ENVI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de l'environnement et du développement durable
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TÉMOIGNAGES
Le mercredi 25 avril 2018
[Énregistrement électronique]
[Traduction]
Nous allons commencer. Il manque quelques personnes, mais j’espère qu’elles arriveront bientôt.
De toute évidence, nous avons des défis à relever aujourd’hui. Nous voulons vraiment que les organismes comparaissent devant nous. Nous aurons la possibilité de réexaminer ce dossier mercredi prochain au besoin.
Nous pourrions devoir vous demander, si vous le voulez bien, de revenir la semaine prochaine. Voyons toutefois ce que nous réussirons à faire aujourd’hui.
Je vais maintenant présenter nos invités. Peter Watson, président et premier dirigeant de l’Office national de l’énergie; Robert Steedman, chef de l’environnement, et Jim Fox, vice-président, Intégration de l'information sur l'énergie et de l'analyse.
Scott Tessier, président et premier dirigeant de l’Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers; Dave Burley, directeur des affaires environnementales; et Susan Gover, avocate générale.
De la Commission canadienne de sûreté nucléaire, nous accueillons Michael Binder, président et premier dirigeant.
Monsieur Watson, c'est à vous.
Bonjour et merci, madame la présidente, de nous avoir invités à comparaître aujourd’hui.
Pour gagner du temps, je ne vais pas lire toute ma déclaration, puisque j'ai cru comprendre que les membres du Comité en recevront une copie. Je vais seulement vous présenter un résumé de quelques-uns des principaux points.
Notre travail de réglementation des infrastructures énergétiques nous a placés au coeur de certains des plus importants débats de politique publique des dernières années au Canada. Il est très clair que les Canadiens sont passionnés par l'intendance de l’environnement, les effets régionaux et cumulatifs, ainsi que par l’évolution de la situation et de la nature de la relation du Canada avec les peuples autochtones. Les deux ont des opinions arrêtées et souvent divergentes en la matière.
Nous observons souvent cette passion dans le cadre de nos audiences, qui sont devenues l’occasion de débattre de certaines de ces questions litigieuses. Bon nombre de ces questions se posent à l’échelle régionale, et l’un de nos défis, c’est que les audiences de l’Office national de l’énergie sont nécessairement de nature limitée, en ce sens que nous appliquons les pouvoirs et les autorités législatives propres aux demandes de projet.
Nous remarquons que le gouvernement propose de laisser la place, dans la Loi sur la Régie canadienne de l’énergie, à une orientation plus transparente à la Régie au sujet des grandes questions de politique. À l’avenir, l’organisation pourrait bénéficier de ce genre de clarté générale des politiques, à mesure que les politiques et les priorités globales continueront d’évoluer, afin de veiller à ce que les mécanismes qui s'imposent soient mis en place pour déterminer si un projet particulier s’inscrit dans le cadre stratégique élargi.
J’insiste sur le fait que cela devra englober des cadres régionaux et des effets cumulatifs établis selon le modèle de la collaboration avec entre les divers ordres de gouvernement.
Le projet de loi C-69 propose de nombreux autres changements, et peu sont plus pressants pour nous que les évaluations d’impact intégrées entre l’Agence canadienne d’évaluation d’impact proposée et la Régie canadienne de l’énergie.
La Régie, l’Agence canadienne d’évaluation d’impact et d’autres ministères et organismes devront travailler côte à côte pour tirer parti de nos forces, de notre expertise et de nos pouvoirs respectifs afin que nous puissions établir un nouveau système qui fonctionne pour tous les intervenants.
À titre de partenaire clé du nouveau processus d’examen de l’évaluation d'impact fédérale, nous apportons des connaissances et une expertise technique approfondies sur les marchés de l’énergie, sur la conception, la construction et l’exploitation des pipelines, ainsi que sur les aspects environnementaux, sociaux, de santé, économiques et de sécurité des projets énergétiques. Comme je l’ai dit, nous avons aussi les connaissances et l’expertise nécessaires pour évaluer les conditions du marché et la nécessité économique du projet.
Il y a un besoin d’harmonisation dans l'ensemble du système, mais en ce qui concerne les examens intégrés, dans trois domaines en particulier. Le premier concerne les délais et les dispositions relatives aux arrêts. Le suivant porte sur l’établissement et la modification des conditions du projet, car les conditions jouent un rôle essentiel dans l’atténuation des risques et des préjudices associés à un projet. Le dernier point concerne l'étape de la planification d’une évaluation d'impact.
Nous travaillerons ensemble dans l’ensemble de nos organismes pour apprendre les uns des autres et harmoniser nos approches respectives afin de nous assurer que nous offrons un processus à guichet unique à tous les intervenants et que les processus d’examen aboutissent à des décisions rapides, équitables et techniquement solides.
Il est également important de reconnaître que la Loi sur la Régie canadienne de l’énergie officialise certaines pratiques exemplaires que nous avons déjà adoptées à l’ONE.
Un dernier exemple que j'aimerais souligner est notre travail avec les comités consultatifs et de surveillance autochtones du projet Trans Mountain et le programme de remplacement de la canalisation 3 d’Enbridge. Ces comités ont été mis sur pied conjointement avec les peuples autochtones le long de ces deux ouvrages. Ils favorisent une participation autochtone axée sur la collaboration, inclusive et significative à la surveillance des questions environnementales, de sécurité et socioéconomiques liées à ces projets tout au long de leur cycle de vie. Le projet de loi C-69 officialiserait notre capacité d’établir de tels processus et des processus semblables aux fins de la surveillance du cycle de vie d’autres initiatives à l'avenir.
En conclusion, je suis extrêmement fier du dévouement de notre personnel et des membres de l’Office national de l’énergie. Nous sommes prêts et déterminés à travailler avec nos collègues fédéraux pour mettre en oeuvre le projet de loi et mettre en place des processus transparents, efficients et équitables pour tous les participants et intervenants dans notre processus.
Merci beaucoup, madame la présidente.
Bonjour et merci de nous donner l’occasion de vous faire part de notre point de vue sur le projet de loi C-69.
J’ai le privilège de diriger depuis 2013 un organisme de réglementation de calibre mondial en matière de sécurité et d’environnement. Pendant plus de 30 ans, l’Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers a été un agent efficace de gestion conjointe indépendante de la zone extracôtière Canada-Terre-Neuve-et-Labrador. La sécurité et la protection de l’environnement sont primordiales dans toutes les décisions de l’Office.
Nous avons examiné le projet de loi C-69 et avons discuté avec les gouvernements de notre rôle dans le nouveau cadre législatif. J’aimerais toutefois commencer par un bref résumé de la récente expérience de l'Office dans ce domaine.
Depuis 2003, l’Office a réalisé 57 évaluations environnementales et huit autres évaluations environnementales stratégiques ou mises à jour d’évaluations environnementales stratégiques. Les commentaires du public sont sollicités à plusieurs étapes de ces processus et, par souci de transparence, les documents pertinents sont affichés publiquement. L’Office procède actuellement à la mise à jour de son évaluation environnementale stratégique pour le plateau du Labrador, une initiative coprésidée par le gouvernement du Nunatsiavut.
Dans le mémoire que nous avons présenté au groupe d’experts en évaluation environnementale à l’automne 2016, nous avons exprimé notre appui aux principes provisoires d’évaluation environnementale du gouvernement du Canada. De même, je confirme aujourd’hui que nous appuyons les objectifs du projet de loi C-69.
L’Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers reconnaît que le renouvellement de la législation peut offrir des occasions d’améliorer l’exécution de notre mandat. L'article 6 du projet de loi C-69 traite du principe de la gestion conjointe. Nous sommes heureux que le gouvernement ait reconnu l’importance de l’Accord atlantique. Nous sommes également heureux de constater, dans des documents connexes, que les projets susceptibles d’avoir des effets moindres dans des régions de compétence fédérale peuvent être assujettis à d’autres processus de réglementation en vertu d’organismes de réglementation du cycle de vie comme l’Office.
Cela dit, notre analyse a permis de cerner des points préoccupants et des incohérences entre le projet de loi C-69et les lois de mise en oeuvre de l'accord dont les gouvernements ont pris connaissance et qu’ils semblent disposés à envisager. Je vais également parler brièvement de notre contribution initiale à l’égard de questions clés dans deux documents de travail connexes, que nous avons examinés parallèlement au projet de loi.
Notre première préoccupation concerne l’approche du guichet unique, dans un esprit de gestion conjointe et du principe « d’un examen par projet ». Outre le fait d’être un produit de l’Accord atlantique, le fait d’avoir un organisme de réglementation intégré était l’une des recommandations du rapport de la Commission royale sur le désastre maritime de l'Ocean Ranger. L’approche à guichet unique de l’Office fonctionne efficacement depuis plus de 30 ans dans l’un des environnements extracôtiers les plus rigoureux du monde. Elle permet de veiller à ce que toute l’information pertinente soit disponible et intégrée, ce qui nous permet de prendre des décisions pleinement éclairées.
Le projet de loi C-69 renferme des dispositions concernant la nomination et les pouvoirs des agents de l’autorité — que j’appellerai les agents de l’autorité, qui pourraient s’écarter de cette approche à guichet unique et faire double emploi avec les agents de l’Office. Si un agent de l'autorité ordonnait que des travaux soient interrompus ou exécutés indépendamment de l’Office, la sécurité pourrait être compromise. Je dois souligner que ce risque existe également en vertu de la LCEE de 2012, et les organismes concernés y travaillent. Cependant, il n'est pas question dans le projet de loi C-69 en soi de ces questions de conflit potentiel entre les organismes de réglementation, et l’Office serait préoccupé si des décisions touchant la sécurité extracôtière étaient prises sans notre contribution.
Un deuxième problème concerne le rôle et l’autorité de l’Office. Nous voulons nous assurer d’avoir un pouvoir législatif clair dans tous les domaines où nous assumons des responsabilités. Le projet de loi C-69 continue de désigner l’Office comme une autorité fédérale. On m’a dit qu’au milieu des années 1990, lorsqu’elle a été créée, cette désignation visait à permettre la substitution de processus d'examen en vertu des lois de mise en oeuvre de l’accord. Le projet de loi C-69 n'autorise pas de telles substitutions.
À l’heure actuelle, il n’y a pas de modifications corrélatives pour le recouvrement des coûts ni pour l’article 138.1 des lois de mise en oeuvre de l'accord concernant les évaluations environnementales. Il n’y a pas non plus de dispositions qui obligent l’Office à s’acquitter des fonctions prévues par le projet de loi C-69, à collaborer ou à incorporer autrement les obligations énumérées à l’article 21 du projet de loi C-69 aux lois de mise en oeuvre de l'accord. Il n'est pas clair non plus quel rôle aura la nouvelle Régie canadienne de l'énergie, puisque la section du projet de loi C-69 qui porte sur la zone extracôtière inclut par définition la zone économique exclusive et le plateau continental.
Nous avons pris note des commentaires du ministre Carr devant votre comité, le 22 mars dernier, au sujet de la possibilité de modifier les lois sur l'accord afin de conférer aux offices extracôtiers des responsabilités supplémentaires en cas de production d'énergie renouvelable dans les zones extracôtières. Idéalement, l'Office devrait avoir la même autorité que la Régie dans la zone extracôtière Canada-Terre-Neuve-et-et-Labrador, et une solution consisterait à refléter les dispositions du projet de loi C-69 et des lois de mise en oeuvre de l'accord afin d'assurer la cohérence de l'interprétation des lois.
Le troisième point de notre examen est le fait que le projet de loi C-69 exige que le ministre renvoie à un comité toutes les activités concrètes qui sont des projets désignés et qui sont régies par les lois de mise en oeuvre de l’accord. Notre processus d’approbation du plan de développement comprend un énoncé de répercussions environnementales, un énoncé socioéconomique, un plan des avantages et d’autres plans précisés par l’Office. Il peut aussi exiger un examen public assorti d’audiences.
Cela soulève la question de savoir quand le processus du plan de développement de l’Office devrait commencer. Nous devrons décider si nous devons attendre d’avoir en main le rapport de décision de l’agence d’évaluation d'impact.
L’Office reconnaît que nous aurons l’occasion de faire valoir notre expertise dans le cadre du processus de la commission. Toutefois, le processus décisionnel signalé à la conclusion du rapport du groupe d’experts semble être exclusivement fédéral, et ce résultat final pourrait entrer en conflit avec les lois de mise en oeuvre de l’accord.
Nous reconnaissons l’engagement qu'a pris le gouvernement du Canada de mener à l’est de Terre-Neuve une évaluation régionale qui pourrait servir à éclairer et à orienter les évaluations environnementales et les décisions réglementaires relatives aux futurs projets de forage exploratoire dans la région.
Comme la ministre McKenna l’a indiqué au Comité le 22 mars, il est possible d’éviter la nécessité d’une évaluation d'impact distincte pour les activités de forage exploratoire extracôtier propres à un projet lorsqu’une évaluation régionale a été effectuée. Cette approche pourrait éviter la nécessité de longs examens par des commissions pour des projets de forage exploratoire dont les répercussions et les mesures d’atténuation sont bien connues et bien établies.
L’Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers travaille en collaboration avec l’Agence canadienne d’évaluation environnementale et nos collègues des ministères fédéral et provinciaux des Ressources naturelles à la conception de l’évaluation régionale à l’est de Terre-Neuve.
Un quatrième facteur d’incertitude découle de l’article 9 du projet de loi C-69, en vertu duquel le ministre peut désigner une activité concrète qui relève autrement des attributions de l’Office comme projet désigné, comme il pouvait le faire en vertu de la LCEE de 2012. En théorie, cela pourrait s’appliquer aux puits de délimitation ou aux programmes géophysiques, quels qu'ils soient, qui n’étaient en général pas des projets désignés par le passé.
Dans un esprit de gestion conjointe, nous nous attendons à ce que ce pouvoir discrétionnaire ministériel soit exercé de façon minimale et à ce que de telles décisions soient prises en consultation avec le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador et l’Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador, si le projet en question se trouve dans la zone extracôtière Canada-Terre-Neuve-et-Labrador.
Notre dernière observation porte sur les dates d’entrée en vigueur.
Toute modification de la loi fédérale de mise en oeuvre de l’accord ne peut entrer en vigueur sans que des dispositions similaires soient prises dans la version provinciale. L'on ne sait pas encore comment la loi provinciale sera modifiée pour refléter bon nombre des changements envisagés dans le projet de loi C-69 ni le moment choisi pour le faire tout en respectant le principe de la gestion conjointe.
Nous ne savons pas non plus comment l’Office sera censé concilier nos obligations actuelles en vertu des lois de mise en oeuvre de l'accord avec le projet de loi C-69 une fois qu’il entrera en vigueur, compte tenu de la disposition de préséance inscrite à l’article 4 des lois de mise en oeuvre.
Enfin, notre personnel a examiné deux documents de travail sur le projet de loi C-69 qui ont été publiés afin de solliciter les commentaires du public, et je suis heureux de vous faire part brièvement de nos commentaires initiaux aujourd’hui.
En ce qui concerne le document de consultation sur l’approche de révision de la liste de projets, l’Office appuie l’approche fondée sur des critères pour la révision de la liste de projets. Pour revenir à un autre point que j’ai soulevé plus tôt, nous appuyons le plan selon lequel les projets qui pourraient avoir des effets moins importants continueront d’être assujettis à d’autres processus, comme ceux qui relèvent des organismes de réglementation du cycle de vie.
Pour ce qui est du document de consultation sur le Règlement concernant les exigences en matière de renseignements et de gestion des échéanciers, l’Office est prêt à aider l’agence d’évaluation d'impact à examiner les documents, que les promoteurs de projet seraient tenus de fournir au début de l'étape de la planification. Nous pouvons aussi appuyer l’agence dans ses efforts de consultation, étant donné notre connaissance et nos relations avec les intervenants. Nous pouvons fournir des conseils d’expert sur les documents que l’agence a l’intention de fournir aux promoteurs lorsqu’une évaluation d'impact est jugée nécessaire. L’Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers est favorable à l’idée de fournir aux promoteurs une certitude, par voie de règlement, quant au moment où le délai pourrait être arrêté pour les échéanciers prévus par la loi.
En résumé, l’Office appuie les objectifs du projet de loi C-69, en tenant dûment compte de la coordination avec le régime de l’Accord atlantique et la surveillance de l’Office, ce qui comprend la protection et la sécurité de l’environnement.
Si le projet de loi tient compte des considérations nécessaires relativement aux activités pétrolières extracôtières et si les modifications nécessaires de la Loi de mise en oeuvre de l’Accord atlantique sont apportées, les changements pourraient améliorer la coordination réglementaire et contribuer à un système de réglementation plus stable et efficace, y compris la surveillance et l’application après l'évaluation.
Je vous remercie encore une fois de m’avoir donné l’occasion de témoigner. Mes collègues et moi serons heureux de répondre à vos questions.
Bonjour madame la présidente et membres du Comité.
[Français]
Je vous remercie de m'avoir invité ici aujourd'hui pour commenter le projet de loi C-69.
[Traduction]
En vertu de notre loi habilitante, la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires, notre mandat consiste à réglementer l’utilisation de l’énergie et des matières nucléaires afin de protéger la santé, la sûreté, la sécurité et l’environnement; mettre en oeuvre l’engagement international du Canada à l’égard de l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire; et communiquer au public des renseignements scientifiques, techniques et réglementaires objectifs.
La CCSN est un organisme de réglementation unique. Elle est différente de tout autre organisme de réglementation de l’énergie au Canada. Comme les membres du Comité le savent sûrement, dans le domaine nucléaire, un accident, où qu'il se produise, a des répercussions partout. C’est pourquoi le Canada a établi un cadre de réglementation nucléaire fondé sur des obligations internationales et des conventions juridiques au niveau des traités. Dans mon mémoire, je vous donne une liste des principales conventions.
Suivant la principale exigence du régime international de sûreté et de sécurité nucléaires, les pays disposent d’un organisme de réglementation nucléaire indépendant dont les décisions sont fondées sur la meilleure information scientifique et technique disponible, qui n’est pas assujetti à un examen gouvernemental ou politique. De plus, pour assurer le respect des engagements juridiques internationaux, le Canada doit régulièrement rendre compte de son rendement en matière de réglementation, procéder à des examens par des pairs et se soumettre à un examen de l’Agence internationale de l’énergie atomique des Nations unies. J’ai fourni dans mon mémoire la liste des examens par des pairs qui ont été menés récemment au Canada.
Outre ce niveau de transparence et de surveillance à l’échelle internationale, nous appliquons des normes nationales rigoureuses et des exigences réglementaires dont nous devons rendre compte. La CCSN est le seul organisme de réglementation de l’énergie qui publie des rapports annuels de surveillance réglementaire qui évaluent le rendement de tous ses titulaires de permis en matière de sûreté.
Ce qui m’amène au projet de loi C-69.
La CCSN possède une vaste expérience des évaluations environnementales. Depuis 2000, la CCSN a réalisé plus de 70 évaluations environnementales et évalué comme il se doit les répercussions environnementales de tous les projets proposés. Dans tous les cas, passés, actuels et à venir, la CCSN a toujours été et demeurera l’autorité responsable de la sûreté et de la sécurité nucléaires.
Il me semble que la notion d’évaluation environnementale comme outil de planification a été oubliée. La mise en oeuvre et l’exploitation d’un projet nucléaire peuvent prendre de nombreuses décennies. Il est important que l’organisme de réglementation du cycle de vie nucléaire dispose des outils nécessaires pour apporter toutes les améliorations et tous les ajustements, en tenant compte des considérations environnementales, tout au long de la durée du projet.
Par suite de son examen du projet de loi C-69, la CCSN a cerné des aspects de la Loi sur l’évaluation d’impact proposée qui pourraient être plus clairs. Nous comprenons l’objectif d'un examen par projet, et nous y souscrivons. Parallèlement, pour reconnaître l’indépendance du processus décisionnel de la CCSN en matière de réglementation, il doit y avoir une séparation claire entre l’évaluation d’impact et l'étape d’autorisation d’un projet nucléaire. De plus, toutes les conditions faisant l’objet d’une évaluation d’impact doivent échoir à la CCSN afin qu’elles puissent être gérées efficacement tout au long du cycle de vie du projet.
D’après notre expérience de la réglementation des mines d’uranium, l’harmonisation avec les provinces en matière d’autorisation des mines d’uranium a été bénéfique et efficace pour éviter les dédoublements. Nous croyons que le nouveau régime d’évaluation d'impact devrait permettre la coopération et même la substitution avec les provinces. Nous travaillons également avec le gouvernement relativement aux processus et aux calendriers de mise en oeuvre.
Il est important que nous sachions tous, dès le départ, le temps que cela prendra avant que le projet soit approuvé. D’après notre expérience, l’industrie peut accepter une décision favorable ou défavorable prise rapidement. Un « peut--être » n'est toutefois pas acceptable comme réponse. Par exemple, cela fait maintenant plus de 15 ans que nous avons entamé des discussions avec Ontario Power Generation au sujet d’un dépôt géologique en profondeur.
Une commission d’examen conjoint a été constituée en vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale de 1992, et des audiences et consultations approfondies ont été réalisées auprès du public et des Autochtones; un rapport a été présenté à l'ancien gouvernement en mai 2015 et nous attendons toujours la décision du gouvernement actuel. Il s'agit là d'un problème qui devrait être évité à l’avenir.
Nous tâchons également d'aider le gouvernement à établir une liste de projets désignés efficace et raisonnable. Nous sommes d'avis que les activités autorisées et les installations nucléaires n'ont pas toutes besoin d'être soumises à une commission d'examen; pensons ici, notamment, à un cyclotron d’isotopes dans un hôpital, à une petite installation de recherche ou à la remise à neuf d’une centrale nucléaire en vue de la rendre plus sécuritaire. Pour ce genre de projet, la réglementation assurée par la CCSN en vertu de la LSRN devrait suffire.
Pour terminer, j’aimerais préciser que la CCSN appuiera les modifications aux lois et aux politiques proposées par le gouvernement du Canada en vue d'améliorer le processus d’évaluation d'impact. Nous sommes impatients de collaborer davantage avec la nouvelle Agence canadienne d’évaluation environnementale afin de clarifier les exigences et de mettre la Loi en oeuvre de manière efficace.
[Français]
Je vous remercie, et je répondrai à vos questions avec plaisir.
[Traduction]
Merci beaucoup à vous tous d’avoir fait preuve de patience en livrant un résumé de votre position de manière à respecter les 10 minutes allouées.
Je tiens également à vous remercier de nous avoir fait parvenir vos commentaires et vos déclarations en anglais et en français, afin que nous puissions les distribuer aux membres du Comité. C’est toujours pratique de les avoir en main. On peut l'annoter au fur et à mesure de la discussion et y écrire les questions qu’on veut poser.
Nous allons commencer les questions avec M. Rogers.
Mais avant, je tiens à souhaiter la bienvenue au député Cooper qui rejoint notre comité aujourd’hui.
Allez-y, s’il vous plaît.
Merci, madame la présidente, et bienvenue aux témoins. J’ai apprécié les exposés.
Compte tenu du temps dont je dispose, je ne m'attarderai pas à mes observations personnelles et je vais passer aux quelques questions que je veux poser. Certaines décisions prises en vertu de la Loi sur la Régie canadienne de l'énergie qui est proposée doivent tenir compte des effets préjudiciables que ces décisions peuvent avoir sur les droits des peuples autochtones. De même, les recommandations de la Commission doivent tenir compte des intérêts et des préoccupations des peuples autochtones, notamment en ce qui a trait à leur utilisation actuelle des terres et des ressources à des fins traditionnelles. À votre avis, monsieur Tessier, cette loi aurait-elle une incidence sur la façon dont l’industrie tient compte des intérêts et des préoccupations des peuples autochtones lors de la planification d’un projet?
Je pense que nous observons déjà une évolution dans l’industrie en ce qui a trait à son engagement auprès des peuples autochtones. Le gouvernement fédéral a certainement adopté une vision élargie et a accordé une grande priorité à la réconciliation avec les peuples autochtones, et l’industrie suit cette voie. Nous constatons déjà une forte augmentation de la mobilisation des Autochtones et je soupçonne que cela se poursuivra dans le nouveau cadre, peut-être plus formel d'un point de vue législatif et réglementaire.
Dans des pays tels que la Norvège et en mer du Nord, les permis de forage exploratoire semblent être approuvés beaucoup plus rapidement, du moins c’est ce qu’on entend dire. Croyez-vous que ce projet de loi permettra d’accélérer le processus et que l’Office Canada -Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers, en tant qu’organisme de réglementation autorisé, aura son mot à dire sur les petits projets comme les puits d’exploration? Dans le même ordre d'idées, une fois que l'ACEE a effectué l’évaluation environnementale stratégique, considérez-vous que les délais prescrits par le projet de loi conviennent? Devrait-on les prolonger ou les raccourcir?
Pour ce qui est de savoir si les choses iront plus vite, je ne sais pas. Je pense qu’il y a certainement place à l'amélioration, mais il faudrait pour cela resserrer les processus ainsi que les rôles et les responsabilités. Tout dépend des ressources dont bénéficieront les organismes de réglementation, et il reste beaucoup à faire pour déterminer les rôles, les responsabilités et les ressources des organismes du gouvernement fédéral, d'une part, et les nôtres à titre d’organisme de réglementation du cycle de vie.
La question des délais est délicate. Encore une fois, pour le moment, je ne suis pas en mesure de dire si ce sera plus rapide ou plus lent et si ce sera mieux ou pire, car il y a des étapes à respecter dans le cadre du travail de collaboration entre les organismes. Je pense qu’il est possible d’avoir un processus simplifié et rigoureux, mais encore une fois, cela dépend des ressources fournies, des mandats et des feuilles de route de ceux qui assurent la surveillance réglementaire et la prise de décisions.
Encore une fois, c'est à vous que je pose la question, monsieur Tessier, parce que je viens de Terre-Neuve-et-Labrador et, de ce fait, je me demande en quoi le projet de loi favorise le processus ou lui nuit d'une certaine façon, si on l'examine sous tous les angles.
Quels aspects de la Loi sur l’évaluation d’impact proposée influeraient le plus sur le fonctionnement quotidien du conseil et sur son mandat en vertu des lois de mise en oeuvre de l'Accord?
Il y aura une refonte fondamentale de notre relation de travail avec le gouvernement fédéral; l’instauration de la Loi sur l’évaluation d’impact et la constitution de l’Agence d’évaluation d’impact entraîneront des changements dans nos activités quotidiennes. Nous travaillerons plus étroitement avec ces organismes fédéraux et nous continuerons de travailler en étroite collaboration avec les experts en la matière d’autres ministères et organismes responsables au fédéral.
Les échanges quotidiens seront sûrement plus fréquents en ce qui concerne les évaluations environnementales et les évaluations d’impact. En dehors de cela, comme je l’ai mentionné dans mon exposé, en ce qui concerne notre processus d’approbation du plan de développement, par exemple, nous allons devoir discuter du meilleur moyen d'aligner nos responsabilités selon les lois de mise en oeuvre de l’Accord et les nouvelles relations de travail instaurées dans le projet de loi C-69.
Je crois comprendre qu’on s’est engagé à aller de l’avant concernant les évaluations régionales dans la zone extracôtière en commençant par un projet pilote dans l’est de Terre-Neuve. Encore une fois, du point de vue de l'Office, pourquoi est-ce si important que les évaluations régionales continuent et qu'est-ce qu'il peut apporter au processus?
L’évaluation régionale peut grandement profiter aux gouvernements, aux promoteurs, aux groupes autochtones, aux intervenants et à nous en tant qu’organisme de réglementation. Je suis emballé à l'idée que l'évaluation régionale soit permanente, contrairement à notre évaluation environnementale stratégique qui doit être mise à jour périodiquement. Nous envisageons, avec l’Agence, l'adoption d’une formule numérique quelconque, mais nous en sommes encore au support papier pour nos évaluations environnementales stratégiques. Le numérique offre un potentiel immense à toutes les personnes concernées.
Une évaluation régionale offre également l'occasion de réorganiser et de réduire le fardeau de toutes les personnes que je viens de mentionner. Il y a un risque réel de lassitude, non seulement de la part des organismes de réglementation et du gouvernement, mais aussi de la part des promoteurs et des personnes que nous consultons. Nous voulons réduire au minimum l’usure due aux consultations,et l’action plus collective tout en étant rigoureux, présente un grand potentiel. C’est la gouvernance qui appelle une réserve ou dicte une condition. Il faut la définir correctement. Nous cherchons l’inclusion, mais pas une trop grande lourdeur.
Je suis sur le site de l’Office Canada -Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers et vous semblez être à la fois un organisme de réglementation et une agence de développement parce que vous parlez des avantages qu’offre ce lien entre le Canada et Terre-Neuve-et-Labrador et que vous dites favoriser l’exploration et l’exploitation des ressources pétrolières.
Combien d’emplois dans la province dépendent de l’industrie pétrolière extracôtière?
Nous ne sommes pas une agence de développement au sens où l’entend communément Ottawa, soit une agence de développement régional. Notre mandat est large et comprend la gestion des ressources et les retombées industrielles, pour que ce soit bien clair.
En ce qui concerne l’emploi, je dirais que l’industrie représente 3 000 emplois directs et 7 000 à 10 000 emplois indirects, mais il y a des gens dans la salle qui ont ces chiffres en tête ou au bout des doigts et qui pourraient me corriger si je me trompe.
On peut supposer sans trop s’avancer que l’industrie dont vous faites partie est un employeur très important dans cette région.
Elle représente 16 à 20 % de l’économie provinciale actuellement et a déjà occupé le tiers de cet espace.
Est-ce que l’industrie dépend de l’investissement annuel en provenance de l’extérieur pour sa survie ou pour constituer des entreprises?
Oui, l’exploitant type du pétrole extracôtier fait partie d’une entreprise mondiale, et c’est cette concurrence entre les entreprises mondiales qui explique leurs investissements. Elles peuvent investir n’importe où dans le monde, donc les gouvernements du Canada et de Terre-Neuve-et-Labrador font tout pour les attirer dans la zone extracôtière.
Puis-je vous interrompre un instant? La sonnerie a commencé à retentir, alors je veux m’assurer d’avoir le consentement unanime du Comité pour continuer.
Merci.
J’ai beaucoup apprécié votre dernier point, parce que cela m’amène à ma prochaine question.
L’Association canadienne des producteurs pétroliers, lorsqu’elle a comparu devant nous, a déclaré ce qui suit:
Malheureusement, aujourd'hui, le climat d'incertitude au Canada ne permet pas d'attirer des capitaux, et nous continuerons de perdre des investissements et des emplois si nous n’instaurons pas un système de règles claires et de décisions qui sont définitives et fiables.
Malheureusement, l'Association canadienne des producteurs pétroliers et les investisseurs estiment aujourd'hui que le projet de loi C-69 ne prévoit pas grand-chose pour améliorer cette situation.
Son évaluation de la situation est-elle bonne?
Je ne sais pas. Il y a certainement des problèmes de compétitivité au large de Terre-Neuve-et-Labrador. Je dirais que l’industrie évalue l’attrait d’une région en fonction du contenu du puits creusé, on parle ici de géophysique et de géoscience, et sur la base de ce qui entoure le puits, soit des choses comme la stabilité de la gouvernance et le cadre réglementaire.
À mon avis, notre cadre réglementaire est de classe mondiale. Notre compétitivité en général, par ailleurs, n’est pas vraiment dans mes attributions. Nous ne nous soucions pas de la situation économique des exploitants. Ce sont là des discussions et des questions qui sont plus du ressort des gouvernements.
Vous me permettrez de ne pas être d’accord avec vous, car sur le fond, les rapports abondent. Dans un article du Maclean’s, on affirme que les investissements étrangers se sont raréfiés et que l’investissement direct étranger au Canada a atteint 31,5 milliards de dollars, une baisse de 56 %.
Chris Bloomer, de l’Association de pipelines, a fait valoir que « [d]e nouveaux projets sont pratiquement interrompus, et nous éprouvons de graves problèmes, à l'échelle de notre secteur et de notre pays, pour ce qui est d'ouvrir de nouveaux marchés pour nos produits énergétiques dans le monde entier. »
Il semble que le projet de loi C-69 nous engage sur une voie qui va sérieusement affecter la compétitivité du Canada.
Vous avez soulevé le problème de la compétitivité, donc la question vous préoccupe, vous qui oeuvrez dans ce secteur. Selon vous, en quoi ce projet de loi influera-t-il sur la compétitivité du Canada du point de vue de la capacité de ce dernier d’attirer des investissements de partout dans le monde?
Peut-être qu’un bon prétexte pour en discuter, ce serait d’examiner les candidatures et les appels d’offres. Autrefois, leur nombre atteignait des sommets, alors que l’année dernière, la participation a été relativement faible.
Nous avons un appel d’offres qui vient à échéance en novembre. J’invite les membres du Comité à surveiller les soumissions que nous attirons dans le cycle qui se termine en novembre prochain. Ce sera un bon indice de la réponse que vous attendez.
Je peux vous assurer que nous allons surveiller la situation, surtout de ce côté-ci de la salle.
Je reviens à ce que Chris Bloomer, de l’Association canadienne de pipelines d’énergie, a déclaré. Je lis: « [s]i l'objectif est de suspendre la production pétrolière et gazière et d'arrêter la construction de pipelines, ce projet de loi pourrait bien avoir atteint son objectif. »
Combien de temps me reste-t-il, madame la présidente?
D’accord.
J’aimerais conclure avec l’avis juridique d’Osler et compagnie. Ils disent ce qui suit:
Malgré la suggestion du gouvernement du Canada selon laquelle la nouvelle loi améliorera l’efficacité et le calendrier des examens réglementaires fédéraux, il n’y a rien dans cette mesure qui permettra nécessairement d’atteindre ces résultats et de nombreux aspects de la loi auront probablement l’effet contraire...
Les associations industrielles, dont votre industrie fait partie — vous ne faites peut-être pas partie d'une association, mais vous faites tous partie de la même industrie — et un avis juridique de la part d’une société d’exploitation des ressources naturelles s’entendent pour dire que ce projet de loi favorisera un déclin de l'investissement étranger au Canada et freinera lentement notre production énergétique jusqu'à immobilisation complète.
Merci, madame la présidente.
Mes questions s’adressent à M. Watson.
C’est un plaisir de vous revoir. Nous avons beaucoup travaillé ensemble sur la Clean Air Strategic Alliance de l’Alberta, organisme avec lequel les relations de travail ont été très positives, et nous recommandons au gouvernement fédéral de réunir tout le monde.
Nous entendons surtout parler du premier volet du projet de loi C-69, mais il y en a un deuxième, soit celui qui porte sur la Régie canadienne de l’énergie. Un certain nombre de recommandations ont visé tant l’évaluation d’impact que cette régie, celle du nouvel organisme canadien de réglementation de l’énergie.
L’une des propositions amenées par des témoins et que le comité d’experts a lui-même recommandée, pour être franche, consiste à abandonner les groupes spéciaux et à plutôt créer un tribunal administratif.
Compte tenu de votre expérience en Alberta et à titre de dirigeant de l’Office national de l’énergie, pensez-vous qu’il y a un avantage à avoir un tribunal administratif qui acquiert l’expertise nécessaire dans le domaine ou pensez-vous que vous seriez en mesure d’assumer efficacement les mêmes responsabilités avec des personnes nommées de façon ponctuelle à des comités?
Je pense qu’une chose qui sera importante et qui est déjà prévue dans le projet de loi, c’est qu’il faut, si l’on tient compte de la nature des projets dont nous sommes responsables, soit les pipelines et les lignes de transport d’électricité à l’échelle internationale, assurer la totale intégration des fonctions de surveillance réglementaire du cycle de vie. Comme vous le savez, nous avons certaines de ces caractéristiques en vertu de la Loi sur l’Office national de l’énergie. Nous pensons qu’un partenariat avec l’Agence d’évaluation d’impact et l’offre de notre expertise technique, et de notre capacité de résoudre les enjeux soulevés par l’application de la Loi sur la Régie canadienne de l’énergie constitueront un bon point de départ et permettront d’exploiter au maximum les forces et les capacités des deux organisations.
Je pense que dans notre monde, le processus d’examen intégré peut bien fonctionner.
Je ne remets pas en cause l’intégration, mais on peut se demander combien de personnes devraient venir des différents secteurs énergétiques. Il faut plutôt se demander comment, car, dans la première partie du projet de loi, il n’est question que d’une liste de personnes nommées aux comités, alors qu’à l’heure actuelle, c’est l’Office national de l’énergie qui s’en occupe à plein temps.
Pensez-vous qu’un tribunal administratif offre des avantages dont on se priverait en se contentant d’une liste de personnes pouvant être appelées de temps à autre?
Je ne suis pas certain d’être le mieux placé pour parler de cette question en particulier parce que, dans notre organisation, pour exercer notre pouvoir dans les domaines de compétence fédérale, il est utile de comprendre, de bien connaître et d’être capable d’apprécier les enjeux qui résident dans le cycle de vie en entier. Cela s’explique en partie par le fait que nous assurons la sécurité et la surveillance réglementaire de ces projets.
Je sais que d’autres personnes et organismes, dont l’Agence canadienne d’évaluation environnementale, vous ont fourni des renseignements et des conseils; c’est à eux que vous devriez poser la question. Je ne peux pas vraiment traiter de l’éventail des problèmes auxquels ils peuvent être confrontés.
Bien sûr. Nous comptons les entendre de nouveau, si possible.
Deux autres recommandations ont été formulées par des personnes de Calgary, soit un chercheur de l’Université de Calgary et le Pembina Institute. Malheureusement, l’objet de leurs recommandations exigerait la sanction royale, car des ressources additionnelles seraient nécessaires. Ils ont en effet proposé la création d’un organe indépendant d’information sur les formes d’énergie. Je pense que ce qu’ils proposent, c’est de mettre en commun toutes les données recueillies par les tribunaux provinciaux et l’Office national de l’énergie afin d’offrir une information sur laquelle tout le monde peut se fier et dans laquelle tout le monde a confiance.
Croyez-vous qu’il serait utile d'envisager cette option pour appuyer le travail de tous les tribunaux visés par le projet de loi C-69?
Nous appuyons l’intégration du travail d’information sur l’énergie en général. Nous jouons un certain rôle à cet égard, mais pas complètement, et avec raison. Nous recueillons certains ensembles de données qui sont absolument essentiels à l'exécution de notre mandat et qui en font partie en vertu de la Loi sur l’Office national de l'énergie. Ils sont également essentiels à l'exercice de notre rôle d’organisme de réglementation économique, à notre compréhension des flux d’énergie au pays et à notre prise de responsabilités en matière d’importation et d’exportation.
Nous fournissons des ensembles de données de base au système. Nous comprenons et appuyons le besoin d’une meilleure intégration dans l’ensemble du système, et nous aimerions en faire partie à l’avenir. Nous pouvons et nous devrions viser une meilleure intégration et un meilleur effort dans l’ensemble du Système canadien d’information sur l’énergie.
Mon autre question porte sur un point soulevé par certains intervenants de l’industrie, soit la durée de la période de transition où il faut compter sur l’adoption de cette loi, la création des nouvelles entités et le maintien de l’Office national de l’énergie.
Je me demande si vous avez quelque chose à dire à ce sujet.
Bien sûr. Je veux simplement dire aux membres du Comité que dans l'intervalle, bien entendu, nous continuerons de traiter les demandes présentées en vertu de la Loi sur l’Office national de l'énergie. Nous positionnerons également notre organisation pour qu’elle puisse réagir aux changements qui seront nécessaires lorsque nous passerons aux nouvelles dispositions. Nous sommes très conscients non seulement des efforts à déployer pendant cette période de transition, mais aussi de la nécessité d'assurer plus de clarté et de certitude relativement aux demandes déjà en traitement.
Merci à nos distingués représentants des organismes de réglementation au Canada. C’est un privilège de vous avoir parmi nous.
J’ai l’impression que le public — pas seulement les électeurs de Pontiac, mais les Canadiens en général — aimerait que je demande à chacun d’entre vous de parler de la question de la confiance de la population envers nos organismes de réglementation. À votre avis, comment le projet de loi C-69 permettra-t-il de résoudre cette question, et quelles améliorations pourrait-on apporter pour accroître la confiance du public? Au bout du compte, si nous voulons que l’environnement et l’économie aillent de pair, il faut aussi que le public participe au processus. Il doit avoir l’impression que les bons projets seront bien réglementés et qu’ils seront bien évalués avant même d’être lancés.
Je vais donner la parole à M. Binder pour commencer, mais j’inviterais chacun de vous à répondre au nom des institutions respectées que vous représentez. Que pourrait-on améliorer dans le projet de loi C-69? Que pourrait-on modifier pour accroître la confiance du public envers nos organismes de réglementation?
Merci de votre question. Je pense que c’est une question importante à une époque où les gens entendent parler de fausses nouvelles et de faits mensongers. Nous venons de prendre connaissance d’un sondage récent selon lequel 40 % des Canadiens pensent que la science est une question d’opinion. Dans ce contexte, la question qui se pose est la suivante: en tant que responsables de la réglementation, comment pouvons-nous convoquer des gens, les faire participer à nos audiences et leur faire accepter nos décisions?
J’aimerais faire une distinction au sujet du processus d’approbation des projets, dans le cadre duquel nous essayons d'établir un dialogue grâce à des audiences publiques. En fait, nous avons recours au financement participatif pour permettre aux gens de comparaître devant nous. Les audiences sont diffusées sur le Web. Nous publions un rapport annuel sur le rendement des titulaires de permis et des installations. Nous faisons tout cela.
Soit dit en passant, au cas où vous n’auriez pas assisté à l’une de nos audiences, je vous recommande fortement de le faire. C’est fascinant. Les échanges sont vraiment intéressants. J’espère que les gens vont essayer de comprendre les données scientifiques et techniques que la Commission examine.
Nous n'arriverons jamais à faire changer d'avis un petit pourcentage de gens qui sont contre le nucléaire, un point c’est tout. Nous espérons que la grande majorité... Dans les collectivités où il y a des installations, particulièrement, le taux d’acceptation est très élevé. Dans ces collectivités, où l’on comprend le travail effectué par les titulaires de permis, je pense qu’il y a un fort niveau d'approbation. Il est toutefois difficile d'étendre cette perception. Nous essayons de le faire et de fournir autant... Nous avons le mandat législatif de diffuser de l’information technique et scientifique, et nous essayons de le faire de notre mieux en utilisant notre site Web, nos nouveaux médias, etc.
Je comprends cela, mais ma question porte sur le projet de loi C-69 en particulier. À votre avis, quels aspects pourraient être améliorés, afin de mieux gagner la confiance du public? Je comprends que vous faites tout votre possible pour communiquer avec le public canadien, mais il y a clairement un manque de ce côté.
Madame la présidente, j’invoque le Règlement. Cette question s'adresse davantage à ceux qui ne sont pas responsables de la réglementation. La question est posée à un responsable d'un de nos organismes de réglementation au sujet de la confiance du public, mais elle devrait plutôt l'être à d’autres intervenants ou politiciens, ce qui, je crois, serait plus approprié.
Je pense que la question est tout à fait raisonnable. Si l’un ou l’autre de nos témoins n’est pas à l’aise avec ma question, je suis tout à fait certain qu’ils diront: « Je ne me sens pas à l’aise de répondre à la question. »
J’ai fait preuve de souplesse de part et d’autre en permettant aux gens de poser des questions, de faire des déclarations ou de ne pas poser de questions, alors poursuivons. Nous allons garder cela à l’esprit.
Je vais peut-être poser la question à l’Office national de l'énergie. Je vais commencer de façon très positive, parce que j’ai eu une expérience fabuleuse, et je crois qu'il en est allé de même pour les gens que je représente, au moment de la revue des exigences en matière de forages extracôtiers dans l’Arctique en 2011. M. Steedman a joué un rôle clé dans ce processus, et je l’en félicite.
C’est un processus qui, à mon avis, a suscité la confiance du public, mais il y a eu d’autres instances auxquelles l’Office national de l'énergie a participé, où le niveau de confiance n’était pas aussi élevé. Que pouvez-vous ou voulez-vous nous dire sur la façon dont le projet de loi C-69 pourrait le mieux contribuer à susciter la confiance du public à l'égard de notre processus réglementaire?
J'aimerais mentionner certaines des choses que nous avons déjà commencé à faire. Je crois qu’elles s'inscrivent dans l'esprit du projet de loi C-69, qui les appuie.
Nous avons reconnu il y a quelque temps que nous devions être plus proactifs dans notre engagement auprès des intervenants de partout au pays et des participants à nos processus d’audience. La participation des Canadiens est nécessaire et pertinente, et nous constatons qu'elle est permise et attendue dans le cadre du projet de loi C-69.
Je pense que les organismes de réglementation peuvent aussi prendre des mesures pour accroître la transparence de leurs activités. J’aimerais attirer votre attention sur l’une des initiatives qui ont été prises dans le cadre du projet d’agrandissement du réseau de Trans Mountain et du projet de remplacement de la canalisation 3 avec nos comités consultatifs et de surveillance autochtones. Nous travaillons en collaboration avec eux, afin d’être entièrement transparents en ce qui concerne nos activités de surveillance du cycle de vie et la façon dont les choses sont faites pour assurer la sécurité et réduire les dommages associés aux effets potentiels d’un pipeline en exploitation.
Grâce à ce processus, nous apprenons à mieux travailler ensemble et à nous engager à l'endroit des Premières Nations et de la nation métisse pour nous assurer que cet engagement est vraiment transparent et efficace, surtout en ce qui concerne les questions de surveillance du cycle de vie.
Il y a un certain nombre de choses que nous avons essayé de faire, et je crois qu’elles pourront se poursuivre.
Merci à tous nos témoins d’être venus.
Ma première question s’adresse à M. Tessier. J’ai pris note du fait que vous avez dit que nous avons un régime de réglementation de calibre mondial. Maintenez-vous cette déclaration?
Beaucoup de députés libéraux ont laissé entendre que, dans les faits, le système de réglementation au Canada est défaillant en ce qui concerne les évaluations d’impact et la réglementation de l’énergie. Parlez-moi du genre de consultation qui se fait habituellement dans le cadre d’une proposition de projet qui vous est soumise.
Elle se fait à deux niveaux. En ce qui concerne l’évaluation environnementale, il y a deux ou trois façons différentes de mobiliser le public, les intervenants et les groupes autochtones. Comme je l’ai mentionné, nous effectuons des évaluations environnementales stratégiques, sur de vastes régions géographiques, tous les cinq à sept ans, en tenant compte des spécificités biologiques et géophysiques d’une région. À cela s’ajoutent, bien entendu, les évaluations environnementales propres aux projets, que le Comité connaît bien.
Le troisième moyen par lequel nous invitons essentiellement le public à nous faire part de ses commentaires est un peu comme un processus d’approbation d'un plan de développement pour un projet comme Hebron ou Hibernia, les grands projets familiers. Il y a un troisième processus qui permet d’examiner les considérations socio-économiques et autres dans le cadre d’un mégaprojet, et cela comprend souvent des audiences publiques.
Merci.
J’ai une question pour M. Binder. Vous avez dit que l’industrie peut facilement accepter un oui ou un non catégorique, mais que ce qui est déraisonnable, c’est de se faire dire peut-être. Vous citez ensuite comme exemple les 15 années qui se sont écoulées depuis qu'Ontario Power Generation a entamé des discussions sur le stockage dans des couches géologiques profondes. Je suppose que vous vous plaignez du fait qu’il a fallu au moins 15 ans pour faire approuver ce projet. Est-ce exact?
Pouvez-vous me dire ce qui, dans ce projet de loi, le projet de loi C-69, accélérerait ce processus?
Comme je crois l’avoir souligné dans mes remarques, une véritable clarté sur les échéanciers à chaque étape... Le projet de loi peut améliorer les choses si la planification précoce d’un projet peut se faire très vite et aboutir à un non rapidement, si tel est le cas, afin que l’industrie puisse aller de l’avant. Si c’est un non, il faut nous le dire rapidement. Si la réponse est oui, il faut permettre alors aux intervenants de procéder à l’évaluation environnementale dans un délai raisonnable, puis il faut renvoyer la conclusion de l’évaluation environnementale à l’organisme de réglementation pour qu’il la mette en oeuvre. Pour moi, ce serait l’idéal. Si l'accent est mis sur des délais précis, avec le minimum d'obstacles, etc., alors je pense que des améliorations sont possibles.
Comme vous le savez, le projet de loi C-69 accorde au ministre un pouvoir discrétionnaire considérable de suspension et de prolongation. En fait, le projet de loi offre de multiples possibilités au ministre pour retarder une demande particulière. Pensez-vous que cela aide à faire avancer ces projets rapidement?
Je ne peux pas me prononcer là-dessus. Tout ce que je peux dire, c’est que dans le projet de loi, il y a des limites de temps, et que si elles sont respectées, tout semble bien aller. Je ne peux pas dire si le ministre trouvera alors un moyen d'y mettre un terme. Cela est intégré au processus.
Cela fait certainement partie du processus, ce qui m’amène à ma dernière question. Vous avez laissé entendre qu’au bout du compte, la décision d’approuver ou non un projet ne devrait pas être politique. Il devrait s'agir d'une décision fondée sur des données scientifiques, prise par l’organisme de réglementation. Ai-je bien compris?
Non. Ce que j’ai dit, c’est que nous avons beaucoup d’expérience dans les commissions d’examen conjoint. En fait, en tant que commission de contrôle, nous avons participé à des projets conjoints comportant toutes sortes de modèles. Je pense que ce que les gens oublient, c’est que l’évaluation environnementale est un outil de planification, et que nous aimerions que le plan proposé soit approuvé rapidement. Une fois que c’est fait, c'est à l’organisme de réglementation qu’il revient d'en assurer la gestion. Tout ce sur quoi je me concentre... nous allons nous en tenir à ce qui est déjà en place, à condition que le processus de planification soit rapide.
Au nom du Comité, je tiens à remercier nos invités d’aujourd’hui pour leurs mémoires et leurs réponses très réfléchies aux questions. Nous leur sommes également reconnaissants de leur patience.
Je vais suspendre la séance, car nous devons aller voter à la Chambre. Nous serons de retour pour le prochain groupe de témoins.
Merci.
Je vais commencer la prochaine partie de la réunion.
J’aimerais vous présenter nos invités. Nous accueillons le chef Roland Willson et Bruce Muir, planificateur environnemental principal, des West Moberly First Nations. Nous accueillons le chef Harold St-Denis, de la Première Nation de Wolf Lake. Nous accueillons aussi le chef Lance Haymond de la Kebaowek First Nation.
J’ai entendu dire que vous voudriez peut-être un peu plus que les 10 minutes que nous avons allouées. Je comprends cela et j'en tiens compte. Il faut être conscient que nous voulons permettre le plus grand nombre de questions possible, alors si vous pouviez vous en tenir aux 10 minutes, nous vous en serions très reconnaissants. Lorsque vous serez à une minute de la fin des 10 minutes, je vous montrerai une carte jaune pour vous l'indiquer. Cela signifie que votre temps est écoulé. Ne vous arrêtez toutefois pas au milieu d’une phrase, mais concluez rapidement.
Chef Willson, voulez-vous commencer?
Merci de nous avoir invités à comparaître.
Je suis le chef Roland Willson des West Moberly First Nations. Je vis dans le nord-est de la Colombie-Britannique. J'appartiens à la nation Dunne-Za. Nous sommes le peuple Dunne du nord-est de la Colombie-Britannique, et nous nous trouvons au coeur d'une région de projets pétroliers et gaziers, d’exploitation forestière, d’exploitation du charbon, de parcs éoliens, de grands projets hydroélectriques, du barrage du site C. J’espère que tout le monde ici sait de quoi il s’agit. Notre exposé a été préparé très rapidement pour parler des changements prévus dans le projet de loi C-69.
Je vous remercie de nous avoir invités et de tenir compte de ce que nous avons à dire. Une partie de mon exposé porte sur les considérations qui nous ont menés à la situation où nous nous trouvons sur notre territoire. Je sais que je n'ai que 10 minutes, alors je vais faire vite.
Le titre de notre présentation est « Ni « assujettis » ni « inférieurs au droit de la Couronne » à la durabilité » et a été inspiré par l’affaire judiciaire qui nous a opposés à la Colombie-Britannique et à une société minière du nord-est de la Colombie-Britannique. La province avait proposé la construction d'une mine dans la zone de l’habitat d'hivernage du caribou, la harde de caribous Burnt Pine qui, en raison de cette activité, est maintenant disparue. Les caribous de North Peace sont maintenant considérés comme étant en voie de disparition — ils sont visés par la Loi sur les espèces en péril — et ce genre d'activités est strictement interdit. Le tribunal de la Colombie-Britannique a statué que la responsabilité de la Couronne en matière de développement ne l’emportait pas sur le droit des Premières Nations à cet égard, mais était à égalité. Cela est censé être pris en compte au moment de délivrer des permis, notamment.
La troisième page porte sur le territoire cédé en vertu d'un traité. Le Traité 8 est le plus important et le plus complet des traités historiques. Il englobe la Colombie-Britannique, l’Alberta, la Saskatchewan et une partie des Territoires du Nord-Ouest. La nation Dunne-Za vit sur le territoire du nord-est de la Colombie-Britannique depuis plus de 13 000 ans. Nous avons chassé le mammouth; nous sommes là depuis longtemps et nous prévoyons y rester encore longtemps. Le peuple Dunne-Za est un peuple de rêveurs — cela fait partie de notre culture — et les profits sont surtout basés sur la terre; de petits groupes familiaux se déplacent à travers le territoire. En 1914, les West Moberly First Nations ont adhéré au Traité 8 au sein de la bande de Hudson’s Hope. Nous sommes devenus la West Moberly First Nation en 1974. Lorsque nous nous sommes séparés de la bande de Hudson’s Hope, nous avons créé la Halfway River First Nation et la West Moberly First Nation, en partant du principe que nous étions établis à deux endroits distincts et qu’il était plus facile pour nous de maintenir notre identité de cette façon.
Le Traité 8 comportait un certain nombre de promesses. Parmi ces promesses, il y avait des promesses verbales, dont l'une était la non-concurrence des Blancs. On en a beaucoup parlé. L’autre élément important était l’absence d’ingérence forcée, qui a été utilisée dans le rapport du commissaire en 1899 dans l’affaire des Cris Mikisew, car les promesses verbales font partie du contexte du traité.
La page 5 présente les résultats des évaluations environnementales. Nous nous sommes penchés sur les changements recommandés dans le document d’évaluation environnementale par rapport à ce qui est maintenant considéré comme le projet de loi C-69. Il s'agit pour ainsi dire du même document, qui est seulement libellé différemment. Je vous ai remercié de tenir compte de ce que nous avions à dire et je vais maintenant vous expliquer les éléments qui nous ont amenés où nous en sommes.
La page 6 est intitulée « De l'air irrespirable ». Partout sur notre territoire, nous retrouvons ici et là des affiches au sujet de canalisations de gaz acides et d'activités pétrolières et gazières.
La page 7 est intitulée « Du poisson qui n'est pas comestible ». La photo à gauche est celle de mon fils. C’est le premier poisson qu’il a pris, mais il vient du réservoir Williston, qui est contaminé par du méthylmercure. Tous les poissons du réservoir comportent des concentrations élevées de méthylmercure, et il serait très malsain de manger un poisson de cette taille. Habituellement, nous aurions relâché ce poisson, mais il avait mordu tellement fort que l'hameçon lui a abîmé la bouche et que nous n'avons pas pu le faire.
Vous ne pouvez pas voir l'image de droite à moins d’avoir la copie numérique. Il y a une carte où sont tracées des lignes rouges. Elles représentent l’étendue du système de filtration du mercure dans le réservoir Williston. Du côté droit, vous avez la zone bleu pâle où se trouve le barrage W.A.C. Bennett. En 1968, on a autorisé le barrage et, en 1969, on a élargi la zone pour créer le réservoir Williston, dont on dit qu'il est le plus grand lac artificiel de l’Ouest canadien. Je pense que c’est le troisième en importance en Amérique du Nord. Tout le système est rempli de méthylmercure. Tous les poissons qui s’y trouvent sont contaminés et nous ne pouvons pas les manger.
La page 8 est intitulée « Des terres où nous ne pouvons ni chasser ni tendre de pièges ». Il y a des affiches partout dans la région qui limitent nos activités dans ces secteurs. Les résidants n'ont pas le droit de chasser et d'utiliser une arme à feu. Il y a des camps partout dans la forêt.
La page 9 est intitulée « Des animaux que nous ne pouvons pas manger ». À gauche, vous avez la photo d'un caribou femelle, une espèce en péril. Elle mangeait du sol contaminé dans un site loué qui n’avait pas été nettoyé. Elle est morte. L’image à droite est celle d’un bison qui fait partie des espèces en péril. Il a pénétré dans un puits non clôturé et s’est coincé la tête sous les tuyaux. Il a dû être endormi pour qu'on puisse le sortir de là. Cet animal fait partie des espèces en péril, et nous n’avons pas le droit de le chasser.
La page 10 s’intitule « De l’eau que nous ne pouvons pas boire ». Dans les zones où les rivières et les cours d’eau ne sont pas contaminés par le méthylmercure du réservoir Williston, on retrouve des mines de charbon, où il y a de fortes concentrations de sélénium. Il y a des affiches partout sur le territoire qui indiquent qu’il faut faire attention de ne pas boire l’eau ou de ne pas manger le poisson en raison des niveaux élevés de mercure.
La page 11 est intitulée « Des forêts où nous ne pouvons pas camper ». Partout sur le territoire, des panneaux nous interdisent de camper. À droite, vous avez une photo d'une cabane en équilibre sur la berge. C’est le réservoir Williston, dont l'élargissement a provoqué des coulées de boue. Lorsqu’ils avaient pensé au réservoir Williston la première fois, ils s'étaient dit que cela finirait par cesser. Cela n’a pas cessé. Cela fait 40 ans et ça continue. De nouveaux débris se retrouvent dans l’eau chaque année. Depuis que la photo a été prise, cette cabane est tombée dans le réservoir.
À la page 12, je m’excuse, mais c’est notre réalité. Il s'agit d'un caribou mort, le dernier caribou mâle de la harde de caribous Burnt Pine. Lorsque la province a délivré le permis d’exploitation à la société minière pour qu’elle aille là-bas... un permis illégal... En fait, on ne leur a pas donné de permis. On leur a dit d’aller de l’avant et de commencer et qu’ils finiraient par obtenir leur permis, mais cela n'est jamais arrivé. Ils sont venus et ont construit ce grand puits, et quand nous sommes intervenus devant les tribunaux, ils ont abandonné le puits. Ils ont laissé le gouffre là. Il restait deux caribous là-bas, et le mâle s'est approché trop près du bord de la fosse. Il est tombé et il est mort. Nous l’avons découvert au printemps au fond du puits. Sa chute a été tellement brutale que l'un de ses bois s'est brisé.
La harde de caribous de Burnt Pine a maintenant disparu. Lorsque nous nous sommes adressés aux tribunaux pour tenter de protéger la harde de caribous de Burnt Pine, il restait 425 individus dans la région sud de la rivière de la Paix, selon l'analyse provinciale des caribous de la région. Il reste maintenant 219 individus, et ce, après le procès et toutes les autres démarches que nous avons entreprises pour tenter de protéger l'espèce. Les Premières Nations de West Moberly et la Nation Sto:lo, nos voisins, se sont regroupées. Nous avons mis en place un programme et un enclos de mise bas. Là, l'une des hardes de caribous — la plus proche des collectivités — est passée de 19 à 70 individus. Nous menons nous-mêmes un programme de rétablissement de l'espèce, parce que nous ne pouvions pas attendre que les gouvernements fédéral et provincial s'unissent pour faire cela.
Voilà maintenant que le gouvernement s'en mêle. Je ne sais pas si quelqu'un a entendu parler de la harde de South Selkirk, à l'extrémité sud de la province. On croit maintenant qu'elle a disparu, en pratique. Il n'en reste que trois individus et ce sont toutes des femelles. Tout cela s'est passé depuis qu'il y a une planification. Voilà où nous en sommes.
Au début de mon intervention, j'ai parlé des promesses verbales et de l'absence d'ingérence forcée en toute chose. Nous ne pouvons pas chasser le caribou parce qu'il n'y en a pas assez. Dans le cadre de leur programme de rétablissement de l'espèce, les gouvernements fédéral et provincial rétablissent les hardes à des niveaux suffisants pour assurer la durabilité, mais non pas pour soutenir la chasse. Ils veulent mettre un terme à la destruction du caribou, mais ils n'imposent pas de limites au développement et ils n'ont pas de programme de rétablissement du territoire qui permettrait de restaurer les zones d'habitat. Ces gens-là se promènent en hélicoptère, tirent sur tous les loups et protègent l'habitat en haute altitude, mais ils ne comprennent pas qu'au printemps, les caribous descendent dans la vallée, où ils sont en train d'être détruits.
Autrefois, il y avait des mers de caribous. Le caribou était vu comme cet animal que nous pourrions toujours aller chercher dans les montagnes. C'était un aliment pratique. Quand nous n'arrivions pas à trouver l'orignal ou le wapiti convoité, nous pouvions toujours aller dans les montagnes et trouver un caribou. C'est comme le poisson. Quand vous aviez faim et que vous ne trouviez rien d'autre, vous pouviez toujours aller à la rivière ou au lac et pêcher un poisson. À l'heure actuelle...
Désolée de vous interrompre. Votre témoignage est très éloquent et nous voulons l'entendre. Seulement, je suis soucieuse du temps qu'il nous reste, car nous devrons revenir aux votes.
À la page 13, vous voyez la seule étude, à ma connaissance, qui ait porté sur les effets cumulatifs. L'image du côté gauche a été réalisée par le professeur Faisal Moola de la Fondation David Suzuki et de Global Forest Watch. Voici le développement qui a lieu actuellement sur le territoire, du fait de la Colombie-Britannique et du gouvernement fédéral. Voici les cinq bassins hydrographiques de ma collectivité. L'image de gauche représente l'empreinte réelle et l'image de droite représente l'empreinte comprenant la zone tampon de 500 mètres que le gouvernement fédéral utilise dans la région. Quand je parle d'absence d'ingérence forcée, voilà ce qui se passe sur notre territoire.
Passons à la page 14. Au vu des documents, des changements recommandés, des modifications proposées à l'évaluation environnementale, nous constatons qu'il n'y a rien sur les Premières Nations. Voilà le problème qui existe actuellement avec l'évaluation environnementale du gouvernement fédéral et de la Colombie-Britannique. Lorsque nous examinons ce qui est recommandé à présent, nous voyons que les Premières Nations ne sont pas prises en considération.
Nos oreilles et nos yeux nous disent qu'ils en tiendront compte, mais nous savons bien ce que donne cette « considération ». « Prendre cela en considération », qu'est-ce que cela veut dire? L'évaluation environnementale vise-t-elle à empiéter de façon injustifiée sur le traité? J'aimerais bien que vous me répondiez. Est-ce là l'intention?
Nous ne sommes pas inclus. Les Premières Nations ne font pas du tout partie de cela. Nous devrions être présents d'entrée de jeu. Le traité est un document constitutionnel. Il fait partie de la Constitution du Canada. Pourtant, nous arrivons à la toute fin du processus, alors que des permis ont déjà été délivrés et que des études ont déjà été réalisées. Voilà où nous en sommes dans le site C.
Il m'en coûte de vous interrompre, mais nous avons dépassé le temps alloué par presque cinq minutes.
Je n'utilise pas le maillet. Je ne veux pas vraiment vous interrompre, mais je vous ai accordé presque le double du temps alloué en vous donnant encore une fois cinq minutes supplémentaires. Je tiens à laisser du temps aux autres chefs.
Vous avez bien exprimé votre point de vue. Nous avons l'exposé et vous avez formulé des remarques. Que diriez-vous si nous examinions les détails pendant le tour de questions?
Tout à fait. Je comprends.
Je suis navrée de vous interrompre. Nous respectons votre présence ici et nous désirons vous entendre.
Qui veut prendre la parole maintenant?
Merci, madame la présidente.
J'ai demandé à parler un peu plus longtemps que 10 minutes parce que nous savons que les membres du Comité n'ont pas vu notre mémoire. Nous avons présenté un mémoire écrit avant la date limite, mais je suppose qu'il n'a pas encore été traduit.
Personne n'a de copie du document que je vais lire. Nous allons donc prendre notre temps pour essayer de bien communiquer nos arguments.
Tout d'abord, je tiens à vous remercier, madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du Comité, de m'avoir invité à prendre la parole devant le Comité permanent au sujet des amendements au projet de loi C-69.
Je m'appelle Harry St-Denis et je suis le chef de la Première Nation de Wolf Lake. Je suis accompagné aujourd'hui par le chef Lance Haymond, de la Première Nation Kebaowek. Nous représentons aujourd'hui deux Premières Nations algonquines au Québec.
Comme je l'ai mentionné, nous vous avons remis un mémoire avant la date limite. Il contient un certain nombre de recommandations et d'amendements que nous vous soumettons. Je crois comprendre que vous n'avez pas eu le temps de lire notre mémoire en raison des délais serrés dans cette course que représente le processus législatif. Je vais donc mettre les choses en contexte.
La nation algonquine est composée de 11 communautés distinctes reconnues comme étant des bandes en vertu de la Loi sur les Indiens. Neuf de ces bandes sont situées au Québec et deux en Ontario. La nation algonquine n'a jamais renoncé au titre ancestral de notre territoire traditionnel, qui comprend toutes les terres et les eaux du bassin hydrographique de la rivière des Outaouais, tant à la frontière de l'Ontario qu'à celle du Québec. Le titre ancestral est détenu au palier communautaire au sein de la nation algonquine. Nos deux Premières Nations, ainsi que la Première Nation de Timiskaming, revendiquent des droits ancestraux non éteints, y compris un titre en vertu de l'article 65 de la Constitution canadienne.
Nos terres et nos eaux font partie intégrante de l'Aki anishinaabe, un vaste territoire entouré par les Grands Lacs en Amérique du Nord. Depuis des siècles, nous comptons sur nos terres et nos cours d'eau pour pouvoir exercer nos droits inhérents en vertu de notre propre système de droit coutumier et de gouvernement appelé Ona'ken'age'win. Cette loi est fondée sur notre mobilité sur le territoire, sur la liberté de chasse, de cueillette et de maîtrise de l'utilisation durable de nos terres et de nos cours d'eau pour les générations futures.
Quand les Européens nous ont découverts, nous étions déjà une société bien établie contrôlant le bassin hydrographique de la rivière des Outaouais. Nous avions un vaste réseau commercial soutenu par notre propre économie, qui comprenait la perception de droits de péage à l'île Morrison sur les flottilles de canots qui descendaient la rivière des Outaouais. Nous étions non seulement la porte d'entrée du continent, mais aussi le fournisseur de technologie de la seule embarcation capable de naviguer sur les rivières en aval. Il n'existe aucune autre région du monde où les cours d'eau et le canot ont eu une influence aussi majeure, en l'occurrence une influence sur la culture algonquine et sur le développement de son histoire après la rencontre avec les Européens.
Ce qui faisait jadis l'objet de savoir et de partage sur nos territoires en vertu de traités de paix et d'amitié avec les Européens fait maintenant l'objet d'abus. Nos ancêtres n'avaient jamais envisagé une industrialisation de nos territoires. Aussi, les lois gouvernementales ne nous ont jamais suffisamment protégés contre le développement industriel. Nous nous considérons toujours comme les gardiens de nos terres et de nos cours d'eau, après sept générations de responsabilité en matière de subsistance, de sécurité, d'identité culturelle, de territorialité et de biodiversité. Ce sentiment a été exprimé par beaucoup d'autres représentants des Premières Nations devant le Comité.
Ces responsabilités découlent d'une histoire de savoir traditionnel et de gouvernance sur le territoire auxquels nous devons notre identité anishinaabe, qui se distingue de la forme que les gouvernements ont donnée à notre nation au moyen de mesures législatives comme la Loi sur les Indiens.
Alors que vous recueillez de l'information pour le projet de loi C-69 afin de veiller à ce que la Loi sur l'évaluation environnementale soit modifiée de manière à ce qu'il y ait davantage de consultation, d'engagement et de participation dans notre effort pour la protection de nos terres et de nos cours d'eau, nous souhaitons émettre, au nombre de nos recommandations principales, la recommandation suivante: votre comité devrait aller au-delà de la loi elle-même et tenir compte d'autres mesures législatives et d'autres politiques qui affaiblissent encore plus la capacité des peuples autochtones à participer au processus d'examen de l'exploitation des ressources, y compris, entre autres, la politique fédérale relative aux revendications globales.
Je crains que diverses mesures législatives, y compris la proposition actuelle de combiner des mesures législatives antérieures à la loi sur l'évaluation d'impact, ne constituent une attaque contre la souveraineté des Autochtones et la protection de nos terres, de notre air et de nos eaux. Cet effet cumulatif des politiques pourrait conduire à la suppression intentionnelle des protections environnementales dans tout le pays, au fur et à mesure que l'exploitation des ressources a lieu et que le colonialisme achève son oeuvre.
Par conséquent, nos nations sont ici aujourd'hui pour rechercher une approche législative différente, mais conjointe, avec votre gouvernement, une approche qui puisse fournir une base solide pour la réconciliation, la reconnaissance et la protection de nos droits et de nos intérêts inhérents et constitutionnels, conformément aux articles de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones que votre gouvernement adopte désormais.
Dans notre exposé d'aujourd'hui, le chef Haymond et moi-même avons l'intention de vous offrir une brève présentation de nos communautés et de nos expériences en matière de lois environnementales sur notre territoire, tout en vous exposant brièvement ce qui, selon nous, pose encore problème dans le projet de loi C-69. Plus précisément, nous demandons au Comité de procéder à des amendements pour intégrer les éléments suivants au projet de loi C-69: la réconciliation; l'établissement d'institutions autochtones et d'une relation de nation à nation; l'amélioration des lois environnementales provinciales qui posent problème et auxquelles on se fie trop souvent; le renforcement de la protection de nos voies navigables traditionnelles et la mise en oeuvre du savoir autochtone et de l'évaluation d'impact.
Le chef Haymond abordera maintenant trois points, après quoi je conclurai notre exposé.
Merci beaucoup, chef St-Denis, de votre présentation.
Bonsoir, madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du Comité. Je suis ravi d'avoir l'occasion de discuter de cette question importante.
En tant que chef de Kebaowek, je représente environ 1 000 membres algonquins. Bien que nos terres de réserve se trouvent au Québec, notre territoire traditionnel chevauche le bassin de la rivière des Outaouais, où les membres de notre communauté vivent, travaillent et exercent des droits ancestraux, possédant des titres en Ontario comme au Québec. Notre territoire de compétence est transfrontalier.
Avant de commencer, j'aimerais, aux fins du compte rendu, mentionner un problème qui me préoccupe au sujet de la procédure de cette audience. Les délais serrés, les courts préavis, le financement insuffisant et l'échéancier très contraignant imposé aux communautés autochtones comme la mienne ont fait en sorte qu'il a été très difficile de témoigner devant le Comité.
Je signale que les Premières Nations de Kebaowek et de Wolf Lake ont formulé des remarques portant sur toutes les demandes de réforme des lois sur l'environnement et sur la réglementation environnementale présentées par votre gouvernement, en plus de participer à deux réunions de groupes d'experts. Nous avons également participé pleinement à l'examen technique du projet de loi C-69 par l'Assemblée des Premières Nations, ou l'APN. Nous appuyons sans réserve le mémoire de 25 pages de l'APN et ses recommandations d'amendements article par article.
En dépit de nos efforts combinés, nos messages les plus importants semblent absents du projet de loi C-69; on a préféré apporter des ajustements à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, la LCEE, de 2012 plutôt que de la moderniser. À notre avis, une véritable modernisation de la loi suppose une réparation des torts qui ont été causés aux peuples autochtones du Canada par les lois et les politiques antérieures.
Puis-je vous interrompre un instant? Nous allons arrêter le chronomètre.
Je dois obtenir l'accord du Comité pour continuer comme avant. Cinq minutes avant les votes, nous retournerons à la Chambre.
Merci. Désolée de l'interruption.
Dans le cadre d'une véritable modernisation de la loi, nous vous demandons de revoir les sources originales de la loi et de reconnaître que l'évolution de la loi au cours des dernières décennies a joué contre nous. Il est impératif de renforcer le libellé des amendements concernant la protection des droits écologiques et des droits des Premières Nations. Sinon, nous affirmons au Comité que ce projet de loi n'est qu'une tentative infructueuse de mener des consultations sérieuses auprès des communautés des Premières Nations et de moderniser les lois, comme le présent gouvernement en avait l'intention.
Je termine mes remarques préliminaires en exprimant le respect que j'ai pour le Comité. Votre travail est urgent et crucial pour toutes les Premières Nations du Canada. En fait, l'APN tiendra une assemblée spéciale la semaine prochaine à Gatineau à ce sujet. Dans tout le travail que vous accomplissez pour en arriver aux derniers amendements au projet de loi C-69, je vous demande d'être résolus dans votre volonté de faire en sorte que cette mesure législative concrétise les points de vue des Premières Nations, conformément aux appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation et à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones ou la DNUDPA. La loi modernisée ne doit pas dénigrer ou banaliser davantage notre revendication du territoire, notre savoir environnemental, nos droits constitutionnels et la mise en oeuvre de la DNUDPA.
De toute évidence, il existe un lien étroit entre la réconciliation, l'évaluation environnementale et la protection de nos droits sur nos territoires, un lien qui devient de plus en plus clair pour nous de jour en jour. Nous voyons nos jeunes s'intéresser aux sciences de l'environnement; aussi, les connaissances socioécologiques algonquines sont en croissance. Nous croyons nécessaire de créer un institut algonquin d'évaluation environnementale sur notre territoire. Toutefois, les conditions de la réconciliation doivent être couchées par écrit dans ce projet de loi et dans les politiques.
Le problème, c'est que le gouvernement définit les relations de réconciliation en se fondant sur l'a priori de l'extinction des droits et des titres dans un cadre législatif fédéral destiné à faire passer les bandes actuellement régies par la Loi sur les Indiens vers des accords d'autonomie gouvernementale, des accords de revendications globales ou des traités modernes, que le gouvernement considère comme de l'autodétermination. Les droits et les titres des Premières Nations ne peuvent être compromis par l'interprétation coloniale de la réconciliation.
La réconciliation devrait être un objectif énoncé dans la loi et elle devrait renforcer l'engagement du Canada à mettre en oeuvre la DNUDPA, ce qui comprend notre droit à nos propres interprétations de l'autodétermination sur nos territoires.
De plus, la loi doit être compatible avec la protection des droits et des titres autochtones reconnus et confirmés par l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.
En ce qui concerne notre deuxième point — soit la mise en oeuvre des institutions algonquines et des relations de nation à nation —, nous estimons que les valeurs, les intérêts et les besoins de nos nations risquent d'être marginalisés au sein d'un office régional d'évaluation environnementale où nos droits et nos intérêts constitutionnels seront dilués ou ignorés par les acteurs les plus dominants. Nos dispositions constitutionnelles sont uniques et devraient être traitées comme telles.
Dans notre présentation à la réunion du groupe d'experts, nous avons présenté le concept d'une institution algonquine qui servirait à stimuler la participation algonquine aux évaluations environnementales canadiennes afin que les questions qui préoccupent les Algonquins reçoivent davantage d'attention. Voilà qui est souhaitable non seulement pour combattre les préjugés des promoteurs et des organismes gouvernementaux en matière de développement qui se sont fait jour dans le contexte de la LCEE de 2012, mais aussi pour explorer le rôle important que les institutions autochtones peuvent jouer dans l'économie de l'évaluation des impacts environnementaux et de la planification des services écosystémiques, ce qui comprend l'évolution des marchés pour la surveillance des projets et d'autres services environnementaux.
Nous demandons à ce que le projet de loi C-69 soit modifié de façon à autoriser les institutions autochtones relevant des nations à exercer des pouvoirs ou des fonctions ayant trait à l'évaluation d'impacts en vertu de cette loi, sans exclure les bandes régies par la Loi sur les Indiens qui ont un pouvoir de compétence sur les territoires en vertu des titres non abandonnés.
En ce qui concerne les mesures législatives provinciales en matière d'environnement, je souhaiterais que, plutôt que l'on se fonde là-dessus pour effectuer les évaluations et la cueillette d'information, le Comité porte une attention particulière à la récente réforme de la Loi sur la qualité de l'environnement, ou la LQE du gouvernement du Québec par le biais de l'adoption du projet de loi 102 le 23 mars 2017. Le fait que les Premières Nations du Québec n'aient pas été consultées dans le cadre d'un projet de loi susceptible d'avoir une incidence aussi importante sur nos titres ancestraux et nos droits autochtones devrait vous inquiéter. Qui plus est, la nouvelle version consolidée de la LQE ne fait aucunement référence aux droits des Premières Nations du Québec.
Nous trouvons scandaleux le fait que, 35 ans après la reconnaissance de nos droits dans la Constitution du Canada et après des années de jurisprudence, on ne parle pas de nos droits et de la nécessité de nous consulter et de tenir compte de nos besoins, ni même, dans certains cas, d'obtenir notre consentement libre, informé et préalable, même si nous sommes souvent les premières communautés touchées par les dommages causés à l'environnement.
Nous avons des droits autochtones qui s'appliquent au Québec et qui doivent se refléter dans la loi et dans les directives, afin que nous puissions participer de façon significative aux processus d'évaluation et d'examen des impacts environnementaux au Québec.
En terminant, je préconise l'adoption d'une loi prévoyant une protection claire et obligatoire et l'amélioration des droits prévus à l'article 35 dans les processus d'examen fédéraux comme dans les processus délégués à d'autres pouvoirs.
Le chef St-Denis va maintenant aborder quelques points en conclusion.
Merci.
Puis-je vous interrompre brièvement?
Chef, avant que vous ne commenciez, je précise que j'ai accordé quatre minutes supplémentaires.
Le Comité souhaite-t-il poursuivre l'audition du témoin? Je ne suis pas sans savoir que nous empiétons sur le temps dont nous disposons pour les questions.
Est-ce la volonté du Comité?
D'accord.
Est-ce la volonté du Comité?
Des voix: D'accord.
La présidente: D'accord.
Vous avez la parole.
J'aimerais parler du renforcement de la protection de nos voies navigables traditionnelles dans le cadre du projet de loi C-69. La Première Nation de Wolf Lake est une communauté hors réserve qui, comme de nombreuses communautés des Premières Nations, accorde une grande importance à la protection de ses cours d'eau.
Les modifications apportées en 2012 à la Loi sur la protection de la navigation ont touché les Premières Nations d'un océan à l'autre. Comme je l'ai mentionné plus tôt, l'utilisation libre et sans entrave des cours d'eau sur nos territoires est essentielle à notre culture et à notre capacité d'exercer un éventail de droits en vertu de l'article 35. Elle sert aussi à d'autres fins économiques importantes comme la gestion de nos entreprises touristiques.
Récemment, lors des audiences de votre comité parlementaire permanent, Mme Kelly Block a demandé au ministre des Transports M. Garneau de fournir un exemple d'un événement ayant eu lieu après 2013 où la Loi sur la protection de la navigation aurait eu des conséquences fâcheuses sur la navigation. Elle a dit que, pendant les audiences d'examen réglementaire en 2016-2017, aucun témoin n'avait été en mesure d'énoncer une remarque à ce sujet.
À notre avis, Mme Block a ainsi mis en relief les manquements en matière de consultation et d'établissement de délais adéquats pour le processus législatif. La Première Nation de Kebaowek et la Première Nation de Wolf Lake n'étaient pas au courant de la possibilité de participer aux audiences. Cela dit, nous avons décrit, dans nos observations écrites au sujet des réformes de la LCEE de 2012 et de la Loi sur la protection de la navigation, comment la navigation a été entravée non pas à un seul endroit, mais bien à deux endroits sur notre territoire depuis 2013.
Ces incidents n'ont pas eu lieu sur des voies navigables non protégées, mais bien, ce qui est encore pire, sur une voie navigable inscrite à l'annexe des cours d'eau en vertu de la Loi sur la protection de la navigation, soit la rivière des Outaouais, la principale route de navigation de notre nation.
Les exemples qui suivent démontrent que cette nouvelle idée d'inscrire en annexe des cours d'eau ne protège en rien la navigation en vertu de cette loi.
Notre premier exemple est celui d'une clôture à mailles losangées de trois mètres de hauteur installée par Ontario Power Generation — OPG — sur le portage historique de La Cave au moment où la société d'État effectuait des travaux d'entretien mineurs à la centrale Otto Holden. OPG s'est permis d'installer une clôture verrouillée en permanence sur notre portage historique, sans consultation ni avis. Ensuite, la société d'État a refusé d'accorder un accès continu aux membres de notre communauté ou à nos clients du secteur des canots sans présentation d'une preuve d'assurance pour dommages aux tiers. La barrière demeure en place et le problème n'est pas réglé.
Le deuxième incident s'est produit dans le cadre du projet de remplacement mené par les Travaux publics au complexe de barrages Témiscamingue sur le cours supérieur de la rivière des Outaouais, à l'île Long Sault où la Première Nation de Wolf Lake exploite une filiale de notre entreprise de pourvoirie de la Algonquin Canoe Company. En 2013, sans que le gouvernement fédéral ait agi de manière appropriée en ce qui a trait aux dispositions de désignation interprovinciale des projets d'envergure dans la loi, et alors que le ministre de l'Environnement de l'époque a refusé notre demande de désignation du projet, la Direction générale des biens immobiliers de Travaux publics a refusé de s'engager dans un cadre de consultation et d'accommodement qui aurait guidé la prise de décisions au sujet de ce projet. Par la suite, pendant plus d'un an, les Algonquins et les non-Algonquins n'ont pas pu accéder au cours inférieur de la rivière par portage.
De plus, l'évaluation des effets environnementaux menée par Travaux publics en vertu de la LCEE de 2012 a complètement écarté du processus nos communautés autochtones ainsi que les espèces menacées d'esturgeon jaune, car Transports Canada, l'Office national de l'énergie et le ministère des Pêches et des Océans ont délivré des autorisations sans nous consulter. Encore une fois, ces travaux ont eu des conséquences sur le bassin hydrographique et sur nos droits.
Le grand bassin versant de la rivière Kitchissippi constitue une ancienne route pour le commerce et le voyage qui traverse le territoire de la nation algonquine, dont font aussi partie les rives, les îles et les portages le long de cette voie. Nous demandons au gouvernement pourquoi la navigation a été entravée par la Loi sur la protection de la navigation sur une voie navigable inscrite à l'annexe. Est-ce que la planification des cours d'eau nous fournit vraiment la garantie que la navigation sera protégée?
De plus, nous ne sommes pas convaincus que le groupe de travail des ministres veillera à ce que la Couronne respecte ses obligations constitutionnelles à l'égard des droits ancestraux et des droits issus des traités dans le cadre de cette nouvelle loi et de la réglementation en cours, ce qui fournirait des protections novatrices, efficaces, applicables et précises pour les Autochtones et pour l'environnement de la rivière des Outaouais.
Par exemple, la chute Akikodjiwan est un lieu sacré essentiel pour nos peuples. Ici, à Ottawa, on l'appelle aussi la chute des Chaudières. La chute Akikodjiwan était et demeure un lieu de prière, d'offrandes, de rituels et de paix. Ces activités sont importantes pour nous qui avons la garde de nos cours d'eau et de nos communautés à l'heure où nous redéfinissons les interrelations qui unissent notre peuple et la rivière dans une perspective de réconciliation.
Nous avons examiné de près les menaces qui pèsent sur la chute Akikodjiwan et le bassin hydrographique de la rivière des Outaouais et nous avons formulé des recommandations à la Commission de la capitale nationale et à la ministre du Patrimoine canadien, Mélanie Joly, pour que la reconnaissance et la préservation d'Akikodjiwan comme point de guérison clé pour les peuples algonquins et toutes les cultures de la région de la capitale nationale deviennent une priorité majeure.
Par conséquent, en tant que dirigeants algonquins, nous explorons ensemble toutes les solutions possibles pour remédier aux lacunes législatives qui ont une incidence sur la protection de nos voies navigables sacrées et de notre compétence sur le territoire, notamment la quête pour que des droits juridiques distincts soient accordés aux voies navigables.
Les nations de Wolf Lake et de Kebaowek ont présenté à l'assemblée nationale de l'Assemblée des Premières Nations — l'APN — une résolution visant à accorder un statut juridique à la rivière Kitchissippi, c'est-à-dire à la rivière des Outaouais, explorant ainsi la possibilité d'utiliser le concept d'identité juridique pour protéger le bassin hydrographique. Cette résolution est annexée au mémoire; vous pourrez donc la lire plus tard.
Pour ce qui est de nos recommandations, le projet de loi C-69 demeure excessivement politisé, puisque la ministre a le dernier mot au sujet de l'annexe des cours d'eau ou de la désignation des projets et le cabinet prend les décisions finales sur les projets après un processus complet d'évaluation d'impacts. Nous pouvons dire, en nous fondant sur notre propre expérience, que cela ne nous inciterait pas vraiment à participer. Au vu du processus tel que nous le découvrons jusqu'à maintenant, la question suivante se pose: pourquoi accomplir tout ce travail si le gouvernement a déjà pris sa décision?
Le premier ministre Trudeau a expressément promis de rétablir la protection des voies navigables au Canada. Ce n'est pas forcément ce qui va se passer. Ce sera à la discrétion du ministre d'établir la liste des nouveaux cours d'eau à protéger. Nous demandons à ce que la loi garantisse par écrit l'ajout à l'annexe de tout cours d'eau dont les Premières Nations réclament l'inscription. Sans cet amendement, nous n'avons d'autre choix que de chercher à obtenir un statut juridique pour le bassin hydrographique de la rivière des Outaouais, parce que selon nous, de fait, il n'y a plus aucune protection.
Nous sommes d'accord avec le fait que la Loi sur l'évaluation d'impact vise à « prendre en considération » le savoir autochtone, ainsi que l'information scientifique et les connaissances des communautés. Cependant, en l'état, seul le savoir « traditionnel » est pris en compte en tant que facteur dans l'évaluation environnementale. La loi ne va pas assez loin pour exiger que les évaluations et les décisions soient fondées sur tout éventail des connaissances sociales, écologiques et culturelles des Autochtones.
Je dois simplement garder à l'esprit le fait que nous devrons aller voter très bientôt. Je vous ai accordé près de 12 minutes de plus que les 10 minutes prévues.
D'accord.
J'aimerais enfin dire que lorsque le très honorable premier ministre s'adresse à l'assemblée nationale, il commence toujours sa présentation par les mots suivants: « J’aimerais reconnaître la nation algonquine, puisque nous sommes rassemblés sur ses terres ancestrales. Nous les reconnaissons comme les gardiens passés, présents et futurs de ce territoire. »
Madame la présidente, il me semble que ce projet de loi serait le moyen idéal pour concrétiser les paroles du premier ministre et donner vie à la DNUDPA. À mon avis, cette mesure législative serait l'occasion rêvée pour que le gouvernement prouve une fois pour toutes qu'il prend au sérieux la réconciliation et la collaboration avec les peuples des Premières Nations.
Merci.
Merci beaucoup.
Aux fins du compte rendu, je tiens à préciser quelque chose, parce que vous avez dit dans votre témoignage que vous étiez très préoccupé par le déroulement de cette audience.
Aux fins du compte rendu, je précise que le Comité a adopté dès le départ un processus pour établir son fonctionnement en ce qui a trait au temps de parole et à l'ordre des interventions. Voilà qui s'applique à tous les travaux du Comité. Nous n'avons rien changé à notre procédure habituelle. Nous sommes restés cohérents. Cela dit, comme vous avez pu le constater, nous n'hésitons pas à accorder davantage de temps aux témoins lorsque cela est nécessaire. Il ne faut donc pas y voir un obstacle. Aussi, nous payons seulement les frais de déplacement; il en va ainsi pour tous les travaux des comités. Je vous prie de m'excuser s'il y a eu un malentendu à ce sujet.
Je vais ouvrir la discussion. Il nous reste 13 minutes avant les votes. Nous tiendrons deux tours de trois minutes, puis nous devrons partir. Je remarque que Linda n'aura pas de temps de parole. Commençons plutôt par deux minutes et voyons si nous pouvons...
Allez-y, Mike.
Merci, madame la présidente.
Meegwetch de nous avoir permis de tenir ces réunions sur le territoire non cédé du peuple algonquin. Votre présence parmi nous aujourd'hui est très importante, afin que vous puissiez nous faire part de vos réflexions et de vos inquiétudes au sujet de cet important projet de loi.
Will et moi siégeons au Comité des affaires autochtones et étudions le projet de loi C-262 sur la DNUDPA. Si je comprends bien, vous dites que le cadre des droits et de la reconnaissance, les tables de concertation et le consentement libre, informé et préalable — le CLIP — devraient être reconnus et intégrés dans ce projet de loi?
D'accord.
Dans le cas du CLIP, il y a trois définitions différentes du concept. Le premier sens le définit comme un acte de bonne foi par lequel on n'obtient pas vraiment le consentement; le deuxième, comme un processus axé sur le consensus, ce que l'on appelle le consentement collaboratif; le troisième, comme un droit de veto. J'aimerais savoir ce que vous pensez du consentement et de sa signification dans le cadre du CLIP.
Cette question est très bonne, mais elle est aussi très vaste. Pouvez-vous y répondre très rapidement?
À mon avis, tout dépend du projet ou de la proposition. Je sais que le Québec a le même problème. On s'imagine que cela est forcément synonyme de droit de veto. Je ne crois pas que ce soit là l'intention. Nous devrions avoir notre mot à dire, selon la nature du projet et de ses répercussions. Je ne dirais pas qu'il s'agit d'un droit de veto systématique sur tous les projets, mais nous devrions avoir notre mot à dire, notre opinion devrait compter de façon significative — c'est là, je crois, le sens du concept. Il ne devrait pas s'agir d'un droit de veto systématique, sinon tout le monde craindrait que l'on s'oppose à tout. De fait, en matière de développement de projets et de développement économique, les gens de nos nations doivent aussi travailler.
Il m'en coûte de faire cela, mais je me dois de vous interrompre.
Monsieur Fast, vous avez deux minutes.
Merci.
J'aimerais poser la même question à M. Willson.
Vous avez très clairement exprimé les inquiétudes qui sont les vôtres à l'égard de vos droits issus des traités. Si le gouvernement libéral adopte le CLIP, comme il semble enclin à le faire, quel sens donnez-vous à ce concept? Est-ce un droit de veto? S'agit-il d'une sorte de collaboration dans le contexte d'une discussion de nation à nation? Quel aspect cela revêt-il?
Je peux vous raconter notre expérience. Le site C en est un excellent exemple. Nous n'avons jamais été contre le développement du secteur de l'énergie. En revanche, nous nous opposions aux moyens utilisés pour créer de l'énergie, à savoir, sur le site C, l'inondation de la dernière partie restante de la vallée de la rivière de la Paix. Nous n'avons jamais eu l'occasion de tenir une discussion à ce sujet. Pour nous, le consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause, signifie que nous prenons part à la discussion avant que la décision ne soit prise. Ils ont décidé de construire le site C, puis ils sont venus nous parler ensuite. On parle alors d'un processus d'atténuation. Ils avaient déjà décidé de réaliser le projet. Nous n'avions pas d'autre choix à ce moment-là. Maintenant, nous nous retrouvons devant les tribunaux pour essayer de mettre un terme à cela. Il existe des solutions de rechange à ce projet, des solutions qui ont fait leurs preuves, mais nous n'avons jamais eu l'occasion d'en parler. Celles-ci sont maintenant considérées comme étant de meilleures solutions que l'aménagement du site C.
Je suis d'accord pour dire que le CLIP dépend du projet. Ce n'est pas un droit de veto. Cependant, le site C n'était pas un bon projet. Ce n'est pas un bon projet, loin de là. Il s'est avéré que c'est probablement la pire chose que nous puissions faire, mais nous n'avons jamais eu l'occasion d'en parler. On nous a dit: « Nous construisons le site C. Quelles sont vos préoccupations? Nous allons en tenir compte. »
Partagez-vous les inquiétudes exprimées par d'autres Premières Nations selon lesquelles une évaluation fédérale ne devrait pas seulement être exigée pour certains projets figurant sur une liste et les évaluations d'impact devraient également être lancées lorsqu'une activité proposée risque d'avoir des effets négatifs sur les oiseaux migrateurs, les rivières et les lacs, les groupes autochtones ou leurs droits reconnus et confirmés par l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 et de la DNUDPA?
Vous pouvez tous les deux apporter votre réponse, si cela est possible.
Selon mon expérience, si ce n'est pas justifié, il s'agit d'une violation du traité. C'est la loi. C'est pourquoi j'ai demandé si votre intention était d'enfreindre le traité de façon injustifiée. On est censé effectuer un test, le test Sparrow, pour déterminer si l'impact est justifiable ou non. Ce test n'a jamais été effectué.
On nous a dit que cela n'était pas nécessaire sur le site C, qui est pourtant le plus grand projet d'infrastructure jamais réalisé en Colombie-Britannique, d'une valeur de 12 milliards de dollars. Si ce projet ne justifie pas un test d'analyse Sparrow, quel projet le justifiera?
Il s'agit d'une mort à petit feu. Au moyen d'un stylo, on arrive à tout minimiser. Ils ont structuré l'affaire de manière à s'écarter du processus de justification. Nous avons dit qu'il fallait envisager des solutions de rechange et ils ont refusé. Ils savent maintenant que le site C et l'électricité qu'on en tire n'étaient pas nécessaires. Il n'y a aucune raison pouvant justifier de détruire la dernière parcelle de cette rivière. C'est pourtant ce qui a été fait.
Par conséquent, nous voilà maintenant devant les tribunaux. Deux petites Premières Nations du nord-est de la Colombie-Britannique doivent se battre contre le Canada, la Colombie-Britannique, et BC Hydro, une société d'État qui possède des milliards de dollars pour tenter de justifier un aménagement qui n'est pas nécessaire.
Vous avez fait beaucoup de chemin pour venir ici. Je vous suis reconnaissante pour la sagesse que vous avez insufflée à la discussion. Je suis désolée que nous n'ayons pas pu consacrer plus de temps aux questions. C'est en raison de ce qui se passe à la Chambre aujourd'hui et des votes qui y seront tenus. Il se trouve qu'il y aura trois votes et cela prendra beaucoup de temps, malheureusement. Nous ne pourrons donc pas revenir ici.
Nous vous remercions encore une fois. Je dois mettre fin à la séance.
La séance est levée.
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