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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 070 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 5 mars 2013

[Enregistrement électronique]

(1105)

[Traduction]

    La séance est ouverte. Bonjour à tous.
    Avant de commencer, j'aimerais souligner aux membres du comité que le cahier d'information qui nous a été remis au début de la présente étude contient une description des études précédentes sur l'emploi des personnes ayant une incapacité, ainsi que des liens vers ces études et leurs principales recommandations, si jamais vous désirez les consulter.
    Je vous informe également que les analystes ont dressé une liste de recommandations tirées du dernier rapport du comité sur l'employabilité qui proposait 10 recommandations. Cette liste a été envoyée aux derniers témoins de RHDCC afin qu'ils puissent faire rapport au comité sur le suivi de ces recommandations.
    N'oubliez pas que des liens vers les études précédentes sont fournis dans le cahier d'information qui nous a été remis au début de la présente étude.
    Cela dit, accueillons nos témoins: James Roots, président, Association des sourds du Canada; Paul Cudmore, directeur exécutif, Association canadienne des paraplégiques; et Robert White, directeur exécutif, Blessure médullaire Canada.
    Merci, messieurs, d'avoir accepté notre invitation. Nous permettrons à chacun de vous — enfin, peut-être pas à chacun de vous, car je crois que deux ou trois d'entre vous avez une présentation à faire — de présenter son exposé, après quoi nous passerons aux questions des membres de chacun des partis représentés au comité.
    Monsieur Cudmore, nous allons commencer par vous. Vous avez la parole.
    Je tiens d'abord à vous remercier de nous avoir invités aujourd'hui. Nous sommes enchantés de cette occasion qui nous est offerte.
    Nous vous avons transmis notre document sur le tard et n'avons pas eu le temps de le faire traduire. La version traduite vous sera envoyée à une date ultérieure. Pour le moment, nous n'avons que la version anglaise. Nous en sommes désolés. C'est probablement ma faute — j'ai mis du temps à faire l'édition du texte.
    Commençons. Nous représentons Blessure médullaire Canada, connue anciennement comme l'Association canadienne des paraplégiques. Nous travaillons à modifier le nom à l'échelle du pays. Nous sommes encore connus comme l'Association canadienne des paraplégiques de l'Île-du-Prince-Édouard, mais le nom changera dès septembre. Le processus est un peu long, c'est tout.
    Nous sommes enchantés de pouvoir faire une présentation au Comité HUMA de la Chambre des communes sur les possibilités d'emplois pour les personnes ayant une incapacité.
    Nous sommes heureux de voir que le comité consacre du temps et de l'énergie à ce dossier très important et que ce dossier est considéré comme une priorité pour l'avenir.
    Nous désirons informer le comité que nous soutenons tous les éléments de la présentation qu'a livrée le 28 février dernier le Conseil des Canadiens avec déficiences. Selon nous, le gouvernement du Canada devrait mettre sur pied un plan stratégique quinquennal pour examiner les besoins en matière d'emploi des personnes ayant une incapacité. Blessure médullaire Canada sera heureuse de participer à tout comité consultatif technique qui pourrait être formé en vertu de ce plan et d'y représenter la collectivité, à la suggestion du CCD, afin d'avoir une représentation pancanadienne.
    Nous désirons aussi insister sur les cinq points soulignés par le Conseil des Canadiens avec déficiences dans son message au sujet des ententes fédéral-provinciales sur le marché du travail pour les personnes ayant une incapacité. Le gouvernement fédéral, en collaboration avec les gouvernements provinciaux, doit mettre l'accent sur des cibles de programme et faire en sorte que nous avons les ressources nécessaires pour assurer la prestation des programmes aux personnes ayant une incapacité.
    La mauvaise nouvelle, c'est que le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador a annoncé qu'il allait réduire de 900 000 $ le financement accordé à Blessure médullaire Canada. Cette décision entraînera la perte de 23 emplois à temps plein et touchera plus de 2 600 personnes. C'est triste et ironique à la fois, étant donné le sujet de la présente étude.
    Aujourd'hui, nous allons nous concentrer davantage sur l'approche opérationnelle. J'aimerais vous montrer que les choses peuvent bien fonctionner. À l'Île-du-Prince-Édouard, nous avons créé un programme intitulé Discovering the Power in Me. Ce programme aide les personnes ayant une incapacité à réintégrer le marché du travail. Nous avons soumis ce projet à RHDCC, en décembre dernier, dans le cadre de l'appel d'intérêt lancé par le ministère pour les obligations à impact social. Ce programme pilote a vu le jour en janvier dernier et a été réalisé en collaboration avec le Conseil des Canadiens avec déficiences de l'Île-du-Prince-Édouard. Le programme a été très réussi. Il y avait 10 participants. Au début, 8 des 10 participants ont trouvé un emploi. Aujourd'hui, quatre travaillent toujours, mais quatre autres ont décidé d'améliorer leurs compétences. Ils ont entrepris des études postsecondaires.
    J'aimerais vous fournir un peu plus de détails sur le fonctionnement du programme. Comme vous le savez — en raison de l'excellent rapport publié sur le sujet —, les personnes ayant une incapacité sont confrontées à de nombreux défis et obstacles alors qu'elles tentent de s'intégrer à la société et de se trouver un emploi. Le programme Discovering the Power in Me a été créé en collaboration avec l'Association canadienne des paraplégiques et le Pacific Institute. Il s'appuie sur des décennies de recherche sur la psychologie cognitive et la théorie de l'apprentissage social. Le programme s'adresse aux personnes ayant une incapacité qui sont confrontées à des obstacles considérables dans leur cheminement vers l'indépendance, l'autodéveloppement, l'emploi et l'intégration au sein de la collectivité.
    Le programme a été conçu pour aider les gens à comprendre, dans le cadre d'un processus structuré, comment l'esprit fonctionne et comment contrôler leur façon de penser pour avoir du succès dans toutes les facettes de leur vie. Pour ceux ayant subi des blessures traumatiques, ainsi que pour leurs parents, amis et soignants, il est plus important que jamais de canaliser la puissance de l'esprit et de se concentrer à mener une vie gratifiante et productive.
    Selon une étude nationale majeure sur la participation à l'emploi menée en 1997 par Blessure médullaire Canada, auparavant l'Association canadienne des paraplégiques, seulement 38 p. 100 des personnes ayant subis un traumatisme médullaire ont un emploi. L'organisme joue un rôle essentiel en fournissant à ces personnes et à d'autres ayant une déficience physique des renseignements grâce à nos pratiques exemplaires, comme un soutien en matière d'éducation et des présentations opportunes de candidats à l'emploi.
    Bien que 60 p. 100 des personnes récemment blessées réintègrent le marché du travail — ils avaient probablement un emploi avant de se blesser et ont repris leur emploi —, 40 p. 100 éprouvent de sérieuses difficultés à ce chapitre. C'est à ce moment que nos pratiques exemplaires peuvent les aider.
(1110)
    Beaucoup travaillent moins de 20 heures par semaine et cherchent activement un emploi à temps plein ou sont incapables de se trouver un emploi à temps plein et tentent activement d'améliorer leur employabilité ou ont reçu un avis de mise à pied ou doivent quitter leur emploi pour des raisons médicales.
    Les objectifs du programme Discovering the Power in Me sont: encourager le développement global des compétences des personnes ayant une incapacité pour leur permettre d'acquérir et de développer les compétences de vie nécessaires afin qu'elles soient mieux outillées pour atteindre leurs objectifs de carrière; développer les compétences de vie et les compétences améliorant l'employabilité des personnes ayant une incapacité pour qu'elles puissent accélérer leur développement personnel et leur indépendance, participer et acquérir des compétences améliorant l'employabilité dans un contexte sécuritaire favorisant l'apprentissage positif afin de les aider à bâtir leur confiance en soi avant d'intégrer le marché du travail, un aspect très important; et permettre aux personnes ayant une incapacité d'explorer et de développer les compétences nécessaires pour la carrière qui les intéresse grâce au volet exploration de carrière du programme.
    À la fin du programme, soit les participants trouvent un emploi, soit ils amorcent le processus visant à rehausser leurs compétences grâce à l'éducation afin de se préparer à une nouvelle carrière dont ils peuvent être ravis. Les résultats sont faciles à mesurer.
    Dans le cadre de ce projet, nous avons remarqué que ceux qui se trouvaient un emploi étaient insatisfaits de leur revenu. Ils convenaient qu'ils devaient accroître leurs compétences. C'est la raison pour laquelle quatre des participants ont quitté leur emploi pour entreprendre des études postsecondaires. Selon eux, ils pourront ensuite reprendre leur emploi en raison de tout le soutien qu'ils y avaient.
    Blessure médullaire dispose d'un permis de deux ans renouvelable pour la prestation du programme Discovering the Power in Me et huit provinces ont reçu la formation nécessaire pour assurer la prestation du programme. Le principal objectif du programme est d'accroître les possibilités d'emploi des personnes ayant une incapacité en les aidant à réaliser qu'elles ont une source de contrôle interne et qu'elles ne sont pas limitées par leur contexte externe. Ainsi, elles comprennent que c'est à elles de franchir les obstacles de la vie et qu'elles ne peuvent pas laisser le contexte... Lorsque les gens leur disent qu'elles ne peuvent pas aller à un tel endroit ou que certains endroits ne leur sont pas accessibles, il leur revient de franchir ces obstacles. Elles contrôlent leur propre vie.
    Nous travaillons également avec d'autres organisations provinciales pour les personnes ayant des incapacités, comme celles qui ont un programme établi de services à l'emploi. À l'Île-du-Prince-Édouard, nous avons collaboré avec le Conseil des Canadiens avec déficiences de l'Île-du-Prince-Édouard qui possède 28 ans d'expérience dans le service à l'emploi; nous nous sommes concentrés sur le volet Discovering the Power in Me, et le conseil sur le volet compétences de vie. Ensemble, nous avons créé un programme de 13 semaines à l'intention des personnes ayant une incapacité. Nous leur trouvons aussi un emploi pour 13 semaines.
    En terminant, Blessure médullaire Canada tient à remercier le comité pour cette occasion. Nous croyons que notre initiative s'aligne sur la position du gouvernement fédéral qui cherche à améliorer la vie des Canadiens ayant une incapacité.
    Nous avons retenu les services d'un animateur et d'un coordonnateur pour mettre en oeuvre ce programme. Ils ont tous les deux reçu une formation de 13 semaines. Je suis moi-même animateur pour le volet Discovering the Power in Me qui dure une semaine. C'est un élément qui a toujours manqué aux programmes de développement des compétences de vie, car les gens ne comprenaient pas comment fonctionne le cerveau ou ce qui les empêchait de réussir.
    On leur a appris comment les gens qui réussissent, les Rick Hansens de ce monde ou tous ceux ici présents, entrevoient leur avenir et comment se fixer des objectifs. À notre avis, c'est ce qui manque le plus aux personnes ayant une incapacité. Elles ignorent comment se fixer des objectifs, comment bien réfléchir. Leur voix interne leur dit toujours qu'elles ne peuvent pas, alors que le programme leur enseigne à entraîner leur voix interne pour qu'elle dise: « Tu peux le faire, et voici comment tu vas le faire. » Elles fixent ensuite leurs objectifs, et elles apprennent comment canaliser leurs énergies afin de les atteindre et comment procéder étape par étape. Il n'est pas nécessaire de connaître toutes les étapes lorsqu'on fixe ses objectifs, mais le fait de se fixer des objectifs nous donne l'énergie pour passer à la prochaine étape. C'est ainsi que le programme fonctionne.
(1115)
    Merci beaucoup, monsieur Cudmore, pour cet exposé et ces explications.
    Membres du comité, j'aimerais vous rappeler de ralentir un peu votre débit lorsque vous poserez vos questions afin de permettre aux interprètes gestuels de bien faire leur travail.
    Cela dit, monsieur Roots, vous pouvez nous présenter votre exposé.
    Je vais tenter d'utiliser ma propre voix. Si vous ne m'entendez pas, bienvenue dans mon univers.
    Je remercie le comité pour cette occasion qui m'est offerte de vous parler des personnes ayant une incapacité et de leurs perspectives d'emploi.
    Je suis le directeur administratif de l'Association des sourds du Canada. Fondée en 1940, l'association est la plus vieille organisation nationale au pays pour personne ayant une incapacité.
    Je tiens à insister sur le fait que nous sommes l'Association des sourds du Canada, et non l'Association pour les sourds. Nous sommes les sourds au Canada. Nous savons mieux que quiconque ce que c'est que d'être sourd et d'être confronté aux obstacles particuliers à l'emploi que seules les personnes profondément sourdes et qui utilisent le langage gestuel doivent affronter.
    Réfléchissez un instant à quel point vous utiliser votre ouïe pour faire votre travail. Comment pourriez-vous faire votre travail à la Chambre des communes si vous ne pouviez pas entendre?
    Aux employés du comité ou du gouvernement, pourriez-vous faire votre travail si vous perdiez l'ouïe?
    Aux membres des médias ou du public qui écoutent cette séance, que feriez-vous si vous étiez sourds?
    Si vous perdiez l'ouïe du jour au lendemain, vous pourriez vous débrouiller en lisant et en prenant des notes, puisque vous avez déjà appris l'anglais ou le français. On apprend une langue parlée grâce à l'ouïe.
    Et si vous ne l'avez jamais entendue? Qu'arrive-t-il si vous êtes né sourd ou si vous avez perdu l'ouïe en bas âge, avant d'avoir appris à lire et à récrire?
    Selon nos recherches, jusqu'à 65 p. 100 des sourds peuvent être considérés comme étant illettrés. Ce n'est pas en raison d'un manque d'intelligence. C'est parce qu'ils tentent d'apprendre une langue qu'ils ne peuvent pas entendre.
    Malheureusement, depuis un siècle au Canada, on tente d'enseigner aux sourds à « entendre » et à parler au lieu de leur enseigner des matières pratiques dans la seule langue qu'ils maîtrisent facilement: le langage gestuel.
    Doit-on se surprendre si moins de 5 p. 100 des sourds au Canada font des études postsecondaires ou que jusqu'à 91 p. 100 d'entre eux ne terminent pas leurs études secondaires?
    Quelles sont les perspectives d'emplois pour ces gens?
    En 1989, l'Association des sourds du Canada a mené un sondage informel auprès de membres d'organismes, d'éducateurs et de dirigeants communautaires. Selon ces personnes compétentes, le taux combiné de chômage et de sous-emploi chez les sourds au Canada s'élevait à environ 80 p. 100.
    Dix ans plus tard, en 1998, nous avons procédé à ce qui demeure la seule collecte de données crédible sur les sourds jamais réalisée au pays. Les résultats montrent que rien n'a changé. Le taux était toujours de 80 p. 100.
    Regardons ce résultat d'un autre angle. Cela signifie que seulement 20 p. 100 des sourds au Canada travaillent à temps plein.
     Imaginez si vous deviez annoncer au Parlement, à la presse et aux citoyens que seuls 20 p. 100 de tous les Canadiens travaillent à temps plein. Comme je l'ai dit, l'enquête a été réalisée il y a 15 ans. Depuis, personne n'a effectué de suivi crédible. Nous avons plusieurs fois réclamé des fonds à cette fin, mais aucun gouvernement ne veut investir pour apprendre que 80 p. 100 d'une population ne travaille pas depuis 35 ans. Au fait, la dernière fois que la Commission de la fonction publique a accepté de nous divulguer ses données, les sourds représentaient 0,01 p. 100 de la fonction publique fédérale.
    Je ne veux pas insinuer qu'il existe une hiérarchie entre les handicaps, mais tant au public qu'au privé, les employeurs hésitent beaucoup moins à embaucher une personne ayant toute autre forme d'incapacité que la surdité. La raison est simple: ils savent qu'ils pourront communiquer avec elle, lui parler. Il est facile de faire comme si l'incapacité n'existe pas tant que la discussion est possible.
    Mais quelle est la toute première chose à laquelle songe un employeur qui reçoit la candidature d'une personne sourde? Il se dit: « Comment vais-je communiquer avec elle? » Viennent ensuite les réflexions sur la sécurité: « Comment saura-t-elle qu'il y a un incendie si elle n'entend pas l'alarme? », puis sur les coûts: « Mon Dieu, nous allons devoir dépenser des milliers de dollars en interprétation et en alarmes visuelles pour un seul employé! »
    En fait, tout se résume à supposer que l'embauche d'une personne sourde est un embarras. Il est très désolant de constater que des barrières systémiques et comportementales subsistent encore partout au Canada. Et même le fait qu'il existe des solutions assez raisonnables à chacune d'entre elles ne semble pas avoir d'importance: les employeurs présument que nous sommes un embarras sans se donner ni le temps ni la peine de vérifier.
    Quelles sont les solutions? Nos chercheurs ont découvert un fait intéressant: la majeure partie des sourds qui ont un emploi travaillent à leur compte et offrent des services dans le milieu des malentendants, et pas à l'ensemble de la population, sauf les enseignants de cours de langage des signes à l'intention de personnes sans problème d'audition. Autrement dit, le seul milieu où les sourds se trouvent du travail est le leur; ils ne se font pas embaucher dans le monde extérieur.
    À l'arrivée du nouveau millénaire, c'est dans cette optique que l'Association des Sourds du Canada a négocié avec le gouvernement afin de mettre en oeuvre une série de projets dans le cadre de sa stratégie nationale d'emploi pour les sourds. Avec moins de 600 000 $ sur une période de cinq ans, nous avons réussi à créer plus de 150 emplois et processus de formation tout à fait nouveaux destinés à des personnes sourdes. Il en coûte 4 000 $ par emploi.
    En voulez-vous pour votre argent? Chacune de ces 150 personnes sans exception travaille encore, à son compte ou non, car nous leur avons donné exactement ce dont elles avaient besoin pour réussir. Nous savions comment faire puisque nous-mêmes sommes sourds.
    Or, tous les programmes de financement fédéraux grâce auxquels nous avons pu créer ces nouveaux emplois durables ont disparu et n'ont pas été remplacés. Apparemment, les fonds ont été relégués aux provinces et aux municipalités, qui n'ont rien fait.
    Il faut s'attaquer de front à la crise de l'emploi qui touche les sourds. Il faut surtout laisser les sourds concevoir et gérer eux-mêmes les programmes et ressources. Je sais que le parti fédéral actuellement au pouvoir s'oppose à l'idée de financer un organisme national qui s'ingérerait dans les affaires de compétence provinciale comme l'emploi et la formation, mais à l'image de la gouvernance du pays, il faut qu'un pouvoir central de confiance reçoive l'argent et le distribue aux organisations provinciales affiliées afin de créer des possibilités d'emploi et de formation à l'échelle locale.
    C'est exactement la structure de l'Association des Sourds du Canada, grâce à laquelle nous avons réussi à créer ces nouveaux emplois de façon efficace et rentable dans le cadre de notre stratégie nationale d'emploi pour les sourds.
(1125)
    Le Web pourrait offrir les meilleurs débouchés qui soient aux travailleurs autonomes sourds. Il n'y a jamais eu un outil qui permette si bien aux sourds de travailler à l'extérieur de leur milieu, que ce soit pour un employeur ou à leur compte. C'est le moyen idéal d'éviter les barrières systémiques en milieu de travail, les attitudes et les gestes discriminatoires et la tyrannie de la téléphonie classique.
    Nous avons besoin de votre aide pour maximiser les habiletés des Canadiens sourds et les ressources qui s'offrent à eux, et qui leur permettraient de devenir cyberentrepreneurs, télétravailleurs, employés à distance et travailleurs virtuels mobiles. Aidez-nous à nous servir de la vidéo en ligne pour offrir de la formation et de l'éducation aux Canadiens sourds dans le langage des signes, leur langue naturelle.
    Nous avons déjà démontré qu'une stratégie nationale pour l'emploi des sourds peut donner des résultats bien plus concluants si elle est orchestrée par des sourds que toute autre initiative jamais prise par le gouvernement ou le secteur privé, que ce soit avant ou depuis. Nous vous demandons instamment de reconnaître cette vérité et de recommander le financement d'une nouvelle stratégie nationale d'emploi des sourds.
    Sinon, préféreriez-vous que nous retournions dire aux sourds que le gouvernement ne trouve pas qu'un taux de chômage ou de sous-emploi de 80 p. 100 soit si grave?
    Merci.
    Je vous remercie de votre exposé. Merci de nous avoir divulgué ces statistiques plutôt sombres et fait part du besoin que le gouvernement s'attaque de front à la crise de l'emploi qui touche les sourds. Le Web est un outil intéressant; nous le comprenons bien, comme tout ce que vous avez dit.
    Je vais maintenant laisser la parole cinq minutes à Mme Perreault.
    Allez-y.

[Français]

    Ma question s'adresse à M. Roots.
     J'ai lu dernièrement que 5,6 % des employés de la fonction étaient des personnes handicapées. Or, comme on le sait, les effectifs de la fonction publique font présentement l'objet d'une réduction. Comme la majorité des personnes handicapées sont employées à contrat, la représentativité de ces personnes risque d'être diminuée encore davantage. En outre, 0,1 % de la fonction publique est composée de personnes sourdes.
    On dit que le gouvernement devrait donner l'exemple au secteur privé, mais dans ces circonstances, comment peut-on envisager des améliorations à sa politique d'équité en matière d'emploi?

[Traduction]

    Il doit organiser une campagne de recrutement ciblée, peut-être par l'entremise d'organismes de service qui s'adressent directement à nous. Sinon, le gouvernement peut toujours avoir recours à l'Association des Sourds du Canada, puisque nous sommes l'organisation fédérale. Il n'existe aucun organisme de service national pour les sourds; ils sont tous provinciaux. Pour notre part, nous nous occupons de la recherche, de l'information et de l'action communautaire, mais pas des services directs. Mais nous pourrions faire une exception dans un cas semblable.
    Quoi qu'il en soit, il faut cibler les efforts.

[Français]

    On a dit plus tôt que les données étaient cruciales pour comprendre des situations plus complexes concernant l'employabilité des personnes handicapées. Par contre, l'Enquête sur la participation et les limitations d'activités de Statistique Canada a été supprimée en 2010 et a été remplacée par une banque de données comportant des renseignements concernant la fiscalité, l'aide sociale, etc. Cette nouvelle méthodologie aura un effet sur l'échantillonnage.
     Étant donné l'abolition du formulaire long du recensement, croyez-vous que les nouvelles enquêtes seront de moins en moins fiables?
(1130)

[Traduction]

    À nos yeux, elles n'ont jamais été fiables. Lorsque je suis arrivé à l'Association des Sourds du Canada en 1986, c'est à Statistique Canada que j'ai livré ma toute première bataille au sujet du recensement sur la santé de l'époque, à savoir l'Enquête sur la santé et les limitations d'activité. C'était le premier recensement qui portait sur l'incapacité.
    Veuillez m'excuser, car je commence à perdre la voix.
    Le questionnaire du recensement posait problème — le formulaire d'impôt aussi, au sujet du crédit d'impôt pour personnes handicapées. Le problème, c'est que le libellé ne correspond pas à la réalité des personnes sourdes. Par exemple, ma question favorite du long formulaire de recensement ressemblait à ceci: « Avez-vous une incapacité, ou quelque chose qui limite vos activités? »
    En fait, les personnes sourdes ne considèrent pas être frappés d'une incapacité, et estiment plutôt appartenir à une minorité linguistique et culturelle. En effet, nous avons un langage et une culture qui nous sont propres, qui sont différents et distincts, et qui sont reconnus par l'ONU et l'association linguistique... J'ai oublié le nom complet de l'organisme.
    Nous n'appartenons à aucune catégorie de handicaps, mais sommes plutôt un groupe minoritaire distinct. Lorsque les sourds se font demander s'ils ont une incapacité, ils répondent par la négative et ne sont pas comptabilisés. Vous n'avez donc pas une idée juste du nombre de sourds.
    Quoi qu'il en soit, le long formulaire de recensement a disparu depuis, mais je me bats encore avec Statistique Canada sur la terminologie à employer. J'ai déposé une plainte contre l'organisme relativement aux droits de la personne qui a été réglée un mois avant l'abolition du long formulaire. La résolution était axée sur le formulaire, qui devait être plus accessible aux personnes sourdes et plus compatible avec leur réalité. Dès que nous nous sommes entendus, le long formulaire a disparu. L'entente ne vaut donc plus rien. Je ne m'attends pas à ce qu'on puisse obtenir des données raisonnables à partir d'une autre enquête sur les ménages, de données fiscales ou de quoi que ce soit d'autre.
    C'est d'ailleurs parce que nous avons recueilli nous-mêmes les données sur les personnes sourdes que j'affirme qu'elles sont les seules qui soient crédibles. Ce sont des personnes sourdes qui ont posé les questions à d'autres sourds. Personne ne l'avait jamais fait auparavant, et personne n'a recommencé depuis.
    Je vous remercie de votre intervention, monsieur Roots.
    Madame Perreault, votre temps est écoulé.
    Le prochain intervenant est M. McColeman.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie de vous être déplacés à Ottawa aujourd'hui pour défendre ardemment les groupes que vous représentez.
    Les deux témoins nous ont fourni des statistiques aujourd'hui. Savez-vous combien de personnes représentent vos organisations respectives, qu'il s'agisse du large éventail de personnes souffrant d'un traumatisme de la moelle épinière ou des personnes atteintes d'une incapacité auditive? Veuillez m'excuser si vous l'avez déjà dit.
    Me demandez-vous combien de Canadiens souffrent d'un traumatisme de la moelle épinière?
    Oui.
    Il y a 80 000 personnes dans cette situation, je crois — ou plutôt 86 000 personnes...
    Bien, 86 000 personnes...
    ... et 4 300 nouveaux traumatismes par année.
    Bien.
    Monsieur Roots.
    Nous n'avons aucune statistique crédible; veuillez m'excuser si je me répète. Habituellement, nous estimons être dix fois moins nombreux qu'aux États-Unis. Selon cette règle empirique, il y aurait au Canada 350 000 personnes atteintes d'une surdité profonde ayant recours au langage gestuel, et 2,95 millions de malentendants de plus qui ne s'en servent pas. Ces derniers sont généralement regroupés avec nous même s'ils sont frappés d'une incapacité, contrairement à nous. Nous sommes un groupe minoritaire, alors qu'eux appartiennent à une catégorie de handicap. Comprenez-vous?
(1135)
    Merci.
    Puisque vous évoluez dans le milieu depuis un moment, j'aimerais savoir si vous avez réussi à former des partenariats. M. Roots en a décrit un avec le gouvernement. Au fil des ans, avez-vous noué d'autres partenariats — avec des organismes non gouvernementaux — pour accomplir ce que vous voulez pour vos groupes respectifs?
    Habituellement, si l'on s'associe avec un autre organisme sans but lucratif...
    Nous travaillons avec ParaSport. À l'Île-du-Prince-Édouard, nous organisons des activités comme de la voile pour personnes paraplégiques, des coopératives et des programmes d'emploi en collaboration avec le Council of People with Disabilities.
    Mais ces projets ont généralement besoin de financement. Lorsqu'il faut demander des fonds au gouvernement, nous formons des partenariats avec d'autres organisations pour présenter le projet et en assurer la réussite. C'est habituellement ainsi que nous procédons.
    À ce sujet, monsieur Cudmore, y a-t-il des industries ou des entreprises du secteur privé qui s'associent à vous dans un programme particulier?
    À vrai dire, nous nous associons également à certaines organisations nationales. Nous avons noué des partenariats avec des banques. Nous percevons un revenu de 23,5 millions de dollars dans l'ensemble du Canada pour administrer nos activités, dont la moitié provient de partenariats avec le milieu des affaires. Nous formons donc bel et bien des partenariats avec différents types d'organisations, qu'il s'agisse de banques, d'entreprises locales ou nationales. Nous collaborons aussi beaucoup avec toutes sortes d'organisations associées à la sclérose en plaques ou à la dystrophie musculaire.
    Qu'en est-il de votre milieu, monsieur Roots?
    Nous avons formé des partenariats ayant trait au travail dans le cadre de notre stratégie nationale d'emploi. Il s'agit surtout de partenariats tripartis noués entre le gouvernement fédéral, quelques employeurs et nous.
    Grâce à nos efforts, une entreprise de peinture a embauché 10 personnes sourdes, qu'elle a gardées à son emploi. Je pense qu'il y a aussi une banque... Je ferais mieux de ne pas essayer de me rappeler son nom pour ne froisser personne, mais je sais qu'il y avait une banque.
    Quoi qu'il en soit, nous rencontrons la plupart du temps beaucoup de résistance. Les sociétés nous disent que si elles forment une personne sourde, elles devront embaucher un interprète 24 heures sur 24 et installer des avertisseurs de fumée visuels. Même si ce n'est pas un problème, une forte résistance subsiste.
    Au sujet de la question que je viens de poser, envisagez-vous...? Le gouvernement a récemment formé un groupe de travail qui s'est penché sur la grande catégorie des personnes ayant une limitation fonctionnelle, et a déposé un rapport qui s'intitule Repenser l'inCapacité dans le secteur privé. J'ignore si vous l'avez lu; on y parle de champions du secteur privé, c'est-à-dire d'entreprises prêtes à relever le défi.
    Croyez-vous que ce soit possible ou que ces attentes sont tout bonnement irréalistes? Qu'en pensez-vous?
    Monsieur Cudmore.
    Votre temps est écoulé, monsieur McColeman. Nous allons écouter la réponse de M. Cudmore, puis de M. Roots, s'il souhaite intervenir.
    Allez-y.
    Tout dépend de la société et de sa culture organisationnelle. Pour tout vous dire, cela peut dépendre de la présence d'une personne handicapée dans l'entourage ou la famille du responsable, qui comprendrait alors un peu cette réalité. Dans ce cas, le responsable pourrait modifier la culture de la société. Mais si nous nous en remettons à la bonne volonté des dirigeants, ils ne feront tout simplement rien.
    J'aimerais simplement ajouter que le programme Discovering the Power in Me que nous présentons aujourd'hui... En gros, une banque s'y intéresse et voudrait investir pour qu'il voie le jour. Elle aime le concept. En fait, nous nous basons sur la formation de liens sociaux pour nouer une sorte de partenariat entre le gouvernement fédéral, cette organisation et nous afin de mettre en place le programme.
    Je pense qu'il y a une occasion à saisir. J'ignore ce que l'avenir nous réserve, mais la volonté est là.
(1140)
    Ce qui m'inquiète, c'est qu'il s'agit d'un programme gouvernemental, et que l'initiative vient d'en haut. Comme nous l'avons démontré, il faut que les personnes ayant une limitation fonctionnelle s'occupent elles-mêmes de gérer le pouvoir, les ressources et le projet, et non pas le gouvernement ou les fonctionnaires. Pour dire les choses crûment, donnez-nous l'argent, un point c'est tout, puis nous nous occuperons de le dépenser, de créer des emplois et de vous rendre des comptes. C'est ainsi que nous réussirons.
    Merci, monsieur Roots.
    Nous allons maintenant écouter M. Sullivan.
    Oui, même s'il est écrit « Ryan Cleary » sur mon porte-nom. Je viens de le remarquer...
    Je le vois bien. Je croyais qu'il y avait eu un changement considérable...
    Des voix: Oh, oh!
    Je ne viens pas de Terre-Neuve.
    Ma première question s'adresse à tous les témoins. Au Canada et ailleurs, la nature du travail a évolué au cours des 15 ou 30 dernières années. Il y a désormais beaucoup d'emplois contractuels, à court terme et cycliques, mais nous n'avons pas modifié les structures de soutien du revenu en conséquence.
    Cet écart touchera de façon bien plus marquée les personnes handicapées et celles qui appartiennent à un groupe linguistique différent. C'est le cas, par exemple, de la structure de l'assurance-emploi, du Régime de pensions du Canada, de la Sécurité de la vieillesse, qui a été repoussée de deux ans pour les personnes handicapées, et des programmes provinciaux de gestion de l'invalidité, qui ne se coordonnent pas et ne sont pas favorables à ce groupe. Que feriez-vous pour changer la donne?
    Allez-y, monsieur Cudmore, si vous avez des commentaires. Vous pouvez commencer, et ce sera ensuite au tour de M. Roots.
    M. James Roots:Vous êtes très provocateur.
    Des voix:Oh, oh!
    Le président:Vous avez la parole, monsieur Cudmore.
    Le travail à contrat est particulièrement restrictif pour une personne handicapée. Si elle survit grâce à un revenu de base, mais qu'elle peut recommencer à travailler en occupant un poste contractuel, elle ne sera pas certaine de ce qu'elle fera ensuite, ce qui aura un effet dissuasif.
    Quelqu'un qui quitte un poste a très souvent de la difficulté à en trouver un autre au même niveau de revenu, particulièrement s'il était assuré. S'il travaille à contrat, l'entreprise ne lui donnera peut-être pas d'assurance-maladie, et il ne jouira pas de tous les avantages dont il a besoin pour s'occuper de son invalidité, ce qui le dissuadera certainement à aller travailler.
    Il est vrai que les programmes doivent être modifiés de manière à inciter les gens à retourner au travail en leur offrant une protection s'ils perdent leur poste. Il faut un filet de sécurité pour les encourager à trouver des possibilités d'emploi.
    Monsieur Roots.
    Je pense qu'il est improbable que le marché du travail redevienne ce qu'il était à l'époque où il y avait des emplois permanents de longue durée que les gens occupaient toute leur vie. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles il y a de plus en plus de travailleurs autonomes: les gens veulent décider de leur propre destinée.
    Si jamais vous allez sur Internet pour chercher dans Google quelque chose comme « vidéos sourds », vous serez tout à fait étonnés de voir le nombre impressionnant de vidéos faites par des personnes sourdes, parce que nous pouvons maintenant voir le langage des signes, et la parole n'est donc pas nécessaire. Nous pouvons nous voir et communiquer entre nous. Il y a des millions de vidéos sur Internet, et leur nombre pourrait réellement augmenter de manière stupéfiante. Si des particuliers ou des entreprises parrainaient ce genre d'activités, ils comprendraient l'ampleur du phénomène. Environ 65 millions de personnes dans le monde sont sourdes, et elles utilisent toutes Internet pour trouver des vidéos qui leur sont destinées.
(1145)
    Ma prochaine question s'adresse plus particulièrement à M. Roots.
    Jusqu'à maintenant, le gouvernement laisse entendre qu'une partie du problème est que les employeurs ne sont pas bien renseignés et que dans les faits, ceux qui le sont n'hésitent pas à embaucher.
    J'ai fait affaire pendant de nombreuses années avec un employeur de l'est de l'Ontario qui engageait beaucoup de personnes sourdes. Je pense qu'elles étaient 20 parmi 70 ou 80 employés. Elles étaient toutefois au bas de l'échelle salariale de l'entreprise et gagnaient donc très peu d'argent. L'employeur a été affecté ailleurs, et le nouveau gérant n'était pas aussi loyal. Il s'est aperçu qu'il pouvait faire faire le travail à moindre coût en sous-traitance, et les employés sourds ont été congédiés.
    Est-ce que le simple fait de mieux renseigner les employeurs peut suffire à contrebalancer l'avidité des entreprises du pays?
    Nous terminerons avec cette réponse et vos commentaires.
    Je ne suis pas certain d'avoir compris la question.
    Voulez-vous la reformuler?
    Oui. Est-ce suffisant de seulement mieux renseigner les employeurs, ou faut-il en faire davantage?
    Nous avons une législation sur l'équité en matière d'emploi depuis, je ne sais pas, 30 ou 35 ans? Et avons-nous réalisé certains progrès? Pas vraiment.
    Nous savons que la coercition ne fonctionne pas; le bénévolat non plus.
    Je ne connais pas de solution facile pour résoudre le problème. Jusqu'à maintenant, tous nos efforts ont échoué.
    Il est intéressant que vous ayez mentionné l'entreprise de l'est de l'Ontario, parce que vous m'avez fait penser à Boeing, à Winnipeg, qui a été un excellent employeur de personnes sourdes pendant des dizaines d'années. Il en a engagé beaucoup pour les faire travailler dans les sections les plus bruyantes de son usine, et elles se sont très bien acquittées de leurs tâches.
    Mais quelles ont été les premières personnes touchées par la suppression de postes? Je ne sais pas combien de personnes sourdes ont perdu leur emploi dans le cadre de la réduction des effectifs des deux dernières années, mais je sais qu'elles étaient plus de 20 à l'époque. Même si Boeing est un employeur progressiste, il a tout de même congédié ces personnes en premier.
    Merci de ces explications.
    Nous allons maintenant passer à M. Mayes.
    Vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins de s'être joints à nous.
    Je sais que nous parlons de possibilités d'emplois et des moyens de rendre ces emplois plus accessibles au sein de l'économie canadienne, mais l'une des questions examinées par notre comité, alors qu'il se penchait sur l'acquisition de compétences, est la préparation des jeunes pour la formation.
    Je me demande si vos organisations ont des contacts avec les jeunes handicapés pour leur faire prendre connaissance des possibilités qui s'offrent à eux et des formations qu'ils peuvent suivre pour se joindre à la population active malgré leur handicap. Y a-t-il des programmes créés à cette fin?
    Monsieur Cudmore, vous pouvez peut-être répondre en premier, et ce sera ensuite au tour de M. Roots.
    L'idée est excellente, et nous pourrions faire une demande de financement de projet auprès du gouvernement fédéral.
    Nous collaborons étroitement avec la coordonnatrice de la transition qui travaille dans des écoles secondaires, des universités et d'autres établissements d'enseignement postsecondaire. Elle aide des personnes atteintes de toutes sortes de handicaps et organise des réunions sur la transition auxquelles sont invités des groupes membres qui viennent de toutes nos organisations.
    Si quelqu'un a de la difficulté à se déplacer, qu'il soit autiste ou autre, nous sommes là pour lui dire quelles possibilités s'offrent à lui au sein de la collectivité et quelle formation il peut suivre, mais ce n'est pas un programme officiel d'acquisition des compétences. On a vraiment besoin d'un tel programme qui, je pense, profiterait également aux employeurs, qui pourraient désigner une sorte de protecteur du citoyen chargé de donner une formation de sensibilisation.
    Certains parlent de formation à la sensibilité, mais pour moi la sensibilité n'a aucune importance; je veux seulement que les gens sachent ce que les personnes handicapées peuvent faire au sein de leurs organisations. Nous avons besoin d'un tel programme, car il permettrait de répondre à beaucoup de questions sur la façon de réellement sensibiliser les sociétés aux capacités des personnes handicapées ou de leur en faire prendre conscience.
    En fait, il faudrait que quelqu'un aille s'adresser en personne aux responsables des organisations.
(1150)
    Monsieur Roots.
    Nous entretenons des liens très étroits avec des groupes de jeunes partout au Canada, dont Jeunesse sourde canadienne, ainsi qu’une association de personnes sourdes et malentendantes de la région de l’Atlantique. Son directeur général siège à notre conseil d’administration. Nous collaborons tous les deux ans avec Jeunesse sourde Canada à ce que nous appelons le Congrès national des sourds et le Camp du leadership des jeunes sourds du Canada.
     Je peux vous dire que cette génération de jeunes personnes sourdes est en colère. Elle est très en colère. Ces jeunes se sentent complètement rejetés par la société, qui n’a rien fait pour eux et ne leur offre rien actuellement. Leur éducation a été très difficile. Ils n’ont aucune perspective d’emploi dans la société. Ils sont très en colère.
     Ils bâtissent leur vie à l’écart de la société, notamment en créant leur propre emploi ou en se trouvant eux-mêmes un emploi, la plupart du temps sur Internet. Je le répète, la majorité des emplois qu’ils occupent actuellement sont en ligne. Quelques-uns ont créé leur propre service de nouvelles en ligne. Tout est traduit en langage gestuel. Tous les événements quotidiens sont présentés en langage gestuel afin que partout dans le monde, les personnes sourdes puissent comprendre l’actualité. Ils ont mis cela sur pied eux-mêmes, et c’est fantastique. Ils ont trouvé de bons commanditaires.
     On en revient à ce que j’ai dit dans mon exposé, soit que de nos jours, le travail autonome est pratiquement la seule perspective viable pour la plupart des personnes sourdes.
    Monsieur Roots, je pense que personne ici ne peut vraiment comprendre les défis qui sont liés à la surdité dans une société aussi bruyante que la nôtre.
     Je m’intéresse beaucoup à la technologie. Je vois des employés qui, à leur pause-café, envoient des messages textes au lieu de se parler. Ils sont assis à cinq pieds l’un de l’autre. La technologie offre-t-elle vraiment certaines possibilités, comme l’embauche de personnes ne parlant qu’une langue, dont la valeur doit être reconnue par les employeurs?
    Nous vivons avec nos appareils BlackBerry ou iPods. Nous avons été les premiers à voir les possibilités qu’offrent ces appareils mobiles. Je me souviens être allé au Congrès mondial des sourds en Australie, en 1997. Nous avions bien ri à l’aéroport, car les gens pouvaient savoir qui étaient les personnes sourdes qui se rendaient à ce congrès. Elles s’affairaient toutes comme cela. Les gens passaient et nous regardaient, car à l’époque, la plupart des personnes qui entendaient bien n’avaient pas encore ce genre d’appareil; ils passaient et nous regardaient. Il était facile de reconnaître les personnes sourdes et d’aller les rencontrer.
     Je crois avoir perdu le fil de votre question. Pardonnez-moi de m’être un peu égaré.
    Je vous remercie de ce commentaire. Le temps de parole de M. Mayes est écoulé.
     C’est maintenant au tour de M. Cuzner. La parole est à vous.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Je tiens à remercier nos témoins de leur présence aujourd’hui.
     Vous nous dites qu’il y a un problème de perception à régler, mais il y a aussi des barrières physiques et technologiques. Je pense que des améliorations ont été réalisées sur le plan de l’aménagement grâce à la technologie.
     Un été, j'ai travaillé dans une usine de transformation du poisson. Il y avait un homme qui avait eu un accident et était revenu au travail par la suite. Il travaillait à l’usine avant d’avoir son accident. À la chaîne de traitement, tout le monde s’est levé. On lui a apporté un tabouret pour qu’il puisse s’asseoir et faire son travail. Il travaillait mieux que n’importe quel autre employé; l’amélioration technologique consistait donc à lui fournir quelque chose pour s’asseoir.
     Les employeurs ont-ils la possibilité, au moyen de subventions, par exemple, de supprimer certains des obstacles technologiques ou physiques et d’effectuer des aménagements? Ont-ils cette possibilité?
(1155)
    Je peux vous donner un exemple. La semaine dernière, j’étais à Terre-Neuve, où j’ai rencontré un employeur qui est devenu l’un de nos partenaires. Il possède 100 restaurants de poulet frit au Canada. Il vient de faire rénover 15 d’entre eux afin de les rendre entièrement accessibles, non seulement aux clients, mais aussi aux personnes qui voudront y travailler comme cuisiniers, serveurs, etc. C’est donc 15 restaurants sur 100.
     Je lui ai dit que le gouvernement fédéral a des programmes qui peuvent l’aider à rendre ses autres installations plus accessibles. Il m’a répondu qu’il ne voulait pas des tracasseries administratives et qu’il préférait s’arranger seul. Les choses en sont restées là, et je n’ai pas insisté. Voilà un excellent exemple venant d’un employeur canadien qui possède une centaine de restaurants partout au pays.
    Allons un peu plus loin; les employeurs vous répondent-ils souvent qu’ils doivent remplir trop de paperasse pour avoir accès aux programmes?
    Si je puis me permettre, nous sommes également confrontés à ces formalités administratives lorsque nous demandons une subvention. Nous sommes justement en train de le faire. Les tracasseries administratives ne manquent pas et elles exigent beaucoup de temps. Nous avons des budgets très modestes et un nombre réduit d’employés. Nous devons consacrer une grande partie de notre temps à nous occuper de ces formalités administratives, ce qui est exigeant.
    Comme vous venez de le souligner, pour quelqu’un qui a des problèmes de dos ou peu importe — je ne me rappelle plus du début de votre histoire —, il a fallu un tabouret pour régler son problème lié à une incapacité. Bien souvent, pour 500 $, une entreprise peut rendre les lieux accessibles à une personne ayant une incapacité. Mais je parle ici d’un bon endroit.
     Je voudrais attirer votre attention sur une situation. En mai dernier, je suis venu ici pour assister à des réunions. L’une de mes belles-filles vit à Ottawa, et mon épouse et moi avons décidé de l’amener au restaurant. Nous nous sommes rendus dans le Marché, et j’ai été abasourdi. Si vous allez vous promener dans le Marché, vous verrez qu’au moins la moitié, si ce n’est 80 p. 100 des restaurants ne sont pas accessibles aux personnes en fauteuil roulant. On doit franchir une ou deux marches pour y entrer.
     J’étais très surpris, car nous étions à Ottawa; et pourtant, il y avait un manque d’accessibilité dans le Marché, un endroit qui attire beaucoup de gens. J’étais tout simplement stupéfait.
     À Vancouver, tous les endroits, tous les restaurants sont accessibles. Je suis allé là-bas avec un ami l’année dernière. C’est un chef qui enseigne à l’école culinaire… et il voulait voir les restaurants. Après la première soirée, il a cessé de demander si les restaurants étaient accessibles ou non, car ils l’étaient tous.
     L’accessibilité d’une collectivité est en grande partie attribuable à la mentalité et à la culture qui règnent au sein de cette collectivité. Peu importe s’il y a des subventions ou quoi que ce soit; l’important, c’est la mentalité et la culture de la collectivité.
     Si vous voulez rendre la ville d’Ottawa plus accessible, vous devez changer la mentalité et la culture de la collectivité. Tout le monde doit participer afin de rendre le Marché entièrement accessible à tous ceux qui y vivent. C’est ce qu’on a fait à Vancouver. Tout est accessible aux gens de la collectivité.
     Tout repose sur la mentalité de la municipalité et des gouvernements au sein de la collectivité.
    Aviez-vous un commentaire, monsieur Roots?
    Il y a des organismes de services qui vont rencontrer les employeurs pour leur expliquer comment il peuvent faire telle et telle chose s'ils embauchent des personnes sourdes. Mais je préfère inviter les employeurs à venir à mon bureau.
    Lorsque l'employeur arrive à la porte, il cogne. Rien. Il voit alors une affiche indiquant: « Si personne ne répond, veuillez appuyer sur l'interrupteur de la lumière blanche sur le côté. » La lumière s'allume et s'éteint à l'intérieur du bureau afin de m'avertir qu'il y a quelqu'un à la porte. Je sors, j'ouvre la porte et je l'invite à entrer.
    Nous avons un plancher de bois tendre, et lorsque quelqu'un cogne dessus, je peux sentir la vibration. Je dis à l'employeur: « Veuillez m'attendre un moment, quelqu'un veut me parler. » Il se demande bien comment je le sais, car personne n'a dit un seul mot. Je le sais parce que je sens le cognement.
    Puis, l'employeur et moi sommes prêts à discuter. Je lui tends un ordinateur portable afin qu'il écrive ses réponses. Nous sommes en réseau. Ce qu'il écrit sur son écran apparaît sur le mien. Nous pouvons échanger.
    Il me demande ensuite comment j'ai organisé cette rencontre. Je lui dis que je l'ai fait par téléphone. Quand je lui explique avoir utilisé le Service de relais par protocole Internet, il dit: « Oh. Vous pouvez faire cela. »
    Ces choses ne vous coûteront pas une fortune. Installer un simple interrupteur d'éclairage à l'extérieur du bureau ne coûte qu'environ 12 $. Vous pourriez le faire vous-même si vous êtes un électricien amateur suffisamment doué.
(1200)
    Tout allait bien jusqu'à ce que vous parliez d'un « électricien amateur ».
    Des voix: Oh, oh!
    Je ne suis pas certain que nous voudrions que Rodger s'en occupe.
    Quoi qu'il en soit, votre temps est écoulé.
    Nous tenons à vous remercier, messieurs Roots et Cudmore, ainsi que monsieur White, de votre contribution inestimable à notre étude. Nous vous sommes reconnaissants d'être venus et d'avoir discuté de cette question avec nous.
    Je tiens également à remercier les interprètes en langue des signes, qui ont fait de l'excellent travail. Merci beaucoup.
    Sur ce, nous allons nous arrêter quelques minutes.
(1200)

(1210)
    Nous reprenons nos travaux.
    Je vous souhaite à tous la bienvenue.
    Nous accueillons deux représentantes du Réseau national pour la santé mentale, soit Mme Julie Flatt, directrice exécutive nationale par intérim, et Mme Jean Beckett, présidente.
    Nous accueillons également deux représentantes de l'Institut national canadien pour les aveugles, soit Mme Diane Bergeron, directrice nationale, Relations gouvernementales et Défense des intérêts, et Mme Christine Robbins, spécialiste des relations gouvernementales.
    Bien sûr, nous souhaitons aussi la bienvenue à Lucie, qui est ici avec nous. Je trouve qu'elle semble tranquille et bien élevée.
    Elle me fait penser à Colin Mayes.
    Des voix: Oh, oh!
    Nous nous en tiendrons à cela. Merci, madame Charlton.
    Nous allons d'abord entendre les exposés des représentants de chaque organisme, après quoi nous passerons aux questions et réponses de chaque côté.
    Madame Beckett, allez-y.
    Au nom du Réseau national pour la santé mentale, je tiens à remercier les membres du Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées de nous donner l'occasion de leur parler des difficultés auxquelles sont confrontées les personnes que nous représentons, soit celles qui vivent des problème de santé mentale ou de déficience psychique.
    Le Réseau national pour la santé mentale est un organisme national unique qui tire son origine d'un mouvement de mobilisation populaire. Il s'agit du seul organisme en santé mentale sans diagnostic axé sur les consommateurs dont les services sont offerts partout au Canada.
    Les personnes qui sont atteintes d'une maladie mentale sont les plus exposées à une stigmatisation au travail et ce sont également celles qui se butent aux plus gros obstacles pour accéder au marché de l'emploi. De nombreux écueils jalonnent le chemin de l'emploi des adultes ayant une déficience psychique: lacunes dans les antécédents professionnels, expérience d'emploi limitée, manque de confiance en soi, peur et anxiété, discrimination et rigidité au travail, stigmates sociaux et manque de souplesse des régimes d'avantages sociaux et de soutien du revenu.
    L'un des pires problèmes auxquels nous sommes confrontés, c'est le fait que de nombreuses maladies mentales font leur apparition à l'adolescence et que la période la plus grave de la maladie survient, pour bien des personnes, durant les années où elles devraient fréquenter l'école. Leur éducation s'en trouve interrompue, et cela influence grandement le reste de leur vie.
    Le taux de chômage chez les personnes atteintes d'une maladie mentale reflète ces obstacles: il varie de 70 à 90 p. 100, selon la gravité de la déficience. Cette statistique est particulièrement troublante depuis qu'on admet qu'un travail productif favorise la santé mentale et contribue à une vie enrichissante et pleinement satisfaisante dans la collectivité. Sans cela, il est en effet très difficile d'avoir une bonne santé mentale.
    Les avantages d'un emploi pour les personnes qui présentent une déficience psychique sont énormes: il a été démontré que le travail est une source d'identité qui transcende la maladie et qui donne l'occasion de relever de nouveaux défis. La possibilité de travailler donne de l'espoir et permet la réalisation d'un objectif, soit celui de l'inclusion sociale et de la participation à la société.
    Le travail peut valider l'estime de soi et le sentiment de valeur personnelle et en permettre le développement. De nombreuses personnes atteintes de déficience psychique qui ont fait l'objet de préjugés et qui ont été marginalisées, ce qui a nui à leur estime d'elles-mêmes, ont trouvé dans le travail les outils nécessaires pour rebâtir leur santé mentale. Les recherches montrent que la plupart des personnes atteintes de déficience psychique veulent travailler, comme les autres.
    Les recherches ont montré que les préjugés et la discrimination constituent un problème de taille pour les personnes présentant une déficience psychique. Les préjugés et la discrimination les amènent en effet à éviter de demander des soins lorsqu'ils en ont besoin et de partager leurs préoccupations avec leur famille, leurs amis, leurs collègues, les employeurs, les professionnels de la santé et les autres membres de la collectivité. Ces personnes sont davantage confrontées à des préjugés tenaces en milieu de travail que les personnes ayant d'autres déficiences, et elles sont plus susceptibles d'être atteintes d'invalidité de longue durée et d'être sous-employées.
    La maladie mentale est un ensemble de troubles, dont la dépression, le trouble bipolaire et l'anxiété, caractérisés par des symptômes tels que la perte de motivation et d'énergie, la modification des habitudes de sommeil, les changements d'humeur extrêmes, les perturbations de la réflexion ou de la perception, ou les obsessions et les peurs insurmontables. La maladie mentale, ce n'est pas la déficience développementale, ni l'autisme, ni bien d'autres déficiences auxquelles les gens nous associent et qu'ils supposent que nous présentons. Ce n'est pas cela.
    Parmi les différents types de maladies mentales, on trouve le trouble bipolaire, un trouble de l'humeur; les personnes qui en sont atteintes éprouvent des émotions intenses et prolongées qui ont une incidence négative sur leur bien-être mental, leur santé physique, leurs relations et leur comportement. Ces personnes présentent des périodes de dépression suivies d'épisodes de manie. Les symptômes de la manie peuvent comprendre un optimisme, une euphorie et un sentiment de grandeur exagérés, une élocution rapide, des pensées qui défilent et de l'hyperactivité, une diminution du besoin de sommeil et une irritabilité extrême.
    La dépression est un trouble dépressif majeur qui diffère des « blues » et de la tristesse que nous pouvons tous ressentir à l'occasion, par exemple lorsque nous perdons un être cher ou qu'un événement négatif se produit dans notre vie. Cela peut être déprimant. Mais la dépression en tant que maladie est tout à fait différente. On peut vivre la plus belle période de sa vie, mais être tout de même en proie à la dépression. La maladie survient lorsqu'on n'a pas de raison d'être déprimé.
(1215)
    Il a aussi été déterminé que la schizophrénie était un trouble biochimique du cerveau qui peu influer sur la capacité d'une personne de déterminer ce qui est réel et ce qui ne l'est pas. Les schizophrènes peuvent souffrir de délire ou d'hallucinations et d'isolement social. L'image que la plupart des gens se font de la maladie mentale est celle qu'ils voient dans les médias. Ils pensent que c'est de la schizophrénie; ils croient qu'il s'agit d'un dédoublement de personnalité, mais en fait, la schizophrénie est un détachement de la réalité.
    Ensuite, il y a les phobies et les troubles paniques qui peuvent causer des déficiences psychiques appelées troubles anxieux. Ils font partie des types de problèmes de santé mentale les plus communs, qui affectent un Canadien sur dix. Malgré cela, les troubles anxieux ne sont pas bien compris, et ceux d'entre nous qui y sommes confrontés sommes souvent perçus comme étant des personnes faibles et indisciplinées qui ne se refusent rien. On nous dit de nous ressaisir.
    Est-il possible de se remettre d'une maladie mentale? Absolument. Les gens en sont capables et ils le font. Le rétablissement varie d'une personne à l'autre. Pour se rétablir d'une maladie mentale ou d'une déficience psychique, une personne atteinte d'une déficience psychique, et chaque personne en fait, a besoin d'avoir un sentiment d'appartenance et d'autonomie, de l'espoir, et des liens avec les autres.
    Nous avons une expression pour résumer les besoins des personnes handicapées: « un emploi, un foyer et un ami ». Tout le monde a besoin d'un endroit sécuritaire où habiter. Votre foyer est l'endroit où vous cherchez refuge, et tout le monde a besoin d'en avoir un. Nous avons aussi besoin d'un emploi, rémunéré de préférence, mais pas obligatoirement... Vous avez besoin d'une raison de vous lever le matin. Nous avons tous besoin d'une raison de nous lever le matin et d'avoir quelque chose à faire. C'est là que nos emplois sont importants. Lorsque nous parlons d'un ami, nous parlons d'entraide. Nous parlons souvent de la famille que nous avons choisie plutôt que de notre famille biologique, car il arrive souvent qu'une maladie affecte la relation qu'une personne entretient avec sa famille et que les liens soient rompus. Alors nous formons des familles avec des personnes que nous avons choisies, des personnes de confiance qui nous appuient et que nous appuyons à notre tour.
    Dans son article sur la santé mentale et le milieu de travail, le Center for Reintegration fait valoir que l'on se rend de plus en plus compte qu'un handicap n'est pas tant une déficience que le produit de l'environnement dans lequel la personne vit. Je pense que M. Roots serait d'accord avec cette affirmation.
    Même si les traitements dans lesquels des méthodes globales et autres méthodes de rétablissement ont avancé, la mentalité d'une bonne partie de la société concernant les déficiences psychiques est restée la même. Il y a bien des mythes. Premièrement, les gens pensent qu'une maladie mentale est la même chose qu'un trouble du développement ou l'autisme. Un trouble du développement est une difficulté d'apprentissage chez la personne ou une déficience intellectuelle. Les questions de santé mentale concernent la pensée et non la compréhension. L'autisme n'est pas une maladie mentale; c'est une difficulté d'apprentissage.
    Le deuxième mythe est qu'il est impossible de se remettre d'une maladie mentale. Bien que ces maladies soient persistantes, des travaux de recherche ont révélé qu'avec des traitements et un système de soutien communautaire adéquat, la majorité des gens peuvent réellement atténuer leurs symptômes au fil du temps et mener des vies stables et productives tant qu'elles ont « un emploi, un foyer et un ami ».
    Le troisième mythe est que les employés souffrant d'une maladie mentale et ceux qui s'en sont rétablis, c.-à-d. ceux dont la maladie mentale est traitée efficacement, ont tendance à être des employés de deuxième ordre. C'est loin d'être vrai. Loin d'être inférieures aux autres employés, les personnes souffrant de maladies mentales pourraient, en fait, être supérieures à bien des égards à leurs collègues qui ne souffrent pas de pareilles maladies. Les employeurs qui ont embauché ces personnes signalent que leur assiduité et leur ponctualité sont supérieures à la norme; leur motivation, la qualité de leur travail et leur ancienneté professionnelle sont aussi bonnes, sinon meilleures, que celles des autres employés.
    Le quatrième mythe est que les personnes qui souffrent de troubles psychotiques ne peuvent tolérer de stress professionnel. Ce n'est pas plus vrai que ce l'est pour la personne moyenne. Le stress professionnel est un problème pour tout le monde, pas plus pour les personnes souffrant de maladie mentale que pour les autres. Si vous souffrez d'une maladie mentale, il est vrai que le stress peut être un plus gros problème, mais c'est la raison pour laquelle ces personnes reçoivent des traitements, pour pouvoir gérer ce stress comme une personne moyenne. Mais nous devons faire comprendre à nos employeurs que nos milieux de travail sont trop stressants pour tout le monde, pas seulement pour les personnes malades, et en fait, ces milieux ont causé bien des maladies mentales. Nous sommes très conscients des tueries en milieu de travail, des personnes qui tirent à la ronde sur leurs collègues. Ces actes découlent généralement d'un surcroît de stress et de problèmes professionnels qui n'ont rien à voir avec un handicap.
(1220)
    Le cinquième mythe est que les personnes qui souffrent de maladies mentales ou qui en sont rétablies sont imprévisibles, potentiellement violentes et dangereuses. Encore une fois, cela nous ramène à l'image de personnes violentes et imprévisibles que donnent les médias de celles qui souffrent de maladies mentales. Une revue de la littérature effectuée dans le cadre d'un projet de recherche mené à l'Université Cornell n'a dégagé absolument aucune preuve qui donnerait à penser que cela est vrai. Le fait est que la grande majorité des personnes souffrant de déficiences psychiques ne sont ni dangereuses ni violentes, et il est plus probable qu'elles soient des victimes que des agresseuses.
    Le Bureau de la condition des personnes handicapées de Ressources humaines et Développement des compétences Canada a organisé une rencontre le 8 février 2012 pour connaître les perceptions d’intervenants concernant les obstacles et les défis auxquels sont confrontés les Canadiens handicapés en matière d’emploi. Cette rencontre visait à rassembler les intervenants nationaux de la communauté des personnes handicapées. Cette réunion s’inscrivait dans la démarche d’engagement continue de RHDCC à l’égard des Canadiens handicapés.
    Le financement stable à long terme est probablement notre besoin le plus pressant. Il nous permettrait de forger de meilleures relations avec des partenaires comme des employeurs et d'offrir le soutien à long terme que les personnes handicapées aux besoins plus complexes requièrent pour décrocher des emplois et les garder.
    Il y a des modèles d'emploi qui fonctionnent ou il y en a eu. Selon un article de la Global Business and Economic Roundtable on Addiction and Mental Health, nous avons tous des antécédents distincts qui font de nous des personnes uniques, dotées de capacités, de points forts et de lacunes variés. Les lois et coutumes canadiennes célèbrent ces différences. Parfois ces différences invisibles influent sur la capacité d'une personne de faire son travail ou d'interagir avec les gens, et les problèmes de santé mentale font partie de ces handicaps invisibles. Le Centre pour la santé mentale en milieu de travail de la Great West a révélé que les employés croient que le milieu de travail est l'endroit où il est le moins probable qu'ils obtiennent un soutien, alors que 64 p. 100 des employés souffrant de problèmes de santé mentale ne parlent pas de leur état à leur employeur. Pensez-y. Comment réussissez-vous à garder le secret lorsque vous voyez un psychiatre le mardi, un thérapeute le jeudi, et êtes un peu dépassé le vendredi matin si vous n'avez pas une pause d'un quart d'heure supplémentaire? Comment faites-vous pour cacher votre état à votre employeur sans que cela ait une influence sur votre travail?
    Les statistiques montrent qu'environ un Canadien sur cinq sera touché par un problème de santé mentale au cours de sa vie, ce qui signifie que presque tous les Canadiens seront touchés, directement ou indirectement. Alors faisons un comptage. Un, deux, trois, quatre, cinq — statistiquement, trois d'entre vous avez peur de parler ouvertement de votre maladie mentale. Nous ne vous demanderons pas de...
(1225)
    Madame Beckett, votre temps est écoulé depuis un moment. Je vous saurais gré de conclure vos remarques.
    D'accord.
    Par le passé, les modèles d'emploi ont très bien fonctionné pour les personnes souffrant de maladie mentale et sont très viables au plan financier. Comme M. Roots le dit, ils vous en donnent pour votre argent. Les problèmes de santé mentale créent un lourd fardeau au Canada lorsque les personnes qui en souffrent sont incapables de travailler. Si nous arrivons à avoir des modèles d'emploi qui fonctionnent, nous pourrons alléger ce fardeau. Le Réseau national pour la santé mentale avait lancé le projet BUILT, Building Up Individuals through Learning and Teamwork, dans le cadre duquel il offrait des formations de préparation à l'emploi et de la formation particulière au poste de travail pour que les gens puissent décrocher des emplois et les garder.
    Le programme Routes to Work était un projet du bureau national de l'Association canadienne pour la santé mentale. Il aidait aussi les personnes à trouver des emplois et à les garder.
    Il y en a eu d'autres, mais j'aimerais attirer votre attention sur une chose en particulier. De l’ombre à la lumière est le rapport produit par un comité sénatorial qui a mené à la création de la Commission de la santé mentale du Canada, et ce rapport contenait des recommandations. Premièrement, il y était recommandé que, par le truchement du Fonds d’intégration pour les personnes handicapées, le ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences facilite l'établissement d'un programme d'emploi appuyé à la grandeur du pays pour aider les personnes souffrant d'une maladie mentale à décrocher des emplois et à les garder. Deuxièmement, il était recommandé que le programme encourage le développement des entreprises alternatives appartenant et étant gérées par des personnes souffrant de maladies mentales, et qu'il leur offre un soutien. Troisièmement, il était recommandé que le ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences fasse rapport du nombre de personnes souffrant de maladies mentales à qui le Fonds d’intégration pour les personnes handicapées est venu en aide.
    Malheureusement, ces recommandations n'ont pas été suivies, et le financement de certains des programmes a été coupé.
    Merci.
    Votre temps est écoulé. Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à Mme Bergeron.
    J'aimerais commencer par vous remercier de nous avoir invitées à nous adresser à vous aujourd'hui et vous expliquer comment je vais m'y prendre pour faire mon exposé.
    Mes notes d'allocution se trouvent sur mon ordinateur et j'ai une oreillette, alors mon ordinateur me parlera pendant que je vous parle. Ce sont des compétences que certains d'entre nous devons perfectionner, car nous ne pouvons pas lire des textes imprimés.
    Merci encore de nous avoir invitées, Mme Christine Robbins de l'INCA et moi-même, à témoigner devant vous.
    La dernière Enquête sur la participation et les limitations d'activités indique que le taux d’emploi des personnes atteintes de cécité totale ou partielle est de seulement 35 p. 100, en comparaison à 56 p. 100 pour les personnes handicapées.
    Selon le rapport Le coût de la perte de vision de l’Institut national canadien des aveugles, ce faible taux d’emploi coûte annuellement au gouvernement fédéral 886 millions de dollars au chapitre des transferts sociaux, des impôts sur le revenu non perçus et des pertes de productivité.
    Les personnes atteintes de cécité totale ou partielle ont certes un taux de diplomation comparable à celui de la population générale, soit de 19,9 p. 100 par rapport à 23 p. 100, mais ils n’obtiennent pas nécessairement un emploi à leur mesure. Le rapport Inégalité des chances publié par l’institut révèle que 49 p. 100 de ces personnes titulaires d’un diplôme universitaire sont chômeuses ou sous-employées.
    Il existe trois principaux obstacles à la réussite scolaire et professionnelle des Canadiens atteints de cécité totale ou partielle.
    Le premier est l’accès limité à une formation préalable à l’emploi et à l’exploration de carrières. Le deuxième est l’accès difficile aux technologies d’adaptation et à l’information nécessaires à la réussite professionnelle. Le troisième est le manque de connaissances des employeurs sur les capacités professionnelles des personnes atteintes de cécité totale ou partielle.
    Une formation préalable à l’emploi porterait notamment sur les capacités en orientation et en mobilité pour permettre aux personnes de se déplacer dans divers milieux en toute autonomie, notamment de la formation pour savoir utiliser une canne blanche et pour savoir comment utiliser d'autres sens pour se déplacer. Il y a aussi le sens de l’organisation et l’habileté à communiquer — que les employeurs recherchent chez le candidat idéal à un poste et au sein de leur organisation — ainsi que les occasions d’exploration de carrières et la connaissance des technologies d’adaptation.
    L’accès aux technologies d’adaptation et aux différents supports de substitution aux documents imprimés est essentiel à la réussite professionnelle. À l’heure actuelle, les employeurs et leurs employés potentiels disposent de très peu de soutien pour accéder aux mesures d’adaptation en milieu de travail qu’offre la technologie, comme les logiciels de lecture sonore-écran et d’agrandissement.
    D’après des études antérieures sur les obstacles à l’emploi des personnes atteintes de cécité totale ou partielle, les employeurs ont établi deux principales difficultés. Tout d’abord, ils ne connaissent pas suffisamment les capacités professionnelles de ces personnes. Ils ne possèdent souvent ni les outils ni les ressources pour évaluer correctement la manière dont un candidat atteint de cécité totale ou partielle peut accomplir les tâches d’un poste qui exige des compétences techniques et générales.
    Ensuite, les employeurs, surtout les PME, ont peu de temps et de ressources pour étudier les capacités professionnelles des personnes atteintes de cécité totale ou partielle. Comme le Groupe de travail spécial sur les possibilités d’emploi des personnes handicapées l’a indiqué, il faut davantage de formation et de sensibilisation pour vaincre l’hésitation et les préjugés des employeurs au sujet des capacités professionnelles des Canadiens atteints de cécité totale ou partielle.
    La sensibilisation est certes importante, mais le soutien aux employeurs prêts à collaborer reste probablement le meilleur moyen de les convaincre d’embaucher des personnes atteintes de cécité totale ou partielle.
    Selon des études menées aux États-Unis, les employeurs qui ont offert des stages à des personnes handicapées sont 70 p. 100 plus susceptibles de proposer un poste permanent à une personne handicapée.
(1230)
    L’Institut national canadien pour les aveugles recommande que le gouvernement fédéral mette en place, sous l’égide du Fonds d'intégration pour les personnes handicapées et des directions de l'analyse du marché du travail, les mesures ciblées suivantes: des programmes de stage pour les Canadiens atteints de cécité totale ou partielle dans les secteurs privé et public, et dans ce cadre, l’institut recommande également la création d’une banque de technologies d'adaptation destinée aux employeurs afin de faciliter l’intégration des stagiaires au milieu du travail; et des programmes de formation préalable à l’emploi spécialement conçus pour les Canadiens atteints de cécité totale ou partielle, qui porteraient sur le sens de l’organisation et l’habileté à communiquer, l’orientation et la mobilité en milieu de travail, et les technologies d'adaptation.
    Merci de nous avoir invitées.
    Merci beaucoup de nous avoir fait cet exposé en utilisant la technologie de façon aussi intéressante.
    Nous allons commencer notre première ronde avec Mme Boutin-Sweet.
    La parole est à vous.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, mesdames, d'être ici parmi nous. Plus tôt, il n'y avait que des hommes, et maintenant, il n'y a que des femmes.
    On a appris que le nombre de personnes handicapées étant devenues prestataires de l'aide sociale avait augmenté de 38 %. Il semble qu'après l'âge de 19 ans, ce soit la trajectoire habituelle. L'apprentissage est important, soit, mais quand les gens n'intègrent pas facilement le marché du travail, il faut autre chose en plus de l'apprentissage.
    Madame Bergeron, vous avez déjà abordé cette question, et j'aimerais connaître l'avis des autres à ce sujet.
     Comment le gouvernement fédéral pourrait-il soutenir la transition entre l'école et le marché du travail?
    Oui, madame Beckett?

[Traduction]

    Oui, comme je l'ai mentionné plus tôt, il arrive que des personnes développent une maladie mentale pendant leur adolescence et c'est très difficile pour elles, car cela interrompt leur éducation, évidemment. Lorsqu'elles commencent à se sentir mieux, on leur dit qu'elles doivent trouver quelque chose à faire, alors elles finissent par faire du bénévolat au lieu de trouver du travail rémunéré.
    Cela fait maintenant 30 ans que je fais du bénévolat. J'ai besoin d'être payée, comme les personnes qui ont des problèmes de santé mentale. Nous avons besoin de travail rémunéré, tout comme nous avons besoin de technologies. Lorsque l'éducation des gens est interrompue, non seulement il leur manque la formation, mais il leur manque aussi toutes ces expériences que vivent les étudiants. Ils deviennent isolés et exclus du groupe. Toute personne qui n'était pas populaire au secondaire sait de quoi je parle.
    Nous avons grandement besoin de sensibiliser le public; oui, nous avons besoin de traiter la question. Nous devons nous pencher sur les questions relatives aux jeunes pour composer avec les problèmes de santé mentale, car il arrive souvent que les jeunes soient touchés.
    Nous devons aussi aider les gens à être branchés. Bien des personnes souffrant de problèmes de santé mentale se retrouvent très isolées, car elles vivent de programmes de la sécurité du revenu qui ne leur offrent pas une aide financière adéquate. Elles finissent par vivre dans un gourbi ou dans la rue, ou dans une maison où vous ne souhaiteriez pas que votre pire ennemi vive, ou elles finissent par se retrouver dans le Nord, comme moi, à vivre dans des camps de chasseurs; elles vivent dans la brousse et dans des logements insalubres. Cela leur donne un toit, mais crée d'autres problèmes, car il n'y a pas de transport dans la brousse, alors elles sont vraiment isolées.
    Les gens ont besoin de connectivité. Il existe beaucoup de programmes dans lesquels nous, membres d'organismes locaux, fournissons des ordinateurs remis à neuf aux gens, ou le téléphone, ou le BlackBerry. Si nous avions des programmes qui nous aidaient à leur offrir ces outils, ils pourraient poursuivre leur éducation, faire du bénévolat, travailler.
    Qu'est-ce qui arriverait si chaque municipalité au Canada faisait une contribution de 100 $? Combien de municipalités y a-t-il?
(1235)

[Français]

    Madame Beckett, nous recevons ici beaucoup de témoins et nous constatons qu'il existe une grande variété de handicaps. De plus, des témoins ont suggéré que le gouvernement fédéral travaille de concert avec des organismes communautaires pour être en mesure de mieux déterminer les besoins.
    Je vais vous donner comme exemple un programme totalement différent, soit la Stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance. Dans ce contexte, des comités locaux travaillent avec le gouvernement. Ils connaissent la réalité locale.
     Ce genre de collaboration pourrait-il aider les personnes ayant un handicap?

[Traduction]

    Cela aiderait sûrement, mais sans la participation du consommateur, cela ne marchera pas. Il vous faut vraiment parler aux gens. La participation locale est nécessaire.
    En tant que réseau national, nous avons essayé de créer des liens entre des personnes de partout au Canada pour qu'elles puissent avoir voix au chapitre. Malheureusement, avec le déclin constant du financement, nous sommes moins en mesure de le faire. La technologie pourrait nous aider, si nous y avions accès. C'est très facile. Nous sommes venues ici parce que nous avons reçu un courriel. Si nous pouvons mettre les personnes en contact, alors cela marchera, mais il faut le faire aux échelons local, régional et national.

[Français]

    Dans les deux cas, il y a des besoins spécifiques. Je pensais, par exemple, aux problèmes de santé mentale épisodiques. Il y a dans ces cas également des besoins spécifiques.
     Comment le gouvernement fédéral peut-il savoir quels sont ces besoins spécifiques s'il n'entre pas en contact avec des groupes sur le terrain?
     Croyez-vous que des partenariats avec des groupes oeuvrant sur le terrain, qui connaissent la situation réelle, pourraient se révéler très utiles?
     Mesdames Bergeron, Flatt ou Robbins, avez-vous des commentaires à formuler à ce sujet?

[Traduction]

    Madame Boutin-Sweet, c'est tout le temps que vous aviez.
    Je pense que Mme Bergeron a un commentaire à formuler. Nous passerons ensuite à Mme Beckett ou à Mme Flatt.
    Allez-y, madame Bergeron.
    Je pense qu’il est vraiment important de travailler à l’échelle communautaire en collaboration avec les organisations qui offrent des services aux personnes ayant des incapacités, quelle que soit la nature de celles-ci. Ce sont les gens sur le terrain qui comprennent le mieux les services dont ils ont besoin. Ce sont ceux qui assurent leur prestation qui saisissent comment ces services peuvent être offerts à ces personnes. Il ne fait aucun doute que la meilleure façon de procéder est de travailler au sein des collectivités en partenariat avec les organismes communautaires.
(1240)
    Madame Flatt.
    Je répéterais simplement ce que Diane vient de dire, à savoir que cela fait partie des projets de notre organisation. Nous nous efforçons de renouer avec les organismes communautaires et d’accroître de nouveau le nombre de nos membres de manière à ce que nos liens avec les collectivités nous permettent de travailler à l’échelle nationale. Nous voulons vraiment reprendre nos activités communautaires, encourager nos membres à nous informer des besoins de leur collectivité et vous communiquer ensuite cette information, à vous ou aux personnes qui en ont besoin, quelles qu’elles soient.
    Merci beaucoup. Quelqu’un d’autre souhaite-t-il formuler des observations?
    Je pensais avoir entendu Mme Boutin-Sweet dire que la Stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance lui plaisait, parce qu’elle permettait d’interagir avec les collectivités locales à l’échelle communautaire. Je l’ai effectivement entendue le dire. Donc, c’est bien.
    Nous allons maintenant passer à M. Daniel.
    Merci, monsieur le président. J’aimerais également remercier les témoins de leur présence.
    Mes questions s’adresseront principalement aux représentantes de l’INCA. Je n’ai pas une idée claire du genre d’emplois que décrochent les gens aveugles ou atteints d’une déficience visuelle grave. Vous avez dit que 30 p. 100 d’entre eux travaillaient. Quel genre de postes occupent-ils?
    Je ne dispose pas de statistiques exactes à cet égard. Toutefois, je peux vous dire que la majorité d’entre eux travaillent dans des milieux où la technologie informatique occupe une place importante. Pour autant que je sache, leurs fonctions sont liées au travail de bureau et exercées au sein d’organisations. Leur incapacité ne les arrête pas. La technologie d’aujourd’hui est vraiment incroyable. Les gens handicapés font tellement de choses de nos jours. Je sais qu’aux États-Unis, une personne ayant une déficience visuelle exerce la profession de médecin et qu’au Canada, deux personnes atteintes de cécité partielle mènent des recherches sur le cancer. Il n’y a pas de limite à ce qu’une personne ayant une déficience visuelle peut faire si elle est appuyée par la technologie.
    L’INCA a participé à la création du projet Aspiro, en collaboration avec l’Union Mondiale des Aveugles. Il s’agit d’un site Web qui permet aux personnes aveugles ou atteintes de cécité partielle de planifier leur carrière et de se préparer au marché du travail.
    Pouvez-vous nous en dire un peu plus à propos de ce projet? Quand l’INCA a-t-elle lancé le site Web? Combien de gens pourraient avoir consulté le site Web?
    Je crois que le Projet Aspiro a été financé conjointement par le gouvernement de l’Ontario, l’INCA, l’Union Mondiale des Aveugles et un autre partenaire qui ne me vient pas à l’esprit.
    C’est un site Web que les employeurs et les employés aveugles ou atteints de cécité partielle peuvent consulter pour obtenir des renseignements sur ce dont les employés pourraient avoir besoin s’ils perdent la vue. Il permet également aux employés de comprendre ce qu’ils peuvent faire pour devenir plus aptes au travail et pour offrir aux employeurs un plus grand jeu de compétences. C’est une ressource en ligne qui renseigne et sensibilise à la fois les employeurs et les employés. Je ne sais pas combien de personnes ont visité le site Web, mais je peux obtenir cette statistique et vous la faire parvenir.
    Selon vous, combien de personnes aveugles ou atteintes de cécité partielle seront en mesure de trouver un emploi grâce au programme d’aide offert par votre site Web?
    J’aimerais croire que toutes les personnes qui cherchent un emploi en décrocheront un, mais je ne sais pas si c’est le cas, car j’ignore combien de personnes ont consulté le site Web. Pour qu’un site Web éducatif ou de sensibilisation soit utile, il est essentiel que les gens le consultent pour prendre connaissance des renseignements qu’il contient.
    Nous faisons la promotion du site Web, mais je crois qu’il n’a été lancé qu’en octobre dernier. Comme toute chose, il faut du temps pour que la communauté prenne conscience de son existence et que les gens l’utilisent comme ressource.
    Je ne peux m’empêcher de penser que toute personne qui le consulte apprendra quelque chose qui, avec un peu de chance, lui permettra de décrocher un emploi.
    Le site Web fournit-il, par exemple, des renseignements sur les outils et les ressources dont les employeurs ont besoin pour pouvoir embaucher des personnes aveugles ou atteintes de cécité partielle en toute confiance?
(1245)
    Oui, le site Web comporte un lien destiné aux employeurs qui traite de l’équipement adapté et des besoins d’aménagement spéciaux. Le site sensibilise les employeurs et leur fournit les ressources dont ils ont besoin pour aller de l’avant et pour trouver différents moyens d’accommoder des gens ayant différentes déficiences visuelles.
    L’une des observations que nous avons entendues à propos de nombreux programmes, y compris au cours de l’étude sur les apprentissages que nous avons menée plus tôt, a trait à l’importance des mentorats. Je présume que les mentorats sont également utiles aux personnes ayant une déficience visuelle. Offrez-vous un programme de mentorat qui peut aider les gens qui travaillent déjà ou ceux qui n’ont pas encore trouvé un emploi?
    Nous n’offrons pas de programme de mentorat officiel. Toutefois, au sein de l’INCA — où nous employons nous-mêmes des travailleurs ayant une déficience visuelle —, nous nous entraidons, en plus d’aider de manière officieuse les membres des collectivités. Nous commençons à constituer des conseils de la jeunesse au sein de l’INCA. Il y en a déjà quelques-uns en place dans certaines de nos divisions. Nous nous efforçons de mettre ces groupes sur pied à l’échelle nationale. Les conseils de la jeunesse sont chargés en partie d’examiner la possibilité d’offrir des mentorats dans le cadre de leur mandat. Cela permettra d’encadrer nos jeunes afin qu’ils acquièrent quelques-unes des compétences non techniques dont ils ont besoin. Toutefois, à ma connaissance, c’est tout ce que nous offrons en ce moment.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à Mme Charlton. Allez-y.
    Merci beaucoup.
    Je vous remercie tous d’être venus aujourd’hui. Je vous sais vraiment gré des exposés que vous nous avez donnés. Je pense que même les gens qui sont motivés par un intérêt personnel rationnel et qui ne croient pas que la diversité renforce nécessairement notre société devraient s’intéresser à ces enjeux, parce que n’importe qui pourrait être atteint d’une déficience à tout moment.
    Je tiens à approfondir un peu cette pensée. Bien que nous n’obtenions plus de données très fiables, en particulier depuis l’élimination de l’EPLA, avez-vous l’impression que les gens déjà employés qui deviennent handicapés bénéficient plus facilement d’aménagements spéciaux?
    Je pense, par exemple, aux gens qui travaillent dans des installations industrielles et qui se blessent au travail. S’ils sont membres d’un syndicat actif, ils sont plus susceptibles de bénéficier d’aménagements spéciaux et d’être en mesure de continuer à participer au marché du travail. En revanche, les employeurs sont moins enclins à prévoir des aménagements spéciaux dès le début. Toutefois, mes observations reposent entièrement sur des impressions, et j’aimerais savoir ce que vous en pensez.
    Ce n’est pas toujours le cas pour les personnes ayant des problèmes de santé mentale. Comme je l’ai mentionné, je fais beaucoup de bénévolat, et je suis membre de plusieurs conseils d’administration. Les règlements de certains d’entre eux stipulent que les gens qui siègent au sein du conseil doivent être sains d’esprit. Par conséquent, les gens me regardent bizarrement quand je mentionne un problème de santé mentale. Voilà la difficulté à laquelle nous nous heurtons. Je pense que vous avez raison de dire que les choses se passent mieux lorsque la personne occupe déjà un poste mais, à mon avis, cela dépend également du poste en question. Malheureusement, bon nombre de gens ayant des incapacités obtiennent des emplois de première ligne, des emplois inférieurs où ils ne représentent qu’une paire de bras et de jambes. De plus, s’ils éprouvent des difficultés, ils sont mis à la porte et remplacés par quelqu’un d’autre.
    Merci.
    Je pense que, dans vos propos, vous avez abordé dans une certaine mesure l’autre partie de ma question, alors je vais peut-être céder la parole à Mme Bergeron maintenant. D’après votre expérience, est-il plus facile de bénéficier d’aménagements spéciaux si l’on est syndiqué que, si, comme Mme Beckett vient de le dire, on occupe un emploi relativement inférieur et l’on est le premier à être renvoyé?
    Je ne dispose pas de statistiques à cet égard. Par conséquent, je peux seulement parler de mon expérience personnelle de travail.
    J’ai travaillé dans des milieux syndiqués et des milieux non syndiqués. J’ai travaillé dans un milieu syndiqué à titre de gestionnaire. Par conséquent, je ne bénéficiais pas du soutien du syndicat. Lorsque j’étais syndiquée, un groupe de gens m’appuyait. Je pouvais m’adresser à eux en cas de problème, et ils luttaient pour le régler en mon nom. Lorsque j’étais gestionnaire dans un milieu de travail non syndiqué, je devais me défendre par moi-même. La question n’est pas vraiment de savoir s’il vaut mieux faire partie d’un syndicat. Ce qui importe, c’est le fait d’avoir accès à des réseaux de personnes-ressources et d’être entouré de gens qui sont prêts combattre avec vous.
    Lorsque j’étais gestionnaire et que j’avais un problème, un syndicat ne prenait pas ma défense, mais j’étais entourée de nombreuses personnes qui occupaient également des postes de cadre et qui luttaient à mes côtés. Le fait d’être membre d’un syndicat facilite probablement les choses, parce que celui-ci est déjà préparé à mener ce genre de combat, alors que dans l’autre cas, il faut établir un réseau de personnes-ressources et cultiver la compréhension des gens.
    En ce qui concerne la question que vous avez posée auparavant, à savoir si l’on obtient davantage de soutien lorsqu’on est employé au moment où l’on développe la déficience ou lorsque, comme dans mon cas, on est déjà atteint d’une déficience au moment où l’on obtient l’emploi, je dirais qu’en particulier lorsqu’il s’agit d’une perte de la vision, les gens ne comprennent pas. Si je leur mentionne que j’ai besoin d’utiliser un ordinateur, ils pensent à leur propre environnement, se disent qu’ils fixent un écran toute la journée et se demandent comment je pourrai utiliser un ordinateur efficacement. Comment des personnes ayant une déficience visuelle pourront-elles se déplacer? Est-ce que le chien causera des problèmes ou endommagera le mobilier de bureau? Les employeurs se posent toutes sortes de questions, ne pensent pas pouvoir résoudre tous ces problèmes et, par conséquent, passent au candidat suivant.
    Si vous travaillez déjà et que vous êtes soudainement atteint d’une déficience, votre crédibilité est déjà établie. Vous avez déjà prouvé que vous possédiez les connaissances et les compétences requises dans le domaine. Je pense que, dans ces cas-là, l’employeur est plus susceptible de fournir des aménagements spéciaux et une assistance. L’obstacle à surmonter en l’occurrence est le fait qu’avant de pouvoir réintégrer son milieu de travail et bénéficier de ces aménagements spéciaux et de cette assistance, la personne doit être appuyée au cours des étapes préalables à l’emploi, car c’est comme si elle repartait à zéro. Elle doit acquérir de nouvelles compétences et se familiariser avec de nouvelles technologies, afin d’exercer ses fonctions différemment.
(1250)
    Merci.
    Votre temps est écoulé, mais si quelqu’un d’autre souhaite faire un commentaire...
    Puis-je faire un commentaire de 30 secondes ou moins?
    Vous avez 30 secondes pour faire votre commentaire, puis je vais laisser Mme Flatt répondre.
    Allez-y.
    Madame Bergeron, je tenais tout simplement à vous dire que vous aviez tout à fait raison. Lorsqu’une personne a déjà travaillé, les employeurs voient plutôt la personne que son incapacité. À l’opposé, les employeurs voient peut-être plutôt l’incapacité que la personne, si elle essaye d’entrer sur le marché du travail pour la première fois.
    Merci.
    C’est un bon point.
    Allez-y, madame Flatt.
    J’essayerai d’être brève.
    En ce qui concerne la population ayant des troubles mentaux, c’est plus difficile d’entrer ou de retourner sur le marché du travail après une maladie, en raison des stigmates y étant associés. Dès que les gens entendent qu’une personne a eu des troubles de santé mentale, ils se tourneront vers les médias et ce qu’ils disent au sujet de la violence, par exemple. La stigmatisation est si profonde qu’il est difficile de retourner travailler au même endroit, même si c’est possible. J’ai entendu de nombreuses histoires de gens qui sont retournés au travail, mais qui n’y sont pas restés longtemps. C’est très difficile.
    Merci de votre commentaire.
    Madame Leitch, allez-y.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup de prendre le temps de venir discuter avec nous. Nous vous en sommes très reconnaissants.
    J’ai de l’expérience dans le milieu des soins de santé. Je suis chirurgienne orthopédiste en pédiatrie. J’ai donc eu de nombreux patients qui avaient des troubles mentaux ou qui étaient aveugles ou sourds, par exemple.
    En côtoyant ces jeunes personnes dans le passé, j’ai notamment remarqué les premières étapes en ce qui a trait au travail. Quelles sont ces premières choses que les gens devraient faire ou qu’ils devraient demander aux employeurs, lorsqu’ils essayent de percer le marché du travail? La première étape est gigantesque. En ce qui concerne les enfants dans ma pratique qui ont la paralysie cérébrale, la majorité d’entre eux ont besoin en permanence de leur fauteuil roulant. Ils ne savent même pas ce qu’ils doivent demander.
    J’aimerais avoir votre opinion au sujet des premières étapes, des premières questions que les gens devraient poser et des premières choses sur lesquelles ils devraient mettre l’accent en vue de percer le marché du travail, parce que c’est souvent encore plus difficile pour eux que ce l’est pour les jeunes étudiants valides qui se cherchent un premier emploi et qui sont parfois anxieux à l’idée d’entreprendre les premières démarches.
    Qu’en pensez-vous? En ce qui concerne les jeunes gens qui entrent sur le marché du travail, quelles sont les premières questions qu’ils devraient poser? À quels employeurs devraient-ils s’attendre en premier? Nous pourrons ainsi mieux sensibiliser les employeurs à leur sujet.
    Les programmes dont j’ai parlé plus tôt, Routes to Work et Building Up Individuals Through Learning and Teamwork, abordaient les questions que vous avez soulevées. Si vous avez des troubles mentaux, cela peut miner vos aptitudes sociales. Les médicaments que vous prenez peuvent avoir toutes sortes d’effets secondaires qui font reculer les gens, pour ainsi dire.
    Par l’entremise du BUILT Network, nous aidions les gens à acquérir de telles compétences préalables à l’emploi. Ainsi, ils se trouvaient au moins sur le même pied d’égalité que les autres qui n’ont pas à surmonter un défi additionnel en raison de troubles mentaux. Ces programmes fonctionnent très bien. Malheureusement, bon nombre de ces programmes ont perdu leur financement ou n’existent tout simplement plus.
    Nous aimerions voir renaître certains de ces programmes, mais nous aimerions leur donner une nouvelle couleur et nous servir de la technologie pour que les gens puissent apprendre à mieux s’intégrer avant même d’y être. Par le passé, on nous disait que si vous vouliez avoir un travail, vous deviez faire du bénévolat. Eh bien, je l’ai fait, et je le fais encore. C’est ce que je fais actuellement. C’est une suggestion pertinente, mais il faut porter une attention particulière aux endroits où les gens font du bénévolat. Le bénévolat en tant que tel ne mène pas nécessairement au marché du travail. Il faut très bien réfléchir à l’endroit où vous faites du bénévolat et à la manière dont vous le faites.
    Les programmes communautaires présentent un avantage énorme. Nous sommes déjà passés par là. Nous savons que ce que les employeurs vous demanderont, et les gens n’ont souvent besoin que d’avoir un peu plus confiance en eux. Nous pouvons les aider à renforcer cet aspect, s’ils suivent l’un de nos programmes de formation préalable à l’emploi.
(1255)
    Madame Bergeron, madame Robbins, avez-vous un commentaire à cet égard?
    Les programmes de formation préalable à l’emploi sont essentiels. Vous ne pouvez pas avoir d’emploi si vous ne savez pas comment traverser la rue de manière sécuritaire ou si vous avez des lacunes en matière d’orientation ou si vous avez de la difficulté à vous déplacer. Vous ne pouvez pas avoir de travail si vous n’êtes pas autonome. Si vous ne savez pas comment vous nourrir, vous habiller et prendre soin de vous-même, vous n’aurez pas de travail. Si vous n’avez pas d’aptitudes à communiquer et de compétences générales, vous n’aurez pas de travail.
    C’est très important pour les gens, en particulier les aveugles ou les personnes ayant une déficience visuelle, d’apprendre toutes les compétences relatives à la technologie adaptée, aux instructions en braille, par exemple, parce que si vous ne pouvez pas utiliser un ordinateur, vous n’aurez pas de travail.
    La première chose que je conseillerais à une personne ayant une déficience visuelle serait de s’occuper de ses compétences préalables à l’emploi, de les pratiquer. Il faut les maîtriser le plus possible; ensuite, vous devriez faire du bénévolat. Apprenez et réseautez. L’important n’est pas qui vous connaissez, mais qui vous connaît. Assurez-vous que les gens vous connaissent.
    Il vous reste 30 secondes.
    Ce ne sera peut-être pas évident de répondre brièvement, mais la question est courte.
    Quels sont les deux principaux éléments auxquels nous devrions sensibiliser les employeurs en vue de les aider à considérer l’embauche de personnes ayant un handicap ou une incapacité?
    Je vous répondrai ce que la Commission de la santé mentale du Canada nous a récemment dit. Elle dit aux employeurs de payer maintenant ou de payer plus tard. Il faut que les gens ayant une incapacité travaillent. D’ici 2030, les troubles mentaux seront la première cause d’incapacité au Canada. Il faut faire comprendre aux employeurs qu’ils doivent embaucher des gens ayant une incapacité. Étant donné les besoins de ces gens, si les employeurs n’investissent pas maintenant en vue d’adapter leur milieu de travail, la situation s’empirera. Ils doivent participer de manière à sensibiliser leur propre milieu de travail. Ils doivent comprendre qu’il y a de plus en plus de gens ayant une incapacité et qu’il s’agit d’un désavantage économique pour le gouvernement qui doit en assumer tous les frais.
    Merci.
    Soyez brève, madame Bergeron.
    En ce qui a trait aux employeurs, il est vraiment important de briser les mythes au sujet des gens ayant une déficience visuelle. Il faut que les gens comprennent que ce n’est pas parce qu’une personne ne voit pas, qu’elle n’est pas une personne qualifiée et compétente. Les personnes aveugles ne sont pas différentes des autres. Nous ne voyons tout simplement pas le monde comme eux.
    Je me souviens d’avoir discuté avec un ministre en Alberta, d’où je viens. Il a dit: « Quel est, selon vous, le problème? » Je lui ai répondu que bien des gens croient que les mesures d’adaptation coûtent très cher et s’inquiètent beaucoup que l’argent des contribuables serve à de telles mesures. En toute honnêteté, je suis une contribuable et je suis renversée qu’une partie de mon argent durement gagné serve à payer la facture pour garder les lumières allumées toute la journée en vue d’accommoder les gens qui voient.
    Des voix: Oh, oh!
    Mme Diane Bergeron: Je crois que nous devons aborder autrement la question. Nous accommodons chaque jour la majorité de cette population. Je pourrais vous faire économiser beaucoup d’argent en éteignant les lumières.
(1300)
    Merci, madame Bergeron.
    Rodger, pourriez-vous nous mener...
    M. Rodger Cuzner: Jusqu'à la fin?
    Le président: Oui.
    J’aurais quelques commentaires, mais je crois que je vais d’abord me servir de ce commentaire et de l’autre commentaire mentionné plus tôt, à savoir que l’important n’est pas qui vous connaissez, mais qui vous connaît.
    Nous sommes des politiciens et nous nous gavons de phrases toutes faites que nous essayons de faire passer pour de la perspicacité, donc... mais ce n’est pas vraiment du vol, si j’emprunte les deux; ce serait plus tôt une sorte d’étude de marché.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Rodger Cuzner: Quoi qu'il en soit, il s’agit de deux excellents commentaires.
    J’aimerais revenir sur le concept « du travail, de la maison et des amis ». Ce n’est pas un problème simple, parce que ces aspects sont interreliés. La question d’un logement abordable dans le cas des gens ayant une incapacité est importante. Je suis persuadé que tous nos témoins le répéteront.
    J’aimerais vous entendre sur le sujet. Les personnes ayant des troubles mentaux représentent un nombre disproportionné de Canadiens qui vivent dans la pauvreté. Elles représentent également un nombre disproportionné de gens dans le milieu carcéral au pays. En tant que pays et en tant que peuple, si nous ne faisons pas tout en notre pouvoir pour comprendre et accommoder ces gens, certains se retrouveront à la rue ou dans les prisons. Cela finira par nous coûter beaucoup plus cher.
    Pourrais-je vous entendre à ce sujet? Diane et Christine voudront peut-être également faire un commentaire.
    Vous venez de frapper en plein là où je l’espérais.
    Vous connaissez peut-être la pyramide des besoins de Maslow; du moins, la médecin au bout la connaît probablement. Maslow était un travailleur social qui a déterminé ce dont les gens ont besoin pour vivre et être heureux et en santé. Il a représenté ses observations sous la forme d’une pyramide. Les choses dont nous avons le plus besoin se trouvent au pied de la pyramide. Il s’agit de besoins fondamentaux. Les choses dont nous avons le moins besoin sont en haut. Les deux ou trois premiers paliers — j’essaie de me représenter le tout dans ma tête — concernent la sécurité. Si vous ne vous sentez pas en sécurité, vous ne pouvez pas avoir une bonne santé mentale.
    Vous avez donc raison au sujet de la pauvreté. Si nous n’abordons pas le problème de la pauvreté, les gens seront de plus en plus malades. La pauvreté mine la santé mentale; cela nous rend malades. Vous avez raison de dire qu’il faut nous occuper de la pauvreté et du logement.
    En ce qui a trait au logement, l’un des problèmes avec lesquels sont aux prises les gens ayant des troubles mentaux, est que leurs symptômes ne sont parfois pas des plus plaisants. Des gens ont parfois de nombreux symptômes liés à leur maladie ou à leurs médicaments; par conséquent, il se peut qu’ils ne soient pas de très bons voisins. Nous sommes toujours aux prises avec de tels problèmes.
    Il faut d’abord nous occuper de la pauvreté, et nous ne pouvons pas le faire si nous sommes... en particulier avec des périodes intermittentes. J’ai entendu quelqu’un parler plus tôt d’incapacité intermittente. Nous parlons plutôt d’emploi intermittent, parce que c’est tout ce que nous réussissons à avoir. Je viens de terminer un contrat. J’ai travaillé 18 heures sur une période de 14 semaines. C’était un contrat rémunéré que j’avais obtenu. Comment peut-on réussir à vivre avec cela?
    De plus, il faut constamment nous démener auprès des responsables de notre programme de sécurité du revenu, parce que si nous avons gagné 3 ¢, ils veulent le savoir. Je ne sais pas ce qu'il en est pour les autres programmes provinciaux, mais les responsables du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées se réservent le droit de vous appeler pour vous demander de vous présenter le lendemain au bureau avec vos documents, parce qu’ils veulent y jeter un coup d’oeil.
    J’aboutirai dans un lit d’hôpital.
    Ils iront maintenant vous visiter, et le gouvernement fédéral vous rendra maintenant également visite.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Rodger Cuzner: Monsieur le président, puis-je poser une dernière question?
    Le président: Oui.
    M. Rodger Cuzner: C’est complètement hors sujet, mais je voulais vous demander si Le bon côté des choses rend service aux gens ayant des troubles de santé mentale.
(1305)
    Des troubles bipolaires?
    M. Rodger Cuzner: Oui.
    Je ne l’ai pas encore vu, mais j’en ai vu des extraits. J’ai également écouté une émission avec les acteurs et le producteur. J’espère vraiment que c’est un très bon film. Je crois bien que oui.
    Il y a d’autres productions qui sont très mauvaises. Il n’y a pas si longtemps, j’ai vu la série Do No Harm. Elle met en scène un médecin qui a prétendument un trouble de personnalités multiples. Cependant, ce n’est pas du tout le cas; c’est une caricature à la Jekyll et Hyde. Chaque soir, il devient une personne qui aime faire la fête. Cela n’a rien à voir avec les troubles de santé mentale.
    J’ai aussi vu l’autre jour la bande-annonce de la série Cracked. Elle est censée porter sur un joueur de hockey qui subit une sorte de dépression nerveuse. Dans la bande-annonce, on le voit patiner, et tout à coup son visage change, et on a l’impression qu’il vient de griller un fusible. C’est très irréaliste, et c’est une mauvaise chose que nous soyons ainsi présentés, parce que les gens croient que c’est la réalité.
    Merci de vos commentaires. Nous allons nous arrêter là.
    Merci beaucoup de votre présence.
    Sur cette note, la séance est levée.
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