:
Je vous remercie de nous avoir invités au comité aujourd'hui.
Je vais commencer par vous parler brièvement de Personnes d'abord du Canada. Nous sommes l'organisation nationale des Canadiens étiquetés « déficients intellectuels ».
J'avais l'intention de vous présenter des diapositives PowerPoint, mais nous avons eu des difficultés techniques. Je vais donc simplement lire le contenu des diapositives. Je m'en excuse. Les renseignements qui suivent constituent le point de vue de Personnes d'abord du Canada au sujet de l'emploi des personnes ayant une déficience intellectuelle.
Les personnes atteintes d'une déficience intellectuelle devraient avoir le choix et la possibilité de gagner leur vie en occupant un emploi rémunéré sur le marché du travail. Les employeurs doivent accueillir une main-d'oeuvre diversifiée et offrir au besoin des mesures d'adaptation et de soutien en milieu de travail. La rémunération devrait être équivalente à celle des personnes non handicapées.
De tout temps, les personnes ayant une déficience intellectuelle ont été placées dans des ateliers protégés et des projets de création d'emploi à long terme parce qu'on croyait qu'elles étaient incapables d'occuper un emploi. Dans ces ateliers, le travail est dévalué et le salaire est souvent de moins de 2 $ par jour. De plus, les gens y sont regroupés et séparés des autres.
Nous croyons que tous les individus ont une valeur, que les personnes étiquetées déficientes intellectuelles représentent un potentiel inexploité et enrichissent le milieu de travail grâce à leurs compétences et à leur talent. Nous croyons qu'avec un soutien adéquat, ces personnes ont prouvé qu'elles étaient loyales, fiables et consciencieuses. La recherche montre que les déficients intellectuels font des employés stables. Autrement dit, ils ne changent pas constamment d'emploi.
Je voudrais citer une déclaration de l'honorable Philip Lee, lieutenant-gouverneur du Manitoba:
Nous soulignons aujourd'hui le travail d'employeurs qui viennent en aide aux autres. Et nous les récompensons aussi parce qu'ils sont intelligents.
Dans les affaires, il est judicieux d'engager des travailleurs qui veulent vraiment contribuer. Il est également judicieux pour les employeurs d'offrir des mesures d'adaptation qui leur permettront de conserver des travailleurs engagés qui sont attachés à ce qu'ils font.
Pour les personnes ayant une déficience intellectuelle, les mesures d'adaptation comprennent un langage clair, le droit d'avoir un conseiller — dans notre monde, un conseiller est une personne sans déficiences intellectuelles — et des aides en milieu de travail.
Le langage clair est essentiel pour les personnes étiquetées déficientes intellectuelles. Il permet de rendre l'information plus accessible et plus compréhensible. Les personnes ayant une déficience intellectuelle ont droit aux pleins avantages de l'emploi au-delà de leur chèque de paie. Il y a des avantages sociaux, personnels et communautaires qui découlent de l'appartenance à la population active ordinaire plutôt qu'à un environnement de travail protégé.
Qu'est-ce que Personnes d'abord du Canada peut faire? Nous pouvons continuer à éduquer nos membres pour les familiariser avec leurs droits et leurs responsabilités par rapport à la population active canadienne. Nous pouvons travailler avec les employeurs pour les persuader qu'il peut être avantageux d'engager des personnes étiquetées déficientes intellectuelles. Nous continuerons en outre à promouvoir la notion d'un vrai travail et d'une vraie rémunération pour tous les Canadiens.
Nous veillerons à ce que tous les citoyens ayant une déficience intellectuelle aient le droit et la possibilité d'occuper un emploi, à ce que les ateliers protégés ne fassent plus partie des choix offerts aux personnes ayant une déficience intellectuelle et à ce que des mesures d'adaptation soient assurées pour permettre l'emploi de ces personnes.
À titre de représentants du gouvernement, vous pouvez accroître les possibilités d'emploi offertes aux personnes ayant une déficience intellectuelle. En travaillant ensemble, toutes les parties peuvent contribuer à l'amélioration de la vie de ces personnes en leur assurant des emplois équivalents et valorisants.
Je vous remercie. Je vais maintenant céder la parole à Shane Haddad. Shane, qui vient de Regina, est le président de Personnes d'abord du Canada.
:
Je croyais que nous faisions partie de l'équipe Canada.
Je suis monté sur des podiums et j'ai souvent siégé au sein de groupes semblables à celui-ci. Je l'ai fait dans ma collectivité, dans ma province et partout dans le pays. J'ai pris la parole aux Nations Unies et je m'adresse aujourd'hui au Parlement, qui est au coeur du gouvernement de mon pays. J'ai parlé de questions telles que la fermeture d'établissements et des écoles plus inclusives. J'ai pris la parole dans ma collectivité en mon propre nom et au nom d'autres personnes.
Je suis ici aujourd'hui pour vous parler de questions touchant l'emploi. J'ai cru bon de recourir à ma propre expérience. Lorsque je me suis présenté, je vous ai mentionné certains aspects de ma vie. En voici quelques autres.
Lorsque j'étais jeune, on m'a mis dans un pensionnat où je n'ai pas reçu une très bonne éducation. Je n'ai même pas atteint la 12e année. J'ai travaillé dans un atelier protégé. Pendant toute ma vie, je me suis battu pour avoir du travail et pour gagner mon pain et celui de ma famille. Lorsque je suis allé à la recherche de mon premier emploi, je n'avais pas une 12e année, mais je voulais travailler dans le domaine de l'entretien. J'ai suivi des cours pour essayer d'avoir un emploi dans ce domaine. J'ai réussi à décrocher un certificat en entretien de chaudières, mais je n'avais pas un diplôme secondaire. Je posais ma candidature à des emplois, mais, même avec mon certificat, on refusait de m'engager. J'ai continué à lutter. Finalement, j'ai trouvé un emploi dans une entreprise d'entretien des gazons. J'ai travaillé là pendant quelque temps, avant de décider de lancer ma propre société dans le même domaine. Je connaissais le travail et l'équipement, et j'aimais ce que je faisais. J'ai commencé à faire de la publicité. J'ai réussi ainsi à avoir ma propre clientèle. J'étais alors dans la trentaine, ce qui signifie que je fais ce métier depuis 20 ans.
Le travail est saisonnier. Quand Mère nature est votre patron, la vie est souvent une alternance entre le festin et la famine. Voilà comment j'ai vécu pendant des années. Je voulais trouver un autre travail, mais c'est difficile. J'ai plus de problèmes que les autres quand je cherche un emploi. Certains de ces problèmes sont attribuables à ma déficience, mais d'autres ne le sont pas.
Mon problème d'emploi le plus récent, c'est que j'ai trouvé un travail, mais que je ne savais pas si je devais l'accepter ou non. J'avais besoin d'un emploi, mais la philosophie de l'employeur ne me plaisait pas. Tous les travailleurs de cette entreprise avaient une déficience, sauf les cadres. Je voyais défiler tous les principes contre lesquels je m'étais battu pendant toute ma vie: ségrégation, regroupement et isolement. Je voyais en même temps le chèque de paie, les factures payées, la nourriture sur la table et l'essence dans le réservoir de la voiture. À titre de militant, je ne voulais pas de cet emploi parce que j'aurais alors été obligé de renoncer à mes principes éthiques et à mes convictions en échange d'un chèque de paie lié à ma déficience et à rien d'autre. À titre de mari et de père, j'avais besoin de l'emploi parce que je voulais donner à manger à ma famille et assurer son avenir.
Voilà mon problème, mais c'est aussi le vôtre. L'emploi des personnes ayant une déficience intellectuelle n'a rien à voir avec les partis et l'affiliation politique, mais tout à voir avec les gens, la dignité, le respect et les droits.
J'appuie les personnes ayant une déficience intellectuelle de mon pays. Être intégré et être valorisé: tous les partis du Canada doivent s'associer à ces valeurs non seulement pour accroître les possibilités d'emploi, mais aussi pour donner des emplois réels aux personnes ayant une déficience intellectuelle.
Je vous remercie.
:
Bonjour. Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de vous présenter notre point de vue et de vous parler du travail de bien des gens au Manitoba, au Canada et partout dans le monde.
Je commencerai par quelques mots au sujet du Canadian Centre on Disability Studies, ou CCDS, parce qu'il s'agit d'une organisation d'un genre très particulier. Notre centre a été créé en 1995 par un pionnier et des dirigeants de quatre secteurs — la communauté des personnes handicapées, le monde universitaire, le gouvernement et le secteur privé — avec l'idée que la principale lacune qui existait alors avait été cernée: l'absence, dans les quatre secteurs, d'une connaissance commune de ce qu'est la déficience, de ce que les professionnels savent — je parle de ceux qui travaillent dans les quatre domaines, y compris la communauté des personnes handicapées — et de ce qu'ils devraient savoir pour être en mesure de revoir leurs politiques et leurs pratiques, d'élaborer des stratégies conjointes et de les mettre en oeuvre.
Le CCDS a été créé comme modèle de partenariat actif entre quatre secteurs. C'est un terme très courant aujourd'hui, mais, en réalité, comment un tel partenariat peut-il fonctionner? Nous discutons aujourd'hui de la possibilité d'avoir un partenariat actif entre le gouvernement et le secteur privé pour remédier aux lacunes existantes et répondre au besoin de changer les pratiques du secteur privé, non seulement pour engager des personnes handicapées lorsque certains dirigeants sont conscients de la situation, mais aussi pour en faire une question systémique, de sorte que si ces dirigeants s'en vont, les bonnes initiatives ne disparaîtront pas.
J'aimerais aborder quelques points. Le cadre dont nous nous servons au CCDS a été mis au point en 2002 lorsque nous avons travaillé avec la Banque mondiale pour examiner ses mécanismes de prêt.
Le cadre se compose de trois parties: l'accès, l'inclusion et la participation. Dans ces trois domaines, différentes questions se posent. Beaucoup d'entre vous connaissent les différents moyens d'utiliser un cadre semblable, mais si vous utilisez ce cadre, nous pourrons examiner, par exemple, les obstacles définis dans le rapport le plus récent sur l'accès des personnes handicapées à l'emploi, les annonces, les possibilités de formation, les perspectives d'éducation et les emplois stables, ainsi que la possibilité de passer d'une région ou d'une province à une autre sans perdre les avantages et le soutien.
Ces questions peuvent également être posées dans le contexte de l'accès du secteur privé aux connaissances et aux pratiques les plus actuelles qui puissent être appliquées sur une base systémique.
Il y a trois grandes questions que je voudrais mentionner en particulier et qui découlent des recherches que nous avons menées dans les 10 ou 15 dernières années.
Premièrement, le Canada est un pays où beaucoup de gens vivent dans deux domaines parallèles, le domaine privé et le domaine public. Nous avons de bonnes politiques et pratiques applicables au domaine public, mais les politiques et pratiques applicables au domaine privé sont différentes. Elles se rejoignent parfois, mais il arrive qu'elles soient divergentes.
Deuxièmement, beaucoup de secteurs sont cloisonnés. C'est le cas de l'éducation, de l'emploi, des transports, du logement, du soutien, etc. Il y a de nombreuses bonnes pratiques, des pratiques et des politiques prometteuses dans tous les secteurs, mais combien d'entre elles sont contradictoires? Combien d'entre elles ciblent des groupes semblables sans recourir aux ressources humaines et financières et aux pratiques exemplaires?
Troisièmement, dans quelle mesure intégrons-nous systématiquement notre propre acquis dans les pratiques exemplaires, la recherche et le développement afin d'affronter un environnement en évolution constante? Par exemple, dans quelle mesure les recommandations issues de la recherche et des pratiques exemplaires, quelle que soit leur origine, sont-elles intégrées dans les politiques des différents ordres de gouvernement?
Ce sont là trois enjeux particuliers du cadre de l'accès, de l'inclusion et de la participation.
Je voudrais maintenant mettre en évidence quelques obstacles et formuler certaines recommandations.
Les obstacles à l'emploi des personnes handicapées ne sont pas nouveaux. Nous les connaissons. Nous faisons des recherches à ce sujet depuis 10, 15 ou 20 ans. L'un des plus grands obstacles est l'attitude négative. Très souvent, elle se fonde sur un manque de connaissances. Dans quelle mesure savons-nous utiliser les connaissances qui existent déjà dans la communauté des personnes handicapées et dans le secteur public pour changer cette attitude? Avons-nous appris à bien utiliser les stratégies?
En milieu de travail, le principal obstacle tient à deux choses particulières: la transition entre les études et l'emploi, qui s'applique à tout le monde, et le retour au travail. Ces deux plus grands problèmes de transition constituent les obstacles à surmonter pour mieux préparer nos diplômés à soutenir la concurrence sur le marché du travail. Leur offrons-nous des occasions de mentorat ou de stage leur permettant d'utiliser nos diverses options, de même que la technologie du XXIe siècle?
Certains programmes de soutien du revenu et d'aide aux personnes handicapées découragent en fait ces personnes de chercher à progresser dans leur carrière parce que cela peut les priver du soutien dont elles ont besoin. Nous ne pensons pas à l'approche de transition à long terme dans ce cas.
Il manque en outre de mesures d'adaptation en milieu de travail et d'aide aux personnes handicapées qui cherchent un emploi: transports, dispositifs de communication, logement, horaires souples, tâches modifiées et environnement de travail accessible.
Je voudrais présenter aujourd'hui quelques recommandations, mais il y en a davantage que je pourrais mettre en évidence.
Le gouvernement, le milieu des affaires et la communauté des personnes handicapées doivent travailler ensemble en concentrant leurs efforts sur la promotion de résultats d'emploi positifs pour les personnes handicapées. Il est important d'examiner les politiques et les pratiques du secteur public qui ont eu du succès et d'établir si elles sont applicables au secteur privé. Nous n'avons pas à réinventer la roue. Ces politiques et pratiques sont efficaces. Cette question est particulièrement importante en ce moment. Au Canada, on se demande quelle responsabilité les sociétés doivent assumer dans la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées. L'application de la convention relève-t-elle uniquement du gouvernement, de la communauté ou bien doit-elle être une responsabilité conjointe du gouvernement et du secteur privé?
La recommandation suivante consiste à élaborer et à offrir des initiatives de promotion de l'entreprenariat aux personnes handicapées, comme des prêts accessibles, de la formation et du soutien en gestion des affaires et des réseaux d'entrepreneurs handicapés.
Permettez-moi de mentionner un exemple. De 1996 à 1999, notre centre a réalisé une étude en trois étapes sur l'accès des personnes handicapées aux occasions d'affaires. Se basant sur nos conclusions et recommandations, Diversification de l'économie de l'Ouest a lancé un programme de soutien de l'accès des personnes handicapées aux occasions d'affaires doté d'un budget pouvant atteindre 18 millions de dollars. Ce programme existe encore. Il a bien réussi à fournir des moyens de transition des études au travail grâce à des services d'emploi et à des occasions d'acquérir de l'expérience.
Il faut penser aux stages, au mentorat et aux nouvelles occasions qui s'offrent par suite des changements démographiques touchant les secteurs public et privé. Nous avons également songé à collaborer avec les employeurs pour créer des milieux de travail inclusifs dotés des ressources nécessaires. Je reviens au cadre de l'accès, de l'inclusion et de la participation. Nous avons des codes du bâtiment auxquels doivent se conformer les locaux publics. Pourquoi ne s'appliquent-ils pas aux locaux privés?
Que peut faire le gouvernement fédéral? Les services d'emploi relèvent des provinces et des territoires. Toutefois, le gouvernement fédéral peut jouer un rôle en améliorant les résultats d'emploi pour les personnes handicapées, en servant de modèle, en favorisant la collaboration interrégionale et en appuyant les efforts régionaux visant à cerner et à combler les lacunes.
Nous croyons que certaines initiatives particulières pourraient remédier à ces lacunes, comme la création d'un mécanisme systémique d'échange d'information, tenant compte encore une fois des quatre secteurs: la communauté des personnes handicapées, le monde universitaire, les gouvernements et le secteur privé. Par exemple, on pourrait établir un centre qui étudierait les initiatives actuelles et antérieures, les pratiques exemplaires et les politiques partout au Canada, dans les secteurs aussi bien public que privé. On pourrait recueillir, produire et échanger des connaissances concernant les pratiques exemplaires dans le monde. Il serait alors possible de connaître les moyens déjà essayés, ceux qui ont marché, ceux qui ont échoué, et de veiller non seulement à diffuser, mais aussi à utiliser les renseignements recueillis. Nous pourrions faciliter les initiatives interrégionales, étendre les initiatives qui ont réussi dans une province à d'autres et élaborer des stratégies interrégionales d'emploi et de recrutement. Nous pourrions aussi recueillir des données longitudinales établissant un lien entre les stratégies et les pratiques d'emploi prometteuses pour les personnes handicapées et les résultats positifs obtenus.
Je vous remercie.
:
Merci beaucoup, madame la présidente. Vous vous acquittez particulièrement bien de votre rôle aujourd'hui.
Pour situer les choses, j'aimerais vous dire que je m'intéresse à cette étude particulière parce que j'avais un frère, qui était mon cadet d'un an et qui était atteint de paralysie cérébrale. Il est décédé à l'âge de 39 ans. Ma mère était depuis longtemps une militante en faveur des personnes handicapées.
À l'époque où mon frère est entré à l'école ordinaire, les responsables avaient proposé de le placer dans ce qu'on appelait alors la classe des enfants retardés. Je me souviens de la lutte menée par ma mère auprès des directeurs et des conseils scolaires ainsi que de l'évolution de son combat. Mon frère fonctionnait à un niveau très élevé et avait un vaste cercle d'amis. Il avait ouvert un petit magasin grâce auquel il gagnait sa vie. Il possédait une voiture et avait une petite amie, mais il ne s'était pas marié parce qu'il était trop pingre. Il était d'une sagesse qui allait bien au-delà de son âge.
Par conséquent, l'inclusion, l'accès et la participation faisaient partie des discussions quotidiennes que nous avions à la maison. Ma soeur est actuellement directrice d'un atelier. J'ai pu observer l'évolution du point de vue de ma mère sur l'intégration totale du système scolaire. Les opinions exprimées au début ont un peu changé avec le temps. Juste avant son décès, elle n'était plus aussi convaincue qu'auparavant que l'intégration était la bonne solution pour tout le monde. Elle croyait presque qu'il fallait juger au cas par cas.
J'aimerais revenir aux observations de Shelley sur l'expérience des ateliers. Je peux comprendre votre point de vue sur le cloisonnement et l'argument selon lequel une fois qu'on a placé là tous ces gens, on n'a plus besoin de se soucier d'eux. Je sais cependant que certains des ateliers — en particulier, celui que ma soeur dirige — ont obtenu de bons résultats en facilitant la transition et en donnant le soutien nécessaire.
J'ai une seule chose de plus à dire. J'aimerais vous demander de nous parler de ce que peuvent réaliser ces ateliers, auxquels je crois que vous vous opposez énergiquement. Pouvez-vous nous expliquer votre point de vue?
Il y a une autre chose que ma soeur a remarquée dans le cas de certains des étudiants qui quittent l'école publique ordinaire: ils ont tous un aide-enseignant qui s'occupe d'eux et ils ne sont plus endurcis. Ils sont étroitement entourés, de sorte que, d'une certaine façon, ils ouvrent et ferment des portes. Je sais que nos voisins essayaient d'endurcir mon frère. Ses frères et soeurs s'efforçaient aussi de le faire afin de le préparer aux réalités de la vie. Par conséquent, l'atelier faisait… On passe beaucoup de temps à préparer ces gens à faire la transition, mais c'est un grand succès.
Vous trouvez peut-être que je pontifie, mais ce sont plus des réflexions qu'autre chose. Quoi qu'il en soit, pouvez-vous nous donner votre point de vue sur les foyers de groupe?
Je vis dans une petite collectivité rurale proche de Winnipeg. Nous avons un atelier protégé. Nous avons aussi des écoles très inclusives. Les parents viennent me voir lorsque leurs enfants commencent l'école pour me demander ce qu'il convient de faire. Je les mets en garde au sujet des aides-enseignants. Je leur dis que si leur enfant n'a pas besoin d'aide à plein temps, ils ne devraient pas demander une telle aide parce que l'enfant peut devenir très dépendant. Une fois qu'il a fini l'école, il doit affronter un monde inconnu et plein d'embûches. C'est tout à fait vrai.
Nous avons fait du bon travail dans le domaine de l'éducation inclusive, mais je suis bien d'accord avec vous. L'éducation inclusive doit être individualisée et dépendre des besoins de l'enfant. Tout le monde n'a pas sa place en classe. C'est ce que nous pensons actuellement. La classe intégrée ne convient pas à chacun. Il faut agir en fonction des individus.
Nous entendons dire partout dans le pays qu'il est très difficile pour les gens de trouver un emploi intéressant. Cela est particulièrement vrai dans une collectivité rurale. Dans ma petite ville de 3 000 habitants, beaucoup de personnes valides s'en vont parce qu'il n'y a pas d'emplois intéressants.
Quant à notre point de vue sur les ateliers protégés, nous croyons que si des gens sont payés pour faire un travail et que des employés de soutien touchent un salaire réel pour les aider à travailler, ces gens méritent d'être rémunérés. Si une personne travaille tout un mois pour recevoir un chèque de paie de 38 $, je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas parler d'un travail de forçat, car ce n'est rien d'autre. Si un travailleur d'usine reçoit le salaire minimum ou plus pour faire son travail, mais qu'une personne handicapée fasse la même chose pour moins de 1 $ par jour, ce n'est pas juste. C'est à cela que nous nous opposons.
Si des gens vont dans des centres de jour pour acquérir des compétences… Je sais que nous faisions cela au centre où j'ai travaillé. Il y avait des gens qui pouvaient occuper un emploi après une certaine formation spécialisée. Il y avait par exemple un groupe de personnes qui, je crois, pouvaient travailler dans un club vidéo. Certains considéraient qu'ils n'étaient pas aptes à travailler, mais je savais qu'ils pouvaient devenir d'excellents employés à cause de leur attention au détail et de leur capacité de s'acquitter de certaines tâches avec une minutie incroyable.
Comprenez-vous où je veux en venir?
:
Bonjour. Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'adresser au comité.
Nous sommes heureux de voir un comité parlementaire s'intéresser particulièrement aux questions touchant les personnes handicapées, notamment dans le contexte de l'emploi.
Comme nous étions présents pendant la dernière heure, nous essaierons d'aborder certaines des questions qui ont été soulevées. Je suppose que d'autres témoins doivent comparaître. Nous pourrions donc modifier notre exposé.
Notre président, Tony Dolan, de l'Île-du-Prince-Édouard, souhaitait assister à cette réunion, mais il a eu une infection qui l'a empêché de venir. Michael Bach, vice-président à la direction de l'Association canadienne pour l'intégration communautaire, avec qui nous collaborons étroitement, a été retardé. Son vol de 8 heures a été reporté à 10 h 10, et je ne sais même pas s'il a décollé de Toronto à l'heure. Il est donc en route. S'il arrive, nous sommes tout à fait disposés à présenter notre exposé de concert avec lui.
Voici ce que nous attendons et espérons de cette étude.
Nous espérons que chacun comprendra que l'incapacité concerne tout le monde et constitue une question non partisane. Nous espérons donc que vous serez en mesure de produire un rapport consensuel. Nous demandons aux parlementaires de comprendre que l'incapacité est indépendante de l'idéologie politique, de l'âge, du sexe et de la région géographique et qu'une longue tradition s'est établie au sujet des moyens d'avancer progressivement, par consensus, en vue d'améliorer la situation des personnes handicapées. Nous devons trouver ce consensus, non seulement entre la communauté des handicapés et nos représentants élus, mais aussi avec les gouvernements provinciaux, les employeurs, les entreprises, les syndicats, etc. Nous devons trouver un moyen d'avancer en faisant fond sur les réalisations du passé.
J'ai fait circuler une petite brochure, que nous avons produite en français et en anglais, intitulée Célébrons nos réalisations. Elle présente notre point de vue sur ce qui s'est produit dans les 30 dernières années.
Monsieur McColeman, vous vouliez savoir quelles mesures simples et directes il serait possible de prendre. Je m'occupe de ces questions depuis 30 ans ou plus. J'ai commencé comme bénévole en 1969 quand quelqu'un m'a persuadé de me joindre à un petit groupe qui s'efforçait de donner du soutien à de jeunes handicapés qui voulaient participer à des activités physiques. J'ai continué à travailler dans ce domaine depuis cette époque.
Je fais partie du CCD depuis 30 ans. Notre communauté n'est pas simple; elle est en fait très complexe. Nous n'avons pas de solutions magiques, mais nous avançons sans cesse à tout petits pas. Nous avons en permanence besoin d'attention, de soutien et d'innovation. Autrement, nous piétinerons et commencerons à reculer.
Nous avons des organisations qui s'occupent de toutes les incapacités, de toutes les maladies, de chaque partie du corps humain, des thérapies, des traitements et ce, aux niveaux local, provincial et national. Nous sommes une communauté complexe, mais beaucoup des éléments sont isolés les uns des autres. Le CCD s'efforce d'aborder de vastes questions de politique sociale touchant les personnes handicapées, comme la pauvreté, l'emploi, les attentes relatives aux droits de la personne, le transport et l'accès, le développement international, la justice, etc. C'est ce que nous faisons depuis 1976. Je crois que c'est ce que nous avons fait avec succès pour essayer de mettre de l'avant un programme pour les personnes handicapées.
Cela étant dit, notre vision et nos aspirations les plus récentes se retrouvent dans la Convention relative aux droits des personnes handicapées. Nous croyons que ce document, que le Canada a ratifié, établit un cadre qui nous permet d'avancer. Nous avions espéré qu'un plan de mise en oeuvre serait élaboré au niveau fédéral. Je vais donc passer rapidement à quelques-unes des principales recommandations que nous présentons à votre comité.
Nous exhortons le gouvernement du Canada, et particulièrement la ministre Finley, à établir un plan stratégique quinquennal destiné à répondre aux besoins d'emploi des personnes handicapées. Les mesures ponctuelles et les décisions qui n'intéressent qu'une seule collectivité ne nous permettront tout simplement pas d'obtenir les résultats voulus.
Nous souhaitons que le plan soit établi avec la participation de la communauté des personnes handicapées et que le gouvernement établisse un comité consultatif technique chargé de coordonner l'apport de cette communauté à l'élaboration du plan.
Nous comprenons, d'après le rapport du comité d'experts, qu'il faudrait obtenir la participation des employeurs et aussi celle des gouvernements provinciaux. Nous ne réussirons que si nous pouvons faire un effort collectif concerté.
Nous estimons que la première priorité devrait comprendre des mesures en faveur des jeunes personnes handicapées âgées de 18 à 30 ans, qui font la transition entre l'école et le monde du travail. Si nous pouvons faire en sorte que cette transition se passe bien, si nous pouvons aider les gens et les appuyer fermement pour leur permettre d'accéder à la formation et aux mesures d'adaptation dont ils ont besoin pour occuper un emploi, nous éviterons la situation actuelle dans laquelle nous sommes témoins d'une augmentation de 38 p. 100 du nombre de personnes handicapées inscrites à l'aide sociale. Nous n'avons pas une augmentation de 38 p. 100 du nombre de personnes handicapées qui trouvent un emploi. Nous n'avons malheureusement qu'une hausse de 38 p. 100 du nombre de ces personnes qui dépendent de l'aide sociale parce qu'elles n'arrivent pas à trouver du travail.
Nous avons besoin de toute une gamme de services et de mesures de soutien. Voilà où nous pouvons constater la complexité de la situation en considérant les personnes à mobilité réduite, les malvoyants, les malentendants, les sourds, les Autochtones vivant dans les réserves et les femmes handicapées.
La tâche n'est pas simple. C'est pour cette raison que, depuis des années, nous préconisons la création d'un sous-comité chargé d'étudier en permanence la situation des personnes handicapées. Votre comité a des responsabilités à cet égard, et nous sommes heureux d'être ici, mais vous auriez peut-être intérêt à établir un sous-comité qui s'occuperait particulièrement de ces questions, qu'il s'agisse de la réforme des prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada, de l'amélioration du régime enregistré d'épargne-invalidité ou des nouvelles initiatives fédérales-provinciales liées aux ententes relatives au marché du travail. Voilà le genre de choses dont nous avons besoin.
Nous voudrions également vous dire que les systèmes de soutien des personnes handicapées établis dans les années 1970 et 1980 avaient été conçus dans un environnement très différent, pour un marché du travail qui se distinguait très sensiblement de celui que nous avons aujourd'hui.
Nous avons besoin de recherches sur les effets d'un marché du travail beaucoup plus fluide dans lequel les gens parlent de l'insécurité de l'emploi, du temps partiel, des emplois d'une durée déterminée, de l'absence d'avantages sociaux et de contrats de travail à court terme. Quels effets un tel environnement a-t-il sur les personnes handicapées?
Vous avez entendu Shane et Shelley vous parler de couverture médicale. Si on peut bénéficier de soins gratuits quand on est inscrit à l'aide sociale, mais qu'on perde cet avantage en acceptant du travail, quel choix a-t-on vraiment?
Nous croyons que les ententes relatives au marché du travail négociées entre le gouvernement fédéral et les provinces doivent comprendre des objectifs et des mesures précises de responsabilisation dans le cas des personnes handicapées. On ne peut pas compter exclusivement sur les fonds de l'assurance-emploi parce que les membres de notre communauté n'y sont pas admissibles. Comment pouvons-nous nous assurer, dans ces ententes qui cèdent aux gouvernements provinciaux la responsabilité des mesures actives relevant de la compétence fédérale…
Voilà Michael Bach qui se joint à nous. Il va venir s'asseoir à la table et pourra intervenir quand il en aura la possibilité.
Les obstacles actuels à l'accès au marché du travail sont bien connus. Nous demandons à RHDCC de produire un document convivial expliquant ces obstacles et présentant des exemples de réussite.
Je voudrais vous présenter très rapidement quelques autres exemples. Grâce à une subvention du Conseil de recherches en sciences humaines, nous avons réalisé une étude qui révèle une augmentation sensible du nombre de personnes handicapées inscrites à l'aide sociale. C'est exactement le contraire de la situation que nous souhaitons voir, mais cela reflète la réalité.
Quant aux programmes fondés sur les régimes d'assurance — prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada, indemnisation des accidentés du travail, assurance-emploi et autres —, je dois dire en toute franchise que les membres de notre communauté n'y recourent pas beaucoup. Ils s'adressent plutôt à l'aide sociale.
Les personnes handicapées ne restent pas assez longtemps dans la population active pour devenir admissibles à ces programmes. Pourtant, ces programmes, dont beaucoup relèvent de la compétence fédérale, constituent le principal moyen de soutien.
Nous croyons que le gouvernement du Canada doit être un employeur modèle. Si nous ne donnons pas l'exemple sur la Colline et dans nos bureaucraties, nos efforts ne seront pas fructueux.
Nous vous signalons que, d'après les chiffres de 2010, la représentation des personnes handicapées dans la fonction publique est à 5,6 p. 100. Je ne sais pas quels seront les effets des compressions d'effectifs sur ce chiffre. Il serait intéressant de déterminer de quelle façon les compressions se répercuteront sur les personnes handicapées. Seront-elles les dernières engagées et les premières congédiées? Compteront-elles parmi les titulaires des emplois à durée déterminée qui seront abolis?
J'ai une autre chose à vous dire, que vous pouvez aussi trouver dans cette brochure: dans notre pays, les personnes handicapées ont joué et continueront à jouer le rôle de catalyseur du changement dans ce domaine. Le CCD est une association d'encadrement dont font partie le Réseau d'action des femmes handicapées du Canada, Personnes d'abord du Canada, l'Association des sourds du Canada, le Réseau national pour la santé mentale, l'Association canadienne des victimes de la thalidomide et l'Alliance pour l'égalité des personnes aveugles du Canada.
Nous avons également un réseau provincial d'associations s'occupant d'incapacités multiples qui s'étend à tout le pays. Il s'agit non d'organismes de services, mais de groupes de personnes ayant différents handicaps qui ont conjugué leurs efforts afin d'expliquer ce qu'elles attendent de la société pour que celle-ci devienne plus accessible et plus inclusive.
Si ces efforts ne sont pas soutenus, si les voix qui s'élèvent sont réduites au silence d'une façon ou d'une autre, nous devrons croire que le catalyseur qui a donné lieu aux changements des 30 dernières années cessera d'agir.
Nous sommes heureux que le comité ait entrepris cette étude. Nous espérons qu'il produira un rapport consensuel et qu'il nous sera possible d'engager une discussion concernant la responsabilité fédérale, les rôles à jouer, les répercussions et la façon de progresser. Nous espérons aussi que tous les efforts déployés auront pour cadre la Convention relative aux droits des personnes handicapées.
Je vais en rester là en attendant vos questions.
Je cède maintenant la parole à Michael.
:
Merci, madame la présidente et membres du comité. Je vous prie d'excuser mon retard, mais le mauvais temps de ce matin a bouleversé mon horaire et celui des compagnies aériennes.
Je voudrais tout d'abord remercier le comité d'avoir entrepris cette étude. Nous croyons que c'est un premier pas très important, qui a peut-être tardé à venir, car nous avons ressenti l'urgence du problème. Nous sommes heureux de voir le comité assumer un rôle de leadership à cet égard.
Je suis le vice-président à la direction de l'Association canadienne pour l'intégration communautaire, organisation nationale qui représente les personnes ayant une déficience intellectuelle et leurs familles. Nous avons 40 000 membres, 300 associations locales un peu partout dans le pays et 13 associations provinciales et territoriales. Nous travaillons en étroite collaboration avec le Conseil des Canadiens avec déficiences ainsi qu'avec Personnes d'abord du Canada, dont les représentants ont comparu devant le comité plus tôt ce matin.
Je voudrais commencer par dire que l'ACIC appuie pleinement les 10 messages généraux et recommandations du Conseil des Canadiens avec déficiences. Les deux organisations ont étroitement collaboré ces dernières années afin d'élaborer un programme national conjoint d'action en faveur des personnes handicapées. Par conséquent, nous appuyons pleinement ces recommandations.
Permettez-moi de mettre en perspective aujourd'hui les problèmes particuliers des personnes ayant des déficiences intellectuelles.
En gros, le Canada compte quelque 500 000 adultes en âge de travailler qui ont des déficiences intellectuelles. Leur cheminement habituel consiste à s'inscrire à l'aide sociale dès l'âge de 19 ans. C'est ce qui arrive le plus souvent. En général, un tiers des bénéficiaires de l'aide sociale dans les provinces sont des personnes ayant des déficiences intellectuelles. Nous croyons qu'il est temps de mettre fin à ce genre de cheminement.
Compte tenu des problèmes liés à la population active et à la productivité de la main-d'oeuvre au Canada, nous croyons que c'est là une énorme source inexploitée de main-d'oeuvre. Nous avons été heureux de voir les recommandations formulées par le groupe de travail spécial sur les possibilités d'emploi des personnes handicapées dans son rapport Repenser l'inCapacité. Le groupe reconnaît l'existence de ce bassin inexploité. Nous appuyons les orientations générales du rapport. J'y reviendrai dans quelques instants.
Nous avons donc ce groupe de personnes ayant des déficiences intellectuelles. Environ 30 p. 100 d'entre elles font partie de la population active, mais, en grande majorité, ces personnes vivent de l'aide sociale. Pourquoi en est-il ainsi? Nous devons nous attaquer aux multiples obstacles que doivent affronter les personnes handicapées et les personnes ayant des déficiences intellectuelles.
Le premier, c'est le manque d'accès à l'éducation. Près de 50 p. 100 seulement des étudiants ayant des déficiences intellectuelles sont pleinement intégrés. Ils ne font pas d'études postsecondaires, même s'il existe d'excellents exemples de personnes ayant des déficiences intellectuelles, parfois importantes, qui sont inscrites dans des établissements postsecondaires. Ces gens n'atteignent peut-être pas des niveaux universitaires très élevés et ne décrochent pas des diplômes techniques, mais ils accumulent le même capital social que les autres étudiants de niveau postsecondaire. Ils reçoivent une formation et acquièrent des compétences.
Des initiatives de démonstration de l'accès aux études postsecondaires réalisées en Alberta ont révélé — je parle ici non de programmes spéciaux des universités et collèges, mais de programmes pleinement intégrés — que 80 p. 100 des adultes ayant des déficiences intellectuelles obtiennent un emploi rémunéré après avoir quitté l'université ou le collège.
C'est donc réalisable. L'éducation postsecondaire est généralement utile aux gens. Nous savons qu'il y a des problèmes sur le marché du travail, mais cette éducation profite aussi aux personnes ayant des déficiences intellectuelles.
Ces personnes n'ont sûrement pas un accès suffisant aux mesures de soutien dont elles ont besoin, comme l'aide personnelle et certains dispositifs techniques. Je note dans le mandat de l'étude du comité que vous reconnaissez que les services et les mesures de soutien relèvent de la compétence des provinces et des territoires. Nous en sommes parfaitement conscients, mais nous reconnaissons aussi, comme l'a fait le groupe de travail spécial, que les employeurs n'ont pas des partenariats communautaires efficaces pouvant permettre aux personnes handicapées d'entrer sur le marché du travail dans leur propre collectivité. Je crois que c'est l'un des principaux éléments sur lesquels le gouvernement fédéral peut concentrer ses efforts, et je pense qu'il peut le faire.
Le premier résultat stratégique mentionné dans le Rapport sur les plans et les priorités de Ressources humaines et Développement des compétences Canada, c'est « une main-d'oeuvre qualifiée, inclusive et capable de s'adapter » et « un marché du travail efficace ». Nous félicitons le gouvernement d'avoir déclaré que c'est là le premier résultat stratégique qu'il veut obtenir. Nous y croyons et nous prenons très au sérieux le qualificatif « inclusive » qui s'y trouve. Le gouvernement fédéral dit par conséquent que c'est l'un de nos objectifs les plus importants. Les stratégies élaborées par le Conseil des Canadiens avec déficiences ainsi que les recommandations que nous formulons dans notre mémoire peuvent nous mener assez loin le long de cette voie.
Pour créer une main-d'oeuvre ouverte aux personnes handicapées, il faut commencer à l'échelle communautaire. Nous devons disposer à ce niveau de moyens suffisants pour surmonter les obstacles à l'éducation scolaire et à la formation postsecondaire, pour assurer aux gens le soutien individualisé dont ils ont besoin, pour mettre à leur disposition des moyens de transport efficaces et pour établir des liens entre les employeurs et les personnes handicapées. Des capacités communautaires suffisantes sont nécessaires pour que tout cela fonctionne.
Le problème est que nous avons, au niveau communautaire, un système essentiellement désuet de prestation de services aux personnes ayant des déficiences intellectuelles ou autres. D'une part, la prestation des services du marché du travail a pris une allure générique dépourvue de la spécialisation et des compétences nécessaires pour répondre aux besoins très particuliers des personnes handicapées, pour les renvoyer aux organismes compétents, leur fournir les mesures de soutien voulues et les mettre en contact avec les personnes compétentes.
D'autre part, nous avons un système désigné de services d'emploi aux personnes handicapées qui est en grande partie dépassé. Dans le cas des personnes ayant des déficiences intellectuelles, les services se limitent essentiellement aux programmes de jour et aux ateliers protégés, malgré les grands efforts déployés par certains pour s'écarter de ce système vraiment démodé. D'une façon générale, le système offre aux gens inscrits à l'aide sociale un endroit où aller pour assembler les éléments en plastique des écouteurs ou s'acquitter de tâches semblables en contrepartie d'un ou deux dollars par jour. Nous ne croyons pas que ce soit le bon cheminement pour les personnes ayant des déficiences intellectuelles. Nous pensons qu'il faut changer la situation. Il faudra pour cela que le gouvernement fédéral réfléchisse vraiment aux exigences dont sont assortis ses outils d'investissement destinés à assurer l'intégration des personnes handicapées dans la population active. Cela réside dans les ententes relatives au marché du travail visant les personnes handicapées.
À notre avis — et cela s'applique à toutes les déficiences —, le gouvernement du Canada devrait agir d'une manière plus proactive dans la négociation de ces ententes. À l'heure actuelle, les 22 millions de dollars consacrés aux ententes sur le marché du travail visant les personnes handicapées servent pour la plus grande part à financer ce système désuet de prestation de services, qui n'a pas les effets qu'il devrait avoir. Le gouvernement fédéral n'en a pas pour son argent, même s'il a fait d'une main-d'oeuvre inclusive le premier résultat stratégique qu'il souhaite atteindre. Nous n'aurons pas une main-d'oeuvre inclusive au Canada à moins que le gouvernement fédéral ne se montre plus proactif dans l'utilisation de ses fonds. Nous engageons donc le gouvernement du Canada à faire vraiment preuve de leadership dans les prochaines négociations sur le renouvellement des ententes relatives au marché du travail.
Ces ententes permettent de transférer des fonds aux provinces et aux territoires afin de répondre aux besoins de ceux qui sont défavorisés sur le marché du travail. Ces fonds sont surtout consacrés à un système générique qui n'a ni les capacités ni les compétences voulues pour servir adéquatement les personnes ayant des déficiences intellectuelles ou autres. C'est pour cette raison que nous appuyons énergiquement la première recommandation du Conseil des Canadiens avec déficiences, qui préconise d'établir un plan stratégique quinquennal, de créer un comité consultatif technique et de trouver les moyens d'agir dans ce domaine. En toute franchise, je dirai qu'en son moment, nous estimons que le gouvernement fédéral gaspille son argent, qui n'a pas les effets qu'il devrait avoir. Nous voulons contribuer à la solution du problème car nous souhaitons que l'investissement fédéral produise un marché du travail inclusif et efficace au Canada.
Nous présentons un certain nombre de recommandations dans notre mémoire. Dans l'ensemble, nous recommandons que les moyens et les investissements stratégiques du gouvernement du Canada se fondent sur ce que nous appelons une politique cadre visant l'emploi d'abord. L'emploi doit être la première option, l'option privilégiée pour les personnes handicapées. Les 500 000 personnes handicapées du pays peuvent profiter d'une série plus proactive d'interventions, même celles qui ont des déficiences graves et qui vivent de l'aide sociale. Notre mémoire présente plusieurs recommandations précises. Nous aurons peut-être l'occasion d'y revenir plus tard.
Je vous remercie.
:
Certainement. Je préfère moi aussi considérer qu'un verre est à demi plein. On peut trouver de bons exemples de réussite un peu partout dans le pays. Nous avons examiné de très près cet aspect au cours des 18 derniers mois pour déterminer les principaux facteurs qui ont joué et définir de nouvelles interventions.
Pour prendre un exemple très pratique, je parlerai des clubs Rotary du Canada. Il y a une initiative en cours en Ontario, au Nouveau-Brunswick et en Alberta. Cela correspond bien à l'approche exposée dans le rapport Repenser l'inCapacité du groupe spécial sur le marché du travail. Les employeurs assument eux-mêmes des rôles de leadership qui inspirent leurs homologues et montrent comment il est possible d'engager une personne handicapée. Les réseaux d'employeurs peuvent réaliser des programmes efficaces quand ils ont un partenaire dans la communauté parce qu'ils ont besoin d'information de la part de quelqu'un de fiable pouvant les mettre en contact avec des personnes locales ayant une déficience intellectuelle ou autre qui cherchent du travail. De plus, ces personnes peuvent avoir besoin d'un moniteur ou d'un collègue pouvant leur donner de la formation.
La première chose qu'il nous faut, ce sont des employeurs pouvant faire preuve de leadership et de confiance et qui soient conscients de la situation. Comme l'a très clairement établi le rapport du groupe spécial, il y a au Canada des employeurs désireux de participer. Je crois que les réseaux d'employeurs, établis par l'entremise des chambres de commerce, des clubs Rotary et d'autres clubs de services, sont des exemples de pratiques efficaces quand ils investissent vraiment dans leur leadership.
Je peux citer un autre exemple du même genre. Il ne s'agit pas dans ce cas d'un réseau d'employeurs. Nous avons trouvé d'excellents exemples chez Tim Hortons. Mark Wafer, qui faisait partie du groupe spécial sur le marché du travail, a montré un leadership très réel. C'est un peu comme l'éducation inclusive, qui constitue une autre de nos quatre grandes priorités. Celles-ci sont évidemment interdépendantes. Nous ne pouvons pas tout faire dans le cadre d'une approche descendante. Nous avons besoin de chefs sur le terrain. Dans le domaine de l'éducation, il nous faut des directeurs d'écoles et des enseignants inspirés capables de voir les choses autrement. Il en est de même pour les employeurs. Le problème, dans leur cas, comme l'a signalé le groupe spécial, c'est qu'une fois qu'ils ont décidé d'agir, ils ne savent pas où obtenir de l'information. Ils ne peuvent pas compter sur des mesures permanentes de soutien et d'investissement. Je crois que cet aspect est vraiment essentiel.
Il y a un autre aspect extrêmement important sur le plan des pratiques exemplaires: les jeunes. Vous noterez que, parmi les priorités du CCD, les jeunes de 18 à 25 ans figurent en bonne place. La recherche montre que, pour des gens ayant des déficiences intellectuelles, même assez importantes, le premier facteur qui influe sur l'emploi et qui fait que ces gens ont un travail deux ans après avoir quitté l'école secondaire, c'est le fait d'avoir eu un emploi pendant qu'ils fréquentaient l'école. C'est le tout premier facteur. Il en est de même des gens qui ont un accident du travail. Plus longtemps ils sont restés sans emploi, plus il est difficile pour eux de recommencer à travailler.
Ceux d'entre nous qui ont des enfants valides ne supposent jamais qu'ils s'inscriront à l'aide sociale à 19 ans. Pourquoi avons-nous donc amené les parents d'enfants handicapés à penser ainsi au Canada? Nous avons besoin d'enseignants, de directeurs d'écoles, d'employeurs disposés à aider des jeunes à alterner entre les études et le travail et à occuper un emploi pendant l'été. Nous avons d'excellents exemples basés sur le recours au Programme canadien d'emploi d'été pour aider les jeunes ayant des déficiences intellectuelles à obtenir des emplois à temps partiel.
Je vais m'arrêter là pour laisser mon collègue Laurie continuer.