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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le lundi 19 octobre 1998

• 1100

[Traduction]

Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): Je voudrais ouvrir la séance et souhaiter la bienvenue à tout le monde dans cette merveilleuse ville de Saskatoon.

Nous avons le plaisir de recevoir ce matin les représentants de l'Association culturelle franco-canadienne de la Saskatchewan, du bureau de l'Association canadienne pour la santé mentale à Saskatoon, de l'Immigrant Women Society, de Prairie Pools Inc., du Saskatchewan Wheat Pool et de l'Université de Regina.

Nous allons commencer par la présidente de l'Association culturelle franco-canadienne de la Saskatchewan, Mme Lorraine Archambault. Vous êtes la bienvenue.

[Français]

Mme Lorraine Archambault (présidente, Association culturelle franco-canadienne de la Saskatchewan): En tant que présidente de l'Association culturelle franco-canadienne de la Saskatchewan et porte-parole de la communauté fransaskoise, j'aimerais vous remercier de nous avoir invités à cette consultation et de nous donner l'occasion de nous exprimer. C'est signe que vous êtes prêts à nous entendre, et nous en sommes très heureux.

Cependant, se faire écouter est autre chose, et nous ne pouvons qu'espérer que nous serons écoutés et que notre apport à ces consultations fera une réelle différence vis-à-vis des résultats.

Permettez-moi d'abord de vous dire que nous ne remettons pas en cause les efforts déployés afin d'assainir les finances publiques. Nous désirons, autant que tous nos autres concitoyens et concitoyennes, un pays qui soit économiquement fort. Mais un pays en bonne santé doit être fort à plusieurs niveaux. Les citoyens et citoyennes d'un pays doivent se sentir bien dans leur peau, pour ainsi dire, au sein de leur pays. Un gouvernement doit être sensible au mieux-être de tous ses résidants. J'avoue que c'est une tâche difficile, mais non une tâche impossible.

Les citoyens et citoyennes francophones de ce pays sont des gens dynamiques, énergiques et inlassables qui contribuent de façon très concrète au développement et à l'épanouissement du Canada. Selon nous, la francophonie canadienne est un atout d'une valeur incalculable pour notre pays, une richesse qui doit être minutieusement soignée.

Le Canada a pris des engagements envers ses communautés de langues anglaise et française, des engagements qui se retrouvent dans la Charte canadienne des droits et libertés et qui garantissent l'égalité statutaire des deux langues officielles.

Grâce à l'apport de ses différents programmes, le gouvernement fédéral est venu appuyer nos efforts afin de développer le caractère unique du Canada. Malheureusement, les récents budgets fédéraux démontrent un écart toujours grandissant entre les bonnes intentions du gouvernement et la réalité que nous vivons.

Il est certain que tous les Canadiens et Canadiennes ont subi des compressions budgétaires au cours des dernières années. Cependant, je dois faire état du fait que les groupes de la communauté francophone et acadienne ont fait, depuis 1992, leur juste part dans la lutte pour l'assainissement de finances publiques. Par exemple, le budget 1998 est venu amputer l'enveloppe globale du ministère du Patrimoine canadien de 6,6 p. 100. Comment avons-nous été affectés, nous, francophones? Les programmes pour les langues officielles de ce ministère ont été coupés de 15 p. 100, l'aide à l'éducation francophone a été coupée de 21 p. 100 et les budgets pour la programmation des organismes ont été réduits de 30 p. 100.

En Saskatchewan, les Fransaskoises et les Fransaskois ont subi des compressions de plus de 50 p. 100 au cours des dernières années. La situation est telle qu'à chaque année, un nouveau budget vient ériger de nouveaux défis qui sont très difficiles à relever. Je pourrais vous en citer plusieurs exemples, mais le temps alloué ne me le permet pas. Qu'il suffise de dire que nous sommes devenus fragiles là où nous pourrions être très solides.

• 1105

L'apport financier du gouvernement fédéral aide nos organismes dans leurs projets de développement et devrait leur permettre de mettre en place les outils nécessaires à notre épanouissement. Au moment où s'amorcent les négociations pour le renouvellement des ententes Canada-communautés, le ministère du Patrimoine canadien doit pouvoir compter sur des ressources financières adéquates et suffisantes pour répondre à nos besoins. Il est essentiel que nous recevions les ressources nécessaires pour continuer à assurer notre développement. Ainsi, par la suite, nous serons en mesure de continuer à contribuer des efforts considérables pour ensuite appuyer le gouvernement dans l'exercice des rôles qu'il s'est donnés par la Loi sur les langues officielles de 1988.

En province, tout repose sur nos initiatives communautaires puisque la plupart d'entre nous ne peuvent compter que sur un apport minime, pour ne pas dire inexistant, de la part des gouvernements provinciaux.

À ceux et celles qui trouvent que trop d'argent est investi pour appuyer les initiatives de développement des associations francophones, permettez-moi de rappeler que le budget consacré aux programmes d'aide aux communautés de langue officielle ne représente que 0,2 p. 100 du budget total du gouvernement fédéral. Deux dixièmes de 1 p. 100!

Ceux et celles qui qualifient d'excessives les sommes qui nous sont réservées n'ont guère raison et ont certes une vision du Canada qui ne correspond pas à celle inscrite dans notre constitution. Je dois ajouter que nous faisons énormément de diversification économique et d'autofinancement. Par conséquent, nous ne demandons pas au ministère du Patrimoine canadien la somme totale de nos budgets, mais seulement ce qui nous manque pour continuer à fonctionner de façon efficace et dynamique.

Le moment d'augmenter le budget du Patrimoine canadien ne pourrait être plus propice, plus favorable. En 1999, le Canada célébrera le 30e anniversaire de la Loi sur les langues officielles. Le Canada sera l'hôte d'un événement majeur, le Sommet de la francophonie internationale à Moncton. Si nous voulons que les 48 autres pays francophones du monde croient vraiment que la francophonie du Canada est vibrante, dynamique, reconnue et respectée, il faudra le leur démontrer avec fierté et de façon très concrète. Le premier geste concret de la reconnaissance du rôle important que jouent nos communautés dans le façonnement du caractère unique du Canada sera le dépôt du prochain budget fédéral. Ce nouveau budget doit refléter l'engagement du Canada envers ses communautés francophones.

Nous croyons aussi qu'il est essentiel que le fait français, d'un bout à l'autre du pays, soit ainsi officiellement reconnu, respecté et appuyé pour servir les meilleurs intérêts de l'unité canadienne. Il faut absolument démontrer aux Québécoises et aux Québécois qu'ils n'ont rien à craindre d'une assimilation éventuelle en demeurant au sein du Canada. On pourra leur dire: «Regardez, même les francophones vivant en situation minoritaire ne craignent plus l'assimilation parce que nous avons un gouvernement fédéral qui nous accorde son soutien et son engagement tout entier.» Ne donnons pas raison à cet ennemi numéro un qu'est l'assimilation. Faisons-lui la bataille. Ensemble, nous gagnerons.

Pour y arriver, nous recommandons fortement, premièrement, que les initiatives que présentera la ministre du Patrimoine canadien pour bonifier substantiellement la prochaine entente Canada-communautés soient accueillies favorablement par le Cabinet et que ces initiatives reçoivent les crédits supplémentaires nécessaires à leur réalisation. Deuxièmement, nous recommandons que les budgets consacrés au Programme des langues officielles en enseignement soient augmentés afin que le gouvernement du Canada puisse remplir ses engagements en vertu de l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés.

Je vous remercie de votre invitation et de votre attention.

Le président: Merci, madame Archambault.

• 1110

[Traduction]

Nous allons maintenant entendre le représentant des Prairies Pools Inc., M. Marvin Shauf, vice-président. Vous êtes le bienvenu.

M. Marvin Shauf (vice-président, Prairie Pools Inc.): Merci.

Au nom de Prairie Pools, j'aimerais vous remercier de me donner cette occasion de prendre la parole devant votre comité dans le cadre des consultations sur le budget fédéral de 1999.

Je représente trois syndicats des Prairies: l'Alberta Wheat Pool, le Manitoba Pool Elevators et le Saskatchewan Wheat Pool. Ces trois syndicats travaillent ensemble depuis plus de 60 ans sur des questions nationales et internationales.

Selon Statistique Canada, le revenu agricole net dans les Prairies a diminué de 35 p. 100 en Alberta, de 40 p. 100 au Manitoba et de 84 p. 100 en Saskatchewan en 1997, par rapport à 1996. Pour les six premiers mois de 1998, les recettes monétaires agricoles dans les Prairies sont en moyenne de 11 p. 100 inférieures à ce qu'elles étaient au cours de la même période en 1997. Et je parle des recettes monétaires ici; l'effet sur le revenu net correspondant sera énorme.

Le rendement final prévu pour les cultures de blé et de l'orge, qu'on vient de récolter, n'a jamais été aussi bas en plus de cinq ans. On s'attend à une réduction additionnelle de 35 $ la tonne dans les prix du canola cette année, et les prix pour le lin seront également moins élevés.

La situation est aggravée par des augmentations constantes des coûts reliés à la production et au transport des céréales et des graines oléagineuses dans les Prairies. Les frais de transport ont plus que doublé depuis 1995. Les coûts de fonctionnement des équipements ont augmenté de 21 p. 100. Les engrais ont subi une hausse de prix de 57 p. 100. Et le coût des produits utilisés pour la protection des cultures s'est accru de plus de 63 p. 100 en cinq ans.

Les agriculteurs des Prairies dépendent presque entièrement du marché mondial. Entre 50 p. 100 et 80 p. 100 des céréales et des oléagineux et de leurs dérivés dans les Prairies sont destinés à l'exportation. Lorsque les prix internationaux sont faussés par des subventions et par d'autres activités qui influent sur le commerce, le revenu agricole dans les Prairies chute.

Nos principaux concurrents dans le marché mondial sont moins sensibles aux fluctuations de prix. Les céréaliculteurs européens reçoivent l'équivalent de 175 $ canadiens seulement pour avoir semé. Ils bénéficient en outre de prix garantis pour leur production. En 1998, on garantit aux producteurs de blé européens l'équivalent de 205 $ la tonne. Ce prix, à lui seul, est bien au-dessus des prix mondiaux actuels et projetés.

Les agriculteurs américains bénéficient également d'un prix garanti pour leur production de blé. Le prix minimum pour le blé aux États-Unis se situe actuellement à 145 $ canadiens la tonne, ce qui est plus élevé que le prix projeté par la Commission canadienne du blé. Par ailleurs, les agriculteurs américains reçoivent des paiements d'aide directs, et les céréaliculteurs reçoivent un montant additionnel de 24 $ la tonne.

De tels programmes d'aide nationale encouragent la production. En fait, les stocks de blé que détient actuellement l'Union européenne sont les plus grands de son histoire. La prochaine mesure prise par ces pays consiste à se servir de subventions pour écouler les stocks. L'Union européenne offre des subventions à l'exportation qui se chiffrent à plus de 60 $ canadiens la tonne pour le blé, 108 $ la tonne pour l'orge et plus de 140 $ la tonne pour le malt.

On prévoit que les prix que nous obtiendrons seront les plus bas depuis cinq ans. Et on n'envisage aucun redressement du marché qui pourrait aider les agriculteurs qui ont déjà subi une réduction spectaculaire dans leur revenu.

Nous désirons collaborer activement avec le gouvernement afin d'évaluer la situation et d'élaborer un programme qui corrigera le problème sans fausser la production et sans nuire à la capacité de notre industrie à réagir, capacité qui nous a demandé de grands efforts.

En même temps, il faut prendre des mesures à l'égard des coûts. Premièrement, nous demandons au gouvernement de geler immédiatement toutes les mesures de recouvrement des coûts. On estime que les agriculteurs canadiens paient déjà plus de 100 millions de dollars par année pour des services fournis ou exigés par le gouvernement. Les producteurs n'ont pas les moyens de payer plus.

• 1115

L'évaluation du besoin pour certains de ces services et leur prestation constituent certes un objectif à long terme, mais nous vous demandons de recommander que le gouvernement ne mette pas en place d'augmentations supplémentaires ou de nouveaux droits. Nous mentionnons en particulier les nouveaux droits pour le déglaçage prévus par la Garde côtière canadienne et l'augmentation prévue dans les droits pour les services d'entretien et de dragage dans la Voie maritime du Saint-Laurent.

On a aussi annoncé une augmentation des frais d'inspection de l'Agence canadienne d'inspection des aliments. On a annoncé une augmentation des frais liés aux programmes publics de prêts tels que les prêts destinés aux améliorations agricoles. L'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire pourrait bientôt proposer une augmentation de ses frais et la Commission canadienne des grains, qui doit faire face à des réductions de volumes, envisagerait vraisemblablement une augmentation de ses frais afin de combler un déficit budgétaire. À ces mesures s'en ajoutent d'autres qui finiront par faire augmenter les coûts pour les agriculteurs, et on ne devrait pas les mettre en oeuvre à l'heure actuelle.

Deuxièmement, on est en train d'achever un examen important du système de transport des céréales dans l'Ouest. Nous espérons que cet examen débouchera sur des recommandations qui permettront de réaliser des gains d'efficacité et ainsi d'économiser des centaines de millions de dollars pour les producteurs des Prairies.

Troisièmement, tous les paliers de gouvernement devraient agir sans délai pour réviser les mesures fiscales qui désavantagent nos producteurs par rapport à leurs concurrents.

Tout en admettant que les questions fiscales sont complexes, nous soutenons que c'est dans le meilleur intérêt des agriculteurs, des Prairies et du Canada que de s'attaquer ensemble aux différences en ce qui concerne la fiscalité.

À plus long terme, nous espérons que l'industrie et le gouvernement pourront travailler ensemble à l'élaboration d'un accord commercial international qui permettra à notre industrie de livrer concurrence en s'appuyant sur ses avantages naturels et la qualité de ses produits, accord qui comporterait l'élimination des subventions à l'exportation et un élargissement considérable de l'accès aux marchés; l'identification et l'élimination des barrières réglementaires nationales et d'autres obstacles qui défavorisent notre industrie par rapport à leurs concurrents; l'élaboration d'un véritable programme de sécurité du revenu national comprenant un programme d'aide en cas de désastre pour permettre aux producteurs de faire face aux risques posés par les conditions météorologiques et le marché; un engagement visant à financer la recherche fondamentale dans le domaine agricole afin de s'assurer que les producteurs disposent des meilleurs outils agronomiques et technologiques possible.

Pour conclure, je tiens à réitérer que les agriculteurs des Prairies vivent une situation financière très difficile cette année. C'est une situation qui risque de s'aggraver à mesure que l'Union européenne augmentera ses stocks et les écoulera sur le marché international par le biais de subventions accrues à l'exportation, et à mesure que les effets de la crise financière en Asie continueront à se faire sentir.

Le Prairie Pools veut travailler avec le gouvernement et avec d'autres intervenants afin d'élaborer des stratégies à court terme destinées à aider les agriculteurs qui font face à des prix en baisse et à une demande réduite. Cependant, à plus long terme, nous préconisons l'établissement, au niveau mondial, de règles commerciales qui nous permettront de concurrencer sur un pied d'égalité. Nous préconisons aussi la mise en place de programmes canadiens qui n'entravent pas mais renforcent notre capacité naturelle de concurrencer.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Shauf.

Nous passons maintenant aux représentantes de l'Immigrant Women Society: Mme Judy Kobsar, présidente, et Bozana Cosic, directrice exécutive intérimaire. Vous êtes les bienvenues.

Mme Judy Kobsar (présidente, Immigrant Women of Saskatchewan): J'aimerais commencer par vous remercier d'avoir invité l'Immigrant Women of Saskatchewan, bureau de Regina, à prendre la parole ce matin.

J'aimerais vous donner un bref aperçu de notre mandat et ensuite je ferai un survol.

Notre organisme défend le principe de l'égalité de tous les hommes et femmes, et aspire à faire disparaître le sexisme, le racisme et toutes les autres formes de discrimination. Il vise aussi à accroître la compréhension interculturelle afin de créer une société plus harmonieuse.

L'IWS chercher à promouvoir le bien-être des immigrantes par la création de systèmes sociaux qui permettent à ces femmes de participer pleinement dans la société canadienne et de s'épanouir.

L'Immigrant Women of Saskatchewan est un organisme à but non lucratif qui cherche à promouvoir l'égalité pour les immigrantes et à leur donner les moyens de faciliter leur adaptation à la société canadienne.

• 1120

Notre organisme exerce des pressions au nom des immigrantes et de leurs familles et leur fournit des services appropriés. L'organisme a été fondé en 1983, et depuis, il a élaboré bon nombre de programmes et entrepris plusieurs projets innovateurs pour sensibiliser les gens aux questions liées aux immigrantes et pour leur fournir appui et service.

J'aimerais parler brièvement de notre travail. Le Bureau de l'IWS à Regina adopte une approche holistique et offre des services aux immigrantes et aux réfugiés à Regina, comme des ateliers éducatifs, un programme d'adaptation au milieu et un cours de promotion humaine. Il offre aussi un service de référence et fournit de l'aide à ceux qui se sentent seuls, à ceux qui se sentent privés de leurs droits, et aux femmes qui sont maltraitées ou victimes de violence. En outre, il aide les immigrantes à trouver un emploi, surtout dans les sociétés d'État, en faisant valoir le programme d'équité en matière d'emploi. Nous donnons une formation de commis de bureau aux immigrantes qui veulent travailler comme bénévoles dans notre bureau.

Notre organisme travaille sur des dossiers qui concernent les immigrantes, grâce à un outil puissant de changement social qui s'appelle Popular Theatre, qui est notre compagnie théâtrale. Nous aidons nos clients à trouver du travail de nettoyage et de gardiennage, etc., dans la communauté. Nous aidons les immigrantes à s'établir et à s'intégrer dans la communauté.

J'aimerais parler de certains de nos projets et réalisations: une série d'ateliers éducatifs qui traitaient de la violence familiale; les pièces de théâtre de notre compagnie Popular Theatre; des activités sociales, telles que les services de traiteur; et une émission intitulée Global Gourmet, qui est télédiffusée depuis trois ou quatre ans au poste 7, sur le câble à Regina. Grâce à cette émission, nous avons fait connaître notre organisme et avons sensibilisé le grand public aux contributions des immigrantes à ce pays.

Nous avons aussi un groupe de soutien pour les immigrants et pour les adolescents. Ce groupe est le premier du genre au Canada, à ma connaissance.

Nous entretenons des contacts avec l'Organisation nationale des femmes immigrantes et des femmes appartenant à une minorité visible du Canada, qui est notre organisation mère au niveau national; le Canadian Council for Refugees; le Canadian Women's Health Network; le Saskatchewan Action Committee; la Société John Howard; le YM-YWCA; HELP; la banque alimentaire; la SEEPA Transition House; la Sofia House; le Mobile Crisis Centre; la Saskatchewan Coalition Against Racism; et la Saskatchewan Association on Human Rights.

Nous sommes affiliées à un certain nombre d'organisations membres, entre autres: le Congress of Black Women; la Philippine Association of Saskatchewan; la Eritrean Women's Association; la African Association; la Domestic Workers Association; la Jamaican Association; la Saskatchewan Workers Association; et la Caribbean Association.

Cette année, nous avons fait des efforts considérables pour donner une formation en restauration à nos clientes en collaboration avec la banque alimentaire de Regina et les environs. Cinq des femmes qui ont participé à cette formation ont obtenu un emploi dans des hôtels.

Dix de nos clientes participent à notre compagnie théâtrale; deux clientes travaillent comme bénévoles dans notre bureau et une cliente occupe le poste de directrice exécutive intérimaire. Cinq autres clientes travaillent dans notre bureau de temps à autre.

En ce qui concerne notre financement, Condition féminine Canada et le ministère du Patrimoine canadien nous accordent une assistance financière, et récemment nous avons reçu des fonds du gouvernement provincial par le biais du programme d'études postsecondaires pour les nouvelles carrières. Ces fonds nous ont permis d'acheter un ordinateur et d'offrir à certains de nos membres une formation sur l'utilisation d'un ordinateur, Internet etc.

• 1125

Un de nos objectifs est de fournir une tribune pour la promotion de nos besoins et nos préoccupations; nous voulons militer non seulement pour les femmes immigrantes mais aussi pour les hommes immigrants parce que nous avons constaté que bon nombre de femmes se présentent à notre bureau avec leur famille. Donc, nous devons être prêts à travailler avec eux.

Nous publions des documents, au rythme d'environ trois par année. Notre bulletin a été publié peu après notre fondation. Plus récemment, pourtant, il a été transformé en magazine, qui est publié trimestriellement. Ce magazine est diffusé auprès de nos membres et d'autres organisations. Nous préparons aussi de la documentation afin d'informer les immigrantes sur plusieurs sujets, entre autres, la santé, le droit, la violence contre les femmes et les services communautaires.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, madame Kobsar.

Nous entendrons maintenant les représentants du Saskatchewan Wheat Pool, MM. Marvin Wiens et Mitchell Demyen. Bienvenue.

M. Marvin Wiens (vice-président, Saskatchewan Wheat Pool): Bonjour et merci. Le Saskatchewan Wheat Pool est heureux de participer de nouveau à vos consultations prébudgétaires.

Tout d'abord, nous tenons à féliciter le gouvernement d'avoir réussi à équilibrer son budget. Le gouvernement a atteint avant la date prévue son objectif de surplus budgétaire pour l'exercice financier 1997-1998. Le gouvernement fédéral, et tous les Canadiens, peuvent en être fiers. Cette réalisation permet au Canada d'être mieux en mesure de faire face à l'incertitude économique mondiale actuelle et de résister au ralentissement de la croissance qui peut se produire.

Lorsque votre comité a entrepris ses consultations, vers la fin du printemps, vous nous avez invités à répondre à quatre questions. Vous avez demandé quelles priorités devraient être fixées à l'égard du dividende budgétaire, quels investissements et quels changements au régime fiscal seraient nécessaires pour atteindre ces objectifs prioritaires, comment on pourrait aider les Canadiens à mieux profiter des occasions qui s'offrent et comment le gouvernement pourrait s'assurer d'élargir les possibilités d'emploi. Ces questions traduisent peut-être un optimisme peu en rapport avec la situation actuelle.

Nous avons remarqué que la décision du gouvernement d'affecter le surplus de l'exercice précédent à la réduction de la dette pour protéger notre santé financière nationale est devenue, pour le ministre des Finances, une condition incontournable. Nous reconnaissons qu'il faut faire preuve de prudence; toutefois, nous convenons de ce que vos quatre questions demeurent valables. Il faut établir des objectifs prioritaires. Ces objectifs pourraient même être encore plus importants dans une période d'incertitude économique.

Le Saskatchewan Wheat Pool estime qu'il faut accorder la priorité à la santé de l'agriculture canadienne, dans le prochain budget. L'incertitude économique mondiale a beaucoup nui à notre secteur. En raison de la diminution du pouvoir d'achat dans les pays asiatiques, il y a eu une réduction des prix et des quantités de denrées agricoles canadiennes qui sont maintenant exportées. Parallèlement, la faiblesse du dollar canadien a fait augmenter nos coûts de production, et notre prix se situe dans le contexte nord-américain. En outre, notre secteur ressent encore les effets de l'intervention politique que constituent les subventions et le harcèlement commercial. Bref, la dépendance de l'agriculture envers les marchés d'exportation a exercé sur nous les mêmes pressions qui ont amené le gouvernement fédéral à revoir sa propre situation financière au cours des derniers mois.

Notre secteur a beaucoup contribué à l'équilibre du budget grâce à une réduction du financement des programmes et à une augmentation du recouvrement des coûts. Depuis 1992, les prestations directes des programmes aux producteurs des provinces des Prairies ont chuté de près de 50 p. 100. Durant la même période environ, les droits de recouvrement des coûts ont plus que doublé.

En pourcentage, ces compressions et ces augmentations de coûts ont été bien supérieures à celles des États-Unis ou de l'Union européenne, qui sont nos principaux concurrents. Cela signifie que les politiques fédérales nuisent de plus en plus à la compétitivité de l'agriculture sur le marché mondial. Nous estimons donc que le moment est maintenant venu d'inverser certaines réductions du financement et certaines mesures de recouvrement des coûts qui ont été imposées auparavant au secteur agricole.

Pour ce qui est du recouvrement des coûts, nous estimons que le secteur canadien de l'agriculture et de l'agroalimentaire payera plus de 100 millions de dollars par année pour la prestation de services fournis et souvent exigés par le gouvernement fédéral. Le secteur des céréales et des oléagineux doit tout assumer, aussi bien les services de classement et d'inspection que l'enregistrement et la réévaluation des produits phytopharmacologiques, de même que les aides à la navigation et, bientôt, le service de brise-glace.

• 1130

D'une manière générale, nous ne nous opposons pas aux mesures de recouvrement des coûts. Il faut toutefois tenir compte de la capacité du secteur d'en payer les frais et éviter de nuire à sa compétitivité. Dans le cas des services obligatoires, les utilisateurs devraient avoir leur mot à dire sur la prestation et les modalités de ces services, ainsi que sur les frais qui sont réclamés à leur titre. En outre, si le service fourni correspond à l'intérêt public, les coûts du service devraient être assumés par le public.

Permettez-moi de mentionner brièvement quelques autres domaines. Le premier, ce sont les négociations commerciales que l'on prévoit entreprendre l'an prochain et les discussions actuelles avec le gouvernement américain. Nous sommes heureux que le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire de la Chambre des communes ait décidé d'examiner ces questions et nous prévoyons participer à ces travaux. Nous exhortons le gouvernement du Canada, dans toutes les négociations commerciales, à défendre fermement un commerce libre et équitable, la réduction des tarifs douaniers, l'élimination des subventions à l'exportation et une réduction importante des subventions nationales qui faussent les échanges. À long terme, c'est une amélioration de l'accès réel aux marchés qui garantira le succès de notre agriculture à l'échelle internationale.

Le deuxième domaine, c'est le transport. En 1995, le gouvernement fédéral a abrogé la Loi sur le transport du grain de l'Ouest et aboli la subvention du Nid-de-Corbeau. Ces deux mesures octroyaient chaque année aux producteurs de graines oléagineuses et de céréales une aide financière de 550 millions de dollars au titre du transport. Leur élimination a provoqué une baisse radicale des revenus des producteurs et déclenché une série de mesures importantes d'adaptation structurelle et de pressions en vue de réduire notre infrastructure ferroviaire. Il en est résulté un affaiblissement important de notre infrastructure routière, qui doit maintenant être reconstruite ou améliorée, et ce, à grands frais. Il conviendrait que le gouvernement fédéral verse des fonds supplémentaires pour compenser les frais d'adaptation qu'a entraînés cette politique.

Le troisième domaine, c'est la politique fiscale. Voilà l'un des obstacles les plus importants de notre secteur en matière de compétitivité internationale. Il est extrêmement important que tous les ordres de gouvernement coordonnent leurs efforts pour régler le problème de la politique fiscale et de ses répercussions.

En outre, nous souhaitons parler du financement public de la recherche agricole. Les nouvelles pratiques de production, le recours à des équipements perfectionnés sur le plan technologique, les grands pas en avant dans le domaine des biotechnologies ainsi que la mise au point de nouvelles variétés font en sorte que notre secteur agricole est concurrentiel et devient plus viable sur le plan écologique. Nous invitons le gouvernement fédéral à accorder une plus grande priorité au financement de la recherche agricole.

Enfin, nous voulons souligner l'importance de mettre en place un programme bien adapté de protection du revenu. Lorsque les producteurs ne peuvent gagner leur vie sur les marchés en raison de facteurs internationaux—facteurs indépendants de leur volonté—il incombe au gouvernement de prendre des mesures de sécurité du revenu, comme cela se fait pour d'autres secteurs de la société. Les dépenses visant les programmes de soutien du revenu ont baissé, passant d'un sommet de plus de 2 milliards de dollars en 1993 à un total prévu de 700 millions de dollars en 1998—et ce, pour l'ensemble du Canada. Compte tenu des facteurs que j'ai mentionnés précédemment, il faut souligner que le montant total du financement fourni par le gouvernement dans le cadre des programmes actuels de sécurité du revenu est tout simplement insuffisant. Des programmes complets de sécurité du revenu conçus pour protéger les agriculteurs contre ces facteurs incontrôlables sont un élément essentiel du partenariat économique entre le gouvernement et l'industrie.

Nous invitons le comité à revoir les engagements de dépense du gouvernement en ce qui concerne ces programmes. Nous demandons que le montant de l'aide financière accordée par le gouvernement fédéral sous forme de mesures de protection du revenu soit déterminé à la suite d'une évaluation des besoins et, deuxièmement, que le gouvernement fédéral confie au Comité national d'examen des mesures de protection du revenu la tâche de mettre au point un programme national d'aide en cas de désastre.

Un peu plus tôt ce matin, j'ai participé à une conférence téléphonique du comité consultatif du service d'écoute téléphonique des agriculteurs, ici en Saskatchewan. On nous a dit que le nombre d'appels reçus au service d'écoute avait atteint un nombre record en septembre. Cette augmentation est due à la situation actuelle du revenu agricole en Saskatchewan et dans les provinces des Prairies.

Pour conclure, les programmes de sécurité du revenu, le recouvrement des coûts, les négociations commerciales, le transport, la politique fiscale et la recherche agricole jouent tous un rôle important dans le bien-être économique à court et à long terme du secteur agricole. Nous prions votre comité d'examiner soigneusement tous ces domaines quand il formulera ses recommandations en vue du prochain budget fédéral.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Wiens.

Nous entendrons maintenant Mme Marjorie Brown, présidente de la Graduate Students's Association de l'Université de Regina. Bienvenue.

• 1135

Mme Marjorie Brown (présidente, Graduate Students' Association, Université de Regina): Je tiens à remercier le comité de me donner l'occasion de témoigner au nom des étudiants de notre province. Je représente la Graduate Students' Association, association qui représente environ 750 étudiants diplômés de l'Université de Regina; nous travaillons toutefois en étroite collaboration avec la Students' Union de l'université, qui représente environ 10 000 étudiants.

À l'instar d'autres organismes du domaine de l'éducation, la Graduate Students' Association tient à souligner que l'éducation était un élément clé du budget de 1998. Nous en avons été fort heureux. Le dernier budget contenait plusieurs mesures positives, plus particulièrement les bourses d'études du Canada à l'intention des étudiants qui ont des personnes à charge et l'augmentation du financement des conseils subventionnaires. Il contenait également d'autres mesures qui pouvaient avoir des effets positifs, dont l'allégement des intérêts pour les étudiants. Cependant, le programme d'allégement des intérêts ne touche pas en fait le capital des prêts étudiants. Nous estimons que cette mesure profite peut-être davantage aux banques qui reçoivent le paiement de ces intérêts qu'aux étudiants qui souffrent d'un endettement trop lourd.

Le programme de remise de prêts était également une mesure positive. Malheureusement, seul un nombre très limité d'étudiants peut s'en prévaloir. En fait, cette mesure ne s'applique qu'aux étudiants dans les pires des cas. Il s'agit des étudiants qui remboursent leurs prêts depuis au moins cinq ans et qui ont épuisé tous les recours à d'autres programmes pour obtenir un allégement.

Dans le dernier budget, le gouvernement a créé trois programmes qui retiennent souvent l'attention mais qui, en fait, posent de nombreux problèmes. Il s'agit du régime enregistré d'épargnes-études, des crédits d'impôt et du fonds des bourses d'études du millénaire.

Le régime enregistré d'épargnes-études n'aide en rien les personnes à faible revenu. En fait, ce programme encourage les familles à commencer à épargner en vue des études postsecondaires de leurs enfants, et ce, dès la naissance de ceux-ci. Ce n'est tout simplement pas possible pour les familles à faible revenu. Nous estimons que cette mesure vise en fait à décharger le gouvernement d'une partie de son obligation de fournir une aide aux étudiants qui atteignent l'âge de faire des études postsecondaires. Elle place dans une position très précaire les familles qui n'ont pas été en mesure de faire de telles économies.

De la même façon, les crédits d'impôt au titre des coûts des études postsecondaires ne profitent qu'aux étudiants qui disposent d'un revenu élevé, ce qui est invraisemblable si l'on considère que le chômage chez les jeunes atteint plus de 15 p. 100 et que l'endettement moyen des étudiants est actuellement de 25 000 $.

Le fonds des bourses d'études du millénaire nous avait donné l'espoir que les étudiants pourraient recevoir des bourses, mais d'après les calculs, ce fonds n'aidera que 7 p. 100 des étudiants dans le besoin au lieu des 75 p. 100 d'étudiants qui, d'après nos estimations, ont besoin de cette aide. En outre, nous trouvons préoccupants les intérêts privés qui semblent dominer le conseil d'administration du fonds des bourses d'études du millénaire. Le président du conseil est le PDG de Bell Canada, et deux autres directeurs ou administrateurs de Bell Canada siègent également au sein du conseil. À l'inverse, on ne trouve qu'un étudiant au sein de ce conseil. Entre parenthèses, je signale que Bell Canada doit encore au gouvernement 1,9 milliard de dollars en impôt différé pour l'exercice de 1995. Si le gouvernement cherche à accroître le financement des études postsecondaires, il pourrait peut-être envisager de percevoir cette somme.

La deuxième conférence annuelle du secteur de l'éducation a confirmé nos craintes quant à l'orientation vers la privatisation de l'enseignement postsecondaire. Nous joignons donc notre voix à celle du Conseil des ministres de l'Éducation, c'est-à-dire des ministres des diverses provinces, qui réclame que le gouvernement fédéral veille à ce que l'argent du fonds des bourses d'études du millénaire soit distribué par le truchement des mécanismes actuels d'aide financière aux étudiants, afin que cet argent soit accordé aux étudiants qui en ont besoin.

Nous sommes extrêmement inquiets des mesures relatives à la faillite qui ont été adoptées l'an dernier. Il est maintenant interdit aux étudiants de déclarer faillite pour une période de dix ans. Certains administrateurs de faillite estiment que cette mesure pourrait même accroître le taux de suicide chez les étudiants qui ont contracté des prêts étudiants et que leur endettement pourrait mener au désespoir.

• 1140

Honnêtement, nous ne comprenons pas pourquoi ces mesures ont été adoptées. Dix-huit pour cent seulement de tous les prêts étudiants consentis en 1996 sont actuellement en situation de non-remboursement. Depuis que le programme de prêts étudiants a été créé en 1964, 93 p. 100 des prêts étudiants ont été remboursés. Enfin, 15 p. 100 seulement des prêts consentis aux grandes entreprises ont été remboursés depuis 1982. Si le gouvernement fédéral cherche qui ne rembourse pas ses prêts, ce n'est pas vers les étudiants qu'il doit se tourner.

Nous sommes également inquiets de l'augmentation des vérifications de crédit et de la possibilité que les étudiants se voient refuser des prêts en raison de mesures adoptées par le gouverneur en conseil. Nous avons donc quatre recommandations à faire pour ce qui est du budget fédéral de 1999. Nous aimerions que soit modifiés les programmes créés en 1998 et nous avons quatre mesures à proposer qui pourraient aider dans une certaine mesure les étudiants assiégés par une augmentation des frais de scolarité, par une diminution de l'aide financière aux étudiants, par une augmentation de l'endettement et par des perspectives d'emploi incertaines.

Puisque le budget du gouvernement est équilibré, il est maintenant nécessaire que le gouvernement intervienne dans l'économie en réinvestissant dans les programmes sociaux et qu'il rejette les demandes de réduction d'impôt. De toute évidence, l'économie mondiale est actuellement en crise. Les économies d'Asie se sont effondrées, les indices du marché boursier canadien ont subi des chutes spectaculaires et divers politiques ont même expliqué que nous entrons peut-être en fait dans une période de récession.

En période de crise économique, il est nécessaire de stabiliser les systèmes économiques. Ce n'est pas en se retirant davantage de la scène économique que les gouvernements assureront cette stabilité. Ils devront pour cela intervenir dans l'économie et réglementer celle-ci. Les citoyens doivent avoir ce sentiment de stabilité, et le gouvernement peut le leur donner par le truchement de programmes sociaux qui redistribuent la richesse qui existe au Canada tout en offrant des possibilités aux travailleurs et aux Canadiens qui sont tombés dans la pauvreté.

La Graduate Student's Association demande au gouvernement de rejeter les demandes de réduction d'impôt car elles sont prématurées dans le contexte économique actuel. Nous demandons au gouvernement de réinvestir le surplus du budget dans les programmes sociaux qui ont subi des compressions massives au cours des dernières années.

Il est temps, à notre avis, que le gouvernement rende accessible l'enseignement postsecondaire. Depuis 1993, le financement de l'enseignement postsecondaire par le truchement du Transfert canadien au titre de la santé et des programmes sociaux a été réduit de 2,29 milliards de dollars. Comme je l'ai dit, on en voit clairement les effets. L'endettement moyen des étudiants est passé de 5 260 $ en 1982 à 25 000 $ par étudiant aujourd'hui. Dans ma propre université, les frais de scolarité ont plus que doublé au cours des dix dernières années, et il en est de même dans la plupart des autres établissements canadiens. Les frais de scolarité que je paie moi-même ont doublé, depuis que j'ai entrepris ma première année d'étude de premier cycle jusqu'à cette année, qui est ma deuxième de deuxième cycle. Toutefois, mon accès au financement n'a pas doublé pour autant.

Nous trouvons cette situation ironique, compte tenu de ce que les pays qui financent en totalité leurs programmes d'enseignement postsecondaire disent que leurs politiques de gratuité scolaire augmentent les débouchés économiques des étudiants tout en favorisant la croissance économique dont ces pays ont besoin. Récemment, la présidente de l'Irlande, Mary McAleese, a visité le Canada et signalé la réussite de la politique de gratuité scolaire de l'Irlande. Mme McAleese a également fait remarquer que l'accès accru à l'université favorise le développement économique rural; on sait que c'est une question particulièrement importante pour les étudiants de la Saskatchewan.

• 1145

Outre la difficulté que pose un accès moins grand à l'enseignement postsecondaire, les étudiants—et plus particulièrement les étudiants diplômés—ont souffert d'une diminution spectaculaire du financement qui est à leur disposition au titre de la recherche. La réduction de ce financement rend extrêmement difficile la poursuite d'études de deuxième et de troisième cycles, tant pour les étudiants eux-mêmes que pour ce qui est de leurs réalisations au moyen des ressources limitées de recherche à leur disposition. Le dernier budget a augmenté dans une certaine mesure le financement des conseils subventionnaires, mais cette mesure n'a fait que le ramener au niveau où il était en 1993.

La Graduate Student's Association demande au gouvernement d'imposer immédiatement un gel national des frais de scolarité afin que l'enseignement postsecondaire soit accessible à tous les Canadiens et afin de fournir au pays un mécanisme valable de stabilité et de croissance économique. Une telle mesure aiderait des étudiants comme moi à avoir une vie un peu plus stable. Au cours de mes études, j'ai vu mes frais de scolarité doubler.

Nous demandons au gouvernement de transformer le fonds des bourses d'études du millénaire en un système de subventions entièrement axées sur les besoins.

Nous demandons à ce que soient abolies les mesures discriminatoires qui empêchent les faillites au titre des prêts étudiants.

Nous demandons une interdiction des programmes d'enseignement postsecondaire privés à but lucratif qui constituent une réalité toujours croissante à notre époque de compression des budgets de l'enseignement postsecondaire. Les sociétés privées ont déclaré très franchement que le manque de financement de l'enseignement postsecondaire leur a donné l'occasion de pénétrer ce marché et d'en faire un régime à but lucratif.

Nous demandons une augmentation du financement des conseils subventionnaires, plus particulièrement du Conseil de recherches en sciences humaines.

Enfin, nous estimons qu'il est temps que le gouvernement fasse davantage pour régler le problème du chômage chez les jeunes et qu'il rembourse aux travailleurs cotisants le surplus de l'assurance-emploi. Le taux de chômage chez les jeunes demeure supérieur à 15 p. 100 au Canada, ce qui réduit la possibilité pour les étudiants de payer le coût élevé de l'enseignement postsecondaire. On peut voir clairement comment tout cela se répercute sur la viabilité de programmes comme les programmes de crédit d'impôt ou le régime enregistré d'épargne-études. S'il n'existe pas d'emplois pour gagner de l'argent, ces programmes ne signifient pas grand-chose.

Le secteur privé s'est révélé incapable de fournir à lui seul des possibilités d'éducation aux jeunes, et ce, pendant des périodes de croissance et de stabilité économiques. Avec la récession qui s'annonce, les étudiants craignent de devoir s'en remettre au secteur privé. Le gouvernement a un rôle à jouer pour ce qui est d'assurer la stabilité et la croissance économique; il doit intervenir et mettre sur pied de vrais programmes pour réduire le chômage chez les jeunes.

Les réductions imposées au programme d'assurance-emploi ont par ailleurs entraîné de graves difficultés pour les chômeurs canadiens. Les taux élevés de pauvreté qui continuent à exister au Canada d'après les rapports des Nations Unies et aussi la crise des sans-abri que nous connaissons à l'heure actuelle en sont des manifestations. Les étudiants en particulier se voient systématiquement refuser les prestations d'assurance-emploi. L'accès aux prestations est très limité en raison de la nature du régime. À l'heure actuelle, 36 p. 100 seulement des chômeurs sont admissibles à quelque prestation que ce soit. Les taux élevés de chômage et de pauvreté ne sont guère propices à la stabilité économique. Par conséquent, la Graduate Students' Association invite le gouvernement à s'engager à mettre sur pied de nouveaux programmes pour s'attaquer au chômage chez les jeunes et à remettre les excédents de la caisse d'assurance-emploi aux travailleurs et aux employeurs qui y ont cotisé, en éliminant les restrictions à l'admissibilité à l'assurance-emploi et en relevant les niveaux des prestations.

Chose certaine, le processus budgétaire fédéral de 1999 sera difficile, compte tenu des nombreux intérêts contradictoires qui voudront se faire entendre. La possibilité qu'il y ait un surplus dans le budget de 1998 et le surplus qui existe à l'heure actuelle dans la caisse d'assurance-emploi ajoutent sans doute à la difficulté. Le gouvernement sera soumis à des pressions intenses de la part du secteur privé pour qu'il cesse d'intervenir dans la vie des Canadiens et qu'il accorde aux entreprises des incitatifs financiers supplémentaires, notamment des réductions d'impôt. Nous tenons toutefois à rappeler au gouvernement que, si le déficit a été éliminé, ce sont les travailleurs canadiens et les pauvres qui en ont payé le prix en raison des réductions massives qui ont été effectuées dans des programmes sociaux comme l'enseignement postsecondaire. En outre, c'est une période de grande incertitude financière qui s'annonce pour les pauvres et les travailleurs canadiens, et il faudra une intervention vigoureuse de la part du gouvernement pour empêcher que la qualité de vie de ces personnes diminue encore davantage et que l'accès aux programmes sociaux de base se trouve encore plus limité.

La Graduate Students' Association de l'Université de Regina exhorte le gouvernement à se rappeler ces faits pendant le processus budgétaire et à donner suite aux recommandations que nous formulons afin d'atténuer quelque peu les besoins des étudiants canadiens.

Merci.

• 1150

Le président: Merci beaucoup, madame Brown.

Pour la période de questions, nous commencerons par M. Epp.

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Je tiens tout d'abord à remercier tous les témoins qui sont venus ici aujourd'hui. Vous vivez tous en Saskatchewan, bien entendu, et vous êtes donc ici chez vous. Pour moi, notre visite ici s'apparente à des retrouvailles, puisque j'ai obtenu mon diplôme de l'université de cette ville il y a de cela un certain nombre d'années.

Je suis très intéressé par vos témoignages respectifs. Nous parlons ici de répartition budgétaire, et je dois prendre garde de bien répartir le peu de temps dont je dispose avant que d'autres membres du comité n'obtiennent la parole. Je vous demanderai donc de donner des réponses très brèves.

Ma première question s'adresse à Mme Kobsar. Vous nous avez bien expliqué tout ce que vous faites, mais je ne vous ai pas entendu formuler de recommandations précises en vue du budget, ce pourquoi nous sommes là. Avez-vous des recommandations précises à nous faire? Qu'est-ce que le gouvernement fédéral devrait faire dans son prochain budget pour vous aider?

Mme Judy Kobsar: Merci beaucoup, monsieur Epp. Je suis désolée de ne pas en avoir parlé aussi clairement que j'aurais dû.

J'aimerais bien que le gouvernement fédéral nous accorde plus de fonds dans son prochain budget. Les femmes immigrantes, réfugiées et membres de minorités visibles ont des projets qu'elles aimeraient mettre en oeuvre, mais elles ne reçoivent pas assez de fonds du gouvernement fédéral. Comme je l'ai déjà dit, nous avons droit à un certain financement de Condition féminine Canada. Ce sont les seuls fonds qui nous proviennent du gouvernement fédéral. Nous ne recevons rien d'autre.

Nous nous tirons plus ou moins d'affaires grâce au service de traiteur que nous avons mis en place. Un certain nombre de femmes du domaine des services sociaux nous aident avec ce service. Notre organisation a droit à 15 p. 100 des revenus qu'elle gagne ainsi...

M. Ken Epp: D'accord. Si vous me permettez de vous interrompre, vous voudriez donc avoir plus de financement direct de la part du gouvernement.

Mme Judy Kobsar: Oui.

M. Ken Epp: Dans un budget récent, le gouvernement a fait passer à 50 p. 100 du revenu net le montant des déductions pour dons de charité. Cela vous aide-t-il? Faites-vous des levées de fonds auprès du privé?

Mme Judy Kobsar: Nous faisons bien sûr des levées de fonds auprès du privé: nous organisons des dîners, et des banquets et d'autres activités de ce genre qui nous aident un petit peu.

M. Ken Epp: Recevez-vous des dons des vôtres en tant qu'organisme de...? Êtes-vous enregistrés...

Mme Judy Kobsar: Non, nous ne recevons pas de dons, parce que nous n'avons pas de numéro de charité.

M. Ken Epp: En vouliez-vous un?

Mme Judy Kobsar: Oui.

M. Ken Epp: En avez-vous demandé un? Vous en a-t-on refusé un?

Mme Judy Kobsar: Oui, nous en avons demandé un, mais on nous l'a refusé—n'est-ce pas?

Mme Bozana Cosic (directrice exécutive intérimaire, Immigrant Women of Saskatchewan): Oui.

Mme Judy Kobsar: Oui. Nous sommes sur la liste d'attente.

C'est donc un obstacle pour nous, puisqu'il y a un certain nombre de personnes qui aimeraient bien nous faire des dons, mais nous n'avons pas de numéro de charité. Si vous me permettez d'entrer un peu dans les détails, l'organisme Centraide de Regina est d'ailleurs prêt à nous donner de l'argent, mais parce que nous n'avons pas de numéro de charité, cela nous nuit.

M. Ken Epp: Il me semble qu'il y aurait peut-être lieu de faire des démarches de ce côté-là.

Mme Judy Kobsar: Oui.

M. Ken Epp: En tout cas, je dois poursuivre, car j'ai encore beaucoup de questions.

Ayant grandi sur une ferme de la Saskatchewan, je suis intrigué par ces gens-là. Vous savez, les problèmes sont toujours les mêmes. Je me souviens, quand j'étais enfant et que nous vivions dans une ferme près de Swift Current, dans le sud de la Saskatchewan, que mon père parlait de ces mêmes problèmes à l'époque où le tarif du Nid-de-Corbeau était toujours en place, même s'il fallait que notre blé se rende jusqu'à Winnipeg pour le toucher. Le tarif comportait toutes sortes d'aberrations.

J'ai une question à poser à l'un ou l'autre des représentants du milieu agricole. Nous savons que l'aide gouvernementale a beaucoup changé. Auparavant, il y avait des programmes qui étaient directement financés. Où sont-ils tous passés? N'en reste-t-il plus rien? Croyez-vous qu'il est juste que le gouvernement fédéral fasse payer des impôts à tout le monde et qu'il remette ensuite de l'argent entre les mains d'un secteur de l'économie, à savoir les agriculteurs?

M. Marvin Wiens: Vous avez raison de dire que l'aide à l'agriculture dans l'ouest du Canada, voire dans le Canada tout entier, est presque disparue du budget fédéral, exception faite des 700 millions de dollars dont j'ai parlé et qui sont toujours réservés à la sécurité du revenu agricole. Si toutefois nous voulons maintenir le secteur agricole canadien et accroître les exportations, les doubler d'ici l'an 2005, objectif que s'est donné le gouvernement fédéral pour le secteur agricole, nous devons venir en aide au secteur à une époque où il se heurte à la concurrence de produits subventionnés des États-Unis et de l'Union européenne.

• 1155

C'est surtout l'Union européenne qui est à l'origine du problème. Elle a des surplus qui sont dus aux subventions nationales. Les cours mondiaux s'en trouvent diminués. Nous devons soutenir la concurrence avec le marché mondial. Nous n'avons pas de subventions directes qui permettront de soutenir les agriculteurs jusqu'à ce que nous ayons, comme nous l'espérons tous, des règles commerciales sensées.

Les agriculteurs ne demandent pas que le gouvernement aide leur secteur à long terme. Ils veulent être financièrement autonomes, et ils ont déjà pris des mesures en ce sens. S'ils doivent toutefois continuer à soutenir la concurrence avec des prix mondiaux à la baisse en raison de l'intervention d'autres gouvernements dans le monde, les agriculteurs canadiens ne survivront pas.

Le président: Monsieur Shauf.

M. Marvin Shauf: Le problème que nous vivons à l'heure actuelle dans le milieu agricole est la conséquence de certains des accords qui ont été conclus. Les pays européens subventionnent leur production intérieure, ce qui entraîne une production élevée et des surplus qui ne peuvent être écoulés sur le marché. À la veille de la nouvelle série de négociations commerciales, les pays européens veulent que ces stocks soient épuisés avant qu'ils ne soient soumis aux nouvelles règles qui limiteraient leur pouvoir d'action, ce pourquoi ils ont reporté une partie de leur capacité de subventions à l'exportation des années passées pour l'appliquer aux produits qui arrivent maintenant sur le marché.

C'est ainsi qu'on se retrouve, comme je l'ai dit dans mon exposé, avec des taux de subvention ridiculement élevés appliqués à ces produits venant des pays d'Europe. Les cours mondiaux se trouvent ainsi dépréciés et continueront de l'être sans doute jusqu'en l'an 2000, au moment où commencera la prochaine série de négociations et où certaines des limites qui seront négociées commenceront à circonscrire leur pouvoir d'action.

Ainsi, tant l'Europe que les États—Unis appliqueront une bonne part de leurs subventions à l'exportation au cours des 18 à 24 mois à venir. L'effet sur les producteurs canadiens au cours de ces deux années sera considérable.

M. Ken Epp: Très bien.

Je suppose que la question n'est peut-être pas de votre ressort, puisque vous vous occupez de mise en commun du blé et de livraison au marché et que ma question porte sur les producteurs individuels, mais j'ai entendu un certain nombre d'agriculteurs se plaindre amèrement de la TPS. Ils consacrent énormément de temps à calculer à la fin de l'année tout ce qu'ils ont dépensé ici et là pour avoir droit à une remise. Sinon, ils renonceraient aux 5 000 $ ou aux 10 000 $ auxquels ils ont droit comme remise. Je me suis entretenu avec un agriculteur qui m'a dit qu'il avait passé deux semaines à la fin de la campagne agricole pour faire ses calculs, et il aurait préféré pouvoir prendre ce temps-là pour faire quelque chose de productif au lieu de se conformer simplement... Recevez-vous des plaintes à ce sujet? Quelle est l'incidence de la TPS sur votre organisation? En êtes-vous satisfait?

M. Marvin Shauf: En être satisfaits, c'est quelque chose de relatif, il me semble. Payer la TPS et faire les calculs nécessaires pour obtenir la remise sont des activités qui compliquent l'existence des agriculteurs. La TPS est donc une source de frustration importante, mais au regard de certains des problèmes financiers auxquels ils se heurtent actuellement en raison des cours du marché et des subventions qui réduisent leur revenu, elle ne les préoccupe sans doute pas tellement dans l'immédiat.

M. Ken Epp: Vous ne représentez toutefois pas les producteurs individuels ici. Vous représentez le secteur de la mise en marché du grain, n'est-ce pas? C'est bien cela?

M. Marvin Shauf: Nous représentons les syndicats du blé. Je représente les syndicats du blé, notamment celui de la Saskatchewan, en tant que délégué et administrateur pour ma localité, qui se trouve dans la région sud-est de ma province. J'ai 5 000 producteurs environ à qui je dois rendre des comptes.

M. Ken Epp: Très bien.

Très rapidement, le coût du transport augmente et les subventions fédérales disparaissent. Quelle est la solution à ce problème? Les chemins de fer disent que leurs coûts augmentent, et il faut donc que quelqu'un paie la note. Ce sont les agriculteurs qui finiront par la payer. Quelle est la solution au problème du transport?

• 1200

Il me semble qu'un des gros problèmes auxquels se heurtent les agriculteurs, c'est ce qu'il leur en coûte pour faire transporter leur grain, une fois qu'ils l'ont produit, de leur ferme jusqu'à l'acheteur ultime. Le coût est énorme. Un agriculteur m'a d'ailleurs dit que le coût de production ne représentait en fait qu'environ la moitié des dépenses totales, l'autre moitié étant attribuable au transport du grain à partir de la ferme.

M. Marvin Wiens: Je voudrais réagir à cela, si vous le permettez.

Le coût du transport est considérable. Je suis agriculteur ainsi que vice-président du Saskatchewan Wheat Pool, et je peux vous dire que, depuis quelques années, je dois moi-même payer environ 10 000 $ de plus pour le transport. Le problème est toutefois bien plus vaste. Les agriculteurs de l'Ouest canadien explorent divers scénarios qui permettraient de régler le problème. Ils étudient notamment la possibilité de diversifier leur activité en se lançant dans l'élevage. Ils étudient aussi les possibilités du côté de la valeur ajoutée, cherchant à accroître les activités de transformation dans l'Ouest canadien. Ils étudient toutes sortes de scénarios, et ils ont déjà mis en oeuvre beaucoup des solutions proposées, dont les résultats commencent déjà à se faire sentir.

Les cours mondiaux étant ce qu'ils sont, même le prix du bétail a chuté de façon radicale. Pour cette raison, certaines des solutions qu'ils ont essayées n'ont pas donné les résultats escomptés et ne les donneront pas tant que nous n'aurons pas certaines de ces nouvelles règles commerciales qui sont censées être négociées.

Nous demandons donc de l'aide fédérale dans trois domaines: le recouvrement des coûts, la fiscalité et les discussions commerciales à venir, et nous demandons aussi une aide provisoire par l'entremise du programme de sécurité du revenu agricole dont nous avons déjà parlé. Ce sont donc là les trois domaines où le gouvernement fédéral pourrait intervenir; nous tentons également d'obtenir une intervention de nos gouvernements provinciaux dans ces domaines.

M. Ken Epp: Monsieur le président, mon temps de parole est écoulé pour ce tour de questions et je vais donc céder la parole, mais je voudrais que les témoins commencent déjà à réfléchir à ma question suivante. Quand j'en aurai de nouveau l'occasion, je leur demanderai ce qu'ils voudraient que le ministre des Finances dise en février? Quels sont les mots importants qu'il pourrait dire?

Bon, d'accord, j'ai terminé.

Le président: Merci, monsieur Epp.

Monsieur Nystrom.

M. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Merci, monsieur le président. Je suis désolé d'être arrivé un petit peu en retard. Notre avion avait un peu de retard ce matin, si bien que j'ai raté une partie des exposés et je n'ai pas eu l'occasion de les lire.

Je tiens par ailleurs à souhaiter à mes collègues la bienvenue en Saskatchewan, la terre de Dieu. Je vous souhaite un agréable séjour dans la province.

J'ai deux ou trois petites questions à poser à chacun des groupes.

Je m'adresse tout d'abord aux syndicats du blé. Le revenu agricole net des producteurs de notre province a baissé de 84 p. 100 en 1997, comme vous le signalez dans votre mémoire. Il s'agit d'une baisse de revenu très considérable qui a une incidence sur l'économie du pays tout entier. À l'échelle nationale, la baisse est d'environ 40 p. 100. Par ailleurs, le revenu agricole net a baissé au cours des six premiers mois de 1998—cette baisse s'ajoute à la baisse de 84 p. 100 que nous avons déjà connue. Aux États-Unis, le Congrès vient d'approuver un projet de loi prévoyant un soutien au revenu agricole d'environ 6 milliards de dollars US. En Europe, si je ne m'abuse, les subventions peuvent atteindre 200 $ la tonne de blé—corrigez-moi si je me trompe.

Voici ma question. Seriez-vous pour la mise en place d'un programme d'aide d'urgence à ce moment-ci? C'est une mesure à laquelle les gouvernements canadiens ont eu recours de temps en temps par le passé. Quand les forces du marché échappent complètement à la volonté de l'agriculteur, quoi qu'il fasse, ou quand les subventions accordées aux agriculteurs d'autres régions du monde font en sorte que les règles du jeu ne sont pas équitables, nos agriculteurs n'ont d'autre choix que de déclarer faillite ou de demander une aide d'urgence.

Ma deuxième question est la suivante: Les programmes de sécurité du revenu agricole devraient-ils, selon vous, se fonder sur une formule qui tiendrait compte du coût de production approximatif? Quel serait le coût approximatif pour le trésor national d'un programme à long terme?

Il s'agit de deux questions distinctes, qui s'adressent à l'un ou l'autre d'entre vous.

Le président: Monsieur Shauf.

M. Marvin Shauf: Merci.

En réponse à la première question en ce qui a trait aux niveaux de subventions accordées aux États-Unis et dans l'Union européenne, il me semble que le gouvernement fédéral doit effectivement prévoir un programme d'aide d'urgence quelconque pour le secteur agricole. La réponse à cette question est donc oui. J'estime que pareil programme devrait être considéré comme un investissement dans l'avenir, non pas seulement de l'agriculture canadienne, mais aussi de l'économie canadienne. Les exportations agricoles sont très importantes pour le Canada à long terme, elles sont très importantes pour l'avenir comme elles l'ont été par le passé.

La valeur des exportations agricoles a augmenté considérablement ces dernières années, mais l'objectif qui a été fixé est de la faire doubler d'ici 2005. Pour réaliser cet objectif, le secteur agricole a besoin de mesures transitoires pour l'aider à se rendre jusque-là. Si nous n'investissons pas dans l'agriculture et que nous permettons aux subventions internationales d'acculer nos agriculteurs à la faillite, nous négligerons une composante importante de l'économie future du Canada. Voilà donc ce que je répondrais à votre première question.

• 1205

M. Lorne Nystrom: Une petite question à ce sujet: quel serait le montant de l'aide que vous souhaiteriez obtenir? Aux États-Unis, l'aide se chiffre aux alentours de 6 milliards de dollars US. Si le Canada versait 10 p. 100 de ce montant, l'aide pourrait atteindre 700 ou 800 millions de dollars CAN environ. Quel est le montant approximatif que vous souhaiteriez obtenir?

Je voudrais aussi savoir quand vous voudriez l'obtenir? Nous avons déjà l'argent puisque nous avons un excédent budgétaire. L'an dernier, l'excédent était de 3,5 milliards de dollars; cette année, il atteindra peut-être 5 milliards, 10 milliards ou 12 milliards, selon les résultats économiques. Il me semble qu'il vaudrait mieux consacrer une partie de cet excédent à des programmes sociaux et des programmes d'urgence, comme l'aide au revenu agricole, qui ont aussi pour effet de stimuler l'économie en général et qui permettent ainsi au gouvernement fédéral de récupérer une partie de l'argent versé sous forme d'impôts sur le revenu.

Quel est donc le montant que vous souhaiteriez obtenir approximativement? Deuxièmement, quand souhaiteriez-vous l'obtenir? Avant les semailles du printemps, je suppose, mais...

M. Marvin Shauf: Nous n'avons pas arrêté de montant comme tel, et ce, pour diverses raisons, je suppose. Si nous établissions un montant, les arguments porteraient, non pas sur le problème, mais sur le montant, et il me semble qu'il y a là un problème sur lequel nous devons nous pencher au Canada... Il faut chercher à régler le problème au lieu de se chamailler sur le montant.

La deuxième partie de la question—quand? Je crois qu'il faudrait que ce soit bientôt, car j'estime que, si nous ne jugulons pas la crise dès maintenant, les répercussions se feront sentir dans tous les secteurs de l'économie et causeront un tort considérable à l'économie, non pas seulement de la Saskatchewan, mais certainement de l'Ouest canadien et, d'après ce que je comprends, du Canada tout entier en fait.

Pour ce qui est d'établir un programme à long terme, je crois qu'il faut bien réfléchir aux modalités du programme quand nous fixerons notre choix. Aux États-Unis, malgré tout l'argent qu'on dépense, il reste encore des problèmes. Il me semble qu'un programme qui se poursuit indéfiniment finit par devenir capitalisé, avec pour résultat net, que l'aide est insuffisante.

Ce qu'il nous faudrait, ce serait un programme qui nous permette de faire la transition. Il ne devrait pas s'agir d'un programme permanent, sauf qu'il devrait y avoir un volet permanent qui se déclencherait en cas de catastrophe. Il s'agit de mettre en place un mécanisme qui permettrait de surmonter les bouleversements économiques, mais qui ne serait pas une réserve dans laquelle on pourrait venir puiser année après année.

M. Lorne Nystrom: Monsieur Wiens.

M. Marvin Wiens: Je suis d'accord avec ce qu'a dit mon collègue, mais j'ajouterais simplement qu'il y a une menace qui pèse dans l'Ouest canadien, du fait que les agriculteurs de l'Ouest ont renoncé à leur subvention au transport en 1995. Ils y ont renoncé en toute bonne foi, parce qu'ils croyaient que les autres pays du monde emboîteraient le pas, qu'ils réduiraient leurs subventions et que nous pourrions récupérer l'argent sur le marché. À toutes fins utiles, ce n'est pas ce qui s'est produit. Les règles commerciales actuelles sont telles que les Européens continuent à subventionner leur production intérieure et qu'ils ont ces stocks considérables qu'ils sont prêts à écouler sur le marché.

Ce qui m'inquiète, c'est que si notre gouvernement fédéral n'intervient pas à court terme pour aider les agriculteurs de l'Ouest canadien à contrer ce qui se passe dans le reste du monde... Les gens perdent espoir. J'ai dit que j'ai participé pas plus tard que ce matin à une conférence téléphonique du groupe consultatif de la ligne Tel-Aide pour agriculteurs de la Saskatchewan, et les gens qui appellent disent effectivement: «Il n'y a pas d'avenir. Notre gouvernement ne nous aidera pas comme les gouvernements des autres pays du monde, alors à quoi cela sert-il de continuer? Pourquoi ne pas abandonner tout simplement?» Nous pourrions perdre ainsi toute une génération d'agriculteurs parce qu'il n'y a pas d'espoir.

L'agriculture dans l'Ouest canadien offre des possibilités et les agriculteurs sont prêts à les saisir et à faire face à l'avenir dans la mesure où les règles du jeu seront équitables. Nous ne pouvons toutefois pas soutenir la concurrence avec le Trésor des autres pays du monde, et c'est là finalement ce que nous demandons d'abord et avant tout.

Je suis d'accord avec vous, monsieur Nystrom, pour dire qu'à court terme, nous devons envoyer très rapidement un message, mais nous avons aussi besoin d'une planification à long terme pour renforcer le programme de sécurité du revenu agricole que nous avons déjà. Les programmes d'assurance-récolte et de stabilisation du revenu net sont assez bien acceptés par les agriculteurs de l'Ouest canadien, mais il manque une composante à ce programme de sécurité du revenu agricole. C'est pour cette raison que nous demandons qu'on y ajoute un volet catastrophe. Le gouvernement fédéral a un comité d'examen du programme national de sécurité du revenu agricole. Je siège à ce comité, qui compte des représentants des agriculteurs de toutes les régions du Canada. Le gouvernement pourrait notamment passer par ce comité pour obtenir les chiffres voulus et savoir quels sont les types de programmes dont nous aurions besoin pour renforcer le programme de sécurité du revenu agricole.

• 1210

M. Lorne Nystrom: Le gouvernement fédéral a une réserve pour éventualités de 3 milliards de dollars dont il peut se servir pour les cas d'urgence.

Je crois qu'on a dépensé un milliard de dollars en fait d'aide d'urgence en 1986-1987. Plus loin de nous, à l'époque de Diefenbaker, on a aussi versé des paiements d'appoint et des paiements à l'acre.

J'ai une question à poser à Marjorie Brown, si vous le voulez bien. Vous avez parlé de frais de scolarité, question extrêmement importante, et vous avez dit qu'il n'y avait pas de frais de scolarité en Irlande. Quels sont les autres pays où il n'y a pas de frais de scolarité ou encore qui ont des frais de scolarité très bas? Pouvez-vous nous dire combien il pourrait en coûter au Canada d'adopter une politique semblable qui pourrait être mise en oeuvre graduellement sur plusieurs années? En tout cas, j'estime que vous avez raison de recommander que nous nous engagions dans cette voie, mais si vous pouviez nous donner un peu plus d'information... si non, vous pourriez peut-être nous la faire parvenir plus tard.

Mme Marjorie Brown: J'ai effectivement ici des faits et des chiffres. Il y a un seul pays de l'OCDE où les frais de scolarité sont plus élevés qu'au Canada. Nous sommes au deuxième rang des pays industrialisés. Nous sommes aussi parmi les derniers pour ce qui est de l'aide financière aux étudiants, et j'entends par là pour ce qui est des subventions.

Quant à savoir ce qu'il en coûterait au gouvernement fédéral, il y aurait un coût initial à l'investissement dans l'éducation, mais nous soutenons, comme nous l'avons fait à maintes reprises, qu'il pourra récupérer ce qu'il aura dépensé au moyen des avantages qu'il en retirera. À l'heure actuelle, nous avons une génération d'étudiants qui terminent leurs études avec des hypothèques qui atteignent 25 000 $ en moyenne. Quand ils se cherchent un emploi, ils doivent d'abord commencer par rembourser cette dette et cela les empêche de participer au monde économique comme le faisaient les étudiants d'il y a 20 ou 30 ans, à l'époque où l'aide aux étudiants était plus importante ou encore où le coût de l'éducation était beaucoup moins élevé.

Nous disons que le gouvernement pourrait récupérer l'argent grâce à la participation active des étudiants qui terminent leurs études, sans qu'il y ait d'incertitude—les gouvernements ne cessent de le dire, quand le contexte économique est incertain, les gens hésitent à acheter, et c'est bien là la situation dans laquelle se trouvent les étudiants maintenant, ce qui ne stimule guère l'économie.

En outre, il a été prouvé dans d'autres pays que les étudiants qui complètent des études supérieures sont en mesure de trouver un emploi très rémunérateur. Or, un revenu élevé se traduit par un niveau de taxation plus élevé. Par conséquent, le gouvernement touchera des revenus directs grâce aux étudiants qui seront en mesure de payer des impôts, par opposition à des étudiants qui recevraient une forme d'aide quelconque parce qu'ils sont incapables de dénicher un emploi et de subvenir à leurs besoins.

[Français]

L'hon. Lorne Nystrom: Madame Archambault, vous avez mentionné que le gouvernement fédéral avait fait des réductions budgétaires de l'ordre de 50 p. 100 ici, en Saskatchewan. À quand remontent ces réductions? Deuxièmement, est-ce que ces réductions budgétaires ont été plus importantes ici que dans les autres provinces ou si elles ont été exactement les mêmes partout? Il serait important que nous le sachions.

Mme Lorraine Archambault: Les réductions budgétaires de 50 p. 100 qu'on a subies en Saskatchewan remontent à environ trois ans.

L'hon. Lorne Nystrom: Trois ans?

Mme Lorraine Archambault: Oui. L'entente originale prévoyait que nous recevrions 10 millions de dollars pendant trois ans, tandis que l'avant-dernière entente et l'entente actuelle prévoient le versement de 5,2 millions de dollars pendant trois ans. Nous avions déjà subi des réductions budgétaires auparavant. Je ne crois pas que les autres provinces avaient subi des réductions aussi importantes. En Saskatchewan, nous en sommes à notre troisième entente, tandis que les autres provinces en sont à leur première entente.

L'hon. Lorne Nystrom: Pourquoi ces réductions sont-elles plus importantes ici que dans les autres provinces comme le Manitoba ou la Nouvelle-Écosse, par exemple?

Mme Lorraine Archambault: Il faudrait vraiment que nous posions la question au ministère du Patrimoine canadien. Il est possible que ce soit dû au fait que nous avions conclu des ententes dès 1988, tandis que les autres provinces n'en sont venues à des ententes que depuis trois à cinq ans. Le ministère pense peut-être qu'on a déjà reçu notre juste part et préfère peut-être aider davantage les autres provinces. Les provinces qui sont impliquées dans ces ententes sont plus nombreuses de nos jours.

• 1215

[Traduction]

M. Lorne Nystrom: Si le temps me le permet, monsieur le président, j'aimerais poser une brève question à Judy, ou laisser un collègue l'interroger.

En ce qui concerne le financement du gouvernement fédéral, ou l'absence de financement, existe-t-il une différence entre la Saskatchewan et les autres provinces? D'autres associations se débrouillent-elles mieux que la nôtre? Y a-t-il quelque chose que nous devrions savoir pour mieux vous aider à faire en sorte d'être sur un pied d'égalité avec les autres? Avez-vous un conseil ou un organisme national? Par exemple, avez-vous des liens avec les conseils de l'Ontario, du Québec ou de la Colombie-Britannique? Ont-ils des rapports différents avec le gouvernement fédéral, ou sont-ils dans la même situation que vous?

Mme Judy Kobsar: Je vous remercie de votre question, monsieur Nystrom.

Nous avons une organisation nationale appelée l'Organisation nationale des femmes immigrantes et des femmes appartenant à une minorité visible du Canada, dont le siège social est à Ottawa, sur la rue Bank.

Nous ne recevons pas de financement direct de cette organisation. Cette dernière reçoit des fonds directement du gouvernement fédéral. Elle est constituée de divers comités et de membres de conseil de toute la province qui représentent les immigrants et les minorités. Il y a aussi des comités de réfugiés.

Nous avons constaté que la Saskatchewan est sous-financée, mais nous ne savons pas vraiment pourquoi. Ailleurs, au Québec, en Ontario et au Manitoba, pour ne nommer que quelques endroits, et même à Montréal, les organismes reçoivent plus d'argent que nous. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure nous recevons certains fonds de Patrimoine Canada une fois l'an. Nous en recevons également de Condition féminine Canada, et c'est tout.

L'un de nos principaux problèmes c'est le fait que nous n'avons pas de numéro d'organisme de bienfaisance. Nous en avons fait la demande il y a environ un an, mais elle a été rejetée. L'organisme Centraide est venu à notre secours il y a quelques semaines et a décidé de présenter une demande en notre nom. La Cour suprême en est maintenant saisie, et nous espérons que notre démarche sera couronnée de succès.

Des bénévoles travaillent à nos bureaux, mais il y a aussi des employés que nous devons payer. Par conséquent, la situation est plutôt difficile pour l'instant.

Le président: D'autres observations?

M. Lorne Nystrom: Ai-je encore du temps?

Le président: Bien sûr, allez-y.

M. Lorne Nystrom: Je voudrais interroger de nouveau les représentants du Saskatchewan Wheat Board. Je pense que la population canadienne dans son ensemble ne comprend pas vraiment la question de l'aide d'urgence. Même à Regina, j'ai rencontré des gens qui ne comprennent pas la gravité de la crise. Encore la semaine dernière, j'ai rencontré des agriculteurs qui vont abandonner leur exploitation et dont la famille éclate sous le stress. Il y a des séparations, et ainsi de suite. Ils sont acculés à la faillite.

Jeudi soir dernier, après nos réunions à Toronto en matinée, je me suis rendu dans la petite ville de Lestock, dans ma circonscription pour prendre le pouls de la situation. Les gens ont vraiment peur. C'est ce qui décrit le mieux leurs sentiments. Ils n'ont aucune prise sur la situation. Ce sont des producteurs compétents, efficaces et productifs qui travaillent très dur, mais ils ne font pas la lutte à armes égales.

J'ignore comment faire prendre conscience au reste du pays de l'ampleur du problème. Je suis extrêmement frustré, d'où cette question: Parlez-vous à d'autres organisations agricoles? Je sais que la Fédération canadienne de l'agriculture, la FAC, a déjà fait mention du problème. Essayez-vous de rallier un front uni d'un bout à l'autre du pays pour expliquer la gravité du problème?

Si nous ne faisons rien d'ici le printemps, un grand nombre d'agriculteurs vont disparaître. C'est une catastrophe économique, non seulement sur le plan individuel, pour les agriculteurs, mais pour l'ensemble du pays. En effet, cela a une influence sur nos efforts pour équilibrer nos budgets à long terme, ainsi que sur les problèmes de la dette et du déficit.

Essayez-vous de vous organiser à l'échelle nationale? Organisez-vous une campagne nationale de lobbying auprès des députés? Pourriez-vous nous en dire un peu plus long sur vos plans?

M. Marvin Shauf: Nous avons évoqué le problème à la FCA. Nous avons également parlé à d'autres organismes agricoles. Un grand nombre d'agriculteurs ont vraiment accordé foi au discours selon lequel il n'y a pas d'argent pour l'agriculture. À mon avis, c'est ce qui explique ce désespoir silencieux que vous avez constaté. Voilà pourquoi vous n'entendez pas un tollé de protestations.

À mon sens, l'agriculture est en train d'absorber tranquillement des chocs sérieux. Nous allons perdre des ressources de production très importantes, ainsi que des éléments d'actifs très précieux pour l'avenir de l'agriculture au Canada. Et tout cela se produit pour une raison que peu de gens comprennent, soit l'incidence sur les cours du marché international des subventions aux exportations accordées par les autres pays.

• 1220

Si les Européens achètent leur malt à 140 $ la tonne, cela fait baisser à 140 $ la tonne le prix international de ce produit, par opposition au prix normal, car aucun acheteur ne va payer davantage. Et comme il s'agit déjà d'un produit de faible valeur, il est impossible pour les producteurs d'être concurrentiels.

M. Lorne Nystrom: Les gens croient que nous sommes entrés de plein pied dans une ère de libre-échange et que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, mais c'est tout le contraire, si l'on songe aux guerres céréalières, au programme de promotion des exportations des États-Unis, aux programmes des pays du marché commun européen, etc.

Pouvez-vous nous donner une idée du pourcentage des agriculteurs de la Saskatchewan qui risquent vraiment de faire faillite d'ici les semences du printemps? Je pense qu'il y a 58 000 ou 60 000 agriculteurs dans la province. L'un ou l'autre d'entre vous peut-il nous donner un pourcentage approximatif pour que nous puissions évaluer cela sur le plan humain? Je sais que ce n'est pas facile de fournir un chiffre précis. Mais s'agit-il de 10, 20 ou 30 p. 100?

M. Marvin Wiens: Je ne pense pas être en mesure de vous donner un chiffre exact mais pour ce qui est d'avoir une vision optimiste de l'avenir, je peux vous dire que 100 p. 100 des agriculteurs de l'ouest du Canada et de la Saskatchewan se demandent s'ils ont véritablement un avenir compte tenu de ce qui se passe à l'heure actuelle.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous sommes convaincus que si nous pouvons obtenir gain de cause aux négociations commerciales, il y aurait parité des chances pour tous. Nous espérons que ce sera le cas lors de la prochaine ronde et que nous ferons davantage de gains. Nous encourageons le gouvernement fédéral à viser cet objectif. Comme nous n'y sommes pas encore parvenus, un nombre considérable d'agriculteurs connaissent de sérieuses difficultés financières. Je ne saurais trop insister sur ce que vous avez dit. Tout ce que vous avez entendu, nous l'avons entendu aussi: les gens abandonnent, tout simplement.

Dans les années 80, on voyait des manifestations. Les gens se rassemblaient pour exiger du ministre de l'Agriculture qu'il vienne dans l'ouest du Canada pour les écouter. Je ne pense pas qu'on verra cela maintenant. Les agriculteurs en parlent, mais ils vont plutôt abandonner. Ils se diront que s'ils ne peuvent obtenir de l'aide du gouvernement fédéral, ils vont renoncer. Et c'est cela qui nous inquiète le plus.

Nous sommes tous convaincus qu'il y a un avenir, mais il nous faut pouvoir atteindre cet avenir.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Wiens.

Madame Sophia Leung.

Mme Sophia Leung (Vancouver Kingsway, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Je remercie tous les témoins de leurs exposés. Vous m'avez fourni une information précieuse qui me permettra d'en apprendre plus long sur vos préoccupations.

Ma question s'adresse aux représentants du Saskatchewan Wheat Pool. Je tiens à vous dire qu'à titre de nouvelle présidente du caucus libéral de l'Ouest et du Nord que c'est un sujet que je vais inscrire à notre ordre du jour une fois que j'aurai terminé ces séances et que je serai de retour à Ottawa.

Vous avez également un allié indéfectible en la personne de Ralph Goodale. Vous le connaissez. Chaque fois qu'il me voit, il me dit que nous devons parler. À ce moment-là, je l'invite à se présenter devant notre caucus, ce qui signifie que 30 d'entre nous pourront l'entendre.

Je vous invite à envoyer votre documentation à mon bureau. Je peux vous aider. Avant que la question ne soit inscrite à l'ordre du jour, je distribuerai les documents à tous les députés pour qu'ils puissent mieux comprendre vos préoccupations.

Je sais pertinemment que vos problèmes sont très complexes. Nous en convenons, mais je tiens à vous rassurer encore une fois. Nous ne sommes pas indifférents. Je voudrais que vous disiez à vos agriculteurs que nous nous penchons régulièrement sur ce dossier.

Je voudrais maintenant vous poser quelques questions. Le gouvernement vous a déjà remis 700 millions. Cela constitue votre filet de sécurité. Ce n'est pas une petite somme. Qu'envisagez-vous exactement? Pensez-vous que nous devrions augmenter la somme en question?

C'est ma première question. Deuxièmement, il me semble évident que nous devons accroître nos exportations. Je ne sais pas vraiment ce qu'il en est car je n'ai pas obtenu beaucoup de données à ce sujet. Je sais que la Chine est un grand marché pour vous. Vous attachez-vous à élargir ce marché? La Chine ne semble pas encore avoir été touchée par ce qu'on appelle la crise asiatique.

Évidemment, il est très difficile pour les agriculteurs canadiens de livrer concurrence aux agriculteurs européens et américains. Vous nous l'avez déjà très bien expliqué, mais j'aimerais tout de même que vous répondiez à cette double question.

M. Marvin Wiens: Merci beaucoup de la question. Nous vous remercions de votre appui. Nous vous sommes vraiment reconnaissants.

• 1225

Premièrement, les 700 millions de dollars dont vous parlez servent pour l'ensemble du Canada. La Saskatchewan ne reçoit qu'un pourcentage de cette somme. Si je ne m'abuse, sa part tourne autour de 35 à 40 p. 100. Mais les 700 millions doivent servir à aider les agriculteurs de la Colombie-Britannique à Terre-Neuve. Cet argent n'est pas uniquement destiné à la Saskatchewan.

Il convient d'élaborer un programme supplémentaire qui entrerait en vigueur si les prix des matières premières sur les marchés internationaux tombent sous un certain seuil, ce qui s'est déjà produit. Ce serait compliqué de vous expliquer en quelques phrases le CSRN, mais c'est un programme qui permet aux agriculteurs de verser de l'argent dans un compte. Le gouvernement y verse une somme équivalente et les agriculteurs peuvent puiser dans ce compte lorsque leur revenu agricole tombe sous un certain seuil. Pour les agriculteurs qui ont de nombreuses années d'expérience, ce programme, qui est en vigueur depuis trois ou quatre ans, donne de très bons résultats. Ces derniers savent qu'ils pourront compter sur cet argent en période difficile. Malheureusement, il y a un grand nombre de jeunes agriculteurs qui n'ont pas d'argent dans ce compte. Il n'y a donc aucun programme auquel ils peuvent recourir, même si le gouvernement fédéral a instauré le CSRN depuis quelques années.

Nous avons besoin d'un programme qui réponde aux besoins des gens qui glissent entre les mailles du filet de sécurité dans le contexte de l'actuelle crise financière.

Il y a un autre argument que j'aimerais invoquer car je n'ai pas très bien répondu tout à l'heure. Dans nos discussions, nous avons essayé de faire front commun avec d'autres organisations agricoles de l'ouest du Canada afin de donner une plus grande visibilité au problème. La semaine dernière, nous avons rencontré le ministre de l'Agriculture de la Saskatchewan. Comme il s'agissait d'une assemblée publique, je suis libre de rapporter ses propos. Il a dit que si nous pouvions convaincre le gouvernement fédéral qu'il est nécessaire de délier les cordons de la bourse, le gouvernement provincial pour sa part serait disposé à consulter ses experts financiers pour déterminer sa part. C'est ce qu'il a dit officiellement. Généralement, le financement est partagé dans une proportion de 60 p. 100 pour le gouvernement fédéral et 40 p. 100 pour le gouvernement provincial. Notre ministre provincial de l'Agriculture a donc dit qu'il était disposé à plaider notre cause auprès de son ministre des Finances si nous pouvons convaincre le gouvernement fédéral d'assumer sa part de 60 p. 100.

Mme Sophia Leung: Ce sont de bonnes nouvelles. Avez-vous transmis cette information au ministre Goodale?

M. Marvin Wiens: Nous allons le faire. Nous le rencontrons régulièrement et nous allons lui transmettre ce message. Je sais qu'un certain nombre d'autres groupes agricoles étaient représentés à la réunion de l'autre soir, à Regina, et je suis sûr qu'ils vont aussi passer ce message.

Mme Sophia Leung: J'aimerais vous signaler également que notre caucus libéral national comporte un caucus rural très dynamique. Je pense que vous devriez communiquer avec leurs membres. Je vais également m'entretenir avec son président, qui nous présente régulièrement un rapport. Je pense qu'il s'appelle Larry. Je vais obtenir son nom pour vous. J'aimerais beaucoup vous aider à exprimer vos préoccupations auprès des instances à Ottawa. Je vais vous dire comment vous pouvez communiquer avec moi.

J'aimerais maintenant féliciter les dames, qui ont fait de l'excellent travail. Ma première question s'adresse à Mme Archambault. Je pense que vous faites un travail magnifique et que vous avez besoin d'un soutien accru. Cela m'apparaît clairement. Recevez-vous une aide quelconque des autorités provinciales, ou est-ce que cela ne les concerne pas?

Mme Lorraine Archambault: Nous recevons une très modeste somme de notre province. Depuis trois ans, nous avons obtenu de la province la gestion de nos écoles, mais nous n'avons pas encore atteint la parité avec les écoles anglophones pour ce qui est de la qualité de l'éducation. Il reste encore beaucoup de travail à faire. Pour ce qui est de l'aide pour les collectivités francophones, il y en a très peu à l'heure actuelle. J'ai l'impression que même s'il nous prête une oreille favorable, le gouvernement provincial estime que le bilinguisme est du ressort fédéral. Nous avons donc des difficultés à obtenir ce dont nous avons besoin. Nous dialoguons avec les autorités provinciales et nous essayons en collaboration avec elles de mettre sur pied certains programmes.

Nous nous diversifions aussi d'autres façons. Comme je l'ai dit, nous ne nous attendons pas à ce que Patrimoine Canada nous fournisse la totalité de notre budget. Nous diversifions nos sources de financement et nous organisons nous-mêmes des campagnes de financement pour nous autofinancer. Nous demandons à Patrimoine Canada de répondre à une partie seulement de nos besoins financiers.

Mme Sophia Leung: Judy, je pense que votre organisme fait du très bon travail, et c'est un travail dont la communauté a besoin.

• 1230

Je suis de Vancouver, en Colombie-Britannique, où il y une importante population de femmes immigrantes. À titre d'immigrante moi-même, il va de soi que vous pouvez compter sur mon appui.

Je vous invite instamment à obtenir ce numéro d'organisme de bienfaisance. C'est essentiel. J'ai été étonnée d'apprendre que vous êtes implantée dans la collectivité depuis 1983. Ayant moi-même participé à de nombreux groupes communautaires à Vancouver, je sais qu'un organisme comme le vôtre est absolument nécessaire.

Je note que vous avez déjà reçu le soutien de la secrétaire d'État à la condition féminine et de la ministre de Patrimoine Canada. En fait, j'ai déjà fait la connaissance de Hedy Fry à Vancouver. Je sais qu'elle appuie sans réserve des programmes comme le vôtre.

À mon avis, il est très important de mobiliser la communauté locale et, en Colombie-Britannique, c'est pratiquement la façon de faire traditionnelle. Dans un premier temps, nous mobilisons la collectivité pour faire état de notre poids lorsque nous manifestons. Et ensuite, nous demandons l'aide des instances de financement fédérales et provinciales. J'ai participé activement à ce genre d'activités et nous avons réussi à obtenir un financement solide. Le gouvernement provincial de la Colombie-Britannique nous donnait à l'occasion un million de dollars et le gouvernement fédéral fournissait la somme équivalente. Je pense que vous devriez rallier toute votre collectivité. Je sais que vous faites déjà des efforts en ce sens et, dans l'intervalle, vous pouvez compter sur mes encouragements.

Mme Judy Kobsar: Merci.

Mme Sophia Leung: J'ai une dernière question à poser à Mme Brown. Le week-end dernier, j'ai assisté à un congrès libéral dans cet endroit merveilleux qu'est Whistler. Chose intéressante, deux personnes m'ont abordée en votre nom pour discuter de l'enseignement postsecondaire, et en particulier d'un crédit d'impôt pour les bourses. On a fait valoir bien des arguments pour montrer l'injustice de la situation. Ces gens, qui sont des donateurs, m'ont signalé que le fisc grugeait une bonne part du revenu des récipiendaires. J'aimerais avoir votre point de vue là-dessus.

Mme Marjorie Brown: Vous parlez du fonds des bourses du millénaire?

Mme Sophia Leung: Non, de bourses en général.

Mme Marjorie Brown: D'accord.

Mme Sophia Leung: Supposons que vous receviez une bourse d'études et de perfectionnement, ce qui est maintenant considéré comme un revenu, et que vous payiez de l'impôt. Bien des gens se demandent si on ne devrait pas envisager un tel crédit. Pourriez-vous aborder rapidement cette question?

Mme Marjorie Brown: J'ai fait des études supérieures, et cela concerne surtout les étudiants du premier cycle car de façon générale, nous recevons une forme quelconque de financement ou une bourse. Mais ce qui importe de savoir c'est que pour que cet argent soit déductible d'impôt, il faut avoir un certain niveau de revenu, et les étudiants de plus en plus n'atteignent pas ce niveau, surtout s'ils ne comptent que sur ces fonds qu'ils reçoivent. Peut-être que s'ils ont un emploi à temps partiel, dont le salaire s'ajoute à leur bourse, leur revenu peut se rapprocher de ce niveau.

Cela aide les étudiants du doctorat, et un peu ceux de la maîtrise, mais dans le cas des étudiants du premier cycle, qui sont les plus nombreux, cela n'est guère utile. En effet, ce sont ces étudiants qui font des demandes d'aide financière et qui empruntent de l'argent. Ils ne font pas d'argent. C'est donc un avantage très restreint étant donné que le nombre des bénéficiaires baisse à mesure qu'on avance dans le cycle universitaire.

Je peux vous expliquer ma situation personnelle. Un crédit d'impôt n'aurait aucune incidence sur les fonds que je reçois en tant qu'étudiante de troisième cycle. Étant donné que le financement est insuffisant et que je travaille en plus d'étudier, je pourrais être touchée, mais pour ce qui est d'accroître le financement des étudiants, cela ne ferait aucune différence.

Mme Sophia Leung: Le crédit d'impôt, l'exemption d'impôt ne vous touche guère.

Mme Marjorie Brown: Il n'aurait pas d'incidence s'il s'appliquait uniquement au financement que je reçois.

Autrement dit, les niveaux de financement ne sont pas suffisamment élevés pour que cela fasse une différence. Par conséquent, une meilleure façon de procéder serait d'augmenter le niveau de financement disponible au lieu de fournir des crédits d'impôt. Cela serait plus avantageux car les étudiants pourraient en tirer parti d'emblée, lorsqu'ils doivent payer leurs études.

Mme Sophia Leung: Merci.

Je ne sais pas si vous le savez, mais à Ottawa il existe un comité appelé le comité de l'enseignement postsecondaire présidé par Peter Adams. Ce serait une autre avenue pour nous rejoindre.

Mme Marjorie Brown: Merci.

Mme Sophie Leung: Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup, madame Leung.

Nous allons maintenant passer aux questions de Mme Bennett.

• 1235

Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Merci.

Dans le cas des gens qui ont des emplois à temps partiel, il y a une chose qui inquiète beaucoup d'entre nous, particulièrement si l'on prend en compte tous les petits salariés. Nous nous demandons si le fait de hausser le crédit d'impôt personnel serait utile à un plus grand nombre de gens. Je pense aux Canadiens qui touchent des pensions d'invalidité ou qui ont des revenus fixes, mais il y a aussi de nombreux étudiants de troisième cycle qui, lorsqu'ils ajoutent à leur bourse le salaire d'un emploi à temps partiel, se trouvent obligés de payer de l'impôt. Que penserait votre organisation d'une augmentation générale du crédit d'impôt personnel. Croyez-vous que cela aiderait votre groupe?

Mme Marjorie Brown: Nous n'avons pas d'objection à une hausse du crédit d'impôt personnel, mais cela ne serait pas la façon la plus efficace de répondre aux besoins des étudiants de troisième cycle. Pour faire de bonnes études supérieures, il faut pouvoir s'y consacrer à temps plein. Malheureusement, il y a très peu d'étudiants, du moins à l'Université de Regina, qui peuvent y consacrer tout leur temps. Cela compromet la qualité de la recherche.

Mme Carolyn Bennett: Êtes-vous payés pour le tutorat que vous faites? Des fonds sont-ils versés pour cela?

Mme Marjorie Brown: C'est ici que les coupures entrent vraiment en jeu, car en réduisant les budgets d'éducation aux gouvernements provinciaux, le gouvernement fédéral a également réduit le financement des universités, réduisant ainsi le financement que nous pouvons obtenir. Donc pour tout un semestre, il y a possibilité de seulement environ 90 heures de cours particuliers, représentant peut-être 2 000 $ pour tout le semestre, ce qui est insuffisant pour faire vivre un étudiant et payer pour les recherches qu'il fait.

La faculté peut offrir des bourses, mais elles sont également limitées à cause des coupures qu'a subies l'université. Les sources extérieures de financement, notamment le CRSNG, le CRSH et le Conseil de recherches médicales, ont subi des coupures. En Saskatchewan l'an dernier, le Conseil de recherches médicales n'avait accordé aucune subvention, mais il s'est ravisé et il nous en a accordé une.

Donc, si on veut répondre aux besoins, il faudrait sans délai accorder un plus grand appui financier, ce qui aurait beaucoup plus d'impact sur la vie des étudiants de troisième cycle. Cela nous permettrait par ailleurs de réduire le nombre d'heures que nous consacrons à des emplois à temps partiel et cela aurait un plus grand impact sur notre éducation.

Mme Carolyn Bennett: Je ne pense pas que les gens considèrent que les subventions d'un conseil subventionnaire sont en fait des emplois. Nous devrions essayer de mieux expliquer que lorsque nous finançons les conseils subventionnaires, en fait nous créons de l'emploi.

J'ai trouvé intéressant que vous parliez du Conseil de recherche en sciences humaines du Canada. À votre avis, ce conseil a-t-il subi des coupures injustes, ou est-ce que vous pensez que nous devrions en fait augmenter le financement accordé à tous les conseils subventionnaires?

Mme Marjorie Brown: Je pense qu'il faut augmenter le financement accordé à tous les conseils, mais le CRSH est traditionnellement oublié, car souvent on n'envisage pas la recherche en sciences humaines de la même façon que la recherche appliquée qui se fait par exemple au CRSNG et au Conseil de recherches médicales. C'est un oubli malheureux, car la recherche financée par des subventions accordées par le CRSH permettent de faire des progrès importants dans le domaine social.

Mme Carolyn Bennett: Dans la proposition du Dr Friesen de créer des instituts canadiens de la santé, on veut relier les divers centres universitaires au pays dans le domaine de la santé. Nous espérons qu'ils aborderont également les facteurs sociaux qui jouent un rôle déterminant dans la santé, notamment la pauvreté et la violence et ce genre de choses. Est-ce que vous et votre association en avez entendu parler? Avez-vous vu leur proposition? Avez-vous l'impression que certaines des sciences sociales auront leur place dans cette nouvelle série d'instituts?

Mme Marjorie Brown: À vrai dire, je ne suis pas vraiment au courant de ce projet.

Mme Carolyn Bennett: Naturellement, le modèle irlandais est très intéressant pour nous car il a eu beaucoup de succès. C'était intéressant lorsque vous avez dit dans votre mémoire que l'accès aux universités avait permis le développement économique rural. À votre avis, la réduction des frais de scolarité se ferait-elle beaucoup ressentir sur la scène rurale?

Mme Marjorie Brown: Pour les étudiants provenant des régions rurales, c'est un obstacle beaucoup plus important lorsqu'ils doivent complètement perturber leur vie et déménager dans un centre urbain pour avoir accès à l'enseignement postsecondaire. Il s'agit d'un obstacle énorme, même d'un obstacle psychologique, si on considère qu'en plus ces gens doivent contracter une dette de 25 000 $ pour le faire. C'est beaucoup plus encourageant pour les étudiants des régions rurales lorsqu'ils n'ont pas à faire face à cet obstacle et lorsqu'ils peuvent retourner dans leurs communautés rurales. Lorsqu'ils y retournent, cela augmente le capital des connaissances des collectivités, ce qui nous aide à maintenir la viabilité de ces collectivités.

• 1240

Mme Carolyn Bennett: Merci.

Comme vous le savez—et je m'adresse ici à la plupart des témoins—le gouvernement fédéral a entamé des négociations avec les provinces relativement à l'union sociale. Lorsque le président de l'Université de Toronto a comparu devant notre comité jeudi, nous lui avons posé des questions au sujet des frais de scolarité. Dans le cadre de ces négociations, c'est la première fois que nous voyons le mot «responsabilité». Avec le TCSPS pour l'enseignement postsecondaire, croyez-vous que le gouvernement fédéral devrait avoir un mot à dire en ce qui concerne les frais de scolarité et le maximum que ces derniers peuvent atteindre?

Mme Marjorie Brown: Absolument. Nous ne nous opposons absolument pas à ce que le gouvernement intervienne pour réglementer les frais de scolarité, et en fait nous sommes heureux que le gouvernement intervienne. Dans notre province, le gouvernement provincial a réussi à compenser un certain nombre de coupures, de sorte que les budgets des institutions sont demeurés un peu plus stables que dans d'autres provinces. Cependant, les institutions ont continué d'augmenter les frais de scolarité malgré ce financement. Si le gouvernement fédéral augmente son financement, nous ne sommes pas opposés à ce qu'il contrôle les institutions en disant que cet argent doit servir à réduire les frais de scolarité.

Mme Carolyn Bennett: Donc, comme dans le domaine des soins de santé, où l'accessibilité fait partie de la Loi canadienne sur la santé, considérez-vous que l'accessibilité est un élément clé de l'éducation postsecondaire?

Mme Marjorie Brown: Absolument. Nous serions très heureux de voir une loi ou des normes nationales sur l'enseignement.

Mme Carolyn Bennett: En ce qui concerne la communauté francophone, je crois que nous avons été impressionnés, particulièrement dans l'Ouest canadien, par la force des exposés. Nous en sommes très reconnaissants, car nous avons l'impression que dans le cadre du projet unité, rien n'est plus important que d'avoir une forte présence des communautés francophones partout au pays. Nous pensons que c'est quelque chose que nos amis du Québec ne comprennent pas très bien.

Lorsque je regarde les chiffres que vous avez présentés ici, vous dites que le gouvernement fédéral a fait des coupures de 50 p. 100 dans les programmes de cette province... Croyez-vous que dans le cadre des négociations de l'union sociale, le gouvernement fédéral devrait demander aux provinces une sorte de responsabilité à cet égard, ou est-ce à votre avis quelque chose que le gouvernement fédéral devrait être prêt à financer tout simplement?

Mme Lorraine Archambault: Non. En fait, j'ai dit à notre gouvernement provincial qu'en ce qui concerne l'unité nationale, chaque province devrait être préoccupée par toute cette question. Le bilinguisme devrait vraiment être une préoccupation pour chacun, et les provinces doivent investir davantage d'argent dans les programmes. Cela montrerait certainement au Québec que la francophonie est bien vivante au pays et qu'ils n'ont pas à craindre d'être assimilés, comme je le dis dans mon mémoire.

Je sais qu'en Saskatchewan et dans bien des provinces, les francophones tentent vraiment de convaincre les provinces et de montrer également qu'ils en sont fiers et que ce n'est pas toujours quelque chose de caché dont on parle derrière des portes closes. C'est donc très important.

Mme Carolyn Bennett: Je ne veux pas vous faire dire ce que vous n'avez pas dit, mais l'Accord de Calgary pour ce qui est de reconnaître le caractère unique du Québec est une chose, mais vous croyez en fait que les provinces doivent joindre le geste à la parole et montrer qu'il est important d'avoir une forte communauté francophone dans chacune de ces provinces. Il est également très important que les provinces désignent en fait des fonds pour ce projet.

Mme Lorraine Archambault: Oui, cela est très important.

Mme Carolyn Bennett: Ce ne serait pas la même chose si tous les fonds provenaient d'Ottawa.

Mme Lorraine Archambault: Non. Ce serait beaucoup mieux si les fonds provenaient des deux paliers de gouvernement.

Mme Carolyn Bennett: Très bien.

• 1245

J'ai une autre question qui s'adresse aux groupes de femmes immigrantes. La question du statut d'organisme de bienfaisance me préoccupe. Étant donné que vous faites du travail comme organisme de défense, croyez-vous qu'il est plus difficile d'obtenir le statut d'organisme de bienfaisance? Je pense que Revenu Canada a certaines règles selon lesquelles si plus de 10 p. 100 de vos activités sont des activités de défense, on vous considère moins comme un organisme de bienfaisance. Croyez-vous que nous devrions changer ces règles?

À l'une des conférences auxquelles j'ai assisté ce week-end, les gens étaient certainement d'avis que si le gouvernement veut parler de partenariat, nous devons vraiment être en mesure de faire en sorte que les gens soient représentés. Cela veut dire qu'il faut augmenter le financement de base et tout ce qui peut permettre aux organisations comme celles que vous représentez de participer de façon efficace.

Mme Judy Kobsar: Nous ne recevons aucun financement de base.

Mme Carolyn Bennett: Non, je pense que c'est permanent...

Mme Judy Kobsar: Nous avons toujours du personnel dans nos bureaux qu'il faut payer. Bozana Cosic fait partie de notre personnel—elle est notre coordonnatrice de programmes—, et il y en a d'autres.

Notre principal problème c'est que nous n'avons pas de numéro d'enregistrement d'organisme de bienfaisance. Si nous pouvions en obtenir un, vous seriez surprise de voir combien de dons nous pourrions obtenir. Il y a des gens qui viennent à notre bureau nous faire des dons, mais ils repartent sans l'avoir fait parce que nous n'avons pas de numéro d'enregistrement. Par exemple, McCallum Hill est très connue dans la province, et elle est venue nous donner de l'argent. Lorsqu'elle s'est rendu compte que nous n'avions pas de numéro d'enregistrement à titre d'organisme de bienfaisance, elle a changé d'idée.

Mme Carolyn Bennett: Ce problème existe depuis longtemps. À votre avis, vos organismes sont-ils perçus davantage comme des organismes de défense que de services, et est-ce pour cette raison que vous avez de la difficulté?

Mme Judy Kobsar: Je le crois.

Mme Carolyn Bennett: Êtes-vous d'avis que nous devrions changer les règles?

Mme Judy Kobsar: Oui, ce serait très bien si les règles étaient changées. J'en serais très heureuse.

Mme Carolyn Bennett: Je voudrais tout simplement vous donner l'occasion de faire un peu de publicité pour le financement de base. Les groupes que j'ai entendus disent que si nous leur donnions un peu plus de financement de base, ils pourraient entreprendre des campagnes de financement et avoir des projets spéciaux. S'il n'y a de l'argent que pour les projets spéciaux, alors ils doivent constamment se réinventer sous la forme de projets. C'est une source d'insécurité.

Mme Judy Kobsar: Si nous pouvions obtenir du financement de base, ce serait très bien. Nous pourrions alors faire beaucoup de choses.

Mme Carolyn Bennett: Pourriez-vous expliquer cela à nos collègues du Parti réformiste?

Mme Judy Kobsar: Très bien.

Mme Bozana Cosic: Vous nous avez demandé une feuille de temps, en fait une feuille de passage. Au service pour les familles autochtones, nous avons des cours en informatique qui sont offerts à la fois aux immigrants et aux Autochtones. Récemment, nous avons dû faire une nouvelle demande de financement pour un programme de quatre mois. Nous l'avons obtenu, mais nous n'avons pas eu suffisamment d'argent, ce qui veut dire que nous avons dû réduire les heures.

Il est vraiment important pour les immigrants d'avoir des compétences en informatique. Bon nombre d'entre eux, y compris moi-même, n'en ont pas. Il y a des gens très éduqués qui viennent ici. Ce sont des médecins ou des avocats, mais ils sont bloqués. Ils ont besoin d'un complément de formation. Habituellement, nous devons aider les nouveaux immigrants, mais, comme Judy l'a dit, le plus gros problème est de trouver du financement. J'ai bien des programmes et bien des idées, mais je ne peux rien faire sans argent.

Mme Carolyn Bennett: Je devrais le savoir, mais est-ce que l'entente sur le marché du travail a été signée en Saskatchewan, et la formation n'est-elle pas maintenant la responsabilité de la province?

Mme Bozana Cosic: Oui.

Mme Carolyn Bennett: Êtes-vous en mesure de partager des renseignements avec vos organisations parallèles partout au pays en ce qui a trait aux besoins des femmes immigrantes en matière de compétences? Dans ma circonscription, nous avons un programme qui s'appelle Skills for Change. Je pense que c'est un excellent programme pour les gens qui arrivent de différents pays qui sont très spécialisés mais qui ont besoin d'acquérir des compétences pour utiliser un téléphone ou autre. Naturellement, les solutions viennent de la base; elles viennent rarement d'en haut. Y a-t-il possibilité pour le gouvernement fédéral ou des organismes comme le vôtre de partager cette information avec d'autres groupes ou d'autres organismes au pays?

Mme Bozana Cosic: Comme je l'ai dit, nous avons commencé à avoir de nombreux partenariats avec d'autres organismes comme la Open Door Society et de nombreux autres, des associations autochtones comme...

Mme Carolyn Bennett: Mais ce sont des organismes locaux encore une fois.

• 1250

Mme Bozana Cosic: Je suis avec Immigrant Women of Saskatchewan depuis juillet dernier. Je suis encore nouvelle ici, car je suis arrivée au Canada il y a deux ans seulement. Je ne suis pas suffisamment au courant, mais Judy peut vous répondre.

Mme Judy Kobsar: Oui, Carolyn, nous avons pu partager nos expériences avec d'autres provinces. Par exemple, nous avons partagé avec le Immigrant Women's Network de Vancouver. Nous leur avons envoyé de l'information au sujet de certains de nos programmes—soit des programmes de mentors ou des programmes d'immigrants—et ils ont partagé les leurs avec nous. Ils nous ont dit également combien d'argent ils recevaient du gouvernement fédéral et du gouvernement provincial et ce genre de choses. Ce que nous tentons de faire également, c'est d'incorporer ce qu'ils ont fait, et ils essaient d'incorporer ce que nous avons fait. Il y a moyen ainsi de grandir et d'obtenir plus d'argent. Nous avons donc été en mesure de partager. Comme je l'ai mentionné, il y a un organisme national. Lorsqu'il se réunit une fois par mois, il prend note de toutes nos préoccupations et en discute à ce niveau à Ottawa.

Mme Carolyn Bennett: Très bien, merci.

Le président: Merci, madame Bennett.

J'aimerais revenir à une question qu'a posée M. Epp relativement aux priorités pour le prochain budget.

Je voudrais vous signaler qu'en parcourant tout le pays pour avoir réellement un dialogue national avec les Canadiens lors de rencontres de discussion ouverte, les députés des deux côtés de la Chambre ont constaté que de nombreuses demandes étaient faites au ministre des Finances. Franchement, il y a des gens au pays qui veulent que nous mettions l'accent sur la réduction de la dette. Il y en a d'autres qui veulent des réductions de l'impôt des particuliers. D'autres encore veulent que nous remboursions environ cinq milliards de dollars du fonds d'assurance-emploi aux employeurs et aux employés. Naturellement, il y a aussi les provinces qui demandent davantage d'argent par le biais des paiements de transfert. La liste n'a plus de fin.

De temps en temps, nous faisons un petit calcul et nous constatons que nous nous retrouvons avec un déficit. Nous savons également que ce que les Canadiens ne veulent pas, c'est que nous nous retrouvions avec un déficit comme auparavant. Vous vous rappellerez sans doute qu'aussi récemment qu'en 1993, nous avions un déficit de 42 milliards de dollars. Par conséquent, l'économie en a énormément souffert.

Je voudrais revenir à la question de l'assurance-emploi, car il s'agit d'une question extrêmement importante. Si nous écoutions ceux qui veulent que cet argent soit remboursé aux employeurs et aux employés, l'exposé budgétaire du ministre des Finances en février ne comporterait en fait que deux lignes. Il dirait qu'il a emprunté trois milliards de dollars de la réserve de sécurité et qu'il a remboursé cinq milliards de dollars aux employeurs et aux employés. Ce serait à peu près tout pour ce qui est des dépenses.

Si notre comité devait en fait recommander cette stratégie, comme vous le savez sans doute, il ne serait pas possible de répondre à bon nombre de vos demandes, et peut-être même à aucune d'entre elles. On n'y toucherait sans doute même pas.

Ma question est très simple. Devant ces deux possibilités, à votre avis qu'est-ce que nous devrions faire? Devrions-nous réduire la dette nationale, augmenter les transferts aux provinces, accorder un allégement fiscal, rembourser une partie des fonds de l'assurance-emploi soit en augmentant les prestations ou en abaissant les cotisations?

Monsieur Epp, j'espère que vous n'y voyez pas d'inconvénient si je reprends vos questions.

M. Ken Epp: Vous êtes le président.

Le président: Êtes-vous d'avis que nous devrions retourner les cinq millions de dollars du fonds de l'assurance-emploi aux employeurs et aux employés?

• 1255

Mme Marjorie Brown: Oui, c'est ce que je pense, absolument. Autrement, cet argent aura été perçu sous de faux prétextes. Il ne s'agit pas d'impôt sur le revenu ni d'impôt sur les sociétés. Il s'agit d'un fonds pour les travailleurs sans emploi. Ce fonds s'est accumulé à même les cotisations des employeurs et des employés, à même leur chèque de paie, alors il est tout à fait injuste à l'égard des gens qui ont fait confiance à ce programme de l'utiliser pour financer d'autres programmes.

J'ajouterais que je ne pense pas que le fait de maintenir le fonds de l'assurance-emploi comme un programme d'assurance distinct limite la portée de ce budget. En fait, je pense que si le gouvernement ne répond pas aux demandes, par exemple des groupes d'agriculteurs, des étudiants ou des soins de santé, il se retrouvera dans une situation de déficit. Ce n'est tout simplement pas vrai que le secteur privé pourra nous sortir de cette crise et que le marché réglementera la crise si le gouvernement s'abstient de toute intervention économique. Au Japon, le gouvernement est en fait intervenu et a nationalisé les banques dans un effort pour stabiliser la crise économique.

Je pense que le rôle du gouvernement n'est pas de considérer le fonds de l'assurance-emploi comme une solution mais plutôt de trouver des mesures pour faire en sorte que l'économie puisse être source de stabilité pour les Canadiens ordinaires afin qu'ils puissent travailler, payer des impôts, avoir une économie stable, ce qui permettra ensuite de réduire le déficit.

Le président: Vous dites donc que lorsque nous avons un déficit, nous sommes dans une meilleure position.

Mme Marjorie Brown: Non, ce n'est pas ce que je dis. Je parle de l'économie keynésienne. À mesure que nous entrons dans une période d'instabilité et de récession, le rôle du gouvernement consiste à nous aider à nous en sortir. Son rôle n'est pas de se retirer.

Il est clair que la situation économique ne s'améliore pas à l'heure actuelle. Se retirer et vouloir laisser les forces du marché résoudre les problèmes n'est pas une solution. Cela ne fonctionne pas en Asie. Un pays après l'autre requiert une intervention massive non pas uniquement des gouvernements nationaux mais aussi du FMI. Je ne sais pas pourquoi nous pensons que la situation serait différente au Canada et que nous devrions nous retirer, ou pourquoi les forces du marché devraient résoudre le problème lorsqu'on sait que le marché boursier a connu des fluctuations importantes au cours des derniers mois et que le dollar ne cesse d'être dévalué.

La solution consiste à aider les travailleurs, à maintenir une certaine stabilité au niveau des prestations d'assurance-chômage, à offrir une éducation accessible, à aider les agriculteurs aux prises avec la crise grâce à tous ces types de mesures. C'est ce qui permettra d'en arriver à une solution. C'est ce qui maintiendra la stabilité du revenu et de l'économie au Canada.

Le président: Je veux bien comprendre, car je ne vous suis peut-être pas.

Vous reconnaissez que la grande majorité des Canadiens—du moins ceux à qui je parle, c'est-à-dire un assez bon échantillonnage—me disent qu'ils ne veulent pas se retrouver dans une situation de déficit. C'est ce qui leur répugne le plus. Ils n'aimaient pas du tout cela lorsqu'ils étaient dans cette situation, et ils ont compris que l'économie en a beaucoup souffert. Nous nous souvenons tous des taux de chômage qui avaient dépassé le cap des 10 p. 100 et de tout ce qui vient avec ce genre de conditions économiques.

Ma question est simple. Si on a un excédent de 8 milliards de dollars et qu'on dit que 5 milliards de dollars doivent retourner aux travailleurs et aux employeurs qui ont cotisé au fonds d'assurance-emploi, il ne reste que 3 milliards de dollars. Ces 3 milliards de dollars ont déjà été engagés par le plan de réduction de la dette qu'on appelle la réserve pour éventualités diverses. Il ne reste donc pas d'argent pour quoi que ce soit d'autre car une grande majorité des Canadiens—je ne sais pas quel en serait le pourcentage—veulent avoir un budget équilibré. Si on rembourse l'argent de l'assurance-emploi, je ne sais pas où on trouvera de l'argent pour les soins de santé, pour l'éducation, pour les étudiants que vous représentez ou pour ceux qui estiment avoir travaillé fort et veulent voir une réduction de l'impôt sur le revenu des particuliers. Où va-t-on trouver l'argent?

Mme Marjorie Brown: Encore une fois, je tiens à souligner que l'assurance-emploi n'est pas tout simplement un autre poste dans le budget du gouvernement. Il s'agit d'un programme d'assurance qui est distinct des recettes générales du pays. Et l'argent est là.

Le président: Ce n'est pas le cas, au fait.

Mme Marjorie Brown: Eh bien, on dit que c'est un programme qui est là en cas de besoin lorsque les travailleurs sont au chômage et qu'il ne s'agit pas d'une autre forme d'impôt. Si c'est ce que le gouvernement veut faire, alors il devrait être franc et tout simplement percevoir un autre niveau d'impôt auprès des employeurs et des employés. Il ne faut pas dire qu'il s'agit d'un programme d'assurance-emploi et que seulement 36 p. 100 des travailleurs sans emploi pourront y avoir accès lorsqu'ils en auront besoin. Mais l'argent est là.

• 1300

Je pense que vous avez raison lorsque vous dites que nous pouvons atteindre ces objectifs, et je vais vous dire où se trouve l'argent. Il est dans les prêts qui n'ont pas été remboursés—dans une proportion de 85 p. 100—par les grandes entreprises depuis 1982. C'est là où se trouve beaucoup d'argent. L'argent se trouve dans les profits record réalisés par les banques. C'est là qu'il y a énormément d'argent.

On doit se demander, si les banques réalisent des profits record année après année et s'il y a 85 p. 100 des prêts consentis à des grandes sociétés qui n'ont pas été remboursées, pourquoi alors est-ce les agriculteurs qui souffrent? Pourquoi le chômage est-il aussi élevé, pourquoi le chômage est-il de plus de 15 p. 100 chez les jeunes? Il y a des indicateurs qui laissent entendre que certains secteurs de l'économie se portent assez bien, mais cela ne filtre pas jusqu'aux Canadiens ordinaires.

Nous disons que le gouvernement a un rôle à jouer, qu'il doit intervenir, réglementer et redistribuer de façon à ce qu'au cours de cette période de crise économique, la richesse puisse filtrer pour atteindre les gens qui en ont besoin. Elle doit atteindre les Canadiens ordinaires. C'est le rôle que le gouvernement devrait jouer dans le prochain budget.

Le président: Vous dites donc essentiellement que s'il y a un excédent de 8 milliards de dollars, nous devrions retourner 5 milliards de dollars dans le fonds d'assurance-emploi et que 3 milliards de dollars serviront au remboursement de la dette, comme l'a déjà dit même le premier ministre. Alors il ne resterait rien. Essentiellement, vous dites que nous devons revenir dans une position de déficit.

Mme Marjorie Brown: Non, car la situation n'est pas aussi simple que cela. Nous pourrions même revenir en arrière et regarder comment nous nous sommes retrouvés dans une situation de déficit au départ, ce qu'un déficit est, et quels intérêts ont participé à créer la situation dans laquelle nous nous retrouvons tous, c'est-à-dire une situation de crise économique continue, de déficit et de dette. Mais cela n'est pas aussi simple que cela.

Nous devrions peut-être plutôt regarder le système économique dans son ensemble et nous demander quelles mesures le gouvernement peut prendre pour équilibrer les hauts et les bas pour en arriver à un niveau durable plus normal pour les Canadiens ordinaires. Ce n'est pas aussi simple que de dire que nous pouvons faire une, deux, ou trois choses. Il faut tenir compte de tous les secteurs.

Il y a des secteurs qui sont très riches et qui ne partagent pas leur richesse avec d'autres Canadiens. C'est peut-être une possibilité qu'on devrait envisager dans le budget. Comment pouvons-nous redistribuer cette richesse pour faire face au taux de chômage et aux coupures dans les programmes sociaux que les Canadiens...

Le président: Je pense que vous avez présenté d'excellents arguments. Cela étant dit, la réalité est telle qu'à mon avis ce dont vous parlez est en quelque sorte une division pour le pays. En fait, il y a des réalités comptables auxquelles nous devons faire face à ce moment-ci.

Si on a un déficit de 5 à 8 milliards de dollars dans le prochain budget, et si on fait tout ce que vous avez dit qui était important, je pense, franchement, que le ministre des Finances et le gouvernement doivent signaler aux Canadiens où nous allons nous retrouver et comment nous allons nous y retrouver dans toutes sortes de discours. Je tiens cela pour acquis.

Si on tient compte de la comptabilité réelle pour cet exercice, pour le budget de 1999, alors c'est la réalité à laquelle nous devrons en fait faire face. Donc, à votre avis, la priorité devrait être de rembourser l'argent aux employeurs et aux employés. C'est clair.

Madame Archambault.

Mme Lorraine Archambault: Nous voulons certainement réduire la dette. Je serais certainement en faveur de cela. J'ai cependant deux questions. Lorsque vous parlez de vos réductions d'impôt, voulez-vous parler de réduction d'impôt pour les particuliers ou pour les sociétés? Parlez-vous de réduire les impôts pour tout le monde? À quel genre de réduction d'impôt songez-vous?

Ma deuxième question est la suivante: en ce qui concerne l'assurance-emploi, j'ai tendance à simplifier les choses—est-ce que l'argent doit être retourné dans le fonds d'assurance-emploi en une année ou est-ce que cela peut se faire de façon échelonnée sur une certaine période?

Le président: Nous renversons les rôles ici.

En ce qui concerne par exemple l'impôt sur le revenu des particuliers, on a parlé entre autres de la possibilité d'augmenter l'exemption personnelle de base et d'éliminer les surtaxes qui ont été introduites pour réduire le déficit.

En ce qui concerne l'assurance-emploi, c'est là où vraiment il y a un débat. Certaines personnes font valoir que cela devrait se faire immédiatement, ce qui limitera naturellement toute marge de manoeuvre pour le gouvernement fédéral de s'occuper de programmes comme les vôtres et de tous les témoins qui sont devant nous aujourd'hui, notamment des programmes pour les étudiants de troisième cycle. Voilà essentiellement en quoi consiste le défi.

Mme Lorraine Archambault: Je crois qu'on n'a cependant pas vraiment répondu à ma question. Est-il possible de retourner cet argent dans le fonds de l'assurance-emploi sur une période de trois ou quatre ans...

Le président: Exactement.

Mme Lorraine Archambault: ...plutôt que le tout en une seule fois?

• 1305

Le président: C'est cela. Nous discutons précisément de cette question.

Mme Lorraine Archambault: Vous en discutez, d'accord.

Le président: C'est pour cela que je vous ai posé la question. Je voulais savoir ce que souhaitaient les Canadiens. Veulent-ils que cet argent soit rendu en une seule fois, ce qui limiterait la marge de manoeuvre du gouvernement sur d'autres plans, ou faudrait-il étaler cela sur une longue période? Qu'en pensez-vous?

Mme Lorraine Archambault: Personnellement, je préférerais que ce soit sur une certaine période. Je pense que cet argent devrait être rendu, mais sur une certaine période.

Le président: Sur une certaine période, d'accord.

Monsieur Shauf.

M. Marvin Shauf: Merci. J'aurais plusieurs choses à dire.

Le gouvernement a la responsabilité, selon moi, de créer un climat propre à favoriser la croissance. Si l'on examine la situation sur une période budgétaire d'un an, c'est sans doute trop court. Le gouvernement doit examiner les choses à plus long terme qu'il ne le fait en prenant toutes ses décisions sur une période d'un an.

À mon avis, depuis plusieurs années, l'agriculture a perdu une bonne partie de l'aide fédérale et je ne pense donc pas qu'il faudrait préciser quels sont les montants à investir ici ou là. Si nous disions que tel ou tel montant doit servir à investir dans l'avenir de l'agriculture, je crois que nous nous ferions beaucoup de tort.

Mais je crois que le Canada doit se pencher sur un certain nombre de choses, notamment sur le secteur agricole, et y investir à long terme. L'agriculture aura un avenir une fois que nous appliquerons des règles commerciales logiques qui limiteront les excès que nos concurrents peuvent commettre.

Ces règles ont été négociées. Elles ont été approuvées et je crois que, dans l'ensemble, nos concurrents s'y conforment. Le Canada est allé au-delà des compressions qu'il s'était engagé à faire. S'il l'a fait, c'est pour réduire son déficit.

Je crois donc que, si la situation est inégale, c'est en grande partie parce que le Canada a réduit son financement beaucoup plus rapidement que ne l'ont fait nos concurrents.

Il va y avoir une période de tractations très intenses avant la prochaine série de négociations, mais je crois que le Canada va devoir protéger son agriculture au cours des dix-huit à vingt-quatre prochains mois.

Le président: Merci.

Monsieur Epp.

M. Ken Epp: Merci.

Au cours des quelques prochaines minutes, je voudrais parler des difficultés des étudiants. Je n'ai pas pu aborder ce sujet dans ma première série de questions.

Marjorie, j'aurais quelques questions à vous poser. Dans quel domaine étudiez-vous?

Mme Marjorie Brown: Les sciences politiques.

M. Ken Epp: Les sciences politiques. D'accord, je m'en doutais un peu. Je vous voyais à mi-chemin entre les sciences politiques et l'économie.

Pourriez-vous me dire, à partir de votre propre expérience ou des données que vous possédez, comment se répartissent les dépenses d'un étudiant de l'université? Consacrez-vous 50 p. 100 à vos frais de scolarité, 25 p. 100 aux livres et 25 p. 100 à vos frais de subsistance? Quelle est la répartition approximative de vos dépenses?

Mme Marjorie Brown: Je suis en train de faire un peu de calcul mental. Pour ce qui est des frais de scolarité, les étudiants peuvent obtenir environ 12 000 $ d'aide pour une année. Sur ce montant, les frais de scolarité représentent environ 3 000 $. C'est la situation à Saskatchewan. C'est donc le quart du total.

Cela laisse aux étudiants un budget d'environ 9 000 $ pour le loyer, la nourriture, le transport et l'habillement. C'est très très peu pour vivre.

M. Ken Epp: D'accord. Et combien coûtent les livres?

Mme Majorie Brown: Les livres sont de plus en plus coûteux. Les étudiants peuvent avoir à dépenser environ 1 000 $ par an pour les livres. Cela s'ajoute aux frais de scolarité et aux autres frais universitaires.

• 1310

Il est important de souligner que les universités s'arrangent, depuis quelques temps, pour camoufler le montant réel des frais de scolarité. Elles imposent des frais accessoires, des frais de stationnement, toutes sortes de faux frais. En réalité, les étudiants doivent débourser davantage, mais les universités peuvent prétendre qu'elles n'augmentent pas leurs frais de scolarité autant qu'elles le font réellement.

M. Ken Epp: Cela semble être la stratégie adoptée par tous les niveaux de gouvernement, n'est-ce pas?

Voici ma question suivante: Quelle proportion de ces frais les contribuables devraient-ils assumer selon vous, par l'entremise de bourses, de subventions aux universités, d'argent payé directement par le contribuable?

Mme Marjorie Brown: Il est difficile de répondre à cette question car cela dépend du mécanisme choisi pour payer.

Si les possibilités d'emploi sont suffisantes, par exemple s'il y a des programmes d'emploi d'été qui permettent aux étudiants de gagner un revenu raisonnable, il me paraît tout à fait raisonnable de demander aux étudiants d'assumer une plus grosse partie de leurs frais de scolarité. Mais avec un taux de chômage de 15 p. 100, ce n'est pas possible pour le moment. En fait, l'élargissement des programmes d'emploi nous apporterait également une formation professionnelle, ce qui serait bénéfique à long terme.

Sinon, il est possible d'accorder des prêts ou des bourses. Dans le cas des prêts, comme je l'ai déjà dit, cela empêche les étudiants de participer pleinement à l'économie une fois qu'ils obtiennent leur diplôme, étant donné qu'ils doivent consacrer la majeure partie de leur revenu au remboursement de leur dette. Cela ne fait qu'enrichir les banques au lieu de stimuler l'ensemble de l'économie.

Comme je l'ai dit, le Canada se classe avant dernier des pays de l'OCDE pour ce qui est des subventions visant les frais de scolarité et autres. Parmi tous les pays de l'OCDE, il y en a seulement deux qui n'ont pas de régime national de bourses d'études, le Canada et le Japon. Tous les autres pays industrialisés estiment que le gouvernement fédéral a un rôle plus important à jouer en apportant une aide financière aux étudiants qui fréquentent l'université et en leur offrant des programmes qui leur permettent d'obtenir un revenu grâce auquel ils pourront assumer certains coûts.

M. Ken Epp: Seriez-vous pour la gratuité de l'enseignement dans toutes les universités du pays?

Mme Marjorie Brown: Oui, et je crois important de souligner que cela n'irait pas à l'encontre de la tendance générale. On s'imagine au Canada qu'il est normal de payer des frais de scolarité et que nous devons nous contenter d'imiter les États-Unis pour ce qui est du financement de notre enseignement postsecondaire. De nombreux pays industrialisés n'imposent aucun frais de scolarité pour l'enseignement postsecondaire parce qu'ils estiment qu'en donnant accès à l'éducation, on obtient des travailleurs hautement formés et instruits, ce qui sert les intérêts de l'économie. Vous pouvez vous diriger vers une économie plus fondée sur la technologie est plus intellectuelle parce que votre main-d'oeuvre a reçu la formation nécessaire.

M. Ken Epp: Pensez-vous que la situation actuelle des étudiants est désespérée? Peut-on parler de crise?

Mme Marjorie Brown: Absolument. Si vous êtes endetté de 25 000 $ lorsque vous obtenez votre diplôme, à l'âge de 22 ou 23 ans... Certains étudiants ne se rendent même plus compte de ce que cela représente. Le chiffre est si élevé qu'ils ne peuvent même pas planifier de façon réaliste la façon dont ils rembourseront.

Par-dessus le marché, la Loi sur la faillite a été modifiée et empêche les étudiants de déclarer faillite pendant 10 ans. Les étudiants ne savent absolument pas quoi faire. Ils ne savent pas comment faire face à cette situation étant donné le taux de chômage élevé et la lourdeur de leur dette. Aucune solution ne s'offre à eux et même si 93 p. 100 des prêts étudiants ont été remboursés, il est maintenant interdit de déclarer faillite.

M. Ken Epp: C'était ma question suivante. Il est intéressant que vous l'ayez soulevée avant moi. Je sais que vous en avez parlé tout à l'heure et que vous avez recommandé notamment de ne pas renforcer ces règles au sujet de la faillite.

Le fait est que si nous, les contribuables, prêtons de l'argent aux étudiants, nous voulons le récupérer. Par conséquent, si les étudiants sont de plus en plus nombreux à profiter des règles régissant la faillite pour transformer leur prêt en subvention, je m'étonne qu'une jeune femme très intelligente comme vous nous dise qu'il faudrait permettre à tous ces étudiants de déclarer faillite. Autrement dit, ils vont commencer leur carrière professionnelle avec un dossier de crédit déjà entaché.

• 1315

Cela m'étonne de votre part. J'aurais pensé que vous préconiseriez plutôt une réduction de la dette afin que les étudiants n'aient pas à déclarer faillite et qu'ils puissent rembourser leurs dettes.

Mme Marjorie Brown: Absolument, et c'est ce que nous demandons. Mais alors que nous nous attaquions à ces problèmes, voilà qu'on nous a imposé cette interdiction discriminatoire de faire faillite. Nous nous opposons à cette interdiction discriminatoire de 10 ans.

Cela vise le pire des cas, les étudiants pour qui tout va mal sur le plan financier et qui n'ont pas d'autres solutions. Nous ne proposons pas d'offrir là une solution pour tous les étudiants. Nous demandons simplement que cette option existe pour le cas où tout va mal.

Les statistiques prouvent que les étudiants ne sont pas de plus en plus nombreux à déclarer faillite. En 1993, le taux de faillite était de 21 p. 100; il était de 16 p. 100 en 1994 et de 14 p. 100 en 1995. Il y a moins d'étudiants qui se tournent vers la faillite. Mais il faut que cette solution continue d'exister pour les quelques étudiants qui ne peuvent pas payer. Pour le moment, cette possibilité n'existe plus. Il y a une interdiction discriminatoire de 10 ans.

Qu'est-ce que peut faire l'étudiant lorsque tout va mal? Il ne peut pas trouver d'emploi, il ne peut pas faire ses paiements, il a des enfants à sa charge et il ne peut même plus déclarer faillite.

M. Ken Epp: Je passe beaucoup de temps avec vous parce que c'est une question qui m'intéresse vraiment.

Quoi qu'il en soit, j'ai travaillé dans le secteur de l'enseignement postsecondaire pendant 27 ans et j'ai donc beaucoup de sympathie pour les étudiants.

Je voudrais savoir ce que vous recommandez pour offrir des emplois aux étudiants. Lorsque j'étudiais, c'est ainsi que je finançais mes études. J'hésite presqu'à l'avouer, de peur d'exciter votre jalousie, mais lorsque je travaillais dans cette ville, chaque été, je gagnais environ 50 p. 100 de plus que ce dont j'avais besoin pour vivre pendant l'année. C'est le seule période de ma vie où j'ai disposé de revenus excédentaires que j'ai pu dépenser à ma guise. Cette époque est bien entendu révolue à cause de la situation économique globale qui règne au Canada et sans doute aussi dans le monde entier.

Quelle est la mesure budgétaire tangible qui tiendrait compte des intérêts des contribuables et qui aiderait le mieux les étudiants à obtenir de bons emplois d'été afin qu'ils puissent payer eux-mêmes leurs dépenses et se retrouver, à la fin de leurs études avec un diplôme, mais pas de dettes?

Mme Marjorie Brown: Il y a trois choses. D'abord, pour ce qui est des étudiants de deuxième cycle, il s'agit d'accroître le budget des conseils de subventionnement qui, comme nous l'avons déjà dit, fournissent des emplois dans la haute technologie.

Deuxièmement, il faudrait accroître le financement des universités, car ces dernières peuvent créer un assez bon nombre d'emplois pour les étudiants. Elles ont moins été en mesure de le faire ces dernières années à cause des compressions budgétaires. L'une des premières dépenses qu'elles ont réduites était les emplois pour les étudiants. C'est regrettable, car ces emplois sont souvent dans le domaine d'étude de l'étudiant et lui permettent d'avoir des débouchés lorsqu'il obtient son diplôme.

En troisième lieu, et ce serait certainement avantageux pour le contribuable, il faudrait des programmes d'alternance travail-étude. De plus en plus d'universités mettent en place ce genre de programmes qui permettent aux étudiants de travailler dans leur domaine. Des programmes accrus auraient le double avantage de donner aux étudiants une source de revenu de même qu'une formation dans leur domaine d'étude.

M. Ken Epp: D'accord.

Sur un aspect que vous avez abordé en passant, vous avez proposé une solution différente ou du moins vous n'avez pas mentionné la solution qui serait la mienne.

J'hésite à le dire, mais lorsque j'étais étudiant, il y a plus de 40 ans, j'ai dû cotiser à ce qui était alors la caisse d'assurance-chômage. Quand j'ai voulu toucher mes prestations à la fin de mon emploi d'été, on m'a dit: «désolé, mais vous n'y avez pas droit parce que vous n'êtes pas disponible pour travailler; vous retournez étudier.» J'ai donc écrit une lettre—je m'en souviens très bien—dont j'ai envoyé copie à mon employeur et dans laquelle je disais: «comment pouvez-vous me forcer à acheter une police d'assurance dont je ne peux pas bénéficier?»

Je m'opposais donc déjà, dans les années 50, à ce qu'on me demande de cotiser à l'assurance-chômage en tant qu'étudiant étant donné que je ne pouvais pas toucher des prestations. En fait, on me prenait une partie de mon salaire pour subventionner, à l'époque, des pêcheurs qui gagnaient 18 000 $ en six mois et qui touchaient l'assurance-chômage pendant les six mois suivants. C'est une question qui, je m'en souviens, me préoccupait beaucoup alors.

Les choses n'ont pas changé. Les étudiants qui exercent un emploi d'été doivent toujours payer ce que l'on appelle maintenant des «cotisations d'assurance-emploi». Le fait est qu'il faut toujours payer.

• 1320

Pourquoi les étudiants ne demandent-ils pas au comité, au président et au ministre des Finances de s'engager, dans ce budget, à ce que les étudiants obtiennent le plein remboursement de leurs cotisations d'assurance-emploi à l'automne lorsqu'ils s'inscrivent à un autre programme universitaire? Pourquoi ne faites-vous pas cette recommandation?

Mme Marjorie Brown: Parce que, malheureusement, la plupart des étudiants ne se contentent d'exercer un emploi pendant l'été. Un grand nombre d'entre eux cherchent à travailler toute l'année et cela à temps partiel. Les étudiants ont donc besoin de l'assurance-emploi lorsqu'ils perdent leur emploi en cours d'année et se retrouvent sans source de revenu. L'idéal serait que les étudiants puissent travailler pendant les quatre mois d'été et reprennent leurs études à plein temps à l'automne, mais pour le nombre de plus en plus grand d'étudiants à temps partiel, ce n'est plus ce qui se passe.

Il n'y a que 36 p. 100 des chômeurs qui ont droit à l'assurance-emploi. Les étudiants figurent parmi la majorité de cotisants qui n'y ont pas droit.

M. Ken Epp: Les étudiants sont-ils vraiment satisfaits de l'intention du gouvernement actuel de percevoir la TPS sur les livres et des redevances sur les livres d'occasion. Chaque fois que ces livres changeront de main, il faudra payer de nouveau? En êtes-vous vraiment satisfait?

Mme Marjorie Brown: Non.

M. Ken Epp: Pourquoi ne l'avez-vous pas dit?

Mme Marjorie Brown: Il y a tellement de choses à dire. Nous avons toute une liste de problèmes auxquels nous voudrions qu'on remédie. Et bien entendu, une taxe de vente régressive n'aide pas les étudiants.

M. Ken Epp: C'est une taxe très régressive.

Monsieur le président, même si nous sommes ici pour entendre les témoins, je tiens à dire très clairement que nous devons répondre aux besoins des étudiants. Donnons-leur le régime fiscal qui leur permettra de se tirer d'affaire eux-mêmes. Et je suis découragé, comme Marjorie, devant le nombre d'étudiants que j'ai eus et qui se sont retrouvés très lourdement endettés à la fin de leurs études.

Notre perception de la dette obsède tellement notre société que tant les gouvernements, les particuliers, les agriculteurs et les étudiants, nous croyons que la solution consiste à emprunter davantage. Mais ce n'est pas la solution. Ce sont mes dernières observations à ce sujet.

Par ailleurs, j'aimerais simplement dire que ceux qui sont contre la réduction de la dette, maintenant que nous avons un budget équilibré, ne doivent pas oublier que si nous n'avions pas cette dette, nous pourrions, avec les intérêts que nous payons sur la dette, uniquement les intérêts, offrir gratuitement une formation universitaire à tous les étudiants du Canada et accroître considérablement le financement des soins de santé.

En ce moment, le service de la dette représente 31 milliards de dollars, ce qui est une somme énorme. À mon avis, nous devrions chercher à ne pas léguer aux générations à venir le fardeau de la dette et des paiements d'intérêt des générations antérieures. C'est ainsi que je vois les choses, et dans une certaine mesure c'est aussi la philosophie du parti dont je suis membre. En fait, c'est l'une des raisons pour lesquelles j'ai adhéré à ce parti.

J'ai remarqué que les autres témoins n'avaient pas vraiment respecté le délai de 10 minutes, donc je suppose que je ne suis pas obligé de le respecter non plus. Je vais donc revenir sur la question des agriculteurs.

Je vous ai demandé plus tôt de réfléchir à cette question. Et lors du prochain budget en février, lorsque Paul Martin, qui devrait être encore ministre des Finances—on ne sait jamais, il y a parfois des vents de changement qui soufflent en politique—lorsqu'il prononcera à la Chambre des communes son exposé budgétaire, quelles sont les grandes orientations que vous voudriez y voir figurer? C'est l'objet de ces consultations pancanadiennes. Nous essayons de savoir ce que les Canadiens veulent voir dans le prochain budget. Il s'agit de consultations prébudgétaires. Par conséquent, est-ce que vous pourriez vous concentrer le plus possible sur vos deux ou trois grandes priorités?

Le président: Monsieur Shauf.

M. Marvin Shauf: À mon avis, ce que le ministre des Finances devrait dire au sujet de l'agriculture, c'est que nous devons investir dans ce secteur, et nous devons essayer d'uniformiser les règles du jeu dans le secteur agricole jusqu'à ce que les règles commerciales conçues à cette fin s'appliquent à l'échelle internationale.

M. Marvin Wiens: Selon moi, une annonce qui laisserait entendre que le gouvernement fédéral est disposé à geler les initiatives de recouvrement de coût qu'il a lancées et qu'il est disposé à maintenir notre compétitivité au moyen d'une réduction des taxes, dans tous les domaines possibles. La troisième mesure serait d'affecter des fonds additionnels à un programme de protection du revenu, à un programme de secours en cas de catastrophe qui va nous permettre de traverser cette période jusqu'à la nouvelle ronde de négociations commerciales de l'OMC, où nous espérons assister à une augmentation des prix mondiaux afin que nous puissions tirer nos revenus du marché. C'est ce que nous espérons. Ce sont donc les trois choses que j'aimerais voir dans le budget.

• 1325

M. Ken Epp: Excellent.

Je pense qu'il serait juste que tous les autres témoins puissent répondre également à cette question, si vous le voulez.

Mme Judy Kobsar: J'aimerais simplement dire en ce qui concerne les immigrantes, les femmes membres de minorités et les réfugiées—et cela ne s'applique pas uniquement à la Saskatchewan mais à toutes les provinces—nous devrions leur accorder un financement suffisant pour leur permettre de réaliser leurs projets. Pour les immigrants qui arrivent de régions déchirées par la guerre, la Bosnie par exemple, d'où vient Bozana—elle est originaire de la République yougoslave—et d'autres endroits comme le Libéria, le Soudan et les pays d'Amérique du Sud qui traversent des périodes de conflit en ce moment, pour ces gens qui arrivent au Canada et qui sont éduqués, les organisations d'aide aux immigrants devraient recevoir un financement adéquat pour les aider à s'intégrer à la société canadienne.

M. Ken Epp: Merci.

Marjorie, vous avez déjà exprimé votre opinion je pense.

Madame Archambault n'était pas ici pour entendre la question, j'ai donc terminé mon intervention pour l'instant. Merci, monsieur le président.

Mme Lorraine Archambault: Je suis ici.

M. Ken Epp: Voulez-vous répondre à la question?

La question que j'ai posée aux autres, à la fin de ma dernière intervention, était la suivante. Si vous pouviez vous mettre à la place du ministre des Finances en févier prochain, quelles seraient vos deux ou trois priorités? Qu'est-ce que vous aimeriez que le ministre inclut dans son budget pour votre secteur d'activité—en étant aussi précis que possible?

Mme Lorraine Archambault: Nous allons certes continuer d'essayer de réduire la dette.

Deuxièmement, dans ma région, la communauté francophone s'affaiblit depuis quelques années à cause des compressions budgétaires, et nous constituons un élément important de l'unité nationale au Canada. Nous sommes inclus dans la Charte des droits et libertés, dans la Constitution de ce pays. Même si le gouvernement doublait les sommes qu'il nous verse, cela ne représenterait même pas 0.5 p. 100 du budget total du gouvernement fédéral. J'aimerais l'entendre dire qu'il va bonifier sensiblement les accords communautaires canadiens.

M. Ken Epp: Si je peux vous emboîter le pas pendant quelques secondes à ce sujet, vous dites d'abord qu'il faut continuer à réduire la dette. Puisque nous avons maintenant un budget équilibré et qu'il semble même que nous disposions d'un excédent, quoi que cela ne soit pas tout à fait sûr à cause des bouleversements économiques—au fond, vous dites «réduisez la dette au détriment de tous les autres programmes, mais doublez mon financement». Est-ce bien ce que vous dites?

Mme Lorraine Archambault: Je le répète, notre financement ne représenterait même pas 0.5 p. 100 du budget.

M. Ken Epp: Donc, vous ne revenez pas sur votre déclaration. Merci.

Le président: Monsieur Nystrom.

M. Lorne Nystrom: Merci, monsieur le président.

Je tiens à dire à M. Epp et aux autres que la question n'est pas de savoir s'il faut réduire la dette ou le déficit, mais comment on le fait. Il y a différentes solutions possibles. Un des principales raisons qui fait que le Canada traîne une lourde dette, c'est à cause de la politique financée de John Crow, le gouverneur de la Banque du Canada dans les années 80, alors que nous avions des taux d'intérêt extrêmement élevés, jusqu'à 5 p. 100 de plus qu'aux États-Unis. Cela a eu pour effet de ralentir l'économie et d'aggraver la situation à tel point que les Canadiens ont perdu leur emploi et que la croissance de l'économie s'est mise à ralentir. Les taux d'intérêt et la dette ont alors augmenté, créant un cercle vicieux, comme un chien qui court après sa queue.

La question que l'on pose, c'est comment s'en sortir? Comme l'a dit le syndicat du blé ce matin, et d'autres témoins, nous nous en sommes sortis grâce à des compressions draconiennes des dépenses—et Marjorie l'a mentionné également—aux dépens des Canadiens ordinaires et grâce à des augmentations d'impôts.

M. Ken Epp: Des augmentations d'impôts considérables.

M. Lorne Nystrom: D'énormes augmentations d'impôts généralisées. On peut pointer un doigt accusateur à bien des gens mais ce n'est pas ce que je veux faire ce matin. Je veux entendre ce que vous avez à dire.

• 1330

Je voulais vous demander, si l'on revient au syndicat du blé—M. Demyen voulait dire quelque chose beaucoup plus tôt.

En 1997-1998, le gouvernement a enregistré un excédent de 3,5 milliards de dollars, et il a décidé, après de très brèves consultations, de tout le dépenser sans réduire la dette. J'ai affirmé que c'était une mauvaise décision. Cette année, l'excédent pourrait être beaucoup plus important, selon les événements qui se produisent ailleurs dans le monde. Il pourrait atteindre 10 ou 15 milliards de dollars. Il pourrait aussi n'être que de 7 milliards de dollars, mais nous disposerons quand même d'un surplus. Ce qu'il faut savoir, c'est comment nous allons l'utiliser?

Compte tenu de la conjoncture de récessive mondiale—les deux tiers de la planète connaissent actuellement une récession et nous aussi peut-être—la dernière chose que le gouvernement devrait faire c'est d'effectuer d'autres compressions. Il devrait plutôt affecter une bonne partie de cet excédent à des programmes qui vont créer des emplois au Canada. Une partie devrait être consacrée à un programme d'aide d'urgence aux agriculteurs qui non seulement aiderait les agriculteurs et d'autres Canadiens, mais stimulerait l'économie et créerait des emplois.

Je vais vous poser une question très précise. Si on adopte un programme d'aide aux agriculteurs de plusieurs centaines de millions de dollars, comment les agriculteurs vont-ils employer cet argent? Est-ce que la plupart de ces fonds serviront à l'achat de biens et de services?

Le secrétaire parlementaire de M. Martin, M. Valeri s'est joint maintenant à nous. Il importe qu'il entende aussi ma question. Quelles retombées auraient ces fonds sur l'économie, à l'extérieur du milieu agricole?

M. Marvin Wiens: L'argent serait réinvesti dans l'économie. Je pense que les mises à pied dans le secteur manufacturier liées à l'agriculture fournissent un bon exemple. Tous les secteurs de la fabrication liés à l'agriculture mettent à pied beaucoup de monde, par exemple, Flexi-Coil, Case IH, John Deere, y compris des emplois dans l'est du Canada. L'autre jour, un vendeur dans l'industrie de l'automobile me disait que son revenu avait diminué de moitié par rapport à l'année dernière.

Les agriculteurs utilisent rapidement ces fonds pour acheter du matériel dont ils ont besoin pour leur exploitation, ce qui profite directement à l'économie de l'Ouest du Canada. Malheureusement, l'argent ne peut rester entre les mains de l'agriculteur, parce qu'il a des factures à payer.

M. Lorne Nystrom: Donc les dépenses effectuées par les agriculteurs stimulent directement toute l'économie. Cela se traduirait par une légère diminution du taux de chômage et des déboursés du gouvernement fédéral aux titres de l'assurance-emploi ainsi qu'à une baisse des dépenses des gouvernements provinciaux au titre de l'aide sociale, etc. Quel est le revers de la médaille? Si rien n'est fait, quels seront les coûts?

M. Marvin Wiens: Le revers, c'est exactement ce que nous voyons. L'organisation que nous représentons, le Saskatchewan Wheat Pool, est en train de mettre des employés à pied. Nous avons été obligés de le faire. L'économie ralentit. Les dépenses ont diminué sensiblement depuis un an et nous avons dû commencer à opérer des compressions, comme tous les autres acteurs économiques dans l'ouest du Canada. Le genre d'emplois que nous offrions dans le passé n'existent plus.

Nous avons essayé de trouver de nouveaux débouchés, et nous réalisons des projets d'expansion dans le domaine de l'élevage afin de fournir de nouveaux emplois dans l'Ouest du pays. Malheureusement, ils ne vont pas remplacer les emplois que nous avons dû supprimer à cause des compressions de dépenses dans le secteur agricole.

Ce qui nous inquiète, c'est exactement ce dont nous avons parlé plus tôt au cours de la réunion, nous n'étions même pas au courant de la situation en Saskatchewan il y a six mois. Je pense que c'est en train de changer. Nous avons discuté avec le ministre fédéral de l'Agriculture, M. Vanclief, et il est beaucoup plus conscient de la gravité de la situation dans l'ouest du Canada. Nous sommes très heureux d'avoir pu défendre notre cause auprès de M. Goodale et de M. Vanclief, et nous allons poursuivre nos démarches.

Lorsque le gouvernement fixera ses priorités de dépenses au cours de la nouvelle session—nous reconnaissons l'importance de la santé et de l'éducation—nous tenons à dire officiellement que l'agriculture, malheureusement, figure aussi sur cette liste de priorités.

M. Lorne Nystrom: Je pense que vous avez raison. Beaucoup de personnes ne comprennent pas la gravité de la situation. Lorsque le revenu agricole net chute de 84 p. 100, comme c'est le cas dans cette province, cela crée une véritable crise dans les villes et les villages. Je pense que les priorités du gouvernement devraient être les programmes sociaux, l'éducation et l'aide d'urgence, et que nous devrions affecter des fonds à cette situation urgente.

Est-ce que vous avez des suggestions à faire au comité en ce qui a trait à la structure du programme d'aide? Est-ce qu'il devrait être basé sur un système de paiement à l'acre pour les terres cultivées? Est-ce qu'il faudrait le restreindre au secteur céréalier ou non? Est-ce que vous avez des suggestions quant aux caractéristiques du programme? À long terme, c'est autre chose.

M. Marvin Shauf: À court terme, il faut avant tout reconnaître qu'il y a un problème. Deuxièmement, il faut prendre l'engagement de le résoudre. De nombreux mécanismes peuvent s'appliquer pour la distribution de l'aide.

• 1335

M. Marvin Wiens: L'autre point à faire valoir à cet égard, c'est que par le passé, lorsque le revenu dans le secteur céréalier baissait, le revenu provenant du secteur de l'élevage compensait cette perte ou augmentait. Aujourd'hui, nous observons une réduction du revenu dans tout le secteur, que ce soit celui du bétail, de la viande de porc ou des céréales. Malheureusement, il y a en ce moment peu de secteurs vers lesquels les agriculteurs peuvent se tourner pour soutenir les autres secteurs d'activité.

M. Lorne Nystrom: Comment se fait-il que les coûts de production aient augmenté? Je crois comprendre par exemple que le coût des machines agricoles augmente plus vite que le taux d'inflation. Est-ce exact?

M. Marvin Shauf: Oui, c'est exact. Dans mon exposé j'ai mentionné que les frais de transport avaient doublé depuis 1995. Depuis cinq ans, le coût des machines agricoles a augmenté de 21 p. 100, celui des engrais, de 57 p. 100, et celui des produits de protection des cultures, de 63 p. 100. C'est de loin supérieur au taux d'inflation.

M. Lorne Nystrom: Dans le cas d'un programme à long terme, quelle serait la contribution du gouvernement fédéral? Vous parlez d'un programme dont le coût pourrait être partagé avec les provinces et les agriculteurs, mais est-ce que vous pouvez donner au comité une idée de ce que ça représente comme engagement à long terme?

Cela dépendrait, je suppose, des cycles de l'agriculture, un peu comme dans le cas de la caisse d'assurance-emploi qui est conçue pour traverser des cycles, en décaissant davantage de fonds en périodes difficiles et en enregistrant un excédent lorsque l'économie va bien. Est-ce que vous avez des conseils à donner au comité à cet égard? Peut-être que M. Demyen a quelque chose à ajouter à ce sujet.

M. Marvin Wiens: C'est très difficile à évaluer. Le Conseil consultatif national sur la protection du revenu, au niveau fédéral, a demandé aux fonctionnaires des gouvernements fédéral et provinciaux de cerner les besoins à ce chapitre, et ils sont en train d'y travailler.

Si je devais vous donner un chiffre rapidement... j'espère que ça ne sera pas à long terme. Comme je l'ai dit plus tôt, nous cherchons à tirer nos revenus du marché, et si nous pouvons faire des progrès sur le plan des négociations commerciales, peut-être que nous réussirons. Mais à court terme, c'est impossible. On peut très clairement attribuer la réduction du revenu au problème du commerce international. Nous ne savons pas quels seront les chiffres à long terme. Nous savons toutefois qu'il faut accroître le financement des programmes de protection du revenu.

Le président: Merci, monsieur Wiens. M. Valeri posera la dernière question.

M. Tony Valeri (Stoney Creek, Lib.): Merci, monsieur le président. Je n'ai que quelques commentaires à propos de ce que M. Nystrom a dit plus tôt au sujet de l'excédent en 1997-1998, et simplement un commentaire général. Je pense que vous serez tous d'accord, et reprenez-moi si je me trompe, pour dire d'abord et avant tout, qu'à la veille de la prochaine période budgétaire, le gouvernement devrait essentiellement faire ce qu'il fait de mieux, en comprenant qu'il veut dorénavant continuer de présenter des budgets équilibrés.

Le gouvernement ne devrait pas essayer de dépenser de l'argent qu'il n'a pas. J'aimerais vraiment entendre vos commentaires à ce sujet, parce que c'est un principe fondamental, un principe qu'on ne vient pas d'inventer; c'est le résultat des consultations prébudgétaires qui remonte à l'exercice 1993-1994. Lorsque nous avons rencontré des Canadiens, leur message primordial a été: «écoutez, pour commencer, vivez selon vos moyens, et ensuite établissez des priorités en fonction des désirs des Canadiens mais toujours selon vos moyens».

Le commentaire qui a été fait, c'est que l'excédent en 1997-1998 a servi à réduire la dette, et je pense que M. Nystrom a peut-être insinué que l'on aurait pu se servir de cet argent autrement pour contrer le cycle de l'économie. Je veux simplement apporter cette précision.

Au gouvernement, l'année financière va du 1er avril au 31 mars,—il y a un problème à ce sujet avec le vérificateur général en ce moment—et à moins qu'on annonce un programme, que l'on s'engage à le financer, et que l'on définisse le mode d'application de ce programme, essentiellement on ne peut pas comptabiliser le coût de ce programme. Lorsque les livres sont fermés au 31 mars, il n'y a fondamentalement pas d'autres programmes. Ce qui se fait du 31 mars jusqu'au mois d'août, ce sont des rajustements de fin d'année.

• 1340

Ces rajustements sont parfois négatifs, et parfois positifs. Lorsqu'ils sont positifs, les fonds ne peuvent servir qu'à rembourser la dette. Ils ne peuvent pas servir à financer d'autres programmes, comme le laisse entendre M. Nystrom. On ne peut pas, après la clôture de l'exercice, annoncer un programme pour l'année 1997-1998. Cet argent ne peut servir qu'à rembourser la dette ou à réduire le déficit, et voilà ce qui se produit. C'est pourquoi, en fait, nous avons pu réaliser notre objectif et même dépasser les attentes de la plupart des gens. Le bilan de fin d'année était bon, et nous avons pu réduire davantage le déficit. Le scénario est le même dans le cas de la dette.

Donc, lorsque vous parlez d'un excédent de 3,5 milliards de dollars et que vous demandez pourquoi le gouvernement ne vous a pas donné plus de fonds pour la protection du revenu en prévision des prochaines négociations, ce n'est vraiment pas fondé, parce que ce chiffre est déterminé à l'avance. Je tenais simplement à vous fournir cette information. Ce n'est pas une attaque dirigée contre vous.

À mesure que l'année avance, la plupart des économistes du secteur privé prétendent que l'excédent pourrait atteindre 5 ou 7 milliards de dollars, dont 3 milliards qui seraient affectés à une réserve de sécurité pour garantir l'équilibre. Comme nous nous dirigeons essentiellement vers un excédent de 2 milliards de dollars, vous proposez d'instaurer des programmes de stabilisation du revenu et des programmes de protection du revenu. Je ne sais pas si je vous ai bien compris, mais est-ce que vous avez une idée du budget de ce programme et des sources de financement? Est-ce que ce sera un programme à frais partagés? Ou est-ce qu'il serait strictement financé par le gouvernement? Pourriez-vous nous fournir plus d'explications?

M. Marvin Wiens: Non, le programme de protection du revenu actuel est un programme à frais partagés. Le budget est d'environ 1 milliard de dollars pour l'ensemble du Canada; la contribution du gouvernement fédéral est d'environ 600 ou 700 millions de dollars, et celle des gouvernements provinciaux, d'approximativement 400 millions de dollars. C'est donc un programme à frais partagés.

En vertu de l'assurance-récolte et du compte de stabilisation du revenu net, les deux principaux volets du programme de sécurité du revenu, les agriculteurs versent des primes. Les agriculteurs contribuent donc au financement du programme. Je me réjouis que vous l'ayez signalé. Il s'agit également d'un volet important. Les agriculteurs sont prêts à le faire, et ils l'ont fait par le passé.

Malheureusement, comme je crois l'avoir dit avant que vous n'arriviez, un bon nombre de jeunes agriculteurs n'ont pas encore constitué de réserve, parce qu'ils ne sont pas en affaires depuis assez longtemps.

Supposons que vous êtes un jeune agriculteur. Prenons l'exemple de mon fils qui est agriculteur depuis deux ans. Il n'a pratiquement aucune participation au CSRN parce qu'il n'est pas en affaires depuis assez longtemps. Il lui est donc très difficile de faire face à la forte baisse de son revenu agricole cette année parce qu'il n'a pas pu participer à un programme qui existe depuis un certain temps.

Un grand nombre de nos producteurs... En fait, en moyenne en Saskatchewan, je pense qu'il y a environ 18 000 $ dans le CSRN, dont la moitié est versée par les gouvernements, et l'autre moitié par le producteur. Aujourd'hui, 18 000 $ représente une bien petite somme lorsqu'il faut faire face à une forte baisse du revenu agricole.

M. Lorne Nystrom: C'est la moyenne?

M. Marvin Wiens: C'est la moyenne.

M. Tony Valeri: Vous avez aussi dit que normalement le secteur céréalier et le secteur de l'élevage se compensaient l'un l'autre, mais ce n'est pas le cas maintenant. Quelle est la raison? Est-ce que c'est quelque chose que nous aurions pu prévoir, ou est-ce quelque chose de passager? Est-ce que vous pensez que c'est permanent ou passager? Peut-être pouvez-vous éclairer ma lanterne.

M. Marvin Wiens: Nous ne nous attendons pas à ce que cela perdure. Les éleveurs de bétail dans l'ouest du Canada investissent actuellement même si les prix sont faibles. Ils ont confiance en l'avenir.

L'élevage des porcs est un excellent exemple. Selon les dernières données qui m'ont été communiquées, la production du porc dans cette province va probablement doubler au cours des deux prochaines années.

Les agriculteurs et les organisations comme la nôtre, le Saskatchewan Wheat Pool, investissent dans l'élevage du bétail même s'ils enregistrent actuellement des pertes dans ce secteur d'activité. Nous espérons que la crise économique mondiale se résorbera à court terme. L'Asie représente un marché considérable pour les éleveurs canadiens, et l'ouest du Canada veut profiter de la reprise dans l'élevage du bétail lorsque l'économie de l'Asie se redressera.

M. Tony Valeri: D'accord. J'ai une dernière question.

• 1345

Est-ce que vous êtes d'accord pour dire qu'il faut veiller en priorité à ce que le budget demeure équilibré, réduire les impôts lorsque cela s'impose—je pense que c'est malheureux que les personnes âgées et les personnes à faible revenu payent encore des impôts au Canada—des gens qui gagnent 11 000 ou 12 000 $ par année payent de l'impôt fédéral—et réinvestir dans la santé.

Je suppose que je vous demande de changer de casquette pendant quelques minutes. Je ne nie pas que l'agriculture ne devrait pas figurer sur la liste des priorités, mais pour ce qui est des trois ou quatre objectifs prioritaires, êtes-vous d'accord avec moi?

Nous pouvons peut-être demander l'avis de tous les témoins.

Le président: Madame Archambault.

Mme Lorraine Archambault: Oui, réduire la dette est une priorité absolue. Mais il y a parfois un bon cycle qui se crée lorsque nous obtenons de l'aide du gouvernement. Par exemple, dans ma région, nous utilisons une partie de l'argent pour créer des emplois. Parce que nous embauchons des gens qui aident les bénévoles à faire le travail qui doit être fait. Par conséquent, le gouvernement fédéral récupère une partie de son argent sous forme d'impôt sur le revenu.

Nous ne faisons pas que parler français; nous soutenons aussi le développement économique et le développement du tourisme, ce qui aide les villes et les villages de notre province. Par conséquent, nous réinvestissons dans l'économie une partie de ce que nous recevons, et je pense que c'est un élément très important à prendre en considération lorsque vous donner des subventions à des groupes comme le nôtre.

Mme Kobsar disait ce matin que son organisation avait un personnel rémunéré; donc, elle crée aussi des emplois.

Je pense que cela doit être pris en considération lorsque vous examinez nos budgets.

Le président: Monsieur Wiens?

Monsieur Shauf?

M. Marvin Shauf: Dans une situation normale, je conviens avec vous que les priorités que vous avez énoncées sont importantes.

La seule chose que je tiens à souligner cependant, c'est que la réduction de la dette, la réduction des impôts et les programmes sociaux entraînent des coûts. Et je pense que nous devons protéger les intérêts des contribuables canadiens, les activités qui procurent des devises étrangères et celles qui créent des emplois au Canada.

Si nous négligeons ces facteurs, malgré toutes nos bonnes intentions... nous ne pourrons pas accorder de réduction de taxes; nous ne pourrons pas offrir de programmes sociaux sans la prospérité économique qui découle des exportations. Je pense donc que ces activités doivent être des objectifs prioritaires.

M. Tony Valeri: Si je peux vous paraphraser, vous soutenez que le gouvernement devrait, ou pourrait en fait, profiter des subventions à l'industrie agricole et qu'il pourrait même rembourser une plus grande partie de la dette, réinvestir dans les soins de santé, et offrir des allégements fiscaux.

M. Marvin Shauf: Je pense sincèrement que c'est un problème à court terme pour le secteur agricole, comme pour d'autres secteurs.

En ce qui concerne l'agriculture, nous pouvons déjà voir se profiler des règles qui restreindront les agissements de nos concurrents dans le secteur de l'exportation, agissements qui nuisent aux prix sur le marché mondial. Je crois également qu'à moins de prévoir une réserve pour notre secteur agricole afin de lui permettre de traverser les quelques prochaines années, un grand nombre des produits à valeur plus élevée et à risque plus élevé ne seront pas produits ici et beaucoup des éléments à valeur ajoutée ne seront pas ajoutés ici. Ce sont d'autres pays qui profiteront de ces avantages, et nous ne pouvons pas nous permettre de laisser ce genre de choses se produire au cours des deux ou trois prochaines années.

Le président: Y a-t-il d'autres commentaires?

M. Mitchell Demyen (Division de la politique et de la recherche économique, Saskatchewan Weat Pool): J'aimerais ajouter que, d'après les spécialistes en devises étrangères l'un des facteurs qui influe sur le cours du dollar canadien, c'est notre dépendance sur les exportations du secteur primaire. C'est l'un des principaux facteurs.

Lorsque vous examinez la situation du gouvernement fédéral, les préoccupations face à l'avenir, cela explique ici encore parce que nous dépendons de différents marchés mondiaux qui traversent des crises. Si on examine la situation à l'échelle nationale, on se rend compte que ce sont des industries nationales comme l'agriculture qui courent en fait beaucoup plus de risques, et qui subissent le gros des conséquences de cette situation. C'est l'une des raisons pour laquelle j'estime qu'il faut s'occuper davantage du secteur agricole.

• 1350

M. Tony Valeri: Je vous remercie.

Le président: Merci, monsieur Valeri.

Au nom du comité, je tiens à remercier les témoins. Vous avez fait un excellent travail comme vous pouvez le constater d'après le nombre de questions qui vous ont été posées et aussi d'après les excellentes réponses que vous nous avez données. Cette information est très utile au comité car nos déplacements d'un bout à l'autre du pays nous permettent d'avoir une bonne idée des priorités et des défis qui se présentent dans notre pays. Bien entendu, nous prenons cette information très au sérieux et elle servira d'ailleurs de base aux recommandations que nous formulerons à l'attention du ministre des Finances. Au nom du comité je tiens à vous remercier de nouveau.

La séance est suspendue jusqu'à 13 h 30.

• 1351




• 1537

Le président: La séance est ouverte. Je tiens à souhaiter la bienvenue à tous ici présents cet après-midi à Saskatoon dans le cadre de notre étude des consultations prébudgétaires.

Comme vous le savez, nous nous sommes déplacés d'un bout à l'autre du pays, afin de connaître les priorités et les opinions des Canadiens d'un océan à l'autre concernant le budget fédéral de 1999. Nous nous faisons donc un plaisir d'entendre vos commentaires.

Nous avons le plaisir d'accueillir le Dr Louis Delbaere, le Dr Valerie Verge, le Dr Andrew Gloster et de la Saskatchewan School Trustees Association, nous accueillons sa présidente, Mme Debbie Ward.

Comme vous le savez sans doute, vous avez cinq à sept minutes pour faire votre exposé, après quoi nous passerons à la période de questions.

Nous commencerons par le Dr Louis Delbaere. Je vous souhaite la bienvenue.

Dr Louis Delbaere (témoignage à titre personnel): Je vous remercie, monsieur le président, distingués invités, chers collègues.

Quel est l'un des moyens les plus efficaces de créer de l'emploi? Augmenter le financement de la recherche dans le domaine de la santé. Environ 75 p. 100 des subventions de recherche servent à engager des professionnels, à les former et à les employer. Ces salaires ont un effet multiplicateur triple ou quadruple sur l'économie. Car nous savons tous que plus il y a d'emplois plus il y a de retombées économiques dans la collectivité où ces gens travaillent. Ce sont tous des gens qui paient aussi de l'impôt.

Le budget serré de la recherche à l'heure actuelle des différents organismes rend la tâche difficile à de nombreux chercheurs, en ce sens que lorsqu'ils obtiennent une subvention non renouvelable disons du Conseil de recherches médicales, ils doivent mettre des gens à pied et ne peuvent pas faire de plans à long terme. Cinquante pour cent de la recherche nouvellement financée par le Conseil n'est plus subventionnée après le premier renouvellement de leur financement. Cela signifie que la moitié des nouveaux chercheurs subventionnés voient leur subvention coupée deux ans plus tard. Si on tient compte des autres personnes qui font partie du système, c'est une façon très inefficace d'utiliser les ressources. On doit constamment fermer des laboratoires, mettre à pied des gens formés. Il faut de l'argent pour les former et lorsque l'on doit les mettre à pied, on perd l'investissement que l'on a fait dans leur formation.

Dans notre département, le Dr Kandelwal, biochimiste, a reçu il y a trois ans une subvention non renouvelable du Conseil de recherches médicales. Il avait un très bon assistant de recherche, très compétent, mais il a dû le remercier de ses services. Par la suite, cette personne est allée à Denver au Colorado où il fait de la recherche à l'université. Son épouse avait travaillé pour moi comme technicienne. C'était une excellente technicienne mais j'ai dû aussi la laisser partir. Donc après avoir perdu la subvention du Conseil, nous avons perdu deux personnes très bien formées au profit des États—Unis.

Il est difficile de recruter et de conserver des employés compétents et le financement de la recherche est l'un des grands problèmes à cet égard.

• 1540

Étant donné que des organismes fédéraux comme le CRM reçoivent du financement des contribuables d'un peu partout au pays, il existe un mandat de financement de la recherche au pays. Les universités forment des étudiants de 1er cycle et des étudiants diplômés et les instituts ont de nombreux chercheurs. Ils font très peu de formation. Donc, ceux qui travaillent dans les universités ont d'autres obligations professionnelles en plus de la recherche. Pourtant ce sont eux qui forment ceux qui iront travailler dans les milieux universitaires, dans l'industrie et dans les instituts. Il est donc important que les universités reçoivent un financement suffisant.

C'est un problème qu'éprouvent en particulier les petits centres que nous avons en Saskatchewan car, en raison de leurs autres obligations professionnelles, ils ont moins de temps à consacrer à la recherche. Nous avons quand même d'excellents chercheurs ici mais il est plus difficile de faire concurrence à l'échelle nationale aux instituts qui n'ont pas ces autres obligations.

Le CRM avait un programme de subventions de développement qui permettait de pallier à cette difficulté. Grâce à cette subvention de développement, nous pouvions engager plusieurs chercheurs à l'Université de la Saskatchewan, leur fournir des fonds pour les aider à démarrer leur laboratoire et financer leur salaire pendant cinq ans. Dans le département de biochimie, nous avons pu ainsi engager six personnes, afin qu'ils nous aident à combler les disparités régionales qui existent. Cela a marché. Elles ont réussi à obtenir des subventions de recherche nationales, et ce programme a bien fonctionné.

Les petits centres, comme le nôtre, n'ont pas beaucoup d'instituts de recherche. Nous ne sommes pas en mesure de consacrer la totalité de notre temps à la recherche. Cependant, le CRM a mis fin à son ancien système de subventions de développement, ce qui nous a fait prendre du recul à l'échelle nationale. Il nous faut des moyens qui nous permettront de régler ce problème de façon permanente pour assurer un financement à l'échelle nationale.

L'institut proposé de recherches médicales est certainement une des solutions au problème. Il permettra d'augmenter le financement de la recherche médicale, d'où une plus grande marge de manoeuvre financière. Il ne fait aucun doute que cela sera très utile à tous les niveaux, mais je persiste à croire qu'il existe certaines régions dont il faudrait s'occuper pour s'assurer que ces fonds sont distribués dans l'ensemble du pays.

Si on tient compte de la distribution régionale, je crois alors que l'Institut canadien de recherches médicales proposé offre d'excellentes possibilités d'assurer plus d'emplois dans l'ensemble du pays, surtout pour nos jeunes, et de les former dans ce domaine. Je pense que ce domaine, surtout celui de la biotechnologie, est vraiment l'industrie de croissance dans notre pays, sinon dans le monde.

Je vous remercie de votre attention.

Le président: Merci beaucoup, docteur Delbaere.

Nous allons maintenant avoir des présentations du Dr Verge et du Dr Gloster. Soyez les bienvenus.

Dr Valerie M.K. Verge (témoignage à titre personnel): Je vous remercie.

Je vais utiliser des transparents. Je vous promets que j'ai une voix suffisamment forte pour me passer du micro. Oh voilà un micro.

J'ai été formé à Montréal à l'un des meilleurs établissements de formation en neurologie, à l'Université McGill au département de neurologie et de neurochirurgie. J'ai été formé à une époque où nous étions extrêmement conscients de l'importance de financer suffisamment la recherche médicale. Nous avions des groupes de recherche très solides, reconnus à l'échelle internationale. Nous avions des fonds de recherche suffisants. C'était en... J'ai d'abord commencé avec un BSc avant de commencer comme stagiaire en 1986. J'ai commencé à travailler comme technicien et je suis devenu un mordu de la recherche. Mais j'ai commencé avec l'un des meilleurs groupes au monde. Nous avions une renommée internationale.

• 1545

Par conséquent, lorsque j'ai choisi cette carrière, j'avais une excellente formation scientifique qui m'offrait de nombreuses possibilités. J'ai pu faire des études postdoctorales partout dans le monde. Après mes études, j'ai eu de nombreuses offres d'emploi dans diverses universités. J'ai choisi la Saskatchewan parce que j'avais rencontré un agriculteur de cette région. C'est en fait le premier endroit où j'ai dû poser ma candidature à un poste, parce qu'à l'époque je n'étais pas au courant de la recherche qui s'y faisait. Cependant, de nombreuses possibilités s'offraient à moi.

La recherche que nous avons faite à l'époque, lorsqu'elle était suffisamment subventionnée, nous a grandement permis de comprendre pourquoi le système nerveux ne se régénère pas à la suite de blessures ou d'un accident cérébrovasculaire. Cela nous a beaucoup éclairés sur ce qui constitue maintenant la recherche entreprise par de nombreuses personnes sur la façon dont le système nerveux peut se réparer.

J'ai aussi eu la grande chance lorsque je suis revenu la première fois au Canada, après avoir fait mes études postdoctorales en Suède, à mon retour ici à l'Université de la Saskatchewan, de faire partie d'un centre d'excellence pour la recherche en neurosciences. Ce centre d'excellence disposait de fonds suffisants ce qui m'a permis d'établir de nombreux contacts et a en fait entraîné la création de plusieurs sociétés de biotechnologie, dont certaines existent toujours. Beaucoup d'entre elles ont dû fermer leurs portes mais bien entendu nous savons tous que 80 p. 100 des entreprises doivent fermer leurs portes.

Je suis revenu et j'ai obtenu une bourse du Conseil de recherches médicales du Canada. Au cours des trois dernières années j'ai siégé au Comité d'examen du conseil subventionnaire, et depuis deux ans je siège au Comité permanent des sciences et de la recherche du Conseil de recherches médicales. De nombreuses possibilités—une époque très déprimante.

Je suis sorti de cette période vraiment bénie pour la recherche scientifique, plein d'espoir et de promesses. Et je demeure optimiste, car je refuse d'abdiquer.

Quelles ont été les conséquences de financement insuffisant? D'après mon expérience au sein du comité de recherche et en sachant le nombre de subventions que nous pouvons offrir maintenant, qui est minuscule comparativement à autrefois—non seulement ce nombre est-il minuscule—et nous tâchons d'ailleurs de le maximiser—mais les niveaux actuels de financement sont les plus bas parmi les pays du G-7 en ce qui concerne le financement de la recherche biomédicale. Les subventions actuelles à la recherche que nous accordons représentent le tiers des subventions de recherches moyennes accordées aux États-Unis. D'ailleurs nous devons acheter certains produits en dollars américains. Et comme vous l'a dit le Dr Delbaere, deux tiers de ce salaire sert uniquement à embaucher du personnel.

La situation est tellement mauvaise à l'heure actuelle que même lorsque je me voyais accorder un renouvellement et que je franchissais cette importante étape du premier renouvellement, c'était l'une des pires époques au CRN, donc cette subvention avait été réduite de 29 p. 100. Je suis donc obligé aujourd'hui de faire ma recherche avec 29 p. 100 de moins de ce qui était considéré comme le strict nécessaire en matière de recherches. Mes mains sont donc liées.

Cela ralentit donc énormément le processus, affaiblit les groupes, démoralise les employés, ce qui bien sûr nuit à la productivité. J'ai également été obligé de devenir un satellite d'une firme de biotechnologie américaine. Pour faire ma recherche, j'avais besoin de molécules qui coûtent très cher. Comme je ne peux pas les acheter avec la subvention que je reçois à l'heure actuelle, j'ai signé une entente avec une firme de biotechnologie qui lui accorde tous les droits intellectuels. Cela signifie que si je découvre une nouvelle thérapie... Oui, je suis vraiment reconnaissant de pouvoir faire cette recherche qui aura peut-être un impact sur la vie des gens si je trouve une solution, mais la propriété intellectuelle appartiendra à la firme américaine. C'est elle qui en retirera les avantages sur le plan de la biotechnologie.

Bien des gens et bon nombre de mes collègues ont en fait dû choisir d'autres carrières. Ils ne peuvent plus être des scientifiques. Certains ont décidé de s'occuper des aspects lucratifs de la chose. Cela les a fait réfléchir et leur a permis de devenir créatifs donc c'est un aspect positif. Mais pour bien des gens... Ma soeur travaille maintenant aux États-Unis. Bien d'autres de mes collègues qui ont fait des études postdoctorales n'arrivent pas à trouver des emplois. Ils n'arrivent même pas à entrer dans le système.

Nous savons, d'après les statistiques, que 30 p. 100 du personnel scientifique spécialisé part maintenant travailler pour les firmes de biotechnologie américaines. Pour les Canadiens, cela se traduit par de moins grandes possibilités de découverte, et par une formation réduite. Nous ne sommes pas en mesure de former autant d'étudiants. Nous devons pouvoir leur garantir un salaire pendant leur formation, ce que nous ne pouvons pas faire par manque d'argent. Donc, nous sommes en train de perdre tous nos meilleurs cerveaux. Ils vont tous aux États-Unis faire des études supérieures grâce à des bourses. Pourquoi ne le feraient-ils pas? Les gens brillants trouvent toujours preneurs. Et croyez-moi, il y a beaucoup de gens brillants en Saskatchewan.

• 1550

Quelles en sont les conséquences dans le domaine de la santé au Canada? Que se passe-t-il lorsque vous voyez disparaître ces dynamiques écoles de médecine axées sur la recherche? On perd tout espoir de développer une biotechnologie ici au Canada. Surtout, nous ne serons même plus en mesure de former les stagiaires pour les entreprises de biotechnologie aux États-Unis, car nous ne pouvons en former que de moins en moins.

Je pense que l'impact le plus important... Mon mari a une exploitation agricole, et très souvent ici dans la région rurale de la Saskatchewan... Par exemple, je sais d'après mon séjour à McGill qu'une école de médecine axée sur la recherche a les meilleures thérapies et les meilleurs traitements à l'heure actuelle. Les meilleurs internes viennent ici suivre une formation. Elle attire les meilleurs éléments, car un milieu de recherche dynamique attire les meilleurs éléments. Cela se traduit en fin de compte par de meilleurs soins médicaux et permet de conserver toutes les découvertes faites au Canada ici et d'en garder la propriété intellectuelle. On a donc les gens les mieux formés. Et on peut donc embaucher: comme je l'ai dit nous embauchons beaucoup de gens, tout le monde grâce à nos subventions de recherche.

Le plus triste, c'est d'entendre des gens ici dans les régions rurales de la Saskatchewan, dire, «Je n'ai aucune chance d'avoir un rendez-vous assez rapidement pour que mon cancer soit diagnostiqué. Je sais que j'ai un cancer.» Ces gens vont alors à la clinique Mayo où ils subissent des examens pendant un ou deux jours. Puis, en une semaine ils ont le diagnostic et l'ensemble du traitement qu'ils devront suivre, qu'ils ramènent avec eux au Canada. Bien sûr, il est difficile pour les Canadiens d'y donner suite de façon systématique car parfois ils ne savent même pas s'il est possible de leur administrer ce genre de traitement.

C'est pourquoi nous devons examiner soigneusement la situation, non seulement sur le plan des soins médicaux en général mais en ce qui concerne les ramifications d'une recherche plus intensive et améliorée pour les Canadiens et pour les milieux scientifiques en général.

J'aimerais terminer par une observation. Comme je siège au Comité permanent des sciences et de la recherche du Conseil de recherches médicales, vous pouvez imaginer à quel point la situation a été déprimante sur le plan financier pour tout le monde ces derniers temps. Mais en mars dernier, l'une de nos fonctions consistait à décider... Je siège à l'un des organismes d'examen des subventions, donc je sais très bien ce que signifie ces cotes. Voici comment nous cotons une subvention de recherche: 4.5 à 4.9—recherche remarquable, excellente, très bonne, importante et solide. Toute recherche qui reçoit une cote de 3 et plus est considérée comme de la recherche qui devrait être subventionnée par ceux qui l'évaluent. Elle fait l'objet d'une analyse rigoureuse. Il y a parfois jusqu'à six personnes qui l'examinent de façon détaillée. Puis ce projet de recherche est examiné par un comité de 15 autres personnes. Donc, une fois franchies toutes les étapes de ce processus rigoureux, nous considérons que tout projet de recherche qui reçoit la cote 3 et plus devrait être subventionné.

Notre comité a tâché de déterminer qu'elle devrait être la cote d'admissibilité l'année dernière. Nous ne pouvions pas l'abaisser à 4.0, compte tenu des fonds dont nous disposions. Pour l'abaisser à 4.0, cela signifie que seuls les projets excellents seront subventionnés... Or, en agissant ainsi, on se trouve à écarter de très bons projets de recherche qui devraient être effectués également. Mais, même pour arriver à financer simplement cette catégorie, nous avons dû imposer une réduction générale de 26 p. 100.

Heureusement, nous avons eu un léger répit. Nous avons pu l'abaisser à 3.89. Mais cela a signifié—je n'ai pas les chiffres sous la main, qu'une centaine de subventions de recherche supplémentaires a pu être financée. Ce qui n'est pas négligeable.

La dernière série était légèrement meilleure—3.74. Mais nous sommes loin d'approcher la cote de 3,0 où la recherche qui devrait être subventionnée ne l'est pas. J'espère que vous vous rendez compte du nombre de scientifiques compétents qui existent et du nombre de bonnes propositions qui sont présentées et du faible pourcentage que nous arrivons à financer. Même lorsque nous finançons ces projets de recherche, cela ne correspond qu'à un tiers de la moyenne des subventions accordées aux États-Unis. C'est à ce niveau que se situe la concurrence, et cela devient très difficile.

Je vous remercie. Je céderai maintenant la parole à Andrew.

Le président: Merci beaucoup.

Docteur Gloster.

Dr Andrew Gloster (témoignage à titre personnel): Je tiens à vous remercier de cette occasion de prendre la parole devant vous aujourd'hui. On m'a dit que j'avais une minute et demie donc j'essaierai d'être concis.

Le président: Je pense que nous vous accorderons deux fois plus de temps.

Dr Andrew Gloster: Vous allez m'accorder deux fois plus de temps et j'aurai donc trois minutes?

Le président: Nous parlons du temps qui vous est alloué, pas de votre financement.

• 1555

Dr Andrew Gloster: J'ai obtenu ma formation dans certains laboratoires excellents et bien respectés au Canada. Je tenais absolument à rester au Canada et j'ai eu la chance d'obtenir l'un des rares emplois qui restent au Canada dans les milieux universitaires. Depuis l'année dernière, je suis professeur adjoint à l'Université de la Saskatchewan.

Malheureusement, j'ai commencé à faire de la recherche à une époque où le financement dans ce domaine est déplorable. Ma recherche a une application directe au traitement d'une multitude de maladies dégénératives. J'ai présenté une demande de subventions lors de la dernière série de subventions accordées par le CRM. Ma demande a reçu un accueil favorable mais malheureusement je me trouvais tout juste sous la cote d'admissibilité. On m'a accordé une subvention provisoire parce que j'avais presque atteint la cote d'admissibilité et qu'un financement provisoire avait été arrangé entre Santé Saskatchewan et le CRM.

Je suis très reconnaissant d'avoir obtenu ce financement, mais ce financement est très précaire et il est très difficile de mettre sur pied un programme de recherche lorsqu'on n'est subventionné qu'une fois par an et qu'on ignore si ce financement sera maintenu. On ignore si on peut engager quelqu'un parce qu'on devra peut-être le mettre à pied d'ici un an. Dans une certaine mesure, j'envisage l'avenir avec assez de pessimisme—du moins mon avenir—en matière de recherche dans notre pays. D'après les entretiens que j'ai eus avec des gens de mon âge et qui sont au même stade professionnel que moi, je pense que c'est un sentiment qui est assez répandu.

Lorsque nous parlons de recherche et de financement, un thème revient sans cesse, à savoir que l'on aboutira aux États-Unis. La principale raison pour laquelle on décide d'aller aux États-Unis, ce n'est pas parce que les impôts y sont moins élevés ou parce que l'on veut vivre sous le soleil de la Californie, bien que cela plaise à bien des gens. La principale raison pour aller aux États-Unis c'est que là-bas il y a de l'argent disponible pour la recherche. Nous avons beaucoup de gens très bien formés qui ont investi une grande partie de leur vie à se former en vue de faire de la recherche. Ils adorent faire de la recherche et c'est ce qu'ils veulent faire.

Bien des gens ont l'impression que cela est impossible au Canada désormais, ou qu'il est possible de s'établir, mais de finir par perdre son financement et se voir obligé d'abandonner le système. Lorsqu'on commence à faire de la recherche et qu'il faut ensuite se retirer du système, les choses deviennent très difficiles, car si vous ne publiez pas vous ne pouvez pas obtenir des subventions de recherche supplémentaires. À bien des égards, c'est une voie sans issue. Bien des gens craignent qu'une fois qu'ils se retirent du système, ils ne pourront plus faire de recherche, et ce n'est pas ce qu'ils veulent. C'est la raison pour laquelle nombre d'entre eux décident d'aller aux États-Unis.

Cela me semble un énorme gaspillage des fonds que nous consacrons à former ces chercheurs. La plupart d'entre eux auront fait des études supérieures et travaillé dans un laboratoire de recherche grâce à une bourse de perfectionnement postdoctorale. C'est une énorme perte si on considère toutes les sommes que le gouvernement du Canada a consacrées à les former, ainsi qu'une énorme perte sur le plan de leur contribution à notre société.

Le dernier laboratoire où j'ai travaillé dans le cadre de ma bourse de recherche postdoctorale était très bien subventionné à l'époque, ce qui n'est plus vraiment le cas aujourd'hui. On nous encourageait à faire breveter notre recherche, et pendant que j'étais là, j'ai participé à certains projets de recherche qui ont débouché sur des brevets. L'un des brevets a servi plus ou moins de base à une entreprise de biotechnologie, qui a été établie par mon superviseur et deux autres superviseurs à McGill. Je pense qu'ils emploient maintenant une vingtaine ou une trentaine d'employés. Je ne peux pas m'empêcher de me demander, si nous ne subventionnons pas la recherche ici, combien d'autres entreprises en puissance ne verront pas le jour, combien de gens finiront par aller s'installer aux États-Unis et combien de projets de recherche médicale qui pourront déboucher sur le traitement de maladies ne seront pas exécutés.

Je tiens simplement à souligner, et c'est une opinion personnelle, qu'il est très difficile pour un jeune chercheur d'envisager une carrière de chercheur au Canada à l'heure actuelle. Cela n'est pas impossible, mais cela devient de plus en plus difficile.

Je pense que je conclurai là-dessus.

Le président: Merci beaucoup, docteur Gloster.

• 1600

Nous entendrons maintenant des représentants de la Saskatchewan School Trustees Association: Mme Debbie Ward, qui en est la présidente, et M. Craig Melvin, qui en est le directeur exécutif. Je vous souhaite la bienvenue.

Mme Debbie Ward (présidente, Saskatchewan School Trustees Association): Je vous remercie beaucoup. Bonjour à tous.

Comme vous l'avez dit, je m'appelle Debbie Ward. Je suis commissaire au Conseil de l'école catholique de Regina et présidente de notre association.

Craig est assis au coin de la table et je pense que cela est assez approprié car nous considérons que l'éducation est la pierre angulaire pour notre province, assurément, sinon pour le pays.

Je tiens à vous remercier d'avoir pris le temps de venir ici et de nous avoir donné l'occasion de faire cet exposé aujourd'hui.

Nous vous avons remis un exemplaire de notre mémoire. Je n'ai pas l'intention de le parcourir mais j'en signalerai simplement les principaux éléments.

La SSTA est une organisation qui représente l'ensemble des conseils scolaires de la Saskatchewan. Nos membres sont des bénévoles et proviennent de différents secteurs. Nous représentons des conseils scolaires urbains, ruraux et du nord. Certains de nos conseils ne représentent qu'une cinquantaine d'étudiants; d'autres plus de 25 000 étudiants.

Les défis que doivent relever nos conseils ne sont pas différents de ceux d'autres conseils scolaires de notre pays. L'insuffisance du financement, la diminution de la population dans certaines régions et un nombre accru d'étudiants ayant des besoins spéciaux sont quelques-uns de ces défis.

Pour l'ensemble de nos conseils, la pauvreté est un problème, comme elle l'est pour notre province et pour notre pays. J'aimerais vous en donner quelques exemples.

Dans un district de la santé dans le nord de la Saskatchewan, 14 personnes en moyenne occupent un logement unifamilial. Les enfants qui vivent dans de telles situations vont à l'école fatigués, mal nourris et incapables d'apprendre.

Dans un grand nombre des écoles des quartiers défavorisés de la ville, le taux de roulement des élèves est supérieur à 100 p. 100. Comme leurs parents déménagent constamment, les enfants fréquentent plusieurs écoles différentes en une année. Dans de telles conditions, il leur est donc difficile d'apprendre.

Bien des détenus des prisons dans cette province sont issus de familles pauvres et un grand nombre d'entre-eux n'ont pas terminé leurs études primaires ou secondaires.

En 1989, la Chambre des communes a adopté à l'unanimité une résolution en vue d'éliminer la pauvreté chez les enfants au Canada d'ici l'an 2000. Depuis, la Saskatchewan s'est engagée à prendre des mesures concrètes à cet égard. L'Association canadienne des commissions/conseils scolaires, par le biais des résolutions qu'elle a adoptées à l'assemblée générale, s'est engagée à agir, et notre propre organisation a fait de même.

Malgré ces efforts, la pauvreté ne cesse de croître. En 1995, 21 p. 100 de tous les enfants de notre pays vivaient dans la pauvreté. Il s'agit d'une augmentation de 58 p. 100 depuis l'adoption de la résolution de 1989, et je suis sûre que ce pourcentage a augmenté considérablement depuis.

Notre organisation comparaît devant vous aujourd'hui parce qu'elle croit fermement qu'il existe un lien entre l'environnement social d'un enfant et sa réussite scolaire. Nous croyons que l'avenir du pays appartient à nos enfants. La seule façon de nous assurer d'avoir une économie solide et une société civique saine au Canada, c'est en investissant dans nos enfants. Il faut que cet investissement se fasse dès maintenant. Chaque année qui passe sans que nous agissions signifie qu'un autre groupe d'enfants entreront à l'école défavorisés, tandis qu'un autre groupe quitteront l'école sans avoir les compétences nécessaires pour survivre dans notre société.

Nous sommes ici pour demander au gouvernement fédéral son soutien. Nous avons besoin de ce soutien à deux titres: sur le plan financier, mais également pour l'initiative que le gouvernement fédéral peut prendre.

Pour ce qui est de cette initiative ou de ce leadership du gouvernement fédéral, il y a beaucoup de choses à faire, mais nous voulons surtout que ce leadership permette une meilleure coopération entre les parties intéressées.

Au niveau national, la National Children Alliance, un groupe d'associations et organismes qui s'intéressent au bien être des enfants et de la jeunesse, ont publié un rapport Investing in children and youth: A national children's agenda (Investir dans l'enfance et la jeunesse: un programme national pour les enfants). Dans ce document, l'Alliance énonce 10 principes qui d'après elle devraient guider l'élaboration des mesures ou initiatives globales visant à améliorer le sort des enfants. Ces principes mettent particulièrement l'accent sur la notion de partenariat entre les diverses instances concernées.

En Saskatchewan, nous avons un plan d'action pour l'enfance. C'est un programme mis sur pied en association avec divers organismes gouvernementaux et communautaires, pour lutter contre la pauvreté.

Au niveau local, nous avons des programmes scolaires que l'on appelle les services scolaires et parascolaires intégrés, regroupant dans le cadre de l'action scolaire un vaste éventail d'instances provinciales et communautaires, de services sociaux et médicaux ainsi que de programmes.

En Saskatchewan nous avons l'habitude de l'effort collectif et de la collaboration. Nous encourageons le gouvernement fédéral à suivre l'exemple, et à travailler de concert avec les provinces et les autres instances concernées, je pense notamment aux commissions scolaires, pour mettre en place un plan d'action qui réponde aux besoins des enfants pauvres.

• 1605

La situation nationale permet de dire que ces programmes devraient porter sur la sécurité du revenu, le soutien social et communautaire, la recherche au plan national et le suivi, ainsi que sur la nécessité de donner aux communautés les moyens de soutenir le familles et enfants dans le besoin. La SSTA approuve les objectifs d'un tel programme, mais y ajouterait des objectifs clairs qu'il s'agisse de normes en matière de prestation de services, de moyens de financement à long terme pour les infrastructures et le fonctionnement, de la nécessité de donner au niveau communautaire et local la maîtrise et la direction de l'élaboration des programmes et de leur mise en oeuvre, de la nécessité de se donner une marge de manoeuvre permettant de réagir de façon souple, et de la nécessité d'appuyer toute collaboration entre les provinces, les commissions scolaires et les autres organismes concernés.

Finalement, la SSTA s'inquiète du manque de crédits permettant de créer et d'alimenter les services nécessaires. Le programme de la National Children Alliance propose des mesures que le gouvernement fédéral devra prendre s'il veut faire évoluer la situation des enfants pauvres dans ce pays. Au nombre de ces mesures citons: une dépense budgétaire de 850 millions de dollars supplémentaires, et l'indexation de la prestation pour enfants, l'octroi de cette prestation pour enfants à toutes les familles des tranches inférieures de revenu, l'octroi d'un crédit d'impôt correspondant à 2 000 $ par enfant, un réexamen de la politique fiscale appliqué aux familles dont les enfants ont des besoins spéciaux, et un régime de congé parental amélioré.

La SSTA appuie toutes ces mesures proposées, en demandant plus particulièrement que l'on revoit très rapidement la question de la prestation nationale pour enfants. Comme je l'ai déjà dit, nos enfants et leur famille ont besoin de votre aide la plus immédiate.

Je pourrais vous donner d'autres exemples de la façon dont la pauvreté touche les enfants de la province. Il ne fait aucun doute, par ailleurs, que les enfants pauvres ont des résultats scolaires inférieurs aux autres. Les commissions scolaires font ce qu'elles peuvent pour leur venir en aide, mais un effort particulier à l'échelle nationale est nécessaire si nous voulons réussir.

Merci d'avoir entendu notre exposé. Nous attendons avec intérêt de voir quels seront les résultats de ces consultations pancanadiennes.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, madame Ward.

Nous allons passer maintenant la parole à M. Buckmaster. Soyez le bienvenu.

M. Archie G. Buckmaster (témoignage à titre personnel): Merci. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, chers invités, et collègues orateurs, je suis heureux de pouvoir m'exprimer à cette tribune. Je suis heureux qu'il en soit ainsi, si on l'avait fait il y a quelques années, notre endettement ne serait peut-être pas ce qu'il est aujourd'hui, et la question aurait pu être traitée plus tôt.

Je veux donc d'abord me pencher sur cette question de la dette, sur laquelle je ne devrais pas avoir à trop m'étendre. Tout le monde est d'accord pour dire qu'il faut la contenir. Cela va être difficile, car, comme beaucoup d'autres, je vois poindre une récession à l'horizon, ce qui signifie moins de recettes pour le Trésor public. En fait on devrait augmenter la dépense publique, mais, étant donné notre situation, ce sera extrêmement difficile.

Ce que je veux surtout dire, et jusqu'ici personne n'en a parlé, c'est que la disparité entre les riches et les pauvres a augmenté. C'est une statistique connue. Or, c'est précisément l'alourdissement de la dette qui en est en partie responsable, dans la mesure où les tranches inférieures de revenu sont plus imposées. Si ma mémoire est fidèle, quelque 50 p. 100 de la recette publique est le fait de 20 p. 100 des contribuables. À ce moment-là on voit une reprise considérable du marché obligataire, et je dois dire que ce ne sont pas les pauvres qui achètent des obligations. Cette dette est donc très dure pour les plus pauvres.

Je pense aux pauvres parce que ce sont eux d'abord dont le pouvoir d'achat compte. Nous avons besoin de toute la population pour pouvoir vendre les produits et les services que nous mettons sur le marché.

La comparaison avec le bâtiment s'impose. La base, c'est le monde du travail. Une main d'oeuvre appauvrie, et l'édifice s'écroule. Je veux parler d'une main-d'oeuvre qui n'est pas bien payée. Ford l'a compris il y a des années, comme l'ont compris nos dirigeants après la grande crise des années 30. Ils ont donc mis en place des programmes destinés aux tranches inférieures de revenu.

• 1610

Je vois qu'on s'est penché sur la question dans le dernier budget, dans une certaine mesure, mais je crois qu'il faut surtout aller plus loin. Je veux dire qu'il faut travailler dans le sens d'une plus grande égalité des revenus.

Je suis un petit entrepreneur. Je vais sans doute déplaire à certains de mes clients, parce que beaucoup d'entre eux ne pensent pas comme moi, mais c'est ce que je crois, et c'est pourquoi je suis venu témoigner.

Passons à l'impôt. Une diminution de l'impôt est toujours une mesure populaire, et c'est ainsi que l'on achète des votes. Cela peut aider certains, mais je ne crois pas que le résultat soit sensible. Il suffit de se reporter aux années du gouvernement Devine, lorsqu'il a commencé à réduire les impôts. Avec une récession——et peut-être une dépression—qui s'annonce, je crois que l'on va voir adopter une politique du type de l'Ontario, de diminution de l'impôt, avant même d'avoir maîtrisé la dette. Contrôler cet endettement aurait pourtant des conséquences bien plus avantageuses pour l'ensemble de l'économie du pays qu'une réduction des impôts. Nous avons une dette énorme, ne l'oublions pas. Pour chaque dollar versé à la recette publique, 40c. sont destinés au remboursement de la dette. C'est peut-être un petit peu plus bas, puisque les taux d'intérêt ont baissé, mais ils pourraient très bien remonter. Je ne le pense pas, car je crois que nous sommes dans une période comparable à 1929, ou sur le point d'y être. Veuillez excuser mon pessimisme.

Évidemment, lorsque l'économie va bien, comme en Ontario, ça fait bonne impression. Mais l'Ontario profite d'une économie américaine prospère. Cette province peut donc réduire les impôts, ce qui fait bon effet, mais dès que les exportations diminueront, suite à un ralentissement de l'économie américaine, il va y avoir des problèmes. Ne perdons pas cela de vue.

Nous devons absolument faire quelque chose pour contrer les effets d'une redistribution négative du revenu dû au service de la dette.

J'aimerais qu'on en revienne à un régime fiscal comportant plus d'échelons. On me dit que cela va compliquer le système. Je pense surtout que ceux dont le revenu est pour eux une cause de soucis, en raison d'un plus grand nombre d'échelons dans le système d'imposition, peuvent certainement s'offrir un comptable ou un ordinateur pour faire leur déclaration.

Il y a d'autres façons de simplifier le régime fiscal. La dernière fois qu'il a été simplifié, si je ne me trompe, le fonds de toute la documentation relative à l'impôt s'est alourdi de deux kilos. Il faudrait peut-être alors revenir aux principes de base et tout recommencer.

Comme vous pouvez le voir, j'ai rédigé cet exposé rapidement, et je saute un peu d'un sujet à l'autre.

Ceci m'amène à vous parler de la caisse d'assurance-emploi—je continue à parler d'assurance-chômage et de l'assurance-maladie. Je pense que l'on devrait avoir là deux comptes distincts, au lieu d'un compte général. Une dame a dit ce matin qu'il fallait avoir une caisse d'Assurance-emploi distincte, je suis d'accord. Si l'assurance-maladie était comptabilisée de façon séparée, les gens pourraient regarder leur feuille d'impôt et dire: «Voilà quels sont nos impôts, et voilà ce que nous coûte l'assurance-maladie». Ce serait également plus facile pour la comparaison avec les États—Unis. Je ne pense pas que nous en arrivions un jour à une situation comparable à celle des États-Unis, notre pays étant beaucoup plus étendu, où la densité au kilomètre carré est nettement inférieure au Canada. Regardez le réseau routier.

En ayant des comptes distincts, le suivi des coûts est plus facile, ainsi que leurs effets sur différents secteurs de l'économie. Un bon exemple est celui de la Saskatchewan, où les infrastructures posent un problème terrible. On peut dire que le transport routier est subventionné, puisqu'une partie importante des infrastructures routières sont payées par l'État. Ce n'est pas le cas des chemins de fer. Voilà pourquoi on voit les compagnies ferroviaires fermer des lignes. J'ai ici une note qui indique que notre économie est de plus en plus inefficace au fur et à mesure que le gouvernement subventionne des secteurs de service inefficaces.

• 1615

Je passe maintenant à la dépense publique.

J'aurais dû regarder ma montre.

Le président: Tout va bien, allez-y.

M. Archie Buckmaster: J'aimerais que l'on supprime toute subvention aux entreprises et à certains autres secteurs. Je suis contre le principe de la subvention, et cela rejoint ce que je viens de dire sur les routes. Je pense que l'on subventionne des secteurs qui ne devraient pas y avoir droit, et qui sinon feraient faillite. Si ce n'est pas exactement le cas, on en arrive à subventionner des gens qui n'en ont pas véritablement besoin et qui en profitent de façon indue. Je pourrais vous donner quelques très bons exemples, dans le secteur de l'aide à la création d'emplois, notamment. Il est tout à fait normal qu'une entreprise veuille s'agrandir. Et ce n'est pas parce qu'il y a des subventions à la création d'emplois; l'entreprise a tout simplement besoin de prendre de l'extension, et elle en profite pour se demander ce qu'elle peut bien arracher à l'État pour cela. C'est un secteur dans lequel j'ai travaillé.

Je pense par ailleurs qu'il faut donner à l'armée le matériel et les hommes dont elle a besoin. Beaucoup d'insuffisance de notre appareil militaire mériterait d'être étudiée et un comité indépendant pourrait être créé pour étudier la façon dont on pourrait obtenir des gains d'efficacité tout en contenant les coûts.

J'ai rédigé tout cela hier soir rapidement, après avoir été informé de ce comité par les médias.

Il y a aussi ce problème de l'an 2000. J'espère que les gens comprennent bien à quel point ça va être dramatique. Cela va soustraire à l'ensemble de l'économie des ressources importantes, et donc des moyens financiers qui ne seront pas disponibles ailleurs, là où nous aimerions véritablement pouvoir investir.

L'éducation devrait rester du ressort provincial. Il suffit de négocier des normes nationales. C'est un petit peu comme l'assurance-maladie, je ne pense pas que le gouvernement fédéral doive trop s'immiscer dans ces secteurs. Je m'en tiens à ces quelques commentaires simples. Je n'ai pas été très heureux l'an dernier d'apprendre la création de ce fonds du millénaire. Je comprends que le gouvernement fédéral veuille se faire connaître, pour les mesures qu'il prend et pour les idées qu'il lance, mais en même temps je crois qu'il faut laisser la possibilité à ceux qui sont directement aux prises avec les problèmes, de les régler.

Dans cette veine, je lui donnerai surtout la responsabilité de l'impôt sur le revenu et de la redistribution des recettes grâce aux paiements de péréquation. Je crois que c'est nécessaire, certaines régions du pays s'en tirent moins bien que d'autres et la péréquation est indispensable.

J'aimerais que l'on convertisse progressivement le RPC à un régime de retraite par capitalisation intégrale... disons à 2 ou 3 p. 100 annuels pour que dans 30 à 50 ans... c'est un peu long, mais au bout du compte il serait pleinement capitalisé.

Une partie importante de l'économie c'est l'infrastructure: les routes, les égouts, etc. De façon générale il faut taxer l'utilisateur. Cela veut dire qu'il faut des comptes distincts au lieu d'avoir un grand compte fourre-tout. Mais, là encore, les principes keynésiens donneraient de bons résultats. Le problème c'est que nous sommes si endettés que nous avons du mal à pratiquer ce type d'économie keynésienne, par manque de fonds.

• 1620

La dette des particuliers pose un problème tout aussi grave, et il suffit de regarder autour de soi pour voir ce qui se passe. Comme je l'ai dit, nous nous rapprochons d'une situation semblable à la crise de 1929. À l'époque c'était un problème d'effet de levier, le ratio capital-endettement s'était complètement détérioré. C'est exactement le type de problème qui se pose maintenant. C'est en tous les cas ce que je vois. J'ai quelques connaissances en économie.

Un très bon exemple, à ce sujet, est celui des fonds de couverture, qui ne sont pas véritablement ce que le mot indiquerait, et la façon dont il s'effondre. Il s'agit plutôt de fonds de gestion de capitaux à long terme. Voilà ce que c'est. À une certaine époque on avait un ratio de 400 à 1 entre la dette et l'investissement. Les derniers chiffres que j'ai consultés montrent qu'on est revenu à un rapport de 100 à 4, ou de 1 à 25. Cela veut dire que pour chaque dollar placé nous avons 25 dollars de dette.

Lorsque j'ai commencé à avoir besoin des banques, on fixait la réserve en capital à 20 p. 100 des prêts, et je ne trouve pas que ce soit une mauvaise idée. Tout cela c'était après des années de la grande crise pendant lesquelles les gens ont appris beaucoup de choses. Ce fut une période terrible. Je suis tout juste assez vieux pour m'en souvenir encore un peu. Il est souvent trop facile d'oublier ce qui s'est passé.

Je ne vous envie certainement pas, c'est sans doute le métier le plus difficile à faire. Permettez-moi de dire cela.

Le président: Nous allons en prendre note.

M. Archie Buckmaster: Il faut évidemment essayer de maximiser le rendement de l'argent, et trouver quelle augmentation ou quelle diminution d'impôt est la plus payante.

J'ai ici un petit tableau, qui concerne les industries forestière et de la pêche de Colombie-Britannique, c'est-à-dire des secteurs de base, un petit peu comme l'agriculture; c'est-à-dire l'alimentation.

Parlons de l'agriculture. Quel que soit l'emploi considéré, si vous remontez la chaîne... parlons par exemple d'un employé de restaurant. À qui est-il utile? Eh bien, au fabricant de Flexi-Coil qui prend son repas au restaurant. Et à qui sa production est-elle utile? Eh bien, à l'agriculteur. Je pourrais avoir le même raisonnement, qu'il s'agisse d'avocats ou autres. On en revient toujours à l'agriculteur.

Je crois que c'est une des supériorités des Européens sur nous, ils ont compris que l'agriculteur est la base de leur économie, et c'est une des raisons pour laquelle leurs récessions sont moins sévères que les nôtres.

Il est donc important de soutenir l'économie agricole. Ce n'est pas simplement un secteur de l'économie comme les autres, c'est la base de notre économie. Je n'insisterai jamais assez là-dessus.

J'avais déjà dit à tous mes amis, tous ceux qui sont propriétaires d'actions, ce qui allait se passer cet été à la Bourse. Je les avais avertis au printemps dernier. On peut toujours prévoir ce qui va se passer en suivant les prix des denrées agricoles.

Voilà ce que j'avais à dire, merci beaucoup.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Buckmaster.

Nous allons donc passer aux questions et réponses. Monsieur Epp, vous avez 10 minutes.

M. Ken Epp: Merci. Je veux d'abord vous remercier tous pour des exposés très lucides. C'est absolument passionnant de voir comment on s'arrache les deniers du contribuable. Derrière tout cela il n'y a qu'un seul contribuable, et certains disent que nous sommes taxés à mort. Et pourtant, j'entends certains d'entre vous nous dire: «Ne diminuez pas l'impôt, continuer à alimenter l'économie avec la recette du Trésor public». C'est un débat intéressant.

Tout d'abord, j'aimerais poser la question à ceux d'entre vous qui font de la recherche.

• 1625

Dr Valerie Verge: «Les originaux de la recherche scientifique», nous aimons bien que l'on nous appelle ainsi.

M. Ken Epp: Des originaux, les scientifiques de la recherche médicale.

Je trouve en tous les cas votre argumentation très solide, à savoir qu'à long terme notre pays ne vaut que ce que valent les fondations. Ces fondations, que l'on parle d'un point de vue économique ou de notre niveau de vie, ce sont précisément la recherche et les scientifiques et ingénieurs et autres Canadiens qui sont là pour, grâce à leurs compétences techniques de haut niveau, nous faire profiter du confort dont la vie peut s'agrémenter, et que presque tout le temps nous tenons pour acquis.

Mais, après avoir déjà entendu pas mal de témoins, je constate que l'on continue à parler de l'exode des cerveaux. Vous en avez parlé aujourd'hui: à savoir que nos jeunes les plus qualifiés et les plus brillants sont incités à aller chercher du travail aux États-Unis, et pas uniquement parce que les impôts y sont plus bas, bien que cela ait été également un argument avancé. Pour certains nous perdons nos gens parce qu'ils peuvent faire plus d'argent ailleurs, là où l'impôt est moins lourd.

À Ottawa, un groupe de témoins nous a parlé de leurs collègues qui partaient aux États-Unis où il leur restait cinq fois plus d'argent après avoir payé les factures des biens de premières nécessités, incluant l'alimentation, le logement, l'habillement, la santé, l'automobile ou les frais de transport, etc.

C'est donc un facteur. Certains d'entre vous ont déclaré que ce n'est pas le facteur le plus décisif. Pour le chercheur portant lunettes, je comprends que ses projets sont de prime importance et qu'il peut vivre dans le dénuement pourvu qu'on lui donne les jouets avec lesquels il travaille. Je n'emploie pas le mot «jouet» par dérision; ce sont les outils, les installations, le personnel dont vous avez besoin. Donnez-moi un ordinateur pour y stocker mes données et y établir mes statistiques et peu m'importe que je n'aie pas d'argent, sauf que je dois pouvoir payer mes factures et prendre soin de ma famille. Beaucoup de gens ont dit cela.

Mais voilà que vous dites que les scientifiques s'en vont parce qu'il y a beaucoup plus de fonds de recherche disponibles aux États-Unis. Ma question est la suivante: cet argent, provient-il de l'État ou de l'entreprise privée? Il me semble qu'aux États-Unis, il provient plutôt d'entreprises privées.

Dr Valerie Verge: Puis-je répondre à cette question? J'ai les chiffres à ce sujet.

Le NIH finance la plus grande partie de la recherche médicale aux États-Unis, à l'instar du Conseil de recherches médicales au Canada. Actuellement, la bourse de recherche moyenne du NIH, comme je l'ai dit, représente trois fois la bourse canadienne moyenne, une fois déduits les frais généraux.

M. Ken Epp: En dollars américains?

Dr Valerie Verge: Non, c'est le montant réel que l'on obtient. Lorsqu'on est aux États-Unis, il faut dépenser des dollars américains. Donc, si j'obtiens 50 000 $ canadiens, mon homologue obtient 150 000 $ américains. Et ce n'est pas tout. Comme c'est une priorité, les États-Unis consacrent actuellement de 2 à 3 p. 100 de leur budget global pour la santé à la recherche biomédicale. Le Canada, lui, dépense 0,3 p. 100.

Vous allez entendre parler d'une proposition touchant la création d'un Institut canadien de recherches sur la santé ou l'on proposera de passer simplement à 1 p. 100. Je tiens à vous rappeler que lorsque l'on parle de recherches médicales, le Conseil de recherches médicales inclut actuellement les découvertes fondamentales, telles que celles que permet la recherche que nous nous efforçons de faire, qui pourrait, espérons-le, avoir des répercussions thérapeutiques, y compris la mise en oeuvre par le moyen d'essais cliniques et ainsi de suite.

Donc, pour l'ensemble des Canadiens, l'incidence de ce 1 p. 100 que l'on propose est énorme. Actuellement, c'est seulement 0,3 p. 100, et c'est ce qui explique qu'il y ait une telle crise. Nous sommes très reconnaissants au gouvernement d'avoir rétabli les niveaux de financement de 1994-1995. Entendons-nous bien. Il a été très agréable de voir ce financement supplémentaire cette année. Mais c'est quand même bien loin de suffire pour profiter des capacités qu'offrent les scientifiques canadiens.

M. Ken Epp: Étions-nous dans une meilleure situation au cours des années 70 ou des années 80?

Dr Valerie Verge: Nous étions certes dans une situation plus avantageuse au cours des années 70 et au début des années 80. Le problème, c'est simplement que la recherche scientifique a été catapultée vers l'avant et que, avec l'explosion des technologies, on entend très régulièrement parler de nouvelles découvertes. C'est l'impact que cela peut avoir, non seulement sur les découvertes, mais sur la création de nouveaux secteurs complets et sur l'emploi d'un très grand nombre de personnes.

Cela a une incidence sur la santé des gens, et nous allons devoir nous en occuper, faute de quoi nous allons nous retrouver dans un goulot d'étranglement où tous les membres de notre génération, les baby-boomers, vont être malades et vont mourir en même temps. Ce que nous espérons réussir à faire, c'est d'étaler ces problèmes sur une période raisonnable afin que certains d'entre eux meurent un peu plus tard.

M. Ken Epp: Oui. Bien sûr, tout le monde finit par mourir.

• 1630

Dr Valerie Verge: Oh, il y aura de nouvelles sources de problèmes.

M. Ken Epp: L'un des témoins invités, ce matin, voulant justifier qu'on lui donne plus d'argent, nous a dit de nous souvenir que la dépense totale ne représentait que 0,2 p. 100 de la dépense nationale totale. Quel est le pourcentage en ce qui vous concerne?

Dr Valerie Verge: Pour l'ensemble des dépenses nationales?

M. Ken Epp: Oui.

Dr Valerie Verge: Je ne sais pas. Mais je sais que, du budget actuel de la santé, nous obtenons 0,3 p. 100.

M. Ken Epp: Du budget de la santé.

Dr Valerie Verge: Du budget de la santé. Sur ce budget, 0,3 p. 100 sont consacré au Conseil de recherches médicales pour le financement de la recherche biomédicale. On va bientôt soumettre une proposition visant à faire passer ce montant à 1 p. 100 et à créer un organisme canadien de recherche sur la santé qui constituera un secteur économique proprement dit, tout en permettant des découvertes en recherche biomédicale.

M. Ken Epp: Pour ce qui est de l'efficacité des opérations, et vous êtes au beau milieu de tout cela, il est évident que plus la bureaucratie gouvernementale est lourde, plus vous avez des obstacles à surmonter, et moins de travail réel est effectué. J'ai parlé à un chercheur qui m'a dit souhaiter ne pas avoir à dépenser—combien déjà?—un huitième de son budget simplement à remplir des formulaires gouvernementaux. Cela prend un temps fou. Est-ce vrai pour vous aussi? Je suis sûr que ce ne sera pas exprimé directement dans l'exposé budgétaire, mais c'est une chose qu'il nous faut examiner.

Dr Valerie Verge: Plus aujourd'hui que jamais auparavant. Comme nous obtenons de moins en moins d'argent d'une seule source, nous passons un temps considérable à remplir des demandes de subventions de recherche. Chacune de ces demandes prend plusieurs semaines ou plusieurs mois à préparer. Cela signifie que ce sont des mois pendant lesquels le temps d'un chercheur est consacré à autre chose qu'à la santé des gens, c'est-à-dire à préparer des formulaires pour obtenir des sommes insignifiantes. Cet argent ne suffit même pas pour effectuer au moins une partie de la recherche nécessaire.

Dr Louis Delbaere: S'il y a plus de fonds disponibles auprès d'une source particulière, qu'il s'agisse des instituts canadiens de recherche en santé ou du CRM, ou d'une combinaison des deux, il faudrait pouvoir ne remplir qu'une seule demande tous les trois ans, par exemple, plutôt que d'avoir à remplir trois ou quatre demandes par an pour obtenir des fonds ou pour que les fonds continuent de vous parvenir.

M. Ken Epp: Toutefois, comme nous représentons les contribuables, je pense que nous devons avoir des moyens de rendre des comptes. Dans certains secteurs de dépenses gouvernementales, les justifications manquent totalement et des gens se retrouvent en possession de fonds pour lesquels ils n'ont absolument pas rendu de comptes. À Heritage Canada, par exemple, il suffit de dire que vous voulez étudier ceci ou cela et vous obtenez une subvention de 80 000 dollars pour étudier les aberrations sexuelles de la mouche tsé-tsé en Amérique du sud, ou de quelque chose de semblable. Ce genre de situation rend les contribuables furieux.

Dans votre secteur, lorsqu'il s'agit d'établir un équilibre entre la reddition de comptes et le temps perdu par des gens très compétents et très instruits, quelle devrait être la solution, selon vous? Si je comprends bien, vos demandes de financement et vos justifications ne peuvent pas être fournies par des techniciens de laboratoire. Il faut qu'il y ait quelqu'un qui sache ce dont il parle pour présenter ses justifications.

Dr Louis Delbaere: Nos demandes sont certainement toutes jugées par nos pairs, pour la plupart du Canada, mais parfois des États-Unis et de Grande-Bretagne.

M. Ken Epp: Est-ce un système efficace?

Dr Louis Delbaere: Ah, assurément. C'est très efficace.

Nous nous classons donc entre nous et nous avons aussi un classement à l'échelle internationale. Nous devons pouvoir concurrencer nos collègues nationaux et internationaux pour obtenir du financement. Ensuite, après deux ou trois ans, nous devons montrer nos résultats, notre productivité, ce que nous avons fait pour justifier cet argent. Nous devons donc constamment rendre des comptes. Contrairement à un laboratoire gouvernemental, nous devons constamment rendre des comptes.

M. Ken Epp: Très bien, mais je veux savoir s'il y a un équilibre. Consacrez-vous une trop grande partie de votre temps à cela? Pensez-vous que c'est disproportionné?

Dr Louis Delbaere: Si vous avez de bons antécédents et que vous avez fait état de votre productivité tous les trois ou quatre ans, cela suffit, certainement, pour voir les fonds renouvelés.

M. Ken Epp: Oui.

Dr Valeri Verge: Encore une fois, cela me ramène à l'obtention d'un financement adéquat au départ. Pour ce qui est de savoir si c'est ou non une utilisation efficace du temps, sachant que j'ai un enfant qui aura bientôt trois ans, que j'enseigne à l'université, que je suis membre de comités fédéraux, que je gère un laboratoire de recherche, j'estime qu'avoir une grande bourse de recherche plutôt que trois ou quatre m'aiderait considérablement à faire avancer mes propres travaux de recherche. Je préférerais de loin une bourse de recherche assez importante pour laquelle je justifierais toutes les dépenses. Il faut faire cela pour chaque article dans la demande de subvention. Ce serait examiné rigoureusement.

• 1635

Actuellement, nous ne finançons que la recherche la plus impeccable et nous n'approchons nullement des niveaux de financement de recherche qui seraient justifiés. J'estime donc que notre temps serait bien mieux utilisé si nous pouvions obtenir des fonds suffisants en une seule fois.

M. Ken Epp: Très bien.

Dr Louis Delbaere: Je voudrais seulement ajouter une observation au sujet du financement accordé par les NIH, aux États-Unis. Non seulement cela représente beaucoup plus que ce que nous obtenons, mais le président propose de quintupler ce montant au cours des cinq années à venir. Ils vont donc attirer tous les chercheurs canadiens en biotechnologie. Si nous ne faisons pas quelque chose, il va y avoir un vide énorme. Consacrer 1 p. 100 du budget de la santé à la création de ces instituts canadiens de recherche en santé constitue une bonne mesure pour surmonter cette difficulté. La situation ne va qu'empirer si nous n'agissons pas.

M. Ken Epp: Très bien. J'ai d'autres questions pour les autres témoins, mais j'attendrai mon prochain tour, si vous le permettez.

Le président: Pourquoi ne continuez-vous pas?

M. Ken Epp: Vous voulez que je poursuive?

Le président: Bien sûr.

M. Ken Epp: Très bien. Je voudrais bavarder un peu avec M. Buckmaster.

J'ai été un peu intrigué par cet exposé, parce qu'il est écrit à la main. Cela signifie que vous vous êtes assis hier soir, et que vous avez essayé de coucher vos idées sur du papier. Je soupçonne cependant que ce que vous dites ici est le résultat de très nombreuses années de réflexion. C'est un amalgame de très nombreuses idées différentes.

Il me semble toutefois que vous vous contredisez. Vous parlez de rembourser la dette, vous dites qu'on a tort de vouloir réduire les impôts avant d'avoir remboursé la dette. Pourtant, en même temps, il me semble que vous dites que le gouvernement devrait cesser d'intervenir. Je ne sais pas exactement ce que vous voulez dire lorsque vous affirmez que l'endettement augmente le nombre de pauvres et aide les riches. Pourtant, vous ne voulez pas que l'on rembourse. Je ne comprends pas très bien. Vous ai-je mal interprété?

M. Archie Buckmaster: Ce que je dis, c'est que du fait qu'un grand nombre de personnes faiblement rémunérées payent un fort pourcentage de l'impôt, elles mettent de l'argent dans les coffres du gouvernement et ne le récupèrent pas. Cet argent est donné aux riches, aux gens, aux entreprises et aux banques propriétaires des obligations. C'est là que va cet argent. C'est perdu dans le système. Les gens ne se rendent pas compte du transfert des richesses des pauvres aux riches à cause de la dette. Je trouve que c'est une raison de plus de surveiller la dette et de la réduire. Cela va devenir très difficile bientôt en raison de la situation dans laquelle nous allons nous trouver.

M. Ken Epp: Très bien. Comment donc conciliez-vous vos déclarations selon lesquelles il faudrait que le régime fiscal sur le revenu comprenne plus d'échelons et que les personnes à revenu élevé soient plus imposées, et votre autre déclaration, un peu plus loin, où vous dites qu'il faut que le régime fiscal soit simplifié? D'une part, vous dites qu'il faut augmenter le nombre d'échelons et s'assurer que les personnes à revenu élevé payent plus, d'autre part vous voulez simplifier le régime fiscal. Selon moi, ces deux objectifs sont incompatibles.

M. Archie Buckmaster: Oui. Ce que j'ai essayé de dire lorsque je disais que beaucoup de gens m'affirment que cela complique les choses.

Quant au nombre d'échelons, je ne pense pas que cela complique les choses. Cela ne complique pas tellement la Loi de l'impôt sur le revenu. Je répète que si l'on a suffisamment d'argent pour s'inquiéter de cet aspect de l'impôt, on peut certainement se payer un ordinateur et un logiciel pour calculer l'effet qu'aura la nouvelle tranche d'imposition si l'on ne veut pas que son comptable s'en occupe. J'ai aussi entendu des gens dire à la radio: «je ne sais pas; c'est mon comptable qui s'en occupe.»

• 1640

Ce qui complique le régime fiscal, ce sont toutes les petites exemptions, surtout pour ce qui est des sociétés et c'est ce qui me concerne. Il y a tout simplement beaucoup trop de choses à surveiller. À chaque budget, on rajoute quelque chose à la Loi de l'impôt sur le revenu qui ne cesse de s'allonger.

M. Ken Epp: Conviendriez-vous que la majorité des emplois sont créés par les PME qui sont le gros moteur de l'économie? Dans les Prairies, cela inclut les agriculteurs.

M. Archie Buckmaster: En gros, oui.

M. Ken Epp: Ma foi, si vous avez un régime d'impôt progressif sur le revenu qui consiste à vous imposer à mort dès que vous commencez à gagner de l'argent, en quoi cela peut-il être un incitatif? En quoi cela va-t-il pousser les gens à rester ici? Nous avons parlé des jeunes qui quittaient le pays parce que, entre autre, le régime fiscal démontre qu'ils gagneront mieux leur vie ailleurs qu'au Canada. Qu'est ce que cela fait aux gens qui ont des moyens? Aujourd'hui, nous avons un ministre des Finances dont les sociétés ne sont pas enregistrées au Canada parce qu'il a trouvé des pays où le régime fiscal est plus favorable.

M. Archie Buckmaster: Je pensais en effet à cela hier soi.

M. Ken Epp: Si donc, on a un régime fiscal où les revenus les plus élevés doivent être imposés au maximum, ces gens-là vont s'en aller et le moteur de notre économie aussi.

M. Archie Buckmaster: Je crois que c'est là l'erreur. Ce n'est pas là qu'est le moteur de notre économie. Le moteur de notre économie, ce sont les gens qui achètent des marchandises.

M. Ken Epp: Oui, mais s'il n'y a pas de marchandises à acheter...

M. Archie Buckmaster: Il y aura toujours des marchandises à acheter.

M. Ken Epp: Oui, mais l'on va se retrouver à acheter des marchandises importées d'autres pays et notre argent quitte ainsi le pays.

M. Archie Buckmaster: Notre gouvernement va devoir en effet se pencher là-dessus. J'y pensais encore hier soir mais je ne l'ai pas mis dans mon exposé. On peut parler de tas de choses mais il y a une chose qui est très importante, ce sont les capitaux qui quittent ainsi le pays. Il faut se pencher sur la question des capitaux qui ne sont pas imposés quand ils quittent le pays.

M. Ken Epp: D'accord. À la page 4, vous parlez de dépenses et vous abordez le problème constitutionnel. Vous dites: «l'éducation devrait rester une responsabilité provinciale». Un peu plus loin, vous dites la même chose à propos de l'assurance-santé. Notre Constitution stipule que l'éducation et la santé relèvent de la compétence provinciale mais vous mettez entre parenthèses «que l'on fait appliquer par la péréquation». C'est exactement ce que fait le gouvernement fédéral depuis un nombre x d'années. Il a déclaré que la santé publique était une responsabilité provinciale mais que les provinces devaient faire ceci et cela si elles voulaient l'argent. Il y a donc des provinces comme l'Alberta, la Saskatchewan et la Colombie-Britannique qui aimeraient faire les choses un peu différemment dans le domaine médical—ainsi que dans celui de l'éducation—mais le gouvernement fédéral n'a jamais dit que si elles le faisaient, ce système ne s'appliquerait plus et Ottawa arrêterait de les imposer pour les services qu'elles offrent. Le gouvernement fédéral continue à prendre notre argent mais nous n'avons plus le droit de le récupérer. Si ce n'est pas contrôler les choses, qu'est-ce que c'est?

Vos propos sont contradictoires: vous dites que le programme doit rester du ressort de la province, mais qu'il doit être appliqué grâce à la péréquation.

M. Archie Buckmaster: Mes notes sont très succinctes, mais je dis également qu'il doit y avoir négociation entre les gouvernements fédéral et provincial. Il me semble que chaque fois que des gens se réunissent pour négocier quelque chose, ils trouvent toujours une solution pour faire appliquer ce dont ils ont convenu.

M. Ken Epp: Si c'est un contrat, il doit être exécuté, à défaut de quoi il est nul et non avenu.

M. Archie Buckmaster: C'est exact. Et c'est de cela que je veux parler.

M. Ken Epp: Bien; j'ai utilisé mes vingt minutes. Je m'en vais, que vous le veuillez ou non.

Le président: D'accord. Il arrive parfois que les membres du comité n'aient plus de questions à poser.

Monsieur Nystrom.

M. Lorne Nystrom: Je voulais interroger monsieur Epp au nom de Carolyn Bennett sur la mouche tsé-tsé et sur les subventions de 80 000 $. Elle essaie de reprendre ses esprits depuis dix minutes.

M. Ken Epp: Ah, vraiment? En fait, je n'ai pas cela sous la main, mais des recherches très intéressantes ont été effectuées.

M. Lorne Nystrom: Elle pensait que vous aviez été mordu.

Le président: Qu'est-ce que vous n'avez pas sous la main, la mouche tsé-tsé ou le rapport?

M. Ken Epp: Je n'ai pas les chiffres exacts, mais je peux les obtenir s'ils vous intéressent vraiment.

Le président: D'accord. En tout cas, allez-y monsieur Nystrom.

M. Lorne Nystrom: Je poserai la question de Mme Bennett plus tard.

Bienvenue à tous les témoins. Comme ce matin, nous avons encore un groupe très diversifié. Je voudrais vous poser quelques questions, en commençant par le milieu de la recherche médicale.

• 1645

Ce que vous nous dites cet après-midi est très inquiétant pour l'avenir de notre pays. Certains prétendent que l'alternative se limite à la réduction de la dette ou à la réduction des impôts. Il me semble que l'on pourrait également parler de la croissance de l'économie de notre pays, de l'investissement au Canada, etc. On pourrait résorber la dette et le déficit grâce à une bonne économie, saine et en croissance.

Au cours de notre histoire, nous avons fait certaines erreurs. John Crow en a fait une en 1986 et 1987 avec sa politique de taux d'intérêt élevés, qui a ralenti l'économie. Je pense aussi que le ministre des Finances a voulu aller trop vite dans son budget de 1995 en imposant des restrictions budgétaires massives et généralisées. Voilà deux mesures qui ont exacerbé le problème de la dette et du déficit.

Cela étant dit, j'aimerais que vous nous parliez de la situation du Canada par rapport à d'autres pays. Vous dites que nous avons le plus faible taux de financement de la recherche médicale des pays du G-7. Est-ce qu'on trouve cela sur ce tableau?

Dr Valerie Verge: Tout est indiqué sur le tableau. Je vous le communiquerai tout à l'heure.

M. Lorne Nystrom: D'accord. Il me semble très utile pour nous situer par rapport aux autres.

Dr Valerie Verge: Je peux vous indiquer ceci: Cette une ligne rouge correspond au NIH des États-Unis. Elle indique une croissance continue, n'est-ce pas? Ce sont des projections de 1991 à l'an 2000.

La France a connu une légère chute vers 1994, mais elle s'est ressaisie et est repartie à la hausse. Elle est en croissance depuis 1991 également.

Le Royaume-Uni a connu une croissance phénoménale. Les autorités anglaises ont investi massivement. J'ai des collègues qui sont en train de constituer des groupes de recherche dont on devrait entendre parler prochainement.

Le Canada correspond malheureusement à cette petite ligne noire au bas du tableau. Nous sommes tout près de la ligne de croissance zéro, et nous avons même plongé en dessous avec les dramatiques compressions budgétaires de 1997, où nous étions presque en train de pleurer autour de la table, comme je l'ai dit. Nous rattrapons actuellement les niveaux de 1994-1995 et une légère augmentation est prévue à l'avenir; mais elle ne suffira pas à garder les scientifiques au Canada.

La principale comparaison doit porter sur les États-Unis et non pas sur les petites fondations de recherche sur le cancer, même si leur apport est très précieux, mais sur la NIH.

Si le Canada n'avait pas sa fondation de recherche sur le cancer et tous les autres organismes du même genre, nous aurions déjà perdu beaucoup plus de chercheurs. Grâce aux contributions philanthropiques de tous ceux qui sont ici, le financement de la recherche a permis au Canada de conserver quelques chercheurs. Néanmoins, c'est une contribution bien modeste par rapport au montant accordé par le Conseil de la recherche médicale. Les perspectives d'avenir sont bien sombres.

M. Lorne Nystrom: Je voudrais vous poser une autre question. Nous parlons cet après-midi de la recherche médicale. Combien de fonds publics lui sont consacrés par rapport aux autres travaux de R-D effectués dans notre pays? La tendance est-elle la même?

Vous vouliez ajouter quelque chose.

M. Louis Delbaere: Je voulais dire qu'aux États-Unis, l'industrie privée ne finance pas tellement la recherche médicale, du moins pas en milieu universitaire. C'est une source de financement modeste.

En ce qui concerne la recherche médicale au Canada, le budget du Conseil de la recherche médicale représente à peu près la moitié de celui du CRSNG.

Mme Valerie Verge: C'est beaucoup plus modeste. En millions de dollars actuels, le CRSNG se situe actuellement à environ 500 millions de dollars, tandis que le Conseil de la recherche médicale est à 266 millions de dollars.

Nous avons bénéficié d'une augmentation importante, grâce aux efforts déployés à la base par le milieu médical l'année dernière, qui ont beaucoup attiré l'attention. Ces efforts ont porté fruit. Ils nous ont rapporté le même pourcentage d'augmentation que les autres, même si nous n'avons pas récolté beaucoup de remerciements.

M. Louis Delbaere: Le CRSNG reçoit donc à peu près le double de ce que reçoit actuellement le Conseil de recherche médicale.

M. Lorne Nystrom: Combien faudrait-il rajouter pour que le Canada rejoigne la moyenne des pays du G-7?

Mme Valerie Verge: Vous allez entendre une proposition à ce sujet de la part du Comité des instituts canadiens de recherche en santé. Il parle de porter le financement de la recherche médicale à 1 p. 100 du budget total, ce qui nous permettrait de financer un tiers supplémentaire de chercheurs à niveau comparable à ce que l'on trouve actuellement aux États-Unis, mais comme on l'a dit tout à l'heure, les Américains ont l'intention de multiplier leur budget de recherche par cinq. Mais même pour atteindre ce niveau, il va falloir conserver tous les excellents chercheurs qui sont actuellement en formation ici, et inciter les esprits les plus créateurs à projeter le monde canadien de la santé dans le XXIe siècle.

M. Louis Delbaere: Il faudrait à peu près tripler le budget.

Mme Valerie Verge: Oui, il faudrait essentiellement rajouter 500 millions de dollars aux 266 millions actuels. On atteindra alors 1 p. 100 du budget actuel de la santé.

• 1650

M. Lorne Nystrom: Vous nous invitez donc à conseiller au ministre des Finances et au ministère de la Santé...

Mme Valerie Verge: Excusez-moi. Le comité parle évidemment d'une augmentation répartie sur trois ans, ce qui donnerait 150 millions de dollars la première année, 300 millions de dollars la deuxième et 500 millions de dollars à la fin de l'exercice. Nous ne pourrions évidemment pas absorber un tel montant d'un coup, car il faut mettre en place toute une infrastructure.

L'essentiel, dans l'immédiat, c'est de garder ce que nous avons, de façon à ne rien perdre. Ensuite, on pourra envisager une croissance face à la mise en place de toute l'infrastructure nécessaire.

M. Lorne Nystrom: Voici ma dernière question. En plus de votre exposé d'aujourd'hui, que faites-vous pour nous sensibiliser? Quand je dis «nous», je veux parler des parlementaires, de la Chambre des communes et du public canadien.

Comme vous le savez, les gens expriment toutes sortes de points de vue et d'intérêts divers et il n'est facile de partager le gâteau. Vous connaissez le dicton: à la ferme—vous avez signalé que votre mari est agriculteur—c'est à la roue qui grince qu'on donne de l'huile. Quelle campagne envisagez-vous? Un certain nombre d'organismes mènent des campagnes de lobbying très efficaces, notamment les banquiers et les compagnies d'assurance, pour ne parler que de ceux-là. Envisagez-vous une campagne de lobbying pour révéler cette histoire très inquiétante, et non pas uniquement aux gens qui sont ici, mais à tous les parlementaires et aux médias nationaux?

Dr Valerie Verge: Tout d'abord, il va y avoir de l'information... On a formé un comité de 33 personnes regroupant tous les intérêts de la recherche en santé au Canada, qui comprend tous les grands organismes de financement ainsi que les grands hôpitaux universitaires. Sa première tâche a été d'informer les plus hauts dirigeants du pays de l'état actuel de la recherche au Canada, pour les convaincre de nous appuyer.

Dans un proche avenir, la semaine de sensibilisation sur la recherche va être organisée dans de nombreux hôpitaux universitaires du pays pour obtenir l'appui de l'ensemble des Canadiens. Normalement, vous devriez recevoir des lettres, non seulement des chercheurs, des étudiants et des scientifiques en formation, mais également de simples citoyens convaincus de l'intérêt et des avantages à long terme de la recherche médicale. Tout cela devrait déboucher sur une rencontre suprêmement importante, le 28 octobre prochain, entre le ministre de la Santé et votre comité.

M. Lorne Nystrom: Je voudrais maintenant poser quelques questions à la Saskatchewan School Trustees Association. Mme Ward a parlé des centres-villes, de la pauvreté, etc. Je représente une bonne partie du centre-ville de Regina.

Il se trouve que ma soeur enseigne dans une école située à la limite du centre-ville. La fin de semaine dernière, elle m'a parlé des problèmes de pauvreté dans son école, et d'un enfant en particulier, qui éprouve d'énormes difficultés d'apprentissage. Ce n'est pas étonnant. Sa mère est prostituée, son père est souteneur et ils vendent de la drogue pour s'en mettre plein les poches. L'enfant est né avec le syndrome d'alcoolisme foetal. Quelle perspective peut-il avoir, sinon le désespoir? Et les histoires de ce genre sont innombrables.

Encore une fois, comment comptez-vous faire passer le message? Quelle campagne allez-vous faire pour diffuser auprès de tous les parlementaires et de l'ensemble du public l'information dont vous nous avez fait part aujourd'hui?

Et par ailleurs, que devrait contenir le prochain budget en matière de crédits supplémentaires accordés à l'éducation pour lutter contre la pauvreté des enfants et pour améliorer l'enseignement?

Mme Debbie Ward: Je peux vous parler de ce que nous faisons en matière de lobbying et de diffusion de notre message. Je laisserai Craig vous parler de l'aspect financier de la question.

Nous faisons partie de l'Association canadienne des commissions et conseils scolaires, qui est affiliée à la National Children's Alliance. Il s'agit d'un regroupement de personnes qui travaillent, très activement je crois, à faire passer le message. Nous avons une campagne en préparation et nous allons nous adresser aux députés. Nous intervenons également au niveau provincial.

M. Craig Melvin (directeur exécutif de la Saskatchewan School Trustees Association): Nous nous intéressons actuellement aux enfants de trois et quatre ans, qui ne vont pas encore à l'école, que ce soit en Saskatchewan ou ailleurs au Canada.

Faisons une estimation rapide: disons que, dans les écoles de Saskatchewan, on consacre environ 5 000 $ à l'éducation de chaque enfant. Si l'on envisage un programme en milieu scolaire ou ailleurs pour les enfants de trois et quatre ans en Saskatchewan, il faut rajouter environ 3 000 $ par enfant, ce qui devrait coûter environ 75 millions de dollars à la province. Comme nous représentons 4 p. 100 de la population du Canada, un rapide calcul indique qu'il faudrait environ 1,8 milliard de dollars pour mettre un tel programme en place.

• 1655

Ce qu'on suggère ici ce n'est pas nécessairement d'établir de grands programmes nationaux pour les enfants de trois et quatre ans, mais de fournir autant de soutien que possible aux collectivités pour renforcer leur capacité de venir en aide aux familles; lesquelles à leur tour, subviendraient aux besoins de leurs enfants qui réussiraient beaucoup mieux à l'école.

Alors il nous semble qu'il nous faut des programmes mis en oeuvre en coopération avec le Canada, les provinces et les organismes au niveau local, pour répondre aux besoins grâce à des ressources suffisantes de manière à élargir la capacité au niveau local. Des fonds sont nécessaires, mais il faut les dépenser d'une manière très créative.

M. Lorne Nystrom: Je voudrais revenir sur certaines des questions posées par mon collègue réformiste. Je ne pense pas qu'il serait très compliqué d'ajouter un ou deux échelons dans le système d'impôt sur le revenu. À une certaine époque, on en avait sept ou huit. Puis on en a eu cinq, et maintenant trois. Il n'est pas plus compliqué d'en avoir cinq que d'en avoir trois. J'aimerais savoir si vous voulez développer cette idée un peu pour nous.

M. Archie Buckmaster: J'aimerais qu'on le fasse pour redistribuer le revenu. C'est l'idée. En ce moment, c'est un choc si quelqu'un reçoit une augmentation de salaire qui le fait monter d'une catégorie salariale à la suivante. Je crois que ce serait un moyen d'inclure un plus grand nombre de salariés à revenu élevé grâce à un taux d'impôt plus élevé qu'actuellement.

Quand j'ai commencé à payer de l'impôt, le taux le plus élevé était 80 p. 100. Je ne dis pas qu'on devrait remonter à ce niveau-là, mais je crois que pour les salariés à revenu élevé, comme un gestionnaire de banque qui gagne 4 millions de dollars...

M. Lorne Nystrom: Vous voulez dire un président de banque.

M. Archie Buckmaster: Effectivement.

Même s'il paie 80 p. 100, il lui en restera toujours davantage qu'à la majorité des Canadiens. C'est pourquoi j'envisage une augmentation dans le nombre d'échelons pour rendre le repère fiscal plus homogène, et aussi pour redistribuer le revenu afin de neutraliser l'effet qu'a eu ce transfert de richesse avec l'intérêt sur la dette.

M. Lorne Nystrom: Je pense que Mme Bennett a une question au sujet des mouches tsé-tsé.

Le président: Allez-y, madame Bennett.

Mme Carolyn Bennett: Je pense que la question de mon collègue dénote un manque de compréhension; parcourir une liste de projets de recherche, comme s'il s'agissait de comptes publics, révèle un manque de compréhension.

Parfois, la meilleure chose en politique, c'est de brosser un tableau. Vous ne pouvez pas le faire aujourd'hui; mais j'aimerais bien, si vous pouviez revenir une autre fois, ou si vous pouviez m'envoyer une lettre, que vous expliquiez comment un projet de recherche a vraiment mené à une meilleure compréhension de MASC ou quelque chose de semblable. Je pense qu'on a toujours une attitude négative au sujet des raisons pour lesquelles le gouvernement finance tel ou tel projet, et qu'on ne comprend pas que les recherchistes doivent passer d'un projet à un autre, et il faut que ce soit autonome et revu par les pairs. Je ne pense pas qu'ils soient revus par les pairs non plus.

• 1700

Avez-vous un exemple de quelque chose qui semble drôle à nos collègues, mais qui finit par changer notre compréhension des choses?

Le président: Si vous avez quelque chose de drôle, dites-le-nous.

M. Lorne Nystrom: La vie sexuelle de la mouche tsé-tsé.

Mme Valerie Verge: Je ne pense à rien de drôle, sauf que je peux parler...

M. Tony Valeri: On acceptera quelque chose de légèrement amusant.

Mme Valerie Verge: ...de mon propre domaine de recherche. Tout le monde a entendu parler des lésions médullaires et de la difficulté pour le système nerveux de se reconstituer. Quand j'ai débuté dans la recherche dans les années 80, on croyait qu'il pouvait même se régénérer. On a fait beaucoup de progrès pour ce qui est de démontrer aux gens qu'il peut en effet se régénérer. Mais l'environnement où il se trouve ne le lui permet pas car c'est un inhibiteur. Vous pouvez facilement comprendre qu'un circuit réglé aussi minutieusement n'est pas là pour rien.

Après cela, certains de mes collègues, ainsi que d'autres des États-Unis et d'ailleurs, ont réalisé des progrès significatifs en démontrant que des molécules spécifiques dans notre cerveau causent en réalité cette inhibition. Maintenant on travaille désespérément et sans relâche. C'est comme un jeu de patience de mille pièces et on fait chacun sa petite contribution qui va nous permettre un jour d'insérer les dernières pièces et de trouver enfin la solution. Il y a des thérapies qu'on développe qu'on teste en ce moment. Les molécules sur lesquelles je travaille, par exemple, font partie de la phase trois des tests de diabète dans le but effectivement d'aider les gens souffrant de névropathies diabétiques.

C'est très gratifiant. Il est très réconfortant de voir qu'une grande partie de la recherche que j'ai faite a mené à une meilleure compréhension des raisons de son aboutissement.

Il y a beaucoup de petites découvertes de ce genre. On a des lauréats du Prix Nobel au Canada, tel que Michael Smith. Au début, on nous a demandé, «Pourquoi couper en morceaux l'ADN? Qu'est-ce que cela donne?» Eh bien, cela a permis aux gens partout dans le monde de prendre les gènes en cause dans une maladie et de les découper en morceaux pour déterminer si la fonction est détruite, jusqu'à ce quÂon trouve le morceau essentiel. Une fois qu'on le trouve, on peut façonner une thérapeute spécifique. Ainsi on a gagné peu à peu une compréhension des gènes et leur fonction. Ce sont des découvertes mineures au début, mais on les insère dans un tableau plus grand. Il est rare de voir le tableau entier tout d'un coup.

Mme Carolyn Bennett: Quand vous avez monté cette campagne couronnée de succès en janvier à l'égard du budget de février, dans le but de restaurer le financement du CRM, un des exemples les plus frappants pour moi, qui fait partie d'une faculté de médecine ailleurs, était le graphique que vous avez montré aujourd'hui au sujet des programmes fabuleux qui en fait ont été refusés.

Y a-t-il un pays du monde où tout à partir de 3.0 reçoit du financement? Est-ce trop exigeant? Croyez-vous que si l'on passe à ce nouveau modèle, je parle des intérêts de la santé, on pourrait en effet promettre aux chercheurs que tout projet à partir de 3.0, lorsqu'il est solide et a du mérite, recevrait le financement nécessaire?

Mme Valerie Verge: C'est ce qu'on faisait dans les années 60 et 70...

M. Louis Delbaere: Et au début des années 80. On le faisait. Tout à partir d'environ 3.0 était financé au Canada.

Mme Carolyn Bennett: Alors le problème du moral c'est que... autrefois, si vous aviez un projet solide du point de vue scientifique et qui était revu par les pairs...

M. Louis Delbaere: Et productif.

Mme Carolyn Bennett: En d'autres mots, les projets sans valeur ne recevaient pas de financement; dès qu'on arrivait au point où les pairs le croyaient justifier, ils recevaient le financement.

M. Louis Delbaere: On pouvait planifier à long terme et ne pas s'occuper de redemander.

Mme Carolyn Bennett: Il y a tous ces gens qui ne reçoivent qu'une ou deux années de financement. S'il est coupé, ils doivent fermer leurs laboratoires, mettre leur personnel en disponibilité, et ainsi de suite.

Si vous êtes sur la bonne voie du point de vue scientifique, il y a très peu de chance qu'on vous coupe l'herbe sous le pied...

Mme Valerie Verge: Effectivement.

Mme Carolyn Bennett: ...si on revient à la méthode antérieure de financer la recherche médicale.

Mme Valerie Verge: Ce n'est pas tant la méthode antérieure. Je crois que la nouvelle perspective compte beaucoup sur le partenariat et le renforcement grâce aux groupes. C'est l'une des raisons pour laquelle on a eu la chance de pouvoir former un centre de recherche en neurosciences deux ans après mon arrivée ici.

• 1705

C'est très stimulant de pouvoir, en compagnie de cinq ou six collègues, échanger des idées et avoir une compréhension similaire, tout en travaillant à des aspects différents du projet, de telle sorte qu'on voit la question sous divers angles. À l'avenir, il sera très important de se rendre compte que la collaboration sera essentielle au progrès. En effet, le monde se rétrécit.

Mme Carolyn Bennett: Mon collègue parlait tout à l'heure de la paperasserie et je pense que les gens trouvent contrariant d'être forcés de remplir tant de formulaires pour obtenir des fonds. Il ne faut toutefois pas accuser la bureaucratie. Si les projets de recherche étaient fermes et leur financement garanti, les chercheurs n'auraient pas à remplir tous ces autres formulaires.

Il semble qu'on réclame un guichet unique. Les instituts sont-ils la solution? Par exemple, l'Institut de l'arthrite travaillerait en partenariat avec la Société de l'arthrite et ensemble ils constitueraient un guichet unique pour les chercheurs s'intéressant à cette maladie.

Mme Valerie Verge: Tout à fait. C'est ce que le Conseil médical de recherche a commencé à faire récemment, mais il faut dire qu'il n'a pas d'énormes quantités d'argent à consacrer à des partenariats avec les étudiants. On a énormément sabré dans les fonds réservés aux étudiants et pour compenser, on a demandé aux diverses organisations de santé, à la Société de l'arthrite, par exemple, de contribuer à 50 p. 100, l'autre moitié étant assumée par le conseil, lorsque l'examen par les pairs déterminait qu'un étudiant était prometteur. Ainsi, cette formule de moitié-moitié, permet de financer deux étudiants plutôt qu'un.

Mme Carolyn Bennett: Qu'il s'agisse de la Société de l'arthrite, de la Fondation du coeur, de la Société du cancer, les chercheurs n'ont pas besoin de faire de multiples demandes. Ainsi, on procède à l'examen par les pairs, et si l'issue est positive, le partenariat prend les choses en charge, n'est-ce pas?

Mme Valerie Verge: Oui. Remplir des formulaires de demande de subvention de recherche n'est pas le pactole favori de qui que ce soit. On veut pouvoir compter sur une seule source suffisante pour le financement d'un programme de recherche.

M. Louis Delbaere: On propose donc un seul examen par les pairs. Autrement, ce sont les mêmes experts qui doivent se prononcer pour la Fondation du coeur, le Conseil de recherche médicale et la Société de l'arthrite. Ainsi, tout serait centralisé. Il vaut beaucoup mieux qu'il n'existe qu'un point central que de devoir envoyer trois ou quatre demandes de subvention.

Mme Carolyn Bennett: M. Gloster a dit que si les gens quittaient le Canada pour aller aux États-Unis afin d'obtenir un financement stable, que ce n'était pas nécessairement une question fiscale.

M. Andrew Gloster: Je suis sûr que pour certains c'en est une, car pour quelqu'un qui déménage, il est intéressant que cela soit avantageux sur le plan fiscal. Toutefois, je pense que la raison essentielle de l'exode, c'est le manque de financement. Nous aimerions tous être mieux payés et il faut espérer que la situation financière du pays s'améliorera et que nos salaires augmenteront ou que nos impôts diminueront. Du reste, si cela se produisait, tous les Canadiens s'en réjouiraient et pas seulement nous.

Tout chercheur veut pouvoir faire de la recherche et advenant qu'il ne puisse pas le faire, il est très tenté de quitter le pays. C'est donc sans doute là le principal motif même si je suis sûr qu'il y a des gens qui iront aux États-Unis essentiellement parce que le salaire y est plus élevé et les impôts moins élevés.

Mme Carolyn Bennett: Un des chercheurs qui m'a rendu visite m'a parlé de cette bourse de recherche spéciale qui était presque l'équivalent du prix Nobel. Les chercheurs prometteurs peuvent obtenir un million de dollars inconditionnellement.

M. Andrew Gloster: Il s'agit de la bourse Howard Hughes.

Mme Carolyn Bennett: C'est cela, la bourse de recherche Howard Hughes. Nous aurions beaucoup de mal à concurrencer cela.

Mme Valerie Verge: Étant donné les caractéristiques de notre système, nous ne pouvons pas ici récompenser la véritable innovation comme il se doit. Nous n'avons pas l'argent nécessaire pour prendre de gros risques pour l'instant. Cela est véritablement déplorable quand il s'agit de recherche et de découverte.

Les instituts pourraient se permettre de courir un peu plus de risques pour des projets, qui, quoique risqués, auraient la possibilité de nous permettre de progresser énormément—auraient un impact sur la découverte médicale. Pour l'instant, il y a très peu de financement qui soit donné inconditionnellement. C'est très rare.

Mme Carolyn Bennett: Pour l'heure, Clinton a promis à la NIH un financement correspondant à 2 à 3 p. 100 des dépenses au titre de la santé. Il s'agit des dépenses publiques au titre de la santé—n'est-ce pas? Qu'est ce que cela représenterait?

• 1710

Mme Valerie Verge: Je peux vous dire à quoi cela correspond par habitant—j'ai les chiffres ici même. Je vais vous donner les chiffres pour 1997-1998, car c'est ce que nous avons pour l'instant. Au Canada, le Conseil de recherches médicales dépense 8,23 $ par habitant pour la recherche. Aux États—Unis, la NIH, en dollars canadiens par habitant, dépense 66,64 $, car il faut tenir compte d'un écart de 40 p. 100 par rapport au dollar américain. Ainsi, c'est sans doute un peu moins de 50 $—environ 48 $. C'est à dire que... Cela représente six fois plus. Exprimés en dépenses par habitant, les investissements américains dans la recherche sont six fois plus élevés que ceux des Canadiens. Ils peuvent compter sur un bien plus grand nombre de chercheurs également. Ce sont les chiffres pour l'an passé.

Mme Carolyn Bennett: Je vois.

Mme Valerie Verge: Les projections sont effarantes et nous allons tout simplement être laissés pour compte. Pour exprimer l'écart, c'est le seul calcul possible.

Mme Carolyn Bennett: Et ce n'est là que le financement accordé par le gouvernement, n'est-ce pas?

Mme Valerie Verge: Oui, exclusivement.

Mme Carolyn Bennett: Avec toutes les fondations et tous les autres organismes, cela représente... Par exemple, avec la bourse Howard Hughes, le total est encore plus élevé.

Mme Valerie Verge: Mais c'est inconditionnel.

Mme Carolyn Bennett: Je vois. Nous espérons quant à nous pouvoir consacrer 1 p. 100 du financement public au titre de la santé, n'est-ce pas?

Mme Valerie Verge: C'est cela.

Mme Carolyn Bennett: Nous espérons donc que ce nouveau modèle d'Institut canadien de recherche en santé va faciliter les choses pour les fondations, va permettre des levées de fonds plus importantes, parce que les chances de succès seront plus grandes, n'est-ce pas?

Mme Valerie Verge: Tout à fait.

Mme Carolyn Bennett: Je vois. Très bien, merci. Pour ce qui est du projet de préparation à l'acquisition de connaissances, je me demandais... Alan Rock et John Godfrey ont rencontré certains responsables d'organisations communautaires pour enfants à Toronto, jeudi soir, et si je ne m'abuse, on a réclamé...

Dans certains cas, le financement vient du programme d'action communautaire pour les enfants, mais les organisations qui n'obtiennent pas de fonds ainsi, voudraient en obtenir. En Saskatchewan, les organisations communautaires connaissent-elles l'existence du PACE? Pensent-elles que l'on pourrait donner de l'ampleur à ce programme? À la vérité, quand on considère les dépenses en matière de santé, la possibilité d'injecter certaines sommes dans les collectivités, si petites soient-elles, et qui donnent des résultats efficaces, semble tout à fait rentable. Y a-t-il des programmes communautaires pour les enfants, financés par le PACE, dont vous pourriez nous parler?

M. Craig Melvin: Il existe en Saskatchewan de nombreux programmes financés par la province ou qui jouissent d'un financement fédéral-provincial-local. Il y en a beaucoup parmi eux qui sont organisés à l'échelle communautaire. La vaste majorité fonctionne extrêmement bien. Comme je le disais tout à l'heure, c'est essentiellement parce qu'on a mis à contribution les ressources disponibles localement.

J'ai été frappé de constater que nous sommes aux prises avec une crise que nous considérons nationale—le grand nombre d'enfants vivant dans la pauvreté. Ce genre de programme existe mais nous n'en sommes pas moins réticents à reconnaître ce qu'il en coûterait pour nourrir nos enfants. Cela me frappe... Lorne Nystrom a posé la question: quel genre de campagne menez-vous pour que cette initiative soit appuyée? Je poserais la question à mon tour: quel genre de campagne menons-nous pour que l'on reconnaisse la nécessité de nourrir nos enfants? C'est en enjeu pour la nation.

C'est un problème épineux. Il faut trouver des appuis. Le gouvernement peut compter sur toutes sortes d'appuis, sur place, grâce à des groupes et à des agences communautaires. J'ai pu constater cela auprès des commissions scolaires et des gouvernements provinciaux d'un bout à l'autre du pays. Je sais que le gouvernement fédéral envisage un programme national à l'intention des enfants. C'est une mesure tout à fait positive mais il est absolument nécessaire de canaliser tous les efforts à cet égard.

• 1715

Mme Carolyn Bennett: On a souvent parlé de la faim chez les enfants, des angoisses que cela créait chez les gens, si on peut dire, quand on constate la multiplication des banques d'aliments. Nous savons que quand les enfants ont faim, leurs parents ont sans doute encore plus faim, parce qu'ils se privent pour donner à manger aux enfants d'abord.

Les loyers sont devenus une composante énorme des budgets des familles, en l'absence de logements abordables, et je voudrais savoir si c'est une chose dont on s'occupe ici en Saskatchewan? Malheureusement, en Ontario, la province d'où je viens, la ministre des services sociaux a déclaré la semaine dernière que les logements sociaux n'étaient désormais plus nécessaires. Les experts lui ont confirmé cela. Pouvez-vous nous faire part de votre point de vue.

Mme Debbie Ward: Je ne peux pas vous décrire notre programme de logement social. Il n'est certainement pas suffisant. J'ai parlé des écoles situées au centre-ville et du taux de roulement élevé des enfants, essentiellement parce que les familles doivent fuir leur propriétaire dans certains cas ou dans d'autres cas parce qu'ils doivent quitter un logement insalubre.

Mme Carolyn Bennett: Y a-t-il des enfants inscrits dans vos écoles qui habitent dans des abris?

Mme Debbie Ward: Oui, bien entendu.

Mme Carolyn Bennett: On constate à Toronto qu'un grand nombre de familles vivant dans les abris, ont des enfants, ce qui n'est pas très acceptable.

Qu'en est-il de la préparation à l'apprentissage par rapport aux normes nationales? Nous sommes nombreux au sein de notre caucus à réclamer que l'on puisse détecter et mesurer, dès l'entrée des enfants à l'école, le degré de difficulté d'apprentissage et le niveau de dommages causés par le syndrome d'alcoolisme foetal afin de pouvoir faire quelque chose.

Par ailleurs, on sait que dans certaines régions, l'anglais est une langue seconde. Il n'y a pas assez d'aides-enseignants de telle sorte qu'à partir de la deuxième année, cela constitue une difficulté d'apprentissage dans bien des cas car les enfants entrent à l'école sans bien maîtriser l'anglais.

Mme Debbie Ward: En Saskatchewan, les enfants de trois et quatre ans ne sont pas scolarisés. Pour les préparer à entrer à la maternelle, nous souhaitons qu'il existe des programmes de prématernelle pour les préparer à l'apprentissage.

M. Craig Melvin: Les divers groupes qui s'intéressent à ces questions réclament en fait des normes. Il faudrait qu'il existe, à défaut de normes, du moins des cibles qui nous permettent de mesurer l'appui que nous fournissons aux familles. Cela touche toute une gamme de services.

Vous avez fait allusion à des objectifs en matière d'éducation. Vous avez sans doute raison. Cela pourrait constituer des cibles pour mesurer la disponibilité à apprendre. Elle permettrait ainsi une évaluation et indiquerait si oui ou non nous réalisons des progrès.

Il y a également des cibles pour ce qui est de la situation économique de la famille, des conditions sociales où elle vit, et certainement de la santé des enfants et de leur mère.

Nous progressons sans cesse. Il faut écouter ce que les scientifiques ont à dire. Dans le domaine de l'éducation, nous constatons que leurs recherches nous fournissent des renseignements fort utiles.

Ce qui est troublant, c'est que nous apprenons ainsi que la croissance et le développement des enfants avant leur scolarisation sont plus déterminants que le travail fait à l'école, pour ce qui est du succès scolaire. Voilà pourquoi il est capital que nous tâchions de rejoindre ces enfants.

Mme Carolyn Bennett: Une étude diffusée la semaine dernière indiquait que les enfants peuvent très bien aller à la maternelle toute la journée. On pense qu'une pleine journée à la maternelle, à la garderie, ou en centre de puériculture est plus avantageuse que la mosaïque avec laquelle la plupart des familles doivent composer. Avez-vous...

Mme Debbie Ward: À titre de mère, j'estime que ce serait peut-être plus facile à régler. Premièrement, compte tenu du caractère rural de la Saskatchewan, nous avons de nombreuses garderies à plein temps, même si elles n'ouvrent leurs portes que tous les deux jours. Pour les commissaires à qui nous en parlons il ne s'agit pas d'un problème.

Mais la continuité de l'apprentissage, par contre,...

Mme Carolyn Bennett: C'est-à-dire, que ce soit la même personne?

• 1720

Mme Debbie Ward: Oui, et j'aimerais également que les gens aient la possibilité de placer leurs enfants dans ces établissements et qu'il y ait d'autres choix. Ce serait bien que les enfants puissent être à la maternelle ou commencer l'école à trois ans et continuer par la suite. Mais ce n'est pas nécessaire pour tout le monde et nous aimerions que les gens disposent d'un certain nombre de choix.

Mme Carolyn Bennett: Ma soeur enseigne elle-même à ses enfants, chez elle en Alberta, mais c'est en grande partie en raison de la distance. Elle a sans doute estimé qu'il n'était pas très intéressant que ses enfants passent une heure sans supervision chaque jour dans l'autobus. Je me demande s'il existe d'autres cas dus à la réalité géographique de notre pays dont on commence seulement à se rendre compte, où l'on trouve tous ces enfants dans des autobus, non supervisés, si ce n'est par le pauvre conducteur. Il faudrait peut-être qu'il y ait un élément éducatif à cela. Nous pouvons peut-être faire une petite annonce pour le patrimoine, au lieu d'utiliser...

Merci beaucoup. C'est une situation très complexe.

Le président: Voulez-vous nous en dire davantage sur ce dernier point? Merci, madame Bennett.

Monsieur Valeri.

M. Tony Valeri: Merci, monsieur le président. J'ai deux questions et une observation.

Monsieur Buckmaster, vous avez dit dans votre proposition—et je veux m'assurer d'avoir bien compris—que les pauvres paient une proportion plus grande d'impôts. Dans le dernier budget, le gouvernement a essayé d'alléger un peu ce fardeau fiscal au moyen de l'exemption de base, tout en allant chercher l'argent dans les fourchettes de revenus plus élevés au moyen d'une surtaxe de 3 p. 100.

Lorsque vous dites qu'ils paient une proportion plus élevée des impôts, vous parlez de leur propre facture d'impôt, car en fait, 12 p. 100 des contribuables canadiens, ceux qui ont les revenus les plus élevés paient environ 55 p. 100 de tous les impôts au Canada. Il y a donc une disproportion. Un tout petit pourcentage de Canadiens paient la majeure partie de la facture fiscale au Canada.

M. Archie Buckmaster: Je n'ai pas les chiffres sous les yeux.

M. Tony Valeri: D'accord. Je voulais m'en assurer.

M. Archie Buckmaster: D'après ce dont je me souviens, cela ne fonctionne pas de cette façon. Comme je l'ai dit, j'ai rédigé ce document et je pourrais faire une recherche à ce sujet.

M. Tony Valeri: Bien sûr.

M. Archie Buckmaster: Toutefois, je vous crois sur parole. Je ne croyais pas que le pourcentage était aussi élevé.

M. Tony Valeri: Le problème vient en partie de ce qu'un grand nombre de Canadiens à faible revenu paient aujourd'hui des impôts et il faut donc faire quelque chose à cet égard. Mais il existe également d'autres difficultés du fait qu'un faible pourcentage de contribuables canadiens paient une grande partie de la facture réelle d'impôts. Il faut donc essayer de trouver un juste milieu et de faire ce qu'on peut avec ce qu'on a.

M. Archie Buckmaster: Je suis tout à fait d'accord avec vous. Il faut surtout voir aux dépenses. D'abord—et je crois avoir des notes à ce sujet, même si je n'en ai pas parlé en détail—toute mesure que prend le gouvernement influe sur le budget. Si elle n'est pas prévue dans le budget, c'est la fin de l'exercice financier qui est touché. Comme le disait le président, s'il reste de l'argent, on peut payer la dette, s'il n'en reste pas, cela augmente le déficit. Je suis étonné que vous n'en ayez pas encore entendu parler.

Je ne possède pas d'arme à feu—j'espère que je n'en posséderai jamais—mais comme la plupart des gens, j'estime que le coût du programme de contrôle des armes à feu est absolument ridicule. Si je voulais me procurer une arme, le régime d'enregistrement ne m'en empêcherait pas. Je soupçonne que ce programme a été mis en place pour tenir peut-être une promesse personnelle. Je n'en sais rien. Mais, il faut voir ce qui est rentable.

Le président: Vous ne croyez pas que ce soit une bonne chose de remplir une promesse?

M. Archie Buckmaster: Je crois que cette promesse n'aurait jamais dû être faite.

M. Tony Valeri: Le problème, dans un pays aussi vaste, c'est qu'il y a tant d'opinions divergentes. Le programme dont vous parlez reçoit un accueil favorable dans certaines parties du pays est dénigré dans d'autres.

M. Archie Buckmaster: Je m'en rends bien compte. Mais ce programme coûte beaucoup plus cher que prévu.

• 1725

Permettez-moi de vous parler de mon expérience personnelle. J'ai été victime de tentatives de vol trois fois au cours des trois dernières années. Ma maison a été dévalisée auparavant. J'ai appelé la GRC et je suis tombé sur un répondeur; le message disait que je devais attendre si mon appel était important. Je suis donc demeuré en ligne et j'ai parlé à quelqu'un de Regina qui n'arrivait pas à mettre la main sur quelqu'un à ce moment-là. Le message a été transmis à un détachement qui n'était même pas situé près de Saskatoon—en fait, il est situé près de Saskatoon, mais ce n'est pas le bon détachement. Que font les agents? Remplissent-ils des formulaires pour un programme quelconque du gouvernement? En tout cas, ils ne sont plus là où ils étaient auparavant. Je me rappelle de l'époque où les policiers luttaient contre le crime.

M. Tony Valeri: Je suis certain qu'il y a encore des policiers qui luttent contre le crime.

J'ai une autre question à vous poser. Vous avez parlé de créer des comptes distincts, de créer une caisse d'assurance-emploi distincte.

M. Archie Buckmaster: Je crois que c'est déjà fait, sous le régime du dernier...

M. Tony Valeri: Non, ce n'est pas déjà le cas. En 1986, le vérificateur général avait demandé le regroupement de cette caisse particulière.

M. Archie Buckmaster: Votre gouvernement n'a-t-il pas adopté une loi pour créer une caisse distincte? C'est bien ce qu'il veut changer?

M. Tony Valeri: Non, la caisse fait partie du Trésor depuis 1986.

Je ne suis ni pour ni contre votre idée d'une caisse distincte, mais ce que j'aimerais savoir—et je me demande ce que vous pensez de mon idée—si une caisse distincte était créée à l'extérieur du gouvernement, seriez-vous d'accord pour que le gouvernement se retire du programme, qu'il n'établisse plus les montants des cotisations, non plus que les règles du programme ou des prestations? Seriez-vous d'accord avec cela?

M. Archie Buckmaster: Je ne dis pas que le gouvernement devrait s'en retirer. Je ne parle même pas de créer une caisse entièrement distincte. Je crois simplement que l'argent ne devrait pas être versé au Trésor car on serait mieux en mesure d'en rendre compte.

M. Tony Valeri: Le problème, c'est que le vérificateur général ne nous permet pas d'avoir un système hybride. Le vérificateur général a déclaré que si le gouvernement mettait en oeuvre le programme, il fallait que la comptabilité de ce programme fasse partie du Trésor; le gouvernement doit rendre compte de tout déficit qui peut se produire.

M. Archie Buckmaster: Le système pourrait être structuré comme un circuit.

M. Tony Valeri: Mais l'essentiel, c'est de savoir si le gouvernement doit mettre en oeuvre le programme. S'il le fait, ce programme peut constituer un passif pour le gouvernement. Cela signifie qu'il faut l'inclure dans la comptabilité. En 1986, le déficit avait été sous-estimé de 6 milliards de dollars à cause du déficit du Programme de l'assurance-emploi, et puisqu'il s'agissait d'un fonds distinct à cette époque, le gouvernement ne l'avait pas signalé. Mais le vérificateur général a dit que si le gouvernement payait les prestations, prestations à l'origine de qui provoquaient ce déficit de 6 milliards de dollars, il fallait inclure ce montant dans la comptabilité générale du gouvernement.

M. Archie Buckmaster: Je vois ce que vous voulez dire.

M. Tony Valeri: C'est une mesure qu'a exigée le vérificateur général. C'est pour cela qu'il en est ainsi. Puisque vous avez abordé le sujet, je me demande si vous seriez également d'accord avec l'idée que le gouvernement se retire de ce programme et permette, comme le propose M. Epp et le Parti réformiste, que soit créée une commission distincte chargée d'établir les taux. Le NPD appuie, je crois, l'idée d'un programme dans lequel on établirait les taux, les prestations, etc. Le gouvernement n'y participerait pas vraiment.

M. Archie Buckmaster: Non, ce que j'aimerais voir, c'est un excédent... Il s'agit d'un excédent comptable en ce moment. Ce n'est pas un excédent en argent. J'aimerais que cet excédent comptable soit retourné aux cotisants. C'est au fond ce que j'ai à dire sur ce point.

En ce qui concerne le vérificateur général, je suis d'accord avec lui. Si le gouvernement veut gérer un programme, il doit le montrer sur ses livres. Il peut quand même en assurer le suivi dans un compte à part. Est-ce que vous me comprenez?

M. Tony Valeri: Seriez-vous d'accord avec l'autre proposition du Parti réformiste, soit de retourner environ 6 à 7 milliards de dollars aux cotisants, ce qui nous mettrait dans une position de déficit?

M. Ken Epp: Voyons.

M. Tony Valeri: Je pense que le président mentionne souvent cet exemple, à savoir si on veut un budget qui comporte une ligne ou deux lignes.

M. Archie Buckmaster: Cela revient au même.

M. Tony Valeri: Comme vous le savez, le budget de cette année prévoit le retour aux cotisants de 6 milliards de dollars. Êtes-vous d'accord avec cela?

M. Archie Buckmaster: Je crois que l'argent doit être retourné. Si cela nous met dans une position de déficit, tant pis.

M. Tony Valeri: Vous êtes d'accord pour qu'on ait à nouveau un déficit?

• 1730

M. Archie Buckmaster: Y a-t-il vraiment un déficit? Cela nous ramène à ce que disait la jeune femme ce matin: il s'agit d'être honnête avec nous, la population. À mon avis, c'est quelque chose de très important que le gouvernement devrait examiner, puisqu'on s'interroge sur l'intégrité du gouvernement en ce moment.

M. Tony Valeri: Je ne sais pas comment nous aurions pu être plus transparents, étant donné que le ministre des Finances a déjà dit que le déficit est absorbé et que les cotisations de l'assurance-emploi seront versées au Trésor. Ce sont ces cotisations, ainsi que les autres taxes payées par les Canadiens, qui ont permis d'éliminer le déficit. Je ne crois pas qu'on puisse être beaucoup plus transparents que cela.

M. Archie Buckmaster: C'est transparent, mais c'est dire...

M. Tony Valeri: Vous n'êtes peut-être pas d'accord avec notre approche, mais ce n'est pas la transparence qui est en cause.

M. Archie Buckmaster: Voici ma perception. Je ne paie pas de cotisations, mais si je le faisais, il s'agirait d'une déduction faite par le gouvernement en guise d'assurance contre la perte de mon emploi. Il y a des restrictions qui régissent l'admissibilité aux prestations, mais il s'agit essentiellement d'une assurance contre le chômage.

Le gouvernement nous dit maintenant qu'il a perçu trop de cotisations, et qu'il va garder cet argent et le mettre ailleurs.

M. Tony Valeri: Non, le gouvernement n'a jamais dit que les prestations n'existaient pas. Les prestations sont toujours là. Le programme étant garanti par le gouvernement, ceux qui sont admissibles aux prestations les recevront toujours, que le programme soit dans une position excédentaire ou déficitaire.

M. Archie Buckmaster: Je ne suis pas d'accord.

M. Tony Valeri: Eh bien, si c'était le cas, le vérificateur général n'aurait pas soulevé la question. Il nous dirait de créer un fonds indépendant et de ne plus rendre compte de cet argent.

M. Archie Buckmaster: Vous percevez actuellement beaucoup plus qu'il ne faut pour faire fonctionner le programme.

M. Tony Valeri: C'est vrai.

M. Archie Buckmaster: Si vous continuez dans ce sens, l'argent excédentaire ne servira pas à l'assurance-emploi. Vous le percevez pour d'autres raisons.

M. Tony Valeri: On s'en sert pour éliminer le déficit. Au fond, on peut s'en servir pour investir dans des programmes de création d'emplois. Le choix à faire—et c'est vraiment le défi que nous devons relever—c'est si on veut voir dans le prochain budget un remboursement des cotisations de l'assurance-emploi, des fonds pour la recherche médicale, une injection de fonds dans les soins de santé ou une réduction générale de l'impôt qui toucherait 14 millions de contribuables, tandis que des modifications à l'assurance-emploi ne toucheraient que huit millions de contribuables. Une réduction du taux d'impôt personnel aiderait les travailleurs indépendants et les retraités, et non seulement les employés. C'est la question à laquelle nous sommes confrontés.

M. Archie Buckmaster: Là encore, c'est une question d'honnêteté et de responsabilité de la part de notre gouvernement. Je crois que c'est très important. Je suis conscient qu'on ne peut pas tenir toutes les promesses. Bon nombre des promesses faites par des gouvernements sont en fait de la démagogie, mais il est perçu comme étant vraiment malhonnête de percevoir des cotisations qui devraient servir d'assurance et d'affirmer ensuite que vous percevez beaucoup plus qu'il ne faut. À votre avis, nous devrions continuer à nous remettre cet argent que vous allez mettre ailleurs.

M. Tony Valeri: Vous payez des taxes sur l'essence pour faire réparer les routes. Certaines routes sont pleines de nids-de-poule. Est-ce qu'il s'agit là aussi de malhonnêteté?

C'est tout le problème des taxes qui sont prévues à des fins précises. Vous dites, d'une part, que si une taxe est prévue à une fin précise, elle devrait être utilisée à cette fin, mais si on manque d'argent dans la caisse d'assurance-emploi, les autres contribuables devraient payer les prestations de ceux qui ont cotisé. Par ailleurs, vous n'acceptez pas ce raisonnement. C'est là la difficulté des impôts spécifiques.

Lorsque le fonds avait un déficit de 6 milliards de dollars, certains Canadiens qui payaient des impôts n'étaient jamais admissibles à l'assurance-emploi parce qu'ils étaient des travailleurs indépendants ou des retraités. Leurs impôts servaient à payer des prestations d'assurance-emploi. Est-ce qu'ils auraient dû appeler le ministre des Finances pour lui demander de ne pas utiliser leur argent pour payer des prestations d'assurance-emploi, étant donné que les cotisations ne suffisaient pas à couvrir leurs coûts à eux?

M. Archie Buckmaster: Je ne m'oppose pas à ce que le gouvernement utilise le surplus, mais pas pour une période illimitée. Ces contribuables se sont fait rembourser. Ceux qui ont versé de l'argent...

• 1735

M. Tony Valeri: Comment se sont-ils fait rembourser? Les taux d'impôt n'ont pas baissé. La première diminution a été annoncée lors du dernier budget.

M. Archie Buckmaster: L'excédent est survenu au moment où le déficit de la caisse d'assurance-chômage a été absorbé. Le contribuable moyen s'est fait rembourser à ce moment-là.

On n'a pas pris l'argent dans ma poche à moi. L'argent a servi...

M. Tony Valeri: On est tous gagnants quand on élimine le déficit. Mais je comprends ce que vous voulez dire.

L'autre question que je voulais vous poser concerne les fonds pour la recherche médicale. Pourrais-je vous demander de me donner votre avis en tant que simple contribuable plutôt que chercheur?

En guise d'introduction, je voudrais dire que j'appuie tout à fait le volet recherche des soins de santé. Mais je me pose des questions. On exerce des pressions sur le gouvernement. De nombreux Canadiens qui ne travaillent pas dans le domaine de la recherche disent qu'il y a des problèmes dans le système de soins de santé. Il s'agit des listes d'attente, de la chirurgie, de l'IRM. C'est au niveau de la prestation des services. Nous avons des inquiétudes à l'égard de l'avenir des soins de santé au Canada à cause de ce que nous vivons quand nous allons à l'hôpital. Comment concilier ces besoins avec votre demande de fonds de recherche?

Dr Valerie Verge: Cela me rappelle des conversations avec mon mari à 11 heures du soir. Il disait, «Pourquoi avez-vous droit à des fonds supplémentaires, quand tous les Canadiens ont besoin de leurs ressources financières? L'agriculture a besoin de l'argent et tous les autres domaines aussi.» C'est une question tout à fait valable. Mais la réponse, à mon avis, est évidente. Sans la recherche, on n'aura pas de nouveaux traitements moins coûteux. On ne pourra pas prévenir la maladie d'Alzheimer. Le fardeau créé pour le gouvernement par la maladie est de loin supérieur à ce qu'il en coûte pour faire des recherches qui peuvent contribuer financièrement au gouvernement en diminuant les coûts des soins médicaux. Les gens n'auront pas besoin d'IRM si on peut prévenir les maladies.

Dr Louis Delbaere: Quant à la prévention et à la guérison, un des projets financés par des fonds supplémentaires a porté sur la tuberculose, en particulier chez les populations autochtones. Un type de tuberculose qui résiste aux antibiotiques se répand de plus en plus. C'est un grave problème à travers le monde. En Saskatchewan, surtout chez les Autochtones, le problème devient grave.

Ces recherches ont donc été financées, et elles finiront peut-être par nous permettre de prévenir et possiblement traiter la tuberculose.

Dr Andrew Gloster: Que je sache, on n'a jamais eu autant d'information au sujet de toutes ces maladies. Pendant très longtemps, on n'avait aucune idée de l'origine de ces maladies. On pouvait décrire la pathologie, décrire les symptômes, mais on n'avait aucune idée de la cause de ces maladies.

De nos jours, on entend dire toutes les semaines, ou tous les mois, que le rôle de deux ou trois gènes a été identifié. On commence à comprendre le fonctionnement possible de ces maladies et les traitements thérapeutiques à leur appliquer.

Je pense que maintenant on peut espérer trouver des traitements pour certaines maladies, dont l'Alzheimer, qui accaparent une part énorme du budget des soins de santé. Compte tenu des sommes consacrées aux soins aux malades, même des progrès très petits pourraient se traduire par des contributions énormes à un excédent budgétaire à l'avenir.

Donc, je pense que la situation est prometteuse. Il faut consacrer des fonds aux soins de santé dès maintenant. Cependant, on ne peut pas négliger la recherche, qui nous donne des avantages en fin de compte.

M. Tony Valeri: C'était la question complémentaire que je voulais vous poser. D'après vous, est-ce qu'il suffit de financer la recherche dans le domaine des soins de santé? Est-ce que le système de soins de santé a un financement suffisant?

Dr Valerie Verge: Non. À l'heure actuelle, comme vous l'avez dit, plusieurs domaines des soins de santé sont sous-financés, pas uniquement celui de la recherche. Je crois à l'efficacité. Je crois que nous avons fait des progrès énormes pour rationaliser nos activités. Par ailleurs, si on veut avoir de bons services médicaux, il faut attirer des personnes compétentes et les payer convenablement.

• 1740

Cette question s'ajoute donc à tout le reste, les longues listes d'attente, etc. J'ai très peur, car ici en Saskatchewan, nous avons beaucoup de mal à attirer des spécialistes à cause de toutes les pressions exercées sur le système, qui a si peu de points de services dans un territoire si vaste. De plus, comme je l'ai déjà dit, je sais trop bien qu'on a besoin de facultés de médecine dynamiques et axées sur la recherche si on veut attirer ces personnes compétentes.

Une telle situation permet d'avoir des médecins résidents plus compétents et de meilleurs programmes de soins de santé, à cause de la recherche qui y est effectuée.

Il s'agit d'une sorte de cercle vicieux—dans la recherche, on ne peut pas s'attendre à ce que le système de soins de santé s'améliore. De plus, qui aurait prédit que des bactéries qui résistent aux antibiotiques allaient devenir un tel problème de nos jours?

Si on ne continue pas à faire de la recherche, nous ne pourrons pas affronter les nouveaux défis à l'avenir. Il faut avoir des chercheurs qui contestent les idées reçues et qui passent par des nouvelles directions.

M. Tony Valeri: Une dernière question et une remarque. Avant tout, il s'agit d'une question qui m'intéresse personnellement.

Vous avez parlé de votre situation particulière, et vous avez dit qu'afin d'obtenir du financement, vous êtes devenu un satellite d'une compagnie biomédicale américaine. Autrement dit, vous avez vendu d'avance votre propriété intellectuelle...

Dr Valerie Verge: Exactement.

M. Tony Valeri: ...en échange de...

Dr Valerie Verge: En échange de ma propre volonté de faire quelque chose de bien pour l'humanité dans son ensemble, et ma volonté de satisfaire ma propre curiosité scientifique et mon dynamisme personnel.

Sans avoir accès à ces molécules pour faire des tests pour voir comment elles se comportent, je ne peux pas faire cela.

M. Tony Valeri: Est-ce qu'il s'agit de la règle ou de l'exception à la règle?

Dr Valerie Verge: Ces jours-ci, cela n'est pas vraiment exceptionnel. Je sais que beaucoup de gens signent avec des firmes biotechnologiques des ententes de collaboration dans le cadre desquelles on cède tous les droits de propriété intellectuelle, ou un pourcentage de ces droits.

M. Tony Valeri: Merci beaucoup.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Valeri.

Au nom du comité, j'aimerais remercier nos témoins. Cette discussion a été très intéressante, et c'est pourquoi nous avons un peu de retard.

De vos interventions, il est très clair que nous sommes confrontés à beaucoup de défis et qu'il faudra faire beaucoup de compromis. Mais j'aimerais dire quelque chose. Le jour où le Canada a décidé de devenir un pays très important dans le contexte du village planétaire, nous avons fait certains choix. Nous avons décidé de bâtir une société composée de travailleurs hautement qualifiés et très bien payés, qui font des produits à haute valeur ajoutée. Il est impossible de bâtir une économie innovatrice sans une infrastructure de R-D, ou sans la recherche médicale.

Donc, si nous voulons maintenir le cap que nous avons choisi à ce moment-là de notre histoire où nous avons dû choisir notre chemin, nous n'avons plus vraiment le choix. Ces investissements sont essentiels. C'est seulement en créant de la richesse et en augmentant la productivité qu'on pourra améliorer le sort des enfants pauvres, et régler d'autres questions. Les programmes ont besoin de financement, ils ont besoin d'innovation. Ces éléments sont essentiels au développement d'une société.

Comme c'est donc la dernière présentation qui avait lieu ici à Saskatoon... Elle a été une étape importante dans nos délibérations. Vous avez clairement souligné le fait que tous ces éléments sont liés. Nous devons donc prendre toutes vos interventions et tous vos commentaires en considération.

Bien sûr, il y a un autre élément important. L'investissement dans les ressources humaines. De nos jours, on voit clairement que les pays qui investissent dans le développement de leurs ressources humaines sont ceux qui sortiront gagnants. Ces investissements sont cruciaux dans une économie concurrentielle—ce qui ne veut pas dire bien sûr une économie sans compassion. On peut être concurrentiel et avoir de la compassion en même temps. D'ailleurs, il est beaucoup moins difficile de faire preuve de compassion quand on est concurrentiel, parce qu'on a plus de ressources à partager.

Cette discussion a été fascinante, et je vous remercie tous au nom du comité.

La séance est levée.