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Je déclare la séance ouverte.
Bienvenue à la 103e réunion du Comité permanent des ressources naturelles de la Chambre des communes.
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le jeudi 6 juin 2024, le Comité entreprend son étude sur l'expansion du pipeline Trans Mountain.
Avant de commencer, je demanderais à tous les participants en personne de lire les lignes directrices inscrites sur les fiches à jour qui se trouvent sur la table. Ces mesures sont en place pour aider à prévenir les incidents acoustiques et les effets Larsen et pour protéger la santé et la sécurité de tous les participants, y compris les interprètes. Vous remarquerez également le code QR sur la carte, qui renvoie à une courte vidéo de sensibilisation.
La réunion d'aujourd'hui se déroule en format hybride. Tous les témoins ont effectué les tests de connexion requis avant la réunion.
Je souhaite également attirer l'attention des participants sur les points suivants.
Attendez que je vous donne la parole avant d'intervenir. Tous les commentaires doivent être adressés à la présidence.
Veuillez lever la main si vous souhaitez intervenir, que vous participiez en personne ou par Zoom. Le greffier et moi-même veillerons à respecter l'ordre des interventions dans la mesure du possible.
J'aimerais également souhaiter la bienvenue à Aimée Belmore, notre analyste, qui remplace Sarah Dodsworth.
Je vous souhaite la bienvenue.
Je vais également utiliser ces deux cartons: le jaune vous avertit qu'il reste 30 secondes, et le rouge signifie que le temps est écoulé. J'essaierai de ne pas vous interrompre au milieu d'une phrase.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins qui sont avec nous pour la première heure aujourd'hui. Nous accueillons Julia Levin, responsable du programme climat et énergie, de Environmental Defence Canada, qui témoigne par vidéoconférence. Nous accueillons aussi les représentants du Bureau du directeur parlementaire du budget: Yves Giroux, directeur parlementaire du budget, et Jason Stanton, conseiller et analyste.
Vous disposerez d'un maximum de cinq minutes pour les remarques liminaires, après quoi nous procéderons à une série de questions.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les membres du Comité de m'avoir invitée à comparaître dans le cadre de cette étude sur le projet d'agrandissement du réseau de Trans Mountain.
Je travaille pour Environmental Defence depuis cinq ans et j'ai suivi le projet Trans Mountain au cours de cette période. Mes commentaires porteront sur les répercussions climatiques et environnementales du projet; le montant du soutien financier public qui a déjà été gaspillé, alors que d'autres montants sont en jeu; l'importance de ne pas refiler ce projet et tous ses risques financiers aux collectivités autochtones; et le lien avec la production pétrochimique et la production de plastique en Chine.
L'expansion du pipeline Trans Mountain pourrait permettre d'acheminer 590 000 barils de pétrole supplémentaires par jour. Chaque baril de pétrole que nous exportons par l'entremise du pipeline produit plus de carbone dans l'atmosphère, ce qui contribue aux feux de forêt non naturels, aux inondations et aux sécheresses que l'on voit partout au Canada, y compris l'incendie qui a brûlé une grande partie de Jasper.
La production et la combustion de 600 000 barils de pétrole se traduiraient par 84 millions de tonnes de dioxyde de carbone chaque année. Cela équivaut à conduire environ 20 millions de voitures ou à exploiter 22 centrales au charbon. C'est plus que les émissions annuelles du Québec.
Selon les calculs du coût social du carbone du gouvernement du Canada, qui tiennent compte de tous les coûts de la pollution par le carbone, comme les coûts des soins de santé, les dommages matériels et la diminution de la productivité agricole, le coût d'une telle pollution par le carbone s'élèverait à plus de 20 milliards de dollars par année.
L'expansion du pipeline Trans Mountain a déjà entraîné une augmentation de la production de pétrole en Alberta. Le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat a été très clair: même les niveaux actuels de production de combustibles fossiles nous feront dépasser le réchauffement de 1,5 oC, et nous savons qu'au‑delà de ce niveau, les répercussions de la crise climatique deviendront catastrophiques et irréversibles. Il est irresponsable d'accroître la production de combustibles fossiles en pleine crise climatique, tant pour les générations actuelles que pour les générations futures.
Cette production accrue a également des répercussions environnementales et sociales, notamment le déboisement de la forêt boréale, la violation des droits autochtones issus de traités et des droits inhérents, et l'augmentation des risques pour la santé des Premières Nations en aval de cette production, ce que le gouvernement fédéral a récemment reconnu dans sa nouvelle étude sur les répercussions sur la santé.
Sur la côte Ouest, la circulation des pétroliers à Vancouver a décuplé depuis que les exportations ont commencé, ce qui met en danger d'extinction les épaulards — qui étaient déjà en voie de disparition — et a une incidence sur les niveaux de saumon, dont dépendent les collectivités des Premières Nations de la région. Les déversements, qui se produisent trop souvent avec les pipelines actuels, mettraient en danger les sources d'eau potable locales le long de la route et les eaux le long de la côte.
J'aimerais souligner le lien entre le pipeline et la production de plastique en Chine, qui contribue à la surproduction mondiale de ce polluant dangereux qui remplit nos océans, notre air, notre eau, nos sources de nourriture et nos corps. En fait, une grande partie du pétrole exporté à ce jour a été achetée par Rongsheng Petrochemical pour la production de plastiques.
Il faut aussi bien sûr tenir compte des répercussions financières du projet, qui a nécessité un investissement massif de fonds publics, une énorme subvention aux combustibles fossiles. Le gouvernement fédéral a fourni plus de 35 milliards de dollars pour financer le projet Trans Mountain. C'est de l'argent que les contribuables devront payer. Le gouvernement pourrait finir par radier la majeure partie de la dette pour faire paraître le pipeline commercialement viable, ce qui signifie que les contribuables auront payé la part du lion du pipeline.
En fait, selon une analyse effectuée par Valeurs mobilières TD en 2018, le projet d'expansion a cessé d'être viable lorsque les coûts du projet ont dépassé 11 milliards de dollars, et ils sont maintenant trois fois plus élevés. Même si le gouvernement canadien trouve un acheteur pour le pipeline, le prix ne couvrira pas les coûts du projet. Selon les estimations actuelles, le gouvernement devrait radier entre 17 et 20 milliards de dollars.
Une vente éventuelle repose en partie sur les décisions concernant les droits — le montant que les expéditeurs paient pour utiliser le pipeline — qui sont actuellement fixés à un taux inférieur aux coûts du marché du transport du pétrole, étant donné qu'ils étaient fondés sur des estimations de construction antérieures et beaucoup plus basses.
Puisque les coûts de construction et d'exploitation du pipeline ont explosé, les droits doivent augmenter considérablement pour couvrir l'ensemble des coûts d'exploitation et des immobilisations du projet. Cependant, les sociétés pétrolières et gazières se battent bec et ongles contre l'augmentation de ces droits. Elles ne veulent pas payer davantage. Elles veulent que les contribuables paient. Une décision sera prise en 2025, ce qui aura d'énormes répercussions sur les aspects financiers du projet.
Ce sont les pétrolières, et non les contribuables, qui devraient payer pour le pipeline dont elles seront les seules bénéficiaires. Cela signifie que les droits devraient presque doubler, pour atteindre 22 $ le baril. Moins les sociétés pétrolières et gazières verseront de droits, plus le public canadien devra payer.
Ce cafouillage a lieu pour que les sociétés de combustibles fossiles obtiennent un prix plus élevé pour leur produit; c'est pour remplir les poches de dirigeants pétroliers déjà incroyablement riches. CNRL, Cenovus, Imperial, Suncor et MEG Energy sont les seuls gagnants, alors que le reste d'entre nous en paie le prix.
Bon nombre de ces entreprises sont membres de l'Alliance Nouvelles voies et de l'Association canadienne des producteurs pétroliers, ce qui souligne la nécessité de faire témoigner ces deux associations devant le Comité.
Enfin, il est très important que ce projet ne soit pas refilé aux communautés autochtones au nom de la soi-disant réconciliation économique. Le projet Trans Mountain est associé à d'énormes responsabilités environnementales et financières, comme nous l'avons expliqué. De plus, étant donné le rythme accéléré de la transition énergétique, ce projet risque de devenir un actif inexploitable bien avant la fin de sa vie utile. Le transfert de ces responsabilités des secteurs public ou privé aux collectivités autochtones ne représente qu'une autre forme d'exploitation coloniale.
J'ai terminé. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
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Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs les vice-présidents et membres du Comité.
Je vous remercie de votre invitation à témoigner devant vous, aujourd'hui. Nous sommes heureux d'être ici dans le cadre de votre étude sur l'expansion du pipeline Trans Mountain, en particulier pour discuter de nos rapports publiés à ce sujet.
Je suis accompagné, aujourd'hui, de Jason Stanton, conseiller et analyste à mon bureau.
Conformément au mandat du directeur parlementaire du budget, qui consiste à fournir une analyse indépendante et non partisane au Parlement, mon bureau a publié trois rapports évaluant la décision prise en 2018 par le gouvernement du Canada d'acquérir, d'agrandir, d'exploiter, puis un jour de céder les actifs du réseau de pipeline Trans Mountain. Le rapport le plus récent a été publié le 22 juin 2022. Il présente une évaluation à jour de la valeur financière des actifs acquis, ainsi que l'estimation de la sensibilité de leur valeur à plusieurs facteurs clés.
À la publication du dernier rapport, en 2022, le budget de construction du projet d'expansion de Trans Mountain s'élevait à 21,4 milliards de dollars, et la date d'achèvement prévue était la fin de 2023. Notre évaluation s'est limitée à l'examen du coût financier direct de l'expansion du pipeline; tout autre coût ou avantage économique associé au pipeline n'a pas été inclus dans cette analyse.
[Traduction]
Sur la base de nos hypothèses de l'époque, nous avons conclu que la décision prise par le gouvernement en 2018 d'acquérir, d'agrandir, d'exploiter puis de céder les actifs de Trans Mountain se traduirait par une valeur actualisée nette négative de 0,6 milliard de dollars. Nous avons aussi évalué l'impact financier de certaines hypothèses sur la valeur des actifs du réseau Trans Mountain, dont la date de mise en service, les coûts de construction, l'utilisation des pipelines, le cadre applicable aux services et aux tarifs futurs, et le taux d'actualisation.
Depuis la publication de notre dernier rapport, le réseau de pipelines Trans Mountain a connu d'importants développements, notamment l'achèvement du projet d'expansion, qui est en exploitation commerciale depuis le 1er mai 2024. Le coût total du projet d'expansion est passé à plus de 34 milliards de dollars.
À la demande du Comité, nous avons entrepris de mettre à jour notre analyse. En juin, nous avons adressé une demande d'information à la afin d'obtenir les données détaillées les plus récentes concernant le réseau de pipelines Trans Mountain. Nous avons reçu toutes les informations demandées, bien qu'elles soient confidentielles pour des raisons commerciales. Nous réalisons actuellement une analyse et prévoyons de publier notre rapport à la fin du mois prochain.
M. Stanton et moi sommes disposés à répondre à vos questions sur notre analyse du réseau de pipelines Trans Mountain ou sur les autres travaux du directeur parlementaire du budget.
Merci, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président.
Merci à tous les témoins d'être ici aujourd'hui.
C'est un plaisir d'être de retour parmi vous en ce début de session. J'ai hâte de demander à la Chambre des communes un vote de censure contre le gouvernement afin que nous puissions sauver notre pays et rendre l'électricité et le chauffage abordables pour les Canadiens, et leur offrir des collectivités sécuritaires, après une élection sur la taxe sur le carbone.
Merci, monsieur Giroux et monsieur Stanton, de votre présence ici aujourd'hui. Je me sens un peu comme dans Le jour de la marmotte, puisque je suis députée depuis 2015 et que j'ai travaillé de nombreuses façons sur cette question particulière.
Je tiens à préciser que les conservateurs se sont toujours opposés à l'expansion du pipeline Trans Mountain par le gouvernement. Nous étions d'avis que le gouvernement fédéral devait offrir une certitude juridique et politique pour que le promoteur du secteur privé puisse mener à bien son projet dans le respect du budget et des délais. Comme vous le savez, son prix aurait été de 340 % inférieur et il aurait été mis en service en 2019.
C'est un autre exemple, et peut-être le plus important, des dommages qui ont été causés à l'économie canadienne ainsi qu'à la croyance voulant que le Canada soit un endroit où réaliser de grands projets, en raison des neuf années d'un gouvernement libéral-néo-démocrate anti-énergie. Bien sûr, vous ne pouvez probablement pas faire de commentaires à ce sujet.
Étant donné l'ampleur du travail que vous souhaitez accomplir, puis‑je vous demander tout de suite si vous seriez disposé à revenir devant le Comité après le dépôt de votre prochain rapport?
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Merci, monsieur le président.
Monsieur Giroux, bienvenue à la séance de notre comité. C'est un plaisir de vous voir, et il est bon que nous commencions la session en entendant votre témoignage, afin d'obtenir un aperçu du projet TMX.
Tout d'abord, je vous remercie du rapport que vous avez publié en 2022. Il constitue une bonne base de référence intermédiaire avant la publication du rapport final, dans lequel toutes les informations seront disponibles. Personnellement, j'ai hâte de lire votre rapport qui sera très détaillé, je pense.
Je voudrais revenir sur le rapport de 2022. Vous avez nuancé ce rapport au cours de votre déclaration préliminaire. À plusieurs reprises, vous avez parlé des hypothèses que vous avez avancées. Si j'ai bien compris, vous avez utilisé cinq hypothèses clés pour mesurer la valeur du projet de construction du pipeline. Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous fournir des précisions à propos de ces cinq hypothèses clés?
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Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de votre présence, monsieur Giroux.
Je veux commencer en mettant les choses en perspective.
En 2018, le gouvernement achète le pipeline pour 4,5 milliards de dollars. Selon l'analyse de Kinder Morgan sur l'agrandissement du pipeline, celui-ci coûtera 7,4 milliards de dollars. En 2020, on estime déjà à 12,6 milliards de dollars la valeur de l'agrandissement. En 2022, on l'estime 21,4 milliards de dollars, en 2023, à 30 milliards de dollars, et en 2024, le coût final est estimé à 34 milliards de dollars.
Vous êtes déjà intervenu à ce comité pour dire qu'il fallait probablement écarter le scénario présenté par le gouvernement selon lequel les profits réalisés grâce au pipeline allaient être investis dans des projets d'énergie propre.
Je voudrais attirer votre attention sur quelque chose d'assez simple. Le gouvernement a présenté dans son budget de 2023 ce qu'il appelle « un grand plan audacieux pour la transition énergétique », d'une valeur de 40 milliards de dollars, qui s'étendrait jusqu'en 2035. Ces 40 milliards de dollars ne serviraient pas seulement à de l'électricité propre, mais aussi à des projets de captation-séquestration de carbone, qui doivent servir au secteur gazier et pétrolier.
Je constate que vous avez mis un prix pour l'analyse que vous avez faite sur le carbone. Si j'examine tout cela d'un œil extérieur, je suis obligé d'en venir à la conclusion que le gouvernement a consacré beaucoup de ressources à des projets sur les hydrocarbures et qu'à l'inverse, on va rater la cible pour ce qui est des projets sur l'énergie propre.
Mon analyse vous apparaît-elle comme étant cohérente?
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Votre analyse semble tout à fait cohérente.
D'une part, on a acheté un oléoduc et on a poursuivi l'aventure en construisant une expansion de cet oléoduc, et le coût total va vraisemblablement dépasser 34 milliards de dollars.
D'autre part, les divers crédits d'impôt qui ont été annoncés dans les budgets récents vont s'élever à plusieurs dizaines de milliards de dollars. Je n'ai pas les chiffres exacts, mais on semble s'approcher des mêmes montants.
Le seul bémol que je mettrais à cette analyse, c'est que le gouvernement pourrait décider de vendre l'oléoduc Trans Mountain et son expansion et vraisemblablement récolter les fruits de cette vente. Ces derniers seront-ils supérieurs ou inférieurs aux coûts d'acquisition et d'expansion? Selon nous, ils vont probablement être inférieurs, et nous subirions donc une perte. Toutefois, les coûts de l'achat et de l'expansion doivent aussi être considérés relativement au profit de la vente, si vente il y a, éventuellement.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur Giroux, j'aimerais avoir vos lumières, parce que je me demande comment situer l'action du gouvernement lorsqu'il est question du pipeline. Vous allez me comprendre.
Il y a un énorme bouquet de soutien au secteur gazier et pétrolier de la part du gouvernement fédéral. On a même de la difficulté à se situer entre les subventions efficaces et les subventions inefficaces. Je pense que même le gouvernement ne veut pas définir ce qu'il entend par une subvention inefficace au secteur pétrolier.
Quand je vois l'achat du pipeline et les coûts affolants qui y sont associés, soit la fameuse somme de 34 milliards de dollars, je ne peux m'empêcher de penser que Kinder Morgan n'a pas voulu faire cet investissement dans cette infrastructure, qui est essentielle pour le secteur gazier et pétrolier, parce qu'elle jugeait probablement que ce n'était pas rentable.
En mettant tout cela ensemble, ne peut-on pas en tirer la conclusion que ces 34 milliards de dollars, finalement, sont un soutien au secteur gazier et pétrolier? Seriez-vous d'accord là-dessus?
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Je vous remercie, monsieur le président.
J'aimerais obtenir une réponse de la part de Mme Levin. Il semble que le plan climatique du gouvernement libéral s'apparente à un programme de désintoxication incitant les patients à continuer de se droguer. Ils ont investi 34 milliards de dollars dans l'augmentation massive de la production de pétrole, tout en affirmant que, d'une manière ou d'une autre, ils allaient réduire les émissions comme par magie.
Le dernier rapport publié par la Régie de l'énergie du Canada indique que si nous adoptons le plan du gouvernement libéral, le Canada risque de maintenir son niveau actuel de production de pétrole jusqu'en 2050. Puis, le s'est énervé et a fait réécrire le rapport. Ensuite, ils ont présenté un nombre plus bas relevant de la pensée magique, qui comprenait une augmentation massive du captage direct du carbone dans l'air. J'ai dû chercher l'expression « captage direct du carbone dans l’air ». Il a été identifié pour la première fois il y a 25 ans et n'a jamais été utilisé, mais il y a une augmentation qui a été multipliée par plusieurs milliers.
Dans le monde réel, nous assistons à l'intensification de l'exploitation des sables bitumineux en Alberta, dans le cadre du projet TMX.
Madame Levin, quelles sont les répercussions de cette augmentation massive...
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Je vous remercie pour la question.
L'ensemble des émissions liées au cycle de vie de ces barils de pétrole, s'ils sont tous brûlés, s'élève à 84 millions de tonnes par an. Encore une fois, il s'agit d'une quantité énorme d'émissions. C'est plus que les émissions annuelles du Québec provenant d'un seul projet. Il s'agit des émissions du pétrole exporté lors de la combustion.
Cependant, les émissions en amont liées à cette production, à l'augmentation de la production de pétrole, seront également importantes. Je n'ai pas les chiffres exacts, mais il est certain que si le plafond d'émissions du Canada doit être rigoureux, il n'y a pas de place pour l'expansion de la production.
Nous savons que les technologies dont les entreprises se prévalent souvent, notamment le captage direct du carbone dans l’air et le stockage du carbone, se sont révélées inefficaces. Il s'agit d'une succession d'échecs coûteux. Ce genre de technologies se sont avérées dangereuses pour les collectivités qui y sont exposées. La semaine dernière, un puits d'injection aux États-Unis, le premier puits d'injection de stockage permanent, a connu une fuite qui a menacé l'eau potable. Telle est la réalité des projets de captage et de stockage du carbone.
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Nous reprenons nos travaux.
Nous reprenons la 103e réunion du Comité permanent des ressources naturelles de la Chambre des communes. Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le 6 juin 2024, le Comité entreprend son étude sur l'expansion du pipeline Trans Mountain.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins pour la deuxième heure. De la Régie de l'énergie du Canada, nous accueillons Mme Tracy Sletto, présidente-directrice générale; Mme Geneviève Carr, première vice-présidente, Transparence et mobilisation stratégique; et M. Chris Loewen, premier vice-président, Réglementation.
Je vous souhaite la bienvenue. Vous disposez de cinq minutes pour votre déclaration d'ouverture.
Bonjour. Je m'appelle Tracy Sletto et je suis présidente-directrice générale de la Régie de l'énergie du Canada.
Je suis accompagnée de Mme Genevieve Carr, qui est docteure en biologie et qui occupe le poste de première vice-présidente, Transparence et mobilisation stratégique, ainsi que de M. Chris Loewen, qui est premier vice-président, Réglementation.
[Traduction]
Je tiens tout d'abord à rappeler que je me trouve sur le territoire ancestral et traditionnel non cédé de la nation algonquine anishinabe, qui habite sur le territoire connu aujourd'hui sous le nom d'Ottawa depuis des temps immémoriaux.
[Français]
Je vous remercie de me donner l'occasion de vous parler du travail de la Régie dans le cadre de votre étude sur le projet d'agrandissement du réseau de Trans Mountain.
[Traduction]
Je présenterai brièvement le mandat de la Régie de l'énergie du Canada, ou REC, la manière dont nous évaluons les projets d'infrastructure énergétique tels que le TMX, le statut réglementaire actuel du projet et notre rôle continu aux côtés du comité consultatif et de suivi autochtone.
Le mandat de la REC est clair: réglementer les infrastructures énergétiques de manière à prévenir les dommages et à garantir la fourniture sûre, fiable, compétitive et écologiquement durable d'énergie pour le Canada et le monde. Nous avons la responsabilité de superviser quelque 71 000 kilomètres de pipelines réglementés par le gouvernement fédéral et 1 500 kilomètres de lignes électriques.
[Français]
Nous jouons un rôle économique important en ce qui concerne les droits et les tarifs pipeliniers, ainsi que les exportations d'énergie.
La Régie a aussi comme mandat de fournir de l'information sur l'énergie. Nous fournissons donc des données et des analyses qui éclairent la prise de décisions et le dialogue sur l'énergie au Canada. Notre série de rapports sur l'avenir énergétique explore divers scénarios auxquels les Canadiens pourraient faire face à long terme dans un monde carboneutre.
[Traduction]
Lorsque la Commission de la Régie de l'énergie du Canada recommande au gouverneur en conseil de délivrer ou non un certificat pour un pipeline, elle doit tenir compte de plusieurs facteurs: la sécurité, l'économie, l'environnement et la société. C'est ce qui s'est passé dans le cas de TMX.
TMX est un projet particulièrement vaste et complexe, et la REC s'est efforcée à tout moment de veiller à ce qu'il témoigne d'un engagement en faveur de pratiques et de processus réglementaires solides, réactifs et inclusifs. Le gouverneur en conseil a approuvé le projet en juin 2019, sous réserve de 156 conditions juridiquement contraignantes en plus des exigences réglementaires qui s'appliquent à toutes les entreprises réglementées par la REC. Depuis lors, nous avons veillé à ce que le projet soit construit en toute sécurité et vérifié que l'entreprise respecte les exigences réglementaires.
La Commission de la REC a délivré l'autorisation finale d'exploitation à TMX le 30 avril 2024. La société a ainsi pu commencer à transporter des produits sur la nouvelle ligne entre son terminal d'Edmonton et son terminal maritime de Westridge.
[Français]
Notre rôle ne s'arrête pas maintenant que la construction est terminée. Étant donné que nous agirons en tant qu'organisme de réglementation pendant tout le cycle de vie des installations, nous continuerons de veiller à ce que la société respecte les conditions, les règlements, les codes et les normes établis.
[Traduction]
La REC est également un organisme de réglementation économique qui supervise les péages des pipelines. Les droits sont les redevances qu'une compagnie de pipelines facture à ses clients pour le transport de produits tels que le pétrole sur son pipeline. Une compagnie de pipeline ne peut percevoir que des droits qui ont été déposés auprès de la REC.
En novembre 2023, la Commission de la REC a approuvé les droits provisoires préliminaires pour l'extension du réseau de pipelines Trans Mountain. La prochaine étape pour la Commission est l'audience sur les droits provisoires définitifs, qui se poursuivra tout au long de 2024 et jusqu'en 2025 et qui comprendra un examen détaillé des coûts du projet.
[Français]
J'aimerais profiter de l'occasion pour souligner un autre élément clé de la surveillance réglementaire du projet de Trans Mountain. Lorsque le gouvernement du Canada a approuvé le projet, en 2016, il s'est aussi engagé à mettre sur pied un comité consultatif et de surveillance autochtone pour le projet.
[Traduction]
Les comités consultatifs et de surveillance autochtones comprennent des représentants autochtones sélectionnés parmi les 129 collectivités touchées par le projet. Aux côtés de la REC et de cinq autres départements du gouvernement fédéral, les comités consultatifs et de surveillance autochtones ont développé des approches innovantes en matière de surveillance des populations autochtones, de notification des projets, de protection des sites d'importance pour les populations autochtones, ainsi que de nouveaux processus et protocoles de gestion des situations d'urgence. Plusieurs de ces améliorations ont depuis été intégrées aux pratiques de la REC et aux exigences réglementaires qui s'appliquent à toutes les entreprises. La REC continuera à travailler avec les comités consultatifs et de surveillance autochtones tout au long du cycle de vie du pipeline.
Pour l'avenir, la REC s'engage à s'améliorer continuellement en tant qu'autorité nationale de régulation de l'énergie, en vue d'instaurer et de maintenir la confiance dans son travail, de faire progresser la réconciliation, de mettre en œuvre la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, de renforcer la compétitivité mondiale du Canada grâce à son leadership en matière d'innovation réglementaire et de meilleures pratiques, et de se préparer à l'avenir énergétique.
[Français]
Je tiens à vous remercier de nouveau de m'avoir donné l'occasion de vous parler de notre travail à la Régie de l'énergie du Canada et de notre rôle à l'égard du projet de Trans Mountain.
Je suis prête à répondre à vos questions.
Merci.
:
Je vous remercie. Nous allons donner suite à cette demande.
À l'heure actuelle, 53 projets sont bloqués, d'une manière ou d'une autre, dans le processus d'examen fédéral. Madame Sletto, vous avez été vice-présidente de la Régie de l'énergie du Canada pendant cinq ans — je vous remercie de vos services — et vous êtes présidente-directrice générale de l'organisme depuis décembre 2023. Bien entendu, la Régie de l'énergie du Canada est un organisme primordial et essentiel pour chaque Canadien, étant donné la portée de ses activités.
Il y a donc 53 projets en attente d'approbation pour lesquels aucune décision n'a été prise. Comme vous venez de le confirmer, 600 personnes travaillent pour la Régie de l'énergie du Canada. Chaque année depuis 2015, c'est‑à‑dire depuis les changements qui ont été apportés, 5 billions de dollars d'investissements sortent du Canada pour aller aux États-Unis, et c'est à cause du gouvernement actuel. C'est un renversement direct. Cette situation est liée aux projets de ressources naturelles qui sont abandonnés ou tués dans l'œuf au Canada parce que le secteur privé ne peut pas franchir le processus de réglementation et qu'il ne peut pas compter sur un gouvernement qui le soutiendra au bout du compte. Prenez l'exemple de TMX, le projet d'agrandissement du réseau de Trans Mountain, qui a initialement été approuvé en 2016, mais le tribunal a rendu une décision selon laquelle les libéraux n'ont pas adéquatement consulté les Autochtones au sujet de ce projet. Je suis donc heureuse d'entendre que vous avez un groupe consultatif autochtone.
Je présume que je vous demande simplement si, à votre avis, cela ressemble à des résultats satisfaisants en ce qui concerne le rendement de la Régie.
:
D'accord. C'est très bien. J'aimerais d'ailleurs poser quelques questions sur ce point. Vous avez tout d'abord refusé au promoteur une demande de modification pour le pipeline, mais vous l'avez approuvée par la suite. Qu'est‑ce qui a changé, puisque c'est l'un des retards qui a fait grimper les coûts?
Deuxièmement, vous avez formulé 16 recommandations au sujet du projet d'agrandissement du réseau de Trans Mountain qui n'entraient pas dans le cadre du mandat de réglementation de la Régie. Votre organisme lui-même l'a confirmé. Nous avons donc un organisme de 600 personnes au sein duquel 53 projets sont en attente, et ce, dans le secteur le plus important de l'économie canadienne. Ces 600 personnes ne peuvent pas faire franchir les processus nécessaires à ces projets, mais d'une manière ou d'une autre, vous avez formulé 16 recommandations au sujet du projet d'agrandissement du réseau de Trans Mountain qui n'ont fait que prolonger les délais et qui n'entraient pas dans le cadre du mandat en matière de réglementation. C'est donc une autre question.
Voici une dernière question. Depuis que la Cour suprême a mis en accusation les échecs du gouvernement actuel au sujet du projet de loi — lequel, soit dit en passant, l'opposition conservatrice a mis en garde au sujet de chaque question sur laquelle la Cour suprême s'était prononcée, et ensuite le gouvernement a simplement inséré certaines de ses mesures de modification dans son projet de loi d'exécution du budget —, quelles répercussions l'absence manifeste de paramètres réglementaires depuis la décision de la Cour suprême du Canada a‑t‑elle eues sur votre travail au sein de la Régie de l'énergie du Canada?
Quel type d'orientation ou de perspective le gouvernement vous a‑t‑il donné sur la portée et le mandat de votre organisme à la suite des changements législatifs apportés après ses erreurs liées au projet de loi , que la Cour suprême du Canada et les 10 dirigeants provinciaux et territoriaux ont mis en accusation et qui est la pierre angulaire de l'évaluation réglementaire pour le principal secteur de l'économie canadienne qui peut offrir l'accessibilité financière à tous les Canadiens dans toutes les collectivités?
:
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Je vous remercie d'être ici et de prendre le temps de répondre à nos questions.
Mes questions porteront sur ce qui est important pour ma collectivité, soit Vaudreuil—Soulanges. D'autres personnes dans cette salle parleront des avantages économiques, en particulier pour l'Alberta et la Colombie‑Britannique, de la construction du pipeline ou de l'agrandissement du projet. D'autres parleront des partenariats autochtones et de la part des quelque 30 milliards de dollars qui ont été versés aux collectivités autochtones et aux entreprises dirigées par des autochtones.
Mes questions porteront davantage sur l'environnement et sur la protection de l'environnement, ainsi que sur la sécurité.
Je parlerai d'abord de l'environnement. Nous savons qu'il est plus efficace de transporter du pétrole par pipeline que par train. En effet, les statistiques révèlent que le transport par pipeline est deux fois plus sécuritaire — et j'en parlerai davantage dans un instant —, mais aussi beaucoup plus efficace sur de longues distances. Nous réaliserons donc d'importantes économies en ce qui concerne les émissions de gaz à effet de serre.
De plus, toutes les émissions qui devraient être créées par ce pipeline seront ou ont déjà été prises en compte dans le plan climatique du Canada, de sorte qu'il ne s'agit pas d'un facteur externe... Elles ont déjà été prises en compte. C'est une bonne nouvelle, et je l'ai communiquée à mes électeurs.
Voici donc ma question. Outre le fait que nous agissons de la manière la plus durable sur le plan écologique en ce qui concerne les émissions de gaz à effet de serre et que ces émissions sont déjà prises en compte dans les objectifs et le plan du Canada en matière d'émissions, quels autres outils principaux ont été mis au point pour s'assurer que tout cela protège l'environnement de la meilleure manière possible?
:
Je vous remercie de la question.
Je pourrais souligner plusieurs aspects, mais il y en a un en particulier que j'aimerais mettre en lumière dans le contexte de ce projet et des projets récents qui ont été soumis à la réglementation de la Régie. Chose certaine, l'étude de facteurs d'ordre social, économique et environnemental fait partie intégrante de tout examen de projet qu'entreprend la Régie. Notre surveillance porte sur le cycle de vie des projets, et nous tenons compte de ces mêmes facteurs dans l'ensemble de notre cadre réglementaire.
Je vais attirer votre attention sur un élément du projet Trans Mountain dont j'ai parlé dans ma déclaration préliminaire et qui constitue une approche particulièrement novatrice qui nous permet de collaborer de façon différente avec les peuples autochtones. Il s'agit du Comité consultatif et de surveillance autochtone et du travail que nous avons effectué en partenariat avec les communautés touchées le long du tracé du pipeline.
Je parle de cette approche, car elle nous a permis d'améliorer notre cadre réglementaire partout au Canada. Les partenariats que nous créons nous aident à cerner des éléments des projets d'exploitation de ressources naturelles et d'infrastructures qui auraient des répercussions non seulement sur l'environnement, mais aussi sur la culture et les ressources patrimoniales et qui auraient de réelles répercussions à long terme sur la façon dont ces projets fonctionnent, et ils nous permettent de prendre des mesures. Nous employons toujours cette approche novatrice; nous ne l'avons pas seulement fait dans le cadre du projet Trans Mountain. Nous avons adopté ces pratiques exemplaires et nous les intégrons maintenant dans notre cadre réglementaire, qui s'applique aux entreprises soumises à notre réglementation d'un bout à l'autre du pays.
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Bien sûr. Je comprends ce que vous dites et je vous remercie de la question.
Je céderai peut-être la parole à mon collègue, M. Loewen, dans un instant pour qu'il vous en dise davantage à ce sujet. Je vous dirai toutefois qu'environ 600 personnes travaillent à la Régie et qu'elles ont toutes à coeur notre mandat en matière de sécurité.
Le rôle de la Régie est de cerner et de prévenir les dommages associés aux activités que nous réglementons, et nous disposons d'employés spécialisés qui se consacrent précisément à cette tâche. Il est essentiel de réfléchir à la manière de déterminer, dans un premier temps, les causes de ces dommages et à la façon de les prévenir.
Je vais maintenant céder la parole à mon collègue, qui s'occupe de la réglementation des activités et, en particulier, des urgences.
Monsieur Loewen, je vous donne la parole.
Merci beaucoup de la question, monsieur Schiefke.
Le niveau de surveillance réglementaire est proportionnel à la complexité et à l'ampleur d'un projet, et il est question ici d'un projet très complexe et très vaste. C'est peut-être le plus vaste de l'histoire du Canada, et c'est certainement le plus important pour la Régie de l'énergie du Canada.
Plus les projets sont vastes et multidimensionnels, plus nos activités de surveillance et d'orientation sont importantes, car nous devons nous assurer que les conditions des projets sont respectées. Nous utilisons également une série d'outils d'application de la loi pour veiller à ce que les entreprises respectent la réglementation et les normes établies par la Régie. Cela va des sanctions administratives pécuniaires aux ordonnances de conformité aux conditions et de vérification de la conformité.
La sécurité demeure notre priorité absolue, et elle inclut tous les travailleurs et entrepreneurs sur les chantiers. Environ 30 000 travailleurs ont participé à ce projet, ce qui est tout un exploit. À notre avis, le bilan en matière de sécurité était... Nous pouvons toujours faire mieux, mais nous pensons que dans ce cas‑ci, le bilan était excellent.
De plus, nous appliquons avec assurance des normes de sécurité et environnementales parmi les plus strictes au monde.
Je vais m'arrêter là.
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Merci, monsieur le président.
Je suis heureux d'être ici. Il faut venir faire un tour au Comité permanent des ressources naturelles de temps en temps pour constater à quel point, d'un point de vue énergétique et environnemental, un libéral est un conservateur.
Ce que mon collègue libéral vient de dire est absolument scandaleux, dans la mesure où l'objectif des libéraux n'est pas de respecter leurs cibles en matière d'émissions de gaz à effet de serre, mais plutôt de faire comme les conservateurs et d'exporter le plus de pétrole possible. L'argument qu'on nous sert, c'est qu'on va construire des pipelines parce que c'est un moyen plus sécuritaire que le train pour transporter le pétrole. C'est l'argument sur lequel mon collègue vient de s'appuyer en demandant aux gens de la Régie de l'énergie du Canada si le pipeline est moins dangereux que le train pour transporter des tonnes de pétrole. C'est une question complètement malhonnête de la part de mon collègue, qui est honnête.
Je vais donc vous poser la question suivante: ne serait-ce pas plus sécuritaire, conditionnellement à ce que notre sécurité énergétique soit assurée, de transporter et d'exporter moins de pétrole?
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Je vais me permettre de vous interrompre. C'est une mauvaise habitude que j'ai.
Je comprends donc que le mandat de la Régie de l'énergie est, entre autres, d'assurer la sécurité des installations, mais que vous êtes incapable de me dire si, en transportant moins de pétrole, il y a moins de risque d'accident. Moi, j'ai ma réponse: je comprends que vous n'avez pas le droit de me donner la réponse. Elle est évidente. Ce que je voulais démontrer, c'est la malhonnêteté de la question de mon collègue libéral, qui vous a mise dans une situation intenable. On ne devrait pas faire cela à ses invités.
Je comprends que votre rôle est de vous assurer qu'une fois une installation construite, le transport de l'énergie se fait de façon sécuritaire. Le transport comprend une notion interprovinciale, de sécurité et d'intérêt national.
Serait-il juste de dire que vous pourriez avoir le mandat de faire en sorte de transporter de la façon la plus environnementalement responsable possible le pétrole le plus sale au monde? Est-il possible que ce soit votre mandat?
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Ce n'est pas une question de politique publique. C'est réellement une question liée au transport. C'est pour cela qu'elle déplaît à mes collègues ici présents.
Certains députés du gouvernement nous disent qu'il faut transporter quand même les produits de façon sécuritaire et écologique. Tout cela occulte deux points centraux dans la question du pipeline Trans Mountain, qui vont au-delà des coûts, absolument insensés, sur lesquels nous n'avons pas le temps de nous pencher.
Le premier, c'est que ce pipeline transporte de façon sécuritaire le produit pétrolier le plus sale à produire au monde. Le second, c'est que, si on veut améliorer la question de la sécurité dans le transport, transporter moins de ce produit sera la première solution à envisager une fois que notre sécurité énergétique sera assurée.
À ce sujet, je veux souligner que jamais un député du gouvernement ni un député conservateur ne fait l'effort d'éclairer correctement le public sur ce point.
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Parfait. Merci, monsieur le président.
Cela fait bien sûr partie de l'écheveau que nous tissons lorsque les libéraux commencent par duper les gens, comme ils l'ont fait dans le cas de TMX et de l'énergie. Ils tiennent un double discours. Ils ont déjoué les électeurs du NPD et du Parti vert. C'est pourquoi vous avez vu ce changement.
Bien entendu, ils ont mis en œuvre le premier plafonnement des émissions du secteur pétrolier et gazier au monde, qui est conçu pour arrêter la production et maintenir les ressources canadiennes dans le sol. Ne vous méprenez pas: les conservateurs sont favorables à l'accroissement de la production et de l'exportation des ressources naturelles canadiennes afin d'améliorer les salaires de nos concitoyens et de contribuer à réduire les émissions à l'échelle mondiale.
Pour revenir aux sujets que nous avons abordés plus tôt, nous avons découvert que moins du tiers des projets proposés depuis novembre 2015 ont été approuvés par la Régie canadienne de l'énergie. Nous devrions probablement tenir des conversations de suivi pour savoir si les Canadiens peuvent raisonnablement considérer cela comme étant un bilan positif. C'est important pour chaque Canadien et chaque communauté — surtout pour les peuples autochtones qui sont les plus touchés par les emplois fournis par les ressources naturelles, et l'exploitation pétrolière et gazière plus particulièrement.
Si nous pouvons simplement revenir à la décision concernant la modification du pipeline qui faisait partie de mon autre question, vous savez, bien sûr, que la Régie canadienne de l'énergie a rejeté cette demande il y a un an. Cela aurait accéléré l'achèvement du projet de deux mois et aurait généré environ 400 milliards de dollars en revenus additionnels. La demande a ensuite été approuvée en janvier 2024.
Ce type d'incertitude sonne évidemment le glas pour la construction de projets d'envergure et envoie des signaux négatifs aux investisseurs du secteur privé. Le bourbier dans lequel nous nous trouvons est dû à l'inaction du gouvernement quand il aurait dû agir et à l'achat inutile de ce projet.
Pouvez-vous expliquer ce qui a changé dans votre décision finale depuis l'année dernière — votre refus qui a encore retardé le projet?
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Je vous remercie de cette question.
Premièrement, en ce qui concerne la décision qui a été prise sur ce projet précisément, ces considérations économiques auraient certainement été prises en compte dans la décision d'intérêt public que le gouverneur en conseil a prise. Vous parlez également d'une analyse de marché plus vaste et de données économiques.
Il y a deux aspects de cette question que je voudrais souligner.
Un aspect serait plutôt une question de mandat politique, je pense, en ce qui concerne l'approche économique du gouvernement.
Je mentionnerai également le mandat de la Régie canadienne de l'énergie concernant les renseignements sur l'énergie et l'offre sur le marché. Vous parlez de nos aperçus, qui sont un élément clé de notre mandat relatif aux données sur l'énergie. Nous produisons non seulement des rapports phares comme le rapport sur l'avenir énergétique ou ces profils provinciaux et territoriaux, dont certains viennent d'être publiés la semaine dernière seulement. Sur ce plan économique en général, et certainement dans l'optique des prévisions et de l'objectif de carboneutralité, nous avons publié notre toute première modélisation carboneutre dans le rapport sur l'avenir énergétique de 2023 l'an dernier, et elle fait mention de certaines des répercussions économiques générales que vous avez mentionnées, si je ne m'abuse.
Je ne serais pas en mesure de parler précisément de ce à quoi vous faites référence dans le contexte des lignes directes de ce projet, mais nous avons certainement beaucoup de renseignements disponibles sur les prévisions économiques générales et les répercussions sur le marché auxquelles nous nous attendons, et plus précisément dans le contexte d'un avenir carboneutre. Nous serions ravis de fournir ces renseignements à titre de suivi.
Je pense que, dans un tel contexte, nous nous appuierions probablement sur les renseignements dans ces aperçus du marché, qui sont accessibles au public, y compris l'analyse sur le lien entre la production et le marché de l'énergie en général au Canada, et certainement dans le contexte des débouchés économiques.
Encore une fois, je vais parler de notre rôle. Fort de notre mandat de fournir de l'information sur l'énergie, notre rôle consiste à fournir cette analyse et cette modélisation, mais nous ne jouons pas de rôle en leadership stratégique. En tant qu'organisme de réglementation, nous jouons un rôle clair qui s'inscrit dans notre mandat de sécurité et notre mandat de réglementation économique.
Nos collègues de Ressources naturelles Canada seraient mieux placés pour parler de la politique économique générale que vous soulevez.
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D'abord, j'aimerais remercier M. Garon de partager son temps de parole avec moi. C'est gentil.
[Traduction]
Monsieur le président, récapitulons la situation: en 2016, l'Office national de l'énergie a conclu — curieusement — que ce pipeline de 1 150 kilomètres était dans l'intérêt public du Canada, malgré son lourd passé terni par 85 déversements en date de la décision. La décision a été portée en appel 17 fois, y compris par de nombreuses Premières Nations.
Puis, le gouvernement a décidé d'acheter le pipeline quelques jours après avoir admis que nous vivions une urgence climatique. De nombreux groupes environnementaux ont qualifié le projet de « bombe climatique » pour de bonnes raisons. Les climatologues nous disent que nous devons agir sans plus attendre si nous voulons limiter le réchauffement en deçà de 1,5 degré Celsius. Or, au lieu d'agir, nous venons d'entendre que ce pipeline transportera chaque jour près de 900 000 barils de bitume dilué, ce qui représente 84 millions de tonnes supplémentaires de pollution par le carbone chaque année. On fait un tour de passe-passe dans la comptabilisation du carbone: ce carbone ne figure pas dans notre bilan d'émissions. Il serait dans les autres pays.
De plus, cette pollution comporte des risques importants pour la santé. L'Association canadienne des médecins pour l'environnement nous apprend que, si un navire-citerne transportant 600 000 barils déversait ne serait‑ce que les deux tiers de sa cargaison et que seulement 0,5 % de ce pétrole atteignait le rivage, il faudrait immédiatement évacuer 25 000 personnes, ou 105 000 si le combustible s'enflammait.
C'est un désastre financier. Nous avons appris que le gouvernement fédéral fait tout ce qu'il peut pour créer des sociétés fictives afin de cacher tout l'argent que nous gaspillons, mais le fait est que nous gaspillons collectivement 34 milliards de dollars — environ 2 000 $ par ménage canadien...
Nous sommes très heureux de vous accueillir aujourd'hui.
C'est une bonne première séance pour notre Parlement. Mes amis du Parti libéral nous donnent enfin l'heure juste. Ce matin, ils ont parlé des investissements et des possibilités économiques considérables liés à l'augmentation massive de la production de bitume et à son exportation partout dans le monde.
Lorsque nous avons reçu le , je lui ai posé une question sur votre scénario énergétique pour 2050, dans lequel vous avez essentiellement dit que la production en 2050 serait à peu près la même qu'aujourd'hui — peut-être quelque peu inférieure. J'ai dit au ministre Wilkinson que le plan ne vaut pas grand-chose si la production énergétique reste la même. Il a rétorqué qu'il fallait rectifier la situation et qu'il allait demander à la Régie de l'énergie du Canada d'élaborer un nouveau scénario.
J'ai examiné le scénario irréaliste de licornes et d'arcs‑en‑ciel. Je l'ai adoré, avec sa multiplication par mille du captage direct du carbone dans l'air et tout ce qui était possible. Maintenant, il faut tenir compte du projet TMX et des augmentations massives de la production de bitume par jour et par baril. Je pense que M. Wilkinson a agi injustement en vous demandant de faire tout ce travail supplémentaire.
Diriez-vous que, dans votre premier scénario, la production pétrolière allait se poursuivre parce que le Canada est un pétro-État qui a obtenu 34 milliards de dollars des contribuables pour conserver ce titre? Votre premier scénario montrait que la production de pétrole au Canada ne diminue pas vraiment, même si l'Agence internationale de l'énergie affirme que des baisses importantes... et même si le groupe d'experts des Nations unies sur le climat et d'autres disent que notre production doit radicalement baisser. Le Canada mène maintenant la barque dans l'augmentation de la production mondiale de pétrole.
Votre scénario féerique de licornes et d'arcs‑en‑ciel est‑il maintenant anéanti par le fait que le projet TMX est enfin prêt?
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Merci. Je ne pense pas que je vais poursuivre dans cette veine.
Ce que j'aimerais dire, c'est qu'en 1951, lorsque le projet Trans Mountain a été mis sur pied au départ, il a fallu 30 mois pour le mener à terme. Lorsque le plus récent projet a été approuvé en 2017, il devait lui aussi prendre 30 mois. S'il n'y avait pas eu autant de retards, il aurait été terminé avant le début de la pandémie, laquelle est, je le rappelle, l'une des raisons pour lesquelles les coûts ont augmenté.
Il y a eu des discussions sur le fait que vous allez devoir composer avec les droits et tarifs ainsi qu'avec leur gestion. Les coûts supplémentaires sont attribuables pour une bonne part à des problèmes de réglementation qui ont ralenti la production.
J'aimerais bien savoir une chose. Lorsque les entreprises s'adressent à vous pour vous parler des droits et tarifs, est‑ce qu'il en est question dans vos échanges et est‑ce que vous en tenez compte dans vos décisions? Quelle est la part des coûts que ces entreprises auraient dû assumer par rapport à celle qui leur a été imposée en raison du système de réglementation que nous avons?
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Je vous remercie de cette question.
Il y a deux éléments que j'aimerais vous rappeler.
Premièrement, dans nos échanges avec l'industrie réglementée nous cherchons sans cesse de nouvelles façons d'améliorer notre surveillance réglementaire. Nous avons diverses tribunes nous offrant l'occasion de le faire, y compris des réunions semestrielles avec notre industrie réglementée dans le cadre de nos efforts incessants pour accroître notre rapidité d'exécution et la compétitivité de notre processus décisionnel. Les conseils et les commentaires que nous recevons ont été mis en œuvre de façon très concrète, y compris dans le cadre d'une initiative qui est maintenant le fer de lance d'une partie du travail de la Régie.
Lorsque vous parlez de la façon dont les questions sont examinées dans le contexte des droits et tarifs à payer, en particulier pour Trans Mountain, je pourrais encore une fois mentionner le rôle important de la Commission dans l'examen des décisions dont elle est saisie.
En ce qui concerne votre question sur notre engagement à assurer l'efficience et l'efficacité en matière réglementaire, je peux vous assurer que c'est l'une des priorités de notre régie. Nous voulons faire preuve d'une telle excellence en matière de réglementation et souscrire à un engagement à l'égard de la compétitivité, et ce, sans compromettre les autres objectifs clés liés à la réconciliation. Nous souhaitons ainsi contribuer de façon significative à la mise en oeuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et maintenir un climat de confiance dans le contexte de notre travail, tout cela à un moment où le secteur de l'énergie est en pleine transition.
Nous devons aussi tenir compte de cette réalité en veillant à être prêts à accomplir notre travail de réglementation au sein de ce nouvel environnement. C'est une priorité pour nous.
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Merci. Comme il ne me reste que quelques minutes, je ne pourrai pas entrer dans les détails, mais je voudrais aborder trois points sur lesquels j'aimerais beaucoup que vous puissiez nous fournir de plus amples informations.
Premièrement, il y a eu de nombreuses discussions au sujet des droits et tarifs et de la façon d'établir une tarification appropriée. Si vous pouviez nous fournir plus de détails sur le processus, ce serait utile, car j'entends sans cesse différentes choses à ce sujet.
Par ailleurs, je crois que vous avez mentionné le comité consultatif autochtone. J'aimerais que vous nous fournissiez, si possible, plus de détails sur le rôle de ce comité de telle sorte que nous puissions nous faire une meilleure idée du travail qui se fait.
L'autre question qui a été soulevée concerne la sécurité, un sujet dont vous avez amplement parlé. Pouvez-vous nous aider à comprendre comment les choses se passent du point de vue de la sécurité en cas de déversement et ce que fait la Régie à ce chapitre? Je sais qu'il y avait un certain nombre de conditions liées précisément au projet TMX, alors que faites-vous pour vous assurer que ces conditions sont respectées?
Comme il ne nous reste qu'une trentaine de secondes, peut-être pourriez-vous répondre brièvement à cette dernière question. Que faites-vous pour faire respecter les conditions rattachées au projet TMX?