RNNR Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des ressources naturelles
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 5 février 2019
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour à tous. Soyez les bienvenus.
Nous avons un peu de retard. Je crois comprendre que c'est plus long que prévu à la sécurité. Nous nous excusons auprès de nos témoins et nous vous remercions de votre patience. D'après ce que je sais, il y a un témoin qui est coincé en ligne à l'étage du bas. Alors, plutôt que de l'attendre, nous allons commencer la réunion.
Avant de passer à nos témoins, je tiens à souhaiter la bienvenue de manière officielle à notre tout nouveau membre, M. Graham.
Merci de vous joindre à nous.
Sont ici avec nous trois de nos quatre groupes de témoins, nommément M. Brian Craik, Mme Kate Darling, M. Duane Ningaqsiq Smith, M. Graeme Reed et le chef Byron Louis.
Merci à vous tous de votre présence.
Selon nos façons de faire, chaque organisme représenté ici dispose de 10 minutes pour faire un exposé.
Une fois toutes les présentations terminées — et souhaitons que M. Helin sera parmi nous à ce moment-là —, nous passerons aux questions des membres du Comité.
Monsieur Craik, comme vous êtes le premier sur la liste, nous allons commencer par vous. Vous avez la parole.
Monsieur le président, madame la vice-présidente, je vous remercie. Je m'appelle Brian Craik et je suis le porte-parole des Cris en ce qui concerne les enjeux de compétence fédérale. Je suis à Ottawa avec Mandy Gull, qui était censée m'accompagner ici, mais elle s'est trouvée malade et dans l'impossibilité de s'exécuter.
Les Cris d'Eeyou Istchee ne prétendent pas que leur expérience en matière de projets énergétiques est nécessairement une source d’enseignements pour les autres. Chaque projet doit être examiné selon ses propres mérites, et cela doit être fait par ceux qui cherchent des moyens de faire avancer leurs communautés.
Au cours des 40 dernières années, le rôle des Cris d'Eeyou Istchee en matière de développement de l'énergie et des ressources naturelles a changé radicalement. Il y a 40 ans, le développement de notre territoire traditionnel était initié et mené par des étrangers. Les Cris étaient très peu consultés ou sollicités, voire pas du tout. Aujourd'hui, ce serait impensable. Comment en sommes-nous arrivés là?
En vous faisant ce récit, je passerai en revue certains événements clés de l'histoire récente des Cris, notamment la Convention de la Baie-James et du Nord québécois, l'opposition au projet hydroélectrique de Grande-Baleine et l'instauration de la Paix des braves. Avant l'arrivée des Européens dans Eeyou Istchee — ce qui signifie « la terre des gens » —, nos moyens de subsistance étaient la chasse, la pêche et la trappe.
Pendant les quelque 400 ans qui ont suivi l'arrivée des premiers Européens dans Eeyou Istchee, les choses n'ont pas beaucoup changé. C'est au cours du XXe siècle que les changements ont commencé. Le commerce des fourrures a connu un déclin avant d'être revitalisé au début du XXe siècle. Le gouvernement du Québec et le gouvernement du Canada ont doté notre territoire de certains services de base en matière de santé et d'éducation. Nos enfants ont été envoyés dans des pensionnats, avec tous les problèmes que cela a engendrés et dont nous tentons encore de nous remettre. Toutefois, sur une note plus positive, il convient de souligner l'instauration d'un programme pour la conservation du castor qui, des années 1930 aux années 1960, a contribué à relancer l'économie des communautés de la baie James. Les gens n'étaient pas riches, mais ils étaient fiers de leur gagne-pain.
En 1971, le gouvernement du Québec a annoncé la construction du projet hydroélectrique de la Baie-James, un projet énorme qui allait avoir une incidence marquée sur les Cris et sur leur mode vie traditionnel. À cette époque, la plupart de nos gens passaient la majeure partie de l'année sur le territoire à pratiquer nos activités traditionnelles. Du jour au lendemain, ils ont dû faire face à un véritable assaut d'avions, d'hélicoptères, de bulldozers et de camions lourds. Des routes ont été tracées à travers notre territoire à coups de dynamite; des barrages ont été dressés et nos rivières ont été endiguées. Pour notre peuple, c’était une invasion.
Le Québec ne nous a pas consultés à propos de ce projet, et il n'a pas cherché à obtenir notre consentement. Il a allégué que nous n'avions aucun droit sur le territoire que nous occupions pourtant depuis des milliers d'années. On estimait que les Cris n'avaient pas le droit de jouir de leur environnement ou de vivre comme ils le faisaient. Ils n'avaient aucun droit. C'est ce qui a donné le coup d'envoi à un marathon juridique qui a culminé, en novembre 1973, avec la décision du juge Albert Malouf de nous accorder une injonction temporaire pour stopper le projet de la Baie-James.
Bien que l’injonction ait été renversée au bout d’une semaine seulement, elle a inspiré une certaine crainte aux bailleurs de fonds de ces grands projets. Au cours des deux années suivantes, les Cris, les Inuits du Nunavik, le Québec et le Canada ont mené d'intenses négociations pour arriver à une entente. Cette entente a été présentée aux Cris et aux Inuits comme étant un partenariat, comme un protocole de cohabitation. C'est un document complexe de quelque 30 chapitres, qui contient, en outre, la description de régimes pour la gestion des terres ainsi que pour la gouvernance locale et régionale. On y parle aussi de santé et d'éducation, de justice et de services de police, de développement économique et communautaire, et d’un programme innovateur de sécurité du revenu pour appuyer les activités traditionnelles des Cris.
Le chapitre 22 de l’entente établit un régime cri de protection de l'environnement et du milieu social, dont le premier processus d'évaluation et d'examen environnemental au Canada.
Par la suite est arrivé le projet hydroélectrique Grande-Baleine, qui a mobilisé une partie des années 1980 et 1990. Ni le Québec ni le Canada n'étaient à la hauteur des attentes des Cris relativement à la mise en oeuvre de leurs droits. Lorsque M. Bourassa a annoncé ce projet, les Cris ont entamé des procédures juridiques pour s'y opposer, et ils ont dû faire preuve de beaucoup de persévérance pour y mettre un frein.
Les Cris avaient signé une entente avec le Canada et avec le Québec, mais cette entente n'a pas été respectée par le Québec et le Canada. En fin de compte, le projet de la Grande Rivière de la Baleine a en quelque sorte été mis en veilleuse.
Puis, il y a eu la Paix des Braves. Les Cris, le Canada et le Québec cherchaient un moyen de se réunir et de résoudre leurs différends. Or, le Québec et les Cris sont parvenus à s'entendre bilatéralement et à conclure une entente. S'il y a une chose à retenir de cela, c'est que les Cris ont été en mesure de travailler avec le gouvernement provincial, le gouvernement fédéral et, dans une certaine mesure, avec les Inuits du Nord du Québec.
La Paix des Braves est une entente de nation à nation, et c'est comme cela qu'elle est perçue. Depuis sa signature, les Cris ont travaillé à d'autres projets qui, essentiellement, ont été conçus pour tenir compte du fait que les projets précédents — comme celui de Grande-Baleine — ont engendré d'énormes problèmes. Ils ont complètement coupé certains cours d'eau et ils ont causé d'importants torts sur le plan écologique. Des poissons ont été contaminés au mercure et l'on a vu arriver des problèmes de toutes sortes, notamment des problèmes sociaux.
Depuis la Paix des Braves, les Cris ont trouvé des façons de travailler avec Québec, et le climat des relations s'est transformé de bout en bout.
Merci.
Merci beaucoup.
Monsieur Helin, merci beaucoup de vous être joint à nous. Je m'excuse pour la longue attente à la sécurité. Nous avons malheureusement dû commencer sans vous.
La procédure est la suivante: nous laissons tous les groupes de témoins faire leur exposé, puis nous passons aux questions des membres du Comité.
Monsieur Smith, nous vous écoutons.
Je m'excuse d'avance si je vais un peu vite, mais je crois que mon exposé fait plus que 10 minutes.
Je vous remercie de me donner l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui. Tout d'abord, je m'appelle Duane Smith. Vous pouvez vous en tenir au nom anglais. Je sais que mon nom inuvialuit est un peu difficile. Je suis accompagné de mon avocate générale, Kate Darling.
Je viens de la région désignée des Inuvialuit. C'est comme cela qu'on la nomme. C'est une région qui est située à l'extrême nord-ouest du Canada. C'est à seulement neuf heures d'ici en avion à réaction, mais c'est toujours au Canada, alors n'hésitez pas à venir nous rendre visite un de ces jours.
La région comprend les terres, les glaces et les eaux du delta du Mackenzie, la mer de Beaufort et, bien sûr, l'océan Arctique. Elle s'étend sur un peu moins d'un million de kilomètres carrés, dont la grande majorité, bien sûr, est l'océan — dont la mer de Beaufort. Notre région compte six communautés. Elles sont situées dans le delta, ou le long de la côte. Il y a environ 6 000 bénéficiaires inuvialuit.
En 1984, nous avons signé la Convention définitive des Inuvialuit, le traité moderne. Il s'agit d'une entente de revendication territoriale qui a été conclue en réponse à l'intensification des activités de développement sur nos terres et dans nos eaux. C'était le premier accord de revendications territoriales global conclu au nord du 60e parallèle et le deuxième accord de ce type de l'histoire du Canada. C'était aussi le premier traité des temps modernes à créer un parc national d'un commun accord et à prévoir la constitution d'un parc territorial.
La Convention définitive des Inuvialuit appartient aux Inuvialuit et au Canada. Je ne cesse de le répéter, parce que le Canada en est signataire et qu'il a, tout comme nous, des responsabilités et des obligations en matière d'application.
Notre région est très riche sur le plan des ressources, mais elle n'a pas beaucoup d'infrastructures. Tant à terre qu'en mer, nous détenons des milliards de milliards de pieds cubes de gaz naturel, une source d'énergie propre par rapport aux autres sources d'énergie non renouvelables.
Depuis la construction de la route de Dempster, le développement des infrastructures dans l'Arctique n'a pas eu de plan stratégique. Les accès commerciaux à l'océan sont limités. Les installations locales de production d'énergie font défaut, il n'y a pas de télécommunications adéquates, etc. Je suis certain que ce n'est pas la première fois qu'on vous brosse ce portrait.
En ce qui concerne l'insécurité énergétique dans ma région, par exemple, nous importons par camion la plupart des produits dont nous avons besoin. Ces camions parcourent des milliers de kilomètres depuis la Colombie-Britannique ou l'Alberta pour alimenter les collectivités en énergie, une situation qui n'a aucun bon sens pour nous puisque nous sommes assis sur neuf milliards de milliards de pieds cubes de gaz.
La route Dempster est sujette à de fréquentes fermetures et à de longues périodes de gel. Deux grands plans d'eau doivent être traversés et il n'y a pas de pont, ce qui, là aussi, rend compte des lacunes sur le plan des infrastructures. Nous devons attendre que ces plans d'eau gèlent à l'automne pour être en mesure de passer sur la glace, ou attendre que les glaces fondent pour permettre aux traversiers de circuler, ce qu'ils font au printemps et tout l'été.
Un autre exemple de notre isolement, c'est la ville la plus proche, si on peut l'appeler ainsi. Il s'agit de Whitehorse, qui compte 24 000 habitants et qui se trouve à plus de 1 200 kilomètres sur cette route. Il nous faut donc transporter le matériel par camion sur environ 2 000 kilomètres pour approvisionner notre collectivité en énergie. Je vous laisse imaginer la quantité d'émissions de gaz à effet de serre que ce procédé génère. Nous devons aussi assumer des frais de transport élevés, et le nombre d'entreprises capables de fournir cette énergie est limité.
La région a un revenu disponible très limité pour l'ensemble de ses résidents et elle n'est pas en mesure de payer davantage. Afin d'être en mesure de payer le chauffage et l'électricité, les résidents renoncent à des aliments nutritifs, à des réparations domiciliaires et à des possibilités pour leurs enfants. Les coûts de l'énergie dans notre région sont probablement les plus élevés au Canada.
Il y a une réelle volonté de développer les ressources énergétiques locales, mais, là encore, il faut des infrastructures.
Dans une optique géopolitique, soulignons que les États émergents sur le plan économique et ceux dont la population augmente veulent une énergie plus propre. Cela s'explique en partie par les coûts associés à la pollution locale et par la nécessité de se conformer à certains objectifs internationaux.
Ces États s'adressent déjà à des organisations autochtones dans des régions riches en ressources naturelles en leur proposant des projets de développement d'infrastructures et des accords d'investissement concurrentiels qui sont attirants pour des populations qui souffrent d'une insécurité énergétique chronique.
Le gaz naturel en provenance du Canada devrait être un élément clé de l'abandon graduel mondial du charbon et du diesel. La démarche permettrait d'optimiser l'utilisation des ressources locales tout en contribuant à l'atteinte des objectifs de réduction des émissions de carbone. Des cadres de droits clairs, des relations mutuellement respectueuses et des plans stratégiques tangibles pour le développement des infrastructures dans les régions éloignées sont nécessaires pour contrôler l'accès et maximiser les avantages pour les Canadiens.
Pour ce qui est d'interagir avec les organisations autochtones, je rappelle que les Inuvialuit ont des décennies d'expérience de négociation avec les conglomérats multinationaux de pétrole et de gaz qui se sont montrés intéressés au développement du pétrole et du gaz dans notre région. Forts de cette expérience, nous sommes intervenus à Clyde River pour faire valoir que le consentement préalable, libre et éclairé — tel que décrit à l'article 32 2. de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones —, est le moyen le plus sûr d'obtenir des investissements et un développement énergétiques prévisibles au Canada. La consultation précoce des titulaires de droits facilite une compréhension commune des répercussions sur les droits prévus aux termes d'un accord de revendication territoriale et l'harmonisation des intérêts mutuels, comme la nécessité de la sécurité énergétique et de la réduction des émissions.
Le consentement préalable, libre et éclairé s'applique à la conception, à la mise en oeuvre et aux impacts attendus du projet. Le fait de s'astreindre au processus de réalisation du consentement préalable, libre et éclairé peut démontrer les gains d'efficacité qui peuvent être faits en développant une ressource à partir des capacités locales. Nous avons soutenu que le refus de donner son consentement doit être raisonnable par rapport aux circonstances et qu'il ne constitue pas un veto. Il faut beaucoup de temps pour atteindre un consentement préalable, libre et éclairé, mais cela doit être considéré comme un investissement dans la réussite d'un projet. Cette approche est conforme aux normes de rendement qui ont été adoptées par l'organisme de la Société financière internationale de la Banque mondiale et reprises de façon volontaire par les banques canadiennes.
Le Canada doit travailler avec les organisations autochtones pour préparer le terrain. En ce qui nous concerne, nous devrons mettre à niveau notre entente sur les revendications territoriales afin qu'elle tienne compte du paysage environnemental, juridique et géopolitique actuel.
Soit dit en passant, dans notre région, nos processus de sélection et d'examen ont été très fructueux et, comme je l'ai dit, cela va faire 35 ans que la convention a été signée. Or, lorsqu'elle a été négociée à la fin des années 1970 et au début des années 1980, l'ouverture des voies maritimes de l'Arctique n'était pas à l'ordre du jour.
Il faut collaborer avec les organisations autochtones pour planifier des investissements dans les infrastructures qui profiteront aux résidents locaux et à l'économie canadienne au cours des 20 prochaines années et pour déterminer ce qui rend les populations vulnérables aux intérêts extraterritoriaux également.
En conclusion, je tiens simplement à vous remercier encore une fois de m'avoir donné cette occasion de m'adresser à vous. Nous serons heureux de répondre à vos questions le temps venu. Qujannamiik.
Premièrement, j'aimerais préciser que je fais cette déclaration sur les terres ancestrales du peuple algonquin.
Mesdames et messieurs les membres du Comité, amis et parents, merci de m'avoir invité aujourd'hui à faire part des opinions de l'Assemblée des Premières Nations sur les pratiques exemplaires internationales afin de faire participer les communautés autochtones à des projets énergétiques d'envergure.
J'aimerais commencer en abordant l'important point soulevé par notre chef national, Perry Bellegrade, qui a déclaré que les Premières Nations ne sont pas opposées au développement, mais que nous établirons un équilibre entre ce qui est bon pour l'économie et l'environnement et nos responsabilités à l'égard de nos territoires traditionnels.
De toute évidence, lorsque nous nous penchons sur les secteurs de l'énergie et des mines et de leur importance pour nos économies locales, régionales et nationales, cela me rappelle qu'il faut aborder la façon de combler les lacunes dans le cadre des discussions sur l'énergie.
Un élément important pour combler ces lacunes consiste à respecter la promesse d'établir une relation de nation à nation avec des processus décisionnels par l'entremise de partenariats. C'est un élément essentiel pour parvenir à un consensus — pour mettre sur pied un processus dans lequel tous les Canadiens et toutes les Premières Nations peuvent avoir confiance.
Nous travaillons en partenariat pour déceler et aborder les questions minières transfrontalières qui ont une incidence sur nos territoires. Cela représente une partie des travaux qui sont menés en collaboration en Colombie-Britannique. L'un des exemples que j'aimerais donner est notre relation avec les tribus confédérées de Colville qui vivent dans l'État de Washington. La majorité de nos membres vivent à Washington, en Idaho et au Montana. Ils parlent le nsyilxcen et font encore partie de notre conseil tribal. L'une des répercussions de l'exploitation minière est que les États-Unis ont traîné Teck Cominco devant les tribunaux et ont remporté une cause pour des dommages en aval causés par Teck Cominco, qui est située à proximité de Trail, en Colombie-Britannique. L'entreprise a déversé des résidus dans le fleuve Columbia pendant plus d'un siècle.
L'affaire judiciaire qui a été portée devant les tribunaux américains a jugé que l'entreprise minière canadienne, Teck Cominco, pourrait être inculpée d'avoir causé des dommages en aval aux États-Unis.
Par ailleurs, jusqu'à présent, dans le fleuve Columbia... Ces activités ont commencé aux alentours de 1946, avec la construction du barrage Grand Coulee dans l'État de Washington. Le Canada n'avait relevé aucune répercussion en amont, ce qui a donné lieu à la construction du barrage Grand Coulee — dont la moitié est située sur la réserve de Colville —, mais il y a aussi le chef Joseph. Je pense qu'il y a des réservoirs visés par des traités ou non qui desservent ce barrage de haute chute à des fins de production énergétique aux États-Unis, ce qui est avantageux pour le Canada dans ce secteur particulier.
Parfois, les gens disent que l'énergie hydroélectrique est de l'énergie propre. Non, ce n'est pas le cas — pas dans un contexte autochtone et pas si l'on tient compte des répercussions sur les peuples autochtones lorsque l'hydrogramme naturel est modifié pour un qui est construit le long de réservoirs qui ralentissent le débit de l'eau dans des crues qui transportaient des saumoneaux vers l'océan Pacifique. Cela nuit également à la montaison du saumon rouge de l'Okanagan qui franchit neuf barrages aux États-Unis.
Il y a deux ou trois ans, des changements ont été apportés. Ce qui se passe dans le système de l'Okanagan, c'est que la colonne d'eau, l'eau désoxydée, ne suffit pas pour que les poissons, surtout le saumon, puissent survivre. On se retrouve avec ce que l'on appelle un blocage thermal, où le saumon dans le fleuve Columbia peut résister à des températures de 22 °C. Lorsqu'il y a un barrage, l'eau change; elle devient presque de l'eau de décantation, et l'eau à la surface se déverse dans le bassin suivant.
Durant les mois d'été, on a également de l'eau chauffée qui redescend dans les systèmes qui se déverse dans le réservoir Rufus Woods dans l'État de Washington. Par conséquent, la montaison de saumons rouges est passée de 400 000 à 200 000. Le système de l'Okanagan est essentiellement le seul système dans le fleuve Columbia où l'on retrouve encore des espèces anadromes qui retournent dans les eaux canadiennes, dans le sous-bassin de l'Okanagan.
C'est un exemple d'un résultat ou d'un impact mesurable de ce qui serait considéré comme étant un projet énergétique d'envergure.
Pour passer à un autre sujet, dans un rapport de 2015, un groupe de travail indépendant sur les ressources naturelles a réclamé que des mesures immédiates soient prises pour veiller à ce que toutes les Premières Nations participent à l'exploitation des ressources naturelles au Canada et en bénéficient. Les recommandations incluaient la création d'une table ronde nationale à laquelle seraient invités des représentants des Premières Nations, des provinces, des territoires, de l'industrie et d'organisations non gouvernementales; la tenue d'une discussion sur le partage des recettes de l'exploitation des ressources en tant que meilleur moyen d'éliminer les disparités socioéconomiques; l'établissement de connaissances et de ressources centralisées pour soutenir les Premières Nations; et le forum international pour promouvoir les partenariats commerciaux et internationaux avec les Premières Nations.
Les Premières Nations en tant que détenteurs de droits, propriétaires et membres d'une population active florissante doivent participer aux solutions et en faire partie. Les entreprises des Premières Nations doivent être incluses dans les processus de passation de marchés et les avantages issus des possibilités d'approvisionnement. Les processus doivent réunir des mécanismes qui comportent des permis, des engagements et des pratiques exemplaires.
Le secteur de l'énergie — ou l'ensemble de l'économie canadienne, en fait — est un partenaire indispensable qui ne doit pas être exclu des efforts déployés en vue de renouveler notre relation.
Lorsque nous parlons de réconciliation, je pense que d'un point de vue des Premières Nations, nous devons vraiment définir ce qu'est la réconciliation. Dans le dictionnaire, on cherche un exemple ou une signification de réconciliation, et c'est le renouvellement de relations après une longue période d'hostilités, ce qui décrit essentiellement les relations des Premières Nations avec le Canada sur une longue période, que ce soit avec le Canada ou les provinces.
Quelle est la définition que nous utilisons pour la réconciliation? Est-ce plus ou moins le modèle international qui pourrait servir d'exemple de ce qui s'est produit après la Seconde Guerre mondiale, où l'Allemagne, l'Italie et le Japon ont pu se reconstruire sur les plans social et économique? Est-ce le type de réconciliation dont nous discutons, ou est-ce à un niveau moindre? Je pense que dans le cas des Premières Nations, nous avons besoin de pouvoir nous reconstruire sur le plan social mais aussi sur le plan économique. Les projets d'envergure jouent un rôle important.
Avant de donner des exemples précis, je veux commencer par expliquer là où nous en sommes. C'est une occasion de parvenir à une véritable réconciliation. Premièrement, comme nous le savons tous, le Canada a annoncé qu'il appuie sans réserve la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Cette déclaration n'a pas créé de nouveaux droits puisque ces droits sont inhérents et préexistants; elle confirme simplement les droits de la personne des Autochtones.
Au gouvernement — et dans le projet de loi C-262 notamment —, nous avons parlé de réaliser ces droits et de trouver un meilleur moyen de travailler ensemble pour éviter de dépenser des millions de dollars et de perdre des années à contester les décisions des tribunaux. De mauvais processus environnementaux donnent lieu à des centaines d'examens judiciaires inutiles chaque année. Les partenariats avec les Premières Nations doivent reconnaître et respecter les droits existants. Le gouvernement doit travailler avec nous pour établir les lois, les politiques et les pratiques nécessaires pour respecter nos droits et notre statut de peuples qui ont droit à l'autodétermination.
La conversation finira inévitablement par aborder la norme du consentement libre, préalable et éclairé. Je tiens à préciser que le consentement libre, préalable et éclairé n'a pas été créé dans le cadre de la DNUDPA ou des droits des Autochtones. Il n'a pas été créé dans le projet de loi C-69 ou le projet de loi C-262. Il existait déjà dans la loi internationale.
C'est un élément essentiel du droit à l'autodétermination de tous les peuples, y compris les peuples autochtones, ce que le Canada reconnaît depuis des décennies. Par exemple, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels prévoient, dans leur premier article, que « Tous les peuples ont le droit de disposer d'eux-mêmes ».
Le consentement est essentiel pour la négociation de nation à nation, l'interprétation des traités et la conclusion des traités, en général. C'est entre les nations qui exercent leur droit à l'autodétermination. Les Premières Nations ont déjà le droit de prendre part aux décisions qui peuvent avoir une incidence sur leurs droits, leur propriété, leurs cultures, leur environnement et leur capacité d'exercer leur droit à l'autodétermination.
Qu'est-ce que cela signifie dans le cadre de cette étude? Ce qu'il faut, c'est un meilleur processus pour des projets énergétiques d'envergure, un qui est conçu avec les Premières Nations, qui les fait participer dès le début des projets. On n'a pas besoin de réinventer la roue. Le consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause existe partout dans le monde. Il y a une jurisprudence internationale volumineuse sur laquelle on peut s'appuyer.
Pour ce qui est de la gestion de la transition énergétique par les Premières Nations, lorsqu'on leur en donne l'occasion, les Premières Nations participent au développement énergétique et en bénéficient.
Comme bon nombre d'entre vous le savent déjà, les Premières Nations sur l'île de la Tortue réalisent des investissements dans l'énergie propre et l'économie à faibles émissions de carbone. Ces investissements sont soutenus par une approche énergique du gouvernement du Canada pour investir dans des projets du secteur énergétique qui appuient la transition vers une économie à faibles émissions de carbone: génération, transmission et exportation. Par exemple, le budget fédéral s'engage à verser 2,37 milliards de dollars sur quatre ans dans l'industrie de l'énergie propre du Canada. De plus, le gouvernement prévoit investir 21,9 milliards de dollars sur 11 ans dans l'infrastructure verte.
Nos enseignements nous ont appris à être des intendants de la terre. Les Premières Nations peuvent être alors des défenseurs de l'énergie propre et des énergies de remplacement à l'avenir. Par conséquent, les Premières Nations participent de plus en plus à l'économie croissante de l'énergie propre du Canada en vue de générer des revenus d'une manière qui est compatible avec nos valeurs culturelles et environnementales.
Il faut encourager ces efforts, appuyer l'indépendance énergétique et contribuer à la transition pour abandonner peu à peu la production de diesel dans environ 112 Premières Nations qui dépendent du diesel au Canada, dont 42 dans les territoires et 70 dans les provinces.
L'un des cinq principes du Conseil Génération Énergie est « une transition concertée [...] qui intègre les valeurs autochtones à toutes les étapes du processus et qui crée des occasions de réconciliation et de nouveaux partenariats avec les Autochtones ». Dans ce rapport élaboré par le conseil, on recommande la participation des peuples autochtones dans la gouvernance de l'énergie, les outils d'investissement et le renforcement des capacités.
L'an dernier, l'Assemblée des Premières Nations a tenu une séance d'une journée en prévision du processus du Conseil Génération Énergie. Le thème qui revenait dans cette discussion était la nécessité d'avoir une collaboration avec les Premières Nations, un engagement véritable et significatif et une politique gouvernementale fédérale et territoriale.
Il y a plus, mais mes 10 minutes sont écoulées.
Monsieur le président, honorables membres du Comité, mesdames et messieurs, je vous remercie de l'invitation aujourd'hui à vous faire part de ce que nous pensons de l'idée de faire participer les collectivités autochtones aux projets énergétiques d'envergure dans nos territoires.
Je vais tout d'abord fournir des renseignements sur ma collectivité. Lax Kw'alaams est l'une des Premières Nations les plus importantes et progressistes en Colombie-Britannique, avec plus de 3 800 membres, dont environ 800 vivent dans le village de Lax Kw'alaams. Nous avons 83 réserves qui couvrent 16 497 hectares. En dépit de nombreux obstacles, que je décrirai en termes généraux plus tard, le développement économique est une priorité, et nous avons été en mesure de réaliser de nombreux projets fructueux dans la collectivité et hors réserve. La majorité de nos occasions d'affaires sont axées sur les ressources naturelles, ce qui comprend la foresterie et les pêches.
Plus récemment, Lax Kw'alaams a réussi à négocier des avantages financiers et économiques provenant d'autres utilisations de nos terres, et nous avons établi des relations de travail constructives avec la province dans certains secteurs tels que les évaluations environnementales.
Comme vous le savez sans doute, Lax Kw'alaams est située sur la côte nord-ouest de la Colombie-Britannique. Nous sommes le peuple Coast Tsimshian qui, pendant des milliers d'années, a prospéré grâce aux terres et aux plans d'eau dans la région avoisinante de ce qui est maintenant Prince Rupert. Nos ancêtres formaient une alliance de peuples ou de tribus dans cette région que l'on appelait les neuf tribus de Lax Kw'alaams. Ensemble, elles géraient un immense territoire de plus de 1,2 million d'hectares des deux côtés de la rivière Skeena et une immense zone océanique entre la partie continentale et Haida Gwaii.
L'alliance a facilité le développement d'une économie prospère avec un système gouvernemental sophistiqué et un environnement social et culturel dynamique. Malheureusement, à l'instar d'autres collectivités autochtones, nous avons été durement touchés par l'empiètement colonialiste sur nos territoires. En 1834, sur invitation de nos ancêtres, la Compagnie de la Baie d'Hudson s'est installée là où se trouve le village actuel de Lax Kw'alaams. Au début, notre peuple a continué de prospérer en ayant le monopole du commerce quasi total dans la région. Cependant, l'introduction de maladies comme la variole et la grippe a décimé notre peuple, et les nouvelles religions qui critiquaient les pratiques sous-jacentes à nos structures sociales ont ébranlé notre gouvernement traditionel, divisant notre peuple.
Durant la création du Canada, ce qui était au départ des relations mutuellement avantageuses se sont transformées en un combat que devait livrer notre peuple pour assurer sa survie économique et culturelle. Les gouvernements fédéral et provincial successifs ont imposé des politiques oppressives et des lois restrictives pour nous priver systématiquement de nos terres. Notre culture a été ébranlée lorsque les protocoles et les cérémonies de notre gouvernement traditionnel ont été interdits. Comme de nombreuses nations autochtones en Colombie-Britannique, Lax Kw'alaams n'a jamais cédé ou abandonné ses terres. Bien que certaines décisions judiciaires canadiennes appuient l'idée que des lois répressives puissent abolir les droits de notre peuple, dans la mesure où ces lois n'offraient aucun avantage à Lax Kw'alaams, elles vont à l'encontre de notre loi et constituent, sans l'ombre d'un doute, un affront à l'honneur de la Couronne.
Depuis le milieu des années 1800, la Couronne octroie unilatéralement des droits d'exploitation des ressources naturelles sur nos territoires à des tierces parties tout en restreignant l'accès de nos peuples à ces ressources. On nous a même complètement ou partiellement exclus des industries qui avaient été le moyen de subsistance de nos ancêtres depuis des temps immémoriaux, et on a fait fi de notre connaissance inhérente de la gestion des ressources sur nos territoires.
Les activités commerciales des pêcheurs de Lax Kw'alaams ont été considérablement restreintes, et les connaissances de la gestion des pêches acquises de génération en génération ont été ignorées par le gouvernement. Par ailleurs, les arbres sur notre territoire ont été vendus à des acheteurs commerciaux pour être coupés, et les terres ont été utilisées ou cédées sans aucun égard pour Lax Kw'alaams.
Ce n'est que depuis les 28 dernières années, sur les instances des tribunaux, que les gouvernements ont commencé à reconnaître le droit des peuples autochtones à participer à l'économie et à bénéficier de l'utilisation des terres et des ressources sur leurs territoires. On ne devrait pas en minimiser l'importance, puisque plus d'un siècle de politiques et de lois nuisibles a compliqué les relations internes et externes de notre collectivité, rendant la participation à des initiatives comme des projets énergétiques d'envergure plus complexe.
Même si certaines Premières Nations ont tiré avantage du processus de négociation des traités, les tentatives du Canada de régler les questions liées aux ressources naturelles par l'entremise de traités comportent de grands inconvénients. Je n'irai pas trop dans les détails, mais je me contenterai de dire que les politiques sur les traités n'ont pas adéquatement abordé les questions relatives aux territoires communs. Par exemple, la Couronne a prétendu à l'occasion accorder des droits issus de traités qui, aux yeux des tribunaux, briment les droits autochtones non cédés des Premières Nations voisines, même là où il y a des ententes sur la gestion des ressources.
Les Lax Kw'alaams ne participent pas activement au processus de négociation des traités et ils ne le considèrent pas actuellement comme une manière viable de régler les questions liées à la gestion des ressources naturelles. Même si les Lax Kw'alaams ne s'opposent pas à la réalisation de projets progressistes et respectueux de l'environnement sur leur territoire, ces projets doivent profiter à toutes les parties et tenir compte de nos droits et de nos intérêts. Un principe important mentionné dans l'exposé des faits de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones est la conviction selon laquelle « le contrôle, par les peuples autochtones, des événements qui les concernent, eux et leurs terres, territoires et ressources, leur permettra de perpétuer et de renforcer leurs institutions, leur culture et leurs traditions et de promouvoir leur développement selon leurs aspirations et leurs besoins ».
En vue d'en arriver à un développement respectueux, les Lax Kw'alaams ne veulent pas être traités comme tout simplement un autre indivisaire sur nos territoires. Les Lax Kw'alaams sont détenteurs de titres sur les terres et les territoires, et ils doivent à ce titre participer pleinement à tous les processus relatifs à un projet et aussi en profiter. Cela va au-delà de la consultation; cela comprend d'obtenir le consentement pour la réalisation du projet. Voici les éléments que cela doit inclure: le respect des plans généraux d'aménagement du territoire et de gestion des ressources; la détermination en commun des approbations requises; une participation active à la conception du projet et aux processus en vue d'obtenir les approbations et une participation continue à la surveillance de la conformité, y compris le déclassement des projets.
Avant de pouvoir adéquatement participer aux processus, les Lax Kw'alaams doivent également pouvoir consulter les membres. Pour ce faire, il faut créer des politiques internes et faire des examens réguliers et assurer le maintien de solides lignes de communication et l'établissement d'une structure interne de soutien administratif.
Cependant, les Lax Kw'alaams sont aux prises avec de nombreux défis à cet égard.
Premièrement, bon nombre de nos membres habitent et travaillent à divers endroits dans la province. Bref, il est souvent difficile d'avoir des éléments banals comme des coordonnées à jour. Par ailleurs, nous n'avons pas les moyens d'attirer et de conserver du personnel qualifié. Qui plus est, notre financement est souvent en fonction de projets, et cette situation ne permet pas une infrastructure administrative stable.
Des membres qualifiés quittent souvent la région pour décrocher de meilleurs emplois ailleurs. Même lorsque nous sommes en mesure d'attirer du personnel qualifié, c'est normalement d'une courte durée. Nous n'avons souvent d'autres choix que d'avoir recours à des consultants externes, ce qui vient gonfler les coûts, miner les liens avec la communauté et la planification à long terme et nuire à l'objectif d'avoir une administration interne, stable et professionnelle pour la bande des Lax Kw'alaams.
À titre de gardienne des territoires, la nation autochtone est souvent à même d'avoir la meilleure compréhension de l'état du territoire. Elle est donc bien placée pour comprendre les effets cumulatifs de l'industrie et du développement sur son territoire.
Cependant, la tenue d'un registre général des activités de l'industrie et du développement sur le territoire demande beaucoup de temps et d'énergie. Il y a quelques années, les Lax Kw'alaams ont engagé des entrepreneurs pour rédiger un plan d'aménagement du territoire pour nous aider à avoir une idée des sortes d'activités possibles sur nos territoires. Ce plan, qui n'a jamais été ratifié, est désuet, et il nécessite encore du travail. Si nous investissons dans la création et le maintien d'un registre exact des activités de développement sur le territoire, nous serons mieux placés pour évaluer les avantages et les inconvénients des projets.
Les Lax Kw'alaams sont résolus à promouvoir un développement énergétique respectueux de l'environnement et ils sont disposés, si des ressources adéquates sont fournies, à collaborer avec le gouvernement fédéral pour élaborer les politiques et les processus nécessaires en vue d'un développement adéquat du territoire. Comme vous n'êtes pas sans le savoir, la bande des Lax Kw'alaams est l'une des communautés qui appuient un corridor de transport d'énergie entre l'Alberta et la côte Ouest. Nous avons collaboré avec des promoteurs par le passé en vue de permettre la réalisation de tels projets. Nous avons organisé des rencontres avec des chefs traditionnels et un vote des membres au sujet du projet de gaz naturel liquéfié de PNW. Ce processus nous a permis de tirer de nombreuses leçons qui nous seront utiles pour les projets de développement à venir.
Nous ne saurions trop insister sur l'importance de commencer tôt les travaux et de fournir des renseignements conviviaux et neutres, des évaluations précises des risques et des avantages et de nombreuses occasions pour favoriser la participation des membres. Nous pouvons aussi évidemment affirmer qu'il est important que les promoteurs interagissent dès le départ avec la communauté et qu'ils fassent le point régulièrement.
Par ailleurs, je ne saurais aussi trop insister sur la nécessité de soutenir nos communautés pour mettre en place une infrastructure administrative, notamment la rétention d'un personnel qualifié, qui permettra l'élaboration de politiques et de processus adaptables visant à favoriser une participation communautaire importante aux décisions liées au projet et à l'utilisation du territoire. Sans le soutien de la communauté, tout projet est voué à l'échec.
Enfin, je tiens à affirmer clairement que, dans l'esprit de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, si le Canada souhaite examiner des projets énergétiques de grande envergure sur les territoires des Lax Kw'alaams, le gouvernement doit s'assurer de consulter la bande concernant les lois et les décisions relatives aux politiques qui touchent directement l'utilisation des terres et des eaux sur les territoires de la bande.
Sur ce point, il n'en est pas question dans notre mémoire, mais le gouvernement impose actuellement une interdiction concernant les pétroliers sur nos territoires sans nous avoir consultés. La forêt pluviale de Great Bear nous a été imposée sans nous avoir consultés. Cela ne nous laisse probablement d'autres choix que le recours aux tribunaux, ce que personne ne souhaite.
Merci.
Nous avons le temps de faire une série de questions. Nous terminerons donc un peu après 17 h 30, et je présume que personne n'y voit d'inconvénient.
Monsieur Whalen, vous êtes le premier intervenant.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je tiens à remercier tous nos témoins de leur percutant témoignage. Ces injustices historiques sont évidemment un sujet difficile à aborder. Je vous remercie donc de nous avoir fait part de vos opinions franches sur la question.
L'un des principaux éléments de notre étude — M. Helin en a parlé —, c'est la manière de régler les différends entre divers groupes qui habitent différentes régions lorsqu'il y a des revendications territoriales qui se chevauchent, que le Canada souhaite protéger certaines zones écosensibles et que les Autochtones le long de ces corridors ne s'entendent pas sur le développement et les pratiques exemplaires.
Je sais qu'il en a été question lors de la dernière réunion.
Monsieur Helin, je ne sais pas si vous avez une sorte de proposition sur le moyen de nous assurer d'une gestion optimale des intérêts variés de tout le monde le long de ce corridor, parce que la moitié des groupes s'opposent à la réalisation du corridor de transport d'énergie et que certains ne s'y opposent pas. Que pouvons-nous faire? Nous sommes pris entre l'arbre et l'écorce en ce qui concerne le projet Northern Gateway. Nous sommes pris entre l'arbre et l'écorce en ce qui concerne le projet d'expansion de l'oléoduc Trans Mountain. Les Canadiens veulent de l'activité économique. Que nous suggérez-vous?
Je suggère que toute personne qui souhaite faire des affaires sur un territoire comprenne le peuple qui l'habite. Nous avons actuellement un litige avec un voisin. Il y a un regain d'intérêt sur la côte pour le gaz naturel liquéfié. L'un de nos voisins souhaite acheter des terres se trouvant sur notre territoire ancestral visé par un titre qui nous appartient. La province examine actuellement quoi faire. J'ai suggéré de ne pas voir cela comme une question de droits et de titres, mais plutôt d'en faire une proposition d'affaires où les Tsimshians de la côte, soit les bandes des Lax Kw'alaams et de Metlakatla, et notre voisin formeraient une société qui est propriétaire de ce territoire. Nous ne vendons pas ou nous ne cédons pas ce territoire. Nous conservons ce territoire et nous participons ensemble à la réalisation de ce projet. Cela nous permettra de nous rapprocher au lieu d'attiser la zizanie.
Au lieu qu'un territoire appartienne à un seul groupe autochtone au Canada, cela permettrait à de multiples groupes autochtones au Canada d'en être propriétaires.
Je répète qu'il faut aller à la rencontre des gens.
Je ne suis pas d'accord avec vous lorsque vous avancez que la moitié des gens est d'accord et que l'autre moitié est contre.
L'un des problèmes sur notre territoire traditionnel, ce sont les ONG qui fournissent des ressources à des gens dans nos communautés qui représentent des chefs héréditaires qui n'en sont pas vraiment. Je répète que cela revient à comprendre le peuple qui habite la région.
Devrait-il y avoir des règles en place qui restreignent la façon dont les entités financées par des tiers participent à ces négociations ou font entendre leur voix à la table?
Je crois que tout le monde a le droit d'être entendu, mais je crois qu'il faut tenir compte du territoire traditionnel où nous nous trouvons. Je ne vais pas aller à Haida Gwaii pour dire à cette nation comment gérer ses affaires, et je m'attends à ce qu'elle ne vienne pas nous imposer quoi que ce soit chez nous.
Eh bien, c'est une belle transition vers M. Louis.
Monsieur Louis, votre organisation représente bon nombre de groupes divers au pays. Lorsque nous essayons de comprendre la signification profonde de la réconciliation... Vous avez fait une déclaration assez controversée, et c'était peut-être intentionnel. L'Allemagne, l'Italie et le Japon sont évidemment des pays qui avaient des frontières bien définies en Europe avant la Deuxième Guerre mondiale et qui ont mené avec acharnement de nombreuses guerres. Ils étaient des États internationaux, souverains et distincts. Prétendez-vous que le territoire de l'Assemblée des Premières Nations devrait former un État souverain et distinct? Est-ce la position de votre organisation?
Non. Je crois qu'il faut comprendre certains éléments. Ce commentaire met en lumière un exemple d'une réelle réconciliation. Je ne suis pas d'accord pour dire que les frontières n'étaient pas établies avant les premiers contacts avec les Européens et la période coloniale. Elles ont toujours existé. Nous avons les frontières qui ont été établies entre la bande d'Okanagan et de Shxw'ow'hamel et d'autres processus semblables. Affirmer qu'il n'y avait aucune frontière ou qu'il n'y avait rien de semblable aux États...
Je crois que l'un des aspects qu'il faut comprendre est que les frontières de l'Allemagne existent seulement parce que la Belgique, la France, la Pologne et d'autres pays les reconnaissent. Ce n'est pas parce que l'Allemagne a revendiqué ce territoire. Cela repose essentiellement sur un accord entre les parties concernant l'emplacement des frontières. Affirmer que cela n'existait pas en Amérique du Nord avant les premiers contacts, c'est...
... que votre organisation affirme que vous voulez une séparation, et je me demande si vous dites que vous pouvez demeurer au sein du Canada et y trouver votre compte. Les exemples précis de réconciliation que vous avez donnés...
En gros, je dis qu'il faut examiner la réconciliation et que, comme le montrent des éléments dans les archives en Colombie-Britannique, c'est clairement défini par des gens comme la Compagnie de la Baie d'Hudson, les premiers explorateurs et les autres, et cela illustre...
Je répète que c'est correct, monsieur. Si vous ne voulez pas répondre à la question, c'est correct, parce que j'en ai une autre pour M. Smith.
D'accord. Demandez-vous une séparation? Demandez-vous la création d'États souverains et distincts ou une unité en ce qui concerne le territoire commun?
Non. Je ne demande pas d'États souverains et distincts au sens actuel du terme. C'est plus ou moins au sens...
Parfait. Merci beaucoup de cette précision.
Monsieur Smith, évidemment, dans le Nord, la mise en valeur des ressources est importante, tout comme ce l'est dans ma région avec l'exploitation du pétrole et du gaz extracôtiers.
Pouvez-vous nous mentionner certains défis avec lesquels est aux prises votre organisation en ce qui concerne la promotion de l'exploitation du gaz naturel? Comment le gouvernement fédéral peut-il devenir un meilleur partenaire en la matière et quels sont les obstacles, selon vous, en ce qui a trait à l'état des négociations sur la mise en valeur du gaz naturel sur votre territoire?
Eh bien, premièrement, il y a l'éloignement et le coût élevé lié à l'exploitation de toute entreprise dans cette région du Canada, soit l'Arctique. Pour vous donner une idée, sur le plan géographique, nous sommes plus près de l'Asie que du reste du Canada.
C'est le coût élevé lié à l'exploitation d'une entreprise dans notre région ainsi que les éléments que j'ai soulignés dans mon exposé. Indépendamment du parti à la tête du gouvernement fédéral, nous n'avons pas de planification claire ou d'engagement clair à l'égard de l'Arctique canadien.
Les quatre régions inuites représentent 38 % de la masse continentale du Canada, et nous avons 50 % du littoral canadien dans nos quatre régions. Il n'y a aucune approche, aucune stratégie ou aucun plan avec nous pour assurer une mise en valeur continue. Cela se fait toujours sur une base ponctuelle. Cela se fait sans réfléchir. Il n'y a aucune prévision ou direction pour les 20 prochaines années, et ce, indépendamment de la ressource dont il est question.
Comme je l'ai mentionné, cela fait maintenant 50 ans que nous sommes assis sur des réserves inexploitées de pétrole et de gaz.
Une partie du problème avec le système canadien, c'est que, lorsque nous permettons à une entreprise d'explorer...
... cela lui permet de détenir pour toujours une attestation de découverte importante et de ne pas y donner suite. Le ministre a le pouvoir de dire à une société d'exploiter la ressource, mais cela n'a jamais été fait. Nous devons le faire.
Merci, monsieur le président.
Merci à tous les témoins de leur présence au Comité.
À titre de députée du nord-est de l'Alberta, soit une grande région rurale, je me réjouis vraiment des occasions de souligner les façons dont les communautés autochtones participent à titre de partenaires et de propriétaires à l'exploitation des ressources. Il y a beaucoup d'exemples dans les collectivités que je représente dans la circonscription de Lakeland et celles dans la circonscription voisine au nord en Alberta.
Je déplore que nous ayons un temps restreint au Comité. Comme nous avons un grand nombre de témoins et que nous traitons d'enjeux très complexes, le temps sera limité.
Monsieur Helin, je vous remercie de votre présence au Comité. Pourriez-vous nous parler un peu plus de votre expérience en ce qui a trait à l'élaboration du projet de loi C-48 dont il a été question à la fin de votre exposé?
J'essaie seulement d'avoir quelques précisions concernant des différences dans ce que j'ai entendu en la matière. La semaine dernière, mon bureau a obtenu la réponse suivante à une question inscrite au Feuilleton:
Le ministre des Transports a consulté directement des groupes autochtones... Le gouvernement a tenu 20 rencontres avec des groupes autochtones, y compris les Lax Kw'alaams...
Toutefois, un représentant de Services aux Autochtones Canada a mentionné la semaine dernière au Comité qu'il n'était pas au courant de la tenue de consultations avec des peuples autochtones ou qu'il n'avait pas participé à de telles consultations avant que le premier ministre impose la première interdiction après son élection.
Pouvez-vous m'aider à démêler le tout? Des rencontres ont peut-être eu lieu avec votre communauté sur d'autres enjeux qui n'étaient pas liés au projet de loi C-48.
Oui, et de la question de savoir s'il y a eu des consultations sur l'élaboration du projet de loi C-48.
Eh bien, pour autant que je sache, la consultation a eu lieu tout de suite après l'élection du gouvernement libéral. Le ministre est venu à Prince Rupert et a rencontré certains de nos groupes. Je n'étais pas présent à la réunion en question, mais il a mentionné que le gouvernement allait interdire la circulation des pétroliers. Une lettre a été remise par le peuple Coast Tsimshian, ainsi que notre village et la bande de Metlakatla, pour indiquer notre opposition. Nous n'avons pas été consultés.
J'ai comparu devant je ne sais combien de comités permanents. Le gouvernement déclare m'avoir rencontré une cinquantaine de fois, mais aucune de ces réunions n'avait pour objet de mener une consultation sur l'interdiction des pétroliers. Pour ma part, cela me fait penser à la situation concernant la forêt pluviale de Great Bear. Cette décision nous avait été imposée par la province, sans qu'elle nous consulte.
Nous pouvons peut-être en parler. Un membre de votre communauté, Calvin Helin, a dit:
[...] ce que les chefs constatent de plus en plus maintenant, c'est qu'on a recours à beaucoup de tactiques sournoises, où certaines personnes dans les communautés se font payer pour devenir porte-parole [...]. Essentiellement, [ce sont] des marionnettes et des accessoires [...] ayant pour but de torpiller l'exploitation des ressources.
Il ajoute:
C'est scandaleux. Les gens devraient être en colère qu'on agisse ainsi, et les chefs sont [indignés].
On a révélé que des milliers de dollars en financement étranger avaient été acheminés à des groupes de pression hostiles au secteur de l'énergie en Colombie-Britannique, notamment dans le but explicite d'imposer le projet de loi C-48 aux gens de la côte nord de la Colombie-Britannique. Je sais que la plupart des Canadiens trouvent cela probablement un peu difficile à croire. Ils ne sont pas au courant de la situation et ils n'arrivent pas à imaginer qu'une telle chose puisse réellement se produire.
Puisque vous en avez fait mention, pourriez-vous nous en dire plus sur l'expérience de votre communauté?
J'ai été élu à mon poste en plein milieu d'une négociation sur un projet de gaz naturel liquéfié dans notre région. Les ONG avaient infiltré notre communauté, et il y a eu une controverse au sujet de l'emplacement du projet. Cela a beaucoup divisé nos membres.
Ce que j'ai dû faire, c'est aller chercher la bonne information auprès de gens qui n'avaient rien à gagner et rien à perdre. Je l'ai ensuite transmise à nos membres. Résultat: les deux tiers des gens ont fini par accepter le projet, alors que 100 % d'entre eux s'y opposaient. J'encourage tout le monde à écouter Vivian Krause et à suivre l'argent, à surveiller comment ces fonds entrent au Canada. Certaines personnes dans ma communauté, dont les noms ont été dévoilés, ont reçu du financement de la part de ces groupes. Vous savez, l'information circule. C'est bel et bien réel, et le tout est bien organisé.
Est-ce lié à la confusion entourant la question de savoir qui sont les chefs héréditaires et qui ne le sont pas, sans compter le fait que vous êtes un chef élu?
À mon avis, cela ressemble à ce que les Russes ont fait lors des élections fédérales tenues au sud de la frontière en créant de la confusion. Je crois qu'il y a des gens aux États-Unis qui veulent que nos ressources énergétiques ne coûtent pas cher, et ils s'y prennent très bien. C'est bien financé et bien organisé.
Je crois que la plupart des Canadiens d'un bout à l'autre du pays seraient alarmés d'apprendre que l'exploitation des ressources au Canada pourrait être empêchée par des intérêts étrangers, qui privent les communautés autochtones de la capacité de prendre des décisions sur leur propre territoire pour saisir des possibilités économiques dans l'immédiat et à très long terme.
J'ai une autre question sur l'interdiction de forage en mer. Dans le même ordre d'idées, et compte tenu de notre discussion sur la nécessité, pour les gouvernements, de collaborer avec les communautés autochtones en vue de l'exploitation des ressources, il s'ensuit, me semble-t-il, que les gouvernements devraient peut-être aussi les consulter au sujet des lois et des politiques liées à l'exploitation des ressources. Y a-t-il eu une consultation sur le moratoire imposé aux forages pétroliers et gaziers extracôtiers dans le Nord?
Merci de soulever ce point. Je ne l'ai pas mentionné dans mes observations. Même si le gouvernement n'appelle pas cela un moratoire, c'est bien ce dont il s'agit. Il nous l'a imposé, sans reconnaître nos droits relatifs aux ressources extracôtières. Non, nous n'avons pas été consultés avant l'entrée en vigueur du moratoire.
Que devrait-il se passer maintenant, selon vous? Je crois que le gouvernement aurait le pouvoir d'annuler son moratoire et d'entreprendre une consultation constructive avec vous et avec le territoire.
À titre de précision, pour l'heure, le territoire n'a aucune compétence au large des côtes. Le tout relève du fédéral parce que nous sommes des territoires.
Cela dit, oui, je suis d'accord. Vous avez répondu vous-même à la question. Nous devrions nous asseoir ensemble et trouver une solution parce que cette situation ne rassure pas non plus l'industrie. Tous les investisseurs ont renoncé à leurs projets d'exploration dans la région. Comme je l'ai souligné plus tôt, certaines communautés sont assises sur des milliards de milliards de pieds cubes de gaz, ainsi que de pétrole. Le pays est pris en otage par un processus qui entrave le développement de ces communautés.
Bien entendu, il y a d'énormes occasions perdues au sein de votre communauté, ce qui se répercute sur tout le Canada et sur l'avenir de notre pays.
Merci à vous tous.
Merci, monsieur le président.
Merci à tous nos témoins de leur présence cet après-midi.
J'aimerais pouvoir m'entretenir avec vous tous. La plupart d'entre vous ont mentionné que le consentement préalable, libre et éclairé s'applique même aux investissements nécessaires pour la réussite d'un projet, si je vous ai bien compris.
Je suis plutôt d'accord là-dessus, mais je voudrais commencer par vous, Brian. Nous avons travaillé ensemble il y a bien des années, dans une vie antérieure. Vous dites au troisième paragraphe de votre mémoire que les Cris d'Eeyou ne prétendent pas que leur expérience en matière de projets énergétiques est nécessairement une source d'enseignements pour les autres.
Je ne suis pas de cet avis. Vous avez mentionné que le chapitre 22 de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois est un chapitre important qui reconnaît le droit de mener des projets de développement dans le territoire, droit que possède toute personne y agissant légitimement. Cela fait partie des règles du jeu dans le nord du Québec depuis maintenant de nombreuses années.
Je crois comprendre que les Cris ont conclu, au fil des ans, plus de 80 ententes depuis qu'ils ont signé pour la première fois, en 1975, la Convention de la Baie-James et du Nord québécois.
Estimez-vous que les 80 ententes que nous avons signées avec des sociétés minières, Hydro-Québec, les deux gouvernements et tout le reste, représentent l'expression d'un consentement libre, préalable et éclairé?
Je ne pourrais pas dire que chaque entente conclue avec un promoteur a fait l'objet d'une consultation en bonne et due forme avec la communauté, même s'il s'agit de communautés relativement petites; d'ailleurs, celles-ci veulent maintenir leur position dans leurs territoires respectifs afin de pouvoir mettre au point différentes formules avec les promoteurs.
Un des défis que doivent relever le Grand Conseil et le gouvernement de la nation crie, c'est de s'assurer que ces ententes sont conformes aux conventions conclues ailleurs dans le territoire, non seulement pour qu'elles soient comme les autres, mais aussi pour qu'elles soient à la hauteur de ce qui a été négocié par les Cris dans le passé.
En ce qui a trait aux grandes questions, nous avons déployé beaucoup d'efforts pour informer les gens. Nous y avons consacré beaucoup d'argent et de temps. Les résultats sont importants. Nous sommes passés du projet La Grande, qui n'avait pas fait l'objet d'une véritable évaluation d'impact, au projet EM1A, qui prévoit l'installation de digues d'une valeur de près de 1 milliard de dollars le long de la rivière pour maintenir le niveau naturel des eaux, tout en assurant la dérivation partielle des eaux vers le projet La Grande.
Il faut examiner ce genre de questions, une à la fois, et s'assurer de comprendre toutes les variables.
Merci.
Chef Louis, on vous a demandé de définir ce qu'est la réconciliation dans le contexte actuel. Cela me rappelle toujours la décision rendue en 2004 par la Cour suprême dans l'affaire de la nation haïda. Le tribunal y affirme, en parlant de réconciliation, que l'objectif est de concilier la souveraineté préexistante des peuples autochtones et la souveraineté supposée de la Couronne. Ce sont les paroles de la Cour suprême, et non les miennes.
Serait-ce là un bon point de départ fondamental pour les efforts de réconciliation déployés au pays?
Absolument; il faut déterminer quel est le point de départ de ces efforts.
Si vous regardez les 20 dernières années, vous constaterez que c'est la Cour suprême du Canada qui a fourni la plupart des directives sur la façon dont les consultations et les accommodements devraient se faire. Il y a eu des causes pour lesquelles les Premières Nations se sont durement battues. Cela a permis de tirer au clair beaucoup de questions.
Voilà que, maintenant, nous nous apprêtons à entrer dans cette ère de consultation et à entamer la voie de l'accommodement. Je tiens à rappeler une des décisions qui ont été récemment rendues dans l'affaire Clyde River; il s'agit d'ailleurs d'une très bonne décision. Une des conclusions — et j'ai une petite note à ce sujet —, c'est que la Couronne ne s'est pas enquise des droits des gens de Clyde River et des répercussions particulières sur leurs rivières, mais elle a pourtant mis l'accent sur les effets environnementaux.
La réconciliation doit consister, en partie, à comprendre quelles sont les répercussions réelles sur un droit autochtone. Dans n'importe quel autre secteur au Canada, on élabore une analyse socioéconomique qui sert à mesurer les répercussions, c'est-à-dire à déterminer quelles sont les conséquences liées à l'imposition ou non d'une décision statutaire. Cela découle de la Loi sur les textes réglementaires.
Il faut aussi tenir compte d'autres mécanismes. Or, il n'y a rien qui permet d'examiner les conséquences, pour les Premières Nations, de la disparition des stocks de poisson. Pourtant, une telle situation est lourde de conséquences pour elles. Tout compte fait, il n'y a rien dans l'assiette; cependant, le Canada a l'obligation de garantir que nous y avons accès à des fins alimentaires, sociales et rituelles. Si vous examinez l'extrémité sud des provinces, vous verrez que très peu d'aliments traditionnels se retrouvent dans notre assiette.
La réconciliation doit viser, entre autres, à évaluer s'il y a lieu de récupérer ces usages. Pour ma part, la réconciliation consiste à déterminer comment nous allons vivre ensemble à l'avenir. Alors, oui, je suis d'accord avec vous.
Je vais utiliser mon temps de façon judicieuse. J'ai deux questions. Je tâcherai de les poser rapidement, et j'espère que vous pourrez m'aider à cet égard.
Comment pouvons-nous aider les communautés autochtones qui connaissent des divisions internes ou qui ne s'entendent pas entre elles sur un sujet donné? S'il n'y a pas de consensus, c'est l'impasse. Comment sommes-nous censés parvenir à une décision?
Dans le même ordre d'idées, avant l'arrivée des Européens, quelle était la démarche pour prendre des décisions lorsqu'une communauté était divisée?
Je vais demander au chef Louis de répondre en premier, s'il le veut bien.
Il existe une foule de processus au sein des cultures. Dans notre cas, lorsqu'il y avait un désaccord entre des membres de la communauté, nous faisions parfois appel à un arbitre indépendant qui pouvait venir d'une communauté voisine. Il y a aussi des exemples qui montrent que les désaccords entre les communautés pouvaient être réglés autrefois par voie d'arbitrage en faisant appel à une personne ou à un tiers impartial...
Pour en revenir à votre observation sur la division entre les chefs héréditaires et ce qui est maintenant prévu aux termes de la Loi sur les Indiens, c'est là un aspect du problème. En Colombie-Britannique, la décision Campbell précise que les droits autochtones restent intacts, même s'ils sont brimés. Je ne fais que paraphraser la décision. En gros, le tribunal affirme que les lois héréditaires subsistent et demeurent pleinement en pleine vigueur. Par contre, la Loi sur les Indiens prévoit un vote majoritaire.
Merci, chef. J'aime bien votre réponse, mais je suis déjà à court de temps, et je tiens à faire une petite remarque.
Dans ce cas, je vais passer à mon autre point, et je reviendrai là-dessus. Merci.
Voici mon autre point: quand nous avons affaire à des communautés désireuses de participer à un projet et, s'il n'y a aucune institution déjà en place pour agir comme partenaire, avec qui faut-il collaborer et comment vous y prenez-vous pour établir, au sein des communautés, les institutions qui travailleront de concert avec nous?
Je crois que le problème tient au fait qu'il y a un système héréditaire qui s'oppose au corps élu; en somme, l'un dit oui et l'autre dit non. À un moment donné, y a-t-il lieu de recourir à l'arbitrage dans le contexte culturel de ces gens au sein de ces nations? Sinon, est-il possible de faire intervenir un organisme indépendant de l'extérieur pour arriver à une entente? Parfois, il faut simplement accepter que non, c'est non. Je crois que c'est ainsi que nous nous trouvons dans une impasse.
Qu'en est-il de la création d'institutions au sein des communautés pour qu'il y ait une personne à qui s'adresser, non seulement pour parler, mais aussi pour pouvoir donner suite à la décision prise? Si vous voulez entreprendre un important projet d'extraction de ressources dans une communauté qui n'est pas en mesure de le faire ou si vous voulez collaborer avec elle, comment pouvons-nous préparer une institution à jouer ce rôle?
À mon avis, l'une des meilleures façons d'y parvenir, c'est de s'inspirer de l'exemple des Haïdas, qui ont élaboré leur constitution communautaire, laquelle régit la manière dont ces décisions sont prises. Dans un tel contexte, je crois que cela constitue probablement la meilleure occasion d'examiner les résolutions qui seraient jugées internes, comme l'exemple que vous avez donné concernant le désaccord entre les chefs traditionnels et les chefs héréditaires. Toutefois, c'est quelque chose qui doit être mis au point, parce qu'il s'agit d'une pratique de plus de 100 ans, et cette situation en est le résultat. Aujourd'hui, ces Premières Nations, y compris la nôtre, ont besoin de temps pour mettre fin aux dissensions et rétablir le tout. Je le répète, en quelque sorte, l'une des meilleures façons d'y arriver, c'est de reproduire ce que les Haïdas ont fait en élaborant leur constitution, qui est appuyée par tous les membres.
Monsieur Helin, vous avez beaucoup parlé des divisions au sein de la communauté, et vous avez expliqué que la décision prise concernant l'interdiction des pétroliers n'était pas celle que vous escomptiez.
À la lumière des observations faites par le chef Louis, quelle est la meilleure approche, d'après vous, pour mener une consultation lorsqu'il existe une division importante au sein de la communauté?
Selon moi, la meilleure approche consiste à fournir les meilleurs renseignements à tous les membres. La division entre un corps élu et un corps héréditaire n'est pas une bonne façon de procéder. J'ai été élu maire, mais j'appartiens aussi à une tribu, ce qui signifie que j'en suis membre. Dans notre système tribal, il y a des chefs, des sous-chefs et des orateurs. Ce système s'est effrité au fil des ans. Les gens réclament des titres qu'ils ne devraient pas, ce qui provoque désarroi et confusion.
Pour ma part, je ne veux pas qualifier quelqu'un de chef héréditaire ou... Nous sommes tous égaux, et nous devrions tous avoir accès à la même information pour que nous puissions prendre une décision éclairée sur un projet ou un dossier proposé, en gardant à l'esprit que l'environnement est l'élément le plus important de toute proposition.
Je peux peut-être ajouter une observation.
Il faut examiner la composition et l'histoire d'un groupe particulier avant de pouvoir comprendre comment faire affaire avec ses membres ou comment travailler avec eux. Par exemple, dans le cas des Cris dans le nord du Québec, nous avons non pas un aîné, mais bien des centaines. Ils sont tous responsables de leurs territoires de chasse et de piégeage. Tous ces facteurs doivent être pris en compte dans vos démarches auprès d'une communauté.
Par ailleurs, les Innus de la Côte-Nord et les Cris ont récemment signé une entente sur la façon de régler des questions comme celles dont nous parlons aujourd'hui, notamment la façon de répartir les bénéfices découlant de tout projet de développement mené dans les zones contestées.
Ce n'est là qu'un aspect de la situation actuelle.
D'accord.
Cette fois, il ne me reste vraiment plus de temps, je crois. J'invite donc M. Smith à dire un dernier mot sur la même question, puis ce sera tout. Merci.
Ayant présenté la deuxième plus ancienne revendication, nous disposons d'un processus bien établi qui est en place depuis de nombreuses années. En ce qui a trait aux questions qui se recoupent, lorsque nous tentions d'exploiter le gaz dans notre région, nous avions proposé la construction d'un gazoduc allant de ma localité jusqu'en Alberta. Nous avons donc créé l'Aboriginal Pipeline Group, qui est composé de tous les groupes autochtones situés le long de ce corridor.
C'est un bon exemple qui montre comment nous travaillons ensemble dans l'intérêt commun en essayant d'exploiter les ressources. Malheureusement, après l'effondrement des prix, on a commencé à miser sur la fracturation.
Je tiens à remercier tous les témoins de leur présence aujourd'hui. Nous n'avons pas assez de temps, comme d'habitude — et je vous suis reconnaissant de la patience dont vous avez fait preuve face au délai d'attente à la sécurité. Par conséquent, s'il y a d'autres renseignements que vous auriez aimé nous fournir dans le cadre de votre témoignage ou si vous n'avez pas eu assez de temps pour répondre à une question, n'hésitez pas à nous transmettre l'information. Nous en tiendrons compte dans notre rapport.
Merci à tous d'avoir été des nôtres aujourd'hui. Nous vous en sommes très reconnaissants.
La séance est levée.
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