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Je vous remercie, madame la présidente.
J'aimerais faire un rappel au Règlement au sujet d'une motion du comité datant du 5 mars 2013 et de son incidence négative directe sur les démarches que nous entreprenons aujourd'hui.
Tout d'abord, je tiens à présenter des excuses aux témoins, mais il s'agit d'une question qui revêt une importance fondamentale que, j'en suis sûre, vous comprendrez, et qui, à mon avis, met en péril l'impartialité et la rigueur de cette étude et, par voie de conséquence, mes responsabilités et devoirs constitutionnels en ma qualité de députée, de membre du comité et de porte-parole de mon parti en matière de condition féminine.
Je m'attends à ce que mes collègues du parti ministériel veuillent traiter de cela à huis clos, mais j'estime que cette question nous concerne tous. Ce n'est pas seulement une question touchant les travaux du comité, ni quelque chose dont on ne peut traiter que derrière des portes closes, alors j'en fais l'objet d'un rappel au Règlement.
Le comité avait prévu d'entendre le témoignage de Krista Carle durant notre dernière réunion, le 7 mars. Alors que ce témoignage avait d'abord été prévu déjà pour le 5 mars, les membres du parti ministériel qui siègent au comité se sont empressés de faire adopter une motion en vertu de laquelle, « conformément à la convention sub judice, les invitations à comparaître sur l'étude de harcèlement sexuel dans les milieux de travail fédéraux soient limitées aux personnes qui ne sont pas actuellement partie prenante d'une procédure judiciaire ou d'un grief ».
À la suite de cela, la greffière du comité a envoyé à Mme Carle un courriel selon lequel, « en conséquence » de la motion, « et compte tenu du rôle que vous jouez actuellement dans un recours collectif contre la GRC, votre comparution devant le comité, prévue pour le jeudi 7 mars... a été annulée ».
En gros, un témoin potentiel s'est fait dire par le comité qu'elle ne pourrait témoigner de son expérience des agressions, du harcèlement et de l'intimidation dans le milieu de travail parce qu'elle avait choisi d'intenter des poursuites contre les auteurs de ces infractions présumées. En conséquence de ce rejet, j'ai demandé un avis juridique sur la question.
Hier, le légiste adjoint et conseiller parlementaire a livré cet avis juridique à tous les membres du comité. Bien qu'il y soit question de l'historique et du cheminement juridique de cette affaire, deux éléments en particulier sont pertinents dans ce que je tiens à dire aujourd'hui.
Richard Denis, le légiste adjoint et conseiller parlementaire, a déclaré ce qui suit:
Après avoir examiné les passages pertinents de la transcription des travaux du comité, nous avons conclu que les témoignages et les questions étaient de nature générale et portaient sur des questions d'ordre public, plutôt que sur des allégations précises. Par conséquent, il semble n'y avoir eu aucune violation de la convention du sub judice;
Présentement, les procédures judiciaires entourant le recours collectif n'en sont qu'à leur stade préliminaire et l'audience pour l'autorisation du recours collectif aura lieu seulement à la fin de l'année. Nous ne savons pas encore si les tribunaux permettront que les demandes soient entendues sur le fond, ce qui pourrait prendre encore quelques années. Par conséquent, il y a peu de chances que les témoignages devant le comité nuisent à une poursuite potentielle, et donc il n'y aurait pas manquement à la convention du sub judice.
Nonobstant le fait que la convention du sub judice n'est pas une règle et que nulle part il n'est signifié que c'est une mesure applicable dans le Règlement de la Chambre des communes, cet avis juridique signifie que la comparution de gens comme Mme Carle ne mettrait aucunement en péril des procédures formelles et, même si elle le faisait, le recours collectif mis en oeuvre n'est pas actuellement devant les tribunaux.
Maintenant que nous le savons, et puisque le légiste adjoint et conseiller parlementaire l'a confirmé, il m'est avis que la motion présentée le 5 mars au comité était prématurée, mal informée et irrecevable. Je soutiens que cette motion n'aurait pas dû être présentée avant qu'ait été reçu et étudié un avis juridique afin que tous les membres du comité soient convaincus de l'exactitude et de la pertinence de cette motion.
Il est clair que cette motion était fautive. Je propose donc qu'elle soit annulée et que le comité prenne immédiatement des mesures pour entendre le témoignage de gens comme Krista Carle, Catherine Galliford et les nombreuses autres femmes courageuses qui ont été victimes de harcèlement de la part de leur employeur, et dont l'expérience et les leçons qu'elles en ont tirées peuvent être précieuses pour le comité.
Madame la présidente, cette étude que nous avons entreprise est, à mon avis, d'une très grande importance, et je ne voudrais pas risquer que l'on s'égare. Nous y travaillons déjà depuis six mois et n'avons entendu le témoignage que d'une personne qui a souffert aux mains de bien des membres de la GRC, et c'est pourquoi j'ai demandé que le comité envisage d'annuler cette motion afin de nous permettre d'aller de l'avant et de donner aux nombreuses intéressées cette occasion de venir se faire entendre du Comité de la condition féminine.
Je vous remercie, madame la présidente. Je serais reconnaissante au comité de m'accorder son soutien.
Je comprends que nous ne connaissons pas tous les règles, mais il est clair que cette motion était irrecevable. Je crois que si le comité avait bien compris qui il est possible de convoquer ou non, cette motion n'aurait probablement pas été déposée.
Je vous remercie infiniment de m'avoir permis de faire ce rappel au Règlement. J'aimerais savoir ce que pense le comité de l'annulation de cette motion.
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Je vous remercie. Nous souhaitons appuyer ce rappel au Règlement et la motion d'annulation de la motion antérieure à la lumière des nouveaux renseignements que nous avons reçus et, particulièrement de ce qu'a dit le légiste quand il a déclaré ce qui suit:
Présentement, les procédures judiciaires entourant le recours collectif n'en sont qu'à leur stade préliminaire et l'audience pour l'autorisation du recours collectif aura lieu seulement à la fin de l'année. Nous ne savons pas encore si les tribunaux permettront que les demandes soient entendues sur le fond, ce qui pourrait prendre encore quelques années. Par conséquent, il y a peu de chances que les témoignages devant le comité nuisent à une poursuite potentielle, et donc il n'y aurait pas manquement à la convention sub judice.
J'aimerais aussi souligner que l'une des femmes qui devait témoigner devant nous s'est adressée aux médias de la Colombie-Britannique, la semaine dernière, en disant qu'elle avait été bâillonnée et que son droit de se faire entendre avait été bafoué. Nous savons maintenant, grâce à l'avis juridique reçu, que nous n'avons aucune raison de rejeter les témoignages de ces femmes, surtout pas à cette étape-ci.
J'aimerais revenir sur une chose qu'a dite ma collègue, Mme Sgro, au sujet de notre devoir fondamental en notre qualité de députés. Nous sommes ici pour faire preuve de diligence raisonnable. Notre rôle est d'écouter — et dans le cadre de ce comité-ci, d'écouter les femmes qui ont vécu ces terribles expériences. Nous sommes ici pour formuler des recommandations à la lumière de leurs témoignages, de ce que nous disent tous les témoins, et on ne pourrait certainement pas penser prétendre nous acquitter correctement de la tâche de notre comité, en ce qui concerne ce projet de recherche, sans entendre les femmes de la GRC. Nous savons tous, grâce à l'avis juridique qui nous a été fourni, que nous en avons pleinement le droit.