Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Bonjour à tous et bienvenue à la 59e réunion du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration de la Chambre des communes, qui poursuit aujourd'hui son étude sur la réponse du gouvernement au dernier rapport du Comité spécial sur l'Afghanistan.
Au nom de tous les membres du Comité, je souhaite la bienvenue à l'honorable Marilou McPhedran.
Je vous remercie de témoigner devant le Comité. Vous disposez de cinq minutes pour faire votre allocution d'ouverture, après quoi nous procéderons à nos tours de questions.
En tant que sénatrice indépendante du Manitoba, j'ai le privilège d'habiter sur le territoire couvert par le Traité no 1, la patrie de la nation métisse.
J'aimerais remercier le Comité de m'avoir invitée à témoigner aujourd'hui.
En septembre 2022, le Globe and Mail a publié deux articles contenant des allégations provenant de fonctionnaires d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada selon lesquelles j'aurais envoyé, en août 2021, un document type à des Afghans coincés, surtout des femmes, fuyant les talibans. Ces allégations sont fausses.
[Traduction]
Les allégations d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté publiées à mon endroit dans le Globe and Mail sont fausses. Elles ne sont pas vraies.
Le 25 août 2021, le modèle de lettre de facilitation en question m'a été envoyé par George Young, chef de cabinet de Harjit Sajjan, alors ministre de la Défense. Les membres du Comité se souviendront que quand Kaboul est tombée, le Canada n'avait pas de présence diplomatique sur le terrain en Afghanistan, et les forces spéciales canadiennes ont été autorisées à faire le nécessaire pour conduire des gens en sécurité à l'aéroport pour être évacués.
M. Young a reçu ce modèle de lettre de facilitation d'Affaires mondiales Canada et il me l'a indiqué par écrit. Comme le Comité l'a entendu le 8 février, Affaires mondiales Canada, ou AMC, et Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, ou IRCC, ont tous deux fourni des modèles de lettre de facilitation, mais IRCC allègue que celui que j'ai reçu de M. Young n'est pas authentique, et ce, en dépit du fait que le contenu du modèle que j'ai reçu de lui est exactement le même que celui qu'IRCC envoyait aux Afghans vulnérables.
Je fournirai au Comité une des lettres d'AMC venant d'IRCC afin de la comparer à celle que j'ai reçue. Mon bureau a toutefois demandé que le premier modèle de lettre de facilitation que j'ai reçu soit modifié pour qu'il n'indique pas que le porteur est citoyen canadien, et M. Young a promptement envoyé le modèle demandé.
Mon bureau a envoyé cette lettre de facilitation à une liste évolutive d'Afghans vulnérables, dont les noms venaient d'avocats dignes de confiance travaillant dans un certain nombre de pays. Ces noms étaient fréquemment transmis à M. Young et M. Oz Jungic, conseiller politique principal du ministre des Affaires étrangères. M. Jungic m'a confirmé la réception de ces noms le 24 août, m'assurant que le ministère ferait tout ce qu'il pouvait pour tenter d'évacuer ces personnes.
M. Young a indiqué qu'il avait entré ces noms dans le système. M. Jungic m'a envoyé un courriel pour dire qu'il avait communiqué ces noms aux fonctionnaires d'AMC et à IRCC. Mon bureau a continué de transmettre au gouvernement du Canada les noms d'autres personnes afghanes, principalement des femmes, qui avaient besoin d'un transport sécuritaire jusqu'à l'aéroport de Kaboul.
Comme le Comité l'a entendu le 8 février, IRCC a indiqué que les lettres de facilitation n'avaient pas pour but de faciliter l'embarquement à bord d'un avion à l'aéroport ou la confirmation d'un visa. Quand George Young m'a envoyé les modèles de lettre de facilitation le 25 août, il a écrit, avec le premier, qu'il l'avait reçu d'un collègue d'AMC et il me proposait de l'essayer. J'ai cru comprendre que j'étais autorisée à l'utiliser, et on m'avait assuré que les noms que nous avions reçus avaient été entrés dans le système.
Madame la présidente, ces lettres de facilitation ont été envoyées par le chef de cabinet du ministre de la Défense nationale. IRCC envoyait des lettres de facilitation avec le même contenu, également pour aider des Afghans vulnérables à échapper aux talibans. J'ai fait confiance aux modèles de lettre fournis par M. Young, comme je leur fais confiance aujourd'hui. Je pense qu'ils sont authentiques et qu'ils ont contribué à sauver de nombreuses vies, principalement celles de femmes.
Au bout du compte, j'ai pris la décision de parler publiquement à mes collègues du Sénat, quand j'ai appris plus tôt cette année qu'un affidavit avait été signé par un fonctionnaire d'IRCC continuant d'alléguer que j'étais la source du prétendu modèle de lettre de facilitation non authentique d'AMC. J'ai alors décidé de fournir mon propre affidavit à l'appui des Afghans qui remettaient en question la position d'IRCC, et je peux vous le remettre si vous le souhaitez.
(1635)
Je vous remercie de m'avoir offert l'occasion de rectifier les faits.
Je voudrais commencer en indiquant que je pense que tout le monde dans cette salle souhaiterait que le gouvernement en ait fait davantage. Il y a encore des Afghans ayant des liens avec le Canada qui n'ont pas été évacués et qui devraient l'être.
Sénatrice McPhedran, qui, à Affaires mondiales Canada, a envoyé les modèles de lettre de facilitation relatifs aux visas à M. Young?
Je sais que le courriel que M. Young a envoyé contenait le premier modèle en pièce jointe. Une copie de ce courriel a été envoyée à M. Jungic, d'Affaires mondiales Canada.
Je ne peux répondre à cette question. Il pourrait y répondre, mais je crois comprendre que vous avez décidé de ne pas l'inviter. Voici ce qu'il s'est passé...
La liste était évolutive. Nous avons échangé de nombreux courriels, dont je peux vous fournir des copies. Nous avons ajouté des noms. Nous avons donné les noms et aussi tenté d'apporter des corrections à mesure que la situation évoluait.
Nous en parlions. Dans un courriel que je peux vous donner en exemple, ma collègue Laura Robinson demande si un employé du gouvernement ajoutera ces noms, ajoutant que si ce n'est pas le cas, nous irons de l'avant et le ferons. Personne n'a répondu. Nous avons donc été de l'avant et nous les avons ajoutés. Nous avons clairement indiqué notre intention, et les communications montrent que le processus s'est poursuivi jusqu'à ce que l'aéroport soit bombardé.
Il était indiqué sur la lettre de facilitation originale qu'elle s'adressait uniquement aux citoyens canadiens. Est‑ce exact? Mme Robinson a ensuite écrit à M. Young pour dire...
L'hon. Marilou McPhedran: C'était à ma demande.
L'hon. Michelle Rempel Garner: ... à votre demande que cela ne convenait pas. Est ensuite arrivé un modèle qui avait été modifié. Est‑ce exact?
Vous ignorez si M. Young ou un employé d'AMC a modifié le modèle. Est‑ce que vous, un membre de votre personnel ou Mme Robinson avez envoyé le modèle modifié à une tierce partie afin de le distribuer?
Oui, nous collaborions avec un réseau d'avocats dignes de confiance. Le modèle avait été modifié pour en retirer les mots « citoyens canadiens ». Rien d'autre n'avait changé.
AMC vous avait‑il autorisée à envoyer la lettre de facilitation modifiée à de tierces parties afin de la distribuer? Aviez-vous la permission expresse de le faire?
Je me ferai un plaisir de vous remettre les échanges de courriels. Nous avons présenté une demande, car des femmes se voyaient refuser l'accès à l'aéroport.
Je vous remercie. Je serais enchantée de voir ces échanges.
Comme c'est le cas pour de nombreux parlementaires, mon bureau a reçu des appels de détresse de personnes qui voulaient faire évacuer des proches. Le 27 août, mon bureau correspondait avec le gouvernement pour évacuer du pays la mère d'un électeur appartenant au groupe ethnique hazara, ainsi qu'un médecin qui éduquait les femmes afin de résister aux vérifications de virginité. Pourquoi pensez-vous qu'ils ont fait appel à nous?
Je l'ignore. Tout ce que je peux dire, c'est que je faisais partie d'un groupe d'échange de courriels qui a commencé le 20 août. George Young en faisait également partie. Ces échanges ont été amorcés par l'ancienne ministre Monsef.
Votre affidavit inclut un courriel que vous avez écrit le 21 septembre 2021 à 13 h 30 à Mike Jones, chef de cabinet de celui qui était alors ministre de l'Immigration et qui est maintenant ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino, disant que même si vous étiez certainement prête à collaborer le plus étroitement possible avec un gouvernement conservateur s'il était élu, vous pouviez honnêtement dire que vous espériez davantage que le même premier ministre, le ministre Mendicino et l'équipe de direction d'IRCC soient encore en poste ce matin‑là.
Pensez-vous que vous avez pu envoyer des lettres de facilitation et choisir qui viendrait au Canada pendant que d'autres restaient derrière parce que vous aviez fait part de votre soutien envers le gouvernement libéral au chef de cabinet d'un dirigeant politique pendant des élections fédérales?
Non. Je dirais que ce sont les décennies de travail que j'ai passées à titre d'activiste des droits de la personne qui ont incité des Afghanes à me demander d'aider...
J'ai également fait du travail social pendant une décennie, comme c'est le cas d'un grand nombre de mes collègues ici présents. Nous ne pensons pas qu'il soit équitable ou juste que des parlementaires choisissent qui vient au Canada dans une situation d'urgence comme celle‑là. Pourquoi avez-vous pensé que ce l'était?
J'ai lu un certain nombre d'articles dans lesquels vous mentionniez que vous étiez convaincue d'avoir été autorisée à envoyer les lettres de facilitation que vous avez envoyées. Je voudrais en discuter brièvement et vous demander des détails plus précis sur cette conviction. Je m'appuierai sur certains des faits que vous avez décrits. Je précise tout d'abord que je ne sais pas si ces affirmations sont vraies ou fausses, mais je m'appuierai sur elles pour vous poser mes questions aujourd'hui.
Dans certains articles de la presse, vous dites que vous étiez autorisée à envoyer des lettres de facilitation et que vous l'avez fait de bonne foi. Vous dites que vous avez été autorisée à le faire par un membre du personnel qui vous a fourni un modèle de lettre. Encore une fois, je comprends que vous ayez un grand désir d'aider les gens. Je crois que beaucoup d'entre nous, sinon nous tous autour de cette table, avons ce grand désir aussi, car c'est l'un des facteurs communs qui poussent les gens à s'impliquer dans la vie publique. Toutefois, je suis fermement convaincu que des éléments d'équité et de justice doivent sous-tendre toutes les décisions que nous prenons dans l'exercice de nos fonctions. Pour moi, cela signifie qu'il faut respecter les processus et les procédures, même si nous ne sommes pas d'accord sur ce qu'ils sont.
Admettons — c'est une hypothèse — qu'un membre du personnel vous ait fourni le modèle. En tant que sénatrice et juriste, pensiez-vous sincèrement, madame, que le fait de recevoir un modèle de document gouvernemental par courriel était suffisant pour vous permettre de délivrer officiellement les documents à quelqu'un d'autre?
Je suis désolée, mais je vais répondre en anglais, si cela vous convient.
[Traduction]
Sachez tout d'abord que le message que j'ai reçu du chef de cabinet — pas d'un simple employé, mais du chef de cabinet — du ministre de la Défense du Canada indiquait qu'il avait reçu ce modèle de la part d'un collègue d'AMC et que je pouvais l'essayer.
Non. M. Young indique que le modèle vient d'un collègue d'AMC et propose de l'essayer. Il y a ensuite un point, puis « George ». Ce message était accompagné du premier modèle, qui incluait les mots « citoyen canadien ». J'ai demandé à Laura de lui répondre que nous aidions des Afghans et de lui demander de nous fournir un document que nous pourrions utiliser pour eux. Nous n'avons pas tardé à recevoir un deuxième modèle où les mots « citoyen canadien » avaient été retirés. Tout le reste du texte était identique. Toutes les insignes et le sceau d'AMC étaient les mêmes.
Ce n'est pas dans une crise humanitaire extrême que les processus bureaucratiques devraient triompher. À dire vrai, les employés du gouvernement qui se trouvaient au cœur de cette crise et avec lesquels je communiquais étaient beaucoup plus expérimentés que moi. Après avoir échangé moult courriels et fourni des exemples de femmes qui étaient refusées par nos propres soldats canadiens, nous avons réclamé jour et nuit un formulaire et demandé quel était celui dont ces femmes avaient besoin. Enfin, dans les alentours de midi le 25 août, nous avons reçu le courriel.
Je ne suis pas la seule à l'avoir reçu. Il a été envoyé à la ministre Monsef et à son chef de cabinet, ainsi qu'à moi et aux collègues avec lesquels je travaillais. Il venait de George Young, qui en avait envoyé une copie à M. Jungic, à AMC.
Dans un autre article, vous dites que, dans les prétendus courriels, le membre du personnel vous a dit qu'il avait reçu le modèle d'Affaires mondiales Canada, ou AMC, et il vous avait suggéré de l'essayer. Un collaborateur vous a dit avoir reçu un modèle de la part d'AMC et suggéré de l'essayer en réponse à une demande de votre part. C'est cet échange précis que vous avez pris pour une délégation de pouvoir du ministre des Affaires étrangères ou du ministre de l'Immigration, et vous croyiez que cette déclaration vous autorisait à distribuer des lettres de facilitation au nom des ministres de la Couronne.
Est‑ce un oui ou un non que vous voulez? La réponse est oui, c'est ce que je croyais et c'est ce que j'ai fait. La raison en est que nous travaillions tous ensemble dans l'espoir de sauver des vies.
Madame la sénatrice, j'aimerais revenir sur le principe. Ce que je comprends, c'est que votre objectif était de sauver des Afghanes. C'était l'objectif ultime. On dit souvent que la fin justifie les moyens. Bien franchement, le fait que vous ayez envoyé des lettres de facilitation qui étaient jugées inauthentiques n'est pas ce qui m'embête beaucoup. Ce qui m'embête, c'est l'action gouvernementale. J'ai lu quelque part que vous avez fourni 640 lettres, je crois.
Comment se fait-il que ce soit une sénatrice qui entre en contact avec des Afghanes qui veulent peut-être se rendre au Canada? J'arrive difficilement à comprendre cela.
Comment se fait-il que ce ne soit pas le gouvernement qui soit le principal responsable à cet égard? Comment se fait-il que ce soit vous qui preniez l'initiative quant à ce qui se faisait en Afghanistan?
Il y a une réalité pratique que nous devons garder à l'esprit, à savoir que ce sont les organismes non gouvernementaux et les défenseurs des droits de la personne dans le monde entier qui faisaient le gros du travail pour essayer de sauver des vies. Les gouvernements n'ont pas pu le faire. Ils n'étaient tout simplement pas en mesure de répondre à l'ampleur des besoins.
Nombre d'entre nous — en tout cas dans le réseau de défenseurs de confiance dont je faisais partie — ont travaillé avec des femmes afghanes, se sont rendus en Afghanistan et ont collaboré avec les organismes pendant plus de 20 ans. Lorsque la demande émane d'une personne que vous connaissez, que vous travaillez avec d'autres personnes que vous connaissez — et qui sont en contact direct avec ces Afghans exposés à de grands risques — et qu'ils vous demandent si vous pouvez faire quelque chose pour les aider, je suis le genre de personne qui... Comme je l'ai dit à mes collègues du Sénat, monsieur, je suis entrée au Sénat en tant qu'activiste féministe et avocate des droits de la personne, et c'est toujours ce que je suis. C'est pour cela que j'ai réagi et que j'ai travaillé avec un réseau de confiance d'activistes non gouvernementaux en contact direct avec ceux et celles qui couraient des risques d'une telle ampleur.
Je vais faire un parallèle avec le travail que nous avons à faire en notre qualité de députés dans nos circonscriptions. Je suis celui qui transmet les intérêts des gens de ma circonscription au gouvernement, mais, pour arriver à des résultats, j'ai besoin de celui-ci. Je ne peux pas croire que le gouvernement n'était pas informé de ce que vous faisiez. Si on veut obtenir des résultats, il faut que quelqu'un au gouvernement soit informé des gestes qu'on pose et des contacts qu'on a.
Je réitère ce que je vous ai dit en réponse à la première question: ce qui me préoccupe, ce n'est pas tant la façon dont vous l'avez fait, même si cela peut être discutable, c'est le manque de leadership du gouvernement dans cette crise.
Vous me dites que des réseaux de confiance se constituent, et je comprends tout cela, mais, pendant que vous, vous agissiez, que faisait le gouvernement? Que faisaient les ministres responsables, à ce moment-là, à votre avis?
Je pense qu'il faut rappeler que le 15 août 2021, lorsque Kaboul est tombé aux mains des talibans, le premier ministre Trudeau a déclenché des élections. Je pense que, dans une certaine mesure, cela a quelque chose à faire avec une partie de ce qui s'est passé — avec une partie de ce qui s'est passé et de ce qui ne s'est pas passé.
Je suis une personne très pragmatique, monsieur. Je travaille avec les outils qui sont à ma disposition, et il n'y avait pas de temps à perdre. On a annoncé officiellement que le Canada serait parti le 31 août, mais officieusement, on nous a dit qu'il quitterait le pays le 27 août. Je ne savais certainement pas que HKIA, l'aéroport de Kaboul, allait être bombardé le 26 août, ce qui allait mettre un terme au pont aérien dans son entier.
Ce que je savais à l'époque — et je parle d'une situation qui n'a duré que quelques jours —, c'est que nous nous efforcions de faire sortir surtout des femmes et leurs familles, et qu'il ne restait plus de temps. Nous devions utiliser les ressources et les relations disponibles, et c'est ce que j'ai essayé de faire.
Vous expliquez un peu le contexte et c'est très bien. Toutefois, comme il ne me reste pas beaucoup de temps, j'aimerais juste vous poser une autre question.
Comme vous avez vécu cela de l'intérieur, en quelque sorte, pouvez-vous nous dire ce qui pourrait être fait différemment par le gouvernement devant une crise semblable dans l'avenir?
Je pense que le travail qu'a fait le Comité spécial sur l'Afghanistan, présidé par Michael Chong... Les recommandations sont excellentes. Je pense que la prochaine étape doit être de mettre l'accent sur la mise en œuvre de ces recommandations — et j'espère que ce comité sera aussi de cet avis, et je serai heureuse de revenir pour faire partie de ce processus. Il y a beaucoup d'enseignements à tirer de cela.
Merci beaucoup, madame la présidente, et merci, sénatrice, de votre présence.
J'aimerais simplement que certains faits soient consignés dans le compte rendu. Pourriez-vous dire au Comité combien de lettres de facilitation ont été envoyées par votre bureau?
Quand vous dites mon bureau, je dois clarifier le processus qui s'est déroulé. Le modèle que nous a remis George Young a été envoyé à un certain nombre de défenseurs de confiance dans différents pays qui ont ensuite facilité, du mieux qu'ils le pouvaient, l'entrée des personnes dans l'aéroport, espérant que les soldats les y acceptent.
Vous m'avez demandé un chiffre précis, mais je ne tenais pas de comptes du nombre de lettres envoyées. Il s'agissait de faire sortir le plus grand nombre de personnes, le plus grand nombre de femmes possible.
Je suis désolée. Je comprends que la lettre a été communiquée à des organismes et à des défenseurs de confiance pour qu'ils puissent la distribuer, mais n'avez-vous pas gardé trace du nombre de lettres de facilitation envoyées par votre bureau?
Je n'ai pas suivi cela de près, non. Il s'agissait de donner le modèle à des défenseurs de confiance et d'aider à obtenir les noms pour créer les lettres qui allaient pouvoir être utilisées.
Permettez-moi de clarifier les choses. Je crois comprendre que votre bureau n'a pas envoyé de lettres de facilitation à des particuliers, mais qu'il les a plutôt envoyées à des organismes pour qu'ils les distribuent.
Je suis désolée. Puis‑je obtenir des éclaircissements? Est‑ce que votre bureau a à la fois envoyé ces lettres et remis des copies de ces lettres à des organismes de confiance?
Je pense que nous allons vous demander de soumettre cela au Comité, parce qu'il pourrait y avoir des groupes concernés qui seraient mis en danger, et je ne veux pas que cela se produise.
Qu'avez-vous compris de ces lettres de facilitation? Qu'étaient-elles censées faire, d'après vous?
Elles étaient censées aider les gens à se rendre à l'aéroport puis, une fois arrivés à l'aéroport, à accéder aux soldats qui gardaient l'aéroport et à être traités, avec un peu de chance, en vue d'une évacuation. C'est ce que disait la lettre.
Il s'agissait de les faire passer au point de contrôle et ensuite, avec un peu de chance, de les faire monter dans un avion pour qu'ils soient évacués.
Je présume que oui. En fin de compte, ce que vous avez compris, c'est que cela allait leur permettre de sortir de l'Afghanistan et d'accéder à la sécurité.
Est‑ce que cet échange avec George Young, dont une copie a été envoyée à Affaires mondiales Canada — je crois que vous avez parlé de M. Jungic —, s'est fait par le truchement de votre courriel parlementaire ou de votre courriel privé?
Concernant M. Jungic, qui a été engagé par Affaires mondiales Canada et qui a reçu une copie de cette lettre, savez-vous quel était son poste à l'époque?
En ce qui concerne la période pendant laquelle cela a été fait, savez-vous si les personnes que vous avez aidées ont été évacuées dans le cadre de l'opération Safe Haven?
Elles ont été évacuées de plusieurs façons. En fait, elles ont été évacuées par un certain nombre de pays. Il y a eu des situations où elles ont réussi à passer grâce à nous, mais les Australiens les ont aidées aussi, ou elles se sont retrouvées au Royaume-Uni.
Il s'agissait de personnes qui cherchaient à se mettre à l'abri par l'intermédiaire de l'aide humanitaire et non en évoquant l'aide qu'elles auraient pu fournir au Canada. Ai‑je bien compris ou y avait‑il un peu des deux?
Pour ce qui est des services rendus au Canada, pour la plupart, ce sont des femmes. Ce sont des femmes qui travaillaient dans des organismes non gouvernementaux financés par le Canada, et de jeunes militants, hommes et femmes, qui travaillaient dans certains de ces organismes financés par le Canada.
En ce qui concerne les personnes qui ont reçu cette lettre, j'ai lu dans les médias que beaucoup d'entre elles sont toujours bloquées et incapables, en fin de compte, de se rendre au Canada pour se mettre en sécurité. Comment ont-elles perçu ce que cette lettre signifiait? Le savez-vous?
Je ne peux pas me prononcer sur ce que ces personnes ont compris. Je peux toutefois vous dire que cinq Afghans en situation de risque extrême ont soumis une demande de révision judiciaire à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada et au gouvernement du Canada, et que les avocats de ces personnes soutiennent que la lettre...
Dans votre témoignage, vous avez indiqué que l'ancien ministre de la Défense, le ministre Sajjan, avait été placé en copie conforme de cette correspondance. Pouvez-vous expliquer clairement à propos de quoi il a été mis en copie conforme et ce sur quoi on l'a conseillé?
Je pense qu'il serait très utile que vous les déposiez.
Puisque vous avez reçu cette autorisation et que vous pensiez avoir la permission d'agir en conséquence, qui au sein du gouvernement était au courant, qui au sein des ministères était au courant et, plus précisément, quels ministres? Je ne crois pas que les chefs de cabinet agissent de leur propre chef sans l'autorisation de leur supérieur politique.
Si vous avez de la correspondance qui indique que des ministres étaient au courant et qu'ils savaient que tout cela se passait en même temps, ce sont des documents pertinents qu'il nous faudrait...
Sénatrice McPhedran, plus tôt dans votre témoignage, en réponse à une question que j'ai posée — et, en quelque sorte, à Mme Kwan —, vous avez déclaré que les lettres n'étaient pas destinées à permettre aux gens d'entrer au Canada. Est‑ce bien ce que vous avez compris?
Dans un article du Globe and Mail d'hier, on apprend que plus de 150 Afghans qui avaient reçu cette lettre sont bloqués en Albanie. On apprend aussi que, selon des documents déposés dans le cadre d'une affaire judiciaire, les avocats affirment que Mme Robinson, votre consultante, a confirmé dans un échange écrit de septembre 2021 avec une personne dont le nom a été caviardé que les documents allaient permettre aux Afghans d'entrer au Canada. Dans ces écrits, Mme Robinson précise que grâce à cette lettre, ils seront assurément autorisés à entrer au Canada.
Je crois que j'ai demandé à Mme Robinson de travailler avec moi en tant que bénévole et que la délégation dont vous parlez... Je ne surveillais pas chaque mot écrit par Mme Robinson.
Il n'y en a pas eu tant que ça. Nous travaillions avec l'ancienne capitaine de l'équipe nationale afghane de football, Khalida Popal, et c'est lui, qui, au départ, me l'a demandé.
Nous avons travaillé avec le responsable des droits de la personne de la FIFA. Nous avons également travaillé avec un ancien athlète olympique canadien, qui est maintenant avocat en Australie, et avec un réseau des États-Unis.
Est‑ce que quelqu'un à Affaires mondiales Canada, à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada ou au ministère de la Défense vous a autorisé à envoyer le deuxième modèle à ces groupes pour qu'ils le distribuent?
Outre la copie conforme sur le courriel, avez-vous demandé d'autres éclaircissements? Avez-vous expressément demandé si vous pouviez distribuer le deuxième modèle de lettre à ces organismes?
Y a‑t‑il d'autres ministres ou membres du personnel de cabinets ministériels qui, selon vous, étaient informés directement de ce qui se passait dans votre cabinet?
Ce n'était pas dans tous les courriels. Cela dépendait des sujets, mais c'était le ministre Sajjan, la ministre Monsef, le ministre Mendicino et le ministre Garneau.
Le 25 août 2021, à 21 h 49, votre bureau a envoyé, en votre nom, le deuxième modèle — une lettre de facilitation de visa modifiée — à un membre de la famille d'une personne de ma circonscription. Le courriel qui l'accompagnait indiquait qu'il n'y avait aucune garantie que le document allait fonctionner. Le courriel priait également la famille de cette personne de « ne pas parler de cela à qui que ce soit ».
Pourquoi ces instructions ont‑elles été incluses dans le courriel que vous avez envoyé?
Pour les besoins du compte rendu, je tiens toutefois à préciser qu'après avoir couru un danger et pensé qu'ils avaient un passage vers le Canada, et après avoir harcelé mon bureau pendant un an, pensant qu'il s'agissait d'un document officiel du gouvernement, ce qui les a disqualifiés pour les programmes officiels... Ils se sont retrouvés dans une cohue humaine en se rendant à l'aéroport, pensant qu'ils avaient un billet d'avion pour le Canada.
Néanmoins, je vous prie de continuer. Pourquoi ces instructions étaient-elles là?
Je ne peux pas vous dire comment ils l'ont interprété. Ce que je peux vous dire, par exemple, c'est qu'il n'y avait pas de façon sécuritaire de quitter l'Afghanistan à cette époque.
J'essaierais tout de même de les aider. J'ai fait tout ce que je pouvais faire et tout ce qui me semblait possible à l'époque. Compte tenu des circonstances, je défends les choix que j'ai faits.
Par votre intermédiaire, madame la présidente, je tiens à vous dire, madame la sénatrice, que je vous suis reconnaissant de vous être jointe à nous aujourd'hui.
Je suppose que vous savez qu'il existe des instruments très officiels que les bureaux des ministres et les ministères utilisent lorsqu'ils souhaitent déléguer des pouvoirs exécutifs, qu'il existe des lois, des règlements et des instruments... Leur personnel n'envoie jamais de courriel accompagné de modèles de lettre en pièce jointe.
Avez-vous, dans le cadre d'une autre opération ou d'un autre secteur d'activité du gouvernement du Canada, vu un pouvoir délégué de la manière dont vous laissez entendre qu'il l'a été dans ce cas, c'est‑à‑dire par l'intermédiaire d'un échange de courriels?
Je n'ai jamais travaillé dans une situation comme la crise humanitaire extrême qui a découlé de la reprise de l'Afghanistan par les talibans. J'ai considéré qu'il s'agissait d'une situation unique en son genre et qu'un grand nombre des règles bureaucratiques que l'on pourrait appliquer n'étaient tout simplement pas réalistes à l'époque. Voilà ce que j'en pense.
Madame la sénatrice, je vois que tout le travail que vous faites est motivé par votre désir d'aider les autres. Je peux vous assurer qu'il est important pour moi et pour notre comité de comprendre précisément ce qui s'est passé dans cette situation et de ne blâmer personne.
Je voudrais m'attarder un peu sur les différences entre un visa et une lettre de facilitation et sur votre compréhension de ces deux documents.
Je suppose que vous savez qu'un visa est nécessaire pour venir au Canada. Un visa de résident temporaire est un document que doivent obtenir les ressortissants étrangers qui se rendent au Canada en provenance de pays dont les citoyens ne sont pas dispensés de l'obligation d'obtenir un visa. Pour obtenir ces visas, ces ressortissants doivent présenter une demande avant de se rendre au Canada. Dans certains cas, un visa autocollant est inséré dans le passeport de la personne avant son départ, alors que dans d'autres cas, le visa est inséré à son arrivée à la frontière canadienne.
Vous comprenez qu'une lettre de facilitation est un document exceptionnel qui a été créé et délivré afin d'aider les titulaires de visa à se rendre à l'aéroport Hamid Karzai de Kaboul et à y transiter, n'est‑ce pas?
Je suis désolée, mais d'après mon expérience de ce qui se passait réellement, par opposition à ce qui aurait dû se passer en théorie, bon nombre des gens qui recevaient des lettres fondées sur le modèle d'Affaires mondiales Canada, qu'elles aient été envoyées par IRCC, Affaires mondiales Canada, la Défense nationale ou par mon bureau, n'étaient pas titulaires de visas.
Si l'on examine la lettre, on constate qu'elle contient des déclarations qui, pour la plupart, n'étaient pas vraies pour la grande majorité des Afghans qui tentaient de fuir leur pays. Ce qui comptait, ce n'était pas tant le contenu de la lettre que son objectif. La lettre visait à assurer aux soldats qu'ils pouvaient laisser passer une personne pour que sa demande d'entrée au Canada soit traitée, et ces processus visant à protéger notre pays devaient être mis en œuvre une fois que la personne avait réussi à entrer dans l'enceinte de l'aéroport en toute sécurité.
Madame la sénatrice, je voudrais mieux comprendre si vous connaissez les différences entre un visa et une lettre de facilitation. Vous avez délivré de fausses lettres de facilitation, mais il semble que vous ayez expliqué aux personnes à qui vous les envoyiez qu'il s'agissait en fait de visas, et non de simples lettres.
Pouvez-vous nous parler un peu de ce que vous avez dit exactement aux personnes à qui vous avez envoyé les lettres?
Monsieur, vous ne pouvez pas me tenir responsable du contenu des lettres préparées par le gouvernement du Canada.
Le contenu était comme il était, et il est arrivé, dans mon cas... On m'a assuré qu'il provenait d'Affaires mondiales Canada. Il portait l'insigne d'Affaires mondiales Canada. Le modèle que j'ai reçu de George Young et que je peux remettre au Comité est formulé exactement comme celui qui a été envoyé par IRCC à un autre Afghan qui se trouve maintenant à Ottawa.
Je crois comprendre que les lettres de facilitation qui ont été légitimement délivrées par Affaires mondiales Canada et IRCC étaient accompagnées d'un contexte formulé par le ministère émetteur, un contexte qui expliquait que les lettres ne servaient qu'à leur permettre de franchir les points de contrôle. Elles étaient...
Madame la sénatrice, plus tôt vous avez dit que vous étiez pragmatique et que, ce que vous recherchiez, c'était des résultats. Cela me pousse à vous poser la question suivante, et soyez bien à l'aise de répondre.
Avez-vous l'impression que le gouvernement se traînait les pieds relativement à la crise humanitaire en Afghanistan?
Dans l'ensemble, je pense que les gouvernements des démocraties ont échoué la plupart du temps dans leur tentative de répondre à cette crise. Je pense que les chefs de file de la société civile ont repris bon nombre d'activités que les gouvernements ont laissé tomber ou qu'ils n'ont pas été en mesure d'exercer peut-être correctement ou du tout.
Bref, je n'utiliserais pas nécessairement l'expression « à la traîne », mais je dirais que « dans de nombreux cas, ils ont été incapables de répondre de manière adéquate à la crise ». Là encore, je me reporte à l'excellent rapport du Comité spécial sur l'Afghanistan. Un grand nombre de ces problèmes sont très bien décrits dans le rapport, de même que les changements qui doivent être apportés.
Sans vous mettre des mots dans la bouche et sans accabler le gouvernement, disons que vous avez été plus efficace que le gouvernement.
Si je suis au gouvernement et si je suis au courant des gestes que vous posez — tout à l'heure, vous avez parlé des groupes de confiance, avec qui vous aviez des relations —, il me semble que, la première chose qui me vient à l'esprit, c'est d'entrer en contact avec vous et de créer un lien avec ces groupes de confiance. C'est la première chose que je ferais parce que je voudrais être informé et je voudrais connaître la marche à suivre et le déroulement de ces choses. Je ne peux pas croire que personne, au gouvernement, n'est entré en contact avec vous pour connaître ces groupes de confiance.
Y a-t-il des gens qui sont entrés en contact avec vous?
Oui. De nombreuses conversations et communications ont eu lieu, en particulier avec Olga Radchenko, la directrice de la politique d'IRCC, et en particulier vers la mi‑septembre, lorsque de nombreuses femmes, dont certaines languissent toujours en Albanie, ont été transportées par avion par la FIFA, et que les lettres de facilitation ont fait partie de ce qui a rendu possible le transport aérien de ces centaines d'athlètes féminines. Il ne s'agissait pas de savoir si elles avaient des visas...
Madame la sénatrice, plus tôt au cours de votre témoignage, vous avez mentionné que le personnel de l'ancienne ministre Maryam Monsef et une autre collègue étaient au courant de ces lettres de facilitation. Pouvez-vous nous dire qui est cette autre collègue?
D'accord. J'ai compris, et je vous remercie de votre réponse. C'est ce que je croyais, mais je voulais être sûre.
Compte tenu de la situation actuelle, de nombreux Afghans ont été laissés pour compte, y compris ceux que vous avez essayé d'aider. Il y a ceux qui ont besoin d'une aide humanitaire et ceux qui ont servi le Canada. En fait, les personnes qui ont servi le Canada par l'intermédiaire des militaires, de l'OTAN et de diverses autres activités visant à aider le Canada à remplir sa mission n'ont même pas vu leur demande traitée.
Le gouvernement a fixé le nombre maximal de réfugiés à 40 000, un chiffre arbitraire qui vient de je ne sais où. Pensez-vous que le gouvernement devrait lever cette limite arbitraire de 40 000?
Absolument. Il s'agit essentiellement d'une promesse. La lettre de mandat du ministre indique « au moins 40 000 ». Elle ne dit pas « arrêtez-vous à 40 000 ».
Vous avez fait valoir des arguments très importants à ce sujet, et je suis tout à fait d'accord avec vous.
Certaines de ces demandes ont été saisies dans le système par l'intermédiaire d'un courriel dans lequel le gouvernement demandait aux gens d'indiquer leur intention d'essayer de se mettre à l'abri en... en août ou pendant l'été. D'ailleurs, je reçois encore des courriels et des membres de famille communiquent avec moi pour me dire qu'ils n'ont même pas reçu d'accusé de réception ou de réponse de la part du gouvernement. Que pensez-vous que le gouvernement devrait faire pour amener les gens à des endroits sûrs, en particulier ceux qui vivent des crises et qui sont persécutés par les talibans, ceux qui ont servi le Canada et les membres de leur famille?
Tout d'abord, je pense que les recommandations formulées par le Comité spécial sur l'Afghanistan énumèrent un certain nombre de mesures pratiques qui doivent être mises en œuvre, mais en outre, je dois dire que lorsque Mursal Nabizada a été assassiné le 15 janvier, j'ai vraiment cru que nous allions assister à une accélération du processus. Je pensais qu'au moins les femmes parlementaires piégées en Afghanistan allaient devenir une priorité, mais cela ne s'est pas produit. D'autres personnes et moi-même avons travaillé — par exemple, avec l'Union interparlementaire — à l'établissement de listes particulières de femmes parlementaires, mais cela n'a pas abouti.
Il est écrit dans cette lettre que le gouvernement canadien atteste du fait que les personnes identifiées ont reçu « un VISA pour entrer au Canada ».
Je fais partie de ce comité depuis sept ans. À l'époque, j'en étais la vice-présidente, en plus d'être la porte-parole de l'opposition dans ce dossier. Cela m'a porté à croire, à tort, que ces personnes pouvaient entrer au Canada.
Êtes-vous en train de prétendre que vous n'avez jamais pensé que cela leur permettrait d'entrer au Canada?
Concernant la lettre de facilitation originale, j'ai cru comprendre, des gens d'Affaires mondiales Canada, que cette lettre n'est remise qu'à des citoyens canadiens. Pourquoi y lit‑on qu'ils ont besoin d'un visa pour entrer au Canada s'ils sont citoyens canadiens?
A‑t‑elle été modifiée? Le mot « visa » a‑t‑il été changé dans la deuxième version?
En tant que parlementaire, je comprends que je ne fais pas partie de la branche exécutive du gouvernement et que je n'ai donc pas le pouvoir d'autoriser certaines choses comme l'envoi de lettres comme celles‑ci, parce qu'il y a une procédure qui doit être respectée. Vous prétendez, si je comprends bien, croire que ces lettres sont authentiques parce que quelqu'un vous a envoyé un modèle de lettre par courriel.
Je les ai transmises. Je les ai reçues du chef d'état-major du ministre de la Défense nationale, et je les ai transmises à des avocats de confiance qui aidaient les femmes à sortir du pays, et cela a sauvé des vies.
Cependant, le gouvernement n'a jamais connu l'identité de ces personnes parce que vous ne la connaissiez pas. Le gouvernement ne l'a jamais connue, n'est‑ce pas? Le gouvernement avait‑il les noms de ces personnes?
Nous avions une liste évolutive de noms et, dans la mesure du possible, nous avons mis ces... Ils nous ont répondu que ces personnes étaient dans le système.
Comment est‑il possible que vous puissiez autoriser des lettres authentiques si vous n'êtes pas un membre du gouvernement dûment autorisé à...
Tout ce que j'essaie de dire, sénatrice, c'est qu'aucun d'entre nous ne ferait jamais cela, quelle que soit son appartenance politique, parce que nous comprenons la répartition des pouvoirs et parce que cela pourrait représenter un danger pour les soldats. Il y a des problèmes d'équité.
En quoi les personnes que vous avez sélectionnées étaient-elles plus méritantes que d'autres personnes figurant sur la liste du gouvernement? Comment l'avez-vous déterminé?
Un peu plus tôt, vous avez également dit que vous pensiez que les élections avaient eu une incidence sur la situation. Croyez-vous que le fait que le premier ministre ait déclenché des élections fédérales à ce moment‑là vous a fait sentir l'urgence d'entreprendre ces activités?
Ma collègue, mon attachée à Ottawa, Mackenzie Schultz, est à Ottawa aujourd'hui. Elle a passé un an à faire pression sur le gouvernement, à essayer d'obtenir de l'information et à faire toutes les démarches nécessaires dans l'espoir de réussir à faire sortir ma famille du pays. Pensez-vous que ce que vous avez fait est mieux que ce qu'elle a fait? Est‑ce que cela a été plus efficace?
Par l'entremise de la présidente, je voudrais tout d'abord vous remercier, sénatrice, de prendre le temps d'être parmi nous aujourd'hui pour répondre à ces questions très difficiles. Je sais que vous allez rester ici pendant deux heures, et je vous remercie sincèrement de prendre le temps de répondre à ces questions très importantes de notre comité.
Sénatrice, je me demande plus généralement si vous pouvez nous dire si vous croyez que la façon dont vous avez agi dans cette situation a créé un genre de précédent. Il y a diverses situations extrêmes et malheureuses et de crises qui se déroulent actuellement dans le monde, et le Canada intervient dans plusieurs cas. S'il est rare que nous intervenions de façon aussi vigoureuse que nous l'avons fait au moment de la chute de Kaboul, il y a d'autres situations préoccupantes, notamment en Ouganda en ce moment même.
Pensez-vous qu'il serait approprié pour moi, en tant que députée, de travailler avec des partenaires en Ouganda afin d'envoyer des lettres produites de mon propre chef et de dire ensuite au gouvernement qu'il doit honorer les promesses que j'ai faites? Je ne voudrais pas que des gens un peu partout dans le monde pensent qu'un parlementaire canadien leur a fait une promesse à un moment où ils étaient dans une situation vulnérable, désespérée.
Les lettres transmises par l'intermédiaire de mon bureau provenaient d'Affaires mondiales Canada. Si des promesses ont été faites, elles ont été faites par le gouvernement du Canada. Je n'ai rien à voir avec la formulation de cette lettre.
Le fait que le chef d'état-major du ministre de la Défense nationale m'ait envoyé un modèle de lettre, puis un second modèle plus approprié pour les Afghans est pour moi la preuve plus qu'adéquate qu'en temps de crise humanitaire massive, des personnes comme George Young, au sein du gouvernement, faisaient tout ce qu'elles pouvaient pour essayer de faire sortir les gens du pays. Tout le monde savait que beaucoup de personnes seraient laissées derrière, mais les gens avec qui je travaillais s'échinaient littéralement nuit et jour pour faire tout ce qu'elles pouvaient pour en faire sortir le plus grand nombre possible.
J'aimerais revenir sur un point que vous avez mentionné tout à l'heure concernant les communications avec le personnel politique et les ministres sur l'envoi de ces lettres. Je ne porte pas de jugement sur le bien-fondé de vos actions, mais je voudrais que nous soyons très clairs et que nous ne blâmions pas accidentellement des membres du personnel qui faisaient leur travail. Je suis sûre que vous êtes d'accord avec moi.
Si vous étiez autorisée par la loi à agir ainsi, il me semble qu'il y aurait une très longue liste de membres du personnel et de ministres qui auraient été au courant, or cette liste est très courte, au contraire. Concernant cette liste — qui comprend Mme Radchenko, M. Jones, M. Jungic et les ministres que vous avez nommés —, êtes-vous en train de dire au Comité que vous avez envoyé un courriel directement à leurs comptes personnels pour les informer du fait que vous enverriez des lettres de facilitation de votre propre chef?
L'hon. Marilou McPhedran: Vous savez, je...
Mme Arielle Kayabaga: Je veux simplement comprendre la nature de la correspondance que vous avez envoyée à ces membres du personnel et à ces ministres. Si vous prétendez que cela indique qu'ils étaient au courant de vos activités en leur nom, j'aimerais savoir si vous avez communiqué directement avec eux au sujet de ces activités, si vous les en avez informés.
Oui. La réponse courte est oui. Ils ont reçu de nombreuses communications. Je serai ravie de les déposer, mais je dois m'excuser, parce qu'elles ne sont qu'en anglais. Toutes ces communications ont eu lieu en anglais. Si vous souhaitez les voir aujourd'hui, je serai ravie de les déposer.
Il est très clair qu'il y a eu des communications concernant l'envoi du plus grand nombre possible de lettres de facilitation. Pour être honnête avec vous, dans certaines de ces communications, lorsque je réclamais plus d'action, j'ai mis en copie les ministres et leurs chefs de cabinet. Cela a duré plusieurs jours, jusqu'au moment du bombardement.
C'était à propos de la situation, du fait que nous ne faisions pas sortir beaucoup de ces femmes, que nous nous attendions à ce que les soldats les laissent passer, mais qu'ils ne les laissaient pas passer.
Quand avez-vous été informée pour la première fois que quelqu'un au gouvernement estimait que ces lettres étaient inauthentiques ou qu'elles n'auraient pas dû être envoyées par l'intermédiaire de votre bureau?
Est‑ce que c'était après que je vous ai mis en copie sur la question de ma... Je vous ai mis en copie d'un courriel que j'ai envoyé à la ministre des Affaires mondiales ainsi qu'au ministre de l'Immigration, parce que je ne savais pas d'où venait cette lettre.
Il est toutefois intéressant de souligner que lorsque nous nous sommes parlé en personne en juin, vous ne m'avez jamais fait part de vos préoccupations ou de vos critiques.
Parce que nous n'avions pas encore reçu de réponse du gouvernement.
C'est pourquoi j'essaie de déterminer qui savait quoi, quand, et j'essaie de déterminer, après avoir passé un an à mon bureau à me demander d'où venait cette lettre, pourquoi personne ne le savait et pourquoi la famille de mon électrice n'était pas autorisée à présenter une demande dans le cadre des programmes réguliers, même si elle avait présenté une demande d'asile en bonne et due forme au Canada, parce qu'elle pensait y avoir été admise à la lumière de cette lettre. Cela m'a induite en erreur.
Je ne voulais pas jeter l'opprobre sur vous. C'est pourquoi j'ai écrit aux ministres pour leur demander: « Qu'est‑ce qui se passe? D'où est‑ce que cela vient? » C'était moi, mais c'est de vous qu'il s'agit aujourd'hui. Je veux savoir...
Vous avez dit tout à l'heure que le ministre Sajjan et le ministre Mendicino étaient au courant. Vous avez dit que le ministre Garneau était au courant aussi.
Je tiens à être très claire. Vous pensiez qu'ils savaient que vous envoyiez le deuxième modèle de lettre à des organisations de confiance. Ils le savaient.
Ils ont reçu copie de la correspondance sur la situation.
Puisqu'il s'agit de moi, j'aimerais également dire qu'il est intéressant de constater que vous n'avez pas hésité à remettre mon intégrité en doute et à en faire part au Globe and Mail...
Je ne connais pas les méthodes de journalisme du Globe and Mail. J'essaie simplement de rester hors de leur ligne de mire. Je recommande la même chose à toutes les personnes présentes dans cette pièce.
Vous envoyiez la liste évolutive. Est‑ce que vous disiez que c'était des gens qui devaient sortir du pays ou des gens pour qui vous produisiez des lettres?
Pouvez-vous me dire quelle adresse électronique... Pour faire suite à ce que disait Mme Kayabaga, vous savez pertinemment que vous avez envoyé l'information aux adresses électroniques personnelles des ministres.
Je pense que ce que Mme Kayabaga disait est très important aussi, extrêmement important. Indépendamment de ce que vous pouvez penser, je pense qu'il est important que toute personne qui écoute les délibérations de ce comité comprenne que les parlementaires du Sénat ou de la Chambre des communes n'ont pas l'autorisation d'accorder l'accès au Canada, parce que...
Sénatrice, je ne comprends pas très bien ce que vous pensiez faire. J'ai ici une lettre qui dit « lettre de facilitation de visa ». Selon un article du Globe and Mail, Mme Robinson estimait que cette lettre leur permettrait sûrement d'entrer au Canada.
Pour le compte rendu, pour tous ceux qui nous écoutent dans le monde ou au Canada, un parlementaire ne peut pas permettre à qui que ce soit d'entrer au Canada. Nous ne pouvons pas donner accès à qui que ce soit à un aéroport. Ce n'est pas pour rien que nous avons des procédures gouvernementales. Je tiens à ce que ce soit très clair. Notre travail de parlementaires consiste à corriger les procédures et à demander des comptes au gouvernement.
Sénatrice, vous avez mis la vie de membres de ma famille en danger. C'est ce que vous avez fait.
Ils ont mis leur vie en danger et ne pouvaient pas faire une demande dans le cadre d'un programme régulier. Savez-vous à quel point c'est déchirant?
Encore une fois, vous avez dit tout à l'heure que vous recommenceriez. Sachant ce que vous savez maintenant, sachant qu'il y a 150 personnes qui croupissent en Albanie parce que vous avez pris l'initiative d'envoyer ces lettres, le referiez-vous?
Ces femmes sont en Albanie, elles ont accès à de la nourriture, à un abri, elles sont en sécurité. Elles sont dans une bien meilleure situation qu'en Afghanistan.