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RNNR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources naturelles


NUMÉRO 005 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 9 février 2022

[Enregistrement électronique]

(1305)

[Traduction]

    Soyez les bienvenus à la cinquième réunion du Comité permanent des ressources naturelles de la Chambre des communes. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, le Comité poursuit son étude d'un plafonnement des émissions de gaz à effet de serre pour le secteur pétrolier et gazier et il en est à sa deuxième journée sur huit d'audition de témoins.
    La réunion pratique la formule hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 25 novembre 2021. Des membres sont présents en personne, d'autres y assistent à distance grâce à l'application Zoom. Veuillez noter que la webémission montrera toujours la personne qui a la parole plutôt que l'ensemble du comité. J'en profite pour rappeler à tous les participants l'interdiction des captures ou des photos de leur écran. Les travaux d'aujourd'hui seront télévisés et accessibles sur le site Web de la Chambre.
    Vu la pandémie, les recommandations des autorités sanitaires et la directive du Bureau de régie interne du 19 octobre 2021, il est recommandé à tous ceux qui assistent à la réunion en personne de prendre les mesures suivantes d'hygiène.
    Le participant qui présente des symptômes doit éviter le présentiel et se servir de Zoom. Assis ou debout, chacun doit maintenir une distance de deux mètres avec ses voisins. Dans les salles des comités, il faut porter un masque non médical en tout temps, y compris quand on est assis. Ce genre de masque est offert dans la pièce et il permet de mieux se faire entendre des interprètes que si on porte un masque de tissu. Il faut aussi assurer une hygiène convenable de ses mains grâce à l'emploi d'un désinfectant fourni à l'entrée de la pièce. Les salles des comités sont nettoyées avant et après chaque réunion. À cette fin, chacun est encouragé à désinfecter, quand il arrive à sa place ou quand il la quitte, les surfaces de son pupitre, de son fauteuil et de son microphone avec les lingettes fournies.
    En ma qualité de président, je ferai respecter ces mesures durant la réunion. Je vous remercie d'avance de votre concours.
    Voici quelques petites règles pour assurer la bonne marche de la réunion.
    L'interprétation est fournie. Vous avez le choix, dans le bas de votre écran, entre trois canaux audio: le parquet, l'anglais, le français. Les membres et les témoins peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Je demande à nos témoins de ne pas livrer leur témoignage à un débit trop rapide pour nos interprètes.
    Aux membres présents sur place qui souhaitent prendre la parole, je leur demande de bien vouloir lever la main, et la greffière et moi‑même ferons de notre mieux pour dresser la liste des intervenants.
    Quant aux membres qui participent en virtuel, prière d'utiliser la fonction « lever la main », qui vous attribuera un rang dans la file d'attente. Vous vous en êtes certainement rendu compte, ça peut présenter des difficultés, mais la greffière et moi‑même ferons de notre mieux pour garder votre rang. Avant de prendre la parole, veuillez attendre que je vous l'aie nommément accordée. Je demande aux participants sur Zoom de bien vouloir cliquer sur l'icône du microphone pour le désactiver. Quant aux membres présents dans la pièce, ce sera, comme à l'accoutumée, l'agent des délibérations et de la vérification qui contrôlera le vôtre. Entre vos prises de parole, désactivez votre micro.
    Je vous rappelle d'adresser toutes vos observations à la présidence, que vous soyez membre ou témoin, et je remercie M. Barlow de se joindre à nous en sa qualité de remplaçant pour la réunion.
    Nous étudions un éventuel plafond des émissions de gaz à effet de serre pour le secteur pétrolier et gazier. Nos témoins sont les coprésidents Marie-Pierre Ippersiel et Dan Wicklum du Groupe consultatif pour la carboneutralité. Soyez les bienvenus.
    Je tiens particulièrement à remercier M. Wicklum qui, il paraît, a éprouvé des problèmes techniques lundi, mais qui, au prix d'immenses efforts, a pu trouver un endroit satisfaisant aux critères techniques. Malgré le peu de temps qui restait, il a rapidement dégotté un casque d'écoute approuvé par la Chambre et a pu se joindre à nous. Je vous suis vraiment reconnaissant de votre flexibilité pour un nouveau rendez-vous et de votre célérité pour vous joindre à nous malgré les difficultés techniques de lundi. Merci beaucoup.
    Après votre déclaration préliminaire d'une durée de cinq minutes, nous entamerons directement la période de questions. Comme la réunion se termine à 14 heures, chacun pourra en poser.
    Mais avant de vous céder la parole, je dois préciser que nous communiquons par cartons. Le carton jaune signifie qu'il vous reste 30 secondes, c'est‑à‑dire que votre temps est écoulé et que vous pouvez conclure. Je vous préviendrai si vous prenez trop de temps.
    Madame Ippersiel, monsieur Wicklum, allez‑y.
(1310)

[Français]

     Monsieur le président, madame la vice-présidente, monsieur le vice-président et distingués membres du Comité permanent des ressources naturelles, nous sommes très heureux d'avoir été invités en qualité de témoins aux fins de votre étude portant sur le plafond des émissions de gaz à effet de serre pour le secteur pétrolier et gazier.
    Comme vous le savez probablement, le Groupe consultatif pour la carboneutralité a été créé en 2021. Il est composé de 11 personnes issues de toutes les régions du Canada et qui disposent également d'une gamme d'expertises solides et variées.
    Notre mandat en vertu de la Loi sur la responsabilité en matière de carboneutralité consiste à fournir au ministre de l’Environnement et du Changement climatique des conseils indépendants sur les trajectoires les plus probables pour permettre au Canada d'atteindre la carboneutralité d'ici 2050, de même que sur les jalons et les plans en matière de réduction des émissions jusqu'en 2050.
    En juillet dernier, nous avons publié notre premier document, intitulé « Trajectoires vers la carboneutralité : observations initiales ». Ce document suggère 10 valeurs et principes de conception essentiels qui, selon nous, devraient orienter l'élaboration des trajectoires de transition qui sont le plus susceptibles de permettre au Canada d'atteindre la carboneutralité d'ici 2050. En respectant l'ensemble de ces valeurs et principes, le Canada pourrait non seulement atteindre la carboneutralité des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2050, mais il pourrait aussi créer un avenir beaucoup plus juste, plus sain et plus prospère pour tous les Canadiens et les Canadiennes.
    En règle générale, fait intéressant à noter, les personnes que nous avons rencontrées souscrivent à ces valeurs et ces principes, qui peuvent s'avérer utiles pour le Comité dans le cadre de ses délibérations sur les enjeux liés à la carboneutralité.

[Traduction]

    Précisons que nous organisons notre travail selon quatre champs d'enquête. Il s'agit, si vous voulez, de nos priorités. Nos quatre priorités étaient le pétrole et le gaz, les transports, les bâtiments et la gouvernance. Notre groupe a travaillé à ces priorités pendant tout l'été et l'automne derniers.
    Comme vous vous en doutez sûrement, nous avons également reçu, en novembre 2021, une lettre commune du ministre de l'Environnement et du Changement climatique et du ministre des Ressources naturelles, qui nous ont missionnés, en notre qualité d'organisme consultatif, pour prodiguer des conseils sur les principaux principes directeurs que pourrait employer le gouvernement pour orienter l'élaboration de ses objectifs quinquennaux quantitatifs de réduction des émissions dans le secteur pétrolier et gazier.
    Nous avons accepté de nous en charger, vu que la tâche était en harmonie complète avec notre mandat et la loi qui nous a donné naissance.
    De plus, comme l'engagement est au centre de notre mission, nous nous sommes adressés à des experts scientifiques et du secteur, à des décideurs, en général aux Canadiens, aux entreprises et à l'industrie ainsi qu'à différents types d'autres organisations et associations, y compris celles qui représentent les travailleurs et les Autochtones, pour guider notre travail d'élaboration de principes directeurs.
    Entretemps, nous avons participé à des discussions et à des séances d'information avec des dirigeants de l'industrie, des syndicats, des représentants autochtones et des écologistes. Nous avons reçu plus de 1 200 observations, commentaires et mémoires, y compris des provinces et des territoires, et nous avons organisé 7 tables rondes avec près de 60 organisations participantes.
    Cette activité a concerné nos quatre champs d'enquête d'organisme consultatif, mais la plupart des mémoires reçus renfermaient une réflexion sur des trajectoires plus générales du Canada vers la carboneutralité et sur ses conséquences dans le secteur énergétique, plus précisément celui du pétrole et du gaz. Cet engagement inspirera le document que nous remettrons au gouvernement du Canada, dont il tiendra compte dans l'élaboration de son plan de réduction des émissions d'ici 2030. Notre groupe met la dernière main à ses conseils pour le plan de réduction, y compris les principes directeurs de fixation des objectifs quantitatifs de réduction des émissions.
    Nous serons heureux de communiquer notre avis définitif aux membres de votre comité à la première occasion.
    Au nom de tout notre groupe, Mme Ippersiel et moi nous nous disons ravis de votre invitation, et il nous tarde de contribuer à vos délibérations.
    Monsieur le président, merci.
(1315)
    Excellent. Merci de votre déclaration.
    Allons directement aux questions.
    Chacun des intervenants du premier tour disposera de six minutes.
    Mme Michelle Rempel Garner commencera. Vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Les nouveaux projets pétroliers et gaziers en cours de réalisation seront‑ils exemptés du plafond proposé?
    La question, en fait, n'est pas du ressort de notre groupe. Notre tâche est d'élaborer des principes directeurs qui permettront au gouvernement du Canada de fixer le plafond et, à vrai dire, de déterminer le régime réglementaire de l'administration de ce plafond…
    Croyez-vous que, en vertu d'un principe directeur, les nouveaux projets pétroliers et gaziers en cours de réalisation devraient ne pas être soumis à ce plafond?
    En fait, nous ne concevons pas notre rôle comme étant de nous rendre jusqu'à ce niveau de détail. Nous nous en tenons à l'interprétation à la lettre de notre mandat et nous interprétons notre rôle relativement aux émissions et non au niveau de production ni aux installations nouvelles ou anciennes. Il s'agit vraiment pour nous d'orienter le gouvernement pour qu'il arrive à une valeur pour l'équivalence carbone…
    Conseilleriez-vous d'exempter les réserves prouvées et comptabilisées par les compagnies?
    Encore une fois, c'est à un niveau de détail que nous estimons ne pas être de notre ressort, et il reviendrait au gouvernement de déterminer le régime réglementaire précis de ce qu'il englobe. Notre travail consiste vraiment à l'aider à chiffrer le plafond et ce qu'un niveau d'émission d'équivalent carbone…
    Si vous ne donnez aucune orientation sur ces paramètres, comment pouvons-nous être sûrs que le plafond s'appliquera aux émissions et non à la production?
    Eh bien, encore une fois, je pense que vous devriez poser la question au gouvernement. C'est son travail…
    Si c'est votre travail, croyez-vous, simplement pour effacer l'ambiguïté, qu'on ne devrait plafonner que les émissions et non la production?
    Absolument, et j'estime que nos instructions viennent du ministre. Il nous a bien dit qu'il ne destinait pas ce plafond à la production. C'est un plafond pour les émissions.
    Vous n'avez donc pas donné de conseils ni formulé de principes directeurs sur les questions que je vous ai posées sur les réserves prouvées et comptabilisées ou sur les projets pétroliers et gaziers approuvés qui pourraient ne pas avoir encore débuté. Des orientations ont‑elles même été prodiguées?
    Il s'agit d'un niveau de détail que, en réalité, le gouvernement doit préciser. Nos principes se situeraient à un niveau plus élevé.
    Croyez-vous que, en ce qui concerne les principes, l'annonce du plafond sans orientation préalable sur ces notions pourrait déstabiliser les investissements dans le secteur pétrolier et gazier?
    C'est, d'après moi, une autre question sur laquelle vous devez consulter les investisseurs, à savoir s'ils envisagent de formuler, à un stade préliminaire, des orientations pour déterminer la politique ou…
    Je croyais que vous les aviez consultés. C'est ce qu'ils vous ont raconté?
    Nous ne sommes absolument pas allés jusqu'à ce niveau de détail. Je crois…
    C'est vraiment malheureux.
    Je poursuis.
    Est‑ce que vos conseils accordent du crédit pour des mesures complémentaires comme la capture du carbone et son stockage ou sa capture directe dans l'air ou prévoient une place pour elles?
    Encore une fois, nous n'entrons pas dans les détails. Nous essayons vraiment de nous cantonner au niveau stratégique. Mais je peux dire que nous estimons que la capture et le stockage du carbone est peut-être une technique très importante pour que le monde parvienne à la carboneutralité, sans parler de…
    Mais ça ne faisait pas partie des conseils que vous deviez donner. En donnez-vous sur, peut-être, la réglementation, si nous proposons d'imposer un plafond au secteur pétrolier et gazier et, en même temps, des plafonds à d'autres secteurs émetteurs — comme la cimenterie — pour favoriser l'équilibre ou plus de cohérence à l'égard des émissions industrielles au Canada?
    Encore une fois, notre tâche est d'élaborer des principes à l'intention du gouvernement pour, ultérieurement, la fixation d'objectifs pour le secteur pétrolier et gazier.
    Mais je peux vous dire ce que nous avons trouvé. C'est très difficile à faire en faisant abstraction de tout. Il faut vraiment, pour aboutir à un objectif chiffré pour les émissions du secteur pétrolier et gazier, tenir compte d'autres mesures…
(1320)
    Avez-vous donné des conseils sur les types de produits de substitution nécessaires pour parvenir aux réductions visées par vos conseils pour le secteur pétrolier et gazier? Ou, disons que…
    Qu'entendez-vous par « produits de substitution »?
    Ce serait, par exemple si nous cessons de consommer du pétrole et du gaz, d'autres produits qui pourraient servir à leur place. J'essaie de voir, parce que vous n'avez pas vraiment dit ce que… Les industriels et les écologistes se posent beaucoup de questions sur les conseils que vous avez donnés, et on me répète sans cesse que vous n'en avez pas donné. J'essaierai donc de formuler mes questions d'après les modèles que vous avez utilisés.
    Est‑ce que vos conseils tiennent compte de la possibilité d'une fuite du carbone vers d'autres États gros émetteurs de carbone à la faveur d'une réglementation ou d'un plafond rigide imposés au secteur pétrolier et gazier canadien, qui y déplaceraient ces produits ou cette production ?
    Je préciserai seulement que la plupart de vos questions s'arrêtent à un degré de résolution qui nous semble étranger à notre tâche. Notre réflexion se situe à un niveau stratégique supérieur — c'est‑à‑dire vraiment s'assurer que le gouvernement a la responsabilité de fixer l'objectif, ce qui n'est pas notre tâche.
    Que faut‑il donc que vous fassiez?
    Il faut vraiment que ça vienne de porte-parole élus.
    Que diriez-vous…
    Voici ma réponse…
    … que vous avez fait?
    Voici ma réponse à votre dernière question sur la fuite de carbone. En notre qualité d'organe consultatif, nous sommes catégoriques sur un point: nous nous en tenons à notre mission, d'après la loi et dans le mandat. Notre mission…
    Vous avez donc fourni un niveau de…

[Français]

     Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
     Je suis désolé, je ne veux pas ralentir Mme Rempel Garner dans son élan, mais le rythme est très rapide et je pense que cela rend le travail des interprètes impossible. Je ne peux pas suivre la discussion en ce moment.
    Je ne veux pas ralentir Mme Rempel Garner, je sais qu'elle est passionnée, mais, si c'était possible de laisser un petit délai entre les interventions pour permettre aux interprètes de faire leur travail, je suis certain qu'ils l'apprécieraient.

[Traduction]

    Très bien. Merci, monsieur Simard, de votre intervention. Je vous encourage tous à ne pas couper la parole à votre interlocuteur, parce que, sinon, vous rendez la tâche impossible aux interprètes.
    Malheureusement, vous devez vous arrêter ici. Les six minutes sont écoulées. Merci pour votre première intervention.
    Au tour maintenant de Mme Dabrusin, qui dispose de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être des nôtres.
    Revenons au rapport intitulé Trajectoire vers la carboneutralité, que vous avez publié et voyons ce qu'est la carboneutralité ainsi que ce que ça comprend. Le quatrième principe était de ne pas se faire avoir par la notion de neutralité. Je me demande si vous pouvez me faire mieux comprendre ce à quoi vous voulez en venir en matière de carboneutralité.
    Je vous demande pardon, monsieur le président, monsieur Simard. Je vais parler plus lentement pour que les interprètes puissent me suivre.
    L'une des constatations que nous avons faites en préparant notre premier rapport... Je vais apporter une précision importante. Nous avons produit notre rapport après avoir rencontré 14 groupes ou organisations de partout dans le monde qui ont déjà élaboré des trajectoires vers la carboneutralité qui tiennent compte de l'ensemble de la société. Plutôt que de partir de zéro pour fournir des conseils au gouvernement, nous et le gouvernement avons cru sage de consulter des groupes qui ont déjà fait ce travail. Nous avons donc rencontré 14 groupes, et au lieu de résumer leurs travaux dans un format technique très détaillé, nous avons décidé d'en tirer des conclusions et de les présenter sous la forme de valeurs et principes qui guideront nos actions futures. Les 10 valeurs et principes ne sont pas vraiment l'œuvre du Groupe consultatif pour la carboneutralité; ils sont plutôt inspirés des observations que nous avons faites auprès des 14 groupes de partout dans le monde.
    Le concept de ne pas se faire avoir par la notion de neutralité reflète leur façon de calculer la carboneutralité. La carboneutralité ne signifie pas l'élimination totale des émissions. La carboneutralité est atteinte lorsque les émissions de gaz dans l'atmosphère sont compensées par l'élimination de gaz de l'atmosphère, que l'élimination soit le résultat de procédés naturels ou d'outils technologiques. Ces outils sont des moyens tout à fait acceptables d'atteindre la carboneutralité. Toutefois, nous tenions à attirer l'attention des gouvernements, des sociétés, des secteurs d'activité et des entreprises sur le risque qu'on tende à privilégier l'élimination plutôt que la modification des systèmes émetteurs sous-jacents. Selon nous, ce n'est pas le meilleur moyen d'atteindre la carboneutralité, et le concept d'élimination, qui renvoie à la notion de neutralité, devrait être appliqué uniquement aux émissions les plus difficiles à réduire à zéro. Autrement dit, tous devraient chercher à réduire leurs émissions le plus possible, et les technologies d'élimination devraient être gardées pour les émissions qu'on n'aura toujours pas réussi à réduire à zéro à l'approche de 2050.
(1325)
    Je vous remercie.
    J'allais ajouter que je pense que ce qui pose problème pour les interprètes, c'est quand les gens parlent en même temps, et non le débit. Je ne voulais pas vous interrompre, mais vous pouvez parler à un rythme normal.
    D'accord.
    La question de ce qu'on entend par « carboneutralité » et de ce qui est inclus dans les normes du GIEC a été soulevée durant notre dernière réunion. Par exemple, un pays producteur de pétrole inclut les émissions générées par sa production de pétrole dans le calcul de ses émissions. Si le pétrole est exporté et utilisé dans un autre pays, les émissions sont-elles comptabilisées?
    Oh non, je ne vous entends plus, monsieur Wicklum.
    Nous ne vous entendons pas, monsieur Wicklum.

[Français]

    Je peux peut-être prendre le relais.
    Bien sûr, madame Ippersiel, j'en serais heureuse.
    L'engagement du Canada en matière de carboneutralité comprendra effectivement tous les gaz à effet de serre, mais il sera aussi limité géographiquement aux émissions qui sont générées au Canada dans l'ensemble des secteurs, et pas seulement dans le secteur pétrolier et gazier.
    Il faut se rappeler que c'est conforme aux normes internationales de comptabilisation des GES, selon lesquelles chaque pays comptabilise les émissions qui sont produites à l'intérieur de ses frontières. Les émissions liées aux exportations qui produisent des GES seront comptabilisées dans le pays d'utilisation. Je ne sais pas si cela répond à votre question.
    Oui, c'est exactement ce que je voulais savoir.
     Merci beaucoup.
    D'accord.
    Je sais qu'il ne me reste pas beaucoup de temps, mais j'aimerais poser une autre question. Selon vous, est-ce que les ajustements à la frontière pour le carbone peuvent jouer un rôle dans l'atteinte de la carboneutralité?
    Je vais laisser M. Wicklum répondre à cette question.
    J'espère qu'il pourra le faire.

[Traduction]

    Est‑ce que vous m'entendez maintenant?
    Mme Julie Dabrusin: Oui.
    M. Dan Wicklum: Nous sommes ici pour témoigner en notre qualité très officielle de représentants du Groupe consultatif pour la carboneutralité. À ce point‑ci, le Groupe consultatif pour la carboneutralité ne s'est pas penché sur un régime précis de réglementation ou de mise en œuvre de la politique relativement à un plan de réduction des émissions. Par conséquent, je préfère ne pas me prononcer là‑dessus, simplement parce que nous n'avons pas encore étudié la question.
    Votre temps de parole est écoulé.
    C'est ce que je pensais.
    D'accord.
    Nous allons passer à M. Simard, qui disposera de six minutes.
    La parole est à vous, monsieur Simard.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    J'ai trois ou quatre préoccupations au sujet desquelles j'aimerais entendre Mme Ippersiel et M. Wicklum.
    J'ai un peu de difficulté à saisir le principe voulant qu'il faille se concentrer uniquement sur le plafonnement des émissions. Je ne comprends pas qu'on puisse hausser la production du secteur gazier et pétrolier et obtenir des résultats permettant d'atteindre la carboneutralité. Pourtant, le gouvernement semble vouloir se concentrer simplement sur le plafonnement des émissions.
    J'aimerais d'abord vous entendre là-dessus. Ensuite, j'aimerais vous poser quelques questions sur les technologies qui seront utilisées pour plafonner ces émissions.
(1330)

[Traduction]

    Je vais répondre à la question.
    Je pense qu'il ne faut pas oublier que le gaz et le pétrole — surtout le pétrole, mais le gaz aussi — servent à fournir des services et à fabriquer d'autres produits que les carburants brûlés dans les moteurs à combustion interne et les turbines. Ce sont ces derniers qui produisent les émissions de portée 3, les émissions qui se retrouvent dans l'atmosphère et qui causent le réchauffement climatique.
    Prenez l'exemple des sables bitumineux. Puisque le bitume est utilisé dans l'asphalte, un monde carboneutre demandera une grande production de pétrole. Il faut des routes même pour les véhicules électriques et les camions à hydrogène.
    Il y a d'autres produits à base de pétrole qui ne génèrent pas d'émissions. Je trouve donc tout à fait valable pour le secteur pétrolier de tenter de produire du pétrole tout en visant la carboneutralité.

[Français]

     Je vous remercie, monsieur Wicklum. Je voudrais vous amener à ma seconde préoccupation.
    Vous avez fait état de l'utilisation du secteur pétrolier pour une pléthore de produits que nous utilisons tous les jours. J'en suis parfaitement conscient. Toutefois, on sait maintenant qu'on peut remplacer beaucoup de produits du pétrole par la lignine, entre autres, issue de la biomasse. On sait qu'un coût est rattaché à cela. C'est pourquoi, d'ailleurs, le secteur de la bioéconomie ne prend pas son envol. Le coût est un peu trop élevé.
    Ce que je trouve pernicieux, c'est la façon dont on investit des milliards de dollars. Je vous donnerai simplement l'exemple de la stratégie de captation de carbone en Alberta, qui coûtera 2,5 milliards de dollars, dont 57 % seront assumés par les gouvernements albertain et canadien. Cet argent n'est pas utilisé pour la recherche-développement dans des secteurs qui ont une empreinte carbone déjà faible.
    Je trouve qu'on applique une logique un peu absurde. En effet, par l'entremise d'investissements et de la recherche-développement, on cherche à décarboner le pire secteur d'activité au Canada, et, pendant ce temps, on ne soutient pas des secteurs d'activité économique de remplacement qui pourraient offrir une solution pour réduire considérablement l'empreinte carbone de l'État canadien.
    Êtes-vous d'accord avec moi là-dessus?

[Traduction]

    Officiellement, en vertu de la loi, le mandat du Groupe consultatif pour la carboneutralité est de fournir des conseils sur les cibles provisoires et les trajectoires les plus probables pour atteindre la carboneutralité. Notre travail est centré sur les émissions. S'il est possible d'utiliser toute notre gamme de ressources naturelles, que ce soit dans les secteurs de l'agriculture ou du pétrole et du gaz, tout en respectant nos objectifs de carboneutralité, selon nous, cela est acceptable. Je le répète, notre but n'est pas de faire en sorte qu'il n'y ait plus de production pétrolière et gazière; c'est de faire en sorte que notre économie atteigne la carboneutralité d'ici 2050, conformément à nos engagements internationaux.

[Français]

    Ce n'est pas ce que je dis. Je comprends la base de votre mandat, mais, si l'objectif de votre mandat est de réduire la production de GES, vous ne pouvez pas avoir simplement pour but de décarboner le pétrole. Ce serait inconséquent. Il me semble qu'il y a un principe premier, et j'aimerais vous entendre là-dessus.
    Il y a un principe premier en écologie qui est celui du pollueur-payeur, et non celui du pollueur payé. Ce que vous proposez suppose qu'on va retarder l'arrivée de nouvelles technologies d'énergies propres parce que toutes les ressources du gouvernement seront investies dans la décarbonation du pétrole. C'est ce que je trouve un peu inconséquent.
    J'entends de votre réponse que cela ne fait pas partie de votre mandat. Est-ce que je vous mets des mots dans la bouche ou est-ce un peu ce que vous avez voulu dire?

[Traduction]

    Il faut songer aux dispositions à intégrer aux politiques et à la réglementation pour que tous les secteurs réduisent le plus possible leurs émissions. Franchement, le gouvernement doit aussi réfléchir à la mise en place de sa structure incitative. C'est une question très difficile. Si les ressources du gouvernement sont limitées — et elles le sont —, dans quelles parties des stratégies de réduction des émissions devrait‑il investir et quelles mesures incitatives devrait‑il proposer pour chaque secteur?
    Je souligne encore une fois qu'on parle ici surtout des émissions liées à la production pétrolière et gazière. Or, la plus grande part des émissions découlant de l'ensemble de la chaîne de valeur du pétrole et du gaz sont des émissions de portée 3. Elles sont produites lorsque le gaz et le pétrole sont brûlés, surtout pour chauffer des bâtiments et transporter des marchandises au moyen de moteurs à combustion interne. Par conséquent, le gouvernement doit...
(1335)

[Français]

    C'est un cercle vicieux puisque, on le sait...

[Traduction]

    Je suis désolé, monsieur Simard, mais votre temps de parole est écoulé.
    Nous avons seulement une heure, et je veux m'assurer que chaque membre a droit à son temps de parole.

[Français]

    Je vous remercie de votre réponse, monsieur Wicklum.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Angus, la parole est à vous. Vous disposez de six minutes.
    Notre étude est probablement la plus importante à laquelle j'ai jamais participé: il est question de l'avenir de la planète, et le temps presse.
    Votre groupe a été créé en vertu d'une loi — en février 2020, je crois — dans le but de fournir des conseils au ministre de l’Environnement sur les mesures à prendre pour agir tôt et de façon urgente. Quand avez-vous commencé à avoir des discussions avec le ministre de l'Environnement sur le plafonnement des émissions et sur les détails d'une telle mesure?
    En fait, notre groupe a été mis sur pied au début de 2021, mais la loi qui l'a constitué a seulement été adoptée à la fin de l'été.
    D'accord.
    Cela étant dit, nous sommes en fonction depuis le début de 2021.
    Nous avons commencé à réfléchir au concept du plafonnement et de cibles de plus en plus strictes après avoir reçu la lettre des deux ministres. La lettre a été l'élément déclencheur de notre travail dans ce dossier.
    Je vous remercie. C'est très bon à savoir parce que j'ai entre les mains la lettre en question, datée du 1er novembre, dans laquelle les ministres Guilbeault et Wilkinson vous demandent officiellement de vous pencher sur le plafonnement des émissions. Le même jour, le premier ministre a annoncé au monde entier qu'il allait imposer un plafond sur les émissions.
    Je trouve cela extraordinaire. Je déteste l'expression à propos d'écrire sur une serviette de table, mais le ministre n'aurait‑il pas pu, au moins, vous appeler de l'aéroport avant de partir? Le premier ministre monte sur la scène mondiale et annonce qu'il a un plan pour plafonner les émissions, alors que personne n'a pris la peine de vous demander votre avis. Ne trouvez-vous pas que cela mine notre crédibilité?
    En un mot, non.
    M. Charlie Angus: Non?
    M. Dan Wicklum: Si vous lisez notre mandat, vous verrez que nous sommes chargés de fournir au gouvernement des conseils sur des objectifs quantitatifs.
    D'accord. D'après le document que j'ai devant moi, on vous demande d'accorder la priorité aux réductions précoces et profondes. Il n'y a pas plus sérieux que cela.
     D'un côté, vous avez comme mandat d'accorder la priorité aux réductions précoces et profondes. De l'autre côté, le premier ministre annonce au monde entier qu'il a un plan pour plafonner les émissions, sans avoir consulté qui que ce soit. En même temps, la Régie de l'énergie du Canada recommande d'augmenter la production tirée des sables bitumineux de 1,2 million de barils par jour.
    Comment conciliez-vous cela? Vous allez préconiser des réductions profondes pendant que le gouvernement pour lequel vous travaillez appuie des augmentations massives dans le secteur pétrolier.
    Je vais vous présenter la séquence des événements, mais avant, je précise...
    Excusez-moi, je ne veux pas être impoli, mais je n'ai pas beaucoup de temps.
    M. Dan Wicklum: Oui.
    M. Charlie Angus: Ce n'est pas la séquence qui m'intéresse, c'est l'inconséquence de la stratégie.
    Comment pouvez-vous préconiser des réductions précoces et profondes pendant que le gouvernement pour lequel vous travaillez dit au monde entier qu'il prévoit d'augmenter sa production de plus d'un million de barils par jour, au minimum? Que répondez-vous à cela?
    Tout d'abord, ce n'est pas à nous de décider si le Canada plafonnera ou non les émissions. C'est au gouvernement de décider. C'est ce qu'il a fait, et maintenant, il nous demande des conseils pour l'aider à imposer le plafond. Cette démarche est parfaitement conforme à la Loi et à notre mandat...
    D'accord. La Loi vous oblige aussi à ne pas permettre les augmentations d'émissions de gaz à effet de serre. Ne devriez-vous pas appeler le ministre pour lui demander pourquoi diable le gouvernement recommande une augmentation de 1,1 million de barils par jour? Ce projet ne va‑t‑il pas à l'encontre de votre mandat?
    Écoutez, la Régie de l'énergie du Canada est une société d'État. Ce n'est pas vraiment le gouvernement. Elle a son propre conseil d'administration et sa propre direction.
    M. Charlie Angus: C'est vrai.
    M. Dan Wicklum: Oui. Je sais que... Il faudrait que je parle à un représentant du gouvernement, mais je sais que le ministre a envoyé un message très ferme à la Régie de l'énergie du Canada. Le ministre a demandé à la Régie de faire concorder ses activités et sa philosophie avec l'objectif d'atteindre la carboneutralité d'ici 2050. Je sais que ces discussions sont en cours.
    D'accord. C'est bon à savoir parce que vous avez dit à ma collègue que vous ne vérifierez pas si les nouveaux projets respectent le plafond. Pourtant, l'Agence internationale de l'énergie — qui est loin d'être un foyer de radicalisme — a déclaré que pour atteindre nos objectifs, il fallait mettre fin aux nouveaux projets pétroliers et gaziers.
    Êtes-vous d'accord avec l'AIE? Si vous avez comme mandat de ne pas permettre les augmentations d'émissions de gaz à effet de serre, comment pouvez-vous ne pas examiner les nouveaux projets, au moins pour déterminer s'ils respectent le plafond, ou, conformément à la déclaration de l'AIE, pour déterminer s'il y a même lieu de les autoriser?
(1340)
    Je le répète, selon moi, notre mandat n'est pas de trancher sur des questions aussi pointues. Toutefois, le gouvernement devra le faire. Si un plafond est imposé, à combien s'élèvera‑t‑il, et quelles seront les implications du plafond sur les nouveaux projets et les projets en cours? C'est au gouvernement qu'il revient de répondre à ces questions.
    D'après l'interprétation que nous en faisons, notre mandat et nos responsabilités sont de fournir des conseils à l'échelle globale et stratégique, et de laisser les décisions dont vous parlez au gouvernement.
    Je regarde votre document, qui est vraiment rassurant pour les Canadiennes et les Canadiens. Vous allez accorder la priorité aux réductions précoces et profondes. J'essaie de trouver dans quels secteurs ces réductions précoces et profondes sont en cours.
    J'aimerais parler d'un autre dossier sur lequel le gouvernement libéral travaille et que vous semblez appuyer.
    Au Canada, les émissions découlant des exportations de pétrole et de gaz sont supérieures au total des émissions générées par tous les autres secteurs réunis. Grâce au pipeline TMX, un projet conçu pour l'exportation, nos exportations augmenteront de 900 000 barils. Si nous avons vraiment à cœur de sauver la planète, ne pensez-vous pas qu'il faut réfléchir à cela? Est‑ce que c'est le problème de quelqu'un d'autre?
    Je tiens à être clair. Nous n'avons pas d'opinion à ce sujet...
    Vous n'avez pas d'opinion à ce sujet?
    ... parce que la question ne relève pas de la Loi en vertu de laquelle notre groupe a été constitué. C'est en dehors de notre mandat...
    Ce serait une très bonne discussion à avoir en 2006, mais ce que le GIEC nous dit, c'est que la planète brûle.
    Le gouvernement va augmenter massivement les exportations vers des pays comme la Chine et l'Inde, où les produits seront brûlés. Votre rôle est d'exhorter le gouvernement à accorder la priorité aux réductions précoces et profondes, ainsi que de veiller à ce que nous n'émettions pas de gaz à effet de serre. Or, le gouvernement exporte plus d'un million de barils pour que leur contenu soit brûlé à l'étranger.
    Ne pensez-vous pas que vous avez au minimum l'obligation morale d'avertir le gouvernement que s'il fait des choses pareilles, nous ne pourrons pas respecter nos obligations internationales?
    Le temps prévu pour la première série de questions est écoulé.
    Je suis désolé, mais je dois vous arrêter là. M. Angus devrait avoir droit à un autre tour; il pourra reprendre la question à ce moment‑là, s'il le veut.
    Nous passons à la deuxième série de questions. Elle est un peu plus courte que la première.
    Monsieur Melillo, vous avez le premier tour. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais revenir sur une question que ma collègue libérale Mme Dabrusin a posée à M. Wicklum. J'ai peut-être mal interprété votre réponse. Si c'est le cas, je vous prie de me corriger, mais j'aimerais vous demander des précisions.
    En parlant de la façon de calculer la carboneutralité, vous avez mentionné les forêts qui séquestrent naturellement le carbone et les technologies d'élimination. Ces technologies sont merveilleuses, mais si j'ai bien compris, vous avez dit — je paraphrase — que d'après vous, on devrait les garder pour plus tard et n'y avoir recours que si les autres mesures ne fonctionnent pas.
    Selon moi, il faut réduire les émissions le plus rapidement possible, et pour y arriver, il faut employer et perfectionner toutes les technologies à notre disposition. Si tel est le cas, pourquoi ne pas avoir recours à ces technologies dès maintenant? J'aimerais vous entendre là‑dessus.
    Nous ne vous entendons pas, monsieur Wicklum. J'arrête le chronomètre.
    Je ne l'entends pas.
    Nous vous entendons maintenant.
    Il y a une nuance à apporter. Si nous avons inclus dans notre rapport sommaire le principe selon lequel il ne faut pas se faire avoir par la notion de neutralité, c'est par crainte que les gens commencent à invoquer l'utilisation de technologies d'élimination comme excuse pour retarder l'action ou pour ne pas réduire les émissions. Or, nous sommes convaincus que pour atteindre la carboneutralité, la trajectoire doit comprendre des réductions réelles et profondes des émissions, ainsi qu'un recours limité...
    Je comprends cela, mais si nous n'utilisons pas ces technologies, ne retardons-nous pas l'action? On ne veut pas utiliser les technologies d'élimination pour réduire les émissions parce qu'on veut procéder autrement, mais si on ne le fait pas, pourquoi ne pas utiliser ces technologies?
    Encore une fois, comment réduit‑on les émissions? Nous sommes d'avis que le recours aux technologies d'élimination devrait servir pour les émissions les plus difficiles à éliminer. Notre préoccupation, c'est qu'en nous concentrant sur les technologies d'élimination maintenant, nous risquons d'accorder moins d'importance à la lourde tâche qu'est la réduction des émissions ou de nous détourner de cet objectif.
    Nous en sommes convaincus; voilà pourquoi c'est l'un des principes clés. Toutes légitimes que soient ces technologies...
    D'accord.
    ... ou ces approches, elles ne peuvent servir de prétexte pour retarder l'action ni être utilisées comme excuse pour ne pas réduire réellement les émissions.
    Je vous remercie de la réponse. Je ne suis pas d'accord avec vous là‑dessus, mais je comprends votre point de vue.
    Comme j'ai beaucoup de sujets que j'aimerais aborder, je vais passer autre chose.
    Par rapport aux nouvelles technologies qu'il faut envisager — le solaire, l'éolien ou les diverses choses sur lesquelles nous travaillons —, les minéraux critiques joueront manifestement un rôle important. Ils sont importants pour ma circonscription. Le Cercle de feu est un exemple probant des endroits où trouver des minéraux critiques.
    Recommanderiez-vous que le Canada mette un accent accru sur l'extraction de minéraux critiques au pays afin d'appuyer cette transition?
(1345)
    Permettez-moi de faire le lien avec notre rapport sommaire initial. Une de nos principales conclusions était que l'idée d'atteindre la carboneutralité n'est pas qu'un inconvénient. C'est probablement l'une des plus importantes occasions économiques depuis des générations, et les pays du monde se positionnent pour récolter les fruits économiques de cette importante transition. Il y a là d'énormes retombées économiques, et nous devons positionner le Canada pour qu'il en tire parti.
    Nous avons réfléchi au concept des chaînes de valeur et des minéraux. Nous pensons qu'il est essentiel que le Canada agisse rapidement et stratégiquement afin de profiter de retombées potentielles qui ne se concrétiseront que si nous agissons.
    Je pense que le secteur privé a aussi une très grande responsabilité à cet égard.
    Très bien.
    Un de nos principes fondamentaux... Les gens ont attendu 30 ans que le gouvernement fédéral fasse quelque chose pour pouvoir agir. Nous n'en sommes plus là. Donc, la responsabilité doit reposer également le secteur privé, le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux et les administrations municipales.
    Merci.
    C'est une constatation claire...
    Merci.
    ... que nous inclurons dans notre rapport sur la réduction des émissions.
    Je vous remercie. Je suis désolé, mais mon temps est limité. Je ne veux pas être impoli, mais je veux poser le plus de questions possible.
    J'aimerais m'éloigner quelque peu de l'industrie et avoir votre avis sur les solutions locales, les solutions communautaires sur mesure. Par exemple, Fort Severn, dans ma circonscription, est la collectivité la plus septentrionale de l'Ontario. Elle se situe sur la rive de la baie d'Hudson. On y fait de l'excellent travail pour trouver des solutions novatrices, notamment pour le solaire et l'éolien.
    J'aimerais avoir vos observations sur le rôle que le gouvernement peut et devrait jouer pour appuyer aussi ces solutions communautaires.
    Je pense que le gouvernement a un rôle essentiel à jouer. Le secteur financier réclame continuellement des politiques. Il faut toutefois partir du principe qu'il y a, en fait, plus de certitudes que d'incertitudes. Nous savons qu'une transition massive vers l'électrification sera nécessaire. C'est la clé. Nous savons que nous aurons probablement besoin de diverses sources d'énergie pour alimenter tout ce qui se trouve dans le paysage. Donc, en matière de politiques, il est très important d'avoir des certitudes qui permettront au secteur financier et au secteur privé d'agir rapidement.
    Les gouvernements ont également un rôle à jouer dans le soutien direct. Nous pensons que notre travail, qui sera intégré au PRE, selon nous, informera le gouvernement sur les secteurs économiques qui ont le plus besoin de son soutien. Il s'agit dans bien des cas de choses que les collectivités éloignées doivent faire.

[Français]

     Si vous me le permettez, j'ajouterai que le respect des différences et des particularités régionales fait partie de nos valeurs. Les solutions qui seront proposées à l'échelle locale seront donc très importantes.

[Traduction]

    Nous devons nous arrêter ici.
    Nous passons maintenant à Mme Lapointe.
    La parole est à vous, madame Lapointe. Vous avez cinq minutes.
    Monsieur Wicklum, vous avez déclaré ce qui suit dans votre rapport sommaire initial publié en juin dernier:
Les trajectoires les plus probables tiendront compte du fait qu’il n’existe pas d’approche unique pour tout le Canada et accorderont la priorité aux solutions locales.
    Aujourd'hui, j'aimerais connaître vos suggestions sur ce que doit faire le gouvernement pour créer et mettre en œuvre, en fait, une politique efficace adaptée aux régions.
    Je pense que vous venez de décrire l'un des grands défis du Canada. Si nous étions en Europe, nous serions probablement 10 pays ou plus, selon les différences régionales. C'est donc l'un des principaux défis pour un grand pays comme le nôtre.
    Nous nous attendons à ce que le gouvernement donne plus de détails sur la façon d'y arriver dans le plan de réduction des émissions qu'il est tenu de publier, selon la loi, avant la fin mars. Je dirais qu'une des principales responsabilités prévues dans notre mandat — et que nous prenons très au sérieux — est de nouer le dialogue. Nous n'avons donc pas un rôle d'experts techniques. Notre rôle consiste essentiellement à représenter le Canada dans toute sa diversité, puis à parler aux Canadiens, dans toute leur diversité, pour obtenir des suggestions à l'échelle régionale et locale sur la façon de répondre à la question que vous posez. Voilà le mécanisme que nous utilisons, et nous pensons pouvoir rendre ce travail plus officiel à mesure que nous progressons au fil des ans. Mais comment peut‑on tenir compte des particularités régionales et des intérêts locaux? Il s'agit de discuter avec les représentants des régions et des intérêts locaux. C'est un aspect essentiel pour ce que nous voulons faire.
(1350)
    À ce propos, les organismes autochtones de lutte contre les changements climatiques ont-ils été inclus dans vos consultations, et qu'avez-vous retenu de ces consultations?
    Nous avons organisé huit tables rondes. Une multitude d'organismes et de représentants autochtones y ont participé. À la demande des gens et des organismes participants, le plus souvent, et parfois à notre demande, les discussions se sont essentiellement déroulées selon les règles de Chatham House. Nous avons promis de ne pas publier un compte rendu précis des observations présentées lors de nos consultations afin que les gens aient le sentiment de pouvoir s'exprimer librement et en toute franchise. C'est tout à fait normal.
    Cela dit, nous avons demandé à chaque organisme de déposer un mémoire officiel sur notre site Web. Tous les mémoires reçus sont résumés dans un document de synthèse. Nous avons décidé d'entrée de jeu, probablement durant notre premier mois d'activité, que l'écoute des intérêts autochtones et veiller à ce qu'ils puissent bénéficier aussi des retombées économiques de la transition vers la carboneutralité seraient des éléments centraux de notre philosophie et de notre travail.
    C'est une réponse générale.
    Très rapidement, ce que j'entends du côté de l'industrie minière — et je suis certaine que le secteur pétrolier et gazier est en proie à des difficultés du même ordre —, c'est que le temps presse et que nous devons soutenir nos industries du secteur énergétique et leur donner les outils nécessaires pour atteindre les objectifs que nous fixons.
    Comment le gouvernement peut‑il favoriser l'accélération de la transition vers la carboneutralité?
    Je pense que c'est un défi pour tous les ordres de gouvernement — national, provincial, régional ou municipal — partout dans le monde. Comment pouvons-nous agir plus rapidement?
    J'ai l'impression qu'on s'est éloignés du paradigme de la réduction des émissions dans lequel nous étions depuis 30 ans, où nous avions le luxe de réduire simplement les émissions dans une certaine proportion pour que le monde soit sauvé. Collectivement, à l'échelle mondiale, nous n'avons pas agi assez rapidement, de sorte que nous sommes obligés de passer à un paradigme d'élimination des émissions. Cela réduit les options qui nous sont offertes.
    La question n'est pas de savoir quel secteur peut réduire ses émissions de la façon la plus économique pour que nous atteignions un pourcentage de réduction donné. Chaque secteur doit atteindre zéro. Je pense que le changement de paradigme — de la réduction à l'élimination des émissions — modifie aussi le fardeau du leadership. Cela ne relève plus seulement d'Environnement et Changement climatique Canada. Franchement, cela relève de tous les ministères et organismes fédéraux, de la Couronne, des provinces, des territoires, des administrations municipales et même, je dirais, du secteur privé.
    C'est dans le secteur privé que se trouvent les investisseurs. Pendant des décennies, la philosophie collective consistait à demander au ministère de l'Environnement de faire le nécessaire pour qu'il soit rentable d'investir. Une telle approche ne fonctionnera plus dans un paradigme d'élimination des émissions. En toute franchise, je pense que le secteur privé doit revoir son processus de prise de décisions, sa contribution à l'élaboration de politiques et de règlements et sa contribution à l'élaboration de projets d’investissement compatibles avec une société carboneutre.
    À mon avis, il ne s'agit pas de savoir ce que le gouvernement peut faire, mais ce que chacun peut faire, en particulier le secteur privé.
    Merci.
    Nous devons arrêter ici.
    Merci.
    Très brièvement, si vous avez...

[Français]

     En fait, tout ce que je veux ajouter, c'est qu’en faire peu maintenant et en faire beaucoup plus tard, ne fonctionnera pas. L'inaction a un coût et il faut prendre les devants. Comme le dit M. Wicklum, tous doivent contribuer à l'effort climatique.

[Traduction]

    Très bien, merci.
    Nous passons maintenant à M. Simard, qui disposera de deux minutes et demie.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    J'aime bien ce que vous venez de dire, madame Ippersiel, à savoir que l'inaction a un coût. Je suis entièrement d'accord avec vous.
    Je vous prie donc de ne pas interpréter ce que je vais vous dire comme une critique de votre travail. Je cherche simplement à mieux comprendre votre mandat.
    En introduction, Mme Ippersiel parlait de certains principes et de certaines valeurs nous permettant d'atteindre nos cibles. C'est sur ce point que je voudrais revenir.
    Vous parlez abondamment de ce qu'est votre mandat. Je vous écoutais et je me demandais si vous aviez toute l'autonomie et l'indépendance nécessaires pour formuler des recommandations qui, parfois, doivent être courageuses par rapport au gouvernement.
    Je vous parlais, tout à l'heure, de principes somme toute assez simples. Je ne suis pas un spécialiste de la question environnementale, mais je vois souvent passer l'idée du pollueur-payeur, du bonus-malus, où on ne récompense pas les acteurs qui ont de mauvaises pratiques. Pourtant, j'ai l'impression que, dans les études que nous menons depuis un certain temps à ce comité, on cherche le Saint‑Graal, c'est-à-dire qu'on veut faire du secteur gazier et pétrolier un secteur prometteur qui permet de lutter contre les changements climatiques, alors que c'est précisément ce secteur qui pose problème.
    D'une part, j'ai une petite préoccupation, à savoir si dans les recommandations que vous allez formuler vous aurez suffisamment d'autonomie et d'indépendance.
    Je vous donne un exemple somme toute assez simple.
     Nous avons étudié la question de l'hydrogène. Plusieurs intervenants sont venus nous dire qu'il faudrait mettre un prix sur la molécule. Ainsi, le prix d'une molécule d'hydrogène faite à partir d'hydroélectricité ou de biomasse serait peut‑être un peu plus élevé. Or on ne semble pas calculer que le coût d'une molécule d'hydrogène faite à partir de gaz et de stratégies de séquestration de carbone est aussi élevé. Souvent, on essaie d'enfouir le fait que la technologie a un coût.
    En ce sens, allez-vous avoir l'autonomie suffisante pour dire que c'est une mauvaise chose de mettre toutes nos billes dans le secteur gazier et pétrolier en cherchant à réduire les émissions?
(1355)
    Je vais commenter le début de votre question. Pour ce qui est de l'hydrogène, mon collègue a beaucoup plus de connaissances que moi dans ce secteur.
    Il est clair — et je peux vous l'assurer, monsieur Simard — que tous les membres de notre groupe tiennent à leur indépendance et à leur autonomie. C'est un principe fondamental pour lequel tout le monde a accepté d'y mettre le temps nécessaire.

[Traduction]

    Merci...

[Français]

    Sur la question de l'hydrogène...

[Traduction]

    Je vais laisser M. Wicklum répondre, s'il peut le faire en 30 secondes. Puisque les intervenants conservateur et libéral ont tous deux dépassé le temps imparti de 45 secondes, je vous accorde 30 secondes pour répondre ou contribuer, si possible.
    Nous avons le sentiment d'être totalement indépendants. Nous examinons continuellement nos activités et nos interactions avec le gouvernement pour assurer cette indépendance. Nous avons la certitude d'être indépendants.
    Quant à savoir si le gouvernement soutient le secteur pétrolier et gazier... Encore une fois, nous examinons en profondeur les façons dont le gouvernement pourrait mener le pays à la carboneutralité le plus efficacement possible ainsi que la répartition du soutien dans les multiples secteurs. Même si la question porte précisément sur le secteur pétrolier et gazier, nous estimons que cela ne peut être considéré de manière isolée et qu'il convient de prendre une décision très délibérée sur le soutien... même dans le contexte de la carboneutralité du secteur pétrolier et gazier.
    Merci.
    Monsieur Angus, vous avez les deux dernières minutes et demie.
    Merci beaucoup.
    Selon vos 10 valeurs et principes, une augmentation des émissions de gaz à effet de serre n'est pas envisageable. C'est dans vos principes. Il n'en demeure pas moins qu'une augmentation d'un million de barils par jour se dessine à l'horizon.
    Comment peut‑on concilier cela? Êtes-vous en train de nous dire qu'il est possible d'augmenter la production d'un million de barils par jour et de ne pas avoir d'émissions de gaz à effet de serre?
    Ce chiffre sur l'augmentation d'un million de barils provient‑il du rapport prévisionnel de la Régie de l'énergie du Canada?
    Oui, et selon les prévisions du projet TMX, qui est en voie d'être finalisé et construit.
    Nous considérons, après examen, que cette prévision de la Régie de l'énergie du Canada est une prévision parmi tant d'autres. Nous nous basons surtout sur les prévisions de l'Agence internationale de l'énergie, qui prévoit une baisse de la consommation mondiale de 55 % pour le gaz et de 75 % pour le pétrole d'ici 2050...
    Je vois cela, mais le problème fondamental, dans le cas présent, c'est que la hausse spectaculaire des émissions de gaz à effet de serre s'est poursuivie.
    Surtout dans les secteurs pétrolier et gazier, en effet.
    C'est dans le secteur pétrolier et gazier. Vous avez raison.
    À Paris, le premier ministre s'est levé et a déclaré: « Le Canada est de retour ». Depuis, le commissaire à l'environnement a indiqué que nous sommes devenus une anomalie au sein du G7 et que nous allions d'échec en échec. Ensuite, à l'occasion de la COP26, le premier ministre a déclaré qu'il y aurait un plafond des émissions de gaz à effet de serre, sans vous consulter.
    Je pose une question directe. Si on s'apprête à augmenter la production, comment pouvons-nous dire à quiconque sur la planète que nous accorderons la priorité aux réductions précoces et profondes, comme vous les appelez? Ce sont deux positions contradictoires.
    Recommanderez-vous au gouvernement de tendre davantage vers un plafonnement important de la production afin de limiter les émissions? Cela semble être la question logique qui se pose.
    Êtes-vous d'accord?
    Non. Je vais décortiquer cette question.
    Nous ne recommanderons pas un plafonnement de la production, car c'est une question d'émissions.
(1400)
    Pouvez-vous vraiment me dire qu'on peut augmenter la production de plus d'un million de barils par jour ou plus, et réduire les émissions? Dites-vous que c'est possible?
    Nous n'examinons pas cette question, car c'est une question artificielle. Le concept de l'augmentation...
    Ce n'est pas une question artificielle. C'est la vraie question à laquelle la planète est confrontée. C'est votre obligation; me dire que c'est une question artificielle... Si votre mandat est de ne pas augmenter les émissions, comment pouvez-vous me dire qu'on peut augmenter la production et que la question des émissions n'est pas un facteur?
    C'est votre travail.
    Il y a là une tension entre les niveaux de production et l'intensité. Si vous combinez les niveaux de production avec l'intensité du produit, vous obtenez les émissions.
    Je comprends cela.
    Il y a des scénarios dans lesquels...
    Mais avez-vous déjà vu ces scénarios? Les émissions n'ont cessé d'augmenter d'année en année. Elles n'ont jamais baissé...
    Je vais devoir intervenir.
    Ce n'est pas artificiel. On parle du monde réel, ici.
    Je déteste devoir interrompre la discussion, mais le temps est écoulé. Nous sommes rendus à deux heures, et j'avais dit que nous devrions mettre fin à la réunion à ce moment‑là.
    Je tiens à remercier Mme Ippersiel et M. Wicklum de s'être joints à nous. Je sais que vous avez réorganisé vos horaires. Il était très important que le Comité vous entende au début de cette étude précise. Je vous remercie donc de vous être libérés aujourd'hui.
    Chers collègues, nous tiendrons une autre réunion cet après-midi à 15 h 30. Nous serons dans une autre salle, dans l'édifice de l'Ouest, je crois. Nous accueillerons cinq témoins, comme indiqué dans l'avis de convocation.
    Sur ce, la séance est levée.
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