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HEAL Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de la santé


Témoignages du comité

TABLE DE MATIÈRE

Le mardi 19 février 2002




Á 1105
V         La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville))
V         M. Claude Carrière (directeur général, Direction générale de la politique commerciale I, négociateur en chef, Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA), ministère des Affaires étrangères et du Commerce international)

Á 1110

Á 1115

Á 1120
V         La présidente
V         M. Gagnon (Champlain)
V         M. Claude Carrière

Á 1125
V         M. Gagnon (Champlain)
V         M. Claude Carrière
V         M. Gagnon (Champlain)
V         M. Claude Carrière
V         M. Gagnon (Champlain)
V         M. Claude Carrière

Á 1130
V         La présidente
V         M. Stan Dromisky (Thunder Bay--Atikokan)

Á 1135
V         M. Claude Carrière
V         La présidente

Á 1140
V         Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.)
V         M. Claude Carrière
V         M. Claudio Valle (directeur, Direction des règlements et des obstacles techniques, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international)
V         

Á 1145
V         La présidente
V         M. Gagnon (Champlain)

Á 1150
V         M. Claude Carrière
V         M. Gagnon (Champlain)
V         M. Claude Carrière
V         M. Gagnon (Champlain)
V         M. Claude Carrière
V         La présidente

Á 1155
V         Mme Brenda Chamberlain (Guelph--Wellington, Lib.)
V         M. Claude Carrière
V         Mme Brenda Chamberlain
V         La présidente
V         Mme Brenda Chamberlain
V         La présidente
V         M. Claude Carrière
V         Mme Brenda Chamberlain

 1200
V         M. Claude Carrière
V         Mme Brenda Chamberlain
V         M. Claude Carrière
V         Mme Brenda Chamberlain
V         M. Claude Carrière
V         Mme Brenda Chamberlain
V         La présidente
V         M. Claude Carrière
V         La présidente
V         M. Claude Carrière

 1205
V         La présidente
V         M. Claude Carrière
V         La présidente
V         M. Claude Carrière
V         La présidente
V         Mme Brenda Chamberlain
V         La présidente
V         Mme Yolande Thibeault (Saint-Lambert, Lib.)
V         M. Claude Carrière
V         Mme Yolande Thibeault

 1210
V         M. Claude Carrière
V         Mme Yolande Thibeault
V         M. Claude Carrière
V         Mme Yolande Thibeault
V         La présidente
V         M. Claude Carrière

 1215
V         La présidente
V         M. Stan Dromisky
V         M. Claude Carrière

 1220
V         La présidente
V         M. Gagnon (Champlain)
V         La présidente
V         M. Gagnon (Champlain)
V         La présidente
V         M. Gagnon (Champlain)

 1225
V         La présidente
V         M. Gagnon (Champlain)
V         La présidente
V         Mme Brenda Chamberlain
V         La présidente
V         Mme Hélène Scherrer
V         M. Claude Carrière
V         Mme Hélène Scherrer
V         M. Claude Carrière

 1230
V         Mme Hélène Scherrer
V         M. Claude Carrière
V         Mme Hélène Scherrer
V         M. Claude Carrière
V         Mme Hélène Scherrer
V         M. Claude Carrière

 1235
V         Mme Bonnie Brown
V         M. Claudio Valle
V         Mme Bonnie Brown
V         M. Claudio Valle
V         Mme Bonnie Brown
V         M. Claude Carrière
V         La présidente
V         M. Claude Carrière
V         La présidente

 1240
V         M. Claude Carrière
V         La présidente
V         M. Claude Carrière
V         La présidente
V         M. Claude Carrière
V         La présidente
V         M. Claude Carrière
V         La présidente
V          M. Claudio Valle
V         La présidente
V         M. Claude Carrière
V         La présidente
V         M. Claudio Valle
V         La présidente
V         M. Claudio Valle
V         La présidente
V         M. Claudio Valle
V         La présidente
V         M. Claudio Valle
V         La présidente
V         M. Claudio Valle

 1245
V         La présidente










CANADA

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 057 
l
1re SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

Témoignages du comité

Le mardi 19 février 2002

[Enregistrement électronique]

Á  +(1105)  

[Traduction]

+

    La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville)): Étant donné l'heure, nous devrions sans doute commencer.

    Je voudrais vous présenter les représentants du ministères des Affaires étrangères et du Commerce international, M. Claude Carrière, directeur général, direction générale de la politique commerciale et négociateur en chef de la zone de libre-échange des Amériques, Claudio Valle, directeur, direction des règlements et des obstacles techniques et Victor Bradley, directeur adjoint, direction des règlements et des obstacles techniques.

    Messieurs, je suppose que vous avez décidé qui prendrait la parole en premier, alors allez-y.

    Monsieur Carrière.

[Français]

+-

    M. Claude Carrière (directeur général, Direction générale de la politique commerciale I, négociateur en chef, Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA), ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Merci, madame la présidente, de nous avoir invités à présenter ce matin notre exposé au Comité permanent de la santé. Je vais vous présenter quelques observations préliminaires, après quoi nous serons heureux de répondre à vos questions. Permettez-moi d'ajouter que le ministère prépare actuellement un document détaillé qui vous sera transmis pour aider le comité dans ses délibérations.

    Notre témoignage portera sur la politique commerciale et les obligations internationales du Canada, sur les répercussions globales de l'étiquetage obligatoire des aliments génétiquement modifiés et sur les approches de l'étiquetage adoptées par nos principaux partenaires commerciaux.

    De toute évidence, dans le débat entourant les aliments génétiquement modifiés, les considérations intérieures telles que les questions économiques, sociales, de santé et de sécurité sont très importantes. Je suis cependant ici pour mettre en évidence les facteurs relatifs au commerce international qu'il faut également prendre en compte.

    Les effets sur le commerce international ainsi que les répercussions connexes sur l'économie canadienne sont particulièrement importants lorsqu'il s'agit de l'étiquetage des aliments génétiquement modifiés, surtout quand l'objectif de l'étiquetage n'a rien à voir avec la santé et la sécurité.

    Bien sûr, l'étiquetage est nécessaire pour fournir des renseignements, mais il peut également faire l'objet d'abus si l'objectif visé est moins l'information que la désinformation et la distorsion des marchés. Quand les gouvernements exigent l'étiquetage comme condition d'accès à un marché, il y a des règles internationales à suivre non seulement pour protéger nos exportations, mais aussi pour protéger nos importations et le bien-être des citoyens du Canada.

    Je ne veux pas m'égarer dans le débat portant sur la question de savoir si les aliments génétiquement modifiés doivent être étiquetés même s'il est prouvé qu'ils sont propres à la consommation, simplement parce qu'il «pourrait y avoir» des effets à long terme que nous ne connaissons pas encore. Je voudrais cependant noter que la justification de l'étiquetage obligatoire basée sur un principe de précaution sans rapport avec des considérations de santé et de sécurité est incompatible avec notre approche scientifique du principe de précaution. Les responsables de la réglementation continuent de nous assurer de la sécurité de ces produits.

    Étant de nature optimiste, je voudrais dire quelques mots sur l'importance de la biotechnologie agricole dans le monde, et surtout dans les pays en développement.

    Beaucoup d'observateurs croient que la biotechnologie pourrait considérablement accroître les rendements dans le monde entier, augmentant les revenus et réduisant la pauvreté. Le Rapport mondial sur le développement humain 2001 des Nations Unies a conclu que beaucoup de pays en développement pourraient profiter énormément des techniques de modification génétique des aliments et des récoltes pour combattre la malnutrition. Les agriculteurs peuvent à cette fin utiliser des semences génétiquement modifiées sans avoir à adopter de nouvelles techniques agricoles, comme l'irrigation ou l'utilisation de produits chimiques à grande échelle. La biotechnologie pourrait réduire les coûts de production des récoltes en réduisant le recours aux pesticides, en rendant les récoltes plus résistantes à la sécheresse, aux inondations, aux niveaux élevés de sels et de minéraux et aux virus attaquant les végétaux, et aussi diminuer les pertes dues à la détérioration et aux maladies.

    Les consommateurs des pays développés peuvent également bénéficier de la production d'aliments ayant une plus grande valeur nutritive, comme les variétés de riz à plus forte teneur de fer et de bêta-carotène qui sont actuellement mises au point. Il y a des écologistes qui vous parleront de leurs préoccupations et de leurs inquiétudes au sujet de ce qu'ils appellent les effets préjudiciables de la biotechnologie sur l'environnement. Pour ma part, je vous demande de ne pas perdre de vue les avantages environnementaux des cultures génétiquement modifiées, qui sont également critiques car elles permettent aux agriculteurs de produire plus d'aliments avec moins de terres et moins d'herbicides et de pesticides chimiques, ce qui réduit la contamination des eaux souterraines et de surface.

    Tout en reconnaissant les avantages mondiaux possibles de la biotechnologie agricole, nous nous rendons compte que votre comité s'intéresse en premier lieu à la réglementation de ces produits au Canada. Des témoins précédents vous ont dit que la sécurité des aliments et la protection des consommateurs constituent la première priorité du gouvernement du Canada.

    Nous sommes fiers de noter que le système canadien de réglementation des aliments est respecté dans le monde entier pour sa rigueur et l'importance qu'il attache à la sécurité. À notre connaissance, le Canada est le seul pays qui exige l'évaluation et l'approbation de tous les aliments nouveaux ou non traditionnels, y compris ceux qui sont produits par des procédés biotechnologiques. Les nouveaux aliments comprennent les produits qui n'ont jamais été consommés auparavant comme aliments, qui résultent d'un procédé qui n'a jamais été utilisé précédemment dans la production d'un aliment, ainsi que les produits modifiés par manipulation génétique.

    Nous avons actuellement des exigences d'étiquetage obligatoire pour tous les aliments, y compris les nouveaux aliments qui diffèrent sensiblement des aliments traditionnels ou qui comportent un risque relié à la santé ou à la sécurité, comme le caractère allergène, pouvant être réduit grâce à l'étiquetage. Le débat actuel porte donc sur la question de savoir si les exigences d'étiquetage obligatoire devraient être étendues aux aliments génétiquement modifiés pour lesquels on ne croit pas qu'il existe un risque relié à la santé ou à la sécurité.

    Madame la présidente, au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, nous avons de sérieuses préoccupations au sujet de l'étiquetage obligatoire des aliments génétiquement modifiés. Par exemple, si des exigences obligatoires ne sont pas justifiées par des motifs de santé ou de sécurité, cela pourrait avoir des répercussions non seulement sur le commerce international, mais aussi sur notre capacité intérieure de réglementation. Les ressources financières publiques, toujours rares, peuvent toujours être utilisées plus efficacement pour développer notre compréhension des effets des produits génétiquement modifiés sur la santé et la sécurité. De plus, un régime réglementaire trop lourd dans le domaine de l'étiquetage obligatoire des aliments génétiquement modifiés peut décourager l'investissement canadien et étranger dans ce secteur, compromettant encore plus l'innovation.

    Fait beaucoup plus important, madame la présidente, nous croyons que l'étiquetage des produits génétiquement modifiés se fonde dans beaucoup de cas sur des procédés et des méthodes de production. D'une façon générale, nous sommes d'avis que des normes d'étiquetage obligatoire basées sur de telles méthodes de production constituent des obstacles possibles au commerce qui, dans des conditions concrètes particulières, sont susceptibles de contrevenir aux obligations commerciales internationales. Nous avons soutenu que ces mesures peuvent faire l'objet d'abus ou être utilisées de manière abusive par d'autres pays à des fins protectionnistes. Nous croyons en fait que cela s'est déjà produit.

    Les préoccupations du Canada au sujet de ce genre d'étiquetage vont bien au-delà de la biotechnologie agricole, s'étendant à des domaines tels que l'agroalimentaire en général, les forêts, les mines, les pêches et la fabrication. On pourrait également y inclure les produits pharmaceutiques et d'autres produits de la biotechnologie. Si le Canada était tenu d'adopter des règles d'étiquetage obligatoire pour tous les OGM, il irait à l'encontre de la position qu'il a constamment appuyée sur la scène internationale et compromettrait notre opposition à ce genre d'étiquetage pour nos autres industries.

Á  +-(1110)  

    De plus, le Canada pourrait être vulnérable à une contestation présentée en vertu des accords de l'OMC ou de l'ALENA parce que l'étiquetage obligatoire des aliments génétiquement modifiés pour des raisons autres que la santé ou la sécurité pourrait être contraire aux dispositions de ces accords.

Á  +-(1115)  

[Traduction]

    Madame la présidente, le Canada aurait à affronter un certain nombre d'effets négatifs s'il adoptait un système d'étiquetage obligatoire des OGM non fondé sur des motifs de santé ou de sécurité. Notre principal souci est le coût de l'étiquetage obligatoire, qui pourrait considérablement désavantager l'industrie canadienne. Par exemple, pour citer les résultats d'une étude, l'étiquetage obligatoire augmentera vraisemblablement les coûts de production de 35 à 41 p. 100 et les coûts intérieurs au détail d'environ 10 p. 100. Même s'il est impossible de déterminer le montant exact de ces coûts, cette estimation est assez comparable au résultat d'une étude semblable réalisée en Australie.

    À part les frais occasionnés par l'étiquetage obligatoire, il y a la perception négative qu'ont certains consommateurs des aliments produits par des procédés biotechnologiques, perception qui les amènera à croire faussement que l'étiquetage obligatoire représente un avertissement du gouvernement basé sur des motifs de santé et de sécurité. Cela pourrait nuire encore plus à la capacité du Canada de soutenir la concurrence sur les marchés tant intérieurs qu'internationaux des produits alimentaires. De plus, ces fausses perceptions pourraient entraîner de la désinformation et de la confusion sur les marchés, au lieu d'informer les consommateurs d'une façon utile.

    Comme je vous l'expliquerai dans quelques instants la répercussion négative la plus importante de l'étiquetage obligatoire pourrait être de nuire à nos relations commerciales avec les États-Unis, qui constituent notre plus important partenaire en matière de commerce agricole, ce qui pourrait mettre en danger des échanges commerciaux bilatéraux d'une valeur annuelle de 25 milliards de dollars dans le secteur de l'agroalimentaire.

    Les principaux partenaires commerciaux du Canada ont adopté des approches différentes dans ce domaine. Les partisans de l'étiquetage obligatoire mentionnent les mesures prises par l'UE, le Japon et la Chine comme preuve que nos grands partenaires commerciaux adoptent des exigences d'étiquetage des produits GM et soutiennent que le Canada devrait en faire de même. Ces marchés sont sûrement importants—nous y reviendrons dans quelques instants—, mais il est important de souligner que les deux tiers des exportations agroalimentaires du Canada sont destinées à des partenaires commerciaux qui n'ont pas adopté l'étiquetage obligatoire, notamment les États-Unis et le Mexique.

    Adoptant une approche très semblable à celle du Canada, les États-Unis exigent actuellement l'étiquetage des aliments et des ingrédients GM qui présentent un risque relié à la santé ou à la sécurité. Les États-Unis ont également des lignes directrices volontaires pour l'étiquetage des aliments GM et d'autres aliments afin de donner des renseignements non reliés à la santé et à la sécurité. Les États-Unis et le Canada ont en général abordé la biotechnologie agricole dont une perspective semblable. Nous avons eu recours aux mêmes principes réglementaires fondés sur la science et nous avons défendu des intérêts semblables lors de la discussion des OGM à des rencontres multilatérales. Si le Canada change de position sur cette question, il pourrait remettre en cause des échanges agroalimentaires bilatéraux d'une valeur annuelle de 25 milliards de dollars.

    Madame la présidente, il est également important de se rappeler qu'une grande partie de notre commerce agroalimentaire avec les États-Unis consiste en produits transformés. En fait, plus de 78 p. 100 de nos exportations d'aliments transformés vont aux États-Unis. Ces aliments sont les plus vulnérables à une politique d'étiquetage obligatoire parce qu'un si grand nombre d'entre eux contiennent des ingrédients tirés de récoltes GM, comme le maïs, le soja et le canola. Ce facteur, ajouté à l'énorme volume du commerce transfrontalier, signifie que toute discussion des répercussions commerciales de l'étiquetage doit comprendre un examen sérieux de la façon dont les politiques envisagées se répercuteront sur les exportations agroalimentaires du Canada vers les États-Unis.

    Cela étant dit, nous comprenons que les Canadiens s'inquiètent de la façon dont les politiques d'étiquetage GM adoptées ailleurs toucheront les agriculteurs et les entreprises de transformation des aliments du Canada.

    En avril 2001, le Japon n'exigeait l'étiquetage pour un ingrédient contenant de l'ADN recombinant que s'il faisait partie des trois premiers ingrédients du produit en poids et représentait au moins 5 p. 100 du poids du produit final. Dans les cas où les producteurs canadiens ont eu des difficultés d'accès au marché japonais, ces difficultés se rattachaient à des retards dans l'approbation de certains produits GM plutôt qu'à des exigences d'étiquetage.

    L'Union européenne a introduit en 1998 un système d'étiquetage obligatoire qui s'applique actuellement à tous les aliments contenant de l'ADN ou des protéines GM décelables à plus de 1 p. 100. À part l'étiquetage obligatoire, l'UE a déclaré un moratoire sur les autorisations de mise en marché des produits GM. Ces mesures ont complètement arrêté les exportations de canola canadien vers l'EU.

    L'UE envisage depuis quelque temps d'étendre ces règles d'étiquetage obligatoire déjà inacceptables aux aliments produits à partir d'OGM, indépendamment de la présence d'ADN ou de protéines GM dans le produit final. Par exemple, les huiles extraites de produits GM qui ne contiennent ni ADN ni protéines seraient soumises pour la première fois aux mêmes règles. Cela aurait d'importantes répercussions sur les produits agroalimentaires canadiens dérivés du canola, du maïs ou du soja, ou qui en contiennent.

    Le Canada a réagi aux changements envisagés en déclarant qu'à notre avis, il serait discriminatoire, très coûteux et très difficile à appliquer et à vérifier. En fait, l'organisme des normes alimentaires du Royaume-Uni a fait savoir de son côté que les règlements proposés de l'UE seraient «impossibles à appliquer, sans rapport avec les données scientifiques actuelles et hautement coûteux». Nous sommes bien d'accord avec cet organisme britannique.

    En outre, l'une des études réalisée par l'UE elle-même sur les aliments GM a abouti à la conclusion qu'il n'existait «aucun nouveau risque pour la santé humaine ou pour l'environnement, à part les incertitudes ordinairement associées aux techniques conventionnelles de sélection des plantes». En réalité, l'étude a révélé que «l'utilisation de technologies plus précises et de vérifications réglementaires plus serrées en font probablement des produits plus sûrs que les aliments ou les plantes conventionnelles».

    La Chine est un autre marché incertain pour les produits agroalimentaires canadiens. La Chine a rendu publique sa réglementation concernant les OGM agricoles en mai 2001. Les règlements d'application ont paru le 7 janvier 2002. Ils prévoient un régime d'étiquetage obligatoire et constituent un obstacle aux exportations agroalimentaires canadiennes, mettant en cause des exportations annuelles de canola de 560 millions de dollars.

    Ce n'était là que quelques exemples des approches adoptées par nos partenaires commerciaux à l'égard de l'étiquetage des produits GM. Ces exemples indiquent clairement que les politiques d'étiquetage obligatoire sont préjudiciables aux exportations canadiennes de produits agroalimentaires. De plus, nous sommes persuadés que beaucoup de ces politiques pourraient être contraires aux dispositions des accords commerciaux internationaux.

Á  +-(1120)  

[Français]

    Pour terminer, madame la présidente, je dirai que le gouvernement du Canada comprend que la fourniture de renseignements aux consommateurs est une importante réalité du marché. Toutefois, nous devons nous montrer responsables et présenter ces renseignements d'une manière utile, susceptible d'être mise en application et compatible avec nos obligations et nos droits internationaux. La meilleure façon de le faire est d'adopter un système d'étiquetage volontaire fondé sur les connaissances scientifiques actuelles, basé sur le marché et compatible avec nos obligations et nos droits internationaux.

    Nous croyons que la norme d'étiquetage actuellement élaborée par l'Office des normes générales du Canada constitue un document crédible établi au moyen d'un procédé crédible, qui devrait devenir un modèle à l'échelle internationale. Une norme réussie de l'Office des normes, prévoyant un étiquetage tant positif que négatif pour les aliments génétiquement modifiés et les autres aliments, démontrera que des règles imposées par le gouvernement ne sont pas nécessaires et ne constituent pas le moyen le moins restrictif de répondre aux demandes des consommateurs.

    Merci, madame la présidente. Mes collègues et moi sommes prêts à répondre à vos questions.

[Traduction]

+-

    La présidente: Merci monsieur Carrière.

    Monsieur Gagnon, bienvenue à notre comité. Vous pouvez commencer le premier.

[Français]

+-

    M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ): Merci, madame la présidente.

    Je salue nos invités, qui nous donnent des renseignements précis sur la volonté du gouvernement en ce qui concerne l'étiquetage des produits génétiquement modifiés. Vous me permettrez cependant d'être en désaccord sur les points de vue exprimés dans ce document.

    En fait, selon ce document et les renseignements que vous nous donnez, le public n'a pas le droit de savoir. Je pense plutôt qu'on va vers une période où, de plus en plus, le consommateur veut savoir. À mon point de vue, c'est son droit le plus strict que de savoir ce qu'il achète et ce qu'il consomme. Je trouve que c'est une forme de dictature qui est de moins en moins admissible--et on le voit dans les pays européens actuellement--que de dire aux gens que c'est bon pour eux et qu'ils n'ont qu'à le manger.

    On dit maintenant de plus en plus que consommer, c'est voter. Je ne vois pas pourquoi on empêche les gens de savoir ce qu'ils consomment. Qu'on le veuille ou pas, d'après moi, on s'en va vers ce domaine-là. On n'a qu'à regarder la façon dont les petits producteurs sont en train de s'organiser. Ces gens retournent le plus possible à la nature. Cela vient de l'inquiétude qu'on ressent à l'achat de produits dont on ignore la composition. J'ai de la difficulté à accepter ces affirmations que vous faites. De plus, vous dites que si on informe les gens, ça va coûter une fortune. Vous avez dit que le fait d'étiqueter les aliments pour qu'on sache ce qu'on consomme pourrait augmenter le coût de 30 à 41 p. 100.

    Je ne sais pas ce qu'ont coûté les expériences qu'on a faites dans le passé. Des choses assez dramatiques se sont produites parce qu'on n'avait pas informé les gens de ce que cela pouvait coûter en termes de santé humaine. Je refuse de croire qu'à l'avenir, tout ce qui comptera, ce sera l'argent. Je suis persuadé ou, du moins, j'espère qu'on s'en va vers un système plus éclairé pour le consommateur. Je crois que c'est un droit strict.

    J'aimerais que vous m'expliquiez comment on peut évaluer à 30 à 41 p. 100 le coût de l'étiquetage des aliments.

+-

    M. Claude Carrière: Avant de parler de l'étude, je veux simplement dire que sur les questions de santé et de sécurité, la politique gouvernementale est celle de l'étiquetage obligatoire. Nous parlons de questions autres que la santé et la sécurité.

Á  +-(1125)  

+-

    M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ): On parle de productivité et d'améliorations afin qu'on ait besoin de moins d'engrais, d'insecticides et de pesticides.

+-

    M. Claude Carrière: Il y a deux choses. Si un aliment génétiquement modifié pose certains problèmes pour la santé et la sécurité, l'étiquetage est obligatoire.

    Pour des questions qui ne relèvent pas de la santé ou de la sécurité, nous pensons que l'étiquetage obligatoire n'est pas le meilleur moyen d'informer et a des conséquences négatives dans toutes sortes de domaines, comme je l'ai mentionné dans ma présentation. Nous pensons que le meilleur moyen d'informer le consommateur sur ces autres questions est l'étiquetage volontaire, qui est actuellement disponible dans le marché dans le domaine des produits biologiques, et nous espérons avoir bientôt le résultat du travail de l'Office des normes générales du Canada.

    Pour revenir à votre question précise, l'étude en est une de l'Université de Guelph, que nous pourrons rendre disponible au comité plus tard.

+-

    M. Marcel Gagnon: Je comprends quand vous parlez de santé et de sécurité, des allergies et de tout ce qui peut comporter des risques. Ça, c'est déjà fait; les produits sont identifiés. Cependant, qui me dit que le blé ou le maïs qui est aujourd'hui génétiquement modifié sera aussi sécuritaire dans 15 ou 20 ans?

    Est-ce que l'expérience à long terme a été faite pour qu'on puisse garantir aux consommateurs qu'il n'y a aucun risque? À un moment donné, vous avez employé le terme «on croit que». Il n'y a pas de garantie. Je ne sais pas où j'ai vu cela, mais quand pourra-t-on dire aux consommateurs qu'ils peuvent acheter des produits génétiquement modifiés les yeux fermés car on leur garantit que ces produits ne posent aucun risque?

    Est-ce qu'on étudie les produits génétiquement modifiés depuis suffisamment de temps pour dire que l'expérience du passé prouve qu'ils ne présentent aucun risque?

+-

    M. Claude Carrière: Je pense que le comité a déjà eu des présentations d'agences réglementaires comme Santé Canada et l'Agence canadienne d'inspection des aliments, qui sont responsables de mettre en application la réglementation canadienne dans ce domaine. Eux nous assurent que les produits dont la vente est permise sur le marché sont sécuritaires au plan de la santé et de la sécurité du public. C'est leur avis scientifique, que nous acceptons comme ministère. Nous travaillons dans le domaine du commerce international, monsieur Gagnon, et nous nous fions à l'expertise des experts.

+-

    M. Marcel Gagnon: J'espère que votre rôle n'est pas de faire vous-mêmes l'expérience, mais bien de vendre les produits qu'on produit. Il faut être dans une situation concurrentielle.

    Par contre, quand on affirme que l'étiquetage n'est obligatoire que pour les produits qui présentent un risque pour la santé et la sécurité et ne l'est pas pour les produits génétiquement modifiés qui ne comportent aucun risque, de plus en plus de gens se posent des questions. C'est sur cette partie de l'affirmation que j'ai personnellement des doutes. Je pense qu'on est de plus en plus porté à regarder les profits, les entrées d'argent, mais qu'éventuellement, comme plusieurs consommateurs, on regrettera peut-être d'être allé un peu trop vite dans certains domaines.

    Je me dis qu'au moins, le consommateur qui veut faire un choix doit pouvoir le faire. À mon point de vue, c'est le droit le plus strict du consommateur que celui de pouvoir choisir des aliments qui ne sont pas génétiquement modifiés s'il le souhaite.

+-

    M. Claude Carrière: Monsieur Gagnon, le consommateur peut faire ce choix-là. Il peut maintenant acheter des produits biologiques qui sont disponibles sur le marché. Ces produits ne contiennent aucune substance génétiquement modifiée. Ça existe déjà. C'est déjà disponible pour le consommateur.

Á  +-(1130)  

[Traduction]

+-

    La présidente: Merci, monsieur Gagnon.

    Monsieur Dromisky.

+-

    M. Stan Dromisky (Thunder Bay--Atikokan): Je voudrais donner suite au genre de question qui a été posée par un député de l'opposition, monsieur Gagnon.

    Vous avez mentionné une augmentation de 35 à 41 p. 100 des coûts de production et vous avez parlé de l'étiquetage. Voyons ce que signifie l'étiquetage d'un point de vue très simpliste. Si j'ai bien compris, il s'agit principalement des aliments transformés. Cela peut-être aussi bien de la mayonnaise que du beurre d'arachide.

    Prenons l'exemple de la mayonnaise. Le fabricant de cette mayonnaise, qui est vendue en contenant petit, moyen ou gros, peu importe, pourrait facilement déterminer le pourcentage du volume total—avec l'aide de ses chercheurs—qui contient des OGM. S'il s'agit de 1 p. 100, 2 p. 100 ou 2,5 p. 100, cela peut être facilement déterminé.

    Une fois que le fabricant sait exactement ce qu'il doit inscrire sur l'étiquette, il peut fabriquer des centaines de millions de pots de mayonnaise ou de beurre d'arachide, de divers formats, qui porteront tous la même étiquette, sans que cela ne représente de frais supplémentaires. C'est déjà fait. Le fabricant sait exactement ce que le pot contient, à la condition qu'il suive la même recette pour mélanger les ingrédients, transformer les aliments et les mettre dans les pots. La recette ne change jamais.

    Je ne comprends donc pas pourquoi les coûts de production augmenteraient de 35 à 41 p. 100. J'aimerais beaucoup voir cette étude, car je me méfie beaucoup des études de ce genre. N'importe quelle entreprise ou institution, ou tout gouvernement qui veut envoyer un certain message au public peut jouer avec les chiffres, inclure des variables qui normalement ne devraient pas être incluses pour orienter les résultats dans un sens ou dans l'autre, selon le but visé, pour nous faire peur, pour faire croire à tout le monde que ce sera trop coûteux.

    Pour ce qui est de l'augmentation des coûts de 10 p. 100 au niveau de la vente au détail, selon moi, ce n'est qu'un prétexte de plus pour augmenter la marge bénéficiaire. Je ne comprends pas ces chiffres.

    J'aimerais beaucoup voir les études de l'Université de Guelph dont vous avez parlé.

    D'autre part, si l'on examine quels sont les pays qui ne veulent pas d'aliments génétiquement modifiés—Je sais que le marché joue un rôle très important—la plupart d'entre eux se trouvent en Asie. L'Australie est située juste au sud. L'Australie produit du canola, du blé, etc. Elle ne peut pas concurrencer pour le moment les États-Unis et le Canada, mais elle pourra le faire si elle offre des céréales et des oléagineux non modifiés à un marché qui en exige. Je peux donc comprendre pourquoi le canola devient très important pour les agriculteurs australiens étant donné que le marché se trouve à leur porte. C'est là un facteur très important. Comme vous l'avez dit, notre gros marché se trouve juste au sud de la frontière, au Mexique et aux États-Unis.

    Je voudrais savoir jusqu'où nous devons aller. Le comité va devoir se décider. Qu'est-ce qui est le plus important: les facteurs qui stimulent le marché ou la santé de chaque citoyen de notre pays? Allons-nous donner aux gens le choix de consommer ou non certains aliments ou d'acheter ou non certains produits dans leur supermarché? Où allons-nous faire en sorte que la marge bénéficiaire l'emportera sur la santé des Canadiens et des autres consommateurs de ces produits?

Á  +-(1135)  

    Je sais que c'est là un problème très complexe. Vous présentez une position qui n'est pas vraiment la vôtre. Il s'agit seulement de la politique du gouvernement. Je ne devrais peut-être pas vous poser la question, mais quelle est votre opinion personnelle à ce sujet?

+-

    M. Claude Carrière: Madame la présidente, je n'ai aucune opinion personnelle à exprimer ici, comme vous le savez.

    Pour en revenir à ce que vous avez dit, monsieur Dromisky, tout d'abord, j'ignore si le comité a entendu les opinions du secteur privé. L'Association des fabricants de produits alimentaires pourrait peut-être répondre à certaines de vos observations concernant certains aliments transformés.

    Comme je fais parfois ma propre mayonnaise, je sais que l'huile en constitue le principal ingrédient. Il n'y a pas d'ADN ou de protéine dans l'huile. Il n'existe aucun moyen de tester une huile pour déterminer si elle a été fabriquée à partir d'oléagineux génétiquement modifiés ou non. Comme il n'y a ni ADN ni protéine, il est impossible de le savoir. Cela vaut seulement pour l'huile.

    Si vous voulez étudier plus à fond certaines des répercussions pour des produits qui subissent davantage de transformation, l'Association des fabricants des produits alimentaires et de consommation, par exemple, pourrait peut-être en discuter avec vous. Nous remettrons au comité l'étude de l'Université de Guelph dont nous avons parlé pour vous aider dans votre étude.

    Comme je l'ai dit, monsieur Dromisky, en ce qui concerne la sécurité et la santé, la réglementation canadienne s'applique autant aux produits génétiquement modifiés qu'à tout autre produit. L'étiquetage est obligatoire et le produit doit être approuvé. Un aliment GM doit être également inspecté et approuvé par les organismes de réglementation canadiens. Voilà pourquoi nous parlons de l'étiquetage obligatoire qui n'est pas relié à la santé ou à la sécurité étant donné les exigences qui s'appliquent déjà.

    Notre ministère considère que les directives facultatives que le marché suit déjà fournissent aux consommateurs les renseignements dont ils ont besoin s'ils se tournent vers les produits qui ne sont pas censés contenir ou provenir d'organismes génétiquement modifiés. Je veux parler des exigences concernant l'étiquetage des produits biologiques.

    Certains diront peut-être que c'est assez limité et voilà pourquoi le gouvernement a demandé à l'Office des normes générales du Canada d'établir une norme volontaire pour les OGM, qui sera à la fois positive et négative, avec comme d'habitude la participation des parties prenantes des différents secteurs soit les consommateurs, les agriculteurs, les producteurs, l'industrie, les particuliers et divers groupes. Nous espérons que cette norme sera satisfaisante et démontrera qu'il est possible d'avoir une norme volontaire, dont les exigences seront différentes de la norme s'appliquant aux produits biologiques et qui sera peut-être même plus restrictive. Nous croyons que c'est possible et que cela permettra aux consommateurs de faire un choix éclairé.

    En ce qui concerne le marché, nous croyons qu'une norme volontaire constitue la meilleure solution. Certaines personnes ne seront pas d'accord, mais c'est ce que nous pensons.

+-

    La présidente: Merci, monsieur Carrière.

    Avez-vous besoin de plus de temps?

    M. Stan Dromisky: Non.

    La présidente: Je suis prête à vous en accorder, mais j'aimerais que nous questionnions les spécialistes du commerce international sur les répercussions commerciales de tout cela plutôt que sur la santé ou la sécurité. Ce n'est pas leur domaine. Ce sont les répercussions commerciales qui les intéressent.

    Je remarque, par exemple, cette dernière phrase où ils disent: «De plus, nous sommes persuadés que beaucoup de ces politiques pourraient être contraires aux dispositions des accords commerciaux internationaux». C'est pour cette raison qu'ils sont ici. De quels accords commerciaux, de quelles politiques, de quels clauses s'agit-il? Voilà de quoi je voudrais que vous nous parliez plutôt que de vos opinions sur la santé et la sécurité.

    Madame Scherrer.

Á  +-(1140)  

[Français]

+-

    Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.): Je voulais poser une question sur le commerce international de façon très spécifique, mais revenir sur un argument qui peut avoir un impact au niveau du commerce international.

    Dans la même lignée que mes deux prédécesseurs, je dirais que le débat sur les OGM est vraiment un débat qui nous amène des arguments aussi forts les uns que les autres, tant d'un côté que de l'autre. On a toujours l'impression qu'on se sent un peu manipulés dans le débat face à des arguments selon lesquels on empêcherait les pays sous-développés d'avoir accès plus rapidement à des produits si, par exemple, on mettait un étiquetage obligatoire jusqu'à l'autre côté.

    J'ai toujours l'impression qu'au départ, le problème en a toujours été un de communication. Je dois vous dire que personnellement, comme consommatrice, si j'achète un produit sur lequel il est inscrit «peut contenir des produits génétiquement modifiés», je vais certainement avoir une crainte, parce que je ne sais pas ce que ça veut dire et je ne sais pas quelles sont les implications. On en a parlé souvent autour de la table et on revient avec les mêmes interrogations. On avait de la difficulté à faire la différence entre un produit génétiquement modifié, un produit transgénique, un produit biologique et un produit aux hormones. J'avais l'impression que, dans les documents que vous nous apportiez, on ne soulevait pas suffisamment cet argument selon lequel le problème, au niveau du commerce, c'est une crainte, non pas quant aux coûts, mais quant à l'impact que ça aurait sur un produit sur lequel on aurait inscrit «génétiquement modifié». Ce produit pourrait faire craindre au consommateur de l'acheter ou de le mettre sur le marché. J'ai de la difficulté à croire aux coûts reliés à l'étiquetage.

    D'abord, est-ce que vous vous attaquez, ou est-ce qu'il y a effectivement une campagne de communication pour qu'on puisse dire aux gens ce que ça veut vraiment dire?

    Moi, j'achèterais le produit sur lequel on aurait inscrit «génétiquement modifié» si, en-dessous, on était capable de me dire qu'il ne présente aucun risque pour la santé à court et à long terme. Là, j'achèterais le produit.

    À ce moment là, est-ce parce qu'on n'est pas capable de le faire? Est-ce qu'il y a certains pays qui le font? À partir du moment où on inscrit «peut contenir», ça me fait peur. La journée où on inscrira en-dessous «mais ne présente aucun risque à court et à long terme», j'achèterai, parce qu'à ce moment-là, vraiment, ça ne me posera pas de problème.

    Alors, il y a un problème de communication, quant à moi, et de garantie. C'est la garantie qu'on n'a pas, et qu'on n'est pas capable de donner, que le produit pourrait être, à court ou à long terme, nocif pour la santé ou pour les consommateurs. La journée où on sera capable d'inscrire cela en-dessous, je pense qu'il n'y aura plus de problème.

+-

    M. Claude Carrière: Encore là, madame la présidente, ce n'est pas une question de commerce international. J'aimerais beaucoup vous en parler, mais ce n'est pas vraiment de notre compétence.

    J'espère que vous avez eu l'occasion d'en parler aux gens de Santé Canada et de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, parce que c'est leur travail. Ce n'est pas le nôtre. Mais on peut vous parler des coûts.

    Monsieur Claudio Valle.

+-

    M. Claudio Valle (directeur, Direction des règlements et des obstacles techniques, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Si on veut vraiment savoir si un produit contient des ingrédients génétiquement modifiés, on doit mettre en place un système de traçabilité. Du moment où la semence est mise en terre, le produit développé, comment le récolte-t-on? Comment fait-on une ségrégation différente du système actuel?

    Au Canada, pour les grains et céréales, on a un système qu'on appelle le bulk shipment, où ne doit pas ségréguer. Si on doit développer des silos différents, des chemins de fer, des wagons différents, on doit tenir une comptabilité de tous ces effets jusqu'à ce que le produit entre dans la bouche du consommateur. Il faut mettre sur pied un système qui va augmenter les coûts parce que les gens vont devoir tenir compte de tous ces effets.

[Traduction]

+-

     Si tous ces coûts supplémentaires sont associés à la transformation d'un produit, c'est simplement parce qu'il est fabriqué de façon différente. Mais en fin de compte, c'est le même produit.

    Si vous utilisez de l'huile pour faire une mayonnaise, le goût de cette mayonnaise sera le même qu'elle contienne des OGM ou qu'elle n'en contienne pas. Pour indiquer ce renseignement sur l'étiquette du produit, il faudra remonter jusqu'à la semence elle-même. Le traçage entraîne des coûts. Le producteur qui s'est engagé à fournir ce renseignement devra remonter jusqu'à la semence. Le fait qu'on traite un même produit de façon différente entraîne des coûts supplémentaires.

    Si vous optez pour un système volontaire... Si le producteur pense qu'il est dans son intérêt de faire savoir aux consommateurs que son produit ne contient pas d'OMG, il trouvera une façon de le faire. C'est lui qui engagera cependant des frais pour vérifier que ce renseignement est bien exact.

    Si vous adoptez un système volontaire, vous permettez aux commerçants de faire payer par le consommateur le message qui figurera sur l'étiquette. On optant pour l'étiquetage obligatoire, vous imposez des coûts pour les produits susceptibles de poser des problèmes. C'est le problème qui se pose à l'échelle internationale. Il s'agit de produits semblables dont l'ADN est le même. On ne peut pas faire la distinction entre les deux produits. Vous forcez cependant un pays à étiqueter d'une certaine façon un produit alors que le produit semblable n'est pas étiqueté. Il s'ensuit que les coûts augmentent et qu'on privilégie un produit par rapport à un autre. Il s'agit d'une discrimination interdite en vertu de la réglementation internationale.

    Le système commercial prend en compte l'existence produits similaires. Traiter des produits de façon différente simplement parce qu'ils n'ont pas été produits de la même façon constitue une forme de discrimination.

Á  +-(1145)  

+-

    La présidente: M. Gagnon et ensuite Mme Chamberlain.

    Je vous ai pris par surprise, monsieur Gagnon, vous êtes le seul représentant de l'opposition. Vous avez la vedette.

[Français]

+-

    M. Marcel Gagnon: Je vous remercie, madame la présidente. Je vous remercie aussi de m'avoir souhaité la bienvenue. Est-ce parce que je suis membre de l'opposition que vous m'avez souhaité la bienvenue ici?

    J'ai de plus en plus de difficulté à me réconcilier avec le discours qu'on entend ici . Je trouve assez pénible qu'on dise qu'il ne faut pas faire de discrimination pour des raisons de commerce international, bien que cela soit hors du sujet. Mais je reviens à la question de la sécurité. Vous me direz que cela ne nous regarde pas. Mais votre document est plein d'affirmations voulant qu'il faille s'orienter vers les OGM, et c'est pourquoi je suis porté à revenir au thème de la sécurité.

    Pour le consommateur qui ne croit pas, lui, qu'on est rendu au point de pouvoir garantir une sécurité suffisante, on fait de la discrimination. On est obligé de lui dire de payer pour avoir des aliments sains comme il veut les avoir. Pour avoir la sécurité qu'il veut avoir, il est obligé de payer plus cher. Je trouve ça un peu pénible.

    Je ne crois pas, moi non plus, que les coûts qu'entraînerait l'étiquetage des produits qui contiennent des OGM seraient de cet ordre-là. Je comprends que vous les avez et que ce n'est pas vous qui avez fait les recherches et je ne vous en fais pas reproche.

    Je me souviens d'un cas d'il y a 40 ans; un monsieur qui arrivait au Québec nous enseignait qu'il fallait manger des produits biologiques. Il a fait rire de lui par tout le monde et on lui a dit que cela n'avait pas de bon sens, que jamais il ne pourrait fournir des produits biologiques à des coûts raisonnables. Ce monsieur s'appelle Jean Richard et, aujourd'hui, on le décore pour tout ce qu'il a fait pour l'avancement des produits biologiques au Québec. On le cite en exemple et le ministère de l'Agriculture du Québec le consulte.

    Quand on me dit qu'on ne peut pas, comme on le mentionnait plus tôt, confirmer la sécurité des aliments, qu'on ne peut pas faire confiance aux consommateurs en disant qu'on va indiquer le contenu dans l'étiquetage et que cela nuit au commerce, peut-être que cela y nuit à court terme, mais à moyen et à long terme, on pourra s'en féliciter.

    Il y a un autre point. Quand on me cite les États-Unis en exemple, sur le plan de la consommation, j'ai encore plus de difficulté. En effet, j'ai vu des reportages sur l'avenir du peuple américain en ce qui concerne, par exemple, le pourcentage de gens que l'embonpoint est en train d'handicaper. Ce n'est rien pour faire vendre nos produits que de dire qu'on en mange aux États-Unis.

    Je sais que ce n'est pas votre problème. Je suis peut-être un peu en retard. J'aurais dû venir plus tôt. Mais j'ai de la difficulté à penser que pour faire des profits, il faille sacrifier la sécurité. Je vous reviens encore avec la question des coûts, parce que la réponse que vous avez donnée sur le coût de l'étiquetage, j'ai personnellement de la difficulté à l'accepter.

Á  +-(1150)  

+-

    M. Claude Carrière: Je vais revenir là-dessus. Je vous dirai d'abord que les produits sont sécuritaires. Ils sont approuvés par le ministère de la Santé et leur surveillance est assurée par l'Agence d'inspection des aliments.

    Vous nous parlez de l'étiquetage pour des raisons autres que la santé et la sécurité. Il ne faut pas mêler les choses.

+-

    M. Marcel Gagnon: Oui, mais on ne le sait pas.

+-

    M. Claude Carrière: Oui, l'étiquetage le prévoit.

    Sur la question des mécanismes qui devraient être mis en place pour retracer un produit du moment où il est mis en terre jusqu'au moment où il est mis sur la tablette, pour pouvoir assurer qu'un produit est bien ce qu'on en dit, il faut un système de distribution séparé.

    En ce moment, les producteurs choisissent ou non de se lancer dans la production de produits biologiques et il existe un réseau de distribution pour eux. Vous dites que cela coûte plus cher, mais comme c'est un réseau de distribution séparé, cela coûte plus cher. Ceux qui choisissent d'acheter ces produits-là doivent payer pour un réseau séparé.

    Si, pour la production en général, on exige que tous les produits soient retracés, il y aura des coûts. Il faut mettre en place un dédoublement de systèmes. Ça veut dire des investissements et il faut bien voir qu'il y a des coûts.

    Nous ne disons pas qu'il faut faire une chose ou l'autre. Ce sont les conséquences d'une politique qui entraînerait des coûts supplémentaires. Du côté de la santé, c'est déjà fait. Les exigences sont là. Ce n'est pas une question de profit au détriment de la santé. Nous parlons d'étiquetage pour des raisons autres que la santé et la sécurité.

    Merci, madame.

+-

    M. Marcel Gagnon: En parlant de publicité, est-ce que les coûts ne seraient pas compensés possiblement par une demande accrue pour les aliments du Canada qui seraient bien étiquetés? Est-ce que ça n'augmenterait pas la demande? A-t-on fait des recherches dans ce sens-là? Est-ce que ça n'augmenterait pas justement notre visibilité et nos ventes?

+-

    M. Claude Carrière: Je ne connais pas la réponse à cette question-là. D'une part, il y a des gens qui pensent que oui; d'autre part, il y a des gens qui pensent que non. Pour l'instant, c'est le marché qui va déterminer cette question-là, et la réponse est non parce que le marché du produit biologique est limité.

[Traduction]

+-

    La présidente: Le niveau de frustration augmente. Les fonctionnaires du ministère comparaissent devant nous. Ils font valoir que l'étiquetage obligatoire est susceptible d'être contraire aux accords commerciaux. On n'a pas mentionné l'ALENA, l'OMC, les ADPIC ou le protocole sur la biodiversité—tous des textes dont nous sommes signataires.

    Vous semblez penser que l'étiquetage volontaire ne pose pas de problème. Pourquoi n'aurait-il pas la même incidence sur les marchés internationaux vers lesquels nous exportons nos produits que l'étiquetage obligatoire? Vous ne nous avez pas expliqué en quoi l'étiquetage obligatoire serait différent de l'étiquetage volontaire pour les marchés d'exportation et vous n'avez mentionné aucun de ces textes que nous avons signés.

    Si nous vous avons demandé de comparaître ce n'est pas pour nous parler de la santé, de la sécurité ou de l'opinion des consommateurs, mais plutôt des accords internationaux et pour que nous expliquiez pourquoi vous vous opposez à l'étiquetage obligatoire comme l'énonce clairement le document que vous nous avez remis. Quelle que soit la question qu'on vous pose, j'espère que vous traiterez des accords commerciaux qui constituent votre domaine de spécialisation.

    Madame Chamberlain.

Á  +-(1155)  

+-

    Mme Brenda Chamberlain (Guelph--Wellington, Lib.): Existe-t-il un pays où l'étiquetage obligatoire est en vigueur à l'heure actuelle?

+-

    M. Claude Carrière: Comme je l'ai dit dans mon exposé, il existe des exigences en matière d'étiquetage obligatoire au Japon, en Chine et dans l'UE. Toutes ces exigences diffèrent et elles s'appliquent à différents produits ou denrées. Elles s'appliquent de façon générale aux produits en vrac en Europe.

    À l'issue de l'adoption de ces exigences, nos exportations de graines de canola sont passées de 400 millions de dollars à zéro parce que les distributeurs canadiens ne peuvent pas faire la distinction entre les graines de canola contenant des OMG et celles qui n'en contiennent pas. Il leur est donc impossible de fournir l'assurance qu'une cargaison donnée de canola ne contient pas plus de 1 p. 100 d'OMG. Comme l'exige la réglementation. 

+-

    Mme Brenda Chamberlain: Dois-je comprendre que le Canada est défavorisé parce qu'il ne peut pas étiqueter ses produits comme le font d'autres pays?

+-

    La présidente: C'est ce qu'il dit. Nous avons perdu 400 millions de dollars de vente parce que nos produits ne sont pas étiquetés.

+-

    Mme Brenda Chamberlain: C'est ce que je pensais. Je voulais simplement m'en assurer.

+-

    La présidente: Très bien. Je vous remercie, madame Chamberlain.

+-

    M. Claude Carrière: Ce n'est pas parce que nos produits ne sont pas étiquetés, mais parce que nous ne pouvons pas respecter le niveau de tolérance exigé en Europe. Cela nous obligerait à mettre sur pied un système d'entreposage, d'expédition et de distribution distinct, ce qui serait trop coûteux pour des ventes de 400 millions de dollars. Il faudrait prendre ces mesures pour l'ensemble de la production et les frais que cela entraînerait pour le système de distribution seraient plusieurs fois supérieurs à la valeur de nos exportations vers l'Europe. Les producteurs ont donc simplement décidé de cesser leurs exportations.

+-

    Mme Brenda Chamberlain: Et si le mouvement devait s'amplifier... À titre d'exemple, de plus en plus de consommateurs--pas tout le monde évidemment-réclament cet étiquetage. C'est une observation assez générale, mais dans ma région, celle de Guelph, sur laquelle porte votre étude... J'ai beaucoup de respect pour ceux qui ont fait cette étude. Elle a été bien menée par des gens compétents. Je représente cependant l'Université de Guelph et des professeurs et d'autres personnes m'écrivent ou me rendent visite pour réclamer cet étiquetage. Un groupe de personnes est opposé à l'étiquetage et un autre, à l'Université de Guelph, y est favorable. À titre de députée et de profane, je ne sais vraiment pas quoi penser des différents avis qui proviennent de l'Université de Guelph. Je ne suis pas sûre de la position qu'il faut adopter

    Vous ajoutez aussi à ma confusion lorsque vous dites que nous ne pouvons pas étiqueter les produits parce que cela serait trop coûteux. Or, nous perdons des occasions de vente. Je reconnais que ces ventes ne sont pas très élevées comparativement à ce qu'elles sont dans d'autres domaines.

    De façon générale, je ne suis pas très satisfaite de nos échanges commerciaux avec les États-Unis. Je sais que nos échanges sont très importants, mais je crois que ce qui se passe dans le domaine du bois-d'oeuvre est une véritable mascarade. Je ne croirais pas que le Canada ait livré une lutte assez dure aux États-Unis. Nous n'avons pas tenu bon. C'est une autre question qui relève cependant de votre compétence.

    Beaucoup de gens ont perdu leur emploi en raison de la confiance que nous accordons à ces accords. Nous sommes maintenant durement touchés.

    La situation des fermes familiales, en particulier dans les Prairies, est un autre exemple de ce que qui ne va pas avec notre commerce, en l'occurrence le commerce du blé. Des gens abandonnent des terres que leurs familles possèdent depuis 20, 30, 50 ou 100 ans simplement parce qu'ils ne peuvent pas faire concurrence aux autres producteurs.

    Vous nous parlez de toutes ces sanctions qui visent à nous protéger si nous refusons d'étiqueter nos produits, mais je ne leur fais pas beaucoup confiance compte tenu des résultats que nous avons obtenus jusqu'ici.

    Nous sommes au service de la population et nous sommes des dirigeants politiques, mais de plus en plus de Canadiens réclament de l'information au sujet du contenu des aliments qu'ils mangent. J'ai compris ce que vous avez dit au sujet du traçage et des frais qui en découlent. Personne ne veut placer les consommateurs ou le Canada dans une situation désavantageuse. De plus en plus de gens s'interrogent cependant sur ce qu'ils mangent.

    Si nous nous dirigeons seulement vers un étiquetage volontaire... Corrigez-moi si j'ai tort, mais l'étiquette indiquera-t-elle simplement «ce produit peut contenir» ou indiquera-t-elle «ce produit contient». Pourriez-vous me donner cette précision?

  +-(1200)  

+-

    M. Claude Carrière: Il est possible que les deux formulations soient acceptées sur le marché. En fonction de la norme choisie, l'énoncé pourrait être formulé de façon positive ou négative. Les producteurs pourraient choisir de dire: «Ce produit ne contient pas» ou «ce produit peut contenir ou contient». Il appartiendra aux consommateurs de choisir ce qu'ils préfèrent. L'énoncé devra cependant être conforme à une norme et il existera un système d'accréditation permettant d'attester de la véracité de l'énoncé.

+-

    Mme Brenda Chamberlain: Qu'est-ce que la formulation «ce produit peut contenir» signifie?

+-

    M. Claude Carrière: C'est la formulation qui est utilisée à l'heure actuelle pour aviser le consommateur qu'un produit peut contenir des allergènes, et en particulier des noix. Bon nombre de consommateurs qui ont une allergie aux noix décident de ne pas acheter le produit.

    Ces exigences s'appliquent aussi aux aliments qui contiennent des OGM. Si un aliment génétiquement modifié contient un allergène, la réglementation canadienne exige à l'heure actuelle que l'étiquette figurant sur ce produit le mentionne. On peut supprimer les allergènes dans certains nouveaux produits. Il n'existe cependant pas actuellement sur le marché de produits génétiquement modifiés.

+-

    Mme Brenda Chamberlain: Votre ministère pense donc qu'il vaut mieux renoncer à des ventes peu élevées dans un domaine que de risquer de compromettre notre commerce avec les États-Unis, n'est-ce pas?

+-

    M. Claude Carrière: Je n'aurais peut-être pas exprimé les choses de cette façon, mais c'est une façon de voir la situation.

+-

    Mme Brenda Chamberlain: J'aime que les choses soient énoncées clairement.

+-

    La présidente: Puis-je poser une question afin de clarifier le point de vue de Mme Chamberlain?

    Faut-il comprendre que les Américains refuseraient nos exportations de produits alimentaires si nous adoptions l'étiquetage obligatoire? Les États-Unis cesseraient-ils d'importer nos produits si nous les étiquetions? Cela ne me semble pas logique. N'est-ce pas plutôt qu'ils ont peur de la concurrence que nous pourrions leur livrer sur les marchés internationaux parce qu'ils refusent d'étiqueter leurs produits? Je vous demande cependant s'ils refuseraient nos exportations.

+-

    M. Claude Carrière: Vous posez une question très générale. Permettez-moi d'abord de faire remarquer que la vaste majorité des produits alimentaires que nous exportons vers les États-Unis sont des aliments transformés dont certains contiennent des ingrédients en provenance des États-Unis. En fait, la majorité de ces produits contiennent des ingrédients provenant des États-Unis, de sorte que cela créerait une grande incertitude au sujet du commerce des ingrédients qui existe déjà.

    Deuxièmement, les aliments transformés qui sont importés des États-Unis devraient être étiquetés conformément à la réglementation canadienne comme c'est déjà le cas. Cela pourrait avoir un effet dissuasif sur le commerce.

    Et surtout, les États-Unis dont nous sommes les principaux clients et vice versa, pourraient soutenir que l'étiquetage obligatoire constitue une mesure discriminatoire à l'égard d'un produit semblable, ce qui irait à l'encontre de nos obligations dans le cadre de l'ALENA ou de l'OMC. Comme je le disais plus tôt, il est impossible de distinguer une huile de canola qui contient des OGM d'une huile qui n'en contient pas. La même chose vaut pour le maïs ou le soja.

    En vertu des accords sur les obstacles techniques au commerce ou en vertu du chapitre 9 de l'ALENA qui porte sur les mesures liées aux normes, nous sommes tenus de prendre les mesures commerciales les moins restrictives possibles ou de prendre seulement les mesures qui sont nécessaires pour protéger les objectifs légitimes énoncés dans l'accord. L'un de ces objectifs est la protection de la santé et de la sécurité. Les États-Unis n'ont pas contesté nos exigences en matière d'étiquetage qui sont liées à la protection de la santé et de la sécurité. Nous ne savons pas comment ils réagiraient si nous imposions l'étiquetage obligatoire simplement pour renseigner les consommateurs, en particulier compte tenu du fait qu'il y a d'autres façons d'informer le consommateur par des systèmes volontaires, et en particulier par les systèmes d'étiquetage des produits biologiques et les systèmes adoptés par certains producteurs alimentaires au Canada et ailleurs ainsi que par les systèmes qui seront proposés, nous l'espérons, par l'Office des normes générales du Canada.

    L'étiquetage a donc des conséquences pour nos exportations, mais aussi pour les importations en provenance des États-Unis. Cette mesure empêche l'intégration du marché nord-américain. Je reconnais que des problèmes importants se posent dans certains secteurs comme le bois d'oeuvre, l'acier et le blé bien que...

+-

    La présidente: Le sucre?

+-

    M. Claude Carrière: Oui, le sucre. Je connais aussi malheureusement bien ce dossier aussi. Nous pourrions en discuter.

    Le sucre n'est pas, j'imagine, le produit préféré du Comité de la santé, madame la présidente.

  +-(1205)  

+-

    La présidente: Peut-être pas du comité, mais de la présidente en tout cas.

    Des voix: Oh, oh!

+-

    M. Claude Carrière: Cela a donc beaucoup de ramifications.

+-

    La présidente: Pourriez-vous résumer votre pensée?

    Vous dites qu'une des raisons pour laquelle votre document s'oppose si vigoureusement à l'étiquetage obligatoire c'est que le ministère craint une mesure quelconque de rétorsion commerciale des Américains. C'est bien cela?

+-

    M. Claude Carrière: C'est une considération importante pour nous, oui.

+-

    La présidente: Merci.

    Mme Thibault est la suivante, je crois.

    Oh, désolée, madame Chamberlain. Allez-y.

+-

    Mme Brenda Chamberlain: Cela revient à dire que nous n'arrivons pas à nous défendre commercialement contre les États-Unis.

+-

    La présidente: Il en est toujours ainsi, je crois, puisque chaque fois…

    Ce qui est intéressant, pour moi, c'est que si on le faisait, cela les empêcherait de nous envoyer leurs aliments; ils se refroidiraient à notre endroit parce qu'ils ne pourraient pas faire entrer des produits non étiquetés et essaieraient d'interdire nos produits à nous, qui le seraient. Malheureusement, il y a d'autres considérations ici, comme la santé et la sécurité de la population canadienne. Nous ne sommes pas responsables de la population américaine. Il faut donc peser le pour et le contre.

    En tout cas, pour l'instant ce sera Mme Thibeault suivie de M. Dromisky.

[Français]

+-

    Mme Yolande Thibeault (Saint-Lambert, Lib.): Monsieur Carrière, je m'excuse d'être arrivée en retard.

    Je lis en diagonale et je vois que vous êtes le négociateur en chef de la ZLEA. En cette capacité, pouvez-vous nous dire si les pays de l'Amérique du Sud, qui regroupent quand même une population extrêmement importante, ont des politiques vis-à-vis de l'étiquetage ou s'ils en sont encore aux balbutiements? Est-ce qu'ils vont aller vers les États-Unis?

+-

    M. Claude Carrière: Le paysage de l'Amérique latine n'est pas uniforme. L'Argentine, en particulier, a des positions très similaires à celles du Canada. Comme vous le savez peut-être, elle faisait partie du groupe de Miami dans le contexte du Protocole sur la biodiversité.

    Par contre, au Chili, il y a des préoccupations, et du travail se fait là-bas en direction de l'étiquetage obligatoire.

    Donc, c'est un paysage un peu hétérogène.

+-

    Mme Yolande Thibeault: Et le Brésil, lui? C'est peut-être le pays le plus populeux.

  +-(1210)  

+-

    M. Claude Carrière: Il y a eu des tentatives d'imposition d'étiquetage obligatoire qui ont été lancées au Sénat, mais il n'y a pas eu de progrès et aucune mesure n'a été prise jusqu'à maintenant.

+-

    Mme Yolande Thibeault: Il est donc à souhaiter que dans les négociations avec tous ces pays-là, si on se met tous ensemble, on puisse en arriver à ce que les États-Unis se rangent autour de nous, parce qu'on parle de populations immenses. On parle de marchés excessivement intéressants.

    Vous parlez du marché asiatique, mais pour nous, le marché sud-américain va devenir de plus en plus important.

+-

    M. Claude Carrière: Je voudrais revenir à certains commentaires que Mme la présidente a faits et que vous faites.

    L'Amérique latine est un marché potentiellement important, mais ne compte que pour moins de 2 p. 100 de nos exportations pour l'instant. En général, nos exportations aux États-Unis sont de l'ordre de 85 à 87 p. 100, et nous avons un surplus de 90 milliards de dollars avec les États-Unis au niveau des marchandises. Ce surplus finance beaucoup des déficits que nous avons avec d'autres pays. C'est pour cette raison que nous attachons beaucoup d'importance au marché américain, du côté des exportations mais aussi du côté des importations.

    Enfin, comme je vous l'ai mentionné, nous parlons toujours d'étiquetage obligatoire pour des raisons autres que la santé et la sécurité. Pour l'instant, ça existe toujours. Il y a des politiques du gouvernement du Canada qui s'appliquent et qui exigent l'étiquetage lorsqu'un produit génétiquement modifié n'est pas sécuritaire, ne rencontre pas nos exigences en matière de santé. Donc, dans le cas des produits qui présentent des risques pour la santé et la sécurité, c'est fait, et on parle d'étiquetage obligatoire pour des raisons autres que celle-là. Merci, madame.

+-

    Mme Yolande Thibeault: Vous parlez de raisons autres que la santé. J'aimerais faire un petit commentaire en passant. On parle de l'argent qu'on va devoir dépenser pour imposer ce genre d'étiquetage. Je n'oublierai jamais le débat sur l'étiquetage bilingue au Canada. À ce moment-là, on disait que tout le monde allait faire faillite. Les années ont passé, et on est encore là. Toutes nos compagnies comme General Foods et ainsi de suite se portent très bien. Excusez-moi si je suis un peu sceptique. Merci.

[Traduction]

+-

    La présidente: Vouliez-vous répondre à cela, la comparaison avec l'étiquetage bilingue, qui allait provoquer le pire, disait-on?

[Français]

+-

    M. Claude Carrière: En fait, il y a eu une évolution. Quand on va chez certains détaillants, il y a même maintenant des étiquettes trilingues au pays, et on s'en félicite.

    Mais l'étiquetage obligatoire des OGM est différent d'un étiquetage bilingue ou trilingue parce qu'on exigerait que les fabricants du produit nous assurent, comme consommateurs, de l'origine du produit brut. Dans le cas de la mayonnaise de M. Dromisky, il faudrait que le producteur de mayonnaise puisse assurer le consommateur que l'huile qu'il utilise provient ou ne provient pas d'oléagineux génétiquement modifiés. On sait que c'est impossible de le vérifier physiquement. On doit s'assurer que, dans tout le processus de production, il existe une ségrégation. On ne dit pas de ne pas le faire. On dit qu'il y a des conséquences énormes du côté de la distribution et des coûts.

    Enfin, il faut également s'assurer que, si le produit ne peut être mis en marché à cause de ce genre d'étiquetage, lorsqu'on ne peut pas faire la différence entre celui-ci et les autres produits, il n'y ait pas d'obligations d'accords commerciaux internationaux qui interdisent la discrimination entre produits similaires. Ces produits-là sont similaires. On ne peut pas faire la différence physique. Il faut donc tenir compte des conséquences économiques et des conséquences légales au plan international en étudiant la question.

  +-(1215)  

[Traduction]

+-

    La présidente: Merci, madame Thibeault.

    Passons à M. Dromisky, suivi de M. Gagnon et de Mme Scherrer.

+-

    M. Stan Dromisky: Merci beaucoup.

    Tout d'abord, j'aimerais faire une observation d'ordre général.

    Depuis les années que j'observe nos rapports avec les États-Unis et les relations des États-Unis avec les autres pays, j'ai dégagé une sorte de grand principe. Aujourd'hui, comme député, je peux dire que ce principe est devenu un absolu. Ce principe est très simple. Les États-Unis vont respecter un accord international signé avec un pays—ou plusieurs pays—si cela est avantageux pour leur société. Si un signataire enfreint l'accord, ils pousseront les hauts cris parce que cela touche leur société. Si par contre un traité nuit à leur société, ils vont y passer outre sans hésitation. Autrement dit, ils ne respecteront les accords internationaux qu'ils signent que s'ils profitent à leur population, un point c'est tout. Il ne faut pas l'oublier.

    Je vais maintenant faire une observation d'ordre général. Où diable s'en va-t-on? Je parle d'une situation qui existe aujourd'hui. Nous savons quelles sont les restrictions qui existent en Europe, un marché fantastique, mais je voudrais que l'on examine le cas de l'Asie. Je pense que ce qui se passe en Asie aujourd'hui mérite d'être observé soigneusement et d'être pris en compte. Il y a là deux grandes économies, le Japon et la Chine. Les deux font énormément de commerce avec leurs voisins, l'Indonésie, le Vietnam, la Thaïlande, etc. et ces relations commerciales se multiplient de jour en jour. Pourquoi? Parce qu'une classe moyenne forte est en train d'émerger en Asie et le régime alimentaire de centaines de millions de gens est en train de changer, y compris en Inde. Autrement dit, ils ne sont plus obligés de consommer autant de riz que par le passé et ils peuvent commencer à acheter des aliments transformés, comme du pain, etc. Voilà ce qui se passe.

    Vu ce qui se passe sur le marché européen et ce qui va se passer en Asie et vu que tous nos concurrents dans le monde deviennent de plus en plus efficaces et productifs, où allons-nous nous situer à long terme lorsque nous n'avons que...? On dirait que nous sommes en train de nous acculer nous-mêmes dans une situation où notre commerce dépendra entièrement des marchés américains et mexicains. C'est un scénario qui me fait peur.

+-

    M. Claude Carrière: En fait, nous sommes très fiers de notre relation commerciale avec les États-Unis. Comme je l'ai dit, nous avons eu un excédent de 90 milliards de dollars l'an dernier. Mais d'autres marchés offrent aussi beaucoup de potentiel.

    Nous sommes très actifs dans les Amériques. Nous aimerions que notre part de 2 p. 100 des exportations vers les Amériques grandisse au fur et à mesure que nous contribuerons au développement de l'hémisphère.

    Nous sommes très actifs sur le marché chinois. Nous avons été très actifs dans les négociations pour faire entrer la Chine dans l'OMC et nous suivons de très près le respect de ses nouvelles obligations depuis. Nous nous préoccupons tout particulièrement des mesures récentes prises pour limiter notre accès à ce marché.

    Nous nous intéressons aussi beaucoup à ce qui se passe au Japon, en particulier les négociations infrarégionales avec l'Asie du Sud-Est. Les Japonais ont conclu récemment un accord de libre-échange avec Singapour. Vous savez peut-être que nous sommes en train de négocier un accord semblable avec Singapour, aussi bien pour illustrer notre intérêt pour la région en général que pour indiquer aux entreprises canadiennes de ne pas se tourner exclusivement vers le marché américain, mais aussi de considérer le marché asiatique.

    Chacun sait que nous nous intéressons depuis longtemps à l'Europe. C'est le plus gros marché au monde. Nous accusons un déficit chronique avec l'Europe, ce qui nous indique que nous pouvons faire beaucoup mieux tant sur le plan du commerce que des investissements. Au moment où je vous parle, une mission d'Équipe Canada est en Allemagne à la recherche de nouveaux investissements.

    Il est donc vrai que la relation canado-américaine est au sommet de nos priorités en matière de politique commerciale, mais nous cherchons également à ouvrir des marchés partout dans le monde, dans les Amériques, en Asie et en Europe à l'aide d'instruments bilatéraux, mais aussi grâce à l'OMC, à la faveur du nouveau cycle de négociations lancé l'automne dernier.

    Oui, nous sommes conscients des deux facettes de la relation commerciale canado-américaine, et nous encourageons les entrepreneurs, les exportateurs de produits et de services ainsi que les investisseurs canadiens à considérer d'autres marchés tout en prenant de l'expansion sur le marché américain.

    Désolé, madame la présidente.

  +-(1220)  

+-

    La présidente: M. Gagnon puis Mme Scherrer.

[Français]

+-

    M. Marcel Gagnon: Merci.

[Traduction]

+-

    La présidente: Faites un peu plus vite cette fois-ci, monsieur Gagnon. Je vous ai accordé dix minutes la première fois parce que vous êtes le principal porte-parole de l'opposition, mais normalement vous ne disposez que de cinq minutes.

[Français]

+-

    M. Marcel Gagnon: Merci. Ça prend du temps, mais je viens à bout de vous comprendre.

    Monsieur Carrière, j'ai beaucoup de respect pour vos grands talents de vendeur. C'est d'ailleurs pour cela que vous êtes en charge des négociations, mais un peu comme on l'a dit autour de la table, il y a presque unanimité sur certaines inquiétudes. Moi aussi, j'ai toujours été un vendeur, pas de votre qualité, mais j'aurais de la difficulté actuellement, en ce qui concerne l'avenir de l'alimentation, à mettre tous les oeufs dans le même panier avec les Américains et, simplement pour leur faire plaisir, à déplaire un peu à la population interne et européenne. Je pense que c'est une vague qui augmente.

    Vous n'êtes pas trop convaincant vous-même quand vous dites, à la page 2:

Je ne veux pas m'égarer dans le débat portant sur la question de savoir si les aliments GM [...] simplement parce qu'il «pourrait y avoir» des effets à long terme que nous ne connaissons pas encore.

    Vous dites: «des effets à long terme que nous ne connaissons pas encore.» C'est là qu'est le problème actuellement dans l'engagement que l'on prend. C'est là l'inquiétude du consommateur et c'est l'inquiétude en Europe: qu'est-ce qui va se produire à long terme?  Je sais que vous êtes là pour faire du commerce international, mais il va vraiment falloir avoir cette préoccupation, parce que peut-être qu'on se félicitera un jour d'avoir été un peu plus prudent en ce qui concerne l'étiquetage des aliments, même si temporairement, ça crée peut-être des problèmes pour le commerce avec les États-Unis. Je me dis que le consommateur va finir par gagner et que la vague est trop forte pour que ça recule. Les gens veulent davantage de sécurité comme consommateurs à long terme. Selon moi, il va falloir étudier la situation très sérieusement. C'est tout.

[Traduction]

+-

    La présidente: C'était une déclaration plutôt qu'une question; ils n'ont donc pas à répondre.

[Français]

+-

    M. Marcel Gagnon: M. Carrière peut peut-être réagir à ce que j'ai dit.

  +-(1225)  

[Traduction]

+-

    La présidente: Je n'ai rien entendu à propos du commerce. Je vous ai entendu parler de santé et de sécurité à long terme et les témoins ne sont pas experts en la matière. Ce n'est donc pas un emploi judicieux de leur temps de les laisser répondre.

[Français]

+-

    M. Marcel Gagnon: Madame la présidente, la discussion a forcément tourné autour de ce sujet-là.

[Traduction]

+-

    La présidente: Je pensais que les consommateurs...

+-

    Mme Brenda Chamberlain: Dans ce cas, faisons venir des spécialistes de la santé et de la sécurité et mettons-les sur la sellette.

+-

    La présidente: Eh bien, nous avons entendu des spécialistes de la santé. Nous avons déjà entendu deux groupes. Mais la question est de savoir quel ministère est aux commandes? C'est ce que l'on essaie de démêler ici. Ou y a-t-il quelqu'un d'autre ailleurs?

    Madame Scherrer.

[Français]

+-

    Mme Hélène Scherrer: Merci, madame la présidente.

    J'ai une toute petite question assez facile. Puisqu'on a pu déterminer qu'effectivement, un des éléments majeurs pour ralentir un peu l'étiquetage obligatoire était le fait qu'il y aura des problèmes au niveau de l'exportation, spécialement du côté des Américains, qu'advient-il des produits qu'on choisit d'étiqueter sur une base volontaire? Est-ce qu'ils sont boycottés?

    Deuxièmement, comment peut-on se gargariser ou se consoler en se disant que l'on a déjà l'étiquetage volontaire et que les gens n'ont qu'à le prendre, alors qu'on sait pertinemment qu'en bout de ligne, ils seront très handicapés au niveau de l'exportation?

+-

    M. Claude Carrière: Le marché et les accords internationaux prévoient l'étiquetage volontaire ou des normes volontaires en général. À l'OMC comme dans l'ALENA, les consommateurs, qu'il s'agisse d'individus, d'entreprises ou même des gouvernements, peuvent, dans leur consommation et leurs achats, déterminer ce qu'ils veulent acheter et établir des normes, surtout les entreprises. C'est là que le système volontaire existe, en établissant des processus pour donner une assurance que telle norme est respectée.

    C'est prévu et c'est accepté à la fois dans les accords internationaux et dans le marché. Donc, lorsqu'il y a une norme volontaire, les entreprises, si elles veulent vendre tel ou tel produit, doivent se plier à la norme. Sinon, elles vendent ailleurs, là où la norme est différente. Donc, au ministère du Commerce international, d'abord, nous sommes satisfaits de voir que les normes volontaires qui sont développées dans un processus ouvert reflètent les intérêts de toutes les parties à la transaction. Il n'y a pas de problème de politique commerciale.

    Dans le domaine de l'étiquetage, nous pensons qu'un bon système d'étiquetage volontaire peut répondre aux besoins des consommateurs que vous mentionnez au comité et qui vous préoccupent quant à l'information et ainsi de suite.

+-

    Mme Hélène Scherrer: Monsieur Carrière, je voudrais surtout savoir ce qui arrive actuellement aux produits pour lesquels on a choisi d'afficher l'étiquetage: «contient ou peut contenir des produits...». Est-ce que ces produits sont boycottés? Est-ce que vous êtes capable de me dire si ces produits sont boycottés?

+-

    M. Claude Carrière: À notre connaissance, le volume de produits qui sont étiquetés volontairement « ce produit peut contenir des OGM » en ce moment est très petit, pour la raison que vous mentionniez plus tôt: les gens qui voient ce genre d'étiquette choisissent de ne pas l'acheter tout simplement, que ce soit par méfiance ou pour toutes sortes d'autres raisons. C'est dans le domaine volontaire.

    Une des raisons pour lesquelles nous pensons qu'un étiquetage obligatoire pourrait avoir des conséquences est que lorsque le gouvernement exige qu'une information soit donnée sur l'étiquette, c'est pour des raisons de santé et de sécurité. Alors, si on ajoute une information pour une autre raison, le consommateur pourra penser que c'est relié à des questions de santé et de sécurité. Cela pourrait mener à la confusion quant aux deux objectifs visés. C'est pourquoi nous pensons que l'option volontaire est préférable.

  +-(1230)  

+-

    Mme Hélène Scherrer: Avez-vous en tête un exemple d'un produit qui affiche cette étiquette?

+-

    M. Claude Carrière: Je n'en ai pas.

+-

    Mme Hélène Scherrer: Je veux avoir un exemple d'un produit spécifique pour lequel on aurait choisi d'indiquer qu'il pouvait contenir... Est-ce que cette compagnie réussit quand même à exporter son produit, ou si elle est boycottée?

+-

    M. Claude Carrière: Je n'en ai pas. On peut chercher, mais je peux vous dire, par exemple, qu'il y a une très grande proportion de la production de canola qui comporte des OGM. Une partie de la production n'en comporte pas, mais le système de distribution, en général, ne peut pas faire la ségrégation entre les deux produits.

    Alors, que le produit soit étiqueté ou non, les acheteurs de canola ou d'huile de canola canadien, généralement les transformateurs, savent que le produit est, à l'origine, un produit génétiquement modifié ou qu'il pourrait l'être. Or, nos producteurs vendent dans certains marchés et ne vendent plus dans certains autres.

    En Europe, ce n'est pas une question d'étiquetage; c'est une question de ne pas être en mesure de démontrer, étant donné la nature du système, qu'un produit est ou n'est pas génétiquement modifié. Donc, les exportateurs choisissent de ne pas exporter.

    C'est un exemple un peu à l'inverse, mais qui répond à votre question.

+-

    Mme Hélène Scherrer: Je veux juste conclure là-dessus. Ce qu'on utilise souvent comme argument, c'est que nous n'allons pas vers l'étiquetage obligatoire parce qu'on a déjà un étiquetage volontaire et que les compagnies qui souhaitent faire un étiquetage volontaire peuvent très bien bénéficier de cela pour informer les consommateurs que leur produit peut contenir des OGM. Cet argument servait un peu à mettre un baume sur le fait que les gens ou les compagnies qui voulaient le faire répondaient peut-être à un souci de sécurité.

    Par contre, si vous dites que les gens qui l'affichent se voient automatiquement exclus du marché américain, alors, ne parlons plus d'étiquetage volontaire, car il est clair qu'il n'y aura pas une seule compagnie qui voudra étiqueter son produit. Ce n'est même plus une question d'informer les consommateurs, c'est une question de vie ou de mort, à partir du moment où on l'inscrit. Alors, il ne faudrait plus utiliser l'argument de l'étiquetage volontaire si, à ce moment-là, ceux qui veulent s'en prévaloir savent qu'ils seront automatiquement exclus de tout commerce extérieur. On va arrêter d'utiliser cet argument, car il devient finalement non valable. On se console en disant qu'on a un étiquetage obligatoire.

+-

    M. Claude Carrière: Il y a deux modes d'étiquetage. Il y a «peut contenir ou contient» d'une part et, d'autre part, «ne contient pas». Pour l'instant, dans le domaine de l'étiquetage biologique, je ne sais pas si ça dit «ne contient pas», mais il est entendu qu'un étiquetage biologique signifie que le produit ne contient pas d'OGM, ni de produits chimiques, ni d'engrais, ni de pesticides, etc. Ça c'est un mode.

    On n'a pas d'exemples. On peut voir, et on reviendra devant le comité, s'il y a en ce moment dans le marché, au Canada ou ailleurs, des produits destinés aux consommateurs qui disent « ce produit contient ou peut contenir des OGM ». On va vérifier.

    Ce que je vous dis, c'est que dans le commerce de gros, les acheteurs d'huile de canola, ceux qui transforment le canola, connaissent l'origine du produit. Ils savent également qu'une fois qu'on a pressé le grain, on ne peut pas déterminer l'origine génétique de ce produit. Pour certains produits c'est impossible. Pour d'autres, pour des raisons techniques et physiques, c'est plutôt la distribution qui pose un problème, mais on peut essayer de trouver un exemple.

  +-(1235)  

[Traduction]

+-

    Mme Bonnie Brown: Merci.

    J'ai quelques questions à poser. Puisque dans votre document la plupart des questions commerciales sont abordées à la page 4 de la version française, je vous invite à vous y reporter. Merci.

    Au premier paragraphe, avant-dernière ligne, vous dites que «l'étiquetage obligatoire des aliments GM peut décourager l'investissement étranger dans ce secteur, compromettant encore plus l'innovation». Avez-vous des preuves, une analyse économique qui le montrent ou n'est-ce que de la divination à laquelle se livrent vos fonctionnaires? Si vous en avez des preuves, j'aimerais que vous les mettiez par écrit et que vous nous les envoyiez.

    Dans le paragraphe qui suit, je lis ceci: «D'une façon générale, nous sommes d'avis que des normes d'étiquetage obligatoire basées sur des PMP constituent des obstacles possibles au commerce». J'aimerais que vous m'expliquiez cela par écrit. Pourquoi pensez-vous que c'est le cas? Cet avis est-il motivé?

    À l'avant-dernière ligne de ce paragraphe, vous dites: «Nous avons soutenu que ces mesures peuvent faire l'objet d'abus ou être utilisées d'une manière abusive par d'autres pays à des fins protectionnistes». Je ne comprends pas comment ils pourraient s'en servir et j'aurais besoin qu'on me l'explique par écrit à l'aide d'un exemple concret et non d'un cas hypothétique, si vous le voulez bien.

    Dans le paragraphe suivant, on dit: «Si le Canada était tenu d'adopter des règles d'étiquetage obligatoire pour tous les OGM, il irait à l'encontre de la position qu'il a constamment appuyée sur la scène internationale». J'aimerais savoir quelle est la source de cette position. Y a-t-il une loi ou un document d'orientation qui a été approuvé par le cabinet ou est-ce une position qui a été adoptée avec le temps d'abord et avant tout pour ne pas froisser les États-Unis? D'où provient cette position? Est-ce que cela découle d'une loi ou n'est-ce qu'une position? À mon sens, on a demandé au comité d'examiner cette position et je ne crois pas qu'elle tienne à quoi que ce soit d'autre qu'une entente bureaucratique établie au fil des années. Alors je voudrais que vous me le prouviez, par écrit aussi.

    Dans le dernier paragraphe, on dit: «Le Canada pourrait être vulnérable à une contestation présentée en vertu des accords de l'OMC ou de l'ALENA parce que l'étiquetage obligatoire [...] pourrait être contraire aux dispositions de ces accords». J'aimerais savoir, numéros d'articles à l'appui, de quoi vous parlez ici. C'est ce que je m'attendais à entendre aujourd'hui: un tableau qui m'indique les articles de l'ALENA qui nous exposeraient à des recours commerciaux des États-Unis dans l'éventualité où l'étiquetage serait obligatoire.

    Moi aussi, je suis préoccupée par l'augmentation de coût de 35 à 41 p. 100. En fait, je ne comprends pas, puisque dans votre exemple, vous parlez de la séparation du canola génétiquement modifié. Je croyais que la quasi-totalité du canola cultivé au Canada était génétiquement modifiée. Pourquoi faudrait-il le séparer? Vous savez que... Pardon?

+-

    M. Claudio Valle: C'est 70 p. 100.

+-

    Mme Bonnie Brown: C'est 70 p. 100?

+-

    M. Claudio Valle: Ce n'est pas toujours mélangé.

+-

    Mme Bonnie Brown: Non, je sais. Mais pour d'autres produits, nous séparons déjà les aliments biologiques des autres et nous les trouvons dans des rayons différents du supermarché. Si 70 p. 100 d'un produit est génétiquement modifié, il faudrait peut-être garder à part les 30 p. 100 restant, comme pour les cultures biologiques.

+-

    M. Claude Carrière: Les producteurs d'aliments biologiques le font déjà volontairement.

+-

    La présidente: Oui, mais pour le canola biologique? Il dit que tout est mélangé.

+-

    M. Claude Carrière: Les producteurs ont le choix. Ceux qui produisent du canola biologique ou non génétiquement modifié, sans engrais ou pesticides, ont le choix de le vendre étiqueté comme produit biologique. Mais pour les produits en vrac, vous ne pouvez pas séparer ce qui n'est pas biologique...

+-

    La présidente: Une fois que c'est mélangé, c'est pour ainsi dire—je n'aime pas le mot—contaminé de toute façon parce qu'on ne peut pas les séparer. Dans ce cas, pourquoi ne pas étiqueter tout ce qui sort de ce mélange...?

    Quant à la raison de l'augmentation de 35 à 41 p. 100 du coût, votre principal argument est le système de distribution—les wagons, etc.— toute la chaîne depuisle producteur jusqu'au fabricant d'aliments transformés. Pourtant vous dites que 70 p. 100 de cela est génétiquement modifié et que le reste est mélangé. Pourquoi alors ne pas se donner la peine de les séparer; contentons-nous de dire que tout est modifié génétiquement puisque c'est mélangé à l'usine de toute façon?

  +-(1240)  

+-

    M. Claude Carrière: C'est précisément ce qui se fait actuellement.

+-

    La présidente: Alors pourquoi est-ce que cela alourdirait les coûts? Ça ne changerait rien.

+-

    M. Claude Carrière: J'ai utilisé l'exemple du canola.

+-

    La présidente: Est-ce que ce n'est pas sensiblement la même chose pour les autres huiles de graine? À notre connaissance, les seuls OGM actuellement vendus au Canada sont les oléagineux. Je pense qu'il y a une pomme de terre ou une tomate. Je ne m'en souviens plus. Mais le principal produit alimentaire, ce sont les oléagineux génétiquement modifiés, n'est-ce pas?

+-

    M. Claude Carrière: Oui.

+-

    La présidente: Et le canola est la plus importante de ces cultures, n'est-ce pas?

+-

    M. Claude Carrière: Produite au Canada, oui.

+-

    La présidente: Au Canada précisément. Et la récolte de canola est génétiquement modifiée à 70 p. 100 et mêlée aux 30 p.100 qui restent pour le transport. Pourquoi faudrait-il alors un nouveau système de transport?

+-

     M. Claudio Valle: Pas dans tous les cas. Certains voulaient conserver les variétés non GM.

+-

    La présidente: Alors pourquoi est-ce que ce ne serait pas à eux d'avoir un système distinct?

+-

    M. Claude Carrière: C'est précisément ce que le régime facultatif prévoit. Il reviendrait aux producteurs de variétés non GM de mettre en place un système distinct. Ce ne serait pas aux consommateurs des autres variétés GM.

+-

    La présidente: Vous venez de miner votre propre argument. Pourquoi le coût monterait-il de 35 à 41 p. 100 si les produits GM peuvent être amenés au marché et aux fabricants grâce au système de transport qui existe déjà?

    Enfin, j'interprète peut-être mal les choses. Mais si c'est le cas, je voudrais qu'on me l'explique clairement et logiquement pour que tout le monde comprenne.

    Je veux aussi m'élever contre ce qui est dit à la page 8: «L'UE envisage depuis quelque temps d'étendre ces règles déjà inacceptables d'étiquetage obligatoire». Je m'étonne qu'un de nos ministères juge «déjà inacceptable» la réglementation d'autres pays concernant leurs propres aliments. C'est un avis subjectif et ce n'est pas ce que je vous avais demandé. Nous vous avons demandé des faits.

    Autre chose, page 9, dans le passage sur la Chine. Vous dites que les règlements d'application «prévoient un régime d'étiquetage obligatoire et constituent un obstacle aux exportations agro-alimentaires canadiennes, mettant en cause des exportations annuelles de canola de 560 millions de dollars». Reprenons donc l'exemple que vous avez utilisé, celui du canola, qui est à 70 p. 100 génétiquement modifié, selon vous; pourquoi ne pourrions-nous pas simplement apposer une étiquette sur tout ce qui contient du canola, en disant «cet aliment a été génétiquement modifié», ce qui nous permettrait d'exporter en Chine sans perdre les 560 millions de dollars?

    Ce n'est pas la politique de la Chine qui est l'obstacle, c'est la nôtre. C'est un obstacle que nous nous imposons nous-mêmes puisqu'il est si facile de repérer et d'étiqueter le canola en particulier.

    Votre raisonnement ne tient pas debout.

+-

    M. Claudio Valle: Non, je suis désolé, mais les Chinois ont promulgué un règlement vague, imprécis, qui ne nous permet pas de déterminer ce qu'ils veulent comme étiquetage.

+-

    La présidente: Ce n'est pas ce qu'on dit ici.

+-

    M. Claudio Valle: Le fait est que nous ne pouvons pas exporter vers la Chine en ce moment parce que ce pays ne nous dit pas clairement quelles sont ses exigences relatives à l'étiquetage.

+-

    La présidente: Mais ce n'est pas ce que dit ce paragraphe.

+-

    M. Claudio Valle: La Chine n'accepte pas le système d'approbation des produits que nous avons établi, système qui leur dit tout ce qu'ont fait Santé Canada et l'ACIA. Ce pays a simplement adopté un règlement qui dit: arrêtez, nous voulons ce renseignement, sans toutefois préciser lequel.

+-

    La présidente: Donc cette barrière n'est pas fondée sur les exigences relatives à l'étiquetage des OGM, mais plutôt sur leurs exigences générales en matière d'étiquetage, qui sont obscures à dessein. C'est ça?

+-

    M. Claudio Valle: La raison d'être de l'étiquetage des OGM... Mais il vous faut soumettre le produit que vous voulez vendre à notre système d'approbation avant de pouvoir l'étiqueter.

    La Chine n'a pas mis en place un système réglementaire d'approbation qui est transparent et qui nous permettrait de faire approuver les variétés de canola que nous produisons. Et nous ne sommes pas les seuls dans ce cas. Les États-Unis ont également des difficultés pour leur soya et leur maïs.

    Le problème, c'est l'acceptation des...

+-

    La présidente: La priorité.

+-

    M. Claudio Valle: ...des produits réglementés que nous jugeons sûrs, et que la Chine n'est pas disposée à approuver. Et une fois que le produit est accepté, il faut tenir compte des règlements relatifs à l'étiquetage. La Chine n'a pas précisé comment elle veut procéder: qui assure la certification, sous quelle forme, et tout le reste.

    Chose certaine, ce n'est pas un système très transparent. C'est une barrière commerciale. Nous avons présenté certaines observations, pas seulement nous, mais aussi nos autres partenaires commerciaux. Tels sont les facteurs qui handicapent la vente de nos produits.

    Avant de pouvoir l'étiqueter, il faut que le produit soit approuvé.

  -(1245)  

-

    La présidente: Merci beaucoup. C'est une explication beaucoup plus claire que ce paragraphe, et j'en déduis que la Chine avait bien des règles relatives à l'étiquetage des aliments transgéniques, mais qu'elle n'a pas raffiné ses règles au point de les rendre compréhensibles à d'autres. Cela me semble poser un problème distinct qui devrait retenir l'attention de nos agents commerciaux en Chine, lesquels devraient obtenir ces clarifications, ce que veulent aussi d'autres pays, j'en suis sûr.

    Au nom du comité, je tiens à vous remercier de votre visite. Je vous rappelle ce que nous vous avons demandé, dont cette étude de l'Université de Guelph et les réponses aux questions que j'ai posées à la fin, et je tiens à vous faire savoir qu'il se peut que nos attachés de recherche vous téléphonent pour obtenir de plus amples informations. Il se peut même que nous réinvitions dans le cadre de notre étude.

    Je tiens à remercier mes collègues pour leur patience et leurs questions. Dites à M. Gagnon qu'il peut revenir quand il voudra, mais que je ne peux lui garantir dix minutes.

    La séance est levée.