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Bienvenue à la 82
e réunion du Comité permanent de la science et de la recherche de la Chambre des communes.
La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride, conformément au Règlement. Par conséquent, les membres participent en personne, dans la salle, et à distance, à l'aide de Zoom. Nos deux témoins se joignent virtuellement à nous aujourd'hui.
Pour ceux qui sont en ligne, il y a quelques règles à suivre. Vous pouvez demander de vous exprimer dans la langue officielle de votre choix. Des services d'interprétation sont disponibles pour cette réunion. Vous avez le choix, au bas de votre écran, entre le parquet, le français et l'anglais. Si vous perdez l'interprétation, veuillez m'en aviser immédiatement, et nous suspendrons la séance jusqu'à ce que les services d'interprétation soient rétablis.
Les députés qui participent à la séance en personne doivent procéder comme ils le feraient habituellement lorsque toute la réunion se déroule en personne.
Avant de prendre la parole, veuillez attendre que je vous nomme. Si vous participez par vidéoconférence, veuillez cliquer sur l'icône du microphone pour l'activer. Pour ceux qui sont dans la salle, votre micro sera contrôlé comme d'habitude par l'agent des délibérations et de la vérification.
Comme toujours, essayez de vous assurer que votre écouteur ne s'approche pas de votre microphone afin de ne pas créer de rétroaction acoustique dans l'oreillette et de ne pas causer de dommages auditifs aux interprètes ainsi qu'aux députés qui participent à la réunion.
Tous les commentaires doivent être adressés à la présidence, s'il vous plaît.
Veuillez parler lentement et clairement. Lorsque vous ne parlez pas, mettez votre micro en sourdine.
En ce qui concerne la liste des intervenants, le greffier et moi-même ferons de notre mieux pour maintenir un ordre de parole consolidé pour tous les membres, qu'ils participent virtuellement ou en personne.
Conformément à l'article 108(3)i) du Règlement et aux motions adoptées par le Comité le mardi 30 janvier et le jeudi 15 février 2024, le Comité reprend son étude de la répartition du financement du gouvernement fédéral entre les établissements postsecondaires du Canada.
J'ai maintenant le plaisir d'accueillir Mme Alice Aiken, vice-présidente, Recherche et innovation, à l'Université Dalhousie, ainsi que Mme Dena McMartin, vice-présidente, Recherche, à l'Université de Lethbridge.
Vous disposez de cinq minutes chacune pour faire votre déclaration préliminaire.
Nous allons commencer par Mme Aiken, de Dalhousie. Allez‑y, je vous prie.
[Français]
Bonjour.
Je suis heureuse d'être parmi vous. Je voudrais transmettre de chaleureux remerciements de la part des chercheurs canadiens à ce comité.
[Traduction]
Votre travail a permis de réaliser l'investissement historique dans la recherche et les étudiants des cycles supérieurs qui a été annoncé hier. Je vous en remercie donc.
Les universités canadiennes jouent un rôle essentiel dans notre écosystème national de recherche, en soutenant le perfectionnement des talents hautement qualifiés, la production d'idées et de technologies nouvelles et le transfert des nouvelles connaissances et des innovations à l'industrie et à la vie quotidienne.
Les universités canadiennes à vocation de recherche, comme Dalhousie, apportent une contribution fondamentale à l'écosystème pancanadien de la recherche et de l'innovation. En plus de cultiver l'excellence universitaire et une solide collaboration, nous sommes aussi des points de liaison essentiels entre le milieu universitaire, l'industrie et la communauté internationale du savoir.
Les fonds de recherche du gouvernement fédéral sont accordés aux chercheurs de tous les établissements postsecondaires dans le cadre d'un processus concurrentiel et impartial d'octroi de subventions. Ces fonds appuient la recherche et le développement des talents dans les petits et grands établissements de partout au pays. Les universités à vocation de recherche deviennent des pôles de recherche, et possèdent des infrastructures de recherche essentielles, comme des laboratoires et de l'équipement hautement spécialisé, qui soutiennent des initiatives de recherche essentielles. En favorisant la création de solides réseaux de recherche, nous assurons au Canada une place de choix dans le domaine de l'innovation et de la recherche à l'échelle mondiale, tout en renforçant sa capacité nationale.
Une plus grande part du financement va aux grandes universités, en raison notamment du nombre supérieur de professeurs, de la disponibilité de l'infrastructure et de l'équipement essentiels et de l'accès aux talents grâce à des programmes de deuxième et de troisième cycles. La combinaison d'une infrastructure spécialisée et de programmes axés sur la recherche crée les conditions nécessaires à l'intensification de la recherche. En tant que pôle de recherche, l'Université Dalhousie mène des projets de recherche auxquels participent des chercheurs et des étudiants de multiples établissements et organisations à l'échelle locale et mondiale.
J'aimerais donner deux exemples d'importantes initiatives de recherche dirigées par l'Université Dalhousie qui, grâce à des collaborations avec d'autres institutions, l'industrie et les collectivités, contribuent au bien-être économique du Canada.
Le projet « Transformer l'action pour le climat: la question de l'océan oublié » illustre merveilleusement bien la façon dont le Fonds d'excellence en recherche Apogée Canada soutient d'importantes initiatives de recherche en tirant parti des capacités institutionnelles.
Grâce à une subvention de 154 millions de dollars du Fonds, cette initiative donne lieu à un investissement total de près de 400 millions de dollars en espèces et en nature. Ce programme de recherche est un effort de collaboration auquel participent plus de 170 chercheurs de diverses disciplines universitaires, institutions, provinces et langues.
Cette initiative dirigée par l'Université Dalhousie, en collaboration avec l'Université du Québec à Rimouski, l'Université Laval et l'Université Memorial de Terre‑Neuve‑et‑Labrador, met en valeur l'utilisation stratégique du Fonds pour favoriser un réseau de recherche de calibre mondial. Le projet s'attarde au rôle essentiel que joue l'océan en matière de climat, et tire parti de vastes collaborations avec les communautés autochtones, le gouvernement, l'industrie et les partenaires internationaux.
J'aimerais aussi parler du projet Common Ground Canada Network. Cette initiative a reçu une subvention de 2 millions de dollars du Conseil de recherches en sciences humaines, ou CRSH, pour une agriculture durable. Elle réunit des spécialistes en sciences sociales qui mettent en commun, cultivent et appliquent des connaissances sur les relations nécessaires à la transition des systèmes agricoles et alimentaires du Canada vers la carboneutralité. Elle permet une mobilisation multidisciplinaire pour veiller à ce que les coûts et les avantages de la transition vers la carboneutralité soient partagés équitablement.
Le réseau est dirigé par l'Université Dalhousie et comprend 49 universitaires et 22 organismes sans but lucratif. Nos partenaires sont les universités Carleton, Lakehead et Wilfred Laurier, ainsi que celles de Victoria, de l'Alberta et de la Colombie‑Britannique.
Je terminerai en soulignant que la recherche exige énormément de ressources. Elle nécessite des investissements continus dans les gens, dans l'infrastructure et dans de solides programmes universitaires qui soutiennent un flux constant d'apprenants aux deuxièmes et troisièmes cycles. Il faut aussi une expertise technique et opérationnelle pour gérer des installations et des processus uniques. Les grandes universités canadiennes à vocation de recherche sont particulièrement bien placées pour mener de grandes initiatives de recherche et pour agir à titre de pôles de recherche qui mobilisent de nombreux collaborateurs d'autres établissements.
Je vous remercie.
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Bonjour. Je vous remercie de m'avoir invitée à m'adresser au Comité permanent de la science et de la recherche.
Il est très encourageant de voir que le Comité invite activement des représentants des petites et moyennes universités canadiennes.
Pour mettre les choses en contexte, permettez-moi de vous parler un peu de ma région et des raisons pour lesquelles la distribution équitable du financement de la recherche et des initiatives spéciales est si importante.
Lethbridge, en Alberta, est une ville de 105 000 habitants, et le principal centre de services d'une région qui compte plus de 350 000 habitants. Nous sommes voisins de la Confédération des Pieds-Noirs, avec laquelle nous avons des partenariats étroits, à tel point que notre université porte le nom de Iniskim, qui désigne la pierre sacrée ammolite en langue pied-noir.
Si vous traversez Lethbridge en voiture, vous verrez les entreprises qui soutiennent le principal corridor alimentaire des industries agricoles et de transformation des aliments au Canada. Il devient rapidement évident que Lethbridge est aussi une ville universitaire, ou en fait une ville postsecondaire, où se trouvent l'Université de Lethbridge et le Collège de Lethbridge.
Nos étudiants, nos employés et nos professeurs ont des répercussions économiques et culturelles importantes sur notre région. Ce contexte est important, car les dirigeants communautaires ont compris en 1967 l'importance d'une université pour le succès de la ville et de la région. Ce volet n'a pas changé. C'est vraiment la même conversation que le Comité a aujourd'hui.
Nos chercheurs travaillent sur des enjeux importants pour les collectivités que nous servons et pour le Canada. Qu'est‑ce qui est important pour notre région en ce moment? Il s'agit de l'eau, de la sécurité alimentaire, de la santé mentale et de la toxicomanie, ainsi que de la santé des milieux ruraux et autochtones.
En tant qu'université régionale, nous entretenons des liens étroits avec les collectivités les plus touchées par nos résultats de recherche. Nous vivons là où nous apprenons, et avons une incidence sur notre milieu de travail. La recherche qui se fait à l'Université de Lethbridge est de la plus haute qualité. Par exemple, nous faisons des recherches en neurosciences, en développement de la technologie de l'acide ribonucléique, ou ARN, en santé mentale et en toxicomanie, et avons des chercheurs de renommée internationale qui recrutent, forment et travaillent fort pour retenir de nouveaux talents dans notre région. Ces nouveaux talents aident à diversifier l'économie, à créer de nouvelles entreprises et de nouveaux emplois, à améliorer la qualité de vie et à assurer l'accès à des services qui sont essentiels lorsque les gens choisissent un endroit où vivre et élever une famille.
Nous sommes l'établissement qui reçoit le plus de financement des Instituts de recherche en santé du Canada, ou IRSC, dans notre catégorie à l'échelle nationale. Même là, les établissements qui ne sont pas membres du regroupement U15 reçoivent ensemble moins de 5 % de tout le financement disponible des IRSC. Cela crée un stress énorme sur notre capacité à rivaliser pour attirer les meilleurs étudiants diplômés, chercheurs postdoctoraux et professeurs. Pourtant, nous soutenons la concurrence et y arrivons.
Notre réussite est notamment attribuable aux liens authentiques et directs que nous établissons avec nos utilisateurs ultimes, nos partenaires communautaires et les priorités régionales. Ce qui est pertinent pour notre région l'est aussi pour le Canada. La prospérité des petites collectivités urbaines et des régions rurales du Canada est essentielle à la santé du pays, à sa force et à sa stabilité économique.
Avec tous ces avantages exceptionnels, nous devons également reconnaître les défis que nous rencontrons puisque nous sommes une petite université. Le nombre croissant d'exigences de conformité importantes nous frappe de façon disproportionnée. Nous devons répondre à toutes les mêmes exigences que nos homologues de plus grande taille, alors que nous avons une capacité nettement inférieure, moins de personnel et des points de défaillance uniques. Cet écart se creuse à mesure que les besoins augmentent et que l'accès au financement pour y répondre diminue.
Je tiens à souligner que nous appuyons le rapport Bouchard et qu'il faut porter une attention particulière aux inégalités. La compétitivité pour les investissements importants renforce la division de l'accès.
Par exemple, avec le Fonds d'excellence en recherche Apogée Canada, d'une valeur de plusieurs millions de dollars, la plupart des petits établissements n'ont pas le personnel nécessaire pour soutenir la concurrence. Nous avons les installations. Nous avons l'expertise. Cependant, nous n'avons pas les moyens d'en soutenir les frais généraux d'administration. Nous ne pouvons pas retirer les membres du corps professoral du travail qui leur est assigné pour qu'ils se concentrent uniquement sur ces processus de demande. Nous n'avons pas non plus les ressources nécessaires pour embaucher des rédacteurs de demandes de subvention et des gestionnaires de projet à l'externe qui assureraient la réussite. Par conséquent, nous établissons des partenariats plutôt que de prendre l'initiative des projets.
Cependant, ces partenariats et ces programmes s'accompagnent de fonds qui couvrent les frais administratifs et opérationnels, et qui donnent aux établissements responsables une capacité de plus en plus grande pour se préparer au prochain investissement massif et l'emporter. Le succès engendre le succès. Les établissements modestes et régionaux n'ont souvent pas accès à ce cycle.
Récemment, certains des plus grands programmes de financement de la recherche comprenaient un financement pour l'étape initiale du développement qui a vraiment contribué à atténuer une partie de cette disparité. Afin d'égaliser les chances, je recommanderais donc que tous ces grands programmes de recherche institutionnels comprennent un financement du développement destiné précisément aux petites universités.
Le Comité doit se demander si, lorsque le financement de la recherche est concentré dans les plus grandes universités du Canada et dans les plus grands centres urbains, nous répondons aux besoins de tous les citoyens. Réglons-nous comme il se doit les problèmes qui touchent tous les Canadiens lorsque nous désavantageons les établissements situés géographiquement partout au pays?
Je vous remercie.
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C'est une excellente question.
Je pense que les trois organismes, la Fondation canadienne pour l'innovation et d'autres organismes de financement fédéraux font un travail exceptionnel à recueillir ce genre de données.
Les universités sont tenues responsables par le gouvernement fédéral et les bailleurs de fonds provinciaux, qui veillent à ce que nous utilisions au mieux les fonds de recherche que nous recevons. Il faut que nous ayons une incidence sur les collectivités et les politiques, que nous générions de l'activité économique et que nous créions des talents pour l'avenir du Canada.
Je pense que nous avons un système très efficace en ce qui concerne le rendement du capital investi dans le financement de la recherche partout au pays.
On peut toujours s'améliorer, bien sûr. Je pense que nos processus d'examen actuels, bien qu'ils soient extraordinairement robustes et certainement reconnus à l'échelle internationale, pourraient encore être bonifiés pour ce qui est de déterminer l'endroit où vont ces fonds et la manière dont ils sont répartis.
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Je reviens toujours à la question que j'ai soulevée à quelques reprises au Comité, à savoir les fonds de recherche qui ont été accordés pour étudier les paroles de Dolly Parton. Je suis sûr qu'il y a d'autres études, peut-être pas sur ces paroles, mais sur des sujets sur lesquels les Canadiens ordinaires se demanderaient pourquoi diable le gouvernement dépense de l'argent à cette fin.
La question que j'aimerais poser à Mme Aiken, de l'Université Dalhousie, est probablement celle qui frustre les petites et moyennes universités. C'est le fait qu'on leur fait croire, ou qu'on leur impose: ils n'ont pas le fondement, le personnel ou l'infrastructure nécessaires pour mener les projets de recherche et pour « jouer dans la cour des grands ».
Je reviens toujours à l'Université de Guelph. Je ne peux tout simplement pas croire qu'il y a une autre université au Canada qui fait autant de recherches agricoles de première qualité que l'Université de Guelph, et pourtant, elle ne fait pas partie du groupe U15.
Que faisons-nous pour égaliser les chances?
Il ne semble pas juste que Guelph ne soit pas considérée comme l’une des meilleures universités de recherche ou, du moins, qu’elle ne soit pas admissible à faire d’importantes recherches en agriculture.
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Je pense que vous constaterez que Guelph reçoit probablement la majeure partie du financement de la recherche agricole, tout comme l'Alberta et la Saskatchewan.
Le groupe U15, si j'ai bien compris — il a été formé avant mon arrivée à la direction d'une université — a vu le jour en 2012 afin de faire connaître au gouvernement les points de vue d'intérêt commun des universités fortement axées sur la recherche.
Nous le savons tous: de nombreuses universités à vocation de recherche ne font pas nécessairement partie du U15. Il y a Sherbrooke, Guelph, Concordia, Memorial et beaucoup d'autres universités dans cette catégorie. Ce sont toutes des universités à forte intensité de recherche également, en raison de leur infrastructure.
C'est parfois une question de taille — je pense que ma collègue, Mme McMartin, l'a très bien dit. Nous sommes la plus petite des universités du groupe U15, et certains des établissements qui n'en sont pas membre sont même un peu plus grands que nous, du point de vue du corps étudiant.
L'intensité de la recherche dépend de la façon d'établir les priorités au sein de l'université et du budget de fonctionnement. Je pense que parfois, les petites universités n'ont pas la capacité de demander des subventions à grande échelle.
Je vais vous donner un exemple. Nous nous intéressons tous à Horizon Europe. Dalhousie n'envisagerait pas d'être à la tête d'une demande pour ce programme. Nous formerons des partenariats, mais nous n'avons ni la taille ni l'infrastructure nécessaires.
Nous pourrions voir l'Université de Toronto ou l'Université de la Colombie-Britannique diriger une telle initiative, mais aucune autre université au Canada n'aurait la capacité de le faire.
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Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Nous allons maintenant parler de ma ville d'origine.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos deux témoins. C'est merveilleux de pouvoir entendre les deux points de vue et de voir comment ils se rejoignent.
Madame Aiken, je suis ravie que vous représentiez l'Université Dalhousie. Pour le compte rendu, il s'agit de la seule université du Regroupement des universités de recherche du Canada, ou U15, dans les provinces de l'Atlantique.
L'étude d'aujourd'hui est importante. Nous parlons de la répartition du financement du gouvernement fédéral entre les établissements postsecondaires du Canada.
La Nouvelle-Écosse compte un peu plus d'un million d'habitants et 10 universités. Six d'entre elles ont leur campus principal à Halifax. Quatre sont situées à l'extérieur de la municipalité de Halifax. Il y a également le fabuleux Collège communautaire de la Nouvelle-Écosse, qui compte 14 campus dans toute la Nouvelle-Écosse.
Je parle en connaissance de cause. Non seulement j'ai vécu là‑bas pendant la plus grande partie de ma vie — à l'exception de quelques d'années lorsque j'étais enfant et que je vivais à l'étranger —, mais à une certaine époque, j'ai également été ministre provinciale du Travail et de l'Enseignement supérieur. Il se passe des choses fabuleuses dans cette région.
Je tiens à vous féliciter, vous et l'Université Dalhousie, pour votre campagne Bringing Worlds Together, qui vient d'être lancée ce mois‑ci. C'est la vision de l'Université Dalhousie. Il s'agit d'une campagne de financement de 750 millions de dollars qui vise à renforcer l'expérience des étudiants, à accroître la portée de la recherche et de ses impacts et à intensifier vos retombées positives sur les collectivités locales et mondiales. Il s'agit de la plus grande campagne universitaire de l'histoire du Canada atlantique, mais c'est aussi la plus grande université du Canada atlantique.
Dans votre déclaration préliminaire, vous avez souligné deux de vos grandes collaborations avec des universités de partout au pays. Pouvons-nous revenir au Canada atlantique et aux petites universités qui s'y trouvent? Comme je l'ai dit, il y a 10 universités en Nouvelle-Écosse, une province qui compte un peu plus d'un million d'habitants. Pouvez-vous décrire au Comité les relations entre l'Université Dalhousie et ces autres universités et avec le collège communautaire, afin que nous puissions aussi profiter de cette perspective?
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Merci, monsieur le président.
Je salue les témoins qui se joignent à nous pour cette première heure d'étude.
Mes premières questions s'adressent à Mme McMartin.
Madame McMartin, vous mentionnez que votre université a de l'expertise, notamment, en matière de programmes de santé, mais que l'incapacité d'avoir accès au financement nuit particulièrement à l'amélioration des différents programmes, de même qu'aux activités de recherche de votre université.
Nous connaissons les données sur le financement — elles sont assez frappantes —, selon lesquelles 90 % des fonds versés à l'Institut de recherche en santé du Canada sont distribués aux 15 plus grandes universités du Canada. On s'entendra donc sur le fait qu'il ne reste que des miettes pour les autres universités.
J'aimerais entendre votre opinion sur ces données.
Par ailleurs j'aimerais que vous me parliez du fait que la capacité de vous développer est compromise faute d'accès à un financement équitable, ce que vous avez mentionné dans votre allocution.
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Je dis toujours que mes chercheurs peuvent se mesurer à n'importe quel autre chercheur au pays. Nous faisons un travail exceptionnel et nous jouons certainement dans la cour des grands, si vous me permettez l'expression.
Nous disposons d'installations, d'une expertise et d'un personnel incroyables. Nous sommes depuis longtemps l'une des deux meilleures universités du pays dans le domaine de recherche en neurosciences, ce qui est impressionnant. Nous travaillons davantage sur la démence, la maladie d'Alzheimer et les pertes de mémoire intergénérationnelles, qu'elles soient d'ordre génétique ou qu'elles soient liées à des traumatismes. C'est très important pour nous. Il est parfois difficile de faire connaître ces travaux aux communautés d'utilisateurs et aux groupes d'utilisateurs finaux, en partie parce que nous n'avons pas toujours accès aux mêmes installations et aux mêmes services que nos homologues de grande envergure. Quoi qu'il en soit, nous continuons à réussir dans ces domaines. Je pense que cela témoigne en grande partie de la résilience, du pouvoir de la connaissance et de l'efficacité du système canadien de l'infrastructure de financement.
J'aimerais aussi préciser que le processus d'examen du mérite en œuvre dans nos trois organismes est un processus très robuste. Il est même exceptionnel. Toutefois, le seul point qui me pose problème dans ce processus d'examen, c'est le fait que l'on demande aux membres du comité d'examen de juger si la capacité institutionnelle est suffisante pour assurer la réussite d'un projet. Lorsque je signe une subvention, je vous dis que nous avons la capacité institutionnelle nécessaire pour mener à bien le projet. Je pense qu'il est inapproprié de demander à des personnes qui n'ont jamais mis les pieds dans mon université ou qui ne la connaissent pas de porter ce genre de jugement. Si je dis que nous ferons quelque chose, nous le ferons. Ces types de questions sur la capacité sont parfois posées de manière inappropriée. Dans certains cas, on demande aux membres du comité d'examen de porter des jugements pour lesquels ils ne disposent pas des renseignements nécessaires pour fournir une réponse éclairée.
Je pense que cela a donné lieu à des inégalités en matière de financement parce qu'on a l'impression que nous ne pouvons pas faire le travail pour lequel nous nous sommes engagés.
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C'est vrai. Je vous remercie d'avoir soulevé ce point à nouveau.
Les trois organismes subventionnaires et le comité de coordination, en modifiant la façon dont le Fonds d'excellence en recherche Apogée Canada est distribué, ont ouvert la porte aux petits établissements lors du dernier cycle de présentation de demandes. Le problème, c'est que je vois maintenant la porte, mais je n'arrive pas encore à l'ouvrir.
Comme vous l'avez dit, nous n'avons pas nécessairement les frais généraux administratifs, le personnel ou la capacité de retirer des enseignants de leur charge de travail pendant un an, qui sont tous des éléments nécessaires pour répondre aux exigences. Il s'agit d'énormes subventions. Mme Aiken le sait bien. Ces subventions nécessitent de multiples relations internationales, l'établissement de partenariats et une véritable réflexion stratégique. Je pense que toutes les universités canadiennes ont cette capacité et cette expertise, mais qu'elles n'ont pas toutes le personnel nécessaire pour faire tout cela.
Dans ce cas, le défi, bien entendu, c'est que lorsqu'un établissement principal reçoit ces fonds, il reçoit également un financement important pour les frais généraux qui donnent un coup de pouce à la gestion de projet et au soutien administratif, ce qui peut mener à la prochaine grande subvention. Le problème, c'est que si nous n'arrivons pas à entrer dans ce cycle frénétique, il est impossible d'en faire partie. Cependant, une fois que l'on est dans ce cycle, les choses deviennent plus faciles, car il est beaucoup plus facile de rester dans ce cycle de financement que d'y entrer.
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Je peux répondre en premier. Mme Aiken a été bonne joueuse; elle a répondu en premier à plusieurs questions.
En fait, je dirais que la crise de l'abordabilité donne l'occasion de soutenir les établissements régionaux et les petits établissements. Nous ne sommes pas aux prises avec les mêmes problèmes de disponibilité des logements ou d'abordabilité que les grands centres — du moins pas encore.
Le coût de la vie est élevé. L'inflation l'est aussi. Elle est à la baisse depuis quelque temps, ce qui aide énormément.
De telles problématiques reposent sur de multiples enjeux. Il n'y a pas un défi unique à relever pour régler le problème de l'abordabilité. Il faut avoir accès à des fonds adéquats de la part des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux. Il faut faire en sorte que les étudiants aient accès aux bourses d'études dont ils ont besoin et il faut assurer leur sécurité alimentaire.
D'après moi, à l'heure actuelle, la sécurité alimentaire sur les campus est un enjeu particulièrement complexe que nous devrions tous considérer comme une priorité.
Oui, absolument. Je vous ai donné quelques exemples de partenariats d'envergure que nous avons noués avec divers établissements, y compris de nombreuses petites universités et le formidable réseau de collèges communautaires de notre propre province.
Nous croyons que les partenariats nous rendent plus forts. Nous encourageons les partenariats et la collaboration pour accroître la capacité de recherche et de commercialisation et pour soutenir l'ensemble du milieu. Je pense que la majorité des universités font de même.
Il y a une observation que j'aimerais faire au sujet du financement des universités.
En ce qui concerne les écoles de médecine, les subventions que nous recevons des IRSC comprennent les sommes allouées aux hôpitaux. Comme 10 hôpitaux sont associés à l'Université de Toronto, elle semble recevoir beaucoup d'argent, mais une grande partie du financement va directement aux hôpitaux.
Cela étant dit, nous entretenons aussi de bons partenariats avec les hôpitaux. Pour pouvoir mener des recherches, les médecins doivent être nommés à une école de médecine.
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Je vous remercie pour votre réponse.
Je comprends l'importance pour les instituts de recherche d'aider les professionnels de la santé à obtenir des places en milieu hospitalier. Le Réseau universitaire de santé, au centre-ville de Toronto, est particulièrement connu pour cela; il regroupe quatre hôpitaux. Mais je vais changer de sujet.
J'ai une question sur la recherche appliquée. Nous avons reçu des représentants de collèges et d'écoles polytechniques, y compris le représentant d'un établissement de ma circonscription, Ontario Tech. C'est une université, mais elle travaille surtout dans les domaines des STGM, où une grande part de la recherche est appliquée.
Certains témoins ont suggéré d'affecter une plus grande partie du financement des trois conseils à la recherche appliquée, par opposition à la recherche fondamentale, et de rendre les collèges admissibles au financement.
J'aimerais savoir ce qu'en pensent les deux témoins que nous recevons aujourd'hui, Mmes Aiken et McMartin.
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J'ai quelques recommandations.
Nous avons parlé d'améliorer l'examen du mérite. Quand les établissements déclarent qu'ils ont les ressources et les connaissances nécessaires pour faire quelque chose, les comités d'examen du mérite doivent les croire sur parole.
De plus, on devrait offrir des occasions particulières aux membres du corps professoral et aux chercheurs qui attendent avant de se lancer dans le domaine de la recherche. Il faut faire en sorte qu'il ne soit pas désavantageux de se joindre au milieu à mi‑carrière ou en tant que professeur chevronné.
Il faut aussi veiller à ce que les nouveaux fonds pour les étudiants diplômés soient répartis de façon appropriée et équitable. Les stagiaires en recherche doivent avoir accès au financement dans tous les établissements. Ainsi, ils peuvent choisir l'endroit où ils veulent étudier; ils ne sont pas contraints de fréquenter une des grandes universités parce que c'est la seule façon d'avoir accès au financement.
Étant donné la crise de l'abordabilité, je trouve important de trouver des moyens de donner l'option aux étudiants de s'installer dans des petites régions plus abordables, tout en ayant accès à la même qualité d'expertise et d'expérience en recherche qu'il leur faut.
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Nous allons entreprendre la deuxième partie de la réunion. Je vous souhaite à nouveau la bienvenue.
Conformément à l'article 108(3)i) du Règlement et aux motions adoptées par le Comité le jeudi 30 janvier et le jeudi 15 février 2024, le Comité reprend son étude sur la répartition du financement du gouvernement fédéral entre les établissements postsecondaires du Canada.
J'ai maintenant le plaisir d'accueillir M. Vincent Larivière, professeur à l'Université de Montréal, à titre personnel.
Nous recevons également Mme Céline Poncelin de Raucourt, vice-présidente, Enseignement et recherche, de l'Université du Québec. Elle se joint à nous par vidéoconférence.
Nous allons commencer par M. Larivière.
La parole est à vous pour cinq minutes.
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Je vous remercie beaucoup de votre invitation à témoigner à propos de la concentration du financement de la recherche, une question quand même assez importante.
Je m'appelle Vincent Larivière. Je suis professeur de sciences de l'information à l'Université de Montréal et titulaire de la Chaire UNESCO sur la science ouverte.
Je ne représente pas, ici, l'Université de Montréal. Je suis plutôt ici à titre d'expert qui étudie depuis deux décennies le système de la recherche canadienne, et plus précisément l'organisation du financement.
Le premier élément à mentionner est qu'on observe une concentration du financement de la recherche dans presque tous les pays. C'est un peu comme si c'était une dynamique naturelle des systèmes de recherche. Un peu partout, on observe qu'une minorité d'individus ou une minorité d'établissements reçoivent la majeure partie du financement. Il faut aussi mentionner qu'au Canada, le financement est un peu moins concentré que dans les autres pays. Cela s'illustre par le fait que les taux de succès des scientifiques qui demandent du financement aux organismes subventionnaires canadiens sont, en général, un peu plus élevés que ce qu'on observe, par exemple, aux États‑Unis, où le financement est extrêmement concentré. C'est particulièrement vrai en sciences naturelles et en génie, où on a, au Canada, une approche quand même assez déconcentrée.
Pour résumer, on peut dire qu'il y a deux approches au financement de la recherche.
Il y a une approche où l'on se concentre sur l'excellence. On donne d'importants montants, de grandes subventions, à quelques organisations et à quelques individus.
Une autre approche se concentre plutôt sur la découverte. On finance davantage de personnes, mais en donnant des montants plus modestes.
Dans la première approche, on émet l'hypothèse que, si on donne beaucoup d'argent à quelques personnes, il y aura des économies d'échelle dans le système, que la production de connaissances sera un peu plus efficace et qu'il y aura donc plus de bénéfices collectifs. On peut faire une analogie avec le contexte industriel où, si on produit beaucoup de voitures, chacune d'entre elles va coûter moins cher à produire.
Dans la seconde approche, on émet plutôt l'hypothèse que, si on concentre le financement en donnant beaucoup d'argent à des individus ou à des organisations qui ont déjà beaucoup d'argent, il y aura une productivité marginale moindre. On aura ce qu'on appelle, en économie, des rendements décroissants.
C'est une question de politique publique importante. Beaucoup de travaux ont eu pour but de voir si, effectivement, une des deux approches apportait plus de bénéfices collectifs et si on devrait donc concentrer ou déconcentrer les travaux de recherche.
Or, à l'échelle canadienne, les données montrent que la concentration des fonds de recherche ne crée pas d'économie d'échelle, mais qu'elle mène à des rendements décroissants qui font que chaque article scientifique publié coûte plus cher. C'est ce qu'on voit au Canada et c'est ce qu'on voit dans des synthèses qui ont été faites à l'échelle mondiale. On en sait donc pas mal sur les effets de la concentration des fonds de recherche au Canada et dans le reste du monde.
Je dois dire que je note avec plaisir les changements touchant le financement des étudiants du dernier budget. On est revenu à la raison avec des montants uniques, et non des « superbourses » qui concentrent le financement.
J'en arrive à la concentration du financement des institutions, sur laquelle on en sait beaucoup moins. En fait, on sait que le financement des institutions est concentré. On sait que cinq établissements obtiennent collectivement plus de 45 % du financement total offert par les trois conseils fédéraux. On sait aussi que les universités du regroupement des universités de recherche du Canada U15 obtiennent collectivement environ 80 % du financement au pays. Cette situation est stable depuis environ 20 ans. Par contre, on ne sait trop s'il y a des rendements décroissants. Au cours des dernières semaines, avec mon équipe, j'ai donc cherché à avoir de nouvelles données sur les effets de la concentration du financement des institutions.
J'ai donc réalisé une analyse originale qui examine l'ensemble du financement accordé aux universités canadiennes par les trois conseils fédéraux, à savoir les Instituts de recherches en santé du Canada, le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie et le Conseil de recherches en sciences humaines, et qui examine aussi l'ensemble de la production scientifique, c'est-à-dire les articles scientifiques publiés, des chercheurs de ces universités. J'ai voulu voir s'il y avait effectivement des économies d'échelle, ou s'il y avait plutôt des rendements décroissants.
Or on remarque que, tout comme la concentration du financement des chercheurs individuels, la concentration du financement des institutions mène à des rendements décroissants. On l'observe dans deux domaines sur trois, soit celui des sciences naturelles, avec le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, et celui de la médecine, avec les Instituts de recherches en santé du Canada; dans les universités qui reçoivent beaucoup de financement, le coût des travaux de recherche est beaucoup plus élevé que dans les universités où on reçoit moins de financement. Ainsi, on ne fait pas d'économie d'échelle en concentrant le financement des universités. On observe plutôt des rendements décroissants.
On pourrait évidemment émettre l'argument que les travaux sont d'une meilleure qualité dans les grandes universités financées. Or, quand on prend en compte également la qualité des travaux, on remarque aussi le même genre de rendement décroissant. Autrement dit, la qualité plus élevée ne serait pas ce qui expliquerait le fait que la recherche coûte plus cher.
Je conclus rapidement en disant que, en matière de politiques publiques, le but n'est pas de suggérer de prendre l'argent des universités bien financées et de le donner aux universités moins financées, car cela générerait le même genre de rendement décroissant. C'est une caractéristique inhérente au système. Il s'agit plutôt de mieux comprendre quel est le niveau d'inégalité interinstitutionnelle qui permet de générer le plus de bénéfices collectifs. Si on sait qu'il va y avoir une inégalité, quel niveau, acceptable pour les institutions universitaires et pour le système, permettrait de produire collectivement plus de connaissances.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de nous avoir invités à participer à ces travaux très importants.
Les établissements de l'Université du Québec sont en plein essor et la communauté de recherche revendique plusieurs créneaux d'excellence dans des domaines stratégiques pour le Canada. Si on prend uniquement la question environnementale, nos équipes de recherche ont développé des créneaux d'expertise internationalement reconnus, par exemple sur le rôle des océans dans les changements climatiques, sur les technologies propres, sur l'énergie verte ou encore sur l'exploitation durable des ressources naturelles. Plus précisément encore, nous travaillons à réduire les risques d'inondation, à accroître la résilience aux feux de forêt, à accélérer les stratégies d'économie circulaire ou à prévenir et à gérer les problèmes de santé liés à la pollution ou à la détérioration de l'environnement. Ces réussites n'ont pas été réalisées tout à fait grâce au système de financement, mais malgré des modalités d'allocation qui sont souvent défavorables à nos chercheuses et à nos chercheurs.
Comme vient de le mentionner M. Larivière, le phénomène de concentration du financement de la recherche est bien connu. Sur le plan institutionnel, le financement est concentré vers les établissements membres du groupe U15, qui sont en vaste majorité dotés d'une faculté de médecine et situés dans de grands centres urbains. Ces établissements captent près de 80 % des fonds alors qu'ils comptent 59 % de la population étudiante aux cycles supérieurs et à peine la moitié du corps professoral. Sur le plan individuel également, environ 80 % des fonds attribués à la recherche sont consentis à 20 % des chercheuses et des chercheurs les plus financés. Cela signifie que 80 % de la communauté universitaire se partagent à peine 20 % de l'assiette financière.
Cette situation n'est pas le fruit du hasard, mais de préjugés systémiques qui favorisent les établissements de plus grande taille et avec une faculté de médecine. La logique de ce système est simple: les subventions antérieures attirent les subventions futures. Des bourses d'excellence aux grands programmes de subventions, en passant par les chaires de recherche du Canada, l'ensemble du système est conçu de manière à récompenser les établissements et les chercheurs moins en fonction du potentiel de leur programme de recherche pour la société que des fonds qu'ils ont déjà reçus.
Il faut briser ce cercle vicieux. Il le faut d'abord parce qu'il s'agit d'une mauvaise stratégie d'allocation des fonds publics que de les concentrer chez un nombre restreint d'établissements ou de chercheurs. Les recherches, on vient de le dire, ont démontré que la concentration du financement produit un rendement décroissant lorsqu'on mesure celui-ci en nombre d'articles ou en nombre de citations. Au-delà d'un certain seuil, les investissements n'ont plus l'effet souhaité en matière de production.
Le véritable gage de la productivité de la communauté de la recherche réside non pas dans le montant que reçoit chaque individu, mais plutôt dans le nombre d'individus à l'œuvre. C'est en finançant un plus grand nombre de chercheuses et de chercheurs qu'on augmentera la productivité du système. Autrement dit, mettre tous ses œufs dans le même panier, c'est réduire les chances d'innovation de la recherche canadienne, d'autant plus que les faibles taux associés à une forte concentration des fonds encouragent un certain conservatisme de la communauté universitaire.
La concentration des fonds est non seulement une stratégie mal avisée pour soutenir la découverte, mais c'est une politique publique qui pose aussi des problèmes sur le plan du développement économique, car les établissements de petite et de moyenne taille sont imbriqués dans le tissu économique et social de leur milieu. Ils forment une main-d'œuvre hautement qualifiée et leurs recherches portent en premier lieu sur l'environnement, les populations et les défis sociaux de leur région. Or ces établissements sont présentement ceux qui sont désavantagés par le système fédéral de financement.
Un constat similaire peut être posé quant aux collectivités francophones du pays. Depuis 2004, la part du financement total de la recherche accordée par le gouvernement fédéral aux établissements francophones est en déclin. Les chercheurs francophones reçoivent aujourd'hui un pourcentage des fonds moindre que leur poids démographique. Si le Canada veut maintenir la vitalité de toutes ses collectivités, il est impératif que ces établissements reçoivent davantage de financement.
Bien sûr, nous avons fait nôtres les recommandations du rapport Bouchard visant à augmenter substantiellement le financement de la recherche au Canada, et nous saluons les annonces budgétaires de cette semaine concernant la hausse du nombre et de la valeur des bourses d'excellence. Cette décision répond à des représentations qui sont faites depuis de nombreuses années par l'ensemble des acteurs universitaires et par votre propre comité. Au bout du compte, cette hausse assure un avenir meilleur à la relève canadienne en recherche.
Toutefois, injecter plus de fonds dans le système ne le rendra pas plus fonctionnel si on ne change pas aussi les règles qui le régissent. Si on veut briser le cercle vicieux dans lequel est enfermée la communauté canadienne de la recherche, il faut répartir les fonds plus équitablement. Pour ce faire, nous avons formulé un certain nombre de recommandations dans notre mémoire.
Par exemple, nous recommandons que l'augmentation budgétaire des trois conseils tienne compte de la proportion de chercheurs et d'étudiants diplômés dans les disciplines qu'ils recouvrent; que les hausses budgétaires permettent aux chercheuses et aux chercheurs d'augmenter la valeur des bourses qu'ils versent aux personnes étudiantes au moyen de leurs propres subventions de recherche; et que le gouvernement mette en place un seuil minimal de chaires par établissement.
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Merci, monsieur le président.
Mes questions s'adressent à la représentante de l'Université du Québec.
J'aimerais aborder une question délicate. L'élimination des obstacles à l'égalité des chances pour permettre à diverses personnes d'accéder aux fonds de recherche fédéraux est un objectif louable. Toutefois, à cet égard, le gouvernement du Canada a provoqué une controverse au Québec en appliquant certains critères d'admissibilité à l'allocation des fonds de recherche fédéraux dans la province.
À la fin de 2022, un professeur d'histoire d'un établissement de recherche québécois a déposé une plainte de discrimination et de violation des droits de la personne contre l'Université Laval et le Programme des chaires de recherche du Canada. Il soutenait qu'il était admissible au poste de titulaire de la chaire de recherche du Canada en histoire, mais que sa demande avait été refusée parce qu'il est un homme blanc. En réponse à cette situation, en décembre 2022, l'Assemblée nationale du Québec a adopté une motion qui exprimait un engagement en faveur de l'embauche fondée sur le mérite sur les campus universitaires du Québec et qui rejetait l'imposition de quotas raciaux ou de genre par le gouvernement fédéral. Tout cela est lié aux exigences imposées par le Programme des chaires de recherche du Canada du gouvernement du Canada pour que les universités atteignent des objectifs d'embauche axés sur la diversité.
Les responsables de votre université sont-ils d'avis que le gouvernement fédéral devrait pouvoir imposer de telles exigences aux établissements québécois?
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Merci beaucoup, madame Rempel Garner.
Effectivement, votre préambule était bon. C'est une question extrêmement délicate dans la communauté universitaire, et elle déchire de nombreuses personnes.
La réponse que je veux vous faire est que l'ensemble des établissements universitaires, de concert avec les organismes subventionnaires ou les conseils, se préoccupent grandement d'assurer une accessibilité, une équité, une diversité, une inclusion du système à tout un profil de chercheurs, de chercheuses, d'étudiantes et d'étudiants.
À titre d'exemple, l'Université du Québec a été construite historiquement pour favoriser l'accessibilité de groupes qui étaient sous-représentés dans les études universitaires ou dans les milieux de recherche. Par exemple, ce sont des étudiants de première génération, c'est-à-dire des gens qui sont un petit peu plus âgés et qui ont des familles. Nous sommes donc habitués à accueillir une grande diversité d'étudiants et d'étudiantes, mais également de chercheuses et de chercheurs.
Les tentatives ou les soucis des établissements universitaires sont de favoriser un système le plus équitable et le plus diversifié possible. On aurait tort de prétendre, dans ce débat, qu'assurer cette diversité, c'est aller contre l'excellence et le mérite.
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Je vous remercie beaucoup de votre question.
Je vais reformuler les résultats pour être très précis. Ce que l'on voit à l'échelle des organisations, c'est que, plus l'université est globalement financée, plus le coût des articles produits augmente. Dans la littérature, parmi les hypothèses qui expliquent la raison des rendements décroissants, il y a celle voulant que, pour découvrir davantage de choses, il faille plus de chercheurs. Ma collègue Mme Poncelin de Raucourt en a parlé plus tôt.
En tant que professeur, j'ai un nombre d'heures limité dans ma semaine. Il y a 24 heures dans une journée pour tout le monde. Si on me donne plus d'argent, je ne peux pas nécessairement travailler davantage. Dans ce cas, on devrait donner cet argent à quelqu'un d'autre. Pour qu'on découvre encore plus de choses, il faudrait, non pas donner aux chercheurs des montants minimes, mais des montants cohérents, on doit financer plus de personnes, ce qui permettra de produire plus de travaux de recherche.
Par exemple, donner une subvention de 100 000 $ à une université de grande taille est une goutte d'eau dans l'océan; par contre, donner le même montant à une université de plus petite taille peut vraiment changer la donne.
Madame Poncelin de Raucourt, vous avez déclaré que bon nombre des universités du regroupement U15 ont tendance à être situées dans de grands centres urbains et à avoir des écoles de médecine. Elles ont tendance à obtenir beaucoup d'argent pour la recherche, simplement pour cette raison.
Nous avons entendu une témoin du groupe précédent — elle venait d'une petite université, l'Université de Lethbridge — dire que c'est comme une roue de hamster. Les petites universités tentent de se tailler une place au sein d'un groupe important disposant d'un grand bassin de ressources.
Je me demande si vous pourriez nous en dire plus sur la façon dont les universités peuvent s'y prendre pour se tailler une place. Il est difficile de remplir des demandes de subventions, etc.
Je sais que dans le budget que nous avons présenté l'autre jour, le nombre de bourses d'études supérieures a été augmenté. Vous avez dit que c'était une chose qui pourrait aider à régler ce problème.
Avez-vous d'autres suggestions à nous faire?
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Je vous remercie beaucoup.
Pour revenir à la récente augmentation du nombre et de la valeur des bourses, dont on se réjouit absolument, il va falloir être vigilant à l'égard de la répartition de ces nouveaux fonds. Si ceux-ci ne servent qu'à concentrer davantage le financement, cela n'améliorera pas le système.
Il y a un an ou deux, nous avons eu des échanges avec les conseils subventionnaires, qui faisaient remarquer que la majorité des étudiants aux cycles supérieurs finançaient leurs études par l'entremise de bourses versées par les chercheuses et les chercheurs à même les subventions qu'ils reçoivent. Encore une fois, pour les programmes de bourses, il va falloir s'assurer que ces nouvelles bourses sont réparties équitablement, et non en fonction de quotas qui découlent des taux de succès liés aux subventions de recherche, comme c'est le cas actuellement. Les établissements qui concentrent le plus de fonds de recherche ont le plus grand quota pour recruter des étudiants aux cycles supérieurs, qui se retrouvent donc concentrés toujours dans les mêmes établissements.
Il faut donc casser cette logique. Nos collègues de l'Association canadienne pour les études supérieures recommandaient, par exemple, une répartition proportionnelle au nombre d'étudiants diplômés. D'autre part, on doit mieux soutenir l'immense majorité d'étudiants qui sont soutenus par leurs superviseurs à même leurs subventions de recherche, en augmentant également le budget des trois conseils pour qu'ils puissent rehausser les subventions données par l'entremise de leurs programmes de base. Voilà ma réponse à votre question sur les bourses.
Par ailleurs, vous m'avez demandé comment les plus petits établissements pouvaient se tailler une plus grande place. La question des moyens mis à la disposition des établissements pour répondre aux appels et participer aux partenariats est essentielle. Les établissements de petite ou moyenne taille ont des équipes réduites qui doivent gérer un nombre incroyable de programmes, en connaître les règles et pédaler pour aider les équipes de chercheurs à réaliser, dans des délais souvent très serrés, des projets très ambitieux. Il faut s'assurer que l'ensemble des établissements ont des moyens équivalents.
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En effet, l'Université du Québec est préoccupée de longue date par le déclin du fait français au Canada, en particulier dans le champ scientifique, où ce déclin est particulièrement prononcé. Vous avez certainement vu plusieurs données qui ont été publiées sur le fait que, depuis les années 1960, à peine 8 % des revues savantes créées au Canada sont en français.
Dans les domaines des sciences naturelles, du génie ou de la santé, il n'existe pratiquement aucune option pour publier des résultats de recherche en français, ce qui fait que 90 % des publications dans ces champs sont en anglais. De plus, seulement de 5 à 12 % des demandes déposées auprès des conseils subventionnaires sont rédigées en français. Historiquement, le taux de succès des demandes de financement déposées en français est plus bas que celui des demandes déposées en anglais. On pourrait continuer ainsi longuement sur les inégalités.
Pour répondre à votre question, même parmi les établissements du regroupement U15, il n'y a que deux établissements francophones, et aucun des deux ne fait partie de l'Université du Québec ou de l'Alliance canadienne des universités de recherche de petite et de moyenne taille, l'ACCRU, alors que l'Université du Québec est le plus grand réseau universitaire francophone du Canada et se partage le reste du gâteau, comme on le disait tout à l'heure, avec les établissements.
En résumé, comme le remarquait dans son mémoire l'Association francophone pour le savoir, ou l'Acfas, en contexte canadien, la recherche réalisée en français est cruciale pour la vitalité et l'épanouissement des communautés francophones en situation minoritaire. Pour que ces communautés francophones vivent pleinement, elles doivent développer des connaissances sur elles-mêmes, et la langue la plus appropriée pour le faire, c'est le français. Elles doivent aussi former du personnel hautement qualifié dans leur langue. Par l'entremise de la recherche, les établissements nouent aussi des liens avec leur communauté pour mieux la servir. Quand on concentre les fonds de recherche, on met tout cela en danger.
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Nous ne remettons absolument pas en question l'intégrité des personnes impliquées dans les processus d'évaluation. Le personnel administratif et les évaluateurs agissent tous — nous en sommes persuadés — de façon éthique, en respect des règles déontologiques et des valeurs qui sont celles des conseils subventionnaires.
Ce que nous remettons en question, ce sont plutôt les choix de politiques publiques qui ont mené le système de financement à favoriser la concentration des fonds, notamment par des programmes de subvention qui sont conçus pour financer très fortement un plus petit nombre de projets, des programmes qui accordent des points aux chercheurs et aux établissements, selon la somme du financement qu'ils ont récolté, par le passé, ou même selon les moyens déployés par les établissements qui sont davantage liés à sa richesse qu'à l'excellence du projet ou du programme.
Quand le mérite est moins associé à l'impact et à la recherche antérieure sur la collectivité qu'à la somme du financement déjà reçu, on perd de vue la finalité derrière la science, qui est d'améliorer les conditions de vie des collectivités humaines. Il faut donc repenser cette association sémantique qui veut que la concentration des fonds soit synonyme d'excellence.
La valeur d'une recherche ou d'un chercheur ne se mesure pas à la somme du financement qu'on lui a octroyé, mais plutôt à la portée de ses résultats pour la communauté savante dont il faut tenir compte.
Ma prochaine question s'adresse à M. Larivière.
Monsieur Larivière, ce que vous avez mentionné, aujourd'hui, est assez important. L'argument du groupe U15, c'est qu'il a les établissements à haute intensité de recherche, les infrastructures accessibles et l'expertise, notamment, le talent disponible.
Cependant, vous dites que, en matière d'efficience, les investissements d'argent public dans ces établissements ne génèrent pas nécessairement plus de productivité ou de production de publications scientifiques, en raison de l'impact de la recherche.
J'aimerais que vous nous en parliez davantage.
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Ce que vous avez dit est vrai.
Essentiellement, les données indiquent — ce n'est pas moi qui le dis, ce sont les données — que la production d'articles coûte ultimement plus cher dans les universités qui reçoivent davantage de fonds.
Cela dit, certaines raisons peuvent expliquer cela, et elles méritent d'être étudiées de façon scientifique. Nous avons un résultat quand même intéressant et il faut l'étudier davantage pour le comprendre en détail.
Comme je l'ai mentionné plus tôt, il faut creuser davantage ces résultats. Il faut essayer de comprendre les facteurs qui expliquent cela, d'une part. D'autre part, il faut établir la distribution inégalement optimale du financement au pays, de façon à maximiser les bénéfices collectifs.
En outre, comme l'a dit Mme Poncelin de Raucourt, il faut s'assurer d'avoir des connaissances sur les diverses facettes de la société canadienne, et cela passe effectivement par une diversification des lieux où on fait de la recherche.
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Je vous remercie beaucoup de votre question.
Effectivement, c'est une réflexion intéressante. Je vous rappelle qu'au Canada, il y a le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, soit le CRSNG, dont le modèle de financement se distingue de celui des autres organismes de financement au Canada, mais aussi ailleurs dans le monde.
Essentiellement, le CRSNG finance une proportion de chercheurs beaucoup plus élevée que les autres organismes de financement. Évidemment, les montants accordés sont plus faibles, mais ils permettent quand même à un professeur d'avoir, par exemple, une petite équipe formée d'un stagiaire postdoctoral et d'un doctorant. Nous pourrions dire que le CRSNG assure une base financière aux scientifiques.
Si on veut trouver un montant de financement minimal, la façon de faire du CRNSG le donne. Il y a donc des exemples qui fonctionnent bien.
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Ma réponse va dans le même sens que celle de M. Larivière.
Nous nous penchons souvent sur la question du modèle du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie, le CRSNG. Il y a aussi le soutien d'un pourcentage raisonnable de la communauté de recherche pour atteindre un taux de succès, qui est un encouragement à l'innovation.
Plutôt que les freins ou les incitatifs à la concentration, il faut également considérer comment les communautés de recherche sont soutenues tout au long de leur vie. Les nouveaux chercheurs, les chercheurs en milieu de carrière et les chercheurs en fin de carrière sont des éléments dont il faut tenir compte.
En plus de se pencher sur les montants des subventions de recherche, il va aussi falloir se pencher sur les moyens qu'on donne aux établissements. Comme on le disait, les chercheurs ou les équipes de recherche peuvent faire le travail, d'autant mieux qu'elles sont soutenues par des équipes. On peut aussi penser aux techniciens et aux professionnels de laboratoire, qui ont souvent des métiers très précaires, mais qui sont pourtant essentiels à la poursuite des activités de recherche et au maintien des infrastructures, que ce soit en sciences ou en sciences humaines et sociales. Comme le soulignait M. Larivière, il est faux de dire que les sciences humaines et sociales n'ont pas d'infrastructures. En effet, il y a de plus en plus de grandes bases de données et il y a l'intelligence artificielle, deux éléments nécessaires au déploiement des recherches en sciences sociales et humaines.
Un chercheur doit être soutenu par un écosystème, par une équipe composée de professionnels de recherche, de techniciens de laboratoire, mais également des personnes dans l'administration de la recherche. Ces gens soutiennent les chercheurs pour la gestion budgétaire et pour le montage de demandes de subventions, ce qui permet aux chercheurs de se consacrer à leur activité principale.
J'aimerais donner un exemple en lien avec une importante question, soit la sécurité nationale de la recherche. Le gouvernement fédéral a consenti des financements pour soutenir les établissements dans leurs efforts pour assurer la sécurité de la recherche. Cependant, la manière dont l'argent a été réparti favorise encore la concentration, parce qu'on se basait sur les fonds totaux des organismes subventionnaires. L'Université de Toronto a donc obtenu des montants énormes, mais des établissements de plus petite taille n'ont eu aucun financement ou un financement de 2 000 $ pour soutenir la compétence qu'ils doivent déployer pour s'assurer de la sécurité des recherches.
Cela démontre que les moyens sont répartis inéquitablement, ce qui fait peser sur les chercheurs des petits établissements des efforts démesurés par rapport à ceux des grands établissements, qui sont soutenus par un bataillon de professionnels et d'experts.
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Depuis un an et demi, je crois, nous avons une initiative majeure pour l'ensemble des établissements du réseau de l'Université du Québec. Il s'agit de l'Initiative sur la santé mentale étudiante en enseignement supérieur.
Grâce à la mutualisation de nos expertises, nous avons créé cette initiative, qui a reçu du financement des ministères québécois de la Santé et des Services sociaux et de l'Enseignement supérieur pour promouvoir la santé mentale étudiante. Cette initiative a permis de regrouper des ressources en soutien aux intervenants, qui sont en appui à la santé mentale étudiante, ainsi que toute une série de ressources en soutien direct aux étudiants du réseau.
L'initiative était tellement intéressante que les deux ministères nous ont demandé non seulement de desservir la communauté de l'Université du Québec, mais également l'ensemble des universités au Québec ainsi que des cégeps et des collèges. C'est là un exemple d'initiative.
Malheureusement, ce genre d'initiative est trop récent pour que nous puissions examiner son impact sur la santé mentale de la manière dont vous me le demandez.
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Chaque établissement a tout un écosystème de soutien à l'innovation, au transfert et à la mobilisation des connaissances.
Il y a évidemment toute la question des brevets et des jeunes entreprises qui sont issues de ces recherches. De plus, il y a les innovations sociales, souvent moins mesurées, mais qui sont tout aussi pertinentes. D'ailleurs, on commence à améliorer le système de mesures de ces innovations.
Plus tôt, j'ai parlé de la recherche partenariale. Cette dernière, par principe, ne génère pas forcément des brevets ou autres, mais elle crée des maillages entre des industries ou des organisations à but non lucratif et nos chercheurs. Cette recherche partenariale est pensée pour avoir des retombées concrètes et directes sur les milieux qui expriment un besoin. Ces recherches sont menées pour répondre à des questions précises.
Le nombre de recherches partenariales peut aussi être un indicateur des retombées des investissements en recherche sur l'amélioration de la vie des collectivités canadiennes.
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Merci, monsieur le président.
[Français]
D'abord, je veux remercier nos témoins de leurs présentations, aujourd'hui.
[Traduction]
Notre étude porte sur la répartition du financement fédéral entre les établissements postsecondaires du Canada. Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire qu'il faut élargir le gâteau, et c'est pourquoi nous sommes si heureux que notre gouvernement ait présenté son budget, qui, bien sûr, doit faire l'objet d'un vote de confiance, alors nous n'allons rien tenir pour acquis. Cependant, il est proposé évidemment d'augmenter le financement de la recherche.
Je veux me concentrer sur des solutions pratiques quant à la façon dont le financement devrait être réparti. L'une des suggestions que j'ai entendues de la part d'un chercheur, c'est que, lorsque les trois conseils examinent les demandes de subventions, ces demandes devraient être anonymes. Autrement dit, rien ne devrait permettre de savoir qu'une demande provient d'un établissement du regroupement U15 ou d'un autre; et les publications antérieures d'un professeur ne devraient pas nécessairement figurer dans la demande.
Que pensez-vous de la possibilité de ne pas révéler au comité d'examen quel établissement présente la demande?
Pouvons-nous commencer par M. Larivière, s'il vous plaît?
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Je vous remercie de votre question.
La littérature montre bien que réduire l'importance mise sur l'identité des personnes qui font une demande amène une plus grande égalité dans les résultats. Alors, la réponse à votre question est oui, cela devrait être exploré. Le Canada obtient des résultats très intéressants, par ailleurs. Selon une étude de Holly Witteman, professeure à l'Université Laval, lorsque les Instituts de recherche en santé du Canada ont décidé de réduire le poids du curriculum vitæ dans l'évaluation des demandes et de donner davantage de poids au projet, il n'y avait plus d'inégalité homme-femme dans les résultats, dans les taux de succès. Par analogie, on peut penser que cela va aussi réduire le poids des universités plus prestigieuses par rapport à celles qui le seraient moins.
Je suis donc effectivement entièrement en faveur d'anonymiser les projets autant que possible ou, dans le cas du financement des professeurs, de donner davantage de poids aux projets et moins de poids aux curriculum vitæ des demandeurs.
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Si je siégeais à ce conseil, ce serait parce qu'on aurait entendu notre discours.
Une des recommandations que nous faisons dans le mémoire que nous allons déposer est qu'un comité de ce genre permette d'accueillir la diversité de l'écosystème de la recherche au Canada. De cette façon, des établissements situés dans d'autres régions ou ayant un style différent pourraient faire partie de ces comités et faire entendre leur voix. Ce serait la première bonne nouvelle.
Une deuxième recommandation consisterait à s'assurer de financer adéquatement l'ensemble de l'écosystème de recherche. C'est une question dont nous discutons ici depuis un moment. C'est de cette façon, c'est-à-dire en permettant à tous ces territoires et à toutes ces particularités d'avoir une voix, qu'on pourra répondre aux enjeux. C'est, je crois, la qualité novatrice qu'aura l'écosystème de la recherche du Canada.
Il s'agit d'assurer une répartition équitable du financement et de financer les découvertes d'un plus grand nombre de chercheurs de façon à ce que le système soit le plus innovant et le plus agile possible.
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Nous sommes arrivés à la fin de la période des questions.
Je tiens à dire à nos deux témoins qu'ils ont fourni d'excellentes réponses, malgré le très court préavis, voire aucun préavis. Vous avez répondu de façon remarquable à des questions complexes.
Je vous remercie, Vincent Larivière et Céline Poncelin de Raucourt, de vos excellents témoignages. Encore une fois, si vous avez des documents qui pourraient nous aider dans notre étude, nous vous serions reconnaissants de nous les transmettre. Les membres du Comité font un excellent travail pour ce qui est d'obtenir par votre entremise l'information destinée aux analystes.
Nous sommes arrivés à la fin de la huitième heure de cette étude de 12 heures. Nous aurons deux autres réunions dans les semaines à venir, à notre retour de nos circonscriptions. Nous poursuivrons donc l'étude à ce moment‑là.
Je remercie encore une fois les témoins et les membres du Comité pour la séance de ce matin.
Sur ce, quelqu'un doit proposer une motion pour lever la séance, et je constate que c'est fait.
La séance est levée.