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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 5 novembre 1997

• 1533

[Traduction]

Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): La séance est ouverte.

Bienvenue à tous.

Comme vous le savez, conformément à l'article 83.1 du Règlement, le Comité des finances fait des consultations prébudgétaires pour obtenir l'avis des Canadiens sur les mesures à mettre en oeuvre ou à recommander au ministre des Finances pour le budget à venir.

Nous recevons cet après-midi des représentants de l'Association canadienne des compagnies d'assurance de personnes, de l'Association des assureurs-vie du Canada, de l'Institut des fonds d'investissement du Canada et du Conseil du Canada pour les régimes de prestations interentreprises.

Nous allons commencer par le représentant de l'Association canadienne des compagnies d'assurance de personnes, à savoir son président, M. Mark Daniels.

M. Mark Daniels (président, Association canadienne des compagnies d'assurance de personnes): Merci beaucoup, monsieur le président.

Nous sommes heureux d'avoir encore une fois l'occasion de comparaître devant votre comité à l'occasion de ces consultations prébudgétaires annuelles.

Notre association se félicite d'avoir participé à chacun de vos exercices de consultation depuis 1994. Dans l'intervalle, la situation financière du pays a manifestement connu des changements considérables. En ce qui concerne l'ensemble de la gestion financière, c'est au gouvernement fédéral que l'on doit une bonne partie des progrès réalisés dans la réduction du déficit budgétaire, grâce à laquelle notre pays est sur le point de parvenir à l'équilibre budgétaire.

Notre secteur d'activité approuve résolument le vaste plan d'action du gouvernement en matière de restrictions financières. Nous invitons le gouvernement à poursuivre sa gestion financière prudente de façon à assurer la croissance à long terme.

• 1535

Comme il prévoit d'atteindre l'équilibre budgétaire dès l'exercice financier 1998-1999, le ministre a invité le comité à sonder le point de vue des Canadiens quant à l'orientation financière que devrait prendre le gouvernement au-delà de l'équilibre budgétaire.

Dans ce contexte, monsieur le président, votre comité a soumis un certain nombre de questions essentielles aux témoins. L'une d'entre elles concerne les nouveaux investissements stratégiques et les modifications du régime fiscal qui permettraient au gouvernement d'atteindre ses priorités.

Pour tenter de répondre à cette question, monsieur le président, je voudrais tout d'abord rappeler que nous n'invitons pas le gouvernement fédéral à modifier sa stratégie actuelle de lutte contre le déficit et, en bout de ligne de réduction de la dette. L'opération a commencé; elle n'est nullement terminée.

Cela étant dit, s'il est possible d'envisager quelques postes de dépenses supplémentaires, nous avons pensé à certaines dépenses qui pourraient être profitables à l'ensemble de la population. Notre mémoire présente une initiative spécifique qui, à notre avis, pourrait apporter une réponse à cette question.

Au cours des dernières années, notre secteur d'activité a collaboré étroitement avec ce comité pour satisfaire une demande présentée il y a quelques années par le ministre Martin. À l'époque, il avait signalé qu'un grand nombre de Canadiens (huit ou neuf millions) n'avaient pas d'assurance-maladie ou d'assurance dentaire complémentaires en raison des règles inéquitables qui les empêchent de tirer parti du régime fiscal actuel. Afin de mesurer la portée réelle des régimes complémentaires au Canada et de déterminer pourquoi certains groupes ne sont pas couverts, l'ACCAP conjointement avec plusieurs autres associations, a entrepris il y a deux ans une étude visant à mesurer l'étendue véritable de la couverture complémentaire au Canada et à déterminer si l'iniquité fiscale pouvait être mise en cause à ce chapitre.

Il est ressorti essentiellement de cette étude que près de 26 millions de Canadiens, soit environ 88 p. 100 de la population, bénéficiaient d'une protection complémentaire venant s'ajouter au régime public d'assurance-maladie couvrant les soins médicaux et hospitaliers de base, et ce, en vertu de programmes gouvernementaux spéciaux ou de régimes privés. Sur ces 26 millions de Canadiens, 20 millions environ sont couverts par des régimes privés d'assurance-santé, généralement des régimes collectifs proposés par l'employeur. Les 6 millions restants, formés de personnes âgées et d'assistés sociaux, sont couverts par un régime provincial. Il reste donc environ 3,6 millions de personnes, soit 12 p. 100 de la population, qui n'ont pas de couverture complémentaire.

Ces 3,6 millions de Canadiens peuvent être repartis en trois groupes. Le premier, environ deux millions de personnes, est composé d'employés et de personnes à charge qui pourraient bénéficier d'un régime complémentaire mais qui n'en ont pas. Dans ce groupe, l'absence de couverture ne peut pas être attribuée à des causes fiscales.

Le deuxième groupe, soit environ un million de personnes, est formé de travailleurs autonomes non constitués en société et de personnes à charge. Il s'agit d'agriculteurs, de médecins, d'architectes, d'experts-conseils, etc. Les travailleurs de ce groupe, contrairement aux employés des petites entreprises constituées en société, ne peuvent pas déduire le coût de leur couverture complémentaire de leur revenu imposable à titre de dépense d'entreprise. Dans leur cas, une simple modification du régime fiscal en ce qui concerne la déductibilité des cotisations les mettrait sur un pied d'égalité avec les salariés des entreprises.

Les autres, soit 600 000 Canadiens, n'ont qu'un faible lien ou aucun lien avec le marché du travail. Une modification du traitement fiscal des contributions de l'employeur à un régime complémentaire privé ne modifierait en rien le manque de couverture de ce groupe.

Le défi que doit relever notre secteur d'activité consiste à accroître la protection dans ces trois groupes qui, du moins pour les deux premiers, pourraient avoir accès à un régime privé et qui, néanmoins, manquent actuellement de protection. Il faut viser en priorité le secteur de la petite entreprise, qui représente une partie importante des deux premiers groupes.

Pour relever ce défi, nous avons fait un travail considérable avec la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante pour essayer de mieux comprendre les causes de cette absence de protection.

La première d'entre elles, c'est le manque d'information et de sensibilisation. Trop souvent, les petites entreprises ne connaissent pas les produits disponibles en matière d'assurance collective.

La deuxième cause tient à des éléments du régime fiscal. Comme nous l'avons indiqué précédemment, un vaste secteur de la petite entreprise, soit les travailleurs autonomes non constitués en société, fait face à un élément fiscal dissuasif, puisque ces travailleurs autonomes ne peuvent pas déduire le coût de leur régime d'assurance-maladie et d'assurance dentaire de leur revenu imposable.

La troisième cause tient à l'intérêt porté par les assureurs aux grosses entreprises. Pendant un certain nombre d'années, les assureurs ont consacré une bonne partie de leur temps aux grands groupes, au détriment des petits. Ces dernières années, nous nous sommes efforcés de réorienter nos activités vers les petits groupes, c'est-à-dire vers le marché des entreprises de moins de dix employés.

• 1540

Nous collaborons actuellement avec la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante à la réalisation de trois initiatives. La première vise à obtenir de l'information plus précise et plus abondante sur les raisons pour lesquelles les régimes collectifs sont moins répandus dans le secteur de la petite entreprise. La deuxième vise à mieux faire connaître les produits d'assurance collective auprès des petites entreprises et des courtiers en assurance. La troisième vise à informer les assureurs de la possibilité de fournir une protection plus large et mieux adaptée aux petites entreprises et aux travailleurs autonomes.

Dans le contexte de l'amélioration des finances publiques, nous invitons le comité à recommander au gouvernement fédéral de participer au travail entrepris par la FCEI et l'industrie des assurances de personnes pour faciliter l'accès des petites entreprises à l'assurance-maladie et à l'assurance dentaire complémentaires en éliminant l'injustice d'ordre fiscal touchant les travailleurs autonomes non constitués en société. Le Comité des finances et l'industrie des assurances de personnes ont déjà recommandé l'élimination de cette injustice fiscale. Nous considérons que le climat financier actuel donne au gouvernement l'occasion de se conformer à cette recommandation.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Daniels.

Nous allons maintenant donner la parole à M. David Thibaudeau, de l'Association des assureurs-vie du Canada. Soyez le bienvenu.

M. David Thibaudeau (président, Association des assureurs-vie du Canada): Merci, monsieur le président, de nous accueillir aujourd'hui devant votre comité.

Je représente ici les 18 000 membres de l'Association des assureurs-vie du Canada, qui est la plus importante association professionnelle de conseillers en assurances et de conseillers financiers au Canada. Les membres de l'AAVC fournissent des solutions et des conseils financiers qui répondent aux besoins des consommateurs canadiens, de même qu'ils offrent des produits variés: assurance-vie et assurance-maladie, contrats de rente, instruments d'épargne-retraite, fonds distincts, fonds de placement et services financiers connexes.

En 1991, l'AAVC a formé le Congrès pour l'assurance-vie avancée afin de répondre aux besoins de ses membres qui se spécialisent dans des domaines tels que la planification successorale, la succession d'entreprises, les avantages sociaux et les pensions de retraite. Une large part de la clientèle des membres du CAVA est constituée de propriétaires de petites et moyennes entreprises.

Monsieur le président, les membres de l'AAVC et du CAVA aident les Canadiens à assurer leur sécurité financière. Les membres de notre association ont des contacts quotidiens avec des millions de Canadiens, et ils s'efforcent de déterminer leurs besoins individuels ainsi que ceux de leur famille et de leurs entreprises, puis de leur offrir des produits adaptés à ces besoins.

La première fois qu'il s'est adressé à ce comité en 1993, le ministre des Finances a parlé du sentiment d'insécurité et de l'angoisse économique qu'éprouvaient les Canadiens à cette époque marquée par une faible croissance de l'économie et un niveau excessif d'endettement des particuliers et de l'État. Le principal moyen de redonner confiance à un particulier dans sa situation financière consiste à le doter d'un plan financier solide s'appuyant sur la capacité de cette personne d'atteindre les objectifs fixés dans ce plan. Cette affirmation vaut autant pour les gouvernements que pour les Canadiens et leur famille. Nous appuyons donc la pratique du gouvernement qui consiste à fonder sa planification économique et financière sur des hypothèses économiques plus prudentes que les prévisions qui font consensus dans le secteur privé. Nous sommes favorables au cycle de planification étalé sur deux ans, parce qu'il impose la discipline, et nous acceptons le recours à une réserve pour imprévus assez importante qui, à la fin de l'exercice, pourrait servir à la réduction de la dette si elle n'a pas été utilisée.

C'est avec satisfaction que nous avons entendu le ministre réaffirmer l'engagement du gouvernement à réduire le déficit et la dette publique dans sa mise à jour économique et financière. Toutefois, nos membres sont préoccupés par le fait que la règle de répartition 50-50 que le gouvernement a adoptée comme principe directeur à des fins de planification ne met pas suffisamment l'accent sur la réduction de la dette. Nous pensons que la formule devrait plutôt consacrer exclusivement au moins 50 p. 100 du dividende budgétaire à la réduction de la dette, et 50 p. 100 à de nouvelles dépenses destinées à répondre aux besoins économiques et sociaux les plus pressants.

La dette globale du Canada demeure extrêmement élevée, en particulier si l'on tient compte des emprunts directs des gouvernements provinciaux et territoriaux, qui s'élevaient à 190 milliards de dollars à la fin de 1996. Au Canada, le ratio de la dette au PIB est toujours à plus de 100 p. 100, ce qui est beaucoup trop élevé par rapport à la norme internationale. Il convient de se rappeler que cette dette est une taxe que nous imposons délibérément à nos enfants et à nos petits-enfants.

Le ministre des Finances a déclaré à ce comité que la réduction du ratio de la dette au PIB allait améliorer l'efficacité et la croissance de l'économie grâce à un environnement plus propice à l'entrepreneuriat et à l'investissement. Nous ne saurions dire mieux. Les Canadiens reconnaissent que la réduction de la dette tombe sous le sens, et c'est pourquoi ils en ont fait leur priorité financière absolue. D'après un récent sondage Angus Reid du Globe and Mail, il est temps pour le gouvernement de faire de la réduction de la dette sa propre priorité budgétaire.

• 1545

Compte tenu du peu de temps qui me reste, monsieur le président, je voudrais aborder brièvement les questions de la planification de la retraite, des prestations d'assurance-maladie et des dons de charité.

En leur qualité de conseillers financiers, nos membres interviennent auprès de Canadiens aux revenus les plus variés afin de les aider à concevoir et à préparer leur avenir financier. Compte tenu des rajustements qui doivent être apportés incessamment au Régime de pensions du Canada et du remaniement des programmes de la Sécurité de la vieillesse et du Supplément de revenu garanti, dans le cadre du Programme de la prestation aux aînés, les Canadiens s'inquiètent grandement de leur capacité de subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille une fois qu'ils seront à la retraite.

En tant que membres de la Retirement Income Coalition, la Coalition pour les revenus de retraite, l'AAVC et le CAVA s'emploient, de concert avec le gouvernement fédéral, à définir une approche globale en vue de l'élaboration d'une politique d'épargne-retraite qui tienne compte de l'importance à la fois des instruments du secteur public et de ceux du secteur privé.

Les Canadiens sont en droit de s'attendre à ce que les mesures gouvernementales visant à adapter les programmes publics aux nouvelles réalités démographiques et économiques s'accompagnent de rajustements qui augmentent la capacité individuelle des Canadiens à épargner en vue de leur retraite. Pour être plus précis, disons que le moment est venu de relever le plafond des cotisations aux REER.

En ce qui concerne les prestations d'assurance-maladie, le CAVA a joué un rôle dans la formation de la Health Benefits Coalition, la Coalition pour les prestations d'assurance-maladie, qui collabore avec le gouvernement dans le but de faire mieux saisir à ce dernier les liens qui existent entre les programmes publics et les programmes privés dans la prestation globale des soins de santé aux Canadiens.

Dans son rapport de décembre 1996 à la Chambre des communes, le Comité des finances a souligné l'importance des régimes privés dans le système de santé. Le comité a en outre recommandé que le coût des régimes complémentaires d'assurance pour soins médicaux et dentaires souscrits par les travailleurs autonomes canadiens non constitués en société pour eux-mêmes et pour leurs personnes à charge, soit déductible du revenu imposable.

Nous demandons aux membres actuels du Comité des finances de reprendre cette importante recommandation.

M. Bill Strain, le président du Service de la fiscalité au CAVA, a participé antérieurement, avec ce comité, à une discussion sur les très graves conséquences de l'avant-projet de loi relatif à la résolution budgétaire no 21. Au nom des membres de l'AAVC et du CAVA, je voudrais demander une nouvelle fois au comité de recommander le retrait de l'avant-projet de loi et de demander au gouvernement d'étudier à fond la méthode révisée d'évaluation présentée comme solution par l'Institut canadien des experts en évaluation d'entreprises.

Pour terminer, je dirai que l'AAVC et le CAVA tiennent à féliciter les membres du comité pour l'ouverture d'esprit et le souci de concertation dont ils ont fait preuve au cours de ces audiences prébudgétaires. Vous prouvez que vous êtes prêts à écouter le point de vue de tous les Canadiens sur les problèmes à résoudre.

Merci de nous avoir permis de participer à vos travaux. Nous sommes prêts à répondre à vos questions.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Thibaudeau.

Nous allons maintenant passer à l'honorable Tom Hockin, qui représente l'Institut des fonds d'investissement du Canada.

M. Tom Hockin (président et directeur général, Institut des fonds d'investissement du Canada): Merci, monsieur le président. Je suis heureux de vous revoir.

Je suis également très heureux de revoir M. Riis.

Il m'est très agréable d'être ici pour essayer de convaincre le gouvernement plutôt que pour le défendre.

Le président: Est-ce plus facile?

M. Tom Hockin: Oui, je crois que c'est un peu plus facile.

Je suis aujourd'hui président de l'IFIC, l'Institut des fonds d'investissement du Canada. L'IFIC est une association dont les membres viennent de l'industrie des fonds mutuels au Canada.

Nous comprenons bien l'énorme défi que représente pour le gouvernement le fait de décider de l'avenir des finances de la nation et l'importance des conseils que lui assure à cette fin le comité.

Nous voulons dire tout d'abord que nous appuyons la direction prise jusqu'ici en matière de réduction du déficit et nous sommes très encouragés par les récentes observations du premier ministre, selon lesquelles on pourrait équilibrer les comptes dès le présent exercice.

Même si je ne consacrerai pas mon temps aujourd'hui à parler de la politique financière à suivre, je dirai que, face à l'avenir, je pense que la réduction de la dette est une importante priorité.

Je veux mettre l'accent aujourd'hui sur une initiative qui n'aurait aucune incidence directe—voilà une bonne nouvelle pour les membres du comité—mais qui aiderait beaucoup à offrir aux Canadiens une meilleure possibilité d'atteindre la sécurité financière à la retraite—ce qui, je crois, devrait être une priorité du gouvernement actuel, compte tenu particulièrement du vieillissement de la population.

L'initiative dont il s'agit est l'augmentation de la limite imposée par la règle sur les biens étrangers.

Permettez-moi tout d'abord de vous donner une idée de l'ampleur actuelle de l'industrie des fonds mutuels.

• 1550

À la fin de 1991, l'industrie des fonds mutuels gérait des actifs de 49,9 milliards de dollars; aujourd'hui, ils se chiffrent à 283,7 milliards de dollars. C'est une augmentation de 470 p. 100. Les actifs gérés ont augmenté de 51 p. 100 au cours des 12 derniers mois seulement. C'est donc une industrie en très forte croissance.

Si l'industrie connaît une croissance aussi rapide, c'est parce que les Canadiens sont inquiets et qu'ils veulent épargner en prévision de la retraite et d'autres besoins importants, comme les études universitaires de leurs enfants. Ils savent qu'ils auront un jour à faire de grandes dépenses et que leurs économies pourraient ne pas croître suffisamment dans un contexte à faible taux d'intérêt. Ce sont donc leurs préoccupations qui sont à l'origine de la croissance de l'industrie que je représente ici aujourd'hui.

Cependant, les Canadiens ordinaires en sont venus à comprendre qu'ils n'ont pas besoin d'être riches pour bénéficier de la gestion professionnelle de leurs économies par les fonds mutuels et qu'ils peuvent obtenir des rendements plus élevés et jouir des avantages de la diversification. Le Canadien moyen peut profiter de ces avantages grâce à des produits collectifs appelés fonds mutuels.

En réalité, la moitié des 5,2 millions de Canadiens qui contribuent à un REER gagnent moins de 40 000 $ par année. Ce ne sont pas seulement les riches qui épargnent en vue de la retraite. La moitié d'entre eux gagnent moins de 40 000 $ par an. C'est donc là la ressource essentielle pour les Canadiens à revenus moyens ou modestes pendant leur retraite.

La reconnaissance par une partie des Canadiens du besoin d'épargne en vue de leur retraite n'est qu'un élément de la réponse au défi de la sécurité financière à la retraite. Le deuxième élément important est le placement diversifié, et par conséquent plus sûr, des économies en vue de l'obtention de rendements optimaux. Telle est la situation particulière de nombreux Canadiens, dont beaucoup sont propriétaires de petites entreprises, qui comptent uniquement sur leurs REER et n'ont pas de régimes de retraite d'entreprise.

Cela m'amène à mon point principal: il y a un besoin urgent de modifier la soi-disant règle sur les biens étrangers que renferme la Loi de l'impôt sur le revenu. Selon cette règle, seulement 20 p. 100 de l'argent placé dans les régimes enregistrés de pension et d'épargne-retraite peut être investi à l'étranger—20 p. 100 seulement. La modification de la règle sur les biens étrangers ferait beaucoup pour éviter aux Canadiens de trop concentrer leurs économies de retraite dans le même panier et leur permettre de profiter également d'industries en croissance dans d'autres pays ainsi que d'industries qui n'existent pas au Canada et peuvent leur procurer des rendements plus élevés.

Par exemple, le Canada compte 39 groupes d'industries, tandis que les États-Unis en comptent 90. Plus tôt les Canadiens pourront faire fonctionner leurs économies en vue de la retraite, plus tôt ils pourront se préparer à la retraite, compter moins sur le gouvernement, c'est-à-dire sur la prestation aux aînés, le supplément de revenu garanti (SRG), et épargner en prévision d'autres grands besoins, comme les études de leurs enfants.

La limitation de la diversification accroît le risque d'investissement qui va de pair avec un portefeuille concentré—par exemple, un portefeuille composé seulement d'actions canadiennes. Les investisseurs prudents ne mettent pas tout leur argent dans les actions d'une seule entreprise—ils ne font pas cela—dans les entreprises d'une seule industrie ou dans les entreprises situées dans une seule ville. Aucun investisseur prudent ne le ferait. Toutefois, à l'échelle mondiale, c'est à cela que mène la règle sur les biens étrangers. Le marché canadien des titres ne représente que 2,4 p. 100 du marché mondial des valeurs mobilières, mais 80 p. 100 des économies de retraite des Canadiens doivent être investies dans cette catégorie représentant 2,4 p. 100 et qu'on appelle Canada.

Fait intéressant, quand on examine cette question aujourd'hui, on constate que la turbulence récente du marché boursier mondial révèle que, lors d'un ralentissement, le fléchissement varie d'un marché ou d'un secteur à l'autre. Un portefeuille diversifié d'actions, d'obligations et de liquidités, dont une bonne sélection de titres étrangers, permet d'atténuer l'incidence des ralentissements, même mondiaux.

L'IFIC a chargé Ernst & Young de faire une étude de l'incidence de la règle sur les biens étrangers sur les rendements des investisseurs, et je suis heureux d'en dévoiler les résultats publiquement aujourd'hui. Nous tenions à les présenter à votre comité, qui a la lourde tâche d'examiner les questions budgétaires. Nous avons commandé l'étude parce que la question est urgente et nous espérons que ses résultats vous éclaireront.

• 1555

Nous avons demandé à Ernst & Young d'examiner ce qu'auraient été les rendements si la limite d'investissement dans des biens étrangers avait été plus élevée. Si la limite d'investissement dans des biens étrangers avait été de 30 p. 100 au cours des 25 dernières années—30 p. 100 au lieu de 20 p. 100—les investisseurs canadiens auraient ajouté jusqu'à 1,6 p. 100 de plus par année à leur portefeuille d'économies de retraite. Cette estimation est fondée sur le Morgan Stanley Capital International World Index, corrigé pour tenir compte des fluctuations du change.

Prenons le cas d'un investisseur moyen qui contribuerait 5 000 $ par année à un REER ou à un régime de retraite à cotisations déterminées. Même une augmentation de 0,5 p. 100 sur 25 ans procurerait 32 000 $ de plus à la retraite.

Un changement de politique qui peut permettre aux Canadiens d'épargner en vue de leur retraite avec moins de risque et avec un meilleur rendement est une saine initiative et c'est pourquoi nous la proposons au comité. Nous savons qu'il peut y avoir des opposants à un tel changement, mais nous croyons qu'il en est ainsi parce que certaines personnes supposent que la règle sur les biens étrangers a des conséquences qu'elle peut bien ne pas avoir.

Certaines personnes pensent, notamment, qu'on favorise la création d'emplois en exigeant l'investissement de 80 p. 100 des économies de retraite au Canada. Nous ne croyons pas que la règle sur les biens étrangers favorise la création d'emplois. En réalité, si vous ou moi avons plus d'argent dans nos poches à dépenser à la retraite par suite d'une augmentation de la limite qu'impose la règle sur les biens étrangers, nous stimulerons alors l'économie et contribuerons à la création d'emplois. Plus gros sera notre coussin, plus nous dépenserons au Canada à notre retraite.

Comme vous le savez bien, les véritables créateurs d'emplois dans ce pays sont les petites entreprises. Pour les membres de l'IFIC, qui créent des emplois, la règle sur les biens étrangers est un problème, et ils appuient l'augmentation de la limite. Bref, les propriétaires de petites entreprises sont si occupés à gérer leurs affaires, à essayer de créer des emplois et à chercher à joindre les deux bouts, qu'ils voient dans l'augmentation de la limite imposée par la règle sur les biens étrangers un moyen d'atténuer un peu leur inquiétude au sujet de la retraite. Ils veulent que leurs REER leur procurent un rendement maximal et qu'ils soient diversifiés et sûrs. Si les petites entreprises ne croient pas que la règle sur les biens étrangers favorise la création d'emplois, je pense qu'on peut supposer sans risque d'erreur que la règle sur les biens étrangers ne favorise pas la création d'emplois dans notre pays.

Nous ne croyons pas non plus que la règle sur les biens étrangers est nécessaire pour que les grandes entreprises canadiennes puissent trouver des acheteurs pour leurs actions. En fait, tellement d'argent est investi dans les fonds mutuels que trouver des acheteurs pour les actions cotées en bourse n'est pas difficile. Avec l'arrivée sur le marché de la caisse du RPC, il y aura un afflux encore plus grand d'argent, dont 80 p. 100 doit rester au Canada.

Je tiens à signaler que la plupart des pays industrialisés n'ont pas de règle sur les biens étrangers. Les États-Unis, la Grande-Bretagne, l'Australie, l'Irlande et les Pays-Bas n'ont pas de limite quant au montant des économies de retraite qui peut être investi dans des biens étrangers. Au Japon et en Suisse, la limite d'investissement dans les biens étrangers est de 30 p. 100. Tout cela est documenté dans l'étude d'Ernst & Young dont nous vous remettrons le rapport aujourd'hui.

J'ai tenté de faire ressortir les problèmes que crée pour les consommateurs la règle sur les biens étrangers. En fait, il y a d'autres facteurs qui ajoutent à l'urgence du besoin de modifier la règle sur les biens étrangers et il en est également question dans l'étude d'Ernst & Young. Par exemple, une somme énorme d'argent est consacrée aux économies de retraite au Canada, et les gestionnaires des fonds mutuels et les caisses de retraite deviennent d'importants gestionnaires de nombreuses entreprises. La liquidité du marché se trouve réduite et les investisseurs institutionnels deviennent très puissants. Est-ce cela que nous voulons pour notre pays? La règle sur les biens étrangers aggrave le problème.

En conclusion, monsieur le président, nous exhortons le comité à recommander que la limite imposée par la règle sur les biens étrangers soit portée à au moins 30 p. 100. On pourrait envisager une augmentation graduelle de 2 p. 100 par année, la dernière augmentation de 10 à 20 p. 100 s'étant étalée sur la période allant de 1990 à 1994.

En conclusion, l'augmentation de la limite favorise une plus grande diversification, ce qui accroît la sécurité et offre la possibilité de profiter des rendements plus élevés que l'on peut obtenir ailleurs. Un tel changement—cela vous étonnera—ne coûterait rien au gouvernement; nous ne demandons pas d'aide. Ce n'est pas souvent que les députés ont l'occasion de faire quelque chose de si utile qui ne coûte rien.

Je répondrai maintenant avec plaisir à vos questions.

• 1600

Le président: Merci beaucoup, monsieur Hockin, de votre exposé.

Nous allons maintenant passer au Conseil du Canada pour les régimes de prestations interentreprises, représenté par William Anderson, Raymond Koskie et John O'Grady. Bienvenue.

M. William D. Anderson (président, Conseil du Canada pour les régimes de prestations interentreprises): Merci, monsieur le président, de nous donner de nouveau l'occasion de rencontrer les membres du comité et de présenter nos suggestions.

Nous vous avons remis à tous un exemplaire de notre mémoire. Je vous renvoie au sommaire de ce mémoire. Vous remarquerez dans ce sommaire six grandes questions et j'aborderai brièvement trois d'entre elles.

Le Conseil du Canada pour les régimes de prestations interentreprises représente les intérêts de régimes canadiens de prestations interentreprises. Il représente toutes les personnes et toutes les disciplines qui participent à des régimes interentreprises, y compris des fiduciaires de syndicats et d'employeurs, c'est-à-dire ceux qui établissent et administrent les programmes, ainsi que des tiers administrateurs professionnels, des groupes sans but lucratif ou des groupes internes, et tous les professionnels concernés—avocats, comptables et actuaires.

Parmi les nombreux groupes représentés par le conseil se trouvent des régimes de prestations interentreprises, qui assurent des pensions à leurs membres. Il y a environ 360 régimes de prestations interentreprises au Canada, qui représentent près de 700 000 membres ainsi que leurs familles.

En 1994, les cotisations d'employés et d'employeurs à des régimes interentreprises ont dépassé 1,1 milliard de dollars. La majorité des Canadiens qui participent à des régimes interentreprises ont des revenus moyens à faibles dans des industries comme la construction, les forêts, la vente au détail, l'alimentation, l'hôtellerie, le divertissement, les transports, la sécurité, l'impression, les vêtements, etc.

Afin que nous comprenions bien ce que sont les régimes interentreprises et quelle est leur importance pour notre pays, je dois vous dire que ces régimes assurent la continuation de la protection des travailleurs lorsqu'ils changent d'emploi, passant d'un employeur cotisant à un autre. La transférabilité de la protection continue est essentielle aux travailleurs qui occupent des emplois mobiles et saisonniers.

Un travailleur peut être au service d'un employeur donné pendant une journée, une semaine ou un mois, lorsqu'il travaille à un projet spécifique, pour ensuite passer à un autre projet et ensuite à un autre, puis encore à un autre. Entre ces emplois, le travailleur peut se retrouver en chômage pendant une journée, une semaine, un mois ou même plus longtemps. Un travailleur peut être au service de plusieurs employeurs différents pendant sa vie active, avec des périodes de chômage entre ces différents emplois. En l'absence d'un régime central qui couvre tout le travail qu'il fait pour de multiples employeurs, un travailleur ne pourrait pas avoir accès à un régime de pensions.

L'objectif de notre mémoire est double: aider le gouvernement à atteindre ses objectifs financiers et monétaires, et représenter les intérêts de nos membres en ce qui concerne les questions reliées à la retraite et à l'impôt, des questions qui, je dois le souligner, diffèrent parfois dans le cas d'employeur unique.

Si vous me le permettez, je parlerai d'abord de la prestation aux aînés. Notre conseil a examiné les ramifications du remplacement, proposé dans le budget fédéral de mars 1996, du programme de la sécurité de la vieillesse, du programme du revenu garanti ainsi que des crédits d'impôt aux titres de l'âge et des revenus de pensions, par la prestation aux aînés. Nous recommandons fortement qu'on abandonne la proposition relative à la prestation aux aînés, pour les raisons qui suivent.

Premièrement, en raison des dispositions de récupération qui s'appliqueront aux revenus combinés des couples, de nombreuses personnes âgées à revenu modeste subiront une réduction de leur revenu de retraite, par rapport à leur revenu d'aujourd'hui. En réalité la prestation aux aînés est plutôt une taxe imposée aux aînés.

Deuxièmement, on encouragera la retraite anticipée, parce que les impôts supplémentaires affectés à la prestation des aînés n'entreront pas en vigueur avant que les retraités aient 65 ans.

Troisièmement, les Canadiens seront découragés d'économiser en vue de leur retraite, étant donné qu'une plus grande partie de leurs prestations sera récupérée, pour chaque dollar additionnel d'économies. Des études ont déjà montré que les économies des Canadiens sont bien inférieures à ce qu'elles devraient être pour maintenir un niveau de vie raisonnable à la retraite. Ils compteront donc davantage sur les programmes gouvernementaux pour les aider à leur retraite.

Quatrièmement, on exigera de plus en plus des employeurs qu'ils établissent des régimes de pension offrant des prestations plus élevées qu'à l'heure actuelle.

Enfin, nous n'avons plus le déficit budgétaire élevé qui a servi de justification à l'introduction de cette proposition.

Une personne âgée célibataire dont le revenu de retraite privé est de 37 000 $ par année verra son taux marginal d'impôt grimper de 41 p. 100 en vertu du régime actuel à 50 p. 100. C'est inacceptable.

Nous avons aussi inclus une annexe A où sont présentés les prestations de retraite et les autres avantages auxquels ont droit les aînés et nous pourrons en discuter plus tard, au besoin.

En ce qui concerne l'encouragement à économiser en vue de la retraite, c'est un nouvel élément. Nous pensons qu'il peut s'appliquer. Les Canadiens n'économisent pas assez actuellement pour s'assurer un niveau de vie acceptable au moment de leur retraite. Le conseil croit qu'il est donc nécessaire d'encourager les gens à économiser davantage et il recommande qu'on offre les incitatifs suivants.

• 1605

Premièrement, qu'on instaure un crédit pour les économies en vue de la retraite, pour qu'une personne qui cotise à un régime de pension agréé ait droit à un crédit d'impôt pour chaque dollar additionnel cotisé.

Deuxièmement, qu'on instaure une prestation de soutien administratif pour les régimes de pension afin de compenser les frais initiaux et les frais d'administration de régimes de pension nouveaux ou élargis. Il s'agirait d'un supplément offert une seule fois pour encourager la création et l'élargissement des régimes de pension.

Notre conseil est convaincu que les régimes de prestations interentreprises constituent le fondement du revenu de retraite de nos membres lorsqu'on y ajoute un régime de sécurité sociale suffisant et le RPC. Tout ce qu'on fera pour encourager les rentrées de fonds dans ces types d'instruments ou pour augmenter le nombre d'instruments de cette nature contribuera à relever le niveau de vie de nos membres tout en diminuant leur dépendance envers le gouvernement dans leur vieillesse.

Troisièmement, et je ne pense pas devoir m'étendre sur cette question, étant donné que M. Hockin l'a déjà fait, il y a la limite relative aux biens étrangers. Notre conseil estime que le gouvernement devrait faire passer de 20 à 25 p. 100 la limite relative aux biens étrangers en ce qui concerne les fonds contenus dans des REER et des régimes de pension agréés. Une telle mesure augmenterait le choix d'instruments de placement disponibles et la possibilité de taux de rendement plus élevés sur ces investissements.

Je veux parler un peu de certains commentaires faits par Mark Daniels. Nous estimons que le gouvernement doit éviter les inégalités dans le régime fiscal. Notre conseil recommande fortement que dans le budget de 1998, on n'impose aucune nouvelle taxe sur les actifs des fonds de pension, ou sur les prestations des régimes de soins médicaux et dentaires que reçoivent les travailleurs de leurs employeurs.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Anderson.

Nous allons maintenant passer à la période de questions, en commençant par M. Lunn. Bienvenue.

M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, Réf.): Merci, monsieur le président. Je tiens à vous remercier tous d'être venus.

J'ai entendu en particulier M. Hockin et M. Thibaudeau exprimer des préoccupations au sujet de l'avenir des Canadiens lorsqu'ils seront à la retraite. Nous avons entendu de bons commentaires, en particulier de la part de M. Hockin, au sujet de la limite fixée pour les biens étrangers, mais ma première question s'adresse à M. Thibaudeau.

J'aimerais savoir quelle est l'efficacité du Régime de pensions du Canada actuel, selon vous. Voyez-vous une solution de rechange à ce régime qui permettrait aux Canadiens de se donner ou d'avoir une retraite assurée?

M. David Thibaudeau: J'ignore si j'ai une solution de rechange à proposer. Je pense que le Régime de pensions du Canada, avec les modifications et les rajustements qu'on a dû y apporter pour assurer ce pilier de la planification de la retraite pour les Canadiens, est important. Nous nous disons que ce régime existe effectivement et que nous devons faire en sorte qu'au moins une partie du revenu de retraite des Canadiens sera ainsi assurée. En d'autres termes, comment peut-on arrondir ce revenu et veiller à ce qu'il soit vraiment disponible? Nous croyons que dans la planification générale du revenu de retraite des Canadiens, il y a trois piliers: la prestation aux aînés, le Régime de pensions du Canada et les REER ou les régimes de pension agréés.

M. Gary Lunn: Je vous ai entendu dire que vos membres se disent très préoccupés au sujet de leur capacité de subvenir aux besoins de leur famille. C'est pourquoi je pose ces questions. Comme vous le savez, le Parti réformiste entrevoit des problèmes énormes quant à la viabilité à long terme du régime. C'est un problème d'arithmétique. Il y a quelque chose qui cloche dans les chiffres.

Ma question suivante s'adresse à M. Hockin. Je suis fort intrigué par vos commentaires au sujet de la règle sur les biens étrangers. En fait, je suis d'accord avec vous. Je vais vous poser la même question. Pensez-vous que le changement de la règle sur les biens étrangers constitue une mesure de viabilité à long terme qui améliorera vraiment le revenu des futurs retraités canadiens et garantira qu'ils seront capables de subvenir aux besoins de leur famille? Pensez-vous que c'est l'une des solutions qui contribuerait à diminuer considérablement les pressions que subira le Régime de pensions du Canada?

M. Tom Hockin: Je le pense. Je vais vous dire pourquoi. Le ministère des Finances estime qu'en 1997, les REER et les régimes de pension agréés représenteront près de 50 p. 100 de tous les revenus de retraite dans le pays. Le RPC et le Régime de rente du Québec n'en représentent que 28,8 p. 100, tandis que la pension de sécurité de la vieillesse et le SRG en représentent 27,5 p. 100. Nous sommes donc en train de parler de près de la moitié de tous les revenus de retraite, lorsque nous parlons de ces questions. Si le rendement peut être amélioré de 0,5 à 1 p. 100 par année, à cause d'une meilleure diversification des placements, il s'agit là de milliards de dollars, c'est-à-dire que 7 milliards de dollars par année seraient ainsi injectés dans l'économie canadienne, grâce aux retraités qui dépenseraient cet argent au Canada. Je pense que c'est un élément très important du casse-tête.

• 1610

M. Gary Lunn: Merci beaucoup.

[Français]

Le président: Monsieur Loubier.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le président, je trouve particulièrement intéressante l'étude présentée par l'Institut des fonds d'investissement du Canada concernant la limite imposée aux placements étrangers dans les portefeuilles canadiens. Je pense que c'est la première fois qu'on voit une analyse aussi détaillée sur cette limite et sur l'impact de son augmentation sur le rendement des portefeuilles. Je trouve cela intéressant, parce qu'il y a quatre ans, la question avait été débattue au Comité des finances. On n'appelait pas cela une consultation prébudgétaire à ce moment-là, mais il y avait eu une rencontre avec les spécialistes, et le Comité des finances n'avait pas retenu cette proposition. Les années suivantes, quelques témoins avaient suggéré qu'on augmente la limite, mais nous ne nous étions pas penchés sur des analyses d'impact.

Je vous fais une suggestion, monsieur le président. Je me demande s'il n'y aurait pas lieu, cette fois-ci, d'étudier cette analyse et de la comparer à d'autres études qui pourraient exister au ministère des Finances pour voir quelles sont les possibilités. Je regardais les rendements estimés. Je trouve cela vraiment spectaculaire. On arrive à des rendements de 30, 40 et même 50 p. 100 supérieurs avec une limite de 30 p. 100 plutôt que de 20 p. 100 de biens étrangers. Je me demande donc si cette fois-ci, il n'y aurait pas lieu d'étudier de façon un peu plus attentive et sérieuse cette proposition ainsi que l'analyse qui l'accompagne.

Je ne vous dis pas qu'on va conclure que c'est la solution à adopter. C'est peut-être 25 p. 100, c'est peut-être le statu quo ou c'est peut-être 30 p. 100, comme le veut la suggestion de M. Hockin, mais pour une fois, on aura au moins vidé la question.

Monsieur Hockin, je vous félicite pour votre analyse et je vous remercie de nous en avoir donné l'exclusivité aujourd'hui. Je trouve cela fort intéressant.

Le président: Merci, monsieur Loubier.

[Traduction]

Monsieur Riis.

M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): Merci beaucoup, monsieur le président.

Il y a tellement de questions à poser et nous avons entendu d'excellentes présentations.

Tom, vous pouvez aussi parler au nom d'autres intervenants pour ce qui est de la règle concernant la propriété étrangère. Les données indiquent que l'Australie n'a aucune limite, et pourtant ils ont moins de 20 p. 100 de leurs fonds en devises étrangères. En fait, d'autres pays sont dans la même situation. Pourquoi? Cela semble si attrayant, à vous entendre. Ma première question est: pourquoi limiter cela à seulement 25 ou 30 p. 100? Pourquoi ne pas supprimer toute limite? Vous parlez de seulement 7 milliards de dollars. Envisageons que 70 milliards de dollars soient injectés dans l'économie.

Pourquoi êtes-vous si modeste, après avoir dépeint ce magnifique tableau de 21 à 30 p. 100? Et puis, Bill, vous n'en êtes qu'à 25 p. 100. Et les pays comme l'Australie? Si c'est une si bonne idée—et je ne le conteste pas, cela ressort clairement des chiffres—, pourquoi ces pays-là n'ont-ils pas investi plus d'argent dans des titres étrangers?

M. Tom Hockin: Ce sont d'excellents arguments.

Je vais vous dire ce qui s'est passé en Grande-Bretagne. Quand ils ont supprimé la limite complètement, cela s'est arrêté à 30 p. 100. Les directeurs des investissements britanniques comprennent très bien l'économie britannique. Donc, 70 p. 100 des investissements sont restés en Grande-Bretagne. Je pense que c'est le même phénomène en Australie.

Je dirais qu'au Canada, si nous supprimions tout simplement la règle, cette composante culminerait probablement à 30 p. 100, parce que les Canadiens connaissent tellement bien le marché canadien. Ils connaissent à fond les marchés canadiens des valeurs mobilières et des obligations, et cela ne dépasserait probablement pas de beaucoup le seuil des 30 p. 100. Je suis prêt à soutenir qu'il se gaspille beaucoup d'argent simplement pour surveiller tout cela dans les régimes de retraite et les REER, au ministère du Revenu national, etc. Ce serait vraiment bien de se débarrasser complètement de la règle.

• 1615

J'ignore pourquoi les gens n'investissent pas davantage. Dans certains pays, l'économie est tellement restreinte, comme en Irlande et au Danemark, que les gens seraient enclins à investir plus de 30 p. 100 à l'extérieur de leur propre pays, mais le Canada a un marché boursier assez solide et diversifié et, à mon avis, s'il n'y avait pas de règle du tout, cela culminerait probablement à 30 ou 32 p. 100. C'est simplement à cause de la connaissance approfondie que les Canadiens ont des marchés canadiens. C'est peut-être une réponse irrationnelle, mais je pense que sociologiquement, c'est vraiment pour cette raison que les choses se passeraient ainsi.

M. Nelson Riis: Vous défendez la popularité des REER et pourtant, quand on envisage le montant d'argent qu'un gagne-petit investit dans un REER, il est vrai qu'il participe peut-être au régime, mais les sommes en question sont extrêmement minimes. Il s'ensuit que, étant donné les déductions d'impôt, on se trouve à avoir un Canadien qui travaille mais qui gagne un faible revenu et paye une part assez considérable de tout cela en termes de coût fiscal et qui ne participe pourtant pas tellement comme mécanisme d'épargne que constitue le régime.

J'ai remarqué que des pays comme la Norvège n'ont aucun investissement étranger dans le cadre de leur programme et nous reconnaissons qu'ils ont probablement un point de vue différent. Pour les Canadiens qui sont des gagne-petit, qui ne mettent peut- être pas d'argent du tout dans un REER ou si peu, cela ne serait-il pas injuste pour eux de relever le plafond, comme David l'a proposé, je veux dire de simplement relever le plafond pour que ce soit plus attrayant pour certaines personnes tandis que d'autres payent pour tout cela et n'en bénéficient que très peu ou pas du tout? Comment réagissez-vous à cela?

M. Tom Hockin: C'est un mythe de dire que les REER sont en réalité un instrument réservé aux riches; en fait, si vous examinez les données de Statistique Canada pour 1995, vous verrez que ce n'est pas du tout le cas.

M. Nelson Riis: Quel pourcentage des gens sont actuellement aux échelons supérieurs? Ce doit être 2 ou 3 p. 100, à peine.

M. Tom Hockin: Dix-huit pour cent des gens qui font une déclaration d'impôt ont un revenu total de 80 000 $ ou plus...

M. Nelson Riis: On nous a dit lors d'une autre séance qu'à l'heure actuelle, moins de 2 p. 100 des gens étaient imposés au niveau maximum.

M. Tom Hockin: C'est probablement vrai.

M. Nelson Riis: Vous pensez donc que cela devrait être relevé. Est-ce vraiment une priorité si l'on considère que seulement 1 p. 100 des Canadiens qui font une déclaration d'impôt atteint cette limite supérieure?

M. Tom Hockin: Soixante pour cent des 5,2 millions de Canadiens qui ont un REER gagnent 40 000 $ ou moins.

M. Nelson Riis: Tom, vous savez combien de gens font des déclarations. Il s'agit de 16 millions de personnes. Et vous savez à cause de votre ancien poste, que même cela, c'est un chiffre très faible.

David, je ne réussis pas à m'intéresser beaucoup à cette limite supérieure puisque 2 p. 100 seulement des gens qui ont un REER se trouvent dans cette catégorie.

M. David Thibaudeau: Quand on considère cette question, on a parfois tendance à penser que ceux qui sont dans les tranches élevées peuvent en profiter alors que les autres ne le peuvent pas. Si vous considérez les tranches inférieures de revenu, vous verrez qu'avec les plans qui existent actuellement pour les faibles revenus, il est possible de s'attendre à un revenu de retraite de près de 70 p. 100 du revenu préretraite, et cela, même sans investir beaucoup dans un REER ou dans autre chose. Dans les tranches de revenu plus élevé, on est loin d'arriver à la même proportion. Voilà donc une des raisons.

M. Nelson Riis: Oui. Merci.

Le président: Monsieur Jones.

M. Jim Jones (Markham, PC): Merci, monsieur le président.

Pour commencer, je vous remercie tous pour vos exposés que j'ai trouvés très intéressants.

Avez-vous des données sur le nombre de personnes qui participent à un régime de pension autre que le Régime de pensions du Canada? Depuis le début de nos audiences, on nous a dit qu'il y en avait très peu.

D'autre part, monsieur Daniels, je n'ai pas compris ce que vous vouliez dire quand vous avez dit que 600 000 personnes n'avaient aucun lien ou pratiquement aucun lien avec l'industrie de l'emploi.

J'ai une troisième question: que se produirait-il si nous ne portons pas le contenu étranger à 30 p. 100? J'ai l'impression que beaucoup de Canadiens font beaucoup d'économies à l'heure actuelle, et que nous nous restreignons le revenu qu'ils auront pendant les années dorées de leur retraite. D'autre part, j'ai l'impression qu'il y a au Canada beaucoup de gens qui cherchent un investissement et qui n'en trouvent peut-être pas. J'aimerais donc savoir ce qui se produira si nous ne faisons pas cela.

Peut-être que les deux premières questions devraient s'adresser à M. Daniels.

• 1620

Le président: Monsieur Daniels.

M. Mark Daniels: Je peux répondre à la seconde, mais je ne suis pas certain de pouvoir répondre à la première car je ne sais pas combien de personnes au Canada participent à un régime de pension privé.

Une voix: Quarante-cinq pour cent.

M. Mark Daniels: C'est 45 p. 100?

M. Jim Jones: Est-ce que cela comprend les compagnies?

M. Mark Daniels: Oui, dans les régimes de retraite enregistrés. Je pense qu'environ les trois quarts de ces régimes sont administrés par l'industrie que je représente, mais ce sont des plans de petite et moyenne importance. Ils ne représentent qu'environ 20 p. 100 des fonds de retraite gérés. Quant aux autres, ce sont évidemment les gros régimes de pension.

Pour revenir à mes chiffres, monsieur Jones, j'essayais seulement de vous expliquer que sur les 3,5 millions de personnes en question, c'est-à-dire les 12 p. 100 de Canadiens qui n'ont pas de prestations supplémentaires, et ils sont répartis en trois groupes, la majorité d'entre eux travaillent dans des petites entreprises où il pourrait avoir de telles prestations, mais pour une raison ou pour une autre, l'employeur ne les offre pas. D'autre part, il y a les personnes qui travaillent à leur compte et qui ne sont pas constituées en société. Celles-ci ne disposent donc pas de cet avantage fiscal. On s'est aperçu qu'il restait environ 600 000 personnes qui n'avaient pas de lien avec le marché du travail. Il s'agit de jeunes qui n'ont pas encore eu un premier emploi, qui viennent de sortir du collège, qui sont peut-être encore couverts par le régime de groupe de leurs parents, etc.

Dans ce groupe, il y a environ 600 000 personnes. Ce que j'ai essayé d'expliquer, c'est qu'ils n'ont aucun lien avec le monde du travail, et que, par conséquent, il est assez inutile d'essayer de les englober dans le filet. Et pourtant, ils ne font pas partie du filet de bien-être, ils n'ont pas été ramassés par... et ils ne le seront probablement pas. Cela ne veut pas dire qu'ils sont pauvres. Il se trouve simplement qu'ils n'ont pas de rapport avec le monde du travail. C'est ce que j'ai voulu dire.

Le président: Monsieur Hockin.

M. Tom Hockin: Vous nous avez demandé ce qui se produirait s'il n'y avait aucun changement à la règle sur la propriété étrangère; à ce sujet, je peux faire deux prédictions.

Pour commencer, les administrateurs de portefeuilles vont contourner cette règle de plus en plus grâce aux marchés dérivés. C'est extrêmement triste, parce que les dérivés sont très coûteux à fabriquer et à produire, mais lorsqu'on a un dérivé, cela absorbe le quart ou la moitié de 1 p. 100 des gains. Là encore, comme le Canadien moyen ne comprend pas les marchés dérivés, ses fonds mutuels sont d'autant plus difficiles à comprendre. C'est la première conséquence, et cela a déjà commencé.

La deuxième chose, c'est qu'il va y avoir de plus en plus de capitaux sur le marché, et déjà à l'heure actuelle, les investisseurs institutionnels possèdent souvent de gros blocs des actions en circulation des petites et moyennes entreprises canadiennes. Cela a deux conséquences; premièrement, cela pourrait désavantager encore les petits investisseurs qui se battent déjà pour avoir les mêmes avantages à la bourse, car en effet, la bourse est dominée par les joueurs institutionnels. Deuxièmement, les investisseurs institutionnels vont avoir un pouvoir économique considérable. Par contre, si vous relâchez un peu la règle de la propriété étrangère, cela donne plus d'options à ces investisseurs institutionnels, et par voie de conséquence, les petits investisseurs trouvent plus facilement de la place, les marchés ont plus de liquidité, etc.

Le président: Monsieur Koskie.

M. Raymond Koskie (président, Comité sur les relations gouvernementales industrielles, Conseil du Canada pour les régimes de prestations interentreprises): Merci beaucoup, monsieur le président, messieurs.

M. Riis, je crois, ou quelqu'un d'autre, a dit que moins de 2 p. 100 des gens qui font une déclaration d'impôt contribuent au niveau maximum. Cela comprend à la fois les REER et les régimes de pension enregistrés. Le CCRPI considère que c'est là le coeur du problème. En effet, les gens qui ont un faible ou moyen revenu sont justement ceux qui ont le moins les moyens de contribuer à un régime de retraite en dépit de la déduction de 100 p. 100 du revenu imposable. C'est la raison pour laquelle le CCRPI recommande de mettre en place une nouvelle mesure d'incitation pour encourager les gens à contribuer. Aujourd'hui, à un moment où on espère avoir réglé le déficit, le temps est venu d'envisager de nouvelles mesures fiscales pour faire face à ce grave problème.

Nous pensons que la limite relative à la propriété étrangère devrait être augmentée. Toutefois, cela n'aide pas beaucoup de gens dans les tranches des revenus faibles et moyens, des gens qui n'ont tout simplement pas suffisamment de revenus disponibles pour contribuer plus à leurs régimes de pension.

• 1625

Je vous avouerai franchement que je ne connais pas d'autres solutions que le crédit d'impôt que nous proposons. Par exemple, chaque dollar supplémentaire contribué à un régime de pension en plus de ce qui a été contribué l'année précédente ne coûterait que 50c. On a besoin de ce genre d'incitatif. Le gouvernement est en train de se décharger d'une bonne part du système public, et nous avons des problèmes avec le RPC, avec les personnes âgées, des problèmes qui touchent particulièrement les gens à faibles et moyens revenus, si bien que leur revenu de retraite sera diminué d'autant. Mais il n'y a rien pour compenser. Comment ces gens-là peuvent-ils espérer contribuer plus à un régime pour compenser la perte de revenus de retraite provoquée par la mise en place de la prestation aux personnes âgées, si toutefois cela se fait? Il n'y a pas suffisamment d'incitatifs, et c'est la raison pour laquelle nous recommandons au gouvernement d'envisager un crédit d'impôt. C'est ce que nous expliquons à la page 26 de notre mémoire.

Il y a un autre problème avec les REER; beaucoup de gens contribuent à un REER, mais ils ne contribuent pas au maximum. À mon avis, le gouvernement doit encourager encore plus les employeurs à créer des régimes de pension, car on sait que les régimes de pension, qu'il s'agisse d'un régime à employeurs multiples ou à employeur unique, sont beaucoup plus efficaces et moins coûteux à long terme que les REER. Par conséquent, à partir de la page 28, nous recommandons qu'on encourage les employeurs en leur versant une compensation pour les coûts d'administration d'un régime de pension enregistré.

Le gouvernement a reconnu que la mise en place de ces plans a coûté des sommes énormes. Que faut-il faire pour encourager les gens? C'est plus rentable que les REER, cela pourrait être rentable, et il faut donc offrir un incitatif. À mon avis, le temps est venu pour le gouvernement d'envisager cela sérieusement.

Le président: Merci, monsieur Koskie.

Nous allons maintenant passer à M. Szabo, suivi de M. Pillitteri.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Merci, monsieur le président.

Messieurs, je vous remercie pour vos interventions, et comme vous avez abordé la question des REER, nous pouvons aussi bien continuer dans la même voie.

Hier soir, on nous a dit que les contribuables qui gagnent plus de 75 000 $ par année représentent 5 p. 100 seulement des gens qui ont un revenu. Comme vous le savez, pour pouvoir contribuer au maximum à un REER, c'est-à-dire 13 500 $, il faut gagner un minimum de 75 000 $. Quand on considère qu'il s'agit de si peu de Canadiens, je me demande si c'est vraiment une priorité, ou du moins une priorité aussi absolue qu'on pourrait le penser. J'aimerais savoir ce que vous en pensez car c'est controversé. Accordez-vous la même valeur à la justice et à l'équité dans notre système fiscal qu'aux incitatifs et aux possibilités d'investissement? Si c'est le cas, ne jugez-vous pas utile de transformer en crédit la déduction au titre du REER, ce qui permettrait à tous les Canadiens qui investissent dans un REER d'en tirer un avantage identique à celui de tous les autres Canadiens, quel que soit leur niveau de revenu?

Par exemple, supposons qu'un contribuable gagne 35 000 $ par année et investisse 5 000 $ dans un REER, ce qui lui donne droit à un remboursement d'impôt de—attendez, j'ai fait le calcul—2 650 $, c'est-à-dire qu'on rembourse plus de la moitié de ce qu'il a contribué. Pendant ce temps, quelqu'un qui gagne 25 000 $ par année et qui contribue 5 000 $ touche seulement un remboursement de 1 800 $. Autrement dit, le Canadien qui gagne le moins récupère 800 $ de moins que celui qui gagne plus.

• 1630

Apparemment, on ne s'est pas inquiété de la notion de justice et d'équité. Il serait peut-être bon de se pencher sur cette question avant d'accorder aux gens qui gagnent plus de 75 000 $ un avantage fiscal supplémentaire.

Le président: Qui souhaite répondre à la question? Monsieur Thibaudeau.

M. David Thibaudeau: Je vais m'aventurer sur ce terrain controversé.

Deux choses me viennent à l'esprit en suivant votre raisonnement, et je crois l'avoir suivi. D'une part, il y a l'équité, et d'autre part, une question de perspective.

Si vous voulez donner des incitatifs aux gens qui sont en haut de l'échelle des revenus—et qui très souvent seront également demain ceux qui contribueront à la prospérité de l'ensemble du pays—vous devez leur permettre d'atteindre un niveau de vie comparable à ce qu'ils avaient avant. Aux alentours de 70 p. 100, quoi qu'on fasse, ce n'est pas si extrême. Quand ils prendront leur retraite, ils devront pouvoir parvenir assez vite à ce but grâce à une certaine aide fiscale.

En ce qui concerne la justice, c'est juste dans la mesure où la capacité concurrentielle du pays est en cause.

Si nous commençons à distribuer des crédits d'impôt, que deviendra la personne qui doit économiser deux fois plus à cause de son niveau d'imposition? Autrement dit, mes intérêts, mes gains sont imposés, et ce dollar que j'aurais dû économiser, disparaît dans les impôts. Je reçois donc la moitié de ce que je recevais, et j'en rends la moitié également si je n'ai pas une certaine aide fiscale.

M. Paul Szabo: Avant de quitter ce sujet, vous savez fort bien également que lorsque vous achetez un REER, vous pouvez également acheter un REER de conjoint, ce qui dans certains cas vous permet de séparer le revenu. Ainsi, une personne qui a un revenu élevé et un taux d'imposition marginal élevé peut en profiter doublement car la déduction se calcule sur le taux d'imposition marginal le plus élevé. Toutefois, en divisant le revenu, ou en structurant son FERR pour qu'il s'épuise lentement, on descend à un taux inférieur, et on peut profiter d'un taux exceptionnel et également des prestations différées, ce qui n'est pas à la disposition des Canadiens à faible revenu qui ont contribué à un taux très faible et qui doivent donc toucher l'argent à ce même taux. C'est bien le cas?

M. Mark Daniels: Je suis comme M. Thibaudeau. C'est avec beaucoup de prudence que je m'aventure dans ce marécage.

Je voulais seulement dire que la question d'équité et de justice était particulièrement difficile à cerner dans ce cas, mais il y a un truc dans le calcul que vous venez de faire, car si ces chiffres donnent de tels résultats, c'est parce que notre système d'impôt sur le revenu est extrêmement progressif. Par conséquent, si vous exigez la justice d'une part, vous ne pouvez pas adopter en même temps la position inverse et accuser quelqu'un de cette même justice. C'est donc une anomalie mathématique; voilà comment je me tire de cet écueil.

M. Tom Hockin: J'aimerais mentionner la règle sur la propriété étrangère. Vous avez dit que, comparée aux inégalités fondamentales que vous avez mentionnées, la modification de la règle sur la propriété étrangère n'est pas une priorité. En toute logique, quand on voit une lacune dans un programme, il faut essayer de la rectifier. À ce moment-là, cela devient une priorité absolue. Autrement dit, si vous reconnaissez avec moi qu'il n'est pas normal de rester à 20 p. 100 et qu'il vaudrait probablement mieux aller à 30 p. 100, il faut régler le problème si c'est possible, surtout si cela ne coûte absolument rien au système fiscal.

M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): J'espère que vous allez pouvoir répondre à ma question qui porte sur cette règle de la propriété étrangère et sur la possibilité d'augmenter cet avantage.

À l'heure actuelle, nous avons des blocs commerciaux en Amérique du Nord, nous avons l'ALENA, et également une grande circulation des entreprises et du capital. Il y a également le Marché commun européen, et là aussi le capital circule.

• 1635

Monsieur Hockin, je vous ai entendu dire que l'Irlande n'avait pas de règle sur la propriété étrangère, mais vous n'avez pas parlé de l'Allemagne, de la France ou de l'Italie, qui sont des joueurs plus importants pour le Marché commun européen. Parmi ceux-ci, je connais particulièrement bien l'Italie, et je ne pense pas qu'il soit possible de sortir des capitaux du pays. Pouvez-vous répondre à cette question?

M. Tom Hockin: Je veux être certain d'avoir bien compris. Pouvez-vous répéter la question? Vous me demandez pourquoi certains pays continuent à appliquer une règle sur la propriété étrangère?

M. Gary Pillitteri: Oui. Comme je l'ai dit, vous n'avez pas mentionné l'Allemagne, la France ou l'Italie, et plus particulièrement l'Italie. Je ne pense pas qu'il soit possible de sortir de l'argent du pays, à moins que les choses n'aient changé depuis deux ans. Il s'agit du bloc le plus important du Marché commun.

M. Tom Hockin: Dans cette étude de Ernst & Young, au tableau 5.1, à la page 16, vous trouverez une liste de pays de l'OCDE avec les contraintes réglementaires imposées sur les investissements étrangers par les régimes de pension. Je n'y vois ni l'Italie ni l'Allemagne.

Vous avez raison. En Allemagne, la limite sur les biens étrangers est de 4 p. 100. Comme nous le savons tous, cela témoigne de la psychologie des Allemands qui insistent beaucoup sur la sécurité, qui se souviennent encore des années 20 et qui craignent les signes d'inflation.

M. Gary Pillitteri: Au moins l'Allemagne a 4 p. 100.

M. Tom Hockin: Oui.

M. Gary Pillitteri: L'Italie ne permet pas de sortir de l'argent du pays.

M. Tom Hockin: Vous voulez dire que l'Italie ne permet aucune sortie de fonds?

M. Gary Pillitteri: Oui.

M. Tom Hockin: Quoi qu'il en soit, vous avez là une liste de ce que les pays autorisent et n'autorisent pas.

Devons-nous suivre l'exemple italien?

M. Gary Pillitteri: Absolument pas. Je me demandais seulement si cela avait un effet sur ces pays-là, qui font une telle contribution à l'intérieur de leurs propres économies, qu'ils veulent empêcher le capital de sortir du pays.

Le président: Monsieur Pillitteri, monsieur Hockin, à la page 17, on parle de la France et de l'Italie. Apparemment, ces deux pays ne figurent pas dans cette analyse car ils n'ont pratiquement aucun actif dans des régimes de pension privés. C'est le cinquième paragraphe.

À titre d'information.

Monsieur Lunn, avez-vous une autre question?

M. Gary Lunn: Merci, monsieur le président.

J'ai remarqué que, d'après M. Hockin, en supprimant la règle sur la propriété étrangère, on créerait des emplois. Vous vous dites, j'imagine, qu'en plaçant plus d'argent entre les mains des consommateurs, on va leur permettre de le dépenser. Ma question s'adresse aux membres du groupe qui souhaiteront y répondre: est-ce que ce gouvernement ou ce comité peut faire quelque chose de concret, sur le plan de l'imposition ou grâce à des politiques fiscales avisées, pour stimuler le secteur de l'emploi?

Le président: Monsieur Daniels.

M. Mark Daniels: Je suis certain que nous avons tous des idées à ce sujet. L'optique que nous avons adoptée consiste à nous concentrer sur le macro-contexte du débat. Ce que le gouvernement a accompli au cours des quatre dernières années est remarquable. Bien sûr, il a un peu été aidé par la chance, mais il a remarquablement su renverser la tendance. Ce que j'essaie surtout de faire comprendre, c'est qu'il ne faut absolument pas y renoncer; c'est le plus grand générateur de croissance et le plus grand générateur d'emplois que nous ayons.

D'après ce que je retiens de cette conversation, tout le monde ici s'occupe de réaliser des économies, en partie, soit en fournissant des produits, soit en en vendant. D'après ce que dit chacun d'entre nous, il me semble que c'est la partie du filet de sécurité qui est financée par les deniers publics qui est plus que jamais en question. Nous essayons tous de trouver des moyens de mieux satisfaire la demande en produits nouveaux.

• 1640

Nous reconnaissons qu'il faudra trouver un nouveau produit. Dans les deux ou trois dernières années, le secteur des fonds mutuels a battu un record. Sa croissance est phénoménale. Franchement, je pense qu'il a réagi justement au type de problème que nous essayons tous de cerner ici autour de cette table.

Il s'agit essentiellement, soit dit en passant, d'injecter des capitaux dans le système. Ces capitaux créent des emplois, simplement. Qu'ils sortent du pays ou non cela ne veut pas dire qu'il s'agit d'une fuite de capitaux et que cela ne rapporte rien aux Canadiens, même si cela se fait assez indirectement.

Voilà donc la réponse que je vous donnerai—c'est le macro- contexte du débat.

Je ne crois pas qu'il vous serait bien utile, monsieur, que je lance des idées, de part et d'autre, qui pourraient profiter à mes clients et non pas à ceux de Tom, ou quelque chose de ce genre.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Daniels.

Une dernière question pour M. Szabo.

M. Paul Szabo: J'aimerais traiter à nouveau de cette question dont nous avions commencé à parler, à savoir que 88 p. 100 des Canadiens sont directement ou indirectement couverts par des régimes. Étant donné que les employeurs obtiennent les déductions et que l'avantage obtenu n'est pas imposable—encore—nous savons que ceux qui ne sont pas couverts, les 12 p. 100 restants, sont désavantagés ou traités inéquitablement.

Comme c'est inéquitable, seriez-vous d'accord, par exemple, pour que l'on prenne d'autres mesures d'incitation ou d'autres initiatives fiscales qui pourraient aider ces 12 p. 100—par exemple, la réduction ou la suppression des dépenses médicales déductibles dans le rapport d'impôt, qui, comme vous le savez, équivaut à 3 p. 100 du revenu net ou à un certain plafond, selon le moins élevé de ces deux montants?

M. Mark Daniels: Monsieur Szabo, je ne suis pas convaincu qu'en agissant ainsi en ce qui concerne les dépenses déductibles on obtiendrait nécessairement le résultat que vous recherchez. Je pense qu'il vaudrait mieux faire ce que j'ai proposé.

Seulement 1 million de ces 3,5 millions—soit ces contribuables et leurs personnes à charge—pourraient être touchés par un changement de nature fiscale. Je pense que ce qu'il faut faire, c'est leur permettre d'utiliser l'argent qu'ils dépensent pour l'achat de produits ou de soins de santé supplémentaires de la même façon que vous et moi le faisons; cela vient du revenu avant impôt. Donc, il suffit de leur accorder une déduction appropriée. Je pense que ce serait la chose la plus logique, la plus simple et la plus facile à faire.

Si je me souviens bien, monsieur le président, votre prédécesseur et ses collègues avaient déjà évalué le coût de cette mesure. Je pense que le coût total pour l'ensemble de l'économie était inférieur à 30 millions de dollars. Ce n'est pas une dépense fiscale majeure. C'est relativement mineur.

Le reste du fardeau, vraiment, nous incombe. Nous n'avons pas joint le reste de ces gens, comme je l'ai dit. Nous tâchons de structurer nos régimes de manière à ce qu'ils conviennent à des groupes d'employés plus petits que ceux que nous visions dans le passé. C'est pourquoi j'ai parlé du travail que nous faisons avec la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Nous voulons savoir qui sont ces gens et comment les joindre afin que nous puissions nous adresser à ces conseils et leur dire, eh bien, il semble que nous ayons 1 million de dollars de plus.

Le président: Merci, monsieur Daniels.

M. William Anderson: Si vous le permettez, j'aimerais simplement ajouter qu'un bon nombre de gens dont nous disons qu'ils seraient touchés par cette iniquité sont des entrepreneurs indépendants, qui bénéficient de stimulants fiscaux que n'ont pas les salariés. C'est un peu comme si on comparait le cas d'un député à celui du contribuable moyen qui bénéficie de certains stimulants fiscaux. Je ne suis donc pas persuadé qu'il y ait là iniquité.

Si vous le permettez, j'aimerais souligner le fait que vous avez souri en disant «encore» à propos de l'indexation de ces prestations. J'espère que le gouvernement réfléchira bien avant de prendre toutes les mesures visant à imposer des avantages dont bénéficient les contribuables canadiens, parce qu'il pourrait bien avoir à s'en repentir grandement.

Le président: Merci.

Monsieur Riis, une dernière question.

M. Nelson Riis: Merci, monsieur le président.

Messieurs, je n'adresse pas ma question à quelqu'un en particulier.

• 1645

À propos de la discussion que nous avons eue aujourd'hui au sujet des REER, des plafonds et des niveaux d'investissement à l'étranger, etc., ainsi de suite, ainsi que des observations, Bill, que vous avez faites au sujet de l'ensemble des avantages accordés aux aînés et de vos recommandations et vos préoccupations à ce propos, est-ce que chez vous on ne s'inquiète pas de ces deux programmes, c'est-à-dire qu'à mesure que les dispositions de récupération toucheront les prestations aux aînés, on finira par constater que les gens se montreront de moins en moins empressés à investir dans des régimes d'épargne-retraite? Ils se diront: «À quoi bon? Pourquoi ne pas plutôt finir de payer mon hypothèque ou faire autre chose avec mon argent?» On l'a déjà entendu dire. Il me semble que vous êtes le groupe tout désigné pour répondre à cette question.

M. David Thibaudeau: Une des choses qui nous frappent à propos de prestations aux aînés, est au fond un aspect technique qui tient à la façon dont elles sont administrées et à l'incidence que cela a sur les impôts des contribuables. En travaillant avec les responsables du ministère du Revenu et du ministère des Finances et d'autres, nous essayons de trouver une façon d'y arriver. Ce serait toujours la même idée, mais l'incidence fiscale ne serait pas aussi grande.

C'est tellement préoccupant quand ça touche quelqu'un... Je crois que quelqu'un a parlé de revenu moyen, et à ce niveau cela augmente vraiment le taux d'imposition réel, et encore le taux marginal d'imposition passe d'un niveau à l'autre. Je ne pense que pour les tranches de revenus supérieurs, la question des prestations aux aînés causent de grandes inquiétudes.

M. Tom Hockin: Monsieur le président, je m'en remets à Malcolm Hamilton, de William M. Mercer Ltd., pour ce qui est de cette question. Je ne sais pas s'il a comparu devant le comité, mais il a signalé que pour certaines tranches de revenu, il ne sert pas vraiment à grand-chose d'épargner en vue de sa retraite, étant donné la façon dont fonctionne le régime des prestations aux personnes âgées. Je ne me souviens plus de quel niveau de revenu il s'agissait, mais je crois que c'était pour ceux dont le revenu est entre 30 000 $ et 40 000 $, et puis il y avait aussi une autre catégorie de contribuables gagnant plus de 50 000 $, pour qui juste avant de prendre leur retraite, il ne servait plus à grand-chose d'épargner. J'aimerais qu'il puisse expliquer son raisonnement devant le comité. Je ne pense pas pouvoir le faire. Son rapport intéresse un bon nombre de nos membres.

M. Raymond Koskie: Dans notre mémoire, nous mentionnons l'analyse de Malcolm Hamilton, et nous mentionnons aussi l'analyse qu'a faite Paul McCrossan des prestations aux personnes âgées. Ces deux messieurs, comme vous le savez, sont des actuaires réputés et bien reconnus. Ce qu'ils prédisent, c'est que des gens devront prendre une retraite anticipée, ce qui bien sûr ne favorisaient pas le régime, puisque s'ils partent tôt à la retraite, il y aura moins d'argent dans le régime.

À l'onglet A de notre mémoire, nous présentons des exemples qu'a préparés Paul McCrossan et qui montrent la situation de personnes à revenu moyen à différents niveaux de revenus et à revenus égaux et cela afin de montrer la différence de leur traitement fiscal attribuable aux prestations aux personnes âgées. Ainsi, par exemple, au tableau 7 de l'annexe A, on fait état du cas de couples à revenu moyen ayant des revenus égaux. Avec les prestations pour personnes âgées, ce qui change c'est que le premier conjoint subit une perte de plus de 3 000 $, de même que le second conjoint, ce qui fait une perte totale d'environ 6 500 $.

À ma connaissance, personne au ministère des Finances n'a présenté de données contredisant l'argument de McCrossan.

Retirer de l'argent du régime, c'est en toute déférence, aller à l'encontre de la politique du gouvernement, qui consiste à encourager les gens à épargner plus pour leurs vieux jours.

Le président: Monsieur Koskie, monsieur Thibaudeau, monsieur Hockin, monsieur Daniels, monsieur Anderson et monsieur O'Grady, au nom du Comité des finances, je vous remercie beaucoup. Nous avons eu une discussion très intéressante. Vous nous avez apporté une information précieuse, qui j'en suis sûr nous aidera à rédiger le rapport et les recommandations à l'intention du ministre des Finances.

La séance est levée.