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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 15 octobre 1997

• 1305

[Traduction]

Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): La séance est ouverte. Bonjour, tout le monde.

[Français]

Conformément à l'article 83.1 du Règlement, le comité entreprend ses consultations prébudgétaires avec la mise à jour annuelle de la situation économique et financière du Canada, ainsi que le rapport financier annuel du gouvernement du Canada pour l'exercice 1996-1997.

[Traduction]

Nous entamons nos consultations prébudgétaires à Vancouver, et nous rompons du même coup avec la tradition puisque ce sera la première fois qu'une mise à jour économique et financière sera donnée à l'extérieur d'Ottawa. Au nom du comité, je tiens à remercier le ministre des Finances d'avoir accepté notre invitation de témoigner ici à Vancouver.

Le comité a invité les Canadiens à participer à ce que l'on pense être les consultations prébudgétaires les plus vastes jamais. À l'aube d'une nouvelle ère économique où nous devrons relever toutes sortes de défis et faire une multitude de choix, il est essentiel que les Canadiens nous disent quelles sont leurs priorités, leurs valeurs et leurs attentes. J'espère que la mise à jour économique et financière du ministre nous donnera les outils nécessaires pour planifier notre avenir.

Je souhaite maintenant la bienvenue au ministre et je l'invite à faire sa déclaration. Soyez le bienvenu, monsieur Martin.

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Avant de commencer, je voudrais vous féliciter d'avoir été nommé président du comité. Je félicite en même temps les deux vice-présidents du comité et je voudrais aussi remercier tous les membres du comité. Je tiens à les féliciter et à les remercier d'avance du travail qu'ils accompliront et leur signaler que je serai ravi de collaborer avec eux.

Je tiens aussi à remercier le comité de son aimable invitation à venir faire cet exposé à Vancouver.

Nous sommes à un tournant important de notre histoire économique. C'est pourquoi il est opportun de livrer ici, dans cette province extraordinaire qu'est la Colombie-Britannique, la porte d'entrée de la région Asie-Pacifique, l'exposé économique qui donne le coup d'envoi des consultations prébudgétaires cette année.

[Français]

J'ai eu le privilège de parler devant ce comité à plusieurs reprises, mais c'est la première fois que je vous adresse la parole depuis que les Canadiens et les Canadiennes ont accordé un nouveau mandat à notre gouvernement. C'est pourquoi mon exposé et le document que je présente aujourd'hui ont deux objectifs: premièrement, faire le bilan de l'évolution économique et financière depuis le dernier budget; deuxièmement, mettre à jour le cadre de la politique économique que j'ai présenté devant ce comité au début du dernier mandat, en mettant l'accent là où le Canada doit se concentrer pour réussir au cours du prochain millénaire.

[Traduction]

Notre objectif, depuis notre entrée en fonction en octobre 1993, a été de bâtir un pays qui offre à la fois possibilités et sécurité, un pays où nos citoyennes et citoyens peuvent avoir confiance dans leur avenir. Pour atteindre cet objectif, il nous fallait un plan. Cela exigeait des efforts soutenus. Il a fallu engager une réforme en profondeur—une réforme qui a été tributaire dans une large mesure du soutien des Canadiennes et Canadiens afin de réaliser des changements importants et parfois difficiles. À l'heure où je vous parle, il est clair qu'une étape a été franchie, que notre pays prend un nouveau départ et qu'un optimisme nouveau se manifeste d'un bout à l'autre du pays.

• 1310

Il y a quatre ans, le pays était au bord du gouffre. Les finances de la nation se trouvaient dans un état lamentable. Les Canadiens—comme le reste du monde—avaient perdu confiance dans notre économie et dans notre avenir. Nous savions que si rien n'était fait, ce ne serait pas les créanciers obligataires ou les banquiers qui souffriraient. Non, ce serait les travailleurs et les travailleuses. En fait, ils en subissaient déjà les effets. Les Canadiens savaient que la situation lamentable des finances publiques devait être redressée. Ils nous ont dit dès le départ qu'il n'y avait qu'une façon d'y parvenir—stimuler la croissance économique et réduire les dépenses publiques. Telle est précisément la tâche que nous avons entreprise. Et aujourd'hui, grâce aux efforts et à la compréhension de millions de Canadiennes et Canadiens, c'est ce que le pays a réussi à accomplir.

En 1993-1994, le déficit représentait environ 6 p. 100 du PIB, soit 42 milliards de dollars. Notre objectif pour l'exercice 1996-1997 tout juste terminé, que nous avions dévoilé lors de la campagne électorale de 1993, était de 3 p. 100 du PIB, soit 24,3 milliards de dollars. Or, en mai dernier, nous affirmions que le déficit ne dépasserait pas 16 milliards de dollars, soit un chiffre de 9,6 milliards de dollars sur 12 mois, auquel s'ajoutait une estimation des redressements négatifs normaux de fin d'exercice, qui se sont chiffrés dans une fourchette de près de 3 à plus de 6 milliards de dollars au cours des huit dernières années.

Aujourd'hui, nous publions le Rapport financier annuel pour l'année écoulée. On y apprend que, pour la première fois depuis des décennies, nos rajustements de fin d'exercice ont été positifs, et non négatifs. Je suis heureux d'annoncer que le déficit de 1996-1997 ne s'élève qu'à 8,9 milliards de dollars, près de 20 milliards de dollars de moins que l'année précédente, soit l'amélioration la plus importante d'une année sur l'autre de l'histoire du Canada. Monsieur le président, ce déficit fédéral est le moins élevé en plus de 20 ans. Mesuré en proportion de l'économie, le déficit, à 1,1 p. 100 du PIB, est le plus bas enregistré depuis 1970-1971.

[Français]

Aujourd'hui, nous publions le rapport financier annuel pour l'année écoulée. Je suis heureux d'annoncer que le déficit pour 1996-1997 ne s'élève qu'à 8,9 milliards de dollars, soit à près de 20 milliards de dollars de moins que l'année précédente, ce qui est l'amélioration la plus importante d'une année à l'autre dans l'histoire du Canada. Mesuré en proportion de l'économie, le déficit à 1,1 p. 100 du PIB est le plus bas enregistré depuis 1970-1971.

[Traduction]

Le Rapport financier annuel explique en détail comment nous avons obtenu d'aussi bons résultats. Certains facteurs ponctuels y ont contribué, mais les facteurs les plus importants sont les suivants:

Premièrement, les dépenses de programmes ont baissé de plus de 7 milliards de dollars, pour se chiffrer à un peu moins de 105 milliards de dollars. Cela signifie qu'entre 1993-1994 et 1996-1997, les dépenses de programmes totales ont été réduites de 15,2 milliards de dollars, soit près de 13 p. 100. Ce succès est attribuable aux compressions sans précédent qui ont été instaurées dans nos budgets. Mais il est pour autant attribuable au nouveau système de gestion que le gouvernement a mis en place, un système qui donne aux ministères plus de souplesse pour préparer leur budget, tout en les obligeant à faire des choix et à maîtriser leurs dépenses.

Le deuxième facteur de cette réduction spectaculaire du déficit est la baisse des frais de la dette publique, qui est le fruit de la baisse marquée des taux d'intérêt.

Le troisième facteur, c'est le renforcement de l'économie, une économie qui a créé plus d'emplois pour les Canadiennes et Canadiens tout en augmentant par le fait même les recettes que le gouvernement perçoit.

• 1315

La dynamique qui est maintenant à l'oeuvre est évidente. Les importantes mesures d'austérité prises dans nos budgets antérieurs ont réduit le déficit. La baisse du déficit a rendu possible une diminution des taux d'intérêt, qui à son tour a accentué la réduction du déficit et renforcé la croissance économique. Par effet d'entraînement, cela a contribué à la création d'un plus grand nombre d'emplois, qui ont permis une hausse des recettes publiques, d'où une réduction encore plus marquée du déficit.

En résumé, nous avons mis en place un puissant cercle vertueux qui explique les progrès sans précédent accomplis par le Canada « des progrès qui, d'ailleurs, vont se poursuivre.

[Français]

Il y a deux principales méthodes pour calculer le déficit. La première, qui est utilisée au Canada, est considérée comme l'une des plus rigoureuses au monde. Elle inclut toutes les obligations financières comptabilisées par le gouvernement durant l'année, y compris celles à l'égard du fonds de pension du secteur public. C'est le déficit dont je viens de vous donner les détails.

La seconde méthode pour calculer le déficit est utilisée par les autres pays du G-7. Elle n'inclut que les emprunts contractés sur les marchés financiers, les emprunts pour financer les programmes courants du gouvernement ou les intérêts sur sa dette. C'est ce que nous appelons les besoins financiers. Cette mesure s'apparente aux chiffres des comptes nationaux utilisés par l'OCDE pour établir des comparaisons entre les pays.

Selon cette mesure, le Canada présente aujourd'hui la meilleure situation de tous les pays du G-7. L'an dernier, nous avions prévu que, d'ici 1998-1999, nos nouveaux besoins financiers seraient éliminés.

Les résultats annoncés aujourd'hui indiquent que nous avons fait mieux encore. Nos nouveaux besoins financiers sont déjà éliminés. En fait, en 1996-1997, nous avons enregistré un excédent, le premier depuis 1969-1970. En outre, nous sommes le seul pays du G-7 à avoir obtenu un tel résultat.

[Traduction]

Monsieur le président, les résultats annoncés aujourd'hui indiquent que nos nouveaux besoins financiers sont déjà éliminés. En fait, en 1996-1997, nous avons enregistré un excédent, le premier depuis 1969-1970. En outre, nous sommes le seul pays du G7 à avoir obtenu un tel résultat. Ce que cela veut dire, c'est que pour la première fois en 27 ans, le gouvernement fédéral n'a pas été obligé d'emprunter de l'argent frais pour financer ses programmes courants, ni pour payer des frais d'intérêt. Ce qui est plus déterminant encore, depuis le début de l'année, c'est que nous avons commencé à rembourser la dette négociable. Il s'agit d'une étape cruciale pour les Canadiens et Canadiennes.

Enfin, le redressement des finances du pays et l'amélioration de notre balance des opérations courantes ont permis de réduire globalement notre dépendance à l'égard des capitaux étrangers. Cela est important parce qu'une plus grande proportion des revenus gagnés au Canada reste au Canada, entraînant ainsi la création d'emplois. C'est également un aspect important de la bataille que nous livrons pour que les taux d'intérêt au Canada reflètent la réalité fondamentale de notre économie et, en particulier, le fait que nous sommes devenus un pays à faible inflation et comptons bien le demeurer.

[Français]

Il y a deux ans et demi, les taux d'intérêt à court terme, au Canada, étaient de près de deux points et demi plus élevés que les taux aux États-Unis. Ils sont maintenant presque deux points inférieurs aux taux américains. Mais, ce qui est encore plus déterminant, c'est l'amélioration relative de nos taux à long terme. En fait, depuis février dernier, les taux des obligations à 10 ans, au Canada, sont moins élevés qu'aux États-Unis. Cela est sans précédent dans notre histoire de l'après-guerre.

[Traduction]

Nous devons toutefois garder à l'esprit que de nombreux facteurs influent sur les taux d'intérêt. La situation intérieure au Canada peut changer et les gouvernements nationaux « y compris les gouvernements des plus grandes puissances économiques « n'ont pas de contrôle sur un grand nombre de facteurs mondiaux. Pour cette raison, nous sommes déterminés à maintenir, et même à renforcer, notre cadre économique afin de diminuer l'effet des fluctuations brutales des taux d'intérêt. À titre d'exemple, notre objectif a été dès le début d'augmenter la proportion de la dette à taux fixe, à moyen et long terme, par rapport aux titres à court terme. La raison était bien évidente: pour nous rendre moins vulnérables aux variations imprévues de taux d'intérêt. Plus précisément, notre objectif était d'accroître la proportion de la dette à long terme à 65 p. 100 du total. Monsieur le président, nous avons maintenant atteint cet objectif et ce résultat est loin d'être un détail.

• 1320

Par exemple, il y a deux ans, une hausse d'un point des taux d'intérêt aurait entraîné un coût de 1,8 milliard de dollars, rien que la première année. À l'heure actuelle, une hausse d'un point nous coûterait un milliard de dollars, soit 800 millions de dollars en moins. Cela nous confère donc une protection importante.

Il ne fait pas de doute que ce bilan est positif. Mais la question qui préoccupe le plus les Canadiennes et Canadiens n'est pas de savoir si les finances publiques se sont davantage améliorées, mais si cette amélioration commence à avoir un effet positif dans leur vie quotidienne. La réponse à cette question, à mon sens, est oui elle s'améliore, et grandement. La réduction des déficits et la baisse des taux d'intérêt ont un effet puissant et positif sur notre vie quotidienne et sur l'économie canadienne. Les taux hypothécaires actuels pour une échéance de cinq ans sont les plus bas observés depuis plusieurs décennies. La confiance des consommateurs est à son plus haut niveau en plus de huit ans et la confiance des entreprises atteint en ce moment des niveaux records. Les ventes de biens de consommation sont extrêmement vigoureuses, les reventes d'habitations ont repris et les investissements des entreprises connaissent une forte expansion. Au cours du deuxième trimestre, l'économie a progressé à un taux de 5 p. 100 en rythme annuel. Tout cela se traduit par une accélération remarquable du taux de création d'emplois.

Depuis le début de l'année, 279 000 nouveaux emplois ont été créés en terme net, la très grande majorité à plein temps et tous dans le secteur privé. Il est également important de noter qu'environ 63 000 emplois ont été créés chez les jeunes au cours des quatre derniers mois, la plus importante amélioration depuis 1990.

Pour l'avenir, les économistes prévoient maintenant que la croissance économique au Canada au cours des deux prochaines années sera la plus forte en plus de dix ans. En fait, leurs prévisions placent le Canada en tête des pays du G7 avec la plus forte croissance économique pour deux années consécutives, une performance dépassant même celle du Japon, de l'Allemagne et des États-Unis.

[Français]

Pour revenir au déficit, les résultats des cinq premiers mois de l'année en cours sont très encourageants. Les projections détaillées seront fournies dans le budget de février prochain car, à ce moment, la fin de l'exercice sera plus proche.

Toutefois, comme l'a annoncé le premier ministre, le déficit sera éliminé au plus tard à la fin du prochain exercice, soit 1998-1999. Il s'agira du premier budget équilibré du gouvernement fédéral depuis 1969.

[Traduction]

Comme l'a annoncé le premier ministre, nous sommes actuellement en mesure de confirmer que le déficit sera éliminé au plus tard à la fin du prochain exercice, soit 1998-1999. Il s'agira du premier budget équilibré du gouvernement fédéral depuis 1969-1970.

Il est clair, monsieur le président, que notre pays est maintenant à l'aube d'une ère nouvelle—et, de toute évidence, il est aussi sur le point de se lancer dans un nouveau débat. Ce débat sera plus encourageant que celui qui avait marqué le début du dernier mandat, mais il représente un défi qui n'est pas moins redoutable—et important. Pour toutes ces raisons, nous avons le devoir, envers les Canadiennes et Canadiens, de garder les pieds sur terre. Oui, le débat portera sur l'utilisation de notre dividende financier. Mais, du même souffle, nous devons avoir une perspective réaliste.

Tout d'abord, le budget n'est pas encore équilibré. Il faudra y parvenir. Deuxièmement, le dividende, lorsqu'il deviendra réalité, sera peu élevé et n'augmentera que lentement au cours des premières années. Il n'y aura pas de manne immédiate. C'est pourquoi nous devons continuer d'agir avec prudence, et cela pour une raison évidente. Pendant des années, notre pays a payé le prix du manque chronique de prudence dont faisaient preuve nos gouvernements, ce qui a provoqué la perte de confiance dans notre situation financière. Dès le départ en 1993, nous étions bien déterminés à mettre fin à ces mauvaises habitudes, et nous y avons mis fin.

• 1325

Nous avons toujours dit que nos cibles de réduction du déficit ne représentaient pas un objectif maximum, mais un objectif minimum. Nous savions que, si les économistes et les prévisionnistes du secteur privé pouvaient spéculer en présidant l'avenir, le gouvernement ne devrait jamais se permettre de manquer la cible. Par conséquent, nous avons toujours fait preuve d'une plus grande prudence que la moyenne des prévisions du secteur privé. Le résultat est clair: une crédibilité rétablie, un regain de confiance. Tel était notre objectif, et tel sera l'objectif qui continuera de nous guider.

En conséquence, nos principes de gestion financière à l'avenir seront les suivants: premièrement, nous continuerons de présenter, dans notre budget, un plan financier sur deux ans; deuxièmement, ce plan sera basé, comme auparavant, sur des hypothèses économiques prudentes; troisièmement, nous continuerons d'incorporer à notre plan financier un coussin de sécurité, une réserve pour éventualités permettant de faire face aux imprévus. Jusqu'à présent, lorsque cette réserve n'était pas nécessaire, elle servait à réduire le déficit. À l'avenir, lorsqu'elle ne sera pas nécessaire, elle servira à réduire la dette publique.

Je voudrais maintenant vous parler des enjeux de ce débat. À l'heure actuelle, le débat sur l'utilisation de ce futur dividende financier se résume à trois options: une première serait de le dépenser, une deuxième serait de réduire la dette et une troisième, de réduire les impôts et les taxes.

En ce qui concerne la première option, les dépenses, il est très clair que le pays est à l'aube d'une ère où des investissements plus énergiques et responsables dans notre avenir seront à la fois souhaitables et possibles. Toutefois, certains semblent croire maintenant que les finances publiques sont presque équilibrées, qu'on peut faire table rase de la rigueur et de la discipline dans la gestion des finances publiques. Ouvrir le robinet, recommencer à dépenser comme si demain n'existait pas. Il n'en est rien du tout. Ces vieilles habitudes sont bel et bien chose du passé. Cette époque est révolue. Monsieur le président, ce gouvernement s'est départi de sa carte de crédit.

Gérer les finances publiques de façon responsable n'est pas une mode ou une nécessité provisoire. Il s'agit au contraire d'une caractéristique permanente d'une société prospère.

[Français]

Ce n'est pas seulement une question de budgets et de leur ampleur. C'est une question touchant les responsabilités du gouvernement et la manière dont il s'en acquitte. Le gouvernement ne doit jamais plus retomber dans ses vieilles habitudes, se montrant incapable de choisir entre diverses priorités, s'estimant toujours capable d'agir seul et intervenant dans des domaines où d'autres peuvent faire un bien meilleur travail. Le gouvernement doit concentrer son attention et ses efforts, travailler en partenariat et choisir d'intervenir là où il peut faire la différence.

[Traduction]

Permettez-moi de répéter des propos que j'ai tenus il y a quelques années. L'argent dont disposent les gouvernements ne leur appartient pas. Il leur est confié. Cet argent sort de la poche usée—usée à force d'être sollicitée—des travailleurs et des travailleuses. C'est de l'argent, monsieur le président, pour lequel ces Canadiennes et ces Canadiens ont travaillé très dur, d'un océan à l'autre. Ils ont traversé une période d'adaptation difficile et ils ne veulent pas que leurs efforts soient gaspillés. C'est pour toutes ces raisons que le premier ministre affirmait il y a deux semaines que nous ne permettrons jamais plus que l'on perde la maîtrise des finances publiques.

Monsieur le président, l'époque des dépenses excessives et des déficits chroniques est définitivement révolue. Soyons bien clair. Nous croyons, en principe, que la capacité de présenter un budget équilibré est un ingrédient essentiel et durable d'une stratégie efficace de croissance économique et de création d'emplois.

[Français]

La deuxième option qui s'offre aux Canadiens et aux Canadiennes est de s'attaquer à la dette nationale. En effet, le fardeau de la dette du Canada demeure très élevé. Ce fardeau nous impose des impôts plus élevés qu'ils ne devraient l'être et des services inférieurs à ce qu'ils devraient être. La mesure la plus pertinente de la dette est celle qui la met en relation avec la taille de notre économie.

• 1330

Cette mesure est le ratio de la dette au PIB, c'est-à-dire ce que nous devons en comparaison de ce que nous produisons. Plus le ratio est bas, plus la dette est facile à gérer.

En 1995-1996, notre ratio de la dette au PIB était de 74 p. 100. Pour l'exercice se terminant en mars dernier, le ratio, à 73,1 p. 100, était en baisse de façon sensible pour la première fois en plus de 20 ans.

[Traduction]

Le ratio de 73,1 p. 100 de la dette au PIB est en baisse de façon sensible pour la première fois en plus de 20 ans. Il est encore malgré tout beaucoup trop élevé.

Nous prenons l'engagement de réduire en permanence ce ratio. Notre stratégie continuera de faire preuve du sens des responsabilités financières: nous allons réduire la dette, tout en nous concentrant sur la croissance économique.

La troisième option proposée aux Canadiens est d'utiliser le futur dividende financier pour réduire les impôts et les taxes. Le fardeau fiscal au Canada doit être réduit et il le sera. Les Canadiennes et les Canadiens sont en droit de s'attendre à une baisse de leur fardeau fiscal, lorsque les finances du pays seront solidement rétablies. Et je tiens à les assurer que cette baisse sera mise en oeuvre. Mais là encore, nous avons le devoir de faire preuve de réalisme et d'honnêteté envers les Canadiens.

Il y a quatre ans, en raison de sa situation budgétaire, le pays était dans un cul-de-sac financier. Nous avons réussi depuis un redressement spectaculaire. Comme je l'ai déjà mentionné, il ne faudra toutefois pas s'étonner que le dividende financier sera peu élevé lorsqu'il deviendra réalité, du moins au cours des premières années. Par conséquent, une réduction importante des impôts ou des taxes maintenant risquerait, dès les premiers signes de ralentissement de l'économie, de replonger le pays dans une situation déficitaire—ou obligerait à sabrer dans des programmes essentiels. Cela n'aurait aucun sens. Par conséquent, nous sommes d'avis que tant que le dividende n'aura pas atteint l'ampleur permettant d'assurer une diminution significative du fardeau fiscal global, la stratégie la plus responsable sera d'offrir des allégements fiscaux ciblés là où ils sont le plus nécessaires.

[Français]

D'ailleurs, dans nos budgets précédents, grâce aux progrès qui ont été plus importants qu'on ne l'avait prévu dans les finances publiques, nous avons déjà entrepris des baisses d'impôt ciblées, par exemple en instaurant des mesures d'aide fiscales en faveur des étudiants, des personnes handicapées et des enfants de travailleurs à faible revenu.

Nous avons aussi abaissé les taux de cotisation à l'assurance-emploi chaque année depuis que nous sommes au pouvoir. À court terme, nous poursuivrons dans cette voie, mais il faudra aussi, dès que possible, aller plus loin et alléger le fardeau plus global des impôts de tous les Canadiens et Canadiennes. Ce faisant, la priorité sera d'offrir des réductions d'impôt aux personnes et aux familles à revenus faible et moyen.

[Traduction]

Cela m'amène à ce point que je considère comme fondamental dans l'exposé d'aujourd'hui—et il s'agit de la nécessité d'élargir le débat en cours, au-delà d'une vision étroite des choses. Certains ont en effet tendance à discuter de l'utilisation du dividende financier comme si l'augmentation des dépenses, la réduction de la dette publique ou la réduction des impôts et taxes étaient des fins en soi, sans égard aux besoins de la nation. Ce n'est pas là que le débat doit porter. Le débat doit porter sur les priorités nationales—sur la meilleure façon de bâtir une économie forte et une société forte, une économie qui offre à la fois possibilités et sécurité.

[Français]

Nous avons déjà dit que nous devons réduire le fardeau de la dette et le fardeau fiscal, et nous le ferons. La formule de répartition 50-50 énoncée par le gouvernement est une ligne directrice qui assure qu'il en sera ainsi dans le cours de notre mandat.

Toutefois, ceux qui pensent que la responsabilité du gouvernement doit se limiter exclusivement à la réduction de la dette et des impôts oublient que les investissements dans les soins de santé et l'éducation ainsi que dans l'innovation et la réduction de la pauvreté sont essentiels à la réalisation de la vision canadienne.

[Traduction]

S'opposer à des investissements stratégiques, qu'il s'agisse de mesures fiscales ciblées ou de nouvelles dépenses répondant à des besoins fondamentaux pour le pays, ce n'est pas seulement de la mauvaise politique sociale: c'est de la mauvaise théorie économique. Le défi est de trouver le juste équilibre. Ce que nous devons faire, c'est de nous assurer que le niveau de croissance que nous visons contribue à garantir le niveau de vie auquel les Canadiennes et Canadiens ont droit. Telle est notre priorité depuis le tout début.

• 1335

Elle tient à deux principes fondamentaux. Le premier a trait à nos valeurs fondamentales. Nous croyons dans ce pays au partage des risques et des avantages d'une citoyenneté commune. Nous croyons dans ce pays que certains droits fondamentaux sont plus importants que le privilège et le compte en banque; que l'équité et la compassion, loin d'être au second plan, constituent les pierres angulaires d'une société de droit.

Notre second principe découle de l'évaluation des besoins en infrastructures d'une économie prospère. Pour nous, des programmes comme les soins de santé, l'éducation ou le régime public de pensions ne sont pas un luxe. Ils reflètent nos valeurs et sont aussi économiquement nécessaires. Ils donnent aux Canadiennes et aux Canadiens un sentiment de sécurité qui leur permet de participer à l'économie en toute confiance.

En fait, la confiance des Canadiennes et des Canadiens dans les programmes dont ils dépendent n'est pas moins importante lorsque l'économie subit de profondes transformations. Cette réalité doit être prise en compte au moment de porter un jugement sur la pertinence d'investir, de réduire la dette ou de réduire les impôts.

Par exemple, notre système de soins de santé est l'un de nos plus grands atouts en tant que nation. Les principes sur lesquels repose le système, la qualité et l'accessibilité des soins en fonction des besoins et non de la richesse, symbolisent l'une des composantes essentielles de notre pays.

[Français]

C'est pourquoi, par exemple, nous allons présenter une loi afin d'augmenter de 11 à 12,5 milliards de dollars le montant minimum en espèces du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux versé aux provinces et aux territoires. Nous devons également placer au rang de priorités le versement de revenus de pension adéquats à nos aînés.

Notre système de revenus de retraite actuel a très bien fonctionné. Cependant, de nouvelles tendances démographiques et économiques vont bientôt le soumettre à des pressions considérables. C'est pourquoi il nous faut agir dès maintenant. Les mesures à prendre n'ont rien à voir avec l'état actuel des finances publiques au Canada. Elles ont tout à voir avec la santé de la société canadienne à long terme.

[Traduction]

Il est incontestable que le vieillissement de notre population et une croissance plus lente de notre population active menacent la viabilité à long terme de notre régime public de pensions. Ne pas tenir compte aujourd'hui de cette réalité reviendrait à répéter les erreurs du passé. Ce serait injuste envers les jeunes Canadiens qui sont en droit de pouvoir compter sur le système de revenu de retraite lorsque le moment sera venu. Ne rien faire aujourd'hui reviendrait à transférer aux générations futures un lourd fardeau. À notre point de vue, cela est tout à fait inacceptable. Nous avons un devoir: celui d'agir dès maintenant pour préparer l'avenir. Et c'est ce que nous faisons.

Nous avons déposé, il y a deux semaines, un projet de loi faisant suite à l'accord conclu entre les provinces et le gouvernement fédéral, qui assurera la viabilité financière à long terme du Régime de pensions du Canada, tout en le rendant plus équitable. Quant à la prestation aux aînés qui viendra par la suite, elle répondra à la nécessité de protéger les aînés, dont la majorité sont des femmes, qui n'ont pas gagné durant leur vie active un revenu suffisant pour bénéficier d'une retraite adéquate. Enfin, dès que la situation le permettra, l'aide fiscale fournie aux Canadiennes et aux Canadiens qui placent leurs épargnes dans les REER ou des RPA sera améliorée.

Notre réforme du système de revenu de retraite vise un objectif et un seul: la sécurité économique. Il s'agit de veiller, en agissant dès maintenant, à ce que les aînés de demain disposent d'un revenu adéquat au moment de leur retraite et d'assurer aux aînés d'aujourd'hui la protection de leur pension.

La nécessité de protéger les systèmes de soins de santé et d'éducation représente un bel exemple d'un enjeu qui requiert l'élargissement du débat sur les priorités nationales. En outre, la question de la responsabilité pour l'économie d'engendrer non seulement la croissance mais également de bons emplois donne une orientation encore plus précise à ce débat.

• 1340

[Français]

Ceux qui soutiennent que la réduction de la taille des gouvernements constitue une fin en soi font le pari que les forces du marché peuvent être seules garantes du potentiel économique du pays. Nous croyons fermement dans la libre entreprise, mais nous ne croyons pas qu'il soit possible de maintenir une société et une économie fortes en faisant preuve de laisser-aller. C'est dans ce contexte que la nécessité d'élargir le débat sur le dividende financier devient encore plus évidente.

[Traduction]

Notre économie, comme beaucoup d'autres, connaît depuis un certain temps des transformations profondes, qui vont en s'accélérant. Ces transformations offrent de vastes possibilités nouvelles: de nouveaux secteurs d'activité, de nouveaux marchés, de nouvelles technologies et de nouvelles techniques. Mais ces transformations ont également fait naître chez plusieurs un sentiment profond d'angoisse ou de peur. Les Canadiens savent que nous ne pouvons nous isoler du reste du monde, pas plus que nous ne pouvons stopper le changement technologique. Mais ils craignent qu'eux-mêmes ou que leurs enfants ne soient dépassés, victimes d'un phénomène sur lequel ils n'ont aucune prise.

L'expansion économique ne fait pas que des gagnants. Il y a des choses que le libre marché ne peut accomplir et ne réalise pas. C'est là que le gouvernement peut et doit intervenir. Le marché ne peut à lui seul fournir l'infrastructure moderne qui est nécessaire si nous voulons que le changement soit à notre avantage, au lieu de nous desservir. Le marché ne se préoccupe pas des laissés-pour-compte.

L'une de nos principales tâches est justement de combler les lacunes du marché. Nous devons favoriser une croissance économique qui génère de bons emplois. Bref, notre priorité économique à l'échelle nationale doit être de mettre en place des assises durables pour l'emploi dans l'économie actuelle et l'économie de demain.

[Français]

Nous savons qu'il n'y a pas de réponse facile, mais nous savons également qu'il y a des secteurs prioritaires où nous devons agir. L'une de ces priorités est de rendre accessibles au plus grand nombre de Canadiens et de Canadiennes les possibilités d'acquérir toutes les compétences et toutes les connaissances nécessaires pour avancer; les raisons en sont évidentes. Contrairement à ce qui avait cours dans le passé, alors que la réussite économique dépendait de la disponibilité des ressources naturelles, cette réussite est aujourd'hui de plus en plus fonction de l'excellence des ressources humaines, car les idées et l'esprit d'entreprise sont plus que jamais le gage d'un revenu plus élevé et d'une meilleure qualité de vie.

La nécessité d'acquérir des compétences supérieures ne se limite pas seulement au secteur de la haute technologie. Tout le monde, qu'ils ou elles soient mécanicien, camionneur ou vendeur, est maintenant partie prenante à l'économie du savoir. Toutes les industries ont augmenté progressivement leurs pratiques et leurs exigences en matière de compétence. Il n'est donc pas étonnant que quatre travailleurs sur dix craignent que leurs compétences deviennent désuètes d'ici dix ans ou que le tiers des travailleurs craignent qu'elles ne le soient déjà.

[Traduction]

Le défi de l'apprentissage, de la formation et du perfectionnement professionnel ne visent pas uniquement à fournir les travailleurs dont l'économie a besoin. L'enjeu, c'est également de créer la société que les Canadiens et les Canadiennes méritent.

Les dernières années ont fait la preuve que, si le changement technologique est favorable à la croissance, il peut aussi engendrer de profondes inégalités. Et l'histoire récente nous apprend également que l'apprentissage et la formation sont les meilleures armes dont on dispose pour lutter contre ces inégalités. Ils réduisent le phénomène d'exclusion de l'économie. Ils élargissent la participation. Ils ouvrent des horizons nouveaux. Nous jugeons inquiétante la perspective d'un écart croissant entre les riches et les pauvres. Monsieur le président, l'acquisition de connaissances et de compétences est l'arme la plus puissante pour lutter contre les inégalités.

En fait, l'éducation est devenue l'infrastructure suprême sur laquelle tout le reste repose. La croissance est sans doute essentielle à la vigueur de l'économie, mais les connaissances et les compétences sont essentielles à la croissance et elles sont également indispensables à une société plus juste.

L'enjeu, en fin de compte, n'est pas d'ordre économique mais humain—donner aux gens la possibilité de réaliser tout leur potentiel. Ouvrir des horizons nouveaux, susciter de nouvelles aspirations. Donner aux Canadiens et aux Canadiennes les moyens de réaliser leurs rêves.

[Français]

Au Canada, nous avons besoin de nouveaux partenariats. L'éducation est du ressort des provinces, et nous respectons entièrement cette réalité. Mais du même souffle, nous reconnaissons d'emblée que le besoin d'apprendre ne se limite pas à la salle de cours; ce n'est pas uniquement pour les enfants de 6 à 18 ans et selon un horaire strict de 9 heures à 15 heures. Au contraire, apprendre est un défi qu'il faut relever dès la naissance et durant toute sa vie.

• 1345

Voilà pourquoi le secteur privé, les organismes de bienfaisance et tous les ordres de gouvernement font face à de tels enjeux des intervenants de première ligne. Nous devons tous collaborer afin de relever le défi d'une économie mondiale en transformation rapide.

[Traduction]

Qu'est-ce que cela signifie concrètement? Cela signifie que les gouvernements doivent bien choisir leurs priorités et que l'utilisation du dividende financier doit être déterminée en fonction de ces priorités. Le gouvernement a la responsabilité d'aider le plus grand nombre de Canadiens et de Canadiennes à participer à la vie économique. Le gouvernement a le devoir de venir en aide aux laissés-pour-compte. En termes simples, le gouvernement a le devoir de veiller à ce que nos citoyens puissent non seulement survivre dans une économie en évolution, mais qu'ils aient aussi les moyens de réussir.

Tout d'abord, nous devons nous concentrer sur la petite enfance—l'étape la plus cruciale dans la vie d'un être humain, la période où il développe sa capacité d'apprendre. C'est pourquoi le nouveau partenariat que nous sommes en train d'établir avec les provinces dans l'intérêt des enfants du Canada, est si important. Notre objectif est de mettre fin à la situation où les parents qui veulent réintégrer le marché du travail doivent en payer le prix sous la forme d'une détérioration de la situation de leurs enfants—parce qu'ils perdent des services utiles qui leur sont fournis au titre de l'aide sociale. Aller sur le marché du travail devrait permettre d'améliorer son sort, et non l'inverse.

[Français]

C'est pourquoi, comme l'annonçait le budget de 1997, nous avons accordé des fonds supplémentaires de 850 millions de dollars au titre de la prestation fiscale pour enfants. Tel que confirmé par le premier ministre, nous allons également établir, de concert avec les provinces, un calendrier pour accroître cette contribution d'une autre somme de 850 millions de dollars.

[Traduction]

Nous devons ensuite faire tout ce qui est en notre pouvoir pour améliorer l'accès aux possibilités d'apprentissage et de recyclage. Pour cela, nous devons agir sur quatre fronts: d'abord encourager l'épargne pour les études et la formation; deuxièmement, fournir une aide financière à ceux et à celles qui sont aux études; troisièmement, aider les étudiants et les étudiantes à gérer un endettement plus lourd; quatrièmement, offrir des engagements à l'apprentissage permanent.

Nous avons déjà commencé à agir dans ces domaines, comme en témoignent nos budgets précédents. Par exemple, nous avons entrepris de rendre les régimes enregistrés d'épargne-études plus souples et plus attrayants. Nous avons augmenté d'un tiers l'aide fiscale à l'étudiant. Enfin, nous avons pris des mesures pour venir en aide aux étudiants qui ont du mal à gérer leur fardeau d'endettement. Cependant, il est évident que nous pouvons et que nous devrons faire beaucoup plus. C'est la raison pour laquelle le premier ministre a annoncé la création du Fonds de dotation des bourses d'études du millénaire, un investissement rendu possible grâce à des résultats financiers plus favorables que prévus. Le Fonds sera administré de manière totalement indépendante du gouvernement. Le Fonds récompensera chaque année l'excellence sur le plan scolaire et apportera un soutien à des milliers de Canadiens et de Canadiennes à revenu faible ou moyen, de toutes les parties du pays. Il ne saurait y avoir meilleur investissement dans leur avenir—ou dans le nôtre.

Le soutien offert à l'industrie canadienne afin qu'elle exploite à fond ses possibilités d'être chef de file dans l'économie moderne, est un autre exemple d'utilisation possible du futur dividende financier. Si le savoir est l'un des côtés de la médaille, l'autre est certainement l'innovation—il s'agit de favoriser la mise en place de toute l'infrastructure des idées et de l'information dont dépendent la croissance économique et l'emploi.

Les États-Unis ont bénéficié—et bénéficient encore—d'une période extrêmement longue de forte croissance économique, sans pour autant subir les tensions inflationnistes qui apparaissent normalement dans cette phase du cycle économique. Les opinions sont partagées quant aux causes de ce phénomène. Certains considèrent que, jumelée à la mondialisation, la mise en oeuvre des nouvelles technologies entraîne une mutation du modèle économique traditionnel. Que cela soit vrai ou non, une chose est certaine: les pays qui seront des chefs de file dans la création et l'utilisation des nouvelles technologies offriront à leurs citoyens un avenir économique beaucoup plus favorable. Cette question ne présente pas un intérêt purement théorique, loin de là. En effet, c'est la clé d'une progression constante des revenus et d'une amélioration durable de l'emploi.

• 1350

[Français]

Être un chef de file en matière d'innovation, ce n'est pas uniquement l'affaire de quelques spécialistes. Il faut absolument se rendre compte que, de l'agriculture à l'aquaculture, de l'exploitation minière à la fabrication, l'innovation est devenue et restera la pierre angulaire des nouveaux emplois. C'est la raison pour laquelle, par exemple, nous avons établi la Fondation canadienne pour l'innovation afin de mettre en place des installations de qualité mondiale dans nos hôpitaux et nos universités, des installations qui nous permettront de garder chez nous nos meilleurs chercheurs et chercheuses.

[Traduction]

La croissance fondée sur le savoir offre la perspective d'offrir à l'ensemble du pays des chances égales de tirer profit des possibilités. En effet, grâce aux moyens de communication, la distance n'a plus guère d'importance, tandis que l'apprentissage et les compétences deviennent la plus importante matière première; en ce sens, notre but ne doit être rien de moins que de transformer la culture économique du Canada en culture axée sur la technologie. Cela veut dire que la synergie entre les différents volets de la stratégie que je viens d'exposer est ce qu'il y a de plus important.

Un pays disposant de la meilleure culture d'apprentissage au monde échouera s'il n'offre pas les possibilités de développer et d'appliquer les compétences nouvelles dans un milieu de travail innovateur. Et un pays disposant de l'infrastructure nécessaire pour devenir un chef de file mondial en matière d'innovation ne réussira pas s'il n'offre pas un appui très soutenu à sa population dans l'acquisition et le développement de compétences.

Voilà pourquoi nous visons—et nous sommes déterminés à bâtir en considérant le dividende financier à venir—une société reposant à la fois sur les compétences et l'innovation, où ces deux éléments se renforcent mutuellement, afin de créer et de maintenir de bons emplois, conformément à notre engagement de préserver la qualité de vie des Canadiens et Canadiennes.

[Français]

Notre objectif doit être de faire du Canada non pas un simple participant à l'économie moderne, mais un chef de file, un pays qui permet à ses citoyens d'avoir accès au plus haut niveau de vie et au plus large éventail de possibilités qui soient. Tel a été notre objectif dès le départ.

[Traduction]

Ce qui est nouveau aujourd'hui, ce n'est donc pas notre stratégie, mais la vigueur avec laquelle nous poursuivons cette stratégie collectivement en tant que nation. Après avoir passé les dix dernières années à payer pour la consommation passée, nous voici enfin en mesure d'accorder une importance beaucoup plus grande aux investissements dans notre avenir.

Il ne faudrait pas sous-estimer notre volonté de mener à bien ce programme d'action. Si les Canadiens et Canadiennes ont fait preuve de détermination dans la réduction du déficit, ce n'est certainement pas pour se croiser les bras une fois que le déficit a été éliminé. En fait, notre volonté de débarrasser la nation de son fardeau budgétaire trouvait sa source, dans une large mesure, dans la conviction que les Canadiens et Canadiennes devaient retrouver la capacité de forger leur propre destin.

C'est pour cette raison que j'ai déclaré, au début de cet exposé, que le débat sur l'utilisation du dividende financier ne devait pas se limiter aux options des nouvelles dépenses, de la réduction de la dette, et de la diminution des impôts ou des taxes, comme s'il s'agissait là d'une fin en soi. La décision doit être prise à la lumière des priorités nationales.

Et ces priorités sont claires.

Premièrement, nous devons préserver et renforcer les programmes auxquels tous les Canadiens et Canadiennes sont profondément attachés—tels notre système de santé, nos programmes d'éducation et nos régimes de pension.

Deuxièmement, nous devons travailler ensemble à l'amélioration des possibilités d'apprentissage et de formation offertes aux Canadiens et Canadiennes, en mettant l'accent sur leur accessibilité et sur la satisfaction du large éventail de besoins qui commencent dès la petite enfance et se prolongent tout au long de la vie active.

[Français]

Troisièmement, nous devons favoriser et saisir les occasions de faire du Canada un chef de file de l'économie moderne axée sur le savoir. Enfin, nous devons continuer de développer une nouvelle éthique de partenariat fondée sur un sens profond de l'intérêt national.

[Traduction]

Monsieur le président, j'en arrive à la fin de mon exposé que je résumerai comme suit.

Certains anticipent les discussions à venir comme un débat de nature financière seulement. Ce n'est pas le cas. C'est un débat qui porte sur les valeurs.

Ensuite, nous avons énoncé nos priorités. Certains peuvent prétendre qu'elles sont en opposition avec l'objectif du meilleur bilan et des taux d'imposition les plus bas possible. Ils se trompent. Une économie forte requiert une société forte.

• 1355

Aucun pays n'est mieux placé que le Canada. Certains pays disposent de ressources naturelles abondantes, d'autres ont une capacité technologique impressionnante, tandis que d'autres encore possèdent des ressources humaines très performantes. Nous avons ces trois atouts. Et en plus, nous avons nos valeurs fondamentales. Nous sommes conscients que le redressement des finances publiques n'est que le début, et non la fin, de la quête d'une vie meilleure pour tous les Canadiens et toutes les Canadiennes. Nous tendons la main aux plus démunis, tout en marchant vers l'avenir. Nous croyons au plus haut point que la recherche de la prospérité ne doit pas se faire au détriment de l'équité.

[Français]

Certaines personnes soutiennent que le Canada est un petit pays aux possibilités limitées. Nous croyons, au contraire, que le Canada est un grand pays dont les possibilités sont illimitées.

[Traduction]

Certaines personnes soutiennent que le Canada est un petit pays aux possibilités limitées. Nous croyons au contraire que le Canada est un grand pays dont les possibilités sont illimitées. Que personne ne doute de notre volonté. Que personne ne doute que les Canadiens et Canadiennes ont la capacité de relever tous les défis. Que personne ne doute que le Canada est promis à un brillant avenir.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur le ministre.

Nous passons maintenant aux questions et réponses. Nous commençons par des tours de cinq minutes, dont le premier, avec M. Manning.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Merci, monsieur le président. Je tiens à féliciter le ministre, le président et le comité d'avoir décidé de tenir cette première séance en Colombie-Britannique. Il y a ici de nombreux députés de la Colombie-Britannique. Je pense qu'ils savent qu'au XXIe siècle, la Colombie-Britannique sera la deuxième plus importante province du pays, que le commerce avec la région du Pacifique est deux fois plus important que celui de l'Atlantique et que la Colombie-Britannique pourrait être le huitième tigre du Pacifique, si ses niveaux de taxation étaient concurrentiels. Je pense que cette province mérite la reconnaissance que vous lui accordez. Nous espérons qu'elle poursuivra sur sa lancée.

Avant de questionner le ministre, j'aimerais faire deux brèves observations. Tout d'abord, le ministre a souligné les aspects réjouissant du rendement de l'économie et de la performance financière du gouvernement, particulièrement au chapitre de la réduction du déficit, des taux d'intérêt et de la croissance accrue. Nous trouvons aussi que c'est fort encourageant. Il n'est pas étonnant que le ministre insiste là-dessus, comme c'est son droit. Mais ensuite, en tant qu'opposition officielle, nous nous devons d'insister sur les faiblesses et les lacunes de l'économie et de la performance financière du gouvernement et de demander des réponses aux questions auxquelles l'énoncé du ministre n'a pas répondu de manière satisfaisante.

Je vais poser quatre questions au ministre. Je vais les poser l'une à la suite de l'autre et il pourra répondre de manière approfondie à l'une d'entre elles ou d'une manière générale, à toutes. Je suis persuadé qu'on va en parler pendant des mois encore. Elles se rapportent toutes au bien-être social et économique des Canadiens. Nous convenons qu'il s'agit là de notre objectif ultime. Nos questions portent sur la façon d'atteindre cet objectif.

La première porte sur la dette. Vous avez une dette fédérale de 590 milliards de dollars, dont 25 p. 100 sont détenus par des étrangers; ce sont les intérêts versés sur cette dette qui affaiblissent le coeur même de nos programmes sociaux. Où sont les objectifs concrets, les stratégies et les mesures précises visant à réduire le fardeau de la dette des Canadiens et, par conséquent, à stabiliser notre capacité de financer nos programmes sociaux?

La deuxième question porte sur l'emploi. En vérité, le nombre d'emplois créés l'an dernier, soit 280 000, est tout à fait insuffisant quand on considère nos besoins: les besoins des 1,4 million de chômeurs, des deux à trois millions de sous-employés et du 20 p. 100 des jeunes qui sont sans emploi. Où est la nouvelle stratégie pour l'emploi? On ne voit ici que du réchauffé. Où sont les objectifs, les mesures qui iront au-delà de ce que le gouvernement a fait jusqu'ici, afin de nous permettre d'espérer davantage d'emplois? Nous voulons deux ou trois fois plus de création d'emplois que ce qu'on nous a donné au cours des derniers mois.

La troisième question concerne les impôts. Le ministre a fait abstraction du fait que les niveaux d'impôt sont tout simplement trop élevés. Il a dit que la situation du gouvernement fédéral était la meilleure parmi tous les gouvernements du G7, mais il a omis de mentionner que le contribuable se trouvait dans la pire situation de tous les contribuables du G7. Nos niveaux d'impôt sur le revenu des particuliers dépassent de 56 p. 100 la moyenne qu'on retrouve chez nos partenaires du G7, et cette situation élimine des emplois, nuit à la motivation et détruit les rêves.

• 1400

Ma troisième question est donc la suivante: concrètement, quels sont les objectifs, les stratégies et les mesures en vue d'apporter un allégement fiscal?

Nous voyons dans ce document, comme nous l'avons vu dans le discours du Trône... Les dix dernières pages contiennent essentiellement des propositions traitant de ce qui est appelé des investissements stratégiques, et je sais que c'est la nouvelle expression utilisée par Ottawa pour parler des dépenses. Où sont les 10 pages sur les mesures d'allégement fiscal ou de réduction de la dette ou sur certaines de ces autres questions?

Enfin, ma dernière question, monsieur le président—et je sais que mon temps de parole s'effrite...

Le président: Monsieur Manning, le ministre aura 45 secondes pour répondre.

M. Preston Manning: Très bien. Cela lui donnera beaucoup de matière à réflexion.

Quatrièmement, une fois qu'on aura maîtrisé le déficit, la chose facile à faire consiste à revenir aux dépenses et aux impôts, pour en faire la toute première priorité. C'est encore ce que nous voyons dans le discours du Trône et également dans ce document. Ma question est donc la suivante: Où peut-on voir que l'on rejette les dépenses et les impôts comme principales priorités du gouvernement du Canada pour faire de la réduction de la dette et des allégements fiscaux les plus grandes priorités afin d'assurer la création d'emplois et la sécurité sociale?

Nous serons heureux d'entendre les réponses du ministre.

L'hon. Paul Martin: Comme je l'ai dit au tout début, je suis moi aussi ravi d'être ici en Colombie-Britannique. Je me dois peut-être de signaler au chef du Parti réformiste que lorsque j'ai prononcé un discours l'an dernier ici à Vancouver, la ville où l'on a créé l'horloge de la dette, j'ai été le premier ministre des Finances depuis extrêmement longtemps, peut-être depuis la création de l'horloge de la dette, à voir l'horloge ralentir, et j'ai même pu leur dire très clairement que je m'attendais, lors de mon retour ici, à voir l'horloge effectivement s'arrêter.

Je dois dire qu'en écoutant les questions du chef de l'opposition, je me demande s'il ne les a pas rédigées avant mon exposé.

Le fait est que pour être en mesure de réduire la dette, il faut évidemment avoir un excédent. De fait, une chose est devenue très claire, c'est que nous aurons un excédent, pour la première fois depuis près de 25 ans, et qu'en ce qui concerne la dette négociable, comme on le verra dans le rapport financier annuel publié aujourd'hui, au cours des cinq premiers mois de cette année, nous avons réussi à rembourser, et le chiffre peut fluctuer, 11 milliards de dollars de notre dette négociable.

Je suppose donc que la réponse à votre première question est la suivante: Nous avons bien fait depuis le début de préférer être jugés d'après nos résultats plutôt que d'après nos plans, et les résultats montrent sans aucun doute que nous sommes en mesure, et que nous continuerons d'être en mesure, de rembourser notre dette négociable.

Je me dois de corriger une erreur du chef de l'opposition: nous n'avons pas le pire dossier des pays du G7 en matière de fiscalité. Ce n'est tout simplement pas...

M. Preston Manning: En ce qui concerne l'impôt sur le revenu des particuliers.

L'hon. Paul Martin: Non, ce n'est pas statistiquement exact.

Quoi qu'il en soit, j'ai également déclaré qu'à mon avis, les impôts devraient diminuer et que nous avons l'intention des les réduire. Je répète qu'ils diminueront précisément en raison des mesures que nous avons pu prendre pendant notre premier mandat et des mesures que nous continuerons de prendre.

Je suis un peu surpris d'entendre le chef de l'opposition critiquer des initiatives comme les avantages fiscaux à l'intention des étudiants et des personnes handicapées, ou même la prestation fiscale pour enfants. J'aurais pensé qu'il les approuvait, mais quoi qu'il en soit, ce sont ses propres décisions.

En ce qui concerne la création d'emplois, tout cet exposé, et même tout ce que nous faisons est axé vers la création d'emplois. Nous disons cependant très clairement que la création d'emplois à l'aube du prochain siècle se fera d'une manière très différente de ce qui s'est fait au cours de la deuxième moitié du présent siècle. Nous ne voulons pas répéter les erreurs commises par les gouvernements au cours des dix dernières années, parce qu'ils se sont concentrés simplement sur l'économie d'hier, au lieu de regarder vers l'économie de demain. Le gouvernement a un rôle positif à jouer dans l'éducation des Canadiens et ce rôle est de favoriser la R-D. C'est ce que nous avons fait et nous y voyons un investissement intelligent, comme c'est le cas de la réduction de la dette et des impôts.

• 1405

Le président: Merci, monsieur le ministre.

Nous passons maintenant à M. Loubier.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le président, j'espère que vous m'accorderez quelques minutes supplémentaires à cause de la longueur de l'intervention du chef de l'opposition officielle.

Monsieur le ministre, bienvenue au Comité des finances. Ne le prenez pas personnellement, comme on dit chez nous, mais permettez-moi de remettre en cause l'intégrité professionnelle de votre équipe.

De telles prévisions de chiffres relatives au déficit, je n'ai jamais vu ça. Je trouve que c'est une aberration mentale. Par exemple, en mars 1996, vous aviez prévu un déficit de 24,3 milliards de dollars, objectif qui était somme toute louable à ce moment-là, mais lors de votre budget de 1997, vous parliez de 19 milliards de dollars et vous en arrivez finalement à moins de 10 milliards de dollars.

Je me permets de vous rappeler les questions que nous vous posions à la Chambre des communes en mars dernier au sujet d'un déficit de quelque 10 milliards de dollars. Vous nous aviez pratiquement traité de twits, de gens incompétents, disant qu'on garrochait des chiffres en l'air, et maintenant vous arrivez avec un chiffre semblable à la prévision que nous avions avancée. Entre le budget de mars 1996 et aujourd'hui, monsieur le ministre, vous avez fait une petite erreur de prévision de l'ordre de 63 p. 100.

Alors, de deux choses l'une: ou bien vous et votre équipe êtes totalement incompétents en matière de prévisions, ou bien vous jugiez, un peu avant la campagne électorale, qu'il était très mal venu de faire preuve de transparence et d'intégrité dans le débat concernant les prévisions de déficit afin d'éviter justement tout débat entourant les compressions budgétaires draconiennes que vous aviez imposées aux plus démunis de la société, aux personnes malades et aux chômeurs.

Alors, voici ma première question. Est-ce que, oui ou non, vous avez caché délibérément le vrai visage des finances publiques quelques semaines avant le déclenchement des élections pour éviter tout débat concernant le véritable état des finances publiques durant la campagne électorale ?

Ma deuxième question porte sur les compressions budgétaires. Monsieur le ministre, avec ce que vous nous présentez, vous me faites penser à un vieux dicton populaire, d'origine africaine, je crois, qui dit que «la sagesse des crocodiles consiste à verser des larmes sur ceux qui les croquent». C'est exactement ce que vous faites ce matin, monsieur le ministre.

Vous semblez vous pencher avec une grande compassion sur la cause des plus démunis et des enfants pauvres. Je me permets de préciser que depuis six ans, le taux de pauvreté chez les enfants a augmenté de presque 35 p. 100. En 1995, on estimait l'incidence de la pauvreté à quelque 20 p. 100, soit 1,5 millions d'enfants. Vous en êtes en grande partie responsable. Pourquoi?

C'est parce qu'en même temps que vous nous annoncez des mesures de l'ordre de quelques centaines de millions de dollars par année pour soulager les gens pour lesquels vous avez manqué totalement de compassion au cours des dernières années, vous poursuivez votre plan de compressions budgétaires, qui va résulter d'ici la fin de votre mandat en des compressions totalisant 42 milliards de dollars dans les programmes sociaux, c'est-à-dire les programmes d'aide à l'intention des enfants pauvres et de leurs parents. On parle de 5 millions de pauvres au Canada. Les compressions budgétaires touchent aussi le réseau de la santé et s'attaquent aux étudiants. Toutes ces compressions représenteront 42 milliards de dollars d'ici la fin du deuxième mandat libéral.

Parviendrez-vous, avec ces quelques centaines de millions de dollars par année, à soulager ces gens et atténuer ces 42 milliards de dollars de compressions budgétaires cumulatives? Le ministre est-il en train de nous dire qu'il va poursuivre son plan de compressions et que tout ce qu'il nous a présenté ce matin en matière de compassion pour les plus démunis, ce n'est que de la frime? C'est ma deuxième question.

L'hon. Paul Martin: Merci, monsieur Loubier. Il est regrettable que, dans le cadre d'un débat ou d'une discussion autour d'une table où nous avons des sujets très importants à traiter, vous vous trouviez dans l'obligation de faire des attaques personnelles au lieu de vraiment débattre du fond des différences d'opinions que nous pouvons avoir.

Est-ce par manque de substance? Ça, je vous le laisse. Permettez-moi simplement de dire que j'admire au plus haut point l'intégrité professionnelle de tous les fonctionnaires, qu'ils soient du ministère des Finances ou de tout autre palier gouvernemental, au provincial ou au fédéral.

• 1410

Deuxièmement, si j'avais su que le déficit serait de 8,9 milliards de dollars, je peux vous assurer que je l'aurais annoncé en pleine campagne électorale; ce n'est pas quelque chose à cacher.

Quant à la différence entre les 16 milliards de dollars que je prévoyais en mai et les 9,6 milliards de dollars éventuels dont font état les statistiques officielles pour l'année, qui tiennent compte des ajustements de fin de l'année, c'est du jamais vu. Ça ne s'est jamais vu, du moins pas depuis très longtemps, que les ajustements soient positifs et non pas négatifs. Je n'allais certainement pas me soustraire à l'historique des trois à cinq dernières années. Je l'avais dit très clairement: on verra quel sera le résultat.

Pourquoi les ajustements ont-ils été positifs et non négatifs? C'est parce que le gouvernement a bien géré son affaire, et je dois en féliciter mes collègues et les ministres de tous les autres ministères qui se sont serré la ceinture et ont atteint ces résultats.

Deuxièmement, je me réjouis de ce que la croissance économique soit forte à ce point. Nous ne sommes pas le seul gouvernement à connaître une telle croissance. Les États-Unis ont réduit de façon substantielle leur déficit et aussi connu une croissance économique plus forte que ce qu'il avait été prévu. La même chose s'est produite dans plusieurs provinces, et pas seulement au gouvernement fédéral. Nous sommes certainement très fiers du contrôle des dépenses.

D'autre part, je suis très heureux de savoir que vous appuyez à 100 p. 100 nos démarches en vue d'aider les étudiants et j'espère que vous continuerez de le faire. Comme vous le savez, nous venons de rajouter 6 milliards de dollars, échelonnés sur une période de cinq ans, aux transferts aux provinces pour la santé et l'éducation. C'est en quelque sorte une dépense de dividende. Et, comme vous le savez encore, le premier ministre a annoncé qu'au cours de notre mandat, une autre somme de 850 millions de dollars sera accordée au titre de la prestation fiscale pour enfants, justement parce que nous voulons vraiment aider ceux qui ne sont pas capables de s'aider, c'est-à-dire les enfants pauvres de notre pays.

[Traduction]

Le président: Merci, monsieur le ministre

La parole est maintenant...

[Français]

M. Yvan Loubier: Tout à l'heure on a accordé au chef de l'opposition deux minutes supplémentaires, tandis que je n'ai disposé que de 30 secondes supplémentaires. J'aimerais donc continuer de poser mes questions au ministre.

[Traduction]

Le président: Monsieur Loubier, je vous rappelle à l'ordre. M. Manning a eu huit minutes quatre secondes. Vous avez eu sept minutes cinquante-six secondes. Je pense que c'est assez égal.

Monsieur Riis.

M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): Merci beaucoup, monsieur le président.

Monsieur le ministre, c'est merveilleux de vous voir ici en Colombie-Britannique, et comme tous les autres l'ont dit, de vous voir nous reconnaître et apprécier la Colombie-Britannique. Bon nombre d'entre nous ont connu cette région pendant toute leur vie, mais c'est bien de vous voir ici.

J'essaie de prévoir ce que les journaux écriront et je pense que ce qu'on verra dans les pages financières est assez clair. On sera heureux de ce que vous avez dit, monsieur le ministre. Les marchés monétaires seront beaucoup plus heureux. Les banquiers et les porteurs d'obligations dont vous avez parlé tout à l'heure seront heureux.

Vous avez employé une expression merveilleuse dans votre exposé en disant que le gouvernement s'est départi de sa carte de crédit. C'est une bonne nouvelle. Je n'ai cependant pas pu m'empêcher de me demander si le gouvernement avait réussi à se départir de sa carte de crédit parce qu'il avait demandé à d'autres de prendre de nouvelles cartes de crédit. Je pense aux étudiants en particulier. Lorsqu'ils obtiennent leur diplôme, ils ont un endettement moyen de 25 000 $ avant même de commencer à travailler. Je sais qu'il y aura dans trois ans un fonds pour accorder des bourses et cela permettra d'aider d'autres étudiants, mais j'aimerais vous entendre dire qu'il y aura de bonnes nouvelles pour ceux dont je parle.

Deuxièmement, je vais emprunter une question de M. Manning. Je n'ai pas l'habitude de le faire, mais il a soulevé une excellente question au sujet des objectifs. Je pense à ce que les 1,4 million de personnes qui n'ont même pas d'emploi vont penser de vos commentaires, ou à ce qu'en penseront les trois millions de personnes qui ont un emploi à temps partiel ou qui doivent occuper deux ou trois emplois pour essayer de subvenir aux besoins de leur famille.

• 1415

Je me demande pourquoi vous ne profitez pas de l'occasion—un exposé très optimiste, contenant de très bonnes nouvelles sur le plan économique et financier—pour fixer des objectifs précis quant à la réduction du chômage, tout comme nous fixons des objectifs pour presque toutes les autres questions. Comme vous l'avez dit, nous avons atteint les objectifs fixés—nous les avons même dépassés. Pourquoi ne pas fixer de tels objectifs pour les niveaux de chômage, par exemple, sur une période de deux ans, afin que nous ayons un but précis et que dans deux ans, nous sachions dans quelle mesure nous avons réussi, c'est-à-dire que nous puissions mesurer les résultats obtenus?

Encore une dernière question, monsieur le ministre. Nous avons gagné la guerre du déficit, essentiellement. Vous avez dit que les banquiers et les porteurs d'obligations n'étaient les héros. Ils ont profité de cette guerre. Cependant, les véritables héros sont certainement les gens qui ont payé le prix ultime—ils ont payé un prix extrêmement élevé sur le plan personnel: les gens qui sont sur les listes d'attente pour avoir accès à un lit d'hôpital, les 1,5 millions d'enfants qui vivent dans la pauvreté aujourd'hui, les sans-emploi, les étudiants endettés jusqu'au cou, les 10 000 personnes par mois qui doivent déclarer une faillite personnelle ou commerciale... je pourrais continuer cette liste indéfiniment.

Votre exposé va faire la joie des marchés financiers, monsieur le ministre. Mais que pouvez-vous dire pour réconforter les vrais héros de cette guerre contre le déficit?

Plus précisément, je me reporte au mois dernier, quand j'étais à Kamloops. Je sais que vous connaissez bien cette ville, monsieur le ministre. C'est une petite ville. Pourtant, au cours des trois dernières semaines, 1 300 personnes ont dû se rendre à la banque d'aliments de Kamloops, dont près de 400 enfants.

Donnez-nous de bonnes nouvelles, des nouvelles encourageantes, je vous en prie, hormis ce que vous avez déjà dit.

L'hon. Paul Martin: Je vous remercie beaucoup de vos questions, monsieur Riis. Vous avez raison. Je connais très bien la Colombie-Britannique. J'ai passé beaucoup de temps ici. Et je connais effectivement très bien Kamloops. J'y ai passé beaucoup de temps. De fait, j'y suis allé pendant la dernière campagne électorale.

Vos questions sont fort à propos. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle il s'agit d'un budget rempli de bonnes nouvelles pour un grand nombre de Canadiens. Je dis cela parce que la réduction du déficit n'a jamais été pour nous une fin en soi. C'est le moyen d'arriver à des fins plus importantes, c'est-à-dire délester les jeunes de l'immense fardeau de la dette qui pèse sur eux, réduire les impôts et investir dans ce qui compte pour la population.

C'est pourquoi au cours de la dernière campagne électorale, le premier ministre a annoncé qu'il allait faire passer les paiements de transfert aux provinces de 11 à 12,5 milliards de dollars. C'est pourquoi, par exemple, il a pu annoncer que la prestation fiscale pour enfants allait être doublée.

Ce que le Canada a dû faire, c'est se soustraire aux diktats des banquiers et du marché pour être en mesure de répondre aux besoins de la population. Nous y sommes maintenant prêts et c'est cela la bonne nouvelle.

Il faut poursuivre dans cette voie, celle de la responsabilité financière, de manière à ne jamais plus tomber dans cette ornière tout en étant en mesure d'investir pour répondre aux besoins de la population.

En ce qui concerne l'établissement d'objectifs en matière de création d'emplois, à ce que je sache, même la Saskatchewan sous la conduite d'un gouvernement néo-démocrate ne le fait pas. À ce que je sache, la Colombie-Britannique non plus.

Il y a une raison pour laquelle les gouvernements ne le font pas. L'emploi nous préoccupe tous. En limitant les dépenses et en déterminant notre marge de manoeuvre, il est possible de réduire le déficit. J'espère sincèrement qu'avec l'aide des provinces et du secteur privé la nation pourra consentir l'effort nécessaire à la réduction du déficit, après quoi nous serons en mesure d'intervenir.

J'aimerais prendre quelques instants pour répondre à la dernière question de M. Riis parce que je suis tout à fait d'accord avec lui. Je parle de la situation des étudiants.

Si on examine l'économie, la nécessité d'avoir des compétences, de la formation, il est certain que de se pencher sur l'endettement des étudiants, sur les moyens d'aider les parents à économiser pour l'instruction... Nous sommes sur la même longueur d'ondes que vous. C'est pourquoi, ces dernières années, même aux prises avec un déficit, nous avons beaucoup fait pour venir en aide aux étudiants, et nous voulons continuer à le faire. Le fonds du millénaire du premier ministre, le fonds de bourses d'études, est un exemple concret de cet effort et c'est avec plaisir que je collaborerai avec vous dans ce dossier.

• 1420

Le président: Monsieur Jones.

M. Jim Jones (Markham, PC): Tout d'abord, je tiens à féliciter le ministre d'avoir presque réussi à résoudre le déficit, et en particulier pour l'an prochain, dans le budget de 1997-1998. Avant d'être élu, je n'arrivais jamais à comprendre pourquoi pendant 27 années de suite les gouvernements ont dépensé plus qu'ils ne percevaient. Il fallait y mettre le holà.

Mais vous devriez également proposer autre chose. Vous avez dit que vous n'auriez plus jamais recours au financement de l'économie par le déficit. J'aimerais que vous déposiez par la même occasion un amendement qui nous assurerait qu'il n'existera jamais plus de déficit pour le gouvernement. Vous y êtes parvenu, et tant mieux, et peu importe la façon dont vous vous êtes pris.

Ce que je ne comprends pas non plus, monsieur le ministre, c'est que nous arrivons presque à équilibrer notre budget mais que vous voulez pourtant autoriser de nouvelles dépenses de programmes. Les Canadiens en ont assez d'être taxés. Au lieu d'autoriser des dépenses à l'égard des nouveaux programmes, si vous tenez absolument à dépenser quoi que ce soit, vous devriez trouver l'argent nécessaire à partir des programmes qui existent déjà et les réduire. Après tout, c'est ce que font les sociétés et c'est ce qu'ont fait les compagnies privées. Elles n'ont pas choisi de dépenser à nouveau dès que l'avenir leur est apparu un peu plus rose. J'aimerais que vous trouviez les fonds pour vos nouvelles dépenses à partir des programmes qui existent déjà.

De plus, je remarque que vous ne prévoyez nulle part là-dedans de réduire la dette. L'économie est aujourd'hui mondiale; elle est très compétitive, et bien d'autres pays, particulièrement les Américains et les pays de l'Extrême-Orient, nous talonnent. Ils démontrent une très grande compétitivité. Voilà pourquoi nous devons nous débarrasser de notre dette et que vous devriez proposer un plan de réduction de celle-ci. Que prévoyez-vous à cet égard? Chaque fois que vous réussirez à réduire les frais de service, vous pourriez peut-être utiliser ces économies pour financer de nouveaux programmes, ce qui vous éviterait d'avoir à dépenser de l'argent frais.

J'aimerais savoir ce que vous pensez de proposer un amendement obligeant tous les gouvernements à viser l'équilibre de leur budget et ce que vous pensez d'un plan de réduction de la dette qui nous permettrait d'espérer des économies aujourd'hui et demain? Enfin, il est de notoriété publique que des taxes élevées nous coûtent des emplois. À quand un allégement fiscal?

L'hon. Paul Martin: Merci, monsieur Jones.

Puisque je n'ai pas eu l'occasion de le faire à la Chambre des communes, permettez-moi, monsieur le président, de féliciter M. Jones d'avoir été nommé critique des finances du Parti conservateur.

Je répondrai à vos questions à rebours. Si vous regardez ce que nous avons dit au sujet de la réserve pour éventualités, et ce qu'a déclaré le premier ministre au sujet du 50:50, si vous songez un instant au fait que le gouvernement a très clairement l'intention de limiter ses dépenses et de proposer des allégements fiscaux, vous y verrez clairement un plan de réduction de la dette.

Il faut d'abord s'assurer de faire descendre d'une façon constante le ratio d'endettement par rapport au PIB. Ce coefficient est ce qui illustre le mieux la capacité d'un gouvernement de faire face à sa dette. Or, nous avons réussi pour la première fois à le faire chuter de façon sensible. Nous avons l'intention de continuer à le faire descendre.

Vous vous demandez pourquoi nous devrions prévoir des dépenses pour de nouveaux programmes. C'est parce qu'il faut garder un certain équilibre. Rappelez-vous ce dont je viens de discuter avec M. Riis: nous sommes tous deux tombés d'accord pour dire qu'il fallait aider les étudiants à payer leurs études, aider les universités à solidifier leurs facultés, car cela faisait partie intégrante de la nouvelle économie. Or, le marché ne peut réussir tout cela lui-même, et vous devez le reconnaître: voilà pourquoi nous songeons à dépenser dans ces secteurs.

Je consacrerai peut-être un peu plus de temps pour vous expliquer pourquoi, en réponse à votre première question, nous nous proposons de déposer des mesures législatives destinées à réduire notre endettement. Laissez-moi vous renvoyer au programme du Parti réformiste qui a d'ailleurs suggéré la même chose.

• 1425

Lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, l'ancien gouvernement, auquel vous êtes associé, avait imposé des limites de dépenses. Or, après un certain temps, on avait constaté que tout ce que l'on cherchait à faire, c'était de contourner ces limites. Cela nous a semblé être une perte de temps et ne nous a pas semblé très productif. Il nous paraissait beaucoup plus important de nous mettre au travail.

J'en ai discuté avec des gens un peu partout dans le monde et, malheureusement, c'est un phénomène auquel les gouvernements démocratiques sont souvent exposés.

Si vous prenez l'exemple de la suggestion du Parti réformiste, une suggestion typique dans ce genre de situation, ils disent que le ralentissement économique—je ne me souviens pas de l'expression exacte, peut être fort ralentissement économique—constituerait une exception. Lorsqu'on commence à établir de telles exceptions, je vous assure que cela crée une ouverture par laquelle on pourrait faire passer une armée de camions. En fin de compte, les gouvernements perdent beaucoup de temps à essayer de contourner le problème au lieu de trouver une solution.

Ce que les Néo-Zélandais ont fait est bien préférable. En Nouvelle-Zélande, ils n'ont pas le même genre de législation. Ce qu'ils ont fait, c'est la même chose que nous, ils ont déclaré publiquement: «Voilà ce que nous allons faire». Après cela, l'opinion publique accule le gouvernement au pied du mur et l'oblige à tenir ses promesses.

À mon avis, monsieur Jones, cela est un moyen beaucoup plus efficace que de forcer le gouvernement à se lancer dans un débat de comptabilité, comme cela se produit inévitablement un peu partout dans le monde.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le ministre, vous avez dit que l'important ce n'était pas les chiffres, mais plutôt les effets véritables sur l'existence des gens, et cela m'a encouragé. En effet, c'est un point de référence important.

Hier, dans le Globe and Mail, David Foot, l'auteur de Boom, Bust, and Echo, parlait du chômage chez les jeunes. Au sujet de nos jeunes, il disait qu'ils sont en bonne posture, qu'ils ont été bien préparés à jouer un rôle dans notre économie fondée sur le savoir. Mais comme vous le savez très bien, monsieur le ministre, le taux de chômage chez les jeunes se situe à un peu moins de 17 p. 100, ce qui témoigne très mal du véritable éventail de compétences dans ce groupe. En fait, chez les diplômés d'université, le taux de chômage est seulement de 6,8 p. 100. Chez les diplômés du secondaire, il est de 15 p. 100, mais c'est parmi ceux qui n'ont pas terminé le secondaire que les chiffres deviennent critiques, ceux qui n'ont pas un diplôme d'études secondaires, et là, le taux de chômage est d'environ 23,8 p. 100. Monsieur le ministre, ce sont là les futurs pauvres du Canada, en quelque sorte, nos pauvres en devenir.

Comme vous le savez, monsieur le ministre, cette situation pose un dilemme car elle met en cause nos responsabilités, la formation de la main-d'oeuvre et l'éducation secondaire, deux domaines qui intéressent au plus haut point les Canadiens.

J'aimerais donc vous parler de ce groupe important, qui représente environ 50 p. 100 des jeunes chômeurs, ceux qui ont en quelque sorte abandonné, qui ont décidé de s'asseoir au bord du trottoir et de regarder la parade défiler. Avez-vous obtenu les assurances dont vous pensez avoir besoin pour amorcer des discussions financières de coopération avec les provinces pour trouver une solution d'avenir pour ces pauvres en devenir?

L'hon. Paul Martin: Vous avez certainement mis le doigt sur un des domaines les plus difficiles, un des plus importants en ce qui concerne le chômage, monsieur Szabo.

C'est à cause de cela que dans le dernier budget, nous avons mis en place le programme des travailleurs nouvellement embauchés. Aux termes de ce programme, 900 000 petites et moyennes entreprises n'auront pas à payer de cotisations d'assurance-chômage pour leurs travailleurs nouvellement embauchés. Nous nous sommes dit que cela les encouragerait à embaucher justement des jeunes de la catégorie dont vous venez de parler.

En même temps, c'est une des raisons pour lesquelles nous avons beaucoup fait dans le domaine du tourisme, par exemple, car c'est un secteur dans lequel les gens de cette catégorie peuvent plus facilement trouver du travail. Vous aurez remarqué que dans les trois derniers budgets, nous avons cherché à aider tout particulièrement l'industrie touristique, une des principales industries au monde, bien sûr, et cela, précisément pour les raisons que vous venez de mentionner.

• 1430

Cela dit, encore une fois, vous avez parfaitement raison. La première chose qu'un gouvernement, qu'il s'agisse d'un gouvernement provincial ou d'un gouvernement fédéral, doit chercher à faire, c'est de renvoyer le plus grand nombre de ces gens-là à l'école. Le grand problème, c'est que lorsqu'on considère ce groupe, on voit qu'il s'agit de chômeurs qui ont 15, 16 et 17 ans, et en réalité, ces jeunes-là devraient retourner à l'école.

Effectivement, nous en avons discuté avec les gouvernements provinciaux, et nous sommes tout disposés à coopérer. Il s'agit essentiellement d'un domaine qui relève principalement du domaine de compétence provinciale, et nous ne pensons pas qu'il soit juste de confier entièrement cette responsabilité à un segment de la société, qu'il s'agisse du gouvernement ou du secteur privé, qu'il s'agisse de groupes de bénévoles ou de groupes communautaires.

Dans notre pays, les communautés sont particulièrement actives, elles sont en première ligne. J'estime que toutes les institutions de l'État doivent faire tout leur possible pour aider ces communautés qui encouragent les jeunes à retourner à l'école.

Dans la mesure où nous pouvons agir et collaborer par le biais de la législation fiscale ou autrement, le gouvernement fédéral est tout à fait disposé... c'est précisément le genre de choses dont je parlais dans ma déclaration d'ouverture. Si vous considérez l'économie nouvelle si vous considérez la réorientation des compétences de notre pays vers d'autres, il est certain que nous nous heurtons à un défi majeur lorsque nous cherchons à aider les jeunes canadiens, en particulier ceux qui ont quitté l'école, à acquérir ou à récupérer les compétences dont ils auront besoin.

Le président: Monsieur Solberg.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Merci beaucoup, monsieur le président, monsieur le ministre, et merci encore une fois de comparaître devant ce comité.

J'aimerais aborder la victoire du gouvernement sur le déficit sous un certain angle. D'après les chiffres même du gouvernement, si on additionne le total des augmentations des recettes et des diminutions résultant du transfert social canadien, cela représente environ 28,7 milliards de dollars, c'est—à-dire 87 p. 100 de la baisse du déficit.

Ce que je tiens à dire, c'est que dans cette bataille, ce sont les contribuables canadiens qui sont les véritables héros. Ce sont eux qui ont souffert de cette offensive. Je pense qu'il est important de le reconnaître, et pas seulement en paroles, monsieur le ministre, mais également dans des actes.

Une des choses qui me frappe, c'est que le gouvernement parle beaucoup de manifester de la compassion envers les gens les moins favorisés en leur versant des prestations. Je n'ai rien contre cette idée, mais je ferai observer au ministre, que pendant qu'il parle de cela, son gouvernement continue à fermer les yeux, entre autres, sur la non-indexation des tranches d'imposition. Or, le non-ajustement des tranches d'imposition au taux d'inflation ne figure pas dans cet exposé économique mais représente tout de même environ 3,2 milliards de dollars. Et les plus touchés, ce sont les Canadiens qui ont les revenus les plus faibles.

Une autre chose qui n'est mentionnée nulle part, bien que cela soit appelé à devenir la plus forte hausse fiscale dans l'histoire canadienne, c'est l'augmentation de 73 p. 100 des primes du Régime de pensions du Canada. Il s'agit d'une charge sociale qui va nuire particulièrement aux jeunes, et cela, de deux façons. Cela va affecter les gens les plus vulnérables. En effet, cette augmentation aura un effet négatif sur la création d'emplois. Les études du Ministère le confirment. Deuxièmement, évidemment, les jeunes contribueront leur dollar, mais pour chaque dollar qu'ils contribueront, 50c. seront retirés du régime.

Pour replacer les choses dans leur contexte en perspective, le ministre dans son discours nous a dit qu'il avait su lutter contre le déficit, et c'est bien joli, mais je me demande pourquoi le gouvernement s'efforce tant de méconnaître l'impact punitif de ces impôts, à la fois ceux qui font partie du plan actuel du gouvernement et ceux qui s'annoncent. D'autre part, je me demande ce que le gouvernement a l'intention de faire à court terme pour s'assurer que le système fiscal procure un avantage social à ces gens-là.

L'hon. Paul Martin: Si vous regardez les chiffres du gouvernement, le succès que nous avons remporté dans notre lutte contre le déficit tient au fait que nous avons réduit nos dépenses beaucoup plus que n'importe quel autre pays du G7, mais cela n'empêche pas qu'il a eu une augmentation de 13 p. 100 depuis que nous sommes arrivés au pouvoir, ce qui est considérable. Quinze milliards sur 120 milliards, c'est une proportion importante.

Il est certain que nos recettes ont augmenté, et je l'ai d'ailleurs souligné dans mes observations. Si nos recettes ont augmenté dans une telle proportion, c'est parce que nous avons assisté à une véritable relance économique, parce que les gens sont retournés travailler, et lorsqu'ils retournent travailler, ils paient des impôts. C'est le genre de choses que nous recherchons.

• 1435

Mais permettez-moi de revenir sur l'observation du député au sujet des cotisations au RPC. Qu'il n'y ait pas de malentendu à ce sujet. Il aurait été beaucoup plus facile pour nous de faire que les gouvernements précédents ont fait, c'est-à-dire d'attendre sans rien faire du tout. En effet, nous aurions pu laisser le problème du RPC s'envenimer jusqu'à ce qu'il devienne impossible d'y trouver une solution. Cela aurait été la chose la plus facile au monde, mais ce n'est pas ce que nous avons fait. Si nous ne l'avons pas fait, c'est qu'il nous a semblé qu'il n'était pas juste pour ma génération, et je vais être franc, de continuer à toucher les prestations du RPC sans payer des primes équivalentes, et de laisser nos enfants et nos petits-enfants payer beaucoup plus cher.

Nous avons donc introduit ces réformes qui vont permettre, comme cela a été confirmé par des Canadiens des trois côtes, dans une consultation fédérale et provinciale sans précédent qui a porté sur l'ensemble du pays... tous nous ont dit qu'ils voulaient qu'on protège le RPC. Pourquoi tenaient-ils tant à ce qu'il soit protégé? Parce qu'ils savaient que le gouvernement canadien ne l'abandonnerait pas, et qu'ils n'auraient pas à s'inquiéter d'un effondrement du marché. Ils voulaient que ce système soit protégé pour être sûrs d'être protégés eux-mêmes s'ils étaient blessés dans un accident d'automobile. Ils tenaient aux prestations de maternité. Je rappelle à l'honorable député que cette position n'était pas seulement celle du gouvernement fédéral, mais également des gouvernements provinciaux.

M. Monte Solberg: De la Colombie-Britannique?

L'hon. Paul Martin: La Colombie-Britannique a voulu que le RPC soit protégé. Elle voulait seulement ne pas avoir à s'occuper du problème.

La Colombie-Britannique et la Saskatchewan voulaient que le RPC soit protégé. Il est certain, comme l'honorable député le sait, que l'Alberta, l'Ontario et toutes ces autres provinces tenaient également à ce que le RPC soit protégé, et toutes ont adhéré à ce principe.

Le véritable problème, et peut-être devrions-nous en discuter, ce n'est pas l'augmentation des cotisations au RPC, une augmentation qui est considérable, je le reconnais, mais le fait que si nous ne l'avions pas fait maintenant, il aurait fallu une augmentation de 140 p. 100. L'actuaire en chef a calculé qu'il faudrait aller jusqu'à 140 p. 100. C'est ce que nous avons évité. Nous, les gens de ma génération, avons donc décidé de payer un peu plus maintenant, ce qui me permet de dire au président que sa génération à lui ne devra pas payer tout à fait autant.

Ce n'est pas à vous que je pensais, monsieur le président, quand j'ai réfléchi à cette question.

Et voilà donc la réalité.

Le Parti réformiste nous a dit, et nous répète aujourd'hui, qu'il existe un passif de 600 milliards de dollars. Mais comment le Parti réformiste a-t-il l'intention de garantir aux Canadiens leur RPC, de le garantir aux gens qui sont déjà à la retraite? Le Parti réformiste, c'est évident, s'est intéressé à l'avenir du plan, mais en échange, il a abandonné tous les Canadiens qui touchent actuellement le RPC.

[Français]

M. Yvan Loubier: J'invoque le Règlement, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Monsieur Loubier.

[Français]

M. Yvan Loubier: Cela fait quatre ans que j'assiste à ce processus de consultation et de mise à jour économique, et c'est la première fois qu'un fan club est amené à ce genre de consultation. Malgré tout le respect que j'ai pour les partisans du Parti réformiste, leur serait-il possible d'observer un minimum de silence pour qu'on puisse comprendre les discussions, somme toute fort intelligentes et fort intéressantes, entres les intervenants et le ministre des Finances et pour qu'on puisse avoir un processus respectueux des parlementaires et de la population qui nous écoute?

[Traduction]

Le président: Effectivement, je suis convaincu que la population canadienne réagira positivement et que ce genre d'attitude changera.

Nous passons maintenant au tour suivant avec le Bloc québécois.

M. Preston Manning: Monsieur le président, est-ce que nous pouvons répondre? Le ministre des Finances a posé une question directement à l'opposition officielle, il nous a demandé comment nous préserverions le RPC? Pouvons-nous mettre les choses au point?

Le président: Vous aurez tout le temps voulu pour répondre à cette question à une autre occasion. Si les gens avaient été plus brefs et s'en étaient tenus au sujet, peut-être auriez-vous eu le temps de répondre à cette question.

Nous devons maintenant passer au Bloc québécois qui nous a prévenu que MM. Perron et Desrochers se partageraient le temps.

[Français]

M. Gilles-A. Perron (Saint-Eustache—Sainte-Thérèse, BQ): Vous avez raison, nous allons partager notre temps. Merci de me donner l'occasion de m'adresser au ministre des Finances.

• 1440

Monsieur le ministre, je suis ravi de constater que les compressions cumulatives dans les fonds sociaux des provinces seront de 42,4 milliards de dollars au lieu de 48,4 milliards de dollars. Au lieu de continuer à couper dans les transferts sociaux aux provinces, à fouiller, à piger dans le fonds d'assurance-chômage, pourquoi ne respectez-vous pas vos engagements? En 1995, vous vous étiez engagé à réduire de 19 p. 100 les dépenses des ministères, et ces compressions n'ont été que de 9 p. 100.

Pourquoi, monsieur le ministre, ne faites-vous pas vraiment la chasse au gaspillage dans tous les ministères fédéraux, tel que le vérificateur général vous dit de le faire d'année en année?

La parole est à vous, et j'espère obtenir une bonne réponse.

L'hon. Paul Martin: Vous me demandez, je pense, si nous allons atteint l'objectif que nous nous étions fixé pour la revue des programmes. La réponse est oui. Il ne faut pas oublier que la revue des programmes se poursuit toujours. À mi-chemin environ, certains ministères sont en avance dans l'échéancier prévu et d'autres sont en retard. Cependant, dans le sens global, on est au point où on devrait être, et je puis vous assurer qu'à la fin de la revue des programmes, nous aurons atteint l'objectif visé.

M. Gilles-A. Perron: Quant à la deuxième partie de ma question, qu'avez-vous à répondre en ce qui a trait à la chasse au gaspillage?

L'hon. Paul Martin: Cela continue. Je pense que les gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux doivent toujours foncer. La bataille n'est jamais gagnée, mais on continue. Durant toute l'année, on essaie d'éliminer le gaspillage. D'ailleurs, vous avez raison, c'est un sujet sur lequel un comité comme celui-ci ou encore le Comité permanent des comptes publics devrait se concentrer. Il faut que les gouvernements continuent à éliminer le gaspillage.

M. Odina Desrochers (Lotbinière, BQ): Monsieur le ministre, les initiatives que vous nous annoncez aujourd'hui démontrent une fois de plus que votre gouvernement s'apprête à jouer dans les champs de compétence des provinces. Au cours des dernières années, les libéraux ont imposé des coupures drastiques aux provinces, ce qui les a empêchées d'avoir la marge de manoeuvre nécessaire pour répondre aux besoins de nos jeunes.

Nous annoncez-vous aujourd'hui que vous allez continuer à priver les provinces de sommes considérables et que vous allez vous donner ainsi la possibilité de jouer au sauveur en saupoudrant des millions de dollars un peu partout dans les provinces?

L'hon. Paul Martin: Pas du tout, monsieur Desrochers. Il n'y a pas d'ingérence dans les juridictions provinciales. Par exemple, le fédéral a toujours été impliqué dans la recherche et le développement et il a toujours joué un rôle de chef de file dans le domaine de l'aide aux étudiants, par exemple. Le fédéral a toujours géré un programme pour aider les étudiants.

Vous n'étiez pas là lors de notre dernier mandat, mais je me rappelle que le Bloc québécois nous avait alors demandé d'augmenter notre aide aux étudiants. Donc, nous n'avons certainement pas l'intention de faire de l'ingérence dans les domaines strictement provinciaux. Cependant, nous voulons travailler en partenariat, parce qu'il y a des domaines où cela peut se faire, par exemple en recherche et développement, dans le cas nos étudiants et des crédits d'impôt. Le problème est énorme. Comment donne-t-on une formation à nos jeunes? Comment leur assure-t-on un avenir?

[Traduction]

Le président: Nous passons maintenant à Mme Redman.

Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Il y a beaucoup de gens dans ma circonscription de Kitchener-Centre qui considèrent nos institutions avec une véritable angoisse, et en particulier la santé et l'éducation. Le gouvernement provincial de l'Ontario a recours à des sophismes pour rejeter sur le gouvernement fédéral le blâme de cette restructuration. Que répondriez-vous aux provinces qui prétendent que notre succès avec le déficit a été dans une large mesure à leurs dépens.

L'hon. Paul Martin: Pour commencer, pendant la campagne électorale le premier ministre a annoncé que nous réaffecterions 1,5 million de dollars à la santé et à l'éducation dans les provinces. Il sera très intéressant d'observer les provinces, par exemple l'Ontario, et de voir si elles consacrent véritablement cet argent à la santé ou à l'éducation.

• 1445

En même temps, du fait que le gouvernement fédéral a réussi à redresser ses finances, les provinces ont obtenu plus de 2 milliards de dollars lorsque les taux d'intérêt ont baissé. Pour sa part, l'Ontario a reçu presque le quart de cette somme, 500 millions de dollars, argent qu'il peut très bien être réaffecté à la santé et à l'éducation. Comme nous en avons discuté autour de cette table, nous avons également réaffecté des fonds pour aider les étudiants, par conséquent les gouvernements provinciaux ont de l'argent à consacrer à l'éducation et à d'autres domaines.

On peut parcourir la très longue liste des accomplissements du gouvernement fédéral, mais le coeur de la question, ce sont les choix politiques qu'ont fait chacune des provinces. Le fait est que les transferts fiscaux à la province de l'Ontario ont baissé d'environ 1,2 milliard de dollars. Mais pendant ce temps, les impôts qui entrent dans les coffres du gouvernement de l'Ontario ont baissé de 4,9 milliards de dollars. Par conséquent, si l'on considère ce qui se passe dans les domaines de la santé et de l'éducation en Ontario, ils sont dus à cette baisse de 4,9 milliards de dollars des taxes provinciales.

Je ne discute pas; si l'Ontario a décidé de le faire, c'est un choix politique, mais il faut comprendre que ce choix politique a des répercussions sur la santé et l'éducation dans cette province. Elle ferait mieux de défendre ses choix politiques au lieu de chercher un bouc émissaire.

Le président: Monsieur McWhinney.

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Monsieur le ministre, vous avez beaucoup insisté sur le fait que le gouvernement s'est engagé à favoriser la recherche de pointe en sciences et en technologie dans les nouveaux secteurs de la médecine, de la pharmacologie, entre autres, parce que, avez-vous dit, cela était nécessaire à notre croissance industrielle au XXIe siècle, nécessaire pour affirmer notre position sur les marchés étrangers, et vous avez aussi établi un lien avec l'aide aux étudiants et aux chercheurs. Pensez-vous qu'il faudra faire des compromis sur le plan constitutionnel avec les provinces par suite de cette initiative fédérale?

L'hon. Paul Martin: Non, monsieur McWhinney. Le fait est que la Fondation pour l'innovation, la fondation pour la R-D, est une institution indépendante, distincte du gouvernement, dotée d'un conseil d'administration indépendant et dont le mandat lui permet de prendre ses décisions totalement indépendamment du gouvernement.

Le Fonds de dotation des bourses d'étude sera également un fonds distinct, indépendant. Ainsi, le gouvernement fédéral met en place deux institutions qui peuvent fonctionner tout à fait indépendamment et pour cette raison, les mesures dont vous parlez ne seront pas nécessaires.

Nous allons avoir des discussions approfondies avec les provinces au sujet du Fonds de dotation des bourses d'étude et j'ai déjà eu l'occasion de discuter longuement de la Fondation pour l'innovation. Plusieurs provinces étaient tout à fait en faveur du projet, avant même qu'on ne l'annonce, par exemple votre propre province.

Le président: Monsieur Gallaway.

M. Roger Gallaway (Sarnia—Lambton, Lib.): Merci, monsieur le président.

Monsieur le ministre, j'ai deux questions très courtes, dont l'une porte sur votre déclaration. Vous avez dit que le gouvernement devait intervenir uniquement lorsqu'il peut vraiment peser dans le balance. Je sais bien que la semaine dernière, le vérificateur général a critiqué certains programmes du gouvernement fédéral, et en particulier la LSPI. Ma question est la suivante: si aujourd'hui vous deviez affronter le même scénario que sur la côte est, est-ce que vous adopteriez des critères différents avant de prendre une décision? Est-ce que vous auriez tendance à adopter des critères plus empiriques pour déterminer si le programme choisi aura les effets souhaités?

Deuxièmement, ce matin certains ont mentionné la nécessité d'accélérer la création d'emplois. Certains économistes prétendent que si l'on veut ramener le taux de chômage à moins de 8 p. 100, il faut s'attendre à une flambe de l'inflation. À supposer qu'ils aient raison, et que ce soit la conséquence d'un chômage inférieur à 8 p. 100, êtes-vous prêt à laisser l'inflation augmenter dans une certaine mesure, ou avez-vous l'intention de rester fermement sur vos positions?

L'hon. Paul Martin: Monsieur Gallaway, la déclaration que vous avez relevée est particulièrement importante, le fait que le gouvernement ne devrait agir que lorsqu'il peut faire une différence. Les gouvernements ne devraient pas essayer d'avoir la réponse à tout et de faire plaisir à tout le monde. L'une des raisons pour lesquelles les gouvernements se sont attiré tant de difficultés, c'est parce qu'ils ont utilisé un fusil de chasse au lieu d'une carabine, ce qui aurait été beaucoup plus efficace.

• 1450

Si vous considérez toute la situation des pêches dans le Canada atlantique, il est certain que les programmes d'adaptation du gouvernement sont très importants. Le fait est qu'il y a eu une calamite d'origine naturelle... Je parle de la disparition du poisson. Or des collectivités, un grand nombre de gens, des industries toutes entières, tiraient parti de cette ressource. Dans de telles conditions, le gouvernement doit être prêt à intervenir et à aider les gens à s'adapter, et cela, que le problème soit un problème à long terme, comme c'est le cas de la pêche, ou qu'il s'agisse d'une catastrophe de courte durée, comme cela s'est produit, par exemple, au Manitoba ou au Saguenay. La responsabilité du gouvernement est justement de mobiliser l'ensemble de la population et de venir en aide à n'importe quelle région qui se heurte à un problème.

Quant à votre deuxième question au sujet du TCIS... monsieur le président, je sais bien que les responsables du ministère des Finances qui sont assis derrière moi ne sont pas tous d'accord avec moi, mais je vais tout de même essayer d'expliquer; je sais comment les membres de ce comité comprennent la question, mais il y a une théorie qui veut que le niveau de chômage peut baisser jusqu'à un certain point, et au-delà de ce point-là, l'inflation commence à s'accélérer. Personnellement, je suis convaincu que c'est vrai, et quoi qu'il en soit, c'est d'un très grand intérêt théorique. Cela dit, ce n'est pas vraiment intéressant sur le plan pratique car une personne ne sait où se trouve ce point limite. Aux États-Unis, on pensait que TCIS se situait à environ 6 p. 100, mais ils ont donc continué à pousser le taux de chômage de plus en plus bas, en dessous de 5 p. 100, et malgré tout, cela n'a pas relancé l'inflation.

C'est donc une question dont j'aimerais bien discuter longuement avec des économistes, mais cela n'a pas grand intérêt sur le plan de la politique gouvernementale. En fait, cela ne mérite pas d'être étudié tant qu'on ne saura pas où se situe le point limite.

Le président: Madame Torsney.

Mme Patty Torsney (Burlington, Lib.): Merci.

Monsieur le ministre, à la page 9 vous dites clairement que le fardeau fiscal des Canadiens doit être réduit. Je suis certaine que les résidants de Burlington et de tout le pays se demandent pourquoi on ne réduit pas les impôts de 1 ou 2 p. 100 dès maintenant, pourquoi on ne réduit pas la TPS ou encore pourquoi une partie de ce dividende ne sert pas à alléger les pressions qui s'exercent sur le RPC. Monsieur le ministre, pourquoi ne pas décréter dès maintenant une réduction d'impôt généralisée. J'ai du mal à comprendre.

L'hon. Paul Martin: J'aimerais beaucoup pouvoir le faire, mais le fait est que le déficit n'a pas disparu, et que nous n'avons tout simplement pas la marge de manoeuvre nécessaire. Il y a une chose que nous voulons éviter, c'est de réduire les impôts maintenant pour nous trouver ensuite encore une fois en situation de déficit si jamais il y avait un ralentissement économique quelconque. Nous ne voulons pas revenir à une situation déficitaire. Par conséquent, il nous semble que c'est la démarche intelligente, nous préférons effectuer des coupures fiscales sélectives, nous préférons viser les secteurs qui en ont le plus besoin, et attendre pour annoncer les coupures généralisées que notre marge de manoeuvre soit suffisante.

Un autre élément était important; le rapport dette-PIB est de 73 p. 100. Nous venons tout juste de le faire baisser; en moyenne, dans les provinces ce rapport se situe aux alentours de 30 p. 100. Autrement dit, pour chaque dollar que le gouvernement fédéral reçoit, 32c. servent à payer les intérêts (quand nous sommes arrivés au pouvoir, je crois que c'était 35c.). Dans les provinces, c'est en moyenne 14c. Autrement dit, il est beaucoup plus risqué pour nous de nous lancer dans des diminutions d'impôt sur une large échelle. Étant donné que c'est le gouvernement fédéral qui fraye la voie économique au reste du pays, que c'est lui qui fixe les taux d'intérêt pour l'ensemble du pays, nous mettrions les Canadiens en danger en introduisant des réductions d'impôt généralisées et prématurées. Cela dit, je vous assure que j'aimerais beaucoup être ministre des Finances quand ce moment-là sera venu.

Le président: Monsieur Harris.

M. Dick Harris (Prince George—Burkley Valley, Réf.): Merci.

Monsieur Martin, après avoir écouté votre exposé, une chose me semble évidente, c'est que vos rédacteurs et vos spécialistes du conditionnement médiatique méritent de chaudes félicitations. Ils ont remarquablement bien réussi à cacher le fait que vous êtes parvenu à vos objectifs de réduction du déficit aux dépens des travailleurs et des entreprises canadiennes, aux dépens également de réductions considérables des paiements de transfert pour la santé et les services sociaux.

• 1455

En fait, pour reprendre une de vos expressions favorites, les niveaux d'impôt sur le revenu des particuliers ont augmenté depuis 1993. Les niveaux d'impôt sur les société ont augmenté depuis 1993, et cela à la fois pour les grosses et les petites entreprises. Les charges sociales ont augmenté depuis 1993 et finiront un jour ou l'autre, par crever le plafond. De la même façon, tous les droits, permis et coûts réglementaires qui représentent un coût direct pour les Canadiens ont augmenté.

Par conséquent, quand vous dites que les recettes provenant de votre assiette fiscale ont augmenté, vous avez commodément omis de parler de l'augmentation des niveaux d'imposition qui est responsable dans une si large mesure, de cette augmentation des recettes.

En fait, pour parvenir aux résultats que vous avez obtenus sur le plan du déficit, on n'a pas besoin d'être un génie quand il suffit de tirer sur un levier magique pour soutirer plus de dollars aux entreprises et aux travailleurs canadiens chaque fois qu'on en a envie. Or, monsieur Martin, de toute évidence, ce sont là les faits de votre politique financière.

Les taxes et les impôts sont mortels pour les emplois. Vos propres experts financiers l'ont reconnu plus d'une fois; et cela m'amène à ma question.

La Colombie-Britannique est appelée à devenir une force commerciale considérable parmi les pays en bordure du Pacifique. En fait, on a dit que cette province pourrait devenir le huitième tigre de l'économie du Pacifique.

Il est indéniable que les niveaux d'imposition des entreprises et des travailleurs de Colombie-Britannique, les coûts de fabrication et de transport, tout cela a beaucoup nui à la Colombie-Britannique et l'a empêchée de profiter des occasions qui s'ouvrent à elle dans la région du Pacifique.

Pourquoi votre gouvernement ignore-t-il systématiquement les occasions qui s'offrent à la Colombie-Britannique? Pourquoi avoir augmenté les impôts à tel point que cela nuit à notre compétitivité et nous empêche de profiter des occasions superbes qui s'offrent à notre province?

L'hon. Paul Martin: Je vais répondre à vos différentes observations.

Pour commercer, en ce qui concerne les charges sociales, je vous ferai observer que vos chiffres ne sont pas exacts. Les charges sociales auxquelles vous faites allusion, c'est bien sûr les cotisations de l'assurance-emploi. Le fait est...

M. Dick Harris: Et également le RPC.

L'hon. Paul Martin: Vous avez dit essentiellement qu'elles avaient augmenté. On prévoit que les cotisations au RPC vont augmenter, mais cela n'a pas encore été fait.

Prenons l'exemple d'une des charges sociales, les cotisations versées à l'assurance-emploi. Lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, ces cotisations devaient passer à 3,30 $. Nous les avons maintenues à 3,07 dollars. Par la suite, nous les avons ramenées à 3 $, puis à 2,90 $. Nous avons ensuite annoncé que nous avions l'intention de les ramener à 2,80 ,$. Le fait est que chaque année depuis que nous sommes au pouvoir, cette charge sociale qui relève du gouvernement fédéral a baissé.

En passant, avant notre arrivée au pouvoir, ce prélèvement obligatoire subissait une augmentation tous les ans.

Deuxièmement, il est certain—et le chiffre le prouve—que si les recettes du gouvernement ont augmenté c'est parce que l'activité économique a augmenté. C'est une simple réalité.

Il y a une autre chose. Si l'on considère les chiffres, il est très clair que le gouvernement fédéral pourrait s'infliger des coupures lui-même le premier, avant d'en infliger aux provinces et pourrait s'infliger les plus sévères. C'est exact. Mais il y a un problème dans votre proposition, et c'est la grande joie que certains membres du Parti réformiste semblent prendre dans les coupures gouvernementales.

Je ne voulais pas procéder à ces coupures. Personne ne le voulait. C'est la population qui souffre quand les gouvernements réduisent leurs dépenses et je suis heureux que nous soyons parvenus à résoudre ce problème de déficit en procédant à un minimum de coupures même si elles ont quand même été très sévères.

Le plus gros problème que me posent les réformistes, c'est le plaisir qu'ils semblent prendre à sabrer à tous vents. C'est malsain.

• 1500

Quant à votre dernière question sur le taux élevé des taxes en Colombie-Britannique, tout ce que je peux vous dire c'est que vous vous trompez de ministre des Finances.

Le président: Monsieur Iftody.

M. David Iftody (Provencher, Lib.): Monsieur Martin, je vous remercie de votre exposé.

Paul, je tiens à revenir un peu sur cette histoire de taxes. Bien entendu il y a la problématique—et vous y avez fait allusion, vous en avez parlé et le Parti réformiste en a parlé—le rapport entre le produit intérieur brut et le niveau d'endettement du Canada qui reste toujours élevé comparativement à d'autres pays. Il nous empêche de faire certains investissements et certaines dépenses mais je crois que le gouvernement dans le cadre de son objectif global a raison d'être prudent et de poursuivre son effort de réduction de cette dette accumulée.

Mais à propos de la réduction des impôts, j'ai trouvé assez intéressant de constater à la lecture dans les journaux des résultats de certains sondages réalisés, entre autres, par votre ministère, que les Canadiens, monsieur le ministre, s'intéressent de très près à ces questions. Ils veulent que les impôts soient réduits mais pas au détriment des dépenses consacrées à la santé et à l'éducation et bien entendu, à long terme, leur objectif c'est la réduction de la dette globale.

J'aimerais vous parler d'une question qui concerne tout particulièrement la province du Manitoba et la population rurale. Quatre-vingt pour cent des emplois créés depuis quatre ans l'ont été par des petites et moyennes entreprises, tout particulièrement par celles qui comptent au maximum quatre, cinq, voire six employés. Si tel est le cas, dans le cadre de ces consultations, nous devrions peut-être commencer à réfléchir à une stratégie de mesures fiscales favorisant les petites entreprises. Qu'en pensez-vous?

L'hon. Paul Martin: Excellente initiative. Votre président a indiqué que ces audiences allaient être les plus exhaustives qu'un comité des finances ait jamais tenues et j'espère sincèrement que les questions que vous venez de poser occuperont le devant de la scène.

L'importance des petites et des moyennes entreprises en matière de création d'emplois ne fait aucun doute. Nous aimerions en savoir un peu plus, par exemple, sur les nouveaux programmes d'embauche qui ont accompagné la nouvelle assurance-emploi. Est-ce une bonne idée? Y a-t-il des modifications à y apporter? Le premier ministre... La dernière mission d'Équipe Canada s'est concentrée sur les petites et moyennes entreprises et sur les mesures que nous pourrions prendre pour les favoriser parce qu'il ne fait aucun doute que lorsqu'on a une économie où les exportations représentent environ 40 p. 100 des recettes, il est très important que les petites et moyennes entreprises jouent un rôle majeur.

Je répondrai donc ainsi à votre question. L'emploi est la priorité numéro un. Les petites et moyennes entreprises sont les principaux employeurs. Dans ce contexte l'emploi des jeunes est un domaine majeur auquel tout gouvernement doit s'attaquer. Permettez-moi de vous dire que si vos consultations aboutissent à des propositions de politiques qui nous permettent de progresser dans cette direction, il est évident que cela nous intéressera énormément.

Le président: Monsieur Pagtakhan.

M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord—St. Paul, Lib.): Merci, monsieur le président. J'aimerais également féliciter le ministre des Finances.

Monsieur le ministre, pourriez-vous nous dire à partir de quel seuil le fonds de réserve devient superfétatoire? Quelles lignes directrices devraient guider le gouvernement sur le plan de la durée des critères pour déterminer qu'il est superfétatoire?

Deuxième question. J'estime également qu'une approche équilibrée est la seule valable. Cela me rappelle les propos d'un éminent collègue qui disait qu'un oiseau a deux ailes, la gauche et la droite, et que la seule utilisation de l'une ou l'autre ne lui permet pas de voler aussi bien mais par contre s'il utilise les deux son vol est parfaitement équilibré. Quelles sont les données en votre possession qui vous permettent d'avoir la conviction que cette approche équilibrée est souhaitée par l'ensemble des Canadiens?

• 1505

L'hon. Paul Martin: En ce qui concerne le fonds de réserve, je suppose que le meilleur moyen de l'aborder pendant vos consultations est sous l'angle du ratio dette-PIB et des niveaux. Bien que de toute évidence, nous soyons tout près de résoudre le problème du déficit, il nous reste une dette nationale très élevée. Il faudra continuer à surveiller ce ratio dette-PIB.

Tant que le ratio dette-PIB sera considérablement supérieur à la moyenne de celui des autres pays du G7, par exemple, il nous faudra un fonds de réserve car nous n'avons pas les moyens de nous tromper dans nos projections.

Il sera peut-être donc utile que vous discutiez de ratio dette-PIB mais il faut qu'il baisse, c'est indubitable. Il faut qu'il baisse considérablement avant que le gouvernement puisse renoncer à ce fonds de réserve.

Quant à votre deuxième question sur le soutien dont nous disposons pour l'approche équilibrée que nous sommes en train d'énoncer, l'exemple que je peux vous donner est celui des consultations approfondies pendant le sommet de l'Alberta.

En fait, David, nous en avons discuté.

Rey, le sommet de l'Alberta a réuni tous les segments de la société albertaine pour discuter justement de cette question. Pour l'essentiel, ce sommet a confirmé le genre d'approche que nous vous avons proposée aujourd'hui et en fait dans chacun de nos derniers budgets.

Le président: Merci, monsieur le ministre.

Nous passons maintenant au tour d'une minute.

Monsieur Manning.

M. Preston Manning: J'ai une toute petite question. Le ministre, à propos du nouveau programme d'embauche, par exemple, a concédé qu'une réduction—dans ce cas—une élimination des charges sociales favorise la création d'emplois. C'est ce que vous faites dans ce programme. Pourquoi le ministre reconnaît-il que la réduction de cette taxe crée des emplois mais prétend qu'un allégement fiscal généralisé ne peut être créateur d'emplois? Il n'y a pas de contradiction?

L'hon. Paul Martin: Monsieur Manning, là n'est pas la question. Réduire la fiscalité est un de nos souhaits ardents. Cependant, voyons un peu quelle est la situation.

Nous voulons tout autant que vous réduire la fiscalité. Par contre, la question que nous nous posons, c'est: oui, mais à quel coût?

Pour être tout à fait honnête, si vous voulez bien regarder votre propre programme, le fait est, par exemple, que vous étiez prêts à réduire les paiements de péréquation de trois milliards de dollars pour financer cette réduction fiscale. Nous, non. Vous avez dit que vous...

M. Preston Manning: Vous les avez déjà réduits.

L'hon. Paul Martin: Non, nous n'avons pas réduit les paiements de péréquation. La péréquation, c'est une formule—monsieur Manning, vous le savez—qui fonctionne bien.

Vous seriez prêt à réduire les paiements de péréquation de 3 milliards de dollars pour financer cette réduction des impôts. Nous, non. Vous avez clairement indiqué que vous réduiriez les transferts pour les programmes sociaux et de santé de 3,5 milliards de dollars pendant une période de quatre ans pour financer votre réduction des impôts. Monsieur Manning, nous ne sommes tout simplement pas prêts à le faire. Je ne pense pas que les Canadiens souhaitent une coupure dans ces programmes pour financer une réduction des impôts.

M. Preston Manning: La question, monsieur le ministre, est toute simple...

Le président: Monsieur Manning, vous avez eu votre... Nous passons...

Il est très important de respecter la règle.

Monsieur Loubier.

[Français]

M. Yvan Loubier: Plus tôt, monsieur le ministre, vous nous avez dit que vous continuiez les coupures que vous nous aviez annoncées dans le budget de 1996, coupures dans les programmes sociaux qui vont totaliser 42 milliards de dollars d'ici la fin de votre deuxième mandat. En même temps, vous nous annoncez quelques initiatives nouvelles dans ces secteurs où vous avez fait des coupures draconiennes de milliards de dollars et vous vous proposez de continuer à faire des compressions au cours des prochaines années, notamment dans les secteurs de l'éducation, de la santé et de l'aide sociale.

N'y aurait-il pas lieu de tenir, au cours des prochains mois, un véritable débat sur la deuxième partie de votre orientation, qui a trait à l'assainissement des finances publiques et surtout à l'utilisation du surplus budgétaire? Je crois qu'il y aurait moyen de tenir un vrai débat public sur de vraies questions, sur ce que vous avez fait, ce que vous projetez de faire et le saupoudrage dans les champs de compétence exclusifs des provinces.

L'hon. Paul Martin: Monsieur Loubier, j'espère que vous allez tenir ce débat au cours de vos consultations nationales. Quant à nous, nous sommes tout à fait disposés à tenir ce débat en Chambre. D'ailleurs, je suis convaincu que, lorsque viendra le temps de présenter le budget, c'est exactement le débat que nous allons avoir. La réponse à votre question est oui.

• 1510

Monsieur Loubier, je ne vous dirai qu'une chose. Vous savez fort bien que les réductions du gouvernement fédéral à l'égard des provinces sont moindres que les coupures des provinces à l'égard de leurs municipalités. Donc, j'espère que vous allez défendre les municipalités face au gouvernement provincial.

[Traduction]

Le président: Monsieur Riis.

M. Nelson Riis: Monsieur le ministre, une grande partie de votre exposé et des discussions autour de la table ont porté sur l'éducation, la formation et leur importance pour l'économie fondée sur la connaissance du siècle prochain. M. Szabo a donné des preuves empiriques de la valeur de l'éducation pour l'avenir. Nous sommes tous d'accord.

Je vous propose un défi, si vous voulez. Je ne sais si vous voudrez vraiment être le chef de votre parti un jour, ou être candidat au poste de premier ministre, mais je peux probablement vous garantir que vous aurez de bonnes chances si vous répondez correctement à ma question.

L'éducation c'est important. Cela ne fait aucun doute. Dans trois ans il y aura un programme de bourses pour aider les étudiants. C'est une mesure positive—dans trois ans. Pourquoi ne sommes-nous pas plus sérieux à propos d'éducation postsecondaire, d'éducation au niveau collégial, technique et universitaire et ne faisons-nous pas ce que beaucoup d'autres pays font, pourquoi ne reconnaissons-nous pas qu'étudier coûte beaucoup d'argent, tant pour le logement que pour les livres, les transports, etc.? Pourquoi le gouvernement fédéral ne dit-il pas qu'il est prêt à coopérer avec les provinces pour éliminer les frais de scolarité comme dans certains pays?

L'hon. Paul Martin: Je ne sais quelle serait la réaction des provinces à cette suggestion. Comme vous le savez, les coûts de l'éducation ont considérablement augmenté et je pense que c'est aux provinces de décider si elles pourraient ou non se le permettre.

Je peux vous dire que de notre point de vue, utiliser au fur et à mesure les excédents, en plus de réduire la dette et en plus de réduire les impôts, de les injecter au maximum dans la nouvelle économie et dans l'éducation des jeunes, dans les programmes de retour au travail comme je pense l'avoir indiqué dans mes remarques, est certainement une priorité; la priorité des priorités. Il reste à voir quelles seraient les chances d'aboutissement de votre suggestion, monsieur Riis, mais je peux vous assurer que nous sommes prêts à discuter avec les provinces et à mettre en place le genre de partenariat décrit par vous, un partenariat qui permettrait à tous les paliers de gouvernement d'unir véritablement leurs efforts pour que notre société soit la plus progressive du siècle prochain.

Le président: Monsieur Jones.

M. Jim Jones: Merci, monsieur le président.

Monsieur le ministre, nous savons tous que la Caisse d'assurance——chômage dégage un excédent de 4, 5 ou 6 milliards de dollars par an. Nous savons également que la nouvelle proposition de loi modifiant le Régime de pensions du Canada, une fois appliquée au cours des six prochaines années, drainera l'économie de 11 milliards. Ne trouvez-vous pas immoral de prendre l'excédent de l'assurance-chômage et de le verser dans le fonds des recettes générales pour financer le déficit plutôt que de vous en servir pour aider le fonds du Régime de pensions du Canada à défrayer certains de ses coûts? Ces deux cotisations sont des prélèvements obligatoires et en fin de compte vous supprimerez indirectement plus d'emplois que vous n'en sauverez.

L'hon. Paul Martin: Monsieur Jones, je suis sûr qu'au cours des quatre prochaines années nous allons avoir beaucoup de débats intéressants. Vous n'étiez ni membre de la Chambre précédente ni du gouvernement précédent, mais le fardeau de ce qu'il a laissé doit être très lourd à porter. Vous connaissez le bilan des primes d'assurance-emploi du gouvernement précédent; et d'ailleurs ce n'est pas uniquement celui du gouvernement conservateur précédent. J'aurais souhaité que les gouvernements précédents s'attaquent plus tôt au problème du Régime de pensions du Canada. Mais ils ne l'ont pas fait, et si nous nous trouvons dans le pétrin actuel c'est parce que nous avons dû le faire par obligation et par moralité envers les jeunes Canadiens.

Vous savez également que les cotisations au RPC n'entrent pas dans les coffres du gouvernement. Elles sont versées dans un fonds distinct que des gestionnaires professionnels investiront en toute indépendance. Elles ne font pas partie du Trésor public.

• 1515

Par contre, les cotisations de l'assurance-emploi font partie du Trésor public. Et ce, depuis 1986 à la suite d'une décision du vérificateur général. C'est une réalité qu'il nous est impossible d'ignorer.

Il suffit de regarder ce qui se passe depuis trois ou quatre ans pour constater que nous avons réduit ces cotisations d'assurance-emploi au maximum et que nous continuerons à le faire. Le problème est qu'il y a une réalité arithmétique incontournable.

Mme Sophia Leung (Vancouver Kingsway, Lib.): Monsieur le ministre, bienvenue à Vancouver.

Je tiens à vous féliciter de vos excellents efforts de réduction du déficit et aussi des emplois que vous avez créés.

Dans ma circonscription, Vancouver Kingsway, nous avons beaucoup de problèmes d'emploi surtout chez les jeunes. Je sais que nous offrons des subventions spéciales et aussi des programmes spécialement destinés à la prévention du crime. Avez-vous des suggestions à nous proposer pour faire participer les jeunes aux activités communautaires dans les domaines de la formation et de la prévention du crime.

J'ai une deuxième question. Comme vous le savez, Vancouver attire beaucoup d'investissements étrangers. Je sais que vous êtes très sensible à ces investissements, très conscient de ces investissements. Ils représentent un atout potentiel pour notre économie. J'aimerais savoir si vous avez des suggestions pour encourager encore plus les investissements.

L'hon. Paul Martin: Encore une fois, à propos d'investissement, de tous les pays du G7 c'est nous qui avons fait le plus sur le plan de la réduction du déficit. Nous sommes clairement sur la bonne voie d'une réduction progressive et régulière du ratio dette-PIB. En d'autres termes, nous sommes en voie de maîtriser la dette. Grâce à quoi, nous pourrons réduire les taxes et les impôts, nous pourrons injecter de l'argent dans l'éducation et avoir une main-d'oeuvre productive. Il est clair qu'il y a très peu de pays qui soient aussi bien positionnés que le Canada en matière d'investissement étranger.

Pour ce qui est de votre première question, vous avez raison à 100 p. 100. C'est au niveau communautaire qu'il faut agir. C'est la raison pour laquelle en fait tout le secteur bénévole est une composante essentielle au progrès d'un pays, qu'il s'agisse du développement de l'économie sociale, de la prise en charge de la population vieillissante ou des jeunes comme vous l'avez justement mentionné. L'action dans ce pays se fait au niveau des communautés et les gouvernements de tous les paliers ont la responsabilité de s'assurer que celles-ci aient les outils nécessaires pour faire le travail que vous venez de décrire.

M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Monsieur le ministre, je vous remercie de votre engagement clair et sans équivoque sur la réduction de la dette. C'est une bonne nouvelle pour tous les Canadiens.

Ce qui m'intéresse davantage c'est comment nous y arriverons. Si j'ai bien compris vos remarques, une fois le budget équilibré, le fonds de réserve servira automatiquement à réduire la dette. Évidemment, une gestion financière prudente des finances du gouvernement servira également à réduire la dette.

Je voudrais savoir comment nous ferons concorder cela avec notre engagement à appliquer 25 p. 100 de notre excédent à la réduction de la dette.

C'est sur cela que porte ma deuxième question. Fixerez-vous dans le prochain budget des objectifs précis pour la réduction de la dette par rapport au PIB? Autrement dit, sera-t-il inférieur à 73 p. 100, inférieur à 70 p. 100 ou 67 p. 100, et le fixerez-vous dans le prochain budget?

L'hon. Paul Martin: La formule moitié-moitié, présentée dans le Livre rouge, s'applique à toute la durée du mandat. Nous disons essentiellement qu'à la fin de notre mandat, lorsque vous regarderez ce que nous avons fait, vous constaterez que nous avons vraiment respecté ce plan.

Dans une année donnée, il y aura évidemment des variations, en fonction de la situation économique et du moment où certains des programmes sont instaurés.

Pour ce qui est de fixer un objectif précis du ratio de la dette au PIB, les économistes en ont discuté longuement. Nous sommes d'avis que ce ratio est beaucoup trop élevé à l'heure actuelle et qu'au lieu de fixer un objectif, l'essentiel est de le placer sur une trajectoire qui restera descendante. C'est vraiment ce que nous avons l'intention de faire.

Le président: M. Valeri posera la dernière question.

M. Tony Valeri (Stoney Creek, Lib.): J'ai ici l'occasion, monsieur le ministre, de poser la dernière question cet après-midi.

• 1520

Je dois dire qu'en écoutant les questions qu'on vous a posées, je n'arrive pas à m'expliquer pourquoi le parti de l'opposition officielle, M. Manning en particulier, continue de soutenir que nous ne faisons pas de progrès et que les Canadiens ne se trouvent pas aujourd'hui dans une meilleure situation qu'en 1993, avant notre arrivée au pouvoir. Je termine sur ce commentaire et je vous demande de répondre aux questions suivantes. J'aimerais que vous confirmiez pour la gouverne des membres du comité et pour les Canadiens qui nous regardent aujourd'hui, que vous êtes déterminé à équilibrer le budget, que vous êtes déterminé à réduire la dette, que vous êtes déterminé à réduire le fardeau fiscal des Canadiens et que vous êtes déterminé à faire des investissements stratégiques dans des secteurs prioritaires pour les Canadiens. Voulez-vous confirmer cela pour nous, monsieur le ministre?

L'hon. Paul Martin: Merci, monsieur Valeri.

Nous sommes déterminés à équilibrer le budget. Plus précisément, nous croyons que l'équilibre du budget—et je répète ce que j'ai dit dans mon allocution—est un élément clé, sinon le seul élément clé, pour assurer une plus grande création d'emploi et une plus forte croissance économique. Nous allons réduire la dette. Nous allons réduire les impôts. Nous allons investir dans l'avenir des Canadiens.

Il est tout à fait clair que nous sommes en mesure de faire quelque chose, et c'est ce que nous avons tenté d'expliquer ce matin et ce que le premier ministre a dit dans le discours du Trône et dans le discours qu'il a prononcé après le discours du Trône... et c'est que le Canada est maintenant rendu à un point où il peut commencer à prendre les choses en main et à façonner son propre avenir. Cela signifie avant tout que les générations de Canadiens qui suivront pourront être les chefs de file dans n'importe quel domaine de leur choix, que ce soit dans la recherche, les arts ou les affaires. C'est la vision que nous avons sur le genre de pays que nous voulons construire. Pour la première fois que nous sommes arrivés au pouvoir, nous sommes en mesure de le faire et c'est justement de cela qu'il s'agit.

Le président: Merci beaucoup, monsieur le ministre, de cette présentation très instructive. Je pense que vous avez réussi à nous fournir le contexte dont nous avions besoin pour entreprendre nos déplacements dans le pays afin d'entendre l'opinion de la population sur cette question très importante. Je n'ai absolument aucun doute que nous entrons en effet dans une nouvelle ère économique, une ère pleine de défis et de choix, comme je l'ai dit dans mes remarques préliminaires, mais il faut faire ces choix en fonction des valeurs et des priorités des Canadiens.

À titre de président du comité, monsieur le ministre, je pense que le véritable test de votre succès et de celui de votre gouvernement consistera à voir si à la fin de ce mandat, les Canadiens seront plus optimistes, s'ils seront dans une meilleure situation et s'ils verront l'avenir d'une manière plus positive que maintenant. C'est plus ou moins notre principal objectif. Vous verrez que plusieurs des recommandations que nous vous transmettrons seront fondées sur une question centrale: comment pouvoir nous améliorer la qualité de vie des Canadiens?

Sur ce, au nom des membres du comité, je tiens encore une fois à vous remercier.

La séance est suspendue jusqu'à 13 h 15. Merci beaucoup.

[Note de l'éditeur: Les délibérations se poursuivent à huis clos]