:
L'adoption de cette loi a clairement montré la détermination et la conviction du Parlement voulant que le registre des lobbyistes et les rapports des lobbyistes étaient nécessaires pour préserver les principes de la démocratie, la primauté du droit, la transparence, la responsabilité et la confiance dans l'intégrité des prises de décisions gouvernementales.
[Traduction]
Étant un ardent défenseur de la primauté du droit et de la démocratie, l'ABC appuie les objectifs de la Loi sur le lobbying. Dans notre mémoire, nous recommandons des modifications à la loi en vue d'améliorer et de renforcer la transparence et la responsabilisation tout en assurant l'équité et l'uniformité dans l'application et l'administration de la loi. Nous appuyons bon nombre des recommandations qui ont été faites par la commissaire pour renforcer la loi. Plus particulièrement, l'ABC propose huit recommandations.
Premièrement, nous proposons d'éliminer le critère de la « partie importante ». En d'autres termes, cela veut dire supprimer le seuil minimum pour l'enregistrement des lobbyistes salariés. Nous sommes d'accord avec la commissaire lorsqu'elle dit que cette disposition est difficile à interpréter et à faire respecter. Les dispositions actuelles permettent à certaines sociétés et à certaines organisations d'éviter d'enregistrer leurs activités de lobbying. Par ailleurs, et ce qui est peut-être plus important, le seuil actuel permet à un ancien titulaire d'une charge publique désigné d'éviter l'interdiction de faire du lobbying pendant une période de cinq ans s'il travaille comme lobbyiste salarié pour une société lorsque ce travail représente moins de 20 p. 100 de son temps.
Deuxièmement, nous proposons une modification complémentaire qui harmoniserait la divulgation des règles pour les sociétés et les associations. Simplement dit, aux termes de la loi actuelle, lorsqu'une association doit s'enregistrer, elle doit donner le nom de tous les employés qui font du lobbying. D'un autre côté, lorsqu'une société doit s'enregistrer, elle ne doit nommer que certains des employés qui font du lobbying. Le lobbying qui est fait par une société ne devrait pas être moins transparent que celui qui est fait par des groupes sans but lucratif. Nous proposons que la déclaration de toutes les personnes morales inclut le nom de tous les employés dont les tâches incluent du lobbying.
Troisièmement, nous proposons que les membres d'un conseil d'administration, les administrateurs, les partenaires et les propriétaires uniques, lorsqu'ils font du lobbying, soient enregistrés comme des lobbyistes salariés, non pas comme des experts-conseils. Les traiter comme des experts-conseils porte à confusion, et impose un fardeau administratif inutile aux administrateurs individuels, fardeau qui devrait plutôt être imposé à l'entreprise ou à l'organisation. Traiter les administrateurs comme des lobbyistes salariés simplifierait la mise en oeuvre sans nuire à la transparence et à la divulgation. En fait, en plaçant toutes les activités de lobbying d'une entreprise ou d'une organisation sur une seule liste, le changement améliorerait en fait la transparence et la responsabilisation. C'est la formule qui a été adoptée par l'Alberta, la Colombie-Britannique, le Manitoba et le Québec.
Quatrièmement, nous estimons que les déclarations mensuelles devraient être plus transparentes tout d'abord, comme l'a recommandé la commissaire, en déclarant les lobbyistes salariés qui rencontrent les titulaires d'une charge publique désignés, et, deuxièmement, en déclarant tous les titulaires d'une charge publique qui sont présents lors de ces rencontres avec les titulaires de charges publiques désignés. Ce changement pourrait être fait en modifiant le règlement ou en modifiant la loi.
Cinquièmement, nous appuyons la demande de la commissaire qui voudrait qu'on lui confère le pouvoir d'imposer des PAP pour les contraventions à la loi ou au code, ce qui peut être soumis à un examen prévu par la loi ou à un processus d'appel. À l'heure actuelle il n'y a aucune pénalité prévue si le code n'est pas respecté. Les pénalités administratives pécuniaires combleraient cette lacune. En même temps, si les gens risquent maintenant des sanctions pour infraction au code, il est tout naturel que le code soit incorporé à la loi ou au règlement.
En ce qui concerne les infractions à la loi, ces allégations sont à l'heure actuelle renvoyées à la GRC qui fait enquête. La GRC et le procureur de la Couronne déterminent s'il y a lieu de déposer des accusations. Aucune accusation n'a été déposée depuis la mise en place du régime fédéral sur le lobbying.
Je parle par expérience personnelle en tant qu'ancien titulaire d'une charge publique. Lorsque j'étais titulaire d'une charge publique, un ancien titulaire de charge publique qui était assujetti à l'interdiction de cinq ans a tenté d'organiser une rencontre entre moi et son client. Conformément à notre politique qui consiste à informer automatiquement les autorités appropriées de tout acte répréhensible soupçonné, j'ai renvoyé la question devant la commissaire au lobbying qui l'a renvoyée à la GRC. Par la suite, j'ai rencontré les enquêteurs de la GRC et je leur ai fait part de mon témoignage. Je n'ai jamais été mis au courant des résultats de l'enquête de la GRC, mais dans son dernier rapport annuel, la commissaire indique que la GRC n'a déposé aucune accusation à la suite des enquête sur la Loi sur le lobbying. Cela doit certainement inclure le cas que j'avais renvoyé, même s'il s'agissait là sans aucun doute d'une tentative pour organiser une rencontre malgré l'interdiction de cinq ans des activités de lobbyisme.
Selon le système actuel d'enquête à la GRC, des incidents graves de non-conformité n'ont aucune conséquence pour les lobbyistes. En permettant d'imposer des pénalités administratives pécuniaires, cela comblerait ce vide.
Pour être clair, l'ABC n'appuie pas l'élimination des dispositions d'infraction de la loi. Nous croyons que les pénalités administratives pécuniaires et la poursuite en cas d'infraction devraient coexister comme processus de rechange et mutuellement exclusifs aux termes de la loi.
:
Sixièmement, sur le plan technique, nous sommes d'avis que le processus actuel d'examen administratif de la commissaire devrait être incorporé à la loi. Dans notre mémoire, nous énumérons de nombreuses raisons pour lesquelles cette modification améliorerait l'administration de la justice.
Septièmement, nous sommes d'avis que le Parlement devrait suivre l'exemple des assemblées législatives qui interdissent qu'une personne fasse du lobbying auprès du gouvernement dans un dossier à l'égard duquel elle a été retenue par contrat pour fournir des conseils à un titulaire d'une charge publique. L'Alberta, la Colombie-Britannique, le Manitoba et le Québec ont décidé d'interdire ce conflit d'intérêts flagrant. Le Canada devrait faire la même chose.
Huitièmement, et finalement, nous constatons que les restrictions d'après-mandat visant les anciens titulaires d'une charge publique sont divisées entre la Loi sur le lobbying, qui est administrée par la commissaire au lobbying et la Loi sur les conflits d'intérêts, qui est administrée par la commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique. Les catégories de titulaires de charge publique qui sont touchées sont différentes, la durée des restrictions sont différentes et les restrictions elles-mêmes sont différentes. Nous estimons qu'il serait avantageux d'harmoniser les restrictions sous une même loi, quoique l'ABC ne prend pas position pour ce qui est de décider sous quelle loi cela devrait être harmonisé.
En conclusion, nous comprenons que le comité a entendu divers groupes d'intervenants, notamment des représentants de l'industrie du lobbying professionnel. Alors que bon nombre d'avocats agissent à l'occasion comme des lobbyistes enregistrés, comme experts-conseils ou comme lobbyistes salariés, l'ABC a tenté d'aborder cet examen d'un point de vue différent, notamment en renforçant l'administration de la justice et en maintenant la primauté du droit. À cette fin, les membres de notre groupe de travail ont été choisis en raison de leur expérience collective et de leurs compétences juridiques pour ce qui est d'interpréter et d'appliquer la loi sur la transparence du lobbying au Canada et les conseils qu'ils prodiguent à ce sujet. Nous vous remercions donc de l'occasion qui nous a été donnée.
Nous serons heureux de répondre à vos questions.
Merci.
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Bonjour. Je vous remercie de l'invitation. J'en suis très honoré.
Si vous me le permettez, je vais faire ma présentation en français parce que je crois encore être dans un pays bilingue.
Parlons du lobbying. Je vais faire aujourd'hui une présentation tout à fait différente. D'abord, vous savez que je suis professeur de sciences politiques à l'Université Laval et que je travaille sur les questions qui entoure ce sujet. Toutefois, j'aurai aujourd'hui une approche beaucoup plus générale et, je dirais, beaucoup plus philosophique.
Je crois que le lobbying est au coeur des problèmes qu'on connaît actuellement dans notre démocratie, mais peut-être pas pour les raisons qu'on l'on est porté à croire spontanément. Il y a un manque de confiance — on le sait tous — de la part de la population à l'égard des titulaires de charge publique, particulièrement des élus et bientôt même des institutions parlementaires. Dans cet esprit, il y avait avant moi des gens très compétents pour faire une comparaison au chapitre des lois et je l'ai déjà fait moi-même pour le commissaire au lobbyisme du Québec. Ici, ce matin, j'ai décidé de faire un autre type d'exercice. Peut-être le trouverez-vous trop général et non pertinent Je vous laisse en juger. Je vais commencer avec trois questions qui sont tellement élémentaires qu'elles vont vous surprendre.
[Traduction]
Qu'est-ce que le lobbying? Qui est un lobbyiste? Qui est un titulaire d'une charge publique?
[Français]
Sans vous faire insulte et sans dire que la loi actuelle n'est pas la bienvenue — au contraire, je pense qu'elle doit être maintenue —, je crois qu'elle n'est pas tout à fait au point, compte tenu de l'évolution de ce phénomène qu'est le lobbying. Cette pratique a beaucoup évolué au cours des dernières décennies. Depuis que l'on a adopté la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes en 1988, il y a une foule de choses qui ont changé, d'où mes trois questions générales.
En préambule, je citerai l'Assemblée nationale française afin que mes positions soient très claires. En 2009, à Paris, l'Assemblée nationale française a ouvert un registre des lobbyistes. On disait ceci, et je cite.
On présentait le lobbying comme une forme d'expression de la société civile.
Pour justifier le registre, on ajoutait:
[...] le lobbying peut aider l’Assemblée nationale à accompagner avec constance les évolutions économiques, sociales, scientifiques et culturelles, et être un aiguillon d’une politique démocratique, saine et efficace.
On est loin des potins et des journaux à scandale. On parle d'une « politique démocratique, saine et efficace. »
C'est au pays du jacobinisme, au pays de l'intérêt général, qu'on dit cela maintenant. Il faut en prendre conscience. Jusqu'à récemment, les Français ne voulaient rien savoir du lobbying parce que c'était d'emblée un pur scandale.
[Traduction]
Qu'est-ce que le lobbying?
[Français]
Je vais m'en tenir à la question de base. D'ailleurs, si vous lisez le mémoire qui est intitulé « Questions élémentaires pour des problèmes complexes », vous verrez que les questions sont très simples, mais qu'elles couvrent des sujets extrêmement complexes.
Qu'est-ce que le lobbying? J'aborderai ce qu'on retrouve dans nos lois au Canada et aux États-Unis. Ce n'est pas partout aux États-Unis, car la loi fédérale américaine à laquelle je vais faire référence fait très clairement exception là-dessus. Dans nos lois provinciales et fédérales, on définit le lobbying comme étant un
[Traduction]
un contact écrit ou oral avec le titulaire d'une charge publique.
[Français]
Or c'est maintenant marginal dans la pratique du lobbying. En d'autres mots, la loi que nous sommes en train d'examiner avec intelligence, et il faut le faire, ne couvre qu'une infime partie de ce que constitue aujourd'hui la pratique du lobbying. Je pense qu'il faut en être conscient. L'esprit dans lequel nous travaillons est par conséquent radicalement différent. Vous en êtes sans doute conscients, mais je rappelle tout de même la différence essentielle entre la notion de lobbying contact et celle de lobbying activity. La lobbying activity comprend la recherche préalable, l'élaboration de stratégies et ainsi de suite. Or, à l'heure actuelle, c'est surtout à cette étape que les gens s'investissent.
Je pourrais élaborer davantage sur cette question, mais je vais tout de suite passer à mon deuxième point parce que l'incidence est directe. Qui est un lobbyiste? Est-ce celui qui écrit et qui prend contact avec le titulaire d'une charge publique? Mais celui qui a préparé la stratégie au bureau et qui est payé par la firme de lobbyistes n'est pas un lobbyiste? C'est un point important qui, justement, a une incidence sur la règle de carence post-mandat à laquelle les représentants de l'Association du Barreau du Canada viennent de faire allusion abondamment.
Bien sûr, si vous n'établissez pas de contact avec un titulaire de charge publique, vous ne dérogez pas à la loi. Toutefois, sans que j'aie à vous citer des noms, vous êtes conscients que, à Québec comme à Ottawa, certains anciens ministres n'ont pas attendu cinq ans avant de se trouver un bon emploi dans des bureaux d'avocats, même s'ils n'étaient pas eux-mêmes avocats. Je vous laisse deviner pourquoi. Je ne condamne pas ces gens, mais pour ce qui est de couvrir ces cas, je maintiens que notre loi n'est pas adéquate. C'est peut-être un point de vue radical, mais je crois qu'il faut être conscient de cette lacune et la souligner.
Je vais vous parler maintenant des titulaires de charge publique nouveau genre. Prenons un exemple qui ne concerne personne ici, mais qui est probablement connu. Sinon, il va être intéressant d'en prendre connaissance. Ici, à Ottawa, les gens ont fort probablement entendu parler du maire de Québec et de son amphithéâtre. Récemment, le maire a nommé quelqu'un du secteur privé pour, notamment, négocier à sa place avec Quebecor. Cette personne, qui assume la présidence d'une compagnie d'assurances et qui est tout à fait compétente — ce n'est pas ce qui est en cause ici —, est-elle ou non titulaire d'une charge publique? Elle agit au nom d'un titulaire de charge publique. En ce qui a trait à certaines pratiques, vous savez que le maire de Québec est assez novateur, mais il ouvre dans ce cas une porte extrêmement importante à l'égard de la loi que nous étudions aujourd'hui.
Compte tenu de la façon dont les choses évoluent, il faut repenser la loi. On ne peut pas prétendre encadrer le lobbying au moyen de ce projet de loi, sinon de façon extrêmement marginale. Pour ma part, je crois qu'il est important de réfléchir à cela. Vous étiez récemment en campagne électorale et il va bientôt y avoir également des élections au Québec. Vous savez donc que depuis quelques années, le taux de participation est en déclin, et de façon inquiétante. Selon certaines analyses, ce déclin n'est pas terminé. Si de tels projets de loi, que ce soit relatif à l'accès à l'information ou relatif au lobbying, amènent les gens à croire qu'on ne fait pas tous les efforts nécessaires pour rendre les pratiques transparentes, le décrochage va s'amplifier encore davantage. Et je ne pense pas que ce soit ce que l'on souhaite pour l'avenir de notre démocratie.
Cela étant dit, une dernière mise en garde s'impose. Je ne propose absolument pas l'établissement d'un État détective. Il faut faire preuve d'intelligence mais, en même temps, il faut faire preuve d'intelligence dans les deux sens. Il faut être conscient de ce qui se passe et il faut y aller avec intelligence, c'est-à-dire de façon pondérée et équilibrée.
Je vous remercie. Sans doute y aura-t-il quelques questions. Je suis bien conscient que ce n'est pas orthodoxe comme présentation. Cependant, je pense qu'il est temps de faire cette présentation.
:
Merci beaucoup, madame la présidente, et merci à nos témoins aujourd'hui, l'Association du Barreau canadien et M. Hudon, merci de votre contribution à ce débat.
Malgré tous nos efforts, même avec la Loi fédérale sur la responsabilité, pour attacher une cloche autour du cou des lobbyistes de façon plus efficace, nous continuons d'être frustrés par ce que nous considérons comme étant l'influence indue des lobbyistes enregistrés et non enregistrés qui ont beaucoup de liens avec les conservateurs, ce qui à notre avis continue de miner notre démocratie. Nous constatons que l'accès et l'influence sont de plus en plus des denrées commerciales sur la Colline parlementaire, et nous sommes d'avis que nous sommes en train de nous engager sur la même pente glissante vers le précipice du modèle américain où l'on n'arrive à aucun résultat à moins d'être accompagné d'un lobbyiste coûteux qui a de très bonnes relations avec les politiciens. Donc, malgré tous nos efforts, il faut toujours connaître quelqu'un au CPM.
J'ai été très intéressé par le témoignage de l'Association du Barreau canadien, soit la recommandation selon laquelle le registraire devrait pouvoir imposer des pénalités. Je ne peux croire que la GRC n'a jamais découvert un seul cas de trafic d'influence sur la Colline parlementaire.
La différence entre le trafic d'influence et le lobbying est une peine d'emprisonnement de cinq ans. Je devrais dire le lobbying illégal, car il existe aussi le lobbying légal.
Dans le contexte des exposés que nous avons entendus, et même des recommandations qui ont été faites, comment pouvons-nous nous protéger contre quelqu'un aussi peu scrupuleux que Bruce Carson qui se promène dans les corridors du pouvoir, et qui fait un trafic d'influence tout à fait illégal, mais qui réussit apparemment à rencontrer des gens importants? Y a-t-il un règlement ou même une loi qui puisse en fait empêcher quelqu'un qui est déterminé à enfreindre la loi de le faire? Pour danser, il faut être deux. On ne peut pas faire du lobbying de façon illégale sans avoir un partenaire consentant. Rahim Jaffer se serait promené dans les couloirs comme un mouton sans berger s'il n'avait pas pu en fait rencontrer des gens pour promouvoir ses propres initiatives.
Monsieur Giorno, vous pouvez peut-être nous dire s'il y a quoi que ce soit dans les recommandations de l'Association du Barreau qui pourrait vraiment mettre fin aux activités des Bruce Carson de ce monde ou des gens bien branchés qui travaillent fort pour élire un gouvernement et qui commencent immédiatement à vendre l'accès à ce gouvernement, comme John Reynolds et Tim Powers, Geoff Norquay et Ken Boessenkool, et Monte Solberg? Tous ces gens qui ne sont même pas enregistrés comme lobbyistes mais qui font du trafic d'influence sur la Colline parlementaire en passant un petit coup de fil préliminaire pour ouvrir la porte... Si vous avez encore la clé du bureau du premier ministre, vous n'avez peut-être pas besoin de vendre l'accès à la Colline parlementaire.
Peut-on être assurés, avec les recommandations que vous nous avez présentées aujourd'hui, que nous pouvons stopper ce genre d'activités quasi criminelles pour lesquelles même la GRC n'est pas prête à intenter des poursuites?
:
L'ABC n'a pas de position sur des cas individuels, mais nous avons fait des recommandations qui, je pense, madame la présidente, répondront dans une large mesure aux préoccupations qui ont été soulevées par M. Martin.
Nous estimons qu'en donnant à la commissaire le pouvoir d'imposer des pénalités administratives pécuniaires, cela nous assurera que les lobbyistes qui enfreignent le code... M. Martin a fait allusion à un ancien député qui a enfreint le code et qu'il n'y avait eu aucune sanction, sauf pour ce qui est d'un rapport au Parlement, et maintenant la commissaire serait en mesure d'imposer des pénalités pécuniaires.
J'ajouterais que dans les provinces où des pénalités administratives pécuniaires sont imposées, il ne s'agit pas de quelques centaines de dollars. Je crois qu'en Alberta et en Colombie-Britannique, le montant qui est prévu par la loi est de 25 000 $, ce qui est un montant important. C'est la première chose que je voulais dire.
Deuxièmement, en éliminant la règle des 20 p. 100, soit le seuil de 20 p. 100, il sera plus facile de voir qui fait du lobbying et qui n'en fait pas, et par conséquent qui enfreint la loi ou qui fait du lobbying sans être enregistré. Il sera également plus facile de faire respecter l'interdiction de cinq ans.
L'Association du Barreau canadien, en tant qu'institution, protège depuis longtemps la primauté du droit et l'administration de la justice. Nous sommes d'avis que la façon de répondre à cette préoccupation consiste à donner aux organismes de réglementation, à Karen Shepherd, commissaire au lobbying, les outils dont ils ont besoin pour faire respecter la loi et s'assurer que des sanctions sont imposées en cas de violation de la loi.
:
Il faut dire d'emblée que deux pays ont des lois sur le lobbying qui, à quelques exceptions près... par exemple, le Vietnam, etc. Il y a très peu d'exceptions. Pensons à l'Allemagne. Beaucoup de pays ont simplement...
[Français]
Plusieurs pays ont simplement abandonné l'idée d'adopter des lois à ce sujet. Je pense, par exemple, à l'Écosse. D'ailleurs, j'y fais référence dans mon mémoire. J'ai rencontré des gens du Standards Committee du Parlement écossais, en 2000. On voulait une loi extrêmement sévère. On ne voulait pas que les scandales de Westminster se répètent. Tous les partis s'entendaient là-dessus.
En 2002, on a déposé un projet de loi qui était, pour ainsi dire, insignifiant, avec tout le respect que je dois aux parlementaires écossais. Il ne voulait rien dire. Le projet de loi n'a jamais été adopté, de telle sorte qu'on n'a rien. Ce fut la même chose dernièrement au Royaume-Uni.
C'est extrêmement difficile. Il faut savoir que ce dont on traite aujourd'hui est extrêmement délicat. Faire des représentations auprès des titulaires de charge publique est un fondement de la démocratie. La transparence est aussi un fondement de la démocratie. On doit exiger la transparence, mais une telle chose est plus récente dans nos cultures.
:
En fait, cette question donne lieu à un très grand débat parce que la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes a été la première loi de transparence relative au lobbying au pays. Les assemblées législatives provinciales ont emboîté le pas. L'Ontario et la Nouvelle-Écosse ont des lois très peu efficaces parce que leurs lois reflètent en quelque sorte les lois fédérales d'il y a 15 ans. La loi fédérale a ensuite été modifiée. Les lois les plus efficaces au pays ne sont pas les lois fédérales, mais bien les lois de responsabilité et de transparence relatives au lobbying du Québec et de Terre-Neuve-et-Labrador.
J'exhorte le comité — et je sais que vous avez entendu des témoignages de responsables de la réglementation — à étudier les lois du Québec et de Terre-Neuve-et-Labrador. Elles sont parmi les plus strictes au pays.
L'ABC a formulé des recommandations spécifiques conformes aux lois provinciales responsables des sanctions pécuniaires. L'Alberta et la Colombie-Britannique ont légiféré là-dessus. L'ABC recommande au comité de se pencher sur la question et d'adopter le modèle au niveau fédéral. Au Québec, en Alberta et en Colombie-Britannique, les membres de conseils d'administration de sociétés sont considérés comme des lobbyistes pour le compte d'une organisation. Ce sera le cas au Manitoba quand la loi de la province, qui vient d'être adoptée, sera proclamée. C'est une autre question.
Nous proposons l'élimination de la règle des 20 p. 100. Cette règle n'existe pas dans les règlements municipaux de la ville de Toronto. Il n'y a pas de telles règles au Québec non plus. Il y a dans cette province un triple seuil qui est loin d'atteindre ce niveau. Ces 20 p. 100 ne sont pas non plus coulés dans le béton dans les autres provinces. L'ABC croit que la règle des 20 p. 100 devrait être supprimée.
J'aurais d'autres choses à dire. Si vous estimez que ce serait utile aux membres du comité, il me ferait plaisir de vous envoyer par écrit la liste des similarités et des différences entre les différentes lois. J'enverrais cette réponse en mon nom, pas au nom de l'ABC, parce que le groupe de travail n'a pas fait d'analyse nationale pour comparer les provinces.
Le groupe de travail de l'ABC n'a pas pris de position quant à cette question, bien que le groupe soit au courant d'autres recommandations. Selon moi, la commissaire a raison et l'application devrait avoir une portée plus large. Madame la présidente, j'aimerais clarifier ceci.
Deux régimes existent en vertu de la loi fédérale: l'enregistrement général et les rapports spécifiques mensuels. Tout ce dont le député a parlé — des repas au Hy's, des cocktails, le fait de promener son chien tout en essayant de faire du lobbying — peut être enregistré en vertu de la loi actuelle. La différence réside dans le fait que ces occasions de faire du lobbying ne sont pas toutes enregistrées dans les rapports mensuels.
Je crois que les rapports mensuels devraient avoir une portée plus large pour tenir compte de ces activités. Si les députés désirent se référer aux témoignages de 2006 du comité sénatorial, ils constateront que j'étais de cet avis à l'époque. Je suis toujours de cet avis aujourd'hui.
Madame la présidente, comme le député a mentionné mon mémoire rédigé pour le compte du conseil municipal de la Ville d'Ottawa, il me ferait plaisir de l'envoyer au greffier dans les deux langues officielles aux fins du procès-verbal.
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Il est difficile d'empêcher ces rencontres informelles mais, en contrepartie, je dirais qu'une activité de lobbying n'a pas à être planifiée et à être délibérée pour constituer une activité de lobbying.
Quelle est la ligne à tracer? J'ai bien dit en conclusion tout à l'heure qu'il n'était pas question d'instaurer un État détective. Il reste qu'on ne peut pas jouer sur la marge à l'égard des citoyens qui, eux, veulent savoir, mais peut-être qu'ils veulent trop en savoir. À la limite, ils sont un peu curieux et c'est bien entretenu avec un certain jaunisme, si je peux m'exprimer ainsi. Comme je le disais tout à l'heure, la ligne est très difficile à tracer. Pour ce qui est de la transparence et de la représentation, les deux sont légitimes et démocratiques. C'est là où il faut faire preuve d'intelligence.
Revenons à ces rencontres informelles. Je pense qu'à certains égards, on a oublié quelque chose dans toutes nos activités, à savoir le jugement. On ne peut s'en remettre constamment à des règles, avec tout le respect que je dois aux juristes. Les anglophones ont un vieil adage qui n'est pas une invitation à la délinquance, comme je le souligne, mais qui dit ceci: rules are made to be broken. Alors, plus vous allez mettre de règles, plus il y aura de gens qui vont chercher à les contourner.
Il y a une mesure relative au caractère raisonnable dans tout cela. Je ne suis pas en mesure de déterminer une position qui serait de dire: « Voici la vérité ou voici où la ligne doit être tracée. ». Je n'ai pas cette autorité et je pense que c'est en délibérant vraiment entre vous que vous pourrez arriver à tracer cette ligne.
:
Merci madame la présidente.
Je suis content d'entendre le débat qui a cours. Comme vous pouvez le constater, nous sommes saisis de différentes questions. Divers organismes qui ont comparu devant notre comité avant vous ont recommandé exactement l'inverse de ce que vous proposez, ou ont recommandé des changements qui seraient extrêmement différents de ce que nous avons entendu aujourd'hui. Je suis heureux de constater que l'Association du Barreau canadien semble être assez d'accord avec ce que la commissaire a recommandé. Je trouve que c'est formidable.
Comme vous le savez, le gouvernement conservateur est très fier d'avoir adopté la Loi fédérale sur la responsabilité en 2006. Nous faisons présentement l'examen quinquennal pour déterminer si la loi fonctionne bien jusqu'à présent. Le travail dont sont saisis tous les parlementaires ici réunis aujourd'hui est des plus importants. Je crois que nous devons nous attaquer au coeur de la question.
Certaines questions soulevées auparavant ont piqué ma curiosité. Un témoin nous a dit qu'il y a eu un cas où le lobbyiste en question a fait l'objet d'une enquête de la commissaire au lobbying et que le titulaire de charge publique désigné faisait l'objet d'une enquête de la commissaire à l'éthique. La commissaire à l'éthique a conclu que le titulaire de charge publique n'avait commis aucun acte répréhensible, alors que l'autre enquête portant sur le lobbyiste et les mêmes faits et circonstances découlant d'une réunion similaire s'est poursuivie.
Ça reprend les commentaires que vous avez formulés un peu plus tôt par rapport à la cohérence entre les deux bureaux et la question de savoir s'ils devraient être harmonisés. Ma question s'adresse aux deux groupes de témoins. Y a-t-il des exemples qui montrent qu'on pourrait fusionner les bureaux des commissaires à l'éthique et au lobbying en un seul bureau? Y a-t-il des cas au Canada où ça s'est fait? Y a-t-il des exemples où ça s'est fait dans le monde, afin de mettre en commun des outils d'enquête, des sanctions administratives, des enquêtes...? Je pense qu'il y a un problème de redondance si deux commissaires mènent deux enquêtes portant sur les mêmes circonstances. Est-ce que l'un d'entre vous voudrait faire un commentaire?
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Merci. Monsieur Calkins, votre temps est écoulé.
Avant de remercier les témoins, j'aimerais vous rappeler que M. Giorno a offert de remettre deux documents au comité: son mémoire présenté au conseil municipal de la Ville d'Ottawa et un document qu'il s'est offert de préparer pour comparer les lois fédérales et provinciales. Si le comité voulait les avoir, je demanderais à M. Giorno de les remettre au greffier.
Est-ce que tout le monde est d'accord?
Des voix: Oui.
La présidente: Monsieur Giorno, merci pour votre offre. Quand vous aurez remis les documents au greffier, nous les distribuerons aux membres du comité.
J'aimerais remercier les témoins pour leur comparution et pour leurs témoignages.
Comme il ne nous reste pas beaucoup de temps, et que M. Dusseault veut présenter une motion, nous allons passer directement à celle-ci.
Je demanderais aux témoins de quitter la salle, mais vous pouvez rester.
Nous ne suspendrons pas la séance. Nous allons simplement donner la parole à M. Dusseault pour sa motion.