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Bienvenue à la 49
e réunion du Comité permanent de la science et de la recherche.
La réunion d'aujourd'hui se déroule en format hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 23 juin 2022. Certains membres y participent en personne dans la salle, alors que d'autres y assistent à distance au moyen de l'application Zoom. Un de nos témoins comparaît également par Zoom aujourd'hui.
J'ai quelques observations à formuler sur Zoom. Pour choisir votre mode d'interprétation, vous avez le choix, au bas de votre écran, entre le parquet, l'anglais et le français. Gardez votre micro en sourdine à moins que vous n'ayez la parole. Quand vous parlez, adressez-vous à la présidence. Cette consigne s'applique à tout le monde.
Conformément à l'article 108(3)i) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mardi 14 février 2023, le Comité entame son étude des programmes des bourses d'études supérieures et postdoctorales du gouvernement du Canada.
J'ai maintenant le plaisir d'accueillir nos témoins d'aujourd'hui. Je vous remercie de témoigner et de vous être préparés à la rencontre d'aujourd'hui.
Tout d'abord, nous recevons Colin Colterjohn, candidat au doctorat de l'Université McMaster, qui est dans la salle. Nous accueillons également Marc Johnson, président du conseil d'administration de Soutenez notre science, qui témoigne depuis Winnipeg.
Chacun d'entre vous disposera de cinq minutes pour faire une allocution, après quoi nous vous poserons des séries de questions. Je commencerai à vous faire signe quand le temps sera écoulé.
Nous entendrons d'abord Colin Colterjohn, de l'Université McMaster.
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Je vous remercie beaucoup, monsieur le président et honorables membres du Comité permanent de la science et de la recherche, de m'avoir invité à témoigner de mon expérience à titre d'étudiant des cycles supérieurs au Canada.
J'ai pensé qu'il valait mieux commencer en parlant de la manière dont l'Université McMaster reconnaît et admet qu'elle se trouve sur les territoires traditionnels des nations des Mississauga et des Haudenosaunee, et sur les terres protégées par l'entente de la ceinture wampum qui fait référence au concept du plat à une cuillère.
Je voudrais ensuite commencer en donnant un aperçu de ma personne et de l'objet de mes recherches. Natif de Hamilton, j'étudie actuellement au doctorat à l'Université McMaster dans le domaine du génie physique, avec spécialisation en énergie nucléaire. Je m'intéresse particulièrement à la modélisation de l'introduction de petits réacteurs nucléaires parmi les sources d'énergie de l'Ontario. Si vous avez des questions à ce sujet, faites‑le‑moi savoir. Je crois avoir tant parlé de l'énergie nucléaire à la maison que j'ai épuisé la patience de ma partenaire. Je pense qu'il est préférable que je dise tout ce que j'ai à dire sur le sujet pendant que je suis ici.
Avec le soutien de mon excellent superviseur, de l'Université McMaster, de Mitacs et d'autres groupes de financement de la recherche, j'ai eu la chance de collaborer avec des professeurs internationaux et de poursuivre mes recherches à l'étranger, passant notamment neuf semaines au Japon l'été dernier dans le cadre du prix Mitacs-JSPS Globalink.
Cependant, même si des occasions extraordinaires comme celle‑ci peuvent s'offrir aux étudiants, j'ai constaté que le financement des cycles supérieurs dans son ensemble est un domaine qui mérite d'être réformé au Canada si nous voulons vraiment ancrer l'innovation à l'échelle nationale et appuyer une nouvelle génération d'experts de pointe de l'industrie.
Pendant presque toute ma carrière au premier cycle, je savais que les études supérieures étaient une voie que je voulais suivre. Cela étant dit, j'ai tout de même passé la majeure partie de mon temps à chercher à faire des études supérieures aux États‑Unis plutôt qu'au Canada, en grande partie en raison des immenses possibilités de financement offertes aux chercheurs et aux athlètes universitaires chez nos voisins du Sud. Au bout du compte, cependant, la possibilité de travailler avec un professeur en particulier à Mac a éveillé mon intérêt pour des études au pays. Bien qu'aujourd'hui, je sois satisfait de la décision que j'ai prise, cela ne s'est pas fait sans difficulté.
Par exemple, j'ai récemment acheté une maison très modeste à Hamilton. Je suis le seul parmi mes pairs qui a pu le faire, et je n'aurais pas pu le faire sans que ma fiancée partage le fardeau financier. Elle est infirmière autorisée et a récemment réintégré le milieu universitaire pour obtenir sa maîtrise d'infirmière praticienne. Malheureusement, le marché immobilier étant ce qu'il est actuellement, ma fiancée n'a pas pu commencer sa carrière d'études supérieures avant que nous ayons réussi à obtenir une maison ensemble, car les assureurs hypothécaires canadiens ne considèrent pas mes bourses d'études supérieures et de recherche comme un revenu constant, même lorsque c'est stipulé comme tel par mon université émettrice.
Ensemble, avec l'aide de nos bourses d'études supérieures respectives et du financement collectif, ainsi que toutes les mesures de soutien admissibles du Régime d'aide financière aux étudiantes et étudiants de l'Ontario, nous ne serions toujours pas en mesure d'effectuer nos paiements hypothécaires actuels sans les emplois à temps partiel que nous occupons en plus de nos études à temps plein. Ma fiancée continue de faire des quarts de travail de 12 heures comme infirmière autorisée et je travaille comme gestionnaire de bar à temps partiel à Hamilton afin de payer l'hypothèque que nous ne pourrions pas nous permettre autrement. Malgré cela, notre situation financière, bien que viable, est loin d'être confortable. Je pense que mon cas reste une situation idéale pour de nombreux étudiants des cycles supérieurs qui cherchent à être propriétaires de leur maison aujourd'hui.
Bien qu'il puisse sembler évident qu'il serait préférable d'attendre d'avoir terminé ses études respectives avant d'acheter une maison, cette option devient rapidement de moins en moins réaliste. Le prix du logement continue de monter en flèche pour mes amis qui n'ont pas encore acheté de maison, et le prix des loyers est à peine plus facile à assumer.
En résumé, bien que j'apprécie sincèrement le soutien que j'ai reçu de mon université et de tous les organismes de financement gouvernementaux jusqu'à maintenant, je crois que ce soutien devient rapidement insuffisant pour les étudiants qui arrivent. Aujourd'hui, les diplômés canadiens semblent avoir à choisir entre poursuivre des études supérieures ou avoir les moyens de mener une vie adulte. J'estime que cette dichotomie ne fait rien de moins que nuire à l'avancement de la recherche et de l'innovation que dirige le Canada. Je ne crois pas que nous puissions maintenir nos programmes d'études supérieures si nous demandons aux jeunes de mettre leur vie en suspens pour nous suivre.
Je remercie encore une fois le président et les membres du Comité de m'accorder du temps. J'espère que mon témoignage contribuera à renforcer l'engagement du Canada à l'égard de la recherche de deuxième cycle.
Monsieur le président, honorables membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant vous aujourd'hui. Je vous parle depuis Winnipeg, au Canada, qui se trouve sur le territoire visé par le Traité no 1, où habitent aujourd'hui de nombreuses Premières Nations et qui est la terre traditionnelle de la nation métisse.
À titre d'information, je suis professeur de biologie à l'Université de Toronto à Mississauga et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en sciences de l'environnement urbain. Aujourd'hui, toutefois, je m'adresse à vous à titre de président du conseil d'administration de Soutenez notre science, ou SNS.
SNS préconise une rémunération plus élevée pour les quelque 300 000 étudiants des cycles supérieurs et postdoctoraux qui travaillent d'un bout à l'autre du Canada. Je m'adresse à vous aujourd'hui parce que la stagnation du financement et le soutien financier inadéquat du gouvernement fédéral pour les étudiants des cycles supérieurs et postdoctoraux constituent l'enjeu le plus important qui se présente aujourd'hui sur le plan de la recherche et de l'innovation au Canada aujourd'hui.
Je ne vais pas répéter les demandes de Soutenez notre science à l'égard du gouvernement. Si vous voulez les voir, elles ont été présentées par Sarah Laframboise, notre directrice générale, lors de son témoignage du 9 mai. Je serai heureux de les mettre en contexte si vous avez des questions à leur sujet.
Le financement est une question importante, car la recherche universitaire au Canada est le moteur de la découverte et de l'innovation de notre pays, lesquelles stimulent notre économie. Les gens qui effectuent ce travail sont en grande partie des étudiants des cycles supérieurs et des boursiers postdoctoraux. Il est important de mettre les choses en contexte, car l'expression « étudiants des cycles supérieurs » est un peu inappropriée. Ce ne sont pas vraiment des étudiants au sens traditionnel du terme. Ce sont des chercheurs. Leur principale tâche consiste à faire de la recherche. Les chercheurs postdoctoraux ont déjà obtenu un doctorat. Ils comptent déjà parmi les personnes les mieux formées et les plus qualifiées au pays. Nous avons besoin de ces gens pour que le Canada réussisse, et nous les forçons à vivre dans la pauvreté en les payant moins que le salaire minimum. D'autres témoins vous en parleront aujourd'hui.
Permettez-moi de vous présenter les choses d'un point de vue personnel. En 2003, j'en étais à ma deuxième année de doctorat. Cette année‑là, le Parti conservateur du Canada, alors au pouvoir, a eu la vision audacieuse de former une génération de personnes hautement qualifiées qui seraient le moteur de notre économie axée sur l'innovation. Il a ainsi créé le programme de bourses d'études supérieures du Canada pour les étudiants à la maîtrise et au doctorat. Il a également augmenté la valeur des bourses d'études supérieures et des bourses postdoctorales.
L'année suivante, en 2004, j'ai été parmi les tout premiers étudiants au doctorat à recevoir une bourse d'études supérieures du Canada, qui était de 35 000 $ par année. Cet argent, cet investissement, a changé la donne pour moi. Avec cet argent, j'ai payé mes frais de scolarité, ma nourriture et mon loyer. L'investissement m'a permis de me concentrer sur la recherche. Grâce à cette attention accrue, j'ai pu faire de grandes découvertes sur la façon dont les plantes se défendent contre les insectes nuisibles. Ce travail a eu des applications en agriculture, en horticulture et en conservation. Ce travail m'a valu la médaille d'or du Gouverneur général et plusieurs autres prix.
Cette réussite m'a permis d'obtenir une bourse de recherche postdoctorale du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, que j'ai utilisée à l'Université Duke pour apprendre des techniques de pointe en biologie moléculaire et en génomique. Fort de ces nouvelles connaissances et de ces compétences, j'ai ensuite lancé mon propre laboratoire à titre de professeur, poursuivant mes activités à l'Université de Toronto, à Mississauga, où je forme la prochaine génération de scientifiques, d'étudiants à la maîtrise et au doctorat et de chercheurs postdoctoraux, qui font leurs propres découvertes et font des contributions à notre pays et à notre économie.
Mais voilà où se trouve le problème. Vingt ans se sont écoulés depuis que j'ai fait mon doctorat, et le soutien fédéral pour les chercheurs de deuxième et troisième cycles et les chercheurs postdoctoraux que j'ai accueillis n'a pas changé d'un iota. Imaginez si vous n'aviez pas reçu d'augmentation depuis 20 ans. Je pense que la plupart d'entre vous auraient déjà quitté votre profession. C'est exactement ce qui se passe. Le système de recherche canadien est en crise. Les esprits les plus brillants du Canada quittent le pays en grand nombre.
En 2019, l'étude TRaCE McGill a révélé que 38 % des titulaires de doctorat fraîchement diplômés au Canada partent dans d'autres pays où ils sont mieux rémunérés, principalement en Europe et aux États-Unis. Nous perdons ainsi chaque année près de 3 700 titulaires de doctorat dans lesquels nous venons d'investir. Cet investissement visait à stimuler l'innovation et l'économie. Lorsque ces personnes quittent le pays, c'est un investissement perdu. J'ai estimé que cela représente une perte de 740 millions de dollars par année.
Cette étude a été réalisée en 2019. Le problème est encore pire aujourd'hui. Essentiellement, le Canada est devenu le chef de file mondial de la formation des gens qui quittent le pays. Voilà pourquoi un soutien fédéral accru pour les étudiants des cycles supérieurs et les étudiants postdoctoraux constitue l'enjeu le plus important au Canada aujourd'hui.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à nos témoins de comparaître aujourd'hui.
Monsieur Johnson, vous avez dit qu'il n'y avait eu aucune augmentation, mais nous savons que ce n'est pas entièrement vrai. Si l'on tient compte de l'inflation — qui n'a jamais été aussi élevée en 30 ans —, c'est pire qu'une augmentation de 0 %. C'est une diminution, parce qu'on en a maintenant moins pour notre argent.
Avez-vous entendu parler d'autres étudiants contraints de recourir aux banques alimentaires ou de changer de mode de vie pour arriver à joindre les deux bouts avec la même somme que vous receviez il y a 20 ans?
Je vais maintenant m'adresser à notre autre témoin.
Monsieur Colterjohn, merci beaucoup de comparaître en personne. Je crois savoir que vous faites de la recherche sur les combustibles. Il semble que vous ayez choisi McMaster parce qu'un professeur avait un lien avec vous ou une incidence sur vous.
En général, cependant, quel rôle le gouvernement fédéral doit‑il jouer pour encourager plus de gens à étudier en sciences et, surtout, en science nucléaire?
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Merci, monsieur le président.
Je suis heureux de vous voir parmi nous, et je remercie les deux témoins de leurs témoignages.
Je vais d'abord m'adresser à M. Colterjohn.
Monsieur Colterjohn, j'ai pu consulter votre profil et j'ai vu que vous étiez un joueur de waterpolo. Vous devez sans doute jongler avec les exigences académiques et sportives. J'ai déjà été secrétaire parlementaire pour les sports, et je connais donc un peu les systèmes de bourses sportives.
Pouvez-vous nous parler de l'apport des programmes de bourses à votre capacité de maintenir un équilibre en raison des bourses que vous aviez? Avez-vous reçu des bourses combinées pour le sport et pour l'université? Parlez-nous un peu de ce système.
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Oui, je pense qu'il est juste d'avoir un certain degré de financement pour chaque sport en fonction de sa popularité, car il y a également, au bout du compte, des répercussions sur la quantité d'argent versé dans l'ensemble du système. C'est ainsi que les gouvernements accordent le financement, par exemple lorsque j'utilise des programmes comme Quest for Gold du gouvernement de l'Ontario.
En même temps, je crois que le financement, dans l'ensemble, à partir de la base, doit être revu dans une certaine mesure parce qu'il semble actuellement cesser lorsqu'on tient compte de ce que le gouvernement accorde et de ce que les écoles reçoivent. Une fois de plus, je ne peux me fier qu'à mon expérience ici en tant qu'étudiant de premier cycle et ensuite de cycle supérieur. Nous sommes passés de petites subventions au départ sous forme de bourses à une situation où nous devons payer depuis six ou sept ans pour jouer à un niveau de compétition élevé. Notre sport nous tient vraiment à cœur, mais c'est malheureusement, dans les faits, une chose que la plupart des étudiants ne peuvent pas se permettre. Notre association des anciens élèves a pris le relais dans une certaine mesure, mais on a l'impression, en général, que les étudiants ne reçoivent aucun soutien sous forme de bourses pour étudiants-athlètes.
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Merci, monsieur le président.
Je salue les témoins qui sont ici pour participer à notre importante étude.
Monsieur Johnson, le 1er mai dernier, le mouvement Soutenez notre science a organisé des manifestations simultanées à l'échelle du Québec et du Canada. Dans près de 50 établissements, des étudiants, du personnel de recherche, des enseignants et d'autres acteurs se sont rassemblés pour lancer le message au gouvernement qu'il est temps de bouger et que demander à nos meilleurs cerveaux de vivre en ayant le même revenu qu'il y a 20 ans est indigne d'un pays du G7. Connaît-on quelque chose, n'importe quoi, dont le prix n'a pas augmenté depuis 2003?? Moi, je n'en connais pas.
J'étais présent à la manifestation qui a eu lieu sur la Colline du Parlement, à laquelle participaient aussi des représentants de l'Union étudiante du Québec, de l'Alliance canadienne des associations étudiantes et de Soutenez notre science. En fait, j'ai même poussé la note un peu plus loin en tenant un point de presse transpartisan dans le foyer de la Chambre des communes, avec les représentants de ces trois organisations. J'ai invité tous les membres du Comité à se joindre à moi pour demander une hausse des bourses d'études. Je remercie mon collègue M. Cannings, qui a été le seul à se déplacer pour appuyer nos étudiants. C'est important de le dire.
Monsieur Johnson, après cette gigantesque manifestation du 1er mai, organisée par le mouvement Soutenez notre science, avez-vous eu des échanges ou des communications avec le gouvernement en place?
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Il y a quatre demandes précises. L'une d'elles est l'augmentation de 50 % de la valeur des bourses et leur indexation à l'inflation à l'avenir.
La deuxième est que le nombre de bourses d'études supérieures augmente de moitié, car le nombre d'étudiants de cycle supérieur a doublé dans le système au cours des 20 dernières années.
La troisième demande est que le nombre de bourses de recherche postdoctorale augmente à hauteur de 100 %. C'est parce que, en 2010, le nombre de bourses a diminué de 40 % alors que le nombre de doctorants dans le système a doublé au fil du temps.
La quatrième demande est d'augmenter de 10 % par année au cours des cinq prochaines années les budgets pour les subventions des trois organismes.
Je suis surpris que votre comité n'ait recommandé qu'une hausse de 25 %, ce qui ne correspond qu'aux niveaux de 2015, qui se situent encore sous le seuil de la pauvreté. La raison pour laquelle le Comité continue de recommander une hausse de 25 % est également surprenante. Je ne sais pas d'où provient le chiffre. À ma connaissance, il ne s'appuie sur aucune donnée.
Je remercie nos deux témoins d'être ici aujourd'hui. Je vais poursuivre avec M. Johnson.
Tout d'abord, je vous remercie tous du travail que vous avez fait dans ce dossier au cours des dernières années. C'est important, de toute évidence. Comme vous le dites, c'est la question la plus importante pour la science et la recherche au Canada et pour le gouvernement fédéral, et toujours comme vous le dites, il y a eu une surprise générale de la part de toutes sortes de personnes et de groupes, moi y compris, lorsque nous avons vu que ce n'était pas réglé rapidement, car ce serait une victoire facile. C'est très facile.
Je me demande si vous pouvez revenir au chiffre dont vous avez parlé. Je pense que c'était environ 740 millions de dollars par année, et vous avez dit que les investissements perdus pourraient atteindre un milliard de dollars par année. C'est la somme d'argent que nous avons consacrée à l'éducation de nos jeunes chercheurs chaque année, et l'argent est perdu lorsqu'ils quittent le pays parce que d'autres endroits semblent reconnaître leur valeur plus que nous. Je me demande juste si vous pouviez en parler et peut-être en dire plus sur la façon dont cela fonctionne.
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Oui. Tous les doctorants au pays finissent par faire des années de recherche et de formation. En moyenne, un doctorant travaille 5,75 années pour devenir un expert dans son domaine. Nous investissons beaucoup là‑dedans. En moyenne, nous investissons 35 000 $ par année dans ces personnes pour qu'elles deviennent nos meilleures scientifiques, spécialistes en sciences sociales, ingénieures et physiciennes nucléaires, comme l'autre témoin l'a dit.
D'après ce que je comprends, cet argent est investi parce que ce sera profitable pour notre économie pendant des années. J'estime qu'il est problématique qu'il y a quatre ans, avant que tout devienne sens dessus dessous à cause de l'inflation et de la pandémie, 38 % des doctorants quittaient immédiatement le pays — et la plupart ne revenaient pas — parce qu'ils ne pouvaient pas obtenir un soutien adéquat ici au Canada. En 2019, ces départs ont coûté 740 millions de dollars à notre économie. Aujourd'hui, avec l'inflation, ce chiffre sera encore plus élevé. Aucune autre étude n'a été faite depuis. On parle certainement de plus de 1 milliard de dollars par année maintenant.
Par exemple, dans mon propre laboratoire, parmi les quatre derniers doctorants, trois se sont rendus aux États-Unis, et il n'y a aucun espoir de les faire revenir maintenant parce qu'ils gagnent beaucoup plus d'argent. Aux États-Unis, par exemple, l'équivalent de notre bourse de recherche pour un doctorant est de 65 000 dollars canadiens. Nous offrons 45 000 $ ici. Pour les étudiants postdoctoraux, c'est 95 000 dollars canadiens par année pour l'équivalent de ce que nous offrons ici, c'est‑à‑dire 45 000 $.
Il y a un énorme écart en ce moment. Lorsque ma fille, qui fréquente actuellement l'université, songera à un établissement d'études supérieures parce qu'elle veut devenir physicienne, je vais lui dire d'étudier ailleurs à moins que les choses changent ici au Canada.
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Je pense qu'il pourrait y avoir des interactions plus directes entre les groupes de financement du gouvernement et les étudiants.
À l'heure actuelle, la majorité du financement semble être fait par l'entremise de l'université, qui remet les fonds à un groupe de recherche qui les remet à son tour à l'étudiant. Ce n'est pas pour critiquer mon groupe de recherche, le professeur ou l'université, mais je pense qu'avec les professeurs qui ne voient pas nécessairement les besoins financiers de nombreux étudiants... C'est un problème d'interprétation dans une certaine mesure, comme j'y ai fait allusion avant, et il arrive que des fonds ne servent pas du tout.
S'il y avait une communication plus directe entre les étudiants des cycles supérieurs et ces organismes de financement, les fonds pourraient être mieux utilisés. Une plus grande partie des fonds existants pourrait être utilisée plus efficacement.
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Merci, monsieur le président.
Merci aux deux témoins de comparaître devant le Comité aujourd'hui.
Je vais commencer par M. Colterjohn.
Il a abordé la question du logement ici à Hamilton. Nous venons tous les deux de cette ville et nous savons que la vague de migration entre la région du Grand Toronto et Hamilton a sans aucun doute une incidence non seulement sur le prix des maisons — il a parlé des difficultés auxquelles il s'est heurté avec sa partenaire —, mais aussi sur le marché locatif. Pour les étudiants qui se trouvent principalement dans le quartier de Westdale dans l'ouest de la ville et qui cherchent un loyer abordable, cela devient alors un véritable défi.
Certaines des questions que j'ai posées aux témoins précédents se rapportent à la même étude concernant toute la question du logement et la façon dont le gouvernement fédéral peut aider les étudiants à se loger. Monsieur Colterjohn, vous savez peut-être que l'Université McMaster va ouvrir, cet automne, une résidence pour les étudiants des cycles supérieurs au centre-ville d'Hamilton, juste en face de l'hôtel de ville, à un jet de pierre. La résidence accueillera 600 étudiants et permettra de s'attaquer au problème du logement abordable. Je pense que l'université voit cela comme une sorte de carotte.
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Merci pour le coup de main.
Monsieur le président, par votre entremise, voici ma question pour M. Colterjohn: y a‑t‑il des moyens pour nous d'aider à lutter contre le problème de l'abordabilité dont il a parlé plus tôt? On nous a présenté des recommandations cohérentes à propos d'accroître l'aide offerte, le nombre de bourses de recherche ou le soutien postdoctoral, mais si nous nous penchons sur toute la question de l'abordabilité... Je pense que mon collègue, M. Lauzon, l'a abordée pour ce qui est des sports, c'est‑à‑dire l'aide que nous pouvons offrir sous forme de carottes, si je puis dire, pour être plus compétitifs.
En ce qui a trait au logement, comment pouvons-nous aider les personnes qui envisagent de rester dans le système et à l'université pour mener leurs études de cycle supérieur, mais qui estiment que c'est trop coûteux, comme M. Colterjohn l'a dit dans sa déclaration liminaire? Je suis heureux qu'il en ait parlé, car c'est un thème récurrent, non seulement à notre comité, mais aussi à d'autres. Que pouvons-nous faire pour prêter main-forte aux personnes qui sont aux prises avec la forte poussée inflationniste et qui ont de la difficulté à trouver un endroit abordable où vivre sur le campus ou à proximité?
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Merci, monsieur le président.
Cela me fait également plaisir d'aborder le sujet du logement, notamment en ce qui concerne l'abordabilité. Monsieur le président, savez-vous combien de nouveaux investissements ont été accordés au logement dans le dernier budget fédéral? Aucun. C'est la même chose pour les bourses d'études des cycles supérieurs, qui n'ont pas eu de nouveaux investissements au cours des 20 dernières années.
Je veux bien poser des questions et tourner en rond, mais j'aimerais surtout qu'on parle du sujet à l'étude aujourd'hui, soit les bourses d'études supérieures et postdoctorales.
Le rapport Bouchard a été commandé par le gouvernement et produit par le Comité consultatif sur le système fédéral de soutien à la recherche. Dans la recommandation 6 de ce rapport, on demande un niveau de financement compétitif à l'échelle internationale pour les étudiants diplômés et les boursiers postdoctoraux, reconnaissant ainsi leur rôle crucial en tant que futurs leaders de l'innovation scientifique.
Monsieur Johnson, considérez-vous que la mise en œuvre des revendications visant à soutenir notre science représenterait un seuil minimal acceptable pour arriver à un niveau de financement compétitif à l'échelle internationale?
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Il vous reste cinq secondes. Comme toujours, vous avez maximisé le peu de temps dont vous disposiez.
Je remercie nos témoins de nous avoir donné des réponses concises. Si vous pensez à d'autres informations dont vous voudriez nous faire part, vous pouvez nous les faire parvenir par écrit, et la greffière les ajoutera à votre témoignage.
Monsieur Colterjohn et monsieur Johnson, nous vous remercions de vos témoignages. Ils nous seront utiles dans notre étude sur les programmes des bourses d'études supérieures et postdoctorales du gouvernement du Canada.
Nous allons suspendre brièvement la séance pour passer à nos deux prochains témoins, dont un sera en ligne et l'autre présent en personne. Je vais suspendre la séance quelques minutes. Nous nous retrouverons au début de la prochaine heure.
Il se pourrait que nous ayons à interrompre la séance. Comme le témoin en ligne n'est pas encore arrivé, il se pourrait que nous ayons à suspendre la séance pour procéder à une vérification du son avec lui.
Je souhaite la bienvenue à tous ceux qui sont de retour et à notre témoin également.
Conformément à l'article 108(3)i) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mardi 14 février 2023, le Comité poursuit son étude des programmes des bourses d'études supérieures et postdoctorales du gouvernement du Canada.
J'ai maintenant le plaisir d'accueillir à nouveau M. Chad Gaffield, chef de la direction du U15 Regroupement des universités de recherche du Canada. Nous allons commencer par votre témoignage, et j'espère que notre autre témoin pourra se joindre à nous en cours de route.
Vous disposez de cinq minutes. Allez‑y, s'il vous plaît.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais remercier tous les membres du Comité de m'offrir la chance de discuter avec eux de ce que je considère comme la composante clé du dossier sur la science et la recherche.
[Traduction]
J'aimerais aussi vous remercier de continuer à jouer un rôle moteur dans les discussions, le débat et la formulation de politiques sur la science et la recherche au Canada. Au cours de la dernière année, vos rapports et recommandations ont toujours fait état des mesures urgentes et porteuses d'avenir que le Canada doit mettre en place pour progresser en ces temps que nous nous entendons tous pour qualifier, je crois, de turbulents.
Je vais me concentrer aujourd'hui sur les programmes de bourses d'études supérieures et de bourses postdoctorales du gouvernement du Canada, qui feront l'objet de votre prochain rapport. Mon objectif précis est de contribuer à votre rapport en décrivant de façon détaillée les raisons exactes qui font en sorte que ces programmes sont si importants et méritent autant votre attention. Ce sont des détails importants, car ils permettent d'expliquer pourquoi les programmes de bourses d'études supérieures et postdoctorales du Canada sont en danger, pourquoi on risque ainsi de laisser tomber les esprits les plus brillants au pays, de laisser tomber nos institutions, nos entreprises et nos communautés, et pourquoi on risque aussi d'hypothéquer l'avenir de notre pays et le rôle important du Canada sur la scène mondiale.
Comment en sommes-nous arrivés là?
Jusqu'à présent, les témoins ont insisté sur le fait que les étudiants diplômés jouent un rôle essentiel dans l'écosystème de la recherche et de l'innovation, en contribuant de manière significative à l'avancement de la recherche et à la mobilisation des connaissances, tout en développant une expertise dans leur domaine et des compétences approfondies et durables qui sont très recherchées dans la société.
Les témoins ont souligné que les montants des bourses d'études supérieures et postdoctorales du Canada sont généralement restés aux niveaux établis il y a deux décennies.
Les témoins ont décrit comment les pays pairs évoluent dans la direction opposée en augmentant rapidement leurs investissements dans la recherche, en particulier pour favoriser le développement des talents hautement qualifiés, ce qui est maintenant reconnu mondialement comme étant la pièce maîtresse de tout écosystème de recherche et d'innovation robuste.
Aux États-Unis, la Chips and Science Act a plus que doublé l'engagement national en faveur de la science sur cinq ans et a augmenté de 50 % les bourses de recherche des cycles supérieurs.
Les témoins ont souligné que le propre comité consultatif du gouvernement sur l'écosystème de recherche du Canada — le rapport Bouchard — a conclu que le Canada perdait du terrain lorsqu'il s'agit d'investir dans la recherche. Le rapport Bouchard contient des recommandations claires en matière de financement: augmenter le financement des trois organismes subventionnaires de 10 % par an au cours des cinq prochaines années. Le rapport souligne aussi l'urgence d'agir. On peut y lire: « Pour être franc, le soutien actuel aux étudiantes et étudiants chercheurs — notre relève en recherche — est à un point de rupture. »
Dans ce contexte, mon objectif aujourd'hui est de m'assurer que vous disposez des informations détaillées qui expliquent comment nous en sommes arrivés à ce point de rupture et quelles actions sont nécessaires pour remettre le Canada sur la bonne voie.
Voici une série d'éléments clés sur lesquels nous concentrer.
Concentrons-nous sur les titulaires de bourses d'études supérieures et postdoctorales et leur qualité exceptionnelle en tant que leaders émergents de leur génération. Ce sont ceux sur qui le Canada fonde ses meilleurs espoirs pour faire de grands pas en avant. Parlons en détail du processus rigoureux et en plusieurs étapes qui mène à leur sélection. Parlons des objectifs du Canada en offrant ces bourses d'études supérieures et postdoctorales. Précisons ce que ces bourses sont censées accomplir pour le Canada et pourquoi elles constituent une référence pour l'ensemble de l'écosystème scientifique et de recherche du pays.
Examinons ce que cela signifie et l'importance que cela représente pour les étudiants d'être choisis pour recevoir une bourse d'études, en particulier pour les esprits les plus brillants d'entre eux qui sont issus de milieux défavorisés. Dressons la liste des conséquences pour ceux qui reçoivent une bourse aujourd'hui dont le montant a été établi il y a de nombreuses années. Penchons-nous aussi sur les conséquences pour le Canada d'offrir aujourd'hui des bourses d'études supérieures et postdoctorales en dollars de 2003.
Monsieur le président, ce sont ces éléments et d'autres éléments connexes qui doivent être au cœur de nos discussions.
Bien que tous vos rapports aient été d'une grande importance, je suis convaincu que ce rapport sur les bourses d'études supérieures et postdoctorales est celui qui pourrait avoir les retombées les plus importantes à long terme pour le Canada.
Comme vous le savez, le budget fédéral du printemps ne prévoyait pas de nouveaux investissements dans le financement de la recherche universitaire. C'est la deuxième année consécutive que le gouvernement fédéral gèle le financement de la recherche. En fait, cette année, il appelle à une réduction de 3 %. Les montants des bourses d'études supérieures et postdoctorales resteront à des niveaux établis il y a de nombreuses années. L'inflation continuera à éroder le financement destiné aux subventions de recherche, et les initiatives d'innovation dans les secteurs privé, public et à but non lucratif continueront à se heurter à de graves difficultés à un moment crucial.
Le Canada doit agir maintenant.
Je vous remercie et serai heureux de répondre à vos questions.
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Je vous remercie beaucoup de la question.
Comme vous le savez sans doute, j'enseigne à l'université depuis longtemps et j'ai aussi dirigé l'un des conseils de recherche fédéraux. Ce qui m'a frappé au cours des 25 dernières années que j'ai passé à jouer un rôle actif dans ce secteur, c'est que l'engagement à construire un avenir meilleur pour le Canada dans un monde en mutation a réellement été un engagement bipartisan à investir dans nos esprits les plus brillants. Nous l'avons vu. Plus tôt aujourd'hui, on a parlé des initiatives du gouvernement libéral qui a créé le Programme de bourses d'études supérieures du Canada, etc. Le gouvernement conservateur a ensuite pris l'initiative de créer les bourses Banting et Vanier, les chaires d'excellence en recherche du Canada, etc. Il y a eu un engagement à long terme pour faire en sorte que le Canada survive au XXIe siècle en disposant du capital humain nécessaire pour nous aider à faire des progrès.
Ce qui s'est passé au cours des dernières années, à mon avis, c'est que cet engagement de longue date a été un peu tenu pour acquis. Nous n'avons pas réalisé que, dans un monde international et concurrentiel, compte tenu de l'inflation, etc., nous ne pouvons pas nous laisser aller. C'est un élément qui doit être considéré comme une priorité pour le pays, année après année.
J'ai l'impression qu'une grande partie de votre travail au sein du Comité — et c'est assurément ce que les témoins vous ont dit — consiste à mettre en lumière le fait que ce plan, cet engagement, de construire un Canada basé sur le capital humain plutôt que simplement sur nos ressources, est maintenant plus important que jamais. Dans un monde qui s'est transformé, dans un monde où l'économie est intangible et où tous les pays essaient de hisser leurs activités économiques en haut de la chaîne de valeur, nous devons miser doublement, en fait, sur la stratégie bipartisane que le Canada a utilisée avec succès jusqu'à tout récemment.
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C'est un point très intéressant. L'une des questions les plus importantes remonte au débat bipartisan qui s'est déroulé, en fait, au milieu des années 1990: le monde compte de nombreux chercheurs. Le Canada est un petit pays. Pourquoi ne pas simplement importer ce dont nous avons besoin? Nous sommes un petit pays. Laissons les autres faire toutes les grandes découvertes, les avancées, etc. Nous pourrons alors simplement en tirer profit. C'était une sorte d'argument du type « on fabrique ou on achète »".
La raison pour laquelle cette approche a été mise de côté est que des gens ont fait valoir que, si nous ne disposons pas d'un écosystème de recherche et d'innovation riche et de haute qualité, nous ne saurons même pas quoi acheter. Nous ne saurons même pas ce qui se passe dans le monde. Il faut que nos leaders soient dans le coup. Oui, nous sommes un petit pays. Nous ne pourrons jamais réaliser toutes les avancées nécessaires au XXIe siècle, mais si nous n'avons pas de représentants dans le monde de la science et de la recherche, nous deviendrons une colonie dans le nouveau monde du XXIe siècle.
C'est la raison pour laquelle des investissements ont été réalisés et des efforts considérables déployés pour que le Canada ne soit pas seulement une colonie intellectuelle au XXIe siècle ni un pays dépendant du reste du monde, mais un pays fort, souverain et capable d'agir au niveau national, en investissant dans les esprits les plus brillants.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je vous remercie d'être venu témoigner, monsieur Gaffield.
J'écoute les témoins, vous et d'autres. Nous sommes tous conscients de la complexité de la question. Il ne s'agit pas seulement d'augmenter le montant des bourses d'études. Il y a toute une série de questions qui entrent en jeu pour aider les étudiants. J'ai des neveux — des doctorants — dans ma famille. Ils s'efforcent tous, comme la plupart des enfants et comme nous l'avons fait lorsque nous étions enfants, de s'établir et d'avoir une certaine qualité de vie.
Il y a le fait que la monétisation des résultats du travail de ces étudiants aura d'énormes retombées. Il y a aussi la monétisation de la propriété intellectuelle, la possibilité de nous développer et de conserver les investissements au Canada pour, au bout du compte, soutenir les innovations et les étudiants.
Voir seulement un élément et y injecter des fonds sans tenir compte de tout ce qui se fait ailleurs pour soutenir le système n'est pas juste. Ce que nous devons faire, c'est établir des priorités et être efficaces pour attirer les étudiants, les talents et les cerveaux, car c'est la priorité absolue. Je vous félicite pour tout ce que vous avez fait à cet égard.
Dites-moi: comment le gouvernement fédéral, le secteur privé, et même le secteur provincial, peuvent-ils, tous ensemble, soutenir certains de ces efforts?
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Je vous remercie beaucoup de la question, car ce que vous avez sous-entendu est le point crucial.
Encore une fois, au cours des années pendant lesquelles j'ai dirigé le conseil subventionnaire fédéral chargé des sciences sociales et humaines, nous avons constaté que les investissements dans la recherche ont un rendement garanti, soit l'émergence des talents, c'est‑à‑dire des personnes dont nous avons besoin. C'est garanti.
C'était le débat à partir du milieu des années 1990. Quand on y réfléchit, dans quoi un pays peut‑il investir aujourd'hui et obtenir un rendement garanti? Il n'y a pas grand-chose, mais en fait, dans le monde de la recherche, c'est exactement ce qui se passe. Lorsque nous finançons des projets de recherche, c'est notre capital humain, notre capital intellectuel, qui s'accroît pour servir la société.
Vous avez tout à fait raison de souligner l'importance d'une approche écosystémique. L'un des aspects essentiels est que nous ne pouvons pas nous contenter d'en faire un peu ici et... Bien que je sois un fervent partisan de l'idée que nous devons offrir des bourses d'études supérieures et postdoctorales à un niveau international concurrentiel, ce n'est que le point culminant de l'effort beaucoup plus important dont nous avons besoin.
Nous devons être en mesure d'envisager l'ensemble de cet écosystème de manière holistique. Pourquoi? Nous avons besoin de développer des talents dans tous les secteurs au pays et de leur permettre de jouer un rôle au niveau international, parce qu'en fin de compte, c'est le rendement des investissements qui fera en sorte que nous pourrons nous donner un avenir meilleur.
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Oui, je suis tout à fait d'accord avec vous. Être en mesure de convaincre les étudiants de rester au Canada... Nous avons intérêt à ce que les étudiants restent au Canada et poursuivent leur travail. L'abordabilité compte parmi les obstacles. Nous avons toute une gamme de ressources pour les soutenir sur ce plan aussi. La discussion n'en tient pas compte.
Force est de reconnaître que le problème est beaucoup plus vaste. C'est la raison pour laquelle notre comité a été mis sur pied: pour soutenir la recherche et l'innovation et pour défendre la souveraineté et assurer la protection du Canada dans ce domaine. Tout cela est essentiel pour l'avenir.
Au sujet du rapport Bouchard, j'ai déjà reçu des appels de la part de certains de vos collègues. Nous avons eu des discussions. Nous savons qu'il s'agit d'un système prioritaire et que le gouvernement prend la question au sérieux. Je vous en remercie.
Je ne sais pas s'il me reste du temps, monsieur le président. Il me reste deux minutes? C'est encore mieux.
Pouvez-vous nous donner des exemples de ressources non gouvernementales auxquelles les étudiants ont accès pour soutenir leur travail?
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C'est une très bonne question, et vous avez fait allusion à plusieurs éléments cruciaux.
Tout d'abord, qu'est‑ce qui attire les étudiants étrangers au Canada et qu'est‑ce qui décourage les étudiants canadiens de partir? Plusieurs facteurs entrent en ligne de compte.
De toute évidence, il y a la qualité du milieu de la recherche. Depuis 25 ans, le Canada investit dans les installations de recherche pour qu'elles soient à un niveau adéquat. Il investit également de sorte à disposer d'éminents professeurs pouvant agir comme superviseurs auprès des étudiants. C'est là un élément essentiel.
De plus, le Canada est un pays très attrayant pour les figures de proue de la nouvelle génération de partout dans le monde. Je pense que vous l'avez sous-entendu. Notre société est inclusive. Nous avons encore du pain sur la planche, mais nous sommes déterminés à avoir une société inclusive. À de nombreux égards, notre société représente les idéaux du monde du XXIe siècle, un monde favorable à un style de vie et à une façon d'être qui sont reconnus, je crois, à l'échelle mondiale.
En ce qui concerne le milieu universitaire et nos communautés, je pense que nous avons ce qu'il faut à la fois pour retenir nos étudiants et pour attirer des étudiants de l'étranger. Cependant, nous ne pouvons transmettre à nos propres étudiants et au monde entier le message que nous ne les considérons pas comme un bon investissement à l'échelle internationale. Ils doivent pouvoir se nourrir, payer leur loyer et répondre à tous leurs besoins.
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Merci, monsieur le président.
Je salue les témoins qui sont avec nous aujourd'hui.
Monsieur Gaffield, je suis heureux de vous revoir. Je pense qu'il s'agit de votre quatrième ou cinquième visite. Il est toujours plaisant de vous entendre.
Je pense que le portrait de la situation est assez clair. Je regardais nos derniers échanges et, le 5 décembre dernier, vous nous disiez que la situation concernant les investissements était assez préoccupante. Il y a des mots qui m'ont frappé quand j'ai relu votre témoignage. Vous représentez les 15 plus grandes universités canadiennes et vous recevez près de 85 % du financement. On parle quand même de milliards de dollars. Votre témoignage d'aujourd'hui est donc sérieux. Vous disiez, le 5 décembre dernier, que la stagnation du financement des bourses d'études depuis 20 ans était révélatrice d'indifférence et d'inattention. Au départ, monsieur Gaffield, bien sincèrement, je me disais qu'il s'agissait peut-être d'une incompréhension de la part du gouvernement. Cependant, aujourd'hui, il est évident qu'il ne s'agit pas seulement d'une incompréhension. J'en suis sûr à 100 %. Le gouvernement, malheureusement, tient pour acquis les chercheurs scientifiques, le réseau universitaire, le réseau collégial et l'ensemble des gens qui sont dans le domaine de l'éducation aux cycles supérieurs. Je trouve gênant, voire aberrant, qu'un gouvernement ne comprenne pas l'importance d'investir dans la recherche, aujourd'hui. Vous savez, les décisions qu'on prend et les investissements qu'on fait aujourd'hui ne sont peut-être pas très rentables politiquement. Toutefois, ils seront rentables pour l'ensemble de la société dans 10 ans, 20 ans et 30 ans.
Il faut comprendre qu'il y a 6 000 bourses d'études supérieures au Canada. Pourtant, il y a 240 000 étudiants. Je vous laisse constater qu'un faible pourcentage de personnes reçoivent des bourses d'études. On nous a aussi indiqué que 80 % des étudiants aux cycles supérieurs obtenaient leur financement en travaillant avec les chercheurs principaux. Dans son rapport commandé par le gouvernement, le Comité consultatif sur le système fédéral de soutien à la recherche, présidé par M. Frédéric Bouchard, soulignait que de nombreuses personnes étudiantes, si ce n'est la plupart, ne sont pas financées par des bourses d'études. Il s'agit d'un enjeu incontournable parce que, compte tenu de la concurrence pour le talent à l'international, le Canada risque fort, sans un réinvestissement conséquent, de subir un nouvel exode de personnes hautement qualifiées. Vous le savez sans doute, mais je le répète: le Canada est le seul pays du G7 qui a perdu des chercheurs depuis 2016.
La question que je veux vous poser est la suivante. Est-il juste de dire qu'une augmentation du financement global des organismes subventionnaires est indissociable d'une augmentation des bourses d'études supérieures si on veut réellement s'attaquer au problème de la relève scientifique au Québec et au Canada?
Il n'y a aucun doute que nous avons un peu tendance à tenir pour acquise la qualité de notre écosystème de recherche et d'innovation au Canada. Souvent, on entend que le Canada a les meilleures universités et que la vie est belle. Il n'y a pas de doute, nous sommes très fiers de la qualité de nos chercheurs et de nos étudiants. Toutefois, la réalité est que, maintenant, en ce qui a trait au nombre de citoyens au Canada ayant un diplôme d'études supérieures, le Canada se classe 28e dans les classements de l'OCDE. Les gens sont très surpris quand je leur apprends cela. Comment se fait-il que le Canada soit maintenant classé 28e?
[Traduction]
L'une des choses que nous avons omis de faire, c'est de consacrer suffisamment d'attention à l'évolution du milieu. Selon moi, votre comité offre une solution importante à ce problème. Nous avons mis en place un bon système, puis nous nous sommes dit que nous n'avions pas à nous en soucier. Pendant ce temps, le monde a continué à évoluer, et nous n'avons pas porté attention au retard que nous prenions, ce qui fait qu'aujourd'hui, notre système d'éducation n'est pas à la hauteur de l'économie de grande valeur qu'exige le XXIe siècle.
Nous sommes incapables d'imaginer que nous puissions bâtir une telle économie de grande valeur, un monde d'actifs intangibles et de valeur ajoutée, un avenir juste et durable. De tels objectifs sont impossibles à atteindre alors que les investissements que nous faisons nous donnent l'apparence d'être en voie de devenir un genre de nouvelle colonie du XXIe siècle, étant donné notre grande dépendance aux pays étrangers.
Je ne vous apprends rien en disant que ce sera facile pour les pays étrangers de continuer à nous voir comme une source de minéraux critiques ou de ressources souterraines, au lieu de nous considérer, comme nous le disions tout à l'heure, comme un pays souverain doté de capacités nationales qui joue un rôle important sur la scène internationale.
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Merci, monsieur le président, et merci encore à M. Gaffield de se joindre à nouveau à nous. C'est toujours un plaisir de vous recevoir et de bénéficier de votre expertise. Je vous remercie également d'avoir souligné que de toutes les études que nous avons réalisées jusqu'à maintenant, celle‑ci pourrait avoir les retombées les plus importantes pour le milieu canadien de la science et de la recherche.
M. Sousa a déclaré que tous les étudiants éprouvaient des difficultés. Je répliquerais que pour ma part, je n'ai pas éprouvé de difficultés durant mes études supérieures. J'ai eu la chance de recevoir une bourse d'études du CNRC. Les trois conseils n'existaient pas à l'époque, mais la bourse était suffisante pour me loger, me nourrir et subvenir à tous mes besoins. Je n'ai pas eu à me soucier de trouver un emploi à l'extérieur de l'université.
Vous travaillez depuis longtemps dans le milieu universitaire et le domaine de la recherche à l'échelle nationale. Pouvez-vous nous parler de l'investissement global dans les universités réalisé et par le gouvernement fédéral et par les gouvernements provinciaux? Il semble avoir diminué ces 20, 30 et 40 dernières années. Bien entendu, un des effets secondaires de cette diminution, c'est l'augmentation des frais de scolarité que doivent payer les étudiants, en plus des frais d'hébergement et de nourriture.
Pouvez-vous nous en dire plus là‑dessus? Quelles répercussions cet enjeu a‑t‑il sur l'objet de la discussion d'aujourd'hui?
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Merci beaucoup. Votre question est très importante, car, comme vous le savez, la structure canadienne est telle que la mise en place d'un système de recherche et d'innovation robuste exige un partenariat entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux.
Cependant, le rôle du gouvernement fédéral est particulièrement important parce qu'il s'agit d'un rôle de leadership. L'histoire du Canada montre que ce sont les initiatives fédérales qui ont fait comprendre à tout le pays que c'est en défendant la souveraineté nationale et en renforçant les capacités du Canada que nous progresserions. Le leadership du gouvernement fédéral a toujours été un élément clé. Que l'on remonte à... Songez au Conseil national de recherches, à la création des conseils subventionnaires fédéraux, etc. C'est grâce à eux que le Canada a commencé à modifier sa position de colonie intellectuelle aussi récemment que dans les années 1960.
Vous connaissez déjà l'histoire. Dans les années 1960, la majorité des professeurs travaillant dans les universités canadiennes — soit 80 % — avaient fait leurs études à l'extérieur du Canada. De plus, le système canadien d'études supérieures était relativement petit. Vers la fin du XXe siècle, c'est le gouvernement fédéral qui a fait comprendre à l'ensemble du pays que des changements s'imposaient. Les efforts dans ce domaine ont été redoublés au milieu des années 1990 et dernièrement.
L'importance nationale, la sécurité intérieure, la souveraineté — c'est le leadership fédéral qui fait avancer tous ces dossiers. Si les provinces voient, dans une certaine mesure, que cet enjeu ne figure pas dans la liste des priorités du gouvernement pour bâtir un avenir meilleur, ce ne sera vraiment pas à notre avantage.
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Je vous remercie pour votre réponse.
Je tiens à ajouter que la bourse d'études que j'ai reçue au milieu des années 1970 est la raison pour laquelle j'ai décidé de rester au Canada. Je considérais la possibilité d'aller faire mes études supérieures à l'étranger, mais la bourse m'a permis de rester ici.
Je suis aussi heureux d'apprendre que votre organisation, U15, et donc les grandes universités accueillent favorablement le rapport Bouchard. D'après ce que je comprends, le rapport recommande une augmentation annuelle de 10 % des subventions accordées par les trois conseils.
Vous avez mentionné au passage une réduction de 3 %. Les représentants du CRSNG m'ont parlé de la même chose. Pouvez-vous nous en dire plus sur les risques d'une telle réduction?
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Merci beaucoup pour la question. Elle est liée à ce que je disais tout à l'heure au sujet de continuer à porter attention à ce dossier.
Dans le dernier budget, tous les ministères se sont fait dire de réduire leurs dépenses de 3 %. Il y avait une petite phrase à ce sujet quelque part. Nous sommes extrêmement préoccupés par le fait que non seulement le financement des trois organismes n'a pas été augmenté, mais en plus, il a été réduit de 3 %, et ce, au pire moment possible. Je pense que la question mérite notre attention. La situation semble être pire qu'on ne le pensait. Je le répète, il nous incombe, et il incombe à votre comité...
Vous savez, il n'y a pas si longtemps, il n'y avait pas de comité comme le vôtre. On tenait pour acquis que tout allait bien, et il n'y avait donc rien de tout ceci. Selon moi, c'est en grande partie grâce à votre comité qu'on a commencé à s'intéresser à la question et qu'on a cessé de supposer que tout allait bien. Il faut éviter de faire de telles suppositions pour assurer au Canada un bel avenir.
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Merci, monsieur le président.
Je suis ravi de me joindre à vous.
L'Institut universitaire de technologie de l'Ontario salue les membres de la Première Nation des Mississaugas de Scugog Island, qui est visée par les traités Williams. Nous reconnaissons que nous sommes situés sur le territoire traditionnel des Mississaugas, une branche de la grande nation anichinabée, qui comprend les Algonquins, les Ojibwés, les Odawas et les Potéouatamis.
Je suis ici aujourd'hui pour vous parler d'un problème qui touche la compétitivité des Canadiens sur la scène internationale. Comme vous le savez, nous sommes à la traîne par rapport à nos pairs au chapitre des dépenses en recherche et développement, qui équivalent à 1,55 % de notre PIB. Par comparaison, la dernière moyenne de l'OCDE se situe à 2,7 %. Aux États-Unis, les dépenses s'élèvent à 3,45 %, et en Finlande, à 2,9 % du PIB. Les pays les plus près de nous en matière de dépenses sont l'Estonie et le Portugal.
Les pairs du Canada saisissent les occasions d'investir dans la recherche, en plus de prendre des engagements importants pour augmenter leur soutien. Comme vous le savez, par exemple, aux États-Unis, la CHIPS and Science Act prévoit de nouveaux fonds de plus de 200 millions de dollars américains pour la recherche fondamentale.
Sans ambition semblable, le Canada risque de prendre de plus en plus de retard par rapport à la moyenne de l'OCDE. Le comité consultatif du gouvernement a conclu que le Canada resterait à la traîne s'il n'augmentait pas le financement de base des organismes subventionnaires et s'il ne soutenait pas les chercheurs talentueux en début de carrière. Le Canada doit passer à l'action, il doit faire preuve d'ambition et il doit mettre en œuvre les recommandations découlant de l'excellent travail du comité consultatif. Au Canada, les dépenses continuent d'être faites principalement par le gouvernement. Cette situation est révélatrice de certains problèmes que nous avons dans le secteur privé à l'égard des dépenses en recherche et développement.
Il va sans dire qu'au cœur de la recherche et du développement se trouvent des personnes, du personnel hautement qualifié: nos doctorants et nos étudiants des cycles supérieurs. Les bourses de doctorat et les bourses d'études supérieures en général ont virtuellement stagné au cours des 20 dernières années. Les rares chanceux qui obtiennent des bourses doivent compter aussi sur les fonds des trois conseils qu'ils reçoivent de leurs superviseurs, les chercheurs principaux. Toutefois, même le financement des conseils est gelé. En dollars réels, nous perdons du terrain. La valeur des bourses de doctorat et d'études supérieures offertes au Canada n'a pas augmenté depuis 20 ans; leur nombre non plus. Leur valeur réelle a donc diminué de moitié. Redresser le problème de la stagnation du financement des bourses d'études est un pilier important de la solution au problème global de la stagnation du financement depuis 20 ans.
Les programmes d'études supérieures offerts dans les universités canadiennes sont une des sources principales de talents, et les talents sont essentiels à la croissance économique du Canada. Pour retenir les talents au Canada et pour stimuler l'innovation, il faut absolument soutenir les étudiants des cycles supérieurs en investissant dans le programme de bourses d'études supérieures et dans le financement de la recherche scientifique fondamentale offert par les trois organismes. Les études supérieures dans les universités publiques sont un des moyens principaux par lesquels les Canadiens investissent en eux-mêmes. De leur côté, les gouvernements provinciaux subventionnent de plus en plus les possibilités d'apprentissage à l'extérieur des universités. Or c'est en investissant dans l'éducation que nous renforçons les capacités au pays. C'est par l'éducation que nous nous transformons nous-mêmes et, par le fait même, le monde autour de nous, notre pays et la planète entière. En investissant dans nos institutions publiques, nous renforçons nos capacités et nous cultivons la citoyenneté.
L'inflation, notamment la hausse du coût des logements locatifs, a une incidence considérable sur le coût de la vie des étudiants des cycles supérieurs. Puisque les bourses doctorales des trois conseils, y compris les bourses d'études supérieures du Canada, n'ont pas augmenté ces 20 dernières années, la valeur, indexée en fonction de l'inflation, du financement par étudiant des trois conseils et de la Fondation canadienne pour l'innovation est à son plus faible depuis 2000. Qui plus est, on prévoit qu'elle chutera encore plus puisque l'engagement financier pris à la suite du rapport Naylor tire à sa fin. Comme vous le savez, les organismes subventionnaires de la recherche sont la pierre angulaire du milieu canadien de la recherche. Le moment est donc venu de renouveler l'engagement du Canada au chapitre de la recherche fondamentale en augmentant le financement des organismes subventionnaires.
Le financement des études supérieures est un élément fondamental du recrutement et de la rétention d'étudiants de haut calibre dans les programmes canadiens des cycles supérieurs. En outre, les universités sont un catalyseur de l'activité économique: elles emploient près de 410 000 personnes et elles contribuent au PIB du Canada à hauteur de plus de 48 milliards de dollars à l'échelle du pays. Chaque année, nous menons des recherches d'une valeur supérieure à 16 milliards de dollars et nous développons des idées nouvelles et novatrices qui nous aideront à régler les problèmes d'aujourd'hui et, surtout, les problèmes de demain, et ce, dans tous les domaines, des changements climatiques jusqu'aux pandémies.
Les études supérieures sont aussi un facteur prépondérant dans le recrutement de talents des quatre coins du monde. Pendant qu'au Canada le financement accordé aux étudiants des cycles supérieurs stagne, des pays comme la Finlande et nombre d'autres dont il a été question aujourd'hui soutiennent financièrement les étudiants des cycles supérieurs en leur offrant la gratuité scolaire — du moins jusqu'à l'obtention d'un premier diplôme de maîtrise — et l'aide dont ils ont besoin pour pouvoir se concentrer exclusivement sur leurs études. Comme vous l'avez souligné, de plus en plus d'étudiants font leurs études à temps partiel ou occupent des emplois à temps partiel pendant leurs études simplement pour joindre les deux bouts.
Au bout du compte, la majeure partie — 80 % environ — du financement des trois conseils sert à soutenir les étudiants. Par conséquent, les étudiants bénéficient directement de l'augmentation du financement global des trois conseils. Le rapport Bouchard souligne qu'il est « d'une importance capitale » d'augmenter le financement de base des conseils subventionnaires. C'est pourquoi nous avons été déçus de constater que le budget de 2023 ne prévoyait pas un tel financement.
Le Canada doit prévoir des mesures concrètes dans l'énoncé économique de l'automne pour assurer le bien-être de l'écosystème de recherche à l'échelle fédérale. Sans un financement accru, un plus grand nombre d'étudiants doivent occuper des emplois supplémentaires. Cela a pour conséquence involontaire de prolonger le temps qu'il leur faut pour obtenir leur diplôme et, de toute évidence, de contribuer à l'exode des cerveaux.
L'Institut universitaire de technologie de l'Ontario cherche à démocratiser l'enseignement supérieur. Les études supérieures ont toujours été associées à un petit groupe de privilégiés...
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Merci, monsieur le président. Je vais partager mon temps de parole avec Corey Tochor.
Ma première question s'adresse à M. Gaffield.
Je suis heureux de vous voir.
Notre témoin précédent, M. Colterjohn, de l'Université McMaster, une personne très accomplie, a parlé de sa situation actuelle. Il gagne de l'argent grâce à son travail, mais aussi grâce à un deuxième emploi.
Il semblait être d'accord avec moi, et nous partagions un peu le même avis. On dirait qu'il y a beaucoup de bureaucratie dans le système universitaire, et des sommes considérables passent par beaucoup de mains avant de parvenir aux chercheurs. Faut‑il changer complètement ce système pour éliminer toute la bureaucratie et faire en sorte que l'argent aille directement à la personne qui en a besoin?
Devons-nous envisager de faire appel à des entreprises qui ont un intérêt direct dans ces gens une fois que ceux‑ci terminent leurs études?
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Je dirais que c'est une question qui touche tous les aspects de toutes nos institutions dans les secteurs privé, public et sans but lucratif. Une chose qui s'est produite à la fin du XX
e siècle, je crois, c'est que nos organisations ont cherché à se doter des cadres et des structures nécessaires en matière de reddition de comptes et de responsabilité pour garantir que tout fonctionne selon les normes les plus élevées.
Il ne fait aucun doute que, dans le cadre de cet effort, nous avons parfois omis de chercher les moyens les plus efficaces de nous y prendre, et ce, dans tous les secteurs. C'est pourquoi, à mon sens, nous visons tous maintenant — et j'ai l'impression que c'est le cas dans toutes les entreprises et toutes les institutions gouvernementales que j'ai connues — à trouver des moyens d'accroître l'efficacité de nos pratiques. Le rapport Bouchard, par exemple, allait certainement dans ce sens.
Pouvons-nous améliorer la coordination, accroître l'efficacité, simplifier les choses et tout le reste? Je pense qu'il s'agit là d'un objectif commun dans tous les secteurs, objectif qui demeurera certes important dans le cadre de nos efforts en vue de maximiser chaque dollar.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je salue nos témoins.
Monsieur Gaffield, vous avez parlé de la nécessité d'attirer les étudiants les meilleurs et les plus brillants, et nous sommes tous d'accord là‑dessus. Vous avez également expliqué comment le Canada a investi dans la qualité du milieu de la recherche et de l'infrastructure dont nous disposons, bien franchement, à la grandeur du pays. Dans ma province, la Nouvelle-Écosse, je le constate tous les jours et toutes les semaines dans nos établissements, grâce aux éminents professeurs et superviseurs qui y travaillent.
Oui, je suis tout à fait d'accord avec vous: notre pays s'engage à être une société inclusive, ce qui nous permet d'attirer des gens de talent du monde entier. Ils veulent venir, rester, apprendre et contribuer au Canada.
Je vous remercie d'avoir dit que notre comité fait partie de la solution, et c'est quelque chose dont je suis persuadée. Je crois que nous nous entendons là‑dessus. J'étais très fière de la création de ce comité, et fière de mes collègues qui y siègent — ce sont les premiers membres du Comité de la science et de la recherche —, lorsque nous avons entrepris cette étude à l'automne 2021, parce qu'en fait, c'était quelque chose de nouveau.
Je crois que nous avons été en mesure de sensibiliser les gens et de jeter beaucoup de lumière sur de nombreux sujets, notamment celui dont nous sommes saisis aujourd'hui. Je dirais que, dans bien des cas, certaines choses ont été laissées pour compte, et je crois que c'est assurément ce qui s'est passé en l'occurrence.
Nous avons également parlé de l'approche holistique qui entre en ligne de compte. Il ne s'agit pas simplement d'augmenter le montant des bourses d'études supérieures ou peu importe. Il faut une approche holistique pour résoudre le problème. Je pense que Mme Nemer et bien d'autres en ont parlé. À mon avis, bon nombre des problèmes sont également attribuables au coût de la vie et aux défis que de nombreuses personnes doivent relever.
Pendant les quelques minutes qu'il nous reste, pouvez-vous nous dire — en vous fiant à votre expérience de professeur, à vos fonctions à la tête d'un de ces conseils et à votre rôle actuel au sein de l'organisation U15 —, quelles sont les recommandations les plus importantes que vous pouvez nous faire pour que nous puissions mener à bien notre travail au sein du Comité? Il n'y a pas qu'une seule bonne réponse.
Permettez-moi de soulever deux points. Vous avez mentionné deux éléments qui, à mon avis, sont essentiels.
Premièrement, la création d'une société inclusive passe vraiment par l'accès au financement pour les étudiants des cycles supérieurs, au moyen de subventions de recherche ou de bourses d'études supérieures et postdoctorales. Comme vous le savez, les personnes issues de familles démunies et de milieux défavorisés seront les plus facilement découragées par le manque d'accès et de soutien.
De toute évidence, nous ne voulons pas d'un système où les seuls Canadiens qui peuvent poursuivre des études supérieures sont ceux qui viennent de familles avantagées. Nous voulons puiser dans tout le bassin de talents. En fait, c'est la raison pour laquelle les programmes de bourses d'études supérieures et postdoctorales ont été créés — pour vraiment uniformiser les règles du jeu et donner la chance à tout le monde.
Pour bâtir une société inclusive, nous devons comprendre qu'il est absolument essentiel de rendre le système financièrement viable pour les étudiants talentueux. Nous ne pouvons pas instaurer un système prédestiné à l'élite. Ce n'est pas ce que le Canada tente de faire.
Deuxièmement, vous avez évoqué l'avantage supplémentaire pour nos étudiants de pouvoir travailler dans des projets de recherche. Cela fait appel à une foule de compétences, et je vais en énumérer quelques-unes rapidement: apprendre à développer la pensée originale, la créativité et la pensée critique; savoir évaluer l'efficacité des différentes stratégies pour faire avancer les connaissances; acquérir des compétences de recherche très poussées; savoir comment surmonter les obstacles auxquels on se heurte dans le cadre de son travail; savoir comment travailler en équipe, ce que la plupart des étudiants feront à la fin de leurs études supérieures; savoir comment gérer des projets; savoir comment équilibrer la reddition de comptes et l'efficacité, entre autres, avec les impulsions propices aux découvertes, ce qui nous ramène à la notion de créativité.
C'est ce vaste éventail de compétences approfondies qui, selon moi, explique pourquoi nous devons assurer le financement nécessaire afin que des Canadiens talentueux aient la chance de poursuivre des études supérieures et afin que nous puissions devenir un pôle d'attraction à l'échelle internationale et, ainsi, faire du Canada un pays prospère digne du XXIe siècle.
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Merci, monsieur le président.
M. Jonhson, de l'organisation Soutenez notre science, nous a indiqué précédemment que, selon une étude, 38 % des titulaires de doctorats canadiens quittent le Canada pour aller travailler à l'étranger, principalement aux États‑Unis. Ils sont à la recherche de meilleures conditions dans des pays où les gouvernements ont décidé d'investir dans la recherche et le développement. Trente-huit pour cent, c'est un sérieux exode des cerveaux.
Monsieur Gaffied, vous avez dit qu'en conséquence, le Canada était à risque de devenir une colonie scientifique. Nous investissons pour former des chercheurs de haut niveau avant de les voir partir pour aller créer, innover, inventer ailleurs. Après quoi, nous serons captifs de la bonne volonté des États étrangers pour accéder aux technologies et aux innovations qui façonneront la société de demain.
Monsieur Gaffield, vos propos ont fait écho à un discours prononcé en 1925 par le frère Marie‑Victorin, un homme que je respecte énormément. Il est un des fondateurs de l'Acfas, l'Association francophone pour le savoir. J'aimerais vous faire part d'un passage que j'ai lu et qui comprend un extrait de ce discours prononcé il y a près d'un siècle, imaginez-vous:
La souveraineté sur la connaissance est nécessaire à celle du territoire, de l’économie et de la vie nationale : « Nous ne serons une véritable nation que lorsque nous cesserons d’être à la merci des capitaux étrangers, des experts étrangers, des intellectuels étrangers : qu’à l’heure où nous serons maîtres par la connaissance d’abord, par la possession physique ensuite des ressources de notre sol, de sa faune et de sa flore ».
Que pensez-vous de cette affirmation?
Je vous remercie, monsieur Murphy, de vous joindre à nous depuis l'Institut universitaire de technologie de l'Ontario. J'aimerais revenir sur un point que vous avez soulevé, à savoir que l'Institut universitaire de technologie de l'Ontario cherche à démocratiser l'éducation.
Nous entendons souvent dire que l'éducation est le grand égalisateur, mais nous nous trouvons dans une situation où, en raison de la stagnation des bourses d'études, des bourses de recherche et des autres mesures de soutien destinées aux étudiants au cours des 20 dernières années, nous choisissons maintenant les étudiants venant de familles à faible revenu et d'autres origines qui ne peuvent tout simplement pas poursuivre des études à de tels coûts.
J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Pourquoi ce sujet constitue‑t‑il peut-être l'enjeu le plus important en ce moment dans le monde de la science et de la recherche au Canada?
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Je vous remercie de cette question, que je trouve importante.
Je viens de la région de Durham, en banlieue de Toronto, et je peux vous dire qu'un nombre disproportionné d'étudiants sont de nouveaux Canadiens. Ils sont les premiers de leur famille à faire des études postsecondaires. Nous ne voyons pas beaucoup de privilèges, ou pratiquement aucun.
Je peux vous dire que dans ce genre de situations... Notre collation des grades a eu lieu la semaine dernière. J'entends sans cesse des histoires de jeunes qui veulent s'inscrire à des programmes d'études supérieures, mais qui doivent faire une pause pour gagner suffisamment d'argent afin de financer leurs études. Cela a une incidence bien réelle.
Je suis entouré d'étudiants, qui sont l'avenir de notre pays et qui m'inspirent tous les jours. Nous devons trouver une façon d'investir dans leur avenir puisqu'ils représentent l'avenir collectif du Canada.
Nous ne parviendrons pas à améliorer les véhicules électriques, à mettre à profit la technologie quantique et à lutter contre les changements climatiques à moins de réunir les esprits les plus brillants, et si nous avons vraiment à cœur la diversité, nous devons en reconnaître l'aspect économique.
Je remercie nos deux invités de leurs témoignages inspirants et de leurs excellentes réponses à nos questions. Je sais que leur contribution nous aidera dans le cadre de notre étude. Merci d'avoir pris le temps de comparaître devant nous. Comme vous l'avez mentionné, la saison de la collation des grades est une période très occupée pour vous deux. Je vous remercie donc de vos témoignages. Bien entendu, s'il y a d'autres renseignements, veuillez les transmettre par écrit à la greffière, et nous les intégrerons à notre étude le moment venu.
J'ai quelques rappels à faire avant de lever la séance.
Il faut soumettre les listes de témoins d'ici la fin de la journée aujourd'hui pour l'étude sur les partenariats de recherche canadiens avec des entités liées à la République populaire de Chine. Nous entamerons cette étude mardi, alors assurez-vous de remettre vos listes de témoins avant la fin de la journée aujourd'hui.
Par ailleurs, nous nous réunirons le jeudi 15 juin pour reprendre l'étude sur les programmes de bourses d'études supérieures et postdoctorales du gouvernement du Canada. Nous recevrons alors nos deux derniers groupes de témoins.
Plaît‑il au Comité de lever la séance?
Un député: Oui.
Le président: Personne ne s'y oppose.
La séance est levée. Merci beaucoup.