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Merci, chers collègues.
C'est un honneur d'être le président du comité des ressources naturelles. J'ai hâte de travailler avec vous tous dans les mois à venir sur ces importantes études que nous avons entreprises.
Je veux seulement prendre quelques instants pour remercier notre ancien président, John Aldag, du travail remarquable qu'il a fait cette session. Merci infiniment.
Monsieur le greffier, j'ai hâte de travailler avec vous.
Mesdames Fan et Salter, vous avez toutes les deux fait de l'excellent travail également. Merci.
Des députés: Bravo!
Le président: Nous nous réunissons aujourd'hui pour reprendre notre étude des plans du Canada en matière d'énergie propre dans le contexte de la transformation de l'énergie en Amérique du Nord. Nous passerons ensuite à huis clos pour discuter des affaires du Comité.
Conformément à notre motion de régie interne, j'informe le Comité que tous les participants à distance ont effectué les tests de connexion requis préalablement à cette réunion.
Je vais maintenant souhaiter la bienvenue aux témoins qui sont avec nous cet après-midi.
Premièrement, de l'Association canadienne de l'industrie de la chimie, nous accueillons Greg Moffatt, vice-président chargé de la politique et secrétaire général, et David Cherniak, gestionnaire des politiques, Affaires et transports.
De Clean Energy Canada, nous recevons Rachel Doran, vice-présidente, Politique et stratégie.
Nous devions recevoir, de Hoverlink Ontario, Christopher Morgan, qui est dans l'impossibilité de se joindre à nous aujourd'hui. Nous fixerons une nouvelle date pour la comparution de M. Morgan.
De Resource Works Society, nous accueillons Margareta Dovgal, directrice générale.
De L'Accélérateur de transition, nous recevons James Meadowcroft, conseiller principal, trajectoires de transition.
Merci aux témoins de se joindre à nous.
J'ai de beaux cartons. Jaune signifie qu'il vous reste 30 secondes pour conclure votre déclaration liminaire. Rouge signifie que votre temps est écoulé, alors veuillez conclure votre réflexion et nous céderons la parole au prochain témoin.
Nous allons commencer aujourd'hui avec l'Association canadienne de l'industrie de la chimie et M. Greg Moffatt.
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Merci, monsieur le président, et félicitations.
J'aimerais tout d'abord souligner que j'ai le privilège de me trouver sur le territoire traditionnel et non cédé du peuple algonquin anishinabe. Cette région abrite encore de nombreux Autochtones, et nous sommes reconnaissants d'avoir l'occasion d'être ici aujourd'hui.
La chimie et le plastique sont le troisième secteur manufacturier en importance, générant plus de 90 milliards de dollars d'expéditions annuelles. Quatre-vingts pour cent de la production annuelle est axée sur l'exportation, la plupart des exportations étant destinées aux États-Unis. Plus important encore, le secteur est sur le point de connaître une croissance importante. À l'heure actuelle, plus de 24 projets de chimie ont été proposés; ensemble, ils représentent au moins 30 milliards de dollars d'investissements, et chacun d'entre eux est envisagé comme étant à faible émission ou à émission nette zéro. Cela inclut la proposition de Dow de construire la première installation pétrochimique carboneutre à Fort Saskatchewan.
Il existe une voie d'accès en cinq étapes vers la transition pour faire passer l'industrie chimique mondiale à un faible taux d'émissions de carbone. Il s'agit du captage, du stockage et de l'utilisation du carbone, de l'hydrogène, de l'électrification, du remplacement des matières premières par des ressources à faible teneur en carbone, y compris la biomasse, et de la mise en place d'une circularité pour nos produits en aval, en évitant essentiellement la production grâce à la récupération et à la reformulation de produits postconsommation.
La merveilleuse nouvelle est que le Canada est seulement l'une des deux régions dans le monde à être capables d'offrir les cinq étapes de ces voies d'accès pour soutenir la transformation du secteur. Plus important encore, ces voies d'accès aideront également les secteurs de fabrication en aval à réduire leurs propres émissions à mesure que les produits chimiques traversent les chaînes d'approvisionnement.
Cependant, je dois préciser deux défis très réels.
Premièrement, ces nouveaux projets sont proposés. Il n'y a pas de travaux d'entamer, pas de modules de commander, et nous n'avons pas vu de décisions finales en matière d'investissement. Il y a un travail important à faire pour transformer ces propositions en infrastructures construites. Deuxièmement, nous devons attirer chaque dollar d'investissement possible pour réduire les émissions dans l'industrie de la chimie existante. Selon une estimation approximative, l'infrastructure de la chimie existante au Canada représente entre 200 et 300 milliards de dollars. Pour passer entièrement à une production faible ou nette nulle d'ici 2050, nous devons recapitaliser toute cette infrastructure. L'industrie de la chimie mondiale fera la transition vers une économie à faibles émissions. La seule question est de savoir où ces investissements seront effectués.
Je crois que ce comité tient, tout comme nous, à ce que le Canada participe non seulement à la prochaine vague d'investissements dans la chimie, mais aussi à la première vague d'investissements dans la chimie à zéro émission.
Le gouvernement du Canada doit prendre deux mesures importantes pour contribuer à réaliser les projets mentionnés plus tôt et à attirer de nouveaux investissements.
La première consiste à mettre l'accent sur le climat d'investissement général. Toutes les études montrent que le Canada perd du terrain pour attirer les investissements étrangers et que notre prospérité future est potentiellement en jeu. S'il semble possible d'attirer 200 à 300 milliards de dollars de nouveaux investissements au cours des deux prochaines décennies, la réalité est qu'au cours des deux dernières décennies, le secteur n'a attiré qu'environ 10 milliards de dollars en nouveaux investissements. Bref, l'approche du statu quo ne suffira pas. La véritable valeur des incitatifs, tels que le programme d'incitation pour les produits pétrochimiques et ceux prévus dans la loi sur la réduction de l'inflation, soit l'Inflation Reduction Act, des États-Unis, c'est la transparence et la certitude offertes aux investisseurs. Si vous respectez un ensemble de critères prédéterminés, vous recevez les crédits. Il n'y a pas d'adjudication à huis clos et il n'y a pas de favoritisme. Le but de ces crédits est d'attirer des investissements, tout simplement. Au Canada, nous continuons de mettre des barrières dans notre politique d'investissement, et nous devons être conscients des risques qui y sont associés.
La deuxième consiste à nous assurer que les crédits d'impôt dont nous discutons depuis trois ans entrent en vigueur le plus rapidement possible. Le gouvernement du Canada a proposé un crédit d'impôt pour la capture, l'utilisation et le stockage du carbone, un crédit d'impôt pour l'hydrogène propre et un crédit d'impôt pour l'électricité propre, entre autres, et mène actuellement des consultations à ce sujet. Nous parlons depuis des années d'aides à l'investissement et de crédits de taxe sur les intrants, ou CTI, mais nous attendons toujours la première pelletée de terre. Ces crédits doivent être adoptés pour que nous puissions investir des capitaux privés et mettre les Canadiens au travail.
Pour terminer, pour illustrer ce qui est en jeu si nous faisons fausse route, nous risquons de prendre du retard par rapport aux États-Unis pour ce qui est d'aider nos collègues asiatiques à respecter leurs engagements en matière de changement climatique. À ce jour, plus d'une dizaine de projets d'exportation d'énergie propre à base d'ammoniaque sont en cours aux États-Unis. Le Canada a proposé plusieurs projets de ce genre, mais aucun n'est en cours de réalisation.
Mon collègue David Cherniak et moi avons hâte de discuter avec vous de certains aspects précis des CTI.
Merci de cette occasion, et nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président.
Merci aux membres du Comité.
Clean Energy Canada est un groupe de réflexion basé au Centre pour le dialogue Morris J. Wosk de l'Université Simon Fraser qui se concentre sur la transition vers l'énergie propre depuis 10 ans.
Je remercie mon collègue de sa déclaration de reconnaissance du territoire et je reprends ses propos. J'aimerais commencer ma déclaration préliminaire en expliquant notre situation quant au rythme auquel la transition évolue.
Au cours de l'année qui s'est écoulée depuis que le Comité a décidé de mener une étude sur le sujet, l'adoption de la loi sur la réduction de l'inflation au sud de la frontière s'est traduite par 272 nouveaux projets, 170 000 nouveaux emplois et 213 milliards de dollars de nouveaux investissements. Et il ne s'agit que de la première année. Cette semaine, l'Agence internationale de l'énergie a révisé ses prévisions et prévoit désormais que la demande de combustibles fossiles atteindra son point culminant avant 2030. Selon une étude récente, deux tiers des voitures vendues dans le monde pourraient être des véhicules électriques d'ici là.
La transition énergétique n'est pas à venir; elle est en cours. Étant donné que 90 % du PIB mondial est maintenant couvert par des engagements en matière de carboneutralité, nous sommes au cœur de la plus grande transformation économique depuis la Révolution industrielle.
C'est à cet égard qu'une occasion s'offre au Canada, car selon la modélisation que nous avons réalisée au printemps dernier, en prenant les bonnes initiatives, le Canada a la capacité de créer cinq fois plus d'emplois dans le secteur des énergies propres d'ici 2050 qu'il n'y en a aujourd'hui, une croissance dont le rythme serait plus rapide que celui de tout déclin des combustibles fossiles. Il existe d'énormes possibilités pour l'économie des ressources naturelles du Canada, comme utiliser notre approvisionnement en eau propre et notre potentiel au chapitre de l'énergie renouvelable pour produire de l'hydrogène propre ou utiliser le minerai de fer du Québec, qui compte parmi les minerais les plus riches au monde, pour fabriquer la prochaine génération d'acier propre.
Ces changements ne doivent pas se faire au détriment des ménages canadiens. Nos rapports et ceux de nos collègues montrent que les Canadiens peuvent en fait économiser de l'argent sur leurs factures d'énergie dans le cadre de la transition énergétique.
Que doit faire le Canada pour saisir l'occasion?
Au printemps dernier, les Services économiques TD ont estimé que le Canada avait en fait dépensé davantage en pourcentage du PIB que les États-Unis. Le Canada a fait des progrès, mais il y a encore assurément beaucoup à faire.
Premièrement, je dirais que le Canada doit se concentrer sur les possibilités de demain, et non sur celles d'hier. La production de l'hydrogène vert — c'est‑à‑dire l'hydrogène produit à partir d'énergies renouvelables — coûte peut-être plus cher aujourd'hui, mais on prévoit qu'elle coûtera moins cher au début des années 2030. J'abonde dans le sens de mes collègues de l'association de l'industrie de la chimie. Nous avons rédigé des rapports qui soulignent la réelle possibilité que le Canada devienne un exportateur de produits chimiques propres qui entreront dans la chaîne d'approvisionnement des batteries et d'autres produits qui seront nécessaires dans un avenir carboneutre.
Deuxièmement, nous devons redoubler d'efforts sur le plan de nos avantages concurrentiels. Aujourd'hui, le réseau du Canada est propre à 84 % et celui des États-Unis, à 40 %. À mesure que les fabricants rendent leurs chaînes d'approvisionnement plus propres, cet avantage va devenir considérable, mais les autres pays ne nous laisseront pas conserver cet avantage indéfiniment. Les États-Unis souhaitent disposer d'un réseau propre d'ici à 2035.
À l'échelle fédérale, des incitatifs fiscaux, comme le crédit d'impôt à l'investissement dans l'électricité propre, et des réformes réglementaires, telles que le règlement sur l'électricité propre, aideront les provinces à faire face aux coûts de mise en place et aideront à garantir la stabilité pour les investisseurs.
Troisièmement, il faut agir rapidement. Je pense que ce point a déjà été abordé. Le temps presse.
Quatrièmement, il faut adopter une approche intelligente et stratégique. Le Canada ne peut pas rivaliser avec les États-Unis quant à la taille de son marché et à sa puissance financière, dollar pour dollar, et nous devons donc penser de manière stratégique et intelligente à cet égard. Je m'attends à ce que mon collègue en parle davantage, mais ma première recommandation serait de recourir à une bonne politique industrielle — à savoir, adopter une démarche stratégique, souple et itérative avec l'industrie, les syndicats, les partenaires autochtones et d'autres acteurs, en fixant des objectifs clairs qui peuvent aider à orienter les investissements privés et en choisissant des voies, en étant clair sur ce pour quoi le Canada rivalisera ou non. En prenant de telles mesures, le Canada peut se préparer à saisir les nouvelles possibilités qui se présentent.
En outre, en choisissant les investissements de façon stratégique, le Canada peut assurer un meilleur rendement de l'argent des contribuables. Dans le cadre de nos travaux visant à aider le Canada à saisir l'occasion que représente la chaîne d'approvisionnement des batteries de véhicules électriques, d'une valeur de 50 milliards de dollars, nous avons estimé que le multiplicateur d'emplois associé à l'arrivée de giga-usines de fabrication de batteries à St. Thomas et à Windsor et, semble‑t‑il, au Québec, se situerait entre six et huit d'ici 2030. Il s'agit d'un investissement de grande valeur en ce qui a trait aux emplois et au PIB, et c'est la raison pour laquelle des pays rivalisent sur ce plan.
À l'avenir, le Canada peut obtenir un plus grand avantage en se concentrant sur ce qui se passe en amont. Comment faire pour que des minéraux canadiens servent à la fabrication de batteries canadiennes pour que nous tirions parti de notre avantage concurrentiel et pour garantir que des possibilités s'offriront dans un plus grand nombre de régions du pays?
Enfin, l'approche américaine qui consiste à utiliser le pouvoir d'achat du gouvernement pour créer un marché de produits à faibles émissions de carbone s'est avérée efficace pour soutenir les entreprises et les travailleurs américains. Comme les produits canadiens sont déjà plus propres que la moyenne mondiale, favoriser l'achat de produits propres peut signifier utiliser l'argent que le gouvernement prévoyait déjà dépenser pour soutenir l'industrie canadienne afin qu'elle puisse conquérir les marchés de matériaux propres en croissance. Le Canada doit établir la version finale de sa stratégie favorisant l'achat de produits propres.
En conclusion, je souligne qu'il s'agit d'une occasion unique de bâtir une économie résiliente, inclusive et en croissance.
Je serai ravie de répondre à vos questions. Merci.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
C'est un plaisir d'être ici. Je reprends moi aussi les propos du premier intervenant au sujet de sa déclaration de reconnaissance du territoire.
Comme on vous l'a dit, je m'appelle Margareta Dovgal. Je suis directrice générale de la Resource Works Society. Il s'agit d'un organisme à but non lucratif établi en Colombie-Britannique qui prône la reconnaissance des industries des ressources naturelles du Canada économiquement productives et responsables, notamment les secteurs minier, forestier, pétrolier et gazier. En outre, nous organisons chaque année l'Indigenous Partnerships Success Showcase, qui réunit des dirigeants d'entreprises et des partenaires autochtones pour discuter des voies de la réconciliation économique. Nous retournerons à Vancouver en juin pour la cinquième année, et nous espérons donc y voir bien des gens.
Pour examiner en profondeur certains des problèmes urgents qui se posent à nous aujourd'hui et qui entravent la capacité du Canada à saisir les occasions qui se présentent dans le cadre de la transformation énergétique en Amérique du Nord, je voulais parler de deux ou trois points.
Auparavant, je tiens à dire que les choix que nous faisons en matière de politique énergétique et industrielle, y compris ici même, à Ottawa, ont des effets durables non seulement sur les travailleurs des secteurs des ressources naturelles et des technologies propres, mais aussi sur la qualité de vie de tous les Canadiens. Notre niveau de vie général dépend toujours de la production et de l'exportation de produits très recherchés sur les marchés mondiaux.
Il est certain que ce que l'on veut acheter dans le monde change progressivement, mais nous sommes en fait bien placés pour faire face à ce changement. Nous disposons de la bonne combinaison: des matières premières, une main-d'œuvre qualifiée et formée, un cadre réglementaire bien développé et de vastes connaissances au chapitre de l'innovation dans des secteurs comme les ressources naturelles. Nous ne devons pas perdre de vue la valeur de ce que le Canada peut faire pour le monde et ses alliés grâce à ses ressources naturelles.
L'un des principaux problèmes qu'observe la Resource Works Society, c'est que de plus en plus de gens croient que le soutien du gouvernement fédéral à l'exploitation des ressources naturelles comme moteur clé de notre bien-être économique a diminué ces dernières années. La poursuite des investissements dans l'exploitation des ressources naturelles a été une pierre angulaire de notre économie et continue de l'être, mais comme M. Moffatt l'a mentionné, nous avons de la difficulté à retenir et à attirer les investissements afin de créer des emplois. À l'heure actuelle, le monde est rempli d'incertitudes économiques et géopolitiques et les investisseurs ont désespérément besoin de certitude, ce qui ne peut se concrétiser que par l'envoi de messages clairs et positifs de la part de tous les ordres de gouvernement.
La création d'emplois productifs au Canada est un autre élément. La fabrication axée sur les ressources est un aspect qui suscite la réflexion et des discussions au sein de la Resource Works Society. C'est notre force ici, au Canada, et elle a un avenir très prometteur, mais sans un approvisionnement sûr et fiable en matières premières fondé sur des processus rapides d'approbation et de délivrance de permis d'exploitation minière, notre capacité de fabrication continuera à en souffrir et potentiellement à diminuer.
Prenons l'exemple des batteries au lithium-phosphate de fer. Les décisions qu'ont prises récemment des constructeurs automobiles de diriger leurs investissements vers le Canada reposaient sur une combinaison de facteurs, notamment la proximité des marchés américains et notre capacité à nous approvisionner en minéraux critiques, comme le phosphate. Sans un approvisionnement sûr et fiable, la croissance anticipée de la fabrication de véhicules électriques ne pourra pas se concrétiser.
Les problèmes liés à la délivrance de permis constituent un goulot d'étranglement important. Le temps requis pour de nombreux types de projets d'exploitation de nouvelles mines est estimé à 10 ou 15 ans, ce qui est bien plus long que la norme mondiale et que ce que nous devrions viser. Il est urgent d'agir pour simplifier les processus afin que les choses soient claires pour les investisseurs tant canadiens qu'étrangers.
Un autre problème concerne la polarisation et la politisation qui caractérisent le processus décisionnel. La coopération entre les gouvernements fédéral et provinciaux n'est pas qu'une bonne idée. Elle est essentielle si nous voulons avancer. Non seulement le manque d'harmonisation nuit aux progrès, mais il se traduit aussi par la prise de mesures qui vont à l'encontre les unes des autres. On consacre un temps précieux à la négociation dans ces conflits et on cherche à en tirer un avantage politique au lieu de faire front commun et de se concerter pour répondre aux changements qui se préparent à l'échelle mondiale et avec notre principal partenaire commercial, les États-Unis.
Si les projets ont du sens sur le plan des affaires et s'ils favorisent la réalisation d'objectifs que nous avons en commun avec nos alliés, comme les États-Unis, le rôle du gouvernement devrait consister à s'assurer que les règlements sont propices à attirer les investissements et à ce que les responsabilités qu'assument conjointement les gouvernements fédéral et provinciaux sont clairement définies et peuvent être assumées.
Afin que tous les avantages potentiels d'une transformation énergétique nord-américaine coordonnée concordent, il est impératif que nous renforcions nos liens avec les États-Unis. Cependant, le Canada doit également faire preuve d'initiative pour diversifier son commerce et ses produits d'exportation afin de saisir les occasions qui s'offrent à l'échelle mondiale sur le marché de l'énergie propre. Nous voyons des exemples comme le gaz naturel liquéfié au large des côtes de la Colombie-Britannique et ailleurs au pays. Il nous a fallu de nombreuses années pour avancer vers l'achèvement de notre premier grand projet d'exportation, le projet LNG Canada, qui constitue l'investissement le plus important du secteur privé dans l'histoire du Canada.
Au cours de la même période, d'autres pays concurrents, comme l'Australie et le Qatar, ont fait des progrès considérables, ce qui nous rappelle que nous devons accélérer la mise en œuvre des projets.
En rendant les choses claires et en assurant la certitude pour attirer des capitaux grâce à des règlements concurrentiels et en appuyant le développement technologique, le Canada peut réussir sa transition vers une économie de l'énergie propre et tirer parti des possibilités qu'offre la transformation énergétique de l'Amérique du Nord.
Je vous remercie de votre attention. J'ai hâte de répondre à vos questions et de parler davantage de ces sujets.
Tout d'abord, je vous remercie de me permettre de vous parler aujourd'hui.
Comme mes collègues l'ont dit, je salue la déclaration de reconnaissance territoriale qu'a faite le premier intervenant.
Je suis ici pour parler au nom de L'Accélérateur de transition, qui est un organisme national à but non lucratif. Je ne le décris pas comme un groupe de réflexion, mais plutôt comme un groupe d'action. Nous travaillons concrètement avec des parties prenantes des gouvernements et de l'industrie dans tout le pays pour accélérer les processus de transition vers la carboneutralité, en particulier dans les secteurs de l'électricité, de la décarbonisation des bâtiments, de la décarbonisation du système de transport, du développement de l'économie de l'hydrogène et dans des secteurs connexes. Je suis également professeur à l'école d'administration publique de l'Université Carleton. Je me spécialise dans les transitions énergétiques et la décarbonisation à long terme.
Comme je suis le dernier intervenant, je reprends une bonne partie des propos tenus par les témoins précédents. Il est clair que nous sommes au cœur d'une transition énergétique mondiale qui s'est accélérée au cours des deux ou trois dernières décennies et qui se poursuivra encore pendant deux, trois, quatre décennies, voire plus. C'est une transition qui consiste en un abandon progressif de l'utilisation finale des combustibles fossiles, en particulier dans les domaines des transports et des bâtiments et le chauffage dans le secteur industriel.
Il y a 20 ans, on pouvait penser que la question du changement climatique était essentiellement une question environnementale — il s'agissait de préserver le climat et un environnement qui soient bons pour la société humaine, les autres espèces, etc. Il s'agit toujours d'une question environnementale, mais aujourd'hui, du point de vue d'un pays comme le Canada, c'est aussi une question de compétitivité industrielle et de prospérité pour les générations futures du pays.
Tous nos principaux concurrents investissent massivement dans la transformation de leurs systèmes énergétiques, de leurs systèmes de transport, de leurs réseaux d'électricité et de leur structure industrielle afin de parvenir à la carboneutralité au tournant du siècle. Pensons à l'Allemagne, au Royaume-Uni, à la France et, bien sûr, aux États-Unis. Il a déjà été question des investissements massifs que les États-Unis effectuent actuellement dans le cadre de leur loi sur la réduction de l'inflation. Nous construisons une nouvelle économie de l'énergie. La prospérité et la situation de l'emploi au cours des 20 à 30 prochaines années, voire plus, dépendront de la capacité du Canada à suivre le rythme et à exploiter les nouvelles ressources et à réaliser les investissements économiques qui nous permettront de prospérer dans un monde carboneutre.
Une mise en garde s'impose: nous pensons que les transitions se font très lentement. En réalité, si l'on examine tous les grands changements technologiques — l'adoption du téléphone portable ou le passage du transport hippomobile à l'automobile —, il semble que peu de choses changent pendant plusieurs décennies, puis on atteint la pente ascendante de la courbe en S et les choses changent beaucoup plus rapidement que ce que l'on pensait.
À l'heure actuelle, la décarbonisation des réseaux d'électricité et l'adoption des véhicules électriques sont en train de franchir cette étape d'accélération, non seulement dans les pays avancés, mais à l'échelle mondiale. Par exemple, dans un rapport qu'elle a publié hier, l'Agence internationale pour les énergies renouvelables indique que le déploiement d'énergies renouvelables au cours des trois dernières années et l'adoption des véhicules électriques et des batteries progressent désormais à un rythme si rapide que cela correspond au modèle projeté consistant à limiter le réchauffement de la planète à 1,5 degré — c'est‑à‑dire la décarbonisation — d'ici le milieu du siècle. En fait, on en était surpris.
Les choses semblent aller lentement pendant un certain temps, puis le rythme s'accélère. Certains d'entre vous ont peut-être vu que sur la rue Sparks aujourd'hui, se déroule une activité organisée par Accelerate qui a tout à voir avec l'électrification et les véhicules à hydrogène au Canada. On y trouve de nombreux modèles prometteurs qui illustrent la direction que nous allons prendre au cours des années à venir.
Je dirais que certaines entreprises et certains investissements survivront et s'adapteront à un monde carboneutre. D'autres, qui semblent très forts et importants aujourd'hui, auront disparu dans 15 ou 20 ans. Nous devons veiller à ce que les investissements de l'avenir augmentent et à ce que nous ne nous accrochions pas à l'économie du passé.
Merci.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Encore une fois, je voudrais vous féliciter de votre nomination au poste de président. J'attends avec impatience de voir comment se déroulera la suite de votre mandat. Merci encore d'avoir accepté ce poste.
Je vais commencer par Clean Energy Canada. Nous entendons souvent dire qu'il faudrait transformer les derniers 14 % de notre réseau en énergie propre. Vous dites que nous en sommes à 84 % et que les Américains n'en sont qu'à 40 %, ce qui signifie que nous avons déjà pris pas mal d'avance de ce côté‑là. Cependant, il nous faudra à tout le moins doubler la capacité du réseau — c'est ce que nous ont dit certains témoins — pour être en mesure de transformer les derniers 15 % à16 %.
Tout le monde nous dit toujours que c'est ce qu'il faut faire pour abandonner les combustibles fossiles ou le pétrole et le gaz, ou ce que vous voulez, mais personne ne nous a réellement dit comment procéder.
Peut-être voudriez-vous éclairer le Comité quant à la façon dont nous allons procéder dans les faits pour pouvoir doubler la capacité du réseau dans les 12 prochaines années et respecter l'échéance de 2035.
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Bien sûr. Je vous remercie de votre question.
Vous avez mis le doigt sur les deux choses importantes que doit faire le réseau très prochainement, à savoir se décarboner et se développer. Il s'agit d'un défi, c'est pourquoi il est si essentiel, selon moi, que ce comité et que le gouvernement examinent tous les outils de la boîte à outils pour garantir que cela se fasse.
Dans mon allocution, j'ai mentionné justement à quel point ce peut être un avantage concurrentiel. Effectivement, lorsque nous pratiquons des modélisations pour obtenir un accès plausible à la carboneutralité, l'accent est mis sur le réseau électrique de 2035 parce que les véhicules et les thermopompes qui chaufferont les habitations seront alors branchés sur le réseau. Si nous observons le parcours effectué par le Canada, nous avons la chance d'avoir, dans plusieurs provinces, une longue tradition d'investissements dans l'hydroélectricité et dans d'autres éléments qui leur ont donné une longueur d'avance.
Il est certain que le profil des ressources ne sera pas le même dans toutes les provinces et les territoires du pays ...
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Je suis désolé d'avoir à vous couper la parole, mais notre temps est limité.
J'essaie de préciser un petit peu. Traditionnellement, oui, nous avons été avantagés par l'hydroélectricité et autres. Des investissements ont été engagés dans l'énergie éolienne et dans l'énergie solaire. En Saskatchewan, l'énergie solaire ne reflète même pas 1 %. Elle représente en fait 0,002 % de la capacité du réseau. L'énergie éolienne représente assez régulièrement 7 % du réseau et le lundi 25 septembre, nous avons produit 191 mégawatts.
Ne serait‑ce qu'aujourd'hui en Alberta, notre capacité éolienne est d'environ 3,8 gigawatts, pourtant on n'a produit que 512 mégawatts. L'Alberta est en fait la cheffe de file de l'éolien dans ce pays et en a la plus importante capacité. La province y a investi et l'a construite il y a des années, au point où elle est en train de déclasser des parcs éoliens déjà construits. En fait, c'est Suncor qui a construit le premier parc éolien dans ma circonscription en Saskatchewan.
Nous ne savons pas encore quelle sera la technologie qui remplacera le charbon qu'on abandonne et le gaz naturel que le gouvernement veut éliminer. Personne n'a pris la peine d'expliquer comment nous allons les remplacer et quelles seront les technologies que nous allons utiliser.
Je suis curieux. Si vous pouviez en ventiler les éléments, quelle est la technologie à utiliser et de combien d'unités aurons-nous besoin pour répondre à la demande, c'est‑à‑dire au double de la capacité actuelle du réseau?
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Nous aurons quand même besoin de doubler la capacité. Cela ne nous dit pas comment nous allons le faire.
Par exemple, encore une fois, l'hydroélectricité a été quelque chose de fantastique pour ce pays, mais combien de barrages supplémentaires cela va‑t‑il prendre pour doubler le réseau et pouvons-nous l'effectuer en 12 ans? Combien faut‑il de turbines éoliennes pour doubler la capacité du réseau?
Sur la route de l'aéroport que j'emprunte quasiment toutes les semaines, je passe à côté des nouveaux parcs éoliens et, la plupart du temps, aucun ne produit de l'électricité. Il va faire de -30 °C à -35 °C dans quelques mois, quand les gens voudront mettre le chauffage et pendant l'été il fait +30 °C ou +35 °C et les gens veulent mettre la climatisation.
Comment pourrons-nous nous assurer d'avoir réellement le niveau d'électricité de base dont nous avons besoin? Les gens ne veulent pas comme unique option de brancher leur voiture pour chauffer leur maison quand il fait -35 °C. Nous connaissons les problèmes des véhicules électriques — ou VE — quand il fait extrêmement froid dehors et il se trouve que nous vivons dans un pays où cela se produit régulièrement.
Comment allons-nous y arriver, réalistement?
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Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Ma question s'adresse à Mme Doran.
Vous ne serez pas surprise, étant donné que je suis la députée de Sudbury, de m'entendre poser des questions sur le rôle des minéraux critiques et de leur extraction dans la perspective des énergies propres. Nous savons que les technologies de l'énergie, comme la production d'énergie renouvelable, requièrent des quantités importantes de minéraux critiques.
L'Inflation Reduction Act — ou IRA — renferme un certain nombre d'incitatifs fiscaux et de financements pour l'énergie propre. La loi en contient beaucoup et il semblerait que les minéraux critiques déterminent au moins deux incitatifs. L'un est le crédit à la production pour la fabrication de pointe concernant les équipements, comme l'énergie solaire, les composantes des éoliennes et les cellules de batteries. L'autre est le crédit à la production d'électricité propre, qui paie les producteurs pour chaque kilowattheure d'électricité sans émissions qu'ils produisent.
Nous savons que les États-Unis auront besoin des minéraux critiques canadiens pour leurs programmes, dont les deux que je viens de mentionner. Cependant, si nous envoyons tous les minéraux que nous extrayons aux États-Unis à des fins de traitement, nous allons rater cette énorme occasion économique pour le Canada et je crois que vous y avez fait allusion dans votre exposé lorsque vous avez mentionné qu'il fallait se concentrer sur l'amont.
Comment tirer parti de nos ressources naturelles en soutenant l'Inflation Reduction Act, tout en créant des systèmes de raffinage et de chaîne d'approvisionnement pour les batteries des véhicules électriques ici au Canada?
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Merci, monsieur le président. Je vous félicite pour votre élection.
Monsieur Moffatt, je vais vous demander d'être indulgent avec moi, parce que les questions que je vais vous poser pourront vous apparaître banales au début, mais, comme nous allons rédiger un rapport à la suite de cette étude, il nous faudra être clairs et très précis.
Je vous demanderais tous d'indiquer si vous êtes d'accord pour dire qu'il est essentiel de décarboner l'économie. Vous pouvez opiner du bonnet, cela pourrait me faire gagner du temps.
Je vois que vous êtes d'accord.
Monsieur Moffatt, l'êtes-vous aussi?
Vous allez voir où je veux en venir.
Je pense que c'est Mme Dovgal qui a indiqué plus tôt que, parmi les problèmes majeurs, se trouvaient la polarisation et la politisation. Si je vous ai bien compris, vous avez tous dit que, si nous voulons être compétitifs, nous avons besoin de prévisibilité et d'un discours cohérent.
Il y a une difficulté, et c'est celle d'attirer les investisseurs. Si nous voulons attirer les investisseurs, il faut donc tenir un discours cohérent et prévisible, et qui reconnaît à tout le moins que nous cherchons à avoir une économie décarbonée. Je ne crois pas me tromper. Vous me le confirmez, et c'est ce que je voulais entendre.
Un parti qui défendrait quelque chose à l'opposé de cela ferait quelque chose qui ressemble à de la polarisation et de la politisation. C'est moi qui le dis, je ne vous mets pas des mots dans la bouche.
Seriez-vous d'accord avec moi pour dire cela?
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Merci, et félicitations, monsieur le président, pour votre nomination.
Je dois parfois intervenir pour préciser que Mme Lapointe n'est pas la seule personne à représenter une région du Canada exploitant des métaux communs. La circonscription voisine de la sienne compte de nombreuses mines en exploitation. Je tenais simplement à dire que nous recruterions n'importe lequel de vos travailleurs pour la mise sur pied de nos nouveaux projets.
J'entends dire qu'il faut 10 ans pour démarrer un projet minier à cause de questions de réglementation. Je n'ai jamais rencontré quelqu'un qui a pris moins de 10 ans pour démarrer un projet minier, car cela nécessite un investissement énorme se chiffrant dans les milliards de dollars.
Monsieur Moffat, j'ai une question à vous poser. Volkswagen a investi 7 milliards de dollars dans l'usine de batteries de St. Thomas en vue de fabriquer des batteries pour un marché qui n'est pas encore entièrement établi. Il n'est pas lancé comme je voudrais le voir. Il faut une chaîne d'approvisionnement, ce qui constitue un enjeu également. Nous savons que le Canada a un avantage par rapport à l'Europe, qui aimerait beaucoup se doter de telles usines de batteries, mais elle ne possède pas la chaîne d'approvisionnement nécessaire. L'Association canadienne de l'industrie de la chimie est-elle prête? A‑t‑elle des discussions avec les fabricants de batteries? Sommes-nous prêts à mettre en place la chaîne d'approvisionnement nécessaire pour que ces usines commencent à fonctionner et que ce marché voit le jour? Un investissement de 7 milliards de dollars, c'est un gros pari.
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Merci, monsieur le président. Je vous félicite pour vos nouvelles fonctions.
Monsieur Meadowcroft, vous serez peut-être surpris d'entendre que les conservateurs sont tout à fait d'accord avec vous en ce qui concerne la période réaliste sur laquelle une telle transformation devrait s'échelonner. C'est pourquoi nous sommes d'avis que les gouvernements ne devraient pas fixer d'objectifs, assortis parfois d'accusations criminelles et d'autres mesures, qui sont irréalistes compte tenu des échéances qu'ils ont fixées, et nous croyons qu'ils ont le devoir d'expliquer aux Canadiens comment ces objectifs seront atteints.
Madame Doran, vos propos sont très percutants et vous vous exprimez très bien. Je tenais à le souligner et à reconnaître votre capacité à aider les partenaires de la coalition à diffuser leurs messages concernant le programme de politiques que vous avez aidé à concevoir pour le gouvernement lorsque vous étiez conseillère principale auprès du . Puisqu'on vous a donné beaucoup la parole aujourd'hui, je vais demander aux autres témoins de répondre à mes questions.
Bien entendu, les conservateurs conviennent tout à fait que le Canada doit être concurrentiel et que nous devons préserver nos chaînes d'approvisionnement et de valeur. Nous devons mettre la charrue devant les bœufs, alors nous devons exploiter les métaux des terres rares et les minéraux critiques qui servent à alimenter les chaînes de valeur et d'approvisionnement utilisées pour la fabrication de véhicules électriques. Nous savons qu'il faut établir des interconnexions. Il faut des réseaux de distribution aux utilisateurs finaux. On peut faire mieux à cet égard. Les gouvernements et les politiciens qui parlent avec éloquence de tout cela n'ont toujours pas répondu à la question concrète que posent les Canadiens, à savoir comment tout cela va se dérouler sur une période de 11 ans.
Vous avez tous parlé de la question de la compétitivité et des différentes politiques. Les économistes qui proposent une taxe sur le carbone en vue de réduire les émissions le font en précisant qu'elle doit s'accompagner d'une réduction des tracasseries administratives et d'autres types de taxes, et de mesures de protection à l'intention, dans le cas du Canada, des industries essentielles à forte intensité d'émissions et tributaires du commerce. Ce modèle ne fait pas l'objet d'une discussion au Canada. Ce n'est pas le modèle mis en place par le gouvernement.
J'aimerais souligner certains des enjeux en matière de compétitivité, et j'aimerais que les représentants de l'Association canadienne de l'industrie de la chimie et de la Resource Works Society répondent à mes observations à cet égard.
Ce qui me frappe, c'est que les États-Unis n'ont pas mis en œuvre une taxe sur le carbone, alors que le Canada l'a fait. La réglementation américaine sur les carburants n'est pas aussi musclée que la nôtre, qui a engendré toutes sortes d'incertitudes jusqu'à maintenant, et d'autres sont à venir. Les États-Unis offrent des incitatifs à la production, non seulement des incitatifs à l'investissement. Le Canada propose des crédits d'impôt à l'investissement qui ne sont pas prêts. Il n'offre pas d'incitatifs à la production, et, comme nous l'avons mentionné, il y a des éléments manquants. Aux États-Unis, les investissements étrangers et privés ont augmenté, tandis qu'au Canada, ils piquent du nez en raison de nos politiques.
En Alberta, c'est le secteur privé qui a effectué la majeure partie des investissements dans les énergies propres et renouvelables. En effet, le secteur pétrolier et gazier a effectué 75 % des investissements privés dans le secteur des technologies propres. Depuis longtemps, ce sont les entreprises pétrolières et gazières et les sociétés de pipeline de l'Alberta qui mènent le développement des énergies renouvelables et de remplacement ainsi que des technologies de l'avenir. Si on peut nous permettre de le faire, nous pouvons continuer ce travail.
Je représente en partie le centre industriel de l'Alberta. J'ai pensé que vous pourriez formuler des commentaires au sujet de certaines politiques comme celle déclarant que les plastiques sont toxiques, ou d'autres politiques qui font exactement le contraire de l'objectif souhaité, qui est de favoriser des investissements et de mettre au point les technologies et les produits de l'avenir.
Je vais vous céder la parole et vous accorder le reste du temps pour faire des observations sur ces contradictions.
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Je vous remercie pour votre question.
Lorsqu'on compare le Canada aux États-Unis, je dirais qu'il faut tenir compte des possibilités et des contraintes propres à chaque région. Les systèmes et les approches sont complètement différents.
Pourquoi le Canada a‑t‑il une importante grappe industrielle et chimique dans le sud de l'Ontario? Pourquoi le Canada a‑t‑il une grappe chimique et manufacturière dans le centre industriel, et pourquoi prend-elle de l'ampleur dans d'autres régions de la province? Pourquoi le Québec a‑t‑il une grappe?
Je le répète, c'est en raison des possibilités qu'offre chaque région. Les industries doivent composer avec les gouvernements au pouvoir. Les décisions sont prises en fonction de la disponibilité des intrants: de l'électricité fiable à bon prix et des matières premières à bon prix, abondantes et à faibles émissions de carbone dans l'ouest du Canada. Ces éléments entrent tous en ligne de compte.
Il y a un élément dans votre question qui est de nature trop politique pour qu'une association puisse en parler. C'est une question de possibilités et de contraintes, et il faut tirer profit au maximum des possibilités.
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Merci, monsieur le président. Je vous félicite pour vos nouvelles fonctions.
Je vais m'adresser d'abord à Mme Doran de Clean Energy Canada pour quelques raisons. Premièrement, Clean Energy Canada a ses bureaux dans mon alma mater, c'est‑à‑dire à l'Université Simon Fraser. J'y ai étudié il y a 25 ou 26 ans — sans vouloir révéler mon âge —, et c'est un lieu où je me suis développé en tant que personne et où j'ai obtenu mon premier diplôme.
Je tiens à dire aux fins de compte rendu — ce n'est pas une question — que je suis d'accord avec le commentaire qu'on a formulé, à savoir « lorsqu'on bâtit au Canada la chaîne d'approvisionnement des batteries pour les véhicules électriques, le résultat est plus grand que la somme des parties ». Les deux usines de batteries, Stellantis et Volkswagen, représentent des investissements stratégiques pour l'Ontario et le Canada. Par ailleurs, elles font partie d'une stratégie globale dans le cadre de laquelle il faut mesurer les répercussions directes de ces usines et les répercussions indirectes de la mise en place d'une chaîne d'approvisionnement. Le Canada a été reconnu dans le domaine lorsque le BNEF — l'indice Bloomberg — l'a fait passer au second rang mondial au sein de la chaîne d'approvisionnement des véhicules électriques.
Je considère toujours les choses comme un continuum, qu'il s'agisse du marché immobilier ou du secteur industriel. Le secteur des véhicules électriques est un continuum au sein du secteur de l'automobile. Nous procédons de manière très stratégique au Canada en mettant en place les éléments pour créer une chaîne d'approvisionnement dans un continuum, ce qui sera profitable non seulement pour les Canadiens d'aujourd'hui, mais aussi pour les générations futures. Je remercie Clean Energy Canada à cet égard.
Ma question s'adresse toutefois aux représentants de l'Association canadienne de l'industrie de la chimie. J'ai travaillé avec vous pendant longtemps. Bien des années avant la pandémie, je me suis rendu dans le centre industriel de l'Alberta et j'ai visité certaines usines. Des installations sont en cours de construction, et elles représentent des investissements de plusieurs milliards de dollars.
Je crois à la concurrence mondiale, et nous devons toujours en tenir compte, mais pouvez-vous en parler dans le contexte du marché mondial? Il y a des fuites, et nous le savons. Notre objectif est de réduire les émissions de gaz à effet de serre ici, au Canada, mais aussi à l'échelle mondiale. Pouvez-vous nous parler de la concurrence mondiale en ce qui a trait à ce genre d'installations et des possibilités qui s'offrent, par exemple, à l'Alberta au sein de notre magnifique pays? Je serais heureux de vous entendre à ce sujet.
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Ce que j'aimerais dire à ce sujet, encore une fois, c'est que les produits chimiques constituent probablement la marchandise qui fait l'objet du plus grand nombre d'échanges mondiaux. C'est une industrie qui vaut des billions de dollars.
La réalité est que le moyen de production de ces produits chimiques au Canada est un peu différent de celui utilisé en Chine, ailleurs en Asie et au Moyen-Orient. Au Canada, nous utilisons du gaz naturel à faibles émissions de carbone. C'est le moyen de production le plus efficace sur le plan des émissions, comparativement au charbon et aux oléfines, qui sont utilisés en Chine, ou au naphta issu du pétrole brut, utilisé en Europe et dans certaines régions d'Asie. Nous sommes en concurrence avec des pays qui ont recours à des moyens de production dont l'intensité carbonique est élevée. L'intensité carbonique de la production de ces produits n'entre pas en ligne de compte dans le marché mondial, mais s'il vient un temps où on accordera une importance supérieure aux produits dont l'intensité carbonique est faible, alors les produits chimiques fabriqués au Canada présenteront un avantage et une certaine valeur.
Je mentionne toujours que, lorsque le Canada acheminera du gaz naturel liquéfié en Asie, cela apportera un avantage grâce à l'article 6, qui porte sur les émissions évitées dans d'autres pays. Les produits chimiques permettent la production d'énergie. Le moyen de production qui engendre le moins d'émissions de carbone est utilisé ici, au Canada. Nous devrions exporter ces produits partout dans le monde et tirer, par le fait même, des avantages sur le plan des émissions.
C'était une façon détournée de répondre à votre question. Le fait est qu'on n'accorde pas une importance supérieure aux produits canadiens. Il n'y a aucun moyen de rentabiliser les coûts engendrés par la taxe sur le carbone et par la réglementation visant à réduire l'intensité carbonique lorsque l'on exporte 80 % de ce que l'on produit.
Monsieur Meadowcroft, vous avez mentionné le dernier rapport de l'Agence internationale de l'énergie. Je lis ces rapports. Ils sont généralement assez ennuyeux, mais les responsables de l'Agence sont presque désemparés en ce moment puisqu'ils n'arrivent pas à suivre le rythme de la croissance de l'énergie propre, qu'ils trouvent « stupéfiante ». Pour la première fois, je crois, l'énergie propre est presque deux fois plus importante que les combustibles fossiles. Ils ont également affirmé que les grandes compagnies pétrolières n'en font pas assez. C'est là le danger.
Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de lire l'affaire qui oppose le peuple de l'État de la Californie à ExxonMobil, Shell, Chevron, ConocoPhillips, British Petroleum, et les autres. C'est une lecture fascinante. J'en parle parce que le document indique toutes les grandes entreprises qui prétendent vouloir atteindre la carboneutralité et être des chefs de file sur le plan climatique, alors qu'elles doublent leur consommation de combustibles fossiles à un rythme effarant. Cela fait partie de l'acte d'accusation contre ces entreprises. Je remarque qu'il en va de même pour Suncor, qui a tourné le dos au développement durable.
J'aimerais savoir où nous en sommes. D'un côté, nous pourrions sauver la planète avec une hausse de 1,5 °C, mais de l'autre, nous voyons la stratégie des grandes compagnies pétrolières qui, à l'instar des grandes compagnies de tabac, affirment produire de l'énergie propre alors qu'elles ont de plus en plus recours aux combustibles fossiles.
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L'ingéniosité canadienne et notre capacité à exploiter nos matières premières sont les volets que nous aurions avantage à offrir au monde. Comme vous l'avez dit, je constate que le GNL suscite actuellement beaucoup d'intérêt en Colombie-Britannique. C'est très prometteur. Nous avons beaucoup entendu parler des différents moteurs de transformation des systèmes énergétiques. La politique peut bien sûr donner cette impulsion lorsque les sociétés décident collectivement que nous devons amorcer un virage.
Nous constatons les effets positifs des grappes. Lorsqu'un secteur repose sur une base de personnes, de compétences, d'entités, d'organisations et d'entreprises qui travaillent ensemble au sein d'une chaîne d'approvisionnement riche et diversifiée, il en résulte des retombées positives qui stimulent l'innovation et la transformation. Je pense toutefois que ce sont en fin de compte les marchés et la demande des consommateurs qui détermineront la direction que prendra la transition.
Lorsque nous parlons de ces occasions très prometteuses pour le Canada, il ne faut pas oublier que nous sommes une petite économie ouverte. Nous sommes un pays commerçant. À ce titre, nous ne pouvons pas nous contenter de regarder notre consommation intérieure, les changements que nous pouvons apporter, et la façon dont nous produisons et utilisons des choses comme l'énergie au Canada. Nous devons songer à ce que nous offrons au monde. Le transfert aux technologies propres est une chose très utile que nous pouvons offrir. Or, la valeur se trouve selon moi du côté des produits bruts provenant d'un environnement qui fait figure de chef de file à bien des égards. Même s'il y a de la demande pour des industries comme celle du GNL, je pense que nous devrions permettre à ces secteurs de survivre.
Le risque lié au capital est un bon filtre à ce chapitre. Si le secteur privé est prêt à assumer le risque et estime que la conjoncture mondiale permettra aux entreprises de vendre un produit donné, les décideurs devraient y prêter attention. Ils devraient éviter de tirer arbitrairement dans le pied des industries qui ne correspondent pas à notre scénario idéal pour l'avenir de l'économie canadienne.
Cela ne veut pas dire que les décideurs ne devraient donner aucun coup de pouce. J'appuie sans réserve ce que font mes confrères ici pour favoriser cette impulsion de la part du gouvernement et de sources non gouvernementales, mais nous devons en quelque sorte faire le bilan de nos assises.
Si notre pays fait fi de sa force économique, et de ce qui peut apporter le plus de sécurité et de bien-être aux Canadiens en ces temps de plus en plus incertains, nous serons nettement désavantagés. Je crains non seulement que nous ne puissions soutenir la concurrence des États-Unis, mais aussi que la qualité de vie de tous les Canadiens s'en trouve considérablement amoindrie.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Félicitations pour votre élection. J'aimerais souligner qu'hier, j'ai été élu président du comité des affaires autochtones et du Nord, et que nous avons déposé notre premier rapport aujourd'hui. J'espère que notre comité, sous votre gouverne, pourra adopter le même rythme de travail et faire avancer bien des dossiers.
Des voix: Oh, oh!
M. John Aldag: Je me réjouis à l'idée de travailler avec vous dans vos nouvelles fonctions.
J'aimerais remercier nos témoins de leur présence et de l'excellente conversation que nous avons jusqu'à présent.
Dans les déclarations préliminaires, un témoin a dit que le Canada ne peut pas soutenir la concurrence, toutes proportions gardées, des États-Unis en raison de sa Inflation Reduction Act, ou IRA. Or, des mesures très ciblées ont été mises en place dans l'énoncé économique de l'automne dernier et le budget du printemps. Je pense que nous sommes tous au courant. Il y a toutes sortes de mesures: le Fonds de croissance du Canada, le crédit d'impôt à l'investissement pour les technologies propres et la quête de l'hydrogène. Par ailleurs, cette transition est ciblée dans le budget au moyen notamment d'autres mesures de crédit d'impôt.
J'aimerais connaître votre pensée. Nous avons vu le gouvernement fédéral intervenir et tenter de décarboniser notre économie pour qu'elle soit respectueuse de l'environnement, et rivaliser pour que les investissements restent au Canada. Pourtant, nous voyons des provinces comme l'Alberta imposer un moratoire sur les projets d'énergie propre. Un article paru dans le Calgary Herald indique que 118 projets devraient être touchés, ce qui représente 33 milliards de dollars d'investissement et du travail pour 24 000 personnes pendant un an. Cela devrait vraiment inquiéter les Canadiens, et plus particulièrement les Albertains.
Tandis que le gouvernement fédéral prend l'initiative dans le dossier, que pensez-vous des occasions perdues parce que les provinces se battent bec et ongles pour conserver les anciennes méthodes? Nous perdons des investissements qui auraient dû être réalisés au Canada malgré l'IRA, mais c'est nous qui créons cette situation. Est‑ce que cela signifie que tous ces fonds aboutissent en Colombie-Britannique? Quelles mesures le gouvernement fédéral doit‑il mettre en place? Pourrions-nous faire quelque chose de plus pour que les investissements restent au pays et que le Canada poursuive sa transition? Il ne faut pas se mettre la tête dans le sable pendant que nous perdons d'excellentes occasions. Il faut faire ce qu'il faut maintenant.
Avez-vous des commentaires sur la réponse du Canada à l'IRA et sur la manière de soutenir la concurrence, compte tenu de la tension que nous observons actuellement au Canada?
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Oui. Vous avez soulevé la question de la relation entre le gouvernement fédéral et les provinces. Bien sûr, le système politique canadien est complexe avec le partage des compétences et des élections de temps à autre qui peuvent changer les gouvernements provinciaux ou fédéraux.
Du point de vue de la transition énergétique, une certaine stabilité politique est vraiment très souhaitable. Il ne s'agit peut-être pas des particularités de telle ou telle politique, mais il faudrait au moins qu'elles aillent dans la même direction et qu'elles aient la même orientation politique.
Je voudrais dire une chose: le gouvernement fédéral ne peut en aucun cas décarboniser le Canada à lui seul. La collaboration des provinces est nécessaire. Les politiques économiques entourant l'énergie sont différentes d'un bout à l'autre du pays. Les sources d'approvisionnement en énergie et la structure de l'économie du Québec sont différentes de celles de l'Alberta, mais à long terme, nous voulons que chaque province développe sa propre façon d'atteindre la carboneutralité.
Au sein de mon organisation, nous croyons vraiment aux solutions sectorielles et régionales compte tenu de la nature du Canada et du problème. Tous les secteurs ne se décarboniseront pas au même rythme. La décarbonisation des véhicules utilitaires légers progresse rapidement en ce moment, tandis que les poids lourds posent un énorme problème. Nous devrons attendre une dizaine d'années, ou je ne sais trop.
C'est la même chose à l'échelle provinciale. Le parcours de la Colombie-Britannique sera différent de celui de l'Ontario. Il est important de faire preuve de souplesse. Le gouvernement fédéral doit prendre les rênes, tout en laissant aux provinces une grande autonomie pour qu'elles trouvent leur voie.
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Je vous remercie, monsieur Meadowcroft. Le temps est écoulé.
Je tiens à remercier les témoins pour leur témoignage d'aujourd'hui et leurs excellentes observations.
Merci beaucoup. Si vous avez oublié quelque chose et que vous souhaitez envoyer un mémoire au greffier, n'hésitez pas à le faire. Nous espérons vous revoir un jour, peut-être lors d'une prochaine étude.
Un député: Il pourrait s'agir de l'étude sur l'électricité.
Le président: Oui, ce pourrait être lors de l'étude sur l'électricité qui suivra.
Chers collègues, nous allons maintenant suspendre la séance quelques minutes afin que nous puissions passer à huis clos. Nous reprendrons dans quelques minutes, une fois que nous serons prêts.
[La séance se poursuit à huis clos.]