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SRSR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la science et de la recherche


NUMÉRO 054 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 25 septembre 2023

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Bienvenue à la 54e réunion du Comité permanent de la science et de la recherche.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride, conformément au Règlement. Les membres sont présents dans la salle et à distance au moyen de l'application Zoom.
    J'aimerais prendre quelques minutes pour faire des commentaires à l'intention des députés et des témoins.
    Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Si vous participez par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone. En ce qui concerne l'interprétation, encore une fois, monsieur Cannings, vous connaissez très bien le fonctionnement. Vous pouvez choisir le parquet, l'anglais ou le français.
    Bien que cette salle soit équipée d'un puissant système audio, de la rétroaction acoustique peut se produire et s'est déjà produite. Ces incidents peuvent être très dommageables pour les interprètes et causer des blessures graves. Veuillez éloigner votre oreillette du microphone afin de ne pas causer de rétroaction acoustique.
    Conformément à la motion de régie interne du Comité concernant les tests de connexion pour les témoins, nous avons fait le test pour M. Cannings. Au cours de la deuxième heure, nous entendrons également un témoin qui se joindra à nous par vidéoconférence.
    Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence.
    Conformément à l'alinéa 108(3)i) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mardi 6 juin 2023, le Comité entreprend son étude sur l'utilisation des subventions, des fonds et des contributions du gouvernement fédéral en recherche et développement par les universités et les établissements de recherche canadiens ayant des partenariats avec des entités liées à la République populaire de Chine.
    J'ai le plaisir de souhaiter la bienvenue à nos témoins d'aujourd'hui.
    Tout d'abord, à titre personnel, nous accueillons Margaret McCuaig-Johnston, agrégée supérieure à l'École supérieure d'affaires publiques et internationales et Institut de recherche sur la science, la société et la politique publique de l'Université d'Ottawa. Nous recevons également Anna Puglisi, chercheuse principale au Center for Security and Emerging Technology de l'Université Georgetown.
    Vous aurez chacune cinq minutes pour votre déclaration préliminaire, après quoi nous passerons aux questions.
    Nous allons d'abord écouter Margaret McCuaig-Johnston pendant cinq minutes.
    Je remercie le Comité de me donner l'occasion de parler des questions de collaboration scientifique avec la Chine.
    J'ai eu la chance de travailler au gouvernement pendant 37 ans, principalement dans le domaine des politiques, des programmes et du financement en sciences et en technologie, mais ma maîtrise porte sur la Chine. Je parle un peu le mandarin et, au fil des ans, j'ai souvent été la fonctionnaire qui discutait avec la Chine de recherche et de développement, y compris pendant sept ans au sein du Comité mixte Canada-Chine de coopération scientifique et technologique. De plus, pendant cinq ans, j'ai été la sous-ministre adjointe responsable des laboratoires énergétiques à Ressources naturelles Canada, ou RNCan, et, pendant quatre ans, j'ai été la première vice-présidente du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, ou CRSNG. Je connais donc à la fois la recherche et le développement avec la Chine au sein du gouvernement et dans les universités.
    Depuis plus de 10 ans que j'ai pris ma retraite, j'écris sur le régime d'innovation de la Chine. Lorsque j'ai commencé à percevoir des sources de préoccupation, il y a environ neuf ans, j'ai commencé à renseigner mes anciens collègues du gouvernement pour les sensibiliser aux risques.
    Ma principale préoccupation est la politique de la Chine sur l'intégration du développement technologique militaire et civil. C'est devenu une priorité absolue du gouvernement chinois à partir de 2014, et le président Xi préside lui-même la commission nationale pour le développement militaire et civil. Le risque pour le Canada, c'est que nos scientifiques universitaires établissent peut-être des partenariats avec des scientifiques ou des ingénieurs civils d'universités chinoises sans savoir que leurs recherches sont envoyées par des moyens détournés à l'Armée populaire de libération, ou APL. Comme je l'ai dit à maintes reprises, l'APL n'est pas notre amie.
    Je suis heureuse de voir que le Comité reconnaît cet enjeu en relevant cinq domaines de recherche précis, qui sont tous des priorités pour l’APL, et en stipulant que d’autres domaines pourraient poser problème. L’Australian Strategic Policy Institute, ou ASPI, en a dressé une liste, et j’y ajouterais la science spatiale, la recherche polaire et la génomique. Le Canada ne devrait pas s'associer à la Chine dans ces domaines.
    Le deuxième enjeu est la présence directe de scientifiques et d'ingénieurs militaires chinois dans nos universités et nos partenariats. Innovation, Sciences et Développement économique Canada, ou ISDE, élabore des lignes directrices depuis son annonce du 14 février. L'ASPI a créé un outil pour compiler les universités et les laboratoires militaires chinois. Cette liste devrait être remise à tous les laboratoires universitaires et gouvernementaux canadiens, à qui on devrait conseiller de ne pas s'associer à des gens de ces établissements. Les employés des laboratoires doivent également faire preuve de diligence raisonnable à l'égard d'autres établissements, puisque les scientifiques chinois inscrivent parfois un autre établissement sur la liste pour dissimuler d'où ils viennent vraiment. Les provinces doivent faire partie de cette démarche.
    Troisièmement, les chercheurs canadiens s’associent à des entreprises de technologies militaires et de surveillance chinoises comme SenseTime, Tencent, Alibaba, iFlytek et Huawei, qui travaillent avec l’armée et qui conçoivent et vendent de l’équipement pour réprimer les Ouïghours et d’autres groupes. Ces entreprises devraient être ajoutées à la liste que j'ai mentionnée. Nous savons ce que les députés pensent du génocide des Ouïghours. Les chercheurs canadiens devraient partager ces préoccupations.
    C'est ce qui m'amène à la question de la liberté universitaire. Je comprends tout à fait que les chercheurs veulent pouvoir établir des partenariats avec qui bon leur semble. Je leur rappellerais simplement le point de vue éthique qu'ils devraient appliquer en tant qu'être humain ayant des valeurs canadiennes. S'ils avaient devant eux un Ouïghour ou un Taïwanais, ils auraient certainement honte de décrire leur rôle ayant contribué à la répression ouïghoure et aux armes pour attaquer Taïwan. N'oublions pas non plus le risque pour la réputation de leur université où de telles recherches sont menées.
    Le gouvernement du Canada saisit la gravité des enjeux que j'ai soulevés et a pris de nombreuses mesures pour y réagir, y compris l'organisation de séances d'information à l'intention des administrateurs et des chercheurs universitaires; l'élaboration de lignes directrices faciles à comprendre pour protéger nos recherches; l'examen préalable des propositions aux conseils subventionnaires pour des raisons de sécurité nationale; et la disposition conditionnelle selon laquelle le gouvernement ne financera pas la recherche avec les organismes associés à l'APL.
    Les récentes recommandations du Conseil canadien des affaires sont également importantes. On peut en faire plus, surtout pour harmoniser notre approche avec celle de nos alliés du Groupe des cinq.
    Je vais m'arrêter ici. Merci.
(1535)
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à Anna Puglisi pendant cinq minutes.
    Distingués membres du Comité et du personnel, je vous remercie de me donner l'occasion de participer à la réunion d'aujourd'hui. C'est un honneur d'être ici aux côtés de mon estimée collègue.
    Je suis actuellement chercheuse principale au Centre pour la sécurité et les technologies émergentes de l'Université Georgetown. Auparavant, j'ai été agente nationale de contre-espionnage en Asie de l'Est pour les États-Unis et j'ai passé la majeure partie de ma carrière à examiner les stratégies de développement en sciences et technologies et d'acquisition de technologies de la Chine.
    À la demande du Comité, mon témoignage d'aujourd'hui portera sur la coopération en sciences et technologies avec la Chine. Je donnerai un aperçu du régime de sciences et de technologies de la Chine, je décrirai en quoi les politiques et les programmes chinois défient les normes mondiales de la science et je parlerai enfin de la sécurité de la recherche.
    Enfin, je vous ferai part de certaines leçons apprises et je ferai ressortir les tromperies.
    Le problème ne touche pas seulement le Canada ou les États-Unis, mais toutes les démocraties ouvertes, parce que le système de la Chine est différent du nôtre. Il adopte une approche holistique à l'égard du développement de la technologie et il brouille les frontières entre les secteurs public, privé, civil et militaire. Nos politiques et nos stratégies d'atténuation doivent tenir compte de cette réalité.
    Peu importe leurs opinions personnelles, les scientifiques, les gens d'affaires et les fonctionnaires chinois qui interagissent avec nos universités ou nos entreprises doivent répondre au gouvernement ou aux services de sécurité de la République populaire de Chine si on leur demande des renseignements ou des données.
    La Chine intimide ses opposants et les réduit sans vergogne au silence. Ce phénomène n'a fait que prendre de l'ampleur au cours des dernières années, et il touche de plus en plus les citoyens à l'étranger, tant au Canada qu'aux États-Unis.
    Nos établissements ne sont pas outillés pour contrer la menace à la liberté universitaire et la manipulation de l'opinion publique que posent les politiques et les actions de la Chine. À bien des égards, Pékin comprend nos tensions sociétales, et son habileté politique est dirigée contre elles; la Chine fait valoir que tout changement de politique constitue du profilage ethnique. Cet effort peut compter sur un financement généreux.
    C'est en raison de ce dernier élément que je tiens à souligner à quel point ces questions peuvent être difficiles et complexes. La xénophobie ou le profilage ethnique n'ont pas leur place dans les démocraties libérales ouvertes. Ces attitudes vont à l'encontre de tout ce que nous défendons. De plus, précisément en raison de ces valeurs, nous devons aller de l'avant et trouver une façon fondée sur des principes d'atténuer les politiques d'un État-nation qui est de plus en plus autoritaire.
    L'importance de la science et de la technologie est la raison pour laquelle la Chine cible nos universités et nos laboratoires. Les technologies émergentes sont de plus en plus au centre de la concurrence mondiale; elles offrent la recherche fondamentale et les développements qui sous-tendent les industries futures et stimulent la croissance économique. Le génie de l'avenir reposera sur la 5G, l’intelligence artificielle, la biotechnologie, les nouveaux matériaux, la science quantique et les domaines actuellement étudiés dans nos universités, nos laboratoires gouvernementaux et nos centres de recherche et développement.
    Pékin considère cette technologie et l'infrastructure robuste de sciences et de technologies nécessaire pour la développer comme un actif national. La façon dont la Chine a structuré son système pour atteindre cet objectif va fondamentalement à l'encontre des principaux principes des normes mondiales, qui comprennent la transparence, la réciprocité et le partage. Pékin, en particulier le président Xi, voit ce développement dans une perspective à somme nulle. Mon mémoire écrit donne beaucoup plus de détails sur les politiques, les programmes et l'infrastructure qui appuient ces efforts.
    Le système juridique de la Chine complique également les collaborations, car ses lois obligent ses citoyens à communiquer des renseignements et des données à des entités chinoises si on le leur demande, peu importe les restrictions imposées à ces renseignements. Plus important encore, à qui appartiennent ces renseignements? Je vous ai également fait part de ces points dans mon mémoire.
    À l'avenir, nous devons tenir compte de ce qui suit.
    Nous devons nous doter de politiques pour la Chine telle qu'elle existe et non pour la Chine que nous voulons. Jusqu'à présent, la plupart des mesures stratégiques ont été tactiques et n'ont pas été conçues pour contrer tout un système qui est structurellement différent du nôtre.
    Il est essentiel que les démocraties libérales ouvertes comme le Canada et les États-Unis investissent dans l'avenir, mais nous devons intégrer la sécurité de la recherche dans ces programmes de financement. Les politiques et les lois actuelles ne suffisent pas à lutter contre l'influence que le Parti communiste chinois exerce dans notre société, surtout dans le milieu universitaire. Il faut commencer par imposer des exigences plus strictes en matière de déclaration de fonds étrangers dans nos instituts universitaires et de recherche ainsi que des exigences claires en matière de divulgation.
    Il faut aussi assurer une réelle réciprocité dans nos collaborations. Depuis trop longtemps, nous fermons les yeux lorsque la Chine ne respecte pas les règles et ne donne pas suite aux détails des collaborations en sciences et technologies. Il doit y avoir des répercussions si on ne communique pas les données, si on donne accès aux installations et, comme ma collègue l'a mentionné, si on cache la véritable affiliation des scientifiques chinois.
    En conclusion, ce qui compliquera également les choses, c'est que la réalité que représente la Chine ne convient pas à ceux qui en bénéficient à court terme. Cela comprend les entreprises qui cherchent à réaliser des profits rapidement, les universitaires qui profitent personnellement du financement ou de la main-d'œuvre bon marché dans leurs laboratoires et les nombreux anciens représentants du gouvernement qui se transforment en lobbyistes chèrement payés au service de sociétés d'État ou soutenues par l'État en Chine.
    Je tiens à remercier encore une fois le Comité de poursuivre la discussion sur cette question.
(1540)
    Il s'agit là de conversations difficiles que les sociétés ouvertes et démocratiques doivent avoir si nous voulons protéger et promouvoir notre compétitivité, nos réalisations futures et nos valeurs. Si nous ne pointons pas du doigt les politiques de la Chine qui violent les normes mondiales et nos valeurs — et si nous n'y résistons pas —, nous ajoutons foi à un système qui mine l'équité, l'ouverture et les droits de la personne. Les Chinois méritent mieux, tout comme, je crois, les Canadiens et les Américains. Notre avenir en dépend.
    Merci.
    Merci beaucoup. Nous avons hâte de recevoir votre mémoire écrit qui est entre les mains des services de traduction et qui sera distribué une fois traduit. Il sera également affiché sur notre site Web.
    Avant de passer aux questions des députés, j'aimerais souhaiter la bienvenue au député David Lametti. C'est un plaisir de vous accueillir au sein de ce comité.
    Madame Jaczek, nous sommes également heureux de vous accueillir. Nous serons ravis de pouvoir compter sur votre expérience pendant nos discussions.
    Bienvenue également à Anju Dhillon, qui remplace aujourd'hui Ryan Turnbull. Nous sommes heureux de vous avoir parmi nous.
    Nous allons maintenant commencer notre série de questions de six minutes par intervenant, en commençant par Gerald Soroka, du Parti conservateur.
(1545)
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être venus aujourd'hui et de nous avoir fait part de leurs excellents points de vue.
    Madame McCuaig-Johnston, vous nous dites que vous parlez de ces préoccupations depuis des années. Pensez-vous que ce retard à prendre des mesures puisse compromettre la sécurité de la recherche au Canada?
    Je me suis inquiétée du fait que les choses devraient aller plus vite, mais je sais qu'au sein du gouvernement et dans l'ensemble du gouvernement, les fonctionnaires ont essayé de comprendre exactement ce qui se passait et quels leviers ils avaient pour modifier le cours des choses.
    L'un des problèmes, bien sûr, c'est qu'à l'échelon fédéral, le levier, c'est le financement fédéral en recherche et développement. Alors comment le gouvernement doit‑il aborder cela?
    C'est quelque chose qui doit se faire en étapes. Ils ont commencé par des séances d'information à l'intention des administrateurs. Ils ont ensuite élaboré des lignes directrices très conviviales. J'ai été impressionnée par ce qu'ils ont pondu. Maintenant, ils sont rendus à l'application de contrôles de sécurité nationale pour les propositions soumises au Conseil de recherche en sciences naturelles et en génie du Canada. Deux tiers de ces propositions ont déjà été renvoyés à leurs demandeurs. On leur a dit qu'elles étaient refusées parce qu'elles présentaient un risque pour la sécurité nationale. Voilà qui a de quoi inquiéter, puisque cela signifie que pendant toutes ces années, une forte proportion de propositions présentait un risque pour la sécurité nationale.
    Je suis très heureuse que le gouvernement aille de l'avant et examine ce qu'il peut faire d'autre. J'attends avec impatience le rapport de ce comité, car je pense qu'il viendra s'ajouter à l'ensemble des travaux sur ce qui peut être fait de plus.
    Dans un ordre d'idées, les universités cherchent à se procurer de l'argent ou un soutien financier. L'une des choses que le gouvernement a dites, c'est que si vous êtes en partenariat avec la Chine et que vous obtenez un financement, il vous refusera le sien. Or, les Chinois ont des ressources considérables. Sachant cela, l'attitude du gouvernement est‑elle vraiment une protection ou un simple effet de toge qui équivaudrait à dire que, oui, cela le préoccupe, mais pas tant que cela?
    Eh bien, il y a deux dimensions à cela. Il y a le partenariat avec un chercheur universitaire en Chine, qui peut être une personne seule ou un groupe. Or, là où cela devient vraiment problématique, c'est lorsque ce sont des entreprises chinoises qui approchent les chercheurs au Canada et qui leur offrent de grosses sommes d'argent à condition que l'ensemble du contrat soit tenu secret et que la haute direction de l'université ne dise jamais à quiconque le demande que cet argent vient de Huawei ou d'une autre entreprise chinoise.
    C'est un problème de taille, et les universités ont dissimulé les renseignements au sujet de ces ententes secrètes. On a appris qu'un laboratoire d'intelligence artificielle de l'Université de l'Alberta était partenaire de SenseTime et d'Alibaba. L'établissement a retiré cette information de son site Web, mais si vous allez sur le site Web du Hong Kong AI Lab, vous verrez qu'il y a un laboratoire universitaire d'intelligence artificielle en Alberta, l'Alberta Machine Intelligence Institute, qui travaille en partenariat avec Alibaba Group, Alibaba Cloud, Alibaba Damo Academy Alibaba Entrepreneurs Fund et SenseTime, et qu'Alibaba a mis au point une technologie de surveillance qui sera en mesure de repérer un Ouïghour, ou une autre minorité, dans une foule. Cela fait partie de la répression. C'est très inquiétant.
    Oui. Les enjeux problématiques ne manquent pas. C'est pour cette raison que nous menons cette étude.
    Je m'adresse maintenant à Mme Puglisi.
    Vous avez davantage traité des États-Unis et de certaines de leurs politiques. Pensez-vous que le gouvernement canadien en fait assez? Dans la négative, que pouvons-nous faire pour nous améliorer?
    Comme je l'ai dit, je pense qu'il s'agit d'un problème qui touche non seulement le Canada et les États-Unis, mais aussi d'autres démocraties ouvertes et libérales. Je pense que ce qui complique tellement ce démarrage, c'est que nous espérions que ces collaborations — en particulier lorsque de nombreuses personnes y participaient — conduiraient à une Chine plus ouverte et que nous n'allions pas nous retrouver là. C'était ce sur quoi nous misions, en particulier il y a 10 ou 20 ans. Je pense que le mouvement général n'est pas aussi rapide que je l'espérais.
    L'examen de l'origine des fonds et des programmes de promotion des talents est un très bon début, mais il faut aussi dire les choses telles qu'elles sont et faire prendre conscience aux gens qu'il s'agit des politiques et des programmes d'un État-nation.
     Il s'agit également d'investir dans notre propre avenir et d'examiner l'importance de la recherche fondamentale. Ce qui n'est vraiment pas évident, c'est qu'au fur et à mesure que la Chine devient plus compétente, elle cherche à s'immiscer toujours plus tôt dans le cycle de développement, et que nos systèmes ne sont pas configurés pour contrer cela. Nos systèmes sont conçus pour contrer le vol de technologies militaires et d'autres choses. Je pense que cela nous oblige vraiment à réfléchir à une manière différente de faire les choses.
    Je vous remercie.
(1550)
    Vous avez 30 secondes.
    Vous devrez probablement répondre par écrit, alors. Pourriez-vous nous donner des informations sur... Manifestement, le gouvernement est assez confiant — pas seulement celui‑ci, mais beaucoup d'autres aussi. Quels types d'opportunités devrions-nous saisir en collaboration avec les universités pour nous assurer que nous ne perdons pas nos ressources et notre technologie, en particulier pour qu'elles ne tombent pas entre les mains d'entités étrangères telles que la Chine?
    Je pense que mon temps de parole est terminé.
    Vous y étiez presque, mais c'était une bonne question. Nous avons hâte de lire la réponse.
    Maintenant, pour les libéraux, nous avons Lena Metlege Diab.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins qui comparaissent devant nous aujourd'hui. Vous avez toutes deux une expérience et une expertise phénoménales. Merci d'être venues témoigner.
    Madame McCuaig-Johnston, j'ai une question à vous poser. Notre gouvernement s'efforce d'améliorer la sécurité de la recherche au Canada. Il y a quelques années, le ministère de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie a publié des lignes directrices sur la sécurité nationale des partenariats de recherche. J'aimerais savoir ce que vous pensez de ce document.
    J'ai trouvé que c'étaient d'excellentes lignes directrices. J'ai été très impressionnée. Elles expliquent comment protéger votre propriété intellectuelle dans le cadre d'un partenariat direct et comment protéger votre matériel lorsque vous voyagez. Il y avait des listes de contrôle et des exemples de choses qui peuvent tourner mal. J'ai trouvé que c'était très convivial.
    C'était la première démarche du gouvernement, et je l'ai trouvée très bien. Il a fait plus depuis, ce qui m'a encouragée.
    Quels seraient, selon vous, les prochains gestes optimaux qu'il faudrait poser?
    Le ministre Champagne a dit qu'il voulait interdire toute recherche universitaire de quelque nature que ce soit avec toute institution universitaire militaire ou de défense chinoise. J'espère qu'il s'agit d'une liste très large. Ce que je veux dire, c'est qu'il y a en Chine 65 universités militaires proprement dites et 160 laboratoires civils associés qui se concentrent sur la recherche militaire. J'espère que tous ces établissements seront inclus dans la liste que le ministère est en train de préparer et que cette liste sera publiée prochainement. Le plus tôt sera le mieux, parce que les chercheurs sont en train de soumettre leurs propositions pour leurs prochains projets de recherche et qu'il est important qu'ils connaissent les organismes avec lesquels ils ne doivent pas s'associer. Je dis depuis le début que nous devrions donner la liste de l'Australian Strategic Policy Institute à tous les chercheurs et laboratoires gouvernementaux du Canada afin d'assurer que ces derniers ne s'associent pas avec ceux qui y figurent.
    Je pose souvent cette question parce que l'éducation relève essentiellement de la compétence des provinces, mais il est évident que le gouvernement fédéral accorde beaucoup de subventions et d'argent pour la recherche, etc. Que recommanderiez-vous au gouvernement du Canada, aux provinces et au secteur universitaire? Quel devrait être, selon vous, le rôle de chacun? Comment pourrions-nous créer un système qui leur permettra de partager l'information autant que possible, compte tenu de la complexité de ce que nous avons?
    La députée a elle-même très bien expliqué comment les gouvernements peuvent travailler ensemble.
    J'ai passé mes huit premières années au gouvernement de l'Ontario, principalement dans le domaine des relations fédérales-provinciales. J'aimerais que les provinces soient présentes à chaque étape du processus et qu'elles participent au processus décisionnel quant à ce qui est communiqué aux universités.
     Il sera donc important que les provinces fournissent des listes et des directives aux universités concernant les entreprises avec lesquelles elles ne doivent pas s'associer, par exemple, et qu'elles apportent une aide supplémentaire aux chercheurs universitaires.
    Tout au long de ce processus, les provinces ont eu tendance à dire qu'il s'agit de sécurité nationale et que la sécurité nationale n'est pas de leur ressort — que c'est l'affaire du gouvernement fédéral —, mais le gouvernement fédéral a pris ses responsabilités. Il assume ses responsabilités et il peut aider les provinces à relayer le message à leurs universités.
(1555)
    Merci.
    Il me reste une minute.
    Je suis désolée. J'ai pris un vol de nuit depuis la Colombie-Britannique et je ne suis pas habituée à cela. De toute évidence, j'en ressens les effets.
    Madame Puglisi, d'après votre expérience, avez-vous quelque chose à dire en lien avec ma dernière question?
    Je pense que le partage de l'information est vraiment essentiel. Nous nous débattons également avec cela aux États-Unis, c'est‑à‑dire avec la manière de fournir à nos universités et même à nos entreprises le type d'informations dont elles ont besoin pour faire les bons choix.
    Or, ce qui est tout aussi important, c'est d'exiger le même type de transparence que celle que nous recevons lorsque nous collaborons avec d'autres entités. C'est à l'entité chinoise qu'il incombe de faire preuve de transparence et de fournir ce type de renseignements. Or, souvent, nous ne voyons pas ce genre de transparence et de réciprocité, alors que c'est pourtant vraiment essentiel.

[Français]

     Merci.
    Monsieur Blanchette‑Joncas, vous avez maintenant la parole pour six minutes.
    Je me permets d'abord de saluer nos collègues qui se joignent à nous. Je trouve intéressant que le gouvernement veuille ajouter de nouveaux membres à cet important comité. Depuis six mois, nous attendons la venue du ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie. Tous les membres du Comité étaient d'accord pour l'inviter à venir témoigner et nous expliquer les décisions de son budget. À défaut de recevoir le ministre, nous accueillons maintenant d'anciens ministres parmi nous. Nous avançons, il faut le souligner.
    Je reviens aux choses concrètes et à notre étude d'aujourd'hui.
    Madame McCuaig‑Johnston, je vous félicite et vous remercie de votre engagement des 37 dernières années. Ce n'est pas banal. Vous avez de l'expertise en la matière, et nous sommes contents que vous soyez parmi nous aujourd'hui.
    Lors de la dernière réunion du Comité, mercredi dernier, je vous ai citée en parlant des approches à privilégier dans les cas de collaboration scientifique. Vous aviez déclaré qu'un ensemble de règles différentes devrait s'appliquer dans l'évaluation des collaborations scientifiques avec des chercheurs issus de régimes autoritaires, comme la Russie ou la Chine. Différents témoins nous ont fait part de leurs opinions mitigées sur cette proposition. M. Gordon Houlden a souligné la nécessité de s'attarder également au sujet de la recherche, alors que Mme Cherie Wong, une autre témoin, a parlé d'une approche sans égard au pays.
    Pouvez-vous parler en détail de votre approche? Par ailleurs, que pensez-vous des positions des autres témoins?

[Traduction]

    J'ai eu le plaisir d'assister à la réunion de ce comité. Je sais à quoi vous faites allusion.
    Mon point de vue est très proche de celui de Gordon Houlden: nous devons évaluer non seulement le professeur et l'établissement dont il est issu, mais aussi le domaine ou la discipline de recherche. Le comité a examiné une liste de ces domaines. L'Australian Strategic Policy Institute a dressé une liste de domaines de recherche. J'y ajouterais la science polaire et d'autres encore, comme l'aérospatiale, les terres rares et les semi-conducteurs. Même la recherche fondamentale sur les propriétés des matériaux de pointe et la recherche fondamentale sur le cerveau sont potentiellement problématiques maintenant que la Chine est... Aux termes de sa politique en matière d'armement, la Chine souhaite développer des armes qui répondent à l'objectif de gagner sans combattre. C'est là que la recherche sur le cerveau entre en jeu.
    Je ne suis pas de ceux qui prônent qu'il faut être agnostique quant à l'origine des personnes ou de ceux qui disent qu'il faut obliger les chercheurs de tout pays quel qu'il soit à passer par ce processus. Je suis également préoccupée par le registre; c'est peut-être à cela qu'il va ressembler. Je pense que nous devrions nous concentrer sur les pays que nous savons risqués et sur ce qui est documenté. Dans cette optique, la Chine vient assurément en première place, ainsi qu'en deuxième, troisième et quatrième place.
(1600)

[Français]

     Merci beaucoup.
    Selon vous, de quelle façon devrait-on traiter la collaboration entre les différents pays? Par exemple, l'Australie a mis en place certains mécanismes. Les universités australiennes doivent informer le gouvernement chaque fois qu'il y a des partenariats ou des collaborations avec des pays étrangers ciblés.
    Que pensez-vous de ces mesures? Par ailleurs, selon votre expertise, comment devrions-nous traiter les collaborations avec différents pays?

[Traduction]

    Je pense que la mesure australienne est intéressante. Il s'agit simplement d'indiquer en toute transparence quels sont les partenariats proposés. C'est un des éléments, mais il y en a beaucoup d'autres.
    Nous devons également garder à l'esprit que la Chine n'a pas d'accord réciproque avec nous. Elle veut s'approprier tout notre travail, mais elle n'est pas très enthousiaste à l'idée de partager ce qu'elle fait avec nous. Elle dispose d'une énorme base de données pour ses recherches. En mars, elle a coupé l'accès à l'ensemble de sa base de données aux chercheurs étrangers. La Chine a des recherches dans des domaines technologiques stratégiques qui sont examinées avant d'être publiées. Si un élément est trop stratégique et trop sensible, il n'est pas publié, même s'il a été développé avec des chercheurs étrangers.
    Ce sont là quelques-uns des éléments que nous devons garder à l'esprit lorsque nous évaluons des chercheurs chinois.

[Français]

    Merci beaucoup, madame McCuaig‑Johnston.
    J'aimerais revenir aux lignes directrices et aux progrès.
    En 2021, les Lignes directrices sur la sécurité nationale pour les partenariats de recherche ont été publiées.
    Selon vous, deux ans plus tard, quelles avancées ont été réalisées sur la question de la sécurité de la recherche, et quels ont été les obstacles rencontrés au cours du processus?

[Traduction]

    Comme je l'ai dit, je pense que ces lignes directrices sont très utiles. Elles sont faciles à utiliser pour les professeurs. Ces derniers peuvent examiner et évaluer chacun de leurs partenariats de recherche en fonction de ces lignes directrices. En cas de question ou de préoccupation, ils peuvent s'adresser à leur bureau de la recherche et des relations internationales.
    Les grandes universités de recherche disposent désormais de chargés de recherche en matière de sécurité nationale, qui ont généralement une expérience dans ce domaine.
    C'est formidable. Je vous remercie. Vous avez réussi à répondre dans les temps.
    Nous passons maintenant à Richard Cannings du Nouveau Parti démocratique.
    Je remercie les deux témoins d'être avec nous aujourd'hui. C'est un sujet très intéressant.
    J'aimerais revenir sur ce dont M. Blanchette-Joncas parlait avec Mme McCuaig-Johnston, c'est‑à‑dire sur la question des lignes directrices et des listes d'établissements et sujets à éviter.
    A‑t‑on l'impression que ces lignes directrices et ces listes sont observées? Entre les provinces et le gouvernement fédéral, c'est un paysage qui peut être très rocailleux. Je me demande où nous en sommes quant à notre capacité à retracer tous ces partenariats et arrangements.
    Cette question s'adresse‑t‑elle à moi?
    Oui, merci.
    Merci beaucoup.
    En fait, nous n'avons pas encore commencé à remettre les listes aux universités. Nous avons dit que tout ce que ces dernières proposent et que les conseils subventionnaires — en consultation avec Innovation, Sciences et Développement économique Canada et le Service canadien du renseignement de sécurité — jugent délicat sera examiné. Ce que nous devons vraiment faire, c'est donner les listes des établissements aux universités et leur dire qu'elles ne s'associeront à aucune d'entre elles.
    Je pense en outre — et M. Houlden l'a également laissé entendre — que cela a aussi à voir avec les sujets et les disciplines. Même pour quelque chose d'apparemment innocent dans une université civile, nous savons que, dans le cadre de la politique d'intégration du développement technologique civil et militaire, les chercheurs civils sont obligés de s'associer à l'armée chinoise si on le leur demande. C'est ce qui m'a amené à me préoccuper de cette situation il y a de nombreuses années.
    Il s'agit à la fois d'une liste d'établissements et d'une liste de sujets. Je pense que le pire scénario serait que les universités reçoivent simplement une liste très restreinte d'universités dont les noms contiennent les mots « militaire » ou « défense ». Ce ne serait pas du tout suffisant.
(1605)
    Pour que nous puissions avoir l'impression que cette question est vraiment prise en compte au niveau national, pensez-vous qu'il serait nécessaire de conclure une entente fédérale-provinciale pour constituer une telle liste combinée?
    Une grande partie de ce travail a déjà été effectuée par l'institut de politique stratégique de l'Australie, l'IPSA. Nous pouvons adopter leur liste en toute aise et sécurité.
    Le gouvernement fédéral devrait expliquer aux provinces comment la liste a été élaborée, et peut-être demander à des représentants de l'IPSA de venir les rencontrer et de passer la liste en revue avec elles. Je pense que cela contribuerait grandement à aider les provinces, qui cherchent à obtenir des conseils à ce sujet. Elles ne veulent pas faire des bévues. Elles ne veulent pas aider l'Armée populaire de libération, mais elles ont besoin de directives claires, de lignes directrices et de listes de contrôle pour être sûres d'agir de façon sécuritaire.
    Le gouvernement fédéral fournit une partie de cette capacité parce que certaines provinces pourraient déclarer qu'elles ne peuvent pas surveiller toutes les activités exercées dans nos universités.
    Le gouvernement fédéral pourrait‑il jouer ce rôle, à condition que les provinces acceptent cette liste et ces lignes directrices?
    Oui, monsieur le président. Je pense que ce serait un très bon point de départ.
    Comme je viens du secteur des relations fédérales-provinciales, je sais que ces choses peuvent traîner en longueur. J'espère que ces consultations se dérouleront très rapidement, ce qui témoignera du degré d'urgence que nous ressentons tous au sujet de ces questions.
    Enfin, je précise rapidement que vous avez mentionné qu'un certain contrôle de sécurité des propositions de recherche était exercé et que deux tiers d'entre elles étaient renvoyés.
    Pouvez-vous me fournir plus de détails à ce sujet? Combien de propositions ont été examinées? Toutes ces propositions ont-elles été présentées aux trois conseils subventionnaires?
    Je crois que, dans le cadre du premier cycle, il s'agissait d'environ 36 des propositions du CRSNG. Je crois que la statistique des deux tiers est tirée de ce cycle. Je mentionne encore une fois que ce chiffre est très inquiétant.
    Ont-elles été refusées en raison des institutions avec lesquelles ils faisaient équipe?
    Je crois qu'un examen plus détaillé en matière de sécurité nationale a été effectué pour chacun d'entre eux, avec la participation de représentants d'ISED et du SCRS.
    Je vous remercie de vos réponses.
    Je dois approcher de la fin de mon temps de parole.
    Il vous reste environ 30 secondes.
    D'accord.
    Alors, je vais maintenant m'adresser à Mme Puglisi et lui demander la meilleure voie à suivre pour un pays comme le Canada.
    Je pense qu'il est très difficile de dresser des listes, parce que nous traitons avec un acteur très dynamique qui retire des renseignements d'Internet, qui est dissimulateur et qui n'est ni coopératif ni transparent. Comment pouvez-vous collaborer ou mettre en commun vos connaissances si vous mettez hors ligne l'ensemble de votre fonds universitaire de renseignements scientifiques fondamentaux en mandarin?
    C'est là une première étape...
(1610)
    Je vais devoir vous retenir cette fois‑ci. Je vous remercie d'avoir trouvé le temps de fournir cette information.
    Nous allons maintenant passer à Corey Tochor qui aura la parole pendant cinq minutes.
    Je vais permettre au témoin de poursuivre sa réponse. Vous avez parlé d'une liste et d'une première étape, madame Puglisi.
    Merci.
    J'allais juste dire que la Chine n'est pas un acteur neutre, et c'est l'un des défis que posent les listes. Le fait de disposer d'une matrice des risques qui tient compte des recherches et de ce que nous savons de l'entité est un bon début.
    Cela doit venir du gouvernement fédéral. Les institutions n'ont pas la capacité d'établir cette matrice. En convenez-vous?
    J'en conviens. Ce travail est un véritable défi.
    Pensez-vous que le Canada coordonne suffisamment ses activités avec ses alliés, en particulier avec l'Amérique, en ce qui concerne la menace que représente la RPC?
    J'ai quitté le gouvernement depuis un certain temps, alors je ne suis pas au courant des conversations actuelles, mais je pense que les États-Unis et le Canada sont des partenaires qui partagent les mêmes vues et que nous devons vraiment travailler ensemble pour contrer cette menace, parce qu'elle submerge nos systèmes d'une manière qu'ils ne sont pas en mesure de contrer. Donc, oui, la coordination s'impose.
    Je partage cet avis. Je soupçonne que des tensions ont surgi au fil des ans, en particulier à la suite de la décision de ne pas autoriser Huawei à participer à leur réseau que le Groupe de cinq a prise. Pour une raison ou une autre, le gouvernement actuel n'a pas pris de décision à cet égard, ce qui a probablement mis à rude épreuve la relation entre nos deux pays.
    Au cours de votre témoignage devant le Sénat américain il y a plusieurs années, vous avez indiqué que la RPC s'en prenait également de plus en plus aux Chinois non ethniques. Pouvez-vous préciser quels sont les groupes visés par la RPC?
    Il s'agirait notamment d'experts dans les différents domaines technologiques.
    Auparavant, la plupart des programmes de promotion des talents étaient vraiment axés sur les scientifiques d'origine chinoise du monde entier, quelle que soit leur nationalité. Ils utilisaient, de la même manière, les mêmes tactiques — comme le financement et l'espace de laboratoire — pour attirer des gens. Le problème, c'est que ces contrats manquent souvent de transparence et que les institutions d'accueil n'en ont pas connaissance.
    Avez-vous entendu parler de la terminologie « nourrir, piéger, tuer », dont on nous a fait part la semaine dernière?
    Je n'ai pas entendu parler de cela.
    On entend de plus en plus souvent parler d'eux comme d'une source de nourriture, comme dans l'exemple qui nous a été cité la semaine dernière où l'on offrait aux gens trois fois leur salaire, où on les piégeait et où on leur demandait par la suite de faire des choses louches pour l'hôte.
    Passons à notre autre témoin d'aujourd'hui. Vous avez parlé des trois principaux pays cibles de la Chine dont nous devrions nous préoccuper. Quelles sont ces trois principales cibles? De quels pays s'agit‑il?
    C'est très clair. Leurs principales cibles sont les États-Unis, le Royaume-Uni et le Canada. Là encore, l'institut de politique stratégique de l'Australie — Australian Strategic Policy Institute — a mené de nombreuses recherches statistiques sur la mesure dans laquelle les chercheurs militaires chinois sont présents dans nos universités. Cette situation est très préoccupante.
    Le Canada est parmi les premières cibles parce que nous sommes avancés dans toutes les technologies stratégiques que l'Armée populaire de libération, ou l'APL, veut acquérir. Sans surprise, ces technologies sont l'intelligence artificielle, la photonique, l'informatique quantique...
    Ces trois pays sont tous membres du Groupe des cinq. Il doit donc y avoir une certaine coordination entre eux. Si, dans le passé, notre approche à l'égard de Pékin comportait des lacunes, quels sont les autres pays qui se tournent de plus en plus vers la Chine?
    Demandez-vous...?
    Je veux parler de la recherche. Même si nous devrions nous inquiéter pour le Canada, quels sont les autres pays qui devraient être plus inquiets — non pas le Royaume-Uni et les États-Unis, mais plutôt les pays qui sont totalement soumis à leur contrôle?
    Vous voulez dire les pays qui sont sous le contrôle de la Chine?
    Oui.
    Mme Puglisi le saurait peut-être mieux que moi, mais je sais que de nombreux efforts de collaboration avec l'Allemagne et l'Australie ont été déployés. L'Australie est en train de prendre les choses en main à cet égard, et elle constitue vraiment un modèle pour le Canada.
    En ce qui concerne la coordination du Groupe des cinq, je crois que de nombreuses consultations ont été menées, mais selon moi, aucune coordination n'a été entreprise jusqu'à maintenant. J'aimerais qu'une coordination existe et que les alliés harmonisent leur approche pour que les universités agissent uniformément en ce qui concerne les universités chinoises avec lesquelles il ne faut pas collaborer.
(1615)
    Je vous remercie.
    J'ai toujours envie d'intervenir, mais en tant que président, je dois faire avancer les choses. Madame Jaczek, la parole est à vous pendant cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je vous remercie de l'accueil chaleureux que vous m'avez réservé. Je me réjouis de participer à la séance.
    De plus, je remercie les témoins de leur présence.
    Madame McCuaig-Johnston, vous avez fait allusion à la politique de notre gouvernement en ce qui concerne les mesures que nous avons prises jusqu'à maintenant. Vous avez déclaré que vous aimeriez peut-être que les choses se déroulent un peu plus vite.
    Le gouvernement s'est notamment adressé à nos organismes de financement. Il s'agit d'organismes que nous finançons et qui, par la suite, financent eux-mêmes la recherche. Nous avons beaucoup parlé de listes. Le gouvernement s'est‑il assuré que nous avons communiqué avec tous les organismes qui financent eux-mêmes la recherche? Lorsque vous avez énuméré certains secteurs, j'ai pensé en particulier à Génome Canada. Avons-nous veillé à ce que tous ces organismes soient également au courant de nos préoccupations?
    En fait, lorsque le gouvernement a indiqué qu'il allait faire appel à d'autres organismes que le CRSNG, notamment aux IRSC et au CRSH, j'ai remarqué que Génome Canada ne figurait pas dans cette liste d'organismes. J'étais très inquiète. Il y a environ un an, Radio-Canada a mené une grande enquête sur la société chinoise BGI et la recherche génomique qu'elle menait en collaboration avec des institutions canadiennes, des hôpitaux universitaires et des universités. BGI leur fournissait gratuitement des équipements à condition que BGI reçoive toutes les données générées par ces équipements. Cette situation très inquiétante et alarmante. C'est la raison pour laquelle je pense que Génome Canada devrait faire partie des organismes.
    En ce qui concerne ces autres possibilités en matière d'organismes, avez-vous une liste à nous proposer ou des suggestions à nous faire?
    Oui, je crois que ce sont les quatre organismes à utiliser.
    Lorsque l'information a été rendue publique, à savoir que le programme était élargi afin d'inclure ces trois organismes, j'ai été interviewée, et j'ai suggéré que Génome Canada soit également ajouté à cette liste d'organismes. Toutefois, je ne sais pas si cela sera fait.
    Je vous remercie de cette suggestion pratique.
    En lisant certains des documents d'information qui nous ont été remis, j'ai remarqué que certains chercheurs universitaires hésitaient plutôt à accepter certaines des suggestions formulées. Je citerai notamment un article qui a paru dans le Globe and Mail:
M. Wong de l'Université de Toronto a défendu la collaboration de longue date de l'université avec NUDT,...
    — C'est l'une des organisations chinoises —
... en indiquant que les documents étaient publiés dans « des publications universitaires réputées et évaluées par des pairs qui sont facilement accessibles ».
    Cela laisse entendre que cette information est publique et que tout le monde y a accès, pas les chercheurs chinois en particulier.
    Avez-vous des observations à formuler à ce sujet?
    J'en ai effectivement.
    C'est ainsi que les chercheurs voient les choses. Ils déclarent ce qui suit: « Mes amis qui vivent en Chine et que je connais depuis 25 ans ne feraient jamais rien d'inconvenant ». Toutefois, lorsque des chercheurs militaires participent au processus de recherche, ils peuvent réorienter la recherche vers les priorités qu'ils poursuivent au sein de l'APL, que ce soit par l'intermédiaire du National University of Defense Technology, ou NUDT, ou d'une université civile qui travaille en partenariat avec l'armée chinoise.
    Nous entendons souvent l'expression « double usage ». Cette expression donne l'impression qu'il s'agit d'un équipement qui se trouve sur une étagère quelque part et que l'on peut l'utiliser pour fabriquer du matériel de défense ou un dispositif du domaine civil, comme un avion ou quelque chose d'autre. Quiconque vous parle de double usage dans le contexte du programme de fusion militaire et civile de la Chine ne sait pas de quoi il parle, à mon avis, parce que c'est une approche beaucoup trop simpliste. Les choses sont beaucoup plus nuancées. Le fait que des chercheurs chinois — même ceux qui travaillent en partenariat avec des chercheurs civils, qui à leur tour travaillent en partenariat avec des Canadiens — fassent partie de ce processus de recherche redirigera l'innovation canadienne vers l'armement de l'APL, et nous ne saurons jamais comment cela s'est passé. Cela se produit parce que le système de recherche chinois n'est pas transparent.
(1620)
    Me reste-t‑il encore du temps?
     Il vous reste 30 secondes.
    Vous avez également fait allusion à des entreprises privées qui font appel à des chercheurs universitaires. Je suis certaine qu'en fait, dans de nombreux cas liés à ce type de recherche, les résultats ne sont pas rendus publics.
    Non, et la propriété intellectuelle appartient parfois — pas toujours, mais parfois — à l'entreprise chinoise.
    Oui, c'est là une autre dimension du problème, lequel comporte de nombreuses dimensions. C'est la raison pour laquelle le gouvernement a mis du temps à s'y retrouver.
     Formidable. Merci.

[Français]

     Monsieur Blanchette‑Joncas, vous avez maintenant la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Mes questions s'adressent aux deux témoins, qui seront dans la meilleure position pour y répondre.
    J'aimerais connaître leur opinion sur le témoignage que nous avons entendu la semaine dernière, selon lequel la compétitivité du Canada, notamment avec la Chine, pourrait aiguiser l'appât du gain chez certains chercheurs. Je pense que vous connaissez l'état de la situation.
    Les investissements du gouvernement fédéral en recherche‑développement ont diminué au cours des 20 dernières années. Pourtant, la Chine a considérablement augmenté ses investissements: de moins de 1 % de son PIB, en 2000, ses investissements frôlent maintenant les 2,5 %. Quant à lui, le Canada investissait 2 % de son PIB au début du millénaire, et, en 2020, il a investi un peu plus de 1,5 %.
    Le fait que certains chercheurs étaient intéressés à faire affaire avec certains pays a-t-il déjà compromis la sécurité nationale de la recherche?

[Traduction]

    Je précise encore une fois que l'ASPI a mis au point un outil de suivi des technologies critiques qui montre que la Chine est aujourd'hui en tête dans 37 des 44 technologies. C'est très préoccupant. L'une des raisons pour lesquelles la Chine est en tête est qu'elle s'appuie sur des chercheurs canadiens, britanniques et américains. Dans tous ces domaines technologiques, les États-Unis suivent la Chine, mais où en seraient les Américains si les chercheurs canadiens, britanniques, australiens, allemands et autres s'associaient pour soutenir une norme alliée et un effort allié visant à être en tête de file dans ces technologies?
    Les plans à long terme de la Chine, qui s'échelonne jusqu'en 2050, nous apprennent qu'elle a l'intention d'avoir l'armée la plus puissante, l'innovation la plus avancée et l'économie la plus forte. Pourquoi l'aidons-nous à le faire alors que nous savons qu'elle attaquera ses voisins? Il ne s'agit pas seulement de Taïwan, mais aussi de l'Inde. Vont-ils pêcher tous les poissons des Philippines? Le comportement de la Chine est bizarre et très dangereux.
    Nous devons également consacrer beaucoup plus d'argent à l'innovation au Canada. Les chiffres relatifs à l'innovation ont chuté au cours des 10 dernières années.

[Français]

    Si Mme Puglisi souhaite ajouter quelque chose, elle peut nous faire parvenir une réponse écrite.

[Traduction]

    Génial. Je vous remercie toutes les deux.
    Monsieur Cannings, vous pouvez nous ramener au bercail pendant deux minutes et demie.
    Merci.
    J'aimerais revenir sur la dernière question que M. Blanchette-Joncas a posée à Mme McCuaig-Johnston, c'est-à-dire au sujet de l'investissement du Canada dans l'innovation et la recherche.
    Nous avons entendu tout à l'heure une observation concernant le fait que les scientifiques canadiens sont attirés par la Chine, simplement en raison de l'argent offert pour la recherche et des salaires. Est‑ce un travail que le Canada devrait mieux faire — nos investissements ayant diminué —, et pouvons-nous rivaliser avec la Chine en offrant à nos scientifiques l'argent dont ils ont besoin pour mener à bien leurs recherches?
    Il est très difficile de rivaliser avec la Chine, car elle consacre des milliers de milliards de dollars à la recherche et au développement. Nous n'avons pas les moyens de rivaliser avec eux. Les investissements dans la recherche et le développement ont atteint leur apogée au début des années 2000, à l'époque où nous avions un surplus budgétaire. Depuis que nous avons perdu ce surplus, nous investissons de moins en moins.
    Voilà ce que je constate. Mon premier poste de sous-ministre adjointe relevait du ministère des Finances. Je finançais donc la recherche et le développement. Ces dépenses devraient être considérées comme des investissements. Lorsque nos investissements dans la recherche et le développement pourront être combinés à ceux des États-Unis et d'autres pays, ils auront plus de poids et de force. Nous ne devrions pas prendre nos ressources canadiennes et les donner aux Chinois. Cela me fait mal de le dire, car j'ai travaillé pendant des décennies à mettre au point ces collaborations, mais la Chine a changé sous Xi Jinping.
(1625)
    Pour en revenir à la question des étudiants, dans quelle mesure les chercheurs d'ici sont-ils préoccupés par le fait d'accueillir des étudiants chinois, qui sont bien financés, pour les aider dans leurs travaux de recherche?
    Il vous reste 30 secondes.
    Je pense que la question des étudiants est un défi mondial. Nous en parlons beaucoup aux États-Unis. Notre bassin des STIM est déficient. Il est donc important d'investir dans l'avenir, parce qu'à bien des égards, c'est vraiment ce qui va nous permettre de contrer une grande partie de ce que la Chine est en train de faire.
    Je vous remercie.
    C'est fantastique. Je vous remercie toutes les deux de vos témoignages.
    Je remercie les membres du Comité de leurs excellentes questions.
    Je vous remercie encore une fois, Mme McCuaig-Johnston et Mme Puglisi, d'avoir été avec nous aujourd'hui pour participer à notre étude. Comme nous avons dû couper court à certaines questions, si vous avez de l'information supplémentaire à nous fournir, veuillez l'acheminer à la greffière. De plus, si vous avez des questions, la greffière est là pour nous aider dans toute la mesure du possible.
    Nous allons maintenant suspendre la séance brièvement. Si M. Cannings peut rester en ligne, nous allons accueillir nos prochains témoins. Nous devrions reprendre dans trois ou quatre minutes, alors ne vous éloignez pas trop.
    Je vous remercie encore une fois.
(1625)

(1630)
    Nous reprenons, et bon retour à tous.
    Nous allons passer à notre prochain groupe de témoins. Nous avons eu des discussions fort intéressantes au cours de la première heure, et j'attends avec impatience celles qui vont suivre.
    Nous menons cette étude conformément à l'article 108(3)i) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 5 décembre 2022. Le Comité entreprend son étude sur les répercussions à long terme de l'écart salarial entre les sexes et des groupes en quête d'équité dans le corps professoral des universités canadiennes.
    Je suis heureux de souhaiter la bienvenue à nos témoins.
    Nous accueillons tout d'abord, Airini, provost et vice-présidente académique, de l'Université de la Saskatchewan, et Joy Johnson, présidente, de l'Université Simon Fraser, qui témoigne par vidéoconférence.
    Je vous remercie toutes les deux d'être avec nous aujourd'hui.
    Nous allons commencer par la déclaration liminaire d'Airini. Vous avez cinq minutes. Allez‑y, s'il vous plaît.
     Bonjour. Je vous remercie sincèrement de votre invitation à venir témoigner.
    Je m'appelle Airini. Je suis professeure spécialisée en équité dans l'enseignement supérieur. Au cours de ma carrière, j'ai travaillé pour des gouvernements, l'OCDE et les Nations unies, et j'occupe aussi le poste de provost et vice-présidente académique à l'Université de la Saskatchewan.
    J'aborderai aujourd'hui trois sujets: le contexte entourant les écarts salariaux à l'Université de la Saskatchewan, les mesures que les universités peuvent prendre et les mesures que le gouvernement fédéral peut prendre. Ensemble, nous pouvons faire progresser la science et la recherche au profit d'un Canada plus équitable et plus prospère.
     L'Université de la Saskatchewan est semblable à de nombreuses universités au pays. Actuellement, dans la nouvelle cohorte de professeurs adjoints, nous avons plus de femmes que d'hommes. Au cours de la prochaine décennie, nous nous attendons à ce que les femmes représentent près de 50 % des professeurs titulaires.
     Malgré ces bonnes nouvelles, nous savons qu'il existe un écart salarial, en particulier à l'échelon des professeurs titulaires. Nous suivons des points de données précis. Nous nous efforçons d'évaluer les performances de manière inclusive et d'appliquer une rémunération équitable pour les professeurs féminins, autochtones, de couleur, 2SLGBTQIA+ et ceux qui ont un handicap.
     Les causes de l'écart salarial entre les sexes que nous constatons concernent l'échelon des professeurs titulaires et des personnes qui accèdent à ce rang, les salaires de départ et la productivité de la recherche. Les responsabilités liées aux soins aux personnes âgées et aux enfants influent sur la productivité, comme nous l'avons constaté en particulier pendant la pandémie. Mon collègue, le professeur Scott Walsworth, et d'autres ont récemment écrit sur ce sujet. Il y a le travail de service qui prend beaucoup de temps, l'accroissement de la tâche d'enseignement, et il y a aussi la discrimination en milieu de travail et les réalisations des femmes qui sont dévaluées et sous-estimées. Cela semble indiquer qu'en plus des mesures qui ciblent l'écart salarial entre les sexes, il faut des mesures qui ciblent l'écart salarial lié à la discrimination.
     Que peut donc faire une université pour s'attaquer à ce problème d'inégalité entre les sexes?
     En 2015, l'Université de la Saskatchewan a instauré l'augmentation relative à l'équité salariale entre les sexes, qui a été négociée avec l'association des professeurs et a servi à augmenter le salaire de base. Cette mesure a permis de réduire l'écart salarial de 2 % pour les professeurs féminins. Il s'agissait toutefois d'une solution de fortune, et nous travaillons sur des solutions systémiques, notamment la progression de carrière, la formation à l'EDI — l'équité, la diversité et l'inclusion —, la lutte contre la discrimination, la flexibilité des modalités de travail et l'accès aux services de garde d'enfants. Nous savons que des provinces et des établissements ont instauré la transparence salariale. La recherche a montré que cela peut réduire l'inégalité entre les sexes et réduire les salaires.
    Au sujet de l'écart de salaire qui concerne les Autochtones et les personnes visées par l'équité, la diversité et l'inclusion, notre université a instauré en 2023 une politique de vérification de la citoyenneté autochtone. Cela signifie que nous pouvons désormais effectuer un suivi des mesures d'inégalité comme la rémunération. À l'instar d'autres universités, l'Université de la Saskatchewan procédera à un recensement périodique de l'équité, et les données obtenues nous permettront d'examiner la diversité et les écarts salariaux entre les sexes et de déterminer les mesures à prendre. Nous avons dû mettre en place des politiques pour pouvoir commencer ce travail.
    L'inégalité entre les sexes aura deux répercussions à long terme: l'une sur les pensions — et nous savons que le Comité a entendu parler des recherches menées par la professeure Smith-Carrier et son équipe sur l'écart entre les salaires et les pensions des hommes etdes femmes, qui est d'environ un demi-million de dollars et s'accroît tout au long de la carrière d'un professeur féminin —. et l'autre sur le recrutement de talents en science et recherche. Si le Canada veut recruter des chercheurs de haut niveau dans un marché mondial hautement concurrentiel, il est indispensable qu'il se démarque au chapitre de l'égalité des sexes et de l'inclusion. Autrement, nous risquons de continuer à perdre des scientifiques féminins et en quête d'équité malgré leurs hauts niveaux de productivité et de potentiel.
    Vous vous dites sans doute que la majeure partie des mesures nécessaires pour remédier à l'écart salarial dans les universités seront du ressort des universités, et c'est vrai. Néanmoins, le gouvernement pourrait envisager trois leviers de changement: les investissements, le leadership et l'information.
    Sur le plan des investissements, les conseils subventionnaires sont la principale voie par laquelle le gouvernement peut exercer des pressions. Le gouvernement pourrait souhaiter demander aux universités les données qu'elles récoltent et s'en servir pour orienter ses politiques. C'est ce que les chaires de recherche du Canada ont fait avec beaucoup de succès. Les conseils subventionnaires pourraient demander aux bénéficiaires de subventions de garantir l'équité salariale au sein de leurs équipes de recherche.
    Sur le plan du leadership, le rapport du Comité sera important, car les écarts salariaux ont des répercussions sur la science et la recherche. Le gouvernement pourrait demander que les résultats sectoriels fassent l'objet d'un rapport.
    Sur le plan de l'information, des audits continus sur les salaires et le genre sont déjà en cours grâce au Cadre des résultats relatifs aux genres du gouvernement. De pair avec les universités, ce cadre pourrait servir à produire des études de cas, tout d'abord sur les écarts salariaux constatés chez les professeurs des universités canadiennes.
     En conclusion, chacun a le droit d'être rémunéré équitablement. Le gouvernement et les universités peuvent travailler ensemble pour attirer et retenir les talents nécessaires à l'avancement de la science et de la recherche au profit d'un Canada plus équitable et plus prospère.
    Je vous remercie.
(1635)
    Je vous remercie beaucoup. Vous avez terminé à la minute près. Je vous en suis reconnaissant. Je suis impatient d'entendre les questions sur votre exposé.
    Nous passons maintenant à Joy Johnson, présidente de l'Université Simon Fraser, qui nous présentera la deuxième déclaration liminaire.
    Je vous remercie beaucoup. Je vais probablement faire écho à certains points d'Airini dans son excellent exposé.
    Je veux remercier le Comité de son invitation à témoigner aujourd'hui. Je tiens à souligner que je m'adresse à vous aujourd'hui depuis les territoires traditionnels non cédés des peuples Musqueam, Squamish, Tsleil-Waututh et Kwikwetlem qui se trouvent sur la pluvieuse côte Ouest.
     Je vous suis reconnaissante de pouvoir participer à ce dialogue.
     À l'Université Simon Fraser et dans les universités du secteur postsecondaire, nous sommes conscients de l'importance de la diversité des points de vue et des perspectives. Dans un secteur historiquement dominé par les hommes, comme l'ont été les universités par le passé, nous prenons très au sérieux la question de la diversité des genres au sein du corps professoral.
     L'université a fait d'importants progrès en augmentant le nombre de professeurs féminins, mais nous savons aussi que ces chiffres ne reflètent pas toute la réalité. La Colombie-Britannique a l'un des écarts salariaux entre les sexes les plus élevés au Canada, les femmes y gagnant 17 % de moins que les hommes en 2022. Ce problème systémique se retrouve dans l'ensemble du réseau d'enseignement postsecondaire.
     En 2015, l'université a réalisé une étude sur les disparités salariales entre les sexes dans son corps professoral. L'étude a révélé que même si nous faisions des progrès en matière de parité hommes-femmes, la représentation accrue ne se traduisait pas par une hausse du salaire des femmes par rapport à celui des hommes. À l'époque, cet écart salarial était d'environ 10 %.
    Il est intéressant de noter que ce résultat ne semble s'appliquer qu'aux professeurs-chercheurs. Nous n'avons trouvé aucune preuve d'un écart salarial entre les hommes et les femmes parmi nos professeurs-enseignants. Nous avons également constaté que l'écart salarial entre les hommes et les femmes parmi les professeurs-chercheurs était largement attribuable à ce que nous appelons des suppléments salariaux « hors échelle », ou à ce que l'on pourrait considérer comme des primes de marché, plutôt qu'à un écart entre les hommes et les femmes dans le classement sur l'échelle des salaires de base.
    Nous avons également constaté que les professeurs qui prennent des congés parentaux ou médicaux, quel que soit leur sexe, ont moins de chances d'être promus, et nous continuons donc à conclure que l'écart salarial entre les hommes et les femmes est réel et systémique. Cependant, il s'agit d'un phénomène complexe, avec de nombreux facteurs qui se chevauchent. C'est pourquoi la présente conversation est si importante.
     J'aimerais vous donner un bref aperçu de certaines des mesures que nous prenons à l'université pour combler l'écart.
     À l'instar de l'Université de la Saskatchewan, nous avons procédé en 2016 à des rajustements salariaux pour commencer à combler l'écart. Ces rajustements comprenaient une augmentation de salaire permanente de 1,7 % pour nos professeurs féminins, ainsi qu'une allocation financière supplémentaire de 1,7 %. Depuis, nous avons constaté que l'écart salarial chez les professeurs-chercheurs se réduit. Il était de 10 %, et il est aujourd'hui de l'ordre de 7 %.
     Il y a encore des progrès à faire.
    L'un des plus grands défis que nous ayons eu à relever pour approfondir la question a été le manque de données exhaustives. Au cours des dernières années, nous avons été de plus en plus préoccupés par les limites des données et les données administratives qui reproduisent la conception binaire du genre, ainsi que par l'absence d'informations sur d'autres dimensions de la diversité pertinentes pour comprendre les inégalités salariales. Nous avons une nouvelle vice-présidente responsable des personnes, de l'équité et de l'inclusion. Dans son travail, elle s'emploie à s'attaquer à ce problème.
     En Colombie-Britannique, plusieurs lois ont été adoptées récemment, notamment une loi sur la transparence salariale et une loi de plus grande portée pour lutter contre le racisme. Nous pensons qu'il s'agit là de mesures législatives importantes qui nous aideront dans notre travail.
     Nous nous efforçons également de réduire les disparités pour d'autres groupes visés par la Loi sur l'équité en matière d'emploi, notamment les personnes handicapées, les Autochtones et les minorités visibles.
     Une grande partie de ce travail repose sur une meilleure collecte de données. À cette fin, nous mettons en place un cadre de données sur la diversité au niveau organisationnel. L'objectif, en fin de compte, est de recueillir de meilleures données, de faire un suivi et de réfléchir très attentivement à nos objectifs en matière de diversité et aux moyens de nous donner un campus plus équitable et plus inclusif.
     Lorsque je suis devenue présidente en 2020, j'ai fait de l'équité, la diversité et l'inclusion l'une de mes priorités. Je pense que c'est une question très importante pour nous tous. Je tiens à dire qu'il reste encore beaucoup de travail à faire. Je suis fière des progrès que nous avons accomplis, tout en étant consciente que nous n'avons pas encore atteint notre but.
    J'ai hâte de répondre à vos questions et de participer à la discussion.
(1640)
    C'est formidable. Je vous remercie, madame Johnson, de votre exposé.
    Nous passons maintenant aux questions, en commençant par Ben Lobb qui a la parole pendant six minutes.
    Je vous remercie beaucoup et je suis heureux d'être ici.
    Ma première question s'adresse à la présidente de l'Université Simon Fraser. Comment est‑ce possible qu'il n'y ait pas d'équité salariale chez les professeurs-chercheurs?
    L'un de nos problèmes est lié au fait que nous avons offert, au fil du temps, des primes de marché dans certains domaines. Il s'agit de primes offertes dans des domaines où il est difficile de recruter des personnes ou dans lesquels les attentes salariales sont plus élevées.
     Par exemple, dans le programme de comptabilité de notre faculté de commerce, beaucoup de professeurs reçoivent des primes de marché, et comme il y a plus d'hommes que de femmes représentés dans ces départements, cela pousse à la hausse les salaires des hommes dans l'ensemble.
     De la même manière, des primes de marché sont aussi offertes dans notre faculté d'ingénierie. Le but est d'attirer et de maintenir en poste les professeurs en leur offrant une rémunération en plus de leur salaire de base, et c'est vraiment ce qui, je pense, tend à exacerber ce problème.
    Pour que les choses soient claires, on a parlé de professeurs-chercheurs et des professeurs-enseignants. Dites-vous que c'est pareil, ou y a‑t‑il une différence entre les deux, selon vous?
    Nous recrutons des professeurs pour l'enseignement. Ils sont chargés de cours à l'université. Leur rôle à plein temps est d'enseigner, et nous ne constatons pas d'écart salarial dans ce groupe, mais nos professeurs qui sont dans des postes menant à la permanence sont également responsables de la recherche, et c'est là que nous constatons des écarts.
     Je pense que cela renvoie à ce que j'ai dit plus tôt au sujet de la prime de marché, mais il y a aussi d'autres éléments qui entrent en jeu comme les congés parentaux et d'autres facteurs qui font en sorte que les gens se retirent du marché du travail pendant un certain temps, ce qui les désavantage du point de vue de la croissance salariale.
(1645)
    Vous avez soulevé un autre point concernant les données. Vous avez dit qu'il n'y avait pas assez de données. Ai‑je mal compris ce que vous avez dit à propos des données?
    C'est un problème pour nous, et je pense que c'est le cas pour de nombreuses universités au Canada. Jusqu'à présent, nous n'avons pas recueilli des informations détaillées auprès de nos professeurs dans toutes les catégories démographiques, ce qui, à mon avis, a des répercussions sur les salaires. À l'heure actuelle, à l'université, nous progressons dans ce dossier, mais nous ne sommes pas encore au bout de nos peines. Nous ne recueillons pas d'informations sur la race. Nous n'avons pas recueilli d'informations sur l'identité autochtone ou sur le handicap.
     Certaines contraintes sont liées aux enjeux de confidentialité, mais nous sommes en train de les surmonter. Des changements législatifs vont nous obliger à recueillir certaines données et à faire rapport à leur sujet, et je pense que cela va beaucoup nous aider.
    Étant donné que c'est un sujet d'étude présent dans la société depuis tellement longtemps, pourquoi n'y a‑t‑il pas eu plus d'efforts au sein des membres du corps professoral pour recueillir ces données? Ils sont des milliers et des milliers à travailler dans les universités au pays. Pourquoi n'ont-ils pas mis en place des groupes de discussion pour étudier cette question il y a des années? Cela ne devrait pas être une surprise aujourd'hui. Avez-vous une idée à ce sujet?
    Je pense que c'est dû en partie à la question de la protection de la vie privée, de la collecte et du stockage des données et de l'utilisation qui en est faite. Je pense que notre collègue de l'Université de la Saskatchewan a également constaté que, par exemple, même la question de l'identité autochtone autodéclarée est compliquée. C'est pourquoi d'autres mesures sont mises en place pour vérifier l'identité autochtone.
    Il s'agit en fait de poser les bonnes questions et de s'assurer que l'on sait comment traiter les données. Même dans le cas de nos données sur les Autochtones, nous devons faire face à des questions de souveraineté des données. Qui sera en mesure d'y accéder de la meilleure façon, et comment allons-nous faire rapport à ce sujet?
    Je peux comprendre cela pour des données particulières dans certains domaines, mais si vous avez des chercheurs masculins et des chercheurs féminins, il ne devrait pas falloir trop de temps pour que les gens puissent dresser cette liste, c'est‑à‑dire combien gagne l'un par rapport à l'autre, et passer cette liste au crible.
     Je suis heureux que nous ayons proposé cette étude. Je le répète: je suis simplement perplexe de voir que les universités, de tous les endroits, sont un point faible dans ce domaine. Pour être honnête avec vous, je n'arrive pas à y croire.
     Quoi qu'il en soit, merci d'être avec nous et d'avoir donné vos explications. Je regrette de ne pas avoir eu l'occasion de poser une question à notre autre témoin.
    Il vous reste une minute, si vous voulez partager votre temps.
    Je vais le donner à Mme Rempel Garner.
    Madame Johnson, je voudrais juste revenir sur ce que vous avez dit, et dont mon collègue a parlé, concernant l'écart d'équité salariale entre les professeurs-enseignants et les chercheurs. Cette semaine, nous avons eu une témoin qui a déclaré: « contrairement aux femmes, le salaire des hommes augmente considérablement en fonction de la productivité universitaire ».
    Est‑ce qu'Airini et vous pouvez préciser certaines des raisons pour lesquelles nous sommes en train de voir se dessiner la dynamique du « travailler plus dur mais être moins bien payé »?
    Je pense qu'il y a toute une série de facteurs qui expliquent cela.
     Je voudrais juste revenir sur le commentaire qui a été fait plus tôt. Nous disposons de données sur ce que j'appellerais des données binaires hommes-femmes à l'université. Nous sommes conscients également qu'il existe un spectre d'identités de genre. Nous ne disposons pas de données à ce sujet dans la mesure dont nous avons besoin.
     D'autres facteurs influencent également les résultats. En termes de...
    Nous allons devoir nous arrêter à cette phrase. Nous pourrons peut-être connaître la suite si la députée décide de reprendre le fil lors de la prochaine série de questions.
    Je cède maintenant la parole à David Lametti pendant six minutes. Allez‑y, je vous prie.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, chers collègues, pour cet accueil chaleureux au sein de votre comité.
    Je vis cette vie depuis 20 ans. À l'époque, je l'ai également vécue par l'entremise de mon ex‑conjointe. Nous appartenions tous deux au même groupe d'universitaires, qui évoluaient ensemble au sein de l'université.
    Il existe un parti pris inhérent, pas uniquement pour les postes d'enseignement, mais pour tous les postes. Dans notre cas, c'était un tiers pour l'enseignement, un tiers pour la recherche et un tiers pour les services. Pour tous les exercices liés au mérite et à l'avancement, on accordait bien plus de poids au tiers de la recherche qu'au tiers des services, ce qui, au fil du temps, a créé des écarts exponentiels, car, comme le souligne l'un des documents qui nous ont été transmis, pour une raison ou pour une autre, les femmes, plus particulièrement, sont souvent davantage associées aux services.
    J'aimerais poser une question plus particulièrement à Mme Johnson: Qu'est‑ce qui fonctionne?
    Depuis la fin des années 1990, nous disposons au Québec d'un très bon système de garde d'enfants. Ma famille en a beaucoup bénéficié à une époque. Il a bien aidé deux universitaires à l'époque. Existe‑t‑il des différences régionales basées sur des politiques comme celles relatives à la garde d'enfants ou des politiques ciblées que certaines universités ont pu adopter pour traiter la question de l'équité salariale au fil des ans? Qu'est‑ce qui a fonctionné?
(1650)
    Oui, je pense que certaines choses ont fonctionné. J'estime que la garde d'enfants en fait partie. Nous disposons sur notre campus d'une garderie accessible à nos enseignants et à notre personnel, mais elle est sursollicitée. Il n'y a pas assez de places. Je pense que ce service peut faire une grande différence.
    Je pense que la formation sur un grand nombre de préjugés inconscients que nous dispensons désormais aux comités d'embauche fonctionne également. J'estime qu'elle est très utile. En toute franchise, il existe une tradition au sein des universités qui veut que les gens se remplacent eux‑mêmes. Le corps professoral est majoritairement masculin et blanc, et ses membres pensent que c'est ce à quoi ressemble l'excellence. Il y a un sentiment de remplacement ou une conception de l'excellence qui se résume à un certain type de productivité.
    Pour répondre à votre question, je pense qu'il a été largement documenté que les femmes se sont investies dans les universités en présidant des comités, en participant à des groupes de travail, etc. Je crois que les chefs de département, les présidents et les doyens examinent maintenant très attentivement cette question pour veiller à ce que le travail soit mieux réparti.
    Voilà quelques-unes des mesures qui peuvent, selon moi, être utiles. Je pense que nous devons continuer de réfléchir à l'établissement de rapports, rester transparents à ce sujet, essayer d'aider les départements et les facultés à comprendre où ces lacunes commencent à apparaître et comment ils peuvent y remédier.
    Merci.
    Airini, vous avez mentionné l'influence de l'investissement et de l'information comme des domaines dans lesquels nous pourrions intervenir. Vous avez cité un exemple positif de ce que nous avons fait jusqu'à présent avec les chaires de recherche du Canada. Pourrions-nous institutionnaliser ce genre de chose sans susciter trop de résistance chez les universitaires qui disent qu'ils ont déjà suffisamment de rapports à rédiger? Quelle est la bonne solution?
    Le secteur veut améliorer l’équité, la diversité et l’inclusion parmi nos chercheurs et au sein de la communauté universitaire dans son ensemble.
    Les données dont nous disposons... Pour répondre à M. Lobb, nous avons des données et nous les affinons de plus en plus. L'argument peut devenir très convaincant, car cela montre aux membres de la faculté à quel point nous sommes proches des objectifs de la vision. Dans le cas de l'Université de la Saskatchewan, l'équité salariale favorise les femmes en tant que groupe. Pour ce qui est des professeurs adjoints, nous n'avons que quelques points d'écart, tout comme pour les professeurs agrégés, ce qui montre les progrès accomplis.
    Lorsque nous disons « passons à l'étape suivante et créons des incitatifs », nous suivons une certaine logique, car cette démarche fait partie de la vision et de l'ensemble des valeurs qui sous-tendent l'université. La diversité est l'une des valeurs fondamentales de l'Université de la Saskatchewan.
    J'ai une petite question à poser à l'une ou l'autre des témoins. La situation est‑elle plus favorable dans les contextes syndiqués que dans les contextes non syndiqués?
    Je faisais partie d'une faculté non syndiquée qui a voté en faveur de la syndicalisation pendant que j'étais au Parlement. Je n'ai donc pas de preuves anecdotiques, mais la situation est‑elle meilleure dans les secteurs syndiqués?
    Je vais répondre.
    Allez‑y, madame Johnson.
    Je pense que c'est difficile à dire. Notre faculté est syndiquée et elle est assurément préoccupée par les questions d'équité salariale, mais elle veut aussi veiller à ce que les personnes qui occupent des postes temporaires soient titularisées, de sorte que lorsque nous essayons de réaliser certains des travaux que nous voulons accomplir en matière d'équité, nous sommes également confrontés à certaines contraintes. Par exemple, si l'on veut procéder à des recrutements ciblés de professeurs autochtones, on se heurte parfois à des réticences.
    Je pense que l'environnement syndiqué présente de gros avantages pour ce qui est de pousser l'administration, mais il y a aussi des contraintes.
(1655)
    Vous avez une dizaine de secondes, donc si vous avez...
    Oui, l'expérience est la même.
    Je remarque que le mouvement visant à augmenter le salaire de base pour les femmes professeures est survenu en collaboration avec le syndicat. Tous les membres peuvent ainsi voir qu'il s'agit d'un enjeu important tant pour l'administration que pour les membres. N'oubliez pas non plus qu'une convention collective est en fait un partenariat. Il s'agit d'un accord signé entre deux parties...
    Parfait.
    ... pour qu'elles avancent ensemble.
    Merci beaucoup.
    La parole est à M. Blanchette-Joncas pour six minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je salue les témoins qui se joignent à nous pour la deuxième heure de la réunion.
    Ma première question s'adresse à Mme Johnson.
    J'ai pris le temps d'analyser un rapport qui concerne une étude sur l'écart salarial entre les sexes au sein du corps professoral des universités canadiennes. Cette étude a été menée sur une période de 10 ans, soit de 1996 à 2016. Bien sûr, elle ciblait les 15 plus grandes universités canadiennes. Dans cette étude, on notait que la rémunération des hommes était, en moyenne, de 2,14 % supérieure à celle de leurs collègues féminines. L'étude a aussi relevé que les écarts étaient d'autant plus importants au sein des grandes universités de recherche du Canada, aussi connues sous le nom « U15 ».
    Madame Johnson, avez-vous des hypothèses qui expliquent pourquoi les écarts salariaux entre les hommes et les femmes sont plus importants au Regroupement des universités de recherche du Canada, le U15?

[Traduction]

    Oui, merci pour cette question.
    Je pense que les écarts sont plus importants dans certains de ces établissements — par exemple à l'Université de Toronto, à l'Université McGill, à l'Université de la Colombie-Britannique, etc. — en partie parce que leurs fourchettes salariales sont très larges et que, en particulier dans certains domaines comme la médecine et le commerce, les salaires ont tendance à être plus élevés. J'ai parlé des traitements différentiels qui sont parfois proposés pour attirer et retenir certains professeurs, et beaucoup de ces domaines sont dominés par les hommes. C'est également la raison pour laquelle nous constatons ce type d'élargissement.
    Voilà pourquoi cette conclusion ne me surprend pas.

[Français]

    Merci, madame Johnson.
    J'ai remarqué que les deux universités qui présentaient l'écart le plus bas sont les deux seules universités québécoises francophones, notamment l'Université de Montréal, où l'écart se situe à 3,6 %, et l'Université Laval, où l'écart se situe à 4,1 %.
    Pouvez-vous nous expliquer pourquoi les universités québécoises francophones ont de meilleurs résultats en matière d'équité salariale au sein de leurs corps professoraux?
    Y a-t-il des leçons à tirer ou des pratiques universitaires desquelles nous devrions nous inspirer?

[Traduction]

    Je me livrerai volontiers à des spéculations. Je ne connais pas la réponse exacte, mais j'aimerais revenir en partie sur la question ou le commentaire précédent concernant l'accès aux services de garde d'enfants.
    Je pense que c'est en fait très important, car lorsque les femmes quittent le marché du travail pendant un certain temps pour prendre un congé parental, si elles ne sont pas en mesure de revenir en temps voulu ou si elles pensent ne pas pouvoir trouver de services de garde d'enfants adéquats, elles s'absentent plus longtemps et l'écart se creuse. Je pense que l'accès à des services de garde d'enfants de qualité est essentiel. Le Québec l'a bien compris.

[Français]

     Merci beaucoup, madame Johnson.
    Pouvez-vous nous parler des données? Je sais que vous avez déjà des données et que vous aimeriez en avoir davantage, afin d'avoir un meilleur portrait de la situation.
    Vos universités respectives colligent-elles et transmettent-elles l'information sur les écarts salariaux entre les genres, entre les hommes et les femmes? Si oui, à quoi la situation ressemble-t-elle? Des tendances ont-elles été observées au cours des dernières années?

[Traduction]

    Merci.
    Je fais partie de la direction d'Universités Canada et je peux dire que le domaine de l'excellence inclusive et de l'équité au sein du corps professoral fait assurément partie des questions prioritaires. Universités Canada a mené des enquêtes auprès de ses membres — plus particulièrement sur la représentation des groupes dignes d'équité — pour les dénombrer, mais à ma connaissance, nous n'avons pas encore mené d'étude sur les enjeux liés aux écarts salariaux. Cette question est également très intéressante...
    Je ne pense pas qu'il y ait eu de partage de données entre les universités. Ce domaine pourrait évidemment faire l'objet d'une collaboration et offrir de nouvelles possibilités.
(1700)

[Français]

     Merci beaucoup, madame Johnson.
    Je vais rester dans le vif du sujet. Selon vous, quel rôle le gouvernement fédéral pourrait-il jouer? Que pourrait faire le gouvernement fédéral pour mieux soutenir l'équité entre les membres des corps professoraux universitaires, notamment?

[Traduction]

    C'est une question intéressante. Je pense que ma collègue de la Saskatchewan y a fait allusion.
    Le Programme de chaires de recherche du Canada est un programme fédéral. Il a introduit des directives très claires sur l'équité pour ce qui est de la distribution de ces chaires, et a créé des exigences en matière de production de rapports. Les universités ont réagi, lentement, certes, mais elles ont réagi.
    J'estime qu'il est important de cerner les leviers existants au niveau fédéral. Je pense qu'ils passent principalement par les conseils subventionnaires. Comme vous le savez, l'enseignement postsecondaire relève de la compétence des provinces, mais le financement de la recherche relève du gouvernement fédéral, par l'intermédiaire des trois conseils et de leurs différents programmes, comme le Programme des chaires de recherche du Canada, les programmes des conseils subventionnaires et le Programme des chaires d’excellence en recherche du Canada.
    Nous avons constaté que les trois conseils avaient commencé à s'assurer que les enjeux liés à l'équité étaient pris en compte, mais ces efforts se limitent à la représentation. Ils n'approfondissent pas davantage la question de l'écart salarial. Ils veulent s'assurer que les universités créent des opportunités pour les femmes, les personnes handicapées, les personnes autochtones et les personnes noires et de couleur, etc. Toutefois, ils ne vont pas plus loin et ne tentent pas de déterminer si ces personnes jouissent également d'une véritable équité salariale.
    Merci beaucoup, madame Johnson. C'est parfait. Il est bon que nos analystes puissent également disposer de ces renseignements.
    Monsieur Cannings, vous avez la parole pour six minutes. Allez‑y.
    Merci, et merci aux deux témoins.
    Je commencerai par Airini.
    C'est un plaisir de recevoir une personne dont les origines néo‑zélandaises sont évidentes. Mon fils et mes petits-enfants vivent en Nouvelle-Zélande. C'est un endroit merveilleux. J'ai lu quelque part que vous aviez traversé le détroit de Cook en kayak, ce qui, à mon avis, est une expérience effrayante, même à bord d'un grand navire. Je vous félicite.
    Vous avez mentionné que l'on a notamment essayé l'approche consistant à augmenter le salaire de base comme solution provisoire. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet et nous expliquer pourquoi il ne s'agit pas d'une solution à long terme?
    Merci beaucoup.
    En 2015, nous avons introduit l'augmentation du salaire de base. Il s'agissait d'un correctif qui a contribué à réduire l'écart de 2 % dans notre cas.
    Nous souhaitons veiller à ce que le système universitaire reste adéquat à long terme. Pour ce faire, nous devons tous être plus attentifs au développement professionnel et à la progression de carrière. Nous devons également accorder plus d'attention à nos actions, nos paroles et nos pratiques en matière d'embauche et de prise de décisions liées à l'établissement des salaires au début de la carrière d'un universitaire. Nous devons investir dans la flexibilité du lieu de travail et dans l'accès aux services de garde d'enfants.
    Les solutions comportent de multiples facettes. Nous pouvons créer des interventions — elles nous aident à combler les écarts —, mais nous devons vraiment nous assurer que le système reste adapté sur le long terme.
    Je vous remercie. Je passe maintenant la parole à Mme Johnson.
    Je suis heureux d'apprendre qu'il pleut à Burnaby. Nous avons besoin de pluie, mais j'espère qu'il n'y en aura pas trop.
    Pour revenir à la situation des professeurs de recherche, pour lesquels l'écart est le plus important, et vous avez mentionné les forces du marché. Est‑ce dû au fait que ces professeurs sont mieux en mesure de négocier les salaires, ou existe‑t‑il des préjugés selon lesquels les candidats masculins seraient plus aptes à négocier les salaires, ou auraient plus d'influence à cet égard?
    Merci pour cette question.
    Je pense que c'est un très bon point. Le salaire de base, le niveau d'entrée, fait une grande différence dans l'évolution de votre salaire. Je pense que pour s'assurer, dès le départ... Nous savons qu'il existe des préjugés quant à la manière dont les gens négocient leur salaire et ce qu'ils demandent. Je pense qu'il est assez clair qu'il existe des différences entre les sexes dans la manière dont les gens agissent dans ce type de négociations. J'estime que nous devrions également garder cette réalité à l'esprit.
    Au sein de notre université, il n'y a ni plancher ni plafond. Il est très important que les gens négocient leur salaire dès leur arrivée, car c'est ce salaire qui, évidemment, augmentera progressivement au fil du temps.
(1705)
    Le même principe s'applique‑t‑il lorsque les professeurs cherchent à obtenir des promotions? Les professeurs masculins ont‑ils plus de chances de se voir proposer des offres ailleurs?
    J'essaie simplement de souligner que cet écosystème ne se limite pas à une seule université.
    Vous soulevez un très bon point. Comme l'a également suggéré Airini, beaucoup d'autres dynamiques entrent en jeu, et ce n'est pas en donnant plus d'argent aux gens de manière ponctuelle que l'on va résoudre le problème.
    Par exemple, à l'Université Simon Fraser, les hommes sont promus. Nous passons par différents niveaux — professeur adjoint, professeur agrégé, professeur titulaire — et le salaire augmente à mesure que l'on avance dans ce processus. Cependant, les hommes ont tendance à être promus plus tôt que les femmes. Il y a un facteur de confiance. L'idée qu'ils sont prêts. Nous devons absolument offrir un encadrement, des conseils et une aide aux femmes pour veiller à ce qu'elles soient promues en temps voulu, car, une fois de plus, cela aura une incidence sur leur salaire.
    Enfin, pour ce qui est du congé parental, je pense qu'il est clair que les femmes prennent probablement ce type de congé beaucoup plus souvent que les hommes, même si je suppose qu'il est proposé aux deux.
    Vous avez parlé de données. Disposons-nous de données à ce sujet? À quelle fréquence les hommes demandent‑ils un congé parental par rapport aux femmes? Comment pouvons-nous tenir compte de ce facteur?
    Encore une fois, je n'ai pas de données à ce sujet, mais je dirai — et je me base sur des études réalisées il y a probablement cinq ou six ans — que lorsque les femmes prennent un congé parental, elles ont tendance à quitter l'université, à prendre soin de leurs enfants, à s'occuper de leur maison, etc. Souvent, lorsque les hommes prennent un congé parental, ils peuvent s'occuper des enfants, mais ils travaillent également sur leurs recherches et sont très productifs à la maison.
    Là encore, il s'agit d'un préjugé introduit par le système, et je pense qu'il faut en tenir compte dans la manière dont les congés sont évalués et dans la façon dont nous les envisageons.
    Monsieur le président, combien de temps me reste‑t‑il?
    Vous avez 40 secondes.
    J'aimerais que vous parliez toutes deux rapidement du nombre de femmes comparé au nombre d'hommes dans le domaine des sciences, de la technologie, de l'ingénierie et des mathématiques. Nous avons vu des données qui montrent à quel point c'est difficile. À tous les niveaux, des filtres empêchent les femmes, les personnes de couleur et les personnes à faible revenu de poursuivre leurs études universitaires, car ces personnes manquent de fonds pour effectuer leur recherche. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
    Je dirai simplement que c'est un problème majeur pour nous, à l'Université Simon Fraser. Moins de femmes que d'hommes entrent dans nos facultés d'informatique, de sciences et d'ingénierie, et la représentation des sexes et de la diversité n'y est pas satisfaisante. Nous devons réellement retourner dans les écoles secondaires pour corriger ce problème.
    Merci beaucoup.
    La parole est à Michelle Rempel Garner pour cinq minutes. Allez‑y.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais me concentrer sur les recommandations que le Comité pourrait présenter au gouvernement fédéral et qui relèvent de la compétence du gouvernement fédéral. Je sais, Airini, que vous avez commencé à faire quelques suggestions, et vous aussi, madame Johnson. Je pense que ces deux programmes étaient principalement axés sur les leviers fédéraux de financement de la recherche.
    Je considère qu'il est très important que nous nous penchions sur cette question. En ce qui concerne vos deux points de vue, il importe de souligner que je pense qu'il s'agit d'une question de compétitivité des talents pour le Canada ainsi que d'une question d'équité, mais comme vous l'avez mentionné, madame Johnson, une partie de la question relève des gouvernements provinciaux.
    Je tiens à dire, aux fins du compte rendu, qu'il y a eu quelques débats dans une province sur la question des chaires de recherche du Canada, particulièrement au Québec. Un professeur d'histoire du Collège Dawson de Montréal a déposé une plainte en matière de droits de la personne contre l'Université Laval et le Programme des chaires de recherche du Canada, alléguant que ces changements étaient discriminatoires. Par la suite, le ministre de l'Éducation du Québec a présenté une motion — en décembre dernier, je pense — dans laquelle il demandait à l'Assemblée nationale d'exprimer sa préoccupation au sujet de l'exclusion de certains candidats de l'obtention des chaires de recherche du Canada sur la base de critères qui ne sont pas liés à la compétence.
    La question me semble être un peu une pomme de discorde. Y a‑t‑il des façons dont le gouvernement fédéral pourrait peut-être aider à régler cette question sans que cela ne l'amène à se battre avec les provinces, particulièrement avec le Québec, compte tenu de certaines des préoccupations qui ont été soulevées à l'Assemblée nationale?
(1710)
    Pour rassurer les membres du Comité, toute personne nommée à une chaire de recherche du Canada doit satisfaire à la norme de compétence, et elle doit se soumettre à un processus d'évaluation rigoureux à plusieurs étapes avant d'être reconnue par l'autorité fédérale de financement comme ayant satisfait à la norme de compétence et, en fait, la dépassant. Il n'y a pas de compromis sur la qualité.
    C'est aussi un argument intéressant que d'affirmer être laissé de côté ou exclu en raison de son profil démographique. On peut aussi présenter l'argument inverse quand on n'a pas de siège à la table. Il pourrait être utile que le gouvernement fédéral donne l'assurance que les mesures prises pour faire progresser l'équité, la diversité et l'inclusion dans le domaine de la science et de la recherche sont tout à fait conformes au cadre législatif du pays lui-même. Nous voyons la même chose dans le cas de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, alors il est certainement utile de fournir cette assurance et cette clarté.
    Madame Johnson a peut-être quelque chose à ajouter.
    Oui, merci. Je ne veux vous interrompre ni l'un ni l'autre. J'aimerais vous demander, dans vos observations de suivi, de nous dire si les universités canadiennes — ou les gouvernements provinciaux, en particulier — ont reçu... Vous collaborez tous les deux avec vos gouvernements provinciaux pour déterminer si les nouvelles lignes directrices mises en place pour les chaires de recherche du Canada répondent au critère juridique que vous avez décrit.
    Madame Johnson, je vais vous poser la même question que celle que j'ai posée plus tôt. Comment le gouvernement fédéral devrait‑il interagir à cet égard, compte tenu de certaines nouvelles dynamiques?
    Je vous renvoie à la Déclaration d'Universités Canada sur l'excellence inclusive. Je pense que c'est une excellente déclaration. Pour être claire, nous voyons de temps à autre une dynamique semblable à l'œuvre à notre université, où certains groupes se sentent exclus en raison des exigences relatives aux chaires de recherche du Canada.
    Les choses changent, cependant, et on fait appel à des gens qui n'étaient pas invités à la table et on reconnaît des gens qui ne l'étaient pas par le passé. Je pense que c'est une bonne chose. En fait, c'est bon pour la recherche, car cela fait intervenir toute une gamme de points de vue différents. Cela favorise vraiment l'excellence, et nous le savons, mais il y a de la résistance, parfois légère, parfois forte. En Colombie‑Britannique, la question n'a pas soulevé de problème.
    Cela dit, il y a certains éléments, au sein de notre université, qui se sont opposés à ces mesures de temps à autre, mais je pense que ce que nous observons...
    Comment gérez-vous cette résistance? Comment l'Université réagit-elle à ces préoccupations?
    Encore une fois, je vous renvoie à la Déclaration d'Universités Canada sur l'excellence inclusive. Toutes les universités publiques qui font partie d'Universités Canada y ont adhéré. Il est nécessaire d'assurer la diversité des points de vue et que divers universitaires contribuent pour favoriser l'excellence. Nous ne pouvons pas être excellents sans diversité. Nous ne pouvons pas innover sans diversité. Des preuves probantes le démontrent. Nous l'avons constaté au sein des conseils d'administration et dans la recherche également. C'est manifeste.
    C'est excellent. Merci beaucoup.
    Madame Bradford, vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les deux témoins de participer à cette étude très importante. Je vous en suis très reconnaissante. Vos exposés initiaux ont certainement répondu à bon nombre de mes questions.
    J'aimerais examiner l'écart salarial relatif à la diversité au Canada par rapport à des pays comparables. Est‑ce que chacun d'entre vous peut nous dire comment, selon vous, le Canada s'en sort par rapport à d'autres pays comparables quand il s'agit de s'attaquer à cette situation?
(1715)
    C'est une excellente question.
    En fait, je n'ai pas de données à ce sujet à portée de main. J'ai l'impression que les écarts salariaux sont semblables dans les pays européens et au Royaume‑Uni. Je n'ai pas d'information sur l'Australie et la Nouvelle‑Zélande.
    Airini, pouvez-vous répondre?
    Je peux vous fournir une comparaison succincte.
    Il serait peut-être utile de savoir qu'en Nouvelle‑Zélande, d'où vient mon accent, la parité salariale fait l'objet d'un débat rigoureux. Il y a une différence, comme Mme Johnson l'a indiqué précédemment. Au sein de la main-d'œuvre féminine, la situation est encore plus différente pour les femmes de couleur et les groupes sous-représentés dans le secteur postsecondaire. À l'échelle internationale, nous constatons qu'une analyse approfondie des groupes au sein des groupes est essentielle pour progresser vers l'équité salariale.
    Si chacun de vous pouvait s'engager à trouver un peu plus d'informations et à découvrir s'il y a un pays en particulier qui semble faire un meilleur travail à cet égard et dont nous pouvons nous inspirer, ce serait formidable.
    Airini, j'ai deux ou trois points à aborder. Mme Johnson a indiqué que l'Université de la Colombie‑Britannique ne gardait pas de données sur la race, l'appartenance autochtone, les déficiences, etc. Le faites-vous à l'Université de la Saskatchewan? Recueillez-vous ces données?
    Oui, nous le faisons.
    D'accord.
    Nous avons pu commencer ce travail cette année, parce que nous avons mis en place la politique de divulgation de la vérité deybwewin-taapwaywin-tapwewin, qui permet maintenant la vérification de l'appartenance ou de la citoyenneté. Plutôt que de laisser nos collègues autochtones procéder par auto-identification, nous vérifions la citoyenneté et l'appartenance.
    Nous avons commencé à revoir les données par suite de l'entrée en vigueur de la politique. La raison pour laquelle j'ai proposé de le faire — et je vous remercie de la question —, c'est qu'il s'agit d'un rappel de l'importance des politiques pour créer les conditions propices au bon travail et pour nous permettre d'atteindre notre objectif. C'est le rôle essentiel que joue le Comité.
    Merci.
    Dans votre déclaration préliminaire, vous avez dit qu'il y a des « mesures qui ciblent l'écart salarial lié à la discrimination » en jeu. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet, s'il vous plaît?
    Pourriez-vous me rappeler ce que j'ai dit?
    Des voix: Ha, ha!
    Vous avez indiqué qu'il y avait certaines mesures qui étaient à l'œuvre. En gros, vous vouliez savoir pourquoi cette discrimination salariale et cet écart entre les sexes existent. Vous avez dit qu'il y a certaines mesures ciblant la discrimination salariale. Vu les autres témoignages entendus à ce sujet, j'ai pensé que nous aimerions peut-être en savoir un peu plus à ce sujet.
    Je vous remercie d'avoir écouté aussi attentivement ce que je disais. Je vous en sais gré.
    Oui, pas de souci.
    Ce sont des points récurrents, bien que j'en aie un nouveau à ajouter.
    Les cas récurrents concernent les postes de professeur titulaire: qui obtient ces postes et en combien de temps.
    Il y a aussi les salaires de départ. Nous connaissons l'effet cumulatif du salaire de départ. Le Comité se penche sur les répercussions à long terme des écarts salariaux.
    L'autre chose que nous constatons — et qu'il est très important de garder à l'œil —, c'est l'incidence de la COVID sur le parcours de recherche des femmes membres du corps professoral.
    Mon collègue, M. Scott Walsworth, et d'autres collègues se sont penchés sur les répercussions de la COVID. Ils ont constaté qu'il y avait des preuves d'un déclin perçu de la productivité plus marqué chez les femmes que chez les hommes pendant la pandémie.
    Le fait d'être le principal fournisseur de soins constitue l'une des principales causes du problème. Ce n'est pas tant le nombre d'enfants, mais le fait d'être le fournisseur de soins principal dans le ménage qui compte. La recherche, qui est très utile pour préparer le terrain pour d'autres études et une surveillance plus poussée de cette question, nous oblige à repenser, potentiellement, les critères de promotion sur un horizon de 10 ans, et à réfléchir de nouveau à ce qu'il faut faire pour poursuivre une carrière universitaire, pour être actif dans le domaine des sciences et de la recherche et pour contribuer aux soins primaires. Nous avons des exemples à l'échelle internationale de la façon dont une vision plus inclusive contribue à faire progresser la reconnaissance du rendement des gens.
    Merci. Si vous pouvez nous fournir des détails qui nous aideraient dans le cadre de notre étude, ce serait merveilleux.
    Nous allons passer à M. Blanchette‑Joncas pour deux minutes et demie.
(1720)

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais continuer à parler des pistes de solution. On a vu le portrait de la situation, et les données contenues dans certaines études démontrent qu'il y a réellement un problème du côté des écarts salariaux.
    Madame Johnson, tout à l'heure, vous avez dit que des mécanismes étaient déjà en place, dont des fonds fédéraux pour les organismes subventionnaires et les chaires de recherche, afin d'atténuer l'écart salarial ou de respecter l'équité salariale.
    Selon vous, les problèmes en lien avec tout ce qui touche les fonds octroyés par le fédéral ont-ils été réglés? Selon vous, reste-t-il encore des disparités concernant l'écart salarial, tant du côté des chaires de recherche que de celui des trois organismes subventionnaires? Aujourd'hui, peut-on dire que c'est réglé et passer à autre chose? Peut-on maintenant se concentrer sur les politiques qui touchent directement les universités, le gouvernement du Québec ou ceux des autres provinces?

[Traduction]

    Je vous remercie de cette question. Je ne pense pas que le problème ait été résolu avec le Programme des chaires de recherche du Canada, parce que tout ce que le programme a fait, c'est assurer une représentation diversifiée sur le plan des chaires de recherche du Canada. Cela n'a pas réglé la question de la paye.
    C'est intéressant. Je réfléchis à ce qui pourrait être fait à l'échelon fédéral, et je dirais que les universités doivent présenter une demande et être reconnues comme un établissement qui peut obtenir des fonds des trois conseils. Habituellement, cette reconnaissance est fondée sur la présence de bonnes fonctions de vérification, la capacité de gérer les fonds et ce genre de critères, mais il y a d'autres leviers qui pourraient être utilisés pour indiquer qu'une université est admissible à un financement du gouvernement fédéral afin d'obtenir des fonds des trois conseils. Par exemple, l'établissement devrait avoir certaines politiques et pratiques en place.
    Il n'y a pas eu beaucoup de progrès à cet égard. Certains de mes collègues présidents m'en voudront d'avoir suggéré ce qui suit, mais je pense que nous devons envisager à la fois la carotte et le bâton, et ce serait un bâton qui pourrait être utilisé et auquel on pourrait réfléchir.
    Encore une fois, c'est ce à quoi je réfléchis. Quels sont les leviers réglementaires que le gouvernement fédéral peut utiliser pour nous aider à régler ce problème?

[Français]

    Merci beaucoup, madame Johnson.
    Professeure Airini, avez-vous quelque chose à ajouter au sujet des pistes de solutions que le gouvernement fédéral pourrait mettre en œuvre pour améliorer l'équité salariale?
    Je vous remercie de votre question.

[Traduction]

    Je parle des trois domaines que sont l'investissement, l'influence et la mise en œuvre. Le domaine de l'investissement est exactement tel que Mme Johnson l'a décrit. Il s'agit de déterminer où il est possible d'avoir une incidence en utilisant les subventions gouvernementales.
    L'influence émane de votre rapport lui-même. Ce rapport ne doit pas seulement contenir de recommandations, mais aussi demander à ce que le secteur lui-même fasse régulièrement rapport des progrès accomplis à l'égard des recommandations que contiendra cet important rapport, quelles qu'elles soient.
    Le troisième domaine concerne l'information.
    Merci.
    J'ai étiré le temps parce que c'était une question importante à traiter, et je vous suis reconnaissant de l'avoir abordée.
    Nous allons maintenant passer à M. Cannings pour les deux dernières minutes et demie.
    Merci.
    J'aimerais poursuivre avec Mme Johnson en ce qui concerne mon dernier point. Cela s'écarte peut-être un peu de la question à l'étude, soit l'écart salarial, mais il me semble que l'une des choses que le gouvernement fédéral fait et qu'il pourrait faire mieux, c'est de financer les étudiants — qu'ils soient à la maîtrise, au doctorat ou au postdoctorat — qui sont en train de devenir des chercheurs et de travailler dans les universités dont nous parlons aujourd'hui, et de financer adéquatement les bourses d'études et de recherche qui sont gelées depuis 20 ans.
    C'est le grand filtre, je pense, qui écarte les femmes qui essaient de faire progresser leur éducation, parce qu'elles font les choses dont vous avez parlé, comme prendre soin de leur famille. Il écarte les personnes de couleur et les personnes à faible revenu.
    Je me demande si ce facteur pourrait avoir une incidence à cet égard.
    Merci beaucoup d'avoir soulevé ce point.
    Le soutien aux étudiants des cycles supérieurs est absolument essentiel pour nous, au Canada. Comme vous l'avez souligné, le financement est gelé depuis 20 ans, et je suis profondément préoccupée par les obstacles qui empêchent les gens de faire des études supérieures. Ils n'ont tout simplement pas le soutien nécessaire. Nos étudiants des cycles supérieurs nous le disent continuellement, et je pense, comme vous l'avez dit, que nous l'entendons surtout de la part des femmes qui ont peut-être des responsabilités en matière de soins aux d'enfants. Pour d'autres groupes, ce financement a réellement une incidence.
    Nous demandons depuis longtemps que le gouvernement corrige la situation, et je pense que nous devons examiner la question dans son ensemble, comme vous l'avez souligné, pour nous assurer que les talents entrent dans le système. Encore une fois, c'est un domaine où il pourrait y avoir des exigences en matière de représentation, et il devrait y en avoir.
(1725)
    S'il reste du temps, j'aimerais qu'Airini se prononce également.
    Je vous remercie aussi de la réflexion que vous avez faite en soulevant ce point. Je vous remercie.
    En écoutant les échanges, je pense à l'analyse économique que j'ai lue au sujet de ce qu'il en coûte pour les membres des groupes sous-représentés de poursuivre des études universitaires et de réussir, et du fait qu'il est important qu'au moment où ils entreprennent un cheminement de carrière de chercheur, il y ait en fait un cadre d'équité qui s'applique. Ce n'est pas un cadre d'égalité, mais un cadre d'équité. Le dégel des bourses pourrait certainement, si on procède adéquatement, constituer une étape importante pour s'assurer qu'il y a un point de départ fondé sur l'équité.
    Je vous remercie.
    Merci à vous deux.
    Je vais m'arrêter ici.
    Vous lisez dans mes pensées. En ce qui concerne la dernière question, je pensais aux chercheurs en début de carrière et à l'équité à cet égard, parce que nous savons que c'est aussi un groupe sous-représenté. Ceux qui sont financés ont tendance à recevoir du financement, mais ceux qui en sont aux premières étapes sont souvent négligés.
    Je remercie Airini et Mme Johnson de cette discussion très intéressante et de leur participation à notre étude sur les répercussions à long terme de l'écart salarial entre les sexes et des groupes en quête d'équité. S'il y a d'autres renseignements qui peuvent nous aider à nous informer, je pense que notre comité a l'avantage de pouvoir réunir les débats afin que d'autres universités puissent également voir de quoi nous parlons. Bien sûr, elles pourraient aussi soumettre des commentaires et des mémoires.
    Nous nous réunirons le mercredi 27 septembre pour reprendre ces deux études. Je vous rappelle rapidement qu'il y a des activités de défense des droits sur la Colline en ce moment. Le groupe Soutenir notre science se réunit dans la salle 306 de l'édifice de la Bravoure jusqu'à 19 heures. Ses membres aimeraient rencontrer des gens qui s'intéressent à la science, si vous avez le temps.
    Cela mis à part, je voudrais lever la séance.
    M. Maxime Blanchette‑Joncas: Je le propose.
    Le président: Merci, monsieur Blanchette‑Joncas.
    Merci à tous pour cette excellente réunion. Nous nous reverrons mercredi.
    La séance est levée.
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