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RNNR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources naturelles


NUMÉRO 109 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 27 septembre 2018

[Enregistrement électronique]

(1105)

[Traduction]

    Bonjour à tous. Merci de vous joindre à nous aujourd'hui.
    Nous commençons notre deuxième séance dans le cadre de notre nouvelle étude sur les ravageurs forestiers.
    Nous accueillons deux témoins, ce matin.
    Nous accueillons par vidéoconférence M. Carroll, de l'Université de la Colombie-Britannique. J'espère qu'il peut nous entendre et nous voir.
    Nous accueillons aussi aujourd'hui Peter Henry, du ministère des Richesses naturelles et des Forêts de l'Ontario.
    Je vous remercie tous les deux de vous être déplacés. Voici le processus: chacun d'entre vous aura jusqu'à 10 minutes pour présenter un exposé au Comité dans l'une ou l'autre des langues officielles.
    Sur ce, monsieur Henry, vous êtes ici, alors pourquoi ne pas commencer par vous? La parole est à vous.
    Je m'appelle Peter Henry. Je suis gestionnaire des guides forestiers et de la sylviculture du ministère des Richesses naturelles et des Forêts de l'Ontario. Je suis heureux de vous parler au nom du ministère des activités de gestion des ravageurs forestiers en Ontario.
    L'Ontario partage certainement votre intérêt pour la protection de nos forêts afin de s'assurer qu'elles peuvent continuer de procurer tous les avantages qu'elles fournissent à la société et à l'environnement. Nous avons la chance de compter sur un vaste paysage forestier sur lequel nous comptons pour générer des avantages économiques et écologiques pour la province, pour le secteur forestier et pour tous ceux qui profitent de l'existence des forêts.
    Le secteur forestier en Ontario compte pour plus de 15,3 milliards de dollars au sein de notre économie provinciale et crée 150 000 emplois directs et indirects. La durabilité du secteur forestier est cruciale pour la durabilité d'un grand nombre de collectivités au sein de la province ainsi que pour le bien-être de la province.
    L'Ontario s'inquiète de l'évolution des populations de ravageurs forestiers indigènes, comme la tordeuse du pin gris et la tordeuse des bourgeons de l'épinette. Nous sommes actuellement aux prises avec une infestation de la tordeuse du pin gris dont les problèmes se sont multipliés six fois au cours de la dernière année. On s'apprête à mener des consultations publiques en Ontario au sujet d'un possible programme de lutte contre cet insecte précis, et c'est donc un sujet que nous avons très présent à l'esprit.
    On a également constaté des répercussions des anciennes éclosions de la tordeuse des bourgeons de l'épinette en Ontario liées à la situation des feux de forêt cet été. Ceux d'entre vous qui vivent en Ontario ont probablement entendu beaucoup parler des incendies. Une partie de ces incendies ont été exacerbés par les dommages passés causés par la tordeuse des bourgeons de l'épinette.
    Enfin, nous sommes préoccupés par les ravageurs forestiers qui ne sont pas encore présents en Ontario. Vous allez entendre parler du dendroctone du pin ponderosa. Nous sommes bien sûr préoccupés par cet insecte et la possibilité qu'il migre vers l'est à travers le pays. J'ai pris un certain nombre de mesures, ce dont je parlerai.
    Je vais maintenant vous fournir un aperçu de notre cadre législatif et stratégique lié à la gestion des ravageurs, du rôle de la science dans le cadre de notre programme de lutte antiparasitaire et du rôle des partenariats.
    Nous reconnaissons que les insectes et les maladies indigènes jouent des rôles écologiques importants dans les forêts ontariennes. Par exemple, ils aident à renouveler les forêts en favorisant les conditions de régénération. Cette perturbation est essentielle au bien-être de nos forêts. Ils fournissent aussi beaucoup de ressources alimentaires pour des animaux comme les oiseaux, les parulines, par exemple. Lorsque sont réunies des conditions d'éclosion, il y a d'autres espèces qui en bénéficient. Notre cadre stratégique reconnaît les rôles positifs joués par les ravageurs forestiers. De plus, notre cadre tient compte du besoin de limiter les dommages causés par ces ravageurs.
    En fait, notre cadre permet d'assurer la durabilité de nos forêts de la Couronne. La Loi sur la durabilité des forêts de la Couronne est notre principal texte législatif. Les principes de cette loi consistent à conserver des forêts de la Couronne, qui sont grandes, saines, diversifiées et productives tout en assurant leur santé et leur vigueur à long terme. Notre programme de lutte antiparasitaire vise à appliquer ces principes et, par le fait même, à contribuer à la durabilité de nos forêts.
    L'Ontario est aussi touché par des ravageurs forestiers envahissants qui ne sont pas indigènes aux forêts de l'Ontario. Les ravageurs envahissants peuvent représenter une menace immédiate et grave à nos forêts parce qu'ils n'ont souvent pas d'ennemis naturels et parce que nos arbres n'ont pas à adopter de mécanisme de défense pour lutter contre ces espèces envahissantes: en 2015, l'Ontario a adopté la Loi sur les espèces envahissantes afin de renforcer notre capacité de composer avec les menaces posées par ces espèces envahissantes.
    Notre programme de lutte antiparasitaire inclut des activités de contrôle et de production de rapports structurés pour détecter et documenter les ravageurs forestiers et les dommages causés à l'échelle du paysage, un soutien scientifique pour que l'on puisse s'assurer de compter sur les meilleurs renseignements et les meilleures techniques accessibles, comme les techniques de relevés, le dépistage des ravageurs, la recherche sur les options en matière de gestion et les pesticides et un solide système de planification publique pour encadrer les programmes de lutte antiparasitaire. En cas d'éclosion de ravageurs, nous évaluons les mesures de contrôle, et il y a aussi un processus de planification public associé à ces efforts avant la prise de quelque mesure que ce soit.
    Notre programme de lutte antiparasitaire s'appuie entièrement sur la science. La science nous fournit les méthodes pour détecter les ravageurs et prévoir les tendances en matière de population, et cette information est importante au moment de soutenir les décisions en matière de gestion devant mener à la prise de mesures. Nous nous appuyons sur la science pour mettre au point et évaluer des techniques de gestion, c'est-à-dire pour déterminer de quelle façon nous devons intervenir face aux ravageurs. Il peut s'agir de recherches sur les pesticides, de techniques de sylviculture permettant de réagir à la présence des ravageurs ou de mesures efficaces de prévention du déplacement des ravageurs.
(1110)
    L'Ontario soutient des activités scientifiques avec un large éventail de partenaires, y compris le Service canadien des forêts, d'autres provinces, des États et le milieu universitaire. Par exemple, nous avons participé à un projet sur cinq ans du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie intitulé « Turning risk into action for the mountain pine beetle epidemic ». L'Ontario estimait qu'il était important de participer à ce projet et de le soutenir afin de s'attaquer au risque d'un déplacement vers l'est du dendroctone du pin ponderosa. Puisque cet insecte passe du pin tordu aux forêts à pins gris — potentiellement, tandis qu'il se déplace vers l'est —, la dynamique associée à ce ravageur pourrait être différente.
    Nous avons évalué activement les mécanismes potentiels pouvant être enclenchés tandis que l'insecte trouve de nouveaux hôtes. Nous avons transporté du matériel forestier vers l'ouest pour voir s'il était susceptible. Nous transportons des grumes de notre pin blanc de l'Ontario dans l'Ouest pour voir si le dendroctone du pin va s'y reproduire et s'y maintenir. Cette situation est certainement préoccupante pour nous, et nous prenons des mesures proactives.
    Les partenariats sont importants parce que les ravageurs forestiers ne connaissent pas les frontières provinciales ni les limites de compétences, et c'est là assurément un défi auquel nous sommes confrontés lorsqu'il est question des ravageurs envahissants. Le gouvernement fédéral a certaines responsabilités par l'intermédiaire de l'Agence canadienne d'inspection des aliments relativement à certains de ces ravageurs forestiers envahissants. Les ravageurs autochtones relèvent de la compétence d'autres intervenants, et nous travaillons donc sur ces ravageurs autochtones. Le dendroctone du pin ponderosa est une espèce qui passe entre les mailles du filet, puisqu'il s'agit selon nous d'une espèce indigène non pas à l'Ontario, mais à d'autres régions du Canada. Pour l'ACIA, il s'agit d'un ravageur indigène, tandis que pour nous, en Ontario, ce n'en est pas un. Il s'agira d'une difficulté.
    Sur une note positive, lorsque nous devons composer avec des problèmes de ravageurs, tout le monde participe pour essayer de régler les problèmes.
    De toute évidence, les partenariats sont une façon efficiente de soutenir la science et de réaliser des activités de gestion des ravageurs forestiers. Grâce aux partenariats, nous sensibilisons les gens aux ravageurs forestiers et à leur incidence. Nous renforçons notre capacité de détecter ces ravageurs forestiers et nous assurons une coordination des mesures entre les sphères de compétence. En travaillant ensemble, il reste à espérer que nos contrôles et nos interventions sont plus efficaces.
    Les partenariats aident à améliorer notre compréhension scientifique des relations entre les ravageurs et les hôtes, ce qui mène à des améliorations en matière d'évaluation des risques — de quel ravageur devrait-on s'inquiéter et à quel moment — ainsi que de nos méthodes de surveillance et de protection des ressources. Nous misons sur des partenariats actifs avec un assez grand nombre de groupes, mais je vais tout de même vous fournir deux ou trois exemples. Il y a entre autres l'Agence canadienne d'inspection des aliments. L'Ontario est l'hôte d'un groupe de travail sur la gestion des phytoravageurs critiques, qui réunit des organismes provinciaux et fédéraux aux besoins similaires. Nous nous penchons sur la question des ravageurs forestiers.
    Il y a aussi le groupe de travail sur les ravageurs forestiers du Conseil canadien des ministres des Forêts ainsi que l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire. Nous travaillons avec ces entités au sujet des possibles pesticides pouvant servir dans le secteur forestier.
    Nous avons aussi créé un partenariat avec le Service canadien des forêts. Il se trouve que nous bénéficions de la présence du Centre de foresterie des Grands Lacs à Sault Ste. Marie, tout juste au bout de la rue, directement à côté de l'Institut de recherche forestière de l'Ontario. On mise sur une assez bonne collaboration de part et d'autre du parc de stationnement dans les dossiers liés aux ravageurs.
    Comme je l'ai mentionné tantôt, dans le cadre du projet sur le dendroctone du pin ponderosa dont nous sommes un partenaire, nous étions 13 agences, quatre provinces et États, le gouvernement fédéral et cinq universités, et nous tentions tous de mieux comprendre le dendroctone du pin ponderosa et ce qu'il était susceptible de faire ou en quoi sa biologie pourrait changer tandis qu'il se déplace vers l'est. C'est vraiment important pour nous, parce que nous sommes très préoccupés par la menace que ce ravageur précis chemine vers l'est.
    Bien sûr, l'un de nos principaux partenaires en matière de lutte antiparasitaire, pour ce qui est des activités sur le terrain, c'est l'industrie forestière. Ces gens sont là chaque jour — souvent ce sont les premiers — pour déceler si quelque chose a changé ou s'il y a des dommages qu'ils ne s'attendaient pas à voir. C'est essentiellement eux qui permettent de découvrir en premier les problèmes. Ils sont sur le terrain et participent activement à la gestion des forêts pour les gens de l'Ontario — pour ce qui est de notre réalité —, et leurs découvertes sont importantes dans le cadre des activités de détection précoce et d'intervention efficace. Lorsque nous entreprenons un processus de planification, ce sont à coup sûr des partenaires clés dans le cadre de toutes les activités.
    J'ai deux ou trois conclusions à formuler à votre intention.
    Le soutien et la coordination continus des organismes qui participent à des activités de lutte antiparasitaire ou qui sont touchés par des ravageurs sont requis pour nous puissions nous assurer que nos efforts de détection et de surveillance sont couronnés de succès et que nous pouvons détecter ces choses à temps de façon à pouvoir intervenir grâce à la prise de certaines mesures de gestion.
    Il est essentiel de continuer à soutenir l'élaboration d'outils de gestion de façon à ce que nous ayons accès à des outils efficaces et efficients pour nous attaquer aux problèmes des ravageurs forestiers et réduire leur incidence sur le secteur forestier.
(1115)
    Pour terminer, il est essentiel de continuer à soutenir la mise en place de l'infrastructure requise pour réaliser des évaluations des risques liés aux ravageurs, qu'ils soient indigènes ou non, de façon à garantir que nous gérons adéquatement ces risques et ces ravageurs en conséquence.
    C'est certainement un défi clé dans le cas des ravageurs non indigènes, puisque nous devons réaliser beaucoup de travaux en ce qui concerne les risques qu'ils peuvent poser pour la forêt, parce que c'est quelque chose que nous n'avons jamais vu auparavant. On ne sait tout simplement pas quelles répercussions une bonne partie de ces ravageurs pourraient avoir, mais l'infrastructure associée aux activités d'évaluation des risques des ravageurs fondées sur la science est importante pour nous de sorte que nous puissions élaborer des mesures de gestion et réagir à tout ça.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Carroll.
    J'aimerais prendre quelques instants pour décrire le rôle du climat et des changements climatiques dans les perturbations forestières, et je ferai quelques références spéciales au dendroctone du pin ponderosa et à l'avenir de la situation.
    Comme M. Henry l'a souligné, les perturbations naturelles font partie des écosystèmes forestiers et, en effet, ils sont une partie intégrante de ces écosystèmes. En outre, ils peuvent avoir une incidence sur des milliers ou des millions d'hectares de forêts canadiennes chaque année. Cependant, ce qui semble contre-intuitif pour la plupart des gens, c'est que les répercussions des insectes dans les forêts canadiennes sont beaucoup plus importantes que celles associées aux feux de forêt. Comme je l'ai dit, c'est une réalité qui est contre-intuitive, et ce, en grande partie, bien sûr, parce que les feux de forêt attirent beaucoup l'attention des médias.
    Ce que nous avons constaté, c'est que les insectes causent la mortalité des arbres sur une superficie beaucoup plus grande que le font les feux de forêt, chaque année et, bien sûr, l'incidence que ces répercussions peuvent avoir en cas de feux de forêt subséquents est une grande préoccupation, surtout vu les impacts en Colombie-Britannique au cours de la dernière année relativement à la charge de combustibles découlant très probablement de l'invasion du dendroctone du pin ponderosa avec laquelle la province est aux prises depuis deux ou trois décennies.
    Il y a des données probantes selon lesquelles les perturbations causées par les insectes dans les forêts s'aggravent. En fait, depuis environ 1980, environ 50 millions d'hectares de plus dans l'Ouest de l'Amérique du Nord ont affiché un niveau quelconque de mortalité causé par les scolytes, dont le dendroctone du pin ponderosa fait partie.
    La question qui se pose, et c'est une question sur laquelle je vais me concentrer, tout comme certains de mes collègues — les rares d'entre nous qui se pencheront sur ces enjeux —, c'est si le changement climatique exacerbera ces répercussions à l'avenir.
    Comme vous pouvez vous y attendre, c'est une question difficile, mais nous pouvons en fait tirer des leçons et des connaissances des études qui ont porté sur un passé très lointain, il y a des millions d'années. De récentes données probantes montrent, à la lumière de données probantes fossilisées sur la perturbation des insectes dans les forêts, que, à mesure que les températures augmentent, les perturbations augmentent aussi. Nous avons toutes les raisons de croire que, à mesure que notre climat continuera de changer, nous serons aux prises avec des niveaux accrus de mortalité causée par les insectes ou de perturbations causées par les insectes dans les forêts canadiennes.
    À ce sujet, nous commençons aussi à avoir accès à des données probantes, de nouvelles données selon lesquelles, dans l'Ouest canadien, le réchauffement du climat a eu une incidence sur le dendroctone du pin ponderosa, le dendroctone de l'épinette et, en fait, la tordeuse occidentale de l'épinette. En réalité, nous continuons de travailler sur ce dossier tandis que nous nous concentrons de plus en plus sur la question.
     Le réchauffement du climat peut avoir une incidence sur les perturbations des forêts de deux façons principales qui ne sont pas mutuellement exclusives. En ce qui concerne la première, il appert que, pour les espèces limitées à certaines zones, le réchauffement climatique peut, en fait, créer de nouvelles zones habitables, permettant à ces espèces de pénétrer dans de nouvelles régions qu'elles ne pouvaient pas occuper précédemment. Le dendroctone du pin ponderosa est le meilleur exemple à cet égard.
    La deuxième façon concerne les espèces omniprésentes, en d'autres mots, celles qu'on retrouve partout où on retrouve leur arbre hôte. La tordeuse du bourgeon de l'épinette en est un exemple, tout comme le dendroctone de l'épinette, d'ailleurs. Dans ce cas précis, nous remarquons que, dans un environnement qui se réchauffe, les éclosions elles-mêmes qui sont associées à ces espèces ont tendance à empirer en ce qui concerne la fréquence, la gravité et la durée. À cet égard, le dendroctone de l'épinette au Yukon et dans le Nord de la Colombie-Britannique est un très bon exemple.
    J'ai mentionné que j'allais me concentrer un peu sur le dendroctone du pin ponderosa et je sais que c'est un enjeu important, un enjeu sur lequel je me suis beaucoup penché. En effet, M. Henry a mentionné le TRIA-Net. Je suis l'enquêteur principal de ce réseau précis ainsi qu'un chargé de thème.
     Le dendroctone du pin ponderosa est peut-être le premier et le meilleur exemple en ce qui a trait aux répercussions liées au climat prenant la forme de perturbations forestières au Canada.
    Il est important de souligner que c'est un problème qui découle en réalité de deux ou trois choses. La première et la plus importante est notre succès en matière d'extinction des feux de forêt dans l'Ouest. Nous sommes devenus très bons pour éteindre les feux de forêt partout au Canada et particulièrement en Colombie-Britannique au point où nous avons quasiment éliminé les feux de forêt — sauf au cours des deux ou trois dernières années — dans les écosystèmes dominés par le pin. Cette situation a causé une augmentation du nombre d'arbres plus âgés, qui sont une source alimentaire de prédilection pour le dendroctone du pin ponderosa.
    Ce faisant, en l'absence de changements climatiques, nous avons créé un véritable buffet pour le dendroctone du pin ponderosa et avons effectivement permis aux populations de cet insecte d'atteindre des niveaux sans précédent.
(1120)
    De plus, le deuxième facteur de cette importante épidémie est le réchauffement du climat, qui a permis aux dendroctones de mieux survivre. Cela leur a permis d'élargir leur territoire, comme je l'ai mentionné précédemment. Ce territoire s'est élargi au point où les dendroctones ont traversé les Rocheuses et ont commencé à se répandre en Alberta.
    En fait, au cours des dix années ou plus depuis que cet insecte a pénétré du côté est des Rocheuses, il a continué à s'étendre à l'ensemble de l'Alberta, et il se trouve maintenant directement à la frontière de la Saskatchewan. Dans le champ de tir aérien de Cold Lake, nous avons déjà détecté une population, ce qui est très préoccupant.
    Vu le travail que j'ai effectué avec certains collègues liés au TRIA-Net, le programme parrainé par le CRSNG auquel j'ai participé, nous pouvons conclure de façon assez certaine que, tant que les populations restent en phase d'éclosion — en d'autres mots, tant que les populations sont importantes et agressives — une expansion vers l'Est reste très probable. Les dendroctones durant cette phase précise sont capables de trouver et d'attaquer avec succès des pins gris sans trop de problèmes.
    La différence, cependant, c'est que, si les populations peuvent s'effondrer, si nous réussissons à ralentir leur expansion au point où les populations de dendroctones reviennent à un niveau sous épidémique ou à un état endémique, alors la propagation devient beaucoup moins probable. En fait, selon certaines nouvelles données probantes de mon laboratoire, la persistance à long terme de populations du dendroctone du pin ponderosa en phase sous épidémique dans ces nouveaux habitats de pins est en fait très peu probable en raison de la compétition venant d'autres aspects de ces forêts.
    Le dernier point que j'aimerais souligner, c'est que le gouvernement de l'Alberta a en fait affecté beaucoup de ressources, environ un demi-milliard de dollars, pour ralentir la propagation du dendroctone du pin ponderosa au cours des 10 ou 12 dernières années, assurément depuis 2006.
    J'ai récemment terminé une étude, financée en partie par le gouvernement de l'Alberta, qui visait à déterminer si ces efforts ont été efficaces. Nous pouvons conclure que, oui, effectivement, ils l'ont été. Les efforts de l'Alberta ont permis de ralentir de façon importante la propagation du dendroctone du pin ponderosa. C'est quelque chose de très important, surtout à la lumière du point que je viens de soulever il y a un instant sur l'effondrement des populations et le retour à un niveau endémique. Si nous pouvons continuer de nous concentrer sur le dendroctone du pin ponderosa afin de ralentir sa propagation, alors nous pourrions être assez chanceux pour voir ces populations s'effondrer enfin et amorcer une phase sous-pandémique et, par le fait même, réduire de façon importante, essentiellement, la probabilité d'une propagation vers l'est.
    Pour terminer, j'aimerais conclure en rappelant ce que j'ai dit au sujet dendroctone du pin ponderosa, soit qu'il était peut-être le premier et le meilleur exemple des répercussions du changement climatique. Cependant, ce n'est qu'une espèce parmi toute une série d'espèces qui sont susceptibles de réagir à un environnement qui se réchauffe en augmentant les perturbations qu'elles causent dans les forêts canadiennes. En fait, nous sommes en présence d'un canari dans une mine de charbon, dans la mesure où des perturbations futures associées à d'autres espèces sont susceptibles de se produire.
    Merci beaucoup.
(1125)
    Merci, monsieur Carroll.
    Monsieur Hehr, vous allez commencer.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous deux de nous avoir présenté vos exposés.
    Ma question est destinée à M. Carroll. Je représente Calgary-Centre, alors je connais très bien le dendroctone du pin ponderosa et ses ravages en Alberta au cours des 15 dernières années. Vous avez indiqué avoir constaté le déplacement de cet insecte vers la frontière de la Saskatchewan. Je souligne aussi que vous avez dit que certaines stratégies d'intervention fonctionnaient en Alberta.
    Pourrions-nous reprendre certaines de ces stratégies en Saskatchewan et en Ontario en tant que mesure de prévention pour essayer de lutter dès maintenant contre la propagation?
    En bref, la réponse, c'est oui.
    Il convient de souligner que les efforts de l'Alberta jusqu'à présent visaient principalement à tuer directement le dendroctone du pin ponderosa afin d'en réduire la population. Ce sont ces efforts qui ont eu une incidence sur le ralentissement de la propagation. Cela dit, l'Alberta mise aussi sur ce qu'elle appelle sa stratégie pour des pins sains, dans le cadre de laquelle elle tente de miser davantage sur la coupe de pins matures et le rétablissement d'une diversité dans le paysage, comme on pourrait s'y attendre dans le cadre d'un régime normal de contrôle des feux de forêt. La Saskatchewan a aussi, dans une certaine mesure, opté pour de telles mesures.
    Il convient de souligner que le gouvernement de la Saskatchewan a en fait aidé l'Alberta dans le cadre de ses efforts pour ralentir la propagation du dendroctone du pin ponderosa.
    La réponse plus longue consisterait à dire que, en effet, tout ce qu'on peut faire pour réduire la susceptibilité des forêts aux limites orientales de la propagation du dendroctone du pin ponderosa serait utile.
    J'ai aussi remarqué dans votre exposé que vous avez dit que la lutte contre les feux de forêt avait joué un rôle en permettant la propagation des insectes et du dendroctone du pin ponderosa.
    Avons-nous commencé à modifier nos activités de lutte contre les feux de forêt et que faisons-nous à ce sujet au sein du gouvernement national et des gouvernements provinciaux pour nous pencher de plus près sur cette question.
    C'est assurément une question sur laquelle nous nous penchons. Avons-nous modifié nos pratiques? Pas encore. Pour l'instant, nous n'avons pas la capacité de le faire de façon efficace.
    Le problème devant lequel nous nous trouvons maintenant — l'étape à laquelle nous en sommes actuellement — est en fait le produit de nombreuses décennies d'activités efficaces de lutte contre les feux de forêt; ce n'est donc pas une situation que nous pourrons renverser du jour au lendemain. En fait, les répercussions qu'a eues le dendroctone du pin ponderosa en Colombie-Britannique, en causant toute cette mortalité sur environ 16 millions d'hectares de forêt dominée par le pin, ont en fait entraîné une augmentation de la charge de combustibles dans ces forêts au cours des deux derniers étés, même si les données appuyant cette déclaration continuent de nous arriver.
    Tandis que nous progressons vers l'est et que nous commençons à nous retourner pour regarder la situation en Colombie-Britannique, toute administration qui gère actuellement les forêts de pins — ou n'importe quel autre type de forêt, d'ailleurs — doit commencer à réfléchir à la démographie de ces forêts en ce qui concerne leur susceptibilité aux insectes. Si les forêts sont débalancées comme on pourrait s'y attendre à la suite de l'application d'un régime de lutte contre les feux de forêt passé, alors il est très probable qu'il y aura là de la très bonne nourriture pour les insectes à l'avenir.
    J'ai aussi remarqué que vous avez effectué des recherches sur des éclosions passées, remontant aux archives glaciaires et aux fluctuations climatiques du passé.
    Avez-vous constaté dans le cadre de ces recherches des données probantes liées au dendroctone du pin ponderosa et à la présence de ces types de larves dans nos profils géologiques antérieurs? Est-ce que certains aspects de ces recherches jouent un rôle dans ce que nous faisons aujourd'hui?
    Nous avons des données probantes de l'activité du dendroctone du pin ponderosa il y a plus de 8 000 ans dans l'Ouest de l'Amérique du Nord. Ces données probantes s'appuient principalement sur des morceaux fossilisés d'insectes recueillis dans des lacs. Tout ce que cela peut vraiment nous dire, c'est qu'il y avait des dendroctones du pin ponderosa à ce moment-là, et nous ne pouvons que présumer qu'ils faisaient à l'époque ce qu'ils font encore aujourd'hui.
    Les autres études auxquelles j'ai fait référence se sont penchées sur des données probantes fossilisées d'autres types de perturbations causées par des insectes remontant à aussi loin qu'il y a 56 millions d'années, à une époque où s'est produit un événement lié au changement climatique similaire au rythme et à la gravité auxquels nous nous attendons aujourd'hui. Dans ce cas précis, il y a aussi eu, à cette époque, une augmentation importante des perturbations dans les forêts.
(1130)
    Ma dernière question s'adresse à vous deux.
    Pouvez-vous cerner des lacunes que le gouvernement fédéral pourrait combler afin d'aider à contrôler ou étudier les ravageurs forestiers?
    Je peux essayer de répondre, et M. Henry pourra peut-être ensuite ajouter quelque chose.
    J'ai travaillé comme scientifique pour le Service canadien des forêts jusqu'à il y a huit ou neuf ans, après quoi j'ai commencé à travailler à l'Université de la Colombie-Britannique. Je connais un peu le gouvernement fédéral et sa structure de recherche forestière.
    En effet, il y a très peu de gens qui font le genre de recherches que je fais. Je pense que ce genre de déclarations s'applique aussi aux scientifiques qui étudient les feux de forêt, par exemple.
    On s'attend vraiment à ce que, au fil des changements climatiques à mesure que l'environnement se réchauffe, ces perturbations générales — qu'elles soient causées par des insectes ou des feux de forêt — s'aggraveront. Selon moi, nous ne sommes pas bien préparés, du point de vue des recherches que nous réalisons — nos capacités, au moins — à l'échelle du pays, qu'on parle des universités ou du gouvernement, à fournir les réponses dont on a besoin pour s'adapter efficacement à ces changements.
     D'accord.
    Je suis d'accord avec ces commentaires, mais je réfléchis aussi à l'élaboration d'approches de gestion qui pourraient être efficaces à l'échelle du paysage. Ce qui s'est produit en Colombie-Britannique et en Alberta concerne des millions d'hectares. Ce n'est pas comme si on pouvait tout simplement aller couper tous les vieux arbres avant l'arrivée des dendroctones. On ne peut pas réaliser des activités de cette envergure, alors il faut réfléchir au genre d'activité qu'on peut réaliser ensemble pour lutter contre la série d'événements perturbateurs à l'échelle du paysage qui s'en viennent.
    Selon moi, dans le cas du dendroctone du pin ponderosa, beaucoup de travail a été fait au sujet de la détection, et c'est l'une des espèces que l'on peut déceler lorsqu'elle est là et qu'elle tue des arbres. L'Alberta a eu beaucoup de succès en chassant cet insecte, en coupant les arbres touchés et en éliminant ces dendroctones. Pour nous, en Ontario, on entrevoit les recherches plus poussées sur la façon dont la dynamique entre les espèces pourrait changer lorsque cet insecte pénétrera dans nos forêts. Nous sommes préoccupés par le sort de nos forêts de pins blancs et de pins rouges, qui ne sont pas encore touchées par le dendroctone, et les répercussions que cet insecte aura là. Nous n'en sommes pas certains, mais c'est ce qui se produit avec une nouvelle écologie, un nouvel écosystème, lorsque l'insecte y pénétrera. Il faut réaliser plus de recherches à ce sujet aussi, et je reviens encore ici aux techniques de gestion. Nous pouvons assurer un certain contrôle sur certaines de nos activités de lutte contre les feux de forêt.
    L'Ontario possède une stratégie de lutte contre les incendies de forêt, et il ne s'agit pas de lutter contre tous les feux de forêt, partout. Cependant, il faut commencer à tenir compte d'autres valeurs des ressources et des choses comme ce qui se produit si l'on tente de gérer l'habitat de caribous, qui exige des forêts plus vieilles. Dans cette optique, il faut conserver des arbres plus vieux, et il faut peut-être qu'il y en ait plus, et ce sont justement ces arbres qui sont susceptibles, comme M. Carroll l'a dit. On en crée plus.
    Il faut trouver un équilibre entre toutes ces choses et les besoins de l'industrie forestière. Dans le cas des responsables de la lutte contre les feux de forêt, ils essaient de protéger la valeur forestière. Autour des collectivités, les gens tentent d'éteindre les feux de forêt de façon proactive. Je crois qu'on en vient à la combinaison des activités pouvant être réalisées et qui peuvent refléter ces autres valeurs que nous tentons de tirer de la forêt et en tenir compte...
    Je vais devoir vous demander de conclure.
    ... au moyen de mesures de gestion précises que nous pouvons réaliser à une échelle raisonnable.
    Merci.
    Merci.
    Monsieur Eglinski.
    J'aimerais commencer par remercier nos deux invités aujourd'hui, M. Henry et M. Carroll. Je crois vous avoir déjà parlé avant depuis ma circonscription de Yellowhead. Je tiens à vous remercier du travail que vous faites.
    Cependant, pour commencer, j'aimerais remercier le Comité d'avoir accepté de réaliser l'étude. Depuis que j'ai été élu, l'un de mes principaux combats à la Chambre des communes, lorsque je pose des questions, concerne le fait que nous devons faire quelque chose pour lutter contre le dendroctone du pin.
    Ma circonscription de Yellowhead est située à l'entrée Est du parc national de Jasper. Nous avons vu le dendroctone du pin arriver du côté Ouest. J'ai travaillé en collaboration avec M. Carroll, l'Université de la Colombie-Britannique et de nombreuses agences, comme le SCF, pour essayer de lutter contre cet insecte.
    Pour vous donner une idée de la gravité de la situation, comme M. Carroll l'a mentionné, nous l'avons tenu à distance en 2013, 2014 et 2015. Nous le faisions en collaboration avec West Fraser, la société, qui consacrait beaucoup de ses propres ressources, ainsi qu'avec la province de la Colombie-Britannique, bien sûr, le ministère de la Foresterie. Nous surveillions les arbres, en coupant ceux qui étaient infectés. En 2017, le nombre d'arbres signalés a décuplé. Cela vous donne une idée de la rapidité avec laquelle certains insectes s'adaptent, et c'est la raison pour laquelle il est selon moi urgent que le gouvernement réagisse.
    Ma première question est destinée à M. Carroll.
    Qu'est-ce que le gouvernement... et je ne parle pas des gouvernements provinciaux. Nous savons ce que la province de la Colombie-Britannique a fait. Elle a dépensé des millions et des milliards de dollars pour combattre le fléau. Nous savons que la province de l'Alberta dépense le plus d'argent qu'elle peut dans son budget pour lutter contre ce fléau chaque année. Vous êtes un ancien scientifique du SCF. Croyez-vous que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer, à part laisser les provinces s'en occuper?
    Je sais que nous réalisons des recherches, et c'est parfait, mais faudrait-il que nous participions au combat afin de mettre fin à tout ça?
(1135)
    Oui. Je crois qu'il convient de souligner que le gouvernement fédéral a déjà consacré beaucoup d'argent à la lutte contre le dendroctone du pin ponderosa, mais ce genre de financement ne s'est pas poursuivi de façon constante au cours des dernières années.
    Non.
    Cela dit, oui, il y a un rôle important à jouer. Le dendroctone est passé de la Colombie-Britannique à l'Alberta et il est maintenant probable qu'il passe de l'Alberta à la Saskatchewan. Je sais que le gouvernement de l'Alberta commence à laisser entendre qu'il ne peut pas maintenir son niveau d'engagement à l'égard du problème comme il le fait depuis 10 ou 12 ans, soit à hauteur d'environ 30 millions de dollars par année. La province donne à penser qu'elle devra mettre la pédale douce.
    C'est quelque chose qui m'inquiète beaucoup, tout simplement parce que, comme je l'ai indiqué, nous avons des données probantes importantes de l'efficacité du contrôle ou du ralentissement de la propagation associée aux efforts du gouvernement albertain. Selon moi, si nous ne maintenons pas la pression sur le dendroctone, la possibilité que nous puissions provoquer l'effondrement des populations et réussir à vraiment empêcher cet insecte de se propager serait grandement compromise si on arrête de déployer ces efforts, si l'Alberta ne peut pas garder le rythme.
    C'est peut-être là le rôle le plus évident du gouvernement fédéral.
    Merci.
    Vous vous penchez sur la question du dendroctone du pin depuis longtemps, depuis la fin des années 1970 si je ne me trompe pas.
    Le dendroctone du pin s'adapte. Il s'adapte très rapidement à un environnement changeant. Je me souviens que, en 2003, lorsque j'étais maire de Fort St. John, on m'a annoncé que j'étais membre du groupe de travail du Nord de la Colombie-Britannique sur le dendroctone du pin et on m'avait dit que cet insecte n'allait jamais traverser les Rocheuses. La science en était là à cette époque.
    Pouvez-vous nous donner des exemples de la façon dont le dendroctone s'est adapté? Je crois que même le type d'insecte qui passe actuellement par Jasper est en fait une combinaison du dendroctone méridional du pin de l'Alberta et de celui du Nord qui se sont réunis et amalgamés.
    Avec tout le respect que je vous dois, tous les enjeux qui vont en ce sens sont un peu de faux problèmes. Le dendroctone du pin ponderosa est incroyablement bon dans ce qu'il fait et il y a beaucoup de variations au sein des populations.
    Je connais les travaux auxquels vous faites référence, et je suis un peu préoccupé qu'on y laisse entendre que nous sommes aux prises avec un genre d'insecte effrayant à la Frankenstein qui évolue et qui causera beaucoup de problèmes. C'est une question scientifique fascinante — croyez-moi — et je crois que les travaux qui ont été réalisés étaient louables. C'était très bien, mais du point de vue de la gestion, je ne crois pas que ce soit vraiment très pertinent, simplement parce que les dendroctones s'attaquent à des arbres et les tuent. Ils le feront tant que les arbres seront là et que le climat leur permettra de persister.
    Pour ce qui est de savoir s'il y a eu des changements dans la nature de ces insectes, la nature du dendroctone, je ne crois pas que ce soit vraiment important, parce que, au bout du compte, les plus vieux pins sont à risque. Les plus vieux pins touchés par les répercussions de la sécheresse et d'autres conditions climatiques sont plus à risque, et dans les endroits où le dendroctone peut résister durant tout l'hiver, les arbres sont encore plus à risque. Ces trois choses ont pris forme ensemble, et le résultat se fait sentir non seulement dans votre région, mais jusque dans les zones de forêts boréales et subboréales en direction de la Saskatchewan.
    Je suis désolé de ne pas m'occuper de vous, monsieur, mais la seule chose que je peux vous dire, c'est que le dendroctone du pin s'en vient alors préparez-vous.
    J'espère que ces travaux aideront à ralentir ce processus.
    J'ai vu l'insecte progresser dans la province.
    Monsieur Carroll, les principes directeurs et politiques d'exploitation de Parcs Canada disent ce qui suit:
Les écosystèmes des parcs nationaux doivent être gérés de façon à nuire le moins possible aux processus naturels.
    On entend constamment dire que le dendroctone du pin est un processus naturel, mais voici ce que précise la phrase suivante:
Cependant, une gestion active peut être autorisée lorsque la structure ou la fonction des écosystèmes ont subi une détérioration grave et qu'une manipulation est souhaitable pour restaurer l'intégrité écologique.
    Je soulève la question parce que vous savez probablement que, si vous roulez du côté Ouest du Parc national de Jasper au côté Est, vous constaterez que c'est brun. Ce n'est plus vert, mesdames et messieurs. C'est brun. Je peux vous fournir les lettres de deux ou trois personnes différentes. La Ville de Jasper est en état de panique en raison des feux de forêt. Les résidents paniquent. Le nombre de visiteurs a diminué parce que tout est brun dans le parc, et, malgré tout, aucune mesure n'est encore prise pour arrêter l'avancée du dendroctone du pin dans le parc. L'insecte a progressé dans le parc. On a pu voir le processus se dérouler au cours des sept ou huit dernières années, et il a maintenant dépassé le parc et il se répand dans l'Ouest de l'Alberta.
    Croyez-vous que des mesures doivent être prises et qu'on pourrait, justement, prendre plus de mesures?
    Je vous mets dans une situation délicate.
(1140)
    Oui. C'est une question complexe, et vous et moi en avons discuté dans le passé. Ce que je vais faire, ici, c'est d'essayer d'être le plus bref possible.
    M. Henry a fait allusion à certains des problèmes liés au dendroctone du pin ponderosa, à sa nature. S'agit-il d'une espèce envahissante ou indigène? Dans le contexte du Parc national de Jasper, toutes les données probantes scientifiques donnent à penser qu'il s'agit d'une espèce envahissante, et, dans ce cas-là, ce n'est pas un agent perturbateur naturel.
    Banff a traité la situation de la même façon, et la région a eu de très bons résultats il y a environ 10 ans pour ce qui est de ralentir la progression dans la vallée de la rivière Bow.
    Oui, c'est vrai.
    Pour ce qui est de savoir ce qu'il faut faire maintenant, Jasper n'a, en fait, plus de problèmes liés au dendroctone du pin ponderosa. Le parc a un problème d'arbres morts. Le dendroctone du pin ponderosa est maintenant le problème de Hinton, et, en fait, il est maintenant rendu dans la zone visée par l'AGF de Sundre, si on ne vous l'avait pas dit.
    Oui, c'est le cas.
    Effectivement, Jasper a un problème d'arbres morts et s'expose à un risque élevé de feux de forêt. Devrait-on faire quelque chose? Bien sûr. Il y a là une collectivité qu'il faut protéger, et je crois que les responsables déploient en fait des efforts pour protéger la collectivité grâce à des projets FireSmart.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Cannings.
    Merci à vous deux d'être là. J'ai environ 50 questions et seulement le temps d'en poser peut-être deux ou trois. Je m'excuse encore une fois auprès de M. Henry, mais je vais commencer par M. Carroll.
    Je viens de la Colombie-Britannique, et le dendroctone du pin est un important problème là-bas dans nos forêts. Je viens de la vallée de l'Okanagan, alors c'est passé juste à côté, mais j'ai observé avec une certaine appréhension les déplacements de l'infestation vers le sud en 2006-2007, lorsque de grandes volées sont passées du plateau Cariboo à la vallée du Thompson.
    Vous venez de dire que Jasper a un problème d'arbres morts. En Colombie-Britannique, c'est pas mal là où nous en sommes rendus. On dirait que l'importante épidémie du dendroctone du pin ponderosa s'est beaucoup atténuée. Je tourne le regard vers l'avenir et je me demande quel rôle le gouvernement pourrait jouer... M. Henry en a aussi parlé, alors je le laisserai formuler des commentaires à ce sujet à la fin. Que devrait-on faire au sujet des stratégies de coupe, des techniques de sylviculture, pour réduire les probabilités que la situation se produise à nouveau?
     Il y avait une composante historique à tout ça, en plus d'une composante climatique, et il y a eu d'immenses feux de forêt il y a 200 ans; on se retrouvait donc avec des monocultures massives, des peuplements d'âge égal de vieux pins qui ont contribué aux problèmes. Nous en sommes maintenant à la phase de replantation. Je sais que le gouvernement de la Colombie-Britannique tente de replanter certaines choses, et il a pris du retard. Ce que je constate, c'est que nous avons besoin d'une plus grande diversité forestière au chapitre des espèces, de la structure et de la répartition de l'âge des arbres. Est-ce qu'on le fait? Constatez-vous qu'on fait ce genre de choses sur le terrain en Colombie-Britannique et qu'on replante des espèces différentes?
    Et la question du climat s'invite aussi. J'ai vu des cartes qui prédisent ce à quoi les forêts de la Colombie-Britannique ressembleront dans 100 ans, et vous avez des pins ponderosa à Vanderhoof.
    C'est une grande question, mais quels sont les genres de choses que nous devrions faire pour l'avenir afin de réduire les probabilités que se reproduisent ces épidémies vraiment dévastatrices du dendroctone du pin ponderosa et d'autres ravageurs forestiers?
(1145)
    Votre question est encore une fois complexe, et je ferai de mon mieux pour être bref.
    Il vaut la peine de souligner que les activités de suppression des feux de forêt ont eu lieu dans la foulée de perturbations importantes qui, essentiellement, ont éliminé les feux de forêt et produit tout un buffet contigu de pins pour le dendroctone du pin ponderosa. En effet, certaines recherches que j'ai réalisées dans le passé ont révélé qu'il y avait environ trois fois et demie plus de pins matures dans la région au début de l'éclosion qu'il y a 100 ans. Cette situation témoigne directement du manque de diversité, comme vous l'avez mentionné.
    Le problème que nous rencontrons dans le cadre de nos importants efforts visant à récupérer les arbres morts, soit que, bien sûr, on ne peut pas garder le rythme vu le nombre d'arbres morts — ce à quoi s'ajoutent les feux de forêt — eh bien, tout ça fait en sorte que nos mains seront liées en ce qui concerne la superficie dans laquelle nous pouvons réellement changer la donne grâce aux activités de coupe. N'oubliez pas que nous sommes tenus, par le Canada, ainsi que la Colombie-Britannique, de remplacer ce qu'on retire des forêts de façon à ce que nos activités de coupe restent durables.
     C'est en fait un problème lié à nos activités de reboisement, parce que le pin tordu reste l'espèce préférée de la plupart des entreprises et l'espèce la plus susceptible d'être remplacée dans la plupart de ces zones. Par conséquent, il est réintégré, et, pourrait-on dire, d'une façon qui n'est pas appropriée dans de nombreuses zones qui font actuellement l'objet de coupe, au point où on risque de voir ce problème se reproduire dans, disons, de 60 à 80 ans.
    Devrions-nous assurer une diversification? Oui, et ce n'est pas seulement la diversité des espèces d'arbres qui compte; il faut aussi garder à l'esprit ce à quoi les sites ressembleront à l'avenir comparativement à ce à quoi ils ressemblent aujourd'hui. Il faut aussi diversifier les structures de nos forêts.
    Une conclusion intéressante que nous avons tirée de notre analyse des données démographiques du pin avant l'épidémie, c'est que si on éliminait les feux de forêt de l'équation, il faudrait augmenter la quantité de coupe à blanc. En effet, et c'est quelque chose qui est difficile à dire à la plupart des gens, nous n'avons pas coupé assez de pin avant l'épidémie. Si on l'avait fait, le paysage aurait été plus diversifié, au moins du point de vue des groupes d'âge, et la probabilité d'une éclosion du dendroctone du pin ponderosa aurait été beaucoup moins élevée.
    À ce sujet, le besoin de couper plus de pin, aurait-il été préférable de couper les pins de façon différente au cours des 50 dernières années et, plutôt que de procéder par coupe à blanc, de miser davantage sur la coupe sélective comme on le fait dans les forêts de pins ponderosa et de sapins de Douglas, là où on coupe beaucoup de vieux arbres qu'on remplace par des plus petits?
    Les grands et vieux arbres qu'on laisse là sont en santé. Ils ne luttent pas autant avec les autres arbres pour l'eau. Les pistes de phéromones sont perturbées. J'ai entendu dire que c'est l'une des techniques de coupe qui auraient amélioré la situation: ne plus procéder à des coupes à blanc et procéder d'une façon différente.
    Absolument. Dans les endroits où le pin tordu aurait été mélangé avec d'autres espèces et, aujourd'hui, dans les endroits où il est actuellement mélangé à d'autres espèces, je recommanderais fortement d'enlever le pin tordu et de laisser d'autres essences dominer la zone.
    Dans d'autres zones, où il y a une présence uniforme du pin tordu — et c'est une très grande zone, le plateau de Chilcotin étant presque uniformément peuplé de pins tordus, du moins dans le passé —, la situation est différente. Dans ce cas précis, ces arbres et cet écosystème sont adaptés du point de vue des feux de forêt et ces feux de forêt sont nécessaires pour assurer le renouvellement périodique des populations.
    Le problème que nous avons, c'est que, en raison des coupes à blanc, nous ne pouvons pas vraiment reproduire le modèle de perturbation des incendies de forêt, parce que nous procédons par blocs de coupe, ces blocs étant limités à 50 hectares, et il y a certaines règles en matière de continuité qui font en sorte que cela crée habituellement un motif de damier. Vous en avez vu si vous avez pris l'avion de Kelowna à Vancouver. C'est un paysage très vulnérable à la propagation des perturbations, que ce soient des insectes ou des feux.
    Historiquement, les feux auraient brûlé surtout des petits lots, mais aussi, à l'occasion, de plus grandes zones de peut-être 10 000 hectares. Malheureusement, je ne crois pas qu'il soit possible de convaincre le public qu'une coupe à blanc de 10 000 hectares serait le meilleur choix du point de vue écologique.
    C'est tout le temps qu'on avait, malheureusement.
    Il me reste environ 20 questions pour vous deux.
    Merci.
    Madame Damoff, la parole est à vous.
(1150)
    Merci, monsieur le président.
    Lorsque j'ai entendu parler de ce que vous étudiez, j'ai été très enthousiaste. Je vais cependant changer de sujet et parler des forêts urbaines.
    J'ai siégé au conseil municipal d'Oakville pendant cinq ans. Le conseil d'Oakville a fait beaucoup de travail concernant les forêts urbaines. Le couvert forestier y est de 27,8 % et il compte 2 millions d'arbres. En outre, on parle d'une valeur structurale de plus de 1 milliard de dollars. Et c'est seulement une municipalité.
    Lorsque j'étais membre du conseil, nous avons été aux prises avec l'agrile du frêne. En raison des changements climatiques, d'événements météorologiques extrêmes et de facteurs comme l'agrile du frêne, et le longicorne asiatique, le prochain ravageur en lice, et un certain nombre d'autres espèces envahissantes causant des ravages, les municipalités sont laissées pour compte. Je sais qu'Oakville dépensait plus de 25 millions de dollars pour composer avec l'agrile du frêne. Nous avions une stratégie, mais Burlington procédait différemment, London aussi, et, comme vous l'avez dit, monsieur Henry, les insectes ne reconnaissent pas les frontières.
    L'une de mes préoccupations, c'est que, pour quelque chose comme l'agrile du frêne, je crois savoir que les recherches sont venues surtout des États-Unis. Nous n'avions pas suffisamment de recherches, ici, au Canada, sur l'agrile du frêne pour pouvoir composer comme il faut avec la situation. Croyez-vous que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer pour améliorer les recherches sur ces espèces envahissantes?
    Monsieur Carroll, je vois que vous hochez la tête. Je vais commencer par vous.
    La plus grande partie des recherches a été menée sous l'impulsion des États-Unis, mais pas mal de mes collègues du Service canadien des forêts et d'autres intervenants du milieu universitaire travaillent directement en collaboration avec des scientifiques américains aussi. En un sens, la science ne respecte pas non plus les frontières à cet égard. Il y a beaucoup d'efforts déployés actuellement. Pourrait-on en faire plus? Absolument, c'est évident.
    L'agrile du frêne est une espèce envahissante particulièrement nuisible. À l'heure actuelle, des collègues me disent que nous pourrions perdre complètement le genre fraxinus en Amérique du Nord, ce qui est effarant. La dernière fois que nous avons vécu quelque chose d'aussi grave que cela, c'était le chancre du châtaigner il y a environ 100 ans.
    Il y a des problèmes importants, pas seulement du point de vue des forêts urbaines, mais aussi de la foresterie en général lorsqu'on pense aux répercussions de l'agrile du frêne. On ne sait toujours pas comment lutter efficacement contre cette espèce. Nous n'avons pas encore vraiment trouvé une façon de composer avec ce problème. À elle seule, cette dernière déclaration témoigne du fait qu'on a désespérément besoin de recherches supplémentaires pour trouver des nouvelles solutions.
    L'une des choses qui se sont apparemment produites à Oakville, c'est que le nerprun commun s'est implanté, il s'agit encore là d'une autre espèce envahissante. Puisque l'agrile du frêne n'est plus là, la lumière pénètre maintenant dans la forêt et, par conséquent, la plus importante croissance du couvert forestier à Oakville entre 2005 et 2015 est venu de l'argousier européen.
    Nous n'avons aucune stratégie pour composer avec la situation, et il n'y a rien pour aider les municipalités à s'attaquer à ce problème. C'est une cascade d'événements qui fait en sorte que, alors même que l'on compose avec la perte du frêne, on se retrouve aux prises avec autre chose.
    Absolument. Les écosystèmes ne sont pas statiques et ils régissent constamment aux perturbations. C'est tout simplement ainsi que fonctionnent les choses, et s'il y a par chance d'autres espèces capables d'exploiter les ressources alors qu'une espèce menacée a abandonné, elles le feront assurément.
    D'après ce que j'ai compris, le longicorne asiatique est le prochain problème qu'on a à l'oeil en Ontario. Oakville participe à la surveillance de cet insecte. Des efforts sont déployés par le gouvernement fédéral.
    L'expérience qu'on a eue à Oakville avec l'agrile du frêne, c'est que le gouvernement fédéral vient, il observe, il affirme que l'insecte est bel et bien là, puis il part. La municipalité reste prise avec le problème alors qu'elle a des ressources limitées pour effectuer des recherches et gérer le problème.
    Monsieur Henry, pouvez-vous formuler des commentaires sur le longicorne asiatique et son incidence?
    Bien sûr. C'est l'un des ravageurs dont s'occupe l'Agence canadienne d'inspection des aliments. L'Ontario participe aussi beaucoup pour soutenir toutes les activités de surveillance.
    L'insecte a été détecté près de l'Aéroport international Pearson. On soupçonne qu'il est arrivé dans du matériel d'emballage n'ayant pas été traité de façon appropriée. Une infestation a été cernée, des milliers d'arbres ont été coupés dans la zone, puis on a procédé à des relevés pendant cinq ans pour essayer de déterminer si on avait exterminé tous les insectes. Par la suite, on a fait une autre découverte, et nous reprenons une autre série d'exercices de surveillance.
    L'un des défis qui sont mis en lumière au sujet des espèces envahissantes — et je parle ici de recherches des États-Unis sur l'agrile du frêne et celles réalisées à d'autres endroits en ce qui concerne le longicorne asiatique —, c'est que nous ne savons pas qu'un insecte peut se retrouver à notre porte, alors nous ne pouvons pas faire les recherches à l'avance.
    Le Service canadien des forêts a fait du travail fantastique concernant l'un des traitements antiparasitaires les plus efficaces contre l'agrile du frêne, traitement qui a été appliqué à Oakville et dans d'autres municipalités, et je parle ici du TreeAzin. C'est un produit qui a été mis au point par le Centre de foresterie des Grands Lacs et qui est utilisé pour traiter les arbres de rue.
    Un autre enjeu que vous avez soulevé, c'est que, dans l'environnement urbain, les arbres sont très précieux. Les techniques de gestion sont totalement différentes de ce qu'on constate dans la forêt. L'environnement urbain est déjà un environnement perturbé, et donc, lorsqu'on retire ces arbres, comme vous l'avez indiqué dans le cas du nerprun commun, une nouvelle espèce envahissante prend le relais. C'est probablement un problème plus prévalent que dans les forêts naturelles, parce qu'il y a d'autres espèces qui sauteraient sur l'occasion.
(1155)
    Une des choses qui était vraiment évidente lorsque nous nous occupions de l'agrile du chêne, c'est que le Québec misait sur un programme provincial, et pas l'Ontario. Je ne dis pas du tout que le travail devrait revenir aux provinces, parce que ce doit être national.
    Je crois savoir que vous n'avez pas de rôle à jouer en ce qui a trait au traitement des arbres dans les municipalités. C'est exact?
    Exact.
    Alors c'est vraiment à chacun de voir. Selon là où on se trouve, au Québec, c'est un programme provincial, en Ontario, c'est quelque chose qui relève de l'échelon municipal. Il n'y a pas de normes à l'échelle du pays sur la façon de composer avec ces espèces envahissantes.
    Le rétablissement sur un processus générationnel. Ce n'est pas quelque chose qu'on surmontera en peu de temps. C'est exact?
    Oui. Si on perd nos arbres vieux de 80 ans, il faudra 80 ans avant de revenir à une situation semblable.
    Merci.
    Malheureusement, nous n'avons jamais assez de temps, mais je tiens à vous remercier tous les deux d'avoir participé aujourd'hui. Votre présence a été très utile.
    Nous allons suspendre rapidement, puis commencer notre prochaine heure.

(1200)
    Nous allons commencer. Nous accueillons deux témoins durant la deuxième heure.
    Nous accueillons M. Bélanger, de l'Association des produits forestiers du Canada et, par téléconférence, M. Briand, de West Fraser.
    Je crois savoir que M. Briand nous a fourni une présentation Powerpoint. Pour l'instant, elle est seulement en anglais. Elle sera traduite, mais, si nous avons un consentement de tous les membres, nous pouvons utiliser la version anglaise pour l'instant en sachant que la version française suivra plus tard. C'est un document reçu à la dernière minute. Sinon, on ne l'accepterait pas. D'accord. C'est parfait. Merci.
    Le processus est le suivant: vous aurez jusqu'à 10 minutes pour présenter votre exposé. Vous pouvez le faire dans l'une ou l'autre des langues officielles. On peut vous poser les questions en français et en anglais. Vous avez des appareils d'interprétation à votre disposition.
    Monsieur Bélanger, vous êtes ici, alors pourquoi ne pas commencer par vous?

[Français]

    Bonjour, chers membres du Comité.
    Je vous remercie de m'avoir invité à témoigner au nom des membres de l'Association des produits forestiers du Canada, ou APFC, mieux connue à Ottawa sous le sigle anglais, FPAC.
    En bref, l'APFC est le porte-parole au Canada et à l'étranger des producteurs canadiens de bois, de pâtes et de papiers. L'industrie canadienne des produits forestiers a un chiffre d'affaires annuel de 69 milliards de dollars et contribue à hauteur de plus de 21 milliards de dollars au PIB canadien.
    L'industrie forestière est l'un des plus grands employeurs canadiens. Elle est active dans 600 collectivités au pays et procure 230 000 emplois directs, d'un océan à l'autre.
    Je vais maintenant parler des ravageurs forestiers en commençant par vous donner quelques éléments de contexte.
    Les insectes jouent évidemment un rôle écologique essentiel dans les forêts canadiennes, mais en cas d'infestation ou d'épidémie grave, ils peuvent détruire des zones commerciales importantes. Ils sont alors considérés comme des ravageurs.
    Le dendroctone du pin ponderosa et la tordeuse des bourgeons de l'épinette sont des ravageurs bien connus depuis longtemps — plus récemment dans le cas du dendroctone —, qui ont causé et qui continuent de causer des pertes économiques considérables. Ces répercussions se font sentir sur plusieurs décennies. Il est donc impératif de prendre toutes les mesures raisonnables pour atténuer ces répercussions.
    La responsabilité de mettre en place des mesures de lutte contre les ravageurs forestiers au Canada dépend de l'endroit où se produisent les infestations ou les épidémie; cette responsabilité peut être provinciale, fédérale ou municipale. On récolte 85 % des volumes de bois en forêt publique. C'est donc principalement la responsabilité des gouvernements provinciaux de mettre en place des mesures de lutte contre les ravageurs.
    Cependant, les gestionnaires provinciaux se fondent sur les informations scientifiques et les techniques de lutte disponibles. Le Service canadien des forêts, ou SCF, est la principale source de soutien scientifique et technologie au pays en matière de lutte contre les ravageurs forestiers.
    Le processus de prise de décisions fondé sur l'évaluation des risques économiques, sociaux et écologiques constitue le fondement de la Stratégie nationale de lutte contre les ravageurs forestiers.
    En somme, ce sont principalement les gouvernements provinciaux qui ont la responsabilité de mettre en place des mesures de lutte contre les ravageurs forestiers, alors que les principaux rôles du gouvernement fédéral sont les suivants: réaliser la recherche sur l'écologie des ravageurs; fournir une expertise en évaluation des risques; et fournir des avis aux aménagistes forestiers et élaborer des outils d'aide à la prise de décisions.
    L'APFC a deux recommandations à faire relativement aux ravageurs forestiers.
    Premièrement, il faudrait que le gouvernement canadien continue d'appuyer la recherche sur les stratégies d'intervention contre les ravageurs forestiers visant à stabiliser les approvisionnements forestiers.
    Les projections actuelles indiquent que les risques de perturbations attribuables aux ravageurs forestiers augmenteront considérablement dans le temps. Si on ajoute à cela les projections de sécheresse, on en vient à prédire que les conditions pourraient faire doubler la superficie des feux d'ici la fin du siècle. Toutes ces perturbations naturelles mettront la majorité des forêts canadiennes à haut risque.
    La prise de décisions éclairées concernant des enjeux de gestion forestière doit s'appuyer sur une étude approfondie du risque permettant de mieux évaluer et de comparer les répercussions probables ainsi que la rentabilité des différentes mesures qu'on envisage de mettre en place.
    Ainsi, l'un des objectifs principaux de toute stratégie d'intervention contre les ravageurs forestiers devrait être de stabiliser les approvisionnements forestiers à court, à moyen et à long terme.
    Pour ce faire, la recherche sur les stratégies d'intervention contre les ravageurs forestiers présente une importance fondamentale et devrait être encore plus appuyée de manière très sérieuse par le gouvernement fédéral.
    Ces recherches devraient notamment porter sur les éléments suivants: les risques posés par l'ensemble des ravageurs forestiers dans une perspective systémique, en tenant compte des autres éléments et perturbations dans l'écosystème; les coûts d'intervention, particulièrement leur rentabilité; la stabilité des approvisionnements forestiers en quantité et en qualité; et elles devraient s'inscrire dans une perspective à long terme, c'est-à-dire pour toute la durée de l'épidémie, dès le début et pendant sa durée projetée.
    La deuxième recommandation vise à ce que le gouvernement canadien appuie un dialogue national sur de nouvelles approches d'aménagement forestier durable et qu'il y participe dans le contexte de l'augmentation de la gravité des perturbations naturelles et des changements climatiques.
    Vu son origine et son ampleur, l'épidémie du dendroctone du pin ponderosa représente un des exemples de conséquences des changements climatiques les plus cités dans le monde.
(1205)
    De même, nous vivons actuellement des années records pour ce qui est des feux de forêts, et ceux-ci semblent s'inscrire dans une « nouvelle normalité » plutôt que de constituer des exceptions.
    Il est donc à prévoir que ces changements iront en s'accentuant, et il sera primordial pour le secteur forestier de faire face à ces défis, de se réinventer, en un mot de s'adapter.
    Or, si on commence à repenser l'aménagement durable des forêts, il sera capital d'évaluer les conséquences de ces changements sur les valeurs clés, comme le rétablissement des espèces en péril et le fait d'aménager nos forêts compte tenu des perturbations naturelles.
    L'APFC cherche à établir un dialogue national qui réunirait un groupe de décideurs de haut niveau venant de l'industrie, des gouvernements, des groupes autochtones, des groupes environnementaux, des syndicats, des universités et des organismes de recherche. L'objectif de l'initiative « La marche des forêts », appelée Forest Forward en anglais, est de dégager un début de consensus national sur de nouvelles approches d'aménagement forestier durable, dans le contexte de l'augmentation de la gravité des perturbations naturelles et des changements climatiques.
    En ce qui a trait plus spécifiquement aux ravageurs forestiers, un tel dialogue national pourrait permettre d'approfondir certaines questions importantes comme celles formulées ci-après.
    Serait-il approprié de favoriser l'intensification de l'aménagement forestier de manière à obtenir de meilleurs rendements, en quantité et en qualité, sur de plus petites superficies, et ce, plus près des usines?
    Cette approche est notamment préconisée par le forestier en chef du Québec, M. Louis Pelletier, dans son récent avis intitulé: « Prévisibilité, stabilité et augmentation des possibilités forestières ». En ce qui concerne les ravageurs, d'une part, le fait de concentrer les investissements sylvicoles permettrait également de concentrer les interventions nécessaires afin de protéger les approvisionnements forestiers. D'autre part, ces stratégies d'intervention contre les ravageurs, dans ce contexte, devraient être adaptées. Par exemple, on sait que les arbres qui poussent plus vite sont plus vulnérables quant aux ravageurs.
    Un autre dialogue national serait pertinent pour déterminer comment on peut faire évoluer le régime forestier. La question se pose ainsi: est-il encore approprié de régénérer les forêts récoltées avec les mêmes essences que celles présentes sur le site avant la récolte? Cela constitue actuellement une obligation juridique dans la plupart des situations. Les conditions climatiques ont déjà changé et affectent déjà la distribution de certaines espèces d'arbres au Canada. Les arbres que l'on régénère aujourd'hui connaîtront fort probablement des conditions climatiques très différentes lorsqu'ils atteindront la maturité dans 40, 50 et 80 ans.
    Ainsi, d'un côté, il serait possible de régénérer les sites avec des semences venant de régions plus chaudes, avec des espèces différentes ou une variété d'espèces. Cependant, d'un autre côté, de tels changements dans la composition des forêts auraient indéniablement des répercussions importantes sur les habitats des espèces animales qui y vivent, et ils pourraient rendre les forêts plus ou moins vulnérables quant aux ravageurs.
    En somme, l'aménagement forestier durable des décennies à venir risque fort d'être différent de celui qui est visé par les régimes forestiers en place. Il apparaît capital de créer plus d'espace de dialogue sur ces questions, de manière à pouvoir faire face aux changements en cours.
    Pour trouver des solutions novatrices au problème des ravageurs forestiers, il sera important de prendre une approche globale et de réfléchir aux liens qui existent entre ces perturbations naturelles et l'écosystème forestier dans son entier, et ce, dans un contexte changeant.
    Le secteur des produits forestiers est un moteur clé de l'économie canadienne. Il est impératif que le gouvernement mette en place des mesures pour favoriser sa stabilité.
    Je serai heureux de répondre à vos questions.
    Je vous remercie, monsieur le président.
(1210)

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur.
    Monsieur Briand, la parole est maintenant à vous.
    Je m'appelle Richard Briand. Je suis forestier en chef des opérations de West Fraser en Alberta. Je suis un forestier professionnel agréé en Alberta comptant 27 ans d'expérience professionnelle dans les forêts albertaines. Je vous remercie de me donner l'occasion d'être ici aujourd'hui.
    West Fraser est une entreprise nord-américaine diversifiée de produits du bois qui compte 45 installations dans l'Ouest canadien et le sud des États-Unis. Nos principaux produits incluent du bois d'oeuvre, du contre-plaqué, des panneaux de fibre de densité moyenne, du bois de placage stratifié, de la pâte, de l'énergie verte, du papier journal et des copeaux de bois.
    Nous exerçons nos activités de façon continue dans l'ouest canadien depuis 1955. Nous avons investi plus de 1 milliard de dollars dans nos opérations canadiennes de 2013 à 2017, et nous continuons nos investissements en 2018. Nous exploitons actuellement 25 séries dans 10 collectivités de l'Alberta et huit collectivités de la Colombie-Britannique. Nous comptons plus de 5 000 employés directs au Canada.
    En raison de la nature de nos opérations, nous oeuvrons dans des plus petites collectivités où nous sommes souvent le principal employeur. Des collectivités comme Fraser Lake, en Colombie-Britannique, qui compte 988 habitants, et Manning, en Alberta, qui en compte 1 183, dépendent de notre entreprise comme source d'emploi, et nous sommes très fiers d'être un employeur stable et à long terme.
    La principale matière première de nos installations est le bois de conifères, principalement le pin tordu et l'épinette blanche. Nous sommes déterminés à appliquer des principes de gestion forestière durable et nous gérons la valeur du bois et des produits non ligneux dans nos zones d'exploitation.
    L'infestation actuelle du dendroctone du pin ponderosa dans l'ouest canadien a une incidence négative importante sur nos opérations. Il tue du bois précieux — précieux non seulement du point de vue économie, mais aussi en raison de la vaste gamme de biens de service écologiques qu'il offre, comme l'eau, l'habitat faunique, les possibilités récréatives et la séquestration du carbone.
    L'infestation actuelle du dendroctone du pin ponderosa a commencé en Colombie-Britannique en 1999, et on en ressent encore les répercussions de nos jours. Les deux années de feux de forêt record en Colombie-Britannique en 2017 et 2018 découlent, en partie, de cette infestation. Les arbres tués par le dendroctone du pin ponderosa ont contribué à l'accentuation des risques d'incendie, et ces feux de forêt ont menacé des milliers de résidences et touché la vie et les moyens de subsistance de nombreux résidents de la Colombie-Britannique.
    La récupération du bois d'oeuvre économiquement viable en Colombie-Britannique était essentiellement terminée, et la réduction des niveaux de coupe de bois d'oeuvre sont éminentes, ce qui entraînera des fermetures d'usine et de la perte d'emploi.
    En 2006 et 2009, il y a eu des envolées importantes de dendroctone du pin ponderosa en Alberta, ce qui a entraîné l'infestation dans des régions du Nord de l'Alberta où on n'avait jamais vu cet insecte avant. Avant 2006, la plupart des experts croyaient que le dendroctone du pin ponderosa n'allait jamais passer de la Colombie-Britannique en Alberta par les Rocheuses. Les experts croyaient aussi que le climat plus froid de l'Alberta n'allait pas être propice à la survie du dendroctone du pin ponderosa. Ils avaient tort.
    Immédiatement après avoir pris connaissance de la propagation du dendroctone du pin ponderosa en Alberta, le gouvernement albertain a lancé un programme dynamique de contrôle et demandé aux entreprises de modifier leurs plans de coupe pour cibler les pins vulnérables. Reconnaissant la sagesse derrière cette initiative, en 2006, West Fraser a adopté cette nouvelle approche en matière de gestion forestière, qu'on a appelée la « stratégie pour des pins sains ». Par conséquent, la grande majorité de nos coupes de bois d'oeuvre dans les contre-forts visent, depuis 2006, des peuplements dominés par les pins, mais nous avons aussi investi beaucoup de ressources dans le contrôle direct de peuplements infestés grâce à des opérations de coupe individuelle au niveau des peuplements. Au cours des dernières années, tout le bois que nous avons coupé dans la région du centre ouest de l'Alberta s'est fait dans des peuplements infestés par le dendroctone du pin ponderosa.
    De 2007 à 2010, le gouvernement fédéral a versé tout juste un peu plus de 18 millions de dollars pour soutenir les efforts de contrôle en Alberta. Jusqu'à présent, le gouvernement albertain a, à lui seul, investi plus de 487 millions de dollars en effort de contrôle direct. Fait intéressant, le gouvernement de la Saskatchewan a reconnu la possibilité de propagation du dendroctone de l'Alberta à son territoire et a contribué plus de 5 millions de dollars aux efforts de contrôle de l'Alberta afin d'arrêter la propagation du dendroctone sur son territoire.
(1215)
    Pour ce qui est des quantités de pin, si le dendroctone du pin ponderosa passe de l'Alberta à la Saskatchewan, il y a des peuplements de pin contigus qui permettront à cet insecte de traverser le pays et de gagner l'Est du Canada. Il y a des pins jusqu'à la côte Est. Le dendroctone décimerait de vastes étendues de forêts de pin en cours de route.
    Les recherches révèlent que le dendroctone du pin ponderosa peut survivre dans le pin gris, ce qui signifie qu'il peut passer par la zone d'hybridation du pin gris et du pin tordu du Nord de l'Alberta et s'étendre vers l'est. Il s'agit vraiment d'une menace nationale.
    Aussi récemment qu'en 2013, le Parc national de Jasper affichait des niveaux d'infestation du dendroctone de pin ponderosa très faible. Cependant, peu de mesures ont été prises pour contrôler l'infestation et, c'est maintenant par là que le dendroctone du pin ponderosa entre en Alberta. La région de Hinton et Edson dans le centre-ouest de l'Alberta a été inondé de dendroctone du pin ponderosa en provenance du Parc national Jasper et ce, à des niveaux record pendant plus de deux mois. Habituellement, c'est le genre de choses qui se produisait seulement sur une période de deux semaines.
    Cette propagation du dendroctone du pin ponderosa dans nos zones d'exploitation met en péril nos entreprises et finira par exposer les collectivités mêmes où nous oeuvrons à un risque économique et physique associé aux feux d'incendie. Sans mesure de contrôle dynamique, le dendroctone du pin ponderosa se propagera vers le Nord et le Sud le long des bassins hydrologiques cruciaux du versant est des Rocheuses et continuera sa marche constante vers la Saskatchewan et au-delà.
    Parmi les répercussions qu'aura l'épidémie sur West Fraser, mentionnons le risque de feux accrus dans les forêts sur lesquels nous dépendons. D'importants feux de forêt réduiront le bois accessible à nos opérations forestières et, ce qui, encore une fois, mettrait en péril les collectivités dans lesquelles nous exerçons nos activités.
    Cela se traduira aussi par la production de produits de moins grande valeur, puisque nous alimenterons nos scieries de grumes sèches venant d'arbres tués par le dendroctone plutôt que du bois d'oeuvre frais et vert, ce qui, là aussi, réduit la viabilité de nos opérations.
    Il faut aussi s'attendre à une augmentation des coûts et à une réduction de la productivité de nos installations en raison de l'accessibilité limitée de ressources forestière. Il y aura moins d'arbres à couper si le dendroctone du pin ponderosa a envahi nos zones opérationnelles. Il y aura aussi des coûts accrus associés à la coupe et au transport du bois d'oeuvre mort. Il faut aussi probablement s'attendre à des répercussions sur le bassin hydrologique, ce qui peut endommager notre infrastructure routière. En outre, nous devrons investir plus dans nos installations afin de pouvoir traiter les grumes sèches que nous utiliserons dans nos scieries.
    La situation en Colombie-Britannique est très troublante, mais nous ne sommes pas en mesure de faire grand-chose, à part rapprocher les stocks forestiers restants, regrouper nos entreprises et fermer certaines scieries.
    En raison du programme proactif et dynamique de l'Alberta, nous ne sommes pas dans la même situation que la Colombie-Britannique. Le programme est bien coordonné avec l'industrie et les municipalités pour s'assurer que les traitements de contrôle sont harmonisés, ce que nous apprécions certainement. Cependant, les ressources pour réaliser ce programme semblent limitées. Selon nous, un soutien continu au programme de l'Alberta serait très bénéfique.
    Selon nous, il faut continuer à déployer des efforts de contrôle dynamique et il faut aussi un peu d'aide de Mère nature. Les efforts de contrôle ralentiront la propagation du dendroctone du pin ponderosa et permettront au gouvernement et à l'industrie de travailler ensemble pour gérer les forêts et atténuer les répercussions de ce ravageur. Une propagation plus lente aidera à maintenir la viabilité économique des ressources ligneuses, ce qui signifie que nous pourrons procéder à des coupes, puis reboiser des peuplements infestés par le dendroctone du pin, ce qui, à son tour, soutiendra les nombreuses valeurs qu'on en tire. Si elles ne sont pas exploitées, bon nombre de ces zones ne se régénéreront pas tant qu'un feu de forêt ne passera pas par là.
    C'est une situation difficile, mais, grâce à des mesures coordonnées de coopération, nous pouvons avoir une incidence importante sur la propagation du dendroctone du pin ponderosa.
    Je vous remercie à nouveau de nous avoir donné l'occasion de comparaître et de fournir notre point de vue sur la situation du dendroctone du pin ponderosa.
(1220)
    Merci beaucoup à vous deux.
    Monsieur Serré, nous commençons par vous.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Merci aux deux témoins de leur présentation et du travail qu'ils font dans le domaine.
    Ma première question s'adresse aux deux témoins, mais je vais d'abord m'adresser à M. Bélanger.
    Votre association a des membres dans chacune des provinces, mais leur nombre varie de l'une à l'autre.
    Au Québec, le système « plafonnement et échange » a-t-il aidé les producteurs sur les plans de la recherche et de l'éducation?
    Avez-vous des exemples à nous donner quant à l'aide fournie dans le cadre du système en place?
    Je suis désolé. Parlez-vous du système lié au carbone?
    C'est-à-dire, n'y a-t-il pas des fonds destinés à la recherche qui ont été accordés aux compagnies pour les aider?
     Il existe en ce moment au Québec une situation qui pose un peu de problèmes. Beaucoup des fonds de recherche viennent du fédéral par l'entremise du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie, ou CRSNG.
    Malheureusement, suivant le nouveau régime forestier en place, c'est la province qui s'occupe de l'aménagement forestier. Depuis 2014, ce ne sont plus les compagnies qui s'occupent de faire les plans d'aménagement, mais la province, laquelle a aussi repris la responsabilité du financement de la Société de protection des forêts contre les insectes et maladies, ou SOPFIM. Cette dernière n'est donc plus financée par les contributions des industriels, mais par l'argent du gouvernement sous forme de redevances que la SOPFIM reçoit directement, ce qui empêche de doubler les fonds du CRSNG.
    Cela diminue donc beaucoup le potentiel de recherche sur les insectes et les maladies. La faute en revient à ce nouveau mécanisme comptable. Des discussions sont en cours pour rectifier la situation, mais je sais que beaucoup de contributions financières pour la recherche sur les insectes et les maladies arrivent bientôt à échéance au Québec et sont difficiles à renouveler à cause de ce mécanisme comptable qui a été modifié dans le nouveau régime forestier.

[Traduction]

    Monsieur Briand, le système en Alberta et en Colombie-Britannique, vu la tarification de la pollution, vous a-t-il aidé, en tant qu'entreprise du secteur privé, à réaliser des activités de recherche et de développement à l'appui de la lutte contre les espèces envahissantes en général et pas seulement le dendroctone du pin ponderosa?
(1225)
    Oui, beaucoup de financement a été fourni pour réaliser des recherches sur le dendroctone du pin ponderosa. La plupart des fonds sont venus du gouvernement albertain. Le Service canadien des forêts a aussi réalisé beaucoup de recherches. Je ne connais pas grand-chose au sujet d'éventuels liens avec la tarification du carbone ou tout ce qui y est lié.

[Français]

    Les témoins nous ont parlé de l'Est et de l'Ouest du Canada.
    M. Eglinski nous expliquait plus tôt que le dendroctone du pin ponderosa se rapprochait de l'Ontario. Nous parlions aussi de toute la question de l'aéroport Pearson de Toronto et du milieu urbain. Une crise semble se profiler à l'horizon, mais ce n'est pas ce que je vous entends dire.
    Monsieur Bélanger, vous parlez des recommandations au gouvernement fédéral. La première recommandation est d'investir dans la recherche et le développement, ce qui signifie plus d'argent. Il est toujours difficile d'aller chercher de l'argent, mais c'est important. La deuxième rappelle l'importance de l'éducation pancanadienne en ce qui a trait aux changements climatiques.
    Des témoins nous ont parlé des espèces indigènes et des espèces envahissantes. Lorsqu'on en vient aux questions de compétences, il semble nécessaire de bouleverser tout le système. Les municipalités ont des responsabilités, la province aussi, et même le fédéral a un petit rôle à jouer. Il ne semble pas vraiment y avoir de système national. Or, une infestation s'annonce au Canada et qui touchera tout le pays, l'Ontario, le Québec et les villes. Pourtant, les recommandations semblent dire de continuer comme avant et de garder espoir.
    Je ne serai pas ici en tant que député en 2023 pour parler des problèmes nationaux au sein d'une industrie aussi importante que la foresterie. J'aimerais donc savoir s'il est possible de recommander un débat plus national. Les provinces sont responsables de la gestion forestière, mais elles ne semblent pas, selon moi, vouloir suffisamment nous faire participer à cette gestion.
     Ne sous-estimons pas l'importance d'un dialogue national. Cette crise va exiger que nous nous penchions sur nos régimes forestiers et sur les espèces à privilégier pour le reboisement compte tenu de l'augmentation de ces infestations. Les discussions dérangeront beaucoup, et seront également difficiles à plusieurs égards.
    Il est très compliqué de tenir ces discussions avec chacune des provinces séparément, ce qui explique le fort intérêt de l'Association des produits forestiers du Canada pour l'instauration d'un forum national de discussion. L'APFC est en train de négocier avec beaucoup de fonctionnaires et de représentants du Service canadien des forêts pour voir s'il est possible d'élargir la portée de certains dialogues nationaux qui touchent principalement la recherche et la nouvelle vision du Conseil canadien des ministres des Forêts.
    Nous prévoyons qu'il faudra d'autres discussions beaucoup plus musclées sur ces changements. Selon nous, beaucoup des fondements juridiques des régimes forestiers en place ne permettent pas les changements nécessaires, notamment pour ce qui est de repenser la composition des forêts. En effet, la loi exige actuellement de reboiser avec les mêmes espèces, et les paramètres encadrant le rétablissement des espèces en péril sont statiques. Ces deux contraintes nous forcent à prétendre que nous réussirons à rétablir les forêts comme elles étaient dans le temps, tout en sachant que cela n'arrivera pas.
    Nous devrons donc affronter un important conflit si nous continuons à investir dans une direction donnée alors que la forêt doit aller dans une toute autre direction, et nous serons acculés au pied du mur. Ce changement dérangera beaucoup, et nous nous demanderons à quel point nous serons sûrs de notre approche, à quel point nous serons prêts et à quelle échelle nous pourrons appliquer ces changements politiques. Ce sont là de grandes questions. Il est effectivement difficile d'en discuter avec chacune des provinces séparément, tout comme il serait aussi peu pertinent...

[Traduction]

    Je vais devoir vous arrêter ici. Nous devons poursuivre. Merci, monsieur Serré.
    Monsieur Eglinski, allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux deux témoins de comparaître aujourd'hui.
    J'ai écouté votre dernière réponse, monsieur Bélanger, et vous avez mentionné une stratégie nationale quatre ou cinq fois durant vos réponses. J'imagine que c'est ce que votre association souhaite.
    Croyez-vous que nous avons dépassé le stade du dialogue et que le gouvernement fédéral doit maintenant prendre des mesures plus directes en ce qui a trait au soutien financier des provinces?
    Si on regarde l'exposé présenté par West Fraser, le témoin a mentionné le fait que l'Alberta a consacré 487 millions de dollars à la lutte contre le dendroctone du pin et que la Saskatchewan — qui n'est pas encore vraiment touchée — y a consacré 5 millions de dollars, tandis que le gouvernement fédéral y a consacré quant à lui 18,37 millions de dollars. Je crois que ces fonds ont été versés par notre gouvernement, vers la fin de son mandat, et ce n'était définitivement pas assez.
    Croyez-vous que nous en sommes encore à l'étape du dialogue ou croyez-vous que nous en sommes à l'étape de l'action? Croyez-vous que le gouvernement fédéral doit participer davantage? Les provinces participent déjà.
(1230)
    Je dirais les deux. L'intervention fédérale est bienvenue dans la mesure où elle crée une capacité de procéder à des interventions rapides en cas de crise, notamment pour aider à éviter la propagation d'une province à une autre ou pour uniformiser les règles du jeu, et ce, même s'il s'agit peut-être de mesures à court terme et d'interventions rapides dans le cadre de la crise. C'est parfait, mais si nous conservons un régime de gestion forestière qui nous mènera à d'autres crises sans revoir tout ça... C'est aussi quelque chose qu'il faut faire.
    Merci.
    Monsieur Briand, je suis heureux de vous revoir. Votre entreprise, West Fraser, a été très active dans ma circonscription de Yellowhead, surtout dans la région de Hinton, au cours des dernières années, alors qu'on a vu le dendroctone du pin passer par le parc. Au cours des quatre ou cinq dernières années en particulier, vous avez travaillé de façon vraiment proactive avec les gouvernements provincial et fédéral pour essayer d'éliminer le dendroctone à mesure qu'il se propageait dans les versants est.
    Pouvez-vous nous donner un exemple du genre de tâches ou de travail que vous faites? Vous travaillez en collaboration avec les collectivités. Vous avez un groupe de travail pour lutter contre le dendroctone du pin là-bas. Pouvez-vous faire le point sur le genre de...? Vous êtes sur la première ligne. Vous participez aux attaques. Pouvez-vous nous donner une idée de ce que vous faites en groupe.
    Il y a un certain nombre d'approches ou d'activités différentes auxquelles nous participons, la plus évidente étant nos efforts de contrôle direct. Il s'agit en fait de la combinaison de différentes choses: nous redirigeons toutes nos opérations de coupe vers les peuplements infestés de dendroctones aujourd'hui, tout en participant au programme du gouvernement de l'Alberta en matière de contrôle des arbres qui se trouvent dans des petites zones éparpillées à l'échelle du territoire.
    Dès 2006, nous redirigions tous nos efforts de coupe vers des peuplements où le dendroctone se porterait bien s'il s'établissait là. Nous réalisons aussi beaucoup d'activités en collaboration avec les collectivités locales, pour les aider à comprendre ce qui se passe, les taux de propagation et les endroits où on prévoit voir le dendroctone.
    Beaucoup des préoccupations formulées sont liées à la question de savoir s'il y a assez de coordination, par exemple. Il y a eu beaucoup de dialogue à tous les ordres de gouvernement intéressés avec lesquels nous pouvons discuter pendant quelques minutes... quasiment tout le monde affiche un intérêt. Les administrations municipales et les gouvernements provinciaux, en particulier, dans la région, ont été très proactifs à cet égard. Nous consacrons beaucoup d'efforts à ce niveau-là.
    Il y a beaucoup de coûts associés à la réorientation, la replanification, l'abandon des plans de coupe actuels et la concentration des efforts dans de nouvelles zones à mesure que progresse la propagation du dendroctone.
    Que pensez-vous que les gouvernements — les provinces et le gouvernement fédéral — peuvent faire à l'heure actuelle pour aider des entreprises forestières comme la vôtre, lorsque des régions entières sont infestées par le dendroctone du pin? Selon vous, que peuvent-ils faire en plus de ce qu'ils font déjà?
(1235)
    La stratégie de contrôle en Alberta est très bonne. Il faut tout simplement y consacrer le plus de ressources possible. C'est de cette façon-là qu'on sera le plus efficace. Il faut financer la stratégie afin d'en tirer le maximum. L'impression qu'on a à l'heure actuelle, c'est que les ressources accessibles à l'échelon provincial sont de plus en plus difficiles à trouver, alors tout ce qu'on pourrait faire pour soutenir le programme albertain serait un bon pas vers l'avant. Nous n'en sommes pas rendus au point où...
    J'ai une question rapide, Richard.
    Vous avez été en première ligne. Votre entreprise a été très active, et je dois féliciter West Fraser.
    Pensez-vous que vous les aviez retenus pendant un certain temps? Pensez-vous pouvoir le faire? À la lumière de votre expérience, croyez-vous que nous pouvons vaincre?
    Nous pouvons ralentir leur propagation. Je ne crois pas que nous pouvons les arrêter complètement grâce à nos efforts de contrôle, mais nous pouvons avoir une incidence importante en ce qui concerne le ralentissement de leur propagation et la réduction au minimum de l'impact sur les forêts au fil du temps. Nous finirons par obtenir un peu d'aide de Mère Nature qui nous fournira des conditions météorologiques froides au bon moment de l'année, et là, on pourra vraiment les faire reculer.
    Nous pouvons être très efficaces, et des recherches ont été réalisées pour confirmer l'efficacité du programme de l'Alberta, assorti des efforts de l'industrie et du gouvernement.
    Merci.
    Monsieur Cannings, allez-y.
    Merci à vous deux d'être là.
    Je vais commencer par M. Bélanger. J'ai quelques questions à lui poser qui sont liées à ce dont j'ai parlé avec des témoins précédents.
    Je viens de Colombie-Britannique. La Colombie-Britannique est en sorte dans une phase postapocalyptique en ce qui a trait au dendroctone du pin ponderosa et elle se tourne vers l'avenir pour trouver des façons de s'assurer qu'une telle situation ne se reproduira pas.
    J'aimerais revenir sur un commentaire que vous avez formulé et qui m'a un peu surpris, et c'est lorsque vous avez parlé de l'exigence légale de planter les mêmes espèces que celles que vous coupez. Je sais que, en Colombie-Britannique, il y a une exigence légale, ou encore la province exige des entreprises qu'elles coupent des arbres des différentes espèces dans la même proportion que ce qu'on retrouve dans leur zone d'approvisionnement en bois. Par conséquent, on ne peut pas tout simplement entrer là et couper uniquement du pin tordu ou du sapin de Douglas. Il faut faire des coupes proportionnelles, d'après ce que j'en ai compris.
    Cependant, je ne savais pas qu'il fallait aussi retourner sur place et reboiser. Ce que je vois — du moins ce que je vois sur le terrain — c'est une entreprise qui fait une coupe à blanc dans une zone où, peut-être, le pin tordu dominait ou là où il y avait une moitié de pins et une moitié d'épinettes, et puis on y plante uniquement du pin.
    Pouvez-vous me dire quelle est l'exigence juridique? Est-ce qu'elle change d'une province à l'autre ou est-ce une exigence qui s'applique à l'échelle du Canada?
    Oui, l'exigence change d'une province à l'autre. La chose qui revient partout, c'est que toutes les provinces exigent le rétablissement de la forêt afin qu'elle puisse croître librement, et il faut donc régénérer les zones de coupe. Habituellement, il y a des exigences. On peut procéder par regénération naturelle ou, artificiellement, par replantation. Habituellement, l'exigence quant à ce qu'on peut planter, c'est qu'on a seulement le droit de planter des semis qui ont été cultivés à partir de semences de la région.
    Il y a maintenant des essais en Colombie-Britannique pour procéder à ce qu'on appelle une « migration assistée » dans le cadre de laquelle on plante délibérément des arbres d'une région différente, même si c'est uniquement à titre d'essai. Les responsables ont créé cette exception à la règle pour permettre la tenue de tels essais, soit en utilisant des espèces d'altitudes ou de latitudes différentes. Habituellement, dans la plupart des régimes, à ce que je sache, lorsqu'on plante, il faut procéder à la regénération en utilisant les mêmes espèces pour la même région, étant donné qu'on peut planter seulement une espèce, mais en sachant que le peuplement deviendra mixte parce que certaines autres essences moins recherchées apparaîtront tout de même et se régénéreront naturellement, comme le tremble, par exemple.
    Pour ce qui est du rôle que pourrait jouer le gouvernement fédéral durant cette phase de regénération, je sais que les compagnies forestières de la Colombie-Britannique doivent replanter les zones qu'elles coupent, et elles le font conformément à la loi. Il semble, d'après ce que j'ai entendu, que la province a pris du retard. En raison de tous les feux de forêt et de toute la destruction provoquée par le dendroctone du pin ponderosa, il y a un véritable déficit actuellement en ce qui concerne la plantation.
    Je me demande si, selon vous, c'est un endroit où le gouvernement fédéral pourrait prendre les devants et dire: « regardez, nous comprenons que c'est un désastre, alors voici une aide financière en cas de catastrophe pour replanter, mais il y a certaines conditions ». Ces conditions pourraient par exemple refléter une tentative quelconque de rétablir la forêt en misant sur un peuplement plus diversifié qui serait moins vulnérable. Est-ce quelque chose que l'APFC appuierait?
(1240)
    Oui, c'est quelque chose que nous appuierons. Nous constatons cette faiblesse dans le cadre de notre approche actuelle de gestion forestière. M. Briand y a fait allusion. Le fait est que nous exploitons la moitié de 1 % des forêts chaque année, ce qui signifie que nous avons une capacité très limitée — uniquement grâce à la foresterie — de modifier la composition des forêts.
    S'il y avait plus de fonds pour nous permettre de régénérer aussi certains peuplements dévastés par le dendroctone du pin ponderosa, la tordeuse de l'épinette ou les feux de forêt — et qui ne se régénèrent pas actuellement parce que les arbres sont encore là et qu'ils empêchent en partie le processus —, il y aurait des façons de... Personne n'assume cette responsabilité en ce moment. Les forêts attendent. Elles attendent de brûler ou elles attendent que les arbres morts tombent dans des années.
    Il y a de grands pans de forêt qui ne reviennent pas. Ce sont des forêts très productives et saines qui ne s'en remettent pas ou qui s'en remettent très lentement. Puisqu'il n'y a pas d'exigence juridique de se pencher sur cette question dans le cadre des programmes en place actuellement, c'est un rôle vraiment nouveau, proactif et important que le gouvernement fédéral ou un autre ordre de gouvernement pourrait décider d'assumer, ça ne fait aucun doute.
    Il me reste deux minutes, et je veux poser essentiellement la même question à M. Briand quant à la façon dont West Fraser choisit de replanter. Quelles sont vos directives? Quelles sont les contraintes que vous devez respecter? De quelle façon prenez-vous ces décisions sur ce qu'il faut replanter ou la façon de récupérer des billes? Tenons-nous-en à la replantation pour l'instant.
    Bien sûr. Le processus de replantation découle presque entièrement de la réglementation de l'Alberta. Je vais parler de l'Alberta précisément. Nous devons régénérer certaines espèces: les mêmes espèces dans les mêmes proportions que ce que nous coupons. Cette exigence figure dans la réglementation, dans nos normes de regénération actuelles.
    Il y a assurément eu certains rajustements de ces normes pour refléter les changements climatiques en ce qui concerne la source des semences. C'est quelque chose dont on a parlé tantôt. Certaines semences poussant à des altitudes plus basses peuvent maintenant être plantées à des altitudes plus élevées. On a vu ce genre de choses. Pour ce qui est du passage en tant que tel à la replantation d'espèces différentes, c'est un sujet qui a fait l'objet de recherches et d'un peu de discussion, mais il n'y a eu aucun changement à ce sujet dans la réglementation ou les lignes directrices.
    Y a-t-il un favoritisme, si je peux m'exprimer ainsi, faisant en sorte que West Fraser préfère le pin, qui croît plus rapidement que l'épinette, tout simplement pour obtenir un rendement plus rapidement? Je ne connais pas le fonctionnement des régimes fonciers en Alberta et en Colombie-Britannique, mais...
    En général, notre approche s'appuie sur les écosites. Il y a certains sites où le pin pousse mieux, et d'autres où c'est l'épinette blanche qui croît mieux. Nos forestiers en sylviculture se rendent dans chaque zone de coupe pour évaluer ce qui aura les meilleures chances de succès. C'est propre à chaque site.
    Merci.
    Monsieur Cannings, votre temps est écoulé, mais, comme nous en avons parlé, je dois partir un peu plus tôt.
    M. Cannings me remplacera dans le fauteuil pour le reste de la réunion.
    Monsieur Whalen, vous êtes le suivant. Je pense que vous êtes probablement la dernière personne à intervenir de toute façon.
    Merci, monsieur le président. Profitez de votre prochaine réunion, peu importe où vous allez.
    Ma première question est destinée aux analystes. J'aimerais que vous me prépariez un tableau afin qu'on puisse avoir une certaine connaissance de la situation actuelle concernant les dépenses fédérales et provinciales en matière de lutte antiparasitaire forestière au cours des 20 dernières années, tout simplement pour savoir combien d'argent les provinces et le gouvernement fédéral ont dépensé à cet égard au fil du temps, de façon à ce que nous puissions nous appuyer là-dessus. Je crois que ce serait utile pour nous tous.

[Français]

    Monsieur Bélanger, nous avons entendu d'autres témoins nous parler de ce qu'ils appellent, en anglais, landscape scale management. Pouvez-vous nous expliquer ce dont il s'agit en quelques mots pour aider les traducteurs, les interprètes et la rédaction de la version française de notre rapport? Cela nous serait très utile.
    Certainement.
    L'approche d'aménagement à l'échelle du paysage fait référence à l'échelle à laquelle nous allons fixer nos objectifs d'aménagement. L'une des particularités du Canada, qui lui confère des avantages environnementaux sur de nombreux autres pays, est que nous tenons compte de la composition des forêts à l'échelle du paysage par rapport à leur état historique. L'objectif est, par exemple, de voir le paysage évoluer selon ses forêts, de constater si l'aménagement des 50 années nous a mené à des forêts plus jeunes grâce à l'élimination du pin blanc, ou de déterminer le type de forêt que l'on peut recréer qui serait, à l'échelle du pays, plus représentative d'un paysage naturel. Il s'agit de ce que l'on appelle souvent l'approche écosystémique.
(1245)
    D'accord. J'ai déjà entendu ces termes-là.
    Quand on parle

[Traduction]

... d'une gestion écosystémique... Maintenant que nous avons certains verbes et je ne sais quoi pour les interprètes, je vais revenir à l'anglais. C'est beaucoup plus facile pour vous.
    Quel type d'expérimentation reste-t-il à faire pour déterminer s'il est préférable de replanter ou tout simplement brûler les peuplements actuels ou d'adopter je ne sais quelle autre approche; qu'est-ce qui est préférable pour l'environnement du point de vue de la gestion du paysage? Que pourrait-on faire pour déterminer la meilleure solution? Est-ce quelque chose que les scientifiques comprennent bien ou est-ce qu'il faut procéder à des expérimentations pour le déterminer?
    C'est quelque chose qu'on étudie continuellement. Je crois que nous comprenons très bien ce que nous faisons, mais notre compréhension s'améliore constamment. Les essais peuvent continuer, mais ce qui est valorisé sur le terrain et ce sur quoi la société décide de mettre l'accent change aussi au fil du temps. L'atteinte de ces objectifs en constante évolution exige aussi des recherches continues pour que l'on puisse voir si les solutions fonctionneront.
    Par exemple, de nos jours, il est primordial d'aider le rétablissement du caribou des bois. Diverses approches sont mises à l'essai. Il faut pour y arriver réaliser passablement de recherche, parce qu'on ne peut pas s'appuyer uniquement sur une hypothèse de base puis l'appliquer à l'échelle du paysage en espérant que ça fonctionnera dans tous les cas. Il faut continuellement effectuer des recherches sur les approches de gestion pour réaliser des essais et déterminer si, oui ou non, on a atteint l'objectif. Cela exige à la fois des recherches et le maintien de systèmes d'apprentissage continus.
    Lorsque je regarde le grand défi auquel nous sommes confrontés, pas seulement en raison de la flambée des ravageurs forestiers, mais aussi en ce qui concerne la gestion des risques associés aux peuplements morts avec lesquels on est aux prises au Québec — en raison de la tordeuse des bourgeons de l'épinette — et en Colombie-Britannique — en raison du dendroctone du pin ponderosa — y a-t-il là une occasion à saisir par les scientifiques de la gestion forestière, mais aussi par les provinces et, peut-être, les entreprises, qui pourraient élaborer des normes en vertu desquelles procéder aux coupes dans ces peuplements? Une certaine valeur économique, peut-être, grâce à une subvention quelconque, peut être tirée tout en réduisant le risque général de feux de forêt, parce qu'il semble s'agir d'une préoccupation majeure, pas seulement parce que des gens peuvent perdre leur maison et leurs biens, mais aussi en raison des risques de décès parmi les pompiers.
    Pouvons-nous agir de façon plus proactive pour gérer ces peuplements morts de façon à permettre une regénération plus rapide — peut-être grâce à un brûlage dirigé quelconque — au moins de façon à ce que, si des feux de forêt se déclarent dans une zone précise, nous avons fait le travail préparatoire nécessaire afin que les pompiers puissent avoir un accès et puissent protéger les collectivités environnantes de façon plus efficiente?
    J'espère obtenir des réponses des deux témoins.
    Je peux commencer.
    Je dirais que oui, mais pas seulement parce que ces efforts pour sauver les peuplements morts sont très importants. Il ne devrait probablement pas s'agir du seul moyen utilisé pour régler le problème que je pense que vous soulevez.
    Dans certaines provinces, l'approvisionnement en bois vient presque uniquement d'activités de récolte de récupération dans le contexte actuel, et il est donc très difficile d'en faire plus à cet égard, mais, aussi, en assurant l'évolution de nos stratégies de gestion forestière et de nos méthodes de coupe dans des situations plus normales, on pourrait se donner l'objectif de créer une structure forestière moins susceptible de brûler ou remplacer certaines activités de gestion forestière plus intense près des collectivités ou encore réaménager les routes afin de faciliter la gestion des feux de forêt à l'avenir.
    On n'a pas enseigné à notre secteur forestier d'entrée de jeu à concevoir des interventions forestières permettant de composer avec des feux de forêt ou des invasions futures. Si on devait établir dès maintenant que ces objectifs sont plus importants qu'avant, on pourrait changer la façon dont on gère nos forêts en fonction du paysage.
(1250)
    Monsieur Briand, c'est facile pour les gens à Ottawa et même pour les universitaires, mais c'est votre entreprise et vos employés qui, au bout du compte, devront mettre en oeuvre toutes les recommandations liées aux techniques à grande échelle de gestion du paysage ou voir à ce qu'elles le soient.
    Avez-vous des points de vue précis à ce sujet? Si vous deviez vous lancer dans une réflexion sans limites ou une activité de remue-méninges à ce sujet, quelle direction l'industrie devrait-elle choisir?
     Il a 10 secondes, alors vous devriez peut-être arrêter de parler et lui laisser ces 10 secondes.
    Des voix: Ah, ah!
    Merci, Richard.
    Rapidement, je vous dirais que nous faisons beaucoup de recherche pour essayer de reproduire les modèles de perturbation naturelle à la lumière, principalement, des feux de forêt passés. Nous continuons de travailler là-dessus pour essayer de voir de quelle façon ces choses évolueront au fil du temps dans un climat changeant.
    Voilà qui termine le premier tour.
    Je propose que nous nous arrêtions là, sauf si les membres du Comité veulent accorder cinq minutes aux conservateurs. Nous pouvons tout simplement remercier les témoins et mettre fin à la séance.
    Monsieur Eglinski, allez-y.
    Monsieur le président, j'aimerais bien qu'on lui donne quelques minutes de plus pour qu'il puisse terminer de répondre à la question posée par M. Whalen. Dix secondes, ce n'était pas beaucoup, et je crois que nous sommes tous prêts à écouter la réponse.
    D'accord. Merci.
    Je crois que M. Briand a compris ma question. Il n'a tout simplement pas eu tout le temps nécessaire pour répondre.
    Monsieur Briand, vous pourriez peut-être nous en dire un peu plus sur la façon dont votre entreprise peut aider le gouvernement à mettre en oeuvre les recommandations liées à la gestion du paysage et nous parler aussi du rôle que votre entreprise joue déjà et du rôle qu'elle pourrait jouer à l'avenir pour nous aider à gérer les risques de feux de forêt.
    Comme je l'ai mentionné, nous avons déjà beaucoup étudié la façon dont les cycles naturels influent sur les tendances constatées dans les forêts des régions que nous gérons. Il y a beaucoup de variations d'une région à l'autre, alors il faut comprendre les particularités. Il n'y a pas de solution universelle. Il y a différentes parties de la province — même sur le territoire de l'Alberta — où les stratégies peuvent être différentes.
    On parle de plus en plus de la prise en considération et de la reconnaissance des types de combustibles forestiers générés par nos activités — je parle de combustibles du point de vue des incendies — et aussi de la modélisation de ces choses au fil du temps pour voir s'il y a des traitements que nous pouvons réaliser de façon à créer des séparations, pour ainsi dire, à plus grande échelle au niveau du paysage. Nous sommes assurément intéressés à étudier tout ça.
    Encore une fois, les occasions sont plus évidentes dans certains endroits que d'autres, mais je peux vous dire que nous avons déployé beaucoup d'efforts et que différentes provinces du pays ont aussi travaillé très dur autour des collectivités pour cerner ces risques d'incendie et les combustibles autour des collectivités afin que ces dernières soient moins vulnérables aux feux de forêt qui passeraient par là.
    D'accord, merci beaucoup.
    Je tiens à remercier M. Briand et M. Bélanger d'être venus aujourd'hui.
    Sur ce, la séance est levée. Nous nous reverrons tous la semaine prochaine.
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