FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON FINANCE
COMITÉ PERMANENT DES FINANCES
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le lundi 27 avril 1998
[Traduction]
Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): La séance est ouverte. Comme vous le savez, conformément à notre ordre de renvoi, le comité reprend l'examen du projet de loi C-36, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget de 1998 déposé au Parlement le 24 février 1998. Nous étudions cet après-midi deux parties précises, à savoir les parties 1 et 8.
Nous avons le plaisir de recevoir cet après-midi comme premier témoin, M. Kevin Psutka, vice-président de la Canadian Owners and Pilots Association.
Comme vous le savez sans doute déjà, vous disposez d'environ 10 minutes pour faire votre exposé, après quoi nous passerons à une période de questions et réponses. Je vous souhaite la bienvenue. Vous pouvez commencer.
M. Kevin Psutka (vice-président, Canadian Owners and Pilots Association): Merci, monsieur le président.
La Canadian Owners and Pilots Association vous remercie de cette occasion de vous présenter les vues du milieu de l'aviation générale sur l'élimination de la taxe de transport aérien. La COPA est la plus grande association de pilotes au Canada et elle représente quelque 17 000 pilotes et propriétaires d'aéronefs, qui sont pour la plupart de simples citoyens.
• 1535
La Loi sur la commercialisation des services de navigation
aérienne civile, antérieurement le projet de loi C-20, prévoyait
l'élimination graduelle de la taxe de transport aérien
parallèlement à l'introduction par NAV CANADA de redevances pour
les grands aéronefs. Cette mesure n'entraîne pas de coûts pour les
grands transporteurs aériens et leurs passagers. Cela est juste, et
nous appuyons donc la révision de la partie 8 du projet de loi
C-36, par laquelle la taxe de transport aérien est enfin éliminée.
Mais cette mesure ne concerne qu'un secteur du monde de l'aviation.
J'aimerais vous parler du gros du milieu de l'aviation: celui des exploitants de petits aéronefs, essentiels pour assurer les liens dans ce vaste pays; les exploitants qui alimentent les grands transporteurs aériens en passagers et en fret; ceux qui ravitaillent nos communautés éloignées; ceux qui forment nos futurs pilotes de ligne; et ceux qui assurent le transport de particuliers et font de l'aviation de tourisme. J'aimerais vous dire ce qui serait juste pour le milieu de l'aviation générale.
Pour mettre les choses en perspective, permettez-moi de vous dire que sur les 28 000 aéronefs au Canada, l'élimination de la taxe de transport aérien et les redevances récemment introduites par NAV CANADA ne touchent que les opérations des grands aéronefs, soit environ 1 100 aéronefs au total. Ceux-ci utilisent principalement seulement 26 grands aéroports sur un total de 726 aéroports agréés.
La quasi-totalité des 26 900 petits aéronefs appartiennent à des particuliers. Sur les 62 500 pilotes que compte le Canada, 41 400 sont des pilotes non commerciaux. J'espère que vous pouvez reconnaître que les 26 900 petits appareils qui opèrent principalement à partir de petits aéroports constituent un secteur important et significatif de l'aviation au Canada.
La grande majorité du milieu de l'aviation n'a pas encore à payer de redevances à NAV CANADA pour ses services. NAV CANADA entend introduire une redevance pour ces aéronefs le 1er novembre 1998. L'ennui, c'est que pour le moment, rien n'est prévu pour compenser la nouvelle redevance par une réduction des taxes à l'aviation.
En 1979, la COPA a adopté une résolution qui appuyait l'introduction d'une taxe d'accise sur l'essence d'aviation, maintenant de 11c. le litre, tant et aussi longtemps qu'elle était utilisée à des fins aéronautiques. Nous avons toujours considéré une partie de cette taxe comme notre contribution à l'appui de l'exploitation du système de navigation aérienne.
Ces dernières années, d'énormes économies ont été réalisées grâce aux changements intervenus au titre de la responsabilité et de la participation du gouvernement dans le domaine de l'aviation. Voici un extrait tiré du rapport Les transports au Canada 1996, qui reconnaît expressément que d'importantes réductions ont été opérées dans les dépenses de transport, et dans l'aviation en particulier:
-
Les dépenses de l'administration fédérale au titre du transport ont
diminué de plus de 30 p. 100 entre 1991-1992 et 1996-1997, par
suite des réductions de subventions, des augmentations de recettes
et de la commercialisation des services de navigation aérienne et
des aéroports.
Il est dit plus loin:
-
Les dépenses totales et ministérielles ont considérablement diminué
au cours de 1996 par suite des changements radicaux apportés au
rôle du ministère ces dernières années. L'exploitation des grands
aéroports a graduellement été cédée à des organismes locaux ou à
d'autres paliers de gouvernement, la Garde côtière canadienne a été
transférée au ministère des Pêches et des Océans en 1995, et la
propriété et l'exploitation des services de navigation aérienne ont
été cédées en 1996 à NAV CANADA, une société privée à but non
lucratif.
Ces économies continuent de croître au fur et à mesure que le gouvernement finit par céder les aéroports aux autorités aéroportuaires locales. En outre, Transports Canada est passé à un système de financement par l'usager en augmentant substantiellement les droits et en en introduisant de nouveaux pour les services qu'il continue d'assurer. Compte tenu de ces économies, des initiatives de financement par l'usager et de l'importante réduction des dépenses, il serait juste et raisonnable que le gouvernement réduise les taxes qu'il perçoit auprès des usagers de l'aviation. Cela permettrait à NAV CANADA d'imposer une redevance équivalente, selon le principe de la neutralité des coûts pour la communauté de l'aviation.
• 1540
Nous avons témoigné devant le Comité permanent des transports
et le Comité sénatorial permanent des transports et des
communications en 1996, au moment de l'élaboration de la loi. Les
exposés sont annexés à ma déclaration écrite d'aujourd'hui, et je
ne vais donc pas en reprendre les arguments ici. Permettez-moi
cependant de signaler que nous disions nous attendre à ce que les
usagers non commerciaux bénéficient du même traitement équitable
que celui assuré aux grands transporteurs aériens et à leurs
passagers par l'élimination de la taxe de transport aérien. La
réduction de la taxe d'accise sur le carburant aviation constitue
le moyen de traiter équitablement les pilotes et propriétaires de
petits aéronefs.
NAV CANADA a reporté l'imposition de redevances aux petits aéronefs parce qu'elle reconnaît, par le biais des consultations avec notre association de même qu'avec les conseils aéronautiques provinciaux, qu'il faut procéder autrement étant donné la nature variée des opérations du secteur et leur sensibilité aux augmentations de coût. NAV CANADA a reconnu comme nous que pour traiter équitablement ce secteur de l'aviation, il faut réduire la taxe d'accise sur le carburant parallèlement à l'imposition d'une redevance équivalente par NAV CANADA. NAV CANADA a officiellement demandé au ministre des Finances de réduire la taxe d'accise sur le carburant.
Les nombreux conseils aéronautiques et associations au Canada sont eux aussi d'avis qu'une réduction de la taxe d'accise sur le carburant est juste et nécessaire afin d'éviter d'imposer des coûts additionnels au secteur de l'aviation générale. J'ai annexé à ma déclaration écrite un exemplaire de la lettre récemment envoyée au ministre des Finances, signée conjointement par les conseils et associations représentant pratiquement tous les exploitants et propriétaires de petits aéronefs au Canada. L'importance du secteur de l'aviation générale, sa vulnérabilité aux augmentations de coût et l'effet de ces augmentations sur la communauté desservie par l'aviation générale sont soulignés dans cette lettre.
Au nom des conseils aéronautiques du Canada, je vous demande d'envisager de traiter équitablement l'important secteur que constitue l'aviation générale. Après avoir lu les documents écrits, je vous demanderais de vous servir de votre jugement et de votre influence pour convaincre le ministre des Finances de prendre une décision responsable à l'appui d'une réduction de la taxe d'accise sur le carburant aviation.
Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Psutka.
Nous allons maintenant passer à la période de questions et réponses, en commençant avec M. Harris.
M. Dick Harris (Prince George—Bulkley Valley, Réf.): Merci, monsieur le président.
Monsieur Psutka, je vous remercie de votre exposé. J'aimerais avoir une précision. La taxe de transport aérien est réduite en ce moment pour en quelque sorte contrer la redevance de NAV CANADA pour le service de navigation aérienne. Cela concerne-t-il les grands transporteurs?
M. Kevin Psutka: En effet, oui.
M. Dick Harris: La taxe de transport aérien va finir par être complètement éliminée pour les grands transporteurs et cela sera compensé par la redevance. Il s'agit donc de quelque chose de neutre, n'est-ce pas?
M. Kevin Psutka: Oui, c'est cela.
M. Dick Harris: Les propriétaires de petits aéronefs payent-ils également la taxe de transport aérien?
M. Kevin Psutka: Non. La taxe de transport aérien est intégrée au prix du billet des passagers des grands transporteurs aériens.
M. Dick Harris: Donc, en réalité, les grands transporteurs n'obtiennent pas un allégement fiscal spécial par rapport aux exploitants de petits aéronefs, n'est-ce pas?
M. Kevin Psutka: Je crois que la meilleure façon de répondre consiste à regarder la façon dont est administrée la taxe sur le carburant. Une taxe de 4c. le litre est imposée au combustible pour moteur à réaction ou au combustible utilisé par tous ces grands transporteurs aériens. Les petits aéronefs, notamment les petits aéronefs privés et ceux qui sont utilisés à des fins commerciales, sont en grande majorité propulsés par des moteurs à piston. Ils doivent acquitter la taxe d'accise sur le carburant de 11c. le litre. L'écart, environ de 7c. le litre entre le combustible pour moteur à réaction et l'essence, représente, à notre avis, la différence entre ce que paient les grandes lignes aériennes via la taxe de transport aérien et ce que paient les autres.
M. Dick Harris: Dans l'ensemble, les grands transporteurs aériens consomment-ils autant de carburant que les petits aéronefs?
M. Kevin Psutka: Ils en consomment beaucoup plus.
M. Dick Harris: J'imagine donc qu'ils mériteraient un léger allégement fiscal puisqu'ils en consomment beaucoup plus.
Je ne suis pas un fanatique des taxes. J'essaie seulement de voir la différence. Vous proposez que le gouvernement supprime la taxe d'accise sur le carburant pour les petits aéronefs.
M. Kevin Psutka: Oui.
M. Dick Harris: Quelle portion du coût représente-t-elle?
M. Kevin Psutka: Quelle portion de quels coûts?
M. Dick Harris: Que représente la taxe d'accise sur...
M. Kevin Psutka: La taxe d'accise sur le carburant aviation est de 11c. le litre.
M. Dick Harris: Considérant le carburant consommé par les petits aéronefs, combien cela coûterait-il au pays? Combien cela représenterait-il si le gouvernement l'éliminait?
M. Kevin Psutka: Autour de 10 à 15 millions de dollars. Quand la taxe de transport aérien était imposée en totalité—elle a partiellement été supprimée en mars de cette année et le reste le sera en novembre—elle rapportait 600 millions de dollars de revenus, qui étaient ensuite utilisés à l'appui du système de navigation aérienne. Voilà qui met les choses en perspective.
M. Dick Harris: Comme je l'ai dit auparavant, je n'aime pas les taxes, mais si on éliminait cette taxe, par quoi en remplacerait-on les revenus?
M. Kevin Psutka: Le principe qui a présidé à la privatisation du système de navigation aérienne visait principalement les grands transporteurs aériens. Ce système a été mis sur pied pour les grands transporteurs aériens, et la loi qui a été mise en place s'adressait à eux. Donc, l'un des principes fondamentaux de la loi est ce passage, sans effet sur les coûts, d'un système de taxation ou de financement par le gouvernement à un système de navigation aérienne financé par les usagers.
M. Dick Harris: Donc, si l'on supprime la taxe d'accise sur le carburant, vous allez finir par payer NAV CANADA pour...
M. Kevin Psutka: Oui, tout à fait. Nous sommes actuellement en pourparlers avec NAV CANADA et il y a essentiellement quatre options sur la table sur la façon dont nous acquitterions cette redevance. L'option privilégiée par l'industrie est d'imposer un droit sur le carburant, quel que soit le nom que vous lui donniez— pas une taxe mais un genre de droit sur le carburant—que les compagnies percevraient pour NAV CANADA. Donc, comme la taxe d'accise est réduite, la redevance de NAV CANADA n'a aucun effet sur les coûts.
M. Dick Harris: Donc, les grands aéronefs obtiennent une réduction de la taxe de transport aérien, puis son élimination, et leur redevance à NAV CANADA augmente.
M. Kevin Psutka: Oui.
M. Dick Harris: Donc, cela s'équilibre. Vous envisagez ici une réduction des taxes d'accise parce que vous allez devoir verser une redevance à NAV CANADA. Vous n'allez pas finir par payer moins, mais seulement à quelqu'un de différent. Et vous ne voulez pas finir par payer plus; c'est pourquoi vous voulez...
M. Kevin Psutka: C'est cela. Je tiens seulement à souligner que nous ne voulons pas ne rien payer. Nous voulons éviter d'être doublement taxés en ayant à acquitter une nouvelle redevance et à payer la taxe. Il ne fait pas de doute que NAV CANADA va imposer une redevance aux petits aéronefs le 1er novembre. Nous ne savons pas à combien elle s'élèvera et, bien entendu, les effets qu'elle aura sur nous dépendront de l'ampleur de la réduction de la taxe d'accise.
M. Dick Harris: C'est juste.
[Français]
Le président: Monsieur Rocheleau.
M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Je vous remercie de votre témoignage. J'aimerais poser une question complémentaire. Lorsque vous parlez de compensation et de réduction de la taxe, avez-vous une idée des montants que cela peut représenter pour vous et pour le gouvernement?
[Traduction]
M. Kevin Psutka: D'après nos estimations, la réduction de la taxe d'accise sur le carburant entraînerait des économies pour la communauté de l'ordre de 10 à 15 millions de dollars par année, et les redevances que nous négocions avec NAV CANADA actuellement sont du même ordre. En fait, lors de la dernière ronde, elles se situaient aux alentours de 12 millions de dollars, mais il est difficile d'obtenir un chiffre exact. C'est dans ces eaux-là de toute façon.
[Français]
M. Yves Rocheleau: Est-ce que cela découle du fait qu'on a privatisé NAV CANADA? À votre avis, cette privatisation a-t-elle eu des effets positifs ou si elle vous cause plus de problèmes qu'autre chose?
[Traduction]
M. Kevin Psutka: Parlez-vous de la privatisation du système de navigation aérienne?
M. Yves Rocheleau: Oui.
M. Kevin Psutka: Non. Le milieu de l'aviation a appuyé unanimement le passage d'un système de navigation aérienne exploité par le gouvernement à un système privatisé parce que nous estimons qu'il peut être exploité plus efficacement et, en fait, nous commençons déjà à voir des signes de progrès.
Un bon exemple est la taxe de transport aérien. Comme je l'ai dit auparavant, elle rapportait environ 600 millions de dollars par année. Les rapports les plus récents de NAV CANADA indiquent que lorsque la taxe de transport aérien sera enfin éliminée cet automne, la redevance qui sera mise en place par le biais de NAV CANADA sera d'environ 15 p. 100 inférieure à ce qu'aurait été la taxe de transport aérien à la même époque. Nous constatons déjà des économies substantielles depuis le passage à un système de navigation aérienne privatisé.
Nous nous attendons à ce que le secteur des petits aéronefs bénéficie du même genre de traitement quand les redevances seront imposées. Si elles le sont en sus des taxes d'accise que nous assumons maintenant, peu importe à combien elles se montent—12 millions, 15 millions ou 5 millions de dollars—elles vont encore constituer un fardeau additionnel pour ce secteur de l'aviation, auquel le grand secteur n'a pas été assujetti au cours de la transition. Cela s'est fait sans effet sur les coûts. En fait, cela est déjà avantageux pour eux, pour la transition.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Psutka.
Dernière question avec M. Szabo.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Merci.
J'ai écouté ce que vous aviez à dire, mais j'ai également consulté d'autres documents, et je voulais avoir une idée de la dimension.
Tout d'abord, pouvons-nous comparer le rôle joué par les grands transporteurs aériens et les petits aéronefs dans l'industrie de l'aviation et leur utilisation des ressources de NAV CANADA?
M. Kevin Psutka: C'est un problème qui se pose dans notre cas quand il s'agit d'évaluer le coût de l'utilisation du système de navigation aérienne par les petits groupes.
L'une des principales raisons pour lesquelles NAV CANADA n'a pas imposé de redevance aux petits aéronefs dès le début était qu'elle reconnaissait qu'il ne s'agit pas d'un groupe homogène. Il est composé en bonne partie de diverses opérations, depuis le simple citoyen qui utilise une piste de terre jusqu'aux transporteurs régionaux qui transportent des passagers et du fret dans de petits aéronefs. Il est très difficile de quantifier l'utilisation réelle qu'ils font du système par opposition aux grands transporteurs aériens qui, par définition, doivent voler aux instruments, d'une façon très contrôlée, de A à B, et en suivant un horaire. Il est très facile de calculer leur utilisation du système. Dans notre cas, on passe par toute la gamme.
M. Paul Szabo: Dans le système de soins de santé, il existe un concept appelé le poids de l'intensité de la ressource. Il essaie essentiellement d'évaluer quelles ressources techniques sont demandées pour une procédure particulière. Certaines sont automatiques et ne posent pas beaucoup de risques; elles sont routinières par nature. Dans le cas d'autres procédures, la demande exercée sur le système est plus intense. Dans le cas de NAV CANADA, serait-il possible d'évaluer si les usagers de petits aéronefs exigent plus de travail ou posent plus de risques que les appareils commerciaux?
M. Kevin Psutka: Je ne pense pas qu'on puisse établir véritablement un parallèle, parce que le système est établi pour les grands transporteurs aériens. Les petits appareils utilisent ce qui existe. Une très petite partie du système est prévue expressément pour les petits transporteurs. En outre, tout dépend de l'utilisation faite du système par les petits transporteurs aériens. Un pilote privé, par exemple, n'a pas besoin d'utiliser du tout le système pour voler en toute sécurité, donc, je ne sais pas si je pourrais envisager la question du point de vue que vous proposez.
M. Paul Szabo: D'accord. J'aurais donc une dernière question. Il est dit dans ce document que les recettes d'exploitation annuelles par avion de NAV CANADA pourraient se situer entre 250 $ et 750 $. À quel ordre de grandeur avons-nous affaire ici? On dit également qu'il pourrait s'agir de la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Si l'on en est au point où même une somme annuelle de 750 $ puisse faire la différence entre rester en affaire et fermer ses portes ou conserver un avion et s'en défaire, je me demande si les problèmes ne vont pas bien au-delà de la simple question des redevances.
M. Kevin Psutka: C'est certainement le cas. J'aimerais faire un parallèle avec les grandes sociétés du secteur de l'aviation. Depuis que les lignes aériennes ont été déréglementées dans notre pays il y a de nombreuses années, les voyageurs aériens ont bénéficié d'une diminution importante du prix de leurs billets. Aujourd'hui, on peut profiter d'aubaines qui étaient impensables il y a dix ou quinze ans, mais pendant cette même période, l'aviation en général—je parle ici de l'aviation de tourisme et des petits transporteurs commerciaux—a vu grimper constamment les coûts d'exploitation.
Pour avoir une idée des tendances, si vous prenez par exemple le nombre de brevets de pilote qui sont en vigueur aujourd'hui, le nombre de brevets, qui se situait entre 73 000 et 75 000 de 1985 à 1995, a diminué à environ 54 000 ou 55 000 aujourd'hui. Quant au nombre d'appareils, il a diminué d'environ 40 000 ou 45 000 à 28 000 aujourd'hui. Cette situation résulte directement de l'augmentation des coûts de l'aviation. Chaque petite augmentation qui s'ajoute provoque un effritement considérable.
M. Paul Szabo: Merci, monsieur le président.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Szabo.
Monsieur Psutka, je tiens à vous remercier beaucoup de votre exposé réfléchi. Il nous a été très utile et je suis convaincu que nous tiendrons compte de votre point de vue lorsque nous nous emploierons à améliorer leur projet de loi C-26.
M. Kevin Psutka: Je vous remercie de m'avoir écouté.
Le président: Nous allons entendre maintenant l'exposé de la Fédération des cégeps.
Je vous prie de vous approcher.
[Français]
Nous vous accordons 10 minutes pour votre présentation, qui sera suivie d'une période de questions.
M. Réginald Lavertu (président sortant et membre du conseil d'administration, Fédération des cégeps; directeur général du collège Rosemont): Monsieur le président du Comité permanent des finances, madame et messieurs les députés, bonjour et merci de nous avoir invités à participer à cette consultation au sujet du projet de loi C-36.
Permettez-moi de vous présenter la personne qui m'accompagne. Il s'agit de M. Jacques Fortin, directeur des affaires étudiantes et communautaires au cégep de Lévis-Lauzon. Nous sommes ici au nom de la Fédération des cégeps, qui a pour mission de promouvoir le développement de l'enseignement collégial et qui regroupe les 48 collèges d'enseignement général et professionnel du Québec, les cégeps, dont elle est le porte-parole officiel.
Je vais vous tracer en quelques minutes les grandes lignes du mémoire que nous avons préparé au sujet du projet de loi C-36 créant la Fondation des bourses du millénaire. Il s'agit pour nous d'un dossier extrêmement important au sujet duquel nous avons déjà exprimé nos vives préoccupations. Nous pourrons ensuite, mon collègue et moi, répondre ensemble aux questions que vous voudrez bien nous poser.
Je crois qu'il est important tout d'abord de bien vous situer le réseau des cégeps, qui n'a pas d'équivalent à l'extérieur du Québec. Le cégep est une institution d'enseignement supérieur originale qui regroupe la formation préuniversitaire et la formation technique. Des étudiants inscrits dans l'un ou l'autre de ces deux secteurs suivent un ensemble de cours de formation générale commune qui leur permettent d'acquérir les mêmes habilités fondamentales, qu'ils se destinent à l'emploi ou qu'ils poursuivent leurs études. C'est là une des principales caractéristiques de ce modèle.
La création du réseau des cégeps, il y a 30 ans, s'inscrivait dans le vaste mouvement entrepris par le Québec pour rattraper son retard en matière de scolarisation par rapport aux autres provinces canadiennes et à plusieurs pays. Ce choix nous a bien servis. La présence des cégeps dans toutes les régions du Québec a effectivement eu pour effet d'accroître de façon spectaculaire l'accès de la population à l'enseignement supérieur. Le nombre d'étudiants inscrits à l'enseignement ordinaire dans les cégeps a presque quadruplé en 30 ans.
• 1600
En même temps, la formation technique collégiale, qui
est une des réussites du système d'éducation québécois,
a apporté une contribution essentielle au développement
économique du Québec. Les techniciens et les
techniciennes formés dans les cégeps constituent une
main-d'oeuvre de grande qualité très appréciée des
employeurs. Le taux de placement de ces diplômés est
très élevé, ce qui explique l'attrait toujours plus
grand que cette formation exerce sur les jeunes.
Nous sommes fiers de ces succès. Toutefois, il reste beaucoup à faire. Il faut naturellement poursuivre les efforts pour élargir l'accès aux études postsecondaires. Il faut aussi et surtout augmenter la réussite scolaire et les taux de diplômés, qui sont encore insuffisants. Ce défi devrait être stimulant. Il se présente hélas dans un contexte de grande austérité budgétaire qui se traduit depuis plusieurs années, dans les réseaux d'enseignement, par des compressions très lourdes qui menacent directement la qualité de la formation.
Cela m'amène, monsieur le président, mesdames et messieurs le députés, à entrer dans le coeur du sujet et à vous expliquer pourquoi nous nous opposons au projet de loi C-36 tel qu'il est actuellement formulé.
Bien entendu, nous trouvons très louable que le gouvernement fédéral veuille marquer le passage au troisième millénaire en favorisant l'accès à l'enseignement supérieur. C'est un objectif que nous partageons. Toutefois, nous considérons que le moyen retenu et les dispositions prévues pour le mettre en oeuvre dans le projet de loi C-36 ne sont pas du tout adaptés à la situation du Québec. Nous ne sommes pas les seuls à nous opposer à ce projet. Notre opinion est partagée, je vous le rappelle, par un grand nombre d'acteurs du monde de l'éducation du Québec: des représentants des universités et des commissions scolaires, des représentants des syndicats et du personnel travaillant dans ces réseaux et même, ce qui est très significatif, des représentants des étudiants des cégeps et des universités.
Pourquoi cette opposition? Le projet de loi C-36 ne tient aucunement compte de ce que le Québec accomplit depuis 30 ans en matière d'aide financière aux étudiants, de gratuité scolaire, d'accessibilité de l'enseignement supérieur et de limitation de l'endettement étudiant. Le Québec a créé son propre système de prêts et bourses dans les années 1960, ce qui l'a amené à se retirer avec compensation, dès 1964, du Programme canadien de prêts aux étudiants, programme dont toutes les autres provinces font toujours partie.
Ce régime québécois d'aide financière aux étudiants est un des meilleurs au Canada, et même lorsqu'on le compare à celui d'autres pays industrialisés. Il suffit, pour s'en convaincre, de considérer la part du produit intérieur brut consacrée à l'aide financière au Québec et ailleurs. Cette part est de 0,45 p. 100 au Québec, contre 0,38 p. 100 en Ontario et 0,36 p. 100 en Australie. Selon ce qu'en avait conclu un groupe de travail créé par le ministère de l'Éducation du Québec en 1994, l'aide maximale annuelle accordée aux étudiants est supérieure à ce qui est consenti ailleurs, l'endettement des étudiants y est inférieur, et le taux de remboursement est très bon. Il faut rappeler aussi que les frais de scolarité dans les universités du Québec sont les moins élevés dans toute l'Amérique du Nord.
Telle qu'elle est définie actuellement dans le projet de loi, la Fondation des bourses du millénaire viendrait donc faire double emploi avec les orientations, les objectifs et la mise en oeuvre du programme québécois d'aide financière aux étudiants. Ce dédoublement serait d'autant plus inacceptable pour nous que des sommes considérables sont en cause et que les établissements d'enseignement supérieur du Québec sont, je le répète, à bout de ressources.
Je dois ajouter tout de suite que, même si la situation des étudiantes et des étudiants québécois est plus avantageuse qu'ailleurs, cela ne signifie pas pour autant que l'aide financière québécoise couvre tous les coûts engendrés par les études et que les étudiants n'ont aucune difficulté financière. Une enquête récente sur les conditions socioéconomiques des étudiants de cégep montre que, bien au contraire, une proportion encore trop grande d'entre eux éprouvent des difficulté importantes. C'est le cas du quart des étudiants. L'étude indique même que, dans 10 p. 100 des cas, les étudiants ont du mal à assumer leurs besoins premiers en matière de nourriture, de vêtement et de logement. Il y a donc encore sans doute des améliorations à apporter au régime québécois d'aide financière, et les collèges sont très sensibles à cette question.
• 1605
Ce constat ne fait que confirmer à nos yeux le
caractère inadéquat du projet de loi C-36. Il ne
prévoit en effet aucune disposition qui permettrait au
Québec d'affecter les ressources que la Fondation des
bourses du millénaire lui destine en fonction de ses
propres besoins et priorités.
Le projet laisse tout au plus la possibilité de
s'entendre sur la définition de ce que sont les besoins
financiers et de ce qu'est le mérite, et sur la
production de listes de bénéficiaires éventuels des
bourses du millénaire.
Or, le concept du mérite ne fait pas partie des principes de base du régime d'aide financière québécois. Il est au contraire basé sur un principe d'équité qui veut qu'aucune personne ne puisse se voir barrer l'accès à l'enseignement supérieur en raison de ressources financières insuffisantes.
La Fédération des cégeps souhaite donc que le projet de loi C-36 soit amendé pour permettre l'établissement d'ententes particulières avec les provinces. Cela permettrait au Québec de recevoir sa juste part des fonds qui seront confiés à la fondation et de les investir dans son système d'enseignement supérieur, y compris dans l'amélioration de son régime de prêts et bourses. Cette part devrait être fixée en fonction de la proportion des 18-24 ans qui composent sa population par rapport au même groupe d'âge dans l'ensemble du Canada. Le calcul devrait aussi tenir compte de ce que le Québec a investi depuis 30 ans pour assurer la gratuité des études collégiales, pour maintenir les frais de scolarité à l'université à un niveau beaucoup plus bas que dans les autres provinces et pour soutenir financièrement les étudiants les plus démunis.
L'enseignement supérieur au Québec a beaucoup pâti, au cours des dernières années, des compressions budgétaires qui lui ont été imposées et qui découlent, entre autres, de la diminution des paiements de transfert aux provinces par le gouvernement fédéral. Dans le réseau des cégeps, au cours des six dernières années, les compressions se sont élevées à 209 millions de dollars, auxquels il faut ajouter une nouvelle coupure de 56,5 millions de dollars qui sera imposée l'an prochain. Ces coupures ont déjà eu des effets désastreux sur les services directs aux étudiants, qui ont atteint un seuil minimal. Quand on sait que le cégep a une fonction essentielle d'orientation, est-il acceptable que le nombre de conseillers en orientation ait diminué de 40 p. 100 au cours des trois dernières années? Les étudiants doivent attendre des semaines avant de pouvoir consulter un de ces professionnels.
Les cégeps ont perdu 30 p. 100 de leurs aides pédagogiques individuels, 25 p. 100 de leurs techniciens en travaux pratiques et 40 p. 100 de leurs conseillers pédagogiques. Il n'y a plus d'argent pour les bibliothèques, pour l'entretien du matériel informatique, ni pour les technologies de l'information et des communications. Les cégeps sont à bout de ressources et, je le répète, c'est la qualité de la formation qui est directement menacée.
Nous sommes convaincus que les sommes qu'on se propose de confier à la fondation seraient mieux utilisées dans les structures et les programmes qui existent déjà dans l'enseignement postsecondaire québécois. Nous souhaitons vivement que les négociations bilatérales qui se sont engagées entre le gouvernement fédéral et celui du Québec permettent de trouver des solutions acceptables pour tous. Nous pensons qu'il est possible, avec un peu d'imagination, de faire en sorte que la contribution fédérale soit versée au Québec, tout en assurant une visibilité à l'origine canadienne des fonds, cela dans le respect de la compétence provinciale en matière d'éducation. Nous demandons, bien sûr, aux parlementaires canadiens de donner leur appui à ces négociations.
Je vous remercie de votre attention. Nous sommes prêts, mon collègue et moi, à répondre à vos questions.
Le président: Merci, monsieur Lavertu.
[Traduction]
Le premier intervenant sera M. Harris, suivi de M. Crête.
M. Dick Harris: Merci, et je vous remercie de votre exposé, mais je tiens à vous faire remarquer que vous avez probablement perdu la moitié de l'impact de votre exposé parce que nous l'avons reçu—je ne l'ai reçu—qu'en français. Si vous tenez à inclure tous les membres, qu'ils soient bilingues ou non, je vous conseille fortement de fournir un exemplaire en anglais également, monsieur, parce que je dois m'en remettre uniquement à ce que vous venez de dire. Je n'ai pas de documentation en anglais.
Vous avez dit que le Québec souffrait à cause des compressions des sommes transférées pour l'éducation. Je voulais simplement vous faire remarquer que vous n'êtes pas les seuls dans cette situation. En effet, la Colombie-Britannique et toutes les autres provinces souffrent elles aussi à cause des compressions apportées aux paiements de transfert destinés à l'éducation.
• 1610
Même si je ne suis pas un partisan inconditionnel du fonds du
millénaire tel qu'on veut l'établir, je tiens à faire remarquer que
si on devait le répartir, il devrait être réintégré aux paiements
de transfert versés à toutes les provinces pour l'éducation selon
la formule qui existait auparavant et qui tenait compte des
économies des provinces.
Je n'ai vraiment pas de question à vous poser. Je tenais simplement à signaler ces choses et je vous remercie de votre exposé.
Le président: Merci, monsieur Harris.
[Français]
Monsieur Crête.
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Je suis certain que le comité voudra faire traduire le mémoire, comme c'est normalement la règle lorsqu'un texte ne nous est présenté que dans une des deux langues officielles, afin que M. Harris puisse en prendre connaissance.
[Traduction]
M. Dick Harris: Monsieur le président, si vous me permettez. Je ne crois qu'il appartient au comité de s'occuper de la traduction. Je dirais que celle-ci est la responsabilité de ceux qui présentent l'exposé, que ce soit de l'anglais vers le français et du français vers l'anglais. Selon moi, ceux qui font des exposés ne devraient pas imposer au comité le fardeau et les coûts de la traduction.
Le président: Cette question revient constamment sur le tapis. Ceux qui présentent des exposés font de leur mieux. Il leur arrive de ne pouvoir faire traduire le mémoire en anglais ou en français.
M. Dick Harris: Cela s'est produit également ce matin et je ne pouvais pas lire le mémoire.
Le président: M. Crête se retrouve parfois dans la même situation.
M. Dick Harris: Tout à fait, et je crois que nous devrions faire quelque chose.
[Français]
M. Paul Crête: Messieurs Lavertu et Fortin, je vous remercie de votre présentation. Votre mémoire traite de deux thèmes qui m'ont tout particulièrement intéressé et j'aimerais que vous nous en parliez plus longuement. Vous disiez que le programme d'aide financière était l'une des composantes du système d'éducation québécois et comprenait le financement du réseau institutionnel et l'aide financière. Ce système de prêts et bourses qu'on a réussi à développer fait en sorte qu'il y a moins d'endettement étudiant et qu'on a été en mesure d'investir de façon significative dans le réseau institutionnel au fil des années afin qu'il puisse continuer à fonctionner.
J'aimerais que vous insistiez sur le fait que, face aux coupures qui se présentent, l'outil que représenterait la fondation ne contribuerait pas directement à combler les besoins que vous avez identifiés pour les prochaines années en termes d'investissements. Ce ne serait pas votre premier choix. Ce ne serait pas ce que vous auriez le goût de faire.
Vous avez aussi parlé des négociations actuelles entre les gouvernements du Québec et du Canada qui ont été entreprises à la suite de la visite qu'a faite M. Chrétien à M. Bouchard, à la suggestion de ce dernier. Selon vous, qu'est-ce qui serait acceptable pour le réseau des cégeps du Québec, que j'ai le plaisir de connaître particulièrement?
M. Réginald Lavertu: Je vous remercie de faire ressortir la particularité du Québec quant à son programme d'aide financière qui fait partie de l'ensemble de son système d'éducation. Les choix qui ont été faits au cours des dernières années au Québec ont fait en sorte que, comme le démontrent toutes les analyses qu'on a faites, son programme d'aide financière est plus généreux que ceux qu'on retrouve dans la plupart des autres systèmes d'aide financière.
Puisqu'il est à l'intérieur d'une enveloppe de financement qui finance aussi la prestation des services, le problème que pose l'arrivée de la fondation dans le décor, c'est qu'on viendrait dédoubler des choix qui ont déjà été faits au Québec, alors que ce n'est peut-être pas là que le Québec est rendu. Comme nous le précisons dans notre mémoire, certaines améliorations pourraient encore être apportées au système d'aide financière québécois. Mais ce qui nous paraît assuré, c'est que les besoins d'amélioration sont loin d'être du même niveau que dans les autres provinces.
• 1615
Nous avons un système d'enseignement
collégial complètement gratuit, des droits de
scolarité à l'université qui sont les plus bas de toutes
les provinces du Canada et un ratio d'endettement par
étudiant qui est également le plus bas de toutes les provinces du
Canada.
Monsieur le député, je dirais qu'on se retrouve avec une solution qui est à la recherche d'un problème au Québec. On éprouve de sérieux problèmes au niveau du financement du système et nous sommes à la recherche de solutions financières, lesquelles pourraient être trouvées si le Québec pouvait récupérer sa juste part des sommes consacrées aux bourses du millénaire, ce qui répond en même temps à votre deuxième question.
Le résultat acceptable serait un résultat qui permettrait au système d'enseignement postsecondaire québécois de ne pas voir ses efforts dédoublés et qui éviterait que de l'argent ne soit gaspillé par les interventions du gouvernement fédéral. Ce serait également un système qui permettrait que les priorités québécoises soient respectées.
M. Paul Crête: Pour la gouverne du comité, j'aimerais que vous énonciez, en donnant des exemples assez concrets, les compressions qu'a subies le système. Vous avez entre autres parlé de certains types de postes qui ont été touchés par les coupures. Vous serait-il possible de nous donner une image de la situation? Avez-vous estimé la quantité d'oxygène que recevrait la Fédération des cégeps si la part du Québec des bourses du millénaire revenait à la province? Quel en serait l'impact pour les cégeps en région, à Montréal ou dans les autres grandes villes?
M. Réginald Lavertu: Les exemples que je présentais tout à l'heure sont des exemples actuels. Au cours de la prochaine année, une compression supplémentaire de l'ordre de 56,5 millions de dollars viendra s'ajouter aux réductions de 209 millions de dollars que nous avons subies au cours des dernières années. À la fin de la prochaine année, il risque d'y avoir encore moins de conseillers en orientation qu'actuellement. Les aides pédagogiques individuels et les professionnels qui oeuvrent dans les collèges pour aider les étudiants à mieux organiser leur cheminement scolaire, à mieux cheminer vers la réussite de leurs études et à s'y retrouver au cours de leurs études, seront aussi moins nombreux. On a déjà connu une diminution importante, laquelle devrait se poursuivre au cours de la prochaine année.
S'il y avait un rapatriement immédiat des sommes, on pourrait déjà alléger la compression prévue pour l'année prochaine et commencer à réinjecter des sommes en fonction de priorités qui sont aujourd'hui liées à une plus grande accessibilité des études, bien sûr, mais aussi à la réussite de ces études. Il faut recommencer à investir dans l'encadrement des étudiants. C'est sûrement le type de choix qui serait fait au cours des prochaines années si on pouvait récupérer les sommes qui iraient autrement à la bonification d'un régime d'aide financière qui est déjà parmi les meilleurs au monde.
La Fédération des cégeps a fait une étude et vient d'en publier les résultats. On y démontre que 10 p. 100 de nos étudiants ont des problèmes à combler leurs besoins vitaux en matière de nourriture, de logement et de vêtement. Il faut trouver le moyen de faire en sorte que le système aide ces étudiants, mais pas en ayant recours aux mesures prévues dans le cadre de la Fondation des bourses du millénaire, en plus de ce qui existe déjà au Québec. C'est un choix non conforme aux priorités du Québec.
M. Paul Crête: Dans chaque maison d'enseignement collégial, il y a habituellement quelqu'un qui est responsable de l'aide financière et qui est en quelque sorte le lien entre l'étudiant et le système québécois. Quel travail supplémentaire serait requis si on devait, dans le cadre de la Fondation des bourses du millénaire, tenir compte de critères qui seraient différents, notamment de la notion du mérite? Est-ce que vous pourriez étayer votre argumentation?
M. Réginald Lavertu: Cela signifierait une double gestion du système. Actuellement, les personnes qui sont responsables du système d'aide financière dans les collèges doivent gérer l'ensemble des dossiers des étudiants de leur collège. Dans un collège comme le mien, qui compte 3 500 étudiants, quelque 60 p. 100 des étudiants demandent une aide financière. Ainsi, la personne responsable—puisqu'il n'y a qu'une seule personne—gère plus ou moins 2 000 dossiers. Un autre régime de bourses, tel celui des bourses du millénaire, exigerait une double gestion. Les vérifications ne seraient pas nécessairement les mêmes, non plus que la transmission de différentes coordonnées. Cela doublerait l'ensemble du système.
M. Paul Crête: Mais de façon pratique, si on intégrait la notion de mérite dans un système de bourses, il faudrait obtenir des preuves telles que le bulletin scolaire, les résultats obtenus ou différents éléments du genre. Il faudrait remplir un formulaire complètement différent de celui qui existe actuellement pour les prêts et bourses.
M. Jacques Fortin (Fédération des cégeps; directeur des affaires étudiantes et communautaires, cégep de Lévis-Lauzon): À titre d'information, il existe déjà une vingtaine de types de formulaires pour les différentes situations qui peuvent exister pour les étudiants au niveau du régime québécois. Un autre régime de bourses d'excellence viendrait compliquer les choses. On n'a qu'à se rappeler la gestion particulière qu'exigeait le programme des bourses Canada il y a quelques années.
M. Paul Crête: À quand cela remonte-il?
M. Jacques Fortin: Les dernières bourses ont été remises il y a deux ou trois ans.
Le président: Merci, messieurs Fortin et Crête.
[Traduction]
Madame Redman.
En passant, plus tôt aujourd'hui, j'ai omis de vous donner la parole pour la dernière question. Je vous prie de m'en excuser.
Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci. Puis-je poser la question maintenant?
Le président: Oui, allez-y. C'est sans doute la même question, n'est-ce pas?
Mme Karen Redman: Puis-je poser la question?
Le président: Oui, absolument.
Mme Karen Redman: Merci.
Je vous remercie de votre exposé. Cet avant-midi, des groupes d'étudiants sont venus témoigner. Le fait que nous envisageons, par le biais du fonds du millénaire, d'offrir également des bourses aux étudiants à temps partiel était pour eux un sujet de préoccupation. Selon eux, il s'agissait d'une mesure très problématique. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
[Français]
M. Jacques Fortin: Est-ce que vous parlez de bourses qui seraient accordées à des étudiants à temps partiel dans le cadre du régime?
M. Paul Crête: Oui, par la fondation.
M. Jacques Fortin: Je n'ai reçu aucun avis à cet égard. Actuellement, le régime québécois n'accorde pas de prêts et bourses aux étudiants à temps partiel. Ces derniers ont une plus grande disponibilité pour occuper un emploi, ce qui leur permet de mieux subvenir à leurs besoins qu'un étudiant régulier dont l'horaire est restreint en raison de ses heures de cours et qui doit satisfaire à des exigences pédagogiques beaucoup plus grandes.
[Traduction]
Mme Karen Redman: Si vous me permettez de continuer un peu, l'une des choses que le dernier budget a démontrées, selon moi, est le fait que le présent gouvernement veut encourager l'éducation permanente. Prenez par exemple les REEE et les REER et ce qu'ils peuvent faire pour aider les gens qui perdent leur emploi ou qui se voient obligés de changer de carrière plus tard dans la vie à se tourner vers l'éducation à une époque de leur vie où ils ont une famille et d'autres obligations.
J'aimerais approfondir ce point un peu. Les cégeps sont-ils réservés à un certain groupe d'âge, compte tenu du type de financement que pratique le Québec aujourd'hui? Sont-ils réservés exclusivement aux habitants de la province?
[Français]
M. Jacques Fortin: Non, les cégeps sont accessibles aux étudiants de tous les groupes d'âge. Pour y être admis, il faut avoir complété des études secondaires ou obtenu un diplôme jugé équivalent. Les cégeps reçoivent une clientèle adulte qui est au moins équivalente à celle des étudiants dits de l'enseignement régulier, qui ont un cheminement continu après leurs études secondaires.
Vous parliez également des résidants des autres provinces du Canada ou des étudiants qui ne résident pas au Québec. Le Québec a des ententes de réciprocité selon lesquelles il offre aux étudiants de plusieurs pays du monde et des provinces limitrophes du Québec les mêmes conditions qu'à ses étudiants résidants. Les portes des cégeps du Québec sont ouvertes à des étudiants de n'importe quelle partie du monde.
[Traduction]
Mme Karen Redman: Merci.
Le président: Y a-t-il d'autres questions?
[Français]
Monsieur Crête.
M. Paul Crête: Préféreriez-vous qu'on accorde une aide financière à des étudiants dont le revenu n'est pas suffisant, particulièrement à ceux qui vivent en région et qui doivent se déplacer pour aller étudier, ou que l'on accorde des bourses en se fondant sur le mérite, comme se propose de le faire la fondation? Comme réseau collégial, préféreriez-vous que la fondation accorde des bourses selon le mérite ou que l'on vous remette une pleine compensation? J'aimerais que vous illustriez un peu la réalité des étudiants qui sont un peu partout sur le territoire. Souhaiteriez-vous que l'on aide financièrement tous les étudiants qui sont en région et qui ont peut-être des besoins particuliers au lieu d'accorder des bourses selon le mérite? Quel serait l'impact de chacune de ces mesures?
M. Jacques Fortin: Il existe un réseau des 48 collèges qui offrent différents programmes. Puisque tous les programmes ne sont pas offerts dans tous les collèges, certains étudiants, qu'ils soient de la Gaspésie ou de la Côte-Nord, sont obligés de se déplacer, de se loger dans une autre région et de se refaire une vie quasiment afin de poursuivre leurs études.
À titre de renseignement, le régime d'aide financière calcule qu'un étudiant devrait pouvoir compter sur un budget de quelque 7 000 $ à 8 000 $ pour une année scolaire, cela s'il a réussi à travailler durant l'été et à mettre de l'argent de côté pour payer son logement et les frais reliés à ses études, ce qui est possible pour l'ensemble des étudiants du Québec. Donc, ce sont des dépenses qui sont attribuées.
Bien qu'une bourse selon le mérite puisse paraître intéressante, il y a encore, comme l'étude de la Fédération des cégeps l'a démontré, des étudiants qui ont de la difficulté à joindre les deux bouts et qui se privent de choses essentielles, que ce soit de nourriture ou au niveau de leur logement, pour pouvoir poursuivre leurs études, travailler et obtenir un diplôme afin de travailler un jour comme tous les autres citoyens et payer des impôts. À mon avis, c'est ce groupe d'étudiants qu'il faut encourager.
M. Réginald Lavertu: Le principe du mérite ne fait pas partie du système d'aide financière au Québec. Nous recourons plutôt à un critère d'accessibilité afin d'éviter de barrer l'accès à l'enseignement supérieur en raison de ressources financières insuffisantes. Il existe, au niveau des cycles supérieurs, des bourses au mérite et elles sont abondantes.
Permettez-moi de souligner qu'il existe aussi dans tous les collèges un système de bourses au mérite pour les étudiants. Les collèges recueillent des sommes auprès des entreprises et, au moment d'une cérémonie de remise des diplômes ou de fin d'année, ils remettent des bourses de mérite à des dizaines et des dizaines de leurs étudiants pour souligner leur performance exceptionnelle. Je pense toutefois qu'on n'a pas besoin d'un tel principe à l'entrée.
Le président: Monsieur Lavertu et monsieur Fortin,
[Traduction]
nous vous remercions énormément de votre participation. Vous avez apporté à ce dossier une perspective fort utile. Au nom du comité, je tiens encore une fois à vous remercier.
Chers collègues, nous avons épuisé la liste des témoins de la réunion de cet après-midi, qui porte le numéro 73. Nous nous réunirons à nouveau demain, le mardi 28 avril 1998, de 9 heures à 13 h 30, dans la salle 362E de l'édifice de l'Est, pour aborder les parties 1, 9, 11 et 13 du projet de loi C-36?
La séance est levée.