FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON FINANCE
COMITÉ PERMANENT DES FINANCES
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 17 novembre 1998
[Traduction]
Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): J'ouvre maintenant la séance.
Je tiens à vous souhaiter la bienvenue à tous ce matin. Comme vous le savez, le Comité des finances a voyagé dans tout le pays pour demander aux Canadiens quelles étaient leurs priorités en ce qui concerne le budget fédéral de 1999. Au nom du comité, donc, je vous souhaite à tous la bienvenue.
Ce matin, nous avons le plaisir de recevoir des représentants de l'Association canadienne des automobilistes, de la Chambre de commerce du Canada, de la Fédération des contribuables canadiens, du Collège des médecins de famille du Canada, du Conference Board du Canada, de la Fondation du diabète juvénile Canada et de l'Université de Toronto.
Nous allons commencer par l'Association canadienne des automobilistes représentée par Mme Elly Meister, vice-présidente, Affaires publiques et communications, et par Mme Jody Ciufo, chef, Affaires publiques et gouvernementales. Vous êtes les bienvenues.
Mme Elly Meister (vice-présidente, Affaires publiques et communications, Association canadienne des automobilistes): Merci beaucoup.
• 0910
Je suis ici aujourd'hui pour vous présenter la position de
l'Association canadienne des automobilistes et de ses 11 clubs
membres dans tout le Canada. Ce qui est plus important encore,
c'est que nous représentons les quatre millions de conducteurs
canadiens qui circulent sur nos routes.
Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de présenter notre position dans le cadre de la préparation du budget de 1999. L'Association félicite le gouvernement qui a réussi à équilibrer le budget et à éliminer le déficit, c'est-à-dire le déficit national. Nous demeurons toutefois préoccupés par le fait que le déficit du réseau routier continue à croître. La CAA a déjà prédit qu'une négligence continue du réseau national aboutirait à une augmentation en flèche des coûts dans l'avenir. Cette absence d'investissement dans les infrastructures routières du Canada constitue un déficit caché qui s'accumule tandis que les comptes fédéraux ont officiellement atteint l'équilibre budgétaire. Chaque année, le gouvernement fédéral perçoit en moyenne 5 milliards de dollars en taxes sur les carburants, mais il consacre moins de 6 p. 100 de cette somme à l'entretien des routes.
Selon le dernier rapport sur l'état du réseau routier national, 38 p. 100 du réseau ne répondait pas aux normes et il faudrait investir 12 milliards de dollars pour procéder aux réfections nécessaires. Au cours des 10 dernières années, ces coûts ont grimpé à 17,4 milliards de dollars selon le conseil des ministres chargés des transports et de la sécurité routière et une étude de la politique sur le réseau routier national qui doit être bientôt publiée. Nous nous attendons également à ce que l'état du réseau routier national se soit de nouveau détérioré.
Pour le budget de 1999, la CAA avait demandé au gouvernement de réinvestir une portion du surplus budgétaire dans le réseau routier national. Tous les ans, dans le cadre de sondage d'opinions, les membres de la CAA déclarent qu'ils préfèrent que le gouvernement fédéral participe au financement du réseau routier national. L'an dernier, 87 p. 100 des répondants ont affirmé qu'il était important pour l'économie canadienne de posséder un réseau routier national en bon état et sur lequel il n'y a pas d'encombrement, tandis que 85 p. 100 ont déclaré que le gouvernement fédéral devrait jouer un rôle en ce qui a trait au financement du réseau routier national.
Sur le plan concret, ce niveau d'appui se traduit par près de 3,3 millions de membres de la CAA qui exhortent le gouvernement fédéral à se pencher sur la question de ces routes clés. Le conseil des ministres responsables des transports et de la sécurité routière a également présenté des statistiques impressionnantes montrant qu'un investissement de 17 milliards de dollars dans le réseau routier national, au cours des 10 prochaines années, se traduirait par des avantages économiques d'une valeur de 30 milliards de dollars. Des emplois à long terme, une amélioration du commerce interprovincial et international, une hausse du tourisme et de la productivité profiteront non seulement aux automobilistes, mais à tous les Canadiens.
À l'échelle internationale, le Canadien fait piètre figure par rapport aux gouvernements fédéraux qui paient une portion plus importante du financement des routes. Selon la dernière étude de la politique sur le réseau routier national, le gouvernement fédéral ne finance que 6 p. 100 des dépenses totales pour l'ensemble des routes canadiennes, laissant aux provinces la tâche de financer 94 p. 100 des coûts.
Ce qui est plus important encore, c'est que les États-Unis ont adopté un programme très dynamique de renouvellement de leurs infrastructures routières pour améliorer la prospérité et la sécurité des citoyens américains. Ce programme, voté par le Congrès, prévoit d'affecter aux travaux routiers plus de 19,7 milliards de dollars en 1998, soit une hausse de 7,9 p. 100 par rapport à 1995, l'année la plus récente pour laquelle des chiffres sont disponibles. Dans un article récent, Jeffrey Simpson du Globe and Mail résume la question de la façon suivante:
-
Les États-Unis sont en voie de construire des «passerelles»
alimentant les passages frontaliers; les Canadiens se demandent
quelle approche ils doivent adopter... Ottawa ne fait pratiquement
rien, exception faite de sommes considérables que le gouvernement
perçoit auprès des usagers de la route sans en réinvestir une
portion importante dans le réseau routier.
Cette remarque représente fidèlement la position de la CAA en matière de taxation. Les automobilistes assument un fardeau fiscal excessivement élevé, surtout dans le cas de la taxe d'accise fédérale sur l'essence qui se chiffre maintenant à 10c. le litre. En 1995, le ministre des Finances a haussé la taxe de 1,5c. le litre, soit une augmentation de 17,6 p. 100 précisément pour aider à réduire le déficit. Depuis ce jour, les automobilistes ont contribué une somme additionnelle de 2 milliards de dollars qui a servi à réduire le déficit. Ce montant s'ajoute aux milliards de dollars payés par les conducteurs, et qui sont versés au compte des recettes générales par le biais de la perception d'autres taxes et frais d'utilisation. Étant donné que nous avons maintenant éliminé le déficit, il serait grand temps que le gouvernement cesse de pénaliser les automobilistes et qu'il réduise la taxe d'accise sur l'essence.
• 0915
Comment pouvons-nous aider les Canadiens à se préparer à
profiter des occasions qu'offrira la nouvelle ère économique? Au
moment où les Canadiens tranchent avec la tradition de dette, ils
peuvent mieux profiter des nouvelles occasions qui se présentent
s'ils sont dotés de la capacité de se déplacer librement, à coût
abordable et en toute sécurité. La mobilité est entravée par la
taxation excessive, qui présente des obstacles financiers, et par
des barrières physiques comme l'encombrement des routes et la
sécurité routière.
Les investissements dans notre réseau routier national atténueront la congestion qui sévit sur un grand nombre des routes les plus achalandées du Canada. Signalons que 26 p. 100 de toute la circulation au Canada emprunte le réseau routier national, et ce, malgré le fait que ce dernier ne représente que 3 p. 100 de l'ensemble des routes canadiennes. L'achalandage excessif des routes donne lieu à d'innombrables heures perdues, à des pertes de productivité considérables et à des hausses des émissions polluantes produites par les véhicules qui roulent au ralenti.
Selon l'étude de la politique sur le réseau routier national effectuée en 1988, si l'on réalisait les réfections nécessaires pour que le réseau routier national réponde aux normes, chaque année on pourrait sauver 150 vies, prévenir 32 300 blessures et économiser 20 millions de dollars en dommages matériels. Nous savons comment nous y prendre: des voies élargies, des terre-pleins centraux, des routes plus droites et la réduction des obstacles en bordure des routes. Le seul élément manquant est l'engagement fédéral pour financer ces projets.
Quelle est la meilleure façon dont le gouvernement peut veiller à ce que la nouvelle économie fournisse un vaste éventail de possibilités d'emploi pour tous les Canadiens? La meilleure façon pour le gouvernement de créer un vaste éventail d'emplois est de veiller à ce que nous possédions des infrastructures de premier ordre qui jetteront les bases du succès économique.
Voici ce que dit un rapport publié par Transports Canada en 1996:
-
Le déclin du taux des investissements publics dans les
infrastructures a coïncidé avec une baisse de la croissance de la
productivité, ce qui sous-entend une relation possible entre ces
deux éléments.
Le réseau routier national, qui se compose de 24 500 kilomètres de routes clés pour le commerce et le tourisme, facilite le commerce international et interprovincial, sert à acheminer les biens vers les marchés, aide à attirer des investissements étrangers au Canada, favorise la croissance du tourisme et crée des emplois dans plusieurs industries.
Plus on retarde les investissements dans le réseau routier national, plus il faudra attendre longtemps avant de profiter des avantages qui en découleront: la prospérité économique, une mobilité accrue, une sécurité améliorée et une réduction de la pollution atmosphérique. La CAA exhorte donc le gouvernement fédéral à prendre dans son budget de 1999 les mesures nécessaires pour aider les Canadiens à profiter plus tôt de ces avantages, ce qui évitera en même une escalade des coûts de réparation des routes plus importantes dans l'avenir.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci beaucoup.
Nous allons maintenant écouter la Chambre de commerce du Canada, représentée par Mme Nancy Hughes Anthony. Vous êtes la bienvenue.
Mme Nancy Hughes Anthony (présidente-directrice générale de la Chambre de commerce du Canada): Bonjour et merci beaucoup. Au nom des membres de la Chambre de commerce du Canada, je tiens à vous remercier de cette occasion que vous nous offrez de donner notre opinion sur le prochain budget.
Je suis Nancy Hughes Anthony. Je suis la présidente-directrice générale de la Chambre de commerce du Canada. Je suis accompagnée de Don McIver, économiste en chef à la Compagnie d'assurance-vie Sun Life du Canada et membre de notre comité de la politique économique.
J'aimerais commencer par une courte explication: qui nous sommes et qui nous représentons.
[Français]
La Chambre de commerce du Canada est l'association commerciale la plus importante et la plus représentative au pays. Nos membres représentent l'éventail complet des entreprises au Canada, ce qui nous permet d'agir comme le porte-parole de tous les milieux d'affaires.
Grâce à notre réseau de 500 chambres et bureaux de commerce locaux, nous avons des partenaires dans toutes les circonscriptions fédérales. Notre réseau compte plus de 170 membres au total et représente des entreprises de toutes tailles, actives dans tous les secteurs et dans l'ensemble du pays.
[Traduction]
J'espère, monsieur le président, que vous et les députés avez devant vous notre mémoire détaillé qui s'intitule «Un plan d'affaire pour le Canada».
J'utiliserai le temps à notre disposition pour vous donner une idée de ce que nos membres, grands et petits, et des quatre coins du pays, nous ont dit lors de notre récente assemblée annuelle en septembre. Je suppose que vos électeurs vous disent à peu près la même chose.
• 0920
En résumé, nos membres s'inquiètent de l'importance de la
dette, des hauts niveaux d'imposition, de l'assurance-chômage et du
grand nombre de cerveaux qui quittent le Canada à cause des taux
d'imposition excessifs dans ce pays.
Il n'est étonnant que les milieux d'affaires souhaitent que le gouvernement fonctionne comme une entreprise. Les entrepreneurs doivent respecter les règles du marché et gérer leurs finances prudemment. Par principe, ils souhaitent que ceux qu'ils élisent en fassent autant avec les deniers publics.
C'est cette conviction fondamentale qui les a poussés à devenir plus agressifs dans leur critique des politiques de relance par le déficit budgétaire et c'est ce qui a fait de la Chambre de commerce du Canada un porte-parole si éloquent à ce sujet depuis tant d'années. Nos membres ont été satisfaits de voir le premier budget équilibré depuis des années et n'ont pas mâché leurs mots pour le dire. Malgré cet enthousiasme, ils ont dit très clairement qu'ils auraient préféré qu'on parvienne à ce résultat d'une autre façon.
Comme leurs employés, ils cotisent à une caisse qui devait servir de réserve pour les gens temporairement et involontairement sans emploi. Lorsqu'ils ont réalisé que le programme d'assurance-emploi rapporte aujourd'hui plus de 6 milliards de dollars par an de surplus, leur réaction fut une réaction de colère. Ils nous ont dit qu'ils voulaient que l'on mette fin à cette surimposition.
Nos membres veulent que le surplus soit rendu à ceux qui ont trop payé. Plus précisément, ils veulent que l'argent soit rendu de trois façons: remboursement de la dette, réduction des cotisations d'assurance-emploi et réduction de l'impôt sur le revenu des particuliers. D'autre part, ils veulent que la caisse d'assurance-emploi retrouve son objet initial. Ils ne veulent en aucune circonstance que cet argent soit utilisé pour de nouveaux programmes. Ils veulent bien qu'il soit réaffecté, mais certainement pas que l'on fasse de nouvelles dépenses.
[Français]
Je répète, monsieur le président, que le gouvernement doit continuer d'appliquer sa politique de restrictions financières et éviter à tout prix de dépenser pour de nouveaux programmes.
Cependant, le gouvernement doit pouvoir réaffecter les fonds dont il dispose actuellement à mesure que de nouvelles priorités se présentent.
[Traduction]
Nous ponctuerons notre exposé de recommandations très spécifiques pour le prochain budget. Nous vous donnons aussi une formule à utiliser si l'excédent budgétaire est supérieur à ce que l'on prévoit et des solutions de rechange s'il y est inférieur. C'est ce que nous appelons notre calculateur de la Chambre de commerce.
Le message que nous vous laissons est simple. Il est temps de rembourser les contribuables canadiens.
M. McIver va maintenant vous commenter dans le détail les recommandations de la Chambre de commerce.
M. Don McIver (économiste en chef, Sun Life du Canada, Compagnie d'assurance-vie): Merci.
Nos recommandations sont le reflet de nos priorités: pas de nouvelles dépenses. Cela ne veut pas dire que le gouvernement ne peut pas financer de nouvelles priorités. En fait, si le gouvernement choisit de réaffecter de l'argent actuellement utilisé pour certaines programmes à de nouveaux programmes, nous n'y voyons pas d'inconvénient. Mais nous répétons que les milieux d'affaires, partout au Canada, ne voudraient pas que l'on engage de nouvelles dépenses.
Nos recommandations sont aussi inspirées par notre attachement à la réduction de la dette. Il est nécessaire de réduire l'impôt personnel pour rétablir notre niveau de vie et juguler l'exode des cerveaux aux États-Unis. Il faut des mesures qui redonnent aux Canadiens l'envie d'épargner et qui remédient aux distorsions dans la répartition des revenus au Canada. Il faut réexaminer le programme d'assurance-emploi afin qu'il retrouve son objet initial. Il nous faut réformer la structure fiscale du Canada qui est à la fois néfaste à la concurrence et désuète.
Étant donné que le niveau exact d'excédent budgétaire en 1999-2000 n'est évidemment pas connu à l'heure actuelle, la Chambre de commerce du Canada a présenté au gouvernement trois scénarios distincts pour trois conjonctures économiques différentes. Chaque scénario se fonde sur un excédent budgétaire pour 1999-2000 de 4 milliards, 3 milliards ou 2 milliards de dollars en plus du fonds de réserve de 3 milliards de dollars mis chaque année de côté par le gouvernement. Le chiffrage de chaque scénario a été fait à partir de l'exposé financier que vous a fait le ministre des Finances en octobre dernier. Les principes sous-jacents à chaque scénario sont les mêmes. Les recommandations suivantes supposent un excédent budgétaire de 4 milliards de dollars ainsi qu'un fonds de prévoyance de 3 milliards.
• 0925
Premièrement, consacrez entièrement le fonds de prévoyance de
trois milliards de dollars, plus un montant supplémentaire de
500 millions de dollars provenant du surplus budgétaire, à la
réduction de la dette. Ainsi, 50 p. 100 du surplus budgétaire
serait consacré à la réduction de la dette.
Deuxièmement, réduire de 15c. les cotisations d'assurance-emploi.
Troisièmement, éliminer complètement la surtaxe générale de 3 p. 100. Il s'agissait au départ d'une taxe de réduction du déficit qui vise actuellement les professionnels, les personnes que nous voulons justement garder au Canada.
Quatrièmement, augmenter de 500 $ l'exemption personnelle de base pour tous les contribuables. Cette mesure inclut une augmentation de l'exemption de marié ou l'équivalent.
Cinquièmement, augmenter à 14 500, soit de 1 000 $, la cotisation limite à un REÉR.
Sixièmement, introduire l'indexation de la limite de cotisation à un REÉR, après une hausse à moyen terme de la limite de cotisation.
Septièmement, indexer complètement les crédits et les fourchettes d'imposition en fonction de l'indice des prix à la consommation à moyen terme.
Huitièmement, porter à 30 p. 100 le contenu étranger des REÉR.
Neuvièmement, aucune nouvelle dépense gouvernementale.
En outre, la Chambre de commerce du Canada recommande fortement que le gouvernement envisage d'apporter des modifications à la structure du programme d'assurance-emploi afin de le ramener à sa vocation première de programme d'assurance. Les avoirs du programme d'assurance-emploi devraient être gérés comme un fonds distinct du trésor du gouvernement canadien. Nous aimerions voir un remaniement complet du programme d'assurance-emploi, accompagné d'une réduction des cotisations jugée appropriée dans le cadre de la restructuration.
Nous exhortons également le gouvernement à entreprendre un processus global de réformes fiscales. Il faut prendre des mesures afin d'uniformiser la structure fiscale canadienne à celle des autres pays industrialisés et ainsi améliorer la compétitivité du Canada en matière de politique fiscale.
Voilà qui termine notre exposé officiel, monsieur le président. Nous serons heureux de répondre à toutes questions.
[Français]
Mme Nancy Hughes Anthony: Merci, monsieur le président. Nous répondrons maintenant aux questions que vous nous poserez.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup, madame Huges Anthony et monsieur McIver.
Nous allons maintenant passer à la Fédération des contribuables canadiens. Monsieur Walter Robinson, je vous souhaite la bienvenue.
M. Walter Robinson (directeur fédéral, Fédération des contribuables canadiens): Merci, monsieur le président.
[Français]
C'est un grand plaisir d'être parmi vous ce matin pour vous faire connaître nos positions et nos recommandations concernant le budget fédéral de 1999.
Je ferai ma présentation en anglais mais, comme d'habitude, je vais essayer de répondre à vos questions dans la langue de votre choix.
[Traduction]
Depuis ma comparution ici l'an dernier, nous sommes passés d'un déficit budgétaire à un excédent budgétaire. En cette ère d'excédent—nous préférons parler de surimposition—, on ne manque pas de groupes et de particuliers qui vous exhortent à financer toute une gamme de projets et de causes. Pourtant, comme on le dit, plus ça change et, plus c'est pareil. C'est surtout vrai dans le cas de la politique budgétaire du gouvernement.
C'est sur le dos des contribuables canadiens que l'on a équilibré le budget. Le ministre des Finances l'a presque reconnu. Des recettes gouvernementales inégalées, supérieures de 32 p. 100 à ce qu'elles étaient en 1993, sont la principale raison de notre réussite financière. Contrairement à ce que le ministère des Finances ou le BPM voudrait nous faire croire, la réduction des dépenses gouvernementales s'est surtout réalisée aux dépens des provinces, des forces militaires canadiennes et de plusieurs sociétés d'État.
Les recettes provenant de l'impôt personnel ont augmenté de 38 p. 100 et représentent maintenant 8,2 p. 100 de notre produit intérieur brut, comparativement à 7 p. 100 en 1993. Cela représente une augmentation inquiétante de 17 p. 100. Les recettes de la TPS ont également augmenté de 24 p. 100, alors que celles provenant de l'impôt des sociétés ont fait un bond incroyablement de 140 p. 100. Les Canadiens ont fait les frais de cette situation.
Les Canadiens croulent sous le taux d'imposition personnel le plus élevé parmi les pays du G-7. L'imposition fiscale commence ici à la moitié des gains que les citoyens de nombreux autres pays doivent accumuler avant de payer des impôts. Le non-ajustement des tranches d'imposition au taux d'inflation, l'ennemi des plus pauvres dans notre société, continue à ronger les revenus et les avantages de ceux qui peuvent le moins se permettre de se serrer encore la ceinture.
Selon ses derniers calculs, l'Institut Caledon évalue à 3,5 millions, un cinquième de tous les contribuables canadiens, le nombre de ceux qui sont maintenant exposés au rôle d'imposition ou au passage à une tranche de revenu supérieure à cause de la non-indexation. Même au ministère des Finances, on reconnaît que l'on a perçu 10 milliards de dollars de plus grâce à la non-indexation des tranches d'imposition.
Je m'en voudrais de ne pas rappeler aux membres du comité que l'an dernier, ils ont estimé à 840 000 le nombre de familles canadiennes à faible revenu—je ne parle pas de particuliers, mais bien de familles qui sont devenues assujetties au rôle d'imposition à cause de cette forme d'imposition insidieuse et cachée. Pourtant, cela continue.
Dans notre mémoire préparé pour les consultations prébudgétaires, nous avons compilé des recherches émanant de divers groupes d'experts et d'institutions multilatérales qui mettent en lumière la politique financière punitive de notre pays et l'appétit insatiable d'Ottawa pour les recettes fiscales. Il faut absolument donner plus de latitude aux contribuables, car encore aujourd'hui, dans notre pays, il faut attendre le milieu de l'année pour qu'arrive la journée d'affranchissement de l'impôt. Le revenu réel des Canadiens continue de diminuer. Un nombre croissant d'entre nous se livrent à des manoeuvres d'évitement fiscal. L'exode des cerveaux est plus important que jamais et ne fait que s'accélérer. Nous continuons en outre de punir les plus pauvres de notre société en appliquant des politiques fiscales régressives. Cela n'est pas propice à la santé de notre économie, point sur lequel je reviendrai dans un instant.
• 0930
Puisqu'on parle de santé, ce qui est sans nul doute la
première préoccupation des Canadiens—et vous l'avez certainement
entendu dire au cours de vos déplacements pendant l'automne—, nous
présentons également dans notre mémoire une analyse du débat actuel
entourant nos services de santé. Nous sommes fermement convaincus
que les législateurs canadiens sont trop obnubilés par un mandat
électoral de quatre ans pour s'attaquer de façon satisfaisante aux
vrais problèmes des soins de santé. L'enjeu ne consiste pas à
canaliser quelques milliards de dollars dans le système, car les
injections de fonds mal planifiées, dans n'importe lequel secteur
de la politique gouvernementale, ne font pas avancer les choses. Le
véritable enjeu consiste à évaluer objectivement la capacité du
système du payeur unique à financer une dette non provisionnelle au
titre de l'assurance-maladie de 1,2 billion de dollars, selon les
estimations. Ce sont des dépenses que nous aurons à assumer, nous
le savons, mais nous sommes mal équipés pour les financer à l'heure
actuelle. C'est un problème qui concerne plusieurs générations et
auquel les politiques de tout poil refusent de s'attaquer, et cela
représente le pire exemple d'abandon de leadership, tant sur le
plan moral que financier, de l'histoire de notre pays. C'est plus
important encore que le transfert entre générations de la dette et
du passif des pensions gouvernementales actuellement en cours.
Pour en revenir à la santé économique de notre pays, le moment est venu d'accorder d'importantes diminutions d'impôt à tous ceux qui touchent un revenu. Pour que les choses soient bien claires, notre mémoire indique que la majorité des contribuables canadiens n'ont pas reçu d'allégement fiscal comme le prévoyait le budget de 1998. Il est vrai que la surtaxe de 3 p. 100 a été supprimée progressivement, que l'exemption personnelle de base a augmenté, mais ces mesures s'étalent sur plusieurs années ou encore font l'objet d'une disposition de récupération pour les tranches de revenu supérieur. En outre, l'effet de la fiscalité insidieuse et l'augmentation des cotisations au RPC, une fois pris en compte dans le tableau fiscal général, ont réduit à néant ces mesures positives.
C'est pourquoi nous proposons des allégements fiscaux de 10 milliards de dollars. Pour compenser l'incidence d'ordre financier de ces mesures, nous prévoyons des diminutions possibles de dépenses ministérielles de plus de 12 milliards de dollars, un programme accéléré de diversification du mode de prestations des services et la cession de biens de la Couronne. Plus précisément, nous faisons les recommandations suivantes: une diminution d'impôt générale sur le revenu des particuliers de 10 p. 100, ce qui aurait pour effet de réduire les principales tranches d'imposition de 2 p. 100, lesquelles passeraient donc de 17 p. 100, 26 p. 100 et 29 p. 100 à 15 p. 100, 24 p. 100 et 27 p. 100 respectivement; la pleine indexation des tranches d'imposition et tous les crédits pour l'inflation au cours de l'année d'imposition 1999, une mesure qui mettrait fin au problème de fiscalité invisible que l'on appelle en anglais le «bracket creep»; enfin, la suppression des surtaxes fédérales de 3 et 5 p. 100 qui restent, étant donné qu'elles ne sont plus justifiées depuis que nous avons un budget équilibré.
Nous réitérons également notre demande de modification visant la protection du contribuable que nous avons proposée pour la première fois en 1996. Cette disposition rendrait à tout jamais les déficits illégaux, obligera le gouvernement à respecter un échéancier prévu dans la loi pour la réduction de la dette et obligerait l'approbation de projets d'augmentation d'impôt par voie de référendum national. Ce genre de loi est déjà en vigueur dans deux provinces, et est sur le point d'être approuvé en Ontario.
Nos propositions auraient pour effet de rétablir la confiance des Canadiens dans l'économie, de stimuler l'investissement dans la création d'emplois et de répondre aux demandes de longue date des contribuables qui souhaitent des allégements fiscaux. Je tiens à rappeler que nous proposons parallèlement de compenser les répercussions d'ordre financier de ces mesures par une réduction des dépenses dans les enveloppes budgétaires actuelles. Il est également possible de trouver d'autres sources d'économie dans les rapports présentés successivement par trois vérificateurs généraux.
L'excédent d'impôt de 10,4 milliards de dollars—nous en avons entendu parler vendredi dernier—que le gouvernement a engrangé au cours des six premiers mois de l'exercice financier, est dû principalement au taux élevé des cotisations à l'assurance-emploi. Nous incitons le gouvernement à accepter la demande que doit présenter la Commission de l'assurance-emploi en vue d'une diminution sensible de ces cotisations. En fait, le ministre des Finances Paul Martin a déclaré au Ottawa Citizen en mars dernier: «Je pars du principe que cet argent ne revient pas de plein droit au gouvernement.» Nous abondons dans ce sens. C'est aussi Paul Martin qui a déclaré, dans l'exposé économique qui vous a été présenté le mois dernier, que maintenant que le budget est équilibré—ce qui est certainement le cas—les Canadiens ont le droit—et le gouvernement, la responsabilité—de faire en sorte d'accroître leur revenu net. Là encore, nous abandons dans ce sens.
Nous convenons qu'il est temps de réduire les impôts. Comme le dit le vieux proverbe chinois: «Dans un royaume, des impôts modérés permettent d'accomplir davantage que des impôts trop lourds».
• 0935
Au nom de nos 80 000 partisans,
[Français]
merci de votre attention ce matin. J'attends vos questions avec impatience.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup, monsieur Robinson.
Nous entendrons maintenant le représentant du Collège des médecins de famille du Canada, le Dr Jacques Lemelin. Bienvenue.
[Français]
Dr Jacques Lemelin (professeur associé, Département de médecine familiale, Université d'Ottawa, Collège des médecins de famille du Canada): Merci.
Je suis professeur à l'Université d'Ottawa en médecine familiale et membre du Collège des médecins de famille du Canada et je fais aussi partie des chercheurs du collège.
Je vais d'abord faire un survol rapide de la recherche en médecine familiale au Canada. Je vous décrirai son importance et la place qu'elle occupe au sein des instituts canadiens de recherche en santé.
[Traduction]
Permettez-moi d'abord de vous décrire brièvement ce qu'est un laboratoire de soins primaires. Sur cette feuille jaune, vous pouvez voir un diagramme qui a été utilisé pour la première fois par le Dr Kerr White, un médecin d'Ottawa qui malheureusement travaille maintenant aux États-Unis. Il s'est servi de ce digramme pour comparer les parties de la population qui consultent des médecins de famille ou des spécialistes.
Sur un échantillonnage de 1 000 personnes, vous pouvez voir qu'au fur et à mesure que les carrés diminuent en taille, nos patients sont de plus en plus malades et de moins en moins nombreux. Les gens représentés par les carrés les plus petits sont à des étapes plus avancées et plus graves de la maladie. C'est à cette étape que sont effectuées les recherches sur les transplantations cardiaques ou les traitements du cancer, par exemple.
Les gens représentés dans les carrés plus grands sont en bonne santé ou alors aux toutes premières étapes de la maladie, et la recherche en ce qui les concerne porte surtout sur la promotion de la santé cardiaque et la prévention. Je vous signale qu'un rapport, l'étude Ekos, qui avait été commandé par le Conseil de recherches médicales du Canada, révélait que 80 p. 100 des Canadiens estiment qu'il faudrait consacrer une part plus grande du financement de la recherche dans les domaines de la prévention et de la promotion de la santé.
Dans ce grand bloc également, la recherche vise à combler les lacunes qui existent dans le passage de la connaissance à la pratique. Nous possédons beaucoup d'informations sur ce qui devrait se faire en matière de prévention, dans les soins médicaux de routine, mais pour de nombreuses raisons, des raisons qui tiennent aux patients, aux médecins ou aux milieux, souvent ces choses-là ne se font pas. La recherche relative aux plus grands carrés est mesurée par les médecins de famille. Celle portant sur les carrés plus petits est mesurée par des scientifiques de la biomédecine de laboratoire et porte sur une population beaucoup plus faible. Ce déséquilibre de la recherche pose un problème grave, parce que la vaste majorité de la recherche, sinon toute la recherche, se fait à ce niveau-là.
Lorsqu'un médecin de famille reçoit un patient dans son bureau et essaie d'appliquer les résultats de la recherche du petit carré à un problème qui relève du grand carré, souvent, cela ne marche pas et cela produit un examen trop poussé et une surordonnance de médicaments. Par exemple, lorsqu'un patient souffrant de bronchite, dans le petit carré, est hospitalisé pour une maladie pulmonaire chronique grave, il s'agit d'un problème complexe qui nécessite la plupart du temps un travail en laboratoire et des ordonnances d'antibiotiques. Appliquer les résultats de la recherche de ce niveau-là à un patient qui consulte le médecin dans son bureau mène souvent à un examen excessif et à la surordonnance. Par conséquent, les soins de santé sont de moins bonne qualité et ils sont plus coûteux. La recherche relative aux patients qui se trouvent dans ce carré doit se faire à ce niveau-là. De cette façon, les résultats de la recherche peuvent s'appliquer à cette population.
Jusqu'à présent, à peu près tout le financement de la recherche était versé aux catégories des petits carrés. Nous espérons que les instituts canadiens de recherche dans le domaine de la santé préconiseront une méthode mieux équilibrée de financement de la recherche en matière de santé.
Voici quelques exemples des domaines dans lesquels la recherche est effectuée. Il y a d'abord une étude réalisée par Jimenez et autres sur les répercussions d'assister à des actes de violence conjugale, pour la santé mentale des enfants. Il y a également un essai au hasard des consultations pharmaceutiques, dans le contexte de la médecine familiale, en ce qui a trait aux personnes âgées qui prennent des médicaments multiples. C'est un énorme problème à l'heure actuelle au Canada. Ce problème est coûteux et nuit à la qualité des soins de santé. Il y a également une autre étude à l'Université McGill sur la relation médecin-patient dans le contexte des différences socio-culturelles entre le médecin et le patient. C'est un autre problème croissant au Canada. Une autre étude porte sur la fréquence idéale des visites de suivi dans le cas de l'hypertension. Un patient souffrant d'hypertension peut être vu tous les mois, tous les deux mois ou tous les six mois. C'est le médecin qui en décide. S'il n'existe pas de lignes directrices dans ce domaine, la qualité des soins de santé diminue et leurs coûts augmentent.
• 0940
Il sera tout à fait profitable pour le Canada de disposer d'un
secteur robuste des soins primaires qui puisse avoir recours à sa
propre assise de recherche. Ce ne sera possible que si l'on adopte
une méthode plus équilibrée de financement des soins de santé.
Nous avons remis certains documents, dont un exemplaire de Kaléidoscope, du Collège des médecins de famille, ainsi que l'index actuel de tous les projets de recherche menés par des médecins de famille au Canada. La section qui porte sur les chercheurs du Collège comporte plus de 400 projets. On essaie de plus en plus de faire de bonnes recherches dans le secteur des soins primaires, mais il faut pour cela avoir le financement nécessaire.
Merci.
Le président: Merci beaucoup, docteur Lemelin.
Nous entendrons maintenant le Conference Board du Canada, représenté par M. Paul Darby.
M. Paul Darby (directeur, Services économiques, Conference Board of Canada): Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis très content de venir vous rencontrer ce matin pour partager avec vous nos perspectives de l'économie canadienne.
Mes remarques se situent dans le contexte d'autres témoignages que vous avez entendus, d'un certain nombre d'organismes de prévision, il y a une semaine et demie environ. Ce matin, je ferai des remarques générales sur notre évaluation de l'orientation générale de l'économie canadienne. Dans la trousse que je vous ai remise, vous trouverez un synopsis de notre dernière Note de conjoncture canadienne, qui vous donnera une perspective plus détaillée.
J'aborderai plus particulièrement deux questions quant aux raisons pour lesquelles le Conference Board estime peu probable que le Canada connaisse l'an prochain une récession ou un ralentissement économique prononcé. Les indicateurs économiques les plus récents font perdre peut-être de leur fraîcheur à cette nouvelle, mais permettez-moi de vous expliquer les raisons pour lesquelles nous sommes de cet avis.
À l'heure actuelle, les éléments fondamentaux de l'économie canadienne sont généralement très solides et on ne trouve pas, dans la plupart des marchés du Canada, de demande excessive ou d'augmentation de prix due à la spéculation. On ne voit pas dans ces marchés les fluctuations excessives que l'on constate normalement avant un ralentissement important. Le budget fédéral enregistre un surplus, et nous en sommes très contents. Cela signifie qu'il est moins probable qu'il y ait des compressions financières sérieuses l'an prochain, ce qui encouragera une certaine croissance.
Les bilans financiers des entreprises ne relèvent aucun problème. Le passif et l'actif se sont rarement aussi bien portés. Le système bancaire canadien va on ne peut mieux, et il suffit pour s'en convaincre de le comparer à la situation de l'épargne et des prêts aux États-Unis avant le dernier déclin économique. Sur le marché immobilier, les prix des maisons n'ont pas été poussés vers des sommets excessifs. Il y a peut-être eu une augmentation des prix dans certains marchés, comme celui de Calgary, où ces augmentations ont été considérables, mais d'une façon générale, les prix des maisons sont demeurés relativement stables partout au pays.
L'immobilier commercial n'est certes pas en période de prospérité due à la spéculation. Il n'y a pas de surinvestissement, ni de surenchère débridée. Nous savons qu'il y aura de forts investissements dans le secteur de l'énergie l'an prochain, mais ces investissements solides en fonction d'un prix du pétrole fixé à 15 $ le baril ne s'effondreront pas du jour au lendemain.
Si nous regardons la situation, nous ne pouvons nous empêcher d'estimer, je le répète, que les éléments fondamentaux d'une vaste majorité des marchés importants du Canada se portent magnifiquement. Avec le recul, nous pouvons identifier trois problèmes. Deux d'entre eux ont maintenant été corrigés, du moins à notre avis.
Avant les mois d'été de 1998, les stocks étaient excédentaires, mais le problème s'est résorbé dans le deuxième et le troisième trimestre. C'est l'une des principales faiblesses qu'il y avait au cours des mois d'été au Canada. La réduction de ces stocks a entraîné des coûts, bien sûr, mais ces coûts n'ont pas été assez importants pour provoquer une récession.
Certains disent qu'il y a eu surenchère sur les marchés boursiers, et cela semble assez évident si l'on compare les prix et les gains. Mais les éléments fondamentaux du marché boursier semblent en meilleur état maintenant, après la plus récente correction, même si ces corrections ont sans doute eu des effets douloureux dans certains cas. Pour 1999, nous ne prévoyons pas d'autres corrections plus graves sur le marché boursier.
• 0945
Le problème qui reste, à notre avis, c'est que l'endettement
des consommateurs est encore très élevé. Les taux d'épargne sont
très faibles, comme vous le savez. Ce n'est pas trop grave tant
qu'il n'y a pas une augmentation importante des taux d'intérêt.
Avec les taux d'intérêt actuels, le coût de l'endettement des
foyers semble encore assumable.
Il faut également se rappeler que les revenus demeurent dans le système, malgré les préoccupations relatives au déclin des marchés boursiers et aux crises financières internationales. La correction du marché boursier a certes des effets sur la richesse. Ces effets ne sont pas sans importance, mais nous n'avons pas constaté de grands effets directs sur le salaire net, qui détermine dans une plus grande mesure les dépenses et qui risque bien plus d'entraîner une récession.
Bien des provinces ont décidé de réduire leurs impôts. Il y a évidement le cas de l'Ontario. De telles mesures permettent de conserver les revenus dans le système.
Enfin, pour ce qui est de la croissance de l'emploi en 1999, nous sommes optimistes en raison du nombre important de projets de construction non résidentielle, projets qui créent des emplois, et en raison des exportations qui sont favorisées par la faible valeur du dollar. Tout cela favorise le maintien des dépenses des consommateurs.
Le maintien d'un faible taux d'inflation au Canada est également un facteur crucial. En raison du déclin du dollar, on a entendu des gens dire que le Canada était maintenant plus pauvre par rapport au reste du monde. C'est sans doute vrai si vous prévoyez vous rendre en Floride. C'est également vrai si vous voulez importer des produits de l'étranger.
Généralement, pour qu'un dollar faible appauvrisse l'ensemble des Canadiens, il faudrait que nous importions l'inflation. L'indice des prix à la consommation augmenterait en raison de l'augmentation des prix de l'importation. Jusqu'à présent, les chiffres ne donnent aucun indice de ce genre.
Nos prévisions montrent qu'il pourrait y avoir une légère augmentation de l'indice des prix à la consommation, mais que ce ne serait pas considérable. La structure des coûts de nos fournisseurs a certes bénéficié de la réduction des prix des produits de 40 à 60 p. 100, en moyenne, partout au monde. Les coûts des intrants des fabricants américains et allemands sont plus faibles grâce à ce prix plus faible des produits, ce qui permet de contrebalancer l'effet que pourrait avoir sur les prix la faiblesse du dollar.
Je ne saurais trop insister sur ce point. À l'heure actuelle, des gens qui vivent en Indonésie, par exemple, ou le taux d'inflation atteint les 40 p. 100, sont bien plus appauvris en ce qui a trait à leur salaire net réel. Au Canada, il n'y a aucun signe d'augmentation de l'inflation.
Nous croyons que la croissance sera plus lente l'an prochain, mais nous devons faire attention de ne pas être trop pessimistes. La confiance des consommateurs et des entreprises a été durement touchée. Le Conference Board of Canada entreprend en fait des sondages pour évaluer le degré de confiance des consommateurs et des entreprises. L'indice de confiance des consommateurs a connu une chute record, ou presque, au cours du troisième trimestre, et celui des entreprises en a fait autant. À notre avis, les effets de cette situation se feront sentir au niveau des dépenses durables des consommateurs, du logement et peut-être de l'investissement.
De toute évidence, notre économie souffre également de la diminution des exportations vers l'Asie de l'Est. Nous prévoyons une croissance plus lente aux États-Unis, ce qui ralentira également le rendement de nos exportations dans ce pays. La diminution du prix des produits a nui dans une certaine mesure aux investissements et aux activités du secteur des ressources—forage pétrolier et gazier, certains projets miniers, investissement. Il y a également le fait que les consommateurs ont tout ce dont ils ont besoin, dans une certaine mesure. On ne peut pas s'attendre à ce que la consommation d'automobiles—véhicules et pièces—continue d'enregistrer des taux réels de croissance de plus de 10 p. 100 en 1999.
Mais je tiens à répéter que même si nous prévoyons une croissance plus lente l'an prochain, vous ne devriez accorder aucun crédit aux rumeurs de récession qui peuvent circuler.
Merci beaucoup.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Darby.
Nous entendrons maintenant le représentant de la Fondation du diabète juvénile, Michael Giroux ou Alan Patt.
M. Alan Patt (vice-président bénévole, Fondation du diabète juvénile Canada): Bonjour. Je m'appelle Alan Patt et je suis vice-président bénévole de la Fondation du diabète juvénile Canada. Je suis accompagné ce matin d'Elizabeth Braden, l'un de nos administrateurs.
La Fondation est très heureuse de pouvoir présenter ses recommandations au Comité permanent des finances, dans le cadre de ses consultations prébudgétaires.
La Fondation est un organisme bénévole de soins de santé qui possède divers chapitres partout au Canada et au monde. Sa mission est de trouver un moyen de guérir le diabète et ses complications par le truchement d'une aide à la recherche. En fait, la Fondation fournit davantage de fonds directement à la recherche sur le diabète que tout autre organisme à but non lucratif ou agence non gouvernementale de soins de santé au monde. Depuis sa fondation en 1970, la Fondation a versé quelque 435 millions de dollars pour la recherche sur le diabète et, d'ici l'an 2000, ce financement devrait dépasser les 100 millions de dollars par année.
• 0950
Le diabète est un trouble métabolique chronique, une maladie
auto-immune qui empêche le corps de fabriquer de l'insuline. Le
diabète peut être traité et géré, jusqu'à un certain point, grâce
à de nombreuses injections d'insuline chaque jour, mais l'insuline
ne guérit pas la maladie.
Au Canada, 2 250 000 personnes souffrent du diabète, et chaque année, on diagnostique 60 000 nouveaux cas. La maladie peut frapper n'importe qui, quel que soit le sexe, l'âge ou la race.
Le diabète nuit à la santé des Canadiens, mais il a aussi des effets économiques. La réduction de l'espérance de vie des diabétiques peut atteindre 30 p. 100. C'est aussi la principale cause de cécité et d'insuffisance rénale terminale. En fait, 40 p. 100 des nouveaux patients qui doivent subir une dialyse souffrent de diabète. Les diabétiques ont de deux à quatre fois plus de chance de mourir d'une maladie cardiaque ou d'un accident cérébrovasculaire. C'est la principale cause d'amputation non traumatique. Plus de la moitié des amputations des membres inférieurs au Canada sont effectuées sur des diabétiques.
Chez les femmes, le diabète est le principal facteur de maladies cardiaques prématurées. En fait, plus de femmes meurent chaque année du diabète et de ses complications que du cancer du sein et du sida combinés. Le diabète a atteint des proportions d'épidémie dans les communautés autochtones canadiennes. Dans certaines communautés, plus de la moitié des membres sont diabétiques.
Ce sont là les coûts humains et de santé de la maladie. Ses coûts économiques sont tout aussi effrayants. On estime que le diabète coûte au régime de soins de santé canadien plus de 3 milliards de dollars chaque année. Un dollar sur sept consacré aux soins de santé sert à lutter contre le diabète et ses complications.
Les prix des médicaments des diabétiques sont quatre fois plus élevés que ceux des non-diabétiques. Le taux d'absentéisme des diabétiques est de deux à trois fois plus élevé. On estime que la famille d'un enfant déclaré diabétique à l'âge de trois ans paiera, au cours de sa vie, plus de 200 000 $ en insuline, en seringues et en autres fournitures.
Avant d'aller plus loin, il importe de remarquer que les fonds réunis au Canada par la Fondation demeurent au Canada. Nous faisons notre part pour trouver des fonds, pour aider la recherche canadienne et pour trouver des moyens de guérir et de prévenir le diabète et ses complications. Nous demandons maintenant au gouvernement de faire sa part.
Monsieur le président, je tiens à dire que nous apprécions que le gouvernement ait entrepris de renverser sa tendance à réduire le financement du Conseil de recherches médicales du Canada en ramenant le budget de 1998 de ce conseil à son niveau de 1994. Toutefois, il ne faut pas en rester là. Le CRM joue un rôle essentiel puisqu'il est la principale agence fédérale de financement de la recherche médicale au Canada. Toutefois, au cours des dernières années, les budgets du CRM ont fait l'objet de compressions inacceptables. Ces compressions ont eu des répercussions profondes. L'investissement du Canada dans la recherche en matière de santé, par habitant, comparativement aux autres nations industrialisées occidentales, a maintenant atteint un niveau plus bas que jamais. Par exemple, au cours de l'exercice financier 1994-1995, le gouvernement du Canada a dépensé, par le truchement du CRM, 1 $ par habitant pour la recherche médicale, comparativement à 6,50 $ par habitant aux États-Unis, par le truchement des National Institutes of Health. En 1997-1998, le ratio est passé de 1 $ au Canada pour 8 $ aux États-Unis.
Il faut noter que dans l'accord budgétaire américain d'octobre 1998 l'augmentation de près de 15 p. 100 accordée aux NIH représente 2 milliards de dollars américains consacrés à la recherche en santé. Si nous nous servons du traditionnel ratio démographique de 10 pour la population américaine et de 1 pour le Canada, cette augmentation est telle que la croissance d'un an du budget des NIH est supérieure à l'ensemble du budget du CRM, qui est d'environ 250 millions de dollars canadiens.
Un autre résultat de la baisse du financement du CRM, c'est la fuite des cerveaux que nous constatons parmi les chercheurs canadiens. Cette perte des emplois et des talents canadiens représente un potentiel perdu, une stagnation économique et la crainte que nous ne considérions désormais Banting et Best comme les derniers grands points de référence pour les diabétiques, eux dont les travaux remontent à plus de 75 ans.
Enfin, je voudrais pour un instant parler de la recherche actuellement en cours et partager avec vous la montée de l'espoir pour les diabétiques et leurs familles.
• 0955
Grâce, en grande partie, à de la recherche financée par la
JDF, nous avons constaté un accroissement considérable de notre
base de connaissances scientifiques. Cette base a permis
d'améliorer les traitements ainsi que les mesures préventives.
Chose plus importante encore, elle a fourni aux chercheurs la
fondation nécessaire pour réaliser des progrès importants en
matière de prévention, de blocage et de guérison du diabète et de
ses séquelles.
Les secteurs de recherche suivants représentent de l'espoir pour l'avenir, mais ont besoin de financement supplémentaire important pour porter fruit. On a fait la démonstration, sur un modèle animal, du succès de l'ingénierie cellulaire à rétablir et remplacer les fonctions des cellules bêta au moyen des cellules de la glande salivaire. Les techniques d'ingénierie cellulaire par transfert génétique sont extrêmement prometteuses. Les progrès des greffes d'organes tels que les reins, sans recours à des immunosuppresseurs, auront une incidence considérable sur notre aptitude à rétablir et à remplacer les fonctions des cellules bêta grâce à la greffe d'îlots pancréatiques. L'élaboration de nouveaux tests permettant de découvrir des auto-anticorps pour identifier des enfants hautement susceptibles de développer le diabète insulino-dépendant pourrait mener à des thérapies qui retardent le diabète ou l'empêchent de se déclarer. Ces percées pourraient donner aux gens affligés du diabète de meilleures possibilités de vivre une vie normale et plus longue sans souffrir des complications porteuses de risques élevés.
Nous avons inclus, en annexe à notre mémoire, une liste des recherches que la JDF finance actuellement au Canada. Depuis longtemps, nous sommes des partisans du soutien fédéral à la recherche biomédicale. Depuis longtemps, nous avons également contribué à financer la recherche qui permettrait de trouver un remède ou un traitement. Toutefois, nous considérons la recherche biomédicale comme la responsabilité conjointe des secteurs public et privé. C'est pourquoi, au fil des ans, la JDF a été le plus grand contributeur non gouvernemental à but non lucratif en matière de recherche portant sur le diabète dans le monde.
La valeur de la recherche biomédicale dépasse de loin l'aptitude à guérir des maladies dévastatrices et à réaliser des économies en coûts de soins de santé. L'industrie biotechnologique canadienne représente l'un des éléments de croissance les plus rapides de notre économie et elle est essentielle pour défendre notre statut de leader mondial et de concurrent important dans le domaine des technologies de pointe. Nous devons accroître considérablement l'appui du gouvernement fédéral à la recherche scientifique pour assurer la croissance continue de ce secteur prometteur de notre économie. En outre, la JDF appuie fortement la création des instituts canadiens de la recherche en santé. L'élaboration de réseaux de recherche nous dotera du cadre nécessaire pour favoriser les percées scientifiques. Toutefois, nous devons assurer que ces instituts reçoivent des ressources financières adéquates pour atteindre leurs objectifs.
Monsieur le président, la JDF estime que la recherche en santé doit être la pierre angulaire de toute discussion budgétaire. Dans le cas de la recherche sur le diabète, les 2,25 millions de diabétiques canadiens et leurs familles méritent un investissement important du gouvernement, non seulement pour améliorer leur santé, mais également pour assurer la viabilité future du système de soins de santé.
Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Patt.
Nous passons maintenant au professeur Peter Dungan, de l'Université de Toronto. Je vous souhaite la bienvenue.
M. Peter Dungan (professeur adjoint d'économie, Institute for Policy Analysis, Université de Toronto): Merci, monsieur le président. Merci beaucoup de l'invitation à comparaître aujourd'hui devant le comité. En ma qualité d'universitaire, il est toujours très agréable d'être considéré comme utile; je suis donc très heureux d'être ici.
Mon petit groupe au Institute for Policy Analysis (Institut d'analyse des politiques) de l'Université de Toronto effectue constamment de la recherche sur l'économie. Mon collègue, le professeur Tom Wilson, a comparu devant vous il y a deux semaines, et a présenté ses perspectives sur l'économie et sur certaines mesures qui devraient être incluses dans le budget à venir. Je porte à votre attention ses observations, une fois de plus.
Je voudrais également dire que nos travaux confirment en très grande partie ce que vient de dire M. Darby, du Conference Board du Canada. Vous ne devriez pas trop vous préoccuper d'une profonde récession l'année prochaine. L'économie traversera des moments difficiles, mais ce ne sera pas un grand repli. Il est parfois difficile de dire de ne pas écouter les pessimistes, les Cassandre, d'affirmer que tout va bien aller. On a toujours l'air de se faufiler ou d'être timide, comme vous voudrez. Toutefois, il arrive parfois que ce soit vrai, et que les choses se produisent ainsi. Il y a d'excellentes justifications à la bonne santé de l'économie canadienne. Il faut, bien sûr, se préoccuper honnêtement de certaines choses, être un peu prudent, mais ne pas s'abandonner entièrement à la hantise d'être en très grande difficulté. Nous ne le sommes certainement pas, d'après ce qu'indiquent nos recherches.
Ce dont je voudrais discuter brièvement avec vous aujourd'hui, c'est un document de recherche que mon institut prépare depuis près d'un an. Il a été publié il y a deux semaines par l'Institut C.D. Howe. J'avais demandé que des exemplaires de cette étude vous soient communiqués, mais je crois comprendre que, je ne sais trop comment, ils ne vous sont pas parvenus. Je suis désolé de n'avoir pas vérifié qu'ils vous étaient parvenus. S'ils ne sont bel et bien pas ici, je prendrai les mesures qui s'imposent pour qu'ils vous soient remis rapidement. C'est peut-être le résultat de mauvaises communications entre moi-même et l'Institut C.D. Howe, mais je regrette que ces documents ne se trouvent pas sous vos yeux.
• 1000
Cette étude—et je vais simplement la résumer très
rapidement—était essentiellement une étude des augmentations des
charges sociales au titre du Régime de pensions du Canada qui se
produiront au cours des quelques années à venir et de leur
incidence probable sur l'économie canadienne. Bien que cela ne soit
pas d'une pertinence immédiate pour les discussions prébudgétaires,
c'est un document qui fournit des renseignements extrêmement
importants, selon moi, pour la politique financière du gouvernement
fédéral des quelques années à venir. Ces choses-là vont se produire
en arrière plan; il est donc important que nous en comprenions les
effets.
Notre étude a été effectuée au moyen d'un modèle informatisé de simulation de l'économie canadienne. Nous avons élaboré, construit et maintenu ce modèle à l'université depuis plus de 20 ans. Nous nous en sommes servis à de nombreuses reprises pour examiner les budgets et diverses autres mesures budgétaires et politiques. Si je vous dis cela, c'est parce que, dans un bon nombre de groupes auxquels je m'adresse, dès que je dis le mot «modèle», je perds immédiatement une certaine crédibilité et une part de l'intérêt des auditeurs. Si je dis «modèle informatisé», je perds alors toute crédibilité et tout intérêt. Le fait est que ces outils ont été utilisés. Ils sont utilisés par d'autres organismes, tels que le Conference Board, pour analyser des questions complexes touchant des politiques gouvernementales. Ce sont les seuls outils dont nous disposons actuellement, malgré leur imperfection, pour attribuer des chiffres réels à certains phénomènes. Ils n'existent pas simplement pour que nous puissions dire: ceci est bon, ceci est mauvais, ou ceci va faire un peu mal ou va faire très mal. Ils existent plutôt pour que nous puissions dire: nous avons des chiffres approximatifs—très approximatifs—quant aux effets prospectifs réels de ces politiques.
Nous avons soumis les réformes du RPC amorcées en 1997 et poursuivies en 1998 à notre modèle. Nous en avons tiré des conclusions positives ainsi que des conclusions négatives, comme toujours. Les conclusions positives, c'est qu'à long terme les révisions du RPC permettent de sauver le régime. Elles rétablissent une base budgétaire saine. Elles amènent également l'économie, au cours de la vingtaine d'années à venir, à accumuler des capitaux et des économies supplémentaires, tant à l'échelle nationale qu'à l'étranger. Ces mesures-là seront absolument nécessaires pour soutenir les baby-boomers lorsqu'ils commenceront à prendre leur retraite, et j'en suis.
Les mauvaises nouvelles, c'est qu'il y a un coût de transition à court terme qui risque d'être grave. Cette transition à court terme découle particulièrement de l'augmentation des cotisations des employeurs, qui font partie de l'équation. Pourquoi cela pose-t-il problème? Tout d'abord, quelle est la gravité du problème? Nous prévoyons que le problème atteindra son point culminant en 2003, soit une perte relative d'environ 13 milliards de dollars du PIB et de près de 200 000 emplois. Je tiens toutefois à préciser qu'il s'agit d'une conséquence temporaire. Deux ou trois ans après cette date, cette conséquence disparaît. C'est donc une conséquence temporaire, mais qui est suffisamment importante pour que je m'en inquiète. Je crois qu'au cours des quelques prochaines années l'économie n'affichera pas la performance à laquelle on aurait pu s'attendre.
À quoi cela est-il attribuable? Effectivement, une taxe sur la masse salariale imposée aux employeurs, ou toute augmentation des cotisations, quelle qu'elle soit, diminuera le pouvoir d'achat, ce qui entraîne une diminution de la demande de biens et services, et par conséquent affaiblit l'économie. Il existe certains moyens de compenser cette situation. La Banque du Canada peut intervenir et indiquer qu'une diminution de la demande signifie une diminution des prix, et peut envisager d'abaisser les taux d'intérêt. Cela permettra d'améliorer la situation. Mais toute taxe imposée aux employeurs particulièrement est susceptible de se répercuter sur les prix. Cela se traduira par des prix plus élevés, ce qui aggravera la situation des consommateurs. La Banque du Canada doit alors indiquer qu'il y a inflation et qu'elle doit hausser les taux d'intérêt, et non pas les abaisser.
L'autre problème, c'est qu'il s'agit d'un coût direct d'embauche. La concurrence accule les entreprises au pied du mur, et elles arrivent à peine à joindre les deux bouts. Nous avons une économie mondiale dans laquelle tout le monde... Il reste très peu de dégraissage à faire. Si vous augmentez le coût qui se rattache à l'embauche d'un employé par rapport à l'utilisation d'un capital accru, les entreprises cesseront d'embaucher. Ce n'est pas tant qu'il y aura des mises à pied; mais on embauchera tout simplement moins au cours des prochaines années. Bien entendu, cela se répercute sur l'ensemble de l'économie, puisque le pouvoir d'achat se trouve encore plus réduit et que l'on craint que les gens ne consomment moins par suite de mises à pied. Donc la situation ne fait que s'aggraver.
Quelles sont les solutions à ce problème? Je dirais que s'il n'existe aucun autre moyen de contourner le problème, nous devrions opter pour la formule de la douleur à court terme pour un gain à long terme. Il faut sauver le RPC. Le problème, c'est que les Canadiens sont presque trop habitués à la douleur à court terme ces jours-ci. Nous ne nous sentons que dans la douleur à court terme.
Il y a d'autres solutions. Mon étude en examine plusieurs, des plus draconiennes aux moins draconiennes. Nous pourrions envisager de restructurer le Régime de pensions du Canada pour en faire un système plus privatisé, ce qui réduirait essentiellement le fardeau de l'employeur. Cela permettrait de réduire les coûts d'ajustement à court terme, mais c'est un tout autre problème, dont nous devons discuter à un autre moment.
• 1005
Nous pourrions transférer une partie du fardeau à l'impôt sur
le revenu des particuliers et la retirer des charges sociales.
Après tout, un impôt est un impôt, et cela serait plus équitable et
permettrait d'atténuer ce problème à court terme. Nous pourrons en
discuter de façon plus approfondie si vous le souhaitez.
La troisième méthode, qui est peut-être la plus facile, est cette occasion en or qui nous est offerte. Nous devons augmenter les charges sociales pour financer le RPC, mais nous avons une autre charge sociale, à savoir l'assurance-emploi, qui affiche un excédent. Si nous réduisions les primes d'assurance-emploi de 20c. à 30c. par année au cours des deux ou trois prochaines années, nous pourrions annuler la plupart des conséquences désastreuses de la hausse des cotisations au RPC. C'est sur ce dernier point que j'aimerais attirer votre attention. Il existe de nombreuses raisons convaincantes d'envisager des réductions des cotisations à l'assurance-emploi. L'une d'elles, c'est qu'une telle réduction pourrait contribuer à sauver le Régime de pensions du Canada, en évitant les dégâts à court terme pour l'économie qu'un tel sauvetage pourrait autrement comporter.
Je vous remercie.
Le président: Je vous remercie.
Nous allons maintenant passer à la période de questions. Nous aurons un tour de dix minutes, et nous commencerons par M. Ritz.
M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, Réf.): Je vous remercie, monsieur le président.
Mesdames et messieurs, je tiens à vous remercier de vos exposés de ce matin, qui poussent à la réflexion. Ils ne manqueront sûrement pas de stimuler le débat.
Ce qui semble revenir dans les témoignages d'un bon nombre de groupes, également, c'est que la fiscalité excessive est une réalité au Canada, ce qui nous défavorise sur le plan économique si nous nous comparons aux États-Unis, etc. Nous avons dans notre pays une économie souterraine qui ne cesse de prendre de l'expansion. Ce phénomène est alimenté par des impôts élevés, les augmentations au RPC dont le professeur vient de parler, et par les taux élevés d'assurance-emploi qu'il faudra bien entendu réduire—comme nous l'indiquent les actuaires—surtout pour les personnes qui travaillent à leur compte, et qui paient les deux parts. Le RPC, conjugué à une hausse des investissements privés dans les REÉR, est probablement la solution. Pour y arriver, nous envisageons des changements concernant la règle du contenu étranger. Jusqu'où devons-nous aller? Devons-nous éliminer complètement la limite? Jusqu'où peut-on aller pour alléger le fardeau de la population tout en maintenant le filet de sécurité auquel sont habitués et attachés les Canadiens? C'est une question que j'adresse à tous les témoins.
Le président: Qui aimerait... monsieur McIver?
M. Don McIver: Je vais essayer d'y répondre.
Lorsque nous parlons de l'élément étranger des épargnes canadiennes, nous nous attaquons en fait à une question extrêmement complexe. Si j'ai dit qu'elle est extrêmement complexe, c'est en raison de l'aspect démographique qui s'y rattache, du processus général de vieillissement et des besoins collectifs des Canadiens. Lorsqu'ils arriveront à un stade, collectivement, où la proportion de gens à la retraite sera beaucoup plus élevée qu'elle ne l'est à l'heure actuelle, on devra pouvoir faire appel à des ressources qui ne sont tout simplement pas produites dans notre pays.
Prenons un exemple extrême. Supposons que tout le monde est à la retraite et que tout le monde a en main un morceau de papier qui indique qu'ils ont droit à un actif financier. Si c'était le cas, il n'y aurait aucune production cette année-là. Donc, quel serait l'actif auquel ils auraient droit? À mon avis, c'est le genre d'argument fondamental selon lequel au fur et à mesure que la population vieillit, nous allons devoir faire appel aux investissements que nous avons faits dans les pays dont la population a un profil démographique plus jeune. Si vous examinez la situation dans cette optique, mise à part toute autre considération à propos de la liberté d'un particulier de choisir ses investissements, vous reconnaissez que nous allons devoir inévitablement nous orienter dans cette voie.
Le président: Monsieur Robinson.
M. Walter Robinson: Pour répondre à votre question, monsieur Ritz, nous avons souligné dans notre mémoire que la création de notre système public de pensions et de soins de santé dans les années 60 était motivée par des valeurs et une compassion communes et la constatation au Canada que nous nous occuperions des besoins individuels en temps voulu sur le plan des pensions et des soins de santé. En ce qui concerne particulièrement la population vieillissante, nous ferons de plus en plus appel chaque année à une réserve de ressources.
Comme mon collègue de la Chambre de commerce du Canada l'a fait remarquer, la proportion de Canadiens qui travaillent par rapport aux Canadiens à la retraite au cours des années 60, lorsque ces mesures ont été adoptées, était de neuf contre un. Aujourd'hui, elle est d'environ six contre un. D'ici à l'an 2015, elle sera de cinq contre un. Compte tenu des prévisions démographiques actuelles, d'ici à l'an 2050, nous aurons trois Canadiens qui travaillent pour chaque personne à la retraite. Autrement dit, nous devrons subvenir aux besoins individuels d'un plus grand groupe à l'aide d'une plus petite réserve de ressources collectives. Nous pensons que la solution réside dans la capitalisation de ce passif non capitalisé.
• 1010
Les arguments que nous présentons en ce qui concerne les soins
de santé—qui représentent un problème beaucoup plus grave que le
Régime de pensions du Canada et notre dette nationale mis
ensemble—sont très simples. Nous vous implorons d'examiner les
répercussions que vos politiques auront sur les générations
futures. Veuillez cesser d'envisager des solutions de fortune à ces
problèmes en fonction des périodes électorales qui reviennent tous
les quatre ans. L'Institut C.D. Howe a indiqué que les générations
futures de Canadiens paieront de plus en plus d'impôts en tant que
pourcentage de leur revenu pour financer ces programmes.
Certains disent que nos arguments ont un fondement idéologique. Je dirais plutôt qu'ils ont un fondement arithmétique. Car si on se tourne vers l'avenir, il y a quelque chose qui cloche. Donc, pour répondre à votre question, nous vous demandons d'examiner les répercussions de ces problèmes sur les générations à venir et de cesser de recourir à la hausse d'impôt. Si vous voulez perpétuer ces valeurs de compassion, non seulement pour la génération présente, mais aussi pour celle de nos enfants, il faut envisager des réformes plus fondamentales des assises mêmes de ces programmes. C'est tout ce que nous demandons.
Le président: Y a-t-il quelqu'un d'autre?
M. Peter Dungan: Je pourrais peut-être revenir sur ce que disaient les deux intervenants, en ce qui concerne notre étude de modélisation à long terme. On a tendance à croire que si on établit les modalités financières, si le financement existe, disons, pour le Régime de pensions du Canada, alors on a d'une certaine façon réglé le problème des baby-boomers. Eh bien, ce n'est pas le cas. Si vous regardez plus loin, en l'an 2030 ou 2040, il y aura moins de gens qui travaillent pour, disons, le nombre de gens qui veulent consommer une partie du gâteau. Peu importe les modalités financières que vous aurez établies plus tôt, vous aurez un problème au niveau du partage. Il y aura plus de gens qui réclameront à manger et moins de gens qui produiront de quoi les nourrir, si on veut, à ce moment-là. Comment peut-on réduire la gravité de ce problème?
Il n'y a que trois solutions. La première, c'est de permettre à plus de gens de travailler. On pourrait peut-être laisser travailler les personnes âgées de 66 et 67 ans. C'est une solution possible, que nous devrions envisager. La deuxième option, c'est de nous assurer que ceux qui travailleront dans cet avenir lointain seront aussi productifs que possible. Comment peut-on y arriver? Il faut s'assurer que l'économie investit dans la constitution d'un capital au fil des ans à l'avance. Et la troisième méthode consiste à faire travailler pour vous la population dans d'autres pays. Cela signifie que vous aurez dû auparavant investir votre argent à l'étranger. L'Inde et la Chine n'ont pas un problème de baby-boomers. Elles ont des populations très jeunes. Avec un peu de chance, grâce à un certain capital que nous leur fournissons maintenant pour les aider, ces pays seront très productifs d'ici 30 ou 40 ans et seront heureux de nous verser l'intérêt sur les sommes que nous leur aurons prêtées grâce à une économie très productive.
Pour ce qui est des répercussions sur les générations à venir, je tiens à répéter qu'il ne faut pas perdre de vue ceux qui seront responsables de la production et d'où elle viendra au cours des années à venir. Ce n'est pas une simple question financière, mais bien un réel problème.
Le président: Je vous remercie, monsieur Dungan.
En fait, si vous me le permettez, j'ai demandé à M. Ritz si je peux intervenir ici un instant pour indiquer que ces audiences prébudgétaires donnent réellement à notre comité l'occasion de se familiariser avec les perspectives différentes de groupes divers et de prendre connaissance de leurs recommandations. Nous avons entendu des témoins qui sont préoccupés par la santé et qui parlent du financement des soins de santé. Nous avons entendu les représentants de la Chambre de commerce du Canada nous parler de toutes sortes de questions. Et nous entendons M. Robinson nous parler d'impôt. Mais ce dont je me suis rendu compte, c'est que, bien que nous soyons tous ici pour exprimer nos opinions sur diverses questions, il ne semble pas se dégager une vision générale, si on veut l'appeler ainsi.
Que voulons-nous accomplir au juste? Comme M. Robinson l'a souligné à juste titre, il ne doit pas s'agir uniquement de décisions fondées sur une carte électorale. Je pense que notre comité envisage ces questions dans une perspective à long terme, comme certaines de nos recommandations découlant des consultations prébudgétaires de l'année dernière l'indiquent, par exemple.
J'ai réfléchi à la question, et j'en suis venu à la conclusion que le moment est venu, à cette époque de notre histoire, d'adopter enfin une convention sur la productivité en vertu de laquelle les décisions du gouvernement doivent satisfaire à un critère fondamental, à savoir qu'elles augmentent la productivité. Au bout du compte, si nous ne réussissons pas à accroître notre productivité, notre qualité de vie en souffrira.
• 1015
En définitive, tous ceux qui comparaissent devant notre comité
ont la même préoccupation: la contribution éventuelle des décisions
gouvernementales à l'amélioration de la qualité de vie des
Canadiens.
J'aimerais savoir ce que vous pensez de cette idée d'adopter une convention sur la productivité, où chaque décision que nous prenons en tant que gouvernement doit répondre aux critères de la productivité. En dernière analyse, si nous pouvons accroître notre productivité, nous relèverons automatiquement notre qualité de vie.
Nous devrions aussi chercher à dissiper chez le public l'impression que le terme productivité est péjoratif et que nous croyons que les Canadiens ne sont pas productifs ou qu'ils ne veulent pas travailler. Cela n'a rien à voir. Il s'agit de moderniser notre économie et d'exploiter nos ressources aussi judicieusement que possible. L'histoire nous montre que l'innovation dans notre société est à l'origine de tous les gains de productivité que nous avons réalisés et de toutes les améliorations dans notre qualité de vie. Les gens se sont opposés à l'introduction des tracteurs sur la ferme, affirmant que cela se traduirait par des pertes d'emplois. Si nous avions gardé la même attitude face aux questions de l'emploi, nous serions aujourd'hui dans un véritable bourbier.
J'aimerais savoir ce que vous en pensez, madame Anthony.
Mme Nancy Hughes Anthony: Je suis très heureuse de vous entendre parler de la sorte, monsieur le président, parce que j'ai fréquemment l'impression que la responsabilité à l'égard de la productivité retombe sur le monde des affaires. Les entreprises l'acceptent, mais je crois que vous parler d'un concept plus large, où le secteur public et le secteur privé travaillent en partenariat pour atteindre ces objectifs et améliorer l'économie. Ce genre de dialogue me plaît beaucoup. À mon avis, il conviendrait de tenir une discussion sur la terminologie, pour définir les termes et les concepts, afin que nous puissions élaborer une plate-forme d'action.
J'appuie donc votre suggestion. Je pense que le milieu des affaires et le gouvernement pourraient y travailler conjointement.
Le président: Docteur Lemelin.
Dr Jacques Lemelin: Vous vous demandez peut-être quel lien existe entre la recherche et les soins primaires et la productivité, mais si la population est en bonne santé, elle sera beaucoup plus productive. Je peux vous donner un exemple bien précis. J'essaye en ce moment, dans le cadre d'un projet de recherche, d'améliorer les différents aspects de la prévention, différentes mesures de prévention. L'une d'elles consiste à administrer le vaccin antigrippal, en particulier à la population à hauts risques. Cela comprend les personnes âgées, mais aussi les personnes qui souffrent de maladies concomitantes.
On pourrait envisager d'administrer le vaccin à l'ensemble de la population. On a démontré que chez ceux qui avaient reçu le vaccin antigrippal, l'absentéisme était de 40 p. 100 inférieur par rapport à ceux qui ne l'avaient pas reçu, et ils étaient 25 p. 100 moins sujets à souffrir du rhume. C'est une mesure simple, et de nombreuses entreprises le savent et offrent le vaccin à tous leurs employés. Il s'agit d'un très bon investissement.
Si on l'administrait à une grande partie de la population canadienne, imaginez l'augmentation de la productivité qui en résulterait. Ce n'est qu'un exemple. La prévention touche un grand nombre de jeunes. Et si nous faisons davantage d'études pour réaliser ce genre de choses, il en résultera une hausse de la productivité.
Le président: Monsieur Darby.
M. Paul Darby: Je pense que le Conference Board, de même que les établissements d'enseignement supérieur, se réjouiraient de voir que le gouvernement s'intéresse à la productivité, probablement parce que le bilan n'est pas très bon au Canada. À bien des égards, le bilan n'est pas très bon dans les pays industrialisés.
• 1020
Selon les statistiques sur la croissance de la productivité
dans les années 90, les États-Unis, le Canada et de nombreux autres
pays n'ont pas touché sur le plan de la productivité les dividendes
auxquels ils s'attendaient grâce, par exemple, à l'introduction de
la puce informatique ou du matériel de télécommunication. Cela ne
paraît pas dans les chiffres, quoiqu'on se demande sérieusement
s'il n'y a pas un problème de mesure—et je pense qu'il y en a un.
Si l'on compare la productivité du Canada à celle des États-Unis, et je pense que c'est une comparaison très pertinente et que nous avons probablement les mêmes problèmes de mesure, notre bilan est médiocre. Dans le secteur manufacturier, où l'on peut facilement mesurer la productivité, entre 1990 et 1996, le Canada a affiché un rendement inférieur à celui des États-Unis pour ce qui est de la productivité totale des facteurs, qui d'une certaine façon constitue la meilleure mesure—main-d'oeuvre, capital, terrain, bâtiments—dans treize catégories sur treize.
Au Canada, nous n'avons pas enregistré les gains de productivité auxquels nous nous attendions grâce à l'accord de libre-échange. Nous n'avons pas enregistré les gains de productivité qui devaient découler de l'ALENA. Ni ceux qui devaient être réalisés grâce à l'introduction de la taxe sur les produits et services. Donc, de notre point de vue—est-ce que le terme crise est trop fort?—nous avons un problème de productivité au Canada. Le gouvernement devrait s'y intéresser, ou au moins aider ceux qui se penchent sur le problème, parce que si nous continuons d'afficher une faible croissance de la productivité au Canada à long terme, nous aurons un grave problème. Le dollar ne vaudra plus 65c.; il en vaudra 20.
Nous aimerions donc que l'on s'intéresse un peu à la question de la productivité. Cela dit, c'est un dossier très complexe. Il y a des problèmes de mesure et d'autres problèmes pour lesquels il n'y a pas de solutions miracles. À bien des égards, le secteur privé aimerait qu'on lui laisse une certaine marge de manoeuvre afin qu'il puisse croître et trouver ses propres solutions, mais je pense que c'est un dossier sur lequel le gouvernement devra commencer à se pencher.
Le président: Monsieur Robinson.
M. Walter Robinson: Monsieur le président, votre intervention est arrivée à point nommé. J'aimerais enchaîner sur les commentaires de M. Darby, qui affirme qu'il s'agit avant tout d'un problème de mesure de la productivité.
Le dernier rapport du vérificateur général traitait précisément de l'adoption d'un système d'information financière et de la présentation de rapports aux parlementaires sur les ramifications de la politique publique pour en mesurer l'efficacité. La fonction publique ne vous fournit pas ces données sous une forme qui vous permettrait de prendre des décisions sur les ramifications de la politique. Dans son rapport, le vérificateur général affirme qu'au cours des 30 dernières années deux commissions royales, deux quasi-commissions d'enquête et un comité parlementaire ont tenté de mesurer l'incidence de nos décisions sur la productivité nationale.
Je vous encourage donc, si vous voulez vous engager dans cette voie, à demander à la fonction publique fédérale de vous fournir ces mesures. Les fonctionnaires étudient la question depuis 30 ans. Vous pourriez vous engager dans cette voie, mais pour ce faire il faut que notre fonction publique, par ailleurs dévouée, il ne faut pas en douter, mesure de façon précise la productivité et les répercussions de vos décisions.
Le président: Monsieur Dungan.
M. Peter Dungan: Je conviens avec vous que la productivité est très importante. Pendant de nombreuses années, la priorité, c'était la création d'emplois, et les gouvernements se sont naturellement efforcés de relancer l'économie—davantage ici qu'aux États-Unis. Mais d'après nos travaux, et je pense que tout le monde est d'accord, le problème à long terme, ce n'est pas les emplois. Les gens vont finir par réintégrer le marché de l'emploi si nous arrêtons de créer des obstacles à la croissance de l'économie. La question est de savoir quel genre d'emplois ils vont retrouver. S'agira-t-il d'emplois à forte productivité ou à faible productivité? Des emplois bien rémunérés ou mal rémunérés? Donc, le gouvernement devrait chercher à long terme à s'assurer que les emplois sont aussi productifs que possible.
En ce qui a trait à l'accord de libre-échange, le véritable enjeu n'était pas des emplois, des emplois et des emplois, comme cela a été dit à l'époque, c'était plutôt productivité, productivité, productivité. Même si nous n'avons pas encore vu ces gains, je pense qu'ils demeurent toujours possibles.
J'ajouterai une chose. Même si nous demeurons aux prises avec un grave problème, certains des travaux que nous avons faits laissent entrevoir que l'une des façons d'atteindre cette productivité, c'est de réintégrer les travailleurs sur le marché du travail.
• 1025
Si l'on consent des efforts pour abaisser notre taux de
chômage—nous avons également insisté sur le sujet auprès de la
Banque du Canada—, au point que la main-d'oeuvre deviendra rare au
Canada, on commencera à constater certains gains sur le plan de la
productivité. Cela deviendra plus intéressant pour les entreprises
d'investir dans ces gains de productivité. Les deux questions sont
reliées, mais nous sommes tout à fait d'accord avec vous: la
productivité est l'élément clé dans tous les dossiers.
Le président: Monsieur McIver.
M. Don McIver: Je voudrais me faire l'écho de ce qui a été dit jusqu'ici. Chose certaine, lorsque nous parlons de mesures et de définitions, il s'agit de questions plutôt banales. Il faut assurément jeter des assises solides à cet égard, mais il s'agit d'un dossier très vaste.
L'exposé de la Chambre de commerce reflète ses politiques traditionnelles, mais on y parle également du fait que le cadre canadien crée énormément d'obstacles à la mobilité de la main-d'oeuvre, notamment pour ce qui est des programmes régionaux. Il y est question du programme de l'assurance-emploi, ainsi que des problèmes connexes qu'il cause, en ce sens qu'il décourage les gens de travailler ou de déménager dans une autre région du pays pour travailler. Ça, c'est un problème.
La politique fiscale s'inscrit dans les mêmes paramètres fondamentaux. Je ne ferai pas de liste, mais il y a des mesures qui découragent les Canadiens qui touchent un certain revenu ou une certaine forme de revenu de travailler de façon optimale. Il y a dans la structure d'imposition canadienne des composants qui sont très coûteux et qui ont essentiellement pour effet de miner la productivité de l'économie canadienne. Il faut également se rappeler que nous sommes les voisins de l'un des pays les plus productifs du monde.
Le président: Y a-t-il d'autres commentaires? Monsieur Patt.
M. Alan Patt: Monsieur le président, je vous prie de m'excuser à l'avance pour un commentaire qui pourra paraître cavalier, même si ce n'est certes pas là mon intention. Il est difficile pour un mort d'être productif. Comme cela est mentionné dans le mémoire, l'espérance de vie des diabétiques est de 30 p. 100 inférieure. À ce rythme, comme j'ai 34 ans maintenant et que je souffre de cette maladie depuis 16 ans, je mourrai à 51 ans. J'ai un bébé de trois mois et je suis père pour la première fois. J'aimerais bien voir ma fille obtenir son diplôme d'école secondaire.
Au rythme où nous finançons la recherche à l'heure actuelle, ce qui, comme j'ai essayé de le montrer dans notre mémoire, a des répercussions sur l'emploi, la croissance et la productivité, il ne faudrait pas oublier les répercussions humaines. Je conviens qu'il faut examiner tout le spectre de la productivité, mais je pense qu'il est important de ne pas oublier le fait que les gens sont le moteur de la productivité.
Le président: Comprenez-moi bien. Je me fais le défenseur de ce pacte de la productivité précisément pour les raisons qui vous intéressent: pour accroître le niveau de vie de la population. Et cela englobe également les défis que vous aurez sans doute à relever. Mais si notre niveau de vie baisse, tout le monde y perdra. Il ne faut pas l'oublier.
Monsieur Ritz.
M. Gerry Ritz: Le plus grand obstacle aux gains de productivité au Canada est un régime fiscal décourageant ou régressif qui en fait pénalise toute productivité. À moins de régler le problème, les petites entreprises, qui sont le moteur de l'économie, ne pourront redresser la situation.
Je vais maintenant changer de sujet, monsieur Robinson. Dans votre déclaration, vous avez parlé des soins de santé, en affirmant que toute infusion non planifiée de fonds dans un domaine de la politique gouvernementale aurait simplement pour effet de perpétuer le statu quo. En soi, cela pourrait donner lieu à un débat qui durerait toute la journée.
D'après un article que j'ai lu—et je ne parviens pas à me rappeler où ni sous la plume de quel journaliste—, il y aurait suffisamment d'argent dans le budget de la santé à l'heure actuelle, mais cet argent n'est tout simplement pas dépensé à bon escient. À l'appui de cet argument, on faisait valoir que l'imposition de droits pour la prestation de services allait à l'encontre de l'efficience financière. Pourriez-vous commenter cette affirmation, préciser ce que vous avez dit tout à l'heure et ensuite, céder la parole aux médecins pour qu'ils nous fassent part de leur opinion.
M. Walter Robinson: Au sujet de mes observations, monsieur Ritz, je réitère que je ne suis pas médecin, même si je siège au conseil d'administration d'un hôpital local. J'envisage les soins de santé du point de vue de la prestation de services de première ligne. Y a-t-il suffisamment d'argent dans le système? Dans certains domaines, oui, mais il ne fait aucun doute, comme nous l'avons rapporté, que dans la foulée de l'évolution démographique et de la progression des maladies—j'ai été stupéfait d'apprendre que le diabète coûte 3 milliards et le cancer 3,5 milliards de dollars par an à l'économie canadienne—il nous faudra injecter davantage de fonds dans le système, ne serait-ce que pour prendre en compte les progrès technologiques, qui vont faire grimper les coûts, ainsi que les progrès dans le mieux-être, qui font que les gens atteints de maladie vivent plus longtemps, ce qui se traduira également par des coûts. Il nous faudra indéniablement injecter davantage de fonds dans les services de santé. La question est de savoir comment?
• 1030
L'article dont vous parlez a été rédigé, si je ne m'abuse, par
Andrew Coyne de l'Institut de recherches en politiques publiques.
Il a évoqué le débat entre les honoraires à l'acte et la capitation
car, dans notre pays, les services médicaux sont dictés par
l'offre. Ce ne sont pas nous, en tant que consommateurs, qui avons
la main haute. Nous n'avons pas toutes les réponses. Nous
consultons un spécialiste pour les obtenir.
Ça c'est une chose. Mais ce n'est qu'une partie de l'équation. Dans notre mémoire, nous avons simplement essayer d'expliquer que nous savons d'ores et déjà que nous allons devoir absorber des dépenses médicales de 1,2 billion de dollars et qu'en ce moment, nous ne pourrions pas les financer, même si nous devions imposer à la génération actuelle de Canadiens des taux d'imposition marginaux de 100 p. 100 pendant les 10 prochaines années. C'est évident. Par conséquent, il faut trouver un autre moyen de financer ces services.
À notre avis, c'est une triste expérience que celle du Régime de pensions du Canada car les parlementaires n'ont pas voulu s'attaquer aux véritables problèmes sous-jacents du financement. Il nous faut abandonner les systèmes de payeurs uniques, où l'on paye au fur et à mesure. Ce n'est pas la solution de l'avenir. C'était une solution dans les années 50 et 60, à une époque où l'on prévoyait une croissance démographique illimitée.
Nous savons que ce n'est pas ce qui se passe. Il y a au moins 50 pays sur notre planète qui ont déjà réglé ce genre de problèmes d'autres façons, en faisant preuve de créativité. Il n'est pas nécessaire pour le Canada d'imiter la solution chilienne relativement aux pensions ou d'adopter la solution de Singapour qui a créé des comptes d'épargne médicale. Nous pouvons toutefois essayer de tirer le meilleur parti de leur expérience et s'attaquer aux problèmes du financement. Je pense qu'il y a suffisamment de gens présents dans la salle et de membres de cette institution qui pourraient apporter cette contribution dans le contexte d'un débat avec les Canadiens.
Jusqu'ici, cela n'a pas été fait, et c'est regrettable. Encore une fois, cela m'apparaît comme une abdication de notre responsabilité financière et morale.
Dr Jacques Lemelin: La question de savoir comment s'y prendre pour financer adéquatement le régime des soins de santé comporte plusieurs aspects. Il y a le volet clinique et le volet recherche du système de soins de santé.
Manifestement, le volet recherche souffre d'un sous-financement criant. Sauf erreur, les États-Unis dépensent huit ou neuf fois plus d'argent que le Canada pour la recherche, par habitant. C'est là un problème d'envergure. Puisqu'il y a de l'argent à faire aux États-Unis, nous perdons nos chercheurs compétents au profit de ce pays, après les avoir formés ici. C'est donc une double perte. Il va de soi, qu'il faut consacrer davantage d'argent à ce volet.
Pour ce qui est des soins cliniques, j'ai été rémunéré à l'acte et par capitation. À l'heure actuelle, je travaille en vertu d'un régime de capitation. Personnellement, je trouve que cela me donne une plus grande marge de manoeuvre. Je peux faire ce que j'estime devoir faire pour mes patients. Je ne suis pas prisonnier d'un système d'honoraires qui me force à faire ceci ou cela pour être rémunéré.
Les opinions varient à ce sujet, mais je ne pense pas que ce soit le principal problème du régime des soins médicaux.
Aux États-Unis, il se dépense d'une fois et demie à presque une fois et deux tiers plus qu'au Canada pour les soins de santé. Je ne préconise pas nécessairement que nous imitions le système américain. Chose certaine, les Américains s'intéressent à notre régime à bien des égards, notamment pour ce qui est du pourcentage des généralistes par rapport aux spécialistes. Ils s'efforcent d'atteindre un pourcentage qui sera proche du nôtre. En effet, la moitié des généralistes au Canada sont des médecins voués aux soins primaires. Les Américains font agressivement campagne pour recruter certains de nos médecins, pour les convaincre d'aller travailler là-bas parce qu'ils estiment que c'est un meilleur mode de prestation des soins.
Pour avoir un régime de soins à la fois de haute qualité et efficace, il faut faire correspondre l'allocation des ressources aux besoins des patients. Un spécialiste qui fait le travail de généraliste, c'est inefficace. Un médecin qui fait le travail d'une infirmière, c'est inefficace. Par conséquent, il ne suffit pas d'injecter des fonds supplémentaires. Il faut réorganiser notre régime de soins de santé pour s'assurer que l'allocation des ressources corresponde aux besoins de la clientèle.
Le président: Merci, monsieur Ritz.
Monsieur Loubier.
[Français]
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Ma première question sera toute simple. Quel sera, d'après vous, le surplus budgétaire du gouvernement fédéral à la fin du présent exercice financier? Quelle est votre évaluation de ce surplus? Je m'adresse au représentant du Conference Board.
M. Paul Darby: Selon nos dernières estimations, il sera d'environ 5,5 milliards de dollars pour cette année financière. Et selon vous, monsieur Dungan? Environ le même chiffre.
C'est donc un surplus assez intéressant. Cette estimation tient aussi compte de quelques mesures fiscales.
• 1035
Ainsi, on a diminué le taux de contribution à
l'assurance-emploi de 10c., je crois. On a aussi
éliminé complètement la surtaxe générale. Mais, même en
tenant compte de ces mesures fiscales, nous prévoyons
un autre surplus, pour la prochaine année financière,
d'environ 3,5 milliards de dollars. Donc, même en
prévoyant une réduction d'impôt, il serait possible de
continuer à faire un surplus à l'avenir.
M. Yvan Loubier: Mais comment arrivez-vous à ces chiffres pour l'ensemble de l'année financière 1998-1999, alors que pour les six premiers mois de l'exercice, il y a déjà un surplus accumulé de 10 milliards de dollars et que vos prévisions, au Conference Board, ne font pas état d'une récession ou d'un fort ralentissement économique en 1998-1999? On a parlé d'une prévision quelque peu révisée portant sur le PIB, sans plus. Comment pouvez-vous imaginer qu'au cours des six prochains mois, le surplus, qui est de 10 milliards de dollars à l'heure actuelle, fondra de moitié?
M. Paul Darby: Selon notre expérience, au cours du deuxième semestre d'une année, les chiffres faisant état de la performance fiscale ne sont pas aussi réjouissants que ceux des six premiers mois de l'année. Il est même possible qu'il y ait un déficit durant les six derniers mois de l'année, si on tient compte de la saisonnalité des données. Vous avez là un premier élément d'explication.
L'autre raison est que même si nous n'avons pas prévu une récession, le rythme de la croissance économique au Canada a été à la baisse durant les deuxième et troisième trimestres, surtout en 1998. Cela aura sûrement des répercussions sur la situation financière des deuxième et troisième trimestres de 1998.
Il y a donc deux raisons de prévoir un surplus moins élevé que celui qui s'annonçait: la saisonnalité habituelle des données et le rythme de croissance de l'économie canadienne, qui semble avoir diminué au cours du deuxième semestre. Les chiffres sur la situation financière durant le premier semestre peuvent avoir été prometteurs et ceux du deuxième semestre peuvent être assez décevants, ce qui est habituellement le cas.
M. Yvan Loubier: Monsieur Dungan, êtes-vous d'accord sur cette analyse?
[Traduction]
M. Peter Dungan: Approximativement, oui. Je tiens à réitérer que les chiffres dont nous parlons tous les deux pour le surplus de 1998-1999 incluent déjà les réductions d'impôt. Autrement dit, les chiffres ne seraient pas les mêmes si l'on n'avait pas tenu compte des impôts. Nous sommes arrivés à ces chiffres après avoir calculé des réductions d'impôt—et chacun d'entre nous avons nos réductions favorites—de sorte que lorsque nous parlons d'un surplus de 5 ou 6 millions pour l'exercice financier 1998-1999, c'est après avoir pris en compte, dans nos projections, une réduction de 20 ou 30c. au titre de l'assurance-emploi à compter du 1er janvier 1999 et une réduction partielle du taux de la surtaxe.
Comme vous pouvez le constater, M. Darby et moi-même avons une opinion différente...
[Français]
M. Yvan Loubier: C'est déjà contenu dans votre prévision de 3,5 ou 5 milliards de dollars; avant même l'annonce du budget de l'an prochain, vous avez postulé que Paul Martin prendrait cet automne la décision de baisser les taux de cotisation à l'assurance-emploi. C'est ce que vous nous dites.
[Traduction]
M. Peter Dungan: C'est exact. Autrement dit, nous pourrions aller de l'avant avec les réductions d'impôt—et je pense que cela vaut pour nous deux—il nous resterait quand même un surplus. De façon générale, il est très important dans une discussion comme celle-là de préciser si c'est avant ou après les changements de politique.
[Français]
M. Yvan Loubier: Très bien. En chiffres bruts et sans tenir compte d'une baisse des taux de cotisation, quelle serait votre prévision pour cette année? Serait-elle autour de 10 à 12 milliards de dollars si on laissait aller les choses, sans parler de réduction du taux de cotisation?
Les explications de M. Darby m'ont inquiété tout à l'heure. Vous rectifiez un peu les choses en disant que vous avez déjà, dans vos prévisions, calculé qu'à la fin de l'automne, il y aura une baisse substantielle des taux de cotisation à l'assurance-emploi ainsi que d'autres ajustements fiscaux.
• 1040
J'aimerais savoir quel
était le montant du surplus brut que vous prévoyiez
pour 1998-1999 sans ces ajustements fiscaux
et sans la réduction du taux de cotisation.
[Traduction]
M. Peter Dungan: Je n'ai pas les chiffres en main.
[Français]
M. Yvan Loubier: Non, mais quel est le montant approximatif?
[Traduction]
M. Peter Dungan: Disons qu'il s'agit approximativement de 10 ou 11 milliards. S'il n'y avait pas de réductions d'impôt, contrairement à ce que nous avons calculé, ce serait peut-être 10 milliards.
M. Nick Discepola (Vaudreuil—Soulanges, Lib.): Cela inclut-il les 3 millions...
M. Peter Dungan: Dans notre cas particulier, oui.
[Français]
M. Yvan Loubier: Cela veut dire que vous prévoiriez un surplus d'au moins 10 milliards de dollars si aucune mesure n'était prise par M. Martin d'ici le 31 mars de l'an prochain. Est-ce qu'on se comprend bien? On s'entend sur cet énoncé. Très bien.
Comment expliquez-vous alors qu'il y a à peine un mois, ici, au Comité des finances, M. Martin, nous faisant part de ses prévisions sur le surplus de cette année, nous ait répété qu'il serait de zéro?
Voyez-vous quel effet cela peut avoir? Écoutez-moi bien. Vous avez parlé tous les deux de confiance tout à l'heure. Même la Chambre de commerce et M. Robinson ont mentionné qu'il y avait une perte de confiance au sein de la population. Ne serait-elle pas attribuable au fait que, bien qu'ils soient depuis quatre ans égorgés par les impôts—ce que M. Robinson a souligné dans son exposé—et bien qu'ils fassent des sacrifices extraordinaires pour assainir les finances publiques, les contribuables n'entendent jamais de bonnes nouvelles venant de M. Martin? Pourtant, nous sommes parvenus à des résultats, encore à coups de grands sacrifices. Cela risque de démobiliser bien des gens.
On dit que le niveau de confiance a chuté, non seulement chez les particuliers, mais aussi chez les entreprises. Se peut-il que le fait de dire, malgré tous les sacrifices, qu'il n'y aura pas de surplus alors que le surplus doit être de 10 milliards de dollars joue sur le niveau de confiance des gens? Quant à nous, nous situons le chiffre du surplus entre 12 et 15 milliards de dollars, mais il y a toujours certains aspects techniques dans une évaluation qui peuvent la modifier quelque peu.
L'an dernier, c'était encore pire; M. Martin nous disait que le déficit serait de 24 milliards de dollars alors qu'il a été, en fait, de 9 milliards de dollars. Ne croyez-vous que cela finit par avoir un effet sur le niveau de confiance des gens? Ne serait-il pas préférable de communiquer le plus tôt possible les chiffres réels afin de pouvoir dire que les sacrifices consentis au cours des quatre dernières années font entrevoir d'heureux résultats et que l'argent sera employé de telle façon? Il me semble que cela enverrait un signal un peu plus clair qui stimulerait la croissance économique.
Êtes-vous d'accord sur ma position? J'aimerais connaître vos commentaires sur le sujet.
[Traduction]
Le président: Monsieur Robinson.
[Français]
M. Walter Robinson: Permettez-moi, monsieur Loubier, de vous répondre dans les deux langues. On prévoit un surplus de 7 ou 8 milliards de dollars, excluant la debt contingency reserve, qui est de 3 milliards de dollars, ce qui donne un total de 10 milliards de dollars. Je suis d'accord sur les commentaires de M. Darby concernant
[Traduction]
le choix du moment, les recettes gouvernementales, particulièrement pour l'assurance-emploi. De nombreux Canadiens ont atteint le maximum de 1 053 $. Dans la plupart des cas, cela a été rendu au gouvernement.
[Français]
Quant aux prédictions de M. Martin, ma réponse est qu'il joue avec les chiffres. C'est clair.
[Traduction]
À notre avis, il est certain que le ministre Martin a été magistral. À certains égards, il a fait son profit des erreurs du gouvernement conservateur précédent puisqu'il a dépassé les attentes. Il a su gérer les attentes. Il a fait un minimum de promesses et il a plus que tenu parole. Depuis quatre ans, les Canadiens s'estiment satisfaits. Même si dans bien des cas ils s'opposent à la façon dont on s'y est pris pour réduire le déficit, ils ont le sentiment qu'il est à la barre.
Nous convenons avec vous que compte tenu des travaux de modélisation qui ont été effectués et sachant ce qui s'est passé au cours des six premiers mois, il faut arrêter de crier au loup. Il faut être franc envers les contribuables du village et leur laisser savoir que nous afficherons un certain excédent et leur expliquer que nous sommes en train de discuter de ce qu'il conviendrait de faire avec. Il faut que le ministre des Finances fasse cette démarche car le fait qu'il continue de jouer avec les chiffres ou de gérer les attentes à la baisse mine notre crédibilité.
D'ailleurs, on le constate en Colombie-Britannique et même en Ontario et lorsque le ministre des Finances joue avec les chiffres pour des raisons purement électorales, les contribuables ne sont pas dupes. Cela leur fait perdre confiance dans l'institution du Parlement et dans l'institution du poste du premier ministre des Finances. Que le ministre dise aux Canadiens à combien se chiffrera l'excédent, et ils ne lui en voudront pas s'il est un petit peu au-dessus ou au-dessous.
• 1045
Mais dire aux Canadiens qu'il y aura un déficit de 9 milliards
alors qu'il était projeté à 17 milliards et qu'on va équilibrer
notre budget mais ajouter, du même souffle, qu'on accuse un
excédent et qu'on a réussi par la porte d'en arrière à trouver 2,5
milliards pour la Fondation des bourses du millénaire, c'est
fondamentalement malhonnête.
Par votre entremise, dans votre rapport, je voudrais mettre le ministre en garde qu'advenant un excédent, il ne devrait pas encore une fois ramener des argents par la porte d'en arrière comme il l'a fait au cours des exercices financiers précédents. Le vérificateur général a semoncé trois années de suite le ministre des Finances pour ce qu'il avait fait au titre du Fonds pour l'innovation, de la TPS, des versements aux trois provinces de l'Atlantique pour la taxe harmonisée et le Fonds du millénaire. Cela mine la confiance dans les livres du gouvernement du Canada.
Un principe fiscal très simple s'applique dans notre pays: L'argent recueilli au cours d'un exercice financier doit être dépensé au cours de cet exercice et réparti entre les divers programmes. C'est ça la perception démocratique des impôts. Toute autre façon de procéder ne peut que susciter une révolte analogue à celle du Boston Tea Party.
Je suis d'accord avec vos questions. Il faut être honnête lorsque l'on dresse le portrait de la situation financière du pays.
Le président: Monsieur Hugues Anthony.
[Français]
Mme Nancy Hughes Anthony: Je suis d'accord avec vous, monsieur Loubier. C'est pourquoi la Chambre de commerce a présenté trois scénarios différents et a donné une indication de ce que le gouvernement devrait faire si le surplus dépassait nos prévisions.
Ce qui nous déçoit constamment, c'est le fait que nous ne pouvons pas avoir accès à la base de calcul du ministère des Finances et que, partant, nous ne pouvons pas travailler ensemble. Comme vous le savez, les gens d'affaires ont l'esprit assez pratique; ils ont tous leurs plans de revenus et dépenses, etc.
Ce que nous aimerions obtenir du gouvernement, c'est en quelque sorte le respect de ce que nous faisons et la possibilité de travailler avec lui, afin que le public canadien comprenne ce qui se passe. Nous avons aussi mentionné dans notre présentation avoir constaté un excès de prudence dans les calculs que M. Martin a faits de ses revenus et qu'il vient de publier dans son rapport financier de la mi-octobre. Encore une fois, cela sème la confusion quant à la base de calcul employée par le gouvernement. C'est donc un très bon point que vous avez soulevé.
M. Yvan Loubier: Merci, madame.
[Traduction]
Le président: Vous en êtes à votre dernière question.
[Français]
M. Yvan Loubier: J'aimerais m'adresser à M. Darby au cours du temps qui me reste.
Que pensez-vous de cette assertion voulant que l'attitude du ministre des Finances puisse provoquer chez les consommateurs et les entreprises des perceptions négatives et une espèce de découragement? Comme vient de le dire Mme Hugues Anthony, à un moment donné, on ne sait plus à quel saint se vouer. Cela dessert la démocratie que de ne pas montrer la réalité sous son vrai jour. Nous ne demandons rien de plus. Nous demandons simplement que les chiffres apparaissant dans les colonnes aient un sens.
M. Paul Darby: Je suis complètement d'accord que si le ministère des Finances pouvait, par exemple, annoncer dans le prochain budget une réduction du niveau des impôts, cela stimulerait la confiance dans l'économie canadienne. C'est clair.
Il est important aussi, par ailleurs, que le ministère s'assure qu'il y aura réellement un surplus. Comme je l'ai dit dans ma présentation, il est possible qu'une récession ou même un ralentissement important de l'économie canadienne le ramène pratiquement à zéro.
Donc, il y a trois ou quatre mois, le ministère devait se montrer un peu prudent lorsqu'il prévoyait un surplus budgétaire alors qu'il pouvait se produire une récession. Dans le moment, je suis d'accord qu'il y aura probablement un surplus. C'est presque garanti. Il est certain qu'une réduction du niveau des impôts, des impôts personnels par exemple, par un mécanisme quelconque et une réduction des contributions à l'assurance-emploi accroîtraient le niveau de confiance des Canadiens. C'est clair.
M. Yvan Loubier: Merci. Une dernière question, monsieur le président.
Selon la loi fiscale actuelle, lorsqu'il se produit des surplus non prévus, le gouvernement doit les appliquer au remboursement de la dette.
M. Paul Darby: Vous parlez d'un surplus dans la caisse de l'assurance-emploi ou d'un surplus général?
M. Yvan Loubier: Non, je parle d'un surplus en général, qui résulte des rentrées fiscales. Dans le cas du fonds de l'assurance-emploi, c'est un peu différent. Lorsque les rentrées fiscales sont plus élevées qu'on ne l'avait prévu, ces surplus non prévus doivent automatiquement être affectés au remboursement de la dette.
• 1050
La seule façon de se soustraire à cette obligation
serait de déposer un budget supplémentaire.
Donc, pour demander des baisses du taux de cotisation ou des
baisses d'impôt, lesquelles pourraient même être
annoncées avant le budget de l'an prochain pour
redonner confiance dans l'économie et stimuler la
croissance économique, il faut que M. Martin dépose un
budget supplémentaire.
Seriez-vous d'accord pour qu'un tel budget supplémentaire soit déposé? Des surplus non prévus, il y en aura beaucoup, puisque dans le budget de M. Martin, en mars dernier, le surplus devait être de zéro. Seriez-vous d'accord pour que cela se fasse?
M. Paul Darby: Actuellement, oui. Je serais d'accord pour qu'il y ait un financial statement de la part de M. Martin stipulant que maintenant, vu qu'un surplus fiscal est vraiment garanti, nous pouvons envisager la possibilité d'une réduction d'impôts ou d'une accélération du remboursement de la dette canadienne. Oui, je serais d'accord pour que quelque chose d'analogue soit fait parce que cela pourrait servir de fondement à un accroissement du niveau de confiance des Canadiens. Oui, je serais d'accord pour qu'une telle action soit faite.
Étant donné les résultats de la recherche faite par le Conference Board of Canada, je serais intéressé à ce qu'on réduise le taux de cotisation à l'assurance-emploi. Également, je suis d'accord avec M. Dungan pour dire qu'une hausse des cotisations à l'assurance-emploi constitue un silent killer of jobs. L'expression avait été employée, je vous le rappelle, à propos de la taxe de vente des manufacturiers. Je pense qu'une hausse du taux des cotisations à l'assurance-emploi constitue vraiment un silent killer of jobs. Ainsi, selon nos calculs, la hausse du taux des contributions à l'assurance-emploi a probablement ajouté au moins un demi-point de pourcentage au taux de chômage au Canada. Cela accroît le coût de la création d'emplois, surtout pour les entreprises de taille moyenne. Selon nous, et aussi selon les recherches de la Banque du Canada, le taux naturel de chômage a pu être augmenté par la hausse du taux de cotisation à l'assurance-emploi. Si je devais favoriser une réduction d'impôt plus qu'une autre, ce serait celle du taux de cotisation à l'assurance-emploi.
En même temps, il va de soi qu'une réduction du taux d'imposition personnel aurait aussi un impact favorable sur l'économie canadienne et sur le niveau de confiance.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Loubier.
Monsieur Szabo.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Merci, monsieur le président.
J'ai des questions à poser aux représentants de la Chambre de commerce du Canada et de la Fédération des contribuables canadiens. Je devrais peut-être étoffer chacune de mes questions, vous les présenter et ensuite attendre vos réponses.
Les témoins de la Chambre de Commerce sont ici en tant que représentants des entreprises canadiennes de tout le pays, d'un océan à l'autre. Il y a cependant quelque chose qui me trouble car j'ai rencontré récemment un homme qui traite avec des chefs d'entreprise un peu partout au pays. Il m'a dit que 80 p. 100 ou plus des chefs de direction au Canada participent à des activités communautaires, font du travail auprès des enfants, etc. Votre rapport m'a l'air de sortir tout droit du magicien d'Oz. On y présente trois scénarios. En fonction de ces trois scénarios, on voit bien que c'est vous qui avez la cervelle.
• 1055
À la lecture de votre liste, on constate que les Canadiens
nantis, les Canadiens les plus privilégiés, seront les
bénéficiaires de toutes et chacune de vos recommandations. Peut-être me
signalerez vous une exception à cette liste, mais ce
rapport est tout à fait dénué de coeur. Il est dénué de toute
compassion. Nulle part dans le rapport, ni d'ailleurs dans votre
exposé, n'avez vous parlé des soins de santé ou du sort des
enfants. M. Pielsticker vient d'arriver. Il doit comparaître plus
tard, et vous devriez vous entretenir avec lui de ce que pensent
les chefs d'entreprise canadiens au sujet de la nécessité
d'investir dans nos enfants. J'ignore pourquoi ils ne sont pas ici,
mais vous pouvez peut-être nous expliquer pourquoi ce rapport est
tellement sans coeur.
Ma question s'adresse à M. Robinson. Dans votre rapport—et vous l'avez dit également dans votre exposé—vous dites que les recettes provenant de l'impôt sur le revenu des particuliers avaient augmenté de 38 p. 100 depuis 1993 et qu'il s'agit-là d'une augmentation de 17 p. 100 qui est alarmante. Les recettes de TPS ont également augmenté de 24 p. 100, tandis que l'impôt sur le revenu des sociétés a fait un bond de 140 p. 100. Je suppose que ce choix de vocabulaire signifie que c'est quelque chose de négatif. Il laisse entendre que les impôts sur le revenu des particuliers ont augmenté de façon alarmante, alors que cette augmentation est en fait attribuable au fait qu'il y a un plus grand nombre de personnes qui travaillent et paient des impôts qu'auparavant. Ce que vous nous décrivez comme une situation alarmante et négative est en fait positive car l'économie du Canada est en train de s'assainir. Je ne comprends donc pas très bien pourquoi vous présentez la situation comme étant négative, alors qu'en fait il s'agit d'une situation positive.
J'ai réfléchi aux autres rencontres que nous avons eues avec vous, notamment lorsque vous avez comparu devant le Comité des finances et que vous avez commencé à nous dire que les REEE étaient déductibles d'impôt. Nous vous avons fait remarquer que vous vous trompiez et qu'ils n'étaient pas déductibles et nous en sommes arrivés à la conclusion que vous ne connaissiez rien de la Loi de l'impôt. Ensuite, lorsque nous vous avons rencontré pour parler des partenariats en technologie, vous avez commencé à vous plaindre du fait que le gouvernement du Canada ne se faisait pas rembourser tous ses prêts. En fait, la plupart de ces prêts n'étaient même pas échus et exigibles, pourtant vous avez dit qu'ils l'étaient.
J'ai ensuite lu dans le Hill Times du 9 novembre—et j'imagine que c'était dans tous les autres journaux—un article au sujet des députés qui voyagent à travers le monde. Il se trouve que je suis le président du Groupe d'amitié parlementaire Canada-Taiwan, le groupe qui compte le plus grand nombre de députés et de sénateurs sur la Colline parlementaire et dans le rapport que j'ai déposé en Chambre, on parle des avantages pour le commerce international avec Taiwan; de l'investissement au Canada grâce aux visiteurs et aux visas et aux immigrants de Taiwan qui viennent au Canada; du développement de nos relations, des améliorations à notre bureau commercial là-bas qui n'arrive pas à la cheville de ceux que la Grande-Bretagne, la France, les États-Unis et l'Allemagne ont dans ce pays; et de toutes sortes d'autres choses. Parmi les avantages que ce groupe a apportés au Canada, il y a notamment de nouveaux investissements de l'ordre de 2 millions de dollars grâce au bureau commercial, en plus de tous les autres merveilleux avantages. Je sais que vous n'avez jamais lu notre rapport, car le sous-titre dit «la Fédération des contribuables canadiens dénonce le voyage par année par une tierce partie qu'elle qualifie de tourisme aux frais de la princesse». Cela ne tient absolument pas compte des faits. Vous ne vous êtes pas informé.
Eh bien, permettez-moi maintenant de vous citer. La dernière chose que vous avez dite devant notre comité aujourd'hui était: «Soyons justes et honnêtes dans la façon dont nous décrivons les finances de la nation.» Or, monsieur Robinson, la question que je voudrais vous poser est la suivante: pourquoi devrions-nous faire ce que vous dites plutôt que ce que vous faites?
Le président: Monsieur Robinson.
M. Walter Robinson: Je vais demander à Nancy Hughes Anthony de répondre. Je prends bonne note des commentaires de M. Szabo.
Le président: Très bien.
Mme Nancy Hughes Anthony: Merci, monsieur Szabo.
Je suis certaine que vous connaissez la Chambre de commerce du Canada et bon nombre de ceux qui participent au mouvement de la Chambre de commerce. Comme vous l'avez mentionné, ces gens viennent d'un peu partout au pays. Ils ont de grandes entreprises, de petites et moyennes entreprises, et ils ont du coeur. Je pense que si nous sommes ici aujourd'hui c'est pour donner au gouvernement des suggestions utiles et concrètes sur la façon de faire fonctionner l'économie. C'est ce que nous avons inclus dans notre mémoire, et nous avons essayé d'être le plus bref possible.
• 1100
Vous avez dit que nous n'avions pas mentionné, par exemple,
les soins de santé. Comme je l'ai dit, les membres qui vivent dans
des collectivités ont des familles, des enfants, des parents. Ils
comprennent que c'est un problème grave. Ils comprennent que les
Canadiens disent à leurs hommes et femmes politiques que c'est un
problème auquel il faut s'attaquer. Mais ce qu'ils disent, c'est
qu'ils ne sont pas convaincus que chaque cent de ce montant de
108 milliards de dollars des dépenses gouvernementales est dépensée
de façon absolument parfaite, efficace et efficiente. Ils vous
demandent de réaffecter ces fonds, de faire des choix difficiles
pour répondre aux priorités des Canadiens. Vous le faites pour
votre budget familial et vous le feriez si vous étiez à la tête
d'une société.
Je tiens à commenter votre remarque au sujet de ce que vous considérez comme notre parti pris pour les mieux nantis dans nos propositions. M. McIver vous expliquera la logique qui sous-tend nos propositions. Après l'avoir écouté, je crois que vous jugerez que notre approche est plus équilibrée que vous ne le pensez quant à son incidence sur les Canadiens.
M. Don McIver: Merci.
Si vous passez en revue notre liste, vous constaterez que ce sont évidemment les contribuables qui profiteront de toute réduction des impôts. Si ces réductions d'impôt sont proportionnelles, manifestement, celui qui paye le plus en impôt obtiendra la plus importante réduction. Mais au moins certaines de ces mesures profiteront énormément aux personnes à faible revenu—la pleine indexation du niveau d'imposition du revenu des particuliers, par exemple ou l'augmentation...
M. Paul Szabo: L'égalité pour tous, l'égalité pour tous les contribuables—des avantages fiscaux égaux.
M. Don McIver: Je le répète, si vous payez beaucoup d'impôts, la somme d'argent qui vous reviendra sera plus importante s'il y a réduction des impôts.
Avec notre suggestion de relever de 400 dollars l'exemption personnelle de base de tous les contribuables, notre intention est de supprimer des rôles d'imposition les personnes à faible revenu. Cela touchera donc bon nombre d'entre eux, mais je ne peux vous dire combien.
Je ne parcourrai pas toute la liste. Il est évident que certaines de ces mesures auront surtout une incidence sur les personnes à revenu élevé, mais elles permettront surtout, à notre avis, d'améliorer la productivité. Le président a abordé cette question il y a un moment. Nous sommes très inquiets de la perte de ressources humaines dans certaines catégories. Nos confrères, les médecins, nous ont parlé des leurs qui se sont installés aux États-Unis. Cela préoccupe les Canadiens, et à juste titre, surtout lorsqu'on parle d'atteindre un certain niveau de productivité et de le maintenir.
Je ferai une dernière observation, si vous me le permettez. Une des choses qui me déplaît dans le débat public et qui fait rage ces dernières années, c'est qu'on présume automatiquement que la structure fiscale du Canada est progressive ou régressive, et on se demande si elle devrait être plus progressive ou régressive. Or, le gouvernement n'a fait aucune étude—et, que je sache, le secteur privé non plus—qui explique le caractère progressif du régime fiscal canadien. Devrait-il être plus progressif? Peut-être. Mais n'incombe-t-il pas au ministère des Finances d'entreprendre un examen exhaustif des conséquences de notre fiscalité—et nous réclamons une réforme en profondeur—afin de répertorier les conséquences négatives et positives des divers impôts et taxes et de créer ensuite un régime qui rehausse la progressivité?
Je m'en tiens à cela.
M. Gerry Ritz: Monsieur le président, puis-je invoquer le Règlement?
Le président: Oui, allez-y.
M. Gerry Ritz: Je n'aime pas du tout la façon dont M. Szabo interroge M. Robinson. Nous sommes sur une tribune publique où nous débattons de diverses questions; nous ne sommes pas ici pour attaquer personnellement les témoins. Qui voudrait venir témoigner sachant qu'il serait traité de façon si impolie et humiliante?
Le président: Tous sont les bienvenus.
• 1105
Oui, monsieur Robinson.
M. Walter Robinson: J'ai quatre objections à soulever au sujet des remarques de M. Szabo. Je remercie sincèrement M. Szabo de ses questions.
Monsieur Ritz, je vous remercie de votre intervention, mais je suis assez grand pour me défendre. Ce n'est pas la première fois que M. Szabo et moi-même nous engageons dans un débat animé dans le cadre des audiences du comité, et je suis toujours heureux de le faire.
Bien qu'on m'ait accusé aujourd'hui d'être stupide parce que je n'ai pas lu la Loi de l'impôt sur le revenu, je dois reconnaître que je ne suis pas capable de lire cette loi dans sa totalité, car elle compte 1 400 pages, dont 700 pages de modifications techniques et elle grossit chaque année. Dans ma vie, je n'ai tout simplement pas suffisamment de temps pour lire cela.
Au sujet du Programme de partenariats technologiques, dans mon témoignage au sujet du projet de loi C-36 auquel fait allusion M. Szabo, si on vérifiait le compte rendu, on verrait très clairement que nos affirmations sur les remboursements effectués par les sociétés parasites de l'État portaient particulièrement, et surtout, sur le Programme de productivité de l'industrie du matériel de défense et sur la vingtaine d'années d'existence de ce programme.
Ce que nous disions, monsieur Szabo, était très clair. Nous avons prouvé, grâce à des documents de Conseils et Vérification Canada et d'autres, que nous avons reçus du ministère de l'Industrie grâce à la Loi sur l'accès à l'information, que la majorité de ceux qui reçoivent de l'argent en vertu du PPIMD, les principaux bénéficiaires du programme, les entreprises les plus subventionnées qui se retrouvent surtout dans le secteur de l'aérospatiale, au Canada, sont décrites, et je cite, comme ayant «délibérément négligé et refusé de se conformer à leurs obligations de remboursement au gouvernement du Canada, dont elles se moquent manifestement». Ce n'est pas moi qui le dit, mais des vérificateurs indépendants, à la demande de Conseils et Vérification Canada.
Nous maintenons ces affirmations et affirmons que dans le cadre de Partenariats technologiques Canada, bon nombre de ces mêmes entreprises continuent de recevoir des prêts de ce que nous appelons la charité gouvernementale, tout en sachant très bien que sur le site Web de Partenariats technologiques Canada, huit critères sont présentés comme conditions pour recevoir de l'aide. Le huitième critère est la preuve de l'engagement de l'entreprise à rembourser au gouvernement du Canada les obligations précédentes. Or, dans certains cas, nous finançons maintenant des technologies de moteurs de troisième ou quatrième génération alors que nous n'avons reçu aucune redevance pour ceux de la première génération.
Nous avons mis au défi le ministre de l'Industrie, trois fois en public et deux fois par lettre. Si le gouvernement du Canada est si convaincu que ses programmes destinés aux entreprises parasites fonctionnent bien, il devrait dire aux Canadiens quelles étaient les prévisions de remboursement pour les 20 dernières années et les remboursements réels—d'après les renseignements obtenus grâce à l'accès à l'information, nous savons que ce dossier est lamentable. Il faudrait ensuite dire aux Canadiens les remboursements prévus pour les 10, 15 ou 20 prochaines années. Regardons les chiffres, une année à la fois, un cas à la fois, une société à la fois. Il s'agit de faits, de faits catastrophiques, et nous maintenons ce que nous avons affirmé.
Passons à votre troisième point, monsieur Szabo, au sujet du Comité Canada-Taiwan que vous présidez. Félicitations pour votre nomination à la présidence du comité. Si vous repensez au contexte de mes commentaires et aux détails que j'ai relevés dans l'article du Hill Times, vous vous souviendrez que j'ai dit qu'au bout du compte, ce n'était pas à moi de décider. C'est à vos électeurs de décider s'il est dans leur intérêt que des députés voyagent partout dans le monde, aux frais de la Princesse.
M. Paul Szabo: Des voyages et du tourisme aux frais de la Princesse, avez-vous dit.
M. Walter Robinson: Oui. Regardons les faits et les raisons invoquées pour le voyage en Italie de 17 députés et de trois sénateurs.
M. Paul Szabo: Nous parlions du groupe Canada-Taiwan.
M. Walter Robinson: Monsieur le président, je vous en prie, laissez-moi répondre à la question.
Le président: Allez-y.
M. Walter Robinson: Merci beaucoup.
Au sujet de cet article, je maintiens les commentaires que j'ai formulés et j'aimerais recevoir une copie de votre rapport si vous voulez bien l'envoyée...
M. Paul Szabo: C'est un rapport officiel qui a été déposé à la Chambre des communes.
M. Walter Robinson: Encore une fois, monsieur Szabo, je vous répète que je ne suis qu'une personne et que je ne peux pas lire tous les rapports rédigés par chacun des comités du gouvernement, même si j'essaie. J'essaie vraiment.
Enfin, au sujet des recettes, vous présentez un bon argument. Nous en avons déjà parlé, il ne fait aucun doute que certaines recettes gouvernementales sont une conséquence directe de la croissance de l'économie. Mais, comme nous avons déjà essayé de vous dire, dans quatre pages d'information fiscale de groupes comme le Conference Board, l'Institut C.D. Howe, le FMI, la Banque mondiale, les Canadiens continuent de ployer sous l'un des plus lourds fardeaux fiscaux du monde.
Nous pensons qu'une croissance des recettes résultant d'une baisse d'impôts serait une chose positive et marquante, mais nous ne l'avons pas encore vue. Les propres documents du ministère des Finances montrent qu'au moins le tiers de la croissance des recettes résulte directement d'un glissement des tranches d'imposition ou, comme dit le ministère des Finances, d'une interaction entre l'impôt et l'augmentation des revenus. C'est une très habile façon pour les bureaucrates de dire que nous taxons et punissons les Canadiens pauvres, ce qui est fondamentalement mal. Le gouvernement devrait en rougir. Alors, monsieur Szabo, je maintiens ce que j'ai dit.
Monsieur Ritz, j'apprécie votre intervention. Le comprends ce que vous dites et vous respecte pour cela.
La seule chose dont je peux me réjouir, monsieur Szabo, c'est que vous ne m'ayez pas accusé, comme vous l'avez fait pour la Chambre de commerce du Canada de ne pas avoir de coeur. Je vous en remercie.
M. Paul Szabo: Monsieur le président, merci beaucoup.
Je dois respectueusement vous dire que les parlementaires qui ont participé particulièrement aux travaux du groupe sur Taiwan ont été vexés par ces commentaires. Le gouvernement de Taiwan, avec qui nous n'avons pas de relations diplomatiques officielles à cause de notre politique sur la Chine unique, mais avec qui nous faisons quantité d'affaires, a été aussi très blessé.Ils n'ont pas d'autres moyens de communiquer avec les Canadiens, ou avec les parlementaires canadiens, si ce n'est par l'intermédiaire des députés d'arrière-banc.
Il faut prévoir 14 heures de vol à l'aller et au retour. Nous y allons lorsque la Chambre ne siège pas, nous y allons donc pendant ce que vous appelez nos vacances. On dit souvent que les parlementaires sont en vacances lorsque la Chambre ne siège pas. Nous faisons cela parce que nous représentons le Canada à l'étranger. Nous recevons 120 000 visiteurs de Taiwan chaque année et nous avons reçu plus de 60 000 nouveaux immigrants au Canada depuis cinq ans. Ils créent de l'emploi et apportent des capitaux au Canada. Ces choses devraient vous sembler importantes et vous ne devriez pas les dénigrer comme étant des voyages et du tourisme aux frais de la princesse.
M. Walter Robinson: Contrairement à ce qu'on vient de dire, je n'ai jamais déclaré que les parlementaires étaient en vacances lorsque la Chambre ne siégeait pas. Je mets au défi M. Szabo de trouver un commentaire en ce sens que j'aurais formulé depuis un an et demi.
Le président: En tant que président, j'accepte des opinions de toutes sortes, sur divers sujets. En toute franchise, ce qui m'intéresse vraiment, c'est la convention sur la productivité, comment on peut l'améliorer et comment on peut améliorer la qualité de vie des Canadiens.
Au sujet de M. Szabo, on peut dire que la démocratie est extraordinaire et a permis la réélection de M. Szabo à plusieurs reprises, maintenant, ce qui montre que les gens de sa circonscription, qui vous tiennent tant à coeur, apprécient son travail.
Madame Redman.
Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib): Merci, monsieur le président. J'aimerais poser une question à M. Lemelin, si vous permettez.
La question de la santé est manifestement très importante partout au Canada. L'un des témoins d'hier disait que le gouvernement devait corriger la situation, en réunissant deux solitudes, soit l'argent consacré à la R-D dans le domaine médical et les soins aux patients. En vérité, en envisageant la restructuration des soins de santé pour rétablir la confiance que doivent avoir les Canadiens dans leur système d'assurance-santé, ces deux choses doivent être mieux coordonnées. Je me demande si vous avez des commentaires à formuler à ce sujet.
Dr Jacques Lemelin: C'est un point très important, et il faut faire des progrès en ce sens. L'un des domaines de recherche touché est la recherche relative aux services de santé—comment obtenir ces soins. Nous découvrons de nouveaux traitements et de nouvelles façons de prévenir la maladie, et la prochaine étape consiste à mettre ces découvertes en pratique. La recherche sur les soins primaires est très concrète à cet égard.
Si le gouvernement ne fait rien, il se creusera un fossé entre ce que nous savons que nous devrions faire et ce que nous faisons. Voilà pour la recherche concernant les services de santé. Je pense qu'il faut faire davantage. Les personnes les plus aptes à se livrer à ce genre de recherche sont les médecins qui sont près des patients, qui sont consultés au premier stade de la maladie ou même quand le patient n'est pas encore malade et qu'il est possible de prévenir la maladie. Voilà ce qu'est la recherche en soins primaires. C'est un aspect très important qu'il ne faut pas négliger.
Mme Karen Redman: Dans une vie antérieure, sur la scène locale, j'ai siégé au conseil d'hygiène du district, ainsi qu'au conseil d'administration de l'hôpital local. Nous avons envisagé le travail horaire et la capitation. Nous avons examiné plusieurs modèles, souvent des modèles américains, pour voir s'il n'y aurait pas moyen d'améliorer ou de raffiner notre système. Vous avez parlé favorablement de votre travail dans un régime de capitation.
Mais que faire au sujet des patients séropositifs, sidéens et autres qui n'ont pas de carte d'assurance-maladie? Comment peuvent-ils s'intégrer dans ce genre de système?
Dr Jacques Lemelin: Le collège des médecins de famille du Canada a adhéré aux efforts de réforme des soins primaires qu'on a déployés en Ontario. Avec une réforme des soins primaires et un régime de capitation, il faut seulement que le patient soit sur la liste du médecin pour pouvoir obtenir des soins. Que l'on opte pour un système de paiement à l'acte ou de capitation, il n'y a aucune raison que ces malades ne reçoivent pas les soins dont ils ont besoin.
• 1115
Parliez-vous de leur capacité d'avoir accès à des médicaments
gratuits, ou à des soins?
Mme Karen Redman: Si dans tout ce processus, nous devons parler de l'immutabilité du régime et de son coût, il y a des personnes qui absorbent énormément de ressources. Si c'est question de bilan financier, peu importe la répartition géographique, je m'en trouverai fort aise si ce malade va se faire soigner dans l'établissement de quelqu'un d'autre car il va mal faire paraître mes chiffres.
Dr Jacques Lemelin: Assurément, un système de paiement à l'acte permettrait plus facilement aux médecins de choisir leurs patients. Ils auraient tendance à vouloir choisir les patients qui leur permettront d'augmenter rapidement leur revenu. Si vous êtes payé un certain montant pour voir un patient et que ce dernier exige trois fois plus temps qu'un autre, il va de soi que vous ne pourrez voir qu'un tiers du nombre de patients que vous pourriez voir autrement.
Dans un régime de capitation, on peut prévoir des montants différents pour divers patients, selon l'âge et la gravité de la maladie. Ainsi, l'état du patient n'entrerait pas en ligne de compte car il y aurait une différence de rémunération. En théorie, il n'y a pas de raison de ne pas faire la même chose dans un régime de paiement à l'acte également, mais cela devient très compliqué.
Mme Karen Redman: Merci.
Le président: Y a-t-il d'autres questions?
Au nom du comité, je vous remercie. Les témoins ont été très intéressants. Nous apprécions sincèrement votre participation au processus de consultations prébudgétaires. Il est très important pour nous d'entendre les opinions d'un grand nombre de Canadiens de toutes les régions qui se soucient sincèrement de l'avenir de notre pays. Vous avez certainement prouvé que vous étiez animés par ce souci ce matin, et nous vous en sommes reconnaissants.
Nous allons suspendre la séance pendant deux ou trois minutes.
Le président: Le comité reprend sa séance. Je vous souhaite la bienvenue à tous ce matin. Comme vous le savez, le comité des Finances se déplace dans tout le pays pour consulter les Canadiens au sujet des priorités du prochain budget.
Je profite de l'occasion pour souhaiter la bienvenue aux représentants des organismes suivants: l'Association canadienne des bijoutiers; le Conseil national de recherche du Canada; le Conseil de recherche en sciences naturelles et en génie du Canada; Nuclear Awareness Project; M. Dale Orr, qui comparaît à titre individuel; et la Retirement Income Coalition.
Nous allons commencer par l'Association canadienne des bijoutiers, représentée par M. Jonathan Birks. Bonjour monsieur.
M. Jonathan Birks (premier vice-président, Association canadienne des bijoutiers; président, Birkden Management Inc.): Merci, monsieur le président. Je voudrais simplement préciser que c'est l'Association canadienne des bijoutiers.
C'est un plaisir que de vous rencontrer de nouveau, monsieur le président. Nous commençons à sentir des odeurs de budget dans l'air.
Je m'appelle Jonathan Birks et je suis premier vice-président de l'Association canadienne des bijoutiers, ainsi que le président du comité des relations gouvernementales de notre association. Je suis accompagné aujourd'hui de M. Pierre Akkelian, ancien président de l'Association canadienne des bijoutiers, et de M. Michael Birchard, président de l'Association canadienne des montres et aussi président de Rolex Canada.
• 1130
Nous apprécions vivement cette occasion qui nous est donnée de
comparaître, pour la cinquième année consécutive, devant le Comité
permanent des finances dans le cadre de ses consultations
prébudgétaires.
[Français]
L'industrie de la bijouterie au Canada comprend environ 4 400 compagnies, dont la plupart sont de petites entreprises privées. Elles touchent tous les aspects de l'industrie de la bijouterie et emploient environ 35 000 Canadiens à temps plein. L'Association canadienne des bijoutiers est l'association professionnelle nationale qui représente ce secteur.
[Traduction]
Monsieur Akkelian, monsieur Birchard et moi-même sommes ici aujourd'hui au nom de l'Association canadienne des bijoutiers pour vous exhorter, comme les années précédentes, à éliminer la taxe d'accise anachronique de 10 p. 100. Cette taxe est imposée sur tous les bijoux d'une valeur de plus de 3 $ ainsi que sur les montres d'une valeur de plus de 50 $. Cette taxe dite de luxe a été imposée pour la première fois en 1918 pour financer l'effort de guerre. C'est la seule taxe de ce genre qui subsiste encore. Elle aurait dû être remplacée par la TPS en 1991, mais nous avons maintenant les deux. Cette taxe cause beaucoup de tort à l'industrie canadienne de la bijouterie.
L'étude de Ernst & Young que notre association a fait faire en 1997 précisait que «d'après tous les témoignages et renseignements que nous avons analysés, cette taxe devrait être éliminée.» L'étude Ernst & Young concluait que la taxe faisait certainement du tort à l'industrie de la bijouterie et même à l'économie canadienne, et cela de la façon suivante.
[Français]
Premièrement, elle est discriminatoire et punitive. Les bijoux ne sont pas des produits de luxe. Les Canadiens dépensent en moyenne 130 $ par an pour des bijoux, soit moins que le prix d'un abonnement d'un an à un quotidien.
[Traduction]
Cette taxe défavorise les bijoutiers canadiens par rapport à tous les autres secteurs de la vente au détail qui n'ont pas à faire face à cette taxe supplémentaire de 10 p. 100 sur les ventes des fabricants. La taxe augmente également les frais de financement des stocks alors que pratiquement toutes les autres taxes sur les stocks ont été éliminées avec l'instauration de la TPS en 1991.
Deuxièmement, la taxe nuit à la petite entreprise et aux emplois. L'industrie de la bijouterie, qui emploie beaucoup de main-d'oeuvre et qui se retrouve dans les villes grandes et petites de tout le pays, se compose avant tout de petites entreprises. En effet, 90 p. 100 des bijouteries emploient moins de 20 personnes et 65 p. 100 comptent moins de cinq employés.
Troisièmement, la taxe est difficile à appliquer et favorise l'économie souterraine. Dans son rapport de 1996, le vérificateur général déclarait:
-
L'administration de la taxe d'accise sur les bijoux pose en outre
des problèmes particuliers. Des agents de Revenu Canada, s'occupant
directement de l'application de cette taxe, nous ont fait savoir
qu'il est très difficile de l'appliquer à tous les fabricants de
bijoux qui devraient la payer.
Les fraudes fiscales et l'évitement fiscal sont évalués à environ 40 à 60 p. 100 des ventes. Cette taxe a créé une économie souterraine. La section des Douanes et Accise de la division de Milton de la GRC a reconnu que:
-
L'évitement de cette taxe [...] apporte évidement un avantage
injuste à ceux qui font la contrebande de bijoux et à leurs
clients.
Je sais que ce problème a obligé d'autres bijoutiers à
participer à des activités de contrebande ou à acheter aux
contrebandiers des bijoux sur lesquels aucun droit n'avait été payé
afin de rester concurrentiels.
En réduisant la contrebande, nous cesserons d'exporter des emplois. Le gouvernement n'aura pas non plus à consacrer des ressources à la perception d'une taxe qu'il est pratiquement impossible de faire appliquer.
[Français]
Quatrièmement, la taxe génère des revenus nets très minimes. La taxe d'accise sur les bijoux génère environ 55 millions de dollars en revenus fiscaux pour le gouvernement fédéral. Ce montant est insignifiant lorsqu'on le compare à la totalité des revenus fiscaux, soit 0,04c. par dollar de revenu recueilli. Les pertes nettes découlant de l'abolition de la taxe seraient de moins de 55 millions de dollars, parce que l'élimination aurait pour effet de rendre un grand nombre de transactions légitimes et donc de les assujettir à la TPS et aux taxes sur les sociétés. L'élimination de la taxe réduirait également les dépenses administratives de Revenu Canada.
[Traduction]
On pourrait se demander pourquoi abroger la taxe maintenant, au bout de 80 ans. Il y a deux raisons à cette question. Premièrement, il ne faudrait pas que l'industrie de la bijouterie continue d'être pénalisée à cause d'une omission du gouvernement. Et deuxièmement, l'abolition de la taxe d'accise aidera également l'industrie du diamant qui commence à se développer dans le nord du pays.
Les mines de diamant Ekati et Diavik, dans les Territoires du Nord-Ouest, ont coûté environ deux milliards de dollars. À elles deux, elles feront du Canada le quatrième producteur de diamants au monde et représenteront 10 p. 100 de l'industrie mondiale du diamant.
Toutes les entreprises de l'industrie du diamant, et cela va de l'extraction à la vente au détail en passant par le tri, la taille et le polissage, doivent obtenir un permis de taxe d'accise. La taxe n'est payée qu'une seule fois par le détaillant au dernier point de vente. Toutefois, tous les autres intermédiaires doivent remplir un formulaire pour réclamer une exonération pour chaque transaction. Le meilleur moyen d'assurer la vigueur de notre nouvelle industrie du diamant est d'éliminer la taxe d'accise sur les bijoux le plus tôt possible, pendant que ce secteur en est encore à ses débuts.
Dans le rapport prébudgétaire de décembre dernier, votre comité a exprimé ses sympathies pour l'industrie de la bijouterie et a recommandé que, et je cite «... le ministère des Finances évalue le bien-fondé d'une taxe d'accise sur les bijoux».
La citation suivante figurait dans le rapport prébudgétaire de 1996 dans lequel le Comité des finances affirmait de façon encore plus catégorique;
-
Le comité juge anachronique la taxe d'accise de 10 p. 100. Si le
but est de taxer les objets de luxe, la taxe ne devrait pas frapper
les bijoux bon marché, mais beaucoup d'autres articles comme les
yachts, les domaines, les manteaux de vison, le caviar et le
champagne. La taxe d'accises devrait être abolie.
Comme le comité le recommande depuis deux ans, tous les partis politiques fédéraux appuient notre association dans ses efforts visant à faire abolir la taxe d'accise. Et je signale que le ministre du Revenu national est d'accord avec nous.
Le gouvernement s'est engagé à rendre la fiscalité plus équitable. Grâce à l'élimination du déficit, le gouvernement est enfin en mesure de supprimer les aberrations de façon à commencer à rendre la fiscalité plus équitable.
L'Association canadienne des bijoutiers a persisté patiemment, au cours des années, dans ses efforts visant à l'élimination de la taxe d'accises. Nous avons fait tout ce qu'on nous avait demandé et même plus. Nous avons fait faire une étude objective de l'industrie de la bijouterie par Ernst & Young, en octobre 1997, pour analyser le dossier politique. Il n'y a pas de dossier politique. Nous avons consulté à de nombreuses reprises les fonctionnaires, les députés et le ministre. Nous avons obtenu l'appui de tous les partis politiques fédéraux. Nous sommes entièrement appuyés par notre industrie et la nouvelle industrie du diamant. Les avis sont unanimes. Il suffit que le ministre des Finances agisse.
Nous exhortons vivement le comité à exercer ses responsabilités de fiduciaire et à recommander catégoriquement l'abolition immédiate de la taxe d'accise sur les bijoux.
Merci de votre attention.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Birks.
Nous allons maintenant entendre le représentant du Conseil national de recherches du Canada, M. Arthur Carty. Bonjour monsieur.
[Français]
M. Arthur J. Carty (président, Conseil national de recherches du Canada): Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs.
Je vous remercie de me donner la chance de m'exprimer ce matin. Puisqu'on a très peu de temps, je parlerai en anglais si vous me le permettez.
[Traduction]
Le Conseil national de recherches est le principal organisme de R-D du gouvernement fédéral et nous contribuons largement à l'innovation au Canada. En fait, on peut dire que le CNR joue un rôle très particulier dans notre pays. Nous rejoignons chaque province, chaque territoire et un grand nombre de régions et de villes du pays par l'entremise de nos instituts et de nos programmes de recherche, y compris le programme d'aide à la recherche industrielle que la plupart d'entre vous connaissez sous le sigle PARI.
• 1140
D'ici 2001, selon le plan que nous avons établi il y a deux
ans et demi dans le contexte de l'examen des programmes, en
1995-1996, le CNR compte être un chef de file du développement
d'une économie novatrice basée sur le savoir, au Canada, grâce à la
science et à la technologie. Nous réalisons cet objectif de
diverses façons: d'abord, nous faisons de la recherche de pointe
dans nos laboratoires, ensuite en transférant ces connaissances et
la technologie que nous mettons au point à l'industrie canadienne,
également en établissant des partenariats avec les entreprises
grandes et petites afin d'améliorer la commercialisation et la
productivité de même qu'en mettant l'accent sur l'innovation au
niveau local et régional grâce à des initiatives communautaires
d'innovation.
Le Conseil national de recherches fournit également des éléments essentiels de l'infrastructure nationale telle que des souffleries pour l'industrie aérospatiale, des usines pilotes pour la biotechnologie et des observatoires d'astronomie à la fine pointe du progrès pour la recherche universitaire.
Monsieur le président, le CNRC a réalisé d'énormes progrès dans la concrétisation de sa Vision depuis que l'examen des programmes lui a imposé en 95-96 une importante restructuration et un recyclage de ses activités. Malgré de profondes compressions budgétaires de 76 millions de dollars dans le cadre de l'examen des programmes (phase I)—soit 17 p. 100 de notre financement de base—et de 13,1 millions de dollars cette année plus 3,5 p. 100 pour 98-99, le CNRC a fait beaucoup plus avec moins de ressources et a réussi, je crois, beaucoup mieux que nous n'aurions osé l'espérer.
Je n'ai pas le temps aujourd'hui d'énumérer toutes nos réussites mais j'aimerais vous signaler que dans vos trousses d'information vous trouverez une grande affiche en couleur qui décrit certaines de nos contributions à la création de richesses et d'emplois, à l'accroissement de la productivité, à la croissance économique et au mieux être de la société grâce à l'innovation.
Par exemple, je me permets de citer la découverte et la mise au point par le CNRC de vaccins contre la méningite infantile, notre rôle dans l'émergence de Saskatoon comme l'une des collectivités les plus avancées au monde en biotechnologie agricole; et l'impact que continue d'avoir le CNRC sur l'essor des petites et moyennes entreprises au Canada. Nous avons réussi tout cela malgré de profondes compressions dans nos crédits votés. A la différence des conseils subventionnaires, le CNRC n'a pas vu son budget de R-D rétabli au niveau de 94-95 dans le budget fédéral de 98 et nous avons de sérieux défis à relever. Nous n'avons pas pu investir afin de saisir de nouvelles possibilités de R-D stratégique pour le Canada et c'est un problème très grave pour une organisation vouée à la recherche. Ce sont des occasions que le Canada devrait saisir s'il veut conserver sa compétitivité industrielle.
Notre équipement, nos installations et notre infrastructure se détériorent et nous perdons du personnel hautement qualifié de telle sorte que nous sommes moins en mesure d'assurer la formation des jeunes chercheurs sur le tas.
Faute de ressources financières suffisantes, nous ne pouvons pas nous engager dans de nouveaux partenariats et, par ailleurs, l'inflation scientifique et la faiblesse du dollar canadien ont sérieusement entamé nos budgets de fonctionnement.
Voilà pourquoi il nous faut une injection de fonds nouveaux pour que nos crédits votés nous permettent de réaliser la phase II de notre Vision jusqu'en 2001 et améliorer notre capacité de contribuer de façon durable à l'innovation et à l'accroissement de la productivité au Canada. Monsieur le président, nous demandons à notre gouvernement une augmentation annuelle de 25 millions de dollars des crédits votés pour les trois prochaines années.
À mon avis, le CNRC est un véritable trésor pour le Canada. Nous croyons que le Canada doit investir dans des initiatives stratégiques comme les piles à combustible; notre projet des sciences génomiques; les infrastructures et installations aérospatiales; la fonderie à prototype optoélectronique et le réseau de connaissances scientifiques. Il s'agit dans tous les cas de partenariats créés sur l'initiative du CNRC et qui ont une importance cruciale pour le Canada au tournant du nouveau siècle. Nous devons pouvoir compter sur votre appui pour les mettre en place.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Carty.
Nous entendrons maintenant M. Thomas Brzustowski du conseil de recherches en sciences naturelles et en génie. Soyez le bienvenu.
M. Thomas Brzustowski (président, Conseil de recherches en sciences et en génie du Canada): Merci, monsieur le président.
Monsieur le président et membres du comité, vous connaissez sans doute très bien notre sigle le NSERC en anglais, ou CRSNG en français. Nous investissons dans les gens, dans la découverte et dans l'innovation et cela en soutenant la recherche universitaire en sciences et en génie.
Nous avons préparé un très court exposé comme nous savons que le comité est déjà submergé de papiers. Il n'a que 4 pages.
Nous aimerions d'abord vous remercier d'avoir été attentifs à nos préoccupations l'an dernier. Vous les avez soigneusement considérées et vous avez recommandé au gouvernement de prendre des mesures concrètes. Je peux vous dire que les chercheurs universitaires canadiens qui comptent sur le CRSNG pour les appuyer dans leurs recherches vous sont très reconnaissants. Ils peuvent maintenant faire plus de ce que nous attendons d'eux. Ils ont exprimé leur reconnaissance publiquement et dans des lettres adressées au gouvernement, qui continuent à affluer huit mois après l'adoption du budget.
[Français]
Dans le budget de 1998, le gouvernement stipulait que les nouveaux crédits devaient servir à deux fins: rehausser le soutien accordé aux étudiants en recherche et favoriser un plus grand nombre de partenariats entre les chercheurs universitaires et les entreprises.
[Traduction]
À la première page de notre mémoire, nous décrivons tout simplement la façon dont nous utilisons les fonds, et les retombées sont considérables. Plusieurs centaines d'étudiants qui n'auraient pas pu recevoir d'aide dans le passé pourront dorénavant être aidés. Nous avons aussi fait une chose qui nous apparaît très importante, conscients comme nous le sommes que quand nous demandons au secteur privé de s'allier aux universités pour préparer des projets de partenariat, nous devons leur garantir un certain taux de réussite, et nous avons pu augmenter ce taux de réussite dans les programmes universités-industries.
Nous expliquons plus loin dans le mémoire, de façon très succincte, que le budget de 98 nous a permis de parer au plus pressé. Nous vous énumérons les cinq sources de pression sur notre budget. Je ne vais pas prendre le temps de les commenter maintenant; j'en ai déjà parlé à maintes reprises et monsieur Carty en a mentionné quelques-unes. Ces pressions nous ont amenés à déterminer qu'il faudra injecter 250 millions de dollars de plus à notre budget au cours des quelques années à venir. Nous espérons que le gouvernement admettra la réalité de ces pressions et nous donnera raison d'espérer qu'il tentera d'accéder à notre requête.
[Français]
Monsieur le président, une sixième pression budgétaire se forme à l'horizon, pression qui demandera une augmentation du budget du CRSNG, en plus des 250 millions de dollars dont il vient d'être question. Au cours des cinq prochaines années, la Fondation canadienne pour l'innovation investira près de 2 milliards de dollars dans l'infrastructure de recherche, qui est vraiment indispensable. Cependant, les coûts d'exploitation de cette nouvelle infrastructure devront être assumés par les chercheurs qui y ont recours et leur établissement d'attache.
[Traduction]
J'espère que tous les décideurs au gouvernement sont bien conscients que nous devrons bientôt couvrir les coûts d'exploitation de la nouvelle infrastructure de recherches que mettra en place la Fondation canadienne pour l'innovation. La FECI n'aura plus de rôle à jouer quand la clé tournera dans la porte. Si la tendance se maintient, je crois pouvoir dire que la moitié de l'investissement de 2 milliards de dollars sera consacré à la science, au génie et à l'environnement, domaines pour lesquels le CRSNG est responsable. En laissant de côté toute réduction de la valeur de l'actif et toute déduction pour amortissement, et en supposant que le CRSNEG devra assumer seulement la moitié des coûts, nous croyons qu'il nous faudra néanmoins 50 millions de dollars de plus par année en crédit budgétaire, et cela dans trois, quatre ou cinq ans d'ici, cette somme augmentant graduellement au fur et à mesure que l'infrastructure sera mise en place.
Les universités nous ont déjà fait savoir qu'elles s'adresseront à nous puisqu'elles ne peuvent s'adresser à aucun autre bailleur de fonds. Je suis convaincu que tout cela était connu au moment de la conception de la FCI.
[Français]
Monsieur le président, j'aimerais maintenant m'adresser au comité non plus à titre de président du CRSNG, mais en tant que président du Comité de direction du Programme des réseaux de centres d'excellence.
[Traduction]
Le président du CRSNEG doit porter deux casquettes, et si vous me le permettez, je vais changer de casquette pour clore mon exposé.
Vous savez sans doute qu'au cours des dernières semaines on a annoncé la création de trois nouveaux réseaux de centre d'excellence. Ce sont des organisations d'innovation et de recherche canadiennes superbes qui nous permettent d'accumuler une masse critique de capacités intellectuelles dans le but de régler des problèmes de taille tout en permettant aux chercheurs participants de demeurer dans les régions, d'enseigner localement et d'agir comme sources d'information au niveau local.
• 1150
Permettez-moi de parler brièvement de ces trois nouveaux
réseaux que nous avons financés. Il y a un réseau sur l'arthrite
dont l'activité va des bancs d'essai en laboratoire jusqu'au lit
des patients. Il y a un réseau sur les mathématiques comme langage
de haute technologie. Il y a un réseau sur la géomatique, secteur
industriel dans lequel le Canada peut aspirer à devenir un chef de
file. Voilà la bonne nouvelle.
La mauvaise nouvelle c'est que ces réseaux ne sont que trois des 72 propositions reçues. Il n'y avait même pas à l'époque de budget pour ces trois-là. Ainsi, nous avons demandé onze propositions détaillées parmi les 72 lettres d'intention, mais notre budget ne nous a permis d'en financer que trois.
[Français]
Je crains que le faible taux de succès des concours et leur tenue sporadique fassent en sorte que les chercheurs canadiens et les partenaires de l'industrie et du gouvernement se détournent du Programme des réseaux de centres d'excellence, ne voyant pas l'intérêt d'investir autant d'efforts dans l'élaboration de propositions en vue de la formation de nouveaux réseaux de centres d'excellence.
[Traduction]
Il serait épouvantable qu'un si faible taux de réussite décourage les meilleurs parmi les meilleurs de notre pays et leurs partenaires au gouvernement et dans l'industrie et les empêche de demander les fonds nécessaires pour créer ces merveilleux réseaux qui s'attaquent avec autant de succès à d'importants problèmes.
À mon avis, il faudrait au Canada financer le double des 14 réseaux d'excellence que nous avons et nous possédons la capacité intellectuelle de le faire. Il pourrait peut-être y en avoir 30. J'ai signalé dans ma dernière demande l'espoir que j'ai que le gouvernement jugera possible de doubler ce programme. L'augmentation pourrait être très lente, 5 millions dans le prochain budget et ensuite le financement de trois groupes de 16 réseaux de centres d'excellence, pour que nous puissions atteindre un total de 30 de ces merveilleux centres d'innovation.
Cela dit, monsieur le président, je vous remercie de m'avoir invité à venir vous parler.
[Français]
Je demeure à votre disposition pour répondre à vos questions. Merci beaucoup.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Brzustowski.
Nous allons maintenant entendre M. David Martin du Nuclear Awareness Project
M. David H. Martin (directeur de la recherche, Nuclear Awareness Project): Je vous remercie beaucoup. Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs.
[Français]
Bonjour, messieurs et mesdames.
[Traduction]
Je représente le Nuclear Awareness Project, un petit groupe environnemental qu'on appelle souvent le chien de garde nucléaire.
On devrait vous avoir remis un document intitulé «Les subventions versées à l'EACL: La fin d'une époque». Je ne compte pas vous le lire en entier vu le peu de temps qui m'est imparti; je me contenterai donc d'en faire ressortir les faits saillants. Notre groupe ne réclame pas davantage d'argent. En fait, c'est le contraire. Notre message est simple: le moment est venu pour le contribuable de cesser de subventionner l'Énergie atomique du Canada Limitée.
J'aimerais d'abord préciser que je vous ferai tenir plus tard cette semaine une étude révisée qui aborde bon nombre des mêmes sujets. Permettez-moi de vous dévoiler une primeur. Nous avons recalculé les subventions totales versées à Énergie atomique du Canada Limitée au cours des 46 dernières années. Elles s'élèvent à 15,8 milliards de dollars. Nous avons aussi établi que cette somme, si elle avait été investie dans des entreprises rentables, aurait pu générer des retombées économiques de 202 milliards de dollars. Voilà qui vous donne une idée du tort que les subventions versées à EACL ont causé à l'économie.
J'aimerais vous entretenir brièvement de l'orientation qu'a prise le gouvernement. Dans le budget de 1996, à l'issue de l'examen de programmes entrepris en juin 1995, le gouvernement a annoncé qu'il verserait à l'EACL une subvention de 164 millions de dollars pour l'année financière 1996-1997. Cette subvention devait être ramenée à 132 millions de dollars en 1997-1998 et ensuite à 100 millions dollars en 1998-1999. On pouvait supposer que cette somme continuerait d'être versée à l'EACL jusqu'à la fin des temps.
• 1155
En fait, le gouvernement s'est beaucoup écarté de cet
engagement. En 1997-1998, la subvention versée à l'EACL au lieu
d'être 174 millions de dollars, comme le prévoyait le budget
principal, a été supérieure à 197 millions de dollars. Cette somme
ne comprend pas la subvention cachée de plus de 21 millions de
dollars que représentent les recherches provenant de la vente d'eau
lourde, recettes qui ont été remises à l'EACL et comptabilisées
dans son budget pour la première fois en 1996-1997. La subvention
totale versée à l'EACL en 1976-1997 s'est donc élevée à près de 200
millions de dollars.
On voit donc que les crédits affectés à l'EACL en 1996-1997 ont augmenté de 13 p. 100 par rapport à l'année précédente ou, si l'on tient compte des recettes provenant de la vente d'eau lourde que je viens de mentionner, de 25 p. 100. À la même époque, le gouvernement réduisait cependant considérablement les crédits affectés à l'ensemble des conseils, des ministères et des organismes fédéraux. À titre d'exemple, mentionnons le fait que Ressources naturelles Canada, dont l'EACL relève, a été parmi les ministères fédéraux les plus touchés par les compressions budgétaires; étalées sur trois ans, ces compressions ont représenté, si je ne m'abuse, plus de 40 p. 100 du budget ministériel.
Permettez-moi d'aborder quelques questions bien précises. Je crois comprendre que le gouvernement va faire une annonce, dans les semaines qui viennent, au sujet des laboratoires de Whiteshell. Malgré une offre supérieure à 20 millions de dollars au secteur privé pour l'inciter à prendre en charge ces laboratoires, personne n'en a voulu. Le moment est venu de fermer ces laboratoires, et au lieu de gaspiller cet argent, il conviendrait de l'affecter aux opérations de nettoyage des déchets radioactifs produits par l'EACL.
L'EACL construit actuellement deux autres réacteurs dans ses laboratoires de Chalk River. J'attire votre attention sur le fait qu'une entreprise privée, MDS Nordion, touchera une subvention de 120 millions de dollars dans le cadre de ce projet. Si la production d'isotopes médicaux est vraiment une entreprise rentable, pourquoi le gouvernement doit-il continuer à verser des subventions au secteur privé à ce titre?
On construira bientôt un nouveau réacteur, le réacteur canadien à neutrons, au coût de 400 millions de dollars. J'ajoute que le projet a non seulement l'appui de l'EACL, mais aussi celui du Conseil national de recherches. À mon avis, il convient d'établir certains critères pour l'utilisation de ce réacteur. Qui va s'en servir? Dans quelle mesure ces utilisateurs vont-ils participer au financement du projet? Quelle sera la contribution à ce projet de 400 millions de dollars des entreprises qui l'appuient? Quelle sera la contribution d'Ontario Hydro qui compte utiliser le réacteur à des fins de recherche?
Passons maintenant à la question des déchets radioactifs qui sont produits lors de la mise hors service des centrales nucléaires. Pendant longtemps, l'EACL a nié sa responsabilité en ce qui touche la planification et le financement de la gestion des déchets radioactifs provenant de la mise hors service des centrales nucléaires. En 1996-1997, pour la première fois, l'EACL a établi que le coût de la gestion des déchets radioactifs s'élevait à 400 millions de dollars. Le vérificateur général pense plutôt que cette somme s'élève à 665 millions de dollars.
Le vérificateur général reproche sévèrement depuis six ans à l'EACL de ne pas prévoir dans son budget le coût de la mise hors service des centrales et de la gestion des déchets radioactifs. Le moment est venu de contraindre l'EACL à assumer ses responsabilités.
Je terminerai en abordant la question des exportations de réacteurs. À l'issue de l'examen des programmes menés en 1995, l'EACL a décidé, comme on pouvait s'y attendre, qu'elle concentrerait ses activités sur ses exportations de réacteurs CANDU. La société se fixait comme objectif de vendre 10 réacteurs en 10 ans. Or, il est fort peu probable que l'EACL atteigne cet objectif puisque ses meilleurs clients éventuels, la Chine, la Corée du Sud, la Roumanie et la Turquie connaissent des difficultés financières.
• 1200
Qu'adviendrait-il cependant si l'EACL réussissait à vendre 10
réacteurs en 10 ans? À mon avis, même si c'était le cas, cela ne
suffirait pas à compenser l'énorme investissement consenti par le
contribuable dans l'EACL, à savoir les 15,8 milliards de dollars
versés à la société en subventions et les 200 milliards de dollars
en coût d'opportunité. L'EACL n'est pas sur le point de devenir
autosuffisante. Elle ne le deviendra jamais. La société constitue
une perte nette pour le Canada et le moment est venu de le
reconnaître.
Je vous remercie.
Le président: Je vous remercie beaucoup, monsieur Martin.
Je donne maintenant la parole à M. Dale Orr. Bienvenue.
M. Dale Orr (vice-président principal, Wharton Econometrics Forecasting Associates Canada Inc., (témoignage à titre personnel)): Je vous remercie, monsieur le président.
Je représente WEFA Incorporated, une importante société d'experts-conseils économiques comptant 15 bureaux dans le monde. Je suis chargé des services canadiens. Je suis l'auteur des deux documents qui vous ont été remis. Le premier s'intitule «Planification budgétaire» et le second, «Cotisations à l'assurance-emploi: Une porte de sortie pour M. Martin». Je me reporterai à ces deux documents et j'en ferai ressortir les points saillants.
Le document «Planification budgétaire» évalue à 9 milliards de dollars l'excédent budgétaire pour 1998-1999. Cette somme s'ajoute à la réserve pour imprévus. Ce chiffre est conforme aux prévisions annoncées récemment selon lesquelles l'excédent budgétaire pour les six premiers mois de la présente année financière s'élèverait à 10 milliards de dollars. À mon avis, les recettes gouvernementales seront supérieures cette année de 6 milliards de dollars et le produit intérieur brut inférieur de 11 milliards de dollars à ce que M. Martin prévoyait dans son budget de février dernier. La production intérieure sera considérablement moins élevée que prévu, mais les recettes gouvernementales seront, pour leur part, beaucoup plus élevées.
Le comité voudra peut-être discuter du fait que M. Martin fait encore une fois preuve de grande prudence—c'est ce qu'il a certainement fait l'an dernier—dans les hypothèses économiques sur lesquelles il se fonde. Il ne se contente pas seulement de prévoir une réserve pour imprévus. L'an dernier, le gouvernement a en fait sous-estimer ces recettes, craignant un ralentissement de l'économie.
Pour ce qui est des dépenses, à l'heure actuelle, le gouvernement dépense sans doute déjà une partie du dividende budgétaire. Il en aura d'ailleurs sans doute dépensé l'équivalent de 4 millions de dollars d'ici le dépôt du budget en février 1999. À mon avis, l'excédent résiduel sera de 5 milliards de dollars, ce à quoi il faut ajouter la réserve pour imprévus de 3 milliards de dollars. Puisque nous serons en février 1999, soit presqu'à la fin de l'année financière, cette somme sera affectée à la réduction de la dette.
Comme il s'agit de calculs complexes, je serai heureux de vous donner plus de détails si cela vous intéresse.
Je crois qu'on peut raisonnablement prévoir que l'excédent budgétaire pour 1999-2000 s'élèvera à environ 9 milliards de dollars. Dans ces circonstances, je pense qu'il est raisonnable que M. Martin propose, comme il a dit qu'il le ferait, de répartir une partie de cette somme. Je recommanderais qu'entre au moins 2 et 3 milliards de dollars soient affectés à des réductions d'impôts. Ces réductions seraient annoncées dans le budget de février 1999, mais ne s'appliqueraient qu'en 1999-2000. Je recommande également que les 7 milliards de dollars restants soient affectés à la réduction de la dette et qu'aucune tranche de l'excédent budgétaire ne serve à augmenter les dépenses de programmes. Le gouvernement pourrait alors aussi affecter à la réduction de la dette la réserve pour imprévus de 3 milliards de dollars.
• 1205
Le second document intitulé «Primes d'AE: Une porte de sortie
pour M. Martin», débute en reconnaissant l'existence d'un sérieux
problème pour lequel il n'y a pas de solution facile. La
recommandation que je viens de formuler permet d'éviter la
situation dans laquelle M. Martin se retrouve maintenant, compte
tenu des mesures qu'il a prises au cours des deux ou trois
dernières années et des mesures qu'il compte prendre cette année,
lesquelles sont clairement contraires à l'objectif avoué de
l'assurance-emploi. La plupart des gens, M. Martin y compris, ne
souhaitent pas qu'on modifie la Loi sur l'assurance-emploi pour
rendre ces mesures conformes à la politique. Il est bien évident
que M. Martin souhaite conserve la majeure partie de l'excédent du
compte d'assurance-emploi, voire tout cet excédent, pour pouvoir
accroître les dépenses en matière de santé et réduire les impôts.
Nombreux sont ceux qui l'appuient d'ailleurs. Ma recommandation va
dans ce sens.
Je recommande que M. Martin reconnaisse enfin—trois ans trop tard—que les cotisations excédentaires à l'assurance-emploi sont effectivement une taxe. En reconnaissant ce fait, il pourrait ensuite réduire les cotisations pour ramener le compte à une situation d'équilibre, ce qui serait conforme à la politique en matière d'assurance-emploi. Les cotisations pourraient être de 2 $. Il pourrait ensuite décider d'imposer une surtaxe temporaire sur les cotisations, surtaxe qui serait fixée au niveau qu'il penserait pouvoir faire accepter. Il n'y aurait alors aucun avantage politique à faire en sorte que le compte d'assurance-emploi affiche un excédent. Comme le réclament beaucoup de gens, il pourrait dès que possible ramener les cotisations d'assurance-emploi à un niveau conforme à l'objectif de ce programme. Il pourrait à cette fin avoir recours à une surtaxe temporaire.
Je vous remercie, monsieur le président.
Le président: Je vous remercie beaucoup, monsieur Orr.
Nous accueillons maintenant MM. Malcolm Hamilton et Charlie Pielsticker qui représentent la Retirement Income Coalition. Soyez les bienvenus.
M. C.A. (Charlie) Pielsticker (président, Retirement Income Coalition, président, Conference for Advanced Life Underwriting, président, Pielsticker and Associates): Je vous remercie beaucoup, monsieur le président et mesdames et messieurs. Je suis heureux et honoré de comparaître aujourd'hui devant le comité Je comparais aujourd'hui à titre de président de la Retirement Income Coalition, de président de la Conference for advanced Life Underwriting et de président de ma propre entreprise, Pielsticker and Associates. Je suis accompagné aujourd'hui de M. Malcolm Hamilton, de la Retirement Savings Alliance. M. Hamilton est directeur à la maison de conseils actuaires William M. Mercer Limited et est un auteur, un conférencier et un expert-conseil en matière de pensions, dont la réputation n'est plus à faire.
La RIC, la Retirement Income Coalition, compte parmi ses membres 15 organismes qui représentent des Canadiens de tous les milieux—petites et moyennes entreprises, retraités, syndicats, bailleurs de fonds des REÉR et des régimes de retraite et des spécialistes indépendants—comme le montre l'annexe 1.
La commission a pour mandat de collaborer avec le gouvernement canadien à créer un régime de retraite destiné à tous les canadiens qui soit conforme aux trois principes fondamentaux cités dans le livre Vert de 1982 intitulé De meilleures pensions pour les Canadiens, présentés par l'honorable Marc Lalonde et l'honorable Monique Bégin. Les trois principes en question sont les suivants: assurer un revenu de base à ceux qui n'ont pas les ressources financières voulues; donner aux Canadiens les moyens d'économiser en vue de leur retraite; permettre aux Canadiens d'éviter que leur niveau de vie diminue beaucoup après la retraite.
Je cède la parole à M. Hamilton.
M. Malcolm P. Hamilton (membre, Retirement Income Coalition; directeur et conseiller en matière de prestations, William M. Mercer Limited; représentant, Retirement Savings Alliance): Le tableau au bas de la page 3 de notre mémoire montre les sommes que les Canadiens doivent économiser pour prendre leur retraite à 60 ans et pour disposer d'un revenu égal à 70 p. 100 de leur revenu d'emploi. Les régimes de pension des fonctionnaires fédéraux et provinciaux reposent sur cet objectif de 70 p. 100 qui est depuis longtemps reconnu comme un objectif qu'il convient de viser en matière de planification de la retraite.
• 1210
Le tableau montre que les Canadiens qui gagnent moins de
25 000 $ par an doivent épargner une somme relativement modeste car
la majeure partie de ce dont ils ont besoin proviendra des régimes
de pension publics, notamment du Régime de pensions du Canada et de
la sécurité de la vieillesse. D'un autre côté, les Canadiens qui
gagent plus de 76 000 $ par an constateront que même s'ils
épargnent le maximum qui est permis à l'heure actuelle, soit
13 500 $ par an, ils n'atteindront pas leur objectif de 70 p. 100.
Il y a actuellement environ 60 000 Canadiens dans cette situation,
et leur nombre augmente chaque année.
Il y a eu une époque où ces Canadiens avaient des options d'épargne-retraite viables. En 1976, les régimes de retraite professionnels visaient des gains allant jusqu'à 85 750 $. Cela représentait une contribution d'environ 15 500 $ à un REÉR. Depuis les prix ont triplé, les salaires ont triplé, les pensions gouvernementales ont triplé, mais la limite n'a pas changé pour les pensions professionnelles.
Nos limites ne sont pas concurrentielles à l'échelle internationale. Le tableau qui se trouve au bas de la page 4 de notre mémoire montre que nos limites sont de moins d'un tiers des limites correspondantes aux États-Unis et en Grande-Bretagne. Leurs limites sont indexées tandis que les nôtres sont gelées. Nous ne disons pas qu'un grand nombre de Canadiens quittent le pays parce que les limites de contributions à un REÉR sont insuffisantes. Ce n'est pas le cas. Ce que nous disons, c'est que les limites inadéquates sont un des facteurs qui contribuent à rendre notre régime fiscal non concurrentiel, et que ces facteurs sont de plus en plus pris en compte par les diplômés des collèges, par les travailleurs étrangers qui reçoivent des offres d'emploi au Canada et par les Canadiens à qui on demande de rentrer au pays après avoir travaillé à l'étranger.
Nous sommes d'avis que le coût de l'augmentation des limites de l'épargne-retraite est peu élevé. Oui, ceux qui contribuent davantage seront au maximum du taux marginal d'imposition, et leurs contributions supplémentaires réduiront leurs impôts au moment où ils contribuent. Cependant, lorsqu'ils prennent leur retraite, souvent ils sont imposés à un taux d'imposition marginal encore plus élevé, particulièrement lorsqu'on tient compte de la récupération de la sécurité de la vieillesse. Cela signifie que le manque à gagner en recettes fiscales aujourd'hui sera récupéré, avec intérêts, lorsque l'argent sera retiré, et il sera récupéré à un moment où la population du Canada sera plus âgée et où il faudra essayer de trouver une solution au coût accru des pensions gouvernementales et des soins de santé. Pour ces raisons, nous recommandons que la limite de cotisations à un régime de REÉR soit doublée en termes réels et portée à 27 000 $, et que la limite pour les régimes de pension enregistrés soit augmentée à 3 000 $ par an par année de service. Nous recommandons que ces augmentations soient mises en oeuvre par étapes en commençant immédiatement.
M. Charlie Pielsticker: Je vais maintenant parler de la limite de 20 p. 100 du contenu étranger. On a beaucoup parlé des effets négatifs de cette limite. Il est imprudent et peu judicieux d'obliger les Canadiens à investir 80 p. 100 de leur épargne-retraite dans 3 p. 100 des marchés financiers mondiaux; cela augmente le risque auquel ils sont exposés; cela dit diminue le rendement sur leurs investissements, comme on peut le voir à l'annexe 4 de notre mémoire; cela réduit leur revenu de retraite; et en fin de compte cela réduit les taxes que le gouvernement perçoit des Canadiens retraités. Nous ne comprenons pas l'inaction du gouvernement dans ce dossier. Ni les États-Unis, ni la Grande-Bretagne ni l'Australie n'ont de restrictions en ce qui concerne les investissements étrangers pour les fonds de pension.
En conclusion, nous recommandons vivement au gouvernement, tout d'abord de porter de 20 à 30 p. 100 au cours des cinq prochaines années la limite concernant le contenu étranger; ensuite, de porter à 27 000 $ par an la limite de contributions au REÉR et RPA, augmentation qui serait échelonnée sur un certain nombre d'années à commencer immédiatement; et enfin, augmenter la limite pour les pensions à prestations déterminées à 3 000 $ par année de service. Monsieur le président, ces changements sont tout à fait conformes aux trois principes contenus dans le Livre vert de 1982 présenté par l'honorable Marc Lalonde et l'honorable Monique Bégin.
• 1215
Nous vous remercions de cette occasion de venir nous faire
part du point de vue de la coalition, et nous sommes impatients de
répondre à vos questions et d'entendre vos commentaires plus tard.
Le président: Merci beaucoup.
Il s'agit d'une table ronde très intéressante et nous allons maintenant passer à la période de questions et réponses. Nous allons commencer par M. Ritz, et chaque intervenant disposera de 10 minutes.
M. Gerry Ritz: Merci, monsieur le président.
Messieurs, je vous remercie des exposés que vous nous avez faits ce matin.
Monsieur Orr, vous avez parlé d'une taxe sur l'assurance-emploi. Parlez-vous d'un genre de TPS sur les de cotisations à l'assurance-emploi? Voulez-vous parler d'une taxe temporaire ou d'une disposition de ce genre? Est-ce le mécanisme que vous jugeriez utile?
M. Dale Orr: C'est bien cela. Il s'agit d'une surtaxe temporaire sur les cotisations à l'assurance-emploi. Et je tiens à bien préciser que c'est exactement ce qui s'est passé. Je ne recommande pas au gouvernement de percevoir plus d'argent qu'il ne le fait déjà. Si les choses deviennent transparentes, j'espère que le gouvernement percevra au contraire moins d'argent.
M. Gerry Ritz: Je m'adresse aux messieurs de la Retirement Income Coalition. Dans votre mémoire, vous parlez d'augmenter le contenu étranger des REÉR de 2 p. 100 par an au cours des cinq prochaines années. Est-ce suffisant et suffisamment rapide pour la plupart des gens?
M. Malcolm Hamilton: Nous pensons que oui, bien que certaines personnes voudront probablement que ce soit plus rapide. Lorsque la proportion est passée de 10 à 20 p. 100, c'était par tranches de 2 p. 100 et nous ne voyons aucune raison de ne pas passer maintenant de 20 à 30 p. 100 par tranches de 2 p. 100 également.
M. Gerry Ritz: Oui. C'est prudent, sans aucun doute.
Au monsieur de l'EACL qui a dit qu'il est temps d'abolir cet organisme, je demanderais si vous avez une idée de ce que coûterait le démantèlement de l'EACL et ses filiales?
M. David Martin: Je ne suis absolument pas à l'emploi de l'EACL.
M. Gerry Ritz: Non, je le sais.
M. David Martin: Pour être plus précis, je parle des installations de l'EACL, de celles dont cet organisme est responsable. Il s'agit des centrales de Chalk River et de Whiteshell ainsi que de plusieurs réacteurs, ceux de Gentilly, Douglas Point et Rolphton. Dans son dernier rapport annuel, l'EACL précisait que ses installations lui coûteraient environ 400 millions de dollars. La société n'a pas placé cet argent dans un fonds. Par le passé, elle a obtenu des subventions du gouvernement canadien et a payé ses frais sur une base annuelle. C'est à cela que s'oppose le vérificateur général. Ce n'est pas la bonne façon de procéder; c'est contraire aux principes comptables généralement acceptés.
Le chiffre de l'AECL est donc de 400 millions de dollars. Comme je l'ai dit, il y a deux ans, le vérificateur général s'est penché sur ce dossier. Il a estimé que le coût total était beaucoup plus élevé, probablement d'environ 665 millions. Les évaluations indépendantes sont encore beaucoup plus élevées. J'ai entendu dire, par exemple, que la mise hors-service de la centrale de Chalk River coûterait à elle seule plus d'un milliard de dollars.
M. Gerry Ritz: C'est donc le genre de situation où quoi que vous fassiez, on vous donnera toujours tort.
M. David Martin: Les risques sont pour les générations futures. En s'abstenant de comptabiliser les coûts comme il faut, l'EACL compte sur les futurs contribuables, sur nos descendants, pour payer la facture. C'est une question d'équité entre les générations.
M. Gerry Ritz: Merci.
Monsieur Brzustowski, vous avez parlé des réseaux de centres d'excellence. Il y en a actuellement quatorze au Canada. Que vous soyez d'accord ou non, certaines personnes nous ont dit, dans la région de l'Atlantique, que ces centres n'étaient pas répartis équitablement dans les diverses régions du pays. Que répondez-vous à cela?
M. Thomas Brzustowski: Là où la répartition n'est peut-être pas équitable c'est en ce qui concerne les services administratifs de ces centres, des petits bureaux comptant deux ou trois employés. Les centres comme tels sont des réseaux auxquels participent les universités des quatre coins du pays. Nous avons environ 49 ou 50 universités qui font de la recherche en sciences naturelles et en génie et cela comprend également celles où l'on fait de la recherche médicale. Toutes ces universités font partie d'un de ces réseaux et bon nombre d'entre elles sont reliées à plusieurs centres. Par conséquent, la répartition des services administratifs n'est peut-être pas équitable, mais pour ce qui est de l'adhésion et de la participation des universités elle l'est certainement. Je crois que c'est là un des atouts du programme.
M. Gerry Ritz: Ils craignaient que le financement aille dans les grands centres. Évidemment, c'est là qu'on trouve les compétences, les installations, etc. Ils craignaient de ne jamais pouvoir prendre l'expansion qu'ils auraient souhaitée si les fonds étaient constamment alloués à ces grands centres.
M. Thomas Brzustowski: Le financement n'est pas ciblé. Il est accordé en fonction de la demande. Les gens créent un réseau à partir d'un noyau d'experts. Ils font appel à des partenaires, et ce ne sont pas toujours des partenaires industriels. Ce peut être des organismes gouvernementaux dans les provinces, des organisations non gouvernementales, et ainsi de suite. Le financement est accordé ou non en fonction d'un réseau créé à partir de la base. Il y a une concurrence très vive qui joue.
Il n'y a pas vraiment d'allocation régionale décidée par de hautes instances, ou quoi que ce soit du genre.
M. Gerry Ritz: Merci.
Le président: Merci, monsieur Ritz.
[Français]
Monsieur Cardin, monsieur Loubier, avez-vous des questions?
M. Serge Cardin (Sherbrooke, BQ): Messieurs, merci de votre présentation. Je vous souhaite la bienvenue au Comité des finances.
Mes premières remarques s'adresseront à M. Birks. Comme vous le savez, ce n'est pas la première fois que le Bloc québécois appuie vos revendications. L'équité entre les contribuables et entre les différentes industries est un élément important. On sait très bien que cette taxe d'accise fait du tort à l'industrie du bijou, qu'elle fait baisser les ventes de bijoux et qu'elle encourage le marché clandestin.
J'ai peut-être manqué une partie de votre discours tout à l'heure, mais j'aimerais que vous me fournissiez certaines précisions au sujet du marché clandestin, de ses revenus et de la perte potentielle en termes de TPS et de taxe provinciale.
M. Jonathan Birks: Monsieur Cardin, il est toujours difficile de déterminer un chiffre précis, mais on évalue que les activités souterraines représentent environ 1,5 million de dollars canadiens. C'est donc un marché substantiel et il est en croissance continue.
M. Serge Cardin: Nous croyons que dans ce contexte de surplus budgétaire, nous avons une occasion rêvée de faire valoir l'équité. Nous sommes conscients des conditions inéquitables qui sévissent un peu partout dans notre système et qui font souvent souffrir certaines entreprises ou contribuables. À mon avis, le moment est propice pour rétablir l'équité au niveau des industries et des contribuables. C'est très important.
Monsieur Martin, vous avez proposé l'abandon systématique du programme nucléaire dans sa forme actuelle. Il ne faudrait cependant pas négliger le fait que l'énergie nucléaire est une source d'énergie importante pour les consommateurs. Comment nous proposeriez-vous d'investir les sommes qu'on économiserait en cessant de subventionner le secteur nucléaire? Comment pourrions-nous les diriger vers d'autres moyens de nous procurer de l'énergie et nous assurer d'un rendement positif?
[Traduction]
M. David Martin: Je préconise qu'on supprime les subventions accordées à Énergie atomique du Canada Limitée. Il est clair que certains volets de l'industrie nucléaire peuvent fonctionner sans aucun soutien, mais c'est différent. Si Énergie atomique du Canada pense pouvoir survivre et exporter des réacteurs sans subvention des contribuables, c'est une autre paire de manches. Cela implique d'autres considérations—environnementales, éthiques et sécuritaires—, mais il est important de maintenir cette distinction.
Pour ce qui est des solutions de rechange, il en existe vraiment, soit l'efficience, la conservation et l'énergie renouvelable. Nous proposons d'égaliser les chances pour tous. Il y a près de 50 ans qu'on subventionne l'industrie nucléaire. C'est loin d'être le cas pour le secteur de l'énergie renouvelable. Il nous faut tout d'abord créer un cadre équitable et ensuite, nous pourrons commencer à concrétiser vraiment l'option de l'énergie durable pour le Canada.
[Français]
M. Serge Cardin: Merci. Je terminerai en faisant un commentaire qui rassurera les représentants du Conseil national de recherches. Le Bloc québécois est effectivement prêt à appuyer l'augmentation de votre budget puisque ses membres considèrent que la recherche est très importante à tous les niveaux, entre autres dans votre domaine. Sachez que vous pouvez compter sur l'appui du Bloc québécois à cet égard.
Le président: Merci, monsieur Cardin.
[Traduction]
Monsieur Szabo.
M. Paul Szabo: Merci, monsieur le président.
J'aimerais discuter de certaines choses avec les représentants de la Retirement Income Coalition. Je commencerai par M. Pielsticker. Je vous remercie de votre rapport. Il est absolument fascinant, et je suis sûr qu'il nous sera utile.
Étant donné que j'ai mentionné votre nom en m'adressant aux membres du groupe précédent, j'ai pensé que je devais au moins vous donnez l'occasion de faire un commentaire sur les dirigeants d'entreprises, leur ouverture aux réalités sociales du Canada et certaines choses qu'ils font. J'aimerais vous donner l'occasion de faire une brève déclaration.
M. Charles Pielsticker: Merci, monsieur Szabo.
M. Szabo faisait référence à certains renseignements que j'ai communiqués à l'ancien président, M. Peterson, au sujet de notre organisation.
La Coalition qui a ses bureaux dans la région métropolitaine de Toronto, représente le plus grand partenariat qui existe actuellement en Amérique du Nord entre les milieux des affaires et de l'éducation. Notre partenariat dépasse ceux de New York, de Chicago, de Los Angeles et de n'importe quelle autre ville. Il s'agit d'un partenariat qui regroupe des gens issus de la grande et de la petite entreprise, ainsi que des milieux de l'éducation, qui s'intéressent à l'avenir des 950 000 étudiants de la région métropolitaine de Toronto. Cet engagement a débouché sur une participation à de multiples activités dans tout le Canada. Partout, des dirigeants d'entreprises collaborent avec des professeurs et les jeunes.
L'activité qui a le plus de visibilité, qui consiste à emmener nos enfants à notre lieu de travail, a eu lieu la semaine dernière. Chose certaine, cela s'est fait à Ottawa. L'activité en question a touché quelque 1,5 million de Canadiens, dont 450 000 étudiants de neuvième année. Les autres participants étaient des hommes et des femmes d'affaires qui, bénévolement, en collaboration avec les professeurs et les parents, ont accueilli des élèves de neuvième année afin de les sensibiliser à la réalité du travail. C'est une belle occasion pour nous de créer des liens avec les jeunes.
Merci.
M. Paul Szabo: Merci. Je trouvais important de faire en sorte qu'on comprenne que tous les PDG au Canada ne sont pas simplement des gens en complet trois-pièces qui font beaucoup d'argent. Nombreux sont ceux qui redonnent à la collectivité, à nos enfants, et je voulais vous remercier de l'avoir signalé.
Monsieur Hamilton, à la page 3 de votre mémoire, vous parlez des besoins des retraités. Vous vous êtes reporté au tableau et je veux m'assurer d'avoir bien compris ce que vous nous dites. Vous dites qu'en principe les Canadiens devraient mettre de côté environ 70 p. 100 de leur revenu antérieur à la retraite pour répondre à leurs besoins à la retraite. Votre tableau décrit le montant des contributions requises à un REÉR pour certaines tranches de revenu pour que, en ajoutant cela au Régime de pensions du Canada et à d'autres prestations de retraite, le total donne 70 p. 100.
Votre tableau semble indiquer que pour un revenu préretraite de 75 000 $, une contribution de 13 500 $ à un REÉR serait suffisante pour assurer, avec d'autres prestations, un revenu à la retraite de 70 p. 100, c'est-à-dire environ 59 p. 100 de revenu de retraite dans cet exemple.
• 1230
Vous recommandez de doubler le plafond actuel des cotisations
ce qui m'indique que ces salariés qui gagnent plus de 75 000 $ par
an ont accumulé les ressources financières, qu'ils ne peuvent pas
contribuer à un REÉR, dans des tranches de revenu qui leur
permettraient de doubler le montant de leurs cotisations.
Cet argent n'est pas tout simplement jeté par les fenêtres. J'imagine que ces actifs financiers excédentaires, capital ou épargne, qui ne peuvent pas être investis dans un REÉR le sont dans d'autres actifs qui produisent eux aussi un revenu. Ainsi, votre tableau laisse croire que ces retraités ne disposent d'aucune autre source de revenu.
Ai-je bien interprété le tableau? Si oui, une personne qui gagnerait 100 000 ou 200 000 $ aurait-elle un revenu de retraite insuffisant si l'on incluait le rendement fictif sur des revenus de placement non classés dans un REÉR exonéré d'impôt?
M. Malcolm Hamilton: Je vais essayer de vous donner une réponse satisfaisante. D'abord, ce tableau n'illustre pas l'épargne véritable des Canadiens. Ce tableau illustre ce que les Canadiens doivent contribuer à un REÉR pour atteindre le niveau cible de 70 p. 100. Nous ne disons pas que c'est ce qu'économise aujourd'hui le Canadien moyen dans ses tranches de revenu.
Prenons un Canadien qui gagne 100 000 $. Nous disons que s'il veut prendre sa retraite à 60 ans, ce Canadien doit économiser environ 19,3 p. 100 de son revenu, ses économies sont versées dans un REÉR, et que ce serait l'équivalent de 19 000 $ par année. C'est ce qui se passerait s'il pouvait l'investir intégralement dans un REÉR, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
Je crois que le tableau ne renferme pas la réponse à la question que vous posez. Vous demandez quel pourcentage de son revenu ce Canadien serait obligé d'économiser s'il tentait d'atteindre la cible de 70 p. 100 sans investir dans un REÉR? Ce serait sensiblement plus que 19 p. 100 dans le cas d'une personne gagnant 100 000 $ et considérablement plus que 21 p. 100 dans le cas d'une personne qui gagnerait 200 000 $.
Autrement dit, c'est vrai qu'en économisant des sommes très importantes, mettons 30 p. 100 du revenu, ces gens peuvent compenser la lourde ponction fiscale sur le revenu de placement. Mais cela devient extrêmement onéreux et ces gens-là n'y parviendraient pas. Ils remboursent leurs hypothèques et achètent de plus grandes maisons et des autos plus luxueuses parce qu'ils y perdraient s'ils tentaient d'économiser cet argent non investi dans un REÉR où le rendement de leurs placements est lourdement taxé.
M. Paul Szabo: Ainsi, il n'y a pas de report d'impôt, il faut toujours payer. En fait, vous dites dans votre mémoire que très souvent ils paieront un taux d'impôt plus élevé au moment de la cristallisation ou du transfert d'un revenu de REÉR dans un FERR où les rentes sont ensuite ajoutées au revenu que s'ils avaient payé au moment où ils obtenaient la déduction.
Ainsi, si je gagne beaucoup d'argent et que je cotise le maximum et que j'ai un conjoint qui s'occupe des enfants à la maison et qui n'a donc pas un revenu comparable, si j'achète un REÉR pour mon conjoint plutôt que pour moi-même, si c'est le seul revenu de retraite sur lequel peut compter mon conjoint, la somme qui me revient du fait de la déduction à laquelle j'ai droit au taux d'imposition marginal le plus élevé, selon la structure du FEER, ne serait-elle pas imposée au plus faible taux d'imposition marginal en vertu du régime actuel? Autrement dit, vous versez la moitié des impôts qui vous ont été remboursés au moment de la cotisation comparativement au montant d'impôt que vous devez payer au moment du retrait. Vous réalisez un gain en capital sur le taux, une réduction de 50 p. 100 du taux d'imposition. N'est-ce pas aussi le cas et les Canadiens qui investissent dans un REÉR n'ont-ils pas tout intérêt à fractionner le revenu et à réaliser un gain en capital sous forme de réduction de taux, quand ils le peuvent?
M. Malcolm Hamilton: Si tous les Canadiens avaient des conjoints qui ne travaillaient jamais à l'extérieur, ce serait une stratégie très attrayante pour eux.
M. Paul Szabo: S'ils avaient un revenu de retraite identique: par souci de nivellement.
M. Malcolm Hamilton: Vous dites que c'est le taux d'imposition marginal le plus faible qui s'applique. Si vous gagnez 75 000 $ et votre conjoint, 50 000 $, et que vous économisez tous les deux pour la retraite, un REÉR en faveur du conjoint ne donnera jamais droit au plus faible taux d'imposition marginal pour l'un ou l'autre conjoint.
M. Paul Szabo: Mais si.
M. Malcolm Hamilton: Ce sera très difficile.
M. Paul Szabo: Le taux moyen s'applique jusqu'à 60 000 $.
M. Malcolm Hamilton: Non. Si vous avez deux particuliers, dont l'un gagne 75 000 $ et l'autre 50 000 $...
M. Paul Szabo: Mais le conjoint qui gagne 50 000 $ sera assujetti à un taux d'imposition marginal plus faible que celui qui gagne 75 000 $.
M. Malcolm Hamilton: Oui, mais j'essaie de faire valoir qu'il pourrait être de 40 p. 100 plutôt que de 50 p. 100, mais il n'y a pas...
M. Paul Szabo: C'est quand même une réduction du taux.
M. Malcolm Hamilton: Le taux est réduit, c'est certain. Mais la véritable question c'est de savoir ce qui ne va pas dans la situation que vous décrivez? Vous avez essentiellement deux personnes qui tentent d'économiser en prévision de la retraite. La loi leur permet d'utiliser un REÉR au profit du conjoint et ils le font et ils se retrouvent à payer un peu moins d'impôt après la retraite qu'autrement.
Si vous vous opposez à un élément d'un REÉR en faveur d'un conjoint, corrigez le problème. Les limites sont contraignantes et beaucoup de gens n'utilisent pas le REÉR en faveur du conjoint.
M. Paul Szabo: L'essentiel à retenir c'est qu'environ 3 p. 100 seulement des Canadiens gagnent plus de 75 000 $ par année aujourd'hui et plus de la moitié d'entre eux cotisent déjà à des régimes enregistrés. Ainsi, cela représente seulement 1,5 p. 100 des Canadiens et vous dites que pour ceux-là il faudrait doubler le montant de la dépense fiscale pour leur assurer un meilleur revenu de retraite.
M. Malcolm Hamilton: Nous ne vous demandons pas de doubler la dépense fiscale. Nous disons que si vous calculez plus exactement la dépense fiscale—et nous ne croyons pas que les calculs de la dépense fiscale du gouvernement sont fiables—vous trouverez que cela coûterait très peu.
Par ailleurs, d'après nos calculs, cela représente beaucoup plus que 1,5 p. 100 de l'ensemble des contribuables et nous ne pensons pas que cela représente un coût excessif. Il s'agit tout simplement de savoir si ceux qui gagnent plus de 75 000 $ par année doivent pouvoir s'assurer un revenu de retraite décent en économisant des sommes supérieures à ce qu'économisent les autres contribuables?
M. Paul Szabo: Je comprends.
Le président: Merci, monsieur Szabo.
Madame Bennett.
Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Merci, monsieur le président.
Parfois quand on réussit à brosser un tableau cela nous aide à mieux établir les priorités. Je me demande si M. Brzustowski pourrait nous faire une petite publicité pour MITICS et nous dire comment fonctionnent des partenariats afin que le gouvernement comprenne pourquoi c'est une bonne idée d'y consacrer des fonds. Celui des mathématiques ou encore de l'arthrite irait très bien.
M. Thomas Brzustowski: Cette question vient d'une députée qui était présente pour les deux annonces. Merci.
Ce qu'il faut bien comprendre c'est que ces réseaux ne sortent pas spontanément du vide. C'est une superstructure qui est le prolongement des fonds investis dans des chercheurs sur une période de 10 à 30 ans. On les appelle réseaux de centres d'excellence mais l'excellence vient d'abord: l'investissement de conseils subventionnaires comme le CRSNG, le Conseil de recherches médicales du Canada ou le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada au fil des ans, ainsi que l'investissement consenti par des chercheurs individuels et leurs étudiants dans tout le pays.
Ces gens se regroupent en raison d'intérêts communs, et quand le nombre est suffisant, ils forment un centre. Généralement ils sont situés très près les uns des autres. À une certaine étape du processus, ils constatent qu'un problème de la société moderne nécessite davantage de ressources intellectuelles que celles que possède un petit groupe et que s'ils créent un réseau de partenaires industriels, d'ONG et d'organismes gouvernementaux, ils pourront ensemble élaborer une stratégie pour que les efforts de l'ensemble permettent de réaliser plus que les efforts de chacun. Ensuite, ils préparent une proposition pendant un an et participent ensuite à un concours.
Je dois dire que le dernier concours a été catastrophique. Sur les 11 demandes qui avaient été retenues, le taux de succès a été de 27 p. 100, soit 3 sur 11, mais il faut tenir compte des lettres de préavis. Ces lettres n'avaient pas 2, 3, 10 ou 20 pages; c'était de gros mémoires. Mesuré à cette aune-là, le taux de réussite n'était que de 4 p. 100.
• 1240
Si on prend l'exemple de la lutte contre l'arthrite, que vont
faire ces chercheurs? Cela leur permet d'intégrer la recherche
fondamentale sur les sciences neuronales qui portent, par exemple,
sur les caractéristiques que présente leur système immunitaire et
les problèmes que pose le vieillissement sur ce système, jusqu'à la
chirurgie orthopédique. Elle porte aussi sur ce que les gens
peuvent faire pour soulager la douleur, comme remplacer les
articulations de la hanche. Elle s'intéresse aux besoins des
patients dans la collectivité, aux gens qui ont du mal à se
déplacer, à fonctionner, en raison de l'arthrite. Des dizaines de
chercheurs éminents et leurs étudiants intègrent tous ces travaux
au Canada. Ils reçoivent des subventions peu élevées qui viennent
s'ajouter à ce qu'ils obtiennent déjà, mais cet argent peut servir
à décupler les résultats de la recherche.
J'espère que je vous ai convaincus.
Mme Carolyn Bennett: C'est impressionnant. Vos partenaires commerciaux, surtout en ce qui concerne le projet MITICS—pourriez-vous simplement...
M. Thomas Brzustowski: À propos des mathématiques, j'espère que les députés qui étaient en poste lorsque ce projet a été créé demeureront longtemps fiers de ce que le Canada a réalisé, car, en 1998, on assiste maintenant à un changement dans la façon dont les mathématiques sont enseignées et utilisées dans le pays. Le langage de la technologie de pointe, ce sont les mathématiques, cela a toujours été le cas. Mais c'est un secret bien gardé entre mathématiciens. Le projet MITICS fait appel à tous les secteurs de l'industrie. Il fait intervenir l'industrie financière car les gens apprennent à gérer le risque. Même si certains lauréats du Prix Nobel ne se sont pas distingués récemment, ces techniques existent.
À titre d'exemple, on pourrait citer l'ordonnancement des commissions de transport. La compagnie Ad Opt, à Montréal, vend des logiciels d'ordonnancement destinés aux commissions de transport et aux chemins de fer nationaux partout dans le monde. Ces logiciels sont le résultat de la recherche fondamentale effectuée en mathématiques qui a été subventionnée par nos services il y a 30 ans. Ces applications existent et le réseau les réunit. Cela existe dans tout le pays, dans tous les secteurs de l'industrie et du gouvernement et donne aux mathématiques la place de choix qu'elles devraient avoir à l'aube du XXIe siècle.
Mme Carolyn Bennett: Je suis désolée que nos collègues du Parti réformiste ne soient pas ici pour constater que ce qui peut apparaître en surface comme un poste dans un budget puisse en réalité résoudre un problème, comme le criptage des données, une partie de la gestion des risques que posent les produits dérivés et un peu de ce que nous avons entendu souvent à propos du Rapport MacKay...
Je pense que le député d'en face avait mal saisi le caractère solide de ces choses-là et n'avait pas compris qu'il s'agit en réalité d'un réseau virtuel qui dessert le pays tout entier.
M. Thomas Brzustowski: Vous avez absolument raison. Je pense que les gens qui sont dans de petits établissements éloignés peuvent avoir l'occasion de rejoindre les rangs des grands dans ces domaines en communiquant par réseau avec tous les autres protagonistes dans le reste du pays.
Le président: Merci, madame Bennett.
Je suis d'accord avec le fond de cette question. Il est cependant mal venu d'attirer l'attention sur la présence ou l'absence de députés.
Mme Carolyn Bennett: C'est lui qui a posé la question et je suis désolée qu'il n'ait pas été là pour entendre la réponse.
Le président: Bien.
Au nom du comité, j'aimerais vous remercier infiniment. Cette discussion a été très intéressante. Vous avez soulevé des questions très importantes sur lesquelles nous reviendrons lorsque nous établirons les priorités du budget à venir. Les questions que vous avez soulevées sont non seulement importantes pour ce budget-ci, mais pour l'avenir et nous vous en sommes très reconnaissants. Merci.
Nous allons nous arrêter cinq minutes et puis nous reprendrons tout juste après.
Le président: Nous allons reprendre nos travaux et je voudrais profiter de cette occasion pour accueillir les représentants de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. La Fédération est représentée par Mme Catherine Swift, présidente-directrice générale, par M. Pierre Cléroux, vice-président du Québec et par M. Garth Whyte, vice-président chargé des affaires nationales.
Soyez les bienvenus. Vous pouvez commencer.
Mme Catherine Swift (présidente-directrice générale, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante): Merci, monsieur le président. Je le répète, c'est toujours avec grand plaisir que nous comparaissons devant ce comité.
Au Canada, nos membres dépassent en réalité le chiffre cité dans notre mémoire. Nous comptons en réalité, parmi nos membres, plus de 91 000 petites et moyennes entreprises provenant de toutes les régions du Canada.
Nos observations aujourd'hui répondent aux quatre questions que vous avez posées: les priorités rattachées au dividende budgétaire; les changements qui devraient être apportés au régime fiscal pour que ces priorités soient respectées; comment aider les Canadiens à tirer parti des nouvelles priorités budgétaires et enfin, comment le gouvernement peut contribuer à garantir un large éventail d'emplois nouveaux au sein de la nouvelle économie.
Nous avons préparé une série de diapositives que nous allons présenter sur écran. Nous ne les présentons qu'en anglais, mais nous avons préparé une copie papier en français si bien que les deux versions existent. Il est tout simplement difficile sur le plan matériel de les afficher toutes les deux sur l'écran.
Les chiffres que nous allons vous présenter sur les tableaux et dans notre mémoire ont été établis à la suite de différents sondages menés au cours des douze derniers mois. Ces chiffres regroupés représentent des dizaines de milliers de réponses que nous avons obtenues auprès de nos membres.
Tout juste après le dernier budget présenté plus tôt cette année, en mars dernier, nous avons distribué à nos membres un questionnaire assez détaillé sur les priorités budgétaires, la politique fiscale et les priorités en matière de dépenses.
En règle générale, nous avons constaté, que tout juste après le budget, un peu moins des deux tiers de nos membres, étaient satisfaits de la politique budgétaire globale menée par le gouvernement.
Lorsqu'on leur a demandé comment la stratégie budgétaire du gouvernement pouvait être améliorée maintenant que le déficit avait été éliminé, un peu moins de la moitié ont répondu qu'il fallait mettre davantage l'accent sur le remboursement de la dette. Ils ont placé cette priorité en tête de liste.
Un peu plus d'un quart ont dit qu'il fallait alléger le fardeau fiscal, 24 p. 100 estimaient que la politique poursuivie sans relâche par le gouvernement, soit de consacrer la moitié de cet argent au remboursement de la dette et l'autre moitié à la diminution des impôts, était juste. Moins de 1 p. 100 estimait qu'il fallait augmenter les dépenses publiques.
Nous avons ensuite sondé nos membres six mois plus tard, ce qui est assez récent. Or, les priorités de nos membres ont changé puisque plus de 90 p. 100 disent vouloir mettre davantage l'accent sur la réduction des charges fiscales. Cette priorité est passée en tête de liste.
Les cotisations à l'assurace-emploi et la dette publique, citées par environ le même nombre de personnes interrogées, représentaient la deuxième priorité.
Il ne fait aucun doute que nos membres sont devenus de plus en plus inquiets au cours des derniers... il faut dire que l'impôt est—et demeurera—toujours un problème, c'est évident, mais les inquiétudes ne cessent d'augmenter, ce qui s'explique par un certain nombre de facteurs qui se sont produits au cours des douze derniers mois.
Ils estiment, en juste titre, que les dépenses publiques semblent suivre à nouveau une tendance à la hausse après un certain nombre d'années de croissance relativement nulle.
De plus, la charge fiscale globale des employeurs—et des employés aussi d'ailleurs—ne cesse d'augmenter et ce, en raison de l'augmentation non négligeable des cotisations aux RPC et RRQ au cours des années à venir, à laquelle s'associent les cotisations à l'assurance-emploi qui sont beaucoup plus élevées qu'elles ne devraient l'être.
• 1305
Je dois dire également qu'il existe déjà certains signes
précurseurs d'un ralentissement de l'économie, bien que la
situation ne soit pas encore alarmante. Et comme pour toute charge,
les impôts sont plus tolérables lorsque l'économie est plus solide.
À mesure que l'économie ralentira, les appels à une réduction des impôts se multiplieront. Il est manifeste que l'occasion est tout trouvée, étant donné que nous voulons tous essayer de prolonger une période de croissance économique et non pas traverser une période de ralentissement.
Au chapitre des dépenses publiques, les dépenses des programmes, d'après les derniers chiffres publiés par le ministère des Finances, se sont élevées à 108,8 milliards de dollars pour l'année financière 1997-1998, soit bien au-dessus de la barre des 106 milliards de dollars prévus dans le budget de février dernier.
Ce qui est particulièrement troublant... les dépenses publiques ne devraient pas augmenter alors que nous traversons une période de croissance économique raisonnable. De plus, nous venons d'apprendre ces derniers jours que l'excédent est beaucoup plus élevé qu'on ne l'avait prévu.
Mais ce qui est particulièrement inquiétant, c'est que certains de ces chiffres passent par toutes sortes de manipulations et nous nous demandons quel degré de confiance la population canadienne accordera aux projections du ministre des Finances à moyen et à long terme.
Par exemple, le Fonds des bourses d'études du millénaire a été affecté à cet exercice, même si aucune dépense réelle ne sera engagée avant l'an 2000. Et les exemples de ce type ne manquent pas.
On s'attendrait à ce que les dépenses soient réduites les années au cours desquelles elles seraient engagées, car elles ont déjà été prévues. Mais ce n'est pas le cas. En fait, les dépenses actuelles sont plus élevées qu'elles ne l'étaient lors de l'exercice précédent.
Nous sommes tout particulièrement inquiets de ce que le gouvernement semble vouloir dissimuler le montant réel de l'excédent. Le gouvernement précédent, lui, dissimulait l'étendue des déficits, ce qui était particulièrement inquiétant.
Dans le cas qui nous occupe, c'est le revers de la médaille, mais c'est tout aussi déconcertant en raison de l'impact que cela aura, et a déjà, sur la confiance accordée au plan budgétaire du gouvernement.
J'aimerais maintenant demander à Garth de vous parler des cotisations au régime d'assurance-emploi et des charges sociales.
M. Garth Whyte (vice-président, affaires nationales, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante): Venons-en donc à l'excédent du compte d'assurance-emploi.
Le taux des cotisations à l'assurance-emploi pour les employés est d'environ 90c au-dessus du seuil de rentabilité. C'est le seuil qui permet de financer le coût du programme. C'est ce que nous entendons par seuil de rentabilité et pour les employeurs, les primes sont de 1,20 $ au-dessus du seuil de rentabilité.
Le graphique 3 qui figure dans votre document montre que l'excédent du compte d'assurance-emploi atteindra 19,6 milliards de dollars d'ici la fin de l'année. Si les cotisations restent inchangées et que le taux de chômage demeure le même—c'est ce que nous pensons—ou diminue, cet excédent se chiffrera à 32,7 milliards de dollars d'ici l'an 2000.
Or, le ministre des Finances a déclaré qu'il aimerait bien réduire ces cotisations, mais que l'argent provenant de l'excédent est nécessaire pour donner suite à d'autres priorités importantes, comme la réduction de la dette, la diminution de l'impôt sur le revenu des particuliers et l'augmentation des dépenses consacrées aux soins de santé.
Même si on acceptait l'argument selon lequel la caisse d'assurance-emploi devrait servir à d'autres priorités visant à réduire les dépenses et les impôts, position que rejette la FCEI, il y a quand même une marge de manoeuvre pour abaisser immédiatement les cotisations d'assurance-emploi en raison des prodiges auxquels se livre le gouvernement avec la comptabilité des dépenses.
Je vais maintenant passer au graphique 4. Nous avons interrogé nos membres et leur avons demandé si la caisse d'assurance-emploi devrait être à part. Comme vous le voyez, 12 000 personnes ont répondu.
Sur ces 12 000 réponses, 74 p. 100 ont dit oui, 14 p. 100 ont dit non, 11 p. 100 étaient indécis alors que moins de 1 p. 100 estimait que la question était sans intérêt. En s'appuyant sur ce résultat, la CFEI recommande que la caisse d'assurance-emploi soit reconnue comme un compte distinct, voué aux programmes d'assurance-emploi.
Nous craignons que le gouvernement ne souhaite utiliser l'excédent de l'assurance-emploi, exercice après exercice. Il y a trois ans, on nous avait dit que cet excédent servirait à financer les années de vaches maigres.
L'année dernière, on nous a dit que les cotisations d'assurance-emploi ne pouvaient pas être sensiblement réduites parce que l'excédent servirait à éponger le déficit. Maintenant que le déficit a été éliminé, on nous dit cette année de ne pas nous attendre à une baisse des cotisations d'assurance-emploi car il faut parer à la crise mondiale. Quelle raison nous donnera-t-on pour ne pas réduire les cotisations d'assurance-emploi l'année prochaine ou l'année d'après?
• 1310
Nous craignons que le gouvernement ne crée une crise en
dépensant l'excédent de l'assurance-emploi, ce qui signifie qu'il
devra soit relever les cotisations d'assurance-emploi, soit
emprunter pour financer les prestations du programme
d'assurance-emploi lorsque le besoin s'en fera sentir le plus au
cours d'un ralentissement économique.
La FCEI recommande instamment que le gouvernement fédéral établisse et applique un plan triennal pour équilibrer les cotisations d'assurance-emploi avec les coûts de gestion du programme d'assurance-emploi. Il n'y a aucune raison pour laquelle le gouvernement ne devrait pas établir un plan visant à mettre un terme à sa dépendance envers l'excédent d'assurance-emploi, qu'il dépense chaque année.
D'après le sondage d'opinions effectué auprès des membres de la FCIE, ils pensent que la réduction des charges sociales et de l'impôt sur le revenu des particuliers aideraient le plus leur entreprise.
Les charges sociales tentent à imposer une charge disproportionnée sur les petites entreprises qui emploient relativement davantage de main-d'oeuvre que les grosses sociétés. De nombreuses études de recherche montrent que l'augmentation des impôts sur la masse salariale nuit à la création d'emplois. Certaines de ces études ont été effectuées par ce gouvernement.
Certains membres de ce gouvernement prétendent que le Canada a les charges sociales les plus faibles parmi les pays du G-7. Le graphique 5 a été établi à la lumière de l'étude sur les emplois effectués par l'OCDE et des chiffres donnés. C'est un graphique qui n'est pas facile à comprendre, mais ils nous le fallait pour cette explication. Le chiffre indiqué montre le montant des charges sociales qui pèsent sur les employeurs, et non pas le total des charges sociales moyennes qui pèsent sur les employeurs et les employés. Ce sont les charges qui sont aux frais des employeurs, que les employeurs payent.
Un côté du graphique porte sur les variations de l'emploi exprimées en pourcentage de 1994 à 1998 et l'autre côté porte sur les charges sociales des employeurs. Comme vous pouvez le constater, le Canada n'a pas les charges les moins élevées parmi les pays du G-7.
De fait, pour ce qui est de ces charges sociales, les pourcentages du PNB sont plus élevés qu'aux États-Unis ou en Grande-Bretagne, deux des partenaires commerciaux du Canada.
Mais nous n'avons pas fait ce graphique pour réfuter certaines observations faites par d'autres. Ce que nous voulons vous montrer c'est qu'il existe un lien entre les charges sociales et la création d'emplois dans les pays qui tendent à se servir des charges sociales comme leur principale source de perception d'impôts.
Comme vous le voyez, la France et l'Italie dépendent beaucoup plus des charges sociales que le Canada. Si vous prenez l'Italie, l'Allemagne et la France, vous constatez qu'au cours des quatre dernières années, la création d'emplois dans ces pays accuse un sérieux retard par rapport au Canada, aux États-Unis et à la Grande-Bretagne.
Nous savons qu'il existe d'autres raisons qui ont une incidence sur l'emploi. Mais en espèces, nous constatons que les pays qui ont les impôts les plus élevés sur la masse salariale tendent à avoir une croissance de l'emploi beaucoup plus faible et des taux de chômage plus élevés.
Ce qui est déconcertant, c'est que le régime fiscal canadien s'éloigne d'un régime fiscal s'appliquant aux bénéfices.
Le graphique 6 est tiré du rapport Mintz établit à la demande du gouvernement et auquel ont participé divers fiscalistes du pays. Jack Mintz était l'économiste de Clifford Clark, invité au ministère des Finances à l'époque. Robert Brown, autre membre de ce comité, est actuellement l'économiste de Clifford Clark invité au ministère des Finances.
Ce qu'ils ont trouvé figure sur ce graphique. Une partie montre le total des taxes professionnelles prélevées. Une autre montre l'augmentation des impôts établis sans égard aux bénéfices, et ailleurs une diminution de ces impôts.
Ce graphique montre que les gouvernements—non seulement le gouvernement fédéral, mais les gouvernements provinciaux et municipaux—dépendent davantage ces jours-ci des taxes professionnelles établies sans égard aux bénéfices, comme les charges sociales et les taxes professionnelles, que le contraire. Nous connaissons des membres de notre fédération, de nombreux membres, qui n'ont pas réalisé du tout de bénéfices une année donnée et qui ont quand même dû régler ces taxes.
Alors, pourquoi passer son temps à discuter de ce changement d'éclairage? Nous le faisons parce que nos sondages sur les attentes de PME pour 1999, que nous publierons plus tard cette année, indiquent que 45,5 p. 100 de nos membres ont identifié la réduction des impôts fédéraux sur la masse salariale comme condition nécessaire à l'embauche d'un plus grand nombre d'employés que prévu en 1999.
Le graphique 7 montre malheureusement que les impôts fédéraux globaux sur la masse salariale augmentent parce que les cotisations au RPC/RRQ des cinq prochaines années ont été fortement relevées.
Là encore, il s'agit des charges sociales fédérales payées par les employeurs et une partie est consacrée au Régime de pensions du Canada et au Régime de rentes du Québec. Si vous ajoutez les cotisations d'assurance-emploi, vous constatez qu'en moyenne, les charges sociales fédérales augmentent de façon significative.
• 1315
C'est la raison pour laquelle nous recommandons que les
cotisations à l'assurance-emploi en 99 soient réduites d'au moins
20c. à 30c. pour compenser les augmentations des cotisations au
RPC/RRQ. Comme les petites entreprises créent la plupart des
emplois nouveaux au Canada et c'est un fait reconnu, nous
recommandons également que le gouvernement renouvelle le Programme
pour l'embauche de nouveaux travailleurs en faveur des petites
entreprises pour 99 et l'an 2000.
Nous ne saurions trop insister là-dessus, monsieur le président. Si nous insistons autant, c'est parce que nous craignons que le gouvernement n'y donne pas suite. Nous craignons au contraire que le gouvernement n'abandonne la création d'emplois en faveur des petites entreprises. Il va donner suite aux recommandations des grosses entreprises et des gros syndicats, et les cotisations à l'assurance-emploi ne diminueront pas. Le gouvernement s'éloignerait ainsi de ses réalisations antérieures et des déclarations publiques qu'il a toujours faites en faveur des petites entreprises et de la création d'emplois.
Je vais maintenant passer le flambeau à Pierre Cléroux, notre vice-président du Québec.
[Français]
M. Pierre Cléroux (vice-président (Québec), Fédération canadienne de l'entreprise indépendante): J'aimerais présenter six autres recommandations qui sont importantes pour les PME et qui stipulent, bien sûr, que le gouvernement devrait accorder la priorité à la réduction des cotisations d'assurance-emploi et ne pas utiliser les surplus de la caisse pour subventionner d'autres réductions d'impôt. En tenant compte de ces considérations, je présenterai six différentes options.
Catherine a déjà parlé de la première tout à l'heure, lorsqu'elle a dit que la réduction de la dette représentait une priorité pour nos membres. Ils ont bien raison puisqu'en 1998, le gouvernement doit dépenser 27c. de chaque dollar qu'il perçoit à titre de revenu pour le service de la dette. Il est très clair qu'aussi longtemps qu'on ne réduira pas la dette au Canada, on sera incapable de réduire d'une façon permanente et à long terme le fardeau fiscal des Canadiens et des entreprises.
Comment le faire? Le tableau 8 présente la proposition de nos membres qui retient le plus d'appui: c'est l'adoption d'une loi qui obligerait le gouvernement à rembourser au moins 3 milliards de dollars de la dette à chaque année. Nous savons que M. Martin avait annoncé, lors du dernier budget, qu'il avait l'intention de le faire, mais nous serions beaucoup plus confiants si une loi obligeait M. Martin et ses successeurs à toujours réduire la dette afin que les gouvernements futurs puissent jouir d'une certaine marge de manoeuvre.
Le tableau 9 traite de la réduction de l'impôt sur le revenu des particuliers. Nos membres appuient fortement la réduction du fardeau fiscal des consommateurs et proposent une réduction générale du taux. Ils favorisent davantage une approche générale, une réduction qui toucherait l'ensemble des contribuables canadiens, plutôt que des réductions spécifiques limitées à certains groupes de Canadiens.
Nous avons fait un sondage plus récent dont les résultats figurent au tableau 10. On constate qu'il y a un appui très net pour l'élimination des surtaxes individuelles qu'a mises en place le gouvernement en vue de faire face au déficit. On peut y lire que plus de 76 p. 100 des propriétaires de PME qui ont été interrogés sont d'accord sur l'élimination des surtaxes individuelles.
Le tableau 11 traite de la réduction du fardeau fiscal des entreprises. Il est important de noter que les propriétaires de PME estiment que la priorité devrait être donnée à la réduction des cotisations d'assurance-emploi. Comme deuxième priorité, ils identifient la réduction du fardeau fiscal des particuliers et, comme troisième priorité, la réduction du fardeau fiscal des entreprises.
Au niveau du fardeau fiscal des entreprises, on privilégie la réduction du taux d'imposition pour les petites entreprises, ainsi que l'augmentation du seuil de déduction de 200 000 $, qui n'a jamais été majoré depuis maintenant huit ans. Si on tenait compte de l'inflation, ce seuil de 200 000 $ qu'on avait établi il y a huit ans s'élèverait maintenant à plus de 300 000 $. Le seuil de fiscalité pour les petites entreprises a donc perdu une grande partie de son impact depuis son introduction.
La cinquième proposition des propriétaires de PME figure au tableau 12. Nous nous opposons fortement à l'élimination de l'exonération à vie des gains de capital de moins de 500 000 $. Quatre-vingt-un pour cent des entreprises croient que cette élimination aurait un impact négatif sur leur entreprise. Nous verrons un peu plus loin pourquoi cela est si important pour les propriétaires d'entreprises.
• 1320
Le tableau 13 brosse un portrait des moyens
utilisés par les propriétaires d'entreprises pour
assurer leur retraite.
Les fonctionnaires, ainsi que les travailleurs dans les
entreprises, jouissent d'un fonds
de pension, mais ce n'est pas le cas des
propriétaires de PME, qui comptent
particulièrement sur les REÉR, l'exonération du
gain de capital et la valeur marchande de
leur entreprise pour assurer leur retraite.
On constate que les REÉR et tous les éléments reliés
à l'entreprise permettront
aux propriétaires d'entreprises de s'assurer une retraite.
Nous recommandons que la contribution maximale à un
REÉR soit augmentée de
13 500 $ à 14 500 $ en 1999, puis à 15 500 $ en l'an
2000.
Enfin, ma dernière suggestion se trouve au tableau 14, qui présente une dimension très importante du financement des entreprises, soit les sources de capitaux propres. On sait que cela représente souvent des difficultés, particulièrement au niveau des plus petites entreprises. Ce tableau énumère les trois façons auxquelles ont recours les entreprises pour obtenir des capitaux: en premier lieu, l'épargne personnelle, le capital provenant donc de l'entrepreneur lui-même; en second lieu, la réduction d'impôt, provenant des revenus qu'a su générer l'entreprise; et troisièmement, d'autres sources relatives à son réseau et à sa capacité d'emprunt, y compris auprès de ses amis et de ses relations d'affaires.
Nous considérons qu'il est de plus en plus important de rendre le REÉR plus flexible afin que les gens puissent investir une part de leur REÉR dans les PME. Merci.
Mme Catherine Swift: Merci, Pierre.
[Traduction]
J'aimerais faire quelques observations sur la santé et l'éducation avant de conclure.
Bien que nos membres, en règle générale, appuient une restriction globale des dépenses, surtout depuis deux ans, lorsque la croissance économique a été relativement bonne et que les recettes ont augmenté plus que les budgets ne l'avaient prévu, il est également important de signaler que nos membres appuient l'augmentation des versements de transfert aux provinces pour la santé et l'éducation. Et c'est d'ailleurs ce que montre le graphique suivant. Cela ne passe pas nécessairement par une augmentation des dépenses mais plutôt par une réaffectation des priorités des dépenses actuelles.
Parallèlement, nos membres ne sont pas favorables à la création de nouveaux grands programmes publics. Comme le montre la dernière diapositive, les trois-quarts de nos membres ou presque s'opposent au financement public d'un programme de médicaments national. Les raisons ne manquent pas. Le gouvernement devrait reconnaître que le secteur privé peut établir lui-même un certain nombre de programmes et qu'il ne doit pas toujours dépendre du secteur public.
Dans le domaine des régimes de prestations de santé, nous avons été très contents de constater dans le dernier budget que le gouvernement permettrait aux travailleurs autonomes et aux chefs d'entreprises non constitués en société de déduire les coûts de leur régime de prestations d'assurance-maladie pour eux-mêmes, pour leur famille et pour leurs employés. Nous le proposions depuis un certain nombre d'années, et nous avons été contents lorsque nous l'avons vu dans le dernier budget.
Nous collaborons actuellement avec l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes, avec l'Association dentaire canadienne ainsi qu'avec d'autres groupes pour accroître la sensibilisation et élargir la garantie des assurances dans le domaine de la santé et dans le domaine dentaire aux petites entreprises du Canada.
Nous élaborons notre propre programme d'assurance-maladie et d'assurance dentaire pour que non seulement nos membres qui ne sont pas actuellement couverts le soient mais également pour protéger n'importe quelle autre petite entreprise. Il faut donc améliorer le type de produits offerts tout le long de l'échelle jusqu'à l'entreprise qui ne compte qu'un employé. Il est évident que le nombre de travailleurs autonomes a considérablement augmenté ces dernières années si bien que cette proportion s'accroît et que le coût sera plus modéré. Le coût empêche beaucoup de petites entreprises d'obtenir une assurance-maladie et dentaire pour les propriétaires de ces entreprises, leurs employés et leur famille.
En conclusion, les résultats que nous vous avons présentés aujourd'hui ont été établis à partir d'un certain nombre de sondages que nous avons effectués auprès de dizaine de milliers de petites et moyennes entreprises au Canada, ce secteur de l'économie qui créé le plus d'emplois stables. Il ne fait aucun doute que c'est un groupe très représentatif de l'économie canadienne en général. Nous croyons que le gouvernement devrait éviter de saper sa propre crédibilité en manipulant ses prévisions de dépenses, en utilisant à mauvais escient l'excédent de l'assurance-emploi ou en bricolant les chiffres. Comme nous le savons, il faut des années et des années pour asseoir sa crédibilité mais elle peut disparaître en un clin d'oeil.
• 1325
La meilleure façon pour tous les Canadiens de profiter de
l'amélioration de la situation budgétaire est de s'assurer que
l'économie du Canada continue à croître et qu'il y a plus de
débouchés en matière d'emplois. La façon d'y parvenir est d'alléger
la charge fiscale pesant sur les petites entreprises ainsi que sur
le reste de la population canadienne. Du côté des petites
entreprises, nous savons qu'elles créeront des emplois et que non
seulement les économies locales en profiteront mais l'économie
globale du Canada également.
Comme l'a dit Garth, ce gouvernement a accordé la priorité aux petites entreprises ces dernières années. Nous craignons que nous nous éloignions de cette priorité—qui concerne non pas exclusivement les petites entreprises—au profit des grosses entreprises et des gros syndicats qui n'ont pas tendance à favoriser la création d'emplois ou la croissance.
Avant de passer aux questions, j'aimerais remercier Mike de s'être occupé de nos diapositives aujourd'hui.
C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions maintenant.
Le président: Merci de votre exposé très détaillé.
Nous allons maintenant passer aux questions et réponses. Monsieur Ritz, vous avez dix minutes.
M. Gerry Ritz: Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de la présentation que vous avez faite ici aujourd'hui, madame et messieurs.
Vers la fin de votre intervention, vous avez dit que nous avions enregistré une croissance considérable du nombre de travailleurs autonomes, ce qui m'amène à vous poser la question suivante. Ayant moi-même été travailleur autonome, les cotisations à la caisse d'assurance-emploi et autres sont considérables; il faut payer les cotisations de l'employeur et de l'employé. Ne pourrait-on pas partager le tout autrement, pour que ce soit plus équitable?
Mme Catherine Swift: Un grand nombre de travailleurs autonomes ne versent pas de cotisations à la caisse d'assurance-emploi simplement parce qu'ils n'ont pas droit aux prestations d'assurance-emploi si bien que la proportion est respectée dans ce cas-là. Le Régime de pensions du Canada est un bon exemple, car il faut payer la cotisation de l'employeur et de l'employé, si bien que vous êtes doublement pénalisés. Nous recommandons déjà depuis un certain temps que le partage pour l'assurance-emploi, qui est maintenant de 1,4 contre 1, comme vous le savez, soit réduit progressivement jusqu'à ce qu'il atteigne une rapport de 1 contre 1. Les raisons de le faire sur le simple plan de l'équité ne manquent pas.
Il faudrait régler la question du Régime de pensions du Canada car comme vous le dites, notre économie est en pleine mutation. Nous ne pensons pas assister à une tendance inverse prochainement. Le nombre de travailleurs autonomes devrait continuer à augmenter, à notre avis, et je ne crois pas qu'il devrait payer deux fois.
M. Garth Whyte: Nous pourrions discuter sur le fond de chacune de nos recommandations, mais parlons des travailleurs autonomes quelques instants.
Lorsqu'ils se sont penchés sur la mutation de l'économie dans l'analyse qui en a été faite, les gens devenaient travailleurs autonomes, et c'est ce que nous ont dit nos propres membres, en raison des charges sociales, en raison de l'impôt avant bénéfice qui les frappait. Ce que nous faisons indirectement... et lorsque je dis «nous», je veux parler de tous les niveaux administratifs; le gouvernement fédéral n'est pas le seul à dépendre d'augmentation des impôts établis sans égard aux bénéfices. Les gens préfèrent ne pas embaucher. Cela ne vaut pas la peine. Ils préfèrent être autonomes.
C'est un des dangers qu'il faudra surveiller, car après c'est l'économie souterraine. Il faut faire très attention car nous risquons de perdre des recettes fiscales. Croyez-le ou non, une fois un certain seuil atteint, vous perdez de l'argent. On l'a bien vu avec les taxes qui frappaient les boissons alcoolisées et le tabac. Il faut donc faire très attention.
M. Gerry Ritz: Avez-vous fait des études qui vous permettent de mesurer l'importance de l'économie souterraine? Combien d'argent pourrions-nous récupérer en recettes fiscales si nous nous éloignions des régimes fiscaux régressifs?
Mme Catherine Swift: Nous avons effectué des études, mais elles ne sont pas très récentes. C'était au plus fort la récession que notre économie souterraine était la pire. Le cours du dollar était alors beaucoup plus élevé. Il y avait toutes sortes de questions au début des années 90, le magasinage outre-frontière, l'implantation de la TPS, etc. Elles sont quelque peu démodées à l'heure actuelle. Et bien sûr, essayer de déterminer l'ampleur de l'économie souterraine est toujours chose difficile, justement parce qu'elle est cachée.
Il convient de réétudier ces questions maintenant, parce que la plupart des gens en effet prévoient un ralentissement de la croissance économique. Comme je l'ai dit, nous ne sommes pas pessimistes. Nous estimons avoir encore quelques années de croissance acceptable, mais une croissance qui ralentit, ce qui est typique de tout cycle conjoncturel. Étant donné que le Canada a toujours un niveau de taxation très élevé—en ce qui concerne les impôts sur le revenu des particuliers, les taxes de vente et les taxes d'autres secteurs—il n'est pas impossible que l'économie souterraine se ravigote.
M. Gerry Ritz: Nous préconisons des réductions de 20 à 30c. des cotisations à l'assurance-emploi pour 1999. Est-ce assez? Selon l'actuaire, elles pourraient passer à 1,90 $ et le taux de rentabilité serait toujours atteint.
M. Garth Whyte: Nous voulons que les règles du jeu soient équitables envers tout le monde. Oui, elles devraient descendre et elles pourraient descendre de presque 1 $, et on aurait toujours un excédent de 20 milliards de dollars.
• 1330
Nous avons écouté la déclaration économique du ministre. Nous
estimons être plus que raisonnables. Mais à notre avis, il ne
serait pas raisonnable de ne pas réduire les cotisations. Nous
estimons que 5c. est déraisonnable. Nous croyons avoir fait la
moitié du chemin.
Au coeur de la question... Nous estimons que si on retire tout l'argent à la fois, on pourrait nuire aux mesures fiscales qui visent la réduction du déficit et tout le reste. Donc nous préférons des réductions graduelles. Nous sommes même prêts à convaincre nos membres, à leur dire qu'une telle approche est souhaitable pour permettre la mise en oeuvre d'une telle stratégie. Mais il faut commencer à fermer le robinet, sans quoi on deviendra dépendant de cette source de recettes, qui disparaîtra. Nous nous retrouverons alors obligés de financer des déficits ou d'augmenter les taxes.
Mme Catherine Swift: L'autre raison derrière la réduction de 20c. à 30c. c'est qu'un tel montant pourrait compenser l'augmentation du RPC. Au minimum, cela semble tout à fait justifiable.
Il ne faut surtout pas aggraver la situation et alourdir le fardeau cumulatif que nous supportons déjà.
M. Gerry Ritz: Donc vous avez fixé ce montant de 20c. à 30c. de façon arbitraire. Vous n'avez pas fait de sondage? Vous avez dit qu'il faudrait convaincre vos membres. Ce n'est pas la position que vos membres vous proposent?
M. Garth Whyte: Eh bien, je peux dire que nous avons sondé nos membres.
M. Gerry Ritz: D'accord.
M. Garth Whyte: Nous avons demandé à nos membres si l'argent devait servir à éliminer le déficit ou à d'autres fins. Je crois que 5 p. 100 ont dit oui. Il s'agit des leaders d'opinions et des gens qui font partie des associations et représentent les propriétaires de petites entreprises. Cinq pour cent de ces personnes ont dit oui. Une autre grande partie ont préféré une réduction de 20c. à 30 cents. Une autre grande partie a recommandé une réduction immédiate. Donc les avis étaient partagés sur ce sujet.
Pourtant, comme nous l'avons indiqué, il existe d'autres priorités. Donc nous ne pouvons pas simplement dire de faire cela, et ensuite, toutes les autres choses en même temps. Donc nous essayons de formuler une stratégie de mise en oeuvre graduelle.
M. Gerry Ritz: Très bien, merci.
Le président: Merci, monsieur Ritz.
Madame Lalonde.
[Français]
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): J'aimerais tout d'abord vous remercier de votre présentation, aussi intéressante que les précédentes et fondée sur ces enquêtes qu'on a toujours hâte d'étudier. Avant de vous poser une question, j'aimerais relever une expression qui me semble fautive dans la version française de votre document. La correction devrait être consignée dans le compte rendu. Vous y parlez de la réduction des impôts sur la masse salariale, tandis qu'il faudrait plutôt parler de la réduction des taxes sur la masse salariale, ce qui permettrait de clarifier ce dont on parle.
M. Pierre Cléroux: Vous avez raison; nous effectuerons cette correction.
Mme Francine Lalonde: Merci. Le Bloc québécois est non seulement en accord sur bien des points qui figurent ici, mais il s'en est fait le proposeur à différentes étapes. Il a notamment réclamé que le fonds de l'assurance-emploi soit reconnu comme un compte distinct et qu'on réduise de façon importante les cotisations à l'assurance-emploi.
Qu'est-ce que vos membres pensent de notre recommandation visant à réduire les cotisations à l'assurance-chômage de la moitié de l'ensemble de la réduction, ce qui nous ramènerait juste au niveau de la gestion correcte des besoins, tandis que l'autre partie de cette réduction servirait à l'amélioration du régime? Ces améliorations viseraient les personnes qui travaillent pour vous, notamment dans les PME, et qui vivent toutes sortes de turbulences étroitement liées à l'économie. Nous proposons aussi d'assouplir les critères d'admissibilité pour que les jeunes et les femmes puissent avoir plus facilement accès aux prestations et que la période pendant laquelle ils reçoivent ces prestations soit prolongée. Nous ne recommandons toutefois pas que le programme revienne à ce qu'il était auparavant. J'aimerais entendre votre point de vue.
M. Pierre Cléroux: Nos membres accordent vraiment la priorité à la réduction des cotisations. Nous appuyons la dernière réforme qui a eu lieu et dans le cadre de laquelle on a modifié quelque peu les prestations. Nous proposons essentiellement deux choses: d'une part, qu'on ait un fonds séparé et, d'autre part, comme le proposait Garth, qu'on réduise les taux sur une période de trois ans afin d'atteindre un équilibre au niveau du fonds.
Nous ne croyons pas qu'il soit souhaitable pour l'instant d'accroître les prestations, cela pour plusieurs raisons, dont la plus importante est la suivante: nous reconnaissons que nous vivons actuellement une période de forte croissance qui amène des fonds surévalués, si je puis ainsi dire, dans la caisse d'assurance-emploi, mais qu'aussitôt que notre économie ralentira quelque peu, les surplus seront moindres. Si on augmentait les prestations à ce moment-ci, il est évident que la capacité de réduire les cotisations de l'assurance-emploi, à la fois pour les travailleurs et pour les employeurs, serait grandement réduite à l'avenir. Nous accordons donc avant tout la priorité à la réduction des cotisations.
Mme Francine Lalonde: Nous allons continuer à tenter de vous convaincre, vous et vos membres, en ce qui concerne la deuxième partie, ce sur quoi nous ne sommes pas d'accord.
J'ai une question subsidiaire à vous poser. Vous dites que vous demandez au gouvernement de partager les surplus en trois phases, sur trois ans. Cela laisse tout de même une augmentation extrêmement importante. Or, les 19,6 milliards de dollars du surplus actuel pourraient permettre de dispenser tout le monde de payer des cotisations pendant une année et de continuer à verser les prestations. On pourrait aussi dispenser tout le monde de les payer l'année suivante. Le surplus est tellement important qu'il serait nettement exagéré de le laisser grossir encore pendant trois ans. Je ne vous trouve pas assez exigeants.
M. Pierre Cléroux: Comme M. Whyte l'a dit tout à l'heure, nous essayons d'adopter une position équilibrée. Je serais d'accord avec vous, mais il faut se rappeler que le surplus de 19 milliards de dollars n'existe plus. Il a déjà été utilisé par le gouvernement. Le récupérer serait très difficile.
On voudrait s'assurer que la situation qui prévaut actuellement, soit le transfert du surplus de l'assurance-emploi dans le revenu global, ne se reproduise plus. C'est pourquoi, en maintenant un fonds séparé et en appliquant une stratégie de réduction des taux pendant trois ans pour atteindre un taux équilibré par la suite, on permettrait au gouvernement de faire ce qu'il envisage.
Cela lui procurerait aussi un certain coussin en cas de ralentissement de l'économie et lui permettrait de s'assurer que les travailleurs et les entreprises ne soient plus pénalisés par le transfert de fonds dans le compte général à l'avenir.
Vous dites que notre stratégie n'est pas aussi combative que vous le souhaiteriez. C'est que nous sommes conscients qu'un ralentissement économique peut se produire et que nous ne voudrions pas que le gouvernement se trouve en position trop vulnérable. Ayant reconnu cela, nous demandons quand même que l'équilibre soit atteint d'ici trois ans.
Mme Francine Lalonde: Monsieur le président, je reviens à la charge. Vous dites quelque part, et je suis très contente de le lire, que les cotisations à l'assurance-chômage pénalisent les PME qui sont davantage des industries de main-d'oeuvre que des industries capitalistiques. Les grandes entreprises, dans leur ensemble, sont la plupart du temps des industries de capital, même si certaines PME le sont aussi.
Il y a donc deux facteurs qui défavorisent les PME. Ce sont elles qui paient des salaires de moins de 39 000 $. Disons que chez elles, les salaires plus élevés sont rares. Donc, elles paient la taxe à 100 p. 100. Les entreprises capitalistiques ont une moins grande part de personnel et donc un taux de taxation moindre, parce que les salaires sont plus élevés. Il n'est pas rare, dans les grandes entreprises, qu'avec quelques heures de travail supplémentaires, les travailleurs arrivent à se faire un revenu de 60 000 $. Donc, la cotisation est beaucoup moindre.
Ne trouvez-vous pas qu'il est anti-économique de pénaliser les PME par ce type de taxation, quand on dit par ailleurs qu'elles constituent un facteur extrêmement dynamique de création d'emplois et de développement économique? Je vais vous dire que parfois j'ai l'impression d'être toute seule à soutenir ce point de vue. Il y a des années que je dis cela et que je pose la même question. Il me semble inconcevable qu'elles soient aussi lourdement taxées.
M. Pierre Cléroux: Vous avez tout à fait raison, et c'est pourquoi on a dit à deux reprises que nous avions l'impression que le gouvernement, qui semblait vouloir appuyer les PME, se détachait de cette attitude pour adopter une approche préconisée par les grandes entreprises.
Vous savez que les grandes entreprises ont déclaré qu'une réduction des contributions à l'assurance-emploi n'était pas très importante. Tout notre mémoire d'aujourd'hui soutient la thèse qu'on doit d'abord réduire les cotisations à l'assurance-emploi avant de réduire les impôts des particuliers ou les impôts des entreprises. Ce sont nos membres qui ont proposé directement que la grande priorité soit accordée aux cotisations à l'assurance-emploi.
De plus, vous avez tout à fait raison de dire que les cotisations à l'assurance-emploi ou les taxes sur la masse salariale, en général, pénalisent davantage les PME. Nous avons toujours travaillé dans ce sens-là parce que nous sommes bien persuadés de cela. Dans certaines provinces, nous avons fait certains progrès; la taxe sur la masse salariale y a été éliminée ou diminuée. C'est ce qu'a fait le gouvernement du Québec dans son dernier budget.
Donc, c'est pour cela que nous portons à l'attention de M. Martin et du gouvernement en place que cela constitue une priorité pour nous. Il faut absolument le faire, et comme l'a dit M. Whyte tout à l'heure, une réduction de 5c. ne serait pas acceptable. Il faut aller plus loin, surtout qu'on a actuellement un énorme surplus. Il faut diminuer les cotisations d'au moins 20 ou 30c. pour laisser respirer un peu les PME.
Mme Francine Lalonde: Je regarde avec beaucoup d'intérêt le graphique numéro 6, qui illustre bien la discussion que nous avons. Il montre que les taxes qui sont indépendantes des profits... Il faudrait peut-être dire l'impôt. En français, on parle de l'impôt sur les profits et de la taxe sur la masse salariale, parce que les taxes ont tendance à être égales, alors que les impôts sont proportionnels. On voit ici que la taxation diminue à mesure que les profits augmentent. Cela confirme ce que nous venons de nous dire, à savoir que la tendance générale va dans le sens d'une augmentation de la taxe pour les PME par rapport aux grandes entreprises.
Enfin, cela fera partie de notre argumentation, de la mienne assurément. Je sais que les grandes entreprises s'occupent de recherche et développement, et que les programmes qui s'en occupent, comme celui de Partenariat technologique Canada, leur octroient un investissement et non une subvention. Mais ici, je trouve qu'on les subventionne par le mode de taxation. Je vais donc continuer à le répéter et à vous appuyer.
J'aurais beaucoup d'autres questions, mais je vois que le président va m'arrêter. De plus, je suis forcée de vous demander de m'excuser parce que je dois me rendre à la Chambre pour la période de questions. Je vous remercie encore une fois.
M. Pierre Cléroux: Vous avez tout à fait raison, parce que c'est un point très important. Il démontre bien que le gouvernement se protège des variations économiques. En effet, quand on maintient une taxation indépendante des profits, donc basée sur le capital et axée sur la masse salariale, les revenus de l'État demeurent à peu près les mêmes en cas de récession. Donc, ceux qui portent le poids des cycles économiques sont de plus en plus les entreprises parce que leur fiscalité ne varie pas avec le cycle économique, comme il en est des impôts sur les profits.
Mme Francine Lalonde: D'accord. Merci.
[Traduction]
Le président: Merci, madame Lalonde.
Monsieur Szabo.
[Français]
M. Nick Discepola:
[Note de la rédaction: Inaudible].
[Traduction]
Mme Catherine Swift: À court terme ou à long terme?
[Français]
C'est là la différence. C'est bon pour le gouvernement à court terme, mais à long terme, on détruit le secteur des PME et l'économie. Le problème est entier.
[Traduction]
Le président: Monsieur Szabo.
M. Paul Szabo: Merci, monsieur le président.
Merci pour votre exposé.
Monsieur Whyte, dans la partie de votre exposé qui portait sur l'assurance-emploi, vous avez dit que d'après les prévisions, la caisse aurait un excédent de l'ordre de 20 milliards de dollars. Si le gouvernement du Canada utilisait ce montant de 20 milliards de dollars pour réduire la dette, investir dans la santé et stimuler la création d'emplois, combien restera-t-il dans la caisse d'assurance-emploi?
M. Garth Whyte: Ne parlez pas de cotisations à l'assurance-emploi. Parlons plutôt d'une taxe sur la santé ou d'une mesure qui vise la dette...
M. Paul Szabo: Non, non...
M. Garth Whyte: Excusez-moi, je suis désolé. Mais l'année dernière nous avons essayé de faire valoir ce point devant votre comité et on nous a dit: «Non, non, on s'en sert pour l'assurance-emploi». À l'heure actuelle, ce qui se passe...
M. Paul Szabo: Pourriez-vous répondre à la question? Si on prenait ce montant de 20 milliards de dollars et si on le dépensait à toutes sortes de choses, combien restera-t-il dans la caisse d'assurance-emploi?
M. Garth Whyte: À l'heure actuelle, je crois que la réponse...
Mme Catherine Swift: On l'a déjà dépensé.
M. Garth Whyte: On l'a déjà dépensé, n'est-ce pas? Il n'y en a plus.
M. Paul Szabo: Combien d'argent y a-t-il dans la caisse actuellement?
Mme Catherine Swift: En termes réels?
M. Paul Szabo: Selon les prévisions. Dans vos prévisions, vous dites que la caisse de l'assurance-emploi s'élèvera à...
M. Garth Whyte: Non, ce ne sont pas nos prévisions. Pour répondre à la question...
Mme Catherine Swift: Ce sont des prévisions de l'actuaire.
M. Garth Whyte: Non, nous avons parlé d'emploi...
M. Paul Szabo: Un instant, s'il vous plaît.
M. Garth Whyte: Ce ne sont pas nos chiffres, ces chiffres proviennent du ministère du Développement des ressources humaines et de l'actuaire. Ils ont dit que selon...
M. Paul Szabo: Vous avez des chiffres sous les yeux. Selon les renseignements les plus justes que vous possédez, combien d'argent y a-t-il dans la caisse?
M. Garth Whyte: Normalement, 19,6 milliards de dollars.
M. Paul Szabo: À quel moment?
M. Garth Whyte: D'ici la fin de l'année.
M. Paul Szabo: Vous venez de dire que l'argent avait déjà été dépensé.
Mme Catherine Swift: Nous savons qu'il n'est plus là. Nous savons qu'effectivement il a déjà été dépensé.
M. Paul Szabo: Mais combien y a-t-il dans la caisse?
M. Garth Whyte: Normalement...
Mme Catherine Swift: Rien, en termes réels.
M. Garth Whyte: ...19,6 milliards de dollars.
M. Paul Szabo: Non, et je soulève cet argument parce qu'on se fait toujours avoir. La caisse d'assurance-emploi est une espèce d'analyse. Ce n'est pas un compte en banque. Nous le savons.
Mme Catherine Swift: Nous le savons. Nous le savons fort bien. Mais soyons transparents.
M. Paul Szabo: Même si l'excédent accumulé de cette analyse a servi à réduire le déficit et la dette, et à financer entre autres des dépenses au titre de la santé, la caisse et l'analyse continuent à exister et à être régies par une loi. D'ailleurs, vous savez sans doute que le ministre des Finances a fait savoir que la loi régissant cette caisse sera respectée. Il a pris cet engagement.
Mme Catherine Swift: Eh bien, on verra. La situation est loin d'être limpide.
M. Paul Szabo: Donc il n'a pas encore enfreint la loi, n'est-ce pas?
Mme Catherine Swift: Non.
M. Paul Szabo: D'accord. Non. Il fallait le dire publiquement.
M. Garth Whyte: Non. Nous n'avons jamais dit qu'il l'avait fait.
M. Paul Szabo: Non, nous n'avons pas encore enfreint la loi. Passons rapidement à autre chose. Le temps file.
Mme Catherine Swift: Nous ne l'avons pas dit non plus.
M. Garth Whyte: Le gouvernement traite cette caisse comme une véritable caisse, parce qu'il paie des intérêts à l'heure actuelle. Si le gouvernement croyait qu'il s'agissait d'une caisse pour autre chose... Le gouvernement paie des intérêts sur cette caisse théorique, il l'a donc identifiée comme étant une caisse. Ce que nous disons maintenant c'est que le gouvernement doit éviter de modifier les règles à l'avenir, lorsque la caisse s'élèvera à 37 milliards de dollars. Autrement dit, nous aimerions que le comité s'engage à ne pas légiférer qu'elle fasse partie du Trésor public, et que cette caisse continuera à exister à l'avenir.
M. Paul Szabo: C'est toujours versé au Trésor public depuis 1986.
M. Garth Whyte: Voilà le problème. Cela crée énormément de confusion, même lors d'échanges comme ceux-ci. Cela devrait être clair. Les faits sont clairs. Il n'y a pas de compte en banque distinct: la caisse consiste en une analyse sur papier...
Mme Catherine Swift: Nous savons cela.
M. Paul Szabo: Et les liquidités, dont l'existence est confirmée par cette analyse, ont toujours été utilisées pour éponger le déficit ou à d'autres fins, d'accord. Personne n'a enfreint la loi.
M. Pierre Cléroux: Créons une caisse distincte.
M. Paul Szabo: D'accord, j'y viendrai; c'est ma dernière question. Mais j'aimerais d'abord comprendre quelque chose. Si je me reporte au tableau 8, je constate que tous les tuyaux d'orgue donnent un total de 100 pour vos préférences, mais ce n'est pas le cas des autres tableaux. Ce n'est pas réellement clair. Par exemple, je conclus du tableau 9—je ne sais pas comment l'interpréter—que 52,2 p. 100 de quelque chose souhaite réduire les taux généraux d'imposition pour tous. Pouvez-vous me dire ce que représentent ces 52,2 p. 100?
M. Garth Whyte: Nous avons demandé à nos membres d'encercler leurs deux principales priorités. Nous avons procédé au sondage de concert avec le ministère des Finances. C'est ce qu'il a recommandé.
M. Paul Szabo: Alors le total devrait être 200.
M. Garth Whyte: Eh bien, je ne le crois pas, mais...
M. Paul Szabo: Non, 200 p. 100, pour obtenir deux choix...
Mme Catherine Swift: De nombreux répondants à un sondage d'opinion n'encercle qu'un choix, par exemple, même si vous leur demandez d'en encercler deux.
M. Paul Szabo: D'accord.
Mme Catherine Swift: Mais cela dépend de la formulation de la question. Voilà pourquoi...
M. Paul Szabo: Ainsi, je n'aurais pas dû tenir compte de la rubrique—pourcentage de réponses.
Mme Catherine Swift: C'est un tableau de fréquence.
M. Paul Szabo: La question concernait les priorités. Ainsi, seulement la moitié des gens qui ont répondu au sondage croyaient que c'était une bonne idée de réduire les taux d'imposition.
Mme Catherine Swift: Non, nous leur avons demandé comment ils souhaitaient que cela soit fait.
M. Garth Whyte: Cela ne concerne que l'impôt des particuliers.
Mme Catherine Swift: À quel tableau êtes-vous, toujours le 9?
M. Garth Whyte: Nous sommes toujours au tableau 9.
Mme Catherine Swift: Quand nous leur avons demandé comment il faudrait à leur avis réduire l'impôt des particuliers, 52,2 p. 100 ont dit que la meilleure façon serait de réduire les taux d'imposition pour tous plutôt que pour un segment en particulier des contribuables selon les tranches de revenu, par exemple.
M. Garth Whyte: Le graphique 2 leur demandait quelles étaient leurs principales priorités et d'encercler tous les choix de réponses qui leur semblaient pertinents. Ainsi, dans 80 p. 100, le premier choix c'était le fardeau fiscal, 61 p. 100 ont choisi en deuxième lieu l'assurance-emploi et 60 p. 100 ont choisi la dette publique et le déficit.
M. Paul Szabo: D'accord. Bien que toutes les rubriques de ces graphiques soient identiques, nous n'avons aucune explication quant à la formulation de la question et quant aux choix de réponses possibles.
M. Garth Whyte: Nous vous ferons parvenir un exemplaire du sondage. En réalité, les rubriques sont différentes...
M. Paul Szabo: D'accord, je vais tenter de ne pas tirer de conclusion de ces tableaux et graphiques tant que je ne connaîtrai pas les hypothèses qu'ils sous-tendent.
Mme Catherine Swift: Bien sûr.
M. Paul Szabo: D'accord.
Mme Catherine Swift: La seule différence sera...
M. Paul Szabo: Ma dernière question concerne la suggestion d'une caisse distincte pour l'assurance-emploi. Ce serait un revirement important de politique et cela donnera lieu sans doute à un débat fort intéressant. J'aimerais que vous demandiez à vos membres, à ceux qui seraient en faveur d'une caisse d'assurance-emploi distincte, s'ils accepteraient un droit de retrait pour les entreprises et les industries qui préféreraient s'assurer elles-mêmes.
Mme Catherine Swift: Nous l'avons fait pour les accidents du travail, qui relèvent des provinces, par simple intérêt, et une proportion importante de nos membres y étaient favorables.
M. Paul Szabo: Bien sûr, vous comprenez pourquoi ce serait... Enfin, vous n'y parviendriez jamais.
Mme Catherine Swift: Non.
M. Paul Szabo: C'est que certaines des grandes entreprises du secteur des affaires et de l'industrie retirent plus qu'elles ne cotisent.
Mme Catherine Swift: Bien sûr. Cela varie selon le groupe sectoriel, le groupe régional, et quoi encore. Toutefois, la façon dont nous avons structuré le régime a parfois contribué à exacerber le problème au fil des ans. Chose certaine, le régime permet de niveler les différences. Ce serait une transition très douloureuse. Il serait très difficile d'intégrer à l'AE un mécanisme de surprime d'expérience.
M. Paul Szabo: Oui.
Mme Catherine Swift: Mais nous restons convaincus que l'imputabilité et la transparence sont toujours de mise dans un régime fiscal. C'est la principale raison pour laquelle nous proposons une caisse distincte.
M. Paul Szabo: J'ai mentionné cette idée d'auto-assurance parce que les entreprises ne veulent pas payer plus d'impôts que nécessaire. Celles qui n'abusent pas du système sont aussi celles qui ne gardent pas d'effectifs en réserve. Celles qui n'exploitent pas le régime peuvent en réalité être plus rentables parce qu'elles ont une main-d'oeuvre stable et qualifiée. C'est dans l'intérêt des gens d'affaires. Cette proposition s'adresse surtout aux petites entreprises parce que vous traitez avec un groupe assez homogène uni par des liens d'association entre petites entreprises plutôt qu'entre grandes sociétés.
J'aimerais bien que l'on traite un jour de l'opportunité de créer une caisse distincte et que l'on tranche la question de savoir s'il faut abandonner ceux qui, pour une raison ou pour une autre, sont incapables d'assurer la continuité de l'emploi. D'ailleurs, de nombreuses entreprises reçoivent plus qu'elles ne cotisent.
Mme Catherine Swift: Les mêmes arguments valent pour les employés.
M. Paul Szabo: Absolument. Merci.
Le président: Merci, monsieur Szabo.
J'aurais une question. J'ai écouté les Canadiens de tout le pays s'exprimer sur un certain nombre de dossiers. Bien entendu, chacun d'eux voit les choses d'une façon bien personnelle. Je me demande souvent quel est le but de cette contribution. Autrement dit, vous venez ici me parler des besoins des petites entreprises. D'autres témoins viendront me parler de soins de santé, de R-D, ainsi de suite.
C'est un sujet qui m'intéresse. Je préconise un pacte de productivité en vertu duquel le gouvernement prendrait ses décisions en fonction de la productivité.
Je vais vous expliquer pourquoi cela me préoccupe. Cela me préoccupe parce que la productivité demeure le principal facteur déterminant de l'accroissement du niveau de vie. C'est extrêmement important. Rien ne changera dans notre pays à moins que l'on adopte une approche ciblée. Nous pouvons rendre beaucoup de personnes heureuses et leur donner 200 millions de dollars ici et 100 millions de dollars là, mais je pense que le moment est venu, dans l'histoire de notre pays, d'adopter une approche un peu plus ciblée. Même dans le cadre de consultations pré-budgétaires comme celles-ci, nous devons viser le long terme.
Nous allons devoir laisser notre pays aux générations futures. Bien entendu, la génération actuelle a fait les frais de certaines décisions prises dans le passé. J'avoue bien franchement que je ne veux pas que mes enfants pensent que nous les avons engagés dans une bien mauvaise voie. Ainsi, il faut une action plus ciblée.
Je connais votre point de vue sur de nombreuses questions. Vos positions sont très claires. Mais j'aimerais faire appel à votre savoir-faire et vous demander si le moment n'est pas venu que nous nous attardions un peu plus sur l'impact à long terme de la productivité sur notre niveau de vie.
Mme Catherine Swift: Je trouve que c'est une excellente idée. Nous assistons à la détérioration de notre monnaie depuis plus de 20 ans maintenant et c'est simplement une mesure—même si certains groupes parmi nos membres comme le secteur du tourisme, les grands exportateurs diraient que cela est acceptable—qui au fond traduit une détérioration de notre standard de vie. C'est la meilleure mesure que nous avons.
• 1355
Je trouve que la situation est devenue assez préoccupante.
C'est une énigme. Nous estimons que beaucoup de choses que nous
avons proposées pour le court terme, visent à réduire la
réglementation et à rendre l'économie plus efficiente, ce qui à la
longue, cela pourrait aboutir à une augmentation de la
productivité.
Au Canada, nous avons beaucoup de défis à relever, étant donné qu'une forte proportion de nos entreprises sont de propriété étrangère, surtout au niveau des grandes sociétés multinationales. Nous savons que cela a un effet sur la prise de décisions et sur la productivité. La question n'est pas simple, comme vous le savez tous sans doute. Nous exprimons le point de vue de la petite entreprise. Nous représentons les entreprises de propriété canadienne qui trouvent que la lutte actuelle contre le mur de la réglementation nuit à la productivité.
Ce serait une très bonne idée de mettre ce projet en oeuvre. Le défi le plus important serait d'obtenir la collaboration de tous les gouvernements à cet égard. Cela ne pourra pas être seulement une initiative du gouvernement fédéral. Sinon, la tentative échouerait. Il s'agirait de savoir si les gouvernements pourraient collaborer pendant suffisamment de temps pour faire avancer une telle initiative. Je ne saurais trop vous exhorter à poursuivre une telle initiative à moyen et à long terme.
Le président: Nous le faisons pour toutes sortes de questions. Les gouvernements doivent examiner tout du point de vue de relations fédérales-provinciales pour voir si cela peut fonctionner ou non.
Mais lorsqu'on y pense vraiment, nous devrions concentrer nos efforts sur la productivité. Est-ce qu'il y a une autre question aussi importante que celle-là? L'état de notre économie actuelle est très étroitement lié à notre productivité, pourtant, c'est un mot qu'on hésite à prononcer. C'est la peur de l'inconnu. Du point de vue historique, ce sont les innovations au niveau de la productivité qui ont produit notre standard de vie actuel.
Cela me préoccupe, surtout lorsqu'on compare nos taux de productivité avec ceux des États-Unis. Certains diront, bien sûr, que c'est assez injuste, parce qu'ils sont dix fois plus grands que nous. Mais la réalité est que nous partageons les mêmes marchés. Ce sont nos concurrents. C'est avec eux que nous faisons affaires. Je crois qu'il faut porter plus d'attention à cette question.
Mme Catherine Swift: La productivité n'est pas fonction de la grandeur. Des études du secteur des affaires ont démontré que les PME, en général, investissent davantage dans la R et D. Je parle d'une proportionnalité juste.
Alors du point de vue de la productivité, je crois que ce serait un objectif très louable et que les PME seraient un élément essentiel de toute étude dans ce sens. En fait, étant donné notre orientation nationale, ce serait très important, parce que, en général, les PME sont canadiennes.
Le président: Monsieur Whyte.
M. Garth Whyte: Nous avons mené plusieurs études et initiatives visant à accroître la productivité, mais on n'a pas pu y parvenir. Prenons comme exemple, les négociations commerciales et la collaboration à travers les frontières. Nous ne pouvons même pas collaborer à cet égard. Alors nous avons fait beaucoup d'études sur la productivité et la création d'emplois, et que crois que nous penchons du côté de la création d'emplois. Lorsque les gouvernements s'impliquent trop, tout ce qu'on peut faire c'est de permettre à ces nouvelles entreprises—celles qui n'existent même pas aujourd'hui, de se développer.
Nous avons fait des études telles Breaking Through Barriers pour le compte du ministère des Finances et d'Industrie Canada. C'est juste là. Beaucoup de ces choses pourraient être examinées maintenant du point de vue de la petite entreprise pour essayer d'améliorer sa productivité.
Le président: Il faut défendre la cause. C'est une cause qui en vaut la peine. Franchement, le fait que nous n'avons pas pu faire de progrès sur la question des obstacles au commerce intérieur et sur d'autres questions nous prive en effet d'un meilleur standard de vie à cause de cette inertie qui s'est produite dans plusieurs secteurs. En tout cas, c'est la question du jour.
• 1400
Au nom du comité, comme toujours, j'aimerais souligner que la
Fédération canadienne de l'entreprise indépendante déploie beaucoup
d'efforts pour s'assurer que le gouvernement comprend les
préoccupations des PME, qui, comme vous le savez, créent le plus
grand nombre d'emplois. Vous faites un travail excellent pour vos
membres. Nous vous en remercions beaucoup.
La séance est levée.