ENVI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
Comité permanent de l'environnement et du développement durable
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le jeudi 28 septembre 2017
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Nous allons commencer.
Bienvenue à nos invités. Nous vous accueillerons officiellement dans une minute. Avant cela, je crois qu'il serait bon que nous réglions rapidement quelques questions administratives.
Je ne sais pas où est Marc. Il ne devrait pas tarder à arriver. Je souhaite la bienvenue à Geng Tan, Julie Dabrusin et Robert Kitchen et je les remercie de s'être joints à notre comité aujourd'hui.
Je tiens à vous rappeler que nous avons remis la réunion à mardi prochain, parce que la commissaire va présenter des rapports qui concernent le Comité. Je présiderai cette séance le matin. J'espère que vous pourrez tous y participer. Ses rapports traitent d'excellents sujets qui nous intéresseront beaucoup.
Je crois qu'en ce moment, il est important que nous invitions la commissaire au Comité. Nous ne l'avons pas invitée à présenter ses rapports la dernière fois, parce que nous avions surchargé notre calendrier afin de terminer notre rapport avant de suspendre pour l'été. Je veux m'assurer de pouvoir l'inviter devant le Comité.
Est-ce que quelqu'un s'oppose à ce que nous invitions la commissaire pendant cette période de rédaction de rapports? Nous serons de retour dans nos circonscriptions pendant une semaine après la semaine prochaine. Nous aurons entendu tous nos témoins. Je me suis dit que nous pourrions inviter la commissaire la semaine suivante. Nous verrons si elle est disponible pendant l'une de ces deux journées.
Est-ce que quelqu'un pense que le Comité ne devrait pas procéder de cette manière? Nous faut-il une motion, ou sommes-nous tous d'accord pour qu'elle vienne cette semaine-là? Nous nous arrangerons donc avec elle.
D'accord? Je crois que ce serait fantastique. Alors nous avons réglé cette question. Parfait.
Les heures de notre réunion de mardi ont changé. Nous avons réservé de 11 à 13 heures et de 15 h 30 à 17 h 30. Si j'ai bien compris, certains d'entre vous ne pourront pas venir entre 11 et 13 heures, mais je crois que vous pourrez tous venir entre 5 h 30 à 17 h 30.
Je vous prie de me le confirmer, pour que nous puissions annuler l'autre réservation. Il n'est pas nécessaire de le faire tout de suite; je vérifierai à la fin de la réunion si tout est arrangé, et nous choisirons l'heure que je voudrais fixer — 15 h 30 le 3 octobre, je crois.
Nous a-t-elle proposé une date?
Oh, cela va peut-être poser un problème. Je vais lui en parler, et nous verrons ce que nous pourrons faire.
Je crois que c'était le seul détail administratif qu'il fallait absolument régler avant le week-end.
Je vais maintenant présenter officiellement nos invités d'aujourd'hui. Nous avons Julian Smith, directeur, Centre for Cultural Landscape, Willowbank; Chris Wiebe, gérant, Politiques du patrimoine et Relations gouvernementales, Fiducie nationale du Canada. Du Cercle du patrimoine autochtone, nous avons aussi Karen Aird, présidente et Madeleine Redfern, directrice.
Je vous remercie tous d'être venus aujourd'hui.
Comme la présentation de Julian Smith est déjà à l'écran, je me suis dit qu'il pourrait peut-être commencer. Si cela ne vous dérange pas, allons-y.
Permettez-moi de vous rappeler que j'ai ici deux cartes. Lorsqu'il ne vous restera plus qu'une minute, je vous brandirai la carte jaune — je n'aime pas interrompre les gens. Cela vous donnera une idée du temps qu'il vous reste, parce qu'il n'y a pas d'horloge derrière nous. Quand je vous montrerai la carte rouge, vous n'aurez pas besoin de cesser immédiatement de parler, mais je vous demanderai de conclure ce que vous dites parce que votre temps de parole sera écoulé.
Merci beaucoup.
Vous avez la parole.
Merci beaucoup, madame la présidente. C'est un honneur d'être ici.
Je vais commencer par vous montrer quelques images. Je le fais parce qu'il m'est parfois difficile d'expliquer à quel point le domaine de la conservation du patrimoine a changé depuis que j'ai commencé m'y intéresser, il y a maintenant environ 50 ans.
Vous voyez ici un dessin qui date des années 1950. Nous étions en plein mouvement moderniste. C'est la culture dans laquelle j'ai grandi. Voici un immeuble moderne avec un plan d'étage moderne. On y perçoit aussi la dichotomie hiérarchique entre les cols bleus et les cols blancs, entre l'école primaire et l'école secondaire, le baccalauréat, la maîtrise et le doctorat en lettres. On y voit le système juridique où l'on ne répond aux questions que par un oui ou par un non. Il y avait toutes sortes de différentes classes hiérarchiques. On s'accrochait à la notion de la famille nucléaire vivant en banlieue. Les États-Unis interdisaient le mariage interracial, on s'inquiétait de voir se former des couples de gais et de lesbiennes, etc.
L'image suivante illustre les années 1960, où naissent des mouvements populaires; vous en voyez deux à gauche... J'ai utilisé le jaune pour le domaine de l'environnement. Les gens ont commencé à se plaindre de la disparition des terres humides et de l'utilisation du DDT. Rachel Carson défendait le patrimoine. Du côté bleu, vous voyez Jane Jacobs et son ouvrage intitulé Déclin et survie des grandes villes américaines. Nous avions là les premiers pas d'un mouvement populaire de protection du patrimoine culturel. Le patrimoine environnemental et le patrimoine culturel étaient tous deux très populaires. Ces manifestants ne se conformaient pas au système, ils s'en écartaient. Comme je vous le disais, cela venait des communautés.
Vous voyez ensuite les années 1970 et 1980. On a vu l'adoption de lois sur le patrimoine et sur l'environnement dans toutes les provinces. Ces deux domaines, le patrimoine et l'environnement se sont intégrés dans le système. Les avocats ont commencé à se spécialiser en droit environnemental et patrimonial. Les étudiants se sont lancés dans des programmes de baccalauréat, de maîtrise et de doctorat en environnement et en patrimoine culturel. Ils voulaient se joindre au système et s'intégrer dans les boîtes, les encadrés que vous voyez ici.
Ces encadrés représentent aussi le système universitaire, qui catégorise le savoir et les livres par discipline dans les bibliothèques. Il y a aussi le monde des musées, qui catégorise des objets pour les insérer dans des systèmes.
Les années 1990 sont marquées par le développement, les paysages culturels, une notion venant de l'UNESCO et de sa Liste du patrimoine mondial. Il ne savait pas quoi faire des lieux qui revêtaient une importance naturelle et culturelle. La notion de paysage culturel reposait sur la relation des gens avec leur environnement naturel, sur l'habitat humain vu d'un point de vue plus holistique. Ces sites ne s'inséraient pas très bien dans le modèle. Je crois que les communautés des Premières Nations ont commencé à participer beaucoup plus intensément à la conversation sur le patrimoine en général. Ils ont toujours eu de la peine à accepter la dichotomie nature/culture.
Cette notion de paysages culturels a vraiment fait reculer les bornes et nous a précipités dans le XXIe siècle, comme le montre l'image suivante. J'ai passé toute une journée à la préparer avec des jeunes de 20 à 30 ans à Willowbank, où j'enseigne et dont je suis le directeur général depuis 10 ans. Cette image illustre un programme offert aux jeunes qui s'intéressent à la question de l'habitat humain.
Je vais m'arrêter ici en laissant cette image à l'écran.
J'ai quelques observations à vous faire. Je vous dirai que les jeunes s'intéressent à cette approche écologique et plus holistique de l'habitat humain. Ils veulent s'écarter de la dichotomie nature/culture. Ils la trouvent trop eurocentrique et l'accusent d'avoir entravé la durabilité. Ils veulent des méthodes de planification, de développement et de conception qui respectent le savoir traditionnel et les structures existantes afin de trouver moyen d'y intégrer les couches et les niveaux contemporains sans risquer de tout effacer pour ensuite repartir à zéro.
Ils veulent passer d'un point de vue utopique du monde — toujours centré sur des monocultures — à une approche de développement plus organique centrée sur la diversité. Ils veulent réunir le travail des mains à celui de l'esprit afin de vaincre la dichotomie entre la conception et la construction, entre le col bleu et le col blanc, entre l'activité intellectuelle... et aussi entre l'apprentissage pratique et l'apprentissage universitaire. Ces gens ne se contentent pas de s'intéresser à cette approche, mais ils l'exigent, parce qu'ils considèrent qu'il est urgent de régler les problèmes de durabilité.
J'ai deux ou trois suggestions à offrir au Comité. Je vais faire référence au projet de loi C-323, que l'on retrouve dans cette diapositive. Il offre au Canada une occasion de se placer là où se trouvaient la plupart des autres nations dans les années 1990 en reconnaissant que le patrimoine bâti est fondamental.
J'ai deux observations à faire à ce sujet. D'abord, j'espère que si l'on établit des crédits d'impôt, on favorisera les propriétés qui génèrent un revenu. On s'est demandé si le propriétaire d'une splendide maison historique à Westmount, à Rockcliffe ou à Shaughnessy ou ailleurs devrait bénéficier d'un crédit d'impôt pour les travaux de restauration qu'il y fait faire. Les États-Unis affectent ce crédit d'impôt aux propriétés qui génèrent des revenus comme des immeubles commerciaux, des rues principales de petits villages, des quartiers urbains, des sites industriels abandonnés. Nous venons de terminer, pour la conférence de l'ONU Habitat III tenue à Quito, une étude sur les enjeux liés à la culture, au patrimoine et à la durabilité en Amérique du Nord. Les résultats démontrent très clairement que les vieux quartiers et leurs immeubles anciens génèrent plus de richesse. Ils créent de 30 à 40 % plus d'emplois par mètre carré. On y trouve plus de propriétaires venant de groupes minoritaires et de femmes propriétaires. On y voit aussi plus de jeunes. Ces quartiers ont des résidents d'âges très divers. Il est plus facile de s'y promener à pied et ils sont mieux desservis par les transports en commun. Il est crucial que nous cherchions à comprendre ces quartiers et que nous nous en occupions. Il faut offrir des incitatifs à ceux qui s'en chargent. L'existence des régions urbaines dépend de la durabilité des propriétés qui produisent des revenus.
Deuxièmement, je tenais à soulever le fait qu'aux États-Unis — qui offrent ces crédits depuis tant d'années —, les statistiques démontrent que ces crédits d'impôt génèrent beaucoup de recettes fiscales. Peu de programmes de crédits d'impôt produisent tant de recettes. Il en génèrent de sept à dix fois plus que les investissements privés.
D'autres enjeux sont liés à cela. Le gouvernement fédéral devrait installer ses bureaux dans des immeubles existants, à moins qu'aucun ne soit disponible. Les programmes destinés au logement des aînés et des personnes à faible revenu devraient favoriser des immeubles existants, à moins qu'aucun ne soit disponible. Les États-Unis suivent cette politique depuis 40 ans.
Tout au début de ma carrière, j'ai travaillé au Massachusetts. Les programmes de logement abordable cherchaient avant tout d'anciennes écoles et des bâtiments industriels abandonnés, qui se trouvaient pour la plupart au centre-ville et qui bénéficiaient d'un bon service de transport en commun. Quand je suis arrivé en Ontario, la valeur des terrains était cruciale. Le promoteur de notre premier projet a tout fait transférer à la dernière minute dans le champ d'un agriculteur, parce que le terrain coûtait moins cher, ce qui nous permettait de ne pas dépasser notre budget. Ces logements ont fini par abriter des personnes à bas revenu qui n'avaient aucun moyen de se déplacer.
Pour ces programmes, il faudra adapter le Code national du bâtiment aux immeubles existants. Le gouvernement mène de nombreuses initiatives. Le processus d'évaluation environnementale pourrait relier les aspects culturels et naturels, et l'on pourrait le renommer évaluation de la durabilité. Malheureusement, quand les gens pensent à l'environnement, ils ne pensent qu'à son aspect naturel et ils en oublient l'aspect culturel.
De façon plus générale, cette autre image, qui ne présente pas uniquement des bâtiments historiques, nous suggère d'encourager les Canadiens, et surtout les jeunes, à soutenir le problème de la durabilité des habitats humains.
Vous voyez ici des statistiques. L'ICOMOS offre des conseils à l'UNESCO sur le patrimoine culturel et des conseils sur le patrimoine naturel à l'Union internationale pour la Conservation de la nature, l'UICN. Il est crucial que Parcs Canada participe sérieusement à ce débat nature/culture, car le Canada est considéré comme étant en tête de file dans ce domaine. Nos parcs nationaux séparent encore ces deux aspects, comme le fait d'ailleurs la plus grande partie de la société.
Il faut que nous partagions cette mobilisation avec le secteur à but non lucratif. À ses débuts, ce secteur était presque insignifiant — il se contentait de vendre des biscuits et de passer le chapeau. Mais il s'est développé d'une façon incroyable. J'ai travaillé à temps partiel dans les secteurs universitaire, public et privé, mais je trouve que le secteur à but non lucratif est devenu un acteur bien plus important dans tout cela.
À mon avis, le gouvernement fédéral devrait envisager de créer un organisme chargé du développement urbain et rural. En effet, un organe fédéral pourrait relier les municipalités, les circonscriptions, les villages, les réserves et les endroits qui innovent. Ce mouvement devrait être national pour que le Canada participe au dialogue critique sur la durabilité qui se poursuit dans le monde entier. Nous devrions intégrer certains programmes menés par les ministères du Patrimoine, des Parcs et de l'Environnement afin d'apporter des solutions holistiques au domaine du patrimoine grâce aux enjeux communs que ces ministères abordent.
Je vais m'arrêter ici. Nous vivons une époque extraordinaire. Nous sommes en pleine période de transition. Je trouve que les ministères, les agences et les programmes gouvernementaux reflètent cela. Il est maintenant crucial de passer à l'action.
Merci.
Merci beaucoup de m'avoir offert cette occasion de vous parler, et merci de vous intéresser aux lieux historiques. Le domaine du patrimoine est très divers. Il comporte de nombreux types de propriétés et présente une grande variété de solutions potentielles. Je constate que vous cherchez à déterminer les enjeux qui bénéficieront le plus de la collaboration du gouvernement fédéral.
Je vais donc me concentrer sur deux domaines dont on n'a pas beaucoup entendu parler pendant ces audiences: les propriétés patrimoniales commerciales et celles que détiennent des organismes de bienfaisance et sans but lucratif. Pour mieux m'expliquer, j'ai distribué une trousse vous montrant en détail certains des incitatifs offerts, et j'y ferai référence tout au long de mon allocution.
Il y a au Canada 440 000 bâtiments commerciaux construits avant 1960. Si l'on présume que 5 à 15 % d'entre eux pourraient présenter un intérêt patrimonial, il y en aurait entre 22 000 et 66 000 au Canada. Les rues principales des villes canadiennes sont donc bordées d'un nombre considérable d'immeubles qui définissent les communautés qui y vivent.
Mais pourquoi faut-il offrir des incitatifs? Quels obstacles empêchent la survie de ces immeubles? Je vais vous en présenter quelques-uns. Rendement du capital investi: la restauration de lieux patrimoniaux est souvent considérée comme un risque à cause de tous les éléments inconnus qu'elle comporte, à l'encontre des immeubles que l'on construit sur des terrains vierges. Coûts de la construction: bien que certaines restaurations ne coûtent pas trop cher, d'autres exigent de grosses dépenses, ce qui étouffe la demande. Ensuite, considérons le financement. La plupart des grandes banques ne veulent pas se lancer dans l'investissement « échelonné ». Elles ne sont pas prêtes à assumer les risques que pose la restauration de vieux immeubles. Dans les régions rurales, elles refusent carrément d'investir dans les immeubles anciens des petites collectivités. La quatrième raison est le fait qu'il est difficile de développer des propriétés. Les investisseurs se laissent souvent décourager par les restrictions — réelles ou perçues — imposées à la modification de propriétés patrimoniales. Cinquièmement, le système fiscal fédéral lui-même pose des problèmes. Il est impossible d'obtenir des agents fiscaux une explication claire des types de restauration que l'on peut déduire tout de suite pendant l'exercice financier et lesquels doivent être immobilisés. On se heurte aussi à un manque de précision dans les règles sur la TPS à appliquer aux nouveaux immeubles.
Existe-t-il de bons exemples où les incitatifs ont réussi à contrer ces facteurs dissuasifs? Comme Julian et d'autres témoins l'ont souligné, l'industrie de la restauration d'immeubles aux États-Unis est extrêmement prospère depuis 40 ans grâce aux crédits d'impôt de 20 % du gouvernement fédéral. Ce programme encourage le secteur privé à investir dans la restauration de propriétés abandonnées et peu performantes. Pendant toutes ces années, les 24 milliards de dollars offerts en crédits fiscaux ont généré plus de 28 milliards de dollars en recettes fiscales. Ce programme a généré 131 milliards de dollars en investissements privés. Ces chiffres sont impressionnants. Ils représentent un rapport de 5 pour 1 entre les investissements privés et les crédits d'impôt. Ce programme a créé 2,5 millions d'emplois et contribué à préserver 42 000 propriétés historiques.
Soulignons aussi qu'au cours de ces 15 dernières années, ce programme a eu d'énormes répercussions dans les régions rurales. Plus de 40 % des projets bénéficiant de crédits d'impôt aux États-Unis se situent dans des collectivités de moins de 25 000 habitants.
Si vous regardez le tableau que je vous ai remis, celui qui a cinq graphiques circulaires, les projets les plus importants bénéficient d'un ratio moins élevé d'incitatifs à cause des plafonds qui leur sont imposés. J'ai choisi un niveau de 2,2 millions de dollars par projet commercial, parce qu'au milieu des années 2000, il s'agissait du coût moyen du Fonds pour favoriser les propriétés patrimoniales commerciales, ou FFPPC.
Comparez maintenant cela au graphique circulaire qui se trouve à droite. La contribution des trois ordres du gouvernement américain change bien les choses. Il est possible d'ajouter les crédits d'impôt fédéraux de 20 % à ceux de l'État, ce qui donne des crédits de 40 à 45 %. Soulignons que 34 États sur les 50 autorisent cette accumulation de crédits.
Les consultations que j'ai menées partout au pays ont indiqué que ces grands projets d'environ 2,5 millions de dollars ont justement besoin des crédits d'impôt. Par exemple en 2015, on a rasé le pâté de maisons Farnam, sur l'avenue Broadway à Saskatoon. On estimait qu'il faudrait 700 000 $ pour le restaurer. La Ville ne pouvait donner que 150 000 $, alors on a rasé l'immeuble. Ou pensez aussi au site de l'usine Brewing and Malting, à Calgary — qui est très similaire au Distillery District de Toronto. Ce projet stagne, parce qu'on ne peut pas y injecter d'incitatifs assez puissants pour le faire décoller.
Que pourrait faire le gouvernement fédéral? Il ne dispose en fait que de deux mécanismes pour intervenir dans le marché de l'immobilier commercial— les mesures fiscales et les subventions et contributions. On vous a parlé du Fonds pour favoriser les propriétés patrimoniales commerciales et du succès qu'a eu ce programme pilote de crédits d'impôt. Les résultats d'analyses menées par Deloitte et par Ernst & Young indiquent que les crédits d'impôt seraient plus efficaces qu'un programme de subventions. Les programmes de crédits d'impôt remboursables apportent au secteur privé plusieurs avantages que les programmes de contributions n'offrent pas. La période d'attente pour faire autoriser une contribution est souvent plus du double que celle des programmes de crédits d'impôt qui eux, sous-tendent une certaine connaissance du système fiscal, ce qui donne confiance aux investisseurs. Les programmes de crédits d'impôt ont aussi la souplesse de s'appliquer aussi bien aux grands qu'aux petits projets.
Bien entendu, certains témoins ont déjà souligné au Comité les coûts de mise en oeuvre des crédits d'impôt. Selon les résultats de l'analyse du cabinet Deloitte, l'application d'un crédit d'impôt sur la restauration d'immeubles historiques ne coûterait rien au gouvernement. Au contraire, ces crédits généreraient une croissance nette des recettes fiscales provenant des impôts de l'entreprise, de la TPS et des impôts sur le revenu des emplois qu'ils créeraient.
Un modèle de la restauration de 22 000 propriétés commerciale indique que ces crédits d'impôt coûteraient 3,8 millions de dollars pendant la deuxième année et 55 millions de dollars la cinquième année. Toutefois, ces mêmes crédits généreraient une croissance nette des recettes de 3,4 millions de dollars la deuxième année, puis de 14 millions de dollars la cinquième année. Le modèle de restauration de 66 000 propriétés commerciales présente une courbe similaire. Pour accroître ces avantages, le gouvernement pourrait envisager d'étendre ces crédits à la restauration de propriétés patrimoniales privées comme le suggère le projet de loi C-323.
Passons rapidement aux bâtiments d'organismes sans but lucratif et aux immeubles résidentiels. Au Canada, des dizaines de milliers de bâtiments patrimoniaux ne bénéficieraient pas d'un crédit d'impôt, parce que leur utilisation ne génère pas de revenus. Il s'agit là de lieux de culte, de maisons-musées historiques et d'anciens pensionnats.
Maintenant, regardez au verso de la feuille que je vous ai remise et où se trouvent trois graphiques circulaires. Ce sont des exemples d'incitatifs offerts par plusieurs villes. Permettez-moi de souligner que vous avez là les situations qui attirent les meilleures subventions et exemptions fiscales. Toutefois, ces mesures sont souvent limitées par les budgets annuels des programmes qui les offrent, comme ceux de Nanaimo et de Halifax, qui ne peuvent distribuer chaque année qu'une somme limitée. Cependant, nous tenions à ce que vous puissiez examiner les situations les plus avantageuses possible.
Aux niveaux actuels, ces mesures incitatives n'apportent pas grand changement et n'encouragent pas grand monde. On nous dit qu'elles aident les propriétaires qui désirent restaurer, mais qu'elles n'incitent pas les autres à le faire. Vous remarquerez que le gouvernement fédéral ne figure pas dans cette image. On n'y trouve pas non plus de fonds réservés à des propriétés qui ne sont pas admissibles au Fonds pour favoriser les propriétés patrimoniales commerciales, car celui-ci ne concerne que les lieux historiques nationaux, notamment les gares et les phares patrimoniaux.
La concurrence entre les candidats aux financements fédéraux traditionnels est féroce. Par exemple, le Programme d'infrastructure communautaire de Canada 150 oblige les organismes sans but lucratif à se mesurer aux projets de construction d'arénas, de piscines et de terrains sportifs. Un peu plus tôt cette année, le site Web de FedDev annonçait que l'organisme avait reçu, lors de la première phase de financement, 1 100 demandes de fonds s'élevant en tout à 260 millions de dollars, ce qui représentait presque six fois les fonds disponibles. À l'heure actuelle, les lieux patrimoniaux ont beaucoup de peine à se faire entendre.
Voici les deux mesures que le gouvernement fédéral peut prendre pour faciliter la restauration des immeubles des organismes sans but lucratif. Premièrement, il peut créer une source de fonds de contrepartie qui compléteraient les investissements d'autres gouvernements. Les sociétés et les particuliers pourraient encourager ces dons philanthropiques. On pourrait distribuer les fonds en adoptant des méthodes modernes comme le financement participatif, qu'applique par exemple avec succès la Fiducie nationale du Canada sous la bannière de Ce lieu importe. Au cours de ces trois dernières années, l'investissement de 300 000 $ de la Fiducie a attiré 1,1 million de dollars en dons pour des lieux historiques. De même, les États-Unis ont investi 318 millions de dollars en fonds fédéraux pendant les dix ans de leur programme Save America's Treasures, qui a attiré 400 millions de dollars en dons de sources privées. Grâce à ces fonds, on a préservé 1 200 structures historiques importantes et créé 16 000 emplois. Le gouvernement fédéral canadien a aussi utilisé des fonds de contrepartie de cette manière, notamment le programme actuel de dons de contrepartie du ministère du Patrimoine canadien, mais il n'accepte que des fonds de dotation d'organisations artistiques. Je peux aussi citer les interventions d'aide humanitaire du gouvernement à la situation des réfugiés syriens et des victimes de catastrophes et de situations de crise.
Deuxièmement, le gouvernement pourrait verser un financement constant et progressif au programme national de partage des coûts de restauration des lieux patrimoniaux. Je crois que d'autres témoins l'ont mentionné. Les fonds disponibles ont passé de zéro dollar pour certaines années à aussi peu que un million de dollars pour d'autres années. La somme de 10 millions de dollars octroyée pour cette année et pour l'année prochaine est importante, mais comme il faudra la distribuer entre 700 propriétés admissibles — et que plusieurs d'entre elles sont sous-financées depuis des dizaines d'années —, ces 10 millions de dollars ne constitueront qu'une goutte dans l'océan. Comme l'a indiqué Parcs Canada l'autre jour, ce programme est déjà submergé de demandes. D'un autre côté, le Fonds du Canada pour les espaces culturels vient de recevoir 84 millions de dollars par année sur une période de deux ans, donc on perçoit une certaine amélioration de l'aide dans ce domaine.
En résumé, voici ce que nous recommandons. Premièrement, que le gouvernement fédéral offre un incitatif fiscal pour la restauration du patrimoine comme on l'a récemment proposé dans le projet de loi C-323. On attirera ainsi l'investissement des sociétés et des particuliers pour restaurer des lieux historiques de propriété privée afin de les utiliser d'une façon dynamique. Deuxièmement, que le gouvernement envisage d'étendre ce crédit d'impôt aux propriétaires de maisons patrimoniales afin de générer plus de recettes. Troisièmement, que le gouvernement fédéral offre un financement de démarrage pour soutenir des méthodes de financement créatives comme le financement participatif, qui pourrait aider un plus grand nombre d'organismes de bienfaisance et sans but lucratif à attirer des dons privés. Cela permettrait de sauver et de restaurer les milliers d'autres bâtiments patrimoniaux qui caractérisent nos collectivités. Enfin, que le gouvernement augmente sa part du partage des coûts pour le programme des lieux historiques nationaux afin de redonner vie aux monuments importants que l'on a que trop négligés.
Merci beaucoup.
Merci à vous.
Je suis désolée de vous avoir poussé à conclure. Vous aviez beaucoup d'information à nous présenter.
Karen Aird et Madeleine, je vous souhaite la bienvenue. Je ne sais pas laquelle de vous deux voudrait commencer.
Je vais commencer. Je vous présenterai une brève allocution, et Madeleine reprendra après moi. Merci.
Je m'appelle Karen Aird. Je tiens à dire tansi. Merci de nous avoir invitées à vous parler aujourd'hui.
Je représente le Cercle du patrimoine autochtone pour lequel Madeleine et moi travaillons. C'est le seul organisme voué au patrimoine qui soit conçu et dirigé par des Autochtones au Canada. Nous l'avons fondé en 2013 et constitué en personne morale en 2016. Nous y travaillons tous bénévolement. Nous nous sommes efforcés de faire reconnaître et inclure le patrimoine autochtone dans tout le pays. Nous avons organisé des tables rondes à Ottawa et à Vancouver pour donner aux peuples autochtones l'occasion de décrire leurs problèmes et leurs préoccupations et de faire reconnaître leur patrimoine dans les provinces et dans tout le pays. Notre définition est très globale, parce que pour les groupes autochtones, le patrimoine inclut beaucoup de concepts très divers.
Je sais que pour mon peuple — j'appartiens à la Première Nation Saulteau —, Mamahtawin est un lieu sacré. C'est ainsi que nous désignons le patrimoine autochtone. Pour de nombreux groupes autochtones, le patrimoine peut représenter des concepts intangibles comme des lois, des récits, des narrations orales. Il peut représenter des lieux sans objets physiques où le peuple tient ses cérémonies. Il peut aussi s'agir d'artefacts que vous voyez dans des musées. Il peut même s'agir de propriété intellectuelle du passé, comme nos récits, nos chants, nos totems. Je n'ai mentionné ici que quelques-unes des choses que comprend le patrimoine autochtone.
Madeleine et moi menons une campagne nationale pour faire reconnaître le patrimoine autochtone, parce qu'on n'en parle habituellement qu'à l'occasion du développement de ressources. Bien souvent, pour effectuer une évaluation environnementale, on mène aussi ce que nous appelons des études de l'utilisation traditionnelle. Ces études ne portent pas sur la majorité de ce qui nous préoccupe et elles ne visent pas à protéger notre patrimoine ou à le préserver à long terme.
Cependant, en cette époque de réconciliation, le gouvernement a changé, et les gens doivent repenser leur définition de patrimoine. Ils doivent cesser de ne l'appliquer qu'à des structures physiques et tenir compte de la façon dont les peuples autochtones ressentent leur patrimoine et désirent le protéger. Nous avons déjà établi des mécanismes. Nous suivons nos propres méthodes de protection et d'interprétation du patrimoine. Il est donc grand temps que les peuples autochtones expriment cette perception.
Je vais laisser Madeleine vous décrire notre travail plus en détail.
J'ai écouté attentivement ce qu'ont dit Julian et Chris. Je respecte profondément leur façon de voir, mais plus je les écoutais, plus je ressentais qu'ils ne parlaient pas du tout du patrimoine autochtone. Leur patrimoine désigne surtout, comme l'a dit Karen, des structures physiques. En écoutant leurs propositions de crédits d'impôt et de systèmes de protection des lieux patrimoniaux, même si je comprends l'importance de ces propositions, il me semble qu'elles n'incluent pas nos réalités autochtones. J'ai presque l'impression que nous parlons de concepts entièrement différents. Je peux presque vous assurer que si mon président national inuit ou d'autres dirigeants autochtones locaux, régionaux ou nationaux étaient ici, ils vous diraient que vous ne menez pas vraiment la conversation que nous voudrions tenir au sujet de la reconnaissance du patrimoine selon la description que Karen vient de vous en faire.
Les systèmes en vigueur n'ont pas été conçus pour nos communautés. Nous n'avons aucun accès au système de crédits d'impôt pour faire reconnaître nos lieux patrimoniaux afin de les protéger comme nous le désirons. Comme l'a dit Karen, on en parle souvent dans le contexte du développement des ressources, mais même là, on ne se concentre que sur des artefacts archéologiques. Nous devons préserver nos cimetières et nos lieux sacrés. Mais à part cela, tout ce que nous savons que nous devons...
Julian nous a montré une diapositive des années 1950. Nous ne nous y voyons pas. Nous ne voyons pas notre nom dans ces encadrés. Mais cette situation date de bien avant les années 1950. C'est une culture qu'il est difficile d'élargir. Comment nous faire inclure dans ces encadrés? On ne peut même pas nous inclure dans le système existant. Comment créer un système parallèle ou intégrer des systèmes qui permettent aux communautés autochtones de notre merveilleux pays d'obtenir, hors d'un projet de développement, les fonds fédéraux pour commencer à faire reconnaître, désigner et financer leurs pratiques et leurs lieux patrimoniaux?
Voilà les sentiments que je tenais à exprimer après avoir écouté les allocutions de Chris et de Julian.
Karen, désirez-vous ajouter quelque chose?
Oui.
Nous y travaillons bénévolement depuis 2013. Nous avons déniché des fonds tant bien que mal à différents endroits pour soutenir ces tables rondes. Elles nous ont fourni énormément de renseignements. À Ottawa et à Vancouver, nous avons invité des groupes autochtones, et ils sont venus. Ils désiraient vraiment une tribune pour parler de ces choses et ils voulaient du changement. Nous avons un besoin réel de confier cela un organisme — à notre cercle, ou à un autre groupe. Nous y travaillons depuis longtemps, mais je souligne encore que nous avons besoin de nous exprimer, d'offrir aux gens une tribune où ils puissent s'exprimer.
Ces tables rondes ont démontré clairement que nos communautés des Premières Nations ont énormément de peine à obtenir du financement et du soutien. Elles ne savent même pas à qui s'adresser. Je n'y vois pas de solution imminente. Il faut vraiment que nous trouvions des solutions différentes pour régler ce problème. À mon avis, il faudra créer un organisme conçu pour les Autochtones et dirigé par des Autochtones.
Merci beaucoup.
Vous nous avez tous présenté des aspects différents à étudier. Nous allons maintenant entamer la période de questions. Nous avons l'esprit ouvert et nous sommes très honorés de vous avoir avec nous. Nous vous écoutons. Nous tenons à entendre ce que vous nous conseillerez de faire pour améliorer la situation.
Nous allons commencer par M. Aldag.
Je remercie tous nos témoins de ce matin. Ce groupe est très divers. Les points de vue de chacun de vous nous éclairent beaucoup sur la façon de régler ce problème patrimonial. Ils aideront le gouvernement fédéral à participer efficacement à la conversation.
Ma première question s'adresse à vous, mesdames Aird et Redfern. Nous avons ici une occasion incroyable et tout un défi face au patrimoine autochtone. Comme vous nous l'avez souligné, les structures actuelles sont très coloniales. Elles ne représentent pas le patrimoine et les valeurs autochtones. Votre mémoire nous a été très utile. Nous l'avons lu deux ou trois fois. Il soulève un grand nombre de préoccupations.
Je vais commencer par certaines solutions proposées. Vous en avez déjà parlé un peu. L'une d'elles serait de créer un organisme dirigé par des Autochtones. Nous pouvons toujours financer des organismes, mais quels résultats produisons-nous ainsi? Vous êtes-vous fait une image du succès d'un tel organisme? Que se passera-t-il après cela?
Avant d'entrer en politique, j'ai principalement fait carrière dans le domaine du patrimoine. Nos paysages culturels, par exemple, nous ont incités à protéger le patrimoine. Cela devient plus difficile dans les régions industrialisées du Sud. En quoi consisterait le succès, selon vous?
Initialement, nous avons essayé de collaborer avec la Fiducie du patrimoine, avec Patrimoine canadien et avec Parcs Canada. Je dois reconnaître qu'ils comprennent la valeur de notre patrimoine. Je crois qu'ils ont tous été surpris d'apprendre qu'il n'existait aucun organisme national chargé du patrimoine autochtone. Cependant, quand nous nous sommes adressés à nos organismes autochtones nationaux respectifs, ils nous ont pleinement appuyés, mais notre problème ne s'insérait pas dans leurs mandats. En faisant des recherches sur les antécédents et sur la création de la Fiducie nationale, nous avons découvert avec intérêt qu'elle avait reçu un énorme fonds de dotation. Je reconnais la valeur de son travail, mais en réalité, elle n'a presque rien fait pour le patrimoine autochtone.
En pensant aux résultats que notre organisme pourrait produire sans l'aide d'un organisme national chargé du patrimoine autochtone, il est très difficile pour les ministères fédéraux — et je ne parle pas uniquement de Patrimoine canadien et de Parcs Canada, mais d'autres ministères aussi — de s'occuper d'enjeux liés au développement. À qui devraient-ils s'adresser? Quelle aide peuvent-ils apporter? Comment veiller à ce que nous discutions des enjeux qui comptent? Comment développer ce système?
À notre avis, un tel organisme pourrait faciliter ces conversations à l'interne avec nos gens et avec nos communautés dans tout le pays. On ne peut pas faire cela en suivant la hiérarchie du haut vers le bas. Il faut développer beaucoup de capacités au sein de nos communautés. Nous avons aussi observé le besoin urgent d'éduquer également les gouvernements locaux, provinciaux, territoriaux et nationaux. Comment établir la réconciliation? Comme l'a dit Julian, il faut aborder la culture et le patrimoine d'une manière plus holistique. On ne peut pas les limiter à un ministère ou même à un secteur. Ce domaine comporte tellement d'interdépendances! Nous nous considérons comme un organe de coordination, de facilitation et d'éducation. Nous ne sommes pas là pour tout faire et pour produire tous les résultats, nous sommes là pour offrir du soutien.
Karen, voudrais-tu ajouter quelque chose?
Cette mission que nous voulons assumer nous vient essentiellement des conversations de deux tables rondes. Nous voulions en organiser dans tout le Canada, mais nous y avons renoncé, parce que nous avons aussi un emploi, et cette activité était bénévole. Ces deux tables rondes nous ont beaucoup éclairés. Nous y avons compris le besoin de créer un centre d'échange d'information où les gens pourraient trouver des renseignements sur les moyens d'obtenir des subventions et sur les personnes auxquelles s'adresser pour cela, autant du côté autochtone qu'au gouvernement.
Chris, avez-vous plus d'information sur le Fonds pour favoriser les propriétés patrimoniales commerciales? Comme vous l'avez dit, c'était un projet pilote au début des années 2000, puis on y a mis fin. J'ai essayé de trouver pourquoi, mais je n'y suis pas parvenu. Le sauriez-vous? Ce programme nous a-t-il fourni de l'information utile, ou comportait-il des déficiences que vous pourriez nous décrire? Tout ce que vous auriez à nous dire sur le bon vieux FFPPC nous serait très utile.
En fait, je ne sais pas vraiment pour quelles raisons on y a mis fin. Je crois qu'il dirigeait 49 projets, et comme l'a dit Julian, il a attiré huit fois plus d'investissements privés, soit environ 177 millions de dollars. On cherchait à mesurer l'intérêt que susciterait un incitatif fédéral. On en a beaucoup appris sur sa capacité d'attirer des fonds municipaux et provinciaux ainsi que, bien entendu, des investissements privés. Il suivait un modèle efficace. On envisageait de l'orienter vers les crédits d'impôt après avoir obtenu les résultats de l'analyse de Deloitte et d'autres cabinets, mais on n'a jamais entamé cette phase.
Je comprends ce que nous disent Madeleine et Karen. Je ne pense pas que nous devions choisir une solution et abandonner l'autre. Nous ne devrions pas nous concentrer sur certains aspects du problème et abandonner les autres. Notre pays doit ouvrir sa façon de considérer les différents aspects de cette question, notamment les structures patrimoniales, les paysages autochtones et les paysages culturels. Nous avons là, il me semble, une occasion de reconnaître les multiples facettes du problème afin d'y apporter les divers outils et solutions nécessaires.
Merci.
J’ai une question pour vous, monsieur Wiebe. Vous étiez présent lorsque M. Berg-Dick a témoigné devant le Comité. Il a semblé suggérer que tout programme d’encouragement fiscal sur le plan fédéral entraînerait nécessairement une baisse de revenus. Donc, qu’il s’agisse d’un programme de subventions ou d’un programme basé sur un encouragement fiscal, il y avait quand même un effet similaire. Il y avait moins de revenus pour le gouvernement, pour l’un ou l’autre des programmes.
Je présume que vous ne seriez pas d’accord avec cette évaluation.
Je peux comprendre d’où proviennent probablement certaines de ses analyses. On pourrait dire que s’il n’y avait pas une mesure incitative pour certains travaux ceux-ci seraient effectués autrement, mais puisque ceci n’affecte pas les revenus et puisque vous faites la promotion de l’intérêt social et culturel, cela démontre que le gouvernement fédéral a la possibilité d’intervenir.
Pour ce qui est du crédit d’impôt et de sa capacité à rentabiliser de l’argent, une part de l’analyse effectuée par Deloitte, immédiatement après le programme du FFPPC, a démontré qu’il ne s’agirait pas d’un fardeau fiscal pour le public, que cela générerait de nouvelles activités, pouvant peut-être les rediriger... à partir de projets qui sont peut-être davantage semblables, qui ne sont pas liés à de nouvelles constructions. Il s’agit de la nouvelle vision, plus holistique, de la gestion de notre environnement bâti, duquel je crois que Julian parlait également.
Cela est très utile.
Monsieur Smith, vous avez suggéré que le gouvernement concentre son attention sur des propriétés patrimoniales produisant des revenus. Est-ce exact?
Monsieur Wiebe, seriez-vous d’accord avec cette évaluation qui indique que l’accent devrait être mis sur le fait d’offrir des mesures incitatives pour les propriétés patrimoniales qui produisent des revenus?
Nous avons procédé à une étude et avons discuté il y a quelques années avec 27 propriétaires et développeurs à travers le pays. Nous avons clairement pu constater qu’il manque une façon de tirer profit des incitatifs existants, qui sont offerts au niveau provincial et municipal, afin d’obtenir des résultats efficaces. Je pense à des endroits comme Winnipeg, avec le bâtiment de la Baie d’Hudson et quelque chose de cette envergure, un immense bâtiment emblématique situé sur le boulevard Memorial, tourné vers le palais législatif. Pour cela, vous n’arriverez à rien avec une subvention de 50 000 $ de la part de la ville. Vous ne parviendrez pas à persuader ou à faire changer des décideurs. Il faut qu’il y ait quelque chose, dès le départ, qui soit fiable et prévisible, afin que les gens puissent dire « d’accord, nous savons que nous pouvons nous attendre à un certain montant de financement afin de réaliser ce projet autour d’un bâtiment emblématique » et celui-ci doit être suffisant afin de pouvoir avoir un impact.
Si on prend des exemples semblables à travers le pays, il y en a plusieurs qui pourraient présenter ce grand avantage.
Monsieur Smith, vous avez entendu M. Wiebe parler de crédits cumulables. Vous l’avez entendu parler de crédits d’impôt remboursables. Je présume que vous seriez en faveur de ce genre d’incitatifs, au moins pour une part du patrimoine bâti partout au pays.
Oui, absolument. Il est important de comprendre les municipalités, puisque c’est là où a lieu l’innovation dans presque tous les secteurs et particulièrement en matière d’habitat humain. Ce que je veux dire, c’est que les villes sont en première ligne. Elles font affaire avec les Canadiens sur une base quotidienne et de façon individuelle, alors je pense qu’un allégement des taxes municipales, mais aussi des subventions de soutien…
Ce que je veux dire, c’est qu’ils font tout ce qui est en leur pouvoir et je crois que nous devrions nous enquérir de leur opinion. Les planificateurs municipaux partout au pays ne se rencontrent pratiquement jamais. Ils n’ont pas de moyens pour le faire et je pense que c’est pourquoi le gouvernement fédéral se doit de rassembler cette sagesse collective.
Je veux revenir sur ce dont Karen et Madeleine parlaient. Je pense que la question du crédit d’impôt est primordiale. Le domaine du patrimoine, de façon générale, s’en va dans une nouvelle direction où la question, je dirais, n’est pas de savoir si le patrimoine culturel autochtone a une place dans le système. D’une certaine manière, je pense qu’un groupe comme le cercle du patrimoine autochtone doit concevoir un nouveau système pour ensuite étudier comment des moyens comme les crédits d’impôt peuvent y être intégrés.
C’est ce qui s’est produit à l’UNESCO, où il y a trois types de paysages culturels: les paysages conçus, comme Versailles, les paysages évolutifs, comme les zones agricoles en France et ainsi de suite, ainsi que la troisième catégorie qui est celle des paysages culturels associatifs, qui sont pour les peuples des Premières Nations qui attachent une grande importance à la nature. Ce qui s’est produit c’est que la catégorie du paysage culturel associatif est en fait la plus fascinante et je pense qu’elle va éventuellement l’emporter sur les deux autres. Versailles est vraiment un paysage culturel associatif. C’est l’aspect primordial.
Les jeunes de Willowbank se rendent compte qu’ils perçoivent une part de la compréhension autochtone du patrimoine culturel comme le fondement de la façon dont ils perçoivent le monde. Il ne s’agit pas seulement d’incorporer ces idées dans les systèmes en place, mais de changer les systèmes.
Monsieur Wiebe, je vais revenir à vous. Pouvez-vous élaborer un peu plus sur les crédits d’impôt cumulables auxquels vous faisiez référence dans votre intervention?
Ils sont offerts dans 34 états aux États-Unis. Ils ont constaté que le crédit fédéral américain ne suffit pas. Pour les mêmes travaux de réfection, on peut les combiner et obtenir un rabais de 20 % et un crédit d’impôt de 20 à 25 %, celui-ci s’ajoute donc au 20 % offert par le fédéral pour des travaux de réfection. Cela vous donnerait au moins 40 ou 45 % en crédit d’impôt pour ce type de travail, ce qui est extraordinairement attrayant.
Sur notre feuille, ici, vous pouvez voir l’exemple du modèle que nous suivions. Celui-ci provient en fait de Dallas au Texas. Il compense une grande partie des coûts de réfection et cela le rend pratique pour aller de l’avant.
Merci, madame la présidente.
Merci d’être ici aujourd’hui.
Je vais commencer avec vous, madame Aird et madame Redfern. Le comité a procédé à une étude sur les parcs et les zones protégées le printemps dernier. Nous nous sommes déplacés et avons rencontré quelques témoins dans certains parcs nationaux dont celui de Jasper. Un des chefs qui est venu discuter avec nous a utilisé des mots que je n’ai jamais oubliés. Il a dit, « notre langue n’est pas une langue écrite, alors le créateur écrit notre histoire sur la terre. » Ils nous ont ensuite montré des photos d’un site, en particulier, qui se trouve sur une propriété privée. Je me suis demandé, comme plusieurs de mes collègues je pense, comment celui-ci pouvait ne pas être protégé.
Je vais revenir environ 10 ans en arrière. J’étais gestionnaire pour les parcs provinciaux du sud-est de la Colombie-Britannique et j’ai engagé une femme Ktunaxa afin de faire une étude culturelle sur les valeurs à l’intérieur des parcs. Bien sûr, ils ont hésité à partager les résultats de cette étude, ce que je comprenais tout à fait.
Comment construisons-nous un meilleur avenir pour la protection des sites autochtones? Il semble falloir, tout d’abord, surmonter un important degré de méfiance en matière de partage des valeurs. Quelles sont les dispositions les plus importantes que le gouvernement fédéral peut prendre, afin de commencer à mieux protéger les sites autochtones?
Je pense que le message de la table ronde facilitée par le cercle du patrimoine autochtone, que nous avons très clairement entendu, portait sur la valeur et le besoin d’avoir une institution menée par des Autochtones, où cette confiance peut être construite à l’interne, ce qui permet au peuple et aux communautés partout au pays de déterminer comment nous pouvons avoir ces conversations complexes. Comment partageons-nous notre patrimoine avec Parcs Canada? Comment influençons-nous l’approche et les politiques de Parcs Canada de façon à pouvoir commencer à inclure notre patrimoine dans ces espaces?
Nous avons discuté avec Parcs Canada concernant le fait qu’il y a certaines histoires complexes entourant jusqu’à la création de ces parcs. Dans la plupart des cas, même dans mes recherches et mes travaux avec la Commission de vérité Qikiqtani, nous savons que nous avions des sites sacrés, des endroits que nous utilisions ou qui présentaient une valeur particulière parce qu’ils étaient des terrains de mise bas pour le caribou, qui sont soudainement devenus, basés sur ces informations — par l'entremise d’administrateurs de secteur ou d’agents de la GRC, chose intéressante, et plusieurs fois dans le nord, ou par des anthropologues ou des scientifiques — des sites protégés à l’échelle nationale canadienne et nous nous sommes vus refuser l’accès ou le droit d’utiliser ces sites sacrés qui étaient à l’origine, dans certains cas, de la création de ces parcs.
Cela démontre le besoin et la valeur d’une telle organisation qui peut véritablement procéder, comme je l’ai dit plus tôt, à ces discussions internes complexes afin de nous permettre de déterminer comment nous pouvons discuter avec des institutions comme Parcs Canada, Patrimoine canadien ou la Fiducie nationale du Canada, parce que nous devons également déterminer cela pour nous-mêmes.
J’aimerais ajouter une chose, si vous le permettez, madame la présidente. Protéger le bâtiment de la Compagnie de la Baie d’Hudson à Winnipeg est incroyablement important aussi pour les peuples autochtones, non seulement d’un point de vue national ou du point de vue de Winnipeg, mais aussi parce que l’histoire de cette compagnie en particulier touche chaque communauté autochtone au pays. Nous avons également des bâtiments HBC dans nos communautés rurales et éloignées et nous voulons également que notre histoire soit incluse dans celle de ses bâtiments, non seulement du point de vue de la compagnie ou possiblement, dans certains cas, leur point de vue par rapport à la relation historique qu’ils ont eue avec nous. Notre point de vue doit être inclus dans l’histoire de ce bâtiment.
Avez-vous quelque chose à ajouter Karen?
Cela est fantastique. Il nous faut trouver une solution afin de construire un meilleur avenir pour la protection et la célébration des sites autochtones partout au pays. Il faut y arriver à un moment donné et j’espère que cela se fera plutôt que tard.
J’ai une question pour vous, monsieur Smith. Dans la ville de Cranbrook, qui fait partie de ma circonscription de Kootenay—Columbia, ou j’habite, il y avait une caserne de pompiers municipale datant de 1929 qui étaient inoccupée, un magnifique bâtiment très ancien. Quand j’étais maire, nous avons considéré la possibilité de confier sa gestion au Conseil des arts, afin d’en faire un refuge permanent pour les arts. Il y a eu un changement au niveau de notre administration et les nouveaux dirigeants ont décidé de la mettre sur le marché pour ensuite la vendre. Celle-ci sera maintenant une brasserie connue sous le nom Fire Hall Kitchen and Tap.
Selon vous, en matière de hiérarchie, qui devrait prendre en charge les édifices patrimoniaux? Est-ce qu’il y a une préférence? Faudrait-il favoriser le gouvernement fédéral où les gouvernements, ensuite les sociétés à but non lucratif et enfin le secteur privé? Est-ce que cela a une importance?
Je ne pense pas que cela soit important. Il y a en effet certains établissements d’alimentation qui sont administrés par des organismes à but non lucratif de façon à pouvoir employer des jeunes défavorisés. Hamilton à de fantastiques exemples démontrant ceci. Tout ce que je dirais c’est que le secteur à but non lucratif doit être calculé d’une façon que nous ne sommes pas en mesure de calculer. Il n’y a pas que le secteur privé et le secteur public; il y a également ce secteur à but non lucratif qui joue souvent un rôle primordial afin de mener à bien certains objectifs du gouvernement, parce qu’il ne travaille pas dans un but lucratif.
L’autre commentaire que je veux vous partager, puisque vous venez de la Colombie-Britannique, c’est que, selon mon expérience, les villes, les municipalités et les zones rurales de la côte ouest du Canada ont environ une génération d’avance sur celles de la côte est et du Centre du Canada pour ce genre de relation. Je pense que la conscience environnementale a été plus forte parce que les communautés des Premières Nations ont davantage pris part à la discussion et depuis un peu plus longtemps. Je pense que le reste du Canada a beaucoup à apprendre de ce qui se passe non seulement en Colombie-Britannique. Je pense que l’Alberta, la Saskatchewan et le Manitoba sont en avance. Je me sens frustré, car des gens parlent de certaines des grandes villes du Centre du Canada comme si ces endroits allaient nous en apprendre sur l’avenir, parce que je ne crois pas que cela soit le cas.
Merci beaucoup. Et je suis désolée de devoir mettre un terme à cette intervention, puisqu’il s’agit d’excellents conseils.
Darren Fisher.
Merci beaucoup, madame la présidente.
Merci beaucoup d’être avec nous aujourd’hui.
Madame Aird et madame Redfern merci beaucoup de nous avoir fait part de vos commentaires. Madeleine, vous avez dit que nous avons deux discussions différentes et je pensais exactement la même chose quand vous avez dit cela. Je vous remercie d’être la voix de votre communauté.
M. Aldag a dit quelque chose qui m’a vraiment touché et que j’ai moi-même mentionné à propos de l’environnement dans l’ensemble. Il a dit que cela est un important défi, mais également une très grande opportunité. Alors, je vous remercie pour votre témoignage. Je n’ai aucune question directe pour vous, mais vous m’avez ouvert les yeux avec certains de vos commentaires, spécifiquement quand vous avez dit que le système ne convient pas à vos communautés et que vous ne faites pas partie de son orientation. Il s’agit de commentaires importants et je vous en remercie.
Chris, vous disiez que la réfection de bâtiments patrimoniaux était « risquée ». Cela est certainement dispendieux, mais j’aimerais savoir un peu plus à quoi vous pensez quand vous dites que cela est risqué. Je m’intéresse aux nouvelles constructions par rapport à la rénovation de bâtiments patrimoniaux. Le coût d’une nouvelle construction a probablement doublé au cours des 10 à 12 dernières années, par rapport à l’achat d’une maison existante. On ne parle pas de maisons, mais pourriez-vous nous faire part de votre point de vue concernant les nouvelles constructions, par rapport à la rénovation, et nous dire si un certain équilibre a été atteint avec ces coûts énormes ou s’il y a une augmentation faramineuse correspondante pour la rénovation de bâtiments patrimoniaux.
J’aimerais également connaître votre avis sur ce que j’appelerais le « façadisme ». Je ne suis pas certain que cela soit véritable terme, mais quand on parle de bâtiments patrimoniaux, de nombreuses façades sont préservées alors que l’intérieur du bâtiment est démoli. Un conseiller d’Halifax a appelé cela la « Disneyfication » du patrimoine. J’aimerais connaître votre avis. Mon avis personnel et qu’il ne s’agit pas de la meilleure éventualité, mais que c’est beaucoup mieux que la pire. J’aimerais connaître votre avis sur ces quelques sujets.
Aussi, je pense que c’est peut-être vous, Chris, qui avez mentionné vouloir aider les propriétaires consentants. Les congés fiscaux ou les subventions aident les propriétaires consentants, mais n’amènent personne à faire une chose qu’ils ne veulent pas faire. J’imagine que je tente de boucler la boucle ici et je me demande si les changements au niveau de l’économie, concernant la comparaison entre une nouvelle construction et la rénovation, peuvent avoir apporté un équilibre.
Cela fait beaucoup de questions et nous n’avons que trois minutes et demie. Je veux seulement vous faire part de cette perspective…
Je vais tenter de prendre une minute, ou peut-être 30 secondes, par question.
Nous n’avons pas observé un énorme rajustement des coûts. Le risque lié à la réfection du patrimoine est que l’industrie générale de la construction ne sait pas nécessairement comment fonctionnaient les systèmes de ces vieux bâtiments. Quand les ouvriers entrent dans un bâtiment et commencent à abattre des murs, ils découvrent de nouvelles choses.
Quand on construit à partir de rien, on démolit et ont créé un modèle très simple. On sait exactement combien coûtent les poutres en acier et combien coûteront les panneaux à l’extérieur, tandis que pour le bâtiment plus ancien, à moins d’avoir beaucoup de connaissances, cela peut être un défi.
Quelques-unes des différences se produisent lorsque l’on ajoute de nouvelles formes agressives de réutilisation adaptée dans les bâtiments. Quand on prend un bâtiment commercial avec un grand plancher ouvert et des services et qu’on tente d’en faire un bâtiment résidentiel, il faut alors ajouter de nouvelles choses et cela devient plus compliqué. Si l’adaptation est plus délicate, alors les coûts sont moindres. Je vais devoir regarder cela plus en détail, mais selon ce que nous avons observé les coûts n’ont pas changé à ce point.
Le façadisme est un point intéressant, parce que les désignations patrimoniales que nous plaçons sur les bâtiments sont souvent sur l’aménagement à valeur publique, ce qui est la façade que le public peut voir. Pourquoi fournirais-je une subvention ou désignerais-je l’intérieur quand il s’agit de l’espace privé du propriétaire? Ce que je veux dire, je pense qu’il est un peu cynique, d’une certaine façon, d’être entièrement fixé sur la façade. S’agit-il de la meilleure éventualité? Jeter le reste du bâtiment est un gaspillage de matériaux environnementaux, alors un il y a une grande discussion qui a lieu au sein de la communauté de conservation du patrimoine à ce sujet.
Pour aider les propriétaires consentants, en revenant sur ce que Madeleine et Karen disaient, il y a toute une discussion qui doit avoir lieu concernant la façon dont nous allons travailler avec ce que nous avons, pour faire davantage avec moins. Je pense qu’il y a l’idée d’adaptation, en ce qui concerne des endroits et bâtiments qui sont adaptables et qui peuvent changer au fil du temps; en ce qui concerne la durabilité, au sujet des matériaux durables, parce que je crois que nous construisons des bâtiments qui sont en quelque sorte jetables et que nous nous en débarrassons après quelques décennies; en ce qui concerne les bâtiments plus âgés et leurs matériaux naturels, afin qu’il n’y ait pas d’éléments toxiques à l’intérieur que nous laisserons en héritage à nos petits-enfants; et l’idée de maintenabilité, en ce qui concerne les endroits qui ont la capacité d’être maintenus au fil du temps.
Je pense que cela fait partie d’une plus grande discussion par rapport à la construction d’un monde plus durable, qui ne concerne pas la création d’équipements munis de panneaux solaires, mais simplement le fait d’utiliser ce que nous avons déjà d’une façon plus informée et plus holistique.
Veuillez m’excuser, je cherchais à m’exprimer rapidement.
Wow, vous avez répondu à tout cela et vous avez encore une minute. S’il y a autre chose dont vous voulez nous faire part... Vous avez été très concis.
Je m'adresserai à M. Smith, si vous permettez.
Vous avez dit que le Code national du bâtiment avait besoin d'une mise à jour, mais vous n'avez pas vraiment précisé votre pensée. Voulez-vous prendre 40 secondes ou à peu près pour nous en dire davantage à ce sujet?
J'étais architecte en chef à Parcs Canada il y a 35 ans. À l'époque, le Comité associé du Code national du bâtiment disait qu'il faisait une étude en vue d'adapter le Code aux constructions existantes, parce qu'il s'applique en réalité aux constructions neuves.
Trente-cinq ans plus tard, ce n'est toujours pas fait. Le Comité associé du Code national du bâtiment a pourtant tous les pouvoirs pour réunir une équipe compétente.
Je dirais que le savoir qu'on enseigne, les programmes d'études en architecture et ainsi de suite, est tout axé sur la construction neuve, comme le Code national du bâtiment. À Willowbank, nous avons un tronc commun de cours pour les architectes, les planificateurs, les maçons et les menuisiers, parce que nous voulons les familiariser avec les bâtiments qui existent déjà et nous enseignons aussi le design contemporain. Je dirais que les dépassements de coûts et l'incertitude à l'égard des vieux bâtiments et des vieux sites sont dus à un manque de savoir-faire chez les professionnels qui en sont chargés. Le Code du bâtiment n'aide pas.
Mesdames Redfern et Aird, j'ai beaucoup aimé votre intervention.
Madame Redfern, j'ai côtoyé quelqu'un que vous connaissez, Natan Obed. J'ai fait partie de l'expédition Canada C3, de Nain à Iqaluit. J'ai passé beaucoup de temps avec Natan et nous avons pu discuter à fond de sujets auxquels vous et moi nous intéressons beaucoup. Nous nous sommes arrêtés à Hebron, où nous avons pu voir le travail de restauration. J'ai été très surpris. Même s'il s'agit d'un lieu de douleur, je pense, pour les Inuits, j'ai trouvé remarquable qu'on veuille autant recréer et préserver le site. Dieu bénisse ceux qui le font. On assiste là à des progrès majeurs.
À ce propos, il ne semble pas y avoir de réticence dans la collectivité inuite. Vous avez parlé de la Compagnie de la Baie d'Hudson, du rapprochement culturel entre Européens et Inuits favorisé en quelque sorte par la traite des fourrures. Il était très important de le reconnaître.
Pourriez-vous m'en dire un peu plus à ce sujet?
Si je comprends bien votre question et votre commentaire, je pense que les Inuits sont des gens très pragmatiques. Même le travail que j'ai fait avec la Commission de vérité Qikiqtani... C'est une histoire commune. C'est une réalité commune. Il faut que nos histoires soient racontées. C'est un peu triste, je pense; on trouve de ces bâtiments de la Compagnie dans la plupart de nos localités, à Iqaluit et partout dans le Nord. Ce ne sont pas des biens désignés et ils tombent en ruine. Mais ce sont pratiquement les premiers endroits qui attirent les touristes. Idéalement, on devrait les remettre en état. Le problème, même pour nous dans le Nord, est qu'ils ne sont pas assujettis à l'impôt foncier, sauf à Iqaluit et au Nunavut. Les réserves échappent à l'impôt foncier. Un régime de taxation... Cela devient même difficile. Comment faire pour avoir accès à un programme qui fonctionne de cette façon, pour entreprendre concrètement de restaurer ces bâtiments ou ces lieux de mémoire? À Terre-Neuve-et-Labrador, on peut compter sur l'aide de la province et du gouvernement fédéral.
Je ne sais pas si j'ai vraiment répondu à votre question.
Absolument.
Je m'intéresse aussi beaucoup à la relation entre le tourisme faunique et la préservation d'une culture. Je crois comprendre de vos deux témoignages que la culture occupe une grande place dans la préservation du patrimoine. J'aimerais savoir par exemple comment se passe la chasse à l'ours polaire au Nunavut. Je vais appuyer cette chasse tant que je le pourrai. Elle est bien pratiquée. Je me suis prononcé très fort en faveur de cette activité.
L'intérêt de cette chasse, comme vous le savez bien, madame Redfern, est qu'elle est pratiquée selon la tradition. Je cite à partir d'un document:
Les retombées culturelles favorables pour les collectivités qui offrent ces chasses comprennent la renaissance du transport en traîneau à chiens, la préservation de la couture traditionnelle, des techniques de chasse et de survie et la place faite à l'économie de subsistance et aux coutumes inuites du partage.
Voici, je pense, une remarquable fusion de deux cultures qui, sans la moindre subvention publique, assure tranquillement la préservation et la protection de l'une d'elles.
Quelle importance revêt la chasse à l'ours pour les collectivités qui la pratiquent de cette manière?
Une énorme importance, comme vous l'avez signalé. Beaucoup de gens ne comprennent pas que la chasse sportive, celle qui attire les chasseurs du Sud, contribue en fait à préserver les coutumes traditionnelles. Lorsque nous chassons tout court, nous pouvons le faire à notre guise: en motoneige ou même en bateau durant l'été. Mais pour le tourisme et la chasse sportive, vu qu'il faut utiliser des attelages de chiens dans ces localités qui décident de l'offrir... parce que les décisions se prennent à l'échelon local. Village par village, nous devons décider quelle portion du quota de chasse, qui est déterminé scientifiquement selon les paramètres de viabilité de l'espèce, quelle portion de ces ours polaires nous allons affecter à la chasse sportive.
Vous avez entièrement raison; non seulement elle fait revivre la couture ancestrale... Croyez-moi, il n'y a rien de plus chaud qu'une qulitta de caribou...
M. Robert Sopuck: J'en ai une.
Mme Madeleine Redfern: ... une peau de caribou, ou un pantalon en fourrure d'ours polaire. Croyez-moi, vous préféreriez cela à un manteau en duvet d'oie des neiges, n'importe quand.
Ce qu'il faut dire aux gens aussi, c'est que nous mangeons la viande. Le chasseur garde la peau, mais la viande nourrit beaucoup de monde dans le village. C'est très nutritif et c'est un vrai régal.
Je suis désolée, mais votre temps est écoulé. Vous savez quoi, cependant? Il reste du temps pour les questions. Vous n'avez qu'à le partager entre vous, parce qu'il est limité. Nous tenons un bon filon et j'espère que vous le reprendrez.
Nous sommes tout à fait équitables dans l'allocation du temps. Nous le sommes toujours.
Monsieur Gerretsen.
Merci beaucoup.
Monsieur Wiebe, je sais que vos arguments portaient essentiellement sur la remise en valeur du patrimoine bâti à des fins commerciales et privées. Je crois fermement que le meilleur incitatif serait que le gouvernement donne l'exemple, comme le font si bien les Américains. Leur gouvernement excelle à entretenir ses propres lieux historiques.
Quelle note donneriez-vous au gouvernement du Canada et à ses sociétés d'État pour l'entretien des lieux historiques?
Je pense que les États-Unis offrent un exemple intéressant de ce que l'agence des services généraux a fait de bon pour... comment dit-on... les biens de l'État? Il y a tout un programme là-bas, grâce auquel les édifices emblématiques...
Désolé de vous interrompre, mais je suis pressé par le temps. Je suis curieux de savoir comment vous trouvez que le gouvernement fédéral du Canada et ses sociétés d'État s'en tirent avec l'entretien de leur patrimoine bâti.
Je pense que les ministères fédéraux s'en tirent assez bien à certains égards, mais les sociétés d'État n'y sont pas tenues. Je sais que Postes Canada...
Croyez-vous que les sociétés d'État devraient être tenues de restaurer leurs propriétés? Nous avons ce drôle de régime au Canada où les sociétés d'État échappent à l'obligation d'entretenir leur patrimoine bâti.
Oui. Je crois que ce serait une excellente mesure. Le sociétés d'État, y compris les ports, les terrains aéroportuaires de Pickering, entre autres, et tous ces bureaux de poste historiques...
Ce que je dirais à propos de la gestion des édifices fédéraux — et cela rejoint un autre argument de M. Stetski, je crois concerne leur aliénation, à qui on les cède ou à qui on devrait les céder en premier lieu. Le gouvernement se défait de ses propres édifices, comme le complexe de la rue Booth ici à Ottawa, en les offrant en vente libre au plus haut soumissionnaire par l'entremise de la Société immobilière du Canada. Il faudrait songer à établir différents paliers et peut-être ne pas obtenir la plus haute valeur marchande, mais une bonne valeur tout de même en les cédant aux bonnes personnes. Un recalibrage de ce genre débouchera sur de meilleurs résultats, c'est-à-dire plus d'endroits intéressants et plus de respect pour le patrimoine fédéral.
Je représente Kingston et les Îles. D'après le registre canadien, nous comptons dans notre circonscription environ 96 lieux historiques nationaux, certains appartenant à l'État, d'autres à des intérêts privés. Nous avons à Kingston une gare originale du Canadien National. C'est là que le premier de nos premiers ministres prenait le train pour Ottawa et en revenait. De nombreuses personnalités, certaines de rang royal, y sont passées. De nombreux présidents en visite au Canada, surtout à l'époque, sont aussi passés par cette gare.
Ce que nous voyons, non que ce soit fait exprès, mais parce que le système est ainsi, c'est de la démolition par négligence. Cette gare appartient au CN, qui veut la vendre. Elle est littéralement laissée à l'abandon depuis des années et maintenant, elle a l'air de cela. Elle est barricadée. Le toit n'existe plus. Elle est en train de s'écrouler. Le CN n'y fera absolument rien.
Pensez-vous qu'il devrait y avoir plus d'incitatifs offerts ou plus d'exigences imposées aux sociétés d'État pour qu'elles prennent soin de leurs biens?
Pour un cas qui passe entre les mailles — entre les rails, devrais-je dire, en terrain ferroviaire — quant à savoir à qui incombe la responsabilité, dans ce cas il y a des correctifs et d'autres choses connexes. Il faudrait resserrer les règles pour que nous ne voyions plus de ces édifices emblématiques dépérir entre deux sphères de compétence. Il faudrait un genre de crédit d'impôt ou quelque chose qui puisse encourager un promoteur à s'en mêler et à faire quelque chose de cet édifice. Ce serait extraordinaire.
Prenez par exemple, dans un autre secteur de Kingston, l'hôpital psychiatrique Rockwood, près de la prison. Il dépérit là depuis, je ne sais pas, une dizaine d'années?
Voilà d'autres exemples d'édifices emblématiques auxquels on ne trouve pas de solution; il faut un stimulus pour leur assurer quelque utilité dans l'avenir.
Auriez-vous des recommandations particulières que le gouvernement pourrait adopter comme lignes de conduite?
Pour ce qui est de libérer les gares de la propriété des compagnies de chemins de fer et d'en faire des biens désignés par la localité, les gares et les biens ferroviaires échappent entièrement à la loi. Les provinces ne peuvent pas leur attribuer une désignation patrimoniale, les municipalités non plus. Ni même le gouvernement fédéral. C'est pourquoi il est arrivé avec cette loi particulière, qui a créé essentiellement un mécanisme pour faire passer ces édifices entre des mains privées.
En fait, il peut être intéressant de le signaler, lorsque j'étais maire de Kingston, nous avons commencé à émettre des avis de non-conformité aux normes du bâtiment à l'encontre de cette propriété parce qu'elle était laissée à l'abandon. La réponse du gouvernement fédéral, par le biais de sa société d'État, a été: « Nous ne ferons rien parce que nous n'y sommes pas obligés, c'est un terrain fédéral »... Vous voyez le genre.
Je pense qu'il faut resserrer les règles, qui touchent indirectement aussi les silos à céréales, les rotondes et d'autres biens de valeur sur les terrains ferroviaires.
Voilà pourquoi vous avez été élu, pour venir ici régler le problème, n'est-ce pas?
Monsieur Kitchen.
Merci, madame la présidente.
Merci à tous d'être venus. Je vous en suis reconnaissant.
Madame Aird, madame Redfern, je viens du sud-est de la Saskatchewan, le coin sud-est. On compte huit Premières Nations dans ma circonscription. J'ai trouvé intéressant de vous entendre parler d'histoire commune et de réalité commune. Nous avons beaucoup de petits musées là-bas qui essaient justement de montrer cette réalité commune. Vous avez parlé d'aspects et de conception autochtones. À votre avis, comment une circonscription comme la mienne pourrait-elle y prendre part, surtout quand j'entends l'histoire de la Compagnie de la Baie d'Hudson et de ses bâtiments?
C'est intéressant: je suis assise ici à écouter tout le monde parler et je songe à quel point nos points de vue sont différents. Nous parlons de patrimoine bâti et moi, je travaille tous les jours au pensionnat indien de Kamloops. C'est là que se trouve mon bureau. Je travaille avec la nation Secwepemc. Cet endroit-là, c'est du patrimoine bâti. Il revêt des couches de signification pour nous. C'est un lieu de sépulture et l'emplacement d'un ancien village. Il s'y est passé des choses horribles.
Nous sommes là tous les jours et nous constatons l'état des lieux. Le bâtiment tombe en ruine. Il n'y a pas d'argent pour le restaurer, même si on le voulait. Mais nous avons aussi des gardiens de la tradition qui viennent nettoyer, pratiquer des cérémonies, alimenter le feu lorsque quelqu'un meurt, ou pour rendre hommage aux ancêtres, à nos proches disparus, aux anciens. Alors quand je pense au patrimoine bâti et que nous nous demandons aujourd'hui comment avoir une relation mutuelle, la façon dont nous tisserons cette relation et le fait même que nous commencions à en parler sont d'une importance cruciale actuellement. C'est la première fois que Madeleine et moi avons vraiment l'occasion de nous réunir et nous entretenir avec vous tous.
Je ne peux parler au nom des Autochtones de toutes les provinces, mais cette conversation doit avoir lieu à l'échelle nationale, dans toutes les provinces. Voilà par où il faut commencer, sinon je ne suis pas à l'aise de me prononcer sur ce qui doit se passer en Saskatchewan.
Merci.
Monsieur Wiebe, vous parliez des maisons patrimoniales. Lorsque j'était petit, ma mère, une passionnée d'histoire, m'a traîné partout en Angleterre, dans chaque église et chaque lieu historique, si bien que ma connaissance de l'histoire anglaise est assez impressionnante. Mes parents ont fini par acheter une maison patrimoniale à Bath, en Ontario. Elle avait été bâtie aux alentours de 1813 et ils l'ont restaurée du mieux qu'ils ont pu, mais le fait est que cette maison les passionnait. Ils en ont pris soin et ils ont aussi compris qu'ils en assumaient de ce fait la responsabilité.
Comment encourager les gens à faire comme mes parents ont fait, à leurs frais, à même leurs deniers, et à reconnaître à quoi cela les engage?
Je pense qu'il s'agit de reconnaître la valeur publique de ces actes par lesquels on assure la garde et l'intendance de ces précieuses ressources. Une maison historique datant de 1813 est une chose extrêmement rare et il faudrait des mécanismes pour encourager cela, parce qu'il suffit d'un seul propriétaire indifférent pour qu'une telle richesse soit perdue à jamais.
Il n'y a pas beaucoup de mécanismes actuellement pour aider les propriétaires de maisons patrimoniales. En Ontario, il y a bien quelques abattements de taxe foncière qui sont très, très modestes, mais il faudrait d'autres moyens, des leviers pour encourager ces gens-là. Il faudrait aussi, comme le mentionnait M. Smith, des ressources spécialisées pour les aider à prendre les bonnes décisions. Je pense que le gouvernement peut aider du côté financier aussi.
Il ne s'agit pas tant de finances que de motivation. Si nous ne faisons que mettre de l'argent pour les motiver, cela revient à faire porter le fardeau à quelqu'un. Lorsque nous pensons à l'histoire qui se déroule aujourd'hui... Dans 10 ans, dans 40 ans d'ici, les gens vont regarder ce que moi, je considère comme de l'histoire et, vu que les générations évoluent, ils vont penser tout à fait différemment. Alors comment encourager cela, sans y mettre de l'argent?
Il s'agit de le situer dans un contexte plus grand, comme en parlaient Mmes Redfern et Aird et M. Smith. L'important n'est pas de savoir que John A. Macdonald a dormi dans tel immeuble et que c'est la chose à retenir; l'important est que cet immeuble est là et que nous devons mieux prendre soin de ce que nous avons pour assurer la viabilité écologique de notre société. Je crois que nous débordons de 60 % dans notre consommation des ressources de la planète cette année et nous ne pouvons pas vraiment nous permettre...
En situant la sauvegarde du patrimoine et la protection des sites dans le contexte global de l'écologie, d'une utilisation plus réfléchie de nos ressources, je pense que nous interpellerons toute une nouvelle génération capable de s'enthousiasmer pour cette façon neuve que nous aurons d'intégrer les aspects écologiques, culturels et sociaux.
C'était une bonne chose, parce que nous alternons entre vous deux. Chacun...
M. Robert Sopuck: Si j'ai un peu plus de temps...
La présidente: En réalité, vous n'avez pas de temps. Je viens de l'épuiser. Je suis désolée.
Des voix: Oh, oh!
Un député: Ce n'est pas juste.
La présidente: Je suis désolée. Je ne fais rien de différent dans votre cas. Nous aurons probablement plus de temps et nous passerons à une autre série de questions.
Julie.
Je trouve que cette discussion est très intéressante.
Je vais commencer avec vous, madame Aird. Ce que j'entends nous amène au coeur de la définition de la conservation du patrimoine. Je me demandais si vous pouviez en donner une définition. Sinon, quel serait le processus par lequel nous pourrions définir ce concept?
Je peux en parler à la lumière du rapatriement et de la conservation. Dans bon nombre de sociétés autochtones, quand vous parlez de savoirs ou d'éléments communs, ce sont des personnes qui en sont les gardiens. Elles sont responsables de conserver les objets, les vestiges, nos sacs sacrés, nos calumets et de maintenir nos cérémonies. En général, je dirais que bon nombre de ces personnes existent dans une sorte de clandestinité. Elles ne sont pas connues et vous ne les rencontrez pas parce qu'elles ne sont pas politiquement actives. Dans certains cas, elles peuvent être engagées sur le plan politique, mais la plupart du temps, elles sont plutôt actives à l'intérieur du groupe.
Nous avons des mécanismes traditionnels et des méthodes traditionnelles pour préserver les vestiges et prendre soin des objets. Je sais par exemple qu'en ce qui concerne les sacs à médecine des Blackfoot, qui étaient au musée Guggenheim, certaines personnes jouaient le rôle de gardiens de ces objets dans la communauté des Pieds-Noirs. Ces objets sont souvent considérés comme des entités vivantes, si bien que lorsque nous abordons la question de la conservation et de la préservation, je pense vraiment que nous devons examiner les choses avec l'esprit ouvert et une volonté de partage et d'apprentissage. Je pense que la façon dont chaque groupe autochtone au pays voudra aborder la question de la conservation sera unique.
Je sais que le Royal British Columbia Museum s'emploie à rapatrier des enregistrements de langues et de récits oraux ainsi que des restes humains. La plupart des musées en Colombie-Britannique et des universités qui conservent des restes humains retournent ces vestiges et ces objets aux gardiens autochtones et dans nos communautés. Parce que nous devons abandonner cette attitude paternaliste selon laquelle les gens ne savent pas ce qu'ils font. Quand ces objets nous reviennent, des cérémonies ont lieu et nous les conservons selon nos traditions. Souvent, ils sont enterrés de nouveau, mais pas toujours. Parfois, les peuples choisissent de les conserver dans un caveau.
Nous devons vraiment engager cette discussion. Comme je l'ai dit, les tables rondes auxquelles nous avons assisté à Ottawa ont constitué en quelque sorte le début de ces discussions. C'était fascinant, parce qu'un grand nombre de groupes différents ont participé et tous ont exprimé le besoin d'avoir un réel dialogue. Je crois que cette volonté existe à l'échelle du pays. Je pense que les gens sont prêts pour ce dialogue et que les discussions entourant la préservation seront très intéressantes parce que nous allons constater que la situation est différente dans chacune des régions du pays. Je sais que ce sera différent pour la population de Madeleine de même que ce le sera pour les miens. Nous devons gérer le site C, dans le nord de la Colombie-Britannique, où un grand nombre d'objets et de restes humains ont été découverts. Nous avons choisi de conserver certains d'entre eux dans un caveau à Vancouver, dans la région de Burnaby, et nous essayons d'en récupérer d'autres.
Je vous remercie de cette réponse.
Une partie du dernier budget affecté au Patrimoine était consacrée à l'archivage des récits oraux, je crois. Je me demande si ces ressources s'appliquent à la conservation du patrimoine, à la préservation de récits oraux qui feraient partie d'un fonds d'archivage.
Je crois que c'est parfaitement possible et que c'est un défi parce qu'il faut également avoir les ressources pour que ces récits soient racontés à nos communautés, pour les enregistrer et pour donner cette possibilité à nos populations. Il n'y a pas un seul récit, il y a de nombreux récits. Il faut également qu'il y ait un processus pour déterminer l'endroit où ils seront archivés. À l'échelle du pays, il est bien que ce soit à Bibliothèque et Archives Canada, mais le fait est que nous avons très peu de services d'archives qui nous sont propres. Au Nunavut, sauf un établissement gouvernemental, il n'y a pas de services d'archives. Il n'y a rien à l'extérieur du gouvernement. De plus, nous n'avons aucun centre de diffusion culturelle. Ce dont nous parlons, ce sont des histoires vécues, alors quand Karen dit... C'est parfois difficile à expliquer parce que cela ne correspond pas aux concepts ou aux systèmes préexistants et compris dans la société dominante.
Très bien.
J'ai quelques secondes de plus. L'autre fonds dont je veux parler est le Fonds du Canada pour les espaces culturels. M. Wiebe y a un peu fait référence comme une solution qui en exclut une autre en matière de préservation du patrimoine. Je constate que les institutions ou les organisations autochtones sont admissibles et que le fonds concerne « l'amélioration, la rénovation et la construction d'infrastructures artistiques et culturelles ».
Pour vos projets de conservation, avez-vous été en mesure d'avoir accès à un financement du Fonds du Canada pour les espaces culturels?
Je travaille avec nos communautés dans le nord de la Colombie-Britannique, d'où je viens. Le Traité n°8 a permis d'acquérir le site de Charlie Lake. C'est un site vieux de 10 500 ans. C'est l'un des sites les plus importants au Canada et on y retrouve également les premières traces de cérémonies funéraires. Nous en avons fait l'acquisition pour que nos populations puissent l'utiliser, mais nous voulons également y mettre sur pied un centre culturel.
Si vous examinez le Fonds du Canada pour les espaces culturels, vous constatez qu'il y a toutes sortes de critères qui doivent être en place avant de faire une demande. Nous avons fait cette acquisition en 2012. Nous avons réalisé de petits projets et nous avons trouvé le financement, mais nous devons démontrer je ne sans combien d'années de bonne réputation et un état annuel vérifié. Nous devons passer au travers de tellement de failles. C'est très difficile. Finalement, l'utilisation que l'on peut en faire est très limitée.
D'accord.
Nous avons du temps, si bien que je vais donner six minutes à M. Stetski. Cette fois, je vais donner six minutes aux conservateurs et six minutes aux libéraux et par la suite, je reviendrai pendant trois minutes à M. Stetski. Ce qui donne à tous six minutes additionnelles.
Merci.
C'est en quelque sorte une courte question. Est-ce que le gouvernement fédéral devrait créer un organisme patrimonial national distinct pour répondre aux priorités autochtones, ou est-ce que les organismes déjà existants ou les ministères fédéraux en place devraient simplement faire mieux leur travail?
Il faudrait premièrement accorder un financement au Cercle du patrimoine autochtone, parce que nous avons besoin de disposer nous-mêmes des ressources et, à ce moment seulement, nous pourrons commencer à avoir cet important dialogue avec les ministères fédéraux existants. Financer une entité fédérale distincte aurait pour conséquence de détourner les ressources des populations autochtones. Cela reviendrait également à créer un système colonial en même temps qu'une démarche coloniale, plutôt que d'injecter véritablement des ressources dans cette organisation. Même si ce n'est pas nous, le fait est qu'un organisme patrimonial autochtone national doit exister.
Monsieur Wiebe, est-ce que la Fiducie nationale joue actuellement un rôle dans la culture et le patrimoine autochtone?
Oui, c'est le cas. En réalité, au cours des trois ou quatre dernières années, notre conférence nationale et le travail que nous faisons en général ont en grande partie été centrés sur des enjeux de patrimoine autochtone. À Calgary en 2015, nous avons organisé dans le cadre de notre conférence un événement appelé Moh-Kins-Tsis, une table ronde sur le patrimoine autochtone de Calgary. Nous y avons discuté de l'intégration des activités de planification et de l'intégration de la culture autochtone.
Calgary est un exemple très intéressant. Il y existe une interface, un échange entre le savoir culturel autochtone et le bagage culturel européen dans les espaces urbains. Il y a à Calgary ces incroyables couches d'histoire qui ne sont pas vraiment évoquées lorsque la ville se définit généralement.
Nous avons eu nos premières conversations à ce sujet. Cela en plus de certains travaux liés aux séances de consultations que le Cercle du patrimoine autochtone organise. Une autre a eu lieu à Hamilton récemment, où nous avons parlé à... nous avons travaillé avec les groupes des Six Nations et les Mississauga de New Credit et nous avons eu une discussion sur les pratiques de consultation. Nous nous efforçons d'intégrer plus solidement ces pratiques à notre travail.
Ry Moran était conférencier d'honneur lors de l'une de nos conférences l'an dernier et cette année, il y aura une autre table ronde enchâssée dans notre conférence. Je pense que nous avançons assez rapidement.
J'essaie de savoir — et peut-être qu'avec les autres témoins nous y arriverons —, combien d'organismes ou de ministères fédéraux distincts prennent part à un volet de cette discussion sur le patrimoine autochtone et si le fait de rassembler tout cela en un seul endroit ne pourrait pas en réalité être une façon plus efficace de faire les choses. Je ne sais pas si vous avez un point de vue à ce sujet.
C'est sans aucun doute une question intéressante et un dilemme, parce qu'en ce qui nous concerne, quand nous avons fait une évaluation du paysage politique et administratif, il s'est avéré qu'il y a probablement plus de ministères que vous ne le pensez qui jouent un certain rôle ou qui sont responsables d'un certain aspect du dossier, mais qui n'en sont même pas conscients. C'est ce que nous trouvons choquant.
Si vous avez une propriété fédérale, cela relève d'un secteur et de même pour tout ce qui relève de l'innovation, du développement économique et des technologies. Ces éléments sont tous présents dans nos communautés, mais on ne pense pas souvent à même nous inclure dans ces conversations. Ce qui arrive le plus fréquemment quand nous découvrons quelque chose, c'est que nous devons presque sauter de joie et crier « oh là, oh là, oh là, vous nous avez oubliés. Où nous situons-nous dans ces conversations sur le développement économique, la science, la technologie ou l'innovation? »
En ce qui concerne le spectre plus large, les communautés et l'infrastructure, ce qui se passe habituellement, c'est que tout est relégué à un seul ministère, disons Affaires autochtones et du Nord Canada. C'est la même chose s'il s'agit de Patrimoine canadien. Il y a très peu d'ouverture vers le point de vue ou le processus holistique.
Je mets aussi en garde contre ce qui pourrait arriver; nous pourrions bénéficier simplement d'un petit ajout plutôt que d'une approche qui affirmerait « Ayons une nouvelle façon de penser et une nouvelle façon de faire les choses ».
Est-ce le fruit de vos observations prennent la forme d'un rapport écrit que vous pourriez partager avec le comité...
Ce serait formidable.
J'ai une brève question pour vous, monsieur Smith. Avez-vous dit que le crédit d'impôt devrait porter seulement sur les propriétés générant des revenus ou ne devrait pas les oublier lorsque nous examinons le projet de loi C-323?
Je dirais simplement que l'accent devrait être mis sur les propriétés générant des revenus. Je ne connais pas avec précision les visées du ministère des Finances à ce sujet. Je veux simplement dire que les propriétés à revenus, d'après mon expérience, permettent d'obtenir le meilleur rendement du capital investi. Si une personne possède une maison privée et qu'elle la transforme en gîte touristique, elle n'est pas admissible, mais cela lui permet de devenir un espace semi-public et d'en partager les bénéfices. Je ressens certaines inquiétudes à l'idée d'inclure une propriété résidentielle strictement privée dans cette catégorie.
Merci.
Madame Redfern, j'ai été très frappé par la description éloquente que vous avez faite de la chasse à l'ours polaire et de la relation entre cette chasse et la préservation de la culture. Un jour, j'aurai les moyens de l'expérimenter moi-même.
Encore une fois, cela s'adresse aux députés du gouvernement qui siègent au comité. Parce que la question des ours polaires est un sujet très controversé en vertu de la Loi sur les espèces en péril et de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction, je pense que nous devons prendre le parti des Inuits dans ce dossier. Nous devons soutenir sans équivoque la chasse aussi vivement que nous le pouvons et combattre les forces qui font tout pour que cette culture disparaisse, parce que c'est ce que l'on fait largement. C'est une belle réussite. Continuons.
J'aimerais citer le témoignage de M. Peter Williamson, qui a pris la parole lors des audiences du Comité permanent des affaires autochtones sur les taux de suicide. C'est en relation avec la culture, le territoire et la vie sauvage. Il a dit:
Je voudrais aborder deux ou trois questions qui peuvent, je crois, faire une grande différence. La première, c’est que je me suis rendu compte que le nombre de jeunes gens qui se suicidaient a augmenté lorsque leurs parents, leurs tantes, leurs oncles et leurs grands-parents ne pouvaient plus aller chasser. Parce que vivre selon le mode de vie traditionnel et être élevé dans une communauté, dans une famille, où on suit le mode de vie traditionnel, ça, ça fait vraiment une différence. Nous avons commencé à perdre ça dans les années 1970. Dans les années 1980 aussi, mais ça a commencé dans les années 1970. Après cela, le nombre des suicides a augmenté.
Il y avait ce qu’on appelait à l’époque les guerres du phoque. C’est quand Greenpeace et les autres organisations activistes de protection de l’environnement ont commencé à s’en prendre à l’industrie du phoque dont faisaient partie les Inuits. Pour eux, chasser le phoque était vraiment une question de survie.
Il a fait le lien évident entre la fierté de conserver une culture et le fait de subvenir aux besoins de sa famille d'une manière durable, mais également, je pense, le lien consternant avec ces riches groupes extérieurs qui essentiellement, même sans le dire, font tout pour détruire une culture.
Pouvez-vous faire des commentaires sur cet épisode particulier et la façon dont vous voyez cela?
C'est une question très compliquée et chargée de sens dans la mesure où nous désirons, à juste titre, être autosuffisants et faire nos propres choix, surtout s'ils sont viables et que la science appuie cette chasse. Ces activités sont, de toute évidence, d'importants rites de passage qui s'incarnent dans la capacité de subvenir à ses besoins, de pourvoir aux besoins de sa famille et de sa collectivité et dans la nourriture qui provient de cette chasse. Et on ne parle pas seulement de nourriture, mais du lien et de la relation spirituelle qui découlent de la possibilité d'aller sur le territoire et de partager ce savoir et cette tradition avec nos enfants. Y sont rattachés un grand nombre de récits et de légendes, de connaissances environnementales, de science et de technologie. Sans aucun doute, c'est l'incarnation d'une façon d'être et une partie de notre identité.
Comme c'est relié au patrimoine, c'est encore une fois très difficile de... C'est une activité globale, une partie intégrante de notre patrimoine. Le type de relations que nous avons entre nous et le transfert de nos savoirs et de nos compétences font partie de notre patrimoine. Il y a beaucoup de travail à faire pour faire comprendre non seulement aux Canadiens, mais aux autres aussi, que tant que c'est durable...
Je reviens à la définition de la commission Brundtland. Les valeurs peuvent être différentes. Ces valeurs peuvent s'incarner de façon différente. Nos cultures sont différentes. Et finalement, que ce soit en vertu de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones ou simplement des droits fondamentaux des Nations Unies, nous devons respecter ces différences, les accepter et les célébrer.
Oui: voilà qui est très bien dit. J'ai eu l'occasion dans une vie antérieure de participer à une chasse au caribou chez les Inuits avec la famille Netser de Coral Harbour, que vous connaissez sûrement. Parce que j'étais jeune et fort à ce moment et que j'étais capable de transporter le quart d'un caribou, ils m'ont appelé «Pungkik». Je suis très fier de mon surnom inuit. J'ai vérifié auprès de suffisamment de personnes pour savoir que c'est un compliment. Sachant ce que je connais au sujet de l'humour autochtone, j'ai pensé au début que l'on faisait allusion à l'extrémité nord d'un caribou orienté au sud, mais il s'est avéré que ce n'était pas un mauvais nom.
Des voix: Oh, oh!
M. Robert Sopuck: De toute façon, j'ai beaucoup apprécié la réponse éloquente que vous avez faite. Vous pouvez être assurée que, de ce côté-ci de la table, nous défendrons, jusqu'au bout, vos droits de chasser le phoque et votre capacité de vous assurer que la chasse à l'ours polaire se poursuive.
Merci.
Merci.
Monsieur Smith, vous avez parlé du Code national du bâtiment et des changements indispensables qui, croyez-vous, devraient y être apportés. Pour être honnête, je n'ai pas vraiment envisagé l'idée d'entreprendre cette étude. Au moins en Ontario, la section 5 du code du bâtiment porte expressément sur la restauration. L'un des défis de ceux qui restaurent une propriété est de respecter le code actuel. La section 5 traite par exemple d'isolation. Si vous isolez un mur extérieur, et que vous n'avez pas assez d'espace pour obtenir une résistance de R-24, mais que vous pouvez obtenir une valeur de R16, vous améliorez la situation et c'est une bonne chose parce que le bâtiment est en meilleur état qu'il ne l'était auparavant.
Je ne sais pas si le Code national du bâtiment traite de ces questions. Je connais seulement le Code du bâtiment de l'Ontario. Pouvez-vous dire quelques mots concernant le type de changements que vous recherchez et si la question a été abordée? Sinon, comment y remédier?
La raison pour laquelle il nous faut examiner le code national du bâtiment, selon moi, c'est que l'on peut toujours débattre des règlements... on réunit un comité de dérogation et on les adapte, mais on ne remet pas en question le code national ou les codes provinciaux du bâtiment. Ils ont force de loi. Il existe un film de l'ONF intitulé Still Mine qui est un commentaire sur les codes du bâtiment. Il aborde un certain nombre de problèmes.
Vous avez raison; l'Ontario et la Colombie-Britannique, chacune à sa façon, ont ajouté des articles au code national du bâtiment, lors de son adoption par la province, pour essayer de prendre en compte le caractère unique des lieux existants. De plus en plus, les communautés d'immigrants apportent toutes sortes de modes de vie différents au Canada, que le code national du bâtiment ne reflète pas. Par exemple, les chambres doivent être d'une certaine taille. Le code national du bâtiment n'approfondit pas la réflexion sur une utilisation mixte. Nous devrions y réfléchir. Si vous voulez une petite chambre à coucher, pourquoi le code national du bâtiment devrait-il vous empêcher de l'avoir? Cela ne permet-il pas d'avoir des maisons plus petites, ce qui est plus durable?
Le code national du bâtiment vient des années 1950. De cette idée que nous faisons ces boîtes à notre mesure et que nous construisons des maisons de banlieue. J'ai travaillé avec une communauté des Premières Nations au Yukon. La communauté voulait construire des maisons en rondins et la SCHL l'en empêchait. Elle disait que d'après le modèle théorique, elles ne fonctionnaient pas aussi bien. Eh bien, le modèle théorique peut fonctionner quand on parle d'une ossature murale garnie d'isolant, mais dans le nord, ça ne fonctionne pas très bien.
Le Comité fait une telle fixation sur la protection et la défense du code national du bâtiment tel qu'il existe...
Pour être juste, une partie a pu être construite sur la base de... Si l'on autorise les toutes petites chambres, on risque que les propriétaires se mettent à en construire à seule fin de maximiser leur profit. Comment maintenir un équilibre?
C'est précisément le problème, mais c'est là où cette approche de haut en bas partant de l'idée que les experts eux savent et que tout le monde doit suivre les règles qu'ils édictent... C'est pourquoi la CAMO existe en Ontario. Je pense qu'elle n'en a plus pour longtemps...
... et c'est une bonne chose. Nous vivons dans une structure des années 1950. Comme vous l'avez dit, les Premières Nations n'existent même pas dans cette grille. Elles sont invisibles. Nous devons reprendre à zéro certaines de ces choses, et le code national du bâtiment en fait partie.
Si vous allez à ce comité, vous verrez que ce sont principalement des représentants de l'industrie qui vendent le genre de produits qui ont été utilisés à Londres pour ce gratte-ciel qui a entièrement brûlé. Ce n'est pas un bon endroit pour obtenir...
Merci.
C'est la deuxième semaine de notre étude. L'une des questions que je me pose est de savoir quelle répartition des ressources finies, dont nous espérons hériter, nous allons recommander au gouvernement? En quoi consiste le gâteau à partager? Le patrimoine immobilier du gouvernement fédéral constitue l'une des parts: les sites historiques nationaux, les bâtiments classés au patrimoine fédéral. Cela concerne des sites désignés par le gouvernement fédéral, l'ensemble des lieux historiques nationaux, d'autres appartenant à des tiers et gérés par eux. Il y a le rôle d'intendance du gouvernement fédéral, la collection de propriétés inscrites au registre fédéral du patrimoine.
De nouvelles initiatives se font jour, concernant toute cette question du patrimoine autochtone et de la politique à suivre en la matière. Ensuite, il y a l'autre grosse partie. On va dépenser des milliards de dollars dans l'aménagement du complexe parlementaire au cours des dix prochaines années. J'ai bien peur que le gouvernement fédéral ne nous dise simplement: « Là, nous avons dépensé tant de milliards de dollars, voici la facture », alors que nous pourrions être à l'ouvrage un peu partout au pays sur un ensemble de chantiers concrets.
Pourriez-vous, dans les secondes qui restent, nous faire part de vos idées là-dessus? Comment partager ce gâteau pour optimiser l'impact sur la collectivité?
Monsieur Smith, allez-y.
J'étais responsable du plan directeur pour la réhabilitation des édifices du Parlement à Toronto. J'ai travaillé avec un comité de cinq députés, qui assuraient la direction d'ensemble. Je suis étonné que l'on s'apprête à lancer une rénovation de 2,5 à 3 milliards de dollars de l'édifice du Centre sans en avoir confié la direction à un comité de parlementaires et sans représentation des Premières Nations. Pourquoi devrions-nous dépenser autant d'argent pour avoir au bout du compte des édifices du Parlement qui ne redonneraient pas aux Premières Nations leur place dans le Canada et notre identité, telle qu'elle s'exprime sur la Colline?
Ce projet me tracasse vraiment. Je pense qu'il est contrôlé par un petit cénacle des Travaux publics, et que Travaux publics obtiendra environ 1 milliard de dollars de ce budget pour soi-même, juste pour l'administrer.
C'est là un énorme problème, je dirais. Les parlementaires devraient prendre en charge ce projet, comme ils l'ont fait en Ontario. Ils ont contourné leur service des travaux publics et nous ont engagés en tant que consultants pour faire rapport au Parlement, ce que la Chambre des communes pourrait faire, et le Sénat et la bibliothèque ensemble. Je n'en dirai pas davantage là-dessus.
Sinon, je pense qu'il est beaucoup plus important que le gouvernement fédéral ne se focalise pas uniquement sur ses biens patrimoniaux — j'ai mis en place le programme des édifices fédéraux du patrimoine, il y a 30 ans —, mais qu'il revoie sa politique d'occupation des bâtiments en tenant compte de l'effet d'entraînement que les dépenses de fonds publics ont sur toutes sortes d'autres initiatives un peu partout au pays. C'est là que le rôle des autorités fédérales a été le plus important aux États-Unis. Chaque ministère fédéral doit, d'abord, se soucier de se loger soi-même quelque part... plutôt que d'avoir Parcs Canada dans Les Terrasses de la Chaudière. C'est ridicule, lorsque ces propriétaires prennent le risque et créent des biens patrimoniaux qu'ensuite aucun responsable d'une agence gouvernementale n'est disposé à prendre en location. C'est à cela qu'il faudrait réfléchir.
On a posé la question à d'autres députés. Le Comité souhaite-t-il prendre un petit peu plus de temps et entendre les deux autres? On a l'horloge sous les yeux. Cela vous va? C'est une problématique qui intéresse tout le monde?
Alors entendons ce qu'ils ont à nous dire.
Ce que la plupart des Autochtones ne verraient pas d'un très bon oeil, je crois, c'est qu'on se contente de la pratique habituelle, en guise d'inclusion des Autochtones, consistant à mettre quelques oeuvres d'art dans les bâtiments et rien de plus, ou une inscription rédigée par des non-Autochtones évoquant notre patrimoine.
Quant à savoir comment répartir entre nous les programmes et le financement disponibles, nous représentons bien 4 % de la population, mais je ne pense pas que nous obtenions jamais 4 % des fonds. Je peux vous dire, depuis quelques années — Karen l'a déjà dit à plusieurs reprises — nous avons offert notre temps. Vous savez sans doute que la plupart du temps en dehors de nos propres communautés autochtones nous avons le plus grand mal à nous faire entendre pour pouvoir participer. Et lorsqu'on daigne nous laisser participer, on ne pense jamais à nous accorder le moindre subside pour ce faire.
À ce stade, tout serait mieux pour nous que le statu quo actuel.
Il serait intéressant, je pense, de lancer un programme vraiment ambitieux avançant progressivement sur tous les fronts. Ne pas le faire serait, selon moi, rater une occasion. On nous dit que le gouvernement fédéral doit d'abord mettre de l'ordre dans la gestion de ses propres biens patrimoniaux ou des sites historiques nationaux appartenant à Parcs Canada et aux autres ministères. Mais, à mon sens, les sites historiques nationaux non fédéraux ont besoin d'un financement élargi sous une forme ou une autre.
Quelque chose comme un crédit d'impôt ou une autre modalité de financement capable de toucher les collectivités canadiennes dans l'ensemble du pays, aurait un énorme impact et constituerait une initiative intéressante de la part du gouvernement fédéral. De toute évidence, celui-ci fait preuve d'initiative dans la gestion de ses propres sites emblématiques dans tout le pays, mais il convient, je crois, de creuser cette idée d'un crédit d'impôt qui lui permettrait de renforcer son rôle et son soutien à ce type d'activités à travers le pays. Voir le gouvernement soutenir ce genre de développement apparaîtrait comme un changement radical et amènerait bien des gens à changer d'optique. La façon de penser le développement s'en trouverait changée, je pense, ainsi que la façon de penser des gens.
Merci pour votre contribution.
Merci au Comité d'avoir eu la patience d'entendre tout le monde.
Vous avez trois minutes, monsieur Stetski, puis nous en aurons terminé.
Merci.
Merci. Je suis désolé, je ne connais pas la structure du conseil d'administration de Fiducie nationale du Canada, mais à titre de pratique générale, le gouvernement fédéral ne devrait-il pas exiger de toute organisation recevant des subsides fédéraux qu'elle nomme des Autochtones au sein de leur conseil d'administration? Je ne sais pas quelle est la situation actuelle concernant Fiducie nationale du Canada.
Vous avez des Autochtones au sein de votre conseil d'administration actuellement?
Oui. Notre vice-présidente est Lorna Crowshoe. Elle est de la nation Blackfoot de Calgary.
Fiducie nationale du Canada a bénéficié d'une dotation lors de son lancement en 1973, mais maintenant on ne reçoit aucun fonds du gouvernement fédéral. Il importe que toutes les organisations comptent des membres des Premières Nations, des Métis et des Inuits dans leur conseil d'administration. Le nôtre compte maintenant un nouveau membre, M. Suluk du Nunavut, qui siégera cette année. C'est important, je pense...
Qu'en est-il de la pratique générale? Est-ce que s'assurer qu'il y a des Autochtones dans tous les conseils du patrimoine que le gouvernement fédéral finance serait considéré comme faisant partie de la réconciliation?
C'est indubitablement un premier pas, mais un premier pas seulement. Je reconnais, ayant siégé au sein de plusieurs organisations nationales ou ONG, où j'étais souvent le seul Autochtone, que c'est un défi d'essayer d'influer sur une mentalité ou une culture profondément ancrée au sein de l'organisation, même au niveau de la gouvernance. Le gros du travail et les tâches quotidiennes sont prises en charge par le personnel, et les Autochtones sont sous représentés dans l'ensemble de l'organisation. Vous n'êtes souvent qu'un sur... Il arrive que le conseil compte une douzaine de membres et ils ont tendance à continuer à fonctionner de la même façon qu'auparavant.
J'ai siégé au sein de pas mal de conseils. C'est un pas dans la bonne direction; je suis d'accord, mais il nous faut aller plus loin, parce qu'il ne suffit plus aujourd'hui d'avoir seulement une voix. Les gens doivent apporter des changements, des changements systématiques. Mon expérience des conseils m'a enseigné que la tâche était au-dessus de mes forces. On ne peut jamais donner assez de soi-même et cela empiète bien souvent sur le travail concret que l'on s'efforce de mener dans nos communautés.
La difficulté, c'est que si on sensibilise les gens à la perspective et à la culture autochtone, ce qui est très bien et très bénéfique, cela nous enlève à notre véritable travail, à ce que nous essayons de faire. Si l'on va à toutes les conférences où se fait ce travail d'éducation des gens, on ne peut plus protéger ces domaines dans nos communautés et travailler vraiment. C'est ce qui arrive à nos dirigeants et à tout le monde.
Merci beaucoup.
J'apprécie vraiment que vous ayez pris sur votre temps pour venir partager avec nous votre sagesse. Vous nous avez donné ample matière à réflexion et l'on commence à entrevoir quelles recommandations pourraient, espérons-le, faire avancer les choses.
Avant de mettre fin à la réunion, je veux simplement informer les gens que mardi prochain, nous recevrons le commissaire à la première heure. Je souhaite vivement que vous soyez tous présents. Ce serait une excellente chose. Ensuite, notre réunion se tiendra à 15 h 30. Il y a donc un changement d'horaire.
De plus, jeudi, nous aurons une réunion de sous-comité. Cela concerne John Aldag, Mike et M. Fast. Elle aura lieu de 15 h 30 à 17 h 30, parce que Mike a une réunion de comité juste après cette réunion. Nous ne pouvons pas avoir de sous-comités directement après cette réunion-ci, comme à l'accoutumée, parce que Mike ne peut pas être là.
J'espère que cela marche pour vous les gars, le jeudi. D'accord? Parfait.
Merci beaucoup.
La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication