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Merci beaucoup madame la présidente.
Je suis heureuse de pouvoir prendre la parole à propos de cette motion. Comme vous le savez tous, la motion énonce clairement:
Que, dans le cas de l'étude sur le rôle et les défis des femmes employées par la Gendarmerie royale du Canada, le comité prévoit des audiences supplémentaires afin d'inviter à comparaître des employées actuelles ou d'ex-employées de la Gendarmerie royale du Canada qui sont prêtes à communiquer leurs expériences personnelles et observations à ce sujet, et que ces audiences se tiennent dès que le plan de travail du comité le permettra.
J'aborde la question d'emblée. Je ne sais pas si le comité compte passer à huis clos, mais je crois qu'il est important que nous discutions de la question en public. Je trouve que c'est un enjeu important pour les Canadiennes. Je crois aussi que, dans l'intérêt de la crédibilité de notre comité, il est très important que nous nous saisissions d'enjeux difficiles.Nous l'avons fait par le passé. J'espère que le comité comprendra l'importance que nous parlions au nom de toutes les femmes du Canada, mais plus particulièrement les membres de la GRC et peut-être même d'autres organismes similaires. Certaines souffrent peut-être en silence parce qu'elles ne veulent pas gâcher leurs carrières ou tout autre aspect de leur vie. Les propos du commissaire Paulson et les faits relatés par les journaux indiquent clairement les nombreuses difficultés auxquelles de nombreuses agentes de la GRC sont confrontées.
Certains ont dit que les tribunaux se sont peut-être saisis de la question. Je peux vous affirmer que ce n'est pas le cas présentement. Un groupe d'avocats va demander à un juge de certifier un recours collectif, et on pourrait attendre deux ans avant qu'une décision ne soit rendue. Ainsi, aucun tribunal n'étudie activement les témoignages de femmes qui pourraient comparaître devant notre comité.
Le Comité de la condition féminine a une occasion unique. Le moment est parfait pour que nous essayons de corriger les erreurs commises avant que des centaines de femmes n'aient à attendre des années pour faire respecter leurs droits à l'égalité. Ces droits sont protégés par l'article 15 de la Charte. Je crois que c'est précisément ce sur quoi le comité devrait se pencher.
Lundi, en réaction à la motion, la secrétaire parlementaire a demandé à ce que nous reportions la motion à aujourd'hui, disant qu'on en parlerait aujourd'hui. J'ai accepté de bonne foi. Je m'attends, sans l'ombre d'un doute, à ce que le comité prenne une décision aujourd'hui, que nous en parlions en public et qu'il y ait un vote par appel nominal. Je ne vois pas pourquoi nous devrions... Si nous avons des désaccords, je crois que nous devrions en parler ouvertement. Selon moi, il s'agit d'un enjeu important que nous devons mettre de l'avant. Aucun autre comité ne pourrait traiter de la question comme le ferait celui de la condition féminine puisque notre approche serait celle d'un groupe de femmes.
Le commissaire Paulson nous a dit pourquoi nous devrions aller de l'avant. Je lui ai posé une question quant à la motion. Il a répondu que, oui, nous devrions aller de l'avant et donner aux femmes touchées l'occasion de s'exprimer. Des femmes m'ont indiqué, tout comme elles l'ont probablement fait auprès d'autres, qu'elles veulent avoir l'occasion de se faire entendre. Les questions juridiques n'intéressent pas nombre d'entre elles. Elles veulent simplement que nous écoutions leurs problèmes et les changements qui doivent être apportés pour que la modernisation — disons — de la GRC puisse se concrétiser. Ça répondrait à leurs demandes.
J'aimerais que le comité traite de la question immédiatement puisque nous accusons déjà du retard. J'espère aussi que les membres du comité vont appuyer la motion. Il s'agit d'une question non partisane. Je sais que c'est un enjeu important pour de nombreux collègues ici présents.
J'ai lu les témoignages des réunions précédentes, et je n'ai pas l'intention de répéter ce qui a déjà été dit à maintes reprises. Vous avez entendu de bons témoignages. J'ai été particulièrement impressionnée par le témoignage des représentants de Coast Capital au sujet de l'éducation, de la littératie financière, des stages et du leadership d'entreprise qui sont importants pour la prospérité des jeunes filles. Je suis tout à fait d'accord avec cette affirmation.
J'ai pensé vous faire part de ma propre histoire professionnelle, et peut-être pourrons-nous en tirer des conclusions et formuler des recommandations.
La réussite de ma carrière professionnelle n'était pas gagnée d'avance, mais je pense à plusieurs choses qui ont fait une différence pour moi.
Je commence par vous donner un peu de contexte. Je suis née à Petrolia, en Ontario, une minuscule ville d'environ 3 000 habitants située à une heure au sud-ouest de London, en Ontario. Mon père était enseignant et ma mère, infirmière. Ma grand-mère a en fait été la première femme élue au conseil scolaire. Mon grand-père et elle travaillaient ensemble dans une petite entreprise.
En y pensant, je me rends compte que j'ai eu de grands modèles qui étaient en fait des femmes au travail. Pendant toute ma vie, en grandissant, j'avais pour modèles une mère et une grand-mère qui travaillaient. J'avais un père qui était, à cette époque, indifférent aux sexes et aux spécificités. Il pensait certainement que nous pouvions faire tout ce que nous voulions — et nous étions deux filles dans la famille.
J'ai failli ne pas aller à l'université, mais mon père m'a encouragée à l'essayer pendant un an et a dit que si je n'aimais pas ça, je pourrais faire autre chose. Ainsi, bien sûr, j'ai poursuivi mes études universitaires. Cela m'a fait comprendre que de nombreux choix sont faits par les jeunes filles à différents moments de leur vie, et que l'environnement dans lequel on grandit est important. Comme je l'ai dit, j'ai eu la chance d'avoir de bons modèles.
On m'a aussi élevée dans un milieu très frugal. Mes parents avaient connu la Grande Crise, ils ont grandi pendant cette période. Je n'ai certainement pas été habituée à tout recevoir sans travailler. Dès que j'ai eu 15 ans, j'ai commencé à travailler. J'ai toujours eu un emploi d'été et je travaillais pour subvenir à mes besoins.
Je suis donc allée à l'université en pensant vouloir faire carrière dans le domaine du travail social. À ma quatrième année, j'ai décidé que ce n'est pas ce que j'allais faire. Je travaillais à temps partiel comme téléphoniste pendant que j'allais à l'université pour contribuer aux paiements de mes droits de scolarité. Bell Canada m'a offert un emploi dans un programme de formation en gestion, de sorte que je suis en quelque sorte tombée dans le monde des affaires. Ça revenait à faire des choix.
J'ai accepté le poste et j'ai eu une merveilleuse carrière, mais des obstacles sont survenus à l'occasion. Je me souviens qu'au moment où on m'a offert un emploi, j'étais l'une des premières femmes à qui on offrait ce poste. C'était un poste entièrement non traditionnel pour les femmes. Il s'agissait de travailler dans une usine. Pour ceux qui ne connaissaient pas les usines du domaine des télécommunications, c'est l'un de ces édifices sans fenêtres. C'est là que se trouve tout l'équipement et c'est de là qu'on peut transmettre les appels partout dans le monde.
Mes amis m'ont dit: « Tu dois avoir perdu la tête pour accepter ce poste. Tu vas mettre fin à ta carrière. Tu n'as pas les compétences techniques ». Toutefois, j'ai pris une décision et choisi d'essayer. J'ai pensé que le pire qui pourrait arriver, c'était que je perde mon emploi, et ce n'était pas la fin du monde. Ça signifierait seulement que j'aurais un autre choix à faire. J'ai donc pris le poste.
Ma première semaine a été plutôt horrible. Mon patron ne me parlait pas. C'était l'un de ces anciens directeurs d'usine grincheux, si vous pouvez vous l'imaginer, et il pensait que les femmes n'avaient pas leur place dans ce département. Finalement, après une semaine, il m'a convoqué et m'a dit: « Eh bien, j'imagine qu'on doit discuter ». Il a poursuivi en me disant qu'il n'était pas d'accord pour que je travaille là, qu'il avait été forcé de me prendre, mais que j'étais probablement la meilleure des pires. J'ai donc vu une petite fenêtre s'ouvrir, et nous avons fini par avoir une excellente relation de travail. En fait, il a fini par me donner une promotion. Je pense donc que cela en dit long sur la résistance et la persévérance.
Encore une fois, j'aurais pu choisir de ne pas endurer la situation, d'aller faire autre chose, ce que je n'ai pas fait. Avec Bell, j'ai déménagé plus de 13 fois, alors encore une fois, il a fallu prendre des décisions. J'ai choisi de déménager, ce qui a aidé ma carrière, mais c'était des sacrifices. J'avais des amis partout, mais lorsqu'on déménage, il faut recommencer.
C'était une carrière extraordinaire, mais j'ai atteint le point où j'avais occupé presque toutes les fonctions dans l'entreprise, et j'ai eu la possibilité de travailler à Lucent, une entreprise mondiale, une autre entreprise de télécommunications. J'étais à Ottawa à l'époque. Ce changement d'emploi impliquait un déménagement d'Ottawa à Toronto, et je me souviens avoir tergiversé, parce que si je restais, j'avais une excellente pension avec Bell. Je me souviens que des amis m'aient dit: « Soit on suit la passion, soit on suit la pension, et te connaissant, tu vas suivre ta passion. » C'est ce que j'ai fait, j'ai déménagé à Toronto et j'ai occupé ce poste, puis en 2003, on m'a demandé de diriger la Richard Ivey School Business, ce qui encore une fois impliquait un déménagement et une orientation totalement différente pour moi, ce que je n'avais pas envisagé, mais j'ai accepté le poste et j'en suis extrêmement heureuse. J'espère pouvoir aider beaucoup de jeunes femmes à l'école de commerce à faire ces bons choix.
Alors je vais résumer mon expérience personnelle. J'ai réfléchi à la question que vous nous avez posée: Que peut faire le gouvernement?
Je crois que beaucoup de choses sont déterminées par l'environnement qui nous entoure en grandissant. C'est aussi une question de choix personnels. C'est un équilibre. Il faut faire certains sacrifices après avoir pris certaines décisions. Je crois que c'est une question de résistance et de persévérance. Je crois que le gouvernement peut aider par rapport à toutes ces choses — voilà les choix qu'il faut faire. Mais pour ce qui est de ce que le gouvernement peut faire selon moi, outre ce dont vous avez déjà parlé en matière d'éducation, de littératie financière et ainsi de suite, je crois qu'il est important de célébrer certaines des réussites des filles. Lorsque je repense à ma carrière, je me souviens des fois où ma confiance a été mise à l'épreuve, et à la chance que j'ai eue d'avoir des gens qui m'ont aidée en cours de route, ou qui m'ont donné confiance en moi.
Je crois que le gouvernement peut jouer un rôle pour ce qui est de célébrer certaines réussites des femmes, et c'est ce que vous faites selon moi. Il est déterminant pour les jeunes filles de savoir que leurs accomplissements sont reconnus; ça contribue à améliorer leur confiance. Il y a aussi les bourses pour les femmes. Nous avons des donateurs privés qui ont offerts des bourses pour les femmes à l'école commerciale. Je crois qu'il s'agit d'un excellent incitatif pour les femmes — et surtout pour celles qui n'ont pas nécessairement les moyens — qui veulent entreprendre une carrière dans le domaine des affaires, soit le domaine qui m'est probablement le plus familier.
Une dernière chose — je vais avoir l'air de vouloir régler tous les problèmes du monde —, le gouvernement a un rôle important à jouer pour ce qui est de garder une économie solide. Je repense aux amies qui ont fait des choix et qui ont pris des décisions; si l'économie est solide, certains choix sont plus faciles à faire. Les femmes ont davantage de choix quand l'économie est solide. Plus tôt, nous parlions entre nous, pendant que vous étiez à huis clos, des emplois de premier échelon. Une économie solide permet aux jeunes filles de participer à l'économie.
Alors, mon conseil serait de continuer à faire ce que vous faites relativement à la condition féminine, et surtout de continuer à encourager les jeunes filles. Ensuite, deuxièmement, la tâche de maintenir une économie solide est importante selon moi à la réussite des jeunes filles. À l'école de commerce, 50 p. 100 des étudiants de premier cycle sont des femmes. Je vois beaucoup de jeunes femmes brillantes, qui selon moi vont très bien réussir, mais il faut toujours continuer à les encourager.
Est-ce que je devrais m'arrêter là? Mes 10 minutes sont probablement près de...
Je vous remercie de me donner l'occasion de vous adresser la parole. J'en suis reconnaissante.
Vous savez peut-être que Campagne 2000 est un réseau pancanadien d'organismes qui exercent des pressions sur le gouvernement relativement à l'enrayement de la pauvreté chez les enfants et les familles. Cette démarche découle d'une résolution du 24 novembre 1989 dans laquelle la Chambre des communes a convenu à l'unanimité de chercher à mettre fin à la pauvreté chez les enfants et les familles.
Nos intérêts sont vastes: femmes et enfants à faible revenu, logement, soins des enfants, fournisseurs de soins de santé, banques alimentaires, communautés confessionnelles, groupes de femmes et organisations syndicales. Vous connaissez peut-être notre bulletin annuel que nous produisons à chaque année, en français et en anglais, sur les progrès ou le manque de progrès et qui offre nos recommandations sur le travail à faire en matière de politiques publiques.
J'ai été intéressée et ravie d'entendre certaines similarités dans la vie de Carol Stephenson et de la mienne. Je ne vais pas m'étendre là-dessus sauf pour vous dire que moi aussi j'ai eu comme modèles une mère et une grand-mère qui travaillaient. Ma mère disait que pour avoir des choix, il fallait avoir une éducation, ce qui n'avait pas été le cas pour elle; être monoparentale n'était pas très populaire dans les années 1930.
Aujourd'hui, nous sommes ici pour parler des possibilités pour les filles et les femmes. J'aimerais commencer en disant que les possibilités pour les filles et les jeunes femmes à faible revenu au Canada sont de près liées au statut de leurs mères, ce qui n'est pas surprenant. Lorsque les mères ont de la difficulté à payer le loyer et à nourrir les enfants, les filles ratent des occasions. Elles n'ont peut-être pas l'exposition nécessaire pour avoir une vision de l'avenir, et souvent, elles ne voient pas tous les choix qui s'offrent à elles. Comme certaines m'ont dit dans le cadre de diverses consultations, « Je ne peux pas imaginer m'endetter au point où je devrais le faire pour entreprendre des études postsecondaires ». Et certaines de ces femmes ont le potentiel nécessaire pour y arriver.
Je vais vous donner quelques faits rapidement. Selon les dernières données de Statistique Canada, 639 000 enfants vivent dans la pauvreté. Ce chiffre représente 1 enfant sur 10, soit environ la taille de Regina et de Saskatoon réunies, je crois. Et ces chiffres ne tiennent pas compte de la situation dans les collectivités des Premières nations, où environ un enfant sur quatre vit dans la pauvreté, souvent dans des familles monoparentales dirigées par les mères.
Alors disons que les mères portent un fardeau disproportionné de la pauvreté chez les enfants et les familles. Vous savez peut-être que les femmes qui élèvent des enfants seules sont cinq fois plus susceptibles de vivre dans la pauvreté que celles qui vivent dans des familles biparentales. Plus de la moitié des familles monoparentales dirigées par des femmes avec des enfants de moins de six ans vivent dans la pauvreté.
Comme Monica Townson le dit parfois — vous la connaissez peut-être, c'est une économiste bien connue —, le sexe crée des vulnérabilités qui s'appliquent à tous les autres groupes, y compris à d'autres segments de la population vulnérable; nos peuples autochtones, les gens de certaines communautés raciales, les immigrants récents, dont les trois quarts appartiennent à ces communautés raciales, et les personnes handicapées.
J'aimerais parler un peu de deux perspectives critiques concernant les filles et les femmes qui vivent dans la pauvreté — comment elles sont traitées lorsqu'elles ont un emploi rémunéré et la situation dans laquelle elles se retrouvent lorsqu'elles n'ont pas d'emploi — et formuler quelques recommandations.
Comme vous le savez peut-être, les femmes qui travaillent à temps plein toute l'année ne gagnent encore environ que 71 p. 100 du salaire moyen des hommes qui travaillent à temps plein. L'écart est encore plus grand lorsqu'on examine les taux horaires. Évidemment, les salaires des femmes sont en moyenne inférieurs, et il est donc plus difficile pour elles d'épargner pour la retraite. Très peu de femmes peuvent compter sur un régime de pension.
Ainsi, un enfant qui vit dans la pauvreté sur trois au Canada — malheureusement, ce chiffre est assez constant, il baisse ou monte un peu à chaque année — vit dans une famille où au moins un des parents travaille à temps plein. Alors il est clair que le marché de l'emploi a un rôle important à jouer, tout comme les politiques publiques.
Les femmes représentent 60 p. 100 des travailleurs qui touchent le salaire minimum, toutefois je crois que le salaire minimum le plus élevé est de 10,25 $, en Ontario. Il est très difficile de bien gagner sa vie. Les femmes ont moins de chance de pouvoir toucher des prestations d'assurance-emploi lorsqu'elles se retrouvent au chômage.
Je veux parler de trois politiques publiques qui, selon les femmes à faible revenu, sont essentielles. Je dois dire que notre campagne en Ontario a travaillé à un projet de 11 collectivités dans la province, partout, de Pembroke à Windsor en passant par Ottawa, Toronto, les banlieues, Sault Ste. Marie, y compris des communautés autochtones et nombre de nos communautés de nouveaux arrivants dans la région du Grand Toronto.
C'étaient toutes des femmes à faible revenu. Certaines dépendaient essentiellement de l'aide sociale, et d'autres d'un mélange d'aide sociale et de travail. Certaines étaient à différentes étapes du travail rémunéré. Elles ont dit qu'elles avaient besoin de trois choses. Elles avaient besoin de sécurité du revenu. Elles avaient besoin de savoir qu'elles seraient en mesure d'équilibrer leur budget chaque mois, de payer le loyer, de nourrir les enfants et, si elles avaient la chance, de faire des choix.
Je tiens à souligner que les programmes publics jouent un rôle extrêmement important parce que, comme nous le savons, le marché du travail ne fait pas la différence entre les mères et les femmes qui ne sont pas mères. Des programmes comme la Prestation fiscale canadienne pour enfants, le crédit de la TPS, la PUGE et l'assurance-emploi aident à empêcher les familles de se retrouver dans la pauvreté. Ces programmes contribuent à leur donner du soutien pendant les périodes d'instabilité économique. Notre bulletin contient un tableau — peut-être le consulterez-vous à l'avenir — indiquant que nos taux de pauvreté chez les enfants et les familles seraient beaucoup plus élevés si nous n'avions pas accès à bon nombre des programmes que je viens de nommer.
Mais pour qu'un parent seul aujourd'hui puisse se sortir de la pauvreté, il faut des prestations pour enfants plus élevées. Selon nos statistiques idéales, un parent seul avec un enfant doit travailler à temps plein, entre 32 et 35 heures par semaine, à 12 $ l'heure au moins, et a besoin de 5 400 $ en prestations par enfant. C'est un peu plus de 400 $ par mois, ce qui aiderait certaines personnes à équilibrer les contributions fiscales et salariales qu'elles font. À l'heure actuelle, le montant maximal des prestations se situe autour de 3 485 $ pour le premier enfant, et nous aimerions que ce montant augmente.
Nous savons que les femmes à faible revenu ou à revenu modeste ont besoin d'argent pour vivre. Cet argent revient dans les collectivités sous forme de loyers, de frais de garde élevés, si ces femmes ont la chance d'y avoir accès, de nourriture, de dépenses pour les loisirs, si possible, et bien sûr, de vêtements. Nous allons donc recommander que la prestation pour enfants améliorée pour les familles à faible revenu augmente pour atteindre 5 400 $. Bien sûr, il s'agit d'une prestation progressive, de sorte que si on a moins, on en obtient plus. Pourtant, cela permettrait de joindre environ 90 p. 100 de tous les enfants. Si on a un revenu plus élevé, on reçoit moins en prestations, mais on tient compte des parents.
Les parents et les mères nous ont aussi dit qu'ils avaient besoin de garderies de meilleure qualité et plus abordables. En dépit d'une certaine croissance dans les services réglementés ces dernières décennies et du nombre d'enfants qui diminue au Canada, l'écart entre le niveau de service et le nombre d'enfants demeure trop grand. Comme vous le savez tous, parmi les pays de l'OCDE, dans le monde industrialisé, nous avons l'un des taux les plus élevés de femmes sur le marché du travail, pourtant, nous n'avons pas de programme public de garde d'enfants bien établi pour répondre à cette situation. Nous avons de bons exemples. Il y a eu des développements importants au Québec et au Manitoba, et d'autres provinces ont fait certaines avancées.
Campagne 2000 et ses partenaires de partout au pays estiment que le gouvernement fédéral a un rôle important à jouer dans l'éducation de la petite enfance et les services de garde en vue d'établir un cadre stratégique et d'en financer une partie. Du point de vu du développement social, c'est dans notre intérêt. C'est dans l'intérêt de l'égalité des femmes, et c'est dans notre intérêt économique.
Vous avez probablement vu, la semaine dernière, une autre étude réalisée par des économistes du Québec indiquant que le système de centres de la petite enfance pour les enfants d'âge préscolaire au Québec est plus que rentable, à la suite des 14 ou 15 années de perfectionnement du programme. Un plus grand nombre de femmes se retrouvent sur le marché du travail et paient des impôts tout en contribuant plus activement à l'économie, et le programme de garderies a beaucoup à voir avec cela.
Ce que nous disons, c'est qu'en ces temps économiques très difficiles...
J'aimerais remercier Mme Stephenson et Mme Rothman de la portée de leurs exposés très intéressants d'aujourd'hui. Je pense que c'est absolument essentiel.
Madame Rothman, j'aimerais revenir à certains des points que vous avez soulevés. Tout d'abord, vous disiez que le bien-être des filles est inextricablement lié à celui de leur mère, et c'est selon moi fondamental. Selon moi, la société a tendance à nous laisser croire qu'on peut y arriver seul, qu'on a besoin de personne d'autre que soi, alors qu'en fait, on omet ainsi les faits et les facteurs qui déterminent ce que nous deviendrons et ce que nous ferons.
Nous mettons l'accent sur les jeunes filles, mais je crois qu'il est important de se rappeler notre lien avec les femmes qui nous entourent puisque nous devenons nous-mêmes femmes et que nous nous retrouvons devant des défis semblables à ceux auxquels ont été confrontées celles qui nous ont précédées.
J'aurais une question à vous poser concernant vos propos. Il s'agit de la tendance que vous dégagez peut-être de la société canadienne.
Le Canada était considéré comme étant un exemple dans le monde sur le plan de l'égalité entre les genres, et ce, à de nombreux égards. En réalité, le Canada est déchu de son rang. On a sabré le logement, les soins pour enfants et même la loi, telle que celle sur l'équité salariale. Les femmes, surtout les plus marginalisées, sont toujours victimes de violence. Évidemment, certains facteurs sociétaux continuent de faire reculer les femmes.
J'aimerais que vous nous parliez de votre travail à Campagne 2000. Constatez-vous une tendance à l'égard de l'égalité des femmes et le genre d'égalité auquel auront affaire les jeunes filles à l'avenir?
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Je commencerais par dire que ma plus récente expérience consiste à avoir mené un projet dans toute la province de l'Ontario; je me suis rendue dans les 11 collectivités, et nous avons rencontré plus de 250 femmes à faible revenu. Je pense que ce que j'ai entendu... C'était avant le mouvement Occupons, mais laissez-moi vous dire que ces femmes se considéraient pleinement comme faisant partie des 99 p. 100, et même plus. Elles n'avaient pas certaines de ces compétences fondamentales ou, si elles avaient des compétences, elles n'avaient ni le temps ni la possibilité de les utiliser pour sortir de la pauvreté.
Qu'est-ce que cela signifie, alors? Ça signifie que pour les femmes de Pembroke, par exemple — une collectivité rurale à environ une heure et demie d'Ottawa — qui vivent des crises en raison de la violence, il n'y a pas de refuge pour les familles. Qu'est-ce qui se passe quand on vit une crise réelle? Quelqu'un nous conduit, ou autre, à Ottawa pour que des mesures d'urgence soient prises. Ainsi, pour que cette femme et sa famille s'organisent pour ensuite s'établir, trouver un logement abordable, préparer son curriculum vitae afin de tenter de ne plus dépendre de l'aide sociale et trouver du travail, l'autre obstacle auquel fait face une telle personne... Je peux vous dire qu'un autre exemple est le manque de places en garderie.
Il y a donc certaines communautés, en particulier des communautés périphériques, où il y a très peu de possibilités, un point c'est tout.
Je tenais à m'assurer de mentionner le troisième élément que je n'ai pas pu soulever plus tôt au sujet de ce que les femmes nous ont dit de leurs besoins: un logement sûr, adéquat et abordable. On peut dire que c'est l'une de nos autres recommandations. Le Canada continue d'être la seule nation industrialisée sans programme de logement national tourné vers l'avenir, un point c'est tout. Je pense que nous en avons besoin d'un.
Je peux aussi vous parler d'une femme à Orangeville — une communauté suburbaine rurale qui fait partie de la région du Grand Toronto — avec deux enfants, seule, divorcée, qui a réussi à trouver une façon de retourner aux études postsecondaires afin d'obtenir un diplôme collégial. Une année, elle a dû cesser d'aller à l'école parce qu'elle ne pouvait pas faire garder ses enfants. Lorsque je l'ai rencontrée, elle avait trouvé une façon de faire et était de retour à l'école, mais elle s'inquiétait de ce qui arriverait lorsqu'elle finirait et qu'elle tenterait de trouver du travail, en particulier s'il ne s'agissait pas d'un emploi de neuf à cinq.
Nous avons donc de graves lacunes dans ce qui était auparavant un filet de sécurité sociale robuste, ou plus robuste, pour les femmes et les enfants; nous ne faisons pas suffisamment de progrès.
La présidente: Oui.
Mme Tilly O'Neill Gordon: Merci madame la présidente.
Je tiens à remercier les témoins d'être ici aujourd'hui.
Tout d'abord, je tiens à dire que je suis heureuse de vous avoir entendu parler de vos modèles. C'est quelque chose qui me tient à coeur. Vos modèles ont définitivement été importants.
Je viens d'une salle de classe, et je vois chaque jour les incidences des modèles sur les jeunes filles. Lorsqu'on apprend tôt qu'on peut faire des choix... et vous avez fait des choix: vos expériences précoces vous ont poussé à choisir, alors que votre persévérance vous a permis de vous accrocher. En cours de route, vous avez prouvé l'importance des choix et des sacrifices.
Nous devons aussi transmettre ce message aux jeunes filles aujourd'hui. Bon nombre d'entre elles n'ont pas ce modèle. Je me demande comment nous pouvons nous assurer que les filles puissent davantage s'identifier à un modèle. Qu'est-ce que nous, le gouvernement, pouvons faire pour aider nos jeunes filles?
Je pense que c'est quelque chose de très important dans notre monde aujourd'hui. Elles ont besoin de modèles. Je sais que les guides, par exemple, peuvent être importantes pour elles, mais le gouvernement devrait-il examiner d'autres façons d'aider les parents à donner de vrais modèles à leurs filles et à les encourager et à leur donner ce qu'il leur faut?
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Je peux répondre à celle-ci.
Tout d'abord, je pense que vous êtes aussi des modèles, en tant que parlementaires élues. Je vous encourage à tout faire pour inciter les jeunes femmes à suivre vos traces, parce qu'en vous regardant, elles voient le rôle de leadership que vous jouez au gouvernement.
Au sujet des programmes de mentorat, je pense que de nombreuses organisations font un très bon travail, comme le programme Jeunes entreprises, et je suis certaine que vous avez discuté des programmes de littératie financière offerts dans les écoles. De plus, un groupe de femmes qui sont amies depuis 30 ou 40 ans ont toutes des jeunes filles à qui elles servent de mentor.
Je ne suis pas certaine qu'un programme de mentorat financé par le gouvernement soit la voie à suivre. Je pense que le mentorat dépend beaucoup des relations et du fait de savoir si les gens s'entendent. Si on essaie de forcer les choses, parfois, la chimie n'y est pas et ça ne fonctionne pas. Je l'ai vu directement; on a forcé tout le monde à trouver un mentor, et seulement environ 20 p. 100 des jumelages ont fonctionné.
Je pense donc que le gouvernement peut encourager les organisations qui offrent ce type de soutien, et je pense que je reviendrai encore à ce que je disais sur le fait de reconnaître et de célébrer ces organisations. Mais je ne recommanderais pas l'adoption d'un programme de mentorat global financé par le gouvernement.