FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON FINANCE
COMITÉ PERMANENT DES FINANCES
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 18 novembre 1997
Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.): Je déclare la séance ouverte.
Je suis content de vous revoir, monsieur Slater. Vous étiez avec nous hier et nous avons trouvé votre présentation très intéressante. Nous sommes impatients d'entendre ce que vous avez à nous dire aujourd'hui.
Il est inutile je pense de rappeler à tous ceux qui sont ici que nous travaillons sur le projet de loi C-2, Loi constituant l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada et modifiant le Régime de pensions du Canada, la Loi sur la sécurité de la vieillesse et d'autres lois en conséquence. Nous sommes ici pour recueillir les commentaires des Canadiens concernant les divers moyens qui pourraient être utilisés afin d'améliorer ces lois.
Monsieur Slater, vous connaissez le mode de fonctionnement de ce comité. Vous disposez de 10 à 15 minutes pour faire une présentation après quoi nous passerons à une période de questions.
M. David W. Slater (présentation individuelle): Merci, monsieur le président. Je suis très heureux d'avoir encore une fois la possibilité de venir en aide si possible au comité. Vous avez devant vous un vrai retraité, ce qui est probablement un événement rare pour vous. Je consacre tout mon temps à des activités qui ne paient pas beaucoup—comme dit ma femme, «j'y consacre beaucoup de temps».
J'aimerais tout d'abord rectifier une chose. Hier on m'a présenté comme un représentant de l'Institut C.D. Howe. Cet institut a publié certains de mes documents, mais je ne suis pas membre de l'institut et je ne figure pas sur leur liste de paie.
J'aimerais faire trois choses aujourd'hui. En premier lieu, je voudrais placer le Régime de pensions du Canada dans la perspective plus vaste du système de revenu de retraite dans son ensemble. Ensuite, j'aimerais souligner certains des problèmes que comportent les propositions et les mesures. Et troisièmement, j'espère pouvoir esquisser ce que je pense être un meilleur cadre pour la considération des questions qui tournent autour des prétendues appropriations des impôts, des faibles taux de rendement et des questions d'équité.
Je vais commencer par certaines données fondamentales, sur lesquelles je vais passer assez rapidement.
• 0905
Je pars du principe que la responsabilité des Canadiens en ce
qui concerne le revenu des personnes âgées incombe d'abord aux
particuliers et à leur famille, et non aux gouvernements.
Toutefois, le gouvernement et les programmes qu'il subventionne
jouent un rôle majeur, pour ne pas dire vital dans le cadre du
système. L'impôt sur le revenu et sur la fortune joue aussi un rôle
important dans le système.
L'une des principales raisons justifiant la participation du gouvernement à cet égard est de faire face au problème de la pauvreté chez les personnes âgées. Pour un certain nombre de raisons, bien des Canadiens sont incapables de mettre de l'argent de côté en prévision de la retraite. Le régime de la sécurité de la vieillesse et les autres systèmes qui ont été mis en oeuvre pour venir en aide aux personnes âgées en remplacement de ce dernier reposent principalement sur la motivation d'endiguer le problème de la pauvreté.
L'autre raison importante pour laquelle le gouvernement participe est pour compenser l'insuffisance des mesures prises par la majorité des gens durant leurs années d'activité en prévision de leurs vieux jours. Faire preuve de courte vue en ce qui concerne la préparation en vue de répondre aux besoins futurs est une caractéristique presque universelle des sociétés industrielles et commerciales. Cette raison joue un rôle important en ce qui a trait au RPC ainsi qu'aux RPA et aux REER. Il s'agit aussi d'une importante considération en ce qui a trait à l'impôt sur le revenu et sur la fortune. Néanmoins, cela ne diminue en rien le point fondamental qu'est la responsabilité individuelle.
Les régimes de pension du gouvernement et ceux qui sont subventionnés par le gouvernement imposent un fardeau, sous une forme ou sous une autre, à certains Canadiens afin de permettre d'effectuer, au bénéfice d'autres Canadiens des transferts tels que les pensions de retraite, les prestations d'invalidité et ainsi de suite. Il n'y a rien de gratuit dans le système. Les moyens et la bonne volonté des Canadiens de financer ces transferts sont limités.
Les prestations de retraite et autres prestations versées chaque décennie aux Canadiens doivent avoir été financées en grande partie par le revenu national produit au cours de la même décennie. Les prestations de retraite et autres prestations qui seront versées au cours de la décennie qui commence en 2001 devront, dans une large mesure, provenir du revenu national produit au cours de cette décennie. Le régime fonctionne de cette façon, qu'il soit entièrement ou partiellement provisionné ou même non provisionné, qu'il s'agisse d'un régime gouvernemental ou privé ou encore d'un mélange des deux. La capitalisation anticipée pourrait faciliter le transfert en élargissant le revenu national de la décennie suivante et renforcer les prétentions morales et politiques à l'égard de ces transferts. Si la proportion de la population active qui reçoit ces transferts augmente, et si la proportion de la population active diminue en ce qui concerne l'un ou l'autre des programmes sociaux, un pourcentage plus élevé du revenu national pour chaque décennie devra être transféré aux personnes âgées.
Vous connaissez sans doute la tendance à long terme comme quoi il y a un nombre de plus en plus élevé de personnes âgées par rapport au nombre de travailleurs. Au sommet de cette tendance à long terme, il y a 20 ans environ, on a assisté au boom du troisième âge, c'est-à-dire à une augmentation inhabituellement importante du nombre de personnes âgées par rapport aux travailleurs. Ces tendances à long terme constituent l'une des principales raisons pour lesquelles des changements doivent être apportés au régime de revenu de retraite des Canadiens, et non seulement au RPC. Les autres facteurs stratégiques à l'origine des changements sont la perspective d'une croissance assez modeste de la productivité, de taux d'intérêt réels relativement élevés et aussi le fait que la dette du gouvernement est d'une telle ampleur qu'elle ne peut supporter un autre fardeau.
Je préfère envisager le système de revenu de retraite du Canada comme étant composé de quatre blocs interdépendants, et non seulement de trois. À l'heure actuelle, les principaux blocs sont le Système SV-SRG, le RPC et le RRQ, les RPA et les REER ainsi que d'autres sources de revenus de retraite.
Je pense que le système a été conçu comme une combinaison entre les régimes gouvernementaux et les régimes privés. Il s'agit d'un système qui a été conçu de façon plus ou moins délibérée comme tel. Même si le système comporte des faiblesses et des incohérences, comme on l'a souligné récemment dans une communication de l'ACPM, il reste que la structure d'ensemble est souhaitable et que les détails peuvent être modifiés, selon moi.
Alors que le gouvernement canadien propose que le principe fondamental et la structure du système soient maintenus, chaque bloc est appelé à subir des changements et, par conséquent, le système en entier par le fait même. Les prestations au troisième âge sont proposées afin de remplacer le Système SV-SRG. Les modifications proposées au RPC sont justement devant vous. Quant à l'allégement fiscal lié aux RPA et aux REER, il est appelé à être réduit. L'âge de cessation d'activité est appelé aussi à être réduit. Les autres conditions d'utilisation des REER ont changé. Il me semble que le traitement fiscal et gouvernemental des autres sources de revenu de retraite et de fortune est aussi appelé à changer. Et s'il ne l'est pas, il devrait l'être.
• 0910
Comme je l'ai déjà écrit ailleurs, le revenu de retraite des
Canadiens moins bien nantis semble être largement protégé par ces
changements combinés, malgré que certaines anomalies et lacunes
sérieuses persistent. Cependant, à presque tous les égards, les
dispositions du système de revenu de retraite des Canadiens
disposant d'un revenu moyen supérieur subiront des restrictions.
Leurs prestations de retraite subiront une réduction ou encore
l'impôt courant sera augmenté. C'est ainsi pour chacun des blocs du
régime, et c'est encore plus vrai pour le régime dans son ensemble,
en raison des interdépendances.
En ce qui a trait au Régime de pensions du Canada, les prestations seront réduites un peu et les cotisations seront augmentées, et comme nous en avons discuté hier, nous assisterons à la création d'un fonds d'investissement.
Tous les futurs cotisants au RPC, d'après les nouvelles propositions, seront appelés à verser des cotisations beaucoup plus importantes à partir de leurs emplois futurs, que la valeur des prestations qu'ils recevront. Les cotisations supplémentaires serviront en partie à réduire le passif non capitalisé du régime qui origine d'un financement insuffisant des droits accumulés en prévision des pensions futures découlant des emplois passés. J'élaborerai un peu sur ce sujet dans un moment.
J'ai analysé le remplacement du régime de sécurité de la vieillesse et du supplément de revenu garanti par les prestations aux aînés dans ma présentation du mois de février 1997 devant l'Institut C.D. Howe. Essentiellement, les changements visent à protéger, et même à améliorer légèrement, le transfert aux Canadiens à faible revenu tout en réduisant les prestations aux Canadiens à revenu moyen et supérieur. Dans l'ensemble, les perdants sont appelés à perdre davantage que ce que les gagnants vont en retirer, aussi le coût net pour le budget fédéral s'en trouvera réduit. Il y aura maintien des droits acquis pour les personnes qui reçoivent des prestations actuellement ou qui en recevront bientôt.
Même si j'ai trouvé certains aspects du programme proposé intéressants, il reste que plusieurs anomalies et problèmes devraient être examinés. Les améliorations proposées et les prestations destinées aux Canadiens à faible revenu sont minces. Même avec des ratios de remplacement élevés, les personnes à faible revenu sont toujours des personnes à faible revenu. Il conviendrait d'examiner plus attentivement le revenu adéquat d'une personne après le décès d'un conjoint. Il est contestable, sur le plan de l'équité, de fonder l'établissement des prestations en fonction du revenu familial plutôt que du revenu individuel. Le traitement fiscal des aînés à faible revenu qui reçoivent des prestations est généreux par comparaison avec celui des personnes pauvres qui travaillent.
Le principal défaut toutefois de ces propositions réside dans la sévère réimposition que devront subir les personnes qui économisent en vue de la retraite à l'extérieur des régimes de «prestations aux aînés». Le revenu qui en découlera viendra réduire les prestations aux aînés d'autant et sera aussi sujet à l'impôt progressif sur le revenu croissant, même pour les personnes ayant des revenus plutôt modestes.
La tranche d'imposition marginale la plus faible dans ce pays, impôts fédéral et provinciaux réunis, si on prend la surtaxe en ligne de compte et ainsi de suite, est d'environ 27 p. 100. Si vous perdez 27 p. 100 d'une augmentation de revenu et que vous perdez 20 p. 100 de vos prestations aux aînés, cela se traduit, selon moi, par une réimposition, pour les personnes à faible revenu qui paient de l'impôt, de 47 p. 100. À l'extrémité supérieure, le maximum du taux marginal d'imposition dans ce pays se situe, en Ontario, autour de 53 ou 54 p. 100. Si vous enlevez 20 p. 100 des prestations aux aînés et que vous imposez un taux marginal de 53 p. 100, vous obtenez une réimposition de 73 p. 100.
Il en résulte un sévère facteur de dissuasion à l'égard de l'épargne. Les dispositions relatives au maintien des droits acquis entraîneront des écarts anormalement importants de revenu net, selon que vous vous trouverez du bon côté ou non de la date-critère.
Les modifications au RPC bénéficient d'un vaste appui, et je les endosse aussi vigoureusement. Si nous additionnons les effets directs et indirects, ces effets contribueront à réduire les prestations et à augmenter les coûts pour les cotisants, sauf pour ceux qui reçoivent déjà des prestations du RPC—comme moi. Je vais vous parler de la question de l'appropriation des impôts dans un moment.
Pour terminer cette histoire, il faut se rappeler qu'en mars 1996 les mesures du budget visaient à réduire «l'aide» gouvernementale—c'est-à-dire, l'allégement fiscal en ce qui a trait aux cotisations et aux revenus de placement—pour les RPA et les REER, mais ces mesures visaient aussi à les améliorer à certains égards. Après une période de transition, les limites imposées aux allégements fiscaux en ce qui concerne les cotisations aux RPA et aux REER sont appelées à être réduites à environ deux fois le revenu moyen, plutôt qu'à 2,5 fois comme c'était le cas auparavant et même à 3 fois ou même plus dans les années antérieures. Par ailleurs, les REER devront être transformés en argent, en rente ou en programme FERR à l'âge de 69 ans plutôt que de 71 ans. Toutefois, le facteur d'équivalence de la portion non utilisée en ce qui a trait à la participation au programme de REER sera reporté durant toute la vie active d'une personne, plutôt qu'au cours de la période de report de 5 ans, comme c'est le cas actuellement.
• 0915
L'imposition moyenne et marginale des autres formes d'épargne
et de la fortune est aussi devenue plus sévère au cours de la
dernière décennie au Canada par l'imposition de surtaxes et par le
non-ajustement des tranches d'imposition au taux d'inflation dans
le cadre du système d'impôt progressif. La réduction du taux
d'imposition sur le revenu provincial a eu un effet compensatoire
dans certaines provinces. Les taux d'imposition marginaux sur le
revenu au Canada sont non seulement élevés, mais ils s'appliquent
aussi à des seuils de revenu beaucoup plus bas que ceux que l'on
retrouve dans certains autres pays comme les États-Unis. Il faut
tenir compte de ces deux facteurs lorsqu'il s'agit d'évaluer le
fardeau imposé par les taux d'imposition marginaux.
À presque tous les égards, les changements qui sont proposés à ce régime imposent des restrictions à la préparation en vue de...et au revenu de retraite anticipé des Canadiens qui disposent d'un peu plus qu'un revenu moyen. Les Canadiens qui se préparent en vue de la retraite peuvent compenser pour ces restrictions apportées à leur régime de pension public ainsi qu'au régime de supplément du revenu public en réalisant davantage d'économies à l'extérieur du régime public, mais cette façon de procéder entraînera un coût qui se traduira par un impôt courant plus élevé et une consommation courante diminuée. Il faudrait reconnaître, par ailleurs, que les contribuables qui se situent au niveau moyen supérieur assument le gros de l'impôt sur le revenu des particuliers dans ce pays, et cela à des taux marginaux élevés.
Pour aborder cette question de l'appropriation des impôts, à mon avis, il est certain que les Canadiens devront payer davantage pour leur RPC et pour les autres prestations que ce qu'ils paient aujourd'hui sous la forme de cotisations et d'impôts—et je vais vous expliquer dans un moment pourquoi. Nous nous trouvons confrontés à deux types de questions. Tout d'abord, qui devra payer, à quel moment, dans quelles circonstances et de quelle manière? Et deuxièmement, est-ce que certaines méthodes de paiement sont préférables à d'autres en ce qui a trait à la croissance économique et à l'efficacité dans ce pays, ainsi qu'en ce qui regarde l'équité de la répartition du fardeau additionnel?
Les affirmations gratuites concernant l'appropriation des impôts par le Trésor fédéral au détriment des jeunes sont trompeuses, ce sont des propos incendiaires, mais il reste que d'importantes questions relatives à l'imposition et aux cotisations doivent être réglées. Afin de comprendre les problèmes liés au RPC, divisez les prestations en provenance du régime du RPC en deux parties. La partie A correspond au droit à des prestations futures sur la base des années de service accumulées et des cotisations versées au programme jusqu'à aujourd'hui. La partie B, quant à elle, correspond aux années de service qui seront accumulées et aux cotisations qui seront versées dans le futur. La partie A inclut les prestations versées actuellement dans le cadre d'un régime de retraite ainsi que les droits accumulés à des prestations futures qui ne sont pas encore versées.
Concernant la partie B, c'est-à-dire les prestations futures résultant de cotisations versées dans le futur, un certain nombre de possibilités se présentent en ce qui a trait au financement: on pourrait procéder par répartition, par financement partiel ou par capitalisation anticipée. Pour ce qui est des cotisants de la partie B, il serait possible de leur demander de financer entièrement leurs prestations, génération par génération. Le point de départ pour déterminer les taux de cotisation se situerait à l'âge d'entrée au taux normal. Dépendant des tendances démographiques, des taux de rendement des placements ainsi que des fonds de la partie B, les taux de cotisation pourraient être plus ou moins élevés. En règle générale, les taux de cotisation nécessaires pour compenser les prestations versées en vertu de la partie B, se situeraient entre 5 p. 100 et 7 p. 100 de la cotisation et de la formule de calcul des droits, selon la conception du programme. Le point important à considérer est que ces programmes pourraient être autofinancés à des taux de cotisation inférieurs au taux de 9,9 p. 100 proposé pour le RPC.
Qu'en est-il des prestations versées en vertu de la partie A? Ces prestations doivent être versées à moins qu'on y ait renoncé en partie ou en totalité. Ce sont des obligations du gouvernement fédéral même si elles n'ont pas force exécutoire comme des obligations contractuelles. La valeur actuelle de ces responsabilités se situe à plusieurs milliards de dollars—diverses estimations les situent entre 400 et 650 milliards de dollars—et les actifs du fonds sont d'environ 40 milliards de dollars. L'écart entre les responsabilités et les actifs représente le passif non capitalisé. Dans les 30 à 50 années à venir, les prestations devront être versées par le gouvernement fédéral. Des impôts ou des cotisations devront être obtenus par le gouvernement fédéral dans le futur afin de s'acquitter de ses obligations, en plus des coûts et des prestations qui découlent de la partie B du régime, comme je l'appelle.
Le passif non capitalisé résulte du fait que les Canadiens qui reçoivent actuellement des prestations en vertu du RPC—ou qui détiennent des prestations accumulées qu'ils n'ont pas encore retirées depuis le début du programme—n'ont pas eu à verser des cotisations pour un montant égal au coût des prestations. Elles s'accumulaient. Pour les premières cohortes, celles qui reçoivent actuellement des prestations, le versement insuffisant est ridiculement élevé. J'ai fait des calculs dans mon propre cas et, à mon avis, il est clair que la prime que je retire du RPC est indécente.
• 0920
Que représentera le fardeau de s'acquitter des obligations
découlant de la partie A? Il dépendra de la croissance du revenu
national et des taux de rendement des investissements futurs. Plus
la croissance du revenu national, du revenu des particuliers et de
l'assiette fiscale sera rapide dans le futur, et plus léger sera le
fardeau relatif à assumer. Si vous obtenez un revenu national
supérieur, une assiette fiscale plus importante, le dollar de
fardeau à assumer dans le futur, qui est déjà déterminé, s'en
trouvera réduit d'autant.
Jusqu'ici, on pensait que la croissance démographique et celle de la population active et des dividendes du régime permettraient d'assumer les responsabilités découlant du passif non capitalisé sans qu'il soit nécessaire d'imposer des cotisations ou des impôts additionnels, mais ces attentes sont irréalistes depuis plus de deux décennies. Par ailleurs, le taux élevé du rendement de tous les fonds d'investissement accumulés du régime... plus petite sera la taille des prestations futures. La taille du fonds, dans le cadre d'un programme à précotisation très réduit, ne produirait pas suffisamment de ressources, même à des taux réels supérieurs, pour alléger de beaucoup les futures obligations découlant de la partie A.
Le résultat final est que pour assumer les obligations découlant de la partie A du RPC, il faudra exiger des cotisations additionnelles ou obtenir des recettes additionnelles pour le gouvernement à partir de sources autres que celles qui sont nécessaires pour financer les prestations de la partie B. Quelqu'un devra payer davantage, d'une manière ou d'une autre, et à un certain moment donné.
Établir le taux de cotisation au RPC à 9 p. 100, tandis que les coûts de la partie B se situent à 7,5 p. 100 ou moins, dépendant de la richesse du régime, impose une partie des coûts des obligations découlant de la partie A à tous les futurs cotisants du régime. Les gens d'âge moyen, les jeunes et ceux qui ne sont pas encore nés devront faire une contribution partielle aux ressources nécessaires pour assumer les obligations découlant de la partie A.
Toutefois, en vertu des taux de cotisation proposés, celles-ci seront insuffisantes pour assumer la totalité des coûts même si le fonds d'investissement a accumulé des taux de rendement réels relativement élevés. Les gouvernements devront réserver une partie des revenus d'impôt pour assumer une grande partie de leurs obligations. Les gouvernements qui assumeront ces obligations en émettant des obligations à long terme devront assurer le service de la dette, de sorte que le fardeau retombera de toute façon sur les contribuables.
Si les cotisations excédentaires, comme je les appelle, au RPC—c'est-à-dire, les cotisations qui dépassent les coûts des prestations d'années de service futures—ne sont pas versées afin d'assumer les coûts de la partie A, dans ce cas une plus grande partie du fardeau retombera sur d'autres parties du budget fédéral. D'autres sources de revenus du gouvernement devront être utilisées, ou d'autres services devront être réduits. L'impôt sur le revenu devra être supérieur à ce qu'il aurait été autrement, ou encore les taxes de vente seront plus élevées, ou bien des taxes seront imposées sur la fortune ou sur le transfert de succession.
Cela se résume à payer maintenant ou bien payer plus tard, faire de plus importantes cotisations et payer moins d'impôt ou vice versa. Mais d'une manière ou d'une autre, les Canadiens devront payer s'ils veulent assumer leurs obligations découlant de la partie A.
Par conséquent, un premier point concerne l'effet sur le revenu national futur des diverses cotisations possibles et méthodes d'imposition visant à assumer les coûts découlant de la partie A.
Jim Pesando, dans un excellent exposé, affirme que les cotisations excédentaires au titre des propositions relatives au RPC seraient un genre de charges sociales qui risqueraient d'avoir un effet négatif sur l'emploi et la productivité. Si ces dernières ne sont pas appliquées, quels seraient les autres taxes et impôts à utiliser ou les autres dépenses à abandonner? Ces options seraient-elles préférables pour l'économie à une éventuelle hausse des cotisations?
Dans un document publié antérieurement, M. Pesando recommandait l'augmentation des impôts sur le revenu des particuliers. Je pourrais envisager d'autres solutions de rechange comme une surtaxe spécifique sur le revenu des particuliers pendant deux ou trois décennies, peut-être assortie d'une augmentation des taxes à la consommation ou de l'introduction d'une taxe sur la fortune ou les successions.
Je ne suis pas un expert en taxation, mais il ne me semble pas évident que des augmentations apportées dès maintenant au taux de cotisation, comme cela a été proposé, seraient pires pour l'économie que les autres possibilités.
L'autre point concerne la répartition du fardeau additionnel découlant du problème de la partie A. Les propositions du gouvernement placent une partie de ce fardeau résultant de l'augmentation du ratio de préfinancement sur les épaules de toutes les personnes qui cotiseraient dans le futur: quasi-aînés, personnes d'âge moyen et jeunes. Si certaines autres combinaisons de cotisations, de taxes et de services abandonnés devaient être utilisées, est-ce que le fardeau serait moins important pour autant pour les jeunes? Si c'était le cas, le fardeau serait alors plus important pour les quasi-aînés et les gens d'âge moyen. Dans le cadre des propositions, seulement une partie du fardeau des coûts découlant de la partie A retomberait sur les cotisations; une grande partie de ce fardeau retomberait de toute façon sur les autres formes d'imposition. Quelle serait alors l'équité de ces autres changements en matière de taxation?
• 0925
L'équité est perçue à travers la personnalité de
l'observateur. J'aurais moi-même préféré une solution différente au
problème de la partie A, une solution qui ferait appel à la
désindexation partielle des prestations du RPC, qui reculerait
l'âge auquel les prestataires pourraient bénéficier de leurs
prestations, et qui exigerait probablement une cotisation
différente pour les jeunes et les personnes d'âge moyen. Mais mes
préférences auraient sans doute compliqué le système et modifié la
répartition des prestations d'une manière que les autres auraient
considérée comme injuste.
En terminant, comme le soulignait l'Economist dans un article où on passait en revue les différentes possibilités de financement pour le système de sécurité sociale américain, la question n'est pas que les personnes âgées imposent un fardeau indu aux jeunes, mais plutôt qu'il doit y avoir répartition entre les nantis et les pauvres de la société. Selon l'Economist, les propositions américaines visent véritablement la répartition entre les nantis et les mieux nantis. Il se pourrait que la question du fardeau des nantis et des gens plus pauvres au Canada soit moins sévère qu'aux États-Unis parce que notre système ne favorise peut-être pas autant les mieux nantis que le système américain, mais cette question mérite considération.
Je termine avec deux autres points. Le premier concerne le faible taux de rendement implicite pour les futurs cotisants au RPC.
On a fait beaucoup de cas du faible taux de rendement dont les futurs cotisants au RPC profiteront, par comparaison au taux élevé de rendement qu'ils pourraient recevoir si leurs cotisations étaient versées dans un régime d'investissement privé. Le seizième rapport actuariel projette un taux de rendement réel de 1,9 p. 100 par année pour les personnes nées en 1998 et de 1,8 p. 100 pour celles qui naîtront en 2012. De façon générale, on a mal compris et mal interprété ces projections.
Premièrement, le rendement du RPC ne résulte pas seulement du revenu de retraite mais aussi des prestations versées pour invalidité, des prestations de décès, des prestations au conjoint et aux personnes à charge. Ces rendements devraient inclure une allocation pour les éventualités et les prestations. Certains analystes l'ont fait—par exemple, Bill Robson de l'Institut C.D. Howe—mais la plupart ne le font pas. L'assurance contre ces éventualités serait exigée par la plupart des Canadiens s'ils n'en avaient pas une avec le RPC.
Le taux de rendement interne projeté pour le RPC est bas parce que ce n'est pas l'ensemble des cotisations qui seront consacrées au versement des pensions et autres prestations découlant du service futur—cela correspond à la partie B. Une partie des cotisations, celle qui correspond à «l'excédent sur le coût des prestations futures» devra servir à assumer une partie du problème du passif non capitalisé hérité du passé. Les cotisations excédentaires ne produisent pas suffisamment pour compenser pour les prestations futures accumulées par la participation future. Ainsi, les prestations futures qu'elles produisent sont insuffisantes par rapport au taux de cotisation du RPC. Il en résulte que les taux réels projetés de rendement pour les cotisations futures totales au RPC sont entraînés vers le bas à ces taux inférieurs. Si l'on trouvait un moyen de régler le problème de la partie A d'une autre manière, cela permettrait d'imposer des taux de cotisations de beaucoup inférieurs afin d'assumer les prestations futures découlant de la partie B, et le taux de rendement implicite sur le RPC serait de beaucoup supérieur.
Toutefois, si le fardeau découlant de la partie A était entièrement assumé par d'autres formes de taxation ou par la réduction d'autres services gouvernementaux ou encore par une combinaison des deux, il faudrait tenir compte de ces facteurs dans l'établissement du rendement net de l'investissement privé des cotisations au RPC par les particuliers. Déduction faite de l'impôt additionnel, le rendement serait de beaucoup inférieur à ce qui est suggéré par un grand nombre pour un investissement dans un régime privé.
En outre, il est largement reconnu que les coûts d'administration et de distribution des régimes d'investissement privés sont de beaucoup supérieurs à ceux du RPC.
J'aimerais aborder en dernier lieu l'équité entre les générations. Plusieurs se sont plaints que les propositions relatives au RPC imposaient un fardeau indu aux jeunes afin de pouvoir effectuer les transferts aux personnes âgées et aux quasi-aînés au Canada. Il n'y a pas de doute que les propositions imposeraient un fardeau additionnel aux jeunes, mais est-ce réellement injuste?
Les prestations du RPC sont une partie vitale de notre système de retraite. Si elles n'existaient pas, la première année du régime devrait être élargie au détriment des contribuables en général, y compris des jeunes pour les raisons que je viens d'énumérer, tous les Canadiens devront assumer une partie du fardeau additionnel servant à régler le problème du RPC. Ce qu'ils ne paient pas par l'entremise des cotisations, ils le paieront par le truchement d'autres taxes et de réductions dans les services, y compris pour les jeunes. En règle générale, les transferts sociaux des jeunes aux aînés sont souvent évalués de façon restrictive, et ceux qui concernent le RPC le sont particulièrement.
• 0930
Comme Helliwell, Osberg et Baldwin l'ont affirmé de façon très
convaincante lors de la conférence de Statistique Canada du
printemps dernier, l'équité entre les générations doit
nécessairement inclure l'ensemble complet des activités sociales.
Les jeunes de cette génération ont bénéficié des avantages d'une
infrastructure publique complète dont ils ont hérité mais pour
laquelle ils n'ont rien payé. Ils ont aussi hérité d'un système
d'éducation postsecondaire largement subventionné. Ils ont hérité
d'un système de soins de santé qui est fondé sur les
investissements réalisés dans le passé et pour lesquels ils ont
très peu payé.
Je pourrais continuer pendant des heures, mais je pense que j'ai réussi à faire passer le message.
Les Canadiens des générations précédentes ont fait leur part lors de la Grande dépression, de la Seconde Guerre mondiale et de la reconstruction du Canada après la guerre. Est-il injuste que ceux-ci aient bénéficié d'une prime par l'entremise du RPC jusqu'à maintenant, une prime qui sans doute disparaîtra bientôt?
J'ai moi-même largement profité du RPC au-delà de mes contributions personnelles, mais je continue à payer ma dette par le truchement d'impôts plus élevés pour de nombreux services dont je ne profite pas du tout. Cela fait partie du contrat social au Canada, et je suis d'avis qu'il a bien servi les Canadiens jusqu'ici et je suis tout à fait en faveur de sa survie.
Je vous remercie, monsieur le président.
Le président: Merci beaucoup M. Slater.
Nous allons maintenant passer à la période des questions et nous allons commencer avec Mme Ablonczy.
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Réf.): Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Slater. Nous apprécions le fait d'avoir la possibilité qu'une personne de votre expertise puisse venir témoigner devant le comité. J'aimerais profiter de l'occasion qui m'est donnée de discuter avec vous de cette question de l'équité entre les générations.
Comme vous le savez sans doute, j'ai été très critique concernant les aspects de ce plan qui portent sur l'équité ainsi qu'en ce qui a trait au fardeau imposé aux jeunes. Comme le ministre des Finances aime à le souligner, le passif non capitalisé de ce régime se chiffre à 600 milliards de dollars. Je suggère à vous et aux Canadiens qu'il s'agit d'une deuxième dette nationale.
Je reconnais votre perspective selon laquelle, tout bien considéré, le fait de placer le fardeau de cette deuxième dette nationale sur les épaules des jeunes, des jeunes Canadiens, ne serait peut-être pas si injuste que ça. Cependant, permettez-moi de ne pas être d'accord avec vous. Nos enfants, ne l'oubliez pas, héritent aussi de la première dette nationale qui se monte à 600 milliards de dollars. Alors maintenant, ce que nous faisons essentiellement, c'est leur dire qu'ils doivent aussi assumer le fardeau d'une deuxième dette nationale, le passif non capitalisé de 600 milliards de dollars du Régime de pensions du Canada.
Pour compenser cela, il y a un argument que vous nous avez déjà servi selon lequel ils «bénéficieraient d'une infrastructure et d'un système d'éducation postsecondaire largement subventionné». Je pense qu'ils pourraient vous rétorquer que l'éducation postsecondaire dont ils ont bénéficié n'était certainement pas aussi subventionnée que celle que leurs parents ont reçue.
Comme vous le savez, les frais de scolarité ont augmenté, et le fardeau imposé aux étudiants par l'entremise des prêts qui leur sont accordés va grandissant. Toutefois, ce n'est qu'une partie du problème. Je tiens simplement à souligner qu'ils pourraient vous rétorquer que les subventions qu'ils ont reçues ne sont pas très importantes.
Je me demande ce que vous pouvez bien raconter à vos petits-enfants lorsque vous leur dites qu'il n'est que justice qu'ils héritent d'une première dette nationale de 600 milliards de dollars ainsi que d'une seconde dette nationale dont ils devront payer la part du lion, même malgré l'augmentation des primes pour certains d'entre nous qui sommes plus âgés et qui devront payer des cotisations plus élevées pendant une minuscule période de temps par comparaison avec l'étendue du passif non capitalisé. Ils devront payer la majeure partie de cette somme. De même que, bien sûr, ils devront aussi payer pour les coûts des soins de santé des baby-boomers qui imposeront bientôt des demandes accrues sur ce système.
Je suis curieuse de savoir, lorsque vous vous adressez à vos petits-enfants, comment vous justifiez le fait de leur imposer ce fardeau, en leur disant: «C'est comme ça, et ce n'est que justice».
M. David Slater: Je n'ai pas discuté de cela avec mes petits-enfants, mais je l'ai fait avec mes enfants, avec mes filles.
Au départ, bien entendu—et je pense que vous serez d'accord avec moi sur ce point—il y a ce que les enfants et les petits-enfants devront payer pour les prestations futures, et cela impose un fardeau raisonnable. Cela n'entre pas du tout dans le passif non capitalisé. Ce sont seulement les cotisations excédentaires par rapport aux prestations futures qu'ils recevront qui ont à voir avec le passif non capitalisé, et même ces cotisations seront insuffisantes et ne serviront qu'en partie à l'assumer.
La vérité, c'est que la dette existe. Quelqu'un devra la payer. Si les jeunes n'en paient pas une partie, alors nous devrons tous en payer un peu plus, soit par des augmentations d'impôt, par une réduction des services gouvernementaux ou par d'autres moyens.
Donc la question n'est pas d'imposer un fardeau aux jeunes; elle porte plutôt sur la répartition injuste de ce fardeau qui est imposé aux jeunes.
Lorsque j'ai réorganisé le régime de retraite des enseignants de Nouvelle-Écosse, il y a un certain nombre d'années, le régime était en très mauvaise posture. Le gouvernement de la Nouvelle-Écosse et les contribuables de cette province ne pouvaient assumer entièrement le passif non capitalisé. D'un autre côté, la responsabilité du gouvernement à cet égard était un peu ambiguë. Aussi la façon dont nous avons réglé le problème a consisté à répartir le fardeau du passif non capitalisé entre les prestataires existants du régime de pensions, ceux qui étaient appelés à payer des cotisations et ceux qui n'y participaient pas encore.
Nous l'avons fait, et l'un des moyens a constitué à désindexer partiellement les prestations, de sorte que les anciens enseignants qui recevaient des pensions de retraite assumaient une partie du fardeau en acceptant une indexation inférieure de leur pension de retraite. Les enseignants à la retraite avaient voté pour cet arrangement. Ils croyaient que c'était une façon juste de répartir ce fardeau. Ils reconnaissaient que le gouvernement et les contribuables qui, dans l'ensemble, avaient un revenu moyen inférieur à celui des enseignants... il était inacceptable d'imposer tout ce fardeau aux contribuables, qu'ils soient jeunes ou qu'ils soient âgés.
Lorsque je parle à mes filles, je leur dis qu'elles devront payer une partie de cela, seulement une partie et que les autres devront payer davantage. Et je leur dis aussi que si elles paient moins, ce sont d'autres qui devront payer encore plus.
Ce que nous devons faire c'est trouver un moyen de régler ce problème en imposant un équilibre raisonnable dans le partage du problème. Le problème existe, il ne s'évanouira pas.
Mme Diane Ablonczy: J'accepte cela, et je suis d'accord avec vous. Nous devons trouver un équilibre raisonnable.
Mais ce que je dis, c'est que cette façon de procéder n'est certainement pas un équilibre raisonnable. Cette façon de procéder n'impose aucun fardeau aux bénéficiaires actuels du fonds. Elle impose un très petit fardeau aux personnes qui recevront bientôt des prestations parce qu'elles devront assumer une augmentation des cotisations pendant une très courte période de temps. Le gros de cette deuxième dette nationale retombera sur les épaules de personnes qui ne travaillent même pas encore ou qui ne sont peut-être même pas encore nées.
M. David Slater: Tout dépendant de la taille qu'aura atteint le fonds d'investissement avant que les baby-boomers ne commencent à prendre leur retraite, disons que ce fonds pourrait se chiffrer à quelques centaines de milliards de dollars.
Mme Diane Ablonczy: Quel serait le pourcentage du passif non capitalisé?
M. David Slater: Un tiers, tout dépendant de la façon dont vous calculez le passif non capitalisé. L'actuaire du gouvernement fédéral l'établit à 650 milliards de dollars, mais je pense, comme plusieurs des actuaires dont l'opinion est considérée dans ce pays, que le taux d'escompte qu'il a utilisé est trop bas. Il devrait utiliser un taux d'escompte plus élevé. Le passif non capitalisé pourrait être aussi bas que 400 milliards de dollars. Il pourrait être aussi élevé que les 650 milliards de dollars dont il parle, mais il me semble que 650 milliards de dollars est exagéré.
• 0940
Bien entendu, le fait est que cela signifie que, dans le cadre
de ces propositions, les personnes qui sont près de l'âge de la
retraite, celles qui commenceront à prendre leur retraite en 2010,
en 2012 et ainsi de suite, devront assumer au moins le tiers du
coût du passif non capitalisé. Cette somme n'incombera pas à vos
petits-enfants. Elle devra, en un sens, être prise en compte.
Comme je l'ai déjà déclaré en public—je suis réputé pour avoir dit cela—je préférerais qu'une partie de ce fardeau soit imposée à ceux qui reçoivent des pensions de retraite actuellement, comme moi-même, et je préférerais aussi qu'une plus grande partie de ce fardeau soit imposée aux gens qui approchent l'âge de la retraite. Ma suggestion qui consiste à désindexer partiellement les prestations devrait être suffisante pour obtenir ce résultat. Mais le gouvernement ne l'a pas acceptée comme étant un moyen de régler le problème.
Mme Diane Ablonczy: J'aimerais faire une dernière remarque. Le passif non capitalisé ne restera pas fixé à 600 milliards de dollars même si vous ne l'acceptez pas. Il continuera de croître et, en fait, dans environ 10 ans il aura atteint 1 000 milliards de dollars. Il ne cesse de grandir. C'est pourquoi ce fonds sera insuffisant pour financer 30 p. 100 du passif non capitalisé, même s'il grandit au taux que le gouvernement dit qu'il grandira, et nous n'avons aucune raison de croire qu'il y arrivera.
M. David Slater: Je ne sais pas où vous avez pris ces chiffres.
Mme Diane Ablonczy: Ils proviennent de l'actuaire en chef lui-même. C'est lui qui les a établis.
Toutefois, j'accepte vos commentaires concernant la façon dont nous pourrions faire preuve de plus de justice entre les générations et de plus d'équité en répartissant cette responsabilité. Je pense que nous savons tous que c'est ce que j'appelle un «gros éléphant» et qu'il est insatiable.
Je suis préoccupée par la justice. Je veux pouvoir regarder mes petits-enfants dans les yeux dans 20 ans et leur dire que ce que nous avons fait était bien, que c'était approprié, que c'était juste et équitable. Je ne veux pas leur dire: «nous ne voulons pas blesser quiconque aujourd'hui et comme vous n'avez pas le droit de vote au moment où on se parle, vous ne savez pas ce qui se passe, aussi nous allons vous imposer ce fardeau», parce que, tôt ou tard, ils auront le droit de vote et ils ne seront pas très impressionnés par ce que nous avons fait.
M. David Slater: Je comprends.
Mme Diane Ablonczy: Merci monsieur, j'apprécie votre remarque.
[Français]
M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur Slater, avez-vous l'interprétation? M'entendez-vous bien?
[Traduction]
M. David Slater: Mon français s'est détérioré.
[Français]
Mon français n'est pas bon.
[Traduction]
M. Pierre de Savoye: Il n'y a pas de problème.
[Français]
Monsieur Slater, vous nous présentez une étude très intéressante, un point de vue très intéressant sur les mécanismes en cause dans la gestion du Régime de pensions du Canada. Vous nous parlez des parties A et B. La partie B est relativement directe et simple à saisir. La partie A propose plusieurs avenues possible.
À la fin du dernier petit document que vous nous avez passé, vous dites quelle approche est la meilleure et peut-être la moins dommageable pour l'emploi des Canadiens et leur productivité. Pourriez-vous nous indiquer quelle serait selon vous l'approche la moins dommageable, parce qu'en définitive, ce qui sera le plus juste et le plus équitable, sera ce qui marchera le mieux? Selon vous, qu'est-ce qui marcherait le mieux?
[Traduction]
M. David Slater: Je pense que la solution nécessite plus d'un angle d'attaque. Personnellement je suis d'avis qu'une proposition qui nécessite la constitution d'un fonds d'investissement est une partie très importante et souhaitable de la solution. Cette solution aura comme grande qualité, si elle est bien mise en oeuvre, d'établir un sens de crédibilité à l'égard du programme pour un plus grand nombre de Canadiens, et je pense que cela est dans l'intérêt du pays. L'un des problèmes dans le monde aujourd'hui est que les taux d'épargne sont relativement bas.
• 0945
En elles—mêmes et d'elles-mêmes, je crois que les propositions
qui comprendraient l'accumulation d'un fonds de placement sont
souhaitables au chapitre de l'économie, à long terme, de taux
d'intérêts, de croissance et de productivité.
Je crois que dans les circonstances actuelles, résoudre un élément de ce problème en augmentant l'impôt sur le revenu des particuliers peut-être par le biais d'une surtaxe est fortement sujet à caution. Nous avons des taux marginaux d'imposition très élevés au Canada; vous mettez ensemble les taux fédéral et provinciaux et ils s'appliquent à des niveaux de revenu vraiment très bas.
Un distingué comptable agréé a fait récemment une merveilleuse comparaison. Il compare le revenu, les impôts et les fardeaux, et ainsi de suite, disons de quelqu'un habitant Houston ou Dallas et d'une autre personne demeurant à Toronto ou ailleurs; et l'une des choses qui ressort vraiment très clairement, c'est que non seulement les taux marginaux d'imposition sont très élevés mais ils s'appliquent à des niveaux de revenu de loin inférieurs à ceux des États-Unis.
J'hésiterais très certainement à recommander l'ajout d'une surtaxe à l'impôt sur le revenu actuel comme moyen de régler ce problème. Si nous pouvions de quelque façon faire baisser un peu les taux et les taux marginaux, ce serait une autre question, mais je pense que cette solution serait encore même moins acceptée que de relever les taux de cotisation.
Vous devez ensuite faire face à une surtaxe sur les taxes de vente en introduisant un impôt sur la fortune ou un impôt sur les successions, des choses comme çà. Il n'y a pas de solutions faciles à ce problème comme on peut le voir. Il n'y a pas de solutions faciles pour réduire la dette nationale. Il n'y aura pas de solutions faciles dans ce cas-là, il n'y aura pas de solutions faciles ici.
Pour reprendre ce que j'ai dit, je crois vraiment que le fait d'augmenter les cotisations et d'accumuler un fonds de placement constitue une partie importante et bien justifiée de la solution.
[Français]
Le président: Merci, monsieur de Savoye.
[Traduction]
Monsieur Szabo.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, libéral): Merci monsieur le président. Merci monsieur Slater.
Votre largeur de vue m'étonne. C'est sans prétention. Comme philosophie d'imposition, dire que chaque payeur de taxe devrait tirer avantage de chaque programme tout au long de sa vie serait non réaliste et, cependant, comme vous l'indiquez dans la toute dernière phrase de votre exposé, même si vous n'avez pas cotisé au RPC, vous payez un impôt élevé aujourd'hui et vous payez pour des services que vous n'avez pas. Il en ressort encore que tout compte fait et toute notre vie durant, il se peut que nous ne soyons pas toujours traités de façon égale mais que nous sommes traités également à tout prendre.
Ainsi, cette idée d'un impôt élevé est vraiment une réflexion sur ce que je paie pour obtenir des services fondamentaux du gouvernement, et tout autre impôt supplémentaire est vraiment indicateur du niveau de service que j'obtiens.
Alors peut-être que ma première question très rapide, parce que j'ai une question plus pertinente concernant le RPC, est que si vous deviez personnellement réduire l'impôt, ce qui déboucherait par conséquent sur la réduction de certains services, quel service voudriez-vous réduire?
M. David Slater: Oh, bien...
M. Paul Szabo: C'est une question difficile. Continuons.
Vous avez donné plus tôt quelques chiffres sur les taux d'imposition et vous y avez rattaché les prestations aux personnes âgées. Je constate que c'est difficile de mettre tout çà de côté.
Comme député, je gagne à peu près 64 000 $ par année. Si je prends le total de l'impôt fédéral et de l'impôt provincial que je paie sur cette somme de 64 000 $, cela fait environ 40 p. 100. Le taux marginal d'imposition fédéral et provincial combiné le plus élevé est de 53 p. 100. Bien sûr, l'explication de l'écart est que la première partie de mon revenu est à un faible taux, la partie médiane de mon revenu est au taux moyen, et la dernière partie est au taux élevé.
Sur la disposition de récupération de 73 p. 100, si j'avais pris les prestations aux personnes âgées, les avais rendues imposables, les avais mises dans le revenu, puis si j'avais fait la déclaration de revenus, quel serait le taux marginal d'imposition le plus élevé que je paierais sur les prestations aux personnes âgées?
M. David Slater: Vos prestations aux personnes âgées...
M. Paul Szabo: Que se passerait-il si je les avais simplement rendues imposables plutôt que non imposables? Ce serait 53 p. 100, parce que c'est le taux marginal le plus élevé au Canada. Donc, comment se fait-il que vous puissiez dire que les prestations aux personnes âgées, telles que proposées, ont un taux de récupération réel de 73 p. 100 quand le taux marginal d'imposition le plus élevé possible est en fait 53 p. 100 et donne le même résultat pour le contribuable?
M. David Slater: La proposition telle que formulée actuellement n'est pas une prestation aux personnes âgées imposable.
M. Paul Szabo: Je comprends.
M. David Slater: La proposition en est une qui n'est pas imposable, et c'en est une qui vous fait perdre essentiellement 20 p. 100 de vos prestations aux personnes âgées par dollar de revenu supplémentaire.
M. Paul Szabo: Mais vous comprenez que—
M. David Slater: Posons le problème de cette façon. Il y a une plage de revenus où les gens perdront le 20 p. 100 et paieront le taux marginal supérieur. Si vous avez un revenu qui dépasse cela, donc une fois que vous avez perdu toutes vos prestations pour personnes âgées, çà s'arrête là. Par la suite, seul le taux marginal d'imposition disparaît.
M. Paul Szabo: Mais je pense que vous conviendrez que la raison pour laquelle nous pourrions obtenir des chiffres si élevés, et que la raison pour laquelle nous pouvons jouer avec les chiffres, est que vous prendriez les répercussions fiscales comme un pourcentage d'une somme non imposable. C'est pour cette raison que cela fait 73 p. 100.
M. David Slater: Faites simplement les calculs pour les différents revenus des personnes.
M. Paul Szabo: En ce qui concerne le passif non capitalisé, c'est ce que je voulais réellement vous demander. Je pense qu'il s'agit d'une question importante que chacun doit comprendre clairement, et je pense que nous avons besoin de savoir maintenant ce que vous en pensez.
Dans un régime de pensions d'entreprise, je comprends qu'il n'y a aucune certitude à l'effet qu'il y aura un fonds garanti pour le futur. C'est pourquoi les sociétés ne peuvent pas supporter un passif non capitalisé; elles doivent le comptabiliser à court terme. Le Régime de pensions du Canada n'est pas entièrement capitalisé, comme çà devrait être le cas dans le secteur privé.
Je veux savoir si vous êtes d'accord, dites-moi donc s'il vous plaît ce que vous en pensez. Est-ce parce que nous avons des cotisations obligatoires en vertu du Régime de pensions du Canada qu'on est certain que, tant que le Canada existe et tant qu'il y a des travailleurs—en oubliant le taux qui doit être payé—il y aura des cotisations là qui sont garanties, qui seront là sans aucun doute à moins que vous ne décidiez de mettre totalement fin au régime et ne décidiez de réserver les bénéfices accumulés pour les futurs bénéficiaires? Croyez-vous qu'il convient ou qu'il ne convient pas d'avoir le passif non capitalisé à cause de la base par répartition? Si non, à quel moment le passif non capitalisé qui a été créé à partir du premier jour—et c'était une bonne chose à ce moment-là—est-il devenu une mauvaise chose, et pourquoi?
M. David Slater: C'était une idée acceptable pour les actuaires en ce qui concerne les régimes de pensions du secteur public—les professeurs, les pompiers et autres professions semblables—de ne pas être entièrement capitalisés. L'argument voulait que les gouvernements durent indéfiniment et que ce n'était pas la même chose pour les entreprises. Les gouvernements ont des pouvoirs de taxation et d'emprunt que les entreprises privées n'ont pas, y compris le pouvoir d'imprimer de l'argent par la banque centrale. Par conséquent, vous trouvez un certain nombre d'opinions qui soulèveraient cette question sur l'évaluation des régimes de pensions du secteur public il y a vingt ans.
• 0955
Ce point n'est plus acceptable, même dans les régimes de
pensions du secteur public, parce qu'on sait que même si les
gouvernements ont une durée indéfinie, ils n'ont pas de grandes
réserves de capacité d'imposition ou de grandes réserves de
capacité non utilisée d'accroissement de la dette. Cela ne
fonctionnera pas. Plusieurs des régimes de pensions du secteur
public qui ont été capitalisés partiellement pendant plusieurs
années sont tous passés actuellement à une base entièrement
capitalisée ou s'en approchent.
Comme Paul Samuelson l'écrivait il y bien longtemps, le Régime de pensions du Canada s'accompagnait d'un truc intergénérationnel. On croyait que la présente génération de bénéficiaires de pension serait supportée par les cotisations du temps. Vous n'aviez pas besoin de capitaliser la chose, mais les gens de cette génération qui y cotisaient s'attendaient à leur tour de pouvoir recevoir la pension à même les gens qui travaillaient lorsqu'ils ont pris leur retraite. Si les taux de croissance démographique qui ont déterminé l'équilibre entre le nombre des travailleurs et le nombre des retraités étaient stables, ce mécanisme pourrait continuer de fonctionner, surtout si les taux de croissance de la productivité étaient suffisamment élevés.
Depuis la mise sur pied du Régime de pensions du Canada, nous avons connu un changement de la situation où il y avait six ou sept travailleurs par personne retraitée par comparaison avec ce qui nous attend, c'est-à-dire trois travailleurs ou moins par personne retraitée. Pour maintenir les avantages—non pas accroître les avantages en termes relatifs—il faudrait que la contribution de base augmente. C'est ce qu'exige le fait démographique.
L'autre chose est que lorsque le Régime de pensions du Canada a été mis sur pied, les gens croyaient que les taux d'intérêts réels continueraient d'être de 2 p. 100 ou de 2,5 p. 100 ou à peu près et que le taux de croissance de la productivité au sein de l'économie serait de 2,5 p. 100 et que, par conséquent, le revenu national futur allait augmenter à cause de la croissance démographique, de la croissance de la population active, de la productivité accrue et des faibles taux d'intérêts. L'évaluation, si vous préférez, le Régime de pensions du Canada était fondé sur ces prémisses. À l'heure actuelle, chacune de ces prémisses est différente.
La croissance démographique a ralenti, la croissance de la productivité est moindre, les taux d'intérêts réels sont plus élevés; et il serait simplement impossible, même si vous n'aviez aucun passif non capitalisé, de satisfaire au Régime de pensions du Canada sur la base des taux de cotisation déterminés au tout début, ou même sur les taux qui furent fixés lorsque le programme d'augmentation sur une période consécutive de 25 ans a été implanté.
Le président: Merci, monsieur Szabo.
Merci, monsieur Slater. Vous nous avez fait un exposé très profond. J'aimerais vous remercier au nom du comité.
M. David Slater: Merci monsieur le président. Ces choses me tracassent depuis longtemps. Ce sont des problèmes difficiles, comme l'a soulevé votre premier questionneur. Il n'y a pas de réponse facile à ce problème d'équité. Je pense que tous ceux qui avancent que des cotisations accrues ne sont pas la réponse doivent nous présenter ce qu'ils proposent comme solution de rechange.
Le président: Merci.
Je voudrais souhaiter la bienvenue aux représentants du Caledon Institute of Social Policy, M. Ken Battle et Mme Sherri Torjman.
Vous avez déjà participé à suffisamment de réunions de ce genre pour savoir comment nous procédons. Vous avez environ dix minutes pour faire votre exposé et nous donner un aperçu des principaux points. Nous passerons ensuite à une période de questions et de réponses. Bienvenue.
M. Ken Battle (Caledon Institute of Social Policy): Merci de nous avoir invités à prendre la parole.
Aujourd'hui, nous voulons nous concentrer probablement de façon beaucoup plus précise que David Slater l'a fait—même si nous n'avons entendu qu'une partie seulement de son témoignage—sur certains aspects particuliers des changements au Régime de pensions du Canada qui nous touchent. Nous avons un vaste intérêt dans ce domaine, bien entendu, mais pour ce qui est de notre travail, nous avons choisi de parler de l'incidence des changements sur les personnes dont les revenus sont sous la moyenne. Nous pensons qu'il y a là certaines questions qui, même si on les a abordées, n'ont pas vraiment fait l'objet de toute l'analyse qu'elles méritent. C'est sur ce point que nous avons travaillé.
Je suis désolé de ne pas vous avoir remis l'exposé écrit. Nous sommes actuellement à rassembler le matériel sur lequel nous avons travaillé pendant plus d'un an à temps partiel. Aujourd'hui, nous allons partager avec vous quelques-unes des principales conclusions.
Compte tenu de vos contraintes de temps, je vais vous faire grâce de la première partie de mon exposé. Fondamentalement, nous allons voir certains sujets qui peuvent ne pas être nouveaux pour les experts, mais il s'agit de choses que nous ne devons pas oublier, je crois.
• 1005
L'importance du Régime de pensions du Canada et de la Régie
des rentes du Québec pour les gens à faible revenu et à revenu
modeste est beaucoup plus marquée qu'elle ne l'est pour les
Canadiens en général, et on l'oublie souvent dans le débat sur la
réforme des pensions. Le Régime de pensions du Canada est une forme
cruciale de revenu de retraite qui constitue une part très
importante du revenu des gens dont les gains sont sous la moyenne.
Le régime de pensions auquel nous pensons, le régime de pensions mixte du secteur privé et du secteur public du Canada—qui en réalité, selon la Banque mondiale, est le modèle que nous devrions avoir—est tout à fait inconnu pour la majorité des Canadiens. La majorité des Canadiens ne participent pas, autrement que marginalement, au troisième volet du régime de pensions privé: régimes de retraite d'employeur et REER. C'est pour cette raison que les pensions gouvernementales et que la réforme des pensions gouvernementales sont si importantes.
Il y a eu certains progrès dans la couverture des régimes de pensions privés chez les femmes, même s'il y a eu un déclin chez les hommes, mais la minorité des Canadiens faisant partie de la population active est encore couverte par les parties privées du régime de pensions.
En songeant à la ronde actuelle des réformes du RPC... et j'appuie sur ronde actuelle. Ce n'est pas fini. Il en reste encore plus à faire, mais les genres de changements qui ont été apportés sont assez fondamentaux dans l'évolution du Régime de pensions du Canada.
Notre démarche concernant les changements est la suivante, et permettez-moi de la résumer brièvement. Encore une fois, rappelez-vous que ce qui nous préoccupe tout particulièrement, c'est la façon dont ces changements vont avoir une incidence sur les gens dont les gains sont sous la moyenne. Par gains sous la moyenne, nous utilisons le MGAP d'environ 34 000 $. Puisque nous parlons du RPC, il s'agit de la catégorie de personne dont nous parlons.
Parmi les femmes qui cotisent au Régime de pensions du Canada, 79 p. 100 sont sous le MGAP, et 47 p. 100 sont sous la moitié du MGAP. De fait, même la majorité des cotisants de sexe masculin, environ 53 p. 100, ont des gains sous le MGAP. Et, bien entendu, les jeunes ont très nettement des gains sous le MGAP. Ainsi donc, lorsque nous parlons de l'incidence des changements au RCP sur les cotisants dont les gains sont sous la moyenne, nous ne parlons pas d'un groupe marginal. Nous parlons de la majorité des Canadiens, simplement pour être bien clairs.
Les changements au chapitre du financement sont beaucoup plus fondamentaux que les changements relatifs aux avantages. Fondamentalement, les changements relatifs aux avantages, tous étant des restrictions, étaient passablement raisonnables par comparaison avec ce qu'ils auraient pu être compte tenu de ce qui était sur la table à l'étape des négociations.
Nous avons appuyé le mouvement vers le financement partiel du Régime de pensions du Canada. La raison pour laquelle nous l'avons appuyé est que nous espérons qu'il permettra de maintenir et de préserver la stabilité financière et politique du Régime de pensions du Canada à long terme, parce que ce régime de pensions est si fondamentalement important pour la majorité des Canadiens, surtout ceux à plus faible revenu. Ainsi donc, nous avons appuyé ce mouvement.
Quoi qu'il en soit, l'incidence sur les cotisants à faible revenu est ce qui nous préoccupe, et c'est ici que nous divisons nos inquiétudes en deux volets. À longue échéance, le passage au financement partiel profitera non seulement aux cotisants à plus faible revenu en raison du fait que cela permettra de s'assurer que le RPC existera encore pour eux, ils en profiteront également dans la mesure qu'ils paieront des cotisations moins élevées, à longue échéance, qu'elles ne le seraient si nous maintenions le système par répartition, avec ces taux de cotisation augmentant plus graduellement mais s'élevant inexorablement plus encore.
Quand on examine l'incidence du financement du RPC sur les gens dont les revenus sont plus bas, dont les gains sont plus bas, un système de financement partiel—en tenant pour acquis que nous sommes capables de maintenir un taux stable, comme le gouvernement l'a promis—constituerait un fardeau moins astreignant pour eux que le régime actuel.
Le problème, cependant—et ce n'est pas un problème sans conséquence—est ce qui arrive durant la transition au cours des sept prochaines années du système par répartition au système de financement partiel. C'est l'essentiel de notre analyse sur l'incidence des modifications des taux de cotisation.
• 1010
Fondamentalement, ce qui se produit, c'est que le fardeau de
l'augmentation plus rapide, l'accélération plus rapide des
cotisations est beaucoup plus lourde pour les Canadiens à plus
faible revenu. Il y a deux raisons à cela. L'une est simplement la
structure du Régime de pensions du Canada qui paye des primes
ascendantes, atteint un niveau de taux uniforme, puis reste fixe.
Ainsi, lorsqu'on regarde le poids des cotisations comme un
pourcentage du revenu, elles sont plus élevées pour les gens à
faible revenu et moindres pour les gens à revenu supérieur.
L'autre changement qui a été apporté est le gel de l'exemption annuelle de base, l'EAB, le seuil du revenu sous lequel les gens n'ont pas à verser de cotisations, même si pour fins de pensions ils obtiennent des avantages sur toute la plage des revenus. C'est une forme de progressivité dans la structure du RPC.
Le mouvement pour geler cela—même si cela peut se comprendre d'un point de vue financier, parce qu'il s'agit d'un mouvement discret que les gens ne comprennent pas, et de tous les changements qui ont été envisagés pour le RPC, tant sur le plan du financement que des avantages, c'est ce qui comptait vraiment le plus—est un mouvement excessivement régressif. C'est l'essence de notre analyse.
J'essaie d'aller plus loin ici.
Dans les graphiques que j'ai distribués, si vous prenez la figure 4, nous allons examiner assez rapidement un ou deux points. La figure 4 présente le fardeau relatif sur les employés des cotisations au Régime de pensions du Canada cette année—c'est le double pour les travailleurs autonomes; nous nous concentrons sur les employés—à différents niveaux de gains.
Dans tous ces graphiques, nous présentons les gains bruts et les gains nets, et la raison nous sera évidente ultérieurement en ce sens que la solution que nous percevons relativement au fardeau sur les gens à faible revenu découle du crédit des cotisations au RPC. Dans toute l'analyse, nous n'indiquons pas simplement des cotisations brutes; nous présentons les cotisations nettes des économies d'impôts fédéral et provincial découlant du crédit d'impôt pour les cotisations au RPC et au RRQ. Il est très important que nous prenions les contributions nettes parce qu'il s'agit du fardeau réel de fin d'année sur les gens.
Comme je le disais plus tôt, vous pouvez voir que sous le régime actuel—bien, 1997 la première année du passage au financement partiel—le fardeau est plus élevé pour les gens qui sont sous le MGAP de 35 000 $, et il devient beaucoup moindre pour les gens à revenu plus élevé. Il s'agit simplement d'une fonction du dénominateur.
Si vous passez à la figure 5 à la page suivante, nous voyons les cotisations comme elles seront, comme elles étaient en 1996 sous l'ancien régime, comme elles seront en 2003, année où, si tout se passe selon le plan, nous aurons atteint le taux stable. On voit aussi les cotisations telles qu'elles auraient été selon le système par répartition et comme elles sont prévues être selon le régime de financement partiel.
Les barres noires montrent les cotisations telles qu'elles étaient l'an dernier. Les barres médianes, les barres ombragées, les présentent comme elles auraient été en 2003 sous le régime actuel. Les barres hachurées, à la partie supérieure, indiquent ce qu'elles seront avec un financement partiel. Le message est très simple: il y aura des primes substantiellement plus importantes en l'an 2003 selon le financement partiel qu'elles ne le seraient selon le système par répartition. Ce n'est rien de nouveau.
Si vous prenez la figure 6, il s'agit de la deuxième partie de notre argument. Je passe à l'an 2030, le long terme. Ici, le tableau s'inverse. Oui, comparativement à 1996, les cotisations seront substantiellement plus élevées, mais elles auraient été beaucoup plus élevées selon le régime par répartition qu'elles le seront selon le taux fixe du financement partiel.
Si vous passez à la figure 7, je reviens à 2003, parce que nous voulons nous concentrer sur ces sept prochaines années, là où il y a une augmentation rapide des cotisations. Ici encore, les barres noires indiquent les cotisations de l'an dernier comme un pourcentage des gains, les barres ombragées montrent ce que le fardeau aurait été sous le régime par répartition, et les barres supérieures indiquent ce que le fardeau sera selon le nouveau système. C'est évident qu'encore une fois nous obtenons passablement le même modèle de répartition des avantages, mais encore une fois nous avons une augmentation passablement importante. L'une ou l'autre des cotisations nettes...
• 1015
Je vais être très honnête. Nous avons tenu compte du crédit
d'impôt que les gens obtiennent. Par exemple, si vous prenez
quelqu'un qui gagne 25 000 $, ses cotisations l'an dernier
correspondaient à approximativement 1,6 p. 100 de ses gains. Elles
vont passer à plus de 3 p. 100; pour ainsi dire, elles doublent.
Si vous passez à la figure 8, ce que nous faisons ici c'est de quantifier l'augmentation des cotisations entre 1996 sous l'ancien régime et 2003 au moment où le nouveau régime sera graduellement instauré. En dollars, vous pouvez voir qu'en termes absolus les augmentations des taux de cotisation s'accroissent jusqu'au revenu moyen puis restent fixes.
Mais si vous passez à la figure suivante, la figure 9, qui les examine en termes de pourcentage, nous obtenons un tableau très différent—et tout à fait étonnant à notre sens. À cause de la combinaison des augmentations rapides des taux de cotisations et de la décision de geler l'exemption annuelle de base, en termes de pourcentage le fardeau accru sur les cotisants à faible revenu est beaucoup plus élevé que ce qu'il est pour tous les autres. Quelqu'un gagnant moins de 5 000 $ verra une augmentation de 170 p. 100 de ses cotisations après impôt.
Enfin dans cette série, si vous prenez la figure 10, nous tentons encore une fois de mesurer le fardeau relatif de l'augmentation des taux de cotisations au cours des sept prochaines années. La figure 10 présente l'augmentation des cotisations sous forme de pourcentage des gains si nous avions gardé le régime actuel dans les barres noires, mais ce qu'il sera sous les barres ombragées selon le nouveau régime. Vous pouvez voir qu'en termes relatifs il n'y a aucun doute que les gens dont les gains sont sous la moyenne vont supporter la majeure partie de l'augmentation.
Nous avons maintenant un problème encore plus régressif à cause de la décision de geler l'EAB, ce qui signifie dans les faits qu'avec le temps sa valeur diminue et que le poids relatif des cotisations est ramené encore plus vers le bas de l'échelle des gains.
Qu'est-ce que tout cela signifie? Que devrions-nous faire? Nous avons pensé à une ou deux modifications que vous pourriez vouloir examiner.
L'une des modifications évidentes serait de révoquer la décision de geler l'exemption annuelle de base, en d'autres termes, maintenir le régime actuel. Je ne crois pas qu'il y ait beaucoup d'espoir que cela ne se réalise parce que la décision de geler l'EAB, bien que socialement injuste, est très habile sur le plan financier parce qu'elle va permettre au gouvernement d'aller chercher des avantages accrus avec les années, en ce sens que les futurs taux de cotisation en vertu du nouveau régime tels qu'ils sont projetés seront inférieurs à ce qu'ils auraient dû être si nous avions conservé l'EAB.
Ainsi donc, nous reconnaissons qu'il y a ici un compromis entre toute la question de financement, la question intergénérationnelle, dont vous avez parlé je suis sûr, et le fardeau des cotisants, les différents groupes de revenus. Il y a ici vraiment un conflit d'objectifs, de préoccupations.
Cependant, que pourrions-nous faire d'autre si nous ne faisions rien en ce qui concerne l'exemption annuelle de base?
Le domaine le plus évident auquel nous pensons est plausible parce qu'il s'inspire d'un régime existant, le régime d'allégement fiscal pour les cotisations au RPC. Ce que nous recommandons ici—je n'ai pas de modèle, mais nous nous sommes creusés un peu les méninges—c'est de prendre l'allégement fiscal pour les cotisations au RPC qui existe et de le configurer de façon à en faire un allégement fiscal plus progressif.
En d'autres termes, cela assurerait un montant proportionnel plus élevé d'allégement fiscal comparativement au fardeau du RPC sur ceux dont les gains sont moins élevés et ainsi de suite, et il pourrait s'agir d'un régime progressif.
Nous n'en avons pas encore établi les coûts, mais je ne pense pas que ce serait astronomique parce que les cotisations imposées aux travailleurs à faible revenu sont moindres en termes absolus. Je crois que ce serait une juste réforme d'un programme existant. Nous n'avons pas à instaurer un nouveau système administratif; ce système existe déjà.
• 1020
Il y a une troisième option que je mentionnerai brièvement de
façon superficielle. Nous en avons fait une certaine analyse. C'est
une proposition concernant la Régie des rentes du Québec qui a,
comme vous le savez, la même structure que le Régime de pensions
du Canada. On avait proposé d'avoir une exemption annuelle de base
progressive. En d'autres termes, l'EAB serait le montant actuel
pour les gens dont les gains sont très faibles et il diminuerait
jusqu'au point de disparaître au niveau du MGAP.
Superficiellement, ceci pourrait sembler plausible en ce sens que le problème de la régressivité s'inverse de toute évidence mais, concrètement, cela ne fait que corriger partiellement le problème du gel de l'EAB. Ironiquement, la même proposition consistait à avoir une EAB gelée au Québec mais à la rendre proportionnelle. Il y a là une sorte de mélange étrange.
Ainsi donc, cela ne résout vraiment pas le problème d'un fardeau croissant. À moins que quelqu'un n'arrive avec une autre idée, nous croyons que la solution évidente est d'examiner le système d'allégement fiscal, parce que nous n'alléguons certainement pas que nous ne voulons pas aller de l'avant avec une augmentation plus rapide des cotisations. Nous croyons que cela est essentiel à la santé et à la vie politiques et fiscales du RPC.
Nous avons parlé de l'incidence des modifications des avantages qui, quoique relativement modestes par comparaison avec ce qu'elles auraient pu être, comme je l'ai dit, sont toutes régressives. Chacune d'entre elles va avoir une incidence plus marquée sur les bénéficiaires à revenus plus faibles pour la simple raison que leurs revenus sont moindres et que le RPC est une partie de loin plus importante de leur revenu de retraite. Mais ce sur quoi nous voulons nous concentrer, c'est le problème vexatoire des prestations d'invalidité.
M. Sherri Torjman (vice-présidente, Caledon Institute of Social Policy): Merci beaucoup. Je parlerai seulement de quelques-uns des changements proposés aux prestations d'invalidité que je décrirai très brièvement.
Généralement, ce que nous avons entendu, c'est que les Canadiens ne réalisent pas que le Régime de pensions du Canada n'est pas seulement un régime de retraite, mais qu'il assure aussi la protection en cas d'invalidité grave et de longue durée. Il s'agit en réalité d'un problème sérieux du fait que les gens ne réalisent pas que cette protection existe. Il s'agit d'une protection très importante. Ce que nous savons du régime privé de pensions, c'est que plusieurs personnes ont de la difficulté à obtenir une couverture si elles ont certaines affectations préexistantes, ou encore elles doivent payer des cotisations excessivement élevées si, de fait, elles ont eu des antécédents de maladie de quelle que sorte que ce soit.
Le Régime de pensions du Canada protège tous les Canadiens. Il ne s'agit pas simplement d'un avantage pour des besoins particuliers ou pour un groupe d'intérêt spécial, il s'agit de protection pour tout le monde. Nous croyons qu'il s'agit d'une protection très importante et qu'il faut la défendre.
Cependant, par la même occasion, nous reconnaissons qu'il y a eu des problèmes en ce qui concerne les prestations d'invalidité en ce sens que le nombre de cas s'est accru rapidement au cours des dix dernières années. Plus particulièrement, surtout entre 1985 et 1995, il y a eu plus du double du nombre des cas des prestations d'invalidité. Cependant, nous croyons qu'il est très important de préciser qu'il y a eu des raisons très valables pour lesquelles le nombre des cas a augmenté de façon si marquée.
L'une des raisons avait un certain lien avec le fait que les députés eux-mêmes croyaient qu'il devait y avoir des changements substantiels au Régime de pensions du Canada afin d'améliorer à la fois la suffisance de ces prestations—les prestations d'invalidité—et la couverture. Certaines modifications précises à la loi furent votées en 1987 et 1992, et elles eurent pour effet d'ouvrir le régime, de le rendre quelque peu plus généreux, en étendant sa couverture.
Il y a également eu un développement très important en 1993, au moment où le Vérificateur général publiait un rapport indiquant que les Canadiens en général ne comprenaient pas le Régime de pensions du Canada ou comment il fonctionnait, et ne connaissaient pas les avantages auxquels ils avaient droit, surtout les prestations d'invalidité. Il a insisté pour faire connaître le programme, il a insisté pour communiquer avec certains responsables des programmes provinciaux pour savoir s'il existait des gens faisant partie de ces programmes qui auraient droit au Régime de pensions du Canada. Ainsi donc, des discussions eurent lieu au niveau des responsables des systèmes provinciaux d'aide sociale, des systèmes d'indemnisation des accidentés du travail et des assureurs privés. Bien, il en résulta une augmentation du nombre des cas.
• 1025
Je crois que ce qu'il importe de se rappeler, c'est le fait
qu'il y avait certaines raisons historiques très précises pour que
ce nombre de cas augmente. Quand nous regardons ce qui se produit
globalement, de fait, l'intention était d'ouvrir le programme dans
une certaine mesure. Jusqu'à présent, il y a eu un certain nombre
de mesures qui ont été prises depuis 1994 pour resserrer le nombre
de cas afin de s'assurer que la définition, la façon dont on
interprète l'invalidité au pays, est plus cohérente et qu'il y a en
place certaines procédures d'appel plus rigoureuses.
Après avoir examiné les chiffres, les données sur le nombre de cas et les renseignements fournis par le Ministère, je comprends que, de fait, il y a un grand nombre de procédures en place pour commencer à envisager de réduire ce nombre de cas. En fait, il y a eu une diminution, et nous avons certains chiffres ici qui vous démontrent que le nombre de cas a diminué et qu'il est prévu au moins demeurer passablement stable. Je dis cela parce que je crois qu'il y a eu bien de l'hystérie au sujet des prestations d'invalidité en particulier, et une bonne part de cette hystérie résulte d'une absence d'information ou du moins de l'absence d'un contexte historique motivant l'augmentation du nombre des cas.
Il y a présentement d'importants efforts d'harmonisation dont je veux vous faire part dans quelques instants, mais j'ai voulu commenter sur les deux modifications clés qui sont proposées par rapport aux prestations d'invalidité elles-mêmes, que vous pouvez consulter. La première concerne les modifications apportées aux exigences au chapitre des cotisations au régime. À l'heure actuelle, les travailleurs sont admissibles aux prestations d'invalidité s'ils ont cotisé au RPC pendant deux ans durant les trois dernières années ou pendant cinq ans durant les dix dernières années. Les modifications proposées exigeront maintenant de la part des travailleurs d'avoir versé des cotisations durant quatre des six dernières années. En d'autres mots, les gens devront verser des cotisations pendant plus longtemps avant d'être admissibles à une prestation d'invalidité.
Nous comprenons la nécessité de s'assurer que les gens versent des cotisations appropriées avant qu'ils ne puissent retirer quelque avantage que ce soit du régime. Notre principale préoccupation en ce qui concerne cette proposition se rapporte au fait que nous n'avons jamais vu de données d'impact sur l'effet de cette modification proposée. Je crois qu'il est absolument essentiel qu'avant d'approuver tout genre de mesure qui pourrait avoir une incidence importante sur un très grand nombre de Canadiens, il y ait une certaine analyse des données d'impact. Et nous savons qu'elle a été faite; elle n'a pas été rendue publique. J'espère que les membres du comité des finances pourront la consulter, et qu'ils pourront au moins examiner l'incidence de cette mesure proposée.
La deuxième modification aux prestations d'invalidité touchera la prestation de retraite à laquelle les bénéficiaires de prestations d'invalidité ont droit. À l'heure actuelle, si vous touchez une prestation d'invalidité à votre 65e anniversaire de naissance, votre prestation de retraite est fondée sur le salaire moyen que vous touchiez lorsque vous avez eu 65 ans. La modification signifiera que votre prestation de retraite sera fondée sur le salaire moyen au moment de l'incapacité et qu'elle sera indexée. Pour bien des gens, cela pourrait signifier une baisse substantielle de leurs prestations. Les bénéficiaires actuels ne seront pas touchés, mais le futur régime, par comparaison avec ce qu'il était, signifiera un large écart pour bien des personnes au chapitre de la valeur de la prestation. Ce ne seront pas seulement les gens qui sont à l'âge de la retraite qui seront touchés.
La prestation d'invalidité actuelle comprend deux composantes. Il y a une composante de taux fixe que tout le monde obtient sans égard aux gains, puis il y a une composante liée aux gains, et cette dernière composante est calculée correspondre à 75 p. 100 de la prestation de retraite. Si cette prestation de retraite baisse, il en sera de même pour la composante liée aux gains, et il en sera ainsi pour l'ensemble des prestations d'invalidité.
Encore une fois, notre préoccupation vient du fait que nous n'avons vu aucune donnée d'impact sur l'effet de cette modification proposée. Cela pourrait être très grave. Cela nous inquiète et encore on nous demande de la commenter et de faire des recommandations en l'absence de données que nous savons disponibles. Il est difficile de prendre des décisions éclairées dans un tel vide. Tout ce que nous pouvons dire, c'est que cela nous inquiète beaucoup.
Mon dernier point se rapporte au fait qu'il importe que les députés sachent qu'au niveau des représentants, il y a actuellement bon nombre de discussions en cours entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux pour ce qui est de tenter de consolider quelques-uns des programmes disparates en matière d'invalidité, de tenter de faire des évaluations conjointes et de tenter d'aplanir certains des problèmes administratifs qui ont, de fait, contribué à l'augmentation des coûts. Je pense qu'il s'agit-là de bonnes nouvelles et que vous deviez en être informés.
• 1030
Concernant les changements proposés, nous aimerions voir plus
d'informations et nous n'appuierons certainement pas ces
changements avant d'avoir pris connaissance de ces données.
Merci beaucoup.
Le président: Merci beaucoup, madame Torjman.
Nous allons maintenant passer à la séance de questions. Madame Ablonczy, si vous voulez bien commencer.
Mme Diane Ablonczy: Monsieur le président, je crois que nous devrions d'abord traiter du point soulevé par le témoin concernant l'existence d'une analyse de données sur l'effet des changements apportés aux prestations d'invalidité. Le comité devrait obtenir une copie de ce document, l'étudier et en tenir compte lors de la rédaction de son rapport.
Le président: D'accord.
Mme Diane Ablonczy: J'aimerais que le comité reçoive ce document le plus rapidement possible.
Le président: Oui, j'en prends note. Votre question...?
Mme Diane Ablonczy: J'apprécie votre présentation. Je regrette seulement que mes collègues néo-démocrates ne soient pas ici parce que les effets de ces changements sur les pauvres sont une de leurs préoccupations. Comme d'autres témoins l'ont fait remarquer, ces changements touchent en grande partie les Canadiens à plus faible revenu—et je ne parle pas seulement des cotisations, je soutiens aussi que le rendement de l'investissement sera si faible, particulièrement pour les plus jeunes cotisants, que ce sont les Canadiens aux plus faibles revenus qui en souffriront. J'aimerais avoir vos commentaires sur le sujet pour savoir si vous avez étudié cet aspect.
Les chiffres qui m'intéressent particulièrement sont à la figure 7, où vous parlez des cotisations au RPC en tant que pourcentage du revenu dans l'ancien système et de ce qu'elles seront dans le nouveau système.
Une des choses que le ministre des Finances n'a pas cessé de répéter c'est que sans ces changements, les taux des cotisations doivent augmenter à 13 p. 100 ou 14 p. 100. En fait, il attribue sans cesse et à tort ce chiffre de 13 p. 100 aux propositions des réformistes, mais ça c'est un autre problème.
En réalité, comme vos chiffres le démontrent, les modifications contribuent à faire augmenter les cotisations plus qu'elles ne l'auraient été dans l'ancien système. J'aimerais que vous nous disiez pourquoi nous devons adopter ce nouveau système et quels en sont les avantages, quand on sait que les cotisations qui seront versées dans le nouveau système dépasseront de beaucoup les cotisations qui auraient été perçues dans l'ancien système. J'imagine qu'il doit y avoir une bonne explication et je suis certaine que les Canadiens aimeraient l'entendre.
M. Ken Battle: Vous avez en fait deux questions. La première est très intéressante. Nous ne nous sommes pas encore penchés sur ce problème mais nous allons bientôt le faire. Merci de votre suggestion.
Pour ce qui est de votre seconde question, on peut dire qu'une augmentation plus rapide du taux de cotisation, en fait une augmentation beaucoup plus rapide qu'elle ne l'aurait été dans le régime actuel, est nécessaire afin de créer un surplus qui sera ensuite investi dans des instruments plus diversifiés que ceux qu'utilisent généralement le RPC. Par la suite, les revenus provenant de ces investissements seront versés dans la caisse et contribueront ainsi à abaisser les taux de cotisation. L'existence même de ce fonds répondra aux inquiétudes de nombreux Canadiens qui ne comprennent pas réellement la nature d'un mode de financement par répartition ou qui ne croient tout simplement pas que cela s'applique à leurs conditions économiques actuelles et futures. Je peux en fait vous répondre que c'est le prix à payer pour constituer un fonds qui nous permettra de «sauver le RPC».
Quant à savoir jusqu'où nous devons aller, vous avez tout à fait raison. L'équilibre devrait être atteint en 2003. Je crois que la projection est de 9,9 p. 100. Je ne l'ai pas présentement à portée de la main mais elle est dans nos notes.
Je crois que le moment où les deux systèmes se croisent, c'est-à-dire lorsque le mode de financement par répartition dépassera 9,9 p. 100, arrivera quelque part au cours de la prochaine décennie. Je peux me tromper, je ne me rappelle pas.
Ainsi, les taux de cotisation établis selon l'ancien système continuent à grimper tandis qu'avec le nouveau ils devraient rester les mêmes. Je suppose—
Mme Diane Ablonczy: J'imagine que «devraient» est le mot clé parce plusieurs témoins ont indiqué qu'il n'y avait aucune garantie.
M. Ken Battle: Vous avez raison. On entend souvent «état stable, état stable», mais qu'est-ce que ça veut dire au juste? Et si ça ne se produisait pas, c'est que nous aurions été trompés. Il est normal de se demander si de telles prévisions sont réalistes: Peut-on être en état stable pour toujours?
Comme vous le savez, rien n'est éternel, en politique et dans la vie publique. J'imagine donc que c'est une question pertinente. Je ne peux pas y répondre, n'étant pas moi-même un expert en la matière, mais je crois que l'inquiétude est justifiée.
J'aimerais cependant ajouter quelques mots à propos du fardeau relatif. Vous avez souligné que le fardeau se traduit de différentes façons, pas seulement par le taux de cotisation. On peut toutefois dire qu'à certains égards, une augmentation rapide des cotisations aidera à faire taire les critiques relatives aux iniquités du RPC, entre les générations, car sous le nouveau système, les cotisants actuels contribueront plus au régime de pensions qu'ils ne l'auraient fait dans l'ancien système. C'est certainement un argument intéressant en faveur du financement partiel.
Mme Diane Ablonczy: Si vous me le permettez, Monsieur le président, j'aurais une question concernant les statistiques en matière d'invalidité présentées par Mme Torjman.
Je comprends que nous faisons face une situation où de nombreux—pas de nombreux...enfin, je ne sais pas; je vous pose la question, beaucoup—où un certain nombre de prestations d'invalidité sont prises en charge par le programme d'invalidité du Régime de pensions du Canada simplement parce qu'on croit qu'il est subventionné par l'État et qu'on y a droit. Selon vous, jusqu'à quel point y a-t-il l'avantage d'un programme d'invalidité pour les Canadiens avec le RPC, ou l'avantage serait-il le même, mais le RPC s'occupe de tout.
Mme Sherri Torjman: Votre question sur le programme d'invalidité du RPC est très intéressante.
Une de nos préoccupations en matière de prestation d'invalidité est de savoir si le RCP agit comme premier ou comme second payeur.
Au Québec, le système fonctionne différemment. Dans les cas d'invalidité, la RRQ agit comme second payeur, alors que les autres systèmes prévus pour des besoins précis en matière d'invalidité entrent en jeu en premier.
Ainsi, au Québec, si vous vous blessez en travaillant, vous allez d'abord à la CSST, comme vous le feriez ici. Mais au Canada, les prestations du Régime de pensions du Canada pour invalidité viennent s'ajouter aux prestations de la Commission des accidents du travail. Au Québec, le système est harmonisé et vous n'avez donc pas ce double paiement.
Nous devrions jeter un coup d'oeil aux programmes de première ligne qui payent des prestations. Ainsi, l'assurance-automobile est premier payeur; l'indemnisation des victimes d'actes criminels, par exemple, et l'indemnisation des travailleurs sont aussi premiers payeurs; les prestations d'invalidité viennent ensuite. Les prestations d'invalidité devraient entrer en jeu seulement lorsque les autres formes d'indemnisation ne s'appliquent pas, ce qui aiderait à réduire le système de double paiement de prestations qui prévaut présentement et à colmater les brèches du système.
Mme Diane Ablonczy: Il n'y a pas d'obstacle de droit à cette modification. Il s'agit seulement d'un changement de politique.
Mme Sherri Torjman: Tout à fait.
Je vous ai déjà mentionné que des pourparlers visant à remédier à ce problème d'harmonisation étaient en cours entre les représentants des gouvernements fédéral et provinciaux, dans le but d'éliminer l'accumulation des prestations ou si vous préférez la double indemnisation. On cherche à mettre sur pied un groupe de représentants qui déterminera l'admissibilité de certaines personnes de sorte que si un système autre que le RPC doit payer, ce système deviendra alors premier payeur. Il y a beaucoup de choses à régler au niveau administratif.
Mme Diane Ablonczy: Merci beaucoup.
Le président: Merci, Madame Ablonczy.
Madame Torsney, vous avez droit à une dernière question.
Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Merci.
J'aimerais que vous me parliez de stratégies précises. Je suis consciente que vous n'avez pas tous les renseignements en votre possession mais en ce qui concerne les prestations de retraite et une combinaison des deux, pouvez-vous nous donner quelques chiffres?
• 1040
Par exemple, supposons que vous soyez invalide à 40 ans. Vous
recevez une prestation d'invalidité jusqu'à 65 ans, puis selon le
régime actuel, vous changez de régime pour recevoir le revenu moyen
en vigueur lorsque vous avez 65 ans. Dans le nouveau système, vous
dites que cela change—et c'est écrit noir sur blanc—et que la
personne reçoit le revenu moyen de la période où elle est devenue
invalide.
Mme Sherri Torjman: Exactement—au moment de l'invalidité, avec une indexation des prix.
Mme Paddy Torsney: D'accord—avec une indexation. Pouvez-vous nous dire à quel rythme les salaires ont augmenté comparativement à l'indice des prix sur une période de, disons—il faudrait sans doute faire des projections car la progression a ralenti, n'est-ce pas? Savez-vous comment cela fonctionne?
M. Ken Battle: En gros, de mémoire, je peux vous dire que les salaires sont à peu près les mêmes depuis le milieu des années 70. C'est la stagnation des salaires dont on entend parler si souvent. Ils montent puis ils redescendent. Au Canada, nous avons malheureusement changé notre manière de calculer le salaire moyen. Les données ne sont pas toujours constantes mais somme toute, les salaires n'ont pas augmenté plus vite que l'inflation, alors qu'il y a une trentaine d'années, lors de la création du RPC, durant les années du système de répartition, la croissance des salaires dépassait de beaucoup celle de l'inflation.
Mme Paddy Torsney: Donc, sous le nouveau régime, une augmentation des prix nous avantagerait.
Mme Sherri Torjman: C'est ce que nous croyons—peut-être le verrez-vous de cet oeil. Nous n'en sommes pas certains. Nous n'avons pas les données.
Mme Paddy Torsney: Bon d'accord. Mais vous possédez tout de même des données sur la croissance future des salaires.
M. Ken Battle: Le surintendant des assurances, lorsqu'il a réalisé les projections actuarielles pour le compte du RPC, a supposé des indicateurs économiques, y compris des salaires. Je ne me rappelle pas quelle était son hypothèse mais elle existe—une projection gouvernementale officielle. Il devrait aussi y avoir des prévisions pour le secteur privé—celles du Conference Board du Canada, par exemple. Mais c'est un domaine plein d'inconnus et comme vous le savez, dans le cas des prévisions, plus elles sont à long terme plus elles sont incertaines.
Mme Paddy Torsney: Tout à fait.
Vous avez aussi mentionné la possibilité d'une troisième modification, autre qu'une modification fiscale, pour s'occuper de l'exemption de base annuelle. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
M. Ken Battle: Oui, je me rends compte que je n'ai pas été très clair. Nous parlons ici de deux choses complètement différentes. La question de l'exemption de base annuelle—même si je crois qu'elle joue un rôle important sur le fardeau relatif —peut présentement être traitée. Il y a d'abord la question de l'EBA puis de l'augmentation des cotisations et de la combinaison des deux. La réforme fiscale dont je parle pourrait régler ces deux problèmes d'un seul coup, tout en tenant compte des personnes à faible revenu.
Mais la troisième proposition présentée au Québec suggérait qu'au lieu d'avoir une EBA fixe, elle pourrait varier avec le revenu. Vous auriez droit à l'EBA complète jusqu'à un certain niveau de revenu puis à mesure que le revenu augmente, l'EBA diminue.
J'ai fait un peu de recherches sur le sujet et je ne crois pas que cela va régler le problème, c'est la raison pour laquelle je ne suis pas très chaud à cette idée. Je ne crois pas que ce soit une option adéquate ou même réaliste. En fait, nous ne faisions que jeter un coup d'oeil sur les différentes idées mises de l'avant.
J'aimerais d'abord voir comment les autres pays ont traité la question du caractère régressif des pensions gouvernementales. Je ne sais pas, ce n'est peut-être pas une mauvaise idée de regarder ailleurs, on pourrait peut-être trouver d'autres idées et les adapter à la réalité canadienne. Il ne faut pas oublier qu'au Canada, les taux de cotisations sont plutôt bas, surtout lorsqu'on les compare à ceux d'autres systèmes comme par exemple aux programmes de sécurité sociale des États-Unis et des pays européens. Nous devons cependant nous souvenir que le RPC est un régime modeste.
Mme Paddy Torsney: Pour les prestations?
M. Ken Battle: Oui, pour les prestations. Vous savez, le maximum équivaut à 25 p. 100 du revenu moyen. Il s'agit là d'un programme bien modeste lorsqu'on le compare aux programmes offerts dans d'autres pays.
Mme Paddy Torsney: Avez-vous des commentaires à apporter concernant certaines facettes du volet numéro deux qui vont maintenant être discutées? Vous avez commencé votre présentation en disant que ce n'était pas la fin des changements. Y a-t-il d'autres aspects qui, selon vous, devraient être étudiés? En fait, n'avons-nous pas l'occasion d'évaluer un changement d'EBA basée sur le revenu bien que nous soyons en train de mettre en place un système qui prévoit un gel?
M. Ken Battle: C'est assez intéressant. Je ne crois pas que qu'il faille décider une fois pour toutes la question du fardeau des prestations pour que tout soit réglé à l'avenir.
Parmi les autres questions, la notion de pensions partielles nous intrigue beaucoup. Nous n'avons pas travaillé là-dessus, je veux simplement souligner que cela mérite une étude plus approfondie. Il faut que ce soit socialement et fiscalement logique, compte tenu du monde dans lequel nous vivons.
En ce qui concerne la taille relativement modeste du RPC, il s'agit presque d'une hérésie... On est là, en train s'essayer de «sauver» un régime modeste. Au début des années 80, beaucoup de gens parlaient d'élargir le régime, aujourd'hui cette notion semblerait directement sortie d'Alice au pays des merveilles, ce n'est toutefois pas ce que pensait le gouvernement de la Colombie-Britannique durant les dernières rondes de négociations portant sur la réforme du RPC. Il existe bien sûr certaines options qui nous permettraient d'élargir le RPC dans le futur mais elles coûteraient évidemment plus cher. Cela signifierait un fardeau plus lourd, ce qui est plutôt difficile à vendre ces jours-ci.
Si on veut avoir un régime de pensions gouvernemental élargi, il va falloir y mettre le prix, et il peut donc être intéressant d'étudier des façons de l'élargir modestement. Un moyen très simple est d'augmenter le MGAP, peut-être pas énormément, mais un peu. Cela permettrait d'augmenter légèrement les pensions. Cela augmenterait aussi les cotisations des personnes à plus haut revenu.
Je crois donc qu'il y a d'autres avenues à explorer. Comme Sherri l'a dit, en ce qui concerne l'invalidité, il y a un tas de choses qui pourraient être faites et qui seraient utiles, avant même de songer à réorganiser le programme en profondeur. Je crois qu'il s'agit là d'une réponse en évolution.
Mme Sherri Torjman: J'aimerais revenir sur les pensions partielles. C'est une possibilité que nous avons étudiée, surtout dans le cadre des prestations d'invalidité. Il y a des personnes qui peuvent effectuer certains travaux mais à l'heure actuelle, le programme exige une invalidité complète. C'est soit tout noir ou tout blanc, mais tout le monde sait que nous vivons dans un monde aux multiples nuances de gris. Nous croyons que le programme devrait être révisé pour tenir compte des différents niveaux d'habileté, ce qui permettrait ainsi d'offrir des prestations partielles. Nous sommes persuadés que cela répondrait aux situations où les personnes peuvent effectuer certains travaux et gagner un revenu d'appoint.
Mme Paddy Torsney: Je ne suis pas certaine qu'il me reste du temps, mais je trouve les trois graphiques du RPC plutôt difficiles à comprendre. Les deux premiers semblent indiquer une hausse tandis que le troisième suggère que les choses sont assez stables. Est-ce qu'il nous reste assez de temps pour obtenir plus d'explications?
Le président: On va prendre le temps.
M. Ken Battle: Lesquels?
Mme Paddy Torsney: Les trois derniers graphiques. Ils ne sont pas numérotés.
M. Ken Battle: Il s'agit des graphiques qui portent sur les invalidités. Je m'excuse mais nous n'en avons pas encore parlé.
Sherri, pourquoi ne les présenterais-tu pas?
Mme Paddy Torsney: C'est le troisième qui me cause le plus de problèmes, à cause des deux premiers.
Mme Sherri Torjman: Il s'agit du pourcentage du RPC que représentent les dépenses en prestations d'invalidité.
Mme Paddy Torsney: D'accord, et il demeure plutôt stable.
Mme Sherri Torjman: C'est bien cela, il s'agit en fait du rapport entre les dépenses en prestations et le programme en entier. Le programme ne cesse de croître et cela montre que les dépenses en prestations demeurent les mêmes, en termes de pourcentage du programme, ou si vous préférez, en termes de proportion des dépenses totales.
En termes absolus, elles ont évidemment augmenté avec les années, principalement à cause de l'augmentation du nombre de cas dont j'ai parlé un peu plus tôt. Mais en proportion ou en relation avec l'ensemble des dépenses du programme, les dépenses en prestations sont demeurées les mêmes au fil des ans. Nous croyons que c'est un renseignement particulièrement intéressant.
M. Ken Battle: En préparant ce graphique nous voulions aussi vous montrer que les dépenses en prestations représentent un pourcentage relativement faible de l'ensemble des dépenses du RPC. Nous voulions vous donner un aperçu de ce dont nous parlions.
Mme Sherri Torjman: C'est 16 p. 100.
M. Ken Battle: Ça ne nous empêche pas d'étudier la croissance des dépenses. C'est juste que nous ne devrions pas... Certaines personnes ont l'impression que les prestations d'invalidité du RPC sont en train de ruiner le régime. Vous souvenez-vous de toute la couverture médiatique au moment où...
Mme Paddy Torsney: Alors, si on compare un graphique illustrant l'ensemble des prestations du RPC aux deux premiers graphiques que vous nous avez présentés sur l'invalidité, la courbe serait la même.
M. Ken Battle: Nous avons tous ces renseignements en notre possession. Je regrette, mais je ne les ai pas avec moi. Je vous les ferai parvenir. Nous avons des graphiques pour représenter à peu près toutes les facettes du RPC que vous pouvez imaginer.
Mme Paddy Torsney: Si vous prenez les deux premiers, cela ressemble à ce que vous avez décrit tout à l'heure, c'est-à-dire que les gens pensent que tout augmente et c'est exactement le but du programme.
M. Ken Battle: Oui, exactement.
Mme Sherri Torjman: Je voudrais vous faire part d'un court commentaire que j'ai apporté avec moi intitulé Histoire/Hystérie. Il s'agit d'un bref compte rendu des changements de base qui se sont produits depuis 1987; on y explique pourquoi le nombre de cas a augmenté. Je vous le présente à simple titre d'information.
M. Ken Battle: Nous allons faire parvenir au président et aux membres du comité un ensemble d'analyses de tendances que nous avons réalisées. Je suis heureux que vous me l'ayez rappelé. Il y a un tas d'informations qui n'ont pas encore été présentées et qui vous donneront une image plus complète du RPC.
Mme Paddy Torsney: Merci.
Le président: Êtes-vous en train de nous dire que des gens qui ont présenté une demande au RPC, disons en 1980, et qui ont vu leur demande rejetée auraient en fait été acceptés s'ils avaient fait une demande en 1990?
Mme Sherri Torjman: Je m'excuse; parlez-vous des prestations d'invalidité?
Le président: Oui.
Mme Sherri Torjman: S'ils avaient fait une demande en 1980, ils auraient bien pu être rejetés en 1990—est-ce bien le sens de votre question?
Le président: Non. S'ils ont été rejetés en 1980 ou durant les années 70...
Mme Sherri Torjman: Absolument. Ils auraient pu être admis en 1990. Tout comme ils auraient pu être admis en 1990, mais rejetés en 1996.
Il y a de sérieux problèmes par rapport à l'admissibilité, et je crois que les efforts d'harmonisation auxquels on assiste présentement permettront d'obtenir une interprétation uniforme de la définition d'invalidité, et ce à travers le pays et dans les différentes juridictions. Je crois que cela permettra de résoudre une partie du problème, qui est admis et qui ne l'est pas, et de resserrer l'interprétation de la définition, ou tout au moins de la rendre plus uniforme.
Le président: Quand on regarde les années 80 et qu'on remet le tout en contexte, on s'aperçoit que notre économie était en pleine restructuration, que ce soit à cause du libre-échange, de la mondialisation des marchés ou des diverses compressions. Je trouve qu'il est plutôt ironique que toutes ces préoccupations en matière d'invalidité soient apparues en même temps.
Mme Sherri Torjman: C'est juste.
Vous soulevez là un point très important concernant l'augmentation du nombre de cas, car en 1989, il y avait une directive ministérielle provenant de Développement des ressources humaines pour que l'interprétation de l'invalidité soit plus large, des facteurs comme l'âge et le taux de chômage de la région pouvaient entrer en ligne de compte. Tout cela a été annulé. Ce n'est plus le cas aujourd'hui, même qu'en 1995, on a émis une directive afin que les cas d'invalidité ne soient plus interprétés de cette façon.
Toutefois, cela étant dit, il faut savoir que la même chose se passait partout à travers le monde. À la même époque, les pays européens ont connu une augmentation semblable du nombre de leurs cas, l'effort intense de restructuration et les problèmes auxquels ont fait face les travailleurs plus âgés sont en grande partie responsables de cette situation.
À ce moment-là, le programme reflétait un grave problème de chômage structurel. D'après ce que je comprends, cette situation a été corrigée.
Mme Paddy Torsney: Juste une petite clarification, vous avez dit que la demande d'une personne présentée en 1980 aurait pu être rejetée, mais qu'elle aurait été acceptée en 1990. Parlez-vous d'une personne ayant un dossier semblable? La même personne n'aurait pas pu faire une demande parce que si elle ne cotisait pas elle n'avait pas droit à une prestation.
Le président: Supposons qu'elle répondait aux exigences.
À cause de l'atmosphère plus généreuse qui prévalait durant les années 80, je suis persuadé qu'il y a des gens qui ont présenté une demande durant les années 70 qui a été rejetée à l'époque, mais qui a été acceptée dans les années 80.
Mme Paddy Torsney: Il fallait cependant qu'ils aient contribué au système.
Le président: Oui. Certaines personnes, croyez-le ou non, retournent au travail lorsqu'elles font face à un refus parce que c'est la seule possibilité qu'il leur reste, si elles ne veulent pas aller à l'aide sociale.
Mme Sherri Torjman: En 1992, un projet de loi d'initiative parlementaire proposant d'enlever la limite pour les inscriptions tardives a été déposé parce que les députés recevaient beaucoup d'appels de la part d'électeurs qui ne connaissaient pas ce régime, qui ne savaient pas qu'ils étaient admissibles et qui avaient dépassé la date limite d'inscription. Cette limite de temps a donc été retirée en 1992. Il est donc possible que quelqu'un—pas en 1990, mais en 1993—se soit retrouvé parmi les cas traités grâce à cette mesure et comme vous l'avez constaté, il y a eu une importante augmentation du nombre de cas en 1992 et en 1993.
Le président: J'ai soulevé ce point car je crois qu'il faut tenir compte du contexte historique. Que s'est-il passé durant ces années? Pourquoi cette recrudescence subite? Ce n'est sûrement pas parce que les gens sont devenus invalides du jour au lendemain. Je veux dire, c'est impensable.
Mme Sherri Torjman: Tout à fait. Absolument. C'est aussi ce que nous pensons, il faut examiner le programme dans son cadre historique, tenir compte du niveau de chômage et des changements législatifs. Cela aide à mieux comprendre ce qui se passait dans le programme.
Le président: M. Battle et Mme Torjman, votre présentation a été très intéressante. Au nom du comité, j'aimerais vous remercier.
Mme Sherri Torjman: Je vous remercie de nous avoir accordé votre temps.
Le président: Aussi, si nous obtenons les documents que vous avez demandés, nous vous les ferons parvenir demain ou après-demain.
Merci beaucoup.
Je suspends les travaux pour environ cinq minutes.
Le président: Le comité poursuit ses travaux. J'aimerais souhaiter la bienvenue à M. Herbert Emery du département de l'économie de l'Université de Calgary, et à M. Garth White et M. Ted Mallett de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante.
Messieurs, vous connaissez la façon de fonctionner du comité. Vous aurez environ 10 minutes pour faire un exposé, donner les principaux points, puis il y aura une période de questions. Nous commencerons par M. Emery.
M. J.C. Herbert Emery (département d'économie, Université de Calgary): Merci et bonjour. C'est un honneur d'avoir la possibilité de me présenter devant le comité aujourd'hui et j'ai été très impressionné par les mémoires jusqu'à maintenant. Beaucoup d'excellents renseignements sont fournis. Je m'attendais un peu à ce qu'il y ait beaucoup de bonnes présentations.
J'aimerais présenter un autre point de vue qui n'a pas encore été mentionné au Canada jusqu'à maintenant en ce qui concerne le Régime de pensions du Canada. Je vais relever le difficile défi de défendre le système actuel de financement par répartition du Régime de pensions du Canada, qui pourrait faire augmenter les taux d'imposition au titre du régime de 14 p. 100 d'ici l'an 2030 par rapport aux initiatives de capitalisation anticipée du projet de loi C-2. Ce n'est pas facile étant donné que beaucoup de gens croient au financement préalable et croient que c'est la réponse. Ce que j'aimerais faire, c'est de démontrer que le système de financement par répartition n'est peut-être pas si mal par rapport aux autres formes de capitalisation anticipée.
De toute évidence, les politiques ainsi que les solutions aux problèmes économiques et sociaux que proposent les gouvernements ne peuvent pas être parfaites. Lorsqu'on évalue un texte qui modifie la politique en vigueur, comme le projet de loi C-2, il ne faut pas le rejeter ni l'accepter en prétendant ou en niant que ce soit la solution idéale, mais après avoir déterminé, si c'est, ou non, une amélioration par rapport à ce qui existe à l'heure actuelle. Comme je vais l'expliquer, le projet de loi C-2, qui va accélérer à court terme l'augmentation des taux d'imposition du Régime de pensions du Canada, mais qui maintiendra à long terme ces taux à un niveau moins élevé que si l'on conserve le système actuel de financement par répartition, ne représente pas une amélioration par rapport au système de financement par répartition qui existe actuellement. Il se peut même que le projet de loi C-2 empire les choses.
Les modifications énoncées dans le projet de loi C-2 ont été conçues dans le but d'atteindre plusieurs objectifs, mais en consultant les médias et en me fiant à d'autres présentations, les deux que j'estime les plus importants sont que nous voulons rendre le Régime de pensions du Canada financièrement viable en créant un fonds de réserve plus conséquent, et que nous voulons améliorer le Régime de pensions du Canada au plan de l'équité entre les générations en faisant en sorte que les générations actuelles financent une plus large part du coût de leurs propres prestations au titre du Régime de pensions du Canada.
Le projet de loi C-2 n'atteint aucun de ces objectifs. Les modifications qu'il présente ne rendent pas le Régime de pensions du Canada plus viable financièrement qu'un système de financement par répartition. De plus, l'augmentation accélérée des taux d'imposition reflète une politique fiscale régressive au plan de l'équité entre les générations, et non progressive, comme voudraient nous le laisser croire les auteurs du projet de loi C-2.
Lorsque le Régime de pensions du Canada a été instauré au début des années 60, les responsables de l'élaboration des politiques et les groupes d'intervention de droite comme de gauche savaient très bien qu'on n'a pas besoin d'un fonds de réserve pour assurer la solvabilité ou la viabilité financière d'un régime financé par répartition. En dépit de son nom, le Régime de pensions du Canada n'est en réalité qu'un mécanisme de transfert fiscal assorti impérativement d'un budget équilibré, mécanisme que nous utilisons pour répartir les revenus entre les Canadiens retraités et non retraités.
En bout de ligne, la solvabilité du régime est garantie par les Canadiens qui font partie de la population active et qui acceptent de payer les impôts nécessaires au versement des prestations promises. Pour cette raison, vous n'avez pas besoin d'un fonds d'investissement comme celui proposé dans le projet de loi C-2 étant donné que le système actuel, s'il monte à 14 p. 100, est en soi financièrement viable. Les mesures du projet de loi C-2 qui visent la capitalisation anticipée financent les mêmes prestations versées aux Canadiens retraités, les deux régimes sont solvables et il n'y en a pas un qui est meilleur que l'autre pour assurer la solvabilité du fonds.
Le mécanisme de capitalisation anticipée vise vraiment à assurer la viabilité du Régime de pensions du Canada au niveau politique. Un gouvernement peut toujours faire jouer son pouvoir de coercition pour que le budget d'un régime financé par répartition soit équilibré par rapport aux prestations que l'on a promis de verser à un moment donné plus tard, mais un gouvernement n'aime pas en général agir de la sorte.
Le problème qui se pose aujourd'hui à propos du Régime de pensions du Canada c'est que nous ne pouvons pas déterminer ce que seront les prestations à l'avenir. C'est la future génération de Canadiens qui en décidera. Ils évalueront le coût du programme, ce qu'ils estiment qu'ils peuvent se permettre, ce qu'ils sont prêts à payer. Étant donné que dans le cas du système de financement par répartition le taux des cotisations versées au Régime de pensions du Canada augmente, on craint que les Canadiens décideront que le régime est trop dispendieux, et qu'ils commenceront à réduire la valeur des prestations ou à voter l'abolition du régime. Avec la capitalisation anticipée, on pense que les futures générations de Canadiens trouveront plus gênant de réduire la valeur des prestations, étant persuadées que leurs aînés les auront payées d'avance.
En ce sens, la capitalisation anticipée proposée dans le projet de loi C-2 est essentiellement une initiative destinée à donner à la présente génération de Canadiens plus d'influence sur la valeur des prestations qui seront versées à l'avenir. Toutefois, on devrait informer les Canadiens que même si on opte pour cette capitalisation anticipée, le gouvernement du jour ne peut pas garantir les prestations actuellement promises. Ce seront les futures générations de Canadiens qui décideront.
• 1110
Si le projet de loi C-2 ne peut pas servir à régler un
problème financier qui n'existe pas techniquement, apporte-t-il des
modifications souhaitables sur le plan de l'équité entre les
générations? Comme c'est le cas dans le cadre de tous les régimes
de pensions du secteur privé, les Canadiens qui ont jusqu'ici perçu
du Régime de pensions du Canada ont reçu davantage qu'ils ont
contribué en cotisations pendant leur vie active.
À l'heure où augmente le coût que représente pour la population active un Régime de pensions du Canada financé par répartition, on remet en question la générosité d'un tel système en disant qu'il ne respecte pas le principe de l'équité entre les générations, ou, comme on le dit parfois, qu'il représente le résultat répréhensible d'une machination digne de Ponzi.
Jusqu'ici, les retraités canadiens n'ont pas payé une juste part de leurs pensions. La notion d'équité sur laquelle reposent les initiatives énoncées dans le projet de loi C-2 est que le régime ne peut être juste que si les Canadiens paient leur juste part. Afin d'assurer l'équité entre les générations, les initiatives de capitalisation anticipée énoncées dans le projet de loi C-2 feront en sorte que la génération de Canadiens qui constitue à l'heure actuelle la population active paie davantage pour éviter aux futures générations d'avoir à assumer le fardeau que représentent les prestations de retraite des baby-boomers. L'impression que nous en retirons, c'est que ce n'est que justice.
Évaluer l'équité entre les générations est une tâche complexe. Maintenant, on nous demande de passer des jugements normatifs en évaluant quel bien-être est plus important: celui des générations futures ou celui de la génération actuelle. Se fonder sur le critère selon lequel il faut payer sa juste part n'est qu'une des façons légitimes de faire cette évaluation, mais ce n'est pas le seul critère, et ce n'est pas non plus celui qui vient en premier à l'esprit.
Pour mieux me faire comprendre, permettez-moi de mentionner un autre critère communément utilisé pour évaluer l'équité, soit que les Canadiens qui sont les plus capables de payer devraient assumer un fardeau plus lourd. Ne vous méprenez pas, je ne dis pas que cela devrait être le seul critère; je veux tout simplement mentionner une autre possibilité. J'y fais donc allusion parce que c'est un critère qui a déjà été utilisé pour justifier d'autres régimes fiscaux progressifs appliqués au Canada.
La capitalisation anticipée des prestations du Régime de pensions du Canada requiert une augmentation accélérée des taux d'imposition liés au Régime de pensions du Canada afin de constituer un fonds de placement. Si les taux d'imposition entre 1997 et 2015 sont plus élevés que dans le cas du système par répartition d'un régime dont le budget doit être équilibré, cela a l'avantage d'aboutir à des taux d'imposition liés au Régime de pensions du Canada moins élevés après 2015 par rapport au système en vigueur.
Par conséquent, la principale modification dans le cas du projet de loi C-2 est le nivellement progressif du barème d'imposition. Rappelez-vous que les deux barèmes financent les mêmes prestations. Donc, la seule différence est de savoir à quel moment nous voulons l'impôt, maintenant ou plus tard.
Est-ce que le barème d'imposition qui découlerait des dispositions du projet de loi C-2 est plus respectueux du principe d'équité entre les générations que celui qui est lié au système de financement par répartition actuellement en vigueur?
N'oubliez pas que même si au Canada la croissance du revenu réel de 1 p. 100 par an est la plus faible jamais connue, d'ici 2030, ce revenu réel moyen aura augmenté de 50 p. 100. Même si l'on prend en compte une augmentation de 10 p. 100 des impôts totaux versés, le revenu réel après impôt sera sensiblement plus élevé à l'avenir.
N'oubliez pas non plus qu'en toute probabilité, la croissance réelle des salaires ira s'accélérant au fur et à mesure que les baby-boomers prennent leur retraite et qu'elle ne restera pas aussi médiocre qu'elle l'est actuellement.
En toute probabilité, le revenu réel au Canada sera de 50 p. 100 plus élevé qu'il ne l'est aujourd'hui. Même si les taux d'imposition sont plus élevés à l'avenir, la capacité de payer aura aussi augmenté.
Si on conserve le système de financement par répartition en vigueur actuellement, on appliquera aux futures générations de Canadiens, qui auront de plus gros revenus, un taux d'imposition plus élevé que celui qui s'applique à la présente génération dont les revenus sont plus bas. Si on accélère l'augmentation des taux d'imposition dans le cas d'un système de capitalisation anticipée, on va réduire le fardeau fiscal des futures générations des Canadiens, dont les revenus seront plus élevés, et on va accroître le fardeau fiscal de la présente génération, dont les revenus sont plus bas.
Autrement dit, même si les modifications apportées dans le projet de loi C-2 qui se fondent sur le critère de la juste part peuvent sembler être justes au plan de l'équité entre les générations, si on se fonde sur un autre critère reconnu, que ceux qui ont la plus grande capacité de payer devraient payer davantage, ces modifications font régresser une génération par rapport à une autre, et par conséquent respectent moins bien l'équité entre les générations.
Permettez-moi d'exprimer une autre réserve à propos de la capitalisation anticipée des prestations du Régime de pensions du Canada. Même si vous n'acceptez pas l'argument précédent et que vous pensez que je ne fais que jouer avec les mots, demandez-vous si nous pouvons retirer de la capitalisation anticipée des allégements fiscaux.
Jusqu'ici, nous n'avons eu que des descriptions générales d'un fonds d'investissement autonome, mais aucune modalité particulière. Mais les modalités particulières auront leur importance dans ce cas. En particulier, la seule initiative qui permette d'espérer que la capitalisation anticipée se traduise par des allégements fiscaux est le placement du fonds dans des actifs de production qui génèrent un rendement réel pour la société. Autrement dit, il nous faut un produit national plus élevé que l'on pourra répartir entre les Canadiens retraités et non retraités, ou des droits sur la production future d'un autre pays.
Si nous investissons dans des obligations de l'État, nous ne faisons qu'échanger des taux d'imposition au titre du Régime de pensions du Canada plus élevés contre les impôts fédéraux et provinciaux sur le revenu ou à la consommation plus élevés de sorte qu'il n'y a aucun allégement fiscal réel à faire ce genre de placement.
Si le fonds de placement du RPC est investi sur les marchés de valeurs mobilières, quel sera l'impact d'un fonds d'une telle magnitude sur la Bourse de Toronto? Allons-nous nous en tenir à l'exigence de 20 p. 100 de contenu canadien? Est-ce que le gouvernement présume que l'introduction d'un fonds de la magnitude du fonds de réserve du RPC sur les marchés des capitaux ne réduira pas les taux de rendement effectifs? Le fonds accumulé représente-t-il une augmentation de l'épargne canadienne globale, ou accapare-t-il simplement l'épargne privée pour accroître celle du Régime de pensions du Canada?
• 1115
Une autre question laissée en suspens par le projet de loi C-2
est de savoir pourquoi le gouvernement doit accumuler un fonds de
placement centralisé. Pourquoi ne pas conserver le mode de
financement par répartition, prévenir les Canadiens que leurs
impôts pourraient être augmentés à l'avenir pour financer les
prestations actuellement promises, mais leur permettre de conserver
une plus grande part de leur argent dans l'immédiat pour qu'ils
puissent économiser et investir à leur guise? Pourquoi est-ce que
le gouvernement doit gérer l'argent des Canadiens?
Le problème majeur que soulève le projet de loi C-2 est peut-être qu'il reflète une politique qui aboutit à bloquer une discussion plus fondamentale. Si la question des revenus de retraite des générations futures de Canadiens nous préoccupe, quelle est la meilleure façon de les garantir?
Nous ne devrions pas nous occuper uniquement du Régime de pensions du Canada en nous demandant comment en financer les prestations, ce que nous ne pouvons pas garantir de toute façon. Nous devrions plutôt examiner le rôle que joue le Régime de pensions du Canada dans le cadre du système tout entier, qui comprend l'épargne personnelle des Canadiens; les régimes de pensions privés; la Sécurité de la vieillesse, le Supplément de revenu garanti et les régimes enregistrés d'épargne-retraite.
Si la question des revenus de retraite est une préoccupation, il faut la régler dans le cadre d'une politique intégrée, et non en s'intéressant uniquement à un instrument particulier. Si nous rejetons le projet de loi C-2 sur cette base, la décision ne s'avérera pas coûteuse puisque les dispositions du projet de loi C-2 n'amélioreront en rien la situation actuelle.
Enfin, il faut bien dire que même si nous rejetons le projet de loi C-2, nous avons et nous aurons toujours le Régime de pensions du Canada.
Merci.
Le président: Merci Monsieur Emery. Monsieur White.
M. Garth White (vice-président, Affaires nationales, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante): Merci, monsieur le président.
Mon collègue, Ted Mallet, est directeur de la recherche à la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Nous aimerions remercier le comité de nous avoir invités à comparaître devant vous aujourd'hui.
Bien franchement, nous avons été préoccupés par la menace d'une grève postale—aujourd'hui, hier et demain—et nous avons travaillé très fort sur cette question. Je manquerais à mon devoir de ne pas le mentionner. C'est une question qui a des répercussions sur un grand nombre d'entreprises partout au pays. Je serais certainement prêt à parler de ce sujet avec les gens après coup.
Nous n'avons pas demandé à comparaître devant le comité parce qu'essentiellement nous croyons que c'est chose faite. Nous croyons que c'est chose faite parce que les provinces et le gouvernement fédéral l'ont signé. Il n'y a pas grand rafistolage qui peut se faire sans retourner là.
Ceci étant dit, nous voulons nous concentrer sur deux questions, très importantes questions, dont on devrait tenir compte... sur lesquelles ce projet de loi aura une incidence ou qui peuvent se rapporter aux répercussions du projet de loi. Je pense que le comité peut y répondre.
D'abord, le comité peut recommander que le gouvernement mette sur pied un plan en vue d'une importante réforme des pensions. Comme on l'a mentionné plus tôt, le RPC n'est qu'une partie d'un grand processus. Je suis d'accord avec M. Emery qui dit que le gouvernement présume de ce que devrait être le RPC à l'avenir. En même temps, les Canadiens demeurent incertains de ce dont ils ont besoin ou de la façon de parvenir à planifier leur propre avenir.
Nous faisons partie de la Retirement Income Coalition qui compte plus de 20 groupes différents qui essaient de travailler avec le gouvernement à la planification des revenus de pension dans le cadre d'un régime qui porte sur vos propres économies, les pensions privées, le RPC et le système fiscal—et évidemment les prestations aux aînés.
Il y a donc bien des choses pour lesquelles nous aimerions obtenir une réponse. Je pense que le comité devrait au moins dire bon, gouvernement nous en avons maintenant fini du Régime de pensions du Canada et nous devrions examiner toute la question des revenus de pensions.
Ensuite, nous devons nous occuper des augmentations des primes. Il va y avoir des retombées. Vous n'entendrez peut-être pas les lamentations maintenant, mais l'année prochaine, lorsque les gens sauront de combien les primes vont augmenter, ils vont commencer à comprendre soudainement ce que les gens qui comparaissent devant vous disent. Nous pensons qu'il y a une façon pour vous d'annuler ces augmentations—nous l'avons déjà dit et nous allons continuer de le répéter—et c'est en réduisant les primes d'A-E pour annuler les augmentations du RPC.
Je me référerai au document que vous avez devant vous. C'est un recueil de documents que nous avons déjà préparé. Ce n'est pas une déclaration, mais un recueil. Il contient cinq documents dont l'un est la lettre que nous avons envoyée en juin 1996 à M. Walker, le président chargé du comité d'examen du RPC.
Le deuxième est notre sondage et document d'information que nous avons envoyé à 87 000 membres. Nous disons 88 000, mais nous avons présentement plus de membres que nous en avions alors.
Le troisième est de nouveaux renseignements que nous avons recueillis, d'après 10 000 réponses obtenues, sur les priorités de la part du secteur des petites entreprises pour leur planification de retraite.
• 1120
Dans le quatrième, nous parlons de nos augmentations des
primes liées au RPC et de notre recherche à ce sujet et des
répercussions.
Le cinquième est un document qui a été présenté à M. Martin la semaine dernière sur la réduction des primes d'A-E. Nous fournissons quelques stratégies à cet effet.
J'aimerais revenir au deuxième document, tout simplement pour expliquer ce que nous avons fait et ce que nous disons ici.
La deuxième partie porte sur notre sondage et le document d'information. Nous avons envoyé un sondage de quatre pages à nos membres et un document d'information de quatre pages qui expliquait le livre blanc de 60 pages. Nous travaillons en collaboration avec le ministère des Finances et Développement des ressources humaines. Ils l'ont approuvé et nous l'avons envoyé à nos membres. Tout le mérite revient à Ted pour avoir assemblé tout cela et mettre de l'ordre dans ces renseignements afin qu'ils puissent faire des choix.
Dans le sondage, nous leur avons demandé ce qu'ils pensaient de l'ampleur de l'augmentation des primes, du taux d'augmentation, s'il devrait être modéré ou s'il devrait se faire plus rapidement. Nous leur avons posé des questions au sujet des prestations, et demandé de répartir les prestations et de les relier aux primes. Nous abordons la question des sources de revenu pour le RPC et nous parlons de ce qui concerne les prestations du régime.
Nous leur avons également demandé ce qu'ils pensaient d'un super RER. Nous l'avons fait valider par le Parti réformiste et nous avons demandé à nos membres s'ils appuyaient ce genre de régime.
J'apporte cette information à la table à la demande du comité et je la relie aux deux aspects dont nous parlons. L'un est l'augmentation des primes, mais c'est d'abord dans le cadre d'une stratégie globale des pensions de retraite.
Nous avons formulé 10 principes découlant de ce sondage. Je devrais dire que nous y avons mis fin après 6 semaines et que nous avons obtenu 9 000 réponses de propriétaires d'entreprises de partout au pays. C'est donc basé sur 9 000 réponses. C'était des réponses assez réfléchies... en ce sens qu'ils ont lu le document d'information et le sondage.
Le premier énoncé est que nos membres appuient l'actuel Régime de pensions du Canada, le RPC. Ils l'appuient. Ils sont d'accord qu'il devrait être protégé. En même temps, ils ont aussi dit que vous devez améliorer le rendement des investissements du RPC; les rendements actuels sont atroces et ce sont eux qui nous mettent d'abord dans cette position.
Nous avons également dit que vous devez améliorer l'imputabilité publique du RPC. C'est incroyable, jusqu'à l'année dernière, les Canadiens n'étaient pas informés de la crise imminente à laquelle fait face maintenant le Régime de pensions du Canada, qui touche à toutes fins pratiques tout le monde. On devrait mettre sur pied officiellement une bien meilleure imputabilité publique de la situation et du rendement du régime afin de s'assurer que la situation actuelle ne se répète pas.
Vous devez mettre en place des mécanismes qui permettront une supervision actuarielle indépendante, des placements prudents et une plus grande discipline en ce qui concerne la répartition des prestations. Nous recommandons fortement et nous appuyons toute proposition qui permettrait l'adoption d'une loi pour exiger que toute nouvelle prestation proposée fasse l'objet de l'examen le plus minutieux afin de s'assurer que le système peut se le permettre.
Un autre principe était d'agir maintenant. Il s'agit d'une patate chaude politique et nous avons dit qu'il fallait s'en occuper. Ce document a été envoyé au Premier ministre du Canada et aux premiers ministres des provinces. Nous avons dit qu'il fallait éviter de choisir la solution facile de reporter les mesures d'une autre année, et de s'attaquer tout de suite à la question.
J'aimerais qu'on examine les nouveaux renseignements présentés au milieu du mémoire, sur la recherche actuelle sur les priorités de la planification de retraite des PME. Nous avons demandé à nos membres, et nous continuons de leur demander, de quoi ils dépendaient pour l'avenir de leur retraite. Nous sommes inquiets que les gouvernements, provinciaux et fédéral, diront que le RPC est réglé et qu'ils n'ont plus rien à faire avec la question de la retraite.
Aussi, nous avons entendu dire que les RER, par exemple, sont perçus comme n'étant conçus que pour les riches. Nous avons demandé à nos membres quelle était l'importance des RER, et 92 p. 100 d'entre eux ont dit que les RER sont importants ou très importants en ce qui concerne leur plan de retraite. L'exemption pour gains en capital est très importante. La valeur sur le marché de leur entreprise et les bénéfices non répartis dans le régime fiscal sont très importants; et 77 p. 100 ont dit que le RPC était important. Ils considèrent donc ces véhicules, mais ils les considèrent dans leur totalité, pas seulement comme RPC.
Comment est-ce que le RPC fait le lien avec les RER? Nous vous l'avons dit il y a deux semaines. D'une part, nous parlons du Régime de pensions du Canada comme d'une question liée aux pensions et nous disons que les gens doivent se préparer en vue de leur pension, puis nous parlons des RER comme d'une question liée au budget. On doit imposer une limite aux RER, et c'est une question de nature fiscale. Nous ne pouvons pas jouer sur les deux tableaux. Nous devons permettre aux gens de planifier leur avenir. Nous ne pouvons pas tout simplement considérer les REER comme une dépense fiscale. Ils doivent faire partie de la principale planche de la planification des gens pour leur propre retraite.
• 1125
Donc si le RPC n'est pas pour survivre, en particulier auprès
de la plus jeune génération—s'ils estiment qu'ils ne retirent pas
un rendement aussi bon qu'ils devraient du RPC, qui est un
sentiment tout à fait naturel à avoir—ils devraient au moins
pouvoir investir dans des REER.
Je vais passer rapidement sur la question des coûts et je suppose que vous savez tout ce qui est dit à ce sujet, donc je vais le faire rapidement. Dans notre étude, nous avons examiné cet aspect. Nous l'avons fait avant de connaître la répartition réelle sur la façon que vous vouliez répartir les coûts du RPC au cours d'une période de six années.
Nos membres ont répondu oui à notre sondage, ils se sont rendu compte qu'il y aurait un mélange de prestations réduites et de primes augmentées. Il y avait égalité sur la vitesse à laquelle ça devrait être fait: 45 p. 100 ont dit que ça devrait être fait au fil du temps et 45 p. 100 ont dit que ça devrait être fait très rapidement, mais notre scénario rapide portait sur six à neuf années; ce n'était pas six années. Nous leur avons alors demandé quel niveau est acceptable, et nous avons découvert que c'était entre 7 et 8 p. 100, et non entre 9 et 10 p. 100. Nous avons en fait indiqué dans notre ancienne lettre qu'à 9 ou 10 p. 100, il y aura des répercussions significatives sur le milieu des affaires et leurs employés et qu'il fera du tort à la création d'emplois.
Notre préoccupation est donc de savoir quoi faire. Les primes augmentent l'an prochain, probablement plus de 66¢ l'an prochain. C'est passablement élevé. Beaucoup vont dire que le fait d'abaisser les charges sociales ne créera pas d'emplois, mais tout le monde est d'accord pour dire qu'une augmentation des charges sociales nuit aux emplois. Chaque année, nous demandons à nos membres ce qu'il leur faudrait pour créer plus d'emplois—et on les considère comme des créateurs d'emplois—et ils disent une augmentation des dépenses à la consommation et une diminution des charges sociales. Eh bien, ce que nous faisons dans ce projet de loi, c'est augmenter une charge sociale.
Dans notre mémoire et dans cette étude, nous indiquons qu'au cours de la même période, une entreprise comptant 10 employés subira des augmentations d'environ 7 000 $ des primes du RPC. Ça va faire mal.
Que suggérons-nous? À la dernière page, ce que nous avons présenté au ministre Paul Martin, c'est de faire le lien entre des augmentations du RPC et des diminutions de l'A-E. Il y a une possibilité de précisément faire cela. Dès maintenant, à la fin de l'année, l'excédent au chapitre de l'assurance-emploi sera de 12 milliards de dollars. S'il est maintenu au taux de 2,80 $, il augmentera à 20 milliards de dollars. Nous parlons donc d'argent qui n'est plus dans le régime—jusqu'à 20 milliards de dollars—et pendant ce temps nous augmentons les primes de 60 à 80¢. C'est nécessaire. Vous pouvez les annuler, et c'est ce que le comité devrait recommander.
Ça tombe bien, parce que comme pour la grève du service postal, la décision sera prise ce mois-ci ou en décembre. Donc c'est le temps d'établir le lien entre eux. Les premiers ministres étaient d'accord avec cette observation. Ils se sont prononcés lors de leur conférence et l'ont acceptée. Il s'agit d'une option qui ne nuit pas au fisc, qui ne nuit pas au programme et qui ne réduira pas les excédents. Vous pouvez en réalité accumuler l'excédent à un taux de 2,20 $ jusqu'à concurrence de 15 milliards de dollars ou de 16 milliards de dollars. Et si vous ne savez pas cela, ou que vous n'y croyez pas, veuillez demander à l'actuaire les données. Votre comité peut poser les questions relativement à ces données.
Si c'est le cas, notre question pour le comité et le ministre des Finances est de savoir à quel niveau est-ce que l'excédent au chapitre de l'A-E sera suffisant? Est-ce qu'il est de 12 milliards de dollars, de 15 milliards de dollars, de 20 milliards de dollars, de 25 milliards de dollars? En particulier au moment où les taux du RPC augmentent aussi rapidement et radicalement qu'ils vont augmenter...
Nous en faisons une déclaration officielle maintenant parce qu'il va venir un moment l'année prochaine où les gens examineront leur talon de chèque et se rendront compte qu'ils obtiennent moins en janvier qu'ils n'obtenaient en décembre, et les gens commenceront à comprendre ce que signifient ces augmentations. Il y a une possibilité d'annuler ces augmentations avec des primes moins importantes d'A-E.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci beaucoup, monsieur White.
Nous allons maintenant passer à la période des questions, et nous commencerons par Mme Ablonczy.
Mme Diane Ablonczy: J'ai quatre tours n'est-ce pas, étant donné que je suis seule ici?
Le président: Oui, tout à fait.
Mme Diane Ablonczy: Je vous suis reconnaissante messieurs d'être venus et de nous avoir fait part de votre expertise.
Tout d'abord, pour M. Emery, votre approche de cette question nous intéresse tous beaucoup. Évidemment, c'est la première fois, comme vous le savez sans doute, qu'un témoin nous suggère de tout simplement continuer avec le régime dans son état actuel. Le régime, comme vous le faites remarquer, est en fait une approche pyramidale dans laquelle les gens au sommet font tout un coup d'argent financé par les cotisations continues des gens à la base. Ce que vous faites, c'est de suggérer de tout simplement garder cette opération pyramidale.
• 1130
Pourquoi proposeriez-vous de soutenir ce qui n'est rien
d'autre qu'une opération pyramidale, ce qui est illégal pour des
raisons évidentes? Si votre analyse est correcte, et nous supposons
qu'elle l'est, alors pourquoi est-ce que le ministre des Finances
et le gouvernement procèdent à ces modifications? Pourquoi est-ce
que ce fonds est en train d'être créé? Vous avez soulevé certaines
bonnes questions au sujet du fonds, mais je me pose tout simplement
des questions relativement à votre analyse pour savoir quelles
autres raisons il pourrait y avoir. Si vous dites que les raisons
apparentes de rendre le fonds financièrement viable et équitable
entre les générations ne sont vraiment pas valables, alors quelles
autres raisons pourrait-il y avoir?
M. Herbert Emery: Permettez-moi d'essayer de les garder simples. La première au sujet de la machination de Ponzi est intéressante. Techniquement, les machinations de Ponzi sont illégales, mais vous devez vous rappeler ce que je recommande. Je ne dis pas que la méthode de financement par répartition n'est pas en soi la solution, mais est-ce que nous apportons une modification positive en passant à la capitalisation anticipée par rapport à la machination de Ponzi que nous avons actuellement? La réponse est non.
Cela ne veut pas dire que je n'appuierais pas quelque chose qui ressemblerait davantage à un régime privatisé ou même à l'élimination graduelle du Régime de pensions du Canada, mais ce ne sont pas des options que nous avons envisagées. On m'a demandé, lorsque j'ai comparu devant le comité, de dire ce que je pensais du projet de loi C-2. Veuillez donc inscrire mes observations par rapport à la question de savoir si le projet de loi C-2 est mieux que ce que nous avons maintenant. Je ne le pense pas.
J'aimerais me pencher sur l'aspect de la machination de Ponzi. C'est une formulation intéressante qui, je crois, a été attribuée à Bill Robson, qui élaborait sur des notions de Paul Samuelson et d'autres personnes comme lui. Mais au moment où ce régime a été créé, on savait tous que la seule façon que les gens sur le point de prendre leur retraite pouvaient tirer profit d'une économie en croissance était en quelque sorte de relier leurs propres revenus aux revenus des gens qui travaillaient encore. Par conséquent, la redistribution entre les générations n'était pas considérée comme étant injuste à ce moment-là, même s'il s'agissait de toute évidence d'un transfert fiscal progressif par lequel vous prenez des Canadiens qui travaillent et qui ont des revenus plus élevés et vous transférez ces montants aux personnes âgées dont le revenu est moins élevé.
Maintenant, le coût lié à ce scénario a augmenté considérablement. Pendant des années nous avons dit que c'est bien de répartir le revenu entre les gens aux revenus élevés et ceux aux revenus faibles. Maintenant, tout d'un coup, avec la diminution de l'assiette fiscale proportionnelle à la croissance des prestations, les gens disent que c'est tout simplement trop dispendieux à garder.
Le fait de mentionner qu'il s'agit d'une machination de Ponzi rend tout simplement possible sur le plan politique de commencer à attaquer le régime actuel, mais vous pourriez y faire référence de nombreuses façons comme d'une machination de Ponzi, ou vous pourriez l'appeler un mécanisme de transfert fiscal progressif. Ça dépend probablement de savoir si vous essayez de défendre ce programme ou de le défaire. Malheureusement, lorsque vous essayez de défendre le mécanisme de financement par répartition par rapport aux modifications introduites par le projet de loi C-2, on perd aussitôt de vue ce qui surviendra au projet de loi C-2.
Pourquoi est-ce que le gouvernement essaie d'accumuler un fonds? C'est une très bonne question. Nous avons été témoins d'un grand nombre de fonds qui ont été expropriés par les gouvernements, versés aux recettes générales et utilisés à des fins autres que le programme. Je crois qu'on suggère que l'excédent de l'A-E peut tout simplement avoir été caché dans les recettes générales, et non utilisé à l'égard du système d'A-E. Soit dit en passant, je continue de penser qu'il est malheureux que nous assurions maintenant les gens contre l'emploi au Canada; j'aurais préféré voir de l'assurance-chômage. Mais une des grandes menaces découlant de tout ceci a toujours été que les gouvernements ne le considèrent tout simplement que comme une source de financement déficitaire. Par conséquent, les initiatives indépendantes ne sont pas apparues à l'origine au moment où le gouvernement fédéral se présentait aux tables rondes. Il semble que ce soit quelque chose de nouveau qui s'est développé au cours de la dernière année.
De façon générale, c'est une bonne idée si ce mécanisme peut agir rapidement et s'occuper des craintes et préoccupations des gens à l'effet que le Régime de pensions du Canada a un problème; mais de bien des façons, le gouvernement fédéral, par l'intermédiaire des médias, a favorisé cette crise. Il s'agit d'une crise d'hypothèses. Il doit agir maintenant parce qu'il s'est mis lui-même dans un coin et que le projet de loi C-2 est une solution miracle, et non la solution à long terme.
Mme Diane Ablonczy: Je voudrais tout simplement préciser quelque chose d'autre à ce sujet. Vous dites que c'est une solution miracle, et non une solution à long terme; mais vous avez dit plutôt dans la réponse que vous m'avez donnée au sujet des autres options pour améliorer le régime ou obtenir de meilleurs rendements de pension pour les Canadiens. Je me demande si vous pouvez élaborer. Qu'est-ce qui ne serait pas une solution miracle?
M. Herbert Emery: Il n'y a pas de solution facile à ce problème. Pour l'essentiel, nous sommes en présence d'un régime qui est devenu très onéreux pour les travailleurs canadiens. Lorsque vous considérez une accélération de 9,9 p. 100 de l'accroissement des charges sociales au cours des cinq prochaines années, cela signifie que vous irez chercher des sommes importantes dans la poche des gens. Ce sera douloureux. Un régime de retraite par répartition, dont les taux seront à leur plus haut niveau en 2030, sera douloureux pour les Canadiens dans le futur, mais présentement, ce fardeau est en quelque sorte épargné aux gens. La notion qui favorise l'accélération se fonde sur l'idée qu'il est «plus équitable» de porter le coup aujourd'hui et de ne pas le porter demain, il y a donc confusion sur ce point.
• 1135
Vous pouvez considérer la capitalisation anticipée comme un
premier empiétement. Une fois la capitalisation anticipée acceptée,
il est très facile de passer au régime privé. Jim Pesando a exposé
cette théorie dans un document préparé pour l'Institut C.D. Howe.
Vous pouvez réaliser cela avec des charges sociales de 9,9 p. 100,
comme ce qui est projeté maintenant, et attribuer 4,76 p. 100 pour
les prestations au titre d'un REER, 2,24 p. 100 pour les
prestations de décès et d'invalidité du RPC et 2,9 p. 100 pour le
passif non capitalisé. C'est une voie très facile pour s'orienter
vers un régime privé parce que le passif non capitalisé est amorti
avec le temps et est récupéré à même le régime fiscal que vous
introduisez.
Donc, si nous allons de l'avant avec le projet de loi C-2, je ne serais pas surpris que nous nous retrouvions ici dans un an ou deux pour exiger soudainement de nous orienter vers un régime privé parce que nous pouvons le gérer à l'aide du même mode de financement. Le gouvernement fédéral, en adoptant la solution rapide—qui consiste uniquement à faire grimper les taux pour que tout le monde croie qu'il s'agit de quelque chose de sécuritaire— pendant tout ce temps-là n'affirme pas clairement qu'il ne peut garantir ces prestations dans le futur parce qu'il ne s'agit pas vraiment d'un régime d'épargne, ce qui pourrait le placer dans un véritable guêpier, ce à quoi il n'est pas préparé.
Mme Diane Ablonczy: Eh bien, ne leur dites pas cela.
Je n'ai qu'une brève question, monsieur le président, pour M. White et pour M. Mallet. On a laissé entendre que lorsqu'on augmente les charges sociales des employeurs comme les cotisations au Régime de pensions du Canada, tôt ou tard, ces charges sont refilées aux employés. Je me demande quel est votre point de vue à titre d'employeurs.
M. Garth White: C'est vrai en théorie, mais cela ne se produit pas réellement. Bon nombre de nos membres, 50 p. 100 d'entre eux, peuvent connaître une année sans profits, mais ce qui les tue et leur fait vraiment mal, spécialement au cours de la dernière récession, ce sont les taxes avant profits que sont les taxes municipales, les taxes d'affaires et la longue liste des charges sociales comme les primes pour les accidents du travail, les charges sociales dans certaines provinces, les primes d'assurance-emploi et les primes du RPC. La liste est sans fin. Et il est très difficile de les répercuter sur les employés.
Aussi, cela s'ajoute aux coûts d'embauche si en plus des avantages...dans certaines entreprises cela ajoute jusqu'à 20 p. 100 et 30 p. 100. Ce sont des frais qui s'ajoutent à l'embauche et, s'il existe une solution de rechange, elles n'embaucheront pas. C'est une barrière pour se lancer en affaires.
Comme l'a fait ressortir l'étude de l'OCDE sur l'emploi, des charges sociales élevées et des législations du travail très rigoureuses sont les deux facteurs qui freinent la création d'emplois. En fait, le gouvernement actuel et le Parti réformiste... ils reconnaissent tous cela. Ils l'ont dit. Il n'y a maintenant que le RPC qui n'est pas vraiment reconnu comme une charge sociale en soi, mais c'en est une.
M. Ted Mallet (économiste principal, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante): Les ouvrages économiques sont relativement partagés sur les effets à long terme de l'augmentation des charges sociales. Certaines études prétendent qu'elle a des incidences sur l'emploi et d'autres disent qu'elle provoque une baisse des salaires. L'opinion qui prédomine est à l'effet que plus le terme s'allonge plus il est vraisemblable que ce soit les salaires qui soient affectés, mais cela dépend bien entendu du genre d'entreprise et des élasticités ainsi que des facteurs commerciaux associés à la nature des effectifs concernés, ou encore du rapport de force existant entre les employés et l'employeur sur le marché. Et il ne s'agit évidemment pas d'un facteur homogène pour l'ensemble de l'économie.
Le facteur intéressant, en fait, c'est que nous ne vivons jamais dans le long terme; nous vivons toujours dans une série de progressions. Ainsi chaque choc politique qui survient—chaque augmentation qu'a subi le régime d'assurance-emploi à la fin des années 1980—et les augmentations que nous connaîtrons dans le RPC produiront des perturbations à court terme qui restreindront l'emploi plutôt que de s'attaquer au niveau des salaires. À moins que nous n'ayons un régime stable pendant les 15 prochaines années, nous ne verrons pas de répercussions à long terme sur les salaires; nous aurons tendance à les voir, selon nos convictions, plus du côté de l'emploi.
Mme Diane Ablonczy: Merci. J'apprécie ce commentaire.
J'ai de nombreuses questions, mais j'imagine que les autres en ont aussi, donc merci, monsieur le président.
Le président: Je vous en prie, vous pouvez poser une autre question.
Mme Diane Ablonczy: Bien, j'ai une autre question pour monsieur Emery.
Cette proposition m'intrigue beaucoup. Ce sont à nouveau des questions à propos du fonds. Hier, un certain nombre de témoins ont parlé de la gestion des régimes de retraite, de la façon d'obtenir les meilleurs rendements sur les investissements, de la nécessité qu'un fonds d'investissement de l'envergure de celui qui est prévu au projet de loi réponde aux exigences en matière d'efficience, de reddition de compte et de viabilité. J'ai noté dans votre présentation que vous avez un peu parlé du fonds, de son impact sur nos marchés et du réalisme de certaines dispositions en matière de reddition de compte. Si vous pouviez expliciter davantage, cela me serait très utile.
M. Herbert Emery: Je peux essayer de faire cela. Je ne suis pas expert en gestion de régimes de retraite, c'est pourquoi je suis un peu mal à l'aise de me prononcer sur le sujet.
L'une des grandes préoccupations, si vous accumulez un fonds de cette envergure, est de savoir comment vous allez le gérer. Deux scénarios sont possibles ici.
Le premier consiste en la gestion centralisée d'un fonds unique où vous mettez en place des directeurs sans lien de dépendance qui investiront au mieux de leurs connaissances selon les règles du jeu, comme un maximum de 20 p. 100 de placements à l'étranger. Mais ce qui pose problème ici, c'est que vous avez un fonds important géré de façon centralisée dans un marché financier restreint. Nous n'avons donc que le TSE comme marché principal des valeurs mobilières. Nous ne savons pas quel serait l'impact d'un fonds de cette ampleur sur les taux de rendement. Poussera-t-il d'autres personnes à vendre lorsqu'il fera son apparition et commencera à jouer sur les prix?
La grande question est de savoir s'il conduira réellement à une augmentation de l'épargne totale. Si tout ce que nous faisons c'est de retirer l'argent des régimes d'épargne des gens, argent qu'ils auraient placé dans des REER et d'autres formes de placement semblables, vous devez à ce moment-là avoir un fonds gouvernemental qui surclasse l'épargne privée. La plupart des gens ont bien de la difficulté à croire que ce puisse être possible, en particulier parce que certaines dispositions permettront aux provinces d'avoir accès à ce fonds pour emprunter. Plus grandes seront les dettes des provinces dans ce fonds, plus gros sera le problème que vous pourriez avoir.
L'un des plus importants précurseurs de ce genre de situation est le Fonds du patrimoine de l'Alberta. Je vis en Alberta depuis maintenant cinq ans; je ne suis pas encore certain de la valeur de ce fonds ou s'il en reste en réalité quoi que ce soit et, il est censé être l'un de ceux qui ont été assez bien gérés.
Le fait d'établir ce genre de fonds en toute indépendance n'est tout compte fait pas une garantie de réussite, parce que nous ne savons pas ce qu'il adviendra des taux d'intérêt et nous ne savons pas ce qui se produira sur le marché boursier lorsque nous inonderons le marché de capitaux d'un seul coup.
Une autre façon de gérer ce fonds est de ne pas avoir d'organisme gouvernemental autonome pour le gérer. Mais lorsque vous pensez à un régime privé comprenant une composante REER obligatoire, soudainement vous avez en fait des gens qui gèrent leur propre fonds. Vous pouvez en mettre 20 sur pied, reconnus par le gouvernement. La raison pour laquelle vous arrivez à cette possibilité, c'est qu'une fois que vous reconnaissez qu'une taxe est versée pour financer les prestations actuelles et futures, aucune raison ne vous empêche de la répartir de la façon suivante: une partie pour votre propre retraite, une partie pour compenser pour le passif non capitalisé et une partie pour payer les éléments sociaux du régime—l'invalidité, le décès et les prestations de survivant—qui ne sont pas couverts par les autres régimes.
Des REER privatisés, comme on en trouve au Chili et dans d'autres pays comme cela, ne sont en réalité que des façons différentes d'envisager la gestion d'un fonds de cette nature. Ce genre d'initiative peut mener à un fonds complètement privatisé, parce que tout ce que l'on fait en somme c'est de favoriser les initiatives d'épargne privée à l'encontre des initiatives d'épargne publique.
Mme Diane Ablonczy: Mais qu'en est-il de la crainte que ce soit trop risqué pour les Canadiens à titre individuel et que, pour une raison ou pour une autre, ils puissent, en raison de chutes des marchés boursiers ou de mauvais investissements, perdre toute leur protection en matière de régime de retraite?
M. Herbert Emery: Comme vous le savez, la plupart des conseillers en planification financière ne recommandent pas que les gens investissent tout leur argent dans un seul placement. Le gouvernement pourrait structurer les REER de façon à obliger une certaine diversification, mais nous entrons encore dans le détail des stratégies individuelles de placement.
La question qui se pose ici est de savoir si les gens sont capables de planifier pour eux-mêmes ou si nous avons besoin d'un gouvernement paternaliste pour s'occuper ce certaines de ces dispositions? Ceci nous ramène effectivement à un débat idéologique, que je ne peux pas régler, non plus qu'aucune des personnes ici présentes. On en revient à vos convictions. Mais selon une vision, nous aurions des pensions du type SRG et SV comme soupapes de sécurité, et le Régime de pensions du Canada, s'il était privatisé, serait le véhicule qui pourrait supporter un peu plus de risque. Mais, dans l'immédiat, il semble que le risque soit de savoir si l'on veut 12 p. 100 ou 15 p. 100 de rendement. Je ne peux pas croire que les gens craignent la variabilité entre ces taux de rendement.
Le président: Merci, monsieur Emery.
[Français]
Madame Girard-Bujold.
Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Ma question s'adresse à M. Emery. Je suis très surprise de votre exposé. C'est la première fois que je viens à ce comité, mais je pense que vous êtes une des personnes qui ont dit que les modifications du projet de loi C-2 pourraient empirer les choses. Vous rejetez en bloc quatre points. Sur quoi vous basez-vous pour dire cela? Avez-vous fait une étude qui prouve que ces quatre points du projet de loi peuvent empirer les choses?
[Traduction]
M. Herbert Emery: Comme je l'ai exposé dans ma présentation, les questions dont traite le projet de loi C-2 sont très complexes: la solvabilité financière s'accroît-elle grâce à la capitalisation anticipée? Lorsque nous sommes en présence d'un mode de financement par répartition, qui n'est qu'un système de transfert qui sert à distribuer le revenu courant aux gens non retraités et aux gens retraités, nous n'avons pas besoin d'un fonds pour assurer la solvabilité. Le fonds doit avoir d'autres objectifs, et le fait d'offrir aux Canadiens un meilleur taux de rendement pour améliorer leur situation est peut-être un objectif louable. Cependant, je suis sceptique quant à la capacité du gouvernement de surclasser les investissements privés individuels dans leurs propres objectifs, que ce soit la consommation ou l'investissement dans leurs enfants, qui peuvent être leur source de sécurité plus tard.
En ce qui a trait à l'équité entre les générations, il semble que les revenus des générations futures seront plus faibles que ceux des Canadiens d'aujourd'hui; que les baby-boomers constituent la génération la mieux nantie entre toutes et que leur niveau de richesse sera le plus élevé que l'on ait connu, auquel cas le fait d'imposer un fardeau fiscal plus élevé sur les générations futures ne peut être que mauvais. Nous oublions que les revenus réels ne peuvent qu'augmenter et que par le miracle de la capitalisation, même à faible taux, les revenus réels seront plus élevés.
Si nous croyons en un système d'impôt progressif où les gens qui ont de plus grandes capacités de payer devraient payer plus d'impôts, alors il n'y a rien de mal à imposer des charges sociales plus élevées aux générations futures.
Je n'ai pas eu l'occasion de dire que je ne crois pas que ces charges sociales puissent jamais atteindre 14 p. 100. Si la croissance des salaires réels s'accélère, elles n'y arriveront jamais. Je ne crois pas que les jeunes Canadiens, qui supportent des frais de scolarité très élevés et d'autres politiques du genre, puissent considérer ce régime avec bienveillance dans vingt ou trente ans, même à 9,9 p. 100. Je ne crois pas que vous verrez dans le futur les avantages que vous payez aujourd'hui, même si vous cotisez au préalable. Tout ce que vous ferez c'est d'imposer aux travailleurs actuels un fardeau énorme, sans pouvoir leur garantir de sécurité politique. Ceci ne fait que nous distraire de la question primordiale, celle de se demander, si nous sommes vraiment préoccupés par les revenus de retraite, comment pouvons-nous en arriver à une approche politique intégrée de façon à ne pas avoir d'un côté le Régime de pensions du Canada et de l'autre, les dispositifs de récupération de la SV. La stratégie actuelle est vraiment de diviser pour régner.
Les jeunes Canadiens sont obnubilés par le Régime de pensions du Canada parce qu'ils y versent des contributions. Les personnes âgées sont assommées par le SRG. Elles ont fait des économies, elles ont respecté les règles du jeu, et maintenant les règles sont changées. Nous avons vraiment un paquet de feux qui brûlent dans différents coins, et ce que nous devons faire c'est de commencer à rassembler ces choses et de nous demander ce qui est le mieux pour les Canadiens plutôt que comment nous pouvons financer les prestations du Régime de pensions du Canada, que nous ne pouvons même pas garantir.
Je comprends qu'il s'agit d'un point de vue différent de ceux que vous avez entendus. Une des raisons pour lesquelles j'étais heureux de témoigner devant ce comité est que mon point de vue n'est généralement pas accepté par tout le monde. Je le reconnais, et il s'agit d'une occasion de le faire connaître. Je fonde mon opinion sur trente ans de recherches effectuées par des économistes, depuis la création de ces régimes de retraite par participation jusqu'à aujourd'hui. Je crois que nous sommes plus ignorants au sujet de ces régimes aujourd'hui que nous ne l'étions en 1966. Nous oublions constamment le passé, ce qui nous condamne à sans cesse le ranimer, tous les cinq ans, lorsque nous procédons à l'examen des taux. Si nous pouvons établir un barème des taux de cotisation pour 25 ans, pourquoi le revoyons-nous tous les cinq ans?
Une autre discussion rhétorique que je trouve décevante est celle qui porte sur le taux permanent alors que nous savons que la génération du baby-boom constitue une explosion temporaire dont l'incidence sur la population disparaîtra au cours des trente prochaines années. Est-il sensé d'avoir une politique de tarif permanent?
[Français]
Mme Jocelyne Girard-Bujold: Ma deuxième question s'adresse à M. White. Dans la lettre que vous avez adressée à l'honorable Paul Martin, vous lui disiez que, dans l'exposé économique et financier qu'il avait fait, il avait dit que le gouvernement voulait améliorer la qualité de vie de tous les Canadiens. Vous lui disiez aussi qu'il avait affirmé être profondément convaincu que la quête de la prospérité ne devait pas entraîner l'abandon du principe de l'équité. Enfin, vous lui dites que depuis plusieurs années, votre association demande qu'on change les cotisations d'assurance-emploi et vous lui faites des suggestions en ce sens. Ces suggestions ont-elles trait aux nouveaux cotisants et aux cotisants de jeunes entreprises? Pourriez-vous élaborer un peu sur cela?
M. Garth White: Nous avons tenté de trouver une solution qui ne blesse pas les gens qui utilisent le régime, qui ne blesse pas les gens qui versent des contributions, qui ne modifie pas le régime et qui favorisera la création d'emplois. Nous sommes venus à la solution qui suit.
Les recommandations que nous mettons de l'avant ne réduisent pas l'excédent, n'affaiblissent pas le régime et ne diminuent pas les prestations du régime. Elles ne font que réduire les primes supplémentaires que paient les employeurs et les employés. Nous croyons aussi que le programme social numéro un est la création d'emplois. Les créateurs d'emplois nous disent que si vous réduisiez les primes, cela les aiderait à créer des emplois.
Actuellement, ce comité travaille sur un processus par lequel les primes augmenteront considérablement par le biais du RPC. Nous essayons de trouver une solution pour contrebalancer cela—une solution politique, une solution concrète, qui ne blessera personne.
Nous avons même fait une recommandation, par exemple, nous attaquer à l'emploi chez les jeunes, où nous sommes profondément impliqués. Nous procédons à des études majeures sur la question des jeunes. Les jeunes voient en nous une très bonne source potentielle d'emplois.
Nous avons parlé d'une exemption volontaire pour les étudiants. Beaucoup d'étudiants ne veulent pas payer d'assurance-emploi. Beaucoup d'étudiants ne recevront pas d'assurance-emploi. Pourquoi ne peuvent-ils lever la main et dire qu'ils n'en retireront pas, et pourquoi les employeurs doivent-ils contribuer? Ce serait de l'argent qui reviendrait dans leurs poches. C'est de cette façon que nous essayons de trouver des solutions bénéfiques pour tous.
Le programme New Hires, qui prend fin cette année, que ce gouvernement soutient et dont il a fait la promotion, et qui reçoit l'appui de tous, je crois, sera terminé l'an prochain. C'est 25 p. 100, monsieur le président. C'est maintenant 100 p. 100. Il est abandonné. Nous espérons qu'il sera renouvelé.
Nous essayons de trouver des solutions qui satisfassent à tous ces objectifs sans pour autant augmenter la pression sur la situation fiscale.
Le président: Merci, monsieur White. Merci.
Monsieur Pillitteri. Pas de question? Monsieur Szabo.
M. Paul Szabo: Merci, messieurs. C'est intéressant.
Je veux me concentrer sur deux choses. L'une concerne l'équité entre les générations et l'autre, la valeur des prestations par rapport au coût.
Je pense que vous ne proposez d'aucune façon que la situation des personnes âgées et des prestataires actuels soit modifiée. Ceci signifie nécessairement que d'autres personnes devront en payer le coût. Je pense que M. Emery a fait remarquer qu'une partie du 9,9 p. 100 sert en fait au financement de cette responsabilité à l'égard des prestataires actuels. Mais les arguments semblent être que «Bien, il n'y a pas de valeur» ou «Ces personnes âgées obtiennent beaucoup plus et nous obtenons beaucoup moins», et des suggestions concernant la possibilité de ne pas participer et autres choses du genre.
Je crois que ma question est pour monsieur Emery, puisque vous avez soulevé la question des approches privées ou de la privatisation. Avez-vous vraiment essayé de déterminer quel serait le coût d'un système équivalent pour quelqu'un qui voudrait obtenir une pension, avec les prestations de survivant, les prestations pour enfants, les prestations d'invalidité et de décès et l'indexation et la sécurité que procure le RPC? En avez-vous établi le coût? Comment ce coût se comparerait-il au 9,9 p. 100—pour quiconque, peu importe où il se trouve sur le spectre?
M. Herbert Emery: Les questions que vous soulevez sont très importantes, mais ce sont en général les gens qui gèrent les fonds de pension qui s'en occupent et qui étudient le marché pour calculer les taux.
Comme vous le faites remarquer, dans la transition vers quelque régime que ce soit, ou même en conservant le vieux régime, il y a toujours des frais pour cette opération et les gens vont y perdre. Ceci parce que lorsque nous nous écartons d'un Régime de pensions du Canada avec 9,9 p. 100, nous déplaçons en grande partie le pouvoir de redistribution que nous possédons en vertu du Régime.
Les objectifs du Régime de pensions du Canada dépassent l'épargne pure. En fait, il ne s'agit pas d'un régime d'épargne. Le projet de privatisation dont je parlais, que vous pourriez tout aussi bien réaliser une fois le processus de capitalisation anticipée enclenché, n'a pas pour but de dire que je ne crois pas que les régimes de pension de l'État n'ont pas un rôle à jouer. La question est plutôt de savoir comment nous pouvons procurer ces régimes universels aux gens.
• 1155
Je ne crois par que d'augmenter les taux à 9,9 p. 100 pour
créer ce fonds soit une solution. Je ne pense pas non plus que la
privatisation sera toujours la solution pour tous au Canada, mais
elle serait profitable pour beaucoup de Canadiens à qui elle
donnerait plus de possibilités en matière d'épargne. Ils
conserveraient ainsi le taux de rendement plutôt que de partager le
taux du rendement du fonds du RPC entre un vaste groupe de
Canadiens.
M. Paul Szabo: Seulement à titre d'information, les fonctionnaires du ministère des Finances nous ont avisés qu'il en coûterait 15 p. 100 de plus pour l'obtenir de façon privée.
Vous continuez de parler d'une solution de pleine capitalisation, mais vous devez convenir, que cela ne reflète pas ce que propose le projet de loi C-2. Le mode de financement par répartition va continuer. Le changement n'entraîne pas la capitalisation intégrale; il se dirige seulement dans cette voie. Au lieu d'être de deux ans, le cumul des prestations passera à cinq ans. Ce ne sera pas la pleine capitalisation.
Vous avez répété cela tellement de fois que je me demande vraiment pourquoi vous suggérez quelque chose qui n'est pas vraiment le cas. Cela tend à détourner l'attention de votre message, car il ne reflète pas de façon juste ce qui est proposé. Je crois que nous pouvons discuter de ce point.
Je veux savoir pourquoi vous pensez que le seul fait de laisser le système tel qu'il est et de le laisser monter à la limite jusqu'à 14,2 p. 100 puisse être une possibilité viable considérant qu'à ce taux de cotisation, la valeur des prestations serait probablement moindre que ce que vous avez versé au cours de votre carrière et qu'en conséquence, il y aurait un consentement unanime à abandonner le régime. Personne ne veut cotiser dans quelque chose qui lui rapportera moins que ce qu'il a versé.
Pourquoi dites-vous que nous devrions juste laisser les choses comme elles sont? Cela n'a pas de sens.
M. Herbert Emery: Vous soulevez quelques bons points. Je m'excuse si j'ai pu donner l'impression que je croyais que le projet de loi C-2 était un projet de capitalisation intégrale. «Une plus grande capitalisation» est l'expression que j'utilise habituellement. Je suis aussi conscient qu'en principe ils doublent le fonds.
Le point important à ce sujet c'est: pourquoi pas un taux de capitalisation intégrale? Le niveau que vous choisissez est arbitraire. Au fond, vous tentez de faire d'une stratégie d'investissement un allégement fiscal. Il y a maintenant une pression politique dans le sens que les gens n'aimeront pas un taux d'imposition de 12 p. 100, qui correspond à la capitalisation intégrale, au taux constant.
Un autre point, avant de passer à autre chose, est que vous avez raison, le gouvernement peut réaliser d'immenses économies d'échelle en prenant la charge des régimes de retraite et en internalisant les coûts de l'opération. Nous le voyons dans les soins de santé. Les États-Unis ont un système de soins de santé privatisé plus coûteux que celui du Canada. C'est pourquoi je crois qu'il y a place pour un régime public de pensions.
Tout comme je crois que le régime de répartition actuel est une alternative au projet de loi C-2, je ne crois pas que le projet de loi C-2 soit politiquement plus viable que le régime que nous avons actuellement. Je ne pense pas que nous arrivions jamais à des charges sociales de l'ordre de 14 p. 100, en partie parce que l'assiette fiscale va s'accroître substantiellement au cours des 20 à 30 prochaines années. Nous commençons à sentir l'effet des épargnes des membres de la génération du baby-boom. L'arrivée de capitaux supplémentaires dans l'économie provoquera un accroissement de la main-d'oeuvre directe, ce qui se traduira par des salaires plus élevés.
Vous avez donc, dans un sens, une assiette fiscale plus petite, mais dans l'autre sens vous avez une assiette fiscale plus grande.
M. Paul Szabo: OK. Laissez-moi—
M. Herbert Emery: Seulement pour terminer sur un point, si vous croyez qu'à l'avenir les Canadiens vont considérer un taux de 9,9 p. 100, au terme duquel ils ne retirent pas plus du régime alors qu'ils sont réellement sous le 14,2 p. 100, le maximum à 2030 $, je ne comprends pas très bien comment ce gouvernement pense que c'est politiquement plus acceptable même si, lorsque vous considérez le coût d'opportunité de l'argent à partir d'aujourd'hui, les Canadiens payent de loin beaucoup moins en vertu du mode de financement par répartition qu'en vertu d'une alternative de capitalisation intégrale.
M. Paul Szabo: La question, donc, est de savoir si vous voulez ou non reconnaître que l'actuaire en chef a dit qu'en termes actuariels, les taux devraient être haussés à ce niveau pour répondre aux besoins de trésorerie des bénéficiaires du moment et pour assurer la viabilité.
Je suis d'accord avec vous, cependant, que lorsque vous en arrivez au point où non seulement vous n'obtenez pas un rendement juste et raisonnable, mais en fait un rendement négatif, vous ne pouvez pas exiger des charges sociales de 14,2 p. 100. Mais vous ne pouvez pas considérer le RPC de façon isolée. Vous devez tenir compte de l'ensemble de la fiscalité et des avantages que nous retirons du régime fiscal. Il est clair que nous devrions probablement passer à un mode de financement progressif, simplement parce que pour le contribuable, ce qui compte c'est ce qu'il a dans sa poche, pas comment il l'a obtenu. Ce sont les impacts nets.
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Donc, si vous ne payez pas le 14,2 p. 100 dans le cadre du
RPC, vous paierez une combinaison de certains taux et vous devrez
aussi abandonner quelque chose d'autre ou absorber des
augmentations d'impôt, qui combinés atteindront le 14,2 p. 100.
C'est jouer avec les chiffres. Le fait est que sur le plan
actuariel, d'une façon ou d'une autre, 14,2 p. 100 sera nécessaire,
si vous ne faites rien.
M. Herbert Emery: Je suis d'accord avec vous sur ces points. Il y a une différence entre un économiste et un actuaire. L'actuaire part des conditions existantes et présume qu'elles se maintiendront pendant un certain temps. L'économiste veut comprendre dans quelle direction vont les prix, les salaires, la productivité et autres choses du genre. Ainsi, lorsque les économistes se satisfont de dire que les prix et les salaires peuvent changer dans le futur, les prévisions actuarielles disent: supposons qu'il n'y ait aucun changement dans les conditions à partir d'aujourd'hui, comment pourrions-nous financer ces prestations? Nous ne parlons pas d'un régime privé de retraite où nous pouvons convenir qu'il sera payé en 2030. Nous parlons d'un mécanisme de transfert des impôts où les éventuels électeurs décideront de ce que sera la distribution du revenu.
Déguiser cette chose en régime d'épargne ne change rien à la réalité, et vous ne pouvez vraiment rien garantir avec ce régime. Je suis d'accord avec vous que ce qui compte pour les Canadiens c'est ce qu'ils ont dans leurs poches et non pas ce qui est promis pour l'avenir, car le gouvernement libéral pourrait ne pas être au pouvoir dans 30 ans. Il ne pourra pas dire qu'en 1997 il avait promis qu'il paierait ces prestations. Il y a de bonnes chances qu'il soit au pouvoir, mais...
M. Garth White: Nous sommes membres d'une coalition—M. Valeri était présent—de 20 groupes différents et diversifiés, un peu de tout, allant de groupes de professeurs, de personnes âgées et de la chambre du FCEI jusqu'aux actuaires, juste un rassemblement de gens. Nous discutons beaucoup de ces questions, ce qui n'est pas surprenant. Mais un point clé que le comité doit reconnaître est que nous pouvons bien parler de différentes options et de différents scénarios, mais la réalité c'est que les gens ont vraiment très peur quand il s'agit de planifier leur retraite et leur avenir. Le fait est qu'ils craignent l'érosion ou l'abolition du RPC. Pour bon nombre de gens, c'est tout ce qui importe.
Le point auquel nous en sommes arrivés au sujet du RPC, c'est qu'il n'est pas adéquat en lui-même. Vous devez considérer le tableau complet des régimes de retraite. Pourquoi y a-t-il des craintes? Il y a des craintes parce que personne ne considère la situation des pensions dans son ensemble. Personne ne sait ce qu'il faut pour planifier son avenir. Au moins le comité force ce processus et il est nécessaire que nous travaillions ensemble pour savoir ce que pensent les gens de l'ensemble des politiques relatives aux pensions.
L'une de nos préoccupations relativement à l'option d'un régime privé de pensions était que nous n'étions pas certains ce de qu'il en coûterait sur une base individuelle et aussi jusqu'à quel point cela avait été égalé par les employeurs. Il s'avère qu'un grand nombre de nos membres considèrent le RPC comme une composante de leur planification, c'est pourquoi ils sont inquiets à ce sujet. Nous avons besoin d'une image complète, parce que ce n'est qu'une pièce du casse-tête des pensions. Chaque année, nous sommes inquiets relativement au fait qu'il n'y a pas de garantie assurant que le programme des REER ira en augmentant ou en diminuant. Cela ne peut continuer ainsi. Nous devons avoir une certaine stabilité et des outils pour planifier nos pensions.
Le président: Merci beaucoup, monsieur White, monsieur Mallet et monsieur Emery. Ce fut une table ronde intéressante.
Personne ne met en doute que la question des pensions est très difficile. Ceci étant dit, les Canadiens n'accepteraient tout simplement pas que le gouvernement demeure inactif sur ce sujet. Il est important d'anticiper pour s'attaquer à certaines des principales préoccupations. Je suis convaincu qu'il y aura des possibilités de parfaire certains des points qui ont été soulevés par des organismes comme les vôtres et des personnes comme vous pour apporter des améliorations.
Ce que je constate, c'est que les Canadiens recherchent de plus en plus un sentiment de sécurité, et c'est à cela que ce comité veut essayer de répondre. Aussi, au nom des membres du comité, j'aimerais vous remercier de vos réponses et remercier les membres de leurs questions.
Mme Diane Ablonczy: Monsieur le président, j'ai un point d'information pour le comité.
J'ai des renseignements au sujet de la conférence du CATO Institute à laquelle j'ai fait référence précédemment dans ce comité. Il s'agit de celle qui a lieu à Londres, en Angleterre. Elle traite de la recherche de solutions globales à la crise des régimes de retraite publics, et nous sommes un microcosme de ce processus. J'ai ces renseignements pour les membres du comité et je recommande fortement que nous nous procurions les résultats de cette conférence.
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Comme je l'ai mentionné déjà, monsieur José Pi±era, qui a
introduit les changements au régime de retraite au Chili sera le
principal conférencier. Il a témoigné devant le comité
parlementaire britannique qui examine la réforme des régimes de
retraite et il était apparemment très impressionnant. Je pense que
ce sont des renseignements intéressants pour nous, aussi ceux qui
le désirent peuvent se procurer l'information.
Le président: Oui, et nous pouvons peut-être demander à la greffière de vérifier si elle peut se procurer les transcriptions de ces présentations pour que nous puissions aussi en tirer profit.
Mme Diane Ablonczy: Si ce n'était pas trop politiquement incorrect, je pense que ce serait une excellente idée.
Le président: La séance est levée.