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Bienvenue à la réunion n
o 42 du Comité permanent de la science et de la recherche.
La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride, conformément à l'ordre de la Chambre adopté le jeudi 23 juin 2022. Les députés peuvent participer en personne ou avec l'application Zoom.
J'aimerais d'abord transmettre certaines consignes aux témoins et députés
En ce qui concerne l'interprétation, pour ceux qui sont sur Zoom vous avez le choix, au bas de votre écran, entre le parquet, l'anglais ou le français. Pour ceux qui sont dans la salle, vous pouvez utiliser l'écouteur et choisir le canal désiré.
Je vous rappelle que toutes les observations doivent être adressées à la présidence.
Conformément à l'article 108(3)i) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mardi 14 février 2023, le Comité entreprend son étude sur les programmes des bourses d'études supérieures et des bourses postdoctorales du gouvernement du Canada.
Notre premier groupe compte trois témoins qui auront chacun cinq minutes pour faire une déclaration liminaire, avant les séries de questions de la part des députés des différents partis ici présents.
Pour nos cinq premières minutes, de l'Alliance canadienne des associations étudiantes...
Je cède la parole à Ben Lobb.
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Merci, monsieur le président. Je serai bref.
J'ai simplement un commentaire à l'intention du Comité qui découle des événements de la dernière réunion et de la réunion du sous-comité. Je veux rendre compte publiquement. Je ne sais pas ce que mes collègues en pensent. Ils n'ont pas à dire quoi que ce soit à ce sujet maintenant s'ils ne le souhaitent pas. Je tiens simplement à le consigner au compte rendu.
Je préférerais qu'il n'y ait pas de réunions de sous-comités pour discuter des futurs travaux du Comité. Peut-être s'il s'agit de programmation, peut-être pour des questions de calendrier, mais pour les détails de ce qui sera étudié et à quel moment, je pense que tous les membres du Comité devraient pouvoir prendre part à la discussion. Lors des réunions précédentes, cette façon de faire a bien fonctionné.
Je remarque que quelques membres de notre comité régulier sont absents, nous pourrons donc en discuter plus tard. Je tenais à le dire publiquement. J'aime toujours entendre les commentaires de tous les autres membres sur ce qu'ils pensent, au lieu que l'on me relate ce qui s'est dit et comment nous allons procéder.
C'est tout.
Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité et mesdames et messieurs les témoins.
J'aimerais commencer ma déclaration en reconnaissant que nous nous réunissons sur le territoire de la nation algonquine Anishinabe.
Je m'appelle Mackenzy Metcalfe. Je suis la directrice générale de l'Alliance canadienne des associations d'étudiants, l'ACAE. Nous sommes une organisation non partisane et sans but lucratif qui représente les étudiants des collèges, des écoles polytechniques et des universités d'un océan à l'autre. Grâce à notre partenariat officiel avec l'Union étudiante du Québec, nous sommes un porte-parole national de confiance des étudiants, représentant collectivement 365 000 étudiants à travers le pays.
D'emblée, j'aimerais remercier le Comité d'avoir reconnu l'importance des étudiants dans le cadre de son étude des bourses d'études supérieures et postdoctorales du gouvernement du Canada.
Le lundi 1er mai, des milliers d'étudiants de cycle supérieur ont quitté leur campus universitaire dans 45 établissements pour appuyer l'augmentation du financement des subventions des trois conseils pour les chercheurs de cycle supérieur et postdoctoraux. Les étudiants veulent étudier au Canada. Ils veulent rester au Canada et y faire carrière. Ils veulent contribuer à l'écosystème de la recherche au Canada. Les étudiants canadiens utilisent les bourses des trois conseils comme point d'entrée dans cette recherche. Cependant, sans investissements accrus dans ces bourses, de nombreux étudiants ne peuvent tout simplement pas se le permettre.
Aujourd'hui, l'ACAE demande au gouvernement de soutenir la recherche canadienne en augmentant la valeur et le nombre des bourses disponibles et en réservant par voie législative des sièges pour les étudiants au sein de chacun de ces conseils d'administration.
Les programmes de bourses d'études supérieures et postdoctorales du gouvernement du Canada stimulent la science et l'innovation qui permettent au Canada de rester compétitif à l'échelle mondiale. Sans le travail des étudiants de cycle supérieur, la recherche et le développement au Canada s'arrêteraient. Plus précisément, les programmes dont il est question aujourd'hui, mis en oeuvre par les trois conseils, offrent des bourses de recherche financées par le gouvernement aux étudiants de cycle supérieur qui aident le Canada à maintenir le Canada à la fine pointe de l'industrie. Bien que je ne sois pas moi-même étudiante de cycle supérieur, des étudiants de cycle supérieur m'ont dit à quel point ce financement est important, car il crée souvent un précédent pour les meilleurs chercheurs de cycle supérieur du Canada et la rémunération accordée à d'autres dans le domaine pour leur travail.
Ces étudiants travaillent à temps plein comme chercheurs et leurs bourses constituent leur principale source de revenus pour payer leur loyer, les frais de garde d'enfants, l'épicerie et d'autres dépenses. Souvent, ces étudiants n'ont pas le droit d'avoir un autre emploi, car leur attention est et doit être entièrement concentrée sur leur recherche. Cependant, malgré l'immense valeur que ces chercheurs apportent au Canada, le financement que le gouvernement accorde pour les bourses d'études supérieures les plus prestigieuses représente moins que le salaire minimum dans de nombreuses régions du pays. La valeur des bourses d'études supérieures des trois conseils du Canada n'a pas changé depuis 2003, bien que l'inflation ait augmenté de 48 % sur la même période. Compte tenu de la valeur actuelle de ces bourses, des chercheurs aspirent à étudier à l'étranger, non pas parce qu'ils le souhaitent, mais parce qu'ils n'ont pas d'autre choix.
D'autres pays prennent des mesures pour attribuer à leurs chercheurs les fonds nécessaires à la recherche de pointe. Le CHIPS Act des États-Unis a plus que doublé l'engagement du fonds national pour la science sur une période de cinq ans et a augmenté de 50 % le nombre de bourses de recherche de cycle supérieur.
Chaque étudiant-chercheur qui choisit d'étudier à l'étranger pour obtenir un meilleur financement de sa recherche aux États-Unis, en Europe ou ailleurs est un futur innovateur, entrepreneur ou titulaire d'une chaire de recherche au Canada qui est perdu.
Soyons clairs. Le gouvernement actuel a fait de nombreux investissements pour les étudiants: il a supprimé les intérêts sur les prêts d'études canadiens, augmenté les montants des bourses d'études canadiennes et fait des investissements pour des projets ciblés dans les sciences et les trois conseils dans les budgets précédents. Cependant, même les investissements antérieurs dans la recherche canadienne n'ont pas filtré jusqu'aux poches des chercheurs de cycle supérieur qui gagnent le même salaire depuis 2003. Une bonne science nécessite les meilleurs chercheurs, et les meilleurs chercheurs méritent de toucher un salaire équitable pour leurs recherches de pointe.
Cela m'amène à la fin de mon intervention, mais je souhaite rappeler brièvement nos recommandations.
Premièrement, augmenter le financement des programmes de bourses d'études supérieures et de bourses postdoctorales du gouvernement du Canada afin de rémunérer les étudiants pour leur travail.
Deuxièmement, doubler simultanément le nombre de bourses accordées dans le cadre de ces programmes.
Troisièmement, réserver par voie législative un siège aux étudiants dans chacun des conseils d'administration pour garantir que les points de vue des étudiants sont toujours pris en compte dans les décisions futures des trois conseils.
Au nom de nos membres, à l'ACEA, je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'exprimer aujourd'hui et j'ai hâte de répondre à vos questions.
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Bonjour à tous. Je vous remercie de m'offrir l'occasion de m'exprimer.
Je vous parviens de Terre-Neuve-et-Labrador. L'île de Terre-Neuve est le territoire ancestral non cédé des Béothuks et des Micmacs, et nous reconnaissons que le Labrador est la patrie traditionnelle et ancestrale des Innus de Nitassinan, des Inuits de Nunatsiavut et des Inuits de NunatuKavut.
Je vous remercie de me permettre de prendre la parole. Je suis très nouvelle dans ce rôle, mais je suis la coordonnatrice des campagnes pour le caucus national des étudiants de cycle supérieur, qui représente tous les étudiants de ces niveaux au Canada.
J'aimerais soulever quelques points, notamment la pauvreté à laquelle les étudiants sont confrontés: 71 % des étudiants de cycle supérieur vivent sous le seuil de la pauvreté, et un étudiant de cycle supérieur sur trois vit avec moins de 1 250 $ par mois. C'est incroyablement peu et cela crée beaucoup de difficultés et d'obstacles pour les étudiants qui veulent mener à bien leurs recherches et vivre leur vie.
Le 1er mai, comme Mme Mackenzy l'a dit, des milliers d'étudiants de cycle supérieur, de boursiers postdoctoraux, de professeurs, de membres du personnel et de sympathisants de la collectivité à travers le Canada sont sortis de leurs établissements universitaires pour exiger une augmentation des investissements fédéraux dans les bourses d'études, les bourses de recherche et les subventions afin de financer l'augmentation des salaires des étudiants de cycle supérieur et des boursiers postdoctoraux. Bien que je ne sois pas moi-même une étudiante étrangère, je tiens à recommander qu'il est extrêmement important de créer un financement substantiel pour permettre aux étudiants de cycle supérieur de poursuivre leurs études sans le stress de se demander s'ils pourront payer leurs dépenses quotidiennes. De nombreux étudiants n'ont pas accès aux fonds fédéraux et provinciaux, et nous aimerions qu'ils y aient accès.
Nos recommandations sont énoncées à la section 4 de notre mémoire prébudgétaire. Nous voulons étendre l'admissibilité aux bourses d'études canadiennes aux étudiants de cycle supérieur, ce qui pourrait coûter 25 millions de dollars par an.
Nous recommandons d'envisager la création de bourses de recherche réservées aux étudiants autochtones et étrangers. Comme je l'ai dit, elles ne sont pas suffisantes, c'est pourquoi nous aimerions qu'environ 30 millions de dollars par an y soient consacrés.
Nous aimerions augmenter de 48 % la valeur des bourses d'études supérieures et postdoctorales accordées par les trois conseils pour compenser l'inflation depuis 2003, surtout pour les bourses d'études postdoctorales.
Nous souhaiterions que la valeur de toutes les bourses soit indexée en fonction de l'indice des prix à la consommation, ce qui garantirait que les montants soient compétitifs à l'échelle internationale et qu'ils augmentent avec le coût de la vie.
Nous recommandons de doubler le nombre de bourses postdoctorales accordées par les trois conseils. Leur coût s'établit à 51 millions de dollars en 2023 et nous aimerions qu'il soit doublé.
Nous aimerions que le nombre de bourses d'études supérieures accordées par les trois conseils augmente de 50 %. Nous aimerions également voir cette augmentation.
On m'a fait savoir que le dernier budget ne parle pas du tout des étudiants de cycle supérieur, en particulier en ce qui concerne la recherche ou les sciences. Comme le gouvernement s'est dit ouvertement favorable à cette recherche, et à la recherche en général, nous attendons du gouvernement qu'il agisse de manière à accroître la recherche au Canada et à créer une meilleure expérience pour les étudiants.
Je vous remercie beaucoup de m'avoir offert cette occasion. J'ai hâte moi aussi de répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie également le Comité de son invitation.
Je m'appelle Samy-Jane Tremblay et je suis présidente de l'Union étudiante du Québec. L'UEQ représente plus de 91 000 étudiants de niveau universitaire partout au Québec, dont plus de 25 000 étudiants aux cycles supérieurs. L'UEQ a un partenariat avec l'Alliance canadienne des associations étudiantes. Ensemble, elles représentent plus de 365 000 étudiants partout au Canada. L'UEQ et l'Alliance appuient l'organisation Soutenez notre science, qui vise à promouvoir un plus grand financement aux étudiants de cycles supérieurs. Le 1er mai dernier, nous avons participé à une marche aux côtés d'étudiantes et d'étudiants sous-financés pour soutenir cette cause.
Comme vous le savez, aucun investissement n'a été fait pour augmenter le montant des bourses depuis 2003. Pourtant, la recherche sans étudiantes et sans étudiants est tout simplement impossible.
Présentement, nous nous retrouvons dans une situation critique. Le Canada est le seul pays du G7 à avoir réduit ses investissements en recherche et en développement depuis 20 ans. Pourtant, d'autres pays ont compris qu'il s'agit d'une priorité et se sont fixé des cibles ambitieuses en matière de recherche.
Le rapport du Comité consultatif sur le système fédéral de soutien à la recherche, c'est-à-dire le rapport Bouchard, qui a été déposé récemment, exposait que l'Allemagne prévoit porter ses investissements en recherche à 3,5 % de son PIB d'ici 2025, et la Finlande à 4 % de son PIB d'ici 2030. Le Canada, de son côté, se situe à 1,6 % de son PIB. C'est nettement insuffisant pour faire face à la concurrence sur la scène internationale. Le rapport Bouchard l'explique bien: le financement de la recherche n'a pas suivi le rythme des pressions qui s'exercent depuis 20 ans.
En plus de la concurrence à l'international, il y a une croissance de la taille et des activités du système de recherche. Selon la Banque du Canada, entre 2003 et 2023, l'inflation a augmenté de 50,63 %. Pourtant, le montant des bourses, de son côté, n'a pas augmenté depuis 2003, alors qu'il devrait être indexé au coût de la vie, comme c'est le cas en Australie. Le nombre de bourses devrait aussi être revu à la hausse pour soutenir davantage le bassin de la relève scientifique qui est bel et bien présent partout au pays.
L'heure est grave. Le Canada a du retard en matière de recherche, de science et d'innovation. Il ne considère pas cette question comme une priorité, alors qu'il le devrait. On parle ici de l'avenir de notre pays et du travail à réaliser pour résoudre les grands défis de société. En n'investissant pas dans la relève scientifique, le Canada encourage une fuite de ses cerveaux et perd ainsi de grands talents, et ce, il faut le rappeler, dans un contexte de pénurie de main-d'œuvre qualifiée.
Pour remédier à la situation et pour faire face aux pressions constantes qu'on vit présentement, la solution est simple. Il faudrait mettre en pratique le rapport Bouchard et investir de manière massive en recherche et en développement. Pour ce faire, il faut non seulement hausser le montant et le nombre de bourses pour les étudiantes et étudiants, mais également augmenter les subventions qui permettent de soutenir une majorité d'étudiants aux cycles supérieurs.
Un autre problème qui a été exposé, cette fois par le rapport Naylor de 2017, est le fait que la durée du financement actuel ne correspond pas à la durée réelle des études. Pour vous donner une idée, les organismes subventionnaires fédéraux accordent des bourses à la maîtrise d'un an, alors qu'une maîtrise prend au moins deux ans à compléter. Pour le doctorat, les étudiants reçoivent une bourse de trois ans, alors qu'un doctorat prend au moins quatre ans à compléter. C'est une situation qui pose problème, parce qu'on ne finance pas les étudiants en fin de parcours, et ils en ont besoin. À ce moment-là, les étudiants vont devoir trouver des sources de financement alternatives ou retarder l'obtention de leur diplôme, voire abandonner leur projet d'étude et de recherche. À titre de comparaison, les organismes subventionnaires québécois des Fonds de recherche du Québec financent la maîtrise pour deux ans et le doctorat pour quatre ans. Nous invitons le Canada à appliquer la même mesure, qui est beaucoup plus réaliste.
Si on parle de défis qui concernent la population étudiante, il est important que celle-ci puisse exprimer son point de vue sur les décisions qui sont prises. Présentement, les trois conseils subventionnaires fédéraux ne réservent aucun des sièges de leur conseil d'administration à la population étudiante, contrairement à ce qui est fait au Québec. En effet, les conseils d'administration des Fonds de recherche du Québec et du comité intersectoriel étudiant de Rémi Quirion, le scientifique en chef du Québec, réservent des sièges à la population étudiante pour qu'elle puisse exprimer son point de vue. Nous invitons donc le Canada à modifier les lois qui régissent les trois organismes subventionnaires fédéraux pour que des sièges soient attribués et réservés à la population étudiante, lui permettant ainsi de faire entendre ses préoccupations et d'exprimer son point de vue.
En terminant, je tiens à rappeler que les contributions des étudiantes et des étudiants aux cycles supérieurs et des postdoctorants sont considérables. L'avenir de notre pays va dépendre des investissements qui seront faits en recherche et en développement. Pour attirer et retenir les meilleurs talents, le Canada doit en faire sa priorité, comme le font d'autres pays.
Je vous remercie. Je suis maintenant prête à répondre à vos questions et à discuter avec vous.
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Merci, monsieur le président, et merci aux témoins d'être venus.
Nous avons des dépenses inflationnistes incontrôlées et des dépenses incontrôlées également, ce qui provoque de l'inflation, je suppose. Les personnes à revenu fixe et à faible revenu sont particulièrement touchées, surtout les étudiants, et elles ont du mal à joindre les deux bouts.
Après huit ans de ce gouvernement, je voudrais vous faire part de quelques statistiques surprenantes. Les loyers ont doublé. Les étudiants paient aujourd'hui leur logement 25 % plus cher que le locataire canadien moyen. Nous avons entendu parler d'étudiants vivant dans des refuges pour sans-abri. L'an dernier, l'inflation a atteint son plus haut niveau en 40 ans. Les frais d'intérêt n'ont jamais été aussi élevés depuis 15 ans. Quarante pour cent des étudiants de premier cycle et 50 % des étudiants de cycle supérieur disent craindre de manquer de nourriture. Le recours aux banques alimentaires sur les campus atteint de nouveaux sommets. Les aliments deviennent inabordables et nous continuons à voir de plus en plus de Canadiens sauter des repas.
Cette question s'adresse à vous trois, et vous pourrez nous donner plus de détails. Non seulement le gouvernement n'a pas augmenté les bourses d'études et les programmes de bourses de recherche, mais le coût de la vie est également hors de contrôle. Pouvez-vous décrire l'impact de ce gel du financement et de l'augmentation du coût de la vie sur les étudiants que vous représentez?
Madame Tremblay, nous pouvons commencer par vous.
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Assurément. Vous avez soulevé d'excellents points sur lesquels il faudra se pencher, à mon avis. Les étudiants travaillent beaucoup d'heures pour essayer de gagner leur vie et de faire face au coût de la vie, parce que l'inflation a fait en sorte que tout est si cher. Les bas salaires que nous voyons dans les bourses d'études et les subventions maintiennent les étudiants dans des situations financières précaires qui les empêchent de vraiment consacrer leur temps et leur énergie à leurs études.
Comme les autres témoins l'ont dit, nous voyons des étudiants se tourner vers des ressources externes pour tenter d'obtenir de l'aide, ce qui se solde généralement par un échec pour eux. Les mesures de soutien social pour les étudiants sont insuffisantes, nous les laissons donc dans des situations très difficiles qui les écartent de leurs recherches et de leur vécu d'étudiants de cycle supérieur.
Je pense qu'il est également important de dire que 64 % des étudiants déclarent que les frais de scolarité et la dette étudiante à laquelle ils sont confrontés ont un effet négatif sur leur santé mentale et ces données proviennent de notre récent sondage. Un grand stress est associé au fait d'être un étudiant de cycle supérieur, ce qui signifie que beaucoup de personnes ne sont pas à même de poursuivre des études supérieures, et cela les empêche de contribuer à la recherche et à notre économie de cette manière.
C'est tout ce que j'ai à dire, mais je vous remercie de m'en avoir donné l'occasion.
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C'est une excellente question. Je suis heureuse de m'étendre sur le sujet.
Je pense que c'est important. Encore une fois, je tiens à préciser que je ne suis pas une étudiante étrangère, mais j'exprime les préoccupations que j'ai entendues de la part d'étudiants étrangers de cycle supérieur.
Je pense qu'il serait possible d'augmenter le nombre de subventions et de bourses disponibles en les rendant accessibles à tous, et pas seulement aux citoyens canadiens ou aux résidents permanents. Cela crée un obstacle pour les étudiants étrangers qui viennent dans notre pays afin de poursuivre leurs études et qui n'ont pas cette reconnaissance que représentent le statut de résident permanent ou la citoyenneté.
L'élimination de ces obstacles structuraux facilitera l'accès aux financements et aux études supérieures.
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Merci, monsieur le président.
Je me permets tout d'abord de souligner le leadership de mon collègue Maxime Blanchette-Joncas, qui a soulevé cette question. Cela ne peut se faire sans l'appui des demandes des associations étudiantes.
Étant moi-même un ancien du mouvement étudiant, je salue l'engagement et la qualité des revendications de nos trois témoins. Dans l'ensemble de ces démarches et en s'appuyant sur des rapports comme le rapport Naylor ou, plus récemment, le rapport Bouchard, on voit que le sous-financement est absolument critique.
Selon moi, une recommandation englobe toutes les autres recommandations dans l'état actuel. C'est la question de la santé psychologique, qui est une conséquence directe de ce problème. J'aimerais entendre les commentaires des témoins à cet égard.
Madame Tremblay, je vais commencer par vous. Quel lien faites-vous entre la précarité financière et la santé mentale? Il a été question d'un nouveau fonds de 500 millions de dollars sur quatre ans pour engager des professionnels en santé mentale. Le sous-financement est-il aussi une résultante des répercussions sur la santé mentale?
En 2018, l'UEQ a mené une étude sur la santé psychologique auprès de plus de 23 000 étudiants. Ce sondage nous a donné des résultats alarmants. En effet, 58 % de la population étudiante a un niveau élevé de détresse psychologique, comparativement à 20 % de la population québécoise. On a vu comment la précarité financière avait une incidence majeure sur la détresse psychologique et sur l'épuisement émotionnel des étudiantes et des étudiants, ainsi que sur les symptômes dépressifs, particulièrement des personnes qui étudient aux cycles supérieurs.
Je crois donc qu'en augmentant le financement offert aux étudiantes et étudiants aux cycles supérieurs, on atténue les risques de détresse psychologique ainsi que la charge mentale qui leur incombe.
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Merci à tous d'être ici.
Je vais commencer par Mme Hennessey, ne serait-ce que parce que lorsque j'étais étudiant de cycle supérieur au milieu des années soixante-dix, j'ai fréquenté l'Université Memorial à Terre-Neuve. C'était il y a de nombreuses années.
Un député: Les années 1970?
M. Richard Cannings: Oui, c'était dans les années 1970. Y a-t-il eu d'autres années soixante-dix?
À l'époque, j'avais une bourse du CNRC. Je devance le CRSNG. En fait, il n'y avait même pas de CRSNG à l'époque. Je recevais 7 500 $ par an. C'était suffisant pour vivre confortablement. Bien sûr, ce montant a augmenté progressivement jusqu'en 2003, pour atteindre 17 500 $, et il n'a pas changé depuis, comme nous l'avons entendu ici aujourd'hui, au fil des nombreux gouvernements. Nous avons eu un gouvernement libéral, un gouvernement conservateur et un autre gouvernement libéral. Rien n'a été fait au cours des 20 dernières années.
On a aussi mentionné ici que les étudiants de cycle supérieur ne vivent pas tous de ces bourses. En fait, il s'agit d'une minorité d'étudiants de cycle supérieur. La majorité d'entre eux sont payés par leurs professeurs, qui touchent de l'argent par l'intermédiaire des trois conseils.
Je voulais que vous expliquiez l'importance non seulement d'augmenter de 48 % les bourses d'études supérieures, mais aussi d'augmenter les montants versés par les trois conseils aux chercheurs, qui peuvent alors payer la majorité de ces étudiants de cycle supérieur.
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Oui, vous soulevez d'excellents points. Je suis ravie de voir un ancien parmi nous.
Les étudiants ne sont pas payés suffisamment, et ils ne reçoivent pas tous une aide financière. J'ai eu la chance d'en recevoir, mais ce n'est pas le cas de beaucoup d'autres étudiants de ma faculté, et je sais que beaucoup d'autres étudiants à travers le Canada n'en reçoivent pas non plus.
Il est important de veiller à ce que nos étudiants soient bien financés afin qu'ils puissent contribuer à la recherche et effectuer le travail de demain.
Vous avez dit que vous étiez étudiant dans les années 1970. Beaucoup de choses ont changé depuis et il serait formidable que le financement corresponde à cette évolution de notre société, car cela permettrait aux étudiants de contribuer exclusivement à la recherche et de ne pas avoir à faire un million de choses en arrière-plan pour couvrir leurs frais de subsistance et de scolarité.
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Cette question soulève une préoccupation très importante concernant l'accessibilité financière et l'enseignement postsecondaire.
Le financement des universités par l'État a diminué au cours des deux ou trois dernières décennies. Les étudiants paient des frais de scolarité de plus en plus élevés. De plus, et surtout, les étudiants étrangers paient également des frais de scolarité beaucoup plus élevés, car très souvent, les frais dans ces cas ne sont pas réglementés par le gouvernement, tandis que des plafonds prévus par la loi s'appliquent aux étudiants locaux dans leur province pour ce qui est des frais de scolarité.
Avec l'augmentation des frais de scolarité et le fait que les étudiants entrent souvent sur le marché du logement au taux en vigueur, de sorte qu'ils paient donc plus cher pour se loger, les étudiants sont confrontés à une crise de l'accessibilité financière. Cela vaut pour les étudiants de premier cycle comme pour les étudiants de cycle supérieur dont nous parlons aujourd'hui.
L'une des raisons pour lesquelles nous nous concentrons explicitement sur les bourses d'études supérieures et postdoctorales est que ces montants servent de référence. Ce sont les bourses les plus prestigieuses que l'on puisse obtenir comme étudiant au Canada. Il est très difficile pour les étudiants qui sont ensuite embauchés par des professeurs ou par leur université de plaider pour une augmentation de salaire. Nous pensons qu'il s'agit d'un exemple où la marée montante soulèvera tous les bateaux. Si ces bourses sont augmentées, d'autres étudiants bénéficieront également de cet investissement.
J'ai aussi entendu des données qui montrent que 38 % des étudiants qui obtiennent un doctorat ici au Canada vont à l'étranger pour leurs études postdoctorales, en partie à cause de la faiblesse du financement au Canada.
Si nous faisons un calcul rapide, cela représente une perte de 640 millions de dollars par an. Nous avons dépensé tout cet argent pour former ces personnes. Elles partent à l'étranger. Nombre d'entre elles ne reviennent pas, car elles trouvent des horizons plus ensoleillés aux États-Unis ou ailleurs.
Je me demandais si l'une d'entre vous pouvait faire un commentaire à ce sujet.
Je dirai qu'il est difficile de quantifier ce problème en particulier, mais nous avons trouvé un sondage de 2016 qui révèle que 47 % des chercheurs en santé en début de carrière envisageaient de partir à l'étranger. Depuis, les conditions ont empiré.
Selon l'OCDE, le Canada se situe à l'avant-dernier rang des pays du G7 pour l'investissement dans la recherche et le développement en pourcentage du PIB. Il faut aussi souligner que ces étudiants de cycle supérieur et ces chercheurs postdoctoraux mènent des recherches dans les établissements d'enseignement postsecondaire et contribuent au prestige et à la réputation du Canada dans le milieu universitaire.
Cependant, 75 % de ces doctorants se retrouvent dans l'industrie. Ce sont eux qui créent les solutions à des défis comme la lutte contre les changements climatiques et la crise du logement au Canada. Nous avons besoin de ces personnes dans la recherche et dans le secteur privé pour relever les défis auxquels notre pays va être confronté. S'ils partent ailleurs, d'autres pays bénéficieront du temps et des efforts que le Canada investit dans la formation de ces chercheurs.
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J'en sais un peu plus sur le programme américain, car malheureusement, je dois admettre que mon neveu fréquente actuellement l'université de l'État du Michigan et que l'élément le plus important de sa décision était le montant de la bourse complète qu'il a obtenue pour y aller. Il a maintenant entamé son postdoctorat et il a reçu une augmentation considérable par rapport au Canada. Je peux honnêtement dire que les chances qu'il revienne au Canada sont faibles, voire nulles.
C'est l'un des éléments... nous perdons... c'est l'exode des cerveaux. Par ailleurs, que perdons-nous dans le secteur de l'enseignement? Que perdons-nous dans...? Vous avez parlé de notre aspect commercial. Quels types de produits pourrions-nous créer mieux ou de manière plus innovante, et combien perdons-nous ainsi?
J'espère que vous pourrez me fournir cette information.
En ce qui concerne les autres sources de financement, avez-vous l'impression que nous perdons des étudiants — non pas qu'ils aillent ailleurs, mais qu'ils ne reçoivent tout simplement pas l'enseignement nécessaire? Avez-vous des renseignements à ce sujet?
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Merci, monsieur le président.
Madame Metcalfe, je vais commencer par vous pour revenir sur certaines de vos recommandations.
Vous et les deux autres témoins avez soulevé des thèmes récurrents en ce qui concerne le manque d'aide financière depuis 2003. Il s'agit là d'une critique constructive à l'égard des deux gouvernements qui se sont succédé depuis cette époque. Je pense que les recommandations que vous, mesdames Tremblay et Hennessey, avez formulées aujourd'hui seront des thèmes récurrents que nous entendrons de la part d'autres témoins.
J'aimerais que les témoins me fassent part de recommandations qu'elles pourraient avoir en tête concernant d'autres mesures de soutien que nous pourrions offrir, en plus de l'augmentation du financement des bourses d'études et du soutien financier pour les bourses d'entretien et les bourses d'études.
Je m'intéresse au logement. Vous y avez fait référence à deux reprises, une fois dans votre déclaration liminaire et une fois dans une réponse. Il s'agit d'une responsabilité partagée entre les trois ordres de gouvernement. Les municipalités, les provinces et le gouvernement fédéral ont une obligation partagée de fournir des aides au logement. Comme Mme Hennessey l'a souligné, de savoir que 71 % des étudiants de cycle supérieur vivent sous le seuil de la pauvreté... C'est une donnée troublante.
Je souhaite examiner comment le gouvernement fédéral peut apporter un soutien financier au moyen d'incitations ou d'initiatives en matière de logement. Notre Stratégie nationale sur le logement fournit actuellement des fonds aux universités par l'entremise du Fonds national de coinvestissement pour le logement et de l'Initiative de financement de la construction de logements locatifs. Cependant, notre budget ne comporte pas d'articles spécifiques pour les établissements d'enseignement postsecondaire. Je pense qu'il devrait y en avoir un pour la Stratégie nationale sur le logement afin d'alléger la dette étudiante.
Que pensez-vous de la possibilité d'offrir d'autres formes de soutien à l'échelle fédérale afin d'aider à couvrir certains coûts que supportent non seulement les étudiants, mais aussi tous les autres citoyens du pays?
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Cette question tombe à point nommé.
L'ACAE a récemment terminé la rédaction d'un énoncé d'orientation sur ce sujet qui sera publié au cours des deux ou trois prochains mois. Je serais heureuse de vous le fournir dès qu'il sera prêt.
L'essentiel de nos recommandations porte en fait sur la collecte de données, car les étudiants ne constituent pas une catégorie reconnue de locataires dans une grande partie des données dont nous disposons. Certains organismes non gouvernementaux — en particulier UTILE au Québec — ont mené des enquêtes nationales auprès des étudiants pour combler cette lacune, mais en tant qu'organisation étudiante, il est difficile de formuler ces recommandations en l'absence de données cohérentes de la part du gouvernement pour nous aider à cerner les tendances.
Les étudiants sont très préoccupés par le financement stable du Programme canadien de subventions aux étudiants, et c'est un enjeu majeur pour eux. Il s'agit d'un programme très important qui cible directement les Canadiens à revenu faible et moyen pour leur permettre d'accéder aux études postsecondaires. Il comprend un calcul pour le logement.
Les deux recommandations que je peux vous faire aujourd'hui seraient de veiller à ce que ce programme soit systématiquement financé pour ces étudiants et de collecter des données afin que nous puissions aider à combler certaines des autres lacunes.
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Merci, monsieur le président.
Bonjour, tout le monde.
Je suis Sébastien Paquette et je suis ici au nom de l'Association du personnel de la recherche du Québec. Le rôle de l'APRQ est de contribuer à réduire la précarité du personnel de recherche et de reconnaître sa contribution à la recherche universitaire partout au Québec. C'est avec plaisir que j'ai accepté l'invitation de témoigner devant le Comité au sujet du financement de la recherche des chercheuses et chercheurs postdoctoraux. Notez que je n'utilise plus le terme « stagiaire », car il est considéré comme préjudiciable et dévalorisant pour nos membres. En effet, le terme « stagiaire » a trop souvent servi à légitimer de mauvaises conditions de travail, en refusant à nos membres la reconnaissance de leur statut de personnel de recherche hautement qualifié.
Que fait au quotidien une chercheuse ou un chercheur postdoctoral? Elle ou il mène un ou plusieurs projets de recherche, que ce soit un projet uniquement universitaire ou un partenariat industriel. Du fait de l'expérience acquise lors de leurs propres recherches doctorales, les chercheuses et chercheurs postdoctoraux encadrent des étudiants en stage de recherche, à la maîtrise ou au doctorat. Dans certains laboratoires, les étudiants se reposent sur les postdoctorants bien plus que sur les professeurs, qui sont pourtant l'encadrement officiel. Les chercheuses et chercheurs postdoctoraux sont bien souvent celles et ceux qui, dans un laboratoire, rédigent le plus d'articles scientifiques. De plus, ils aident les professeurs à rédiger les demandes de subvention qui garantissent leur survie. En somme, les tâches sont très similaires à celles des professionnels de recherche ou des professeurs en début de carrière. Leur nécessité dans un laboratoire ne fait aucun doute, et c'est pourquoi les professeurs ne considèreraient pas se passer de ces employés, dont le statut n'existe pourtant que depuis la fin des années 1990.
Pourtant, que ce soit au moyen d'une bourse des organismes subventionnaires ou des fonds de recherche des professeurs qui les embauchent, provenant plus souvent de ces mêmes organismes subventionnaires, le statut des chercheuses et des chercheurs postdoctoraux reste précaire. Cette précarité provient de la nature de l'emploi, soit une période transitoire sous contrat à durée déterminée, mais également, et surtout, des trop faibles montants de financement. En effet, le montant des bourses et fonds de recherche actuels ne permet généralement pas aux étudiants postdoctoraux d'avoir un salaire pouvant concurrencer ce qui est offert par l'industrie privée ou d'autres universités en Europe ou aux États‑Unis. En fait, n'eût été la syndicalisation récente des chercheuses et chercheurs postdoctoraux, il serait probablement plus payant pour eux d'aller travailler au salaire minimum prévu par la loi. Le salaire actuel des chercheuses et chercheurs postdoctoraux n'est tout simplement pas suffisant pour vivre décemment ou pour attirer des talents provenant de l'étranger.
Lorsqu'un collègue plus âgé m'a parlé de sa bourse postdoctorale, obtenue en 1996, je me suis rendu compte que les montants des bourses offertes aujourd'hui sont loin d'avoir suivi l'inflation. Même avant les taux d'inflation record observés ces deux dernières années, l'indexation ne suivait pas. Les montants des bourses, qui deviennent des salaires imposables, varient typiquement entre 40 000 $ et, dans de très rares cas, 80 000 $ par année. De ces montants, les universités retranchent souvent les dépenses de l'employeur ainsi que certains frais pour l'achat de matériel, ce qui abaisse le montant du salaire brut d'environ 25 % par rapport à ce qui a été annoncé avant l'embauche. La personne employée ne l'apprendra malheureusement qu'au moment de commencer son emploi.
Beaucoup de chercheuses et chercheurs postdoctoraux travaillent beaucoup plus d'heures que ce pour quoi ils sont payés. Cela vient avec la nature précaire de l'emploi et le besoin de bâtir le début de sa carrière avec de bonnes références. L'augmentation des bourses et des planchers salariaux demeure donc les meilleurs moyens d'assurer un niveau de rémunération par heure travaillée qui respecte les principes minimums de la loi. Les universités se vantent de leur rayonnement en recherche, mais ce rayonnement ne serait pas possible sans la contribution des chercheuses et chercheurs postdoctoraux, et ne devrait pas se faire au prix de la précarité.
Les conventions collectives négociées par les syndicats ont permis d'obtenir des planchers salariaux pour les postdoctorants. Ce plancher varie actuellement entre 33 000 $ et 48 000 $ par année. Dans certains cas, les professeurs qui embauchent des postdoctorants dont le montant de la bourse est trop bas doivent combler l'écart en utilisant leurs fonds de recherche. Or, c'est encore insuffisant et ce ne sont pas tous les chercheurs et chercheuses postdoctoraux qui ont la chance de bénéficier d'une protection syndicale. De plus, le fait de devoir combler un écart pour atteindre un salaire minimum déjà peu élevé est une indication supplémentaire de l'insuffisance du montant des bourses postdoctorales.
Considérant tout cela, je plaide pour un réinvestissement massif dans les bourses liées aux emplois de chercheuses et chercheurs postdoctoraux, tout en assurant une augmentation importante du financement par projet.
La société devrait offrir aux chercheuses et chercheurs postdoctoraux des conditions de travail décentes, en accord avec leur haut niveau d'expertise et leur contribution essentielle à l'avancement de la science et à la formation des futurs professionnels. Cela permettra aussi de rendre les universités canadiennes plus compétitives comparativement aux autres pays, ce qui leur permettra d'attirer et de retenir ces professionnels hautement qualifiés.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie les membres du Comité de m'accueillir.
Je suis le directeur du Service des études supérieures et de la réussite étudiante à l'Institut national de la recherche scientifique. L'INRS est un établissement universitaire dédié exclusivement à la recherche et à la formation aux cycles supérieurs. Il est un des dix établissements constituant le réseau de l'Université du Québec.
Aujourd'hui, je m'adresse au Comité en ma qualité de président de l'Association canadienne pour les études supérieures, une association nationale qui assure la promotion de l'excellence dans l'enseignement des cycles supérieurs et dans la recherche. Nos membres comptent plus de 60 universités et instituts universitaires de recherche canadiens ainsi que plusieurs intervenants intéressés par l'enseignement au cycle supérieur.
L'Association reconnaît que les importants investissements du gouvernement fédéral dans l'écosystème universitaire de recherche, passés et présents, ont contribué de manière considérable au développement d'une culture de la recherche au Canada. Toutefois, l'Association continue de demander que les trois conseils subventionnaires obtiennent de l'État fédéral les moyens d'augmenter la valeur des bourses d'excellence et des subventions de recherche. Les membres de l'Association s'attendaient, je dois le dire, à une augmentation substantielle des bourses d'études supérieures et postdoctorales et du financement de la recherche. Ils ont donc été extrêmement déçus par le budget fédéral de 2023 et par le manque d'investissements dans l'écosystème de la recherche universitaire au Canada.
Malgré les nombreux appels à l'action lancés par les chercheurs et les coalitions étudiantes au cours des dernières années, et à l'encontre des recommandations de son propre comité consultatif sur le système fédéral de soutien à la recherche, le gouvernement du Canada a décidé d'ignorer dans son budget de 2023 les étudiantes et les étudiants canadiens des cycles supérieurs, les chercheuses et les chercheurs postdoctoraux et la communauté de l'enseignement supérieur en général. Le financement accordé par le gouvernement fédéral aux étudiants des cycles supérieurs et aux postdoctorants stagne depuis près de 20 ans. En effet, depuis 2003, il n'y a eu à peu près aucune augmentation de la valeur des bourses de maîtrise ou de doctorat. En raison de l'inflation, de l'augmentation des frais de scolarité et de l'augmentation du coût de la vie, la valeur actuelle des bourses est égale ou inférieure au seuil de pauvreté national fixé par l'État fédéral. Le résultat est donc accablant, puisque, dans ce système, nous maintenons sous le seuil de la pauvreté 3 000 jeunes chercheurs et chercheuses de haut niveau parmi les plus talentueux au Canada.
Une étude approfondie menée en 2016 par l'Université de Montréal a révélé que l'insécurité financière contribuait à des taux alarmants de problèmes de santé mentale chez les étudiants universitaires, qu'il s'agisse notamment de maladies mentales, de dépendance à l'alcool et aux drogues, ou d'une augmentation des maladies chroniques et du nombre de suicides.
Afin de résoudre les importants problèmes liés au financement de la recherche au Canada, l'Association canadienne pour les études supérieures recommande d'augmenter le nombre de bourses accordées aux étudiantes et aux étudiantes des cycles supérieurs, d'augmenter de manière importante la valeur des bourses d'excellence en recherche et, finalement, d'augmenter de manière importante la valeur des subventions de recherche. Cette dernière recommandation permettrait aux professeurs d'augmenter, eux aussi, le soutien qu'ils offrent aux étudiants à même leurs subventions.
En conclusion, les membres de l'Association demeurent convaincus de l'importance des études supérieures pour mieux comprendre et résoudre les problèmes complexes auxquels sont confrontés tous les Canadiens. Pouvoir s'appuyer sur des chercheuses et des chercheurs et une relève scientifique de haut niveau constitue un objectif particulièrement important si on veut assurer le développement juste, équitable et durable du pays. Pour y arriver, il est essentiel que les étudiantes et les étudiants des cycles supérieurs, les chercheurs postdoctoraux et les leaders scientifiques de demain soient soutenus de manière décente.
J'aimerais terminer mon allocution en citant les propos que a tenus en octobre 2022, en réponse à la pétition e‑4098, qui a été déposée à la Chambre des communes et qui portait sur le financement de l'enseignement supérieur:
Le gouvernement du Canada reconnaît également l'importance d'investir dans la recherche postsecondaire et le rôle essentiel que jouent les bourses d'études et de perfectionnement fédérales dans l'encouragement et le maintien des meilleurs talents du Canada. Il le fait par l'intermédiaire d'un soutien de l'avancement professionnel, et de l'accroissement de la sécurité financière et de l'indépendance.
Aujourd'hui, je tiens à dire au ministre et aux membres du Comité que nous sommes d'accord avec le ministre, mais qu'il est maintenant temps d'agir.
Chers membres du Comité, bonjour. C'est un réel plaisir pour moi d'avoir l'occasion de parler devant vous aujourd'hui, dans ma région natale.
Avant de débuter, j'aimerais reconnaître que nous nous trouvons sur le territoire non cédé de la nation algonquine anishinabe et j'aimerais remercier mes collègues de leurs interventions.
Je suis Cynthia Mbuya‑Bienge. Je suis présidente du Syndicat des travailleuses et des travailleurs étudiants et postdoctoraux de l'Université Laval, à Québec. Je suis aussi étudiante au doctorat en épidémiologie et j'ai une expérience personnelle des programmes de bourses d'études supérieures du gouvernement du Canada.
J'aimerais tout d'abord remercier le Comité d'avoir présenté cette motion à la Chambre, car elle est particulièrement pertinente en cette période d'inflation historique, qui touche de manière disproportionnée les groupes de la population les plus vulnérables. Parmi ces groupes vulnérables de la population se trouvent les étudiants et les postdoctorants. De ce fait, j'évoquerai au cours de mon intervention les effets du système de bourses sur les conditions de vie des étudiants des cycles supérieurs ou des postdoctorants.
En premier lieu, bien que le gouvernement fédéral octroie annuellement plusieurs centaines de millions de dollars en bourses d'études supérieures, ce montant n'est plus suffisant et les conditions de vie des étudiants sont précaires. Pour appuyer ce propos, laissez-moi vous illustrer notre quotidien. Être un étudiant à la maîtrise ou au doctorat, c'est effectuer du travail de recherche à temps plein, à bien plus de 40 heures par semaine, en plus de travailler durant les weekends. Pour subvenir à leurs besoins, un bon nombre d'étudiants combinent plusieurs contrats, ce qui peut entraîner leur épuisement, voire un échec scolaire, car, on le sait, la recherche exige un nombre élevé de publications pour réussir dans le domaine. Ces conditions de travail nuisent de façon importante à la conciliation famille-études, ainsi qu'à la santé physique et psychologique des étudiants. D'ailleurs, selon le dernier rapport de l'Union étudiante du Québec, dont la présidente m'a précédée devant vous, 58 % de la population étudiante universitaire souffrirait de détresse psychologique.
D'autre part, depuis 2003, le montant des bourses fédérales est resté inchangé, soit 35 000 $ par année pour un étudiant au doctorat et 17 500 $ pour un étudiant à la maîtrise. Puisque le seuil de faible revenu après impôts au Canada pour une personne vivant seule dans une ville de 500 000 habitants et plus est de 22 060 $ et que la majorité des universités canadiennes se trouvent dans des grandes villes, il ne fait aucun doute que ces montants ne sont plus adaptés pour permettre aux étudiants d'avoir un niveau de vie adéquat. Si l'on ajoute à cela le fait que plusieurs étudiants au doctorat ont des familles à leur charge, le montant de 35 000 $, qui semble élevé de prime abord, n'est finalement plus suffisant compte tenu de la réalité des étudiants.
L'objectif des bourses d'études supérieures du Canada vise à promouvoir l'excellence en soutenant les étudiants dans leur carrière de recherche et en leur permettant de profiter d'une expérience de formation de haute qualité. Rappelons-nous que le travail scientifique des étudiants a des retombées dans toutes les sphères de la société, que ce soit par la compréhension du développement des maladies, l'utilisation écoresponsable des sources d'énergie ou encore l'amélioration des systèmes de santé. Or, avec les montants des bourses actuelles, c'est à se demander si cet objectif est réellement atteint.
Notons également la contribution importante des étudiants internationaux, qui représentent près de 30 % des étudiants au niveau postsecondaire dans les universités canadiennes et qui contribuent grandement au rayonnement social et économique du pays, mais qui n'ont pas accès à ces bourses.
D'un autre côté, les principaux organismes subventionnaires œuvrant en santé, en science, en génie et en sciences humaines appliquent un système d'octroi de bourses qui est souvent difficile à saisir et qui soulève de nombreuses incompréhensions. En effet, j'aimerais mettre l'accent ici sur la répartition du nombre de bourses entre les trois organismes et la manière de déterminer le quota utilisé pour la distribution des bourses par université. De plus, même s'il est souvent question de nouvelles mesures d'équité, de diversité et d'inclusion dans ces systèmes, ces mesures restent vagues et peu concrètes.
Finalement, les montants des programmes de bourses postdoctorales du Canada varient d'un concours à l'autre, allant de 45 000 $ par année pour 2 ans dans le cadre des bourses du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie et du Conseil de recherches en sciences humaines, à 70 000 $ par année pour 2 ans pour les bourses Banting. Malheureusement, ces montants sont loin d'avoir évolué aussi rapidement que l'inflation au cours des dernières décennies, contribuant ainsi à l'appauvrissement des postdoctorants. Il faut savoir que ces derniers sont reconnus comme des travailleurs hautement qualifiés, compte tenu de leur formation exigeante et de leur habilité à diriger des travaux de recherche. Les bourses minimales des chercheurs postdoctoraux ne reflètent pas cela, car elles sont de loin inférieures à la rémunération à un poste d'entrée d'un professionnel titulaire d'un doctorat au Canada. Dans cette optique, il faudrait non seulement uniformiser les montants des différents concours de bourses, mais aussi envisager une réelle augmentation des montants des bourses postdoctorales.
Au regard de l'argumentaire présenté, j'appuie la motion d'entreprendre une étude sur les programmes de bourses d'études supérieures et de bourses postdoctorales du gouvernement du Canada, et j'invite le gouvernement à substantiellement bonifier ces programmes.
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J'ai une autre question à poser avant que mon tour se termine.
Lorsque nous nous penchons sur ces universités, je me demande toujours... et je ne reproche pas aux hauts dirigeants de ces universités leurs gros salaires. Ce n'est pas un reproche que je leur fais, ils peuvent bien gagner ce qu'ils veulent.
Ma question est la suivante, et je suis sûr que vos collègues doivent se demander... Il y a les professeurs, puis il y a cette énorme mer d'administration, et dans certaines universités, cela représente des centaines de millions de dollars par an en salaires. Pensez-vous que les universités devraient examiner leurs budgets annuels...?
Je ne parle pas des professeurs, mais de l'administration et de tout le personnel. Devraient-elles examiner cela aussi et dire au gouvernement fédéral: « Écoutez, nous allons examiner les budgets milliardaires de nos universités » — dans certains cas, des budgets de plusieurs milliards de dollars — et nous allons mettre un peu d'ordre dans nos affaires, puis nous aimerions que vous les financiez. » Qu'en pensez-vous? Vous devez en parler.
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Merci, monsieur le président.
Je vous remercie tous les trois d'être ici pour discuter de cet enjeu important et de la motion qui reconnaît les défis que vous avez tous réaffirmés.
Le financement est insuffisant. Il y a un désir de voir la recherche, l'importance... Monsieur Bélanger, vous avez fait référence au désir du gouvernement de renforcer toute notre capacité en matière de recherche pour garantir que nous sommes compétitifs à l'échelle mondiale et que nous attirons les meilleurs et les plus brillants et que nous les gardons ici également.
C'est évidemment un thème que nous reconnaissons. Nous voulons en discuter. Nous voulons nous étendre sur la façon dont nous pouvons obtenir de meilleurs résultats.
Je dois nuancer un peu la question que je viens de recevoir. Nous devons aussi réorienter efficacement notre financement de manière à faire preuve de responsabilité fiscale, afin que nous fassions en sorte de répartir les crédits de façon efficace.
Madame Mbuya-Benge, attirons-nous davantage d'étudiants étrangers? Y a-t-il un désir de venir au Canada? Vous avez dit que la proportion se situe à environ 30 %. Cette proportion est-elle stable?
Nous recommandons donc d'évaluer des scénarios pour augmenter le nombre de bourses accordées aux étudiants des cycles supérieurs et pour corriger l'erreur historique qu'on impose à nos chercheurs en les laissant vivre dans une situation d'extrême pauvreté depuis des années en n'ayant pas indexé leurs bourses. Qui, ici aujourd'hui, accepterait de voir son revenu rester fixe pendant 25 ans? Quel ministre, sous-ministre, député, ou administrateur universitaire accepterait de voir sa rémunération figée pendant 25 ans? Personne n'accepterait cela. Poser la question, c'est y répondre.
Vous me demandez des chiffres précis sur ce que cela représente. Je vous réponds que l'administration fédérale a trois conseils subventionnaires avec beaucoup d'employés, qui seraient certainement à même de vous fournir des scénarios si vous souhaitez avoir des informations sur l'effet de l'augmentation de la valeur et du nombre de bourses. Comme représentant d'une association universitaire canadienne qui vise à faire la promotion de l'excellence en enseignement supérieur, je peux vous dire que si on veut poursuivre dans cette voie et faire face aux défis au Canada, augmenter le nombre d'étudiants aux cycles supérieurs et s'assurer qu'ils sont bien traités serait une bonne façon de le faire.
Maintenant, en ce qui concerne le coût total final, je vous invite à consulter vos conseillers.
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Merci, monsieur le président.
Je me permets de vous mentionner que j'ai fait des vérifications: mon allocution a commencé à 11 heures 36 minutes et 48 secondes et vous m'avez interrompu à 11 heures 42 minutes et 28 secondes, ce qui représente quand même 20 secondes si nous additionnons les deux minutes et demie. C'est près de trois minutes pour poser des questions. Pourquoi est-ce que je tiens à vous le souligner? C'est parce que cela a des conséquences sur ces jeunes filles courageuses qui sont venues témoigner. Nous n'avons pas pu poser de questions sur un dossier fondamental pour le Québec pendant ces trois minutes.
Ceci étant dit, je me tourne vers cet autre problème que constitue le sous-financement généralisé de la recherche.
Monsieur Bélanger, un reportage de Radio‑Canada diffusé hier, le 3 mai, nous apprenait qu'une analyse des demandes de subventions des 30 dernières années, à laquelle a participé l'Acfas, a permis d'établir essentiellement trois constats: la science en anglais s'approprie la part du lion du financement accordé; le nombre de francophones qui rédigent des projets de recherche en français a dégringolé depuis 30 ans; et, en santé, les demandes de subvention en français sont généralement rejetées.
Le fait que la science en anglais s'approprie la part du lion du financement accordé est un élément clé et un constat préoccupant. Êtes-vous d'accord qu'il faut réserver davantage de sommes à la recherche en français et que le ministre doit agir directement pour bonifier massivement le financement en français, qui est dans un état critique?
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Je pense que toute action qui pourra contribuer à faire la promotion de la science en français serait une bonne action et ce serait sûrement quelque chose que nous soutiendrions.
L'Association canadienne pour les études supérieures est une association bilingue et nous faisons de plus en plus de place à la langue française, que ce soit dans nos séances de travail ou dans nos congrès annuels.
Une revue scientifique multidisciplinaire francophone serait effectivement intéressante, mais il ne faut pas oublier que la langue française peut aussi représenter, dans certains cas, une embûche à la diffusion scientifique. Je pense par exemple à un physicien qui déciderait de publier sa thèse ou son mémoire en français. Il pourrait certes le faire en sa qualité de francophone, mais cela voudrait probablement dire que ses travaux vont rester sur les tablettes.
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Merci à tous d'être ici.
Je vais commencer par M. Bélanger.
Lundi, nous avons eu un débrayage des étudiants de cycle supérieur à travers le pays. Des milliers d'entre eux ont convergé ici à Ottawa sur la Colline du Parlement. Mardi, nous avons eu l'événement La science rencontre le Parlement. Je ne sais pas s'il s'agit d'une coïncidence ou non, mais nous avons accueilli des jeunes chercheurs de haut niveau sur la Colline du Parlement. Nous avons organisé une réception avec des personnes comme la Dre Mona Nemer, conseillère scientifique en chef du Canada, et Frédéric Bouchard, qui a présidé le comité qui s'est penché sur l'écosystème de la recherche au Canada et qui a rédigé le rapport présenté par le gouvernement.
Je me suis entretenu avec chacun d'eux. Tous s'entendent pour dire que l'augmentation du financement accordé aux étudiants de cycle supérieur est une solution si facile à mettre en oeuvre et si évidente. Tout le monde était choqué que rien n'ait été fait dans le budget.
À la lecture du rapport de M. Bouchard et des demandes budgétaires du regroupement des 15 universités de recherche, je constate qu'elles sont plus ou moins les mêmes. On demande une augmentation de 10 % par an au cours des cinq prochaines années pour le financement de la recherche dans les universités canadiennes et de 5 % par an au cours des cinq années suivantes, et ce uniquement pour rattraper les États-Unis et d'autres pays.
Nous disons que c'est beaucoup d'argent. Eh bien, nous sommes en train de prendre du retard. Nous sommes dans un monde d'information et nous devons faire ces investissements, sinon le Canada restera relégué à une place mineure dans le monde.
Je me demandais si vous pouviez commenter ces rapports, celui de M. Bouchard et les demandes du regroupement U15, ce que les étudiants de cycle supérieur demandent. J'aimerais que vous les mettiez en contexte par rapport à ce qui se passe aux États-Unis. La Finlande a été mentionnée.
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La position de l'Association canadienne pour les études supérieures est très claire. Après l'annonce du budget de 2023, nous avons publié un communiqué, qui est parfaitement aligné sur le rapport Bouchard et qui tient compte également des critiques qui ont été formulées par U15 Canada et l'Association francophone pour le savoir, ou Acfas. Il est drôle que vous les mentionniez.
Pour tous les gens à qui l'on parle, la solution est tellement simple: il faut augmenter la valeur des bourses. Comme je le disais tout à l'heure, qui accepterait que sa rémunération soit bloquée pendant 25 ans? Personne n'accepterait cela.
Ensuite, le Canada est effectivement en concurrence avec d'autres pays. On a parlé des États‑Unis, mais il y a aussi l'Allemagne, la Suède et d'autres pays européens qui offrent des bourses supérieures.
Toutefois, ce qui m'inquiète plus que la compétitivité du système universitaire canadien, c'est vraiment le bien-être des étudiants qui sont chez nous et à qui nous avons le devoir moral d'offrir les meilleures conditions d'études possibles. En ayant gelé la rémunération de nos boursiers pendant 25 ans, nous avons failli à notre obligation morale d'accompagner les jeunes adultes qui souhaitent se former pour développer le Canada de demain d'une façon adéquate.
Monsieur Bélanger, je suis fasciné par tous les sujets que vous avez abordés, surtout en ce qui concerne le mécanisme de financement et l'échange que vous avez eu avec M. Lobb.
Vous avez parlé de la nécessité pour le gouvernement d'augmenter ces taux, alors que le financement des universités a augmenté, de toute évidence. Est-ce exact? Supposons qu'un professeur ou un chercheur reçoive un million de dollars de financement. Dans la demande, est-il indiqué qu'il ou elle doit payer 17 500 $, et pas un sou de plus, à l'étudiant en maîtrise, par exemple? Qu'est-ce qui empêche le chercheur de payer cet étudiant plus cher?
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Aucune contrainte n'empêche les professeurs-chercheurs de payer davantage les étudiants et les chercheurs postdoctoraux. D'ailleurs, dans la plupart des universités, les professeurs peuvent leur accorder, à leur discrétion, un soutien financier. On parle beaucoup des bourses des conseils subventionnaires de l'État fédéral, mais les professeurs qui reçoivent des subventions donnent aussi de l'argent.
Si ces subventions ne sont pas indexées, les professeurs auront accès au même montant de subventions, mais auront de la difficulté à suivre le rythme de l'indexation des revenus pour les étudiants. Les programmes de subventions des conseils n'ont pas été indexés non plus, et ce, depuis longtemps. Une bourse qui valait un million de dollars en 2000 vaudrait beaucoup plus aujourd'hui. Le problème, c'est qu'aujourd'hui, on verse encore un million de dollars. Ainsi, si le professeur décide de donner beaucoup plus d'argent à ses étudiants, il va peut-être compromettre une partie de ses activités de recherche ou il va devoir faire des choix relativement à la programmation de recherche.
Selon moi, il y a un lien: si les bourses sont indexées, il faut aussi indexer les subventions de recherche versées aux professeurs-chercheurs de nos universités.
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Je vais parler des membres du syndicat que je représente, parce que c'est leur situation que je connais le mieux.
Ce ne sont pas tous les étudiants internationaux qui ont accès à du financement. Le financement de la recherche subventionnaire est seulement offert à la crème de la crème, que ce soit à l'échelle canadienne ou internationale. Des bourses du gouvernement fédéral sont offertes à des étudiants étrangers pour qu'ils viennent au Canada, mais ce n'est qu'une infime partie d'entre eux qui y ont accès.
En arrivant au Canada, les autres étudiants sont confrontés non seulement à des défis d'adaptation à une nouvelle culture et à un nouveau système d'éducation, mais aussi au manque de soutien offert. Je répète que les étudiants internationaux contribuent énormément au financement des universités, mais ne reçoivent pas le même niveau de contribution de celles-ci. Pourtant, cela leur permettrait d'évoluer dans le système d'éducation au Canada.
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Merci, monsieur le président. Je suis heureux de l'occasion qui m'est donnée de participer aux discussions.
J'aimerais mettre certaines choses en contexte. Nous faisons constamment des comparaisons avec ce qui est offert aux États-Unis. Un examen rapide a montré que le coût moyen d'une maîtrise se situe entre 20 000 et 30 000 $ par an, alors qu'il est de 17 000 $ par an au Canada. J'aimerais replacer ces comparaisons dans leur contexte. Examinons-les sous tous les angles.
L'autre chose, c'est que nous entendons sans cesse dire que rien n'a été fait pour soutenir les étudiants dans leurs études. Dans le budget de 2023, 813 millions de dollars ont été engagés pour améliorer l'aide financière aux étudiants. Cela comprend une augmentation de 40 % des subventions pour les prêts étudiants. Le budget précédent prévoyait que le remboursement des prêts étudiants ne serait pas exigé lorsque le revenu personnel est inférieur à 40 000 $, et le montant maximum de remboursement d'un prêt étudiant a été réduit à 10 % du revenu individuel, au lieu de 20 %.
En outre, nous avons instauré une remise de prêt de 30 000 $ pour le personnel infirmier et de 60 000 $ pour les médecins.
J'aimerais replacer ces mesures dans le contexte du soutien global aux études. Je reconnais que cela n'entre pas dans le cadre de cette étude, mais je pense que cette information devrait aussi être prise en compte tandis que nous poursuivons notre étude.
Cela dit, je cède le reste de mon temps de parole à mon collègue, M. Lauzon.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins de leur présence.
Aux fins du compte rendu de la réunion, je comprends que M. Lemire n'était pas ici lors des dernières études que nous avons faites. Il y en a eu une sur la recherche en français, à laquelle a participé le collègue de son parti qui siégeait ici à l'époque. Beaucoup de données et de questions sont reliées à cette étude plutôt qu'au financement.
Monsieur Bélanger, vous nous avez donné une piste en suggérant qu'il faudrait faire les choses différemment si le financement venait directement des universités. On vient donc ici toucher directement au système même du financement. Pouvez-vous nous dire ce à quoi pourrait ressembler un système de financement administré directement par les universités?
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Il est important pour moi que ce soit consigné au compte rendu de la réunion d'aujourd'hui, et il est également important de distinguer entre cette étude-ci et celle que le Comité a faite sur la recherche en français.
Vous avez piqué ma curiosité en disant que, dans d'autres pays, il était possible d'étudier en français et, qu'au Québec, il était possible de faire de la recherche en français. Cependant, dans son autre étude, le Comité s'était penché sur la publication. Or, la publication, c'est une chose, mais la recherche en est une autre.
Bloque-t-on ou empêche-t-on les étudiants de faire de la recherche en français au Québec et partout au Canada où il y a du français? J'invite aussi Mme Mbuya‑Bienge à répondre à ma question si elle le souhaite.
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Merci, monsieur le président.
Je voudrais remercier M. Collins d'avoir posé la question plus tôt, et M. Lobb de son ouverture.
Je veux réagir à ce que dit M. Lauzon. Il y a des répercussions. Selon l'information publiée sur le site Web de Radio-Canada sur le financement accordé par des organismes indépendants, 98 % du total accordé par les Instituts de recherche en santé du Canada va à la recherche en anglais. Ce pourcentage est de 81 % pour le Conseil de recherches en sciences humaines, et de 96 % dans le cas du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie. Ce parti pris très fort de la part d'instances indépendantes a donc une incidence très grande. On peut faire le lien avec des initiatives comme le projet de loi et son incidence sur le financement des organismes de défense des droits des anglophones au Québec. C'est faire reculer la langue française, et je ne peux absolument pas appuyer cela.
Monsieur Paquette, j'aimerais vous entendre sur la question de la santé psychologique de vos membres et le sous-financement. Quel impact a le sous-financement sur vos membres?
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Je n'ai pas de chiffres précis. Cependant, je me souviens d'avoir vu circuler un sondage pendant la pandémie. Nous en étions à 64 % d'étudiants universitaires ayant des problèmes de santé mentale. Je ne peux pas dire que ce sont les mêmes chiffres pour les postdoctorants, mais je pense que le niveau est élevé aussi. Si on regarde le niveau de financement pour les postdoctorants qui ont la chance d'être syndiqués, le plancher salarial, c'est-à-dire le salaire minimum que l'université doit leur payer, va de 33 000 $ à 48 000 $. Le professeur-chercheur peut payer plus, mais il n'est pas nécessairement incité à le faire.
Plus tôt, nous parlions du niveau de financement, mais il faut également examiner la situation par projet. On attribue un financement au professeur-chercheur pour un projet. À la fin, s'il n'a pas respecté ses engagements, son financement ne sera pas renouvelé. Donc, s'il reçoit 130 000 $ pour payer des postdoctorants, est-ce qu'il va choisir d'en payer deux à 60 000 $ chacun ou d'en payer trois à 40 000 $? La réponse est simple. Il va choisir d'en payer trois à 40 000 $ parce qu'il va vouloir que plus d'articles soient produits. Pendant ce temps-là, ces trois étudiants à 40 000 $ vont travailler dans des conditions de travail difficiles.
Si cela continue, le salaire minimum va rattraper les salaires de nos postdoctorants. Il est certain que cela soulève un problème de santé mentale. Quand on est postdoctorant, dans la trentaine, c'est souvent à ce moment-là qu'on fonde une famille. Cependant, fonder une famille quand on a un revenu de 40 000 $ par année, ce n’est pas facile. Bien des postdoctorants viennent de l'étranger et arrivent donc avec leur conjoint ou leur conjointe, qui n'ont pas nécessairement la capacité de se trouver un emploi dans les...
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Dans le cas des bourses, effectivement, ce sont les conseils de recherche qui en fixent les montants. Pour les postdoctorants, par contre, ce sont souvent des bourses Mitacs à l'échelle canadienne. Le revenu typique des boursiers Mitacs est de 40 000 $, plus 5 000 $ pour l'achat de matériel. Certaines bourses sont plus élevées.
Par exemple, un de mes collègues a reçu à un moment donné une bourse de 53 000 $. Cependant, au moment de lui attribuer la bourse, ce que l'on ne lui a pas dit, c'est qu'on en retrancherait les charges d'employeur, qui représentent typiquement de 13 % à 20 % du total, selon l'emploi. Mon collègue a donc reçu moins de 45 000 $ par année, alors qu'on lui avait fait miroiter un revenu brut de 53 000 $.
C'est un autre problème et c'est quelque chose qui n'est pas annoncé au postdoctorant avant qu'il n'accepte cet emploi. Cela devrait être clair. Sinon, on devrait annoncer la bourse, mais ensuite ajouter des suppléments pour les charges d'employeur afin que l'université puisse payer au postdoctorant le montant annoncé, sans manquer à sa parole.