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Je vous remercie de votre question, monsieur Redekopp.
Comme d'habitude, notre greffier travaille très fort pour mettre à l'horaire le . En tant que Comité et président, nous ne contrôlons pas son emploi du temps, et le greffier non plus. Je peux vous assurer que tous les efforts sont déployés pour qu'il comparaisse devant le Comité. Il est déjà venu deux fois, et il s'est déjà engagé à nous rencontrer le 5 décembre. Nous allons nous assurer de continuer à faire notre travail en tant que président et greffier du Comité. Soyez assurés que cela se produira.
En fait, nous avons également réussi à obtenir le témoignage du rapporteur des Nations unies le 7 décembre. Avec ces deux dates, il ne nous reste que deux séances. Je ne sais pas si le est disponible, mais nous allons certainement envoyer une demande et déployer tous les efforts possibles pour lui demander de venir à cette réunion.
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Pour l'instant, la seule date qui a été confirmée est le 5 décembre, qui portera sur le budget supplémentaire des dépenses. Soyez assuré qu'en tant que président, je vais demander à notre greffier de tout faire en son possible. Il fait un excellent travail de greffier, et je le félicite. Il est très impartial, comme vous le savez, de sorte qu'il fera tout en son pouvoir pour travailler en notre nom.
Je vous remercie.
Maintenant, en tant que président, j'aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins au nom du Comité. Nous recevons Mme Gagnon, qui est ici avec nous, et M. Borja Torres, qui témoigne lui aussi en personne. Je souhaite également la bienvenue à M. Chambers, qui est en ligne.
Sur ce, je donne la parole à M. Borja Torres pour cinq minutes, puis à Mme Gagnon.
Monsieur Borja Torres, je vous prie de prononcer votre déclaration préliminaire de cinq minutes.
Bonjour. Je vous remercie de me donner l'occasion de présenter la position de la Fondation des entreprises en recrutement de main-d'œuvre agricole étrangère, ou FERME, sur les permis de travail fermés.
Je pense que les permis de travail fonctionnent. Ils ne posent pas de problème. Je crois que ce qui fait les manchettes, c'est l'absence de voie d'accès à la résidence permanente pour les travailleurs étrangers temporaires, surtout dans le secteur agricole ou dans les secteurs à faible salaire. Je pense que c'est là que se trouvent bon nombre des problèmes qui font les manchettes. Comme je l'ai mentionné dans mon mémoire, beaucoup des travailleurs que nous amenons dans les fermes du Québec viennent pour des périodes temporaires. La moyenne est d'environ 22 semaines. C'est ce dont ont besoin les employeurs des fermes agricoles. C'est une période très précise pour laquelle ils ont besoin de travailleurs.
Ces travailleurs aident des milliers de familles à avoir des fruits et des légumes frais et de bonne qualité dans leur maison. Des milliers d'entreprises et de fermes sont en mesure de continuer à produire dans les régions rurales du Québec et à en assurer l'essor. Voilà qui aide également des milliers de travailleurs et leurs familles à améliorer leurs moyens de subsistance dans leur pays.
Au sein de la FERME, nous essayons de faire venir les travailleurs pendant une moyenne de huit mois et d'avoir des travailleurs récurrents pour des entreprises qui ont besoin de travailleurs un an ou deux. Nous préférons qu'ils viennent huit mois et qu'il y ait ensuite des rotations de travailleurs. La principale raison pour laquelle les travailleurs viennent au Canada, c'est pour améliorer les moyens de subsistance de leur famille. Les travailleurs passent de nombreux mois loin de leur foyer pendant de nombreuses années. Nous ne pensons pas que ce soit une bonne façon d'aider les travailleurs ou leurs familles. Je pense que huit mois devraient suffire. C'est pourquoi les permis de travail temporaire nous sont utiles.
Étant donné que les permis de travail fermés obligent nos travailleurs à rester à la ferme, je pense que le gouvernement a déjà mis en place des mécanismes pour aider ceux qui se trouvent dans une mauvaise situation à changer d'employeur maintenant, grâce au nouveau permis de travail ouvert pour les travailleurs vulnérables. De plus, dans le cadre du Programme des travailleurs agricoles saisonniers, ou PTAS, si l'agent du gouvernement estime que l'employé n'est pas dans une bonne position, il peut demander à Service Canada d'apporter un changement pour le travailleur. Je pense qu'il y a des options afin que les travailleurs soient en meilleure posture au besoin.
De plus, il y a quelque chose dont on n'a pas discuté. Dans le cas où il y a un permis de travail fermé pour un secteur donné, si un employé vient au Québec et décide ensuite qu'il ne veut pas rester à la ferme, comment pourra‑t‑il faire le changement? Comment l'employeur, qui paie le billet d'avion pour le faire venir, sera‑t‑il remboursé? Va‑t‑on le rembourser? Quelqu'un peut‑il simplement décider que la prochaine ferme lui donnera peut-être un dollar de plus et que c'est une raison suffisante de changer d'employeur? Ces éléments doivent être pris en considération si nous allons de l'avant avec un permis de travail ouvert sectoriel.
Merci beaucoup.
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Merci, monsieur le président.
Merci d'accueillir le Réseau d'aide aux travailleuses et travailleurs migrants agricoles du Québec, ou RATTMAQ. Je vous prie d'excuser mon collègue, qui devrait arriver sous peu. Il partait de Sherbrooke, ce matin, où il avait une autre activité. Nous sommes dans notre période de pointe, où nous accompagnons les travailleurs qui retournent à la maison.
Le RATTMAQ est un réseau issu de différents regroupements dans plusieurs régions du Québec. Il s'agit notamment d'organismes de défense des droits, de pastorales et de diocèses qui se sont regroupés autour de cette organisation non seulement pour accompagner les travailleurs, mais aussi pour assurer la défense de leurs droits. Notre organisme est enregistré comme organisme à but non lucratif, sous la forme d'un organisme autonome de défense des droits, et il est financé par le ministère de l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration du Québec.
Nous n'avons pas eu le temps, malheureusement, de faire une synthèse et de préparer des notes, mais il y a un mémoire qui va suivre dans les prochaines semaines. Il s'agit d'un résumé du mémoire que nous avons présenté au gouvernement du Québec relativement à la planification de l'immigration, où nous abordons la question précise des travailleurs étrangers temporaires et, encore plus précisément, la question des permis fermés.
Comme l'a mentionné le représentant de la FERME, soit la Fondation des entreprises en recrutement de main-d'œuvre agricole étrangère, les permis fermés posent un problème quant à l'accès à la résidence permanente pour les gens que nous représentons. Tout comme le rapporteur spécial des Nations unies M. Obokata, nous croyons que cela crée un sérieux problème de défense des droits. Il y a des droits qui sont reconnus dans nos chartes, dans nos lois, et même dans les accords commerciaux que le Canada a conclus, notamment avec le Mexique. Malheureusement, les travailleurs étrangers vivent avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête, puisque leur seul employeur peut décider à tout moment de les renvoyer dans leur pays. Cela pose un problème de défense des droits, parce que le travailleur ne veut pas défendre ses droits, dans ce contexte.
Au Québec, on examine aussi avec la ministre l'idée d'un permis sectoriel. Nous n'avons pas de position ferme là-dessus, mais nous ne voudrions pas non plus que de grands conglomérats d'employeurs contrôlent cela et qu'il n'y ait pas d'équivalent pour la défense des droits des personnes. Ce ne sont pas tous les employeurs qui maltraitent leurs employés, mais il y a quand même des cas qui font les manchettes au Québec. C'est sérieux. Il faut absolument éliminer les cas problématiques. D'ailleurs, l'Union des producteurs agricoles, au Québec, reconnaît que, si on prête attention à ces cas et qu'on les résout, cela va créer une meilleure concurrence dans le marché pour les agriculteurs et les producteurs dans le domaine de la transformation alimentaire.
Nos services sont entièrement gratuits. Nous sommes financés par la société civile et le ministère de l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration du Québec.
Sur le plan économique, nous sommes d'accord pour dire qu'il faut favoriser un accès à la résidence permanente, voire à la citoyenneté, étant donné que ces travailleurs et ces travailleuses sont déjà en région et que le fait d'avoir des gens en région constitue déjà un défi pour nous, au Québec. Ces travailleurs sont déjà en région et ont appris le français. Ce ne sont pas tous des gens qui sont là seulement pour huit mois. Il y a des gens qui sont là depuis plusieurs années, qui ne voient pas leur famille et qui ne voient pas grandir leurs enfants. Nous pensons qu'il faut revoir ce système pour faciliter non seulement la situation des travailleurs, mais également la situation des producteurs agricoles, qui en arrachent pas mal ces temps-ci.
Évidemment, notre mot d'ordre est le respect du travail décent. Selon l'Organisation internationale du travail, le travail décent repose sur quatre piliers. D'abord, les normes internationales doivent s'appliquer, dont le droit d'association, qui a aussi été limité au Québec, ces dernières années. Ensuite, il doit y avoir un accès aux protections sociales, comme les régimes d'assurance. Or, l'accès à l'assurance-emploi est très compliqué pour les gens que nous représentons. Les deux autres piliers du travail décent, ce sont la non-discrimination ainsi que le dialogue social.
Si on ne met pas en place des mécanismes relatifs au droit des rapports collectifs du travail, on va continuer à tourner en rond, parce que les travailleurs, individuellement, n'ont pas la capacité de se défendre. Si tout allait bien, le RATTMAQ n'existerait plus. En ce moment, nous accompagnons et représentons quelque 20 000 travailleurs et travailleuses tout au long de leur processus d'insertion dans la société québécoise.
Mon collègue Michel Pilon vient d'arriver. Il est responsable des questions juridiques portées devant la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail et d'autres instances.
Je pense avoir épuisé les cinq minutes dont nous disposions.
Nous pourrons répondre aux questions.
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Je vous remercie, monsieur le président. Je suis ravi d'avoir l'occasion de vous parler aujourd'hui des permis de travail fermés.
Je m'appelle Mark Chambers. Je suis le vice-président de la production canadienne du porc chez Sunterra Farms. Sunterra est une entreprise de production alimentaire à valeur ajoutée établie en Alberta. Nous avons une production agricole primaire composée de céréales, de porcs, de transformation du porc, d'une usine de salami et d'une division de serres qui produit des fraises et des tomates. Nous avons également une division de vente au détail dans des magasins de Calgary, Red Deer et Edmonton qui fournissent des produits alimentaires aux consommateurs de l'Alberta.
Comme beaucoup d'autres entreprises au Canada, Sunterra a recours au Programme des travailleurs étrangers temporaires, ou PTET, depuis de nombreuses années, et c'est une réussite. Pour notre part, nous avons surtout utilisé les permis de travail fermés du PTET, et les permis assujettis à une étude d'impact sur le marché du travail, ou EIMT. Ces mécanismes nous ont permis de poursuivre nos activités avec succès, comme beaucoup d'autres entreprises au Canada, surtout avec la pénurie de main-d'œuvre.
Chez Sunterra, nous avons utilisé le programme comme tremplin pour permettre aux employés qui travaillent à l'année d'obtenir la résidence permanente au Canada. En tant qu'employeur, nous offrons des conseils et de l'aide pour accéder aux différents volets de la résidence permanente pendant que les employés continuent de travailler. Souvent, lorsqu'un travailleur étranger temporaire arrive dans une collectivité rurale, il cherche à obtenir la résidence permanente. Ensuite, il fait venir sa famille et reste dans ce milieu rural. C'est un véritable pilier pour nous.
Ce programme a été une pièce maîtresse pour maintenir l'équilibre entre les marchés du travail et la protection des intérêts des Canadiens. C'est particulièrement vrai pour les entreprises agricoles et agroalimentaires. Elles sont situées dans des régions rurales du Canada. Nous savons qu'il y a un exode rural au Canada, de sorte qu'il peut être très difficile de recruter des Canadiens afin de pourvoir les postes vacants.
Même si ce programme a été bénéfique à notre entreprise, il comporte des coûts et des défis, car il est mis en œuvre par quatre entités gouvernementales, à savoir Emploi et Développement social Canada, Service Canada, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada et l'Agence des services frontaliers du Canada. Comme vous pouvez l'imaginer, il peut être un peu difficile de faire en sorte que les quatre ministères travaillent main dans la main. Très souvent, des changements sont apportés au programme — c'est un programme très volatile —, mais ils ne sont pas toujours dans l'intérêt des utilisateurs. Je comprends que le PTET est parfois un peu comme une patate chaude, mais aujourd'hui, de nouvelles règles ont été mises en place, comme des inspections continues et sans préavis pour s'assurer que le programme répond aux exigences des employés qui l'utilisent.
Le programme a permis de réduire considérablement le temps nécessaire pour obtenir une EIMT. C'est grâce aux efforts d'EDSC et de Service Canada. Ils ont fait un excellent travail à cet égard. Il y a encore un défi du côté d'IRCC en raison du temps nécessaire pour traiter les permis de travail. Même au Canada, le processus peut prendre jusqu'à quatre mois et demi. À partir de l'étranger et de différents pays, il faut parfois six à neuf mois pour traiter une demande de permis de travail. Je pense que M. Borja Torres en a parlé.
L'une des idées fausses au sujet des permis de travail fermés, c'est que l'employé est lié à un employeur. C'est peut-être vrai, mais pas de façon permanente. Si un travailleur étranger temporaire veut quitter son employeur actuel, il peut présenter une demande à un autre producteur ou employeur qui a une EIMT ou qui peut en obtenir une. Ils peuvent présenter une demande en ligne. En une dizaine de jours, ils peuvent commencer à travailler pour ce nouvel employeur. Ce processus a été mis en place pendant la COVID. C'était très bénéfique, et ce l'est encore.
Les permis de travail fermés offrent aux travailleurs un sentiment de sécurité d'emploi, puisqu'il y a une entente contractuelle entre l'employé et l'employeur. On y indique les heures convenues, les taux de rémunération, l'hébergement, les déplacements et ce genre de choses.
Le programme comporte des coûts et des nuances. Le logement est un des enjeux aujourd'hui. Nous avons passé beaucoup de temps à en discuter avec EDSC, parce qu'à l'heure actuelle, dans le cadre du volet agricole, on ne peut facturer que 30 $ par semaine pour un logement sur place, même si l'employé vit seul dans une maison de ferme de trois chambres à coucher. La petite nuance, c'est que si l'employé choisit de déménager en ville par lui-même, la maison doit rester vacante au cas où il voudrait revenir. Si l'employeur doit embaucher un autre travailleur étranger temporaire, il doit louer une autre maison. Je suis certain, comme nous le savons aujourd'hui, que le loyer n'est pas de 30 $ par semaine. Nous en discutons continuellement avec EDSC, mais nous n'avons pas encore trouvé de terrain d'entente.
L'une des autres choses dont nous avons parlé à maintes reprises avec EDSC et Service Canada, c'est d'avoir un programme agricole et agroalimentaire indépendant du PTET. Il est prouvé que ces emplois sont continuellement courus et attirent difficilement les Canadiens, compte tenu de l'ampleur du recrutement que nous faisons. Si nous pouvions avoir un programme distinct du PTET, cela me semblerait logique. On pourrait réduire certains des défis que rencontre la population, étant donné que c'est une patate chaude sur le plan politique.
Pour conclure ma déclaration, je pense que les permis de travail fermés sont une bonne façon d'équilibrer les besoins des travailleurs et des Canadiens et de veiller à ce que les Canadiens aient la priorité sur le marché du travail. Ils aident aussi à faire venir des travailleurs dans les régions rurales du Canada, là où la demande est forte. Les employés qui travaillent toute l'année ont la possibilité de demander la résidence permanente, et bon nombre d'entre eux restent avec leur famille dans les régions rurales, ce qui est très utile pour le Canada, compte tenu de l'exode rural. Lorsqu'ils deviennent des résidents permanents, les membres de leur famille arrivent, dont certains travaillent également dans les environs, ce qui augmente la main-d'œuvre.
L'immigration a été l'épine dorsale du Canada et continue de contribuer à notre prospérité. Nous devons donc veiller à ce qu'il y ait de l'immigration dans le Canada rural...
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Monsieur Chambers, votre temps était écoulé il y a une minute.
Avant de donner la parole aux honorables députés — les choses se passent très bien pour les membres du Comité —, j'aimerais simplement demander, à l'avenir, de préciser si votre question s'adresse à M. Borja, à Mme Gagnon, à M. Pilon ou à M. Chambers.
Sur ce, le premier intervenant sur ma liste est mon cher ami Larry Maguire.
Monsieur Maguire, vous avez six minutes, après quoi nous passerons à Mme Kayabaga.
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C'est tout un processus. Si vous faites partie du volet agricole, qui ne concerne que l'agriculture primaire, le coût d'une demande d'EIMT est nul. Si vous ne faites pas partie du volet agricole — comme une usine de transformation de la viande, que nous avons ici à Sunterra —, le coût de chaque demande est de 1 000 $. Si vous avez besoin de 10 travailleurs, c'est un chèque de 10 000 $ que vous envoyez au gouvernement simplement pour avoir le droit de faire venir un travailleur agricole. De plus, il faut aller à l'étranger et essayer de recruter des travailleurs. Nous le faisons, ou nous pouvons faire appel à une tierce partie dans un pays étranger pour nous trouver des travailleurs. Bien sûr, nous devons alors verser une somme à cette tierce partie. Elle peut parfois atteindre 1 000 $ par employé.
Lorsque le travailleur est trouvé, vous lui transmettez l'information. Il doit demander un permis de travail à l'étranger. Il présente sa demande, qui est traitée. Cela représente un coût pour lui et aussi pour le gouvernement canadien. Je pense que ces coûts s'élèvent à environ 250 $ par jour, mais je n'en suis pas certain.
Le processus prend du temps. Ensuite, une fois que la lettre d'approbation pour faire venir les travailleurs au Canada est reçue, l'employeur doit organiser des vols pour les transporter. De plus, peu importe le volet du programme, l'employeur doit s'assurer d'avoir une habitation pour eux, prête à être utilisée et équipée de tout ce dont ils auront besoin. Il faut aller les chercher à l'aéroport. Lorsqu'ils arrivent, nous nous assurons qu'ils savent où sont l'épicerie et le bureau de poste. Nous les aidons à trouver des services bancaires, des soins de santé...
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J'ai mentionné dans mon exposé qu'il y a là une occasion à saisir. Si les employés ne se sentent pas heureux où ils travaillent, ils peuvent postuler chez un autre employeur. Si ces employés cherchent dans le Guichet‑Emplois — parce que tous les employeurs qui veulent recruter des travailleurs étrangers temporaires vont mettre une annonce dans ce guichet —, ils pourront trouver des employeurs qui ont obtenu une étude d'impact sur le marché du travail et présenter leur candidature. Cette démarche prend 10 jours.
Le gouvernement pourrait mettre en place un processus un peu plus rapide qui permette de « cliquer et imprimer ». Le travailleur va en ligne, fait une demande de permis, clique et imprime l'information, et le tour est joué. Dès le lendemain, ce travailleur pourrait quitter son emploi, s'il y a un problème à ses yeux.
Si les travailleurs se sentent vulnérables et qu'ils ont besoin de protection, ils peuvent appeler une ligne d'aide, ce qui va déclencher une enquête. Si l'agent au téléphone estime que l'appel exige des mesures immédiates, il peut accorder un permis de travail ouvert à ce travailleur, qui sera retiré du milieu de travail. Ensuite, l'employeur fera l'objet d'une enquête.
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C'est une excellente question.
Si les employeurs abusent du programme ou des travailleurs, il faut les mettre sur la liste noire et les expulser du programme. Je suis tout à fait pour cela, et cette pratique existe déjà. Si une enquête est menée en raison de la plainte d'un travailleur et que l’on considère que l'employeur est essentiellement fautif ou qu'il est à l'origine de situations d'abus, alors cet employeur est mis sur la liste noire et ne peut plus tirer avantage du programme des travailleurs étrangers temporaires pour embaucher des travailleurs.
J'appuie cette mesure entièrement, parce que ce genre de situations se produit parfois et qu'ensuite, on met tout le monde dans le même panier. Cela a un effet sur les employeurs qui veulent utiliser le programme correctement. Je pense que nous devons continuer de privilégier cette stratégie, mais qu'il faut pouvoir agir rapidement.
C'est une arme à double tranchant, parce que parfois — et nous en avons vu maints exemples récemment —, de fausses accusations sont faites. Des enquêtes ont été menées sur des employeurs qui ne faisaient aucun mal. Ce sont plutôt les employeurs qui se sont fait dire par l'agent d'EDSC qu'ils avaient des employés problématiques.
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D'abord, il y a déjà une mesure que nous appliquons: chaque fois que des travailleurs étrangers temporaires arrivent à l'aéroport, nous leur donnons un agenda où est expliquée la réglementation pertinente. Puisque le travail est de compétence provinciale, toute la réglementation du Québec est bien expliquée dans cet agenda. Cet outil leur permet aussi de noter leurs heures de travail pour s'assurer qu'ils sont convenablement rémunérés en conformité avec le contrat.
Pour ce qui est de l'inspection, M. Pilon pourrait en parler davantage. Les plus gros problèmes découlent du fait que les règles en matière de santé et sécurité au travail et de prévention des accidents sont difficilement applicables. Cela pose de sérieux problèmes aux travailleurs. Par exemple, un travailleur pourrait être victime d'une lésion professionnelle ou d'un accident qui le force à rester au Québec, loin de sa famille, le temps de recevoir des traitements de réadaptation, parce qu'il n'a pas les moyens d'aller se faire soigner dans son pays.
Par ailleurs, nous avons reçu plusieurs plaintes qui étaient tout à fait fondées. Il y a eu le cas Lemay, dont le permis a été révoqué. Cette affaire touchait plus d'une trentaine de travailleurs qui avaient vraiment été victimes de mauvais traitements. Parfois, nous intervenons avec la police dans des milieux de travail. Je répète que ce ne sont pas tous les employeurs qui agissent de la sorte, mais une portion d'entre eux le font et c'est préjudiciable à tout le secteur.
Pour la portion du Québec, on doit renforcer les mécanismes d'inspection des milieux de travail afin de faire des visites surprises. Si les visites sont planifiées, quand l'inspecteur arrive sur les lieux, tout est beau, tout est parfait, personne ne parle, alors le travailleur reste soumis au même diktat de subordination à cet égard.
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Merci, monsieur le président.
Très rapidement, je vais donner avis d'une motion, dont nous débattrons un autre jour. En effet, j'aimerais que le Comité consacre le plus de temps possible aux témoins.
Je dépose donc la motion suivante:
Que le Comité invite à comparaître dans les meilleurs délais le ministre de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, ainsi que le ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales, conjointement pour une durée de deux heures, afin de répondre aux questions du Comité concernant le trafic et la traite de personnes migrantes et les mesures que le gouvernement compte mettre en place pour mettre fin à ces activités illégales qui exploitent des personnes vulnérables et qui mettent en péril leur sécurité.
Nous en discuterons plus tard, monsieur le président.
Bonjour, chers témoins. Je vous souhaite la bienvenue au Comité et vous remercie de votre présence.
Au début de l'année passée, une rencontre s'est tenue entre vous, les gens du RATTMAQ, moi, mon équipe, celle du député et le bureau du ministre, au sujet d'une situation qui nous effrayait: vous receviez soudainement plusieurs refus à des demandes de permis ouverts pour des travailleurs vulnérables.
Est-ce que cette situation s'est résorbée? Avez-vous su ce qui s'était passé?
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Comptez sur moi, nous allons essayer de faire la lumière là-dessus. Cette histoire n'est pas finie.
D'un côté, il y a de bons employeurs qui voient que nous faisons cette étude sur les permis de travail fermés et qui disent qu'il ne faut pas accuser tout le monde. Je suis d'accord sur cela. En effet, pour la majorité des employeurs, cela se passe bien avec les travailleurs étrangers temporaires.
De l'autre côté, cependant, le rapporteur spécial de l'ONU nous dit que le système de permis fermés est le terreau de l'esclavage moderne. Visiblement, le statu quo n'est plus tenable.
Je voudrais que vous me donniez votre opinion sur les propos du rapporteur spécial de l'ONU au sujet du système de permis fermés. Selon vous, est-ce une attaque contre tous les employeurs?
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C'est le système qui pose problème. Malheureusement, c'est ce qui fait qu'il y a des employeurs comme Jean Lemay. Ce n'est pas juste Jean Lemay. Je m'occupe des travailleurs étrangers temporaires depuis 2008 et j'ai vu toutes sortes de conditions dans les fermes, dont des situations d'esclavagisme.
Je suis d'accord avec vous que la majorité des employeurs traitent bien leurs travailleurs. Le problème, ce n'est pas les employeurs, comme je vous l'ai dit. Le problème, c'est le système. Il faut le changer, parce qu'il favorise malheureusement des situations comme celle de M. Lemay ou comme d'autres que nous pourrions nommer.
Quand des employés se font dire par un employeur que, parce qu'il a payé, ils lui appartiennent, il y a de sérieuses questions à se poser. C'est réellement ce qu'il a dit. Par la suite, après que nous avons sorti les travailleurs de là, il a dit qu'ils s'étaient évadés. Alors, la question suivante m'est venue spontanément: y avait-il des barreaux à la fenêtre de leur chambre? Quand on est devant ce genre d'employeur, c'est là qu'on commence à voir que, dans certaines situations, les employeurs considèrent les travailleurs étrangers temporaires comme s'ils leur appartenaient.
C'est vrai que nous faisons parfois face à des cas comme celui de M. Lemay, malheureusement. La dernière fois, nous avons sorti 243 travailleurs de là. C'est quand même beaucoup de personnes. Bien sûr, M. Lemay a perdu son droit de recourir au Programme des travailleurs étrangers temporaires. Je ne sais pas si vous l'avez vu, mais l'émission La Facture a consacré un épisode complet à ce sujet, où j'étais parmi les invités.
Or, M. Lemay est encore actif. Il utilise une ancienne succursale de la Caisse populaire, à Saint‑Jude, et il fait encore son petit trafic. Quand va-t-on arrêter ce monsieur? Ça n'a aucun bon sens. Il a deux ou trois autobus pour des travailleurs détenant un visa de tourisme ou carrément des travailleurs illégaux qu'il recrute et qu'il vend par la suite à différents agriculteurs. C'est ça, la situation.
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Absolument. Nous sommes plusieurs organisations à cette table de concertation et toutes n'ont pas les mêmes intérêts. Par exemple, la Commission canadienne des droits de la personne y siège. Tous les secteurs y sont représentés, notamment celui de la santé et sécurité. Ensemble, nous pouvons cerner un certain nombre de problèmes et progresser.
Ce n'est pas uniquement la table de concertation de la FERME. Plusieurs autres organisations sont présentes à la table pour cerner les problèmes, par exemple AGRIcarrières, ou encore des organisations syndicales comme les TUAC, soit les Travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du commerce.
Je pense que tout le monde s'entend pour dire qu'il ne s'agit pas de chercher des coupables. Il s'agit de mettre le doigt sur ce qui pose problème dans le système. C'est pour cette raison que nous pensons qu'il faut avoir des permis de travail ouverts.
La sécurité alimentaire, c'est quelque chose d'important pour le Canada et pour le Québec. Si, comme pays, nous disons que c'est important, pourquoi serait-ce seulement aux employeurs de financer la venue de travailleurs? Il y a peut-être une réflexion de fond à faire à ce sujet aussi. Comme les représentants de l'UPA l'ont dit la semaine passée, l'indice de sécurité alimentaire a baissé au Québec. C'est rendu 30 %.
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Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Je tiens aussi à remercier tous les témoins.
Je veux poursuivre la conversation avec Mme Gagnon et M. Pilon et obtenir leur réponse.
D'après ce que je comprends, vous indiquez qu'il y a un problème dans le programme des travailleurs étrangers temporaires. Ce système crée bien sûr un milieu où il y a un déséquilibre des pouvoirs. La réalité, c'est que les travailleurs étrangers temporaires n'ont aucun pouvoir et qu'ils sont entièrement dépendants de leur employeur. S'ils se plaignent de leur employeur, ils se font congédier. Ces travailleurs se retrouvent alors en eaux troubles, parce qu'ils ne font pas l'argent qu'ils doivent envoyer à la maison pour subvenir aux besoins de leur famille, par exemple. Dans ce milieu où il y a un déséquilibre des pouvoirs, il peut y avoir de l'abus. Vous en avez cité des exemples horribles.
Afin d'avoir un meilleur équilibre des pouvoirs, certains ont proposé d'offrir un permis de travail ouvert. Autrement dit, les employeurs devraient traiter leurs employés équitablement, sinon ces travailleurs se trouveraient un autre emploi. Certains arguent qu'un permis de travail ouvert amènerait les travailleurs à quitter le secteur, parce qu'ils pourraient aller où ils le souhaitent. Toutefois, comme pour tous les emplois, pour être concurrentiels et trouver de bons travailleurs, les employeurs doivent bien les payer et leur donner de bonnes conditions de travail.
Je me demande si vous pourriez faire un commentaire sur la nécessité de modifier le programme. Le gouvernement devrait‑il envisager d'offrir un permis ouvert aux travailleurs migrants?
Je vais tout de suite poser ma prochaine question, car mon temps est limité.
Vous avez dit être en faveur d'un permis de travail ouvert, mais vouloir un permis ouvert sectoriel. Vous avez dit que s'il y avait un permis de travail ouvert général, les travailleurs pourraient choisir, par exemple, de travailler comme caissier dans une épicerie. Ce serait peut‑être le cas, peut‑être que non, selon ce qu'offrirait la concurrence. Néanmoins, ne pensez‑vous pas que la question se pose? Si le salaire constitue un enjeu, l'employeur agricole ne devrait‑il pas hausser ses salaires pour attirer les travailleurs?
Je le dis en toute sincérité. Je viens d'une famille d'immigrants. Toute notre famille a immigré ici. Nous avions le statut de résidents permanents. Le premier emploi que ma mère a occupé était dans une ferme. Elle gagnait 10 $ par jour pour soutenir sa famille de huit personnes; voilà la réalité. Vous avez bien raison. Après deux ans, elle avait cumulé un peu d'expérience de travail et elle est passée à l'étape suivante, à titre de plongeuse au salaire minimum dans un restaurant jusqu'à sa retraite, à 65 ans.
Vous avez bien raison. Les travailleurs cherchent de meilleures occasions d'emploi à mesure qu'ils gagnent en expérience. La situation ne signifie‑t‑elle pas que les employeurs doivent offrir de bonnes conditions de travail et des salaires concurrentiels pour attirer et conserver la main‑d’œuvre?
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Merci, monsieur le président.
Madame Kwan, ce que vous dites est très important, parce que le système pose problème même dans les milieux syndiqués.
Je vais donner un exemple très concret. À Saint‑Félicien, il y a une serre qui embauche près de 400 travailleurs, mais il ne reste aucun travailleur québécois, parce que les conditions de travail sont trop pénibles. Ce qui se passe, c'est que les travailleurs mexicains qui étaient membres du comité syndical n'ont pas été rappelés pour un contrat cette année. On peut donc dire qu'ils sont en train de perdre leur droit de s'organiser collectivement. On voit bien ici que c'est le système qui pose problème.
Le problème qui survient dans le cas des permis ouverts pour les travailleurs vulnérables, c'est que les gens sont ensuite mis sur une liste noire et ne sont pas rappelés. De notre côté, nous faisons des suivis au Guatemala et au Mexique. Au mois de décembre, nous allons tenir une conférence internationale portant sur ce sujet, entre autres, afin de trouver des pistes de solution pour régler ce problème.
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C'est un peu frustrant, parce que quand quelqu'un dénonce une situation en milieu de travail et qu'une inspection s'enclenche, tout ce qui se faisait est suspendu instantanément, de sorte que l'accusé est considéré comme coupable jusqu'à preuve du contraire. Je pense que le programme fonctionne à l'envers, parce que ce devrait être comme en droit canadien en général: on est innocent jusqu'à preuve du contraire. Pendant la période d'inspection, l'entreprise devrait pouvoir poursuivre ses activités. Si une étude d'impact sur le marché du travail est en cours, elle devrait poursuivre son cours, par exemple.
Quand un employeur est jugé fautif, il peut suffire de bien l'informer des normes pour rectifier le tir. Si la situation est jugée hautement problématique, alors, encore une fois, je suis tout à fait d'accord pour que l'employeur soit exclu du programme s'il contrevient complètement aux règles et qu'il place les travailleurs en situation de vulnérabilité.
Pour ajouter à cela, je pense que parfois, ce qui se produit, c'est que certains employés signalent des situations qui ne sont pas vraies. Je sais personnellement que notre entreprise a fait l'objet d'inspections et de vérifications, et que nous les avons réussies haut la main. C'est le même employé qui signale à répétition des choses sans fondement.
:
Merci, monsieur Chambers.
Je vais passer à autre chose.
[Français]
J'aimerais maintenant m'adresser aux témoins présents dans la salle, au sujet du programme de formation d'enquêteur de la Direction générale des services d’intégrité.
Selon les chiffres que j'ai reçus du ministère, en 2022, seulement 759 personnes ont reçu la formation leur permettant d'aller dans les fermes pour enquêter sur les conditions de travail. À votre avis, est-ce suffisant?
Les enquêtes devraient-elles être menées en personne ou de manière virtuelle, selon vous? Comme je l'ai dit à M. Chambers, 95 % des inspections auprès des producteurs sont faites de manière virtuelle.
Qu'en pensez-vous?
Les témoins peuvent répondre à tour de rôle.
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Merci, monsieur Chambers.
Le plan des niveaux d'immigration pour 2024-2026 déposé par le atteste de son intention de faire venir des migrants économiques au Canada, l'objectif étant que 60 % des nouveaux résidents permanents fassent partie de la catégorie de l'immigration économique d'ici 2026. Les programmes pilotes comme le Programme pilote sur l'agroalimentaire, qui a été prolongé jusqu'en mai 2025, ainsi que le Programme d'immigration au Canada atlantique et le Programme pilote d'immigration dans les communautés rurales et du Nord, pour n'en nommer que quelques-uns, sont parmi les principaux volets de la catégorie de l'immigration économique.
À votre avis, ces programmes pilotes, en particulier le Programme pilote sur l'agroalimentaire, sont-ils utiles pour faciliter la transition des travailleurs étrangers temporaires?
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Nous essayons de créer des alliances. Je sais qu'en amont, au Mexique ou au Guatemala, nous avons des collègues qui surveillent la situation et qui négocient avec les États des systèmes de sélection éthique. Le programme de l'organisme Vérité, au Mexique, en est un exemple.
Par contre, nous ne pourrons jamais vraiment circonscrire ce problème, parce qu'il devient difficile de fournir des preuves, étant donné que nous n'avons pas accès à toute l'information.
J'aimerais juste ajouter qu'au Québec, nous ne faisons pas partie du projet pilote sur les permis sectoriels. L'évaluation est à donc nuancer, parce qu'il faut vraiment voir comment cela peut se traduire dans les faits. Rappelons-nous que l'accord Canada-Québec, en 1978, n'abordait pas la question des permis fermés. Pour nous, il s'agit donc d'un nouvel élément dans le paysage, avec lequel nous devons composer et qui comporte des problèmes.