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La séance est ouverte. Je vois que tout le monde est là.
Chacun d'entre vous formulera ses commentaires, puis il y aura une séance de questions et de réponses.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, j'aimerais soulever quelques points auprès des membres du comité. Premièrement, je vous saurais gré de me suggérer, d'ici jeudi, quelques noms de témoins pour notre future étude.
Je tiens aussi à vous informer — et un avis sera publié aujourd'hui à cet effet — que, jeudi, des fonctionnaires comparaîtront devant le comité au sujet de la motion modifiée de M. Cleary. Je vous prie donc d'en tenir compte.
Cela dit, j'inviterais maintenant les participants à notre première table ronde à nous présenter leurs observations. Qui veut briser la glace?
Nous avons avec nous aujourd'hui M. Kent MacDonald, président du Collège Algonquin. Vous pourrez d'abord prendre la parole, si vous êtes prêt. Ensuite, nous passerons à M. David Corson, président de l'Association des étudiants du Collège Algonquin. Enfin, le brigadier-général Gregory Matte, du programme Du régiment aux bâtiments, interviendra en dernier.
Nous allons d'abord donner la parole à M. Kent MacDonald. Allez-y, monsieur MacDonald.
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Je vous suis vivement reconnaissant de me permettre de vous communiquer certaines de mes réflexions. Il s'agit certainement d'un sujet d'actualité important pour le milieu canadien des collèges et des écoles polytechniques. Ce sujet est nouveau, et ce, non seulement pour le Canada. En effet, il en est question dans le rapport Richard, au Royaume-Uni, ainsi que dans divers États américains. Par conséquent, il arrive à point nommé.
J'ai aussi eu l'occasion de prendre connaissance de certains des commentaires formulés par des intervenants précédents. Par conséquent, j'ai décidé de ne pas simplement répéter ces observations. Pour ce qui est de la question spécifique à l'étude aujourd'hui, je pense que les gouvernements devraient examiner un certain nombre d'initiatives tactiques, dont des mesures incitatives fiscales pour les employeurs, la mobilité interprovinciale des étudiants, l'amélioration des programmes d'apprentissage et l'octroi de subventions. Par ailleurs, je dirais que la plupart des réponses que les membres de votre comité souhaiteraient obtenir se trouvent probablement déjà dans des publications, comme celles du Forum canadien sur l'apprentissage et du Conseil canadien des directeurs de l'apprentissage.
Pour éviter toute redondance, j'ai décidé d'aborder le sujet en m'éloignant le plus possible du point de vue d'un président. Ainsi, mes commentaires seront peut-être utiles aux membres du comité.
Étant donné que j'ai longtemps été enseignant et que, maintenant, je suis président d'un collège, voici la question que j'aime poser aux membres du corps professoral, aux employés et à nos partenaires de l'industrie chaque fois que j'ai l'occasion de discuter avec eux: que veut dire exactement le fait d'être éduqué au XXIe siècle?
Évidemment, le concept de l'apprentissage remonte à l'époque médiévale, et je pense que le temps est venu de repenser totalement la façon dont nous offrons cette éducation. Je crois que, peu importe votre formation, que vous soyez enseignants, avocats ou chirurgiens orthopédistes, vous avez tous bénéficié d'une certaine forme d'apprentissage, conformément à la définition donnée à ce concept.
Je vais limiter mes commentaires à quatre points très brefs.
Tout d'abord, l'été dernier, dans son ouvrage intitulé We Can All Do Better, Bill Bradley, un sénateur américain remarquable, a décrit qu'à une certaine époque, on pouvait utiliser l'analogie d'un ascenseur en Amérique du Nord. Peu importe son statut social dans la collectivité, n'importe qui pouvait prendre un ascenseur. Si on travaillait assez fort et si on avait de la chance, on pouvait sortir de l'ascenseur au deuxième ou au troisième étage, parfois même au cinquième. M. Bradley soutient que cet ascenseur est défectueux au Canada et aux États-Unis et que la seule façon de faire en sorte que les gens continuent de bénéficier de la mobilité sociale, c'est de trouver des moyens d'éduquer le plus grand nombre d'entre eux et de démocratiser l'éducation postsecondaire pour que plus de gens puissent en profiter.
Cependant, je crois que, au Canada, il existe un mythe quant à ce que nous faisons sur le plan de l'enseignement supérieur. Je sais qu'il s'agit d'une compétence provinciale, mais nous devons avoir une conversation plus profonde et plus sérieuse sur les répercussions possibles de l'enseignement supérieur.
Je crois que nous tous, dans cette pièce, nous souvenons que, dans les années 1970 et 1960, la société valorisait l'éducation pratique, appliquée et axée sur les métiers. Puis, dans les années 1980 et 1990, on a commencé à accorder moins d'importance et d'honneur à ce type de travail. De nos jours, les Canadiens ont un défi à relever, soit déterminer comment ils peuvent ramener l'honneur et le respect à ce niveau, par opposition au simple fait de décrocher un diplôme. Selon moi, un certain nombre d'établissements, dont ceux qui sont semblables au Collège Algonquin, peuvent jouer un rôle important à cet égard.
J'ai grandi dans une municipalité que le magazine Maclean's a déjà décrite comme étant la plus pauvre et la moins agréable du pays, à savoir New Glasgow, en Nouvelle-Écosse. Je connais donc la dichotomie suivante: j'habite maintenant à Ottawa, mais je suis originaire de New Glasgow; je suis donc passé de la ville la moins bien cotée au pays à celle qui figure au tout premier rang.
Je suis persuadé que, pour permettre à un plus grand nombre de jeunes de se faire instruire, il faut investir davantage dans l'éducation supérieure, en particulier dans le secteur collégial. Toutefois, le défi qu'il nous faut relever, c'est que certains enseignants, comme moi, n'ont jamais suivi d'études collégiales.
D'habitude, nous réussissons assez bien à l'école secondaire pour être admis à l'université, où nous acquérons une excellente expérience d'apprentissage. Par la suite, nous passons à l'école normale. Je n'ai jamais été exposé aux possibilités offertes par un collège canadien. Notre système est différent du réseau américain des collèges communautaires. En fait, le Canada compte plus de 150 collèges, mais seulement six d'entre eux sont considérés comme des collèges communautaires.
Selon moi, voici la question à laquelle nous devons répondre: comment pouvons-nous exercer une influence plus profonde sur les personnes d'influence, c'est-à-dire celles qui déterminent où pourraient aller leur enfant, leur soeur ou leur frère? Nous savons tous que les personnes les plus influentes sont encore les parents, suivis des enseignants et des conseillers en orientation.
Au cours des minutes qu'il me reste, j'aimerais soulever cinq points à l'intention du comité.
En prenant appui sur l'influence et les pouvoirs dont vous disposez tous dans vos rôles respectifs, vous devez contribuer à donner un sérieux coup de barre dans la façon dont nous formons les enseignants au pays. Les 50 facultés d'éducation doivent jeter un regard différent sur la façon dont elles préparent les enseignants. Je pense que les enseignants devraient être tenus de participer à un stage quelque part au pays. Comme le Canada compte plus de 900 campus collégiaux, il devrait être assez facile de mettre en oeuvre cette mesure.
Deuxièmement — et d'autres personnes en ont déjà parlé en long et en large devant le comité —, il faut éliminer les obstacles. Il existe encore un très grand nombre d'obstacles. Vous pourrez prendre connaissance d'un exemple parmi tant d'autres dans les documents à votre intention que j'ai remis au greffier.
Troisièmement, comme Canadiens, nous devons détruire le mythe entourant ce qui constitue l'enseignement supérieur de nos jours. Je recommande que l'on prenne un engagement à long terme afin de briser le statut social qui est associé actuellement aux collèges et aux universités du pays. Il faut faire cela dès le plus jeune âge. Nous avons brisé le mythe au sujet du tabagisme. Nous avons aussi brisé celui lié à l'alcool au volant. De nos jours, au Canada, nous sommes fiers de pouvoir discuter de la santé mentale. Nous devons maintenant entreprendre une conversation sur ce qu'est l'enseignement supérieur efficace et demander aux jeunes ce qu'ils souhaitent faire pour connaître une carrière positive.
Quatrièmement, nous devons cesser d'évaluer notre réussite en tant qu'enseignants en fonction du nombre de jeunes admis dans le système et commencer à nous demander combien d'entre eux finissent par décrocher un diplôme. C'est simple: il y a beaucoup trop de décrocheurs. Ce phénomène vise surtout les groupes sous-représentés, soit les personnes handicapées, les Autochtones et les étudiants de la première génération.
Enfin, je vous encourage fortement à prendre le temps de lire l'ouvrage intitulé Shop Class as Soulcraft, ne serait-ce que les trois premiers chapitres. J'ai laissé un exemplaire de ce livre pour chacun d'entre vous. Je pense qu'il saura vous inspirer quant à la façon dont nous devrions peut-être changer dorénavant le regard que nous posons sur l'éducation et la façon dont nous valorisons le travail dans notre société contemporaine.
Je vous remercie.
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Mesdames et messieurs, bonjour. Je m'appelle David Corson. Je suis président de l'Association des étudiants du Collège Algonquin. Je vous remercie de l’occasion qui m’est donnée de vous exposer les préoccupations que partagent mes collègues étudiants et les défis qu’ils doivent relever.
Tout d'abord, permettez-moi de vous faire part de notre énoncé de mission, qui est le suivant:
L’Association des étudiants du Collège Algonquin a pour mission de « créer un environnement qui inspire une passion pour la réussite étudiante ». Notre principal objectif consiste donc à conjuguer vie de campus et réussite scolaire.
Il appartient toutefois à l'étudiant de définir sa réussite.
Historiquement, au début du XIXe siècle, les apprentis ouvriers devaient, pour avancer dans leur métier, réaliser une pièce maîtresse prouvant qu’ils maîtrisaient leurs compétences. En concrétisant ce projet, ils pouvaient faire étalage de leur habileté et en tirer une fierté personnelle. Depuis cette époque, et pour diverses raisons, le mode de formation des ouvriers spécialisés au Canada a subi un changement substantiel qui, dans certains cas à notre avis, a contribué à diluer son apparente valeur intrinsèque.
Depuis les années 1980, la société a continué de déprécier les métiers spécialisés. Cette dévaluation, qui est perpétuée par les médias, a contribué à créer une pénurie critique d’ouvriers spécialisés. À ce sujet, l’association des étudiants soutient fermement l’objectif visé par l’Étude de sensibilisation et de perception des métiers spécialisés et de l’apprentissage, qui consiste à remplacer les attitudes négatives à l’égard des métiers spécialisés par une perception plus favorable et à en faire un premier choix de carrière pour les jeunes Canadiens et les personnes qui les influencent, comme les parents et les éducateurs.
Le problème est encore exacerbé par le moment où les étudiants doivent faire un choix de carrière. Nous appuyons la suggestion mise de l’avant par le Forum canadien sur l’apprentissage, selon laquelle le Canada doit absolument mettre en oeuvre des efforts de sensibilisation pour mobiliser les jeunes dans un processus d’évaluation qui permettra de recenser leurs compétences et d’apparier celles-ci aux réalités du marché de l’emploi. Nous savons que des élèves commencent dès la 5e année à faire des choix de carrière avec leurs enseignants.
Nous appuyons également un autre objectif de l’étude précitée, à savoir: encourager les employeurs à créer des débouchés dans les métiers spécialisés pour les jeunes Canadiens, à les augmenter et à les maintenir. À nos yeux, cela aurait également pour effet de rehausser directement le pourcentage de jeunes qui sont conscients de l’ensemble des possibilités de carrière offertes par les métiers spécialisés. Dans cette veine, nous estimons que cela représente pour le gouvernement fédéral une occasion favorable d’investir davantage dans le programme Compétences Canada et d’en faire une meilleure promotion.
Soit dit en passant, le Collège Algonquin enverra un menuisier à Leipzig, en Allemagne, pour nous représenter lors du concours mondial d'aptitudes en menuiserie. Nous sommes fiers de cela, mais qui est au courant? Est-ce que quelqu'un en a déjà entendu parler? Voilà le point que nous souhaitons faire valoir.
Les défis qui émergent à l'échelle locale, provinciale, nationale et mondiale nous apparaissent comme une extraordinaire possibilité de donner aux métiers spécialisés une image sociétale plus positive. Ce n’est peut-être pas les Olympiques; mais pourquoi ce ne le serait pas après tout?
Parmi les obstacles auxquels se heurtent actuellement les apprentis en herbe, il y a les multiples strates de bureaucratie. Il existe quatre niveaux.
Le premier, c'est l'employeur. Les éventuels apprentis peuvent avoir de la difficulté à se trouver un employeur qui acceptera de les former. J'y reviendrai vers la fin de mon exposé.
Deuxièmement, les collèges n'acceptent pas actuellement de demandes de formation en apprentissage. Toutefois, ils le font pour tous les autres. Les étudiants ne peuvent donc pas connaître les dates de début des stages.
À l’échelle provinciale — et je ne peux parler que de la situation en Ontario —, le ministère de la Formation et des Collèges et Universités consulte tout d’abord l’étudiant, puis lui signifie son avis d’offre. À cette méthode, on peut opposer le processus convivial suivi par les Services d’admission des collèges de l’Ontario. Par conséquent, on se retrouve avec un système à deux vitesses. Emploi Ontario peut également verser jusqu’à 1 500 $ en aide financière imposable aux apprentis qui ne peuvent recevoir de prestations d’assurance-emploi pendant leur formation scolaire.
Le quatrième niveau de bureaucratie se situe à l'échelle fédérale. Au gouvernement fédéral, le financement doit cheminer par le processus traditionnel de Ressources humaines et Développement des compétences Canada, le cas échéant — voir le point précédent —, avec ses retards intrinsèques, lorsque nous pouvons déjà prévoir les effets de la formation sur l’évolution des étudiants.
Nous aimerions vous recommander de rationaliser les services. Ainsi, la personne intéressée à faire un apprentissage auprès d’un employeur devrait pouvoir utiliser un système semblable à celui des Services d’admission des collèges de l’Ontario pour demander au ministère de la Formation et des Collèges et Universités de suivre une formation d’apprentissage en Ontario. On pourrait utiliser ce modèle provincial à titre d'exemple.
Les résultats de ce processus seraient communiqués à la fois au collège et au demandeur, ce qui favoriserait la création d’un lien de formation et amorcerait un contact avec le gouvernement fédéral quant aux possibles sources de financement. La Subvention incitative aux apprentis et la Subvention à l’achèvement de la formation d’apprenti figurent parmi les initiatives fédérales que nous soutenons et que nous jugeons opportun de financer davantage.
Une fois que l’apprenti en herbe est formé, il se heurte au manque de transférabilité interprovinciale des compétences. Dans l’esprit de l’Accord de Bologne, nous croyons qu’il devrait y avoir des normes nationales pour les apprentis, à l’instar du Sceau rouge pour les compagnons qui autorise une transférabilité partielle, voire totale, des compétences et de la formation.
La mobilité de la main-d’oeuvre a jusqu’à récemment été définie d’une façon assez étroite, privilégiant la mobilité postcertification. C’est pourquoi la mobilité de la main-d’oeuvre et la transférabilité de la formation d’apprentissage sont des notions mal comprises. Idéalement, il serait préférable de clarifier ces principes à l’échelle nationale.
En conclusion, nous croyons que les métiers spécialisés sont un moteur essentiel de la réussite économique du Canada. Dans la rude conjoncture économique actuelle, les employeurs ont la difficile tâche de choisir entre continuer de former le personnel en place ou risquer de former de nouveaux apprentis. Pour cette raison, l’éventuel apprenti peut avoir de la difficulté à trouver un employeur qui acceptera de le parrainer. Nous croyons que le gouvernement fédéral a la capacité de mettre en place des mesures incitatives qui contribueront à éliminer cet obstacle au profit de tous les Canadiens. Cette libéralisation, couplée aux autres exemples présentés dans cet exposé, aidera les premiers intéressés à faire preuve d’une plus grande efficacité et à créer un système meilleur et plus intéressant pour les apprentis au Canada.
Je vous remercie.
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Monsieur le président et membres du comité, je tiens tout d'abord à vous remercier de votre intérêt à l'égard du programme Du régiment aux bâtiments, ainsi que de votre appui public et financier — public, dans le sens que c'est le premier ministre du Canada qui, il y a 13 mois, a lancé ce programme à Edmonton, en Alberta. Anciens Combattants Canada a versé une subvention de 150 000 $ à ce programme.
J'aimerais prendre quelques instants pour expliquer en quoi consiste le programme et pour en préciser le contexte. J'espère que cela vous aidera à me poser ensuite des questions.
Ce programme s'inspire du programme qui porte le même nom aux États-Unis et qui est en place depuis maintenant 10 ans. Nous avons tout simplement reproduit au Canada une grande partie des mesures qui ont fait le succès du programme aux États-Unis.
La mise sur pied du programme au Canada a pris un certain nombre d'années, en raison de la structure de gouvernance que nous souhaitions établir. Il relève d'un organisme à but non lucratif, constitué sous le régime de la Loi sur les corporations canadiennes. Il compte un conseil d'administration et est assujetti à des règlements. Le programme a été créé de telle sorte que les intervenants ne puissent pas exercer un contrôle sur celui-ci. Il s'agissait de réunir un groupe de personnes, dont des représentants de tous les ordres de gouvernement — provinciaux et fédéral —, ainsi que des représentants du secteur privé, de syndicats et d'associations. Par conséquent, personne n'exerce un contrôle total sur le programme.
Nous offrons aux membres actuels et anciens des Forces canadiennes la possibilité de poursuivre une carrière exceptionnelle dans le secteur de la construction. Outre la possibilité de faire carrière, nous leur donnons aussi la chance d'être formés dans un métier donné et d'obtenir les cartes de compétences requises. Notre objectif ne consiste pas simplement à trouver un emploi à nos anciens combattants, mais aussi à les aider à faire carrière. Nous souhaitons aider les militaires qui ont aidé notre pays, dont ceux qui ont été blessés dans l'exercice de leurs fonctions.
En fait, les anciens combattants doivent faire face à trois défis lorsqu'ils quittent les Forces canadiennes et qu'ils tentent de faire carrière dans le monde civil.
Le premier défi — et j'en suis peut-être un bon exemple —, c'est que plusieurs membres se sont joints aux Forces canadiennes à un jeune âge. Par conséquent, quand vient le temps pour eux de quitter l'armée, ils n'ont pas vraiment d'expérience dans la rédaction de curriculum vitae et ils n'ont jamais eu à subir une entrevue d'emploi exigeante. Lorsqu'ils se sont joints aux Forces canadiennes, ils ont eu droit à un accueil très favorable.
Deuxièmement, il est très difficile pour un militaire de transférer ses aptitudes et ses compétences dans la société civile, de telle sorte qu'un employeur puisse les reconnaître.
Troisièmement — et je crois que c'est peut-être le défi le plus important —, c'est que, compte tenu de la culture des militaires et de la fraternité qui existe entre eux, il est très difficile pour les anciens combattants de trouver une organisation dont la culture répond à leurs besoins.
Voici la proposition de valeur que je présente à l'industrie au nom de tous les anciens combattants canadiens: on parle ici d'un groupe de personnes qui sont extrêmement fiables, loyales et flexibles. Connaissez-vous beaucoup de personnes qui, à un moment donné, participent aux efforts de reconstruction d'un pays comme Haïti à la suite d'un tremblement de terre, qui, le mois suivant, se rendent à la passe de Khyber, en Afghanistan, pour combattre les talibans, ainsi que pour libérer et sécuriser le pays afin que les filles puissent aller à l'école, et qui, l'été suivant, vont aider les Manitobains à se remettre des inondations? Pour les remercier de leur bon travail, nous les faisons venir à Ottawa pour qu'ils puissent faire partie du personnel.
Ces hommes et ces femmes ont la capacité d'apprendre, car les Forces canadiennes sont un milieu d'apprentissage. Ils apprennent à apprendre dans une classe et à assurer leur autoapprentissage à l'aide d'ordinateurs et de simulateurs. Chose plus importante encore, ils apprennent non seulement à apprendre, mais aussi à enseigner. La plupart des cours offerts au sein des Forces canadiennes sont donnés par des militaires. L'enseignement n'est-il pas la meilleure façon d'apprendre et le partage de la matière avec les autres n'est-il pas le meilleur moyen de la maîtriser?
Vous conviendrez tous avec moi que les militaires sont dotés d'un esprit d'équipe. C'est une qualité inestimable qu'il fait bon posséder au Canada, en particulier dans le secteur de la construction. Les militaires sont non seulement excellents pour suivre les directives qui leur sont données, mais ils sont aussi des chefs de file remarquables. Qui plus est, ils ont l'habitude de gérer des situations dynamiques et d'accomplir plusieurs tâches à la fois. Ils possèdent toutes les qualités de leadership nécessaires dans le contexte de la vie civile.
Je dirais que le gouvernement conservateur a rendu un fier service aux Forces canadiennes en revitalisant les immobilisations militaires. Toutefois, la plupart des personnes qui ont passé un certain nombre d'années dans l'armée ont appris à être très ingénieuses, car elles devaient entretenir l'équipement et veiller à ce qu'il fonctionne bien quand elles en avaient le plus besoin.
En outre, les militaires sont très conscients de la sécurité, ce qui, de toute évidence, est important dans le secteur de la construction.
Enfin, les anciens combattants ont déjà fait leurs preuves. Leurs antécédents sont bien connus en raison des rapports sur le rendement dont ils ont fait l'objet. On a déjà vérifié leurs antécédents du point de vue de la sécurité, ce qui est très important dans certains secteurs de l'industrie, et, bien entendu, ils répondent aux normes sur les plans médical et physique.
Le programme consiste à apparier les talents disponibles aux besoins existants dans le secteur canadien de la construction. Notre équipe compte quatre membres bilingues, qui sont tous d'anciens militaires. Notre système est très simple: les anciens combattants qui souhaitent participer au programme se rendent sur le site Web pour s'inscrire auprès de sociétés, d'entrepreneurs et de syndicats qui adhèrent aux objectifs du programme. Nous assurons ainsi la liaison entre les participants au programme et les employeurs éventuels. Cela dit, compte tenu des défis en matière de transition que doivent relever ces militaires, nous leur offrons des services de consultation pour leur faciliter la tâche à cet égard.
Au nombre des problèmes que nous devons régler, mentionnons celui de la visibilité du programme. Le simple fait d'être ici aujourd'hui est très utile pour le programme.
Nous accordons la priorité aux anciens combattants quand vient le temps de combler les places d'apprentis au sein des syndicats. Nous gérons chacun des cas individuellement, car, lorsqu'une personne est atteinte d'une maladie mentale ou d'un handicap physique, il faut comprendre les circonstances particulières de son cas et les limites avec lesquelles elle doit composer, afin de lui trouver un emploi qui répond à ses besoins.
Monsieur le président, voilà qui conclut mes observations préliminaires.
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Je n'ai pas de chiffres précis à ce sujet. Je préfère éviter de recueillir ces données au cas où notre site Web serait piraté. Nous savons ce qui s'est produit au ministère des Anciens Combattants il y a un an et demi. Je ne voudrais pas que notre site Web soit aussi piraté. Nous avons pris des mesures exceptionnelles pour des raisons de sécurité.
Cela dit, nous recueillons une quantité limitée de renseignements. Chaque cas est différent. Si une personne me dit qu'elle est atteinte d'une maladie mentale, j'en parle alors avec elle, sans toutefois entrer dans les détails, car je ne suis pas médecin. Je tiens simplement à savoir ce qui est à l'origine de ses problèmes, comment elle s'y prend pour les gérer et dans quel domaine elle serait à l'aise de travailler.
Permettez-moi de vous présenter un exemple. Un des participants au programme a été embauché en tant que chaudiériste. En Afghanistan, il avait travaillé comme opérateur d'un obusier M777 dans une des bases d'opérations avancées. Il souffrait d'un traumatisme dû au bombardement.
Les chaudières sont très bruyantes. Les outils des chaudiéristes sont très lourds. Souhaitant occuper un poste dans ce domaine, il n'a pas caché au syndicat dont il était membre et aux autres participants au cours qu'il souffrait de ce traumatisme. Dès la première journée, il s'est produit un bruit assourdissant dans la classe. Évidemment, il a figé, mais les autres participants lui ont témoigné du respect en raison de ses années de service et, conscients de son incapacité limitée, ils ont fait preuve de beaucoup d'empathie à son égard. Ils l'ont aidé pendant une brève période. Depuis, il se débrouille très bien. Il a poursuivi avec beaucoup de succès son apprentissage.
C'est donc dire que nous gérons chaque cas individuellement, en tenant compte des circonstances particulières de chacun des participants.
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Il s'agit d'une question très judicieuse et je vous remercie de la poser.
J'ai été engagé il y a huit mois, lors de la mise sur pied du programme. Pendant la première année, je m'intéresse réellement à quatre publics cibles.
Évidemment, le premier public cible est constitué des militaires eux-mêmes et il se divise en trois groupes. D'abord, il y a les membres de la force régulière, c'est-à-dire les militaires à temps plein; puis, il y a les réserves et les diverses unités de milice qui se trouvent partout au Canada; enfin, il y a les anciens combattants à la retraite.
Le deuxième public cible est composé des syndicats qui participent au programme. Je parle ici des unions internationales, de la FAT-COI et, à l'échelon local, des syndicats et des dirigeants et dirigeantes qui en sont responsables. Notre objectif est de veiller à ce qu'ils comprennent bien la proposition de valeur et s'engagent pleinement à accorder la priorité de placement aux anciens combattants.
Le troisième public cible est formé des entrepreneurs et des employeurs de l'industrie du bâtiment et de la construction partout au Canada. Nous leur faisons connaître cette occasion exceptionnelle. Bien entendu, la main-d'oeuvre avec laquelle nous travaillons devra se perfectionner, mais les employeurs saisissent l'idée.
Enfin, le dernier public cible est composé des collèges et des provinces qui font partie du processus d'approbation des apprentis dans tout le pays. Dans ce cas, je travaille avec 13 groupes intéressés.
Ce sont les quatre publics cibles dont j'essaie d'attirer l'attention.
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Je me ferai un plaisir de répondre en premier.
À mon avis, les étudiants de ces programmes subissent la même pression que les autres étudiants. Plusieurs obstacles les empêchent de terminer leurs études.
Selon moi, l'obstacle le plus important est le manque de préparation des étudiants. Cela va bien au-delà de la préparation sur le plan scolaire. Quand on s'intéresse aux élèves qui choisissent ces professions, on constate que nombre d'entre eux sont les premiers à faire des études postsecondaires dans leur famille. Leur père ou leur mère n'a donc jamais eu d'influence sur eux à cet égard, ce qui est un véritable problème. De plus, ils sont mal préparés sur le plan financier, ce qui les empêche de poursuivre leurs études. Par ailleurs, ils sont mal préparés sur le plan social. Ainsi, lorsqu'ils arrivent en classe, ils n'ont tout simplement pas l'impression d'être à leur place. Ils sentent qu'ils devraient plutôt être au travail.
Il existe une pléthore de recherches sur la réussite et la persévérance scolaires. Au Collège Algonquin, nous avons tenté d'appliquer les principes qui en ressortent à nos programmes d'apprentissage. Nous avons constaté une amélioration mesurable de la persévérance, qui est passée de 62 à 64 p. 100 depuis deux ans. Le gouvernement de l'Ontario vise un taux de persévérance de 70 p. 100.
Par conséquent, il faut entrer en contact avec les élèves plus tôt, veiller à ce qu'ils soient bien préparés sur le plan scolaire et faire en sorte de leur offrir toute une gamme de services. Je peux ajouter qu'en 1950, 5 p. 100 de la population faisait des études postsecondaires. À l'époque des Jeux olympiques de Montréal, c'était 20 p. 100 de la population, et on approche maintenant de 70 p. 100. Même s'il n'y a pas de régression, nous savons bien qu'il y a des étudiants issus de milieux où personne n'avait fait d'études postsecondaires avant eux, et qu'une foule de facteurs empêchent ces étudiants de réussir.
Quand on pense à l'aspect scolaire de notre travail, nous devons aussi nous pencher sur les services de soutien dont les étudiants ont besoin, dont certains ont été mentionnés par le brigadier-général, et sur les moyens qui les aideront à terminer leurs études.
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Je crois qu'il s'agit d'une question très importante. Je peux seulement y répondre dans le cadre du programme Du régiment au bâtiment. D'après ce que je sais des gens qui se sont recyclés dans des métiers, je dirais que le taux de réussite des militaires qui entreprennent un apprentissage est pratiquement de 100 p. 100.
Il y a des facteurs économiques qui peuvent les dissuader de terminer leur formation. Par exemple, lorsqu'ils doivent retourner aux études pour une période de quatre, six ou huit semaines, les prestations d'assurance-emploi sont assez souvent retardées. C'est une longue période sans revenu pour une personne qui est à la fin de la vingtaine ou au début de la trentaine, qui a une hypothèque, un prêt automobile, dont le conjoint ou la conjointe ne travaille peut-être pas et qui a peut-être de jeunes enfants. Cela devient un obstacle. Ils acceptent donc que la formation qu'ils ont acquise pendant deux ans leur permet de gagner un certain salaire et ils s'en tiennent à cela.
L'autre problème qu'il vaut probablement la peine de souligner, ce sont les obstacles à l'accessibilité de l'apprentissage. Cela va à l'inverse de votre question, mais c'est quand même un point important parce qu'il touche toute la question du développement de la main-d'oeuvre.
Je trouve intéressant qu'au Canada, où les besoins en matière de main-d'oeuvre spécialisée sont si importants, nous cherchions souvent à combler ces besoins au-delà de nos frontières. Parallèlement, les entreprises qui ont besoin de travailleurs ne contribuent pas nécessairement toutes de façon égale au développement de la main-d'oeuvre. Autrement dit, elles n'encouragent pas les apprentissages. Cela devient un obstacle à l'accessibilité et peut aggraver la situation d'une personne qui consacre un, deux, trois ou quatre ans à un apprentissage, et qui est soudainement congédiée. Il se peut que cette personne doive attendre six mois avant d'obtenir un autre emploi temporaire qui lui permettra d'accumuler les heures qui lui manquent pour obtenir son permis.
Merci.
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Dans mes observations, j'ai parlé du mythe de l'éducation supérieure, qui est bien réel. De nombreuses études font état de ce problème, qui n'existe pas seulement au Canada, mais aussi aux États-Unis et en Europe. Là aussi, il y a des gens qui sont sous-employés.
Rick Miner parle d'emplois sans travailleurs et de travailleurs sans emplois. Il y a des centaines de milliers d'employeurs qui cherchent des travailleurs qualifiés et il y a des centaines de milliers de jeunes qui n'ont pas les bonnes compétences. C'est dans ce contexte que nous devons nous demander plus honnêtement comment faire comprendre aux jeunes le but de l'éducation supérieure.
En Amérique du Nord, nous nous interrogeons depuis 400 ans, c'est-à-dire depuis 1636, sur le but de l'éducation supérieure. Cependant, quand on demande à des élèves pourquoi ils veulent aller au collège ou à l'université, leur réponse est claire. Ils veulent acquérir les compétences et les connaissances qui leur permettront d'obtenir un emploi. C'est là que nous échouons.
À l'heure actuelle, 30 p. 100 des étudiants du Collège Algonquin ont étudié à l'université. C'est bon pour nous. Je qualifierais un grand nombre de nos programmes d'écoles d'études supérieures du XXIe siècle. Ces personnes très instruites viennent à nous afin d'acquérir les compétences qui leur sont nécessaires pour s'harmoniser avec la population active.
Du point de vue du gouvernement et des contribuables qui soutiennent financièrement la plus grande part de l'éducation, c'est un enjeu de plusieurs millions de dollars. Il y a, d'une part, des jeunes qui refont des cours et, d'autre part, le coût d'opportunité en raison de la perte de talent humain que cela représente.
Comme je l'ai dit plus tôt, je pense qu'il faut entrer en contact avec les jeunes et leur parler différemment. Par ailleurs, pour ce qui est du collège, je pense que nous devons continuer à offrir des programmes qui suivent de très près les besoins de l'industrie.
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Merci à vous, monsieur le président, ainsi qu'aux témoins qui sont ici aujourd'hui pour nous aider dans notre mission qui consiste à trouver ce que le gouvernement fédéral peut faire pour promouvoir l'apprentissage et le moderniser.
Depuis que j'ai été élu en 2008, j'ai parcouru le pays et j'ai été en contact avec de nombreuses universités canadiennes grâce à notre caucus sur l'éducation postsecondaire. Je remarque qu'il y a vraiment un changement qui s'opère. En effet, le mode de réflexion cloisonné des universités et des établissements d'enseignement manifeste une ouverture à l'égard des compétences dont les diplômés ont besoin lorsqu'ils terminent leurs études et obtiennent leur titre ou leur diplôme.
Monsieur MacDonald, je me demande si, au Collège Algonquin, vous collaborez avec des universités ou d'autres établissements postsecondaires pour établir de façon concertée la valeur d'un baccalauréat en arts libéraux, qui semble être considéré comme primordial par notre génération quand nous disons à nos enfants qu'ils doivent étudier.
En ce qui me concerne, mes trois enfants ont dû suivre des cours dans un collège communautaire pour devenir aptes au travail, exactement comme vous le disiez. Ils ont obtenu leur diplôme en arts libéraux, mais ils n'arrivaient pas à percer le marché de l'emploi.
Je pense que les établissements postsecondaires reconnaissent maintenant cette situation. Je pense qu'ils comprennent la situation dans une certaine mesure, même si les choses ne vont pas assez vite pour certains d'entre nous. Ils sont confrontés à de nombreux obstacles, surtout dans leurs propres facultés universitaires, qui sont philosophiquement en désaccord avec cette orientation. Quelles expériences avez-vous vécues à cet égard au Collège Algonquin?
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J'ai fait allusion plus tôt à plusieurs des points que vous avez soulevés et j'aurais aimé disposer d'un peu plus de temps.
C'est de cela que traite le livre. J'espère que vous le lirez. Il s'agit d'un phénomène. La valeur accordée à certains emplois s'est reflétée dans les compressions qui ont touché les conseils scolaires de district, y compris la suppression de la plupart des formations axées sur les métiers qui étaient offertes en bas âge.
À mon avis, le paradoxe dans tout cela, c'est que ces emplois ne pourront pas être transférés ailleurs dans le monde, qu'il s'agisse de réparer nos voitures, d'ériger nos bâtiments ou de construire nos routes et nos infrastructures.
Je suis un enseignant. J'ai été un éducateur pendant toute ma vie et c'est une profession noble. En fait, Lee Iacocca a dit que, dans un monde logique, les meilleurs d'entre nous seraient des éducateurs et que les autres devraient accepter de faire quelque chose de moins important.
C'est là l'importance que j'y accorde, mais il faut que les éducateurs modifient encore leur mode de pensée pour changer de perspective et se concentrer sur le but de l'éducation plutôt que sur la matière qui est enseignée ou sur le programme. Lorsque nous serons capables d'aborder la question sous l'angle de que ce les étudiants apprennent au lieu de ce qui leur est enseigné, nous pourrons commencer à nous attaquer à des problèmes comme le délai nécessaire pour que les étudiants terminent leur apprentissage.
Pour conclure, monsieur le président, je ne peux m'empêcher de penser qu'il faut tenir compte du temps consacré aux études et du lieu où elles se déroulent. En ce qui concerne les notions apprises par les étudiants, il y a une limite à ce qu'ils peuvent apprendre pendant huit ou quinze semaines ou pendant quatre ans.
Ce serait une nouveauté si un étudiant était capable de démontrer qu'il a obtenu les mêmes résultats en huit semaines qu'en trois ans. Le financement qui nous est octroyé dépend du nombre d'étudiants qui fréquentent notre établissement et de la durée de leurs études. Il n'est pas dans notre intérêt qu'ils terminent plus rapidement.
Je le répète, c'est un problème complexe et j'aurais aimé avoir plus de temps.
Je terminerai en disant que vous jouez tous un rôle honorifique au Canada. Ma mère, qui vit en Nouvelle-Écosse, s'intéresse de près à la politique. C'était un honneur pour moi de lui dire que j'allais rencontrer certains d'entre vous aujourd'hui. Votre travail est important.
Merci beaucoup.
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L'engagement du gouvernement du Canada a pris fin. Il a versé une subvention de 150 000 $ pour un an. Je suis justement en train d'écrire une lettre au ministre Blaney pour le remercier de sa contribution.
Cela dit, la participation financière n'est qu'un aspect de la question. La contribution du gouvernement du Canada en ce qui concerne la visibilité du programme est inestimable. Je sais que le premier ministre s'est engagé personnellement à faire connaître ce projet, car c'est lui qui l'a présenté aux Canadiens il y a 13 mois. Je crois savoir qu'il le fera de nouveau lors d'un événement dont je ne parlerai pas ici.
Le gouvernement du Canada a donc apporté sa contribution. La première ministre Redford, en Alberta, et Dalton McGuinty, lorsqu'il était premier ministre de l'Ontario, se sont tous deux engagés à verser une subvention unique de 150 000 $. Une autre province est aussi sur le point d'apporter sa contribution au projet.
En ce qui concerne le secteur privé, la société TransCanada Pipelines nous a accordé la somme de 1 million de dollars, qui sera répartie sur cinq ans. Il s'agit donc de 200 000 $ par an pendant cinq ans. Le General Presidents' Maintenance Committee, qui s'est engagé à verser la somme de 800 000 $ répartie sur quatre ans, fait partie des associations qui financent le projet. Par ailleurs, des unions internationales comme celle des chaudronniers, celle des monteurs de conduites de vapeur et d'autres, qui sont la pierre angulaire de ce projet, nous ont aussi accordé une aide financière.
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Excellent. Merci beaucoup.
Kent, nous avons parlé des obstacles. Or, je sais qu'il existe des accords bilatéraux. On constate la transférabilité des personnes accréditées du Sceau rouge. Une chose est sûre, le transfert des apprentissages et la reconnaissance des titres de compétences d'un endroit à l'autre préoccupent tout le monde.
Vous avez mentionné qu'il existe des accords bilatéraux. Terre-Neuve et l'Alberta en ont un, et je crois qu'un autre a été conclu avec la Nouvelle-Écosse. Par qui sont-ils négociés? Par les établissements? Est-ce que c'est le collège Algonquin et le Northern Alberta Institute of Technology qui négocient ces accords? Est-ce les ministères provinciaux du travail? Le gouvernement fédéral peut-il contribuer à la tenue de ces négociations?
Voilà ma première question.
La seconde fait suite à ce que Phil disait. Les entrepreneurs les plus prospères au Cap-Breton sont tous des gens de métier. Électriciens, charpentiers, camionneurs et mécaniciens font carrière et réussissent en tant qu'entrepreneurs et constituent réellement le moteur de l'économie du Cap-Breton.
Puisque les personnes de métier sont nombreuses à se lancer en affaires, intègre-t-on une initiation à l'administration des affaires à la formation dans certains métiers?
Ce sont deux questions complètement distinctes, mais je tente ma chance.
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La première question n'est pas simple.
Au départ, ce sont les employeurs qui manifestent leur besoin d'une désignation Sceau rouge. Je crois qu'ils sont 55 au pays à l'heure actuelle. C'est une étape essentielle. Ensuite, les démarches s'effectuent auprès des gouvernements et des établissements de formation. C'est un peu ironique, parce qu'on commence avec une définition de résultats communs visés par l'obtention du Sceau rouge, mais plus on s'éloigne de cette décision et plus on avance dans la mise en oeuvre dans les provinces, plus le curriculum commence à changer.
Dans un entretien avec notre coordonnateur et président des apprentissages, je lui ai demandé ce que ça ferait si je déclarais ici aujourd'hui que nous souhaitions augmenter de 50 p. 100 d'ici 2015 la désignation Sceau rouge des métiers, mais sachez que je ne suis pas en train de faire cela. Il était très réticent à l'idée justement pour les mêmes raisons que vous soulevez concernant l'industrie, les gouvernements, le curriculum et les établissements. Jadis, l'apprentissage créait un lien entre l'apprenti et l'employeur. Aujourd'hui, on a compliqué la chose en ajoutant un lien entre l'agent de prestation et le secteur public. La coexistence de ces quatre éléments complique les choses.
Selon les conseils de spécialistes que j'ai reçus, il faut d'abord discuter avec l'employeur et parvenir à une entente, puis mettre cet accord à exécution.
Pourriez-vous répéter la deuxième question, monsieur Cuzner?
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Merci, monsieur le président et merci à tout le comité de nous recevoir aujourd'hui.
Je serai bref. Comme le président l'a mentionné, j'ai déjà comparu devant le comité, mais pour vous donner un aperçu de mon rôle, je suis directeur général de Skills/Compétences Canada. Notre organisme fait valoir les métiers et les technologies auprès des jeunes partout au pays.
Pour ce faire, nous organisons des occasions d'acquisition d'expérience. L'une des plus connues prend la forme d'un concours qui permet aux jeunes de partout au Canada de se mesurer les uns aux autres pour tester leurs compétences dans jusqu'à 45 métiers et technologies et qui, parallèlement, donne aux médias, au public et aux étudiants des écoles de la région une meilleure compréhension de toute la complexité des carrières dans les métiers et les technologies.
Outre un gain d'expérience pour les étudiants qui participent aux concours, nous offrons des activités interactives de métiers et de technologies qui permettent aux étudiants d'essayer grossièrement ces métiers pour avoir une idée de ce à quoi ils consistent.
Je suis accompagné aujourd'hui de quelques apprentis ainsi que d'un compagnon d'apprentissage. Deux d'entre eux, Nathan et Kayla, ont déjà participé aux olympiades canadiennes des métiers et des technologies et pourront donc vous parler de ce que cela représente. Les deux autres participent actuellement à un programme d'apprentissage.
Nous sommes impatients de répondre à vos questions.
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J'essaierai d'être bref.
Je m'appelle Nathan Banke. Je suis compagnon d'apprentissage en tant que technicien à l'entretien et à la réparation d'automobiles — mécanicien, si vous le voulez. J'ai participé à un régime d'apprentissage. Au départ, je me suis inscrit au Programme d'apprentissage pour les jeunes de l'Ontario. J'ai suivi un programme de préapprentissage, puis le reste du programme d'apprentissage en tant qu'apprenti normal. J'ai terminé le programme et je suis devenu compagnon en 2007.
Pendant ma formation en apprentissage, j'ai participé aux olympiades canadiennes à divers niveaux — régional, provincial, national — ainsi qu'au Mondial des métiers. Par la suite, j'ai continué de travailler comme mécanicien, mais grâce à Compétences Canada, j'ai rencontré le propriétaire d'une autre entreprise, qui m'a embauché. Je suis donc présentement directeur du développement au sein d'une entreprise qui conçoit et fabrique de l'équipement de formation pour les écoles au Canada, aux États-Unis et partout dans le monde.
Au cours des trois ou quatre dernières années, j'ai voyagé — en avion et en automobile — partout au Canada. J'ai visité des écoles secondaires et des collèges dans toutes les provinces — sauf les Territoires du Nord-Ouest — et je connais les régimes d'apprentissage de diverses provinces. J'ai participé à des comités d'articulation pour diverses provinces et divers programmes d'apprentissage. J'ai de l'expérience avec le régime de la Colombie-Britannique, celui de l'Alberta et un peu avec celui du Québec aussi, où notre entreprise est établie.
Sur une note personnelle, mon frère a suivi un programme d'apprentissage au cours des deux dernières années et a obtenu sa licence dans la dernière année. J'ai aussi beaucoup d'amis qui suivent présentement un programme d'apprentissage.
Voilà qui vous donne un peu d'information à mon sujet.
Merci.
Le plus bel exemple, c'est ce que j'ai vécu cette année. Au cours des deux années précédentes, pour le niveau 1 de mes études, j'ai reçu des prestations d'assurance-emploi après environ un mois d'attente. L'an dernier, ce fut étonnamment rapide. J'ai commencé à les recevoir environ à la troisième semaine de formation. Cette année, je n'ai encore rien reçu.
En fait, je viens d'appeler, ce matin même, les gens de l'assurance-emploi parce qu'ils m'avaient laissé un message pour me dire qu'ils n'ont pas reçu mon relevé d'emploi, bien que je sois allé le leur porter en main propre le 18 janvier.
On m'a raconté d'autres cas épouvantables. Certains apprentis m'ont dit qu'ils n'ont jamais reçu de prestations d'assurance-emploi au cours du niveau 2 de leurs études.
Il y a une longue période entre le moment où on quitte son emploi et le moment où on commence sa formation. Il faut attendre très longtemps avant de recevoir des prestations d'assurance-emploi. Or, il faut continuer à payer les factures. Il ne nous est pas permis de travailler à temps partiel pour obtenir un revenu d'appoint parce que nous sommes censés toucher des prestations d'assurance-emploi. Si nous n'en touchons pas ou ne les recevons pas, nous n'avons pas de revenu, ce qui est certainement une difficulté.
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Avant de raconter les circonstances qui ont fait que j'ai choisi un programme d'apprentissage, je tiens à dire que j'ai souvent l'occasion, pour mon travail, de donner des conférences à des professeurs du collégial. Le mois prochain, je m'adresserai à une cinquantaine d'entre eux. Pendant l'année, je parle à des centaines de professeurs du collégial. Où que j'aille au Canada ou aux États-Unis, peu importe le village, la ville, la province ou l'État, tous les professeurs disent que les étudiants n'ont pas les compétences de base. En effet, depuis 5, 10, voire 15 ans, les conseillers en orientation incitent les jeunes à suivre une formation d'apprenti pour les mauvaises raisons. On constate aussi que les étudiants n'ont pas les compétences de base parce que la culture elle-même a changé.
Personne dans la famille de ces jeunes, ni le père, ni l'oncle, ni la tante, ni le grand-père, ne fait un métier manuel spécialisé, quel qu'il soit. Lorsqu'on a déjà donné le marteau ou le tournevis à son oncle pour l'aider à réparer, par exemple, un conduit de cheminée, on sait ce que c'est de tenir un outil. Bon nombre de ces jeunes n'ont jamais vécu cela.
On n'a qu'à penser à ce qui se passe dans les écoles secondaires. Il ne reste rien lorsqu'on met de côté les programmes de formation dans les métiers spécialisés. Les jeunes ne savent pas comment tenir un tournevis ou un marteau. Ils ne savent pas ce qu'est une clé à molette. Actuellement, les conseillers en orientation incitent les jeunes qui ne sont pas doués pour les études à suivre un programme d'apprentissage et ils les font jouer avec des outils pour qu'ils soient capables de manipuler des objets concrets. C'est ce que je constate au Canada, dans toutes les provinces, et aux États-Unis.
Je reviens maintenant à la première question. En fait, j'étais comme Steve. Lorsque j'étais au secondaire, je me suis demandé si je voulais aller à l'université. La réponse était oui. Avais-je suffisamment d'argent? La réponse était non. Les études universitaires allaient me coûter beaucoup d'argent que je n'avais pas. Voulais-je aller dans les forces armées? Oui, mais je n'étais pas prêt, à 16 ans, à entreprendre des études au Collège militaire royal, à Kingston, ou à m'engager à long terme. On ne peut pas prendre une décision comme celle-là à 16 ans. Du moins, moi, je ne le pouvais pas.
Pour moi, le calcul était simple. Si j'allais à l'université, je me retrouverais dans quatre ans avec une énorme dette, et ce, même si je travaillais d'arrache-pied. Sinon, je pouvais suivre un programme d'apprentissage. À l'époque, je pouvais participer au programme d'apprentissage pour les jeunes de l'Ontario, qui me permettait de quitter rapidement l'école secondaire, de travailler, de gagner ainsi de l'argent et d'obtenir de l'expérience, disons 30 heures par semaine, dans un atelier ou ailleurs. On gagnait de l'argent, on obtenait des crédits d'études secondaires grâce au programme coopératif et on accumulait des heures d'expérience. Le gouvernement payait les frais du niveau 1 du programme d'apprentissage. Du coup, il était logique de suivre une formation de ce genre.
À l'époque, il n'y avait pas les mesures incitatives qu'offre actuellement l'Ontario. Lorsque mon frère a suivi son programme d'apprentissage, il a touché 1 000 $ à chaque niveau, puis 2 000 $ à la fin de son programme, ou je ne me rappelle plus trop à quel autre moment. Il n'y avait pas toutes les mesures incitatives qui sont offertes aujourd'hui. Par rapport aux milliers de dollars que mes amis payaient, mes études ne me coûtaient que 400 à 500 $ par niveau. Et pendant ce temps-là, j'avais un revenu.
C'est l'aspect financier qui m'a fait choisir un programme d'apprentissage.
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Je n'ai pas vraiment de réponse, mais je pourrais vous fournir une piste.
Je ne sais pas ce que prévoit les divers curriculum du pays, mais ici à Ottawa, j'ai dû suivre en 10e année des cours sur le civisme et les possibilités de carrière . C'était obligatoire. Il faut suivre tant de cours de science et tant de cours de mathématiques à l'école secondaire. Deux métiers devraient figurer parmi les cours obligatoires. Il faut que les métiers soient de nouveau représentés à l'école secondaire. On n'en parle plus.
Bien sûr, les adolescents s'en plaindront, mais on en a l'habitude.
Comme vous l'avez dit, j'ai la chance d'avoir grandi dans une famille d'agriculteurs, de tôliers, et ainsi de suite. Je ne me rendais pas sur les chantiers, mais on m'encourageait à faire les choses moi-même. On me disait: « Je ne vais pas accrocher ta photo, prend ton marteau et fais-le toi-même. » J'ai pris mon marteau.
Je savais ce que je faisais, mais mes amis n'en n'ont pas la moindre idée, et voilà la première piste: réintroduire les métiers dans le curriculum et les rendre obligatoires à l'école secondaire dans une certaine mesure. Un cours de base en menuiserie, par exemple.
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Commençons par décrire la procédure exacte que nous devons suivre.
L'une des bonnes mesures que les responsables de l'assurance-emploi ou de Service Canada ont prises a été de nous permettre de présenter une demande deux semaines avant le début des cours. Nous recevons par la poste un code qui nous permet de remplir une demande d'assurance-emploi en ligne. Nos demandes ne sont bien entendu pas traitées avant que nous ayons remis un relevé d'emploi, mais, à tout le moins, on prend ainsi un peu d'avance sur le traitement de notre demande. Nous devrions commencer à recevoir des prestations dès que Service Canada reçoit notre relevé d'emploi.
Cela étant dit, nous n'aurions pas pu choisir une meilleure année pour discuter de cet exemple. En ce qui nous concerne, nous n'avons pas reçu notre code d'avance; nous l'avons plutôt reçu le premier jour de classe, soit en retard. On nous a dit que ce n'était pas le Collège Algonquin qui était en faute, mais plutôt Service Canada, parce que ces codes sont envoyés avec nos horaires.
J'ai rempli ma demande en ligne le jour même, dès que j'ai rencontré un responsable de l'assurance-emploi, et j'ai fourni mon relevé d'emploi une semaine plus tard lorsque mon employeur me l'a enfin donné.
Comme je l'ai dit, j'ai eu un message selon lequel Service Canada n'avait pas reçu mon relevé d'emploi; c'était il y a trois semaines. J'ai essayé le numéro sans frais. Je n'ai eu droit qu'à un message automatisé qui m'invitait à me rendre sur le site Web si je voulais plus de renseignements. Impossible de parler directement à quelqu'un. J'ai dû composer un autre numéro qui devait servir pour mes demandes en ligne, et lorsque j'ai enfin pu choisir une option pour parler à quelqu'un, cette personne m'a seulement dit qu'elle allait examiner la question.
Savez-vous ce que cela signifie? On m'a dit: « C'est vrai. Je ne trouve pas votre relevé d'emploi dans le système; d'ordinaire, on le consigne dans le système 10 jours après la réception. Je vais faire une demande pour que ce soit fait. » J'attends juste qu'un responsable m'appelle pour me dire: « Oui, nous avons votre relevé d'emploi; tout est en règle, nous avons commencé le traitement de votre demande. »
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J'aimerais effectivement faire deux observations.
Tout d'abord, j'aimerais revenir sur les mesures que l'on pourrait prendre pour faciliter la vie des apprentis pendant leur formation. J'estime qu'il faudrait d'une façon ou d'une autre normaliser le salaire des apprentis. Je ne peux pas me prendre comme exemple parce que je gagne un salaire que l'on pourrait qualifier de décent, et j'ai obtenu des augmentations au fur et à mesure que j'ai passé les niveaux.
Mais deux de mes collègues qui sont rendus au même niveau que moi, au niveau 3, gagnent 13 $ l'heure depuis le début. Comment peut-on justifier qu'une personne qui suit une formation d'apprenti qui dure quatre ans gagne le même salaire tout au long de sa formation, jusqu'à ce qu'elle reçoive sa certification? Si vous sortez du secondaire, que vous êtes encore jeune et que vous commencez tout juste votre vie, ce n'est pas si grave. Mais si vous êtes un homme comme moi, qui a quitté une carrière pour en commencer une autre, être payé 13 $ l'heure pendant les quatre ans que dure le programme d'apprenti rend les choses difficiles.
L'autre commentaire porte sur les salaires qui sont offerts en général aux techniciens dans mon domaine. Il y a une chose que j'ai de la difficulté à comprendre. Le taux horaire que chargent les ateliers a presque doublé en 10 ans, mais le salaire des techniciens n'a presque pas augmenté. Il faudrait probablement se pencher aussi sur cette question. Si l'on augmente le prestige lié à ce métier, ça veut aussi dire augmenter les salaires. Si les taux horaires des ateliers ont connu une telle hausse, les techniciens devraient d'une façon ou d'une autre en profiter. N'est-ce pas les techniciens qui font tout le travail?
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J'ai quelques remarques à formuler.
Tout d'abord, je pense qu'il s'agit d'une excellente idée de séparer les demandes de prestations d'assurance-emploi des autres demandes; je ne me souviens plus qui a lancé l'idée.
J'ai des collègues qui viennent de Sudbury. Ils n'ont pas assez d'argent pour aller voir leurs enfants. Le Collège Algonquin attire beaucoup de gens: seulement le quart des étudiants proviennent de la région. Les autres étudiants proviennent de l'extérieur et vivent ici, ce qui leur occasionne d'importantes dépenses. En fait, ces gens ont plus besoin d'argent que moi.
En outre, je fais partie d'un des métiers où le ratio compagnon-apprenti est le plus élevé; je crois qu'il s'agit des charpentiers et des tôliers. Vous pouvez avoir un apprenti et un compagnon, mais après le premier apprenti, le ratio doit être de quatre compagnons pour un apprenti, ça revient donc à ce que vous disiez. Il faut beaucoup d'argent pour accepter des gens. Je travaille dans un petit atelier, et nous n'avons pas l'argent pour faire ça, je pense donc qu'il faut se pencher sur la question.
C'est tout; je vous souhaite tous bonne chance.