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Bonjour, monsieur le président. Merci à tous les membres de nous avoir invités à témoigner devant votre comité.
Je m’appelle Karna Gupta. Je suis président et directeur général de l’ACTI, soit l’Association canadienne de la technologie de l’information. Nous représentons plus de 350 entreprises au pays, mais 65 p. 100 de nos membres sont des PME.
L’industrie des TIC génère des revenus d’environ 160 milliards de dollars au pays et procure environ 750 000 emplois en TIC et emplois connexes. C’est un élément clé de la future croissance de l’économie canadienne dans tous les secteurs d’activité. L’ACTI a longtemps préconisé une stratégie complète sur l’économie numérique en vue d’améliorer la croissance et la prospérité du Canada.
J’aimerais aujourd’hui vous parler de trois piliers clés de cette stratégie en ce qui a trait à la politique sur la protection de la vie privée.
Premièrement, il y a l’innovation. En ce qui a trait aux médias sociaux, nous avons à peine gratté la surface en matière d’innovation et d’avantages connexes pour les consommateurs et les entreprises. La protection des renseignements personnels sera cruciale à mesure que le tout prendra de l’expansion. Nous devons trouver la meilleure façon d’y arriver, tout en favorisant l’innovation et la croissance. La réglementation intelligente est le deuxième pilier de notre stratégie. Le troisième est la culture numérique. Il faut une stratégie nationale en la matière pour aider les Canadiens à utiliser efficacement et sécuritairement les outils du XXIe siècle.
Vous avez probablement beaucoup entendu parler du déficit en matière d’innovation du Canada. L’écart dans les investissements en TIC entre le Canada et les États-Unis s’agrandit. Le déficit en matière de productivité entre le Canada et les États-Unis se maintient; on parle d’un écart de 10 à 20 p. 100. Dans le rapport de 2012 du Forum économique mondial, en matière d’innovation, le Canada a dégringolé de la quinzième place, qu’il occupait en 2011, à la vingt-et-unième place. Aucun autre pays en haut du palmarès n’a perdu autant de places que le Canada.
Quel est le rapport des médias sociaux? L’adoption des TIC est le moteur principal de la productivité, et la popularité des médias sociaux comme Facebook, Google ou LinkedIn a suscité un énorme développement des TIC dans tous les secteurs. Cela laisse présager un potentiel incroyable pour ce qui est de l’augmentation de la productivité et des changements sociaux.
Examinons certaines données économiques. En 2012, selon le Forum économique mondial, les Canadiens se classent au treizième rang en ce qui a trait à l’utilisation d’Internet, mais au sixième relativement à l’utilisation des réseaux sociaux. Selon les prévisions, 60 p. 100 des Canadiens posséderont un téléphone intelligent d’ici la fin de l’année. Cette augmentation est grandement stimulée par l’utilisation d’applications et des médias sociaux.
Les Canadiens adoptent la technologie, et nous sommes bien placés pour en tirer profit. En ce qui concerne la croissance potentielle dans les industries connexes, les présentes recherches s’entendent pour dire que 70 000 emplois seront créés au Canada d’ici 2015, et c’est directement lié à l’infonuagique et aux méthodes plus rentables de stockage de données.
L’un des avantages les plus prometteurs pour le Canada est l’analyse des données, soit la capacité d’interpréter d’importante quantité de données et de saisir l’occasion sur le marché pour aborder des problèmes sociaux. Nous évaluons que le marché mondial pour ces services atteindra de 15 à 20 milliards de dollars d’ici 2015. Le Canada a une forte expertise dans le domaine. Par exemple, les Centres d’excellence de l’Ontario, le gouvernement fédéral, IBM et sept établissements universitaires ont mis sur pied un réseau virtuel pour aider les PME à gérer leurs données en vue d’aborder d’importants défis. À Vancouver, les policiers se servent de l’analyse des données pour coordonner les pistes et le déploiement des ressources en vue d’améliorer la sécurité publique. Ils soutiennent que les crimes contre les biens ont chuté de 24 p. 100.
Les entreprises utilisent l’analyse des données pour surpasser leurs concurrents et réaliser de meilleurs profits. Selon un récent sondage, la majorité des entreprises qui se servent de solutions infonuagiques ont un rendement supérieur à leurs concurrents de l’ordre de 68 p. 100. Voilà le lien avec la productivité. Les médias et les réseaux sociaux qui stimulent l’innovation favorisent la productivité.
Il s’agit également d’une industrie mondiale doublée d’une grande mobilité.
Notre stratégie sur l’économie numérique doit s’assurer que le Canada est une destination qui permet la croissance et la prospérité des entreprises, parce que les emplois et l’économie dont il est question sont hautement mobiles. Le tout se déplace où se trouvent les conditions gagnantes. Un facteur important pour garantir cette croissance est un environnement réglementaire qui s’appuie sur ce que nous appelons une réglementation intelligente.
Examinons certains enjeux concernant la protection de la vie privée. Le présent cadre canadien à cet égard est considéré comme un modèle par plusieurs pays dans le monde. Il accomplit un bon travail dans le domaine primordial de la protection des données personnelles et de la promotion de l’innovation. Nos membres et d’autres sources nous disent que le cadre fonctionne bien, parce qu’il se fonde sur des principes et qu’il est neutre pour l’ensemble des technologies et des secteurs d’activité. Ils disent que le présent cadre s’adapte au secteur des médias sociaux qui évolue rapidement et aux industries pour lesquelles nous ne pouvons pas prévoir les applications futures. Il est très important de souligner que nous ne pouvons pas prévoir bon nombre des applications futures. Nos membres nous mentionnent également que des règles constantes pour l’ensemble des secteurs favorisent les investissements et l’observation de ces règles par les entreprises.
Qu’avons-nous ici? Cela stimule l’innovation en permettant un dialogue constructif avec la commissaire à la protection de la vie privée. De nouvelles composantes entrent en jeu. Ce n’est pas le cas dans l’UE, parce que les règles sont plus normatives. En fait, selon une étude réalisée par un chercheur de l’Université Harvard, les règles de l’UE ont mené à une réduction des investissements en capital-risque dans les entreprises qui utilisent des données en ligne.
C’est également efficace. L’encadrement, les décisions et l’impressionnante collaboration de la commissaire à la protection de la vie privée avec ses homologues internationaux ont permis un véritable changement. Le taux d’adoption des réseaux sociaux au Canada le démontre bien. Le sixième rang, c’est plus que respectable.
Enfin, j’aimerais dire quelques mots au sujet de la culture numérique, à savoir un autre pilier important de notre stratégie sur l’économie numérique.
En vue de croître et de prospérer, les Canadiens ont besoin de compétences pour utiliser efficacement et sécuritairement les données numériques. Nos membres jouent un rôle actif à cet égard. J’aimerais également applaudir la commissaire à la protection de la vie privée pour le rôle actif qu’elle joue en vue de sensibiliser les Canadiens au sujet de l’utilisation des médias en ligne. Il s’agit d’une excellente opportunité pour tirer profit d’organismes, dont l’ACTI, en vue de poursuivre sur la lancée de ce programme de sensibilisation. Nous pouvons servir de portail pour aider les entreprises de TI, particulièrement les PME, à comprendre les règles concernant la protection de la vie privée et à s’y conformer.
En terminant, monsieur le président, la protection des renseignements personnels est extrêmement importante, et je sais que nos membres ne prennent pas la chose à la légère. D’un autre côté, le Canada a besoin d’une stratégie numérique qui permet l’innovation et encourage les entreprises à s’installer et croître ici. Comme je l’ai mentionné, les médias sociaux aident à stimuler nos nouvelles industries connexes au Canada, ce qui démontre un grand potentiel pour notre économie. Nous en sommes encore au début, et c’est fragile. Il faut nous assurer d'avoir un environnement qui favorise ces industries pour concrétiser ce potentiel.
Je vous remercie de votre temps, monsieur le président.
Merci également aux membres du comité de nous avoir donné l’occasion de témoigner devant le comité.
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Bonjour, mesdames et messieurs membres du comité.
Je vous remercie du fond du coeur de m'avoir invité ici, aujourd'hui. C'est à la fois un plaisir et un honneur de dire ce que j'ai à dire. Je pense qu'il s'agit d'un sujet qui est particulièrement important et particulièrement d'actualité. Il est pressant qu'on s'y attaque d'une manière cohérente ici, au Canada.
Avant de commencer, je voudrais juste réaffirmer que la présentation que je fais devant vous aujourd'hui est bien sûr la mienne, mais également celle de la professeure Leslie Regan Shade, de l'Université de Toronto, avec qui j'ai d'ailleurs rédigé le mémoire qui vous a été soumis. Je parle donc en nos deux noms, et loin de moi l'idée de m'attribuer le mérite pour un travail qu'on a fait conjointement.
Comme vous le savez, le droit à la vie privée est un droit humain qui est absolument fondamental. C'est un droit qui est associé à des notions aussi importantes que la dignité humaine, la réputation, l'honneur et la joie de vivre. Tout aussi fondamental, le droit à la vie privée est intimement lié à des droits et libertés qui sont essentiels à la préservation de notre démocratie, soit le droit à la liberté d'expression, le droit à la liberté d'association et de réunion pacifique et, bien sûr, le droit à la participation aux affaires publiques.
Il est généralement acquis que le droit à la vie privée comporte quatre grandes dimensions. La première est la préservation de l'anonymat, soit le fait de ne pas être identifié ou de ne pas être identifiable. La deuxième est l'absence de surveillance, c'est-à-dire de ne pas être soumis à un regard externe et de ne pas être observé. La troisième est la préservation d'un espace d'intimité, qui est l'idée du maintien d'un espace qui est jugé inviolable, un sanctuaire. La quatrième et dernière dimension du droit à la vie privée est évidemment la capacité de chaque personne d'avoir une saine gestion de ses renseignements personnels. C'est la capacité de contrôler les accès, la diffusion, le partage et l'exactitude des renseignements personnels qui sont collectés sur son compte.
Ce n'est pas une surprise de vous dire que le développement des médias sociaux pose d'importantes problématiques pour chacune de ces quatre dimensions. Cela dit, notre contribution aujourd'hui devant vous porte essentiellement sur le quatrième point, c'est-à-dire la gestion des renseignements personnels, qui est considérée, bien évidemment, comme une dimension fondamentale du droit à la vie privée.
La protection des renseignements personnels nécessite la réalisation de neuf critères bien spécifiques. Toute personne qui est sujette à une collecte de renseignements personnels sur son compte devrait pouvoir être correctement informée que l'on procède à une collecte, y souscrire bien volontairement et être en mesure d'identifier les acteurs procédant à cette collecte de renseignements. De plus, elle devrait pouvoir connaître les manières de collecter ces renseignements, identifier la nature de ces renseignements et connaître les usages qui vont en être faits. Une telle personne devrait également pouvoir identifier les acteurs qui peuvent avoir accès à ces renseignements et les règles qui encadrent leur confidentialité ainsi qu'évaluer si ces renseignements sont correctement protégés. Enfin, elle devrait pouvoir accéder aux renseignements collectés ainsi que rectifier, corriger ou retirer des renseignements personnels qui ont été accumulés ailleurs.
Ces neufs critères devraient, selon nous, servir de balises à l'évaluation des mesures qui sont entreprises par les sites de médias sociaux afin de protéger les renseignements personnels des Canadiens. Or, nous constatons de très nombreuses problématiques à cet égard. L'un des problèmes clés en matière de protection des renseignements personnels sur les sites de médias sociaux demeure la multiplication des standards et des protections relatives à la préservation de la vie privée. On déplore l'absence d'un cadre cohérent, clair et exhaustif qui offrirait aux utilisateurs des médias sociaux un ensemble de normes claires en matière de protection des renseignements personnels auxquelles ils auraient droit et cela peu importe la plateforme ou le média social qu'ils choisissent d'investir.
C'est pourquoi nous concluons qu'il serait tout à fait approprié que les instances chargées de la protection de la vie privée au Canada rédigent et adoptent, en partenariat avec la société civile canadienne, une charte de la vie privée sur les sites de médias sociaux à laquelle devrait souscrire l'ensemble des médias sociaux qui ont des activités au Canada.
Si j'ai le temps — vous m'arrêterez si ce n'est pas le cas —, je conclurai ma présentation en détaillant chacun des éléments qu'on considère important de retrouver dans une telle charte.
Pour l'instant, j'aimerais vous entretenir sur la problématique de la protection des renseignements personnels sur les sites de médias sociaux. D'après nous, cette problématique comporte trois volets et découle largement du modèle d'affaire privilégié par les sites de médias sociaux.
C'est une problématique qui, d'après nous, comporte trois volets. Elle découle largement du modèle d'affaires privilégié par les sites de médias sociaux.
D'une manière bien générale, un site de média social crée de la valeur et peut rentabiliser ses activités en procédant à la monétisation des renseignements personnels de ses utilisateurs. Cela se fait habituellement de deux manières: par un prélèvement financier exigé à des personnes et des entreprises qui souhaitent accéder à des renseignements personnels des utilisateurs et interagir avec eux — c'est notamment le modèle privilégié par les sites de rencontre et certains sites de réseautage professionnel — et, plus couramment, par une offre de services publicitaires qui repose sur la collecte, le traitement et l'analyse des renseignements personnels diffusés sur les sites de médias sociaux.
Un site de média social tel que Facebook agrège une audience qu'il vend à des annonceurs. C'est son travail, son modèle d'affaires. La spécificité du produit offert par Facebook à ses clients réside véritablement dans sa capacité à offrir des produits marketing et publicitaires qu'il affirme être adaptés aux goûts et préférences de chaque utilisateur. Formulé autrement, les renseignements personnels constituent à l'heure actuelle la monnaie d'échange qui est transférée entre les utilisateurs, les sites de médias sociaux et les clients de ces entreprises. Toute modification aux pratiques qui encadrent la collecte, l'analyse et le traitement des renseignements personnels a donc des incidences tout à fait directes sur l'offre de services et, par le fait même, sur les revenus générés par les entreprises qui exploitent les sites de médias sociaux.
En matière de protection des renseignements personnels sur les sites de médias sociaux, nous avons identifié trois volets qui comportent tous des problématiques bien spécifiques. Nous allons en faire un survol rapide.
Le premier volet concerne les pratiques de collecte, de traitement et de partage des renseignements personnels. À cet égard bien spécifique, nous avons constaté les problématiques suivantes.
D'abord, il y a toujours une vulnérabilité chez les personnes mineures, plus spécifiquement chez les enfants, aux processus de collecte de renseignements personnels employés par des agences marketing. La multiplication des jeux, des activités interactives et des processus de marketing sur les sites de médias sociaux est extrêmement attrayante pour les jeunes enfants qui ne disposent pas des ressources nécessaires pour protéger leur vie privée de manière efficace. À notre connaissance, il n'existe aucune législation au Canada qui protège les renseignements personnels des personnes mineures en ligne contre les atteintes commises par des acteurs commerciaux.
Ensuite, on constate un éclatement des politiques de collecte et de traitement des renseignements personnels. Les développeurs d'applications et de jeux investissent massivement le domaine des médias sociaux. Ces développeurs et ces agences de marketing ont tous leur propre politique sur la confidentialité et leur propre politique sur la protection de la vie privée. La multiplication des accords contractuels que contracte un utilisateur de médias sociaux, qui découle de l'intégration des applications dans ces sites, crée un flou et fait en sorte qu'il est très difficile pour les utilisateurs de savoir précisément dans quelle mesure et en fonction de quels paramètres ses renseignements personnels sont protégés.
De plus, on constate sur certains sites de médias sociaux l'absence d'un contrôle réel permettant à l'utilisateur d'identifier et de sélectionner les tierces parties pouvant avoir accès à ses renseignements personnels et, le cas échéant, de déterminer quels renseignements il accepte de voir transmis et lesquels il ne désire pas voir transmis. Une fois que nous acceptons une application sur notre page Facebook, il est extrêmement difficile de savoir ce que le développeur de l'application va faire de ces renseignements personnels et à qui il va les transmettre. Il est très difficile de maintenir un certain contrôle sur ces renseignements.
On dénote également l'absence d'études exhaustives sur les risques que représentent pour la confidentialité et la protection des renseignements personnels les nouvelles techniques de croisement des données et d'identification faciale. En d'autres mots, la plupart des utilisateurs disposent actuellement d'un certain nombre de comptes ouverts sur différents sites de médias sociaux. Chacun de ces sites a sa propre vocation, son propre objectif et, au sein de chacune de ces plateformes, l'utilisateur détermine les politiques de confidentialité qui semblent le plus appropriées à ses besoins.
Le risque est qu'avec les nouvelles techniques de croisement des données on peut, à partir d'un individu, retracer l'intégralité de sa vie privée en multipliant les enquêtes qui sont faites sur les sites de médias sociaux que cet utilisateur fréquente. Le danger est là et ce problème est croissant.
Finalement, on constate une vulnérabilité aux attaques informatiques des sites de médias sociaux. Par exemple, en juin 2012, le site LinkedIn s'est fait dérober plus de 6 millions de mots de passe de ses utilisateurs. En 2011, je crois, quelqu'un a eu accès au compte du président et fondateur de Facebook et a pu dévoiler, de manière tout à fait publique, ses photos les plus intimes. La question de la sécurité des renseignements personnels sur les sites de médias sociaux n'est pas du tout réglée.
Le deuxième volet de notre mémoire et de mon intervention porte sur les informations dont disposent les utilisateurs sur les modifications des pratiques de collecte, de traitement et de partage des renseignements personnels.
À cet égard, on constate que le problème est qu'il y a une véritable absence de transparence sur les effets réels et anticipés de toute modification sur les paramètres de confidentialité relative à la vie privée pour les utilisateurs qui ont des comptes dans des sites de médias sociaux.
Au cours des dernières années, les modifications souvent unilatérales des paramètres de confidentialité ont engendré de profondes controverses et résistances au sein des communautés d'utilisateurs, ont préoccupé des organismes de défense du droit à la vie privée et ont engendré des poursuites en recours collectif.
L’imposition de changements aux paramètres de confidentialité sur les sites de médias sociaux pose trois catégories de problèmes bien spécifiques aux utilisateurs.
Premièrement, elle prive l’utilisateur de sa capacité à déterminer par lui-même le degré de protection qu’il souhaite offrir à ses renseignements personnels.
Deuxièmement, la multiplication de ces changements aux paramètres de confidentialité génère véritablement une confusion au fil des ans chez l’utilisateur et fait baisser sa confiance dans les politiques de respect de la vie privée qui ont cours sur les sites de médias sociaux.
Troisièmement, l'imposition unilatérale de changements aux paramètres de confidentialités sur les sites de médias sociaux témoigne de l’absence d’un dialogue sain et productif entre utilisateurs et gestionnaires de sites de médias sociaux sur la question de la protection de la vie privée.
Le troisième et dernier volet de notre mémoire porte sur l'éducation relative aux risques associés aux médias sociaux.
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Merci de votre question.
Je sais que vous avez assisté au Congrès mondial sur les technologies de l’information à Montréal. Comme vous avez entendu le reste du monde le dire, nous vivons dans un monde ouvert. On ne peut donc pas tout contrôler et tout conserver à double tour. Il faut nous assurer d’avoir les capacités de gérer les risques potentiels.
La commissaire à la protection de la vie privée accomplit vraiment un travail crédible en faisant participer l’industrie et en établissement le cadre et les besoins. Les consultations sont continues.
Si nous avons des règles normatives d’un certain type, nous risquons de regarder vers l’arrière, au lieu de nous tourner vers l’avenir. Il faut les modifier de temps à autre. Le monde évolue très rapidement.
D’un autre côté, vous connaissez tous les termes « externalisation ouverte » et « production communautaire ». Si vous souhaitez stimuler l’innovation et la croissance au pays, il faut laisser le monde numérique entrer au Canada, s’établir ici, croître ici, et prendre soin des industries ici. Nous devons être accueillants.
En tant que nation, il faut maintenir un fragile équilibre; il faut non seulement créer un environnement qui attire les entreprises et favorise la croissance, mais aussi nous assurer d’avoir des outils de protection adéquats et la capacité de nous en servir.
Par exemple, toute cour fédérale a le pouvoir d’accorder des dommages-intérêts punitifs si une entreprise s’écarte du droit chemin à cet égard. La commissaire à la protection de la vie privée pourrait dicter certaines règles et certaines lignes directrices si une personne ne s’y conforme pas. Si l’industrie ne participait pas aux discussions et que nous n’avions qu’un ensemble de règles, ce serait très difficile pour l’industrie, parce que nous regarderions encore une fois vers l’arrière, au lieu de nous tourner vers l’avenir.
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Il y a probablement environ trois ans, les entreprises avaient tendance à faire développer bon nombre de leurs logiciels en Inde, en Malaisie et en Indonésie pour des raisons liées à la main-d’oeuvre et d’autres motifs. De nos jours, comme les investisseurs commencent à tenter de résoudre certains des problèmes, ils ont souvent recours à ce qui est connu sous le nom d’externalisation ouverte. Ils soumettent le problème au monde ouvert et attendent que quelqu’un leur explique comment résoudre le problème. Ce processus fait partie du cycle d’innovation de la plupart des entreprises canadiennes en démarrage. Dans à peu près n’importe quel secteur de l’économie canadienne, les entreprises ont recours à ce qu’on appelle l’externalisation ouverte pour résoudre leurs problèmes.
Je vais aller plus loin. Le concept que je vais vous présenter a commencé probablement pour de bon au Massachusetts et en Californie. On l’appelle le financement collectif. Et, maintenant, il est connu dans le Nord et dans le reste du monde.
Vous connaissez les problèmes liés aux fonds de capital-risque au Canada. Dans n’importe laquelle de vos circonscriptions, les entreprises en démarrage ont du mal à obtenir du capital de risque pour survivre. Très souvent, elles parviennent à se maintenir à flot parce que des investisseurs indépendants leur proposent de plus petites sommes d’argent. Je suis membre du conseil d’administration de certaines de ces petites entreprises, et je remarque qu’elles obtiennent leur financement auprès de différentes personnes en ayant recours au modèle de financement collectif. Elles indiquent sur Internet le genre de problème qu’elles s’efforcent de résoudre pour la société, l’entreprise ou le marché en général, et elles demandent aux gens s’ils sont disposés à investir dans ce projet et à les accompagner dans cette aventure. Les sommes investies peuvent osciller entre 100 et 10 000 $, selon la nature du projet.
Aujourd’hui, ces deux approches sont le moteur de l’ensemble des entreprises canadiennes en démarrage. Quatorze centres d’innovation régionaux exercent leurs activités en Ontario seulement. Si vous visitez n’importe lequel de ces centres, que ce soit MaRS, ventureLAB ou Communitech, vous constaterez que l’externalisation ouverte et le financement collectif sont des sujets qui reviennent constamment dans la conversation. Ces approches contribuent véritablement à notre économie, en ce sens qu’elles créent des emplois, engendrent des innovations et permettent de démarrer de nouvelles entreprises qui, un jour, se développeront. Ces approches ont une incidence réelle et mesurable.
Dans votre deuxième question, vous nous avez demandé si nous avions une idée de la valeur financière engendrée par ce modèle fondé sur un marché ouvert, sur l’utilisation des médias sociaux et sur la sensibilisation du marché. Je n’en ai aucune idée. Elle pourrait être énorme. La valeur du marché mondial — ne serait-ce que sur le plan de l’analyse des données —, de toute la recherche et de cet aspect des activités commerciales est extrêmement élevée. Comme je l’ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, elle oscille entre 15 et 20 milliards de dollars répartis sur trois ou quatre ans. Voilà sa valeur.
Si nous souhaitons que nos entreprises jouent un rôle dans l’univers numérique et que notre économie repose sur le savoir plutôt que sur les seules ressources naturelles, nous devons évoluer dans cet univers et disposer de tous les outils nécessaires pour soutenir cette initiative. Je ne peux pas chiffrer avec exactitude l’importance de l’incidence que les médias sociaux ou des plateformes ouvertes de ce genre auraient sur notre économie.
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Je le ferai avec plaisir.
La problématique qui nous semble être primordiale est celle de la multiplicité des politiques qui encadrent la confidentialité des renseignements personnels, ne serait-ce que sur un même site de média social et entre les plateformes.
À l'intérieur d'un même site, comme Facebook, des dizaines et des dizaines d'applications différentes sont offertes. Lorsque l'on s'inscrit à chacune de ces applications, il y a une politique de confidentialité à laquelle on doit souscrire. Lorsque l'on a une quinzaine ou une vingtaine de ces applications, il est pratiquement impossible pour l'utilisateur normal de pouvoir contrôler de manière précise les données auxquelles peuvent accéder ou non des tierces parties. Cela crée un volume de politiques de confidentialité qui est simplement non soutenable pour l'utilisateur moyen.
Ajoutons à cela que l'utilisateur moyen a souvent plusieurs comptes répartis entre différents sites. Chacun des sites a sa propre politique générale de confidentialité. Chacun de ces sites a également des tierces parties, comme des développeurs de jeux ou des entreprises de marketing, qui font affaires avec eux. On arrive très rapidement à un volume qui est simplement déraisonnable. Il est déraisonnable de s'attendre à ce qu'un utilisateur qui est enjoint à multiplier les accords contractuels soit maître, en toute connaissance de cause, des décisions qui sont prises en matière de respect de ses renseignements personnels.
Si l'on tient pour acquis que des enfants en très bas âge ont accès à ces sites et les utilisent et que ces sites les mobilisent alors qu'ils ne disposent ni de la formation, ni des ressources, ni des compétences nécessaires pour faire attention aux données fournies, on se retrouve alors dans une situation où l'exercice d'un contrôle réel est complètement illusoire. Le fait de pousser cela vers l'utilisateur en lui disant qu'il est de son devoir de se responsabiliser, c'est faire fi d'une économie politique des renseignements personnels qui fonctionne entre autres sur cette confusion généralisée de l'utilisateur.
Par ailleurs, la problématique de la vie privée pour les enfants est particulièrement grave. Nous proposons une politique nationale pancanadienne. Elle inclurait également une dimension très claire d'éducation critique aux médias et particulièrement aux médias numériques. On y trouverait un cursus scolaire par l'entremise duquel on enjoindrait les étudiants à développer des aptitudes très tôt dans leur développement et leur formation académique.
Vous savez, il y a deux manières de voir la problématique à l'heure actuelle. On peut voir les utilisateurs de médias sociaux comme des consommateurs qui veulent avoir accès à des services ou alors, on peut les voir comme des citoyens. On peut également les voir comme étant les deux. En fin de compte, la question définitive, celle qui va vous enjoindre de trancher, serait de savoir lequel des deux termes vous voulez prioriser.
Voulez-vous prioriser une agglomération de consommateurs qui ont des droits individuels ou souhaitez-vous créer un corps de citoyens informés sur leur vie privée?
Les deux ne sont pas incompatibles, mais les deux sont fondamentalement en situation de tension. Il faudra faire un choix.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Bienvenue à nos invités.
Nous avons parlé de l'importance de la protection de la vie privée. Bien entendu, nous avons mentionné que les consommateurs ont besoin de savoir qu'il y a un endroit où ils peuvent être protégés de même que leurs renseignements personnels.
Évidemment, nous parlons aussi de culture numérique. Je suis né à l'époque des téléphones à lignes partagées, et je savais que le nôtre avait deux longues sonneries et une courte, ce qui n'était pas très loin du code Morse. Néanmoins, c'est le type d'écart entre les générations dont il est question.
Vous avez aussi fait des suggestions concernant les écoles et la façon dont elles arrivent à gérer ces choses. D'ici à ce que nous fixions des normes.... Toutes les écoles le font. Il n'est pas question de laisser entendre que cela ne se produit pas maintenant, mais elles ne s'attachent pas à un secteur en particulier. Je pense qu'il est important que nous nous penchions sur la question, mais nous devrions aussi pouvoir utiliser le rôle de la commissaire au plan de l'éducation pour élargir ce cadre.
J'aimerais que tous les acteurs de l'industrie y participent, ainsi que ceux du milieu universitaire, pour lui donner les types de renseignements qui seraient importants.
L'un des autres points qui ont été mentionnés est que nous voulons que le Canada soit une destination pour ce type d'industrie en particulier. Je crois qu'on a mentionné que si les conditions sont réunies, les gens viendront chez nous, alors nous devons faire en sorte qu'elles le soient.
Nous avons aussi parlé de stratégie numérique. Je présume que l'industrie et toutes les personnes que la question intéresse envisageront une stratégie numérique qui favorisera l'innovation. Nous devons aussi envisager la question dans une optique mondiale, celle du citoyen culturel. Nous sommes un citoyen culturel de quelle origine? S'agit-il simplement de notre propre province, de notre propre région, de notre pays ou du monde entier? Je crois que cela est aussi significatif.
Je me demandais si vous pouviez vous prononcer sur les stratégies numériques qui favoriseraient l'innovation tout en protégeant les renseignements personnels tels que nous les voyons et grâce auxquelles nous pourrions réussir à faire travailler les gens dans cette optique.