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SRSR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la science et de la recherche


NUMÉRO 108 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 7 novembre 2024

[Enregistrement électronique]

(1610)

[Traduction]

    Je vois aujourd'hui plusieurs nouveaux visages autour de la table et à l'écran. Je m'en réjouis.
    Bienvenue à la 108e réunion du Comité permanent de la science et de la recherche de la Chambre des communes. La séance se déroule en mode hybride. Tous les témoins ont effectué les tests de connexion requis avant la séance.
    Je rappelle à tous les membres du Comité les points suivants.
    Veuillez attendre que je vous désigne par votre nom avant de prendre la parole. Toutes les observations doivent être adressées à la présidence.
    Les membres du Comité voudront bien lever la main s'ils souhaitent prendre la parole, que ce soit en personne ou par Zoom. Le greffier et moi-même allons gérer l'ordre des interventions de notre mieux.
    Ceux qui participent par vidéoconférence doivent cliquer sur l'icône du microphone pour l'activer et ils auront l'obligeance de l'éteindre lorsqu'ils ne parlent pas. Pour l'interprétation sur Zoom, ils ont le choix, au bas de l'écran, entre le parquet, l'anglais et le français.
    Je vous remercie tous de votre collaboration.
    Conformément à l'article 108(3)i) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mardi 17 septembre, le Comité reprend son étude de la mission, du mandat, de la fonction, de la structure et du financement de la nouvelle organisation-cadre de financement de la recherche annoncée dans le budget de 2024.
    J'ai maintenant le plaisir d'accueillir, de Northwestern Polytechnic, Mme Vanessa Sheane, présidente-directrice générale; de Polytechnics Canada, Mme Sarah Watts-Rynard, directrice générale; et de l'Université du Québec, Christian Agbobli, vice-recteur à la Recherche, à la création et à la diffusion, qui témoigne par vidéoconférence.
    Vous disposerez d'un maximum de cinq minutes pour faire votre déclaration liminaire, après quoi nous passerons aux questions.
    Madame Sheane, je vous invite à faire un exposé liminaire d'un maximum de cinq minutes.
    Bonjour. C'est un honneur de comparaître pour discuter de l'organisation-cadre.
    En une ère marquée par des progrès rapides et des défis sans précédent, le rôle de la recherche appliquée qui se fait dans les établissements polytechniques n'a jamais été aussi vital. La Northwestern Polytechnic, le plus grand établissement d'enseignement postsecondaire du Nord de l'Alberta, reconnaît l'importance et la valeur de la recherche appliquée. Elle travaille directement avec les PME pour relever des défis concrets en faisant appel à la recherche appliquée. Lorsque les industries et les collectivités collaborent avec les écoles polytechniques, elles produisent des résultats concrets qui ont un grand impact. Les partenariats dont je parle aujourd'hui mettent à profit les compétences et les ressources du milieu universitaire et de l'industrie, ce qui permet d'élaborer des solutions pratiques susceptibles d'être rapidement mises en œuvre dans la collectivité, sur le marché et ailleurs.
    La recherche appliquée joue un rôle essentiel à l'égard des défis uniques auxquels font face les collectivités rurales. En mettant l'accent sur des solutions pratiques et locales pour les industries, elle contribue à améliorer la qualité de vie, à favoriser le développement économique et à améliorer l'accès aux services essentiels.
    Dans le Nord de l'Alberta, nos principaux partenaires industriels viennent des secteurs de l'énergie, de l'agriculture, de l'exploitation forestière et des soins de santé. Dans le domaine des innovations agricoles, la recherche appliquée aide à développer des pratiques agricoles durables, à améliorer le rendement des cultures et à intégrer la technologie pour soutenir les agriculteurs locaux. Elle favorise le développement économique en explorant des stratégies de diversification des économies locales, en soutenant les petites entreprises et en créant des possibilités d'emploi adaptées aux forces de la collectivité.
    À l'heure actuelle, sans l'organisation-cadre, l'écosystème national de la recherche est structuré autour des disciplines universitaires que sont les sciences humaines, les sciences naturelles et le génie, et les sciences de la santé. Les rôles et les fonctions des trois entités sont de promouvoir et d'aider la recherche postsecondaire dans ces domaines.
    Le Comité a déjà appris que seulement 2,9 % du financement actuel de la recherche est accordé aux collèges et aux écoles polytechniques. De plus, la majorité des investissements dans la recherche appliquée se font dans des établissements situés dans les grands centres urbains. Cette négligence pose problème, car il n'est pas tenu compte de la valeur et de la force des collaborations qui ont lieu en dehors des grandes villes et au cœur de certaines de nos industries les plus lucratives. Cela signifie également qu'une perspective vitale a été exclue de l'écosystème national de la recherche.
    Dans cette optique, les éléments manquants sont la représentativité, la transdisciplinarité et l'égalité. C'est là que l'organisation-cadre peut jouer un rôle.
    Le mandat de l'organisation-cadre doit être de soutenir la recherche axée sur la mission qui aide à relever les défis sociétaux urgents, et la propriété intellectuelle revient aux Canadiens, et non au chercheur ou à l'établissement d'enseignement postsecondaire en particulier. Il s'agit de recherches financées par l'État au bénéfice de tous les Canadiens.
    Le rôle de l'organisation-cadre devrait être double. D'abord, il devrait être axé sur la recherche transdisciplinaire sur les enjeux complexes qui mobilisent les connaissances du milieu universitaire, les expériences de ceux qui relèvent les défis et les avantages espérés pour les Canadiens. Deuxièmement, ce rôle devrait être axé sur l'intégration de l'écosystème canadien de l'innovation, où tous les établissements postsecondaires collaborent et contribuent à l'entreprise de recherche.
    La structure de l'organisation-cadre doit non seulement être représentative de tous les établissements postsecondaires, y compris les écoles polytechniques, les collèges et les cégeps, mais aussi inclure de façon délibérée les chercheurs, les industries et les collectivités rurales et nordiques.
    Le financement de l'organisation-cadre devrait provenir d'une nouvelle enveloppe. Un investissement ciblé et stable permettra à la recherche appliquée de prospérer.
    En terminant, je voudrais communiquer au Comité de l'information sur les centres d'accès à la technologie, les CAT, comme exemple de la façon dont l'approche de l'organisation-cadre peut appuyer la recherche axée sur la mission à plus grande échelle dans l'ensemble de notre pays. Le CAT est une installation de recherche appliquée et d'innovation de pointe. Il permet aux entreprises d'avoir accès à une technologie de pointe, à de l'équipement et à une équipe multidisciplinaire d'experts qui les aideront à transformer des idées novatrices en produits commercialisables grâce au développement de prototypes, à la mise à l'échelle du processus et à la résolution de problèmes d'entreprise précis.
    Le CAT de Northwestern Polytechnic, le Centre national de diagnostic des abeilles, est un chef de file dans la prestation de services de diagnostic complets et dans les techniques de test de pointe pour l'industrie apicole, avec des processus et des pratiques harmonisés avec ceux des laboratoires accrédités de l'Union européenne et des États-Unis. Il travaille à faire progresser les tests de dépistage du miel frauduleux afin de protéger la réputation du miel canadien à l'échelle mondiale.
    Les autres CAT à l'échelle du Canada soutiennent et servent les PME et les collectivités de façon similaire par l'innovation, la technologie, la commercialisation et l'employabilité. J'encourage l'organisation-cadre à tirer parti de son mandat et de son rôle d'une manière qui non seulement mettra à profit le succès de ces CAT, mais amplifiera aussi les forces de notre apprentissage collectif en tant que milieu de recherche collaborative.
    Merci beaucoup. J'attends vos questions.
(1615)
    Merci beaucoup, madame Sheane.
    Nous passons maintenant à Mme Watts-Rynard.
    Vous avez la parole pour un exposé liminaire de cinq minutes.
    Je suis ravie de comparaître de nouveau devant le Comité pour participer à son étude de la nouvelle organisation-cadre de recherche.
    Je n'étonnerai personne en disant que le Canada est aux prises avec des problèmes d'innovation et de productivité. Bien que nous investissions beaucoup dans la recherche, il arrive souvent que notre pays ne parvienne pas à traduire ces résultats en retombées aux plans économique et social. La nature des dépenses en R‑D ne contribue guère à trouver des solutions aux défis pragmatiques de notre pays.
    Je crois que l'organisation-cadre de financement de la recherche a le potentiel de combler cette lacune. Il est possible de mieux cartographier et exploiter le riche écosystème de recherche du Canada, en abordant mieux des sujets d'intérêt national comme le logement, les soins aux aînés et les changements climatiques. Par exemple, la recherche axée sur la découverte dans le domaine de l'intelligence artificielle exige des parcours de mise en œuvre pour les grandes entreprises et organisations partout au Canada. Je constate que cela se fait discrètement et avec de modestes investissements dans les écoles polytechniques du Canada, dans des domaines allant des opérations minières à la lutte contre les feux de forêt.
    C'est pourquoi j'ai été déçue par le rapport interorganismes « Ce que nous avons entendu », publié après une très brève consultation menée auprès des milieux de la recherche. À mon avis, le rapport met davantage l'accent sur le maintien du statu quo que sur l'établissement d'un cadre permettant quelque chose de neuf qui ait un certain retentissement.
    Beaucoup de chercheurs attendent toute leur carrière d'obtenir des fonds qui leur permettront de donner libre cours à leurs passions pour les sciences, le génie, les découvertes en santé et les sciences humaines. C'est louable. Pourtant, si la nouvelle organisation de recherche a l'ambition d'être quelque chose de différent ou de plus que ce qui est actuellement financé par les trois organismes, franchement, ce sera une perte de temps et d'argent si cet objectif n'est pas atteint.
    Pour cette raison, je reviens une fois de plus sur la recherche axée sur la commercialisation qui se fait dans les écoles polytechniques du Canada. Au fil des ans, on nous a souvent demandé, au cours de nos rencontres avec les intervenants du gouvernement, de quantifier le rendement sur le capital investi dans la recherche appliquée: emplois créés, marchés d'exportation développés et nouveaux produits lancés. Sans surprise, ces questions sont rarement posées aux chercheurs universitaires.
    En guise de réponse, Polytechnics Canada a récemment publié un rapport sur l'impact économique de la recherche appliquée. Il s'agit d'une étude d'un an qui a été entièrement financée par mon organisation, qui ne reçoit aucun soutien du gouvernement. Le rapport montre que chaque dollar investi dans la recherche appliquée des écoles polytechniques donne un rendement qui se situe entre 8 $ et 18 $.
    L'analyse a révélé que les écoles polytechniques réduisent les risques liés à la R‑D pour les entreprises, ce qui rend l'innovation accessible. L'adoption de nouvelles technologies ou la mise en place de nouveaux systèmes peuvent équivaloir, pour les propriétaires de PME, à jouer l'avenir de la totalité de leur entreprise, mais la recherche appliquée des écoles polytechniques met l'innovation à portée de main.
    Les données des trois dernières années montrent que les écoles polytechniques ont réussi à attirer des fonds de contrepartie pour chaque dollar investi par le gouvernement fédéral. Non seulement les projets permettent de relever les défis définis par un partenaire de l'industrie, mais le partenaire conserve aussi la propriété intellectuelle découlant de la collaboration, ce qui lui permet de commercialiser des produits sans être pris en otage par le partage de la PI.
    Le rapport ne s'arrête pas là. Il propose plus de 30 études de cas de partenariats de recherche pragmatiques et féconds qui ont favorisé la croissance des entreprises et la création d'emplois. Les projets illustrent la nature interdisciplinaire de la recherche axée sur les défis, en tirant parti de l'expertise de divers secteurs de l'établissement et d'ailleurs. Outre les points de vue des partenaires, nous entendons la réaction de certains des 28 000 étudiants des écoles polytechniques qui participent à des collaborations en recherche appliquée chaque année.
    Il s'agit là d'un plan directeur vraiment utile pour l'organisation-cadre de financement de la recherche, les collaborations axées sur les défis qui fonctionnent à la vitesse du monde des affaires avec des partenaires qui cherchent à relever de vrais défis et à commercialiser les résultats, une orientation qui met l'accent sur l'impact et les résultats dans les domaines importants pour les Canadiens, et les personnes intelligentes qui font de bons choix dans l'intérêt de la prospérité future du Canada.
(1620)
    Merci beaucoup.
    Merci, madame Watts-Rynard.
    Nous passons maintenant à Christian Agbobli.
    Vous avez la parole pour votre exposé liminaire de cinq minutes.

[Français]

    Mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de m'avoir invité à participer à cette consultation, au nom de l'Université du Québec.
    Je m'appelle Christian Agbobli, et je suis vice-recteur à la recherche, à la création et à la diffusion de l'Université du Québec à Montréal, un des 10 établissements qui constituent le réseau de l'Université du Québec. Cela me fait plaisir de vous faire part des commentaires de notre réseau.
    Mes remarques s'articulent aujourd'hui autour de quatre recommandations quant à la gouvernance, au financement et à la mission de la nouvelle organisation-cadre annoncée dans le plus récent budget. Ces recommandations nous apparaissent comme autant de conditions au succès de cette réforme.
    Pour que la création de l'organisation-cadre ait un sens, il faut qu'elle soit un vecteur d'amélioration du système de soutien canadien de la recherche sur quatre points.
    Premièrement, elle doit simplifier et harmoniser le système.
    Deuxièmement, elle doit le rendre plus représentatif de l'écosystème de la recherche.
    Troisièmement, elle doit lui imprimer des orientations stratégiques.
    Quatrièmement, elle doit soutenir et favoriser le soutien à la recherche francophone.
    En premier lieu, il importe que la création de ce nouvel organisme au sein du système canadien de financement de la recherche contribue à le simplifier. Dans le respect des particularismes sectoriels, la nouvelle organisation-cadre devrait permettre une harmonisation des programmes de financement et une simplification des procédures administratives qui la balisent. Pour accroître la cohérence et l'agilité du système canadien de financement de la recherche, l'organisation-cadre devrait notamment contribuer à l'adoption d'outils uniformes, intégrés et conviviaux en matière de gestion de la formation sur la recherche.
    Deuxièmement, pour favoriser une prise de décision éclairée par la diversité des contextes de recherche, les instances de gouvernance, les mécanismes de consultation et les comités d'évaluation chapeautés par l'organisation-cadre devraient refléter la diversité des établissements universitaires canadiens. À cette fin, le mandat de la nouvelle organisation-cadre doit explicitement consister à soutenir le développement de la recherche dans l'ensemble des régions et des villes universitaires au Canada.
    La création de cette nouvelle organisation constitue une occasion unique de rétablir un équilibre quant à la distribution des fonds de recherche. Cela passe notamment par une mobilisation régulière et en temps opportun des groupes de travail représentatifs de la communauté de la recherche au pays.
    Comme la gouvernance est aussi une question de moyens, on nous permettra d'insister, si vous le voulez bien, sur l'importance de doter le nouvel organisme-cadre de ressources proportionnelles à ses ambitions. À cet égard, il faut, si vous me permettez l'expression, « prendre garde de ne pas déshabiller Pierre pour habiller Paul ». Les budgets de fonctionnement des programmes des organismes subventionnaires actuels doivent impérativement être maintenus dans leur intégralité pour que leur investissement annoncé dans le budget de 2024 se concrétise.
    Troisièmement, la création de la nouvelle organisation-cadre devrait permettre de mieux planifier le développement de la recherche. En sa qualité de pierre angulaire du système canadien de financement de la recherche, l'organisation-cadre devrait notamment avoir pour priorité de piloter l'élaboration de stratégies nationales en matière de recherche et d'innovation. Élaborée à l'abri de l'influence politique, cette stratégie devrait tenir compte de la géographie canadienne de ce pôle d'excellence, tout comme des valeurs cardinales du système canadien de soutien à la recherche.
    On peut citer cinq de ces valeurs qui nous semblent primordiales: l'accessibilité au financement; l'indépendance du processus d'évaluation; l'importance de la recherche libre et fondamentale; la collaboration entre chercheurs; et la diversité des objets, des méthodes, des approches et des contextes de réalisation de la recherche.
    En outre, la mise en œuvre et le suivi de cette stratégie devraient s'appuyer sur l'implantation d'outils efficaces pour faciliter la collecte de données probantes sur la performance du Canada et des établissements en matière de recherche et d'innovation.
    En dernier lieu, la création d'un nouvel organisme de soutien à la recherche au Canada doit contribuer à mieux soutenir la recherche en français. Cette question fait l'objet de nombreuses préoccupations au Québec et ailleurs dans la francophonie canadienne. À cet égard, l'Université du Québec salue la création récente du groupe consultatif externe sur la création et la diffusion de l'information scientifique en français par le gouvernement. Cette initiative constitue un rayon d'espoir pour la vitalité de la science en français.
(1625)
    Cela dit, sans attendre les conclusions de ce comité, l'organisation-cadre peut jouer un rôle en matière de valorisation du français dans l'écosystème de la recherche.
    Bien entendu, comme nous l'avons souvent répété, il importe de veiller à ce que les demandes de financement soumises en français soient traitées de manière équitable au sein du système fédéral de soutien à la recherche. Cependant, au-delà de cette mesure d'équité, l'organisation-cadre devra faire preuve d'exemplarité eu égard à la Loi sur les langues officielles en s'assurant que l'ensemble des services qu'elle rend à la population canadienne est de qualité égale dans les deux langues officielles du pays.
    Je vous remercie de votre attention.
(1630)

[Traduction]

    Merci, monsieur Agbobli.
    Nous allons maintenant passer aux questions des députés. N'oubliez pas de préciser à qui vos questions s'adressent.
    Le premier intervenant sera M. Tochor. Six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins.
    Dans les témoignages, notre collègue du Québec a parlé de l'importance des choix stratégiques dans l'utilisation des fonds. Pour nos amis de l'Alberta et les associations de collèges, il est important de tenir compte de la recherche appliquée et de s'interroger sur les recherches qu'on peut faire en fonction des questions, préoccupations ou problèmes courants des Canadiens ordinaires. C'est très encourageant, au moment où nous poursuivons notre étude de l'organisation-cadre et des moyens de canaliser les fonds de recherche vers, espérons‑le, les domaines les plus critiques pour la mission ou l'étude des questions que les Canadiens se posent.
    Voici ce qui se passe depuis un certain temps. Je vais énumérer quelques études, après quoi pourront intervenir ceux qui ont des questions ou des réflexions à leur sujet. Sinon, je voudrais qu'à la fin de la période de questions, on me donne des exemples de recherches utiles.
    À Carleton, nous, les contribuables, avons payé 50 000 $ pour une étude intitulée Playing for Pleasure: The Affective Experience of Sexual and Erotic Video Games. Voilà ce qui se fait à l'Université Carleton. Cela a coûté 50 000 $. Nous avons donné de l'argent pour cette étude.
    Quelqu'un veut‑il réagir?
    Une autre étude, à l'Université de Guelph cette fois, s'intitule Re‑visioning yoga and yoga bodies: Expanding modes of embodiment with non-normative bodies. C'est à l'Université de Guelph. Les contribuables canadiens ont dépensé 90 000 $ pour renouveler la perception du yoga et du corps de ceux qui le pratiquent. C'est une région du pays — l'information est tirée du GuelphToday — où les résidants s'inquiètent de la possibilité que des campements s'installent dans le Preservation Park. C'était le 17 octobre dernier.
    La situation du logement est catastrophique, là‑bas. Certains installent des tentes à Guelph. Pendant ce temps, le gouvernement du Canada dépense l'argent des contribuables à hauteur de 90 000 $ pour renouveler la façon de voir le yoga et le corps de ceux qui le pratiquent.
    L'un des témoins veut‑il essayer de défendre cette idée? Sinon, je tirerai mes conclusions.
    J'ai deux autres études à citer, puis nous passerons à d'autres questions.
    À l'Université de l'Alberta, pour 17 500 $, nous avons eu droit à une étude intitulée An analysis of representations of women in Bioware games and fan reactions through time. C'est la meilleure source de financement pour la recherche à l'Université de l'Alberta. Pour 17 500 $, nous avons eu droit à une analyse des représentations de la femme dans les jeux de Bioware et des réactions des amateurs au fil du temps.
    Quel est le lien avec ce qui se passe au Canada?
    Plus tôt ce mois‑ci, à l'émission CTV News, un reportage s'intitulait: « Bullet found in wall of Edmonton school after Halloween shooting: police ». Les taux de criminalité sont montés en flèche partout au Canada. La criminalité est débridée, et nous consacrons 17 500 $ à ce genre de recherche.
    Ce n'est pas tout. Notre nouveau témoin du Québec voudra peut-être commenter cette étude‑ci. À l'Université Concordia, au Québec, pour 46 227 $, nous avons eu droit à une étude intitulée Class and Video Games. Voilà à quoi s'intéressent les chercheurs à Montréal. Entretemps, la Gazette, le plus grand journal de Montréal, a publié un article le 27 octobre, intitulé « Montreal unhoused encampments emblematic of issue across Canada ». C'est vrai. Le problème du logement est omniprésent au Canada.
    Voilà donc toute une série d'études, que les contribuables ont payées, qui ont très peu à voir — si nous revenons au témoignage de vous trois, qui voulez qu'on fasse des choix stratégiques — avec la recherche appliquée qui répond aux questions les plus cruciales que se posent les Canadiens. Voilà les études que nous finançons.
    J'espère que les témoins nous diront que ce n'est pas ainsi que les choses se passent et qu'il y a, je l'espère, de très bonnes recherches en cours dans leurs établissements respectifs et dans ceux des circonscriptions des députés, car je pense que les contribuables en ont plein le dos.
    J'ai deux questions à vous poser à ce sujet.
(1635)
    Si vos étudiants recevaient des fonds semblables, quel genre de projets vous attendriez-vous à ce qu'ils réalisent? Si un prix de 50 000 $ vous était remis, quel serait un exemple typique de la recherche qui pourrait être réalisée à l'heure actuelle dans une école polytechnique? J'espère que cela répondra à certaines des questions des Canadiens.
    Je peux répondre.
    À Northwestern Polytechnic, il y a deux études dont je vais parler.
    La première est un projet COIL, c'est‑à‑dire un apprentissage international collaboratif en ligne. Le projet est destiné au secteur des soins de santé et à ceux qui étudient dans ce domaine. Nous examinons particulièrement la question du point de vue de l'accès aux soins de santé en milieu rural. Le projet est axé sur la collaboration, en ligne et à l'échelle internationale, et le développement de simulations à l'échelle mondiale vise à améliorer l'apprentissage et à offrir des possibilités d'apprentissage là où ces travailleurs de la santé sont à l'œuvre. Il s'agit de formation en simulation, d'échographie et de sensibilisation à la culture autochtone.
    Les travailleurs de la santé des régions rurales n'ont pas besoin d'aller ailleurs pour apprendre. Ils peuvent le faire là où ils pratiquent. Nos étudiants ont aussi accès à cette formation. Grâce à leur programme d'études, ils peuvent apprendre dans l'action et obtenir leur diplôme avec ces compétences déjà acquises.
    Merci de votre témoignage. Je vous remercie de renouveler l'espoir que certaines recherches en cours peuvent inspirer. J'espère qu'elles aideront les Canadiens.
    Nous passons maintenant à M. Kelloway. Six minutes, s'il vous plaît.
    Je remercie les témoins de leur présence. Je l'apprécie vraiment.
    Je vais essayer de faire un tour complet avec mes questions.
    Je m'adresse d'abord à Mme Watts-Rynard.
    Votre point de vue me plaît particulièrement: la recherche appliquée peut être la boîte à outils pour améliorer l'économie de notre pays. C'est vraiment important.
    Je viens moi aussi d'une école polytechnique. J'ai travaillé au Nova Scotia Community College, le NSCC, pendant 11 ans. J'ai travaillé à l'Université du Cap-Breton, qui s'occupe de nombreux aspects de la recherche appliquée.
    Je vois où vous voulez en venir. Dans votre exposé liminaire, vous avez parlé de recommandations visant à améliorer notre situation. Lorsque j'étais dans le monde de l'enseignement postsecondaire, en particulier au NSCC, il y avait souvent, à mon avis, des stéréotypes au sujet de la recherche appliquée et de son importance. Lorsque vous parlez d'un projet-cadre, avez-vous peur des stéréotypes au sujet de la recherche appliquée? Je suis tout à fait d'accord avec chacun des témoins pour dire que la recherche appliquée est un joyau, mais nous devons y investir et avoir peut-être des critères légèrement différents. Pourriez-vous nous en parler et nous expliquer certaines des recommandations.
    J'aurai ensuite une ou deux autres questions pour les autres témoins.
    Merci beaucoup.
    À l'heure actuelle, moins de 3 % de l'investissement fédéral en recherche est consacré à la recherche appliquée. Pour revenir à ce que vous disiez, l'investissement doit être là pour que nous puissions vraiment faire avancer les choses.
    Lorsque je regarde les exemples du genre de recherche qui se fait sur nos campus, je vois des projets interdisciplinaires. Je vois le souci de faire des affaires. Je vois qu'on s'intéresse aux grands défis du Canada et à la façon de progresser peu à peu vers la solution.
    Voici un exemple de Saskatchewan Polytechnic. On y aide Titan, une entreprise de produits d'énergie propre, à fabriquer des plastiques à partir de déchets des villes. La production de ces plastiques à partir du bois réduit les émissions de GES de plus de 90 %. Je ne vois pas en quoi cela pourrait ne pas être bon pour l'entreprise ou pour le Canada.
    C'est le genre de recherche qui se fait sur le terrain. Ce n'est pas un travail isolé. Il ne suffit pas d'un seul chercheur dans une seule discipline. Cette recherche mobilise des étudiants. Elle mobilise des entreprises et des formateurs. Voilà ce que je constate lorsque je regarde le secteur collégial et il faudrait que ce genre de démarche soit plus répandu.
    Madame Sheane, ce qui m'a particulièrement intéressé dans votre exposé liminaire, c'est lorsque vous avez parlé des collectivités rurales. On trouve des écoles polytechniques dans les grandes villes, mais beaucoup de ce que vous appelez des écoles polytechniques, je les appellerais chez moi des collèges communautaires. En Nouvelle-Écosse, par exemple, il y a 13 campus, et ils sont répartis à l'extérieur de Halifax. Il y a quelques campus là‑bas, mais il s'y fait vraiment des innovations.
    À propos de l'organisation-cadre, comment pouvons-nous nous assurer que les écoles polytechniques peuvent accéder aux fonds, selon votre point de vue? On en revient aux stéréotypes voulant que, dans les collectivités rurales, il y ait des industries de base — dans ma région, la pêche et l'agriculture sont très importantes —, mais il y a aussi tellement de choses à l'intérieur et à l'extérieur de ces secteurs, et le reste du Canada ne le sait pas.
(1640)
    Pourriez-vous nous en parler?
    Je vais vous donner l'exemple du Centre national de diagnostic des abeilles. Quand on pense au Nord-Ouest de l'Alberta, ce ne sont pas les abeilles qui viennent à l'esprit. On songe peut-être à l'agriculture.
    Nous avons travaillé avec l'industrie et avons constaté que la santé des abeilles, le diagnostic des problèmes chez les abeilles, correspond à un besoin du secteur agricole et des agriculteurs de la région. C'est un exemple concret de la façon dont nous avons travaillé avec l'industrie pour cerner ses problèmes. Nous avons fait de la recherche et nous avons aidé à trouver des solutions qui font augmenter le rendement des cultures.
    Pour ce qui est de la représentativité et de votre question sur la façon de s'y prendre, l'organisation-cadre doit obéir à des intentions très nettes de sorte que soient représentés tous les établissements d'études postsecondaires, l'industrie et les collectivités. Il faut transcender les distinctions entre zones rurales et urbaines, provinces et établissements d'études postsecondaires. L'organisation ne doit pas être centrée sur les universités, mais faire place aussi aux collèges polytechniques et aux cégeps.
    Merci.
    Madame Watts-Rynard et madame Sheane, quelles sont vos trois recommandations? Lorsque vous ouvrirez le rapport, quels sont les trois que vous voulez toutes les deux voir?
    Je dirais que la personne qui dirigera l'organisation-cadre doit vraiment comprendre la recherche appliquée.
    Je souhaite vraiment que l'organisation-cadre soit multidisciplinaire et axée sur la mission. Il faut vraiment mettre l'accent là‑dessus, et cela signifie quelque chose de différent de ce qui existe actuellement au sein des trois conseils.
    Nous allons passer au témoin qui est à l'écran, s'il vous plaît.

[Français]

    Je vous dirais que, l'important, c'est vraiment d'avoir la préoccupation de penser à contribuer à l'avancement des connaissances.
    L'organisation-cadre doit jouer ce rôle majeur pour reconnaître aussi la qualité et la rigueur du processus canadien d'évaluation, qui sont reconnues mondialement.

[Traduction]

    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Blanchette-Joncas pour six minutes.

[Français]

    Je salue les témoins qui sont avec nous pour cette première heure d'étude.
    Mes premières questions s'adresseront à M. Christian Agbobli, du réseau de l'Université du Québec.
    Monsieur Agbobli, bonjour.
    J'aimerais que vous nous parliez des quatre recommandations que vous avez mentionnées, soit les quatre axes importants. J'aimerais que vous nous parliez notamment de la deuxième recommandation, qui porte sur la représentativité.
    Pouvez-vous nous expliquer clairement quelles sont vos attentes en matière de représentativité pour les 10 établissements qui sont membres de votre réseau?
    Madame la présidente, je remercie le député de sa question.
    La représentativité doit être assurée à différents égards. D'abord, il doit y avoir un équilibre entre les régions et les villes, parce qu'il s'agit de répondre, pour l'organisation-cadre, à l'ensemble de la communauté de la recherche au pays.
    En matière de représentativité, j'ai aussi parlé de la question de la langue française. Il faut s'assurer que le français a une place importante au sein de l'organisation-cadre de manière à ce que l'équilibre de la recherche soit reconnu.
    Toujours en matière d'équilibre, il faut parler du financement de la recherche. C'est également une question majeure. On sait que, en 2021, les établissements membres de l'association U15 accaparaient 79 % de l'ensemble du financement de la recherche au Canada, alors qu'ils comptaient 52 % du corps professoral et 59 % de la population étudiante aux cycles supérieurs. Il est important d'assurer cet équilibre.
(1645)
    Monsieur Agbobli, revenons sur la représentativité.
    Vous savez que le gouvernement a confié un mandat à un comité consultatif sur le système fédéral de soutien à la recherche. Ce comité comprenait seulement des universités membres du réseau universitaire qui étaient de grande taille. Des universités comme celles de votre réseau, qui sont de petite ou de moyenne taille, étaient complètement exclues, voire occultées.
    Trouvez-vous que le fait de mettre de côté des universités qui ont différents contextes de recherche est une bonne façon de faire pour s'assurer d'avoir une réelle représentativité de l'écosystème scientifique?
    Madame la présidente, je remercie le député de sa question.
    Le réseau de l'Université du Québec souhaite jouer un rôle majeur, tout comme les autres universités francophones canadiennes, pour pouvoir être mieux représenté au sein de l'écosystème de la recherche au pays.
    Nous saluons bien sûr la contribution de ce comité ou la nomination de ce comité consultatif, mais il faut aller beaucoup plus loin pour respecter davantage la Loi sur les langues officielles.
    Comme réseau, nous militons pour que la qualité de la recherche qui est menée en français soit davantage reconnue, valorisée et financée. L'organisation-cadre doit jouer ce rôle majeur en permettant aux universités des régions d'être autour de la table.
    Vous avez parlé des 10 universités du réseau de l'Université du Québec. Autant l'Université du Québec à Rimouski que l'Université du Québec en Abitibi‑Témiscamingue et l'Université du Québec à Chicoutimi doivent s'assurer d'être autour de la table, tout comme l'Université du Québec à Montréal.
    Monsieur Agbobli, vous avez mentionné que le gouvernement fédéral avait créé, le 22 octobre dernier, un groupe consultatif externe sur la création et la diffusion d'information scientifique en français.
    Cela dit, le réseau universitaire du Québec ne fait pas partie de ce groupe. Je le répète: le plus grand réseau francophone universitaire du Canada est exclu de ce comité.
    Trouvez-vous qu'il est logique d'exclure ce réseau, alors qu'il est le plus grand réseau universitaire francophone dans l'ensemble du pays?
    Le réseau de l'Université du Québec est préoccupé par le déclin du français au Canada. Dans le domaine scientifique, ce déclin est effectivement prononcé. Nous espérons que ce comité puisse nous rencontrer et discuter avec nous, pour que nos idées puissent être plus présentes et pour que nous puissions mieux nous positionner et mieux nous faire connaître.
    Nous avons salué la création de ce comité, et nous espérons que nous allons pouvoir faire entendre notre voix par l'entremise des représentants qui y sont présents en ce moment. La recherche en français est importante, et, je le répète, le réseau de l'Université du Québec est, comme vous l'avez dit, le plus grand réseau universitaire au pays, d'est en ouest.
    Il y a 100 000 étudiants qui fréquentent notre réseau, et le nombre de professeurs et de chercheurs dépasse de loin celui de toutes les universités du pays. Nous avons donc un rôle important à jouer.
    Monsieur Agbobli, concrètement, souhaiteriez-vous faire partie du comité d'experts?
    Personnellement, je ne peux pas croire que, parmi les 10 établissements qui font partie du plus grand réseau universitaire francophone du pays, personne n'ait les connaissances ni le savoir requis pour faire partie de ce nouveau comité d'experts.
    Souhaitez-vous lancer au gouvernement le message selon lequel vous aimeriez faire partie de ce comité d'experts?
    Nous aimerions être entendus par le comité d'experts afin que nous puissions faire valoir notre position et faire valoir ce que l'important réseau de l'Université du Québec peut faire.
    J'espère avoir répondu de manière très claire à votre question.
    C'est très clair, monsieur Agbobli.
    Vous avez parlé de la valorisation de la science en français.
    Concrètement, quelles sont vos attentes quant à l'organisation-cadre sur le plan de la promotion et de la valorisation de la recherche en français au Québec et partout au Canada?
    Nous avons différentes attentes. D'abord, il faudrait apporter un soutien aux revues savantes en français. Le savoir en français passe par ces revues, dans ce domaine.
    Dans le domaine des sciences naturelles et du génie ainsi que dans celui de la santé, il n'existe quasiment aucune option pour publier des résultats de recherche en français, de sorte que 90 % des publications dans ces champs de recherche sont en anglais.
    Il faut donc que l'organisation-cadre appuie...
(1650)

[Traduction]

    Excusez-moi. Vous avez dépassé votre temps de parole. Monsieur Blanchette-Joncas, peut-être pourriez-vous poursuivre au prochain tour pour que le témoin puisse terminer. Ce serait formidable.
    Madame Blaney, vous avez maintenant la parole pour six minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie tous les témoins de leur témoignage.
    Madame Sheane et madame Watts-Rynard, j'ai beaucoup apprécié votre témoignage de tout à l'heure. Je représente également une région rurale et éloignée. Je sais que les solutions pragmatiques sont souvent essentielles, car lorsqu'on a moins de ressources, il faut collaborer avec beaucoup d'intelligence.
    Ma première question porte sur votre réponse à la consultation sur l'organisation-cadre de financement de la recherche. Vous présentez l'initiative des universités européennes comme un exemple de collaboration axée sur les défis ou l'expertise dans un réseau de recherche. Qu'est‑ce qui est particulièrement important à ce sujet, et quelles leçons le Canada doit‑il tirer?
    Ce que nous essayons vraiment de faire ressortir, c'est que la recherche interdisciplinaire n'est pas nécessairement dirigée par des chercheurs. Il s'agit d'un sujet d'intérêt national commun et de la capacité de réunir des chercheurs de divers secteurs du milieu universitaire pour étudier la question.
    Dans les universités européennes, on voit s'établir ces liens entre chercheurs qui ne sont pas forcément du même domaine et peuvent aborder un problème sous divers angles et tirer parti de leurs différences. Je remarque ce même réflexe parmi mes membres partout au Canada.
    On veut travailler autour de l'intelligence artificielle, par exemple. L'occasion ne se situe pas au plan théorique. Il faut partir de connaissances que nous avons et les appliquer à des problèmes réels. Cela se ferait de différentes façons dans différents établissements. C'est une occasion de réfléchir à la mise en œuvre. Comment cela se concrétise‑t‑il pour les petites entreprises? Pour le secteur agricole, le secteur minier ou les soins aux aînés, par exemple?
    Il faut constituer des réseaux d'experts pour relever de grands défis plutôt que de se concentrer sur des projets isolés axés sur l'idée d'un seul chercheur.
    Pour avoir vécu longtemps en milieu rural, je sais que les collectivités rurales et éloignées ont souvent un cycle où alternent expansion et ralentissement. Il y a toujours des hauts et des bas. C'est très stressant pour les collectivités, et c'est exaspérant, parce qu'elles gagnent beaucoup d'argent pendant les périodes de prospérité, de sorte qu'elles subventionnent d'autres régions du Canada, et lorsque leur économie plonge, il arrive souvent que les ressources ne soient pas là pour les secourir.
    Dans le travail que vous faites en matière de développement économique et de collaboration avec différentes industries pour trouver des solutions logiques dans la région, quel genre d'investissement ou de soutien serait le plus utile pour parvenir à diversifier l'économie?
    Autre réflexion. Bien des chercheurs m'ont dit qu'au Canada, nous faisons beaucoup de bon travail au début, mais que nous ne savons pas passer à l'étape suivante. Souvent, d'autres pays prennent les résultats de nos recherches, franchissent les étapes suivantes et deviennent ensuite des spécialistes capables de créer des occasions de faire de l'argent chez eux, puis nous achetons des produits dont la création a commencé chez nous.
    Je me demande si cela a du sens, et si vous entrevoyez des possibilités de financement qui permettraient de passer à l'étape suivante.
    Chose certaine, des milliards de dollars sont dépensés en recherche. Je ne nie pas l'importance de ce travail. Je dis plutôt que nous n'avons pas vraiment consacré beaucoup de temps et de ressources à l'exploitation de ces connaissances, à l'outillage des entreprises capables d'utiliser ces connaissances, de passer à la commercialisation pour fournir des produits, des services et du soutien partout au Canada.
    Je souhaite assurément que nous passions de moins de 3 % à au moins 10 % des fonds consacrés à la recherche. Ma recommandation au sujet de l'organisation-cadre de financement de la recherche n'est pas de copier ce que les trois conseils font déjà, mais d'essayer quelque chose de nouveau et de différent. Pour ce faire, il faudra faire appel à des acteurs différents, démonter le système tel qu'il fonctionne actuellement et réfléchir aux moyens de mobiliser toutes les forces de la recherche dirigée par des chercheurs pour la rendre vraiment pragmatique.
    C'est là que les écoles polytechniques et les collèges sont extrêmement forts, et nous avons vraiment sous-estimé leur rôle.
(1655)
    Quelque chose à ajouter, madame Sheane?
    J'ajouterai que, en tant qu'établissement postsecondaire financé par l'État, il ne nous appartient pas de nous prononcer sur le choix des sujets de recherche. Nous attendons de l'industrie qu'elle nous présente des défis à relever. Nous apportons notre expertise en matière d'équipement, la technologie, la rigueur académique et les méthodes d'évaluation, puis nous traduisons les résultats dans la pratique. C'est vraiment là que se situe la force des établissements polytechniques. Nous n'établissons pas le programme de recherche, mais nous utilisons nos compétences pour aider l'industrie et les collectivités à répondre à leurs besoins, et nous pouvons le faire au moyen d'une recherche rigoureuse.
    Merci. Je comprends.
    Je vais céder mes 10 dernières secondes.
    Merci.
    D'accord. Nous allons maintenant passer au deuxième tour.
    M. Kitchen d'abord. Cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à vous trois de vos exposés.
    Nous discutons de l'organisation-cadre que nous sommes en train de mettre en place pour qu'elle s'occupe des trois conseils, les trois conseils fédéraux de financement de la recherche. Notre difficulté, c'est l'impression que nous ont donnée les témoins entendus que la nouvelle organisation aura beaucoup plus d'argent à distribuer, car les chercheurs veulent avoir de l'argent. C'est ce dont ils ont besoin. Ayant moi-même été chercheur par le passé, je peux dire qu'ils en ont besoin pour survivre.
    C'est formidable d'entendre ce que vous avez tous à dire, en particulier à propos des écoles polytechniques, par exemple, partout au Canada. Elles font un travail formidable avec les entreprises et les collectivités recueillent les retombées d'une recherche qui répond aux besoins sur le terrain.
    Au Southeast College, chez moi, Tania Andrist, directrice de l'éducation pour l'innovation et la recherche appliquée, s'intéresse à des sujets comme le captage du carbone et à d'autres excellents projets de recherche. Cependant, comme mon collègue nous l'a expliqué, ce qui nous préoccupe, c'est qu'une foule de projets de recherche ne portent pas sur des thèmes importants comme celui‑là.
    Le défi consiste à s'assurer que les collèges obtiennent des fonds. Vous avez dit qu'ils reçoivent seulement 2,9 % des fonds. Le travail devrait être fait par les trois conseils, qui devraient être responsables de l'utilisation des fonds. Plutôt que de créer une toute nouvelle bureaucratie, faisons en sorte que les trois conseils se chargent du travail que nous proposons de confier à l'organisation-cadre.
    Madame Watts-Rynard, qu'en pensez-vous?
    Le travail des membres des trois conseils gravite autour d'une discipline. C'est dans ce domaine qu'ils financent des chercheurs. Il n'y a rien de mal à cela, pourvu que quelque chose ressorte de cette recherche, que quelqu'un, quelque part, trouve une utilisation aux résultats de la recherche, une utilisation pragmatique.
    Je dirais que c'est ce que font déjà les écoles polytechniques et les collèges. S'il faut créer cette bureaucratie supplémentaire, comme vous le dites, je souhaite qu'elle soit chargée de voir comment nous pouvons rendre pragmatique la recherche qui émane des trois conseils et comment nous pouvons appliquer ces connaissances à des problèmes réels partout au Canada. Je dirais que si elle ne le fait pas, c'est vraiment une perte de temps et d'argent.
    Je comprends. Je considère que c'est une perte de temps, car c'est bien ce qui va se passer dans cette bureaucratie. Si je vous comprends bien, il faudrait peut-être prendre cet argent et créer une quatrième organisation des trois conseils qui s'occuperait des établissements qui font de la recherche et qui travaillent sur le terrain avec les entreprises locales. Est‑ce exact?
    Non. En fait, je souhaiterais qu'une organisation-cadre donne une orientation plus précise aux trois conseils, leur disant: « Voici les grands défis que nous avons au Canada, et nous voudrions que le travail qui se fait — avec les fonds des trois conseils — porte sur la recherche interdisciplinaire liée aux grands défis du Canada. »
    En fait, je ne pense pas que ce soit une très brillante idée de dépenser encore pour créer un autre organisme qui ne sera qu'une nouvelle bureaucratie. En fait, je préférerais qu'on fasse un véritable effort pour parvenir à une plus grande efficacité.
(1700)
    Ce que vous me dites, c'est que le gouvernement doit faire son travail et dire aux membres des trois conseils de faire le leur.
    C'est bien ce que je dis.
    Madame Sheane, c'est formidable d'entendre ce que vous avez à dire du pétrole et de l'agriculture. J'ai parlé du Southeast College, chez moi, en Saskatchewan. Comment pouvons-nous aller plus loin? Comment pouvons-nous dire aux trois conseils qu'il faudrait consacrer des fonds à ces recherches? Pourquoi cela ne fait-il pas partie de la diversité et de l'équité?
    Ma réponse simple et directe est que toutes les possibilités de financement doivent être offertes à tous les établissements postsecondaires. Beaucoup de collèges et d'écoles polytechniques ne peuvent même pas demander des fonds justement parce que ce sont des collèges et des écoles polytechniques. Il faut élargir les perspectives et multiplier les possibilités de financement dont tous les établissements postsecondaires ont besoin.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Chen.
    Vous avez la parole. Cinq minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Madame Watts-Rynard, vous avez mentionné le rapport de votre organisation sur les retombées économiques de la recherche appliquée qui se fait dans les écoles polytechniques du Canada. Vous nous avez donné un chiffre très intéressant, et je voudrais y revenir. Vous avez dit qu'un dollar investi dans la recherche appliquée rapporte entre 8 $ et 18 $, ce qui, à mon avis, est énorme. Il faut que cela se sache.
    Je soupçonne que, lorsqu'on mesure le rendement de l'investissement, il est plus facile de mesurer et de prendre en compte les retombées économiques, car il faut arriver à un montant en dollars. Y a‑t‑il d'autres retombées qui ne sont peut-être pas mesurées, comme les impacts sociaux? Cela voudrait dire qu'il y a d'autres rendements plus importants sur l'investissement qui sont attribuables à la recherche et ne peuvent pas être quantifiés?
    Il y a certainement des retombées non quantifiables. Une partie de notre méthodologie consistait à réfléchir à tout ce qui pouvait être quantifié et à toutes les retombées sociales qui ne pouvaient pas l'être. Évidemment, il y a toutes sortes de recherches en cours. La recherche sur l'impact social, c'est quand on pense à des éléments comme la réduction du bruit ou des émissions de GES. Ces choses‑là ont un impact non seulement sur l'entreprise dont le projet est en cours, mais aussi sur la société. C'est très difficilement quantifiable et c'est pourquoi on propose une fourchette et non un chiffre précis.
    Les économistes qui ont fait ce travail pour nous ont dit que c'est ce qui les amène à avoir l'impression que la limite supérieure est beaucoup plus logique, si on songe à toutes les retombées sociales de la recherche qui sont très difficiles à quantifier en dollars, comme vous l'avez dit.
    Merci.
    Vous avez aussi parlé aujourd'hui de l'adoption de nouvelles technologies pour les PME. Ma circonscription, Scarborough-Nord, est incroyablement diversifiée. Plus de 70 % de la population est née à l'étranger. Comme nous le savons tous, le Canada est un pays fondé sur l'immigration. On vient ici avec l'espoir et le rêve d'avoir une vie meilleure et de créer des possibilités économiques pour les générations futures.
    Les petites entreprises sont le fondement de l'économie canadienne et, dans diverses collectivités, il peut y avoir une barrière linguistique ou il peut arriver qu'on ne comprenne pas tout à fait comment les choses se passent au Canada. Vous avez parlé de certains des grands succès qui peuvent se produire lorsqu'il y a en recherche appliquée une collaboration dont les partenaires sont des PME, et vous êtes à même de mesurer comment le travail qui se fait en recherche appliquée peut se traduire en innovation, en technologie et en adoption par les PME.
    Y a‑t‑il quelque chose à faire pour rejoindre des collectivités plus diversifiées? Comment peut‑on aider les écoles polytechniques à le faire afin que nous puissions stimuler toutes les communautés et nous assurer que l'économie est inclusive et fonctionne pour tout le monde?
(1705)
    C'est une bonne question.
    Le financement actuel permet un ciblage assez étroit. Une entreprise doit venir nous expliquer le défi qu'elle doit relever, le problème à résoudre grâce à une nouvelle technologie. C'est le travail qui se fait. Si nous valorisions cela autant qu'il faut le faire dans l'économie canadienne, nous passerions plus de temps à parler aux chercheurs, aux étudiants et aux établissements. Mme Sheane a parlé des centres d'accès à la technologie. Elle a demandé qu'on diffuse les connaissances acquises grâce aux projets.
    Il ne s'agit pas de partager la propriété intellectuelle. Tout dépend de ce que nous avons appris au sujet de l'adoption de la technologie dans une entreprise et de ceux qui pourraient en profiter dans la collectivité. D'un point de vue réaliste, le financement est beaucoup plus ciblé que cela et il s'agit de montants très modestes, ce qui signifie que l'accent est mis sur l'entreprise qui frappe à la porte. Je m'inquiète pour les entreprises qui ne viennent pas frapper à la porte et qui ne se rendent pas compte que ce soutien leur est offert. C'est une occasion ratée pour le Canada.
    Merci.
    Monsieur Blanchette-Joncas, vous avez la parole. Deux minutes et demie.

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Monsieur Agbobli, vous avez parlé tout à l'heure d'un déséquilibre quant à la distribution des fonds de recherche. Plus précisément, vous avez dit que les fonds de recherche sont concentrés à 80 % dans les 15 plus grandes universités du Canada. Ces dernières sont majoritairement anglophones, ce qui a une incidence sur la création et la diffusion du savoir en français.
    Comme vous représentez le plus grand réseau universitaire francophone du Canada, vous êtes bien placé pour parler de ce sujet.
    J'aimerais que nous mettions en lumière les paroles du gouvernement fédéral et les faits.
    Je vous renvoie au communiqué de presse officiel du gouvernement fédéral relativement à la formation du nouveau groupe consultatif sur la création et la diffusion d'information scientifique en français.
    Voici la première phrase du communiqué: « Nous valorisons le français et la recherche scientifique. »
    Voici la deuxième phrase: « Nous valorisons notre système d'éducation post-secondaire et la recherche en français au Canada. »
    Au cours des 20 dernières années, le réseau universitaire du Québec a démontré qu'il y avait un sous-financement des universités franco-québécoises et qu'il y a un déclin du financement accordé aux établissements d'enseignement que vous représentez relativement au poids de leur corps professoral.
    Compte tenu de ces données et de ces faits, jugez-vous que le gouvernement fédéral met vraiment en priorité le système d'éducation postsecondaire et la recherche en français au Canada?
    Je remercie le député de la question, madame la présidente.
    Le réseau de l'Université du Québec est le plus grand réseau universitaire du pays, que ce soit en français ou dans une autre langue — l'anglais, en l'occurrence. Dans ce contexte, pour que ce réseau puisse jouer un rôle majeur, il importe de rééquilibrer et de soutenir davantage le financement de la recherche en français.
    Par conséquent, nous considérons que, pour remédier à ce déséquilibre en matière de financement de la recherche, il faut s'assurer de faire entendre notre voix. Le rétablissement d'un équilibre doit nécessairement se faire par des mécanismes de consultation permanents, qui prennent en compte l'ensemble du système universitaire canadien, et particulièrement le réseau de l'Université du Québec. Notre réseau est une force dans les régions et dans les villes, et il réalise des recherches pertinentes dans des domaines spécialisés.
    Je vais vous donner quelques exemples.
    Prenons d'abord la prévention des feux de forêt. Le Canada a récemment connu des feux de forêt, et cela va s'accentuer. C'est au sein du réseau de l'Université du Québec que des recherches sont menées dans ce domaine, lesquelles sont financées par les conseils subventionnaires.
    Il y a aussi la question des inondations. Nous avons un réseau interuniversitaire de recherche, soit le Réseau d'informations scientifiques du Québec, ou RISQ, qui contribue à faire mieux comprendre cela.
    La recherche devrait être faite en français, et elle devrait faire l'objet d'un financement de plus grande envergure en ce qui a trait à ces questions.
(1710)

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Notre dernière intervenante de ce tour sera Mme Blaney. Elle a deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai une question à poser à Mme Watts-Rynard.
    Vous avez écrit que l'engagement de l'industrie dans les collaborations de recherche devrait être un objectif important de la nouvelle organisation-cadre de recherche, favorisant la contribution de ceux qui sont en mesure de préciser l'énoncé du problème et de mettre en œuvre des solutions.
    Pourriez-vous nous parler du rôle que l'industrie pourrait jouer dans la gestion de l'organisation-cadre et d'autres secteurs de la société, comme les syndicats, les jeunes et les communautés autochtones?
    Pour entreprendre toute forme de recherche interdisciplinaire et avoir la possibilité de s'attaquer à ces problèmes, il faut qu'on puisse compter sur la diversité des participants. Ce qui me préoccupe, c'est que, peut-être, l'organisation-cadre serait dirigée par ceux qui sont actuellement à la tête des trois conseils et qu'il n'y aurait peut-être pas une participation aussi large. Il faudra pour cela que les jeunes, les travailleurs et l'industrie soient présents.
    Je recommanderais presque qu'il y ait un nombre limité de chercheurs et que nous nous concentrions plutôt sur les grands défis auxquels nous sommes confrontés, que nous définissions ces défis, puis que nous demandions à la direction de l'organisation-cadre du financement de la recherche ou encore aux membres des trois conseils comment nous pouvons nous y prendre pour régler le problème.
    C'est presque comme si nous devions écarter les chercheurs pour que la nouvelle entité nous donne plus d'argent pour financer le travail que nous faisons déjà. Je ne dis pas que nous devrions nous débarrasser des trois conseils; je dis qu'une nouvelle organisation doit se présenter à la table avec des approches novatrices et une nouvelle façon de penser ce qu'est la recherche pour notre pays.
    Merci.
    Je représente une région qui est desservie par le North Island College, où, lorsqu'il s'agit de prendre des mesures progressistes, on est extrêmement novateur et très réceptif à l'égard du développement communautaire, du développement économique, des entreprises et des communautés autochtones lorsqu'il s'agit de prendre des mesures. C'est cette innovation dans la collaboration qui rend l'établissement si utile. Dans cette formule, qu'est‑ce que l'établissement doit comprendre pour prendre des décisions plus en prise sur ce qui se passe sur le terrain, dans les collectivités?
    L'organisation-cadre est là pour relever les grands défis. Il s'agit de faire de la recherche interdisciplinaire, axée sur la mission. Le problème, c'est que, si nous suivons les conseils de ceux‑là mêmes qui aimeraient avoir plus d'argent pour la recherche disciplinaire du type entrepris par les trois conseils, il n'y aura là rien de nouveau, rien de différent. Ce sera la même chose sous un nom différent. Ce sera une occasion ratée.
    Merci.
    Merci aux témoins, Mme Sheane, Mme Sarah Watts-Rynard et M. Christian Agbobli, de leurs témoignages et de leur participation à l'étude du Comité.
    Si vous avez des questions, vous pouvez les adresser au greffier. Vous pouvez également soumettre des renseignements supplémentaires par son entremise.
    Nous allons suspendre brièvement la séance pour permettre au premier groupe de témoins de se retirer, puis nous reprendrons avec le deuxième groupe.
(1710)

(1720)
    Bienvenue de nouveau.
    J'ai maintenant le plaisir d'accueillir, de l'Acfas, l'Association francophone pour le savoir, Martin Maltais, président, qui témoigne par vidéoconférence, et Sophie Montreuil, directrice générale, qui participe également par vidéoconférence.
    Nous accueillons sur place Jennie Young, directrice générale de la Stratégie canadienne de recherche sur le cerveau. De la Fédération des sciences humaines, nous accueillons aussi Karine Morin, présidente et cheffe de la direction.
    Monsieur Maltais et madame Montreuil, je vous invite à faire une déclaration liminaire d'un maximum de cinq minutes.

[Français]

    Je suis le président de l'Association francophone pour le savoir, ou Acfas, et professeur en financement et politiques d'éducation à l'Université du Québec à Rimouski. Je suis accompagné de la directrice générale de l'Acfas, Mme Sophie Montreuil.
    Depuis plus de 100 ans, l'Acfas contribue de façon exceptionnelle à la vie scientifique en français. L'Acfas compte six antennes régionales réparties sur l'ensemble du territoire canadien. C'est à la prospérité et au rayonnement de notre pays que nous œuvrons au quotidien.
    Comme l'a montré le rapport que nous avons fait paraître en juin 2021, intitulé « Portraits et défis de la recherche en français en contexte minoritaire au Canada », la recherche en français connaît un déclin manifeste dans le milieu scientifique canadien, un déclin qui se poursuit encore aujourd'hui. Dans un pays fondé sur le biculturalisme de nos deux langues officielles, il est inadmissible que les instances fédérales n'y portent pas une très grande attention, car ce déclin repose en bonne partie sur des conditions inéquitables, pour les chercheurs francophones, en ce qui concerne l'accès au financement de la recherche subventionnée par le gouvernement du Canada.
    Le rapport rendu public le 17 octobre dernier sur les consultations effectuées l'été dernier n'est certes pas pour nous rassurer quant au sérieux avec lequel la création de la nouvelle organisation-cadre embrassera la question des sciences en français. Sur un total de 10 034 mots, 180 seulement sont consacrés à la recherche scientifique en français, soit 1,8 % de l'ensemble des constats formulés par les trois conseils subventionnaires. Ces 180 mots résument toutefois bien les défis et les préjudices qui traversent le milieu de la recherche en français au Canada.
    Le temps est maintenant venu de mettre en place des mesures qui vont corriger les injustices et entraîner une égalité réelle, et ce, même si la fusion des trois conseils se fait dans un contexte d'une rapidité étonnante et déconcertante. Pour l'Acfas, cette rapidité ne pourra en aucun cas être évoquée ultérieurement comme une excuse pour pallier l'absence de mesures en faveur de la recherche scientifique en français, car le gouvernement du Canada ne peut pas prétendre qu'il ne sait pas comment remédier à la situation du déclin ni qu'il n'en a pas la responsabilité à la suite de l'adoption de la nouvelle Loi sur les langues officielles. Les instances qui vont conduire à la création de l'organisation-cadre ont tout ce qu'il faut entre les mains pour lancer une nouvelle ère de financement public de la recherche, qui permettra d'atteindre l'égalité réelle entre les communautés scientifiques francophone et anglophone.
    Permettez-moi de citer un communiqué de presse émis par Patrimoine canadien le 22 octobre dernier, soit 10 jours après la publication du rapport intitulé « Ce que nous avons entendu »: « [...] le gouvernement du Canada s'engage à améliorer les conditions de production et de diffusion de la recherche scientifique en français au pays. »
    Ce communiqué annonçait notamment la constitution d'un groupe consultatif externe sur la création et la diffusion d'information scientifique en français. Vous me voyez venir: il est impératif qu'il y ait un arrimage fort entre les instances qui vont créer l'organisation-cadre et les membres du groupe consultatif. Or, les agendas ne coïncident pas, car le groupe consultatif commence à peine ses travaux. Là encore, l'Acfas se place en position d'extrême vigilance. Il n'est pas question que le gouvernement envisage de ne pas prendre acte de la nécessité d'inclure des mesures fortes pour soutenir la recherche en français dans la création de l'organisation-cadre parce que les agendas ne coïncident pas. Ce serait tout bonnement inadmissible.
    En fait, la situation est beaucoup plus simple qu'il n'y paraît, et c'est l'essentiel de notre propos aujourd'hui. La nouvelle Loi sur les langues officielles, entrée en vigueur en juin dernier, met en avant un regard neuf et éclairé sur le bilinguisme au sein de notre pays, en reconnaissant pour la première fois que le français « est en situation minoritaire au Canada et en Amérique du Nord en raison de l'usage prédominant de l'anglais ». La nouvelle Loi oblige par ailleurs, dans la partie VII, tous les ministères et organismes fédéraux à mettre en place des mesures visant « à appuyer la création et la diffusion d'information en français qui contribue à l'avancement des savoirs scientifiques dans toute discipline ». Le contexte de création de l'organisation-cadre est donc clair: il ne peut se faire sans ces mesures.
    Il y a du beau. Les consultations qui doivent être faites, lorsqu'on parle de mesures positives, ont déjà été menées. Depuis deux ans, le gouvernement du Canada a lui-même mené des travaux lui permettant de documenter les défis de la recherche en français et les besoins de la communauté qui porte cette recherche. Il a donc, je le répète, tout en main pour remplir les obligations qui lui sont désormais dévolues par la nouvelle Loi.
    Je vous remercie de votre attention.
(1725)

[Traduction]

    Merci beaucoup de votre exposé liminaire.
    Nous allons maintenant passer à Mme Young.
    Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci à vous, madame la présidente, et aux membres du Comité.
    Je suis sincèrement reconnaissante de pouvoir m'adresser au Comité. Je reconnais le dévouement dont chacun d'entre vous fait preuve dans ce travail. Les efforts que vous déployez pour vous assurer que les fonds consacrés à la recherche au Canada ont le plus grand impact possible correspondent à ce que nous visons dans le milieu de la recherche.
    Je suis là aujourd'hui à titre de directrice générale de la Stratégie canadienne de recherche sur le cerveau, la SCRC. Il s'agit d'une coalition pancanadienne représentant 40 programmes de recherche en neurosciences et en santé mentale, ainsi que des cliniciens, des patients partenaires, des partenaires autochtones, des organismes de bienfaisance du secteur de la santé, des bailleurs de fonds de la recherche et des partenaires de l'industrie. Ensemble, nous sommes unis autour d'un objectif commun: faire progresser la santé du cerveau des Canadiens grâce à une recherche collaborative et capable d'un grand retentissement.
    Investir dans la recherche sur le cerveau est essentiel pour le Canada. Un Canadien sur cinq est atteint d'une maladie cérébrale, qu'il s'agisse de démence, de maladie mentale, de lésion cérébrale ou de toxicomanie. Chacun d'entre nous connaît quelqu'un qui est touché par l'un de ces problèmes de santé, et nous avons tous des cerveaux que nous voulons garder en bon état de fonctionnement.
    Nous savons que l'impact des problèmes de santé du cerveau va bien au‑delà de la personne touchée. Les problèmes au cerveau ont une incidence sur notre système de soins de santé, notre économie, la productivité de la main-d'œuvre et les structures sociales, et cet impact ne fera que s'intensifier au gré du vieillissement démographique. Pour s'attaquer à ces problèmes complexes, il faut investir de façon soutenue dans la recherche, comme cela a été annoncé dans le budget de 2024, et adopter une approche nationale coordonnée.
    C'est vraiment une période passionnante grâce aux investissements historiques dans la science et la recherche qui ont été annoncés dans le budget de 2024. Maintenant que nous nous efforçons de rattraper nos pairs du G7, il est essentiel que nous réfléchissions à la façon d'investir plus stratégiquement et de bâtir ensemble un écosystème de recherche plus cohésif.
    L'un des objectifs fondamentaux de l'organisation-cadre est de soutenir la recherche multidisciplinaire, qui est essentielle à mesure que le paysage scientifique évolue et que les défis se font plus complexes. Cette orientation est particulièrement cruciale dans un domaine de pointe comme la recherche sur le cerveau et la santé mentale qui, à l'intersection avec l'intelligence artificielle, se situe quelque part entre les Instituts de recherche en santé du Canada et le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada. Si on ajoute l'importance de la psychologie et des autres sciences humaines, cela signifie que, souvent, la recherche sur le cerveau ne relève pas des mandats de nos organismes de financement existants. Ce défi montre pourquoi nous avons besoin d'une organisation-cadre pour combler les lacunes et veiller à ce qu'aucun domaine, particulièrement les domaines complexes comme la recherche sur le cerveau, ne soit laissé sans soutien suffisant.
    La stratégie nationale de recherche sur le cerveau que nous proposons montre comment nous pouvons concevoir les avantages de l'organisation-cadre. Nous avons établi un cadre qui permet la collaboration entre diverses disciplines universitaires et établit des liens essentiels entre la recherche fondamentale, les applications cliniques et les parcours de commercialisation des résultats de la recherche. En tirant parti du potentiel de l'organisation-cadre, nous pouvons nous assurer que les découvertes issues de la recherche se traduisent efficacement par des solutions pratiques et une amélioration de la santé ainsi que des résultats économiques pour les Canadiens.
    Ces types de cadres prospèrent lorsqu'ils sont axés sur la mission tout en étant éclairés par des experts, un équilibre qui est essentiel si nous voulons réaliser la vision globale d'un écosystème de recherche stratégiquement unifié et capable d'avoir un grand retentissement.
    Les priorités en matière de recherche et les décisions sur le financement sont plus efficaces lorsqu'elles sont fondées sur les connaissances spécialisées que les experts apportent à leur domaine. La stratégie nationale proposée par la SCRC a été élaborée en gardant ce principe à l'esprit, en représentant les programmes de recherche en neurosciences et en santé mentale, petits et grands, partout au Canada, mais aussi en reconnaissant l'expertise qu'apportent les patients et les organisations de patients, les détenteurs du savoir autochtone, les organismes de financement, les organismes de bienfaisance en santé et l'industrie.
    Ce fondement qui repose sur les experts renforce non seulement la qualité et la pertinence de notre travail, mais fait aussi correspondre nos projets aux besoins réels des Canadiens. À mesure que nous progressons, il est essentiel que la prise de décisions de l'organisation-cadre soit guidée par des experts, même si nous poursuivons des objectifs plus vastes axés sur la mission.
    En terminant, je tiens à souligner le grand potentiel que recèle l'organisation-cadre pour transformer l'environnement de la recherche au Canada en un environnement plus collaboratif, inclusif et stratégiquement harmonisé. En comblant les lacunes existantes et en appuyant la recherche multidisciplinaire, l'organisation-cadre peut amplifier les forces que nous avons déjà au sein de la communauté scientifique du Canada. Grâce à des conseils d'experts, nous pouvons nous assurer que la stratégie nationale répond aux défis les plus pressants de notre société.
    Tandis que nous nous efforçons de moderniser les structures de financement de la recherche pour suivre le rythme de l'évolution des exigences de la recherche elle-même, il est essentiel d'avoir des occasions constantes de collaboration et de dialogue comme celles offertes par le Comité. L'organisation-cadre est un pas vers l'établissement des structures de soutien efficaces et cohésives dont nos chercheurs ont besoin, et il faudra que tout le monde — c'est‑à‑dire nous tous — travaille ensemble pour que cette vision soit féconde.
    Je vous remercie encore une fois de m'avoir donné l'occasion de contribuer à ce débat national. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
(1730)
    Merci, madame Young.
    Madame Morin, vous avez maintenant la parole pour une déclaration liminaire de cinq minutes.

[Français]

    Je m'appelle Karine Morin et, depuis juin dernier, je suis présidente et cheffe de la direction de la Fédération des sciences humaines. Nous apprécions grandement l'étude que ce comité a entreprise sur la nouvelle organisation-cadre de financement de la recherche proposée, et nous vous remercions de l'invitation de témoigner devant vous.

[Traduction]

    La Fédération des sciences humaines est le porte-parole national des disciplines vouées à l'avancement d'une société inclusive, démocratique et prospère. Nous comptons parmi nos membres 76 établissements d'enseignement postsecondaire et 80 associations savantes représentant une communauté diversifiée de plus de 90 000 chercheurs et étudiants diplômés de partout au Canada. La Fédération mobilise de nouvelles connaissances en aidant les chercheurs de toutes les disciplines à éclairer et à inspirer les politiques et les actions dans la collectivité et les établissements ainsi que dans l'ensemble de la société.
    La Fédération appuie sans réserve l'idée d'apporter orientation stratégique et coordination au système de recherche du Canada, tout en préservant les caractéristiques qui ont mené à la solide réputation d'excellence du Canada en matière de recherche. La nouvelle organisation-cadre doit s'appuyer sur la force fondamentale des conseils subventionnaires fédéraux, en respectant la structure et les niveaux de financement actuels qui appuient l'avancement de la recherche axée sur les chercheurs et le développement des talents en sciences humaines.

[Français]

    Pour ce faire, la Fédération a formulé trois recommandations.
    Premièrement, afin d'assurer la durabilité des investissements fédéraux et du soutien aux sciences humaines et sociales, la nouvelle organisation-cadre, par l'entremise de sa recherche axée sur une mission, doit reconnaître que bon nombre des défis auxquels nous sommes confrontés sont centrés sur l'être humain. Ainsi, pour contribuer à des solutions concrètes, il est essentiel qu'une proportion importante de la recherche soit menée par des chercheurs et des chercheuses en sciences humaines et sociales.
    Deuxièmement, l'organisation-cadre doit intégrer le soutien à la recherche autochtone et à l'équité, la diversité, l'inclusion et la décolonisation.
    Troisièmement, la gouvernance de l'organisation-cadre doit être inclusive et s'appuyer sur les forces de toutes les disciplines.
(1735)

[Traduction]

    Permettez-moi de donner quelques détails supplémentaires sur chacun de ces trois points.
    Premièrement, les définitions de la recherche axée sur la mission, de l'innovation et de l'impact de l'organisation-cadre doivent inclure toutes les disciplines et tenir compte des différences inhérentes entre les sciences naturelles, le génie, les sciences de la santé, les sciences humaines. Pour relever les divers défis qui se posent à notre démocratie, à notre prospérité, à notre environnement et à notre humanité, il faut des connaissances dans tous les domaines. Il sera essentiel que les nouvelles possibilités de financement soient conçues non seulement comme des solutions scientifiques et technologiques, mais aussi comme des solutions axées sur l'être humain qui tiennent pleinement compte des considérations éthiques, environnementales, juridiques et sociales en plus des considérations économiques.
    Deuxièmement, le soutien à la recherche autochtone et aux grands principes d'équité, de diversité, d'inclusion et de décolonisation doit être intégré à l'organisation-cadre. La consultation et les partenariats continus avec les chercheurs des Premières Nations, des Inuits et des Métis et leurs collectivités sont essentiels. Nous recommandons instamment que l'organisation-cadre s'appuie sur les progrès importants réalisés par les conseils subventionnaires fédéraux pour faire progresser la recherche autochtone, accroître l'accès équitable aux possibilités de financement, promouvoir l'excellence inclusive et fournir l'orientation et le soutien nécessaires aux établissements sous tous ces aspects, y compris par l'entremise du programme Dimensions.
    Enfin, il est essentiel que la gouvernance de l'organisation-cadre soit diversifiée, avec des représentants des différents secteurs et disciplines, pour refléter fidèlement la diversité du Canada. Les conseils subventionnaires demeurent les mieux placés pour répondre aux besoins des diverses disciplines distinctes et tabler sur les forces des milieux de la recherche du Canada, et l'organisation-cadre doit s'appuyer sur ces bases.

[Français]

    Pour conclure, l'intégration des perspectives des sciences humaines et sociales sera essentielle au succès de l'organisation-cadre et lui permettra d'orienter la recherche et son financement de manière à améliorer la vie quotidienne des Canadiens et des Canadiennes.
    Nous nous réjouissons à l'idée de poursuivre le dialogue avec le gouvernement fédéral alors que l'organisation-cadre continue son évolution.
    Je vous remercie de votre attention et je serai heureuse de répondre à vos questions.

[Traduction]

    Merci pour ces exposés liminaires.
    Nous allons maintenant passer aux questions.
    Nous allons amorcer le tour de six minutes avec M. Kitchen.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à tous d'être là. Nous en sommes très reconnaissants. Avec les témoins que nous avons entendus préalablement, c'est tellement formidable d'apprendre continuellement et de voir tant d'aspects différents.
    Madame Morin, votre commentaire est excellent, car vous avez parlé de ce que je qualifierais de nombreuses disciplines et aussi de ce dont nous avons besoin. Bien souvent, lorsque nous parlons de recherche, le Canadien moyen doit penser qu'il s'agit uniquement des sciences de la santé ou des sciences naturelles, alors que nous devons également intégrer les sciences humaines. Souvent, ce lien ne se fait pas.
    Lorsque nous accueillons des témoins, chacun a ses propres priorités. Ils s'intéressent à ce qui est important pour eux parce que c'est leur champ de compétence.
    La Stratégie canadienne de recherche sur le cerveau est en fait très importante pour moi parce qu'à 16 ans, j'ai été victime d'un conducteur en état d'ébriété qui a pris la fuite. J'avais de la matière cérébrale qui s'échappait de mon oreille gauche. J'ai eu beaucoup de problèmes à traiter à cause de cette atteinte au cerveau. Je souhaiterais donc qu'il se fasse beaucoup de recherche de ce côté. C'est une question qui me touche personnellement.
    Ce sont des choses importantes pour l'avenir.
    En fin de compte, nous avons des universités, des collèges, des organisations et des entreprises. L'organisation-cadre sera une bureaucratie. Il n'y aura pas plus d'argent pour faire de la recherche sur le cerveau, pour étudier d'autres questions comme l'encéphalopathie traumatique chronique ou autre chose. Il n'y aura pas de fonds supplémentaires. L'argent va servir à créer une bureaucratie.
    Comment pouvons-nous prendre cet argent et, au lieu de créer une bureaucratie, amener les trois conseils à faire le travail, à rendre des comptes et à s'assurer qu'ils font bien ce qu'ils devraient faire?
    Je vous remercie de reconnaître qu'il y a de nombreuses priorités de recherche différentes. Il est vraiment difficile de déterminer quelles sont les principales priorités ou même les nombreuses priorités importantes.
    L'organisation-cadre, au‑delà de ce que les conseils subventionnaires actuels font sur le plan disciplinaire, permettra selon nous d'effectuer cette recherche axée sur la mission, empreinte d'une complexité supérieure à celle qui pourrait être abordée dans un projet de recherche qui serait autrement axé sur la discipline.
    Ces missions doivent être définies — et c'est là que nous insistons sur le fait qu'il est important de ne pas manquer l'objectif en pensant uniquement aux missions scientifiques et technologiques, sans tenir compte de la complexité des problèmes auxquels nous faisons face — et souvent on ne doit pas y répondre exclusivement ou même principalement par des solutions scientifiques ou technologiques.
    J'aime donner l'exemple de la pandémie et du fait qu'au cours de la première année, il y a eu un vaccin. Les chercheurs biomédicaux ont fait leur travail remarquablement rapidement et efficacement. La pandémie a persisté. Une solution scientifique et technologique ne suffisait pas. Son déploiement au sein de nos systèmes de soins de santé, au sein de différentes populations et dans les différentes provinces était très complexe — la pandémie mondiale ne se limitait pas au vaccin.
    La science du climat permet également d'illustrer mon propos. Nos climatologues nous ont parlé des défis. Il faut désormais de nombreux changements dans les comportements des personnes, des collectivités, des municipalités, et cela à différentes échelles. C'est là que les sciences sociales peuvent intervenir...
(1740)
    Merci. Je ne veux pas vous interrompre, mais j'ai si peu de temps.
    J'apprécie vos commentaires. Vous avez parlé de la COVID. Nos chercheurs et nos virologues ont fait un travail extraordinaire pour produire les vaccins. C'était fantastique. Nous constatons tous les jours qu'il faut poursuivre sur cette lancée.
    Le problème, c'est que le gouvernement n'a pas fait le travail qu'il était censé faire. L'Agence de la santé publique du Canada n'a pas été proactive; elle a réagi à la situation. La raison d'être de l'ASPC était de se montrer proactive, mais c'est un autre débat.
    Madame Young, vous avez fait un exposé tout à l'heure et j'en ai reçu le texte, il porte sur le mémoire de consultation sur l'organisation-cadre que vous avez présenté. Je l'ai beaucoup apprécié. Il y a plusieurs points que je trouve intéressants. Au deuxième point, vous avez parlé de l'autonomie des conseils subventionnaires. Vous avez dit: « Chaque conseil devrait conserver son autonomie pour cultiver un portefeuille de recherche diversifié et adaptable. »
    Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet? J'en retire que chaque membre des trois conseils devrait faire son travail, c'est‑à‑dire examiner la façon dont nous finançons la recherche.
    Je pense que pour déterminer les domaines précis du financement de la recherche, là encore... Cela repose vraiment sur les pairs. Il ne s'agit pas seulement du chef de ce conseil. L'examen par les pairs et la création d'un organisme consultatif scientifique sont très importants.
    J'essayais de souligner le fait que nous avons besoin que chacun de ces conseils subventionnaires fasse son travail selon son domaine de spécialité, comme vient de le mentionner ma collègue Mme Morin. Nous devons réunir ces efforts, ce qui exige une coordination. Je pense que nous espérions depuis trop longtemps que cela se fasse naturellement. Les scientifiques ne sont pas formés à cet égard. Il n'y a pas de soutien pour permettre que cela se mette en place. C'est ce que nous espérons voir se concrétiser.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Longfield, pour six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci aux témoins.
    Je vais d'abord adresser mes questions à Mme Young. C'est un plaisir de vous revoir.
    La Stratégie canadienne de recherche sur le cerveau fait un travail considérable. Il s'agit d'un travail très semblable à ce que fait l'organisation-cadre pour réunir des chercheurs de partout au Canada, mais cette dernière va un peu plus loin dans d'autres domaines.
    Ce matin, j'étais dans un laboratoire de l'Université de Guelph qui étudie les poissons. Il vient de recevoir des fonds fédéraux à hauteur de 1,5 million de dollars sur deux ans et demi, pour étudier le saumon du Pacifique et les effets du bitume sur le saumon. Pendant ma visite, j'ai vu les chercheurs étudier le cerveau de poissons qui vivent en eau profonde, et qui a la capacité de se régénérer lorsqu'il est endommagé. Il s'agit d'appliquer la recherche sur ces poissons en eau profonde à la recherche sur les cellules souches, qui pourrait éventuellement être utilisée dans des applications médicales.
    Nous ne savons pas à quoi mènera une partie de la recherche, mais pour ce qui est de passer du poisson à l'être humain, ou d'examiner les effets culturels de la perte de saumon sur les collectivités autochtones, pourriez-vous nous parler des liens qui pourraient être tissés par l'entremise de l'organisation-cadre?
(1745)
    Je pense que vous avez tout à fait raison. Nous ne savons pas à quoi aboutira la recherche, et pour vraiment comprendre et établir ces interrelations, nous avons besoin d'une structure en place. Vous dites que pour que les choses aillent plus loin que la seule stratégie que nous avons élaborée, nous devons intégrer ces connaissances dans une application pratique et que cela doit être un cycle continu. Ce n'est plus le modèle traditionnel où il y a d'abord la découverte, puis son application. Pour accélérer franchement les choses, surtout dans ce domaine en évolution rapide et compte tenu de la vitesse à laquelle la recherche se fait maintenant, nous avons besoin d'une structure, d'une infrastructure et d'une formation en place.
    J'imagine qu'avec cette structure en place, le travail que vous avez déjà fait au cours des dernières années dans le cadre de la Stratégie canadienne de recherche sur le cerveau serait également accéléré.
    Absolument, parce qu'à l'heure actuelle, nous avons réussi à réunir tous ces différents intervenants, y compris ceux de l'innovation, de l'entrepreneuriat et de l'industrie, dans tous ces domaines, mais nous avons besoin de soutien pour concrétiser nos idées, pour mettre en œuvre la Stratégie.
    Formidable. Je vous remercie en particulier du travail que vous faites avec Parkinson Canada et Brain Canada sur les maladies neurodégénératives. Chaque jour, 35 personnes reçoivent un diagnostic de la maladie de Parkinson, de la SLA et d'autres maladies. Il s'agit donc aussi de gestion de crise.
    J'aimerais maintenant m'adresser à Mme Morin, au sujet des sciences sociales.
    Une partie de la recherche qui se fait autour du cerveau porte sur la socialisation qui est parfois influencée par une maladie cérébrale. Il y a notamment l'étude du mime. L'Université de Guelph mène des études sur le mime. Quel en est le but? La pratique du mime aide à contrôler la motricité lorsque les gens perdent le contrôle. Il y a des études sur le yoga et la relaxation et sur leur utilité pour essayer de gérer le stress associé aux maladies.
    Pourriez-vous nous parler de l'importance des sciences sociales, car elles touchent toutes les disciplines?
    En effet, en matière de sciences sociales et humaines, nous aimons penser à l'importance de la recherche pour les gens, les cultures, les institutions et les relations sociales.
    Vous avez également entendu Chad Gaffield au début de cette étude, et il aime simplifier le propos en disant que c'est l'étude de la pensée et du comportement humains. À quoi pensaient-ils? Pourquoi ont-ils fait cela?
    Nous pouvons nous poser ces questions tous les jours, et nous trouvons des réponses rapides pour pouvoir avancer, mais lorsque les chercheurs creusent ces questions, ils le font avec des méthodes rigoureuses de sorte que, même s'ils prennent des sujets non évidents, d'une certaine façon, il s'agit de perfectionner les compétences permettant de trouver les documents qui seront pertinents. S'il s'agit d'une étude qualitative, il faut parler aux personnes qui seront représentatives de la question, et s'il s'agit d'un sondage quantitatif, il faut faire en sorte de poser les bonnes questions.
    Même si vous travaillez sur des questions de recherche très précises, compliquées et peut-être non évidentes, les ensembles de compétences, en particulier chez les étudiants des cycles supérieurs qui participent à la recherche, deviennent vraiment pertinents.
    Dans le contexte de la recherche axée sur la mission, je viens de souligner ce qui sera important. Sur quoi porte la mission? Quels renseignements seront étudiés? Qui participera à cette recherche axée sur la mission? Quelles questions seront posées?
    Bien souvent, l'encadrement de la recherche axée sur la mission devrait provenir des sciences sociales. Pas dans tous les cas, mais souvent je crois que la recherche en sciences humaines joue un rôle de premier plan pour prendre en charge certains des problèmes urgents auxquels nous nous attaquons ou même les technologies émergentes comme l'intelligence artificielle et cette interface avec l'humanité. Ce sont quelques exemples.
(1750)
    Absolument, ou les élections américaines... Il y a beaucoup d'incompréhension de ce qui s'est passé et de la façon dont cela s'est produit, et nous allons y réfléchir encore plusieurs années.
    Merci beaucoup de votre témoignage.
    Merci.
    Le Comité ne pourra probablement pas résoudre ce problème, mais c'est intéressant, oui.
    Nous passons maintenant à M. Blanchette‑Joncas, pour six minutes.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Monsieur Maltais, comment l'Acfas perçoit-elle son rôle dans le développement de la nouvelle organisation-cadre en lien avec la diversité des formes et des types de recherche?
    Je vais demander à Mme Montreuil de répondre à cette question.
    Merci, madame la présidente et monsieur le député.
    L'Acfas a répondu à la consultation lancée en catastrophe, en juin dernier, par les trois organismes fédéraux de financement de la recherche. Nous avons consulté notre communauté et nous avons déposé un mémoire qui répond aux questions posées lors de la consultation. Ce que nous vous présentons aujourd'hui est légèrement différent de la dizaine de recommandations détaillées que vous trouverez dans le mémoire de l'été dernier.
    Le 17 octobre dernier, nous avons pris connaissance du rapport issu de la consultation qui s'intitule « Ce que nous avons entendu ». Malgré des délais très serrés, la communauté scientifique a répondu présent avec plusieurs mémoires, prises de parole et témoignages. Le rapport explique bien que la communauté scientifique est d'accord sur la création de l'organisation-cadre. Au-delà de cet accord, la communauté a fait valoir des éléments précis à surveiller dans la création de l'organisation-cadre, d'une part, et dans le mouvement de fusion des trois conseils, d'autre part. Plusieurs éléments de vigilance qui concernent l'instance qui créera l'organisation-cadre ont été discutés aujourd'hui et l'ont sûrement été lors des auditions préalables.
    Merci, madame Montreuil.
    Monsieur Maltais, l'Acfas a parlé de la formation d'un groupe consultatif externe sur la création et la diffusion de l'information scientifique en français. On parle de 8,5 millions de dollars sur 5 ans. On sait que la science en français est en déclin, qu'elle se dirige même vers l'agonie.
    Croyez-vous que ces sommes sont suffisantes pour vraiment remédier à l'urgence de la situation?
    D'abord, nous saluons ce premier geste qui a été posé. Nous en sommes très satisfaits et sommes engagés dans ce groupe, mais nous voyons déjà la nécessité d'aller plus loin. C'est important pour l'ensemble de nos collègues de partout au pays de comprendre que de 22 à 23 % de la population du Canada parle français. Pour avoir un même niveau de vie, il faut pouvoir vivre une science en français, également. À cet égard, l'iniquité structurelle qui existe entre les communautés anglophone et francophone dans tout le pays pose un problème économique majeur. En effet, pour avoir un rendement satisfaisant, les francophones au pays doivent fournir de 30 à 40 % plus d'énergie pour prendre leur place dans les milieux anglophones et arriver à publier en langue anglaise. Il y a donc un coût économique à cela, alors qu'on peut mettre en place des moyens pour avoir une vie scientifique en français plus importante.
    L'autre élément qu'il convient d'examiner, c'est qu'en arrivant à avoir des vies scientifiques équivalentes dans les deux principales cultures du pays, cela ouvre pour le Canada, sur la scène internationale, d'autres horizons présentement sous-exploités sur le plan scientifique par le gouvernement du Canada. En effet, il pourrait très bien y avoir des engagements plus importants. Cela inciterait les organismes subventionnaires à se poser des questions comme celles-ci: comment alloue-t-on les sommes pour s'assurer qu'il y a une juste représentation du fait français et de l'activité scientifique en langue française? Cette question est fondamentale.
    Monsieur Maltais, nous savons qu'il existe présentement des disparités structurelles dans l'accès à l'éducation supérieure pour les francophones au Québec, voire dans le reste du Canada. Ces disparités structurelles ou ces déséquilibres dans le système d'éducation sont provoqués par un sous-financement des institutions francophones partout au Canada, tant au Québec que dans les communautés francophones en situation minoritaire. Les données parlent d'elles-mêmes: les institutions francophones, dans tout le Canada, sont sous-financées depuis les 20 dernières années.
    J'aimerais entendre votre opinion à ce sujet.
(1755)
    En ce qui concerne les institutions francophones dans tout le pays et leur sous-financement, le gouvernement du Canada a des obligations claires en matière de recherche et il faut les mettre en avant. Une série de mesures ont déjà été proposées au cours des derniers mois dans le cadre de rapports qu'on a déposés. Mme Montreuil avait commencé à travailler à cette question.
    Madame Montreuil, voulez-vous ajouter quelque chose?
    J'ajouterai très rapidement que des mémoires ont été présentés par l'Acfas aux différents comités, dont le vôtre
    Depuis deux ans, beaucoup de travaux ont été effectués par le gouvernement du Canada sur la question des sciences en français. Tout est documenté. Les besoins sont là, et les solutions existent. Ce qu'il faut éviter, dans la création de l'organisation-cadre, c'est de recommencer à zéro. Les consultations ont été faites, et les solutions existent. Il y a maintenant l'obligation, en vertu de la partie VII de la Loi sur les langues officielles, de demander à tous les ministères et organismes d'adopter des mesures positives, proactives, quand vient la création d'un nouvel organisme comme l'organisation-cadre.
    Ce qu'on dit, c'est que le gouvernement crée l'organisme au bon moment, alors que cela fait au moins deux ans qu'il y a des consultations sur le sujet, et ce, dans tous ses aspects, entre autres, le financement et la publication.
    Le travail est fait. Il n'y a donc aucune excuse.
    Madame Montreuil, vous dites que c'est bien documenté. Selon les données que j'ai, en moyenne, 50 % de la...

[Traduction]

    Votre temps est écoulé. Vous aurez le temps de terminer au prochain tour.
    Merci.
    Nous passons maintenant à Mme Blaney, pour six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Ma première question s'adresse à Mme Young.
    Dans votre réponse aux consultations, vous avez dit: « Les mandats uniques, les processus décisionnels indépendants et les priorités de financement qui correspondent aux domaines de recherche particuliers de chaque conseil subventionnaire, y compris le modèle des instituts des IRSC, doivent être préservés. »
    Comment conciliez-vous ce besoin d'autonomie avec le rôle de coordination de l'organisation-cadre?
    Je pense qu'il est vraiment idéal de pouvoir trouver cet équilibre parce que nous devons concentrer nos investissements sur certains des problèmes majeurs qui exigent que toutes ces disciplines différentes travaillent ensemble. Nous ne pouvons pas espérer que cela se produise naturellement. Nous devons travailler avec le gouvernement et comprendre les problèmes urgents qui touchent les Canadiens aujourd'hui. Nous devons ensuite travailler ensemble et réunir les efforts de chacun pour y arriver. Encore une fois, pour ce faire, il faut du soutien, de l'infrastructure, du personnel et de la formation.
    Merci.
    Dans ma circonscription, je plaisante souvent en disant que nous avons besoin d'un ministère du lien. Je vois le même genre de situation où les gens ne se parlent pas. Ils ont des liens les uns avec les autres, mais il n'y a pas de centre ou de coordination qui permette à ces intervenants de se rencontrer pour vraiment créer des solutions. C'est comme si ce lien manquait vraiment.
    Vous parlez beaucoup de l'établissement de liens entre la recherche fondamentale, la recherche clinique et la commercialisation de la recherche, pour obtenir de meilleurs résultats sur le plan de la santé et de l'économie. Les derniers témoins nous ont parlé de l'importance de travailler avec l'industrie. Cependant, nous avons vu ce qui s'est produit dans certains cas lorsque la relation entre la science et l'industrie est devenue un peu trop étroite.
    Je me demande si vous avez des idées sur la façon dont nous pouvons équilibrer tous ces besoins multiples et garantir qu'il y a une reddition de comptes claire à mesure que nous déployons ces programmes et ces méthodes.
    Je m'excuse. Je n'ai pas compris ce que vous vouliez dire lorsque vous disiez que la science et l'industrie sont trop proches.
    Eh bien, je pense à Technologies du développement durable du Canada, TDDC. Je suis désolée, mais mon esprit est un peu occupé par ce qui se passe dans les médias, ainsi qu'ici à la Chambre. Je pense qu'il s'agit d'un important signe avant-coureur de ce qui se passe, cela tombe en morceaux, et tout le bon travail qui se fait se dissipe parce qu'il n'y a pas de processus clairs au sujet des lignes directrices et de la façon dont elles fonctionnent.
    Voilà ce que j'imagine à l'avenir. J'entends ce que les autres témoins ont dit et ce dont vous parlez, c'est‑à‑dire qu'il faut regrouper les choses pour que ce soit vraiment une application pratique. En tant que représentante des collectivités rurales, je sais qu'il est essentiel de travailler avec l'industrie locale pour trouver des solutions.
    Je me demande si vous avez une idée de la façon de concilier tous ces besoins et de la manière dont l'organisation-cadre pourrait y arriver. Quel genre de méthodes faudrait‑il mettre en place?
(1800)
    Même si tout le monde fonctionne à un niveau différent, qu'il s'agisse de l'industrie ou de la recherche fondamentale, il y a des besoins communs qui, si nous y répondions, profiteraient vraiment à tout le processus de recherche, de la recherche fondamentale à la recherche clinique, en passant par l'entrepreneuriat et l'innovation.
    Parmi ces besoins communs, il y a le fait qu'au Canada, nous avons une culture de collaboration véritablement unique. Nous voulons partager nos ressources et les données. Lors de nos consultations avec les intervenants dans tous ces différents domaines, nous avons entendu qu'il fallait réunir ces données. Lorsque vous avez des données sur la recherche et des données sur la recherche clinique, tous les secteurs peuvent y accéder. Ils peuvent en profiter et utiliser ces données. Cela fait aussi qu'ils travaillent ensemble parce qu'ils utilisent tous les mêmes données.
    Cela ne peut pas être appuyé uniquement par des subventions. Il faut quelque chose qui complète et amplifie l'effet des subventions que nous finançons. Il n'existe actuellement aucun mécanisme au Canada pour appuyer ce genre de choses.
    D'après ce que j'ai compris de l'organisation-cadre, elle est vraiment censée faire quelque chose de plus pour combler ces lacunes et assurer cette stabilité que nous n'avons pas parce que nous n'avons pas le nombre de personnes et la base dont disposent les États‑Unis. Cependant, nous avons ce pouvoir vraiment unique d'être capables de collaborer. Il faut une infrastructure et des ressources pour le soutenir.
    Mme Morin, voulez-vous ajouter quelque chose?
    J'ajouterais que les conseils subventionnaires actuels ont de solides mécanismes de reddition de comptes. Il existe actuellement des possibilités de financement au sein des conseils pour faciliter l'échange entre la science et l'industrie, ou même entre la science et les organismes sans but lucratif.
    Malheureusement, quelque chose de frauduleux ou d'inapproprié pourrait se produire dans n'importe quel secteur. Il est donc important d'assurer la reddition de comptes et la transparence des subventions qui transitent habituellement par les établissements d'enseignement. Ces mécanismes existent et nous espérons qu'ils seront effectivement adoptés et renforcés par l'organisation-cadre, de sorte qu'on aura toutes les garanties que les investissements se font comme prévu.
    Merci.
    Nous allons passer à M. Tochor pour cinq minutes, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup.
    La nécessité d'une structure de type organisation-cadre, comme l'ont dit certains témoins, illustre certains des problèmes que nous avons au Canada en ce qui concerne le financement de la recherche.
    Nous avons parlé de certaines études douteuses en sciences humaines et sociales qui ont bénéficié de l'argent du gouvernement fédéral, mais nous savons qu'il y a aussi des problèmes avec les études en STIM. Je parle de la crise de la reproductibilité au cours de laquelle on s'est rendu compte que les résultats de nombreuses études scientifiques, en particulier en santé et en psychologie, étaient impossibles à reproduire. C'est un peu inquiétant compte tenu de l'argent qui est consacré à des études que nous ne pouvons pas reproduire par la suite. On y accorde beaucoup d'attention.
    Pourriez-vous en dire davantage au Comité au sujet de cette crise de la reproductibilité dans la littérature scientifique et de ce que pourrait faire l'organisation-cadre pour résoudre ce problème?
    Cette question s'adresse à l'un ou l'autre des témoins, s'il vous plaît.
    Vous avez raison. C'est un sujet de préoccupation, notamment pour les scientifiques.
    Nous pouvons nous appuyer sur le fait que les scientifiques veulent partager. Ils veulent partager leurs données. Ils veulent partager leurs méthodologies. Bien souvent, ils ne le font pas parce qu'il n'existe pas de structure leur permettant de le faire.
    Parfois, les expériences peuvent être difficiles à reproduire parce qu'on n'a pas accès à tous les détails de la méthode employée. Ce n'est pas que les chercheurs ne veulent pas partager. Ce n'est pas que les expériences soient mal faites, mais il y a une nuance à apporter.
    En rendant les données disponibles... Je le répète, nous avons une culture incroyable au Canada par rapport aux États-Unis, où j'ai travaillé pendant 14 ans. Nous voulons tout partager et nous montrer très transparents. Il n'y a tout simplement pas d'infrastructure ni de soutien pour ce genre de collaboration. C'est ce que nous espérons pouvoir faire. Il s'agit de réunir tous ces efforts.
(1805)
    À titre de précision, vous avez dit que les chercheurs canadiens veulent partager, mais vous dites maintenant que nous ne pouvons pas reproduire certains de ces résultats parce que les chercheurs ne partagent pas d'information supplémentaire.
    Je vous remercie de me permettre de clarifier cela.
    Ils ne peuvent pas le faire parce qu'il n'y a pas de structure complète qui le permette. Il faut des gens et des compétences. Il faut des postes techniquement qualifiés pour télécharger des données, pour faire des analyses et ce genre de choses. Nos subventions au Canada sont trop petites pour appuyer ce genre de postes techniques. Il n'y a pas de répertoire où vous pouvez partager l'ensemble de votre travail.
    Ce genre de choses exige des ressources et une infrastructure, et au Canada, les subventions ne permettent simplement pas ce niveau de financement à elles seules.
    Vous avez raison de dire que cela pourrait se retrouver dans certaines des études, mais c'est plus répandu que cela. Il y a des études portant sur les études. Celle que j'ai trouvée pertinente s'intitule Why Most Published Research Findings are False, de John P. A. Ioannidis.
    Je ne sais pas si vous avez pris connaissance de cette étude. Elle examine le sujet à fond et montre que même avec les données, il se fait beaucoup de recherches que nous ne pouvons pas reproduire.
    Il y a là des problèmes et je ne sais pas en quoi l'organisation-cadre les réglerait.
    Je vais laisser l'autre témoin répondre à cette question.
    La pression qui pousse à « publier ou périr » est également problématique, et le sentiment que chaque fois que vous entreprenez une étude, vous devez publier quelque chose parce que votre prochaine subvention dépend de la démonstration que chaque investissement précédent a abouti à des résultats publiés. Cette pression semble maintenant faire en sorte que certains scientifiques ne font pas tout à fait le travail rigoureux d'analyse des données et que les publications qui en découlent ne sont pas aussi fiables qu'elles devraient l'être. L'épreuve du temps nous le révèle.
    Cela dit, dans le contexte d'un organisme axé sur la mission, j'espère qu'il y aura des attentes en matière de transparence dans la recherche qui empêcheront ces raccourcis, ces analyses incomplètes ou qui feront en sorte que les données soient mises à disposition par l'entremise de l'infrastructure pour les dépôts de données, afin que nous ne nous retrouvions pas avec de tels problèmes de résultats de recherche non reproductibles.
    Il ne me reste que 30 secondes, alors je vais devoir vous répondre par écrit.
    Pour changer un peu de sujet, la Stratégie canadienne de recherche sur le cerveau, madame Young, recommande que « le président de la l'organisation-cadre [...] possède une solide expérience scientifique pour assurer l'harmonisation des programmes de l'organisation-cadre avec les capacités scientifiques dans l'ensemble de l'écosystème. »
    Est‑ce que cela signifie que personne du côté du CRSH ne pourrait occuper ce poste ou est‑ce que cela exclurait simplement les sciences humaines de l'équation?
    Je vous remercie de me donner l'occasion de clarifier les choses.
    Pour nous, tout cela relève de la science, alors il faut absolument les inclure. Surtout pour un champ comme le cerveau, qui est tellement complexe.
    Si vous me permettez de revenir un peu à votre autre question, la question de la reproductibilité tient également à la complexité du cerveau. Certains des premiers essais cliniques ont échoué parce que nous avons réalisé qu'il y avait d'autres facteurs à intégrer et dont nous n'avions pas tenu compte. À mesure que nous recueillons plus de données, à mesure que nous comprenons la situation, nous réalisons pourquoi cela n'a pas fonctionné avant et nous pouvons peaufiner l'étude en travaillant davantage.
    Merci.
    Monsieur Jaczek, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins de leurs témoignages.
    J'aimerais revenir un peu sur les questions de M. Tochor.
    Madame Young, dans vos recommandations, vous proposez la création d'un conseil d'administration indépendant pour l'organisation-cadre elle-même.
    Le premier groupe de témoins d'aujourd'hui nous a présenté des témoignages très convaincants sur la recherche appliquée et le rôle des écoles polytechniques. Madame Young, pourriez-vous nous dire qui devrait faire partie de ce conseil d'administration indépendant, et êtes-vous d'accord pour dire que la recherche appliquée a un rôle important à jouer?
(1810)
    Je pense, pour revenir à ce conseil d'administration indépendant, qu'il s'agissait d'une recommandation du rapport Bouchard et du rapport Naylor, alors je n'en tire aucun crédit, mais j'apprécie vraiment votre question, parce que je pense que nous opposons trop souvent la recherche fondamentale et la recherche appliquée et ce n'est tout simplement plus une réalité aujourd'hui. C'est un peu dépassé à l'ère des découvertes rapides actuelles.
    Il s'agit plutôt d'un cycle dynamique non linéaire qui crée un échange de renseignements et une émulation permanents, ce qui signifie que nous avons besoin de gens qui possèdent les connaissances appliquées, des spécialistes des données, des gens qui savent faire fonctionner un appareil d'IRM. Il faut des postes techniques pour lesquels les étudiants sont formés dans des collèges, au NAIT, par exemple, à Edmonton, où j'étais .
    Nous avons besoin de ces emplois et nous avons besoin que ceux qui les occupent travaillent ensemble. C'est la raison pour laquelle le financement de la science et de la recherche, surtout avec ce genre d'emplois de personnel dans l'infrastructure, ne se limite pas à la découverte par rapport à la recherche appliquée ou à la recherche fondamentale par rapport à la recherche appliquée.
    Merci.
    Cela peut étonner mes collègues conservateurs, mais personnellement, je serais très réticent à ce qu'une grosse bureaucratie soit nécessaire pour cette organisation-cadre.
    Je présume que ce conseil d'administration sera très au fait du travail des trois conseils. Il aura pleinement accès aux fonds de recherche alloués par chacun des membres des trois conseils et pourra donc leur demander de permettre qu'une partie de leur travail de recherche soit utilisée de façon coordonnée entre les trois conseils. Cela pourrait en fait permettre d'économiser du financement, car on peut supposer qu'une grande partie de la recherche actuellement effectuée par les trois conseils serait très utile pour ces projets axés sur la mission.
    Ai‑je raison de supposer cela?
    Oui, absolument.
    Les gens pensent que cela se ferait naturellement, mais il faut ce soutien, cette structure pour chapeauter tout cela. De la même façon, avec notre Stratégie nationale de recherche sur le cerveau, nous appuyons entièrement la stratégie nationale sur la démence, la stratégie sur l'autisme et, maintenant, la stratégie proposée sur les lésions cérébrales, parce que ces spécialistes connaissent les particularités de ces domaines et leurs besoins propres.
    Ensuite, nous pouvons fournir le soutien global qui permettrait à tous ces travaux de recherche d'être réunis d'une manière qui dépasse la somme de ses parties.
    Madame Morin, je remarque dans votre cursus que vous avez travaillé à Génome Canada. Je suis intriguée. De toute évidence, Génome Canada finance la recherche. Pensez-vous qu'il serait avantageux d'intégrer non seulement les trois conseils, mais peut-être aussi Génome Canada?
    Le premier groupe de témoins nous a parlé des centres d'accès à la technologie. Y a‑t‑il d'autres organismes qui pourraient contribuer à ces projets axés sur la mission?
    Nous constatons dans l'ensemble de l'écosystème que différentes organisations ont été en mesure de mettre à l'essai différentes modalités de recherche ou de financement de la recherche.
    Compte tenu de ma connaissance de Génome Canada, je peux témoigner des nombreuses choses formidables que cette organisation a pu faire. Mon exemple préféré, c'est que la recherche de l'Alliance en génomique a progressé grâce à un volet intégré qui portait sur les sciences sociales et humaines, par l'entremise du programme GE3LS, la génomique et son programme portant sur les aspects environnementaux, économiques, éthiques, juridiques et sociaux.
    L'intégration des sciences sociales et humaines dans les sciences génomiques est une idée que je défends ici pour dire que la recherche axée sur la mission devrait comporter ce genre d'intégration et d'interdisciplinarité et, parfois, être dirigée par les sciences sociales et humaines.
    Si Génome Canada n'existait pas et que nous comptions uniquement sur ce que les trois conseils subventionnaires ont fait dans le cadre de leurs possibilités de financement régulières, nous n'aurions pas vu les avantages de cette modalité, alors je crois qu'il y a un risque à tout intégrer. Cependant il n'y a rien à l'heure actuelle qui empêche les trois organismes de financement ou une organisation-cadre d'examiner également certaines questions liées à la génomique.
    Je pense que c'est un choix difficile à faire, mais il y a des façons de mettre à l'essai des modalités de financement qui sont vraiment essentielles à l'apprentissage. J'espère que ces excellentes idées se retrouveront dans l'organisation-cadre.
(1815)
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Blanchette-Joncas pour deux minutes et demie, s'il vous plaît.

[Français]

    Ma question s'adresse à M. Maltais, de l'Acfas.
    Dans le cadre de la réorganisation du financement de la recherche, quelles mesures l'Acfas propose-t-elle pour garantir la participation active des organisations francophones à la gestion et à la répartition des fonds, afin que les décisions de financement reflètent précisément les priorités de la vision de la francophonie tout en évitant une domination des perspectives anglophones?
    Je ne sais pas si je vais répondre directement à votre question.
    D'abord, il faut comprendre que l'Acfas est multidisciplinaire et représente des chercheurs de tous les domaines. Nous faisons la promotion de toutes les sciences et nous sommes la seule organisation au Canada à jouer ce rôle. Nous sommes le plus grand organisme au monde de promotion de la science en français. Quand nous parlons, ce sont nos membres, des individus, qui parlent, car nous les consultons pour prendre nos décisions.
    L'une des questions posées pendant les dernières consultations portait sur les principes clés qui devraient guider la prise de décision supplémentaire concernant la conception et la mise en œuvre de la nouvelle organisation. Nos membres ont répondu que l'équité linguistique, l'équité institutionnelle en matière de financement de la recherche, la gestion axée sur les données et la consultation étaient les critères à privilégier.
    Je vous remercie.
    En matière de représentativité, quel rôle l'Acfas pourrait-elle jouer? Comme vous venez de le dire, l'Acfas est incontournable dans la recherche en français et sa diffusion. Quel rôle souhaiteriez-vous jouer dans le Groupe consultatif externe sur la création et la diffusion d’information scientifique en français, qui vient d'être créé?
    C'est une excellente question.
    Je pense que nous sommes un porte-parole avéré, qui fait autorité et qui travaille avec sérieux. De plus, quand nous faisons des recommandations, comme le président, M. Maltais, vient de le dire, nous représentons une communauté qui s'étend à la grandeur du Canada. Il y a plus ou moins 65 000 chercheurs d'expression française au Canada. Il y en a 35 000 au Québec et 30 000 dans toutes les autres provinces, d'est en ouest. Quand l'Acfas parle, fait une analyse ou formule une recommandation au gouvernement ou à une autre instance, c'est en leur nom qu'elle le fait.
    Pour répondre à votre question, je pense que la moindre des choses que nous puissions demander serait de prendre en compte les recommandations que nous avons faites dans les cinq mémoires que nous avons déposés — celui d'aujourd'hui sera le sixième. Comme je l'ai dit, elles portent sur des questions connexes, qui touchent directement la question de la création de l'organisation-cadre.
    Ce serait aussi de continuer à nous faire intervenir et à nous voir comme — je vais le dire — un allié. Nous représentons une communauté qui vaut son pesant d'or pour le Canada. Le Canada a cette particularité d'avoir deux langues officielles, ce qui l'inscrit d'emblée dans deux réseaux scientifiques internationaux. Peu de pays ont la chance de faire rayonner des chercheurs...

[Traduction]

    Notre temps est écoulé.

[Français]

    ... leur expertise et leur savoir.

[Traduction]

    Merci.
    Nous passons maintenant à Mme Blaney pour deux minutes et demie.
    Merci, madame la présidente. Je suis heureuse de ne pas avoir votre poste. Il est difficile d'arrêter les gens qui partagent des renseignements vraiment importants.
    Je vais poser la même question à Mme Morin et à Mme Young.
    Cela nous ramène à la conversation que vous avez eue tout à l'heure au sujet de la composition du conseil d'administration, et pendant que j'y réfléchissais — je suis nouvelle au sein de ce comité, alors je ne suis pas tout à fait familière de cette information et j'espère pouvoir la résumer de façon assez concise —, j'ai eu une idée. Je sais que les conseils d'administration diversifiés font souvent le meilleur travail parce qu'ils rassemblent des idées plus complexes et divergentes, et si vous prenez le temps d'aller au fond des choses, vous avez souvent la meilleure solution parce que vous l'avez examinée sous différents angles.
    En ce qui concerne le conseil d'administration, quel genre de représentation imaginez-vous? S'agirait‑il seulement du milieu de la recherche universitaire, ou voulez-vous intégrer d'autres points de vue qui représentent de façon plus générale l'expérience du Canada?
    Je vais commencer par vous, madame Morin, puis je passerai à vous, madame Young.
(1820)
    Nous avons beaucoup mis l'accent sur la diversité disciplinaire au sein du conseil d'administration, mais je pense que vous avez raison de dire que nous devrions également tenir compte de la diversité sectorielle. Cependant, je pense qu'il peut être difficile pour des gens qui ne connaissent pas du tout le monde de la recherche universitaire de contribuer facilement à cette réflexion.
    Certains sont extérieurs au milieu universitaire, mais ils connaissent le sujet et seraient à l'aise dans les échanges avec leurs pairs. Il y a certainement la diversité, comme vous le dites, des disciplines et des secteurs, ainsi que la diversité individuelle, mais pour faciliter les échanges, la connaissance du sujet demeurera essentielle.
    Je conviens que le conseil d'administration devrait être très diversifié, et je peux parler de l'élaboration de notre stratégie nationale. Elle était fondée non seulement sur les dirigeants — tous ces directeurs d'instituts —, mais aussi sur les chercheurs en début de carrière, de sorte qu'il y a des gens à différentes étapes de leur carrière.
    De plus, les connaissances autochtones et les modes de savoir autochtones sont au cœur de notre travail, parce que nous visons vraiment à examiner le cerveau de façon plus holistique. Nous comprenons que nous ne pouvons pas seulement regarder les molécules ou même les réseaux cérébraux, nous devons vraiment regarder au‑delà pour voir d'autres connexions avec la communauté et avec d'autres personnes. De façon générale, dans toutes les différentes nations autochtones présentes dans notre pays, on examine la santé du cerveau et la santé de façon beaucoup plus holistique, et c'est comme si les scientifiques commençaient à peine à comprendre.
    C'est très utile. Lorsque nous avons parlé à des patients, ils nous ont souvent dit que leur problème cérébral ne correspondait pas à une seule catégorie ou à une seule description.
    C'est la fin de nos ressources. En fait, nous avons dépassé notre temps d'environ une minute.
    Merci beaucoup à nos témoins.
    Notre prochaine réunion aura lieu le mardi 19 novembre.
    Plaît‑il au Comité de lever la séance?
    Des députés: D'accord.
    La présidente: La séance est levée.
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