:
Je vous remercie, madame la présidente.
Je suis heureux de tous vous revoir, chers collègues. C'est un plaisir d'avoir l'occasion de comparaître devant le Comité. Je me suis déjà présenté devant vous — non seulement au comité de l'immigration, mais aussi au comité sur l'Afghanistan — pour parler de certaines des questions relatives à la réponse du gouvernement concernant l'initiative de réinstallation des réfugiés et les mesures prises pour donner à des personnes parmi les plus vulnérables du monde la possibilité de refaire leur vie ailleurs.
L'initiative de réinstallation menée en Afghanistan est une des plus difficiles et des plus importantes de l'histoire du Canada. Nous faisons notre possible pour aider plusieurs groupes. Nous aidons des personnes qui ont servi aux côtés des Forces canadiennes et qui ont travaillé avec le gouvernement du Canada pendant notre mission en Afghanistan. Nous réunifions des familles dans le cas de personnes déjà réinstallées au Canada, et nous aidons à promouvoir une voie d'accès au Canada pour les personnes prises pour cibles en raison de qui elles sont ou, peut-être, de l'aide qu'elles ont apportée.
Les difficultés associées à cette initiative de réinstallation sont sans pareil, en tout cas, si je compare à ce à quoi j'ai participé ou, je dirais, aux opérations récentes menées au Canada ou dans la plupart des autres pays du monde. Les difficultés auxquelles nous faisons face vont du chaos dans lequel s'est faite l'évacuation à l'arrivée des talibans à Kaboul au manque de présence canadienne sur le terrain depuis le retrait des Forces canadiennes, en passant par le manque de capacité internationale en ce qui concerne la réinstallation des réfugiés, les États du monde entier n'ayant plus accordé l'asile pendant les années de la pandémie de COVID‑19. L'initiative de réinstallation est aussi marquée par un manque de représentation diplomatique.
Évidemment, certaines difficultés persistent. Ainsi, il est difficile de garantir un départ sans encombre aux personnes restées en Afghanistan. Je vous rappelle que nous avons affaire à un territoire saisi par les talibans, qui figurent sur la liste des entités terroristes en droit canadien. La situation peut être extrêmement difficile pour les personnes qui cherchent à quitter l'Afghanistan, car les exigences changent sans cesse. Les difficultés rencontrées dans cette mission sont particulières.
Malgré l'intensité de ces difficultés, nous sommes fiers de certains succès, même si la tâche n'est pas terminée. À ce jour, environ 28 000 Afghans ont été réinstallés au Canada où ils peuvent refaire leur vie. J'ai eu l'occasion d'en rencontrer un certain nombre. Croyez-moi, c'est toute une expérience de se joindre aux familles sur le tarmac quand un avion arrive. J'ai vu des parents embrasser le sol avec leurs enfants — du même âge que les miens — en arrivant au Canada parce qu'ils croient enfin être en sécurité après les traumatismes épouvantables qu'ils ont subis.
Nous parlons de personnes qui étaient prises pour cibles parce qu'elles avaient essayé d'améliorer leur sort, ainsi que celui de leur famille et de leur communauté en Afghanistan. Elles défendaient les droits de la personne ou travaillaient comme journalistes. Elles étaient prises pour cibles à cause de qui elles étaient. Elles appartenaient à la communauté LGBTQ+, à des minorités religieuses, c'étaient des femmes dirigeantes et d'autres groupes encore. Je pense souvent aux femmes juges qui essaient de venir au Canada et qui, souvent, avaient condamné des talibans à de la prison. Elles sont maintenant persécutées et menacées de torture et de mort à cause de leur désir de contribuer à leur société.
Je vous le dis, c'est probablement une des choses auxquelles je suis le plus fier d'avoir participé. C'est une des choses les plus difficiles auxquelles j'ai participé, mais c'est le genre de choses qui, à mon avis, font que le travail que nous choisissons d'accomplir en vaut la peine.
Je suis heureux de pouvoir aider à faire bouger les choses à ma mesure à ce poste et à protéger des vies.
[Français]
Je vous prie de m'excuser si je m'exprime en anglais. Il s'agit d'un enjeu difficile et chargé d'émotion pour bien des gens. Cependant, il est très important de continuer à appuyer les personnes les plus vulnérables. Il y a maintenant près de 28 000 personnes qui sont maintenant en sécurité, ici, au Canada.
[Traduction]
C'est quelque chose dont je suis fier. C'est quelque chose dont les Canadiens sont fiers. Cependant, des difficultés demeurent. La situation est difficile pour les personnes qui se trouvent encore en Afghanistan. Les personnes qui se trouvent dans des pays tiers et qui n'ont pas réussi à y obtenir les papiers nécessaires pour en partir éprouvent des difficultés. Quelles que soient les difficultés qui demeurent, notre engagement à réinstaller 40 000 réfugiés afghans ne faiblira pas. C'est un engagement dont je suis fier et nous poursuivrons nos efforts pour atteindre cet objectif.
Je vous remercie, madame la présidente. Je serai heureux de répondre aux questions des membres du Comité.
:
Merci, madame la présidente. Je propose:
Que, conformément à l'article 108(2) du Règlement:
(a) le Comité prolonge le nombre total de réunions actuellement allouées à l'étude en cours concernant la réponse du gouvernement au rapport final du Comité spécial sur l'Afghanistan d'un minimum de trois réunions, qui se tiendront avant le 31 mars 2023, afin d'examiner les questions liées à l'étude en cours; et
(b) que la sénatrice Marilou McPhedran, le député Marc Garneau, le ministre Harjit Sajjan et le ministre Marco Mendicino soient invités à comparaître séparément devant le Comité avant le 31 mars 2023, pendant deux heures chacun, pour discuter de questions liées à l'étude en cours; et
(c) La Dre Lauryn Oates, du groupe Canadian Women for Women in Afghanistan, soit invitée à comparaître individuellement devant le Comité avant le 31 mars 2023 pour une heure, pour discuter de questions liées à l'étude en cours; et
(d) que des assignations soient émises pour la comparution de l'ancienne ministre des Femmes et de l'Égalité des genres, Maryam Monsef, Laura Robinson et George Young, pour qu'ils comparaissent séparément, pendant deux heures chacun, aux dates et heures fixées par le président, mais au plus tard le 31 mars 2023, pour discuter de questions liées à l'étude en cours; et
(e) que des assignations soient émises pour la comparution de hauts fonctionnaires du ministère de la Défense nationale devant le Comité, à la date et à l'heure fixées par le président, mais au plus tard le 31 mars 2023, pour discuter de questions liées à l'étude en cours.
J'ai transmis cette motion à la greffière dans les deux langues officielles. Cette motion est pertinente puisqu'elle est liée à ce que le Comité étudie actuellement.
Je vais commencer par expliquer la raison d'être de cette motion en disant que je suis convaincue que la sénatrice McPhedran a agi de bonne foi lorsqu'elle a produit ces lettres de facilitation.
Je demande à mes collègues d'écouter attentivement mes arguments. Ma motion ne repose pas sur des motifs politiques, mais sur une histoire très humaine que je connais depuis plus d'un an maintenant. Je crois que nous aurions dû aider plus d'Afghans que le gouvernement ne l'a fait.
Je veux expliquer au Comité pourquoi je crois que cette motion devrait être adoptée, en racontant l'histoire d'une de mes électrices. Les lettres de la sénatrice McPhedran ont mis la famille d'une résidante de ma circonscription en danger et elles ont ensuite entravé leurs efforts pour venir au Canada. Je pense qu'il est important que ce cas soit consigné au compte rendu. Je ne divulguerai pas l'identité de ces personnes pour des raisons de sécurité et de protection de la vie privée. Je partage des renseignements qu'ils m'ont déjà autorisée à divulguer.
Le 23 août 2021, une de mes électrices a communiqué avec mon bureau au nom de son cousin et de sa famille de neuf personnes, qui sont des ressortissants afghans. Elle a informé mon bureau que son cousin faisait partie d'une ONG appuyée par le gouvernement canadien. Il avait pu fournir à IRCC des accords de contribution conclus entre l'ONG et le gouvernement du Canada qui attestaient l'existence d'une relation de travail. Elle nous a expliqué que son cousin et sa famille avaient tenté de fuir l'Afghanistan pour venir au Canada parce qu'ils étaient en danger en raison de leur travail envers la démocratie, l'égalité et la liberté d'expression en partenariat avec le gouvernement du Canada. Ils étaient menacés par les talibans.
Elle s'est adressée à mon bureau parce qu'elle ne comprenait pas pourquoi sa famille ne recevait pas d'aide pour se réinstaller au Canada et qu'elle avait des difficultés à communiquer avec les fonctionnaires d'IRCC et d'AMC. Elle nous a demandé de nous renseigner et de l'aider à régler son dossier.
À la suite de cette requête, mon bureau a demandé au cousin de mon électrice — que j'appellerai M. X — de nous autoriser à poser des questions sur son statut. Nous avons reçu des formulaires de consentement, l'autorisation d'une tierce partie et des documents portant sur les liens entre le demandeur et le gouvernement canadien.
Au début de nos échanges, mon électrice nous a envoyé un courriel que M. X disait avoir reçu du ministère de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté d'Islamabad le 27 juillet 2021 et dans lequel on lui suggérait de faire une demande dans le cadre de la politique d'intérêt public temporaire pour la réinstallation des ressortissants afghans au Canada. Il a fourni à mon bureau les courriels qu'il a envoyés à IRCC pour se prévaloir de cette mesure dans les délais prescrits. Cette demande fut remise aux bureaux d'IRCC à Islamabad le 29 juillet 2021, conformément aux directives qu'il affirme avoir reçues de représentants du ministère dans le courriel susmentionné.
En outre, mon électrice a pu nous remettre des preuves que son cousin avait effectivement fourni des services au Canada. Il avait en sa possession un contrat de service du gouvernement du Canada avec une ONG à laquelle il était associé, et des documents — apparemment émis par cette ONG — concernant ses liens avec le travail visé par ce contrat. Il a aussi été en mesure de fournir des témoignages de fonctionnaires du gouvernement du Canada qui travaillaient avec l'ONG.
En août 2021, la famille de M. X correspondait aussi directement avec la sénatrice Marilou McPhedran sur la possibilité d'assurer le passage de M. X et de sa famille de l'Afghanistan jusqu'au Canada.
Mon électrice nous a parlé de ces échanges avec la sénatrice après les élections fédérales du 15 octobre 2021. Elle nous a dit que la sénatrice McPhedran et son bureau avaient directement fourni à M. X des lettres de facilitation dans lesquelles il était précisé qu'un visa avait été délivré à certains membres de la famille de M. X et pouvait faciliter leur passage vers le Canada.
Jusqu'à ce moment‑là, mon bureau procédait en supposant que la famille de M. X avait reçu certains documents officiels directement des fonctionnaires canadiens d'IRCC ou d'AMC. Ces documents, qui comportent le logo du gouvernement du Canada et un sceau qui semble représenter un ministère du gouvernement du Canada, auraient été expédiés à M. X et à sa famille par courriel par la sénatrice et son bureau le 26 août 2021. Le courriel suggérait également que la famille se présente à l'aéroport international Hamid Karzaï, plus précisément à Baron Gate, sans parler à qui que ce soit de cette correspondance.
Mon électrice nous a dit qu'après avoir reçu ces documents, et conformément aux conseils contenus dans le courriel de la sénatrice McPhedran et de son bureau, la famille de M. X a tenté de se rendre à l'aéroport international Hamid Karzaï le 26 août 2021, mais que les conditions étaient extrêmement dangereuses et qu'ils avaient dû rebrousser chemin.
Elle a également indiqué à mon bureau qu'après avoir reçu ces documents et présenté une demande dans le cadre de la politique d'intérêt public temporaire pour la réinstallation des ressortissants afghans décrite dans le courriel d'IRCC d'Islamabad, elle et sa famille croyaient qu'ils avaient le passage vers le Canada, mais ils ne comprenaient pas pourquoi ils n'avaient pas obtenu de l'aide pour partir.
Entre août 2021 et juin 2022, mon bureau a correspondu avec AMC et IRCC plus de 30 fois par courriel et par téléphone pour savoir quel était l'état de la demande de réinstallation de la famille de M. X. Pendant tout ce processus, nous avons constamment tenu IRCC et AMC au courant de la situation de M. X et de sa famille en Afghanistan, une situation qui, selon eux, s'était considérablement aggravée en raison d'entretiens avec des talibans et de harcèlement.
Les communications avec mon électrice ont commencé pendant les élections fédérales, alors que le gouvernement était en période de transition et que les processus ou documents utilisés pour évacuer les gens n'étaient pas très clairs. En raison de ces obstacles et après avoir reçu cette correspondance, mon bureau a cherché à comprendre ce qui retardait le processus de réinstallation de la famille de M. X, compte tenu des efforts qui avaient été faits et des documents qu'ils avaient en leur possession.
Même après nos multiples demandes de renseignements, IRCC n'a pas pu nous confirmer avoir reçu la demande présentée par M. X le 29 juillet 2021 dans le cadre de la politique d'intérêt public temporaire pour la réinstallation des ressortissants afghans, même après que nous avons présenté les documents transmis à mon bureau par mon électrice, confirmant l'affirmation de la famille selon laquelle une demande avait été présentée dans les délais prescrits. IRCC ne pouvait pas confirmer qu'une telle demande avait été faite par M. X à la fin de juillet 2021, même après avoir reçu des documents qui semblent corroborer le tout.
Bien que les documents transmis à mon bureau semblaient légitimes et confirmaient le fait que la famille de M. X avait présenté une demande en juillet 2021 dans le cadre de cette politique d'intérêt public temporaire, IRCC n'a jamais confirmé avoir reçu cette demande ou y avoir donné suite.
Après que M. X ait fait une demande dans le cadre de la mesure décrite dans ce courriel, le gouvernement a annoncé un programme d'immigration supplémentaire pour la réinstallation des ressortissants afghans. À mon avis, il semble y avoir eu un manque de coordination entre la politique d'intérêt public temporaire dont il est question dans le courriel d'IRCC d'Islamabad auquel M. X a d'abord répondu et ce nouveau programme, qui, à son tour, semble avoir entraîné beaucoup de confusion dans la famille de M. X. Ils croyaient qu'ils étaient déjà engagés dans un processus de demande valide pour obtenir de l'aide et leur évacuation vers le Canada, et ils ont supposé que leur demande était en traitement. Mon bureau n'a certainement pas entendu dire le contraire pendant un certain temps.
Le manque de ressources allouées à l'évacuation des Afghans et l'orientation d'IRCC au moment de la première demande dans le cadre de la politique d'intérêt public temporaire, et le fait que le gouvernement était en période de transition pendant l'élection fédérale, sont de notoriété publique.
Après avoir essayé pendant un certain temps de connaître l'état de la demande initiale de M. X, un fonctionnaire d'IRCC a conseillé, le 18 janvier 2022 — des mois plus tard — à la famille de présenter une nouvelle demande, cette fois au Programme de mesures spéciales en matière d'immigration pour les Afghans et dans le cadre d'une relation de prestation de services avec le Canada. C'est ce qu'ils ont fait le 5 février 2022.
Plusieurs mois plus tard, le 27 mai 2022, ils ont reçu une décision concernant cette demande. Ils ont été informés par IRCC que même si M. X et sa famille avaient été admissibles au programme spécial, IRCC ne donnerait pas suite à leur demande, citant la limite du nombre de personnes acceptées par le programme.
Je me demande s'ils savaient que ces documents étaient inauthentiques et si la famille aurait pu, en fait, entrer au pays dans le cadre de ce programme.
De plus, au cours de ces interactions avec AMC et IRCC, mon bureau n'a jamais été en mesure de confirmer le caractère officiel des prétendues lettres de facilitation et directives que la famille de M. X avait reçues de la sénatrice McPhedran et de son bureau le 26 août 2021. Mon bureau avait entamé ce processus pour essayer de comprendre pourquoi certains membres de la famille de M. X avaient reçu des documents, alors que d'autres n'avaient rien reçu.
Encore une fois, lorsque mon électrice a commencé à communiquer avec mon bureau, elle et sa famille supposaient qu'ils détenaient des documents officiels délivrés dans la hâte et le chaos des efforts du gouvernement du Canada pour évacuer certaines personnes pendant la chute du pays.
Plusieurs des moyens qui seraient habituellement utilisés par mon bureau pour vérifier des renseignements relatifs à un dossier n'étaient pas facilement accessibles dans ce cas‑ci en raison de l'opacité des processus gouvernementaux d'évacuation de l'Afghanistan, et qu'il y avait des élections fédérales et que le gouvernement était en période de transition.
Ce n'est qu'en octobre 2021, après les élections fédérales, que mon bureau a appris que la famille de M. X avait obtenu leurs documents directement de la sénatrice et de son bureau, et non après avoir communiqué avec des représentants d'AMC ou d'IRCC. Cela nous a causé beaucoup de confusion, car, après les premières discussions avec mon électrice, nos échanges avec AMC et IRCC avaient pour but d'essayer de comprendre pourquoi seulement quelques membres de la famille de M. X avaient reçu des documents de voyage, plutôt que tous.
Après avoir découvert que la famille de M. X avait reçu ces lettres de la sénatrice et de son bureau, nous avons poursuivi nos échanges avec AMC et IRCC pour essayer de savoir quel était leur statut officiel.
Après avoir parlé à plusieurs fonctionnaires d'IRCC et d'AMC pendant des mois, aucun n'a pu nous confirmer que les documents et les directives transmis à M. X par la sénatrice McPhedran et son bureau avaient en fait été délivrés par un fonctionnaire d'un ministère du gouvernement du Canada, quel qu'il soit.
Après que la demande de M. X au programme de mesures spéciales pour les Afghans ait officiellement été refusée en mai 2022 en raison des limites imposées, je me suis adressée directement à la sénatrice McPhedran au début de juin 2022. Ce fut ma première et ma seule conversation avec la sénatrice à ce sujet.
Au cours de cet appel, elle a confirmé verbalement qu'elle avait effectivement correspondu avec M. X. Je n'ai pas demandé à la sénatrice où elle avait obtenu les documents qu'elle et son bureau avaient transmis à M. X, car nous n'avions pas encore obtenu de réponse définitive d'IRCC ou d'AMC concernant le statut de ces documents. Normalement, nous obtenons des réponses claires dans ce genre de situation. Nous supposions que le délai pour obtenir la confirmation était dû au fait que mon bureau ne comprenait pas très bien quels étaient les processus et les documents que le gouvernement canadien utilisait habituellement, le cas échéant, pour faciliter les départs pendant le chaos entourant l'évacuation qui s'est produite en août 2021.
J'ai communiqué pour vérifier si j'avais mal saisi quelque chose dans le dossier et pour confirmer la validité de la demande de mon électrice. Je n'ai jamais pensé qu'un parlementaire en poste aurait fourni des documents inauthentiques.
Après mon appel téléphonique avec la sénatrice McPhedran, je n'avais aucune raison de m'inquiéter jusqu'à ce que l'on me parle d'un article publié dans l'Edmonton Journal selon lequel un sénateur canadien non identifié et son bureau avaient directement transmis des documents à des ressortissants afghans, et que la diligence formelle n'avait peut-être pas été exercée pour vérifier la validité des demandes de certaines personnes qui avaient reçu ces documents.
Mon bureau a donc multiplié les efforts pour faire pression sur IRCC et AMC pour qu'ils établissent la véritable provenance des documents transmis à la famille de mon électrice, car les fonctionnaires avaient indiqué que ces documents avaient une incidence concrète sur les efforts faits par la famille de M. X pour quitter l'Afghanistan. Ne recevant aucune réponse et n'ayant aucun autre recours, j'ai écrit au ministre Fraser pour lui décrire la situation. Le 27 juillet, le a répondu à ma lettre du 7 juillet en m'informant qu'il avait lancé une enquête, que les documents étaient réputés inauthentiques et qu'il avait renvoyé l'affaire aux autorités.
Après cette réponse, en septembre 2022, le Globe and Mail a publié un article intitulé « Selon Ottawa, une sénatrice canadienne a transmis des documents non authentiques à une famille afghane », qui faisait état d'allégations selon lesquelles la sénatrice Marilou McPhedran aurait délivré des titres de voyage inauthentiques à des ressortissants afghans.
La semaine dernière, le jeudi 2 février, la sénatrice McPhedran a prononcé un discours au Sénat. Elle a dit que, bien qu'elle ait effectivement envoyé ce qu'elle a appelé des lettres de facilitation de visa à certains ressortissants afghans, elle l'a fait en coordination avec l'ancienne ministre des Femmes et de l'Égalité des genres, Maryam Monsef, une consultante et « un petit groupe de hauts fonctionnaires », y compris des personnes non identifiées dans d'autres pays.
Dans ce discours, la sénatrice McPhedran a également allégué que des centaines de lettres possiblement inauthentiques auraient été produites à l'aide d'un modèle de document ressemblant aux documents canadiens officiels de George Young, le chef de cabinet du ministre de la Défense de l'époque, Harjit Sajjan. La sénatrice McPhedran a fait ces allégations en invoquant le privilège parlementaire accordé au Sénat, et aucune de ces allégations n'a encore été prouvée.
Le 3 février 2023, le Toronto Star a publié subséquemment un article intitulé « Une sénatrice canadienne a aidé à sauver des femmes afghanes. Le ministère de l'Immigration a fait appel à la police ». Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada a déclaré qu'afin de faciliter l'évacuation des Afghans vulnérables, le gouvernement du Canada avait envoyé des lettres directement aux ressortissants afghans admissibles à venir au Canada afin de les aider à franchir les points de contrôle en se rendant à l'aéroport et à entrer à l'aéroport de Kaboul. IRCC n'a autorisé aucun tiers à émettre ces lettres de facilitation en son nom.
Nous avons donc un problème, chers collègues. La déclaration publique d'IRCC selon laquelle personne n'a été autorisé, y compris les personnes nommées ci‑dessus, à délivrer des documents de voyage à des ressortissants afghans soulève de nombreuses questions que notre comité devrait examiner. C'est une situation extrêmement troublante qui comporte de très graves allégations.
Il y a lieu de se demander si, entre autres choses, une parlementaire canadienne, une consultante dont elle a retenu les services avec l'argent des contribuables, un ministre en poste et le chef de cabinet du ministre de la Défense ont délibérément délivré des documents non authentiques à des ressortissants afghans, ce qui a pu permettre des évacuations dans certains cas ou, dans d'autres, entraîner des difficultés parce que les gens ont été amenés à croire qu'ils détenaient des documents officiels, alors qu'en fait, ces documents ne l'étaient pas, comme ce fut le cas pour mes concitoyens.
On peut se demander qui, au sein du gouvernement, était au courant de cette affaire, à quel moment, et quelles mesures ont été prises, le cas échéant.
On peut également se demander pourquoi de hauts fonctionnaires du gouvernement auraient procédé d'une autre façon ou utilisé un processus non reconnu pour évacuer des ressortissants afghans, plutôt que des processus officiels.
On peut aussi se demander pourquoi cette façon de faire n'a pas été rendue publique ou mise à la disposition d'un plus grand nombre de parlementaires.
Cela soulève également des questions sur l'intégrité du processus de sélection du gouvernement pour les ressortissants afghans ayant des liens avec le Canada et sur les conséquences qu'aurait pu avoir la délivrance de documents non authentiques sur un nombre inconnu d'Afghans qui voulaient venir au Canada, qui auraient dû venir au Canada, mais qui n'ont pas pu le faire.
Cela soulève des questions sur le contournement des listes d'attente, la vérification de l'identité et, surtout, sur l'équité de notre processus de sélection des immigrants.
La chute de l'Afghanistan aux mains des talibans en 2021 a provoqué une grave crise humanitaire qui a exigé une réponse immédiate, même si le gouvernement avait déclenché des élections générales. J'ai moi-même vu mon mari, un ancien combattant ayant servi en Afghanistan, apprendre cette nouvelle et je savais que nous étions en mesure de réagir.
Tous les membres de notre comité ont dans leur communauté des personnes qui sont touchées par cette crise. Plusieurs tentent de régler des cas dévastateurs touchant des membres de leur famille qui étaient restés là‑bas, qui vivaient dans la clandestinité sous la menace constante des talibans alors qu'ils se démenaient avec un gouvernement de transition en raison d'une période d'élection.
Nous voulons tous désespérément que ces personnes puissent trouver refuge au Canada, mais aucun d'entre nous n'a émis de faux visas. Les parlementaires, qu'il s'agisse de députés ou de sénateurs, ne sont pas légalement autorisés à prendre eux-mêmes ces décisions. Ils ne font pas partie de l'organe exécutif du gouvernement à moins d'être nommés. De même, les ministres et leur personnel n'exercent pas tous les mêmes pouvoirs. Par conséquent, ces personnes n'ont pas nécessairement le pouvoir ou l'autorité dans le cadre de leurs fonctions législatives de délivrer des visas ou d'obliger le gouvernement à agir en leur nom. Cela est vrai, peu importe les bonnes intentions de la personne, et je suis certaine que la sénatrice McPhedran était bien intentionnée, ou la gravité des circonstances.
Agir autrement pourrait avoir d'énormes répercussions négatives, notamment en contournant la nécessaire nature apolitique et indépendante de choses telles que les systèmes d'immigration du Canada, qui font que nos processus sont sûrs pour tous, impartiaux et équitables. Ces tâches ne peuvent et ne devraient être exécutées que par des fonctionnaires dûment habilités par l'organe exécutif du gouvernement canadien ou des processus officiellement légiférés et réglementés.
Cela ne veut pas dire que le gouvernement ne devrait pas être tenu responsable lorsque le système ne fonctionne pas. En fait, le rôle des parlementaires dans ces situations est de poser des questions sur les processus et de demander des comptes au gouvernement pour veiller à ce que ces systèmes fonctionnent correctement, surtout en période de crise. C'est ce que la sénatrice McPhedran et la ministre Maryam Monsef auraient dû faire. Si les processus ne fonctionnent pas, le rôle du Parlement est d'obliger le gouvernement à rendre des comptes et d'exiger des changements.
Notre rôle n'est pas de faire des choses que nous ne sommes pas dûment autorisés à faire. Ce n'est pas notre rôle d'utiliser des voies non officielles par l'entremise du gouvernement pour faire ce genre de choses. En fait, il incombe au gouvernement d'empêcher que de telles voies non officielles existent. Cela m'amène à l'essentiel de la motion, et je vais conclure.
Compte tenu des conséquences et des répercussions possiblement importantes des allégations énoncées dans le discours de la sénatrice McPhedran et dans de nombreux articles de presse, je crois qu'il est urgent d'examiner l'étendue et la véracité de ces allégations et de veiller à ce que le gouvernement prenne les mesures appropriées, si nécessaire.
Dans le cas de mon électrice, comme je l'ai appris aujourd'hui par hasard, la situation a eu un dénouement heureux. Son cousin a reçu l'aide du gouvernement américain. Même s'il avait des liens plus serrés avec le Canada, il est maintenant aux États-Unis. J'aurais aimé pouvoir l'aider. J'aurais aimé pouvoir écrire une lettre assise à mon bureau au lieu de passer un an à patiner sur place avec des fonctionnaires qui ne me disaient pas ce qui se passait alors que le cousin de mon électrice était menacé par les talibans. C'est ce dont il est question ici. Ce n'est pas une blague.
Pourquoi des assignations sont-elles nécessaires? Il y a des citations à comparaître dans cette motion. Le gouvernement a poursuivi le Parlement devant les tribunaux au sujet d'un ordre du Parlement visant à délivrer des documents. J'ai du mal à croire que ces fonctionnaires voudront comparaître devant le Comité sur une question aussi grave sans assignation. J'ai inclus les fonctionnaires du ministère de la Défense dans une assignation à comparaître parce qu'ils ont annulé une réunion qui devait avoir lieu avec le Comité lundi, après que l'affaire ait été révélée. Pourquoi tous ces fonctionnaires? Ce sont les fonctionnaires visés par les allégations de la sénatrice McPhedran au Sénat, et j'aimerais leur donner l'occasion de se défendre ou d'expliquer pourquoi ils ont choisi de procéder de manière non officielle plutôt que d'exercer des pressions pour faire des changements, ce qu'ils peuvent faire dans le cadre de leurs fonctions.
L'essentiel est que nous pouvons modifier le système. C'est ce que chacun d'entre nous peut faire. Je sais que vous avez tous tenté de faire venir des gens au pays en essayant d'apporter des changements au système. Je sais que même des collègues libéraux exerçaient probablement des pressions sur le gouvernement en pleine campagne électorale pour qu'il en fasse davantage. Je le sais. Je sais que tout le monde était bien intentionné, mais au bout du compte, les règles ont été violées et cela a fait du tort à des gens. Cela a nui à beaucoup de personnes et à l'intégrité de notre processus d'immigration.
Je crois que nous devons faire venir plus de gens ici. Je pense que le gouvernement n'aurait pas dû déclencher des élections sans avoir un plan pour faire face à cette crise.
Nous devons examiner ce qui s'est passé ici, au Parlement. C'est la raison d'être de notre comité. Nous devons savoir comment le système a échoué, pourquoi cela a pu se produire et ce qui s'est passé, afin que nous puissions recommander un recours possible au gouvernement et que le gouvernement puisse apporter des changements.
Dans l'intérêt du travail exceptionnel que vous avez fait avec les ressortissants afghans, dans l'intérêt des ressortissants afghans qui n'ont pas reçu de réponse d'IRCC, nous devons comprendre pourquoi la meilleure option pour venir au Canada était qu'un parlementaire, qu'une sénatrice, délivre un faux visa sur le coin de son bureau.
Merci.