Je vous souhaite la bienvenue à la 96e réunion du Comité permanent de la science et de la recherche de la Chambre des communes.
J'aimerais faire quelques rappels à l'intention des membres du Comité.
Veuillez s'il vous plaît attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Tous les commentaires doivent être adressés à la présidence. Veuillez lever la main si vous souhaitez intervenir, que vous participiez à la réunion en personne ou par Zoom. Je vous remercie pour votre coopération.
Je souhaite la bienvenue à M. McLean, qui remplace .
Conformément à l'article 108(3)i) du Règlement et à la motion adoptée le jeudi 23 mai 2024, le Comité reprend son étude sur l'innovation, la science et la recherche en matière de recyclage des plastiques.
Je suis heureuse d'accueillir nos témoins: Mohammad Arjmand, professeur adjoint à l'Université de la Colombie‑Britannique, qui témoigne à titre personnel; le directeur général de Circular Materials, Allen Langdon, qui se joint à nous avec la vidéoconférence; et le chef des relations gouvernementales et externes d'Éco Entreprises Québec, Charles David Mathieu‑Poulin.
Nous vous souhaitons à tous la bienvenue.
Vous disposez d'au plus cinq minutes chacun pour votre déclaration préliminaire. Nous passerons ensuite aux séries de questions.
Monsieur Arjmand, je vous cède la parole pour votre déclaration préliminaire. Allez‑y.
Bonjour à tous. Je m'appelle Mohammad Arjmand. Je suis professeur adjoint et chef de la grappe de recherche sur le recyclage du plastique à l'Université de la Colombie-Britannique.
J'ai quelques observations importantes à faire au sujet du recyclage des plastiques, compte tenu de ce que j'ai vécu au cours des dernières années dans le cadre de mon travail dans ce domaine. Les déchets plastiques et la pollution sont reconnus comme étant le deuxième problème environnemental et social mondial en importance du XXIe siècle, après les changements climatiques.
Nous savons que, dans le contexte canadien, selon Environnement et Changement climatique Canada, plus de trois millions de tonnes de déchets plastiques sont jetées. La grande majorité se retrouve dans les sites d'enfouissement, et environ 29 000 tonnes se retrouvent dans notre environnement naturel. Les déchets plastiques sont une source de préoccupation pour les Canadiens, étant donné que seulement 9 % des déchets plastiques sont recyclés, que 12 % sont incinérés et que les 79 % restants sont déversés dans des sites d'enfouissement.
Le gouvernement du Canada prévoit d'atteindre l'objectif de zéro déchet de plastique d'ici 2030. Néanmoins, ce défi dépend fortement de la collaboration des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, de même que de celle du public, du milieu universitaire et des membres engagés de l'industrie. Comme il est énoncé dans le plan d'action pancanadien du Conseil canadien des ministres de l'Environnement, il y a trois thèmes interreliés auxquels il faut penser dans ce domaine: la prévention, la collecte et la récupération.
Il faut garder en tête qu'on ne peut pas remplacer les plastiques par d'autres matériaux comme le verre ou les contenants en métal. Ce n'est pas une solution durable sur le plan environnemental, puisqu'ils sont considérablement plus lourds, ce qui contribue à l'augmentation des émissions de dioxyde de carbone pendant le transport, qui ont une incidence sur notre planète.
Le Canada s'efforce de remplacer ces déchets plastiques par des plastiques d'origine biologique. Nous avons beaucoup de forêts, et nous pouvons faire du bon travail dans ce domaine. Il y a deux ou trois défis que nous devons prendre en considération. Premièrement, les biens physiques que nous obtenons des plastiques d'origine biologique ne sont habituellement pas d'aussi bonne qualité que ceux issus des plastiques à base de pétrole. Deuxièmement, la quantité de plastique biosourcé que nous produisons ne peut toujours pas rivaliser avec les plastiques à base de pétrole. C'est le deuxième problème que nous avons dans ce domaine. Troisièmement, il y a le coût, dont il faut tenir compte. Malgré tout, je crois que nous avons fait d'énormes progrès dans le domaine des plastiques d'origine biologique, mais il reste encore beaucoup à faire.
J'ai dit qu'il y existait trois grandes stratégies pour s'attaquer aux déchets plastiques. L'une d'entre elles est la collecte. Il convient de mentionner que plus de 15 % des déchets plastiques générés dans le monde sont recueillis aux fins du recyclage. Cela représente 55 millions de tonnes sur 353 millions de tonnes. Le problème, c'est qu'en raison de mécanismes de collecte inadéquats, 30 millions de tonnes de plastique ne peuvent tout simplement pas passer à l'étape suivante, et environ 20 millions de tonnes de plastique sont jetées ou gaspillées. Je ne crois pas que le bilan du Canada en la matière soit meilleur que celui des autres pays du monde.
Certaines stratégies ont été mises en œuvre. Elles sont habituellement régies par le gouvernement. L'une d'entre elles est la consignation ou le rachat pour la collecte des plastiques. Nous devons travailler davantage dans le domaine de la collecte des plastiques, mais il y a plus de facteurs à prendre en considération. Nous devons notamment travailler à changer le comportement des gens. Il est très important de tenir compte de l'élaboration des politiques. Il y a aussi d'autres paramètres, que j'aborde dans mon rapport. Voilà pour la première partie, sur la collecte du plastique.
La deuxième partie vise l'étape suivant la collecte des plastiques: le tri. À l'heure actuelle, ce sont surtout des êtres humains qui font le tri du plastique, ce qui n'est pas efficace, surtout lorsqu'on travaille à grande échelle. Les pays européens ont fait un très bon travail en ce sens, notamment la Finlande. Ils ont mis au point des systèmes robotisés pour améliorer le tri et la séparation des plastiques.
Après le tri, il faut s'attarder à d'autres volets, comme la décontamination. Il y a certains additifs à l'intérieur des plastiques, qui doivent être décontaminés. Il y a parfois des adhésifs ou des étiquettes sur le plastique, ou encore de la graisse. Le nettoyage de ces plastiques pourrait être une source de pollution secondaire. Je crois que ce fait n'est pas établi au Canada en ce moment.
Supposons que nous puissions résoudre ce problème pour recueillir les plastiques de façon efficace; que nous puissions séparer les plastiques et les nettoyer. La troisième étape est le recyclage. Celui‑ci doit se faire de façon mécanique, car c'est la façon la plus facile de recycler les plastiques.
En gros, ce que fait mon groupe de recherche et ce qui se fait partout au Canada, c'est de retraiter les plastiques et de les convertir en des produits à valeur ajoutée...
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Madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invité aujourd'hui.
Je m'appelle Allen Langdon. Je suis le directeur général de Circular Materials.
Circular Materials est un organisme national sans but lucratif qui aide les producteurs de tout le Canada à respecter leurs obligations en vertu du règlement sur la responsabilité élargie des producteurs pour les emballages et les produits du papier, que l'on appelle aussi la REP. Cette approche stratégique est reconnue comme l'un des mécanismes les plus efficaces pour améliorer les taux de recyclage. En vertu de ce cadre, les entreprises qui fournissent des produits d'emballage et de papier sont responsables, sur le plan opérationnel et financier, de ces matériaux tout au long de leur cycle de vie.
Notre mandat est de faire progresser l'économie circulaire et de mettre en place des systèmes de recyclage efficaces et efficients.
Nous sommes en train de mettre sur pied le premier programme d'accès aux matières, une initiative unique en son genre qui permettra de retourner directement aux producteurs les matières transformées pour qu'elles soient utilisées sous forme de contenu recyclé, de nouveaux produits et d'emballages. Cette initiative est un très bon exemple d'économie circulaire, grâce à laquelle les plastiques restent en boucle dans le système et peuvent être utilisés à maintes reprises.
Le gouvernement fédéral a établi des cibles ambitieuses pour améliorer le recyclage des plastiques au Canada. Il est essentiel de soutenir l'investissement dans l'infrastructure et l'innovation à l'échelle nationale pour apporter les changements au système qui permettront de recycler efficacement le plastique et d'autres matières. Plus important encore, il est nécessaire de collaborer avec les intervenants de tous les ordres de gouvernement à la gestion des plastiques et des matières pour atteindre l'objectif de zéro déchet de plastique du Canada d'ici 2030.
Notre travail avec nos partenaires de la chaîne d'approvisionnement contribue à faire progresser l'économie circulaire pour les plastiques. Par exemple, notre partenariat avec le Pacte canadien sur les plastiques aide à accroître les investissements dans l'infrastructure et l'innovation.
Récemment, nous avons lancé avec nos partenaires Éco Entreprises Québec et Recycle BC une demande d'expression d'intérêt pour désigner les technologies innovantes de tri des plastiques, de mécanique et de recyclage avancé. Nous évaluerons la viabilité commerciale de ces technologies pour aider à réintégrer les plastiques recyclés dans les chaînes d'approvisionnement de la fabrication.
L'industrie investit beaucoup dans l'infrastructure et l'innovation, mais nous ne pouvons pas y arriver seuls. Il faut élaborer une stratégie concertée et cohérente pour réduire les risques liés aux investissements dans le système de recyclage. Selon un rapport de 2019 commandé par Environnement et Changement climatique Canada, il faudrait un investissement en capital de 6,5 milliards de dollars pour accroître la capacité du système de recyclage et atteindre les objectifs du Canada. Nous avons connu une décennie de sous-investissement des secteurs public et privé dans l'infrastructure de recyclage au Canada. Les incitatifs pour le secteur privé sont essentiels pour stimuler l'innovation, accélérer la mise à l'échelle et la transition vers des solutions, de l'équipement et des technologies « conçus pour la recyclabilité ».
Le soutien des projets pilotes et de démonstration est également une étape clé vers le déploiement commercial de technologies modernes de recyclage pour le tri et le recyclage mécanique et avancé.
Le gouvernement du Canada a un rôle crucial à jouer pour soutenir la transformation du système de recyclage du pays. À ce titre, Circular Materials propose deux recommandations au gouvernement fédéral. La première consiste à encourager les investissements en infrastructures pour l'innovation et les projets d'économie circulaire au moyen des programmes de financement fédéraux existants, et d'éliminer les risques connexes. La deuxième consiste à accélérer la création d'un fonds fédéral pour l'infrastructure et l'innovation qui permettra de mettre à l'échelle et de commercialiser les technologies et les solutions pour la réutilisation et le recyclage des plastiques.
En investissant dans l'infrastructure de recyclage du pays, le Canada peut créer de nouveaux emplois bien rémunérés dans le domaine du recyclage et de la fabrication. Sans cette collaboration, notre économie risque de perdre ces investissements à forte valeur ajoutée au profit d'autres administrations aux États-Unis et en Europe.
Des études ont également montré qu'une économie circulaire pour les plastiques et l'utilisation de plastiques recyclés dans les nouveaux produits pourraient se traduire par une réduction annuelle des émissions de GES de 1,8 mégatonne de dioxyde de carbone, ce qui procurerait d'autres avantages environnementaux au pays.
En gros, l'augmentation des investissements dans les infrastructures et les technologies novatrices est nécessaire pour faire la transition vers une économie circulaire et atteindre des cibles environnementales ambitieuses. Cela ne peut pas se faire du jour au lendemain. Il faut mettre en place une stratégie nationale pour assurer un avenir durable et prospère pour les matières plastiques à valeur ajoutée. Nous allons poursuivre nos efforts et nous serons heureux de travailler avec les gouvernements et les intervenants pour moderniser le système de recyclage du Canada. La collaboration est essentielle pour stimuler l'économie circulaire du plastique au Canada et assurer un avenir plus durable.
Je vous remercie du temps que vous m'avez accordé. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
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Merci beaucoup et bonjour, madame la présidente.
Bonjour, mesdames et messieurs les députés et membres du Comité.
D'entrée de jeu, je souhaite remercier le Comité de cette invitation à témoigner sur un sujet aussi important et complexe que le recyclage des plastiques.
Éco Entreprises Québec, ou EEQ, est un organisme privé à but non lucratif qui représente depuis 2005 les producteurs qui mettent en marché au Québec des produits emballés, des contenants et des imprimés. Dans un principe de responsabilité élargie des producteurs, ou REP, ceux-ci sont responsables d'élaborer, de mettre en œuvre et de financer le système de recyclage au Québec.
En 2022, EEQ a été nommé comme organisme de gestion désigné de la REP au Québec, devenant ainsi le chef d'orchestre de la modernisation de la collecte sélective. Ainsi, dès le 1er janvier 2025, EEQ gérera la collecte, le transport, le tri et la vente des matières recyclables pour l'ensemble de la province. Ce nouveau rôle nous place ainsi dans une position de choix, nous permettant d'avoir une vision systémique sur la question des plastiques et d'assurer leur saine gestion en fin de vie.
Notre approche sur les plastiques se divise en trois grands axes. Premièrement, du fait des cibles de recyclage ambitieuses mises de l'avant par la réglementation du Québec, l'un des principaux bénéfices de la REP est de favoriser les investissements dans les infrastructures. Malheureusement, au cours des dernières années, les opérateurs de centres de tri ont souvent mis de côté les investissements majeurs, visant plutôt à trier à un coût moindre, quitte à devoir exporter ou à enfouir certaines matières, comme les plastiques. En tant que gestionnaire de la REP au Québec, EEQ travaille à rattraper ce retard technologique important non seulement en s'assurant d'exiger une meilleure performance des opérateurs des centres de tri, mais aussi en leur donnant les moyens d'atteindre ces objectifs ambitieux et en construisant de nouveaux centres de tri performants et innovants, comme celui de Montréal‑Est, qui entrera en opération le 2 janvier 2025.
De plus, comme l'a mentionné M. Langdon, avec nos collègues de Recycle BC et de Circular Materials, nous avons lancé au printemps 2024 une demande d'expression d'intérêt pour le traitement des emballages en plastique, dont l'objectif est d'obtenir des informations sur les manufacturiers d'équipements et les recycleurs de plastique, du Canada et d'ailleurs, qui souhaitent participer activement à la modernisation du système. La période de collecte d'information est maintenant terminée et des projets sont actuellement en analyse pour une mise en œuvre en 2025.
Deuxièmement, nous savons pertinemment que ces changements en aval du système doivent être accompagnés de changements en amont. C'est pourquoi EEQ a mis en place de nombreux programme et initiatives en écoconception et en écomodulation au cours des 20 dernières années. En effet, nous avons une équipe dédiée aux producteurs qui souhaitent remplacer leurs emballages et leurs contenants par des solutions de rechange moins perturbatrices pour le système de recyclage. Depuis 2021, plusieurs centaines de milliers de dollars ont été accordés aux producteurs sous forme d'un bonus incitatif à l'écoconception, qui récompense de bonnes pratiques telles que la réduction, le réemploi, le contenu local, la recyclabilité et l'intégration de contenu recyclé. Dans les prochaines semaines, c'est avec fierté que nous lancerons nos premières lignes directrices en écoconception et en recyclabilité, qui guideront les producteurs vers des choix plus responsables d'emballages. Ces lignes directrices sont basées sur les meilleures pratiques mondiales, tout en tenant compte de la réalité terrain du recyclage au Québec.
Pour ce qui est plus précisément des plastiques, nous avons mis en place en 2024 des mesures d'écomodulation sur certaines catégories dans nos tarifs, soit des malus sur le polychlorure de vinyle, ou PVC, et sur les plastiques biodégradables et compostables. En effet, bien qu'ils soient souvent vus comme une solution à certains problèmes reliés aux plastiques, comme la pollution des océans, les plastiques biodégradables et compostables posent plusieurs défis dans le système de recyclage. Comme la majorité des infrastructures de compostage du Québec et du pays ne peuvent pas traiter les emballages compostables, ils sont souvent refusés dans les bacs de compost résidentiels. Les citoyens se retrouvent donc à jeter ces emballages à la poubelle, où leur valeur est perdue, ou à les mettre au recyclage, où ils vont contaminer les ballots de plastique et, par la suite, les résines postconsommation. Il est donc bien important de considérer les effets indirects de l'augmentation de tels produits.
Finalement, EEQ est fier d'être un membre fondateur du Groupe d'action plastiques circulaires, ou GAPC, qui a pour mission de créer une économie circulaire pour tous les plastiques postconsommation au Canada. Depuis sa fondation en 2020, le GAPC a mené plusieurs projets pilotes et de recherche sur des questions importantes reliées aux plastiques, comme la traçabilité, le grade alimentaire, les plastiques souples et le polyéthylène téréphtalate thermoformé. Les produits livrables de ces projets, tels des rapports de recherche et des livres blancs, sont devenus de véritables outils de référence au sein de l'industrie des plastiques partout dans le monde, donnant ainsi une vitrine internationale aux chefs de file canadiens qui y participent. Nous souhaitons d'ailleurs remercier Environnement et Changement climatique Canada de l'aide financière accordée au GAPC par le passé. Espérons que ce soutien sera maintenu dans l'avenir.
Pour conclure, les circonstances actuelles sont favorables au Canada pour ce qui est de l'économie circulaire des plastiques, notamment du fait de la multiplication des initiatives provinciales de responsabilité élargie des producteurs. Bien que l'arrivée de la REP dans la majorité des provinces du Canada entraînera une série d'investissements dans les infrastructures et les nouvelles technologies, cela risque de ne pas être suffisant pour mettre tout le système à l'échelle. Afin d'encourager la circularité des plastiques et accélérer le mouvement déjà entamé, le gouvernement fédéral a donc un rôle important à jouer afin d'encourager les investissements privés dans le recyclage des plastiques, de la fabrication au centre de tri aux recycleurs, et d'en réduire les risques. Des changements d'une telle envergure ne se réaliseront que si tous y travaillent en collaboration.
Merci encore de votre invitation.
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Merci, madame la présidente.
Merci à nos témoins d'aujourd’hui.
Je sais que nous sommes tous conscients du rôle du Canada sur la scène internationale. Le printemps dernier, nous avons été l'hôte de la quatrième séance du Comité intergouvernemental de négociation sur la pollution par les plastiques, qui a annoncé un financement de plus de 3,3 millions de dollars pour soutenir les organisations canadiennes qui innovent dans la lutte contre la pollution par les plastiques. Bien sûr, le recyclage est une partie importante de la solution.
Monsieur Arjmand, vous avez souligné le fait que seulement 9 % des 4 millions de tonnes de déchets plastiques générés au Canada chaque année sont recyclés. Vous avez commencé à parler de la valorisation dans le processus de recyclage et de la façon dont cela contribuerait grandement à soutenir l'économie circulaire. Vous avez manqué de temps, alors j'aimerais vous entendre.
Pourriez-vous terminer votre témoignage?
Différents pays utilisent actuellement trois techniques générales pour bien récupérer et trier le plastique.
L'une des plus simples est le recyclage mécanique. On peut le mettre en place dans n'importe quelle petite ville du Canada. Il peut générer des recettes et des emplois. Nous pouvons simplement convertir une partie des déchets plastiques générés dans chaque ville en produits à valeur ajoutée. Nous pouvons parfois améliorer les propriétés physiques des plastiques. Les bouteilles d'eau potable pourraient par exemple être facilement transformées en un matériau conducteur d'électricité capable, par exemple, d'absorber les ondes électromagnétiques. Voilà comment nous pouvons transformer des produits de faible valeur en produits à valeur ajoutée.
La deuxième approche... Lorsque le recyclage mécanique — qui est la méthode la plus simple — n'est pas possible, les pays ont commencé à se tourner vers le recyclage chimique. L'investissement en capital dans l'infrastructure est plus important, mais les matériaux que nous pouvons obtenir grâce au recyclage chimique sont des produits à valeur ajoutée. Nous pouvons générer des produits chimiques à partir des déchets plastiques qui peuvent trouver un marché.
Si les deux méthodes précédentes ne sont pas envisageables, il en existe une troisième. Certains plastiques sont difficiles à traiter, c'est pourquoi certains pays européens ont commencé à travailler sur la récupération d'énergie. Nous savons que la plupart des déchets plastiques sont fabriqués à partir de matériaux dérivés du pétrole. Ils contiennent un grand nombre de calories, et donc beaucoup d'énergie. Certains pays ont commencé à brûler ce matériau pour produire de l'énergie qu'ils utilisent pour produire de l'électricité ou du courant. Le problème est que nous pourrions générer des gaz toxiques. Nous devons disposer d'excellents systèmes de filtration, d'où la nécessité d'utiliser des technologies de pointe. Certains pays, comme l'Allemagne, sont à l'avant-garde dans ce domaine.
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Oui. Nous devons faire très attention à ce que les plastiques recyclés... L'industrie hésite actuellement à les utiliser pour produire des emballages alimentaires industriels, en raison de la présence de contaminants dans ces matières. D'autres secteurs, comme l'aérospatiale, la défense, la construction ou l'électroménager, peuvent toutefois utiliser ces plastiques.
L'idée est que si nous recevons ces plastiques recyclés, nous devons trouver un moyen, premièrement, de les traiter et, deuxièmement, d'améliorer certaines de leurs propriétés, comme les propriétés électriques, mécaniques ou thermiques, afin de les adapter à ces secteurs cibles. Voilà ce sur quoi nous devons travailler.
J'aimerais souligner un point important. Lorsque nous recyclons des plastiques, leurs propriétés commencent à se dégrader. Ils ne sont plus aussi compatibles que les plastiques vierges. C'est l'une des raisons pour lesquelles l'industrie hésite tellement à les utiliser. Pour ce qui est de leur prix, les plastiques vierges sont beaucoup plus compétitifs que les plastiques recyclés. C'est l'un des principaux problèmes auxquels se heurte actuellement l'industrie.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je salue les témoins qui se joignent à nous pour cette étude.
Monsieur Mathieu‑Poulin, je vous félicite pour l'ensemble du travail de votre organisation. C'est toujours une fierté, pour moi à titre de Québécois, de voir une entreprise québécoise qui rayonne et qui est à l'avant-plan et à l'avant-garde dans plusieurs domaines, notamment en environnement. Le fait de vous voir agir, ça fait chaud au cœur, mais ça démontre aussi que, effectivement, il se passe de bonnes choses. On le sait, on le voit, qu'il s'agisse d'Hydro‑Québec, des services de garderie, voire du régime d'assurance-médicaments du Québec, plusieurs choses permettent au Québec d'inspirer les autres parties du pays. Je vous dis donc bravo pour vos mesures de protection de l'environnement.
Étant donné votre présence aujourd'hui, je veux vous entendre nous parler d'environnement. On le sait, le Québec a toujours été un pionnier en matière d'environnement et dans ses performances en écoresponsabilité. Le Québec n'est pas parfait, mais il se débrouille. Pourriez-vous nous parler de la pointe en matière de recyclage et de protection de l'environnement, et plus précisément des plus récentes innovations qui ont été faites dans le domaine particulier que nous étudions à ce moment, c'est-à-dire le recyclage du plastique?
Selon vous, quelle est l'importance du Québec dans le dialogue au sujet du recyclage du plastique, que ce soit avec les provinces du Canada ou bien avec les États‑Unis? Au Québec, je sais qu'on a Éco Entreprises Québec, qui travaille intensément avec les municipalités en vue d'harmoniser les pratiques d'ici 2025, mais aussi avec les organismes d'autres provinces, comme Circular Materials. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet?
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Je vous remercie des compliments et de la question.
Premièrement, au Québec, nous avons un règlement, soit le Règlement sur la récupération et la valorisation de produits par les entreprises, qui encadre la responsabilité élargie des producteurs, ou REP, et qui est considéré par beaucoup de gens partout dans le monde comme probablement le plus difficile, le plus rigoureux et le plus ambitieux. Nous avons énormément de trucs dans ce règlement.
Plus tôt, par exemple, on a parlé du recyclage local. Le gouvernement du Québec impose l'obligation de faire du recyclage au Québec et dans les provinces environnantes. Je pense que l'une des particularités que l'on a, et qui est très forte au Québec, c'est le recyclage du polystyrène. C'est un produit qui, ailleurs au pays, est peut-être un peu mal aimé, mais, au Québec, on a réussi à bâtir un bel écosystème, autant de transport que de recyclage du polystyrène. Par conséquent, même si ce produit est souvent interdit hors Québec, on est vraiment contre son interdiction au Québec, précisément parce que l'on a établi cette chaîne de recyclage.
J'ai parlé des centres de tri. Nous sommes très fiers du centre de tri qui va ouvrir à Montréal‑Est et qui va probablement être un des plus modernes en Amérique du Nord. On a parlé de robotique ou d'intelligence artificielle. Nous sommes très fiers d'avoir travaillé avec des compagnies québécoises qui sont expertes dans ce domaine et qui construisent des centres de tri ailleurs dans le monde aussi, comme Machinex et Waste Robotics.
Il se passe donc plusieurs choses au Québec, et il y en aura encore plus au cours de la prochaine année avec la modernisation de la collecte sélective.
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Oui, je suis bien d'accord sur ce point.
Au fond, il faut réfléchir à la source du problème. Si le problème est causé par la pollution sauvage de l'environnement par le plastique, l'idée de fabriquer un plastique qui est censé se dégrader dans l'environnement n'est pas nécessairement la solution à envisager. L'idée est plutôt d'essayer de changer le geste citoyen pour éviter que ce plastique se retrouve dans l'environnement, ou de bâtir des infrastructures, surtout hors foyer, pour que les gens puissent disposer de leurs emballages au bon endroit, et non dans l'environnement.
On parle souvent de biodégradabilité. Nous étions très heureux de voir que le gouvernement fédéral semblait interdire l'utilisation du mot « biodégradable » pour ce qui est des plastiques. Souvent, ce n'est malheureusement pas vrai qu'ils sont biodégradables. Souvent, ils se retrouvent en plus petits morceaux de plastique, des microplastiques, qui finissent par aboutir dans l'environnement ou dans le corps humain. Effectivement, je pense qu'il faut faire attention de ne pas essayer de remplacer une chose par une autre, laquelle pourrait soulever des problèmes ou avoir des répercussions qui sont pires.
De notre côté, comme je le disais, nous avons imposé une pénalité à ce sujet, un malus: nos producteurs qui fabriquent des produits avec des plastiques compostables biodégradables vont payer des frais plus élevés à Éco Entreprises Québec que ceux qui ne le font pas. Selon nous, c'est une manière d'inciter les gens à poser le bon geste, c'est-à-dire de ne pas utiliser de tels plastiques. Je pense qu'il est vraiment préférable de produire des plastiques recyclables, qui pourraient passer dans le système, plutôt que des plastiques biodégradables.
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Nous avons eu plusieurs conversations intéressantes au sujet du registre.
Comme vous le savez, en tant qu'organisme de gestion de la responsabilité élargie des producteurs, nous recevons énormément d'informations de nos producteurs sur les emballages qu'ils mettent en marché. Nous avions suggéré au gouvernement fédéral de pouvoir transmettre ces informations au registre, mais les catégories du registre et celles de l'information que nous recevons ne sont malheureusement pas les mêmes. Nous ne pourrons donc pas transmettre au fédéral ce qui se passe au provincial. Je pense que cela pose problème aux producteurs, puisqu'ils doivent envoyer deux rapports différents sur deux catégories différentes et fournir plusieurs informations différentes.
Pour ce qui est du besoin, je pense qu'il est intéressant d'avoir plus d'informations sur les plastiques. Cependant, étant donné que le registre est si exhaustif et demande énormément d'informations que les producteurs n'ont pas actuellement, il y a un risque important que les informations soient vues à un trop haut niveau. Il y a beaucoup d'hypothèses derrière ce registre, à savoir qu'il y aurait beaucoup de double comptabilisation, parce que, malheureusement, ce qui est demandé est extrêmement exhaustif. Le but de ce registre est intéressant, car on a besoin de plus d'informations sur les plastiques. Cependant, le moyen pour obtenir ces informations a besoin de quelques ajustements. Cela dit, c'est l'année prochaine que le registre entrera en vigueur. Il sera donc intéressant de voir comment il évoluera.
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Notre entreprise et Circular Materials font toutes deux partie d'EXPRA, un groupe de professionnels internationaux qui, comme nous, gèrent des systèmes de REP dans des provinces ou des États. Il s'agit d'un excellent espace dans lequel nous pouvons échanger des pratiques exemplaires. Nous nous rendons souvent en Europe pour voir ce qui s'y fait. La France, par exemple, fait quelque chose de très intéressant. Ils ajoutent une deuxième couche entre le centre de tri et le recycleur, qu'ils appellent le tri secondaire.
Nous demandons beaucoup de nos centres de tri. Ils reçoivent beaucoup de choses qu'ils ne devraient pas recevoir. Je vous invite tous à en visiter un si vous ne l'avez pas encore fait. Je pense que chaque citoyen devrait le faire. Une fois que l'on a visité un centre, on comprend ce qu'on leur demande. Il est pratiquement impossible d'obtenir la qualité nécessaire. En France, il y a un deuxième tri. Tous les plastiques sont triés ensemble au centre de tri. Une autre installation les classe ensuite dans différentes catégories pour répondre aux différentes demandes des recycleurs, comme l'a mentionné mon collègue.
Ces idées sont en train d'émerger. Nous en discutons avec Circular Materials. Nous nous demandons si le Canada devrait mettre en place un système de tri secondaire. Nous parlons à nouveau de technologies et d'intelligence artificielle. Beaucoup de choses se passent ici. Fait amusant, comme je l'ai mentionné, de nombreuses entreprises canadiennes construisent des centres de tri dans d'autres régions du monde. L'un des plus célèbres se trouve en Grande-Bretagne, à Coventry, et il est construit par une entreprise québécoise qui fabrique des équipements de tri.
Je crois que nous disposons des connaissances nécessaires. Comme nous l'avons mentionné, je pense que nous n'avons besoin que de politiques et d'investissements, mais nous observons beaucoup ce qui se passe ailleurs.
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Je pense que la recherche prouve que dans la majorité des cas, l'empreinte carbone du plastique recyclé est bien meilleure que celle du plastique vierge, ce qui signifie que malgré toutes les étapes, comme nous l'avons mentionné — le transport, le tri, le recyclage, puis la réexpédition —, cela dépend des types de plastique, mais l'empreinte carbone du plastique recyclé est réduite d'environ 75 %.
Là où cela devient intéressant, c'est dans les nouvelles technologies, comme nous l'avons mentionné, telles que les technologies de recyclage chimique, qui vont chercher à décomposer le plastique en monomères. Ces technologies seront très gourmandes en énergie. Dans ce cas, des questions se posent actuellement. Par exemple, s'il y a tant d'énergie, tant de carbone, pour décomposer le plastique, le gain environnemental du recyclage du plastique est‑il en train de se transformer en création de gaz à effet de serre?
Dans la grande majorité des cas de recyclage physique, de recyclage mécanique, il est utile de recycler les déchets avant de les soumettre à tout autre type de processus de valorisation énergétique.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Il s'agit d'un témoignage très intéressant. Je suis issu d'une formation en sciences politiques et non d'une formation scientifique particulière, de sorte que beaucoup de choses sont nouvelles pour moi, mais d'autres ne le sont pas. Lorsque nous parlons de la façon dont nous, en tant que pays, améliorons notre jeu par rapport aux thèmes que vous avez soulevés, il y a quatre domaines particuliers: le changement de politique, le changement d'investissement, les mesures incitatives, et la réduction des risques.
Pour les témoins ici présents et les témoins en ligne, je me demande si nous pourrions simplement analyser la politique en donnant un exemple d'investissement et une estimation de ce que cela représenterait. Pourriez-vous s'il vous plaît nous donner en exemple certaines mesures incitatives, ainsi qu'un exemple de réduction des risques? Je me demande si nous pourrions commencer ici, puis nous pourrons enfin passer au témoin qui est en ligne.
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Je vais essayer de me souvenir de cet ordre. Commençons par le changement de politique.
Je pense qu'un bon exemple de ce qui est actuellement discuté au Canada est le contenu recyclé obligatoire dans certains produits. Nous savons que pour stimuler le système de recyclage, la demande doit être au rendez-vous. Par exemple, si vous obligez les gens, dans certaines industries, à utiliser du contenu recyclé lorsqu'ils le peuvent, et cela doit être fait de la bonne manière et pas partout. En utilisant la bonne manière, alors cela crée des marchés pour les recycleurs, et c'est ce dont ils ont besoin pour attirer des investisseurs. Voilà donc un usage adéquat des politiques.
En ce qui concerne les investissements, je pense que nous avons mentionné plus tôt que le fonds est une excellente idée. Je pense qu'à l'heure actuelle, de nombreux recycleurs, en particulier, ne savent pas vers qui se tourner. Disposer, par exemple, d'un fonds spécifique pour le recyclage du plastique serait une bonne option.
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Oui, je souhaite aborder un autre aspect important: l'élaboration des politiques.
Je sais qu'il existe actuellement aux États-Unis une réglementation selon laquelle il est recommandé de combiner certains des plastiques utilisés avec une certaine proportion de plastiques recyclés, par exemple 60 % de plastiques vierges et 40 % de plastiques recyclés. Il y a une technologie derrière cela, et c'est une exigence pour certains produits. C'est la première chose à faire.
Deuxièmement, je pense que l'éducation du public est très importante. Si nous fabriquons le matériau à partir de plastique recyclé, s'il n'y a pas de marché pour cela, nous n'irons nulle part. Si l'éducation du public montre que... S'il existe un plastique recyclé et que les gens sont intéressés par son achat, toutes les autres pièces du casse-tête suivront. Il est très important de veiller à la sensibilisation de la population.
Troisièmement, même si le gouvernement fait très bien son travail et que les entreprises font très bien le leur, nous ne pourrons aller nulle part si nous n'avons toujours pas effectué un travail adéquat de sensibilisation de la population en matière de séparation du plastique à la source.
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C'est une bonne question.
Nous ne l'avons pas fait en amont, mais plutôt en réponse à ce registre. Plus un gouvernement est informé sur les différents flux de plastiques au Canada, plus il sera en mesure d'élaborer des politiques publiques qui fonctionnent. Alors, un des bons côtés du registre est qu'il permet d'obtenir plus d'information.
Ensuite, il y a la manière dont l'information est recueillie, comme on en parlait plus tôt. Est-ce qu'on demande les bonnes informations? Il y a énormément de plastiques qu'on ne connaît pas dans des trucs durables, par exemple dans les pêches et dans l'automobile. On parle beaucoup des emballages, parce que c'est ce qu'on voit et qu'on a à la maison en tant que citoyens. Alors, un autre des bons côtés du registre est qu'il vise plus que les seuls plastiques qu'on a autour de nous. Par contre, les gens ne savent pas nécessairement combien de plastiques ils ont.
Je ne crois donc pas que ce registre a été demandé par l'industrie. Par contre, il pourra peut-être appuyer la prise de bonnes décisions et l'élaboration de politiques publiques plus alignées sur ce que souhaite l'industrie.
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Je sais que certains d'entre vous ont des vols à ne pas manquer, alors commençons sans plus tarder.
Je ferai quelques commentaires à l'intention des nouveaux témoins. Veuillez attendre que je vous reconnaisse par votre nom avant de prendre la parole. Pour ceux et celles qui participent à la séance par vidéoconférence... En fait, je vais sauter cette étape. C'est M. Longfield, et je pense qu'il sait ce qu'il doit faire. Interprétation pour les participants sur Zoom... Oui, je pense que M. Longfield le sait aussi.
J'ai maintenant le plaisir d'accueillir, d'Oceana Canada, M. Anthony Merante, spécialiste de campagne sur les plastiques, et, de Réseau Environnement, M. Mathieu Laneuville, président-directeur général, ainsi que Mme Céline Vaneeckhaute, chaire de recherche du Canada en récupération des ressources et en ingénierie des bioproduits et professeure agrégée à l'Université Laval.
Vous disposez de cinq minutes pour faire vos déclarations préliminaires, après quoi nous procéderons à une première série de questions.
Je vais commencer par M. Merante. Vous avez la parole pour une déclaration préliminaire de cinq minutes maximum.
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Je vous remercie de m'avoir invité. Je m'appelle Anthony Merante, et je suis un spécialiste de la campagne sur les plastiques chez Oceana Canada. Je vais vous parler du recyclage des plastiques aujourd'hui.
En bref, ma connaissance des plastiques est le fruit de plus de 15 ans d'expérience dans les domaines des sciences de l'environnement et de la politique environnementale, tant à l'échelle nationale qu'infranationale.
Oceana est un organisme scientifique qui se concentre sur la réduction des plastiques à usage unique non essentiels, ainsi que sur la protection de nos océans. Mon intervention portera sur les plastiques à usage unique, leur recyclabilité, et sur la pollution qui en découle.
En 2023, Oceana a publié un rapport historique intitulé « Breaking the Plastic Cycle », ou « Rompre le cycle du plastique », dont une copie électronique et des copies physiques sont disponibles. Ce rapport présente une feuille de route visant à réduire d'un tiers les déchets d'emballages plastiques au Canada grâce à des interventions politiques qui éliminent les produits non recyclables et augmentent la recyclabilité et la réutilisation des produits courants.
En ce qui concerne la pollution plastique, le Canada génère 4,3 millions de tonnes de déchets plastiques par an, dont seulement 8 % sont recyclés mécaniquement. De 2012 à 2019, la quantité de plastique entrant sur le marché canadien a augmenté de 20 % pour atteindre 6,1 millions de tonnes, ce qui a dépassé à la fois la croissance économique et la croissance démographique. En 2019, les articles d'emballage tels que les bouteilles, les conteneurs et les sacs représentaient 37 % de tous les produits en plastique fabriqués pour la consommation canadienne.
Les faits sont clairs. Nous plastifions à outrance nos vies avec des plastiques à usage unique et non durable. Notre système de recyclage est aujourd'hui défaillant et inefficace. La combinaison de la surproduction et de la transition du Canada des systèmes de collecte et de réutilisation vers des systèmes linéaires d'élimination des déchets à usage unique a entraîné une crise nationale de la pollution.
En ce qui concerne les dommages, c'est la durabilité même des plastiques, qui est présentée comme un avantage, qui est à l'origine de leur grande nocivité. Une fois que les plastiques pénètrent dans l'environnement, ils ne disparaissent jamais vraiment. Lentement, les produits en plastique se décomposent en microplastiques qui persistent pendant des centaines d'années. À titre d'exemple, une fourchette en plastique utilisée pendant 5 à 10 minutes pour un repas à emporter peut voir toute la population de la planète se retourner deux fois. Les chances que cette fourchette soit recyclée sont quasi nulles à l'heure actuelle, mais celles qu'elle finit dans l'environnement sont presque garanties. On trouve des plastiques dans tous les coins de la planète, y compris dans la glace de mer de l'Arctique, dans les nuages de pluie et dans notre alimentation. Les plastiques et leurs produits chimiques sont désormais présents dans les principaux organes du corps humain et sont liés à l'infertilité, aux perturbations hormonales et à des maladies telles que le cancer et la maladie d'Alzheimer.
Les emballages plastiques à usage unique représentent plus de la moitié des déchets plastiques annuels, et les plus grandes quantités proviennent de nos épiceries, des bouteilles de boissons, des articles de restauration, des emballages de palettes utilisés pour l'expédition et le transport, ainsi que du secteur du commerce électronique, qui connaît une croissance rapide. Les principales causes de cette production de déchets sont la disparition des systèmes circulaires, consignés et réutilisables, en particulier pour les contenants de boissons non alcoolisées et d'aliments; l'utilisation de polymères plastiques comme le polystyrène et le chlorure de polyvinyle qui ne s'adaptent tout simplement pas à notre infrastructure actuelle et réutilisables comme le verre et le métal par des plastiques souples et bon marché; l'ajout de colorants, d'additifs et de produits chimiques pour modifier l'apparence des plastiques; et l'utilisation de matériaux mixtes sur un seul produit qui sont jetés par les consommateurs dans leur ensemble. Par exemple, les bouteilles de boissons gazeuses sont fabriquées en PET et leurs bouchons en polystyrène. Les rubans peuvent être en polypropylène, en vinyle ou en polyester, et la pellicule rétractable qui les lie est en polyéthylène.
On estime à 7,8 milliards de dollars la valeur des plastiques mis en décharge chaque année. Cette pollution plastique nuit non seulement à notre environnement, mais aussi à nos portefeuilles.
Les solutions sont simples et claires: interdire la fabrication et la vente de produits qui ne peuvent tout simplement pas être recyclés, réutilisés ou rechargés; normaliser la conception des produits pour éliminer la non-recyclabilité et permettre la circularité; et travailler avec les plus grands acteurs par secteur pour développer des systèmes et des produits qui sont vraiment circulaires et qui ne sont pas destinés à la mise en décharge ou à l'incinération. Il convient de noter que 82 % des Canadiens soutiennent ce type de réglementation, quels que soient leurs antécédents électoraux, et que 80 % d'entre eux estiment qu'il incombe au gouvernement fédéral de prendre l'initiative en matière de lutte contre la pollution par les plastiques. Actuellement, plus de 170 pays élaborent des réglementations internationales sur les plastiques. Il s'agit d'une étude de marché de grande envergure.
Enfin, le recyclage avancé, le recyclage chimique, la pyrolyse et la gazéification sont souvent cités comme des solutions pour recycler les déchets non recyclables. Néanmoins, il a été prouvé que ces solutions échouent lorsqu'elles sont appliquées à grande échelle et qu'elles sont très polluantes. Par exemple, le centre de biocarburants Enerkem à Edmonton est inopérant et a connu des échecs depuis son ouverture. Ces nouvelles formes de gestion des déchets sont présentées aux gouvernements, aux décideurs et à la population en général sans données transparentes, et avec des affirmations de succès non fondées.
Les plastiques ont un rôle à jouer dans notre monde, mais pas dans nos océans.
Je suis satisfait de m'arrêter là et de répondre aux questions des membres du Comité. Je vous remercie de votre attention.
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Merci, madame la présidente.
Mesdames et messieurs les députés, c'est un privilège pour moi d'être ici. Je suis Mathieu Laneuville, président-directeur général de Réseau Environnement, la plus importante association de spécialistes en environnement au Québec. D'ailleurs, un représentant d'Éco Entreprises Québec a témoigné devant le Comité un peu plus tôt aujourd'hui et cet organisme est membre de Réseau Environnement. Je suis ingénieur, mais j'ai aussi un certificat en économie circulaire de l'Université de Cambridge.
Aujourd'hui, je suis accompagné de ma collègue Mme Céline Vaneeckhaute, professeure agrégée à l'Université Laval et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en récupération des ressources et en génie des bioproduits.
Comme je le disais, c'est un privilège pour notre association d'être ici pour vous faire part des défis de nos expertes et experts. Notre association regroupe plus de 2 000 membres des secteurs public, privé et universitaire.
Avant de parler de nos recommandations, j'aimerais revenir sur la raison qui nous réunit, soit l'importance d'agir quant à la question du plastique. Je pense que mon collègue M. Merante a beaucoup parlé des conséquences du fait qu'il va y avoir plus de plastique que de poissons dans nos océans d'ici 2050. On sait que les poissons ingèrent des microplastiques et que nous consommons ces poissons. Nous inhalons aussi des particules de plastique. Ça entraîne évidemment des défis sur les plans de l'environnement et de la santé humaine.
Selon nous, il faut se demander si on veut que la mer et les habitants soient étouffés par les déchets plastiques. Est-ce qu'on veut que nos cerveaux soient contaminés? Actuellement, selon la science, 0,5 % de la masse de notre cerveau contient des microplastiques. En ignorant cette pollution, on va transformer la planète en dépotoir. Il faut se demander si on veut attendre que les poissons et les humains soient transformés en dépotoir de plastique avant d'agir.
Dans les années 1980, on a tiré la sonnette d'alarme relativement à la pollution par le carbone issue du pétrole. Nous croyons qu'il est temps aujourd'hui de la tirer de nouveau relativement aux conséquences du pétrole sur la pollution par le plastique. Il en va de notre santé humaine et de notre environnement.
La bonne nouvelle, c'est que des solutions techniques existent. On a juste à appliquer le principe des 3RV-E: réduire, réutiliser, recycler, valoriser et enfouir, en ordre de priorité.
Le premier message de nos membres experts, c'est toujours le fameux phénomène de réduction à la source. Selon nous, la première solution est d'éliminer ou d'interdire les plastiques à usage unique et de favoriser les options réutilisables et le vrac. S'il n'est pas possible de réduire l'utilisation du plastique, nous recommandons de recycler le plastique. Comme M. Merante l'a mentionné, environ 90 % de nos plastiques ne sont pas recyclés actuellement. On a donc un bon bout de chemin à faire.
Je le répète: des solutions existent. Une des solutions est l'étiquetage écologique. Actuellement, pour savoir si un produit est recyclable, il faut regarder le numéro sur son logo: 1, 2, 3, 4, 5 ou 6. Je vous mets au défi de savoir lequel indique que le produit n'est pas recyclable. Soit dit en passant, il s'agit du numéro 6. Cela dit, les citoyens et citoyennes ont de la difficulté à s'y retrouver. Nous suggérons donc tout simplement d'avoir un crochet quand le produit est recyclable et une croix quand il ne l'est pas. Des solutions simples existent sur ce plan.
Nous proposons aussi d'interdire l'étiquetage des plastiques compostables, qu'ils soient biodégradables, biocompostables ou de tout autre terme connexe. Ça contamine nos ballots et la matière, en plus de créer beaucoup de confusion auprès des citoyennes et citoyens.
Une autre solution pour mieux recycler passe par l'information, la sensibilisation et l'éducation. Il faut informer les gens des méthodes de tri. Au Québec, par exemple, Recyc-Québec a développé l'application mobile « Ça va où? ». Au moyen d'un téléphone cellulaire, on peut savoir dans quel bac on doit déposer le produit en question: le bac de compost, le bac de déchets ou le bac de recyclage.
Il faut aussi augmenter la confiance des citoyens et citoyennes envers le système de recyclage en les sensibilisant. Actuellement, il y a beaucoup de désistement de citoyens et citoyennes, parce qu'ils sont découragés de voir les résultats. Il faut aussi éduquer les jeunes pendant leur parcours scolaire.
Une des pierres d'assise de nos recommandations est l'écofiscalité. Nos prédécesseurs en ont parlé et nous allons y revenir plus tard. La résine vierge qui vient de l'international ne devrait plus être plus abordable que la résine recyclée sur notre marché national. Il en va de notre économie, de notre santé et de notre environnement. Il faut donc des bonus pour les contenants faits de plastiques recyclés et des malus pour les contenants faits de plastiques vierges.
Parmi les autres options pour mieux recycler, on parle de réglementation. La Californie oblige un minimum de contenu recyclé dans tous les emballages. Il s'agit de quelque chose dont le Canada pourrait s'inspirer. Il faut aussi améliorer la qualité de nos infrastructures, notamment les centres de tri, pour finir avec une meilleure qualité de plastique et pour que ce soit plus rentable d'utiliser nos plastiques recyclés.
Une autre question très importante pour nos membres est celle de l'écoconception. Il s'agit probablement de la pierre angulaire permettant de bien faire les choses. Il faut utiliser la science. Je pense que tout le monde autour de la table aujourd'hui compte beaucoup sur la recherche. Utilisons la science pour trouver le meilleur emballage pour chaque catégorie de produits. Ensuite, réglementons les emballages en fonction de l'usage et de ce que les experts ont trouvé lors des analyses du cycle de vie, de la production jusqu'à l'utilisation chez les consommateurs. Selon nous, l'exemplarité de l'État doit faire son chemin. Par exemple, quand obligera-t-on Parcs Canada à avoir des tables, des chaises et du mobilier faits à partir de plastique recyclé? Ça encouragerait l'économie nationale et l'économie circulaire, en plus de créer plus de débouchés pour nos plastiques recyclés.
Évidemment, si on ne peut pas réduire, réutiliser et recycler, on peut toujours valoriser, qu'il s'agisse de plastiques orphelins ou de plastiques non recyclables, et ce, avec des technologies chimiques. D'ailleurs, ma collègue Céline Vaneeckhaute est une spécialiste du domaine.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
En fait, j'aimerais revenir à la raison pour laquelle les témoins sont ici aujourd'hui.
Tout d'abord, je vous remercie de votre présence et de votre présence en personne.
Je vous remercie de m'avoir fourni ce document. Je l'avais en fait en anglais; merci de me l'avoir fourni en français.
[Français]
Je vous remercie beaucoup tous les trois pour tout le travail que vous faites.
[Traduction]
Je comprends très bien que l'environnement et la santé humaine sont en jeu.
[Français]
En ce qui concerne les représentants du Réseau Environnement, je sais que vous n'avez pas eu le temps de finir votre présentation. Je vous invite donc à le faire.
Je pense que le reste de vos recommandations se trouve probablement dans nos documents. Cependant, j'aimerais bien les entendre afin que les analystes puissent faire leur travail.
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Il nous restait deux points. Grosso modo, nous aimerions qu'il y ait plus de recherche, de développement et d'innovation. Entre autres, vous en avez parlé, nous voudrions plus de recherche sur l'impact des plastiques, dont les nanoplastiques et les microplastiques, sur l'environnement et sur la santé humaine. Ces derniers points font partie des recommandations de nos membres. De plus, en ce qui concerne le traitement des eaux usées municipales au Canada, nous voudrions limiter davantage les nanoparticules, les plastiques et les autres contaminants, notamment les textiles qui se détachent lors de la lessive, pour qu'ils ne se ramassent pas dans nos cours d'eau.
Nous avons d'autres recommandations en matière d'écofiscalité. Il y a une approche vivement recommandée par nos membres — je sais que, précédemment, on parlait d'autres pays —, et c'est celle de la Norvège. Celle-ci se démarque beaucoup par son approche pour augmenter le taux de recyclage des produits en plastique qui sont mis en marché. Ça fait plusieurs années qu'elle applique une taxe d'accise sur les emballages et contenants en plastique, de laquelle les producteurs peuvent être exemptés s'ils démontrent que leurs produits sont bien équipés et recyclés à plus de 85 %. La taxe peut être dégressive selon les résultats atteints. Cependant, le certificat de recyclage est émis par les OGD, ou organismes de gestion désignés, qui ont déjà accès aux résultats de la responsabilité élargie des producteurs, ou REP. Ce système inverse donc la dynamique, puisque ce sont les producteurs qui cherchent à se conformer aux filières de recyclage pour obtenir leur certificat. Cette approche favorise l'uniformité des emballages et des contenants ainsi que l'écoconception. D'ailleurs, l'écoconception est ce qu'on souhaite le plus voir se développer.
Au sujet des autres mesures d'écofiscalité, de nombreuses municipalités canadiennes ont une tarification incitative sur les déchets, une mesure fréquente en Europe. Par exemple, quand les citoyens et les citoyennes, les industries, les commerces et les institutions déposent leurs déchets, ils paient en fonction du principe de l'utilisateur ou du pollueur-payeur. Ça va donc inciter les gens à faire beaucoup plus de recyclage et de compostage. À Montréal, la municipalité de Beaconsfield, entre autres, suit ce modèle. On voit des résultats probants avec des réductions de près de 30 % de ce qui va aux sites d'enfouissement. Ce sont des choses basées sur la science qui se font bien.
En dernier lieu, au sujet de l'écoconception, nous avions dit qu'il fallait définir la science permettant de trouver le meilleur emballage pour chaque catégorie de produit. Nos membres nous recommandent entre autres de maintenir à jour une feuille de route comprenant des protocoles clairs d'écoconception pour accompagner nos fournisseurs et nos entreprises. On le sait, changer d'équipements de production exige énormément d'investissements financiers, d'expertise et de main-d'œuvre. Avec ça, nous serons en mesure de connaître les coûts de conception et d'obtenir des résultats durables qui seront favorables à l'économie, à l'environnement et à la santé humaine. Par exemple, on pourrait avoir de plus en plus de monocouches au lieu des multicouches qui viennent souvent d'ailleurs. On pourrait avoir davantage de verre. Je sais que, plus tôt, on parlait de recycler le plastique, mais le verre peut souvent être recyclé jusqu'à 80 %, contrairement au plastique qui est plutôt limité à environ 30 %. De plus, on sait que les particules de plastique des pots de ketchup ou de mayonnaise que l'on conserve longtemps se défont après un certain temps et se retrouvent dans la nature et dans notre corps. La meilleure façon de faire serait, pour chaque bien, de produire le contenant approprié ou l'emballage approprié et que ce soit fait selon une base scientifique accompagnée d'une analyse de cycle de vie.
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Je vous remercie de nous avoir fait part de toutes ces recommandations. J'espère que les analystes les ont notées.
[Traduction]
Monsieur Merante, je viens de Halifax, dans la province de Nouvelle-Écosse. Sur nos plaques d'immatriculation, on peut y lire: « Canada's Ocean Playground », le terrain de jeu océanique du Canada. Nous avons plus de 13 000 kilomètres de côtes, car nous donnons sur l'océan Atlantique.
Lorsque vous avez parlé de la crise nationale de la pollution et de ses effets sur notre environnement, nos océans et, bien entendu, sur nos corps, nous devons prendre cela au sérieux. Je veux juste vous donner l'occasion de nous dire ce que nous faisons de bien, afin que nous puissions réellement... Il est évident qu'il y a beaucoup de choses que nous devons faire, mais de votre point de vue, y a‑t‑il d'autres recommandations?
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Je pense que le gouvernement a commencé à prendre des mesures pour lutter contre la pollution plastique en inscrivant les articles manufacturés en plastique sur la liste de la LCPE. N'oublions pas que la LCPE n'est pas seulement destinée à la protection proactive de l'environnement, mais aussi à la santé humaine.
En raison de l'omniprésence des microplastiques, il est impossible de savoir d'où vient le plastique. On ne sait pas s'il provient d'un pneu ou d'une voiture. La famille de ma mère est originaire d'Halifax. J'ai vu de nombreux chariots d'épicerie jetés dans l'océan. Beaucoup de gens n'imaginent pas ce qui finit dans l'eau. Cela affecte l'écotourisme. Cela affecte notre qualité de vie.
En ce qui concerne ce que nous pourrions améliorer, des mesures telles que l'interdiction du plastique ciblaient les produits, et nous avons vu de nombreux acteurs de l'industrie prendre cette mesure en toute bonne foi. Ils sont passés à des produits réutilisables et à des produits plus durables, mais beaucoup ont essayé de trouver une échappatoire. Nous avons besoin d'une réitération de l'interdiction qui soit sectorielle et qui travaille main dans la main avec les plus grands acteurs de ce secteur. Je vous donne l'exemple du secteur des boissons. Plutôt que d'interdire les boissons gazeuses, les jus de fruits, etc., on pourrait travailler en collaboration avec les trois plus grands acteurs, soit Coca-Cola, Pepsi, et Keurig Dr Pepper, et leur demander de réduire collectivement la quantité totale de plastique qu'ils utilisent.
Bref, je préconise une approche sectorielle.
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Merci de votre réponse. Vous parlez d'exemples, mais moi, je veux qu'on aille dans les sujets précis et concrets.
Vous avez parlé d'écofiscalité. Au Bloc québécois, nous avons déjà fait la promotion de la finance verte à plusieurs reprises. C'est simple; il s'agit d'offrir des incitatifs aux entreprises afin qu'elles arrêtent d'investir dans les hydrocarbures. On sait que le nerf de la guerre, c'est l'argent. Quand on suit l'argent, on voit que des centaines de milliards de dollars ont été investis dans les hydrocarbures ces dernières années par les grandes banques canadiennes.
On ne parle pas de réinventer la roue, ici. Je donne l'exemple de la Norvège. En 2019, elle avait déjà annoncé son intention de se retirer définitivement des énergies fossiles par l'entremise de son fonds souverain. Des études ont conclu également que, si ce fonds s'était départi de ses actifs fossiles plusieurs années auparavant, ça aurait non seulement eu des effets importants sur l'atteinte des objectifs de l'Accord de Paris, mais ça aurait aussi été rentable.
J'aimerais que vous nous parliez davantage de l'économie verte, mais surtout de l'écofiscalité et des avantages que ça pourrait comporter si le gouvernement fédéral décidait réellement d'aller de l'avant.
Vous avez parlé de l'exemplarité de l'État. J'aimerais revenir là-dessus, parce que c'est important. Les gens nous regardent et nous écoutent, mais ils s'intéressent aussi aux gestes posés et aux résultats. Comme on le sait, le gouvernement du Canada n'a jamais réussi à atteindre les objectifs qu'il s'était fixés en matière de réduction des gaz à effet de serre. C'est relié. On veut bien interdire le plastique à usage unique, réduire la dépendance au plastique ou réduire les produits qui ne sont pas recyclables.
Or, le gouvernement actuel a posé un geste concret, soit l'achat d'un pipeline. Grâce à cette dépense de 34 milliards de dollars, la production quotidienne de barils de pétrole va passer de 300 000 à 890 000 barils. Il s'agit d'une augmentation de 200 %. Selon l'Agence d'évaluation d'impact du Canada, ça va entraîner une augmentation des gaz à effet de serre, qui vont passer de 21 millions à 26 millions de tonnes par année. Comme vous le savez, le gouvernement se dit vert. Pourtant, personnellement, je n'ai jamais rencontré un végétarien qui soit propriétaire d'une boucherie, mais peut-être va-t-on me dire le contraire aujourd'hui.
On augmente la production de gaz à effet de serre et, en parallèle, on veut lutter contre les changements climatiques en ayant de bonnes intentions en ce qui a trait au recyclage du plastique. S'agit-il d'un geste exemplaire basé sur des données scientifiques?
Je remercie tous les témoins qui sont ici aujourd'hui.
Je commencerai par M. Merante, spécialiste de campagne sur les plastiques chez Oceana.
Vous avez commenté les grandes difficultés avec lesquelles nous devons tous compter au Canada. Le gouvernement fédéral est responsable de certains aspects, alors que d'autres aspects sont pris en charge par les provinces et les territoires. Cette situation occasionne de nombreux chevauchements. Dans un grand projet comme celui‑ci, qui consiste à se débarrasser des plastiques dans l'environnement, tout le monde doit tirer dans la même direction, comme on dit, et travailler ensemble. Il faut qu'il y ait une coopération.
Chaque province dispose de sa propre réglementation en la matière. Je suis originaire de la Colombie-Britannique, où, par exemple, chaque contenant de boisson de toute sorte... Si vous achetez quelque chose de prêt à boire, qu'il s'agisse de quatre gallons ou de 10 millilitres, vous devez payer une taxe de recyclage. Vous recevez de l'argent lorsque vous le rapportez. Naturellement, tous ces produits sont pratiquement recyclés en Colombie-Britannique. Je sais que c'est différent dans d'autres provinces. Je me souviens que mes enfants ramassaient des tonnes de boîtes de conserve et autres sur les plages de Terre-Neuve et qu'ils étaient déçus du peu qu'ils obtenaient.
Pouvez-vous nous parler de ce système dans son ensemble et du type de coopération qui existe? Y a‑t‑il aujourd'hui un réel effort pour aller dans la même direction?
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Vous avez raison. Il s'agit d'une sorte de méli-mélo multijuridictionnel. Je pense que cela a également été illustré par les matériaux circulaires plus tôt aujourd'hui.
Je dirai cependant qu'il y a de bons exemples où les provinces sont en tête. En revanche, leurs voisines sont à la traîne. L'Alberta réglemente la conception standard des emballages de boissons. C'est pourquoi les taux de recyclage et de récupération y sont très bons. Elle ajoute également des frais de manutention ou de dépôt. La Saskatchewan est également très performante dans ce domaine. Le Manitoba ne l'a pas. L'Ontario vient de le rejeter. Les taux de recyclage y sont terribles. Au Québec, vous pouvez vous rendre dans n'importe quel dépôt de retour, quel que soit le matériau, alcoolisé ou non, et vous pouvez le rapporter.
Cette notion d'écoconception existe, mais elle n'est pas nationale. Vous avez entendu les demandes de l'industrie, du Pacte canadien sur les plastiques et des recycleurs nationaux en faveur d'un plan unifié ou harmonisé. C'est l'obstacle dans un grand pays, géographiquement parlant. Dans de nombreux cas, si l'on veut avoir des systèmes de recyclage et de collecte coopératifs, il peut être plus facile pour l'Ontario et le Québec de partager leurs ressources avec le Maine, l'État de New York ou la Pennsylvanie, plutôt que de les garder entièrement au Canada et de les expédier jusqu'en Colombie-Britannique ou en Saskatchewan. Nous devons en tenir compte. Un traité international sur les plastiques peut y contribuer. L’ACEUM peut y contribuer, mais nous devons savoir ce qu'il y a sur notre marché.
Si nous voulons un contenu recyclé, nous devons récupérer nos propres matériaux et les intégrer, mais nous devons le faire d'une manière saine et sûre. Nous constatons que les produits chimiques du plastique utilisé quotidiennement dans un grand nombre de ces matériaux entravent leur recyclabilité. L'écoconception ne concerne pas seulement le matériau. Elle concerne ce qui est inconnu dans le produit à l'heure actuelle: les colorants, les additifs et les bisphénols. De nombreux matériaux plastiques à usage unique contiennent des substances perfluoroalkyliques et polyfluoroalkyliques, ou SPFA. On parle de bisphénols et de substances perturbatrices du système endocrinien. Ces substances ne se trouvent pas uniquement dans les pailles en plastique à usage unique. On en trouve aussi dans les fourchettes, les récipients à emporter et les suremballages. Nous devrions être plus transparents et plus honnêtes avec les consommateurs sur ce avec quoi ils interagissent, en particulier les matériaux hautement prioritaires avec lesquels ils interagissent: les vêtements, les emballages alimentaires, les jouets pour bébés et les aliments pour bébés, très précisément.
Il faut plus de transparence. Il ne s'agit pas d'une harmonisation sur le plan national, mais d'un jeu juridictionnel. Je pense que la coopération serait encouragée.
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Merci, madame la présidente.
Merci, chers témoins, d'être ici. Je n'ai pas eu l'occasion de remercier tous les témoins qui étaient ici au cours de la dernière heure, mais je tiens à mentionner une chose, à savoir qu'une grande partie de la conversation que nous avons eue durant la première heure sera réitérée et renforcée dans les conversations que nous aurons au cours de cette heure, et j'en suis ravi.
Au cours de la dernière heure, nous avons notamment parlé un peu de l'éducation publique. Vous avez tous parlé de l'éducation publique, et pour moi, c'est probablement la politique numéro un sur laquelle j'aimerais entendre ce que les gens ont à dire. C'est ce qu'il faut commencer à faire, parce que nous ne le faisons pas. Je pense qu'aujourd'hui, les gens ne paient pas attention à ce qu'on leur a appris à l'école sur le recyclage. Ils ne le font pas. Je vois des adultes ici à la Chambre des communes et... Certes, ce n'est pas du plastique, mais le fait est que je vois des gens jeter leurs mégots de cigarettes — ils ne font que les jeter par terre. Ne comprennent-ils pas qu'un mégot de cigarette est en fait un déchet qui n'est pas rapidement biodégradable et qui détruit...? C'est pourtant ce qu'ils font.
Il en va de même avec les bouteilles. On voit des gens qui conduisent et qui les jettent par terre. Les gens les ramassent le long des autoroutes pour recueillir des fonds. Ce sont des choses formidables qui devraient être faites, et nous ne les faisons pas. Nous devons éduquer les Canadiens. Les Canadiens regardent cette émission. J'espère qu'ils prêtent attention et entendent comment nous devons commencer à faire cela. C'est quelque chose qu'il faut faire.
De votre point de vue, je me demande ce que l'industrie peut faire pour essayer de contribuer à cette éducation.
Cette question s'adresse à vous deux, mais je commencerai avec M. Merante, s'il vous plaît.
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Je suis d'accord avec vous pour dire qu'il est très courant de voir des gens laisser des produits en plastique partout. Cela arrive tout le temps. Nous marchons sur une plage, et il y a des déchets partout.
Je pense toutefois qu'en tant qu'élus, vous devriez rencontrer votre population là où elle se trouve. Jeter le blâme sur le consommateur n'est pas la bonne approche à adopter. Il y a une part de responsabilité, j'en conviens parfaitement, mais ce n'est pas la grande majorité.
Je pense qu'il serait très difficile pour la plupart des Canadiens de se promener dans une allée à l'épicerie sans trouver des emballages qui prêtent à confusion et qui ne sont qu'en plastique. Lorsque j'étais enfant, je pouvais acheter de la nourriture pour bébés en verre et en métal. L'endroit où je les jetais n'avait pas d'importance. Ils étaient recyclés. Beaucoup de choses n'étaient pas emballées. Je dois maintenant déterminer si mon plastique souple — parce qu'on m'a appris que le plastique se recycle — est recyclable, et dans ma province, il ne l'est pas. On le brûlera ou il ira dans un site d'enfouissement.
Nous devons nous rencontrer à mi‑chemin. Les produits qui prêtent à confusion, qui sont néfastes pour la santé, qui sont à usage unique ou qui ne sont tout simplement pas durables ou viables finiront à la poubelle.
C'est là où la réglementation devrait entrer en jeu. Vous devriez présenter aux gens des produits durables et de qualité. Ainsi, une fois que ces produits de qualité sont sur le marché... car on ne peut pas nier qu'un produit comme des baies — à moins qu'elles soient très fraîches et que vous les receviez dans un joli petit sachet en plastique ou en papier — doit être emballé dans du polyéthylène téréphtalate, ou PET, pour être transporté sur de longues distances depuis la Californie pendant l'hiver. On l'exige, mais on a besoin d'étiquettes qui sont...
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Merci, madame la présidente.
Merci aux témoins.
J'ai beaucoup aimé la direction que M. Kitchen a prise concernant ce sur quoi nous pouvons travailler du côté fédéral.
Je siège également au Comité de l'environnement, et nous avons réalisé des études sur la LCPE. J'ai été ravi que M. Merante mentionne la LCPE cet après-midi.
En ce qui concerne la science des plastiques et du recyclage, j'aimerais commencer avec Mme Vaneeckhaute et parler de la façon dont les structures de plastiques pourraient s'adapter au recyclage si nous faisions les bonnes recherches.
L'Université de Guelph a le Bioproducts Discovery and Development Centre, où les chercheurs travaillent sur les bioplastiques, mais ils utilisent des oléagineux comme le soya ou le canola comme base. Ils utilisent également les nanoparticules de carbone dans le noir de carbone qui n'est pas utilisé, un carbone naturel qui ne provient pas du pétrole. Il en résulte un produit plus léger, plus résistant et moins coûteux, qui présente donc ces trois avantages. Certains fabricants de pièces automobiles l'intègrent désormais dans leurs produits, comme la société Ford, par exemple.
Pourriez-vous parler des nouvelles découvertes scientifiques que le gouvernement fédéral pourrait financer par l'entremise de votre chaire de recherche ou d'autres recherches que vous connaissez et que nous pourrions soutenir?
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Je vous remercie de la question.
Ce qui serait très important et intéressant pour l'avenir, c'est d'étudier, par exemple, la production de plastique à partir d'autres sources de déchets. Par exemple, nous avons beaucoup de déchets alimentaires et de boues d'épuration que nous voulons également valoriser maintenant; nous devons valoriser les déchets organiques par l'entremise, par exemple, de processus tels que la digestion anaérobie. Dans le cadre de ces processus, nous pouvons produire du méthane, mais nous pouvons également arrêter le processus plus tôt et produire de l'hydrogène avec des acides gras volatils, qui peuvent ensuite être utilisés pour la fermentation par des bactéries qui peuvent produire des bioplastiques. Par exemple, le PHA peut être produit avec cette méthode.
De cette manière, nous pouvons produire des plastiques d'origine biologique, sans entrer en concurrence avec la production alimentaire, etc.