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RNNR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources naturelles


NUMÉRO 111 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 4 octobre 2018

[Énregistrement électronique]

(1110)

[Traduction]

    Bonjour à tous. Merci de vous joindre à nous. Je m'excuse de commencer un peu en retard, mais certains d'entre nous avaient quelques choses à régler à la Chambre.
    Nous poursuivons notre étude sur les ravageurs forestiers et les espèces envahissantes. Nous recevrons deux témoins au cours de la première heure. Nous accueillons Gail Wailin, qui est présidente du conseil d'administration du Conseil canadien sur les espèces envahissantes; et David McLean, professeur à l'Université du Nouveau-Brunswick.
    Merci à vous deux de vous joindre à nous. Vous aurez chacun jusqu'à 10 minutes pour présenter un exposé, après quoi les membres du Comité vous poseront des questions.
    Monsieur McLean, vous pouvez commencer.
    Bonjour à tous. Merci de m'avoir invité à venir ici.
    Permettez-moi d'abord de me présenter un peu. Je suis professeur émérite à la faculté de gestion forestière et environnementale de l'Université du Nouveau-Brunswick. J'ai rejoint l'UNB en tant que doyen en 1999, et auparavant, j'ai travaillé pendant 21 ans auprès du Service canadien des forêts sur les effets de la tordeuse des bourgeons de l'épinette sur les forêts. Mon expérience est dans le domaine de l'écologie forestière, non pas de l'entomologie forestière. J'observe la tordeuse des bourgeons du point de vue des forêts, plutôt que de celui des insectes. Je possède maintenant 40 années d'expérience. J'ai commencé ma carrière dans les hautes-terres du Cap-Breton en 1978, lorsqu'une énorme épidémie de tordeuse des bourgeons a fini par tuer 87 % des sapins dans 30 parcelles qui étaient entretenues dans les hautes-terres.
    Je suis également l'expert principal du Partenariat pour une forêt en santé, dont vous avez entendu parler, je crois, dans une séance précédente. Il se fait en ce moment au Nouveau-Brunswick un projet de recherche d'intervention précoce sur la tordeuse des bourgeons de l'épinette. J'en parlerai davantage un peu plus tard.
    J'aimerais commencer par donner un peu de contexte au sujet de la tordeuse des bourgeons de l'épinette. Il y a cinq faits entourant la tordeuse des bourgeons.
    C'est un insecte indigène. Il a évolué avec notre sapin baumier et nos pessières. Dans une certaine mesure, sa fonction écologique est la même que celle des feux de forêt pour les pins gris, c'est-à-dire le recyclage des peuplements. Il détruit l'étage dominant des arbres, et souvent, la génération avancée du sapin baumier, du moins dans certaines régions, ou d'essences de feuillus intolérants, qui se trouvent juste en dessous et sont prêts à prendre le dessus lorsque le peuplement se recycle.
    Les larves de la tordeuse des bourgeons de l'épinette préfèrent nettement manger les nouvelles pousses. C'est vraiment tout ce qu'elles mangent. Elles le font à maintes reprises, année après année, et les épidémies durent en général environ 10 ans. Les arbres commencent à mourir après environ quatre ou cinq ans. Le réel problème avec les épidémies de tordeuse des bourgeons de l'épinette, c'est l'énorme taux de mortalité qui touche certains types de peuplements. Je dirais qu'en règle générale, on doit s'attendre à un taux de mortalité de 85 % dans les vieux peuplements de sapin baumier, de 35 à 40 % dans les vieux peuplements d'épinette — et par « vieux », je veux dire les arbres matures de 50 à 60 ans — et à la même chose avec les jeunes sapins.
    Pour les arbres qui survivent, il se produit également une production de bois de fût. Probablement environ 90 % de la production de bois de fût est réduite durant les périodes de défoliation active.
    Même si les sapinières rongées par la tordeuse des bourgeons de l'épinette peuvent être considérées comme résilientes sur le plan écologique — elles s'en sortiront, elles ne sont pas détruites — du point de vue économique, c'est dévastateur, en raison de cet énorme taux de mortalité qui survient.
    Dans des recherches menées à l'Université du Nouveau-Brunswick, quelques étudiants au doctorat travaillant sur les effets des épidémies sur l'approvisionnement forestier et les effets socioéconomiques de ces approvisionnements forestiers ont prévu un coût pouvant aller jusqu'à 15,3 milliards de dollars au cours des 40 prochaines années si une épidémie semblable à celle survenue au Cap-Breton dans les années 1970 devait se produire maintenant. Cela se traduit par des pertes d'emploi équivalant à 57 000 années-personnes et par la fermeture d'usines qui en résulterait. Les possibilités de coupe annuelles seraient réduites d'environ un tiers.
    Nous avons des modèles et des systèmes d'aide à la décision très exacts pour la tordeuse des bourgeons de l'épinette, parce que cet insecte présente un intérêt depuis longtemps. Ces modèles et ces systèmes sont mis au point depuis le début des années 1990.
    Il existe essentiellement cinq options de gestion pour traiter une épidémie de tordeuse des bourgeons de l'épinette.
    La première option, c'est de ne rien faire et de juste accepter la mortalité qui surviendra.
    La deuxième option est la sylviculture avant une épidémie, afin de tenter de restructurer la forêt pour réduire les types de peuplement les plus dommageables. Cela met l'accent sur la réduction du sapin baumier. C'est assurément l'espèce qui est le plus tuée.
    La troisième option consiste à récupérer les arbres durant ou après une épidémie. Votre fenêtre pour le faire est très étroite, soit que de deux à quatre ans, quand les arbres sont toujours utilisables. C'est délicat, parce que les arbres ne meurent pas tous en même temps; le phénomène se produit durant une certaine période. De plus, ça se produit généralement dans d'énormes régions, donc sur le plan logistique, il est très difficile de produire de grands effets au moyen de la récupération.
    La quatrième option, c'est la protection des feuilles au moyen d'insecticides biologiques. Nous n'utilisons pas du tout de produits chimiques en ce moment. Le Bacillus thuringiensis et le tébufénozide sont deux insecticides biologiques qui pourraient être utilisés. Dans le passé, on les aurait utilisés de manière réactive pour garder les arbres en vie. On laissait la défoliation se produire pendant au moins deux ans, puis on commençait à pulvériser les arbres pour les garder en vie.
    La cinquième option est une stratégie d'intervention précoce. Nous ne sommes vraiment pas assurés qu'elle fonctionnera, mais après quatre ans d'essai, elle a fonctionné jusqu'à présent. Elle suppose aussi l'application d'insecticides, mais bien avant l'épidémie, avant qu'on commence à voir apparaître la défoliation.
    Le Partenariat pour une forêt en santé est un consortium qui dirige ce projet de stratégie d'intervention précoce. La première phase s'est déroulée de 2014 à 2018 — 18 millions de dollars, dont 10 millions ont été fournis par l'Agence de promotion économique du Canada atlantique et un certain nombre d'autres partenaires. Puis, la deuxième phase a été approuvée par le gouvernement fédéral au cours du dernier budget: 75 millions de dollars viendront de Ressources naturelles Canada, avec des fonds de contrepartie de l'ordre de 60-40, donc les provinces et l'industrie dans l'ensemble du Canada atlantique doivent fournir 40 % de plus.
    Qu'est-ce que la stratégie d'intervention précoce? Il s'agit vraiment d'un concept très simple: une surveillance intensive et une détection précoce des points chauds lorsque les populations commencent à peine à apparaître, donc avec environ 2 000 points d'échantillonnage répartis dans le Nord du Nouveau-Brunswick, avec trois arbres échantillonnés dans chacun des points publics. C'est vraiment une surveillance intensive. Il y a aussi l'application de pesticides biologiques et ciblés dans une petite région afin de réduire la population dans ces points chauds.
    Le troisième élément de la stratégie suppose la recherche sur des outils et des techniques visant à interrompre la reproduction et la migration des papillons de tordeuse des bourgeons. Il y a en ce moment au Québec une grande épidémie. Nous recevons périodiquement des afflux de papillons du Québec.
    Après quatre ans de traitement, les données probantes nous donnent à penser que la stratégie d'intervention précoce semble fonctionner. Nous avons comme cible de garder les populations à moins de sept larves par branche. Le deuxième stage larvaire est le stade d'hivernage. Elles sont vraiment petites, mais ce sont elles qui vont grandir pour se nourrir des bourgeons l'été suivant. Nous le faisons maintenant beaucoup plus tôt que dans les traitements précédents. Nous traitons au moyen d'insecticides toutes les zones où se trouvent des tordeuses des bourgeons, peu importe qui est le propriétaire des terres. Selon les règlements provinciaux, un propriétaire foncier individuel peut choisir de se retirer. On a un système de communication très perfectionné avec les propriétaires fonciers pour les informer de ce qui se produit et des raisons de cela. Jusqu'à présent, environ 2 % des propriétaires fonciers, de terres privées, se sont retirés au cours des quatre années. Cela nécessite un engagement provincial et un volet de communications très forts.
    Durant cette période, nous avons traité un nombre accru de zones. Au cours de la première année, en 2014 c'était environ 5 000 hectares, et cela a augmenté jusqu'à 225 000 hectares en 2018, au cours de la dernière année. Les populations de tordeuse des bourgeons dans les parcelles traitées ont été constamment réduites d'environ 70 % grâce à nos traitements.
    En général, les zones ne sont pas traitées au cours d'années successives. Celles qui ont été traitées en 2017 n'ont généralement pas été traitées de nouveau en 2018. Après quatre années de traitements, on voit clairement depuis les airs la frontière entre le Québec et le Nouveau-Brunswick. Vous pouvez la survoler et voir la défoliation du côté du Québec, mais pas du côté du Nouveau-Brunswick. Les aéronefs effectuant des relevés aériens pour repérer la défoliation ont détecté 2 500 hectares de défoliation au Nouveau-Brunswick en 2017, et seulement 500 hectares en 2018, par rapport à 2,5 millions d'hectares en Gaspésie et à baie St-Laurent, immédiatement de l'autre côté de la frontière. Dans la population de tordeuse des bourgeons, les populations de larves au deuxième stade larvaire sont beaucoup plus grandes dans les zones adjacentes au Québec qu'au Nouveau-Brunswick.
    Les principales réussites jusqu'à présent sont la réduction des populations de tordeuse des bourgeons et des innovations scientifiques assorties de vastes applications pratiques. Le programme comporte un volet très réussi de participation publique et de sciences citoyennes. Nous avons vraiment essayé de prendre les devants au chapitre des communications en parlant aux maires, aux conseils municipaux, aux propriétaires fonciers individuels et aux médias dans les régions touchées. Nous avons évité de graves défoliations dans les pertes d'approvisionnement forestier et nous avons mis sur pied un partenariat unique et puissant entre l'industrie, les universités, les gouvernements et les collectivités.
    J'ai cinq recommandations par rapport à ce qui peut être fait pour protéger le secteur forestier canadien contre la propagation des ravageurs forestiers, ce qui est votre mandat.
    La première, ce serait de soutenir le programme scientifique du Service canadien des forêts de Ressources naturelles Canada, parce que le SCF possède la plus grande expertise en matière d'entomologie pour traiter les insectes forestiers indigènes et introduits au Canada.
    La deuxième va en quelque sorte de soi, mais je dirais qu'il faut continuer de soutenir le projet de recherche sur les stratégies d'intervention précoce du Partenariat pour une forêt en santé. Nous sommes très reconnaissants envers le gouvernement fédéral du financement qui a été offert pour ce projet. C'est la toute première tentative pour effectuer, dans l'ensemble de la province du Nouveau-Brunswick, la gestion des populations d'un insecte indigène. Un de mes collègues appelle cela le jeu de la taupe. Ils commencent à arriver ici et nous leur tapons dessus en les repoussant avec le traitement insecticide.
(1115)
    Ma troisième recommandation, c'est d'obtenir les commentaires des provinces et de l'industrie sur leurs problèmes de ravageurs forestiers les plus importants et d'exiger des approches novatrices en matière de recherche à l'égard de la gestion des ravageurs, pas seulement des approches courantes. Tout le financement fédéral visant à protéger le secteur forestier canadien devrait être fourni en partenariat avec les provinces.
    Ma quatrième recommandation, c'est d'utiliser le Partenariat pour une forêt en santé comme modèle pour d'autres partenariats de recherche novateurs avec des provinces, des chercheurs, des collectivités et des universités. Nous avons en ce moment plus de 20 partenaires. Comme réflexion connexe, il est essentiel que les provinces nous appuient et qu'elles s'engagent à respecter leurs contributions requises. Avec un partage du financement de l'ordre de 60-40, cela ne fonctionne pas si les provinces ne nous appuient pas. La communication est vraiment importante.
    Mon dernier point, c'est qu'un domaine important où il est difficile de mener des recherches à grande échelle spatiale et temporelle, car cela nécessite de très grandes régions et de longues périodes, c'est l'utilisation de la sylviculture et de la gestion des forêts pour changer le paysage forestier, afin de réduire les épidémies futures de ravageurs. C'est un domaine particulier où les ressources du gouvernement fédéral, en partenariat avec l'industrie et les provinces, pourraient aider à l'établissement de certaines études de restructuration du paysage forestier à long terme.
    Merci.
(1120)
    Merci, monsieur.
    Madame Wallin.
    Je suis présidente du Conseil canadien sur les espèces envahissantes. C'est une organisation fondée il y a environ 10 ans à la suite d'un forum national sur les espèces envahissantes à l'issue duquel on a réclamé une voix nationale extérieure au gouvernement pour les espèces envahissantes, sauf que le terme « espèces envahissantes » n'était pas si souvent utilisé à l'époque; on désignait cette réalité de nombreuses façons différentes.
    Je suis présidente de ce conseil. Je viens de la région qui abrite le dendroctone du pin ponderosa dans le centre de la Colombie-Britannique et je suis allée au front de la Colombie-Britannique, du Nord-Est de la Colombie-Britannique et de l'Alberta, puisque nous avons parlé de le garder hors de cette région, donc je suis très au courant de cette discussion. Je sais que ce n'est pas populaire ici, mais j'en ai fait l'expérience pendant les 10 dernières années.
    Le Conseil canadien est une organisation fédérale sans but lucratif constituée en société. Elle a un conseil d'administration composée de représentants d'un bout à l'autre du pays. Son mandat, son format et son orientation sont nés non seulement du premier forum national sur les espèces envahissantes au Canada, mais des forums successifs, parce qu'ils ont fourni cette orientation. C'est un conseil sans but lucratif à quatre chambres, donc des représentants des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux y siègent, ainsi que de l'industrie, des entreprises et des Autochtones. Des chapitres des conseils provinciaux et territoriaux sur les espèces envahissantes existent au Canada.
    C'est le modèle du conseil d'administration. Deux principaux moteurs alimentent le conseil d'administration et le Conseil: les voies d'entrée et les partenariats. Vous verrez ces deux thèmes partout. Lorsque nous parlons des espèces envahissantes, selon la Stratégie nationale sur les espèces exotiques envahissantes, cela signifie habituellement tout ce qui est à l'extérieur du Canada ou d'une région; c'est étranger à cette région. Le gouvernement fédéral a défini ce terme.
    Je vais parler quelques minutes seulement du Conseil canadien, puis je présenterai nos recommandations au comité permanent. J'ai parlé de nos thèmes principaux. Nous avons fait un certain nombre de choses. Nous avons tenu un certain nombre de forums nationaux sur les espèces envahissantes; nous avons tenu le premier forum nord-américain sur les espèces envahissantes ici, à Ottawa, il y a environ trois ans, en partenariat avec le gouvernement fédéral. Le forum se tient en rotation au Canada, aux États-Unis et au Mexique. Nous avons également organisé un certain nombre d'ateliers nationaux, où nous nous sommes penchés sur certains des principaux thèmes, comme la cartographie des espèces envahissantes, de sorte que les gens puissent savoir où les ravageurs forestiers se trouvent au Canada et connaître les espèces aquatiques envahissantes et pour nous permettre communiquer de meilleures données, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur des gouvernements.
    Nous avons favorisé la création du cadre sur les espèces envahissantes en Amérique du Nord, sur lequel Environnement Canada, le Mexique et les États-Unis travaillent maintenant. Nous avons élaboré un éventail d'autres programmes, comme des campagnes nationales de sensibilisation, parce que nous savons tous qu'il importe, pour la prévention des espèces envahissantes, que les Canadiens nous appuient.
    Quand nous examinons comment aller de l'avant par rapport aux ravageurs forestiers... j'ai examiné un certain nombre des autres exposés que vous avez entendus. Vous avez reçu beaucoup de renseignements au sujet des répercussions économiques; je pense que c'est entendu. Vous savez que les ravageurs forestiers peuvent entraîner une énorme perte économique pour nous, dans les régions urbaines et rurales. Au début, les gens croyaient que les ravageurs forestiers ne concernaient que les forêts en milieu rural; ils ne se rendaient pas compte qu'ils s'appliquaient à l'environnement urbain, et ils ont eu tort. Les ravageurs forestiers sont un thème majeur pour les forêts urbaines également.
    L'autre élément que je tiens à souligner au nom du Conseil canadien, c'est que nous examinons la question du point de vue non seulement économique, mais aussi environnemental. Des forêts en santé, c'est important pour le Canada du point de vue de la biodiversité, ce dont nous sommes assez fiers ici, et aussi pour les espèces en péril. Rares sont les stratégies sur les espèces en péril qui ne désignent pas les espèces envahissantes comme la principale menace qui cause le déclin. Si nous tenons compte du risque économique et environnemental, les espèces envahissantes et les ravageurs forestiers sont un énorme problème. Ils influent sur notre commerce. Nous mettons en place beaucoup de règlements commerciaux, et beaucoup de règlements sont imposés au Canada afin de réduire la propagation.
    Reconnaissant que vous avez probablement déjà une bonne idée des répercussions, je vais vous parler de certaines des choses qui, à notre avis, doivent être envisagées du point de vue des ravageurs forestiers. Je vais terminer par cinq mesures précises. D'abord, pour toutes les espèces envahissantes, y compris les ravageurs forestiers, du point de vue économique et environnemental, la meilleure chose à faire est de loin la prévention: il faut empêcher les espèces d'atteindre une région donnée ou le pays. Si c'est fait, la deuxième mesure est une intervention précoce et une éradication rapide. Si vous n'agissez pas immédiatement, vous vous retrouvez habituellement dans un mécanisme de contrôle afin de tenter de réduire et de contenir cette population. Toutes les recherches nous montrent constamment que la prévention est le meilleur outil et le plus rentable. Une prévention efficace ou une intervention rapide supposent une organisation dans l'ensemble des gouvernements, un bon plan et la compréhension des rôles, des responsabilités et des ressources, parce qu'aucun ravageur forestier ne reconnaît les frontières.
(1125)
    L'autre aspect que nous devons examiner, c'est que, même si nous parlerons peut-être d'un plus grand libre-échange ou commerce ouvert, lorsqu'il est question des ravageurs forestiers, vous voulez en réalité plus de barrières. Vous voulez plus de barrières en place, de manière à éviter de les faire venir ici. Le public doit être au courant afin de pouvoir agir. Bon nombre des ravageurs forestiers sont déplacés par les gens. Pour m'appuyer sur ce que M. MacLean a dit, les partenariats sont vraiment importants. Encore une fois, tout comme les ravageurs ne reconnaissent pas les administrations, vous devez conjuguer vos efforts à cet égard. Il n'est pas logique de s'attaquer à une espèce en Colombie-Britannique si l'Alberta s'attaque à une espèce différente. Nous serons tous deux inefficaces.
    J'ai quelques recommandations au nom du Conseil.
    D'abord, par-dessus tout, nous devons fermer les frontières. Vous avez parlé de la tordeuse des bourgeons de l'épinette et du dendroctone du pin ponderosa. Ces espèces existent déjà au pays. M. MacLean le sait beaucoup mieux que moi, mais un certain nombre de variétés de tordeuses des bourgeons de l'épinette existent. Ce sont des variétés indigènes à un certain lieu au Canada. Ce qui n'est pas indigène au Canada, c'est la spongieuse asiatique, je crois, ou la spongieuse rose. Ces espèces nous sont toutes étrangères. Si nous pouvions les garder à l'extérieur du pays...
    Certaines d'entre elles sont établies. La spongieuse européenne se trouve dans l'Est. Elle n'est pas dans l'Ouest. En ce moment, la spongieuse asiatique a été éradiquée du Canada. Si nous la laissons entrer, nous devrons assumer les frais nécessaires pour l'éradiquer et la contrôler dans l'avenir. Nous devons assurément fermer les frontières.
    Nous devons nous assurer qu'il existe au sein du Canada et entre nos frontières une collaboration transfrontalière. Tous les ravageurs forestiers qui entrent au pays arrivent généralement au moyen du commerce. Ils arrivent par cargo, par porte-conteneurs, etc. Oui, il y a des répercussions commerciales. Les emballages en bois doivent être traités. Beaucoup de porte-conteneurs qui arrivent pourraient apporter la spongieuse ou d'autres espèces.
    Nous devons solliciter l'industrie forestière. Il est très important de travailler en partenariat, parce que l'industrie forestière est directement intéressée par l'aspect économique. Elle peut aussi assumer le rôle de chef pour nous aider à réduire la propagation au sein du pays, en adoptant et en mettant en oeuvre des pratiques exemplaires. Une bonne partie de l'industrie travaille maintenant en vertu de différents programmes de certification de la forêt. De plus en plus de ces programmes de certification reconnaissent ces pratiques exemplaires.
    Le bois de chauffage a été reconnu comme une des voies d'entrée, au sein du Canada et à l'extérieur du pays, pour ce qui est de la propagation des ravageurs forestiers. Notre conseil travaille avec Ressources naturelles Canada, l'ACIA et d'autres partenaires pour s'assurer qu'une campagne nationale est en place afin de mettre fin au mouvement du bois de chauffage. Oui, cela s'applique à des régions réglementées pour des ravageurs particuliers qu'Environnement Canada ou l'ACIA a réglementés, mais cela s'applique aussi à l'extérieur de cette zone. De la même façon que nous voyons maintenant des gens recycler, nous espérons que les gens pourront gérer le bois de chauffage de façon responsable dans l'avenir.
    Partout au Canada, il existe des règlements différents pour des ravageurs forestiers différents, et beaucoup d'endroits n'ont pas de règlements. Encore une fois, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux doivent étudier cette situation et comprendre où sont les lacunes dans nos règlements, de sorte que nous puissions ou bien les combler ou bien les contourner. Un élément important pour le Conseil, c'est de s'assurer que nous avons des carrefours d'information nationaux. C'est ressorti dans chaque forum sur les espèces envahissantes que nous avons tenu. Pouvons-nous avoir une meilleure cartographie nationale, de sorte que les gens puissent savoir dans quelle mesure l'espèce envahissante X s'est propagée? Où se trouve ce ravageur forestier? Qu'est-ce qui vient de Washington ou du Sud?
    Ces carrefours d'information nationaux nous aideraient aussi à mobiliser les gens. Bien souvent, la plupart des espèces envahissantes ont été signalées par des citoyens, des citoyens mobilisés qui ont signalé l'insecte bizarre qui se trouvait dans leur cour ou le poisson bizarre qu'ils ont vu. Il est très important d'amener les gens à signaler les espèces envahissantes.
    On devrait assurément consentir des investissements dans la recherche, pas seulement du point de vue de la surveillance, mais aussi pour voir ce que nous pouvons faire si la spongieuse rose arrive bel et bien au Canada — ou la nonne, à côté de laquelle la spongieuse ne présentera plus aucun intérêt. Si cela arrive, les outils doivent être prêts à servir.
    J'aimerais terminer avec quelques commentaires. D'abord, nous devons être préparés. La Nouvelle-Zélande et l'Australie donnent souvent l'exemple en ce qui concerne la biosécurité. Nous avons des restrictions commerciales pour l'emballage du bois. Nous avons aussi des processus de précertification des conteneurs pour ceux qui arrivent au Canada et qui sont vérifiés dans d'autres ports. Toutefois, nous n'avons pas un des outils que possède la Nouvelle-Zélande, c'est-à-dire la précertification des véhicules d'occasion. Les véhicules d'occasion sont en fait une voie d'entrée majeure pour les espèces envahissantes. C'est là que se cacheront des masses d'oeufs, etc., et où elles seront déplacées. Nous pourrions donc mieux examiner des pays comme celui-là.
(1130)
    Parmi certains des outils utilisés dans le Sud, mentionnons la contribution de tous les partenaires à la biosécurité du pays. Le gouvernement fédéral, les États, l'industrie et les importateurs — le commerce — contribuent tous à la biosécurité entourant ces pays. Ce seront des outils, parce que les ressources seront toujours un enjeu.
    J'aimerais terminer et vous remercier tout particulièrement d'avoir mis cette question à l'ordre du jour et reconnu que les ravageurs forestiers sont un grand problème pour le Canada. Je vous remercie de votre temps.
    Merci à vous deux.
    Monsieur Whalen, je crois que vous allez commencer.
    Merci, monsieur le président, et merci à vous deux d'être venus.
    C'est un sujet très important et intéressant, particulièrement puisque nous faisons face à des crises, mais je m'interroge à ce sujet, quand je regarde certaines des données que nous avons reçues par rapport à la somme d'argent que les gouvernements dépensent là-dessus.
    On a vraiment l'impression d'être en mode gestion de crise tout le temps. Il faudrait plutôt utiliser un certain type de processus continu où les gouvernements interagissent avec la forêt, de façon bien organisée, qui nous permettrait de gérer tous ces ravageurs pour toujours, mais je me demande aussi si nous pourrions encore une fois nous tromper et aller trop loin, en ce qui concerne peut-être pas les espèces envahissantes, mais certainement la tordeuse des bourgeons de l'épinette.
    Monsieur MacLean, devrions-nous gérer ces ravageurs comme nous les gérons? Devrions-nous dire, eh bien, nous avons reconnu qu'ils arrivent ici, donc pourquoi ne pas éliminer ce peuplement et extraire la valeur économique de ce peuplement avant que le ravageur s'y installe? Nous le gérerions ensuite tout simplement comme une perte économique, plutôt que de toujours essayer d'optimiser la valeur future de quelque chose que la nature ne nous laisse pas faire?
    C'est une bonne question. Merci.
    Une partie de la difficulté tient à l'échelle. Si c'était une petite échelle, des régions isolées, je pense que nous pourrions faire ce que vous dites. Nous pourrions y aller et le faire, mais regardez juste la province de Québec, où l'épidémie a commencé vers 2005-2006 sur la Côte-Nord, au nord de Baie-Comeau et est devenue de plus en plus grande, de sorte que, en 2017, 7 millions d'hectares étaient touchés. C'est maintenant 8,2 millions d'hectares en fonction des relevés de cette année. Même malgré toute la récupération qu'on peut faire, il n'y a pas d'accès routier dans le Nord, et la récolte est juste impossible là-bas.
    La province de Québec répand des insecticides pour essayer de garder les arbres vivants. C'est son approche. On a dépassé le temps où une approche en matière d'intervention précoce pouvait fonctionner. Elle répand des insecticides sur environ 250 000 hectares ou quelque chose de cet ordre-là parmi les 7 ou 8 millions d'hectares de superficie.
    La récupération, la récolte et la restructuration de la forêt sont essentielles, en plus d'une certaine utilisation d'insecticides. Les trois éléments peuvent être fusionnés dans le cadre d'une approche de planification intégrée à long terme, où vous utilisez la récolte pour réduire la vulnérabilité et utilisez la récupération à certains endroits et des insecticides dans d'autres. C'est ce que nous avons fait dans d'autres provinces.
    C'est peut-être un bon moment pour moi d'intervenir, monsieur MacLean.
    Il semble que le Nouveau-Brunswick assume ce rôle et que, dans le cadre du Partenariat pour une forêt en santé que vous avez, vous faites déjà cela de certaines façons. Vous mettez à l'essai l'intervention précoce et l'utilisation à petite échelle de pesticides et que sais-je encore.
    Procédez-vous au défrichage et à la récolte ou à la récolte sélective en lien avec ce programme? Ou vous contentez-vous de piloter et de mettre à l'essai des interventions précoces avec des insecticides à cette étape-ci?
    Je pense qu'avec la récolte, on essaie de cibler le vieux sapin baumier de toute façon, les espèces les plus vulnérables. J.D. Irving est l'entreprise la plus active en ce qui concerne la plantation. Dans certains de ses territoires privés, elle a vraiment prévu remplacer le sapin baumier par l'épinette, qui est moins vulnérable et plus productive. Sur son territoire du district de Black Brook, elle a fait cela pour la plupart des régions.
    S'il y a beaucoup de sapins baumiers, c'est difficile de les éliminer au complet, donc l'éclaircie précommerciale des jeunes sapins se fait également dans certaines autres régions. Cela les rend moins vulnérables, mais pas non vulnérables. Je pense que cette méthode est utilisée.
(1135)
    Si le Nouveau-Brunswick et les entreprises le font déjà et essaient de gérer activement la forêt, du moins sur les terres privées, quel rôle le gouvernement fédéral doit-il jouer au moment d'entrer dans cette relation?
    Ce que nous essayons de faire avec cette stratégie d'intervention précoce du Partenariat pour une forêt en santé ne pourrait se concrétiser sans le gouvernement fédéral. On ne pourrait se le permettre. Je crois que le rôle, tant du point de vue de la recherche interne à Ressources naturelles Canada... notre groupe est composé de plus de 30 scientifiques qui travaillent sur un vaste éventail de projets. Au total, 10 projets différents dont je n'ai pas parlé et auxquels RNCan contribue sont en cours.
    Le financement sert à appliquer le niveau de traitements qui sont requis. Nous prévoyons un traitement pouvant aller jusqu'à 550 000 hectares d'ici deux à trois ans, lorsqu'on atteindra le sommet de l'épidémie. Cela dépend un peu de ce qui se passe au Québec et de la quantité de papillons qui sont exportés vers le sud jusqu'au Nouveau-Brunswick. On a connu un cas vraiment grave de ce genre en 2016. Nous nous en sommes tirés facilement cette année. C'est plus facile si la province n'exporte pas de papillons vers chez nous. En réalité, la province en a envoyé quelques-uns à Terre-Neuve cette année, semble-t-il.
    Nous devrions peut-être nous assurer que le Partenariat pour une forêt en santé est mobilisé à cet égard pour faire des interventions précoces.
    Voulez-vous dire au Québec ou à Terre-Neuve? C'est un partenaire à Terre-Neuve, donc le travail se fait à l'échelle de l'Atlantique. En ce moment, l'activité a cours dans le Nord du Nouveau-Brunswick, mais la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve sont des provinces actives et y participent. Nous avons tenu plus tôt cette semaine une réunion où les représentants de Terre-Neuve ont fait savoir qu'ils pourraient avoir quelques régions à traiter au cours de l'année à venir.
    Madame Wallin, dans la même veine, de l'autre côté du pays, des espèces envahissantes arriveront tout le temps, pas seulement des ravageurs forestiers, mais d'autres plantes et dans les océans. Quel financement durable existe actuellement à l'échelle nationale pour des organisations comme la vôtre et d'où proviendrait-il?
    Je ne crois pas que des fonds fédéraux ciblés aient été prévus à grande échelle pour des organisations comme la nôtre. Environnement Canada nous fournit un peu d'argent, ou les gouvernements provinciaux le font, mais je crois que là où vous voulez en venir, c'est d'où les fonds devraient provenir. Est-ce bien votre question?
    Eh bien, votre travail ou le travail de votre organisation ne prendra pas fin demain. Il n'y a pas une seule crise, et une fois que c'est réglé... c'est un problème continu qui existera tant et aussi longtemps qu'il y aura du commerce international et des changements climatiques. Quel type de financement stable des programmes est en place pour faire en sorte que votre organisation continue de faire son travail indéfiniment?
    Il n'y a pas de financement stable, et il ne devrait probablement jamais y avoir une seule source de financement stable. Les fonds doivent provenir de partenariats, des échelons fédéral, provincial et privé. C'est le modèle que notre Conseil tente d'atteindre. Nous n'en sommes pas encore là.
    Qui sont certains de vos partenaires privés?
    Nos partenaires privés nous viennent de l'industrie, comme l'industrie horticole, mais pas encore de l'industrie forestière. Nous sommes en train d'en courtiser quelques-uns, que je ne nommerai pas en ce moment, qui travaillent avec nous dans le secteur du bois de chauffage. Nous espérons qu'ils seront tous des bailleurs de fonds. Pour les industries à grande échelle, de J.D. Irving aux Produits forestiers du Canada, la réduction du mouvement — dans notre cas, le bois de chauffage est un exemple — sera en réalité un outil pour eux. Tout comme notre modèle de partenariat pour une forêt en santé, où on trouve des représentants du gouvernement fédéral, des provinces et de l'industrie privée, ce modèle doit s'appliquer au travail que nous faisons.
    Mon temps est écoulé. Merci beaucoup.
    Monsieur Falk, vous êtes le prochain.
    Merci, monsieur le président, et merci à nos témoins. J'ai bien aimé écouter vos témoignages jusqu'à présent. De toute évidence, vous êtes passionnés par votre travail et très renseignés, et je le reconnais.
    Madame Wallin, je vais commencer par vous. Vous avez parlé des espèces naturelles ou indigènes et des espèces plus invasives. Quelle est votre opinion par rapport à certaines des espèces indigènes que nous avons, comme le dendroctone du pin ponderosa. Y a-t-il des façons de l'éradiquer?
    Il y a deux choses: les espèces indigènes comme le dendroctone du pin ponderosa, comme la tordeuse des bourgeons, sont indigènes de certains endroits au Canada. Leur mire de répartition s'est étendue. C'est entièrement associé aux changements climatiques, à la configuration des vents, etc. Je ne crois pas qu'on ait au Canada comme objectif d'éradiquer des espèces. Cela n'est pas conforme à notre façon de voir la biodiversité. Nous voulons les maintenir, mais ce qui se passe avec les espèces indigènes comme celles-là, c'est qu'elles atteignent un sommet durant le cycle et elles vont vraiment exploser. Une partie de ce problème est liée à la gestion forestière, et si elles ont explosé, c'est peut-être en raison de l'absence de feux de forêt ou d'un nombre trop élevé de feux de forêt ou de quoi que ce soit d'autre. Je viens d'un monde où il n'y avait pas assez de feux, et nous en avons maintenant en abondance. Ce sont nos outils. Lorsque vous touchez des espèces indigènes et que celles-ci ont des répercussions sur le plan de l'économie et de la biodiversité, comme les deux que vous avez mentionnées, c'est davantage une question de contrôle. Comment pouvez-vous réduire leurs répercussions? Vous n'essayez pas de les éradiquer. Avec les espèces étrangères, vous essayez d'en prévenir l'apparition, puis de les éradiquer, donc les répercussions économiques ne sont pas les mêmes.
(1140)
    Y a-t-il des avantages pour l'une de vos espèces, comme le dendroctone du pin ponderosa? Jusqu'à présent, les discussions ont porté entièrement sur le fait qu'il n'y a rien de positif au sujet du dendroctone du pin ponderosa. Y a-t-il quelque chose de positif?
    Je dois répondre du point de vue de la biodiversité — et comme M. Cannings est à mes côtés, je suis certaine qu'il pourrait prendre la parole — : toutes les espèces indigènes ont un rôle à jouer dans nos écosystèmes naturels. Si on élimine une de ces espèces, les moustiques étant les insectes évidents dont nous nous plaignons toujours, ils ont un rôle très fonctionnel... Ce à quoi nous avons affaire, c'est que nous avons vu des explosions de certains de nos ravageurs forestiers, surtout en raison... ce pourrait être attribuable en partie à la météo, mais la partie sur laquelle nous pouvons agir, c'est notre gestion forestière, notre protection-incendie. Nous pouvons changer ces choses pour réduire au minimum la hausse ou les niveaux d'épidémie. Notre Conseil canadien n'a pas réclamé l'éradication d'espèces indigènes.
    D'accord, c'est très intéressant, merci.
    J'aimerais juste poser une question pour obtenir quelques précisions. De quoi le Conseil canadien sur les espèces envahissantes est-il formé? M. Whalen a posé quelques questions à ce sujet, mais comment avez-vous commencé? L'industrie a-t-elle décidé de former un conseil?
    Non.
    Environnement Canada a déclenché un forum national sur les espèces envahissantes à Ottawa il y a plus de 10 ans. La question à l'époque — pour m'appuyer sur ce qu'on appelle une stratégie nationale sur les espèces exotiques envahissantes pour le Canada, qui était dirigée par Environnement Canada — c'était de quoi le Canada a-t-il besoin de plus?
    Une des principales recommandations qui sont ressorties de ce forum, c'était l'appel lancé en faveur d'une voix nationale non gouvernementale pour les espèces envahissantes. Voici ce à quoi les choses devraient ressembler, et voilà ce qui était le mandat. On a mis cela ensemble et a tenu un autre forum national l'année suivante ou deux ans après cela. Les gouvernements fédéral et provinciaux ont été très clairs lorsqu'ils ont dit: « Nous avons besoin de quelque chose d'extérieur au gouvernement pour compléter le travail que nous faisons à l'intérieur du gouvernement. » De toute évidence, les organismes à but non lucratif comme nous n'ont aucun pouvoir, mais nous avons les moyens d'influencer les autres d'une façon différente.
    Quel pouvoir avez-vous lorsque vous le détectez?
    Aucun. Nous ne voulons pas de pouvoir. Vous en avez beaucoup autour de la table.
    Quel est votre plan d'action lorsque vous relevez un problème?
    Je vais utiliser un exemple de la Colombie-Britannique que je connais personnellement. Il y a un tout nouveau scarabée — c'est une préoccupation dans les forêts urbaines — qui s'appelle scarabée japonais. Nous avons tenu un atelier et attiré l'attention sur celui-ci. Ce qu'on a demandé, c'était de mettre sur pied un comité multipartite qui interviendrait à ce sujet. Cela a permis de rassembler le gouvernement fédéral, le gouvernement provincial, l'industrie, l'administration locale et les Autochtones, qui se sont posé la question: que voulez-vous faire de plus au sujet de ce scarabée japonais?
    C'est le rôle d'une organisation sans but lucratif. Parfois, nous pouvons faciliter la prise d'une mesure. C'est plus facile pour nous de le faire. Parfois, nous pouvons obtenir et retenir des fonds à l'extérieur du gouvernement, et ils sont plus faciles à dépenser. Nous l'avons fait — détenir de l'argent qui peut être dépensé et qui n'est pas associé à une fin d'exercice, parce que le cycle de ce scarabée pourrait ne pas très bien respecter le 31 mars.
    Cela ne fonctionne pas toujours.
    Non, ça ne fonctionne pas très bien. C'est à ce moment-là que nous pouvons aider.
    Nous pouvons mobiliser les Canadiens d'une façon différente de ce que les gouvernements peuvent faire. C'est plus rapide pour nous de répondre sur notre site Web. C'est plus rapide pour nous de répondre à des gens que, souvent, ce que les gouvernements peuvent faire. C'est juste la vie.
    Estimez-vous avoir une collaboration suffisante avec les intervenants et les décideurs, tant de l'industrie privée que du gouvernement?
    Il y a beaucoup plus de choses que nous pourrions faire.
    Au cours des cinq dernières années, les espèces envahissantes sont devenues une question beaucoup plus pressante au gouvernement et dans l'industrie. Je pense que les prochaines étapes sont importantes, et il y a encore beaucoup de travail à faire.
    Merci, madame Wallin.
    Monsieur MacLean, dans votre exposé, vous avez dit que 2 % des propriétaires fonciers ne veulent pas d'aide dans le cas d'une infestation de la tordeuse des bourgeons de l'épinette. Comment vous occupez-vous de cela, ou ne voulez-vous pas vous occuper de cela? Êtes-vous heureux de cette situation?
    Nous avons consenti beaucoup d'efforts pour essayer de communiquer ce que nous faisons, pourquoi et comment nous le faisons et les conséquences de l'inaction. En vertu de nos règlements provinciaux, on doit communiquer avec tout propriétaire foncier, et celui-ci peut choisir de se retirer de n'importe lequel de nos traitements. C'est ce avec quoi nous avons travaillé.
    Au cours de la dernière année, je pense que nous voulions traiter environ 400 boisés individuels infestés par la tordeuse des bourgeons. Dans certains cas, des gens se sont retirés une année, puis ils ont choisi de participer encore l'année suivante.
(1145)
    Pouvez-vous dire au Comité pourquoi ils choisissaient de se retirer?
    Parfois, c'est parce qu'ils n'aiment pas le gouvernement actuel ou qu'ils n'aiment aucun gouvernement, parce qu'ils ne veulent pas d'ingérence ou peut-être parce qu'ils sont très préoccupés par rapport à toutes sortes d'utilisations de pesticides. Ce pourrait être autre chose.
    Nous nous donnons beaucoup de mal pour essayer d'expliquer que les pesticides que nous utilisons... le Bacillus thuringiensis est une bactérie qui se retrouve naturellement dans le sol qui est cultivé. Ce n'est pas un poison. L'insecte doit la manger. C'est la même chose avec le tébufénozide. C'est un régulateur de croissance qui est propre à la tordeuse des bourgeons. C'est beaucoup plus facile à vendre qu'à l'époque du DDT ou des pesticides chimiques, mais certaines personnes ne veulent rien du tout.
    Ce sont des propriétaires fonciers privés.
    Qu'arrive-t-il lorsque vous avez affaire à des propriétaires fonciers provinciaux ou fédéraux? Comment réagissent-ils, de façon générale, lorsque vous avez repéré une infestation et que vous aimeriez faire quelque chose pour y réagir?
    Nous n'en avons pas encore rencontré dans les parcs nationaux. Nous n'avons encore pas vu de tordeuse des bourgeons dans ces parcs. Au Nouveau-Brunswick, nous avons le parc national Kouchibouguac et le parc national Fundy et nous entamons des pourparlers avec eux. Cela pourrait être un enjeu. Nous essaierions de leur faire part des conséquences — ce qui se passerait dans leurs forêts si nous ne faisions rien et pourquoi nous le faisons.
    Nous avons eu un problème avec des aires naturelles protégées au Nouveau-Brunswick, où un conseil consultatif scientifique s'occupe de ces aires. Habituellement, celles-ci seraient mises de côté, et on n'y ferait rien. Quelques questions ont été soulevées par rapport au fait que nous ne laissons pas la tordeuse des bourgeons suivre son cycle normal dans ces aires. Les règlements permettent que le ministre provincial prenne une décision à cet égard, et il a choisi de faire traiter ces aires naturelles protégées. Nous avons eu beaucoup de mal à essayer de parler aux membres de leur conseil consultatif scientifique afin d'obtenir leurs commentaires et d'expliquer les raisons.
    Merci.
    Monsieur Cannings, c'est à vous.
    Merci à vous deux d'être venus aujourd'hui. La discussion a été très intéressante. J'apprends beaucoup de choses dans ces réunions du Comité. J'ai appris des choses de M. MacLean. Et je sais que, en Colombie-Britannique, la tordeuse occidentale de l'épinette mange le douglas de Menzies et en ce moment, je découvre que la tordeuse des bourgeons de l'épinette mange le sapin baumier. J'aimerais vous demander pourquoi on ne l'appelle pas la tordeuse des bourgeons du sapin, mais je voulais plutôt revenir sur vos commentaires au sujet de la résilience des forêts, de la planification d'avenir et peut-être parler un peu du rôle du gouvernement fédéral à cet égard.
    Comme Mme Wallin le disait, en Colombie-Britannique, l'épidémie du dendoctrone du pin ponderosa a radicalement changé nos forêts et l'avenir de notre industrie forestière. Elle a non seulement tué beaucoup d'arbres, mais en plus, les opérations de récupération par la suite ont produit beaucoup de coupes à blanc. Je suis sûr qu'on plante maintenant dans ces zones de coupe à blanc du pin tordu plutôt qu'un mélange d'essences.
    Les scientifiques ont exprimé beaucoup de préoccupations, à l'époque, au sujet de ce à quoi ces forêts ressembleraient dans l'avenir, si nous continuions cette récupération en respectant les plans. Comme vous le savez, le pin tordu est une espèce de transition qui abrite tous ces jeunes sapins et épinettes, qui peuvent parfois avoir 80 ou 100 ans. Lorsque nous faisons une coupe à blanc dans les pins morts, nous perdons des forêts résilientes très diversifiées d'arbres vieux de 50 à 80 ans qui se trouvent en dessous.
    Pourriez-vous expliquer vos idées au sujet des aspects de la sylviculture? Comment devrions-nous planifier les choses dans l'avenir, la façon dont nous concevons ce que nous plantons, pour assurer la biodiversité de ces forêts; en quoi cela pourrait-il nous aider dans le cas d'une infestation future d'insectes?
    C'est une bonne question. Je pense que la réponse à votre question provient de la compréhension des patrons de succession qui sont associés à des niveaux différents d'épidémie et de la relation des espèces avec les caractéristiques des sites.
    Dans le cadre de notre projet, on s'est beaucoup intéressé à examiner les effets bénéfiques qui ont été observés en raison d'un mélange d'espèces, comme dans le cas du bois dur mélangé avec le sapin baumier. Nous l'avons vu à maintes reprises, lorsqu'un étudiant au doctorat détermine le mécanisme de tout cela, mais les effets semblent être associés à des parasitoïdes et à une plus riche diversité de parasitoïdes dans ce mélange d'espèces. Certaines espèces ont besoin d'autres hôtes intermédiaires de bois dur, donc il y a assurément un avantage à cela.
    Nous avons constaté que cela se produit non seulement dans les peuplements, mais aussi dans l'ensemble du pays. Si vous avez une plantation qui se trouve à côté d'un peuplement de forêt mixte, il pourrait y avoir un avantage, à l'intérieur d'une certaine fourchette.
    La planification des paysages forestiers doit aussi tenir compte des produits et de ce que vous essayez de faire pousser et ce pourquoi vous allez les utiliser. Donc on doit en tenir compte en partie, en plus de prévoir une diversité dans l'ensemble de la plantation et d'essayer de cultiver cela. Une des choses que vous essaieriez de faire, c'est de modifier la répartition des classes d'âge, ainsi que la composition des espèces, en fonction des paysages.
    Beaucoup de théories ont été émises à ce sujet pendant des dizaines d'années, mais comme je l'ai dit dans ma dernière recommandation, c'est très difficile de le faire à grande échelle, parce que cela nécessite vraiment un grand paysage. Je pense que c'est pourquoi une de vos recommandations pourrait viser à faciliter cela au moyen de partenariats dans différentes régions du Canada aux prises avec différents ravageurs forestiers.
(1150)
    En ce qui concerne le changement de la répartition des classes d'âge, je suppose que cela s'éloignerait des grandes coupes à blanc et se rapprocherait davantage de la récolte sélective dans des petites parcelles ou quelque chose du genre. Le Service des forêts mène-t-il des recherches sur ce genre de choses à long terme? Je comprends ce que vous dites au sujet de la planification concernant l'aspect économique des choses. La plupart des usines de ma circonscription accordent une grande importance à certaines espèces, et elles veulent donc pas que d'autres espèces soient cultivées. Elles accordent une grande importance au pin ou au douglas de Menzies. Le gouvernement fédéral fait-il cela? Les forêts sont là à long terme. Je pense que c'est à cet égard que le gouvernement devrait jouer un rôle.
    Il y en a peut-être. Je pense qu'il pourrait y en avoir davantage. Une partie de la difficulté tient au fait que ce ne peut pas être juste le gouvernement fédéral. Cela doit être fait en partenariat avec les provinces et avec l'industrie qui détient le permis pour ce territoire; ils doivent travailler ensemble, mais je pense que cela pourrait être facilité par l'entremise du gouvernement fédéral.
    Je vais passer à Mme Wallin.
    Vous avez mentionné plusieurs fois la spongieuse. Je sais que vous avez dit que nous n'avons pas la spongieuse en Colombie-Britannique, mais chaque année, nous en repérons quelques-unes.
    C'est exact. Je me corrige. Ce n'est pas établi.
    Non, ce n'est pas établi, et je sais qu'on les vise dès qu'on en trouve. Est-ce quelque chose que votre groupe coordonne dans l'ensemble du pays? Y a-t-il une équipe responsable de la spongieuse? Comment cela fonctionne-t-il?
    Deux spongieuses présentent une préoccupation particulière. La spongieuse européenne a été éradiquée, sous la direction du gouvernement provincial. Cela fait maintenant à peu près 20 ans. Chaque année, il prend des mesures, et cette année, cela a supposé beaucoup de nouveau travail sur l'île de Vancouver. Le gouvernement dirige cela.
    La spongieuse asiatique est une espèce réglementée, et ce programme est dirigé par l'ACIA. Notre organisation n'a pas participé à cela parce que deux espèces sont... La spongieuse asiatique est réglementée comme ne se trouvant pas au Canada en ce moment. Elle a été trouvée à Toronto, et on l'a retirée. Nous estimons maintenant en être débarrassés.
    Notre organisation participerait, si j'utilise uniquement la spongieuse comme exemple, pour réclamer... Un des rôles du gouvernement fédéral, c'est d'essayer d'empêcher la spongieuse asiatique, la spongieuse rose et d'autres spongieuses d'entrer. Nous avons vu des exemples de spongieuses asiatiques qui arrivent dans des porte-conteneurs. Le gouvernement fédéral ne mène qu'un certain pourcentage d'inspections sur les porte-conteneurs, et lorsque vous en découvrez sur 3 ou 5 % des conteneurs que vous inspectez, vous savez que vous avez raté beaucoup d'entre elles, et que c'est de là qu'elles viennent.
    Encore une fois, nous conseillons de fermer cette frontière pour que ces spongieuses ne puissent pas entrer.
    Merci.
    Madame Wallin, si vous croyez que les spongieuses ont été éliminées en Ontario, je vous inviterais à venir vous asseoir dans ma cour en juillet.
    La spongieuse européenne qui se trouve ici dans l'Est abonde. Vous n'avez pas encore de spongieuse asiatique et vous n'en voulez pas non plus. Je crois que ce qui abonde ici, c'est seulement l'espèce européenne.
    Je vais devoir surveiller mon langage ici.
    Des voix: Ha, ha!
    Monsieur Tan.
    Monsieur MacLean, j'aimerais poser une question au sujet de la lutte antiparasitaire.
    Vous venez de dire qu'un propriétaire privé peut choisir de se retirer de tout plan de lutte ou de toute stratégie d'intervention précoce. Je crois comprendre que la responsabilité de la lutte contre les ravageurs forestiers au Canada dépend de la nature du ravageur et du lieu des épidémies.
    Est-ce la seule propriété forestière qui détermine cette responsabilité? Le cas échéant, les gouvernements fédéral et provinciaux ou les administrations municipales sont-ils responsables de la lutte antiparasitaire au sein de leur administration particulière? Qu'en est-il des propriétaires forestiers privés? Ils sont peut-être responsables de leur propre forêt. Comme on l'a dit, qu'arrive-t-il s'ils n'aiment pas une personne et qu'ils restent juste là à regarder les ravageurs forestiers se répandre dans d'autres régions?
(1155)
    Cela dépend du ravageur, de l'insecte, je suppose. Si c'est un insecte envahissant, il existe des rôles pour l'Agence canadienne d'inspection des aliments et Ressources naturelles Canada. Si c'est un insecte indigène dans la forêt, le gouvernement provincial a probablement un rôle à jouer, dans l'ensemble, pour déterminer ce qu'on fait avec cela. Si c'est au sein d'une municipalité, il y a un fort rôle municipal.
    J'ai parlé du cas particulier de la tordeuse des bourgeons de l'épinette et de notre projet de recherche sur les interventions précoces. Dans le passé, si on pulvérisait de l'insecticide pour essayer de garder les arbres vivants dans un mode réactif, cela se concentrait probablement surtout sur les terres de la Couronne, les terres de la Couronne provinciale et les terres industrielles, et moins sur les boisés privés, mais peut-être un peu sur ceux-ci. Cela dépend de l'insecte.
    C'est un exemple extrême, mais qu'arrive-t-il si je suis propriétaire de mes terres ou de ma forêt et que je dis au gouvernement provincial de juste se tenir loin de mes terres?
    Dans la situation du Nouveau-Brunswick et dans le cadre des règlements du Nouveau-Brunswick, vous avez le droit de le faire, et le gouvernement ne peut pas superviser cela.
    Dans un de mes cours de premier cycle, j'enseigne la gestion des incendies et je retiens toujours l'exemple de l'État de la Floride. L'État a la capacité d'aller sur des terres privées et de faire des brûlages dirigés pour contrôler les combustibles qui s'y trouvent. C'est assez extrême du point de vue des droits de propriété privée au Canada.
    Merci.
    Madame Wallin, je suis curieux. J'ai posé la question au sujet des espèces envahissantes il y a quelques jours à un autre témoin, mais je ne crois pas avoir reçu une bonne réponse, donc j'aimerais vous la poser.
    Pourriez-vous nous faire part d'un ou de deux bons exemples réussis où ces espèces envahissantes ont été bel et bien détruites ou contrôlées au sein de leur région?
    Je pense qu'une histoire de réussite a trait à la spongieuse asiatique, que nous avons en réalité été en mesure d'éradiquer du Canada. Elle a été détectée au Canada, en Colombie-Britannique et en Ontario, et aussi dans la région de Toronto. Toutefois, grâce à la collaboration des gouvernements fédéral et provinciaux, elle a été éradiquée. Donc, il y a une spongieuse qui n'est pas devenue la spongieuse européenne que nous retrouvons dans l'Est.
    Une autre histoire de réussite au sujet des spongieuses — il y a beaucoup d'autres exemples — c'est celle de la spongieuse européenne en Colombie-Britannique, car qui l'aurait cru...? Il y a 20 ans, on épandait du D6 sur de vastes territoires. L'épandage aérien qu'on a effectué cette année a suscité des réactions sur l'île de Vancouver. Toutefois, le gouvernement provincial a fait de l'épandage pendant des années, et nous n'avons pas de spongieuses européennes établies en Colombie-Britannique.
    Ce sont des histoires de réussite, et je crois que nous devons nous appuyer sur elles, parce que la meilleure mesure consiste, de loin, à les tenir à l'écart plutôt qu'à les pourchasser.
    Je suis très heureux d'entendre cette histoire de réussite.
    Quels dommages la spongieuse a-t-elle causés à la forêt par rapport à d'autres espèces indigènes ou envahissantes?
    Je n'étais pas préparée à vous fournir ces chiffres. La spongieuse européenne établie en Ontario a causé de graves dommages économiques, et c'est pourquoi le gouvernement de la Colombie-Britannique lutte fortement contre elle. En comparaison, la spongieuse européenne et la spongieuse asiatique — et n'oubliez pas, en arrière-plan, la spongieuse rose — ciblent une bonne partie des espèces d'arbres économiques, donc elles auront les plus grandes répercussions. Ce qu'il y a de différent chez ces espèces par rapport à des ravageurs comme la tordeuse des bourgeons de l'épinette ou le dendroctone du pin ponderosa, c'est que, par le passé, dans une forêt bien gérée, elles n'auraient pas eu un cycle élevé aussi important que ce que nous connaissons en ce moment. Lorsque la spongieuse européenne ou quoi que ce soit d'autre arrive, elle n'a pas de prédateurs naturels, et c'est pourquoi nous sommes toujours préoccupés. Ce n'est pas le dendroctone du pin ponderosa de l'Ouest.
(1200)
    Je souligne qu'il y a aussi, en plus de RNCan, d'autres organismes gouvernementaux. On peut mentionner l'Agence canadienne d'inspection des aliments, l'Agence des services frontaliers du Canada, Santé Canada et ainsi de suite. À quoi ressemble la communication entre ces organismes ou ces ministères?
    On doit faire davantage, mais assurément, au sein des gouvernements en ce moment, le modèle FPT — fédéral, provincial, territorial — est employé en ce qui concerne les espèces envahissantes et le groupe de travail sur les ravageurs forestiers. On doit faire davantage, et il doit y avoir plus de collaboration avec des organisations extérieures. Même si nous n'avons pas de pouvoir ni de responsabilités, nous avons la capacité d'être complémentaires et de vraiment aider. C'est une bonne chose, car nous n'avions pas cette capacité il y a 10 ans, mais nous avons besoin d'autres choses.
    Qui supervise ce modèle FPT?
    Le Comité national sur les espèces envahissantes est présidé par Environnement et Changement climatique Canada avec une province. Le groupe de travail sur les ravageurs forestiers est présidé par RNCan, et je crois que c'est avec une province, mais je ne suis pas certaine. Ce sont deux modèles. Le groupe de travail sur les ravageurs forestiers, qui concerne précisément... Il est probable que la plupart des provinces participent; certaines d'entre elles participent plus que d'autres.
    Donc, il est toujours nécessaire que RNCan et Environnement et Changement climatique Canada travaillent ensemble afin de mettre en commun leurs renseignements.
    Absolument, avec l'ACIA. Toutefois, le joueur important qui n'apparaît probablement pas sur cette liste et dont nous voulons parler est l'Agence des services frontaliers du Canada. C'est elle qui doit les freiner à la frontière.
    Merci.
    C'est tout le temps que nous avons pour cette heure. Je vous remercie d'avoir pris le temps de vous joindre à nous aujourd'hui et d'avoir fourni des renseignements très utiles pour notre étude.
    Nous allons suspendre nos travaux pendant cinq minutes ou moins.

(1205)
    Reprenons.
    Monsieur Chubaty, merci beaucoup de vous joindre à nous aujourd'hui depuis Yellowknife. Nous sommes sur le point de commencer une heure de témoignages, et vous êtes notre témoin.
    Mesdames et messieurs, je vous demande votre consentement. Je crois comprendre que notre témoin aimerait utiliser une image. Elle n'est qu'en anglais et elle sera traduite plus tard. Nous l'obtiendrons plus tard en français.
    Êtes-vous tous d'accord?
    Des députés: D'accord.
    Le président: Monsieur Chubaty, la parole est à vous.
(1210)
    Depuis la fin des années 1990, plus de 18 millions d'hectares de forêts de pin ont été tuées par le dendroctone du pin ponderosa en Colombie-Britannique. Le dendroctone appartenant à ces populations à forte densité en Colombie-Britannique s'est répandu vers l'est et le nord, au-delà des montagnes Rocheuses et jusqu'en Alberta, dans des forêts où ne se trouvait pas, par le passé, le dendroctone du pin ponderosa. Vous pouvez le voir sur l'image que j'ai fournie ici. C'est une carte qui vous donne un aperçu des trois provinces de l'Ouest, donc la Colombie-Britannique, l'Alberta et une partie de la Saskatchewan. Ce qui est coloré en jaune, en orange et en rouge montre les dommages causés par le dendroctone du pin ponderosa. Vous pouvez voir qu'ils se concentrent surtout en Colombie-Britannique, avec quelques dommages importants dans la partie Ouest de l'Alberta. En vert, vous verrez la disponibilité et la répartition des pins. C'est le pin gris, le pin tordu et le pin hybride qui composent les forêts de la Colombie-Britannique et de l'Alberta, et le pin gris se retrouve vers l'est jusqu'en Saskatchewan.
    Vous verrez aussi sur cette image une ligne rouge qui traverse l'Alberta. Il s'agit du front de l'infestation du dendroctone du pin ponderosa vers 2012. Cela ressemble assez à la situation aujourd'hui. Le front de l'infestation s'est déplacé un peu, mais cela vous permet de bien comprendre la situation actuelle.
    Cette expansion de l'aire du dendroctone du pin ponderosa menace les écosystèmes de pin gris de la forêt boréale de l'Est de l'Alberta et elle pourrait assurément continuer sa propagation éruptive jusqu'en Saskatchewan et au-delà.
    Deux facteurs importants ont donné lieu à cette épidémie. Le premier, c'est le réchauffement climatique. Nos hivers sont moins durs, avec moins de périodes en-deçà de -35o ou -40o C, qui sont nécessaires pour tuer ces dendroctones pendant l'hiver. Par rapport au climat, il y a aussi le fait que ces arbres sont très soumis à un stress hydrique durant l'été, ce qui les rend réceptifs aux dendroctones. Durant les mois d'été et l'automne, on assiste aussi à une plus grande période de développement, ce qui permet à ces dendroctones de passer à travers le stade de développement dont ils ont besoin pour survivre à l'hiver.
    Le deuxième principal facteur de l'expansion des dendroctones du pin ponderosa est l'abondance de pins matures dans le paysage. Cela est attribuable en grande partie à des décisions de gestion, particulièrement l'extinction des incendies, ce qui a permis à ces peuplements d'arriver à maturité, et nous avons des peuplements de pins d'âge uniforme dans une bonne partie de cette région.
    Que pouvons-nous faire par rapport au dendroctone du pin? Eh bien, l'Alberta effectue annuellement des relevés aériens exhaustifs pour surveiller et détecter les éruptions. Elle effectue aussi un contrôle direct, qui vise à manipuler les populations de dendroctones afin de tenter de les réduire, pour qu'elles deviennent plus gérables. On prend aussi des mesures de contrôle indirect, qui visent à réduire le nombre d'arbres hôtes réceptifs dans le paysage.
    Dans le cadre d'une politique de gestion axée sur les données, ces stratégies peuvent servir à réduire les niveaux de mortalité des arbres attribuables au dendroctone du pin ponderosa jusqu'à des niveaux acceptables, mais ces méthodes ne vont pas nécessairement permettre de supprimer ou d'enrayer l'épidémie. Toutefois, elles peuvent se révéler efficaces pour ralentir la propagation de ces espèces.
    Nous savons, en raison du travail effectué en Colombie-Britannique et en Alberta, que les traitements visant à éliminer les dendroctones dépendent de la densité. Cela veut dire que, dans des régions à population très élevée de dendroctones, il est beaucoup plus difficile d'effectuer un contrôle efficace et de produire des effets importants. Ce sont évidemment les régions en Colombie-Britannique, mais aussi la partie occidentale de la province de l'Alberta, que j'appellerai les « régions du flanc arrière ». Le long du front de l'infestation qui, encore une fois, est la ligne rouge dans l'image ici, les densités de dendroctones sont beaucoup inférieures, les densités de pin sont aussi un peu plus faibles, et cela fait en sorte qu'il est beaucoup plus facile et beaucoup plus efficace de prendre des mesures de contrôle dans cette région.
(1215)
    L'Alberta a été très efficace pour ce qui est de surveiller et de contrôler de façon vigoureuse le dendroctone du pin ponderosa, pas seulement dans l'ensemble de la province, mais aussi en Saskatchewan. Elle a adopté une approche par zones et traite donc les populations dans le flanc arrière différemment de celles qui se situent le long du front de l'infestation, et cela s'est révélé une stratégie très efficace.
    Elle fait une surveillance au-delà du front de l'infestation, dans l'Est et le Nord, et elle procède à une élimination active le long de cette zone du front de l'infestation, où la densité du dendroctone est beaucoup inférieure. Elle a adopté des stratégies d'atténuation et d'adaptation dans les régions du flanc arrière.
    Le travail de M. Allan Carroll, de l'Université de la Colombie-Britannique, a permis de démontrer l'efficacité de la stratégie utilisée par l'Alberta. Nous voyons les deux tiers de la nouvelle attaque verte détectée par ces relevés aériens, et environ les deux tiers de ces attaques détectées sont ensuite contrôlés, et les arbres, retirés et détruits. Cela a entraîné une réduction d'environ 40 à 44 % des pins infestés dans le paysage.
    Toutefois, les ressources financières de l'Alberta sont actuellement limitées, par rapport aux coûts opérationnels nécessaires pour soutenir et maintenir une stratégie de gestion aussi vigoureuse.
    Mes recommandations à l'intention du gouvernement fédéral sont, dans un premier temps, de maintenir cette approche dans le cadre de laquelle l'Alberta et la Saskatchewan ont collaboré afin de ralentir et de contenir la propagation du dendroctone du pin ponderosa. Le but serait ici la limitation plutôt que la suppression de la population, parce que les chiffres sont juste trop élevés dans la partie occidentale de la région pour que la suppression totale soit probable ou faisable.
    L'approche axée sur les données de l'Alberta s'aligne très bien sur un cadre de gestion adaptatif, qui emploie une approche itérative à l'égard de la prise de décisions. Nous prenons des mesures de gestion, nous évaluons ces résultats et nous modifions la formule au fil du temps. Ce genre de processus se répète et s'est révélé très efficace en Alberta. C'est vraiment la meilleure façon de composer avec les incertitudes associées à la propagation du dendroctone, et c'est probablement une stratégie utile pour d'autres ravageurs forestiers également.
    Nous avons ici l'occasion d'exercer une capacité de réaction, comme nous l'avons fait, en réagissant aux épidémies au fur et à mesure qu'elles surviennent, mais nous avons aussi la possibilité d'être proactifs afin d'observer de nouvelles épidémies quand elles surviennent — donc, d'assurer une surveillance le long du front de l'infestation et au-delà — puis aussi d'éliminer les poussées actives lorsqu'elles surviennent. Il serait peut-être possible d'effectuer un certain contrôle indirect pour essayer de réduire la quantité de pins réceptifs qui se trouvent dans le paysage.
    Ma deuxième recommandation, c'est d'élaborer un plan national pour coordonner les efforts de contrôle de la propagation du dendroctone du pin vers l'Est et le Nord. Cette stratégie doit être flexible et respecter l'approche de gestion adaptative que j'ai décrite. Je crois que le gouvernement fédéral devrait assumer une partie du coût opérationnel de l'initiative de l'Alberta et de la Saskatchewan.
    Je crois aussi que nous devons voir une mobilisation accrue et une intégration de la part de chercheurs de toutes les disciplines différentes et de toutes les allégeances du gouvernement également, ainsi que des universités et d'autres chercheurs. Il y a beaucoup de potentiel inexploité ici. Ce ne sont pas tous ces chercheurs et ces organismes qui ont discuté de ces options ici, et il est vraiment important que nous facilitions et appuyions une approche systémique intégrée. Par cela, j'entends faire appel à des experts dans les domaines de la biologie des insectes, de l'écologie relative aux feux de forêt, de la végétation, du carbone, de la faune, de l'économie, etc.
    Ce que nous devons vraiment faire dans l'avenir pour aider à renforcer la résilience de nos forêts, c'est adopter une approche et une stratégie intégrées à l'égard de la lutte antiparasitaire.
    Le dendroctone du pin ponderosa est u signe avant-coureur de beaucoup d'autres ravageurs forestiers, mais nous avons une longueur d'avance dans cette bataille particulière en raison de la longue expérience avec le dendroctone en Colombie-Britannique, et maintenant en Alberta, et nous possédons des mesures de contrôle efficaces.
    Nous pouvons assurément trouver une solution, et je crois que le Canada a la possibilité de devenir un chef de file mondial dans la lutte contre les ravageurs forestiers éruptifs, qui fait la promotion d'une forêt résiliente à long terme.
    Merci.
(1220)
    Merci beaucoup, monsieur Chubaty.
    Monsieur Peschisolido, vous ouvrez le bal.
    Merci de nous avoir présenté votre exposé. Nous avons appris des choses très utiles.
    Dans votre exposé, vous avez dit que l'infestation avait deux causes principales. Pouvez-vous nous parler un peu plus des changements climatiques et de leur incidence sur l'infestation et aussi de notre capacité à y réagir?
    Les changements climatiques, et en particulier le réchauffement climatique, ont eu deux effets biologiques sur les dendroctones. Premièrement, leurs conditions de survie hiémale ont changé. Habituellement, les dendroctones ne survivent pas aux longues périodes de froid où la température descend à -35 ou -40 °C pendant des jours ou des semaines, l'hiver. Lorsqu'il fait aussi froid, le taux de mortalité des dendroctones est habituellement élevé.
    Malheureusement, nous n'avons plus de températures aussi basses en hiver. En conséquence, le taux de mortalité des dendroctones a chuté, et leur population explose à l'été.
    Deuxièmement, les températures plus chaudes causent énormément de stress hydrique, c'est-à-dire que le sol est très sec. Les arbres subissent un stress hydrique qui diminue leur capacité à se défendre contre les dendroctones. Cela contribue également à la vulnérabilité des forêts.
    Vous avez mentionné brièvement que cela tenait au grand nombre de pins matures et que c'était dû à des décisions de gestion. Pouvez-vous nous en dire davantage?
    Il y a plusieurs facteurs qui entrent en ligne de compte, mais en particulier, les décisions prises au cours des 50 dernières années environ dans la lutte contre les feux de forêt ont fait que les peuplements forestiers ont grandi uniformément et ont atteint une tranche d'âge similaire. Nous avons beaucoup de pins matures, et ceux-ci sont particulièrement vulnérables aux dendroctones.
    La présence de pins matures est un facteur très important qui contribue à la dynamique des infestations, parce que la population de ravageurs croît beaucoup plus rapidement dans les peuplements forestiers matures qui s'étendent sur une grande région.
    Vous avez parlé de l'importance des chercheurs, en particulier les chercheurs universitaires.
    Qu'est-ce que le gouvernement fédéral pourrait faire pour les intéresser au problème et faire en sorte qu'ils contribuent à la solution?
    Laissez-moi vous donner un exemple.
    En Alberta, il y a une initiative appelée « TRIA-Net, turning risk into action ». Le Service canadien des forêts a très peu participé aux activités du groupe. Cela me fait dire qu'il est évident que le gouvernement fédéral doit combler le fossé qui sépare des chercheurs universitaires et le secteur privé et faire davantage d'efforts pour que tout le monde s'engage.
    Comme je l'ai mentionné, le gouvernement fédéral, et pas seulement le Service canadien des forêts, possède une grande expertise dans tous les domaines pertinents. Il n'y a pas seulement l'écologie des insectes, il y a aussi les forêts et la santé des forêts en général.
    Le fait que notre objectif est présentement le confinement plutôt que l'éradication, comme vous l'avez dit, traduit l'énormité du problème.
    Pouvez-vous nous expliquer pourquoi et nous dire ce qu'il faudrait faire pour que notre objectif soit l'éradication?
    La raison principale est que la population de dendroctones est énorme, en particulier sur le flanc arrière. Il est trop tard, maintenant, c'est tout. Il est difficile d’éradiquer les dendroctones une fois qu’ils se sont établis. Les populations sont si importantes qu’il devient extrêmement difficile, et même impossible de mettre en oeuvre des méthodes de répression qui permettraient de réduire la population à un niveau acceptable. Dans les régions sur le flanc arrière en particulier, l’atténuation doit être notre seul but.
    Il nous faut quand même prendre des mesures de répression pour réduire au minimum le risque que l'infestation se propage à d'autres régions, mais le gros du travail doit se faire le long du front de l'infestation, parce que c'est là que nous pouvons obtenir des résultats le plus facilement. Dans ces régions, il sera possible de réduire le nombre de dendroctones à un niveau acceptable, parce que la population y est déjà faible.
(1225)
    Quel serait le rôle du gouvernement fédéral dans votre approche intégrée pour lutter contre ce problème?
    Je suis convaincu que le gouvernement doit jouer un rôle de facilitateur. Le gouvernement pourra assurer la coordination entre les provinces. Évidemment, les provinces gèrent leurs propres forêts, et c'est à elles de prendre des décisions et d'adopter des politiques.
    Il est important de fournir des ressources opérationnelles pour la mise en oeuvre des mesures de répression, mais il est aussi avantageux, comme je l'ai dit, de veiller à ce que des experts de tous les échelons participent au processus.
    Y a-t-il d'autres éléments de vos recommandations que vous aimeriez mettre en relief?
    Non. Je crois que je vais simplement souligner à nouveau que les ravageurs forestiers représentent un grand danger pour la santé des forêts. Elles ont une valeur particulière pour nous, mais il y a d'autres valeurs importantes qui doivent être prises en considération équitablement. C'est à cela que tient la logique d'une approche intégrée, qui doit être axée sur la résilience durable et à long terme de nos forêts. Je ne parle pas uniquement des motifs économiques traditionnels, je parle également du tourisme et des facteurs écologiques qui sont pertinents. Il est important de prendre en considération tous ces domaines et tous ces facteurs.
    Merci.
    Monsieur Schmale.
    Je vais poursuivre sur la lancée de Joe à propos de la stratégie nationale. Au cours des dernières séances, des organisations nous ont parlé des efforts spectaculaires qu'elles déploient pour lutter contre ce problème, qu'il s'agisse d'espèces indigènes ou d'espèces envahissantes comme la spongieuse rose.
    À part le gouvernement, connaissez-vous une organisation qui pourrait jouer un rôle directeur et coordonner toutes ces personnes, tous ces groupes, et veiller à ce qu'ils puissent communiquer entre eux? D'après ce que nous avons entendu, les provinces se chargent concrètement d'une grande partie du travail que suppose la mise en oeuvre des plans. Existe-t-il une autre organisation que vous voudriez recommander ou qui devrait, selon vous, participer à la discussion, peut-être une organisation qui pourrait assumer le rôle directeur ou réunir les intervenants?
    Bien sûr, je peux penser à plusieurs personnes. Un grand nombre de groupes ont dû composer avec le fait que le gouvernement fédéral n'est pas vraiment intervenu du côté opérationnel des choses ou même du côté de la recherche. Par exemple, nous savons que TRIA-Net a été créé pour répondre à des besoins précis, pas seulement en matière de recherche, mais également en ce qui concerne la mise en oeuvre de certaines décisions de gestion et leur mise à l'essai sur le terrain. L'industrie forestière est intéressée, cela ne fait aucun doute. Les universités contribuent sans conteste aux efforts. Même sans l'intervention du gouvernement fédéral, nous savons que les organisations et les groupes sont capables d'unir leurs forces. Malgré tout, ce serait très utile pour eux que le gouvernement fédéral participe davantage.
(1230)
    À propos des espèces envahissantes… J’ai remarqué que la majeure partie de votre exposé concernait une espèce indigène de cette région. Est-ce que le gouvernement du Canada, ou toute autre organisation, travaille avec d'autres pays aux prises avec ce genre de problème? Durant la dernière heure, il a été question du fait que certaines espèces envahissantes sont introduites dans l’environnement dans des caisses d’expédition. Avons-nous demandé aux pays concernés ce qu’ils font pour gérer la situation? Y a-t-il des pratiques que nous pourrions adopter ici?
    Il y a une chose que je veux préciser. Vous avez utilisé l'expression « envahissante », mais le dendroctone du pin ponderosa est une espèce indigène du Canada et de cette région, même s'il se comporte comme une espèce envahissante, étant donné qu'il menace aujourd'hui les peuplements de pins gris de l'Alberta. Ces arbres n'ont pas les mêmes mécanismes de défense contre les dendroctones, parce que cette espèce n'a pas fait partie de leur évolution.
    Pour répondre à votre question sur nos discussions avec d’autres pays, je peux mentionner les États-Unis. Le Colorado, l’Idaho, l’Oregon et d’autres États doivent aussi lutter contre les dendroctones, même si la situation est un peu différente aux États-Unis. Le Colorado déploie énormément d’efforts pour contrôler la population de dendroctones dans ses peuplements forestiers, mais ses forêts sont légèrement différentes des nôtres. Par exemple, il y a beaucoup plus de pins ponderosa au Colorado. Dans l’ensemble, cet État doit aussi lutter contre ces ravageurs, même si ces stratégies sont un peu différentes.
    Je n'ai pas vraiment de chiffres à vous donner pour que vous ayez une idée statistique de la situation, mais il y a un risque que les rondins du Colorado, par exemple, traversent la frontière et entrent au Canada. On peut traiter les rondins en enlevant l'écorce ou en les soumettant à la chaleur, ou par ces deux méthodes, pour éliminer les dendroctones, mais si ce n'est pas fait, l'espèce peut être introduite par un pays dans un autre.
    Dans ce contexte, il est important d'inspecter toutes les expéditions de ce genre pour s'assurer que les protocoles adéquats ont été respectés.
    D'accord. Je vous remercie de le mentionner. Je ne sais pas si vous avez entendu la dernière heure de témoignages, mais nous avons plus ou moins conclu sur le fait qu'il fallait renforcer la coordination à la frontière pour éviter que ces espèces ne traversent. Cela correspond exactement à ce que vous avez dit.
    Avez-vous des recommandations à faire à ce chapitre? Nous avons à peine survolé la question, pendant la dernière heure, et, manifestement, il n'y a pas assez de personnes pour prendre des mesures en conséquence. Avez-vous des recommandations qui pourraient nous aider à remédier à ce problème?
    Je ne suis pas aussi versé en ce qui concerne la réglementation et les restrictions actuelles sur les expéditions transfrontalières de rondins, par exemple. Une solution efficace — du moins, je l'espère — serait d'adopter une réglementation qui exigerait que l'écorce soit enlevée. Ainsi, on s'assurerait que les rondins sont traités avant d'arriver à la frontière et même avant d'être expédiés. À la frontière, il faudrait que les inspections soient plus rigoureuses et confirment que les produits ont été traités convenablement avant leur arrivée à la frontière.
    Pourquoi l'écorce devrait-elle être enlevée au Canada et non aux États-Unis? L'écorce a-t-elle une utilité quelconque ou sert-elle à un produit?
    Je ne crois pas, non.
    D'accord. Donc, ce n'est pas que nous avons besoin de l'écorce ici ou que nous pouvons l'utiliser pour quelque chose. Elle n'a pas de valeur ajoutée ni quelque chose du genre?
    D'après ce que j'en sais, il est possible que les gens veulent garder l'écorce pour des raisons esthétiques, lorsqu'ils font construire une cabane en bois rond. Certaines personnes trouvent que ce n'est pas aussi beau quand l'écorce a été retirée du rondin. Bien évidemment, cela n'a pas autant d'importance si, en enlevant l'écorce, on peut éviter que les dendroctones du pin ponderosa entrent au pays.
    Bien sûr.
    Merci.
(1235)
    Monsieur Cannings.
    Merci, monsieur Chubaty, de votre témoignage.
    Je viens de la Colombie-Britannique, alors vous comprendrez que le dendroctone du pin ponderosa représente un énorme problème pour moi. J'ai une formation de biologiste, et je me souviens d'avoir travaillé dans la région de Chilcotin vers la fin des années 1970. À l'époque, il y a eu une éclosion que nous avons crue grave, mais ce n'était rien en comparaison du fléau qui s'est abattu vers la fin des années 1990 et au début des années 2000.
    Vous avez parlé des causes sous-jacentes et de la lutte contre les feux de forêt. D’après ce que j’en sais, la monoculture remonte à plus d’une centaine d’années, lorsque les colons sont arrivés et ont brûlé de grandes parties du territoire. Le pin tordu latifolié est une espèce qui pousse après les feux, d’où les grandes monocultures. Ensuite, nous avons commencé la lutte contre les feux de forêt.
    Vous avez dit qu'il fallait des mesures d'atténuation et d'adaptation dans les régions où il est tout simplement impossible de contrôler les dendroctones. Le problème, c'est que la forêt de la Colombie-Britannique a changé radicalement au cours des 100 dernières années. Notre économie forestière est en train d'être ravagée.
    L'important, selon moi, serait d'examiner des façons d'éviter que cela se reproduise dans l'avenir. Entre-temps, la réaction instinctive est de se dépêcher de sauver ce qui peut l'être en faisant des coupes à blanc sur de grandes étendues.
    J'avais un ami qui était bûcheron dans le centre de la province, et il a travaillé comme un forcené il y a quelques années pendant les opérations de coupe de récupération. Il m'a dit qu'il n'avait jamais coupé autant d'épinettes de sa vie. Les bûcherons obtenaient des permis de coupe et des zones de coupe à blanc.
    Nous nous sommes retrouvés avec des zones de coupe à blanc là où s’élevaient des forêts d’épinette. À présent, on est probablement en train d’y planter, dans la plupart des cas, des pins tordus latifoliés. Pendant la période des coupes de récupération, le milieu de la recherche sylvicole a exprimé quelques réserves et a recommandé d’éviter les coupes de récupération dans le plus grand nombre de zones possibles, ou du moins d’éviter les coupes à blanc, parce qu’il y avait dans ces zones énormément de jeunes pousses d’épinette qui auraient pu renforcer la biodiversité et la résilience de la forêt.
    Je me demandais si vous aviez des commentaires à propos de cela, et peut-être à propos de ce qui est prévu en Alberta. Je crois que la situation n'est pas aussi grave en Alberta, puisque le pin gris ne pousse pas naturellement dans les grandes monocultures, du moins pas pour l'instant en Alberta et en Saskatchewan.
    Vous avez raison. Il est clair que ce ne sont pas seulement les décisions et les stratégies de gestion relatives à la lutte contre les incendies qui ont mené à la situation actuelle en Colombie-Britannique, même si elles y ont beaucoup contribué. Cependant, il ne fait aucun doute que l'âge uniforme des peuplements forestiers est un facteur clé.
    Même avec une monoculture — c'est-à-dire qu'il n'y a qu'une seule espèce d'arbre —, le danger est moindre quand tous les individus ne sont pas du même âge. Habituellement, les incendies de forêt contribuent effectivement à la diversité des âges, ce qui renforce la résilience des forêts à ce genre d'infestations.
    Pour répondre à la deuxième partie de votre question, à propos des mesures que nous pouvons prendre maintenant, je dirais, puisque nous avons déjà procédé à des coupes à blanc dans de grandes zones et que les plantations y sont en cours, qu'il faut éviter toute monoculture et des peuplements forestiers où les arbres ont tous le même âge. Nous ne voudrions pas vivre exactement le même problème dans une centaine d'années.
    Nous devons essayer de planter une diversité d'espèces et peut-être aussi de modifier notre régime d'exploitation. Nous devons éviter de simplement couper à blanc de grandes bandes et nous assurer d'épargner quelques arbres afin qu'il y ait une bonne diversité d'espèces dans les forêts.
    Votre groupe travaille-t-il surtout dans la forêt boréale? Avez-vous poussé votre étude au-delà des conséquences du dendroctone du pin ponderosa? Étudiez-vous des problèmes plus généraux touchant le territoire — le caribou, disons — et avez-vous des recommandations quant à la gestion de la forêt boréale, aux pratiques d'exploitation qu'il faut adopter pour réduire à long terme les insectes ravageurs, lutter contre les feux de forêt et faire place à la biodiversité, y compris le caribou dont on entend beaucoup parler ces jours-ci?
(1240)
    Oui, tout à fait.
    Je suis spécialiste en modélisation écologique, ce qui veut dire que mon travail consiste à simuler, à des fins prédictives, les conditions et les modifications du paysage des forêts boréales. Présentement, les groupes avec qui je travaille s'intéressent précisément aux choses que vous avez mentionnées: le recoupement entre les feux, la dynamique de la végétation et les processus de succession écologique relatifs à la regénération des forêts, mais aussi les infestations d'insectes, en particulier le dendroctone du pin ponderosa. Dans un deuxième temps, nous examinons les conséquences sur le caribou et le reste de la faune. Nous avons adopté une approche intégrée pour lutter contre ce problème. Cela ne fait aucun doute.
    Croyez-vous qu'il existe une solution unique qui nous permettrait de nous attaquer au problème sur tous les fronts? Est-il possible de gagner sur tous les plans?
    Je crois que oui. Je suis convaincu que nous avons réalisé des progrès importants au cours des dernières années, et nous avons réussi à susciter un intérêt non seulement du côté de l'industrie forestière, mais aussi, comme je l'ai mentionné, du côté du gouvernement et des universités, où l'élaboration d'approches intégrées intéresse les gens. C'est tout bonnement que nous n'avons pas eu l'occasion de financer une partie des activités, mais il y a tout de même énormément de bonnes recherches qui ont été faites et qui sont en train de se faire.
    Merci.
    Monsieur Whalen.
    Merci beaucoup d'être parmi nous aujourd'hui.
    Votre carte fait réfléchir. Il semble qu'environ 50 % des forêts de la Colombie-Britannique sont touchées. Est-ce bien l'ampleur du problème?
    Oui, c'est environ 50 %.
    Restons pour le moment en Colombie-Britannique; quelle proportion de la forêt est habituellement replantée annuellement?
    Je vais devoir vérifier. Je ne peux pas le dire de mémoire.
    Pouvez-vous nous donner une idée de la proportion de la forêt qui est récoltée chaque année?
    Laissez-moi vérifier. Non, malheureusement, je ne connais pas la réponse.
    Est-ce au moins 1 %?
    C'est probablement plus que ça. Il est certain que les entreprises qui exploitent la forêt replantent les zones récoltées.
    Non, je voulais dire quelle est la proportion de la forêt qui est récoltée? Est-ce au moins 1 % de la forêt de la Colombie-Britannique?
    Vous voulez dire, dans une année normale? Je ne suis pas sûr. Je ne connais pas le pourcentage exact.
    C'est que je regarde la carte et que je me demande pourquoi nous faisons quoi que ce soit. Il s'agit d'une espèce naturelle. C'est un cycle. Nous savons que cela se produit toutes les deux ou trois décennies depuis des siècles chez nos voisins du Sud. Ils ont encore des forêts. Est-ce que le climat de certaines forêts des États-Unis serait comparable à notre climat actuel ou au climat d'il y a une centaine d'années?
    Même si nous avons connu ces cycles — d'infestations périodiques —, la situation actuelle en Colombie-Britannique et en Alberta est d'une ampleur inégalée.
    L'infestation s'est propagée sur une très grande superficie, et, évidemment, lorsque 50 % ou plus des pins marchands sont détruits par les dendroctones, cela a inévitablement des conséquences économiques graves.
    Le risque, c'est...
    Monsieur, le fait est que nous ne pourrons pas nous en débarrasser. Cet insecte existe. Il est là. Il attaque ces arbres. Il modifie l'écologie sur son passage. Pourquoi essayons-nous de gérer un système écologique, alors que nous ne savons même pas ce qui est censé arriver à cause des changements climatiques? La nature ne va-t-elle pas suivre son cours?
    J'essaie de comprendre pourquoi il ne serait pas, d'une certaine façon, préférable de ne pas intervenir, puisqu'il serait impossible d'investir suffisamment d'argent pour traiter ne serait-ce qu'une partie importante ou suffisante de la grande zone touchée. Alors, pourquoi ne pas laisser les choses comme elles le sont?
    Vous avez raison lorsque vous dites qu'il serait impossible d'intervenir et de traiter en bloc les importantes infestations en Colombie-Britannique et dans l'Ouest de l'Alberta; et c'est pourquoi j'ai dit que, dans ces régions...
    Mais même à la lisière de cette zone... Regardez cette ligne. Elle fait des milliers de kilomètres de long. Je parle de la ligne rouge.
    Ce n'est pas tout. Le fait est qu'il est impossible d'arrêter le phénomène, à cause des changements climatiques: la planète se réchauffe et les dendroctones ne vont pas disparaître.
    J'essaie simplement de comprendre pourquoi nous essayons de gérer une crise qui est impossible à gérer. Est-ce que ce ne serait pas plus avantageux d'essayer de prévoir de quoi la forêt aura l'air une fois la crise passée? Pourquoi ne prendrions-nous pas quelques mesures pour accélérer le processus, afin de pouvoir nous consacrer à la lutte contre les incendies?
(1245)
    En partie, c'est parce que nous pouvons avoir un impact mesurable, en particulier le long du front de l'infestation. Nous pouvons ralentir l'infestation de dendroctones vers l'est; nous l'avons déjà fait.
    Mais l'infestation va se poursuivre. Croit-on que ce soit même possible de la freiner? Vous avez dit qu'il faudrait des températures de -35 °. Y a-t-il une limite claire, des températures sous lesquelles ces insectes ne peuvent pas résister?
    La température et le climat jouent clairement un rôle important, et l'infestation le long du front a même ralenti un peu au cours des dernières années, en partie en raison des conditions météorologiques. Selon une étude récente réalisée par Allan Carroll et l'équipe de son laboratoire, si la densité est suffisamment faible, le long du front de l'infestation — et c'est justement le cas — il serait possible de réduire les populations de dendroctones jusqu'à ce qu'elles atteignent un seuil où l'infestation ne peut plus progresser, ce qui veut dire qu'il serait possible de la contenir.
    Il me semble simplement qu'il n'y a aucune bonne solution. Si nous éteignons l'incendie et que nous laissons les arbres pousser, il y aura plus d'insectes dans les arbres matures, ce qui fait que les arbres mourront et que le feu de forêt sera inévitable. En examinant la situation, je me dis que si on réduit la population d'insectes, cela fait que les arbres peuvent vieillir et sont en conséquence encore plus vulnérables aux insectes. J'ai l'impression que plus on interfère avec le processus, plus on devient prisonnier d'un cercle vicieux qui augmente le risque.
    Il y a une bonne part de culpabilité ici, mais même si les changements climatiques ainsi que ce terrible problème sont notre faute, cela ne veut pas dire que nous faisons bien de prendre des mesures en réaction comme nous l'avons fait jusqu'ici. J'ai simplement l'impression que nous entrons dans une nouvelle ère climatique et que nous devrions peut-être essayer tout bonnement de prévoir et de gérer ce qui va arriver dans cette nouvelle ère climatique au lieu d'essayer de protéger quelque chose qui n'existe essentiellement pas. Nous avons déjà dépassé de 1,5 °C la température qui régnait à la naissance de cette forêt, en premier lieu. J'essaie de comprendre pourquoi nous essayons de protéger un passé qui n'existe plus.
    Dans une certaine mesure, oui, nous essayons de protéger les forêts pour les conserver. Évidemment, les forêts sont une ressource importante pour bon nombre de raisons. Nous réussissons à avoir un impact important par rapport aux forêts. Nous sommes capables de les gérer.
    Je vais le répéter: notre objectif est d'avoir des forêts durables et résilientes à long terme. Cela ne veut pas dire que nous allons nous contenter de replanter des arbres pour nous retrouver avec des peuplements forestiers uniformes à maturité. Nous voulons qu'il y ait une diversité. Nous avons besoin de peuplements divers, dans les forêts, pour un paysage en santé.
    La nature ne s'en chargera pas elle-même? Si un feu se déclare et rase une forêt, alors, au fil du temps, le vent, les insectes et les oiseaux vont disperser les semences, et la forêt va pousser à nouveau, n'est-ce pas?
    Rien ne garantit que la forêt va pousser à nouveau. Nous savons effectivement que les changements climatiques et les changements de l'humidité du sol ont une incidence sur les peuplements de pin. Mais il y a aussi les incendies de forêt majeurs et les infestations à grande échelle de dendroctones du pin ponderosa ou d'autres ravageurs forestiers; ce ne seront peut-être pas des pins qui repousseront.
    D'accord, mais peut-être que ce ne sont pas des peuplements de pin qui sont censés repousser. Comprenez-vous où je veux en venir? Quels sont les peuplements forestiers dans le nord de la Californie? Il y 100 ans, le climat du nord de la Californie ressemblait davantage au climat actuel du sud de la Colombie-Britannique, alors, à quoi ressemblent les forêts là-bas? Ne devrait-on pas prendre des mesures en prévision de cet avenir?
    Je doute que les peuplements de pin repoussent, parce que les dendroctones du pin ponderosa vont tous les manger de toute façon.
    Nous pouvons éviter que cela ne se produise si nous intervenons. Nos peuplements forestiers sont clairement très différents de ceux des États-Unis, de la Californie et du Colorado, où il y a énormément de pins ponderosa.
    Tous ces peuplements forestiers se trouvent dans un écosystème qui tire avantage des feux. Le feu joue encore un rôle très important dans le paysage. Si vous décidez de laisser les dendroctones faire ce qu'ils veulent avec les arbres, ils vont poursuivre leur marche, et le problème sera que les forêts ne seront pas résilientes à long terme à cause de leur état, et je ne parle pas uniquement par rapport aux infestations d'insectes, mais également aux régions des feux, qui vont changer et qui ont déjà commencé à changer.
    Nous devons faire quelque chose. Nous ne pouvons pas nous permettre de simplement...
(1250)
    Mais je ne vois pas ce que nous pouvons faire. La carte montre qu'il y a des dizaines de milliers de kilomètres carrés qui sont impossibles à traiter.
    Je suis désolé, mais je dois vous interrompre.
    Monsieur Schmale, avez-vous finalement décidé si...
    C'est au tour de M. Falk, en fait.
    D'accord, vous avez cinq minutes. Je vous laisse partager votre temps comme vous le voulez. Allez-y.
    D'accord, merci, monsieur le président.
    Monsieur Chubaty, merci de votre témoignage. J'ai trouvé votre exposé agréable et intéressant à écouter.
    J'ai une question à propos de la température. Vous avez dit que les insectes en question mouraient à des températures de -35 °C. Faut-il rester à cette température pendant une certaine période, ou est-ce suffisant d'atteindre ce point?
    Il faut que ce soit pendant une certaine période. Il faut que la température demeure à -35 ou à -40 °C pendant des périodes assez longues.
    Par « longues », voulez-vous dire des heures ou des jours?
    On parle de plusieurs jours et même de semaines.
    Et quelle est la probabilité d'atteindre ces températures dans les zones jaunes sur la carte?
    À la lumière des prévisions actuelles concernant l'adaptabilité du dendroctone du pin ponderosa aux températures, un certain nombre de modèles ont été élaborés pour répondre justement à cette question. Essentiellement, tous les modèles montrent que les températures dans l'ensemble de ces zones, de l'est de l'Alberta allant vers la Saskatchewan et la forêt boréale, seront clairement favorables aux dendroctones. Il est de moins en moins probable que les températures restent aussi froides pendant de si longues périodes.
    Il y a une autre solution dont nous avons entendu parler: le brûlage dirigé. Qu'est-ce qui tue les insectes? Est-ce la fumée ou les flammes?
    Les flammes. J'aimerais préciser que le brûlage dirigé, pour reprendre cette terminologie, est habituellement une méthode de contrôle indirect dont l'objectif est essentiellement de réduire la vulnérabilité de l'environnement aux dendroctones. C'est une approche davantage proactive, par opposition à une approche réactive qui consiste à couper les arbres infestés pour ensuite les brûler.
    Selon des témoins précédents, nous ne voulons pas éradiquer les dendroctones, mais seulement les contrôler. Êtes-vous d'accord avec cela?
    Oui, je serais d'accord.
    Selon vous, quelle est la meilleure façon de les contrôler?
    La meilleure façon, comme je l'ai expliqué, est de poursuivre notre approche par zones où les efforts sont surtout axés sur l'éradication des dendroctones le long du front de l'infestation, où la densité de population est faible et où nous savons que nous pouvons avoir un impact mesurable. Ensuite, dans les zones d'infestation grave, nous adoptons une stratégie d'atténuation et d'adaptation. Nous faisons des coupes de récupération où nous le pouvons, mais nous devons en effet apprendre à vivre avec les dendroctones.
    Quelle est la meilleure méthode d'éradication, selon vous?
    On utilise des méthodes combinées. Après avoir repéré les arbres infestés, on les coupe, puis on les brûle. On peut aussi enlever l'écorce pour la brûler. On utilise aussi une combinaison d'insecticides pour contrôler la population de dendroctones. Ce sont des insecticides qui sont appliqués sur les arbres.
    S'agit-il d'insecticides biologiques ou de synthèse? Dans quelle mesure sont-ils efficaces? Est-ce que c'est rentable?
    Ce sont des insecticides fabriqués en usine, et ils tuent efficacement les dendroctones.
    Est-ce que c'est rentable?
    Je n'ai pas l'information à ma disposition présentement. Je sais cependant qu'une mesure de contrôle consiste à couper, puis à brûler les arbres.
    Dans votre modèle, la ligne rouge représente-t-elle la limite extérieure jusqu'où l'infestation risque de se propager?
    La ligne rouge représente la limite atteinte par les dendroctones en 2012. Comme je l'ai mentionné, ils se sont avancés un peu plus vers l'est, mais la situation ressemble toujours à ce que vous voyez sur la carte.
    Donc, les insectes se déplacent vers l'est; le rythme de la progression s'accélère-t-il ou ralentit-il?
    Pour l'instant, il semble ralentir. Nos efforts depuis 2001 y ont certainement contribué. Nous avons clairement observé une diminution abrupte du taux de propagation vers l'est quand les dendroctones se sont déplacés le long de cette section du front de l'infestation. Cela s'explique aussi en partie par le volume plus faible de pins. Il y a moins d'arbres pour eux, ce qui semble aider, pour l'instant, à contenir l'infestation. Cependant, plus loin vers l'est, en Saskatchewan, le volume de pin augmente.
(1255)
    D'accord, merci beaucoup.
    Madame Khalid, vous êtes la dernière intervenante de la journée.
    Merci, monsieur Chubaty, de nous avoir présenté votre témoignage aujourd'hui.
    Vous allez devoir excuser mon ignorance, mais c'est la première fois que je plonge véritablement dans le domaine des ressources naturelles.
    Le Canada a une grande diversité d'écosystèmes. Diriez-vous qu'il y a des espèces indigènes dans la côte Est qui seraient considérées comme des espèces envahissantes dans les Prairies, disons, par exemple?
    C'est une question de terminologie. Le terme que nous utilisons pour décrire le dendroctone du pin ponderosa est « espèce indigène envahissante ». Même s'il s'agit d'insectes indigènes, en Colombie-Britannique, on en trouve présentement dans des forêts — en Alberta — qui n'ont jamais été exposées aux dendroctones, et c'est pourquoi les insectes se comportent un peu comme une espèce envahissante de ce côté-là. Donc, nous utilisons le terme « espèce indigène envahissante » pour décrire un type d'insecte qui est indigène dans une région, mais qui se propage dans de nouvelles zones.
    Autrement, la plupart du temps, lorsqu'on parle d'espèces envahissantes, il est question d'espèces qui arrivent de l'étranger. C'est habituellement la terminologie que nous utilisons.
    Les marchandises importées au pays ou exportées dans d'autres parties du monde sont fumigées. Utilise-t-on des pratiques similaires pour empêcher que des espèces indigènes d'une région du Canada soient introduites dans une autre région du pays, avec des conséquences négatives, ou est-ce un phénomène nouveau?
    Dans l'ensemble — et en particulier dans le secteur forestier — l'expédition et le déplacement de bois dont l'écorce n'a pas été retirée sont réglementés. Je suis sûr que vous avez vu des panneaux aux frontières provinciales dans l'ouest du Canada qui indiquent qu'il est interdit de traverser la frontière de l'Alberta ou de la Colombie-Britannique avec du bois de chauffage. Il y a effectivement des restrictions, mais il est clair que la réglementation n'est pas appliquée outre mesure pour ce genre de choses.
    En ce qui concerne les biens importés, je ne suis pas sûr à 100 % de ce qui est fait exactement pour traiter le bois qui vient des États-Unis, disons. Manifestement, nous avons besoin de lignes directrices qui exigent que le bois soit traité à la chaleur ou écorcé ou les deux.
    Comment communiquez-vous l'information tirée de vos études aux organes gouvernementaux qui s'occuperaient de mettre en place et d'appliquer des règlements visant à atténuer ce genre de problème? Vous contentez-vous de passer l'information à l'échelon suivant de la hiérarchie, ou y a-t-il un quelconque processus de consultation qui débouche, à la lumière de vos études, sur une stratégie?
    Les résultats des études scientifiques sont publiés directement sous forme d'articles dans des revues scientifiques avec comité de lecture. C'est la principale méthode de communication. Bien entendu, nous envoyons aussi des rapports et d'autres documents à diverses organisations, par exemple des organisations gouvernementales, et à nos partenaires de l'industrie. Nous diffusons nos résultats et l'information de cette façon.
    Lorsque c'est possible, nous essayons de travailler en collaboration avec les gestionnaires et les décideurs dans le but de faire adopter des politiques qui tiennent compte de certains aspects scientifiques et qui sont également adaptés à la réalité quotidienne de la mise en oeuvre opérationnelle.
    Merci beaucoup. Je n'ai plus d'autres questions.
    Merci beaucoup. C'était tout le temps que nous avions.
    Monsieur Chubaty, merci beaucoup d'avoir accepté notre invitation. Votre témoignage très instructif nous a été d'une grande aide.
    Merci aussi à vous tous de vous être présentés aujourd'hui. Je vous souhaite une bonne Action de grâces. Nous nous reverrons dans 12 jours.
    La séance est levée.
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