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HEAL Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON HEALTH

COMITÉ PERMANENT DE LA SANTÉ

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 10 mai 2001

• 1109

[Traduction]

La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.)): Je déclare la séance ouverte.

Nous entamons la première séance d'information par le ministère de la Santé sur l'ébauche de projet de loi renvoyée à notre comité par la Chambre.

• 1110

Nous commençons par un exposé de l'équipe de Santé Canada dirigée aujourd'hui par M. Ian Shugart.

Monsieur Shugart, vous avez la parole.

M. Ian Shugart (sous-ministre adjoint, Direction générale des politiques et de la consultation, Santé Canada): Merci beaucoup, madame la présidente.

Je ne sais combien de temps vous m'accordez pour examiner avec vous cette mesure législative. Je ne vais pas l'éplucher, et j'attendrai que vous me coupiez la parole, s'il le faut. Toutefois, avec les conseils du greffier et des attachés de recherche, nous avons préparé ceci à l'intention du comité.

Laissez-moi d'abord présenter mes collègues: Mme Rhonda Ferderber, qui dirige l'unité qui a pris en main ce dossier; M. Glenn Rivard, avocat, qui travaille avec nous sur ce dossier au nom de Justice Canada et qui a pris part à la rédaction de l'avant-projet de loi; et

[Français]

Madame Francine Manseau, qui travaille avec Rhonda, dans son équipe.

[Traduction]

L'avant-projet de loi commence par un préambule qui énonce les principes directeurs; vous savez sans doute que le préambule peut servir à modeler l'interprétation et le contenu des mesures législatives.

Le préambule énonce longuement et en détail les principes directeurs qui portent essentiellement sur ce qui suit: la protection et la promotion de la santé et de la sécurité; l'intérêt supérieur des enfants touchés par les techniques de reproduction; le consentement éclairé; l'intégrité du génome humain; et le respect de l'individualité humaine. Le projet de loi énonce ensuite la façon dont le Canada régirait les activités spécifiques d'assistance à la procréation, à la lumière des principes énoncés.

Certains actes seront prohibés, à savoir les actes qui sont considérés comme inadmissibles, tels que l'achat et la vente d'embryons, qui seraient interdits dans la loi. Le comité voudra sans doute se demander si la liste des actes interdits par la loi est complète et si les activités inscrites à la liste sont appropriées.

D'autres activités seront considérées comme acceptables, dans la mesure où elles sont entreprises conformément aux règlements; de plus, certaines autres activités pourraient être interdites par les règlements. Le projet de loi donnerait au gouvernement du Canada, par la voie du ministre de la Santé, le pouvoir d'élaborer des règlements.

[Français]

Bref, l'avant-projet de loi couvre deux types d'activités. Premièrement, celles qui sont interdites en tout temps—des interdictions—et, deuxièmement, celles pour lesquelles il faut se conformer au règlement: les activités contrôlées ou réglementées. Les interdictions sont définies dans la loi et les activités réglementées seront décrites dans le règlement à venir.

L'avant-projet de loi vise deux applications différentes. Premièrement, les activités d'assistance à la procréation comme telle, qui sont requises pour aider certains Canadiens et Canadiennes à concevoir des enfants et, deuxièmement, l'utilisation d'embryons humains en recherche pour l'avancement du savoir.

[Traduction]

En bref, l'avant-projet de loi traite de deux types d'activités: les actes prohibés et les activités réglementées; il traite également des deux objectifs vers lesquels tendent ces activités, à savoir l'assistance à la procréation humaine et l'utilisation des embryons dans la recherche. Commençons d'abord par les actes prohibés.

Dans le contexte des principes énoncés dans le préambule, le projet de loi exprime l'idée que les Canadiens n'accepteront pas certains types d'activités dans le domaine de l'assistance à la procréation humaine, et ce sont celles-ci qui seront inscrites dans le texte de loi. Ces actes prohibés incluent le clonage d'êtres humains, la création d'embryons humains uniquement à des fins de recherche et l'utilisation de techniques d'assistance à la procréation pour déterminer le sexe du bébé, sauf pour des raisons médicales spécifiques.

• 1115

D'autres actes prohibés se fondent sur l'idée qu'il est répréhensible de commercialiser le matériel reproductif humain et son potentiel. Cela nous a incités à établir que l'achat et la vente d'embryons humains seront illégaux, de même que la maternité de substitution à visée commerciale.

Je ne vais pas énumérer toutes les autres activités prohibées, mais je m'attends à ce que vous me posiez des questions là-dessus.

J'aborderai maintenant les activités réglementées et les règlements, dont l'un des objectifs principaux, c'est de garantir la santé et la sécurité des Canadiens, et particulièrement des Canadiennes qui ont recours à des procédures telles que la fertilisation in vitro, de même que les enfants issus de ces techniques. Les règlements viseraient également à protéger les embryons créés au cours des procédures d'assistance à la procréation. Les règlements porteront donc sur des questions comme le prélèvement des embryons et leur entreposage.

[Français]

Le consentement écrit et éclairé est un principe de base de l'avant-projet de loi. Le consentement des donneurs illustre ce principe. Par exemple, les donneurs auraient à consentir par écrit à l'utilisation de leurs gamètes pour la procréation assistée. L'utilisation de leurs embryons pour des fins de recherche et de reproduction exigerait aussi leur consentement. Les donneurs pourraient permettre ou non que leur identité soit connue des personnes nées de leur don. De plus, les règlements seraient élaborés de façon à s'assurer que les donneurs reçoivent l'information nécessaire pour donner ou refuser leur consentement.

[Traduction]

Un élément clé du projet de loi vise la fourniture de renseignements. Les intéressés doivent comprendre les options, les processus et les conséquences des techniques pratiquées et des traitements offerts. Plus précisément, les femmes gagneront à être informées sur les résultats et les taux de réussite des différentes techniques de procréation assistée. Ainsi renseignées, les femmes seront en mesure de prendre des décisions éclairées sur les traitements de l'infertilité.

Les personnes nées de dons doivent aussi avoir accès aux dossiers médicaux des donneurs. L'accès se ferait au moyen de registres. Toutefois, l'ébauche de projet de loi protège la vie privée et l'identité des donneurs. Ceux-ci, s'ils le souhaitent, pourraient permettre que leur identité soit connue des personnes nées de leurs dons. Comme vous le voyez, nous revenons ici à la question du consentement éclairé.

Une fois les registres en place, il serait également possible de limiter le nombre d'enfants par donneurs. De telles restrictions réduiraient les possibilités que deux parents par le sang deviennent liés à leur insu ou qu'ils puissent procréer ensemble.

[Français]

La recherche portant sur des embryons humains in vitro sera étroitement réglementée en raison de leur statut spécial, c'est-à-dire leur potentiel de devenir des êtres humains. Seule la recherche sur des embryons humains non utilisés à leur fin reproductrice, c'est-à-dire des embryons déjà existants, sera permise. La recherche sera examinée de près par des scientifiques reconnus, par un processus de revue par des pairs, avant qu'un permis ne soit accordé.

[Traduction]

Les règlements relatifs à la recherche qui utilisent des embryons déjà créés seraient élaborés en fonction de deux objectifs: d'abord, s'assurer que les embryons humains sont traités de façon appropriée; ensuite, définir les motifs justifiant l'utilisation des embryons humains en recherche, par exemple, le progrès du savoir.

Une meilleure compréhension des mécanismes de la fertilité et du développement embryonnaire permettrait la mise au point de traitements plus efficaces de l'infertilité, aptes à réduire le nombre d'avortements spontanés. Voilà un exemple des progrès scientifiques envisagés.

Deuxièmement, il est question de l'extraction de cellules souches d'embryons déjà créés. Comme vous le savez, la recherche sur les cellules souches embryonnaires aurait débouché sur des applications médicales importantes, y compris le traitement de différentes maladies—le cancer, la maladie d'Alzheimer, et ainsi de suite. À l'heure actuelle, de tous les types de cellules souches, ce sont les cellules souches embryonnaires qui sont les plus prometteuses sur le plan des découvertes scientifiques et des nouvelles applications.

• 1120

Enfin, madame la présidente, j'aborderai le sujet de l'organisme de réglementation qui est sous-entendu dans l'avant- projet de loi, et pour lequel M. Rock a affirmé qu'il accueillerait favorablement l'étude et l'avis du comité.

Un organisme de réglementation, soit au sein de Santé Canada ou à l'extérieur du ministère, serait chargé de superviser la mise en oeuvre de la mesure législative proposée. Quatre fonctions de base sont envisagées pour l'organisme de réglementation. L'un des défis consiste à mettre au point un modèle qui corresponde à ces fonctions et qui soit apte à les remplir le plus efficacement possible. Ces fonctions comprennent notamment l'octroi de permis et l'exécution de la loi. Je vous rappelle que le projet de loi autorise le ministre de la Santé à délivrer des autorisations pour les activités réglementées. En pratique, ce n'est pas le ministre de la Santé lui-même qui délivre ces autorisations, mais bien l'organisme de réglementation.

La seconde fonction de l'organisme de réglementation serait la gestion des antécédents médicaux, y compris l'établissement et la supervision des registres d'information; viendrait ensuite l'élaboration de politiques—en d'autres mots, l'organisme servirait d'organe ressource et assurerait le suivi des changements dans le domaine et des modifications qu'il serait nécessaire d'apporter au règlement à terme; et enfin, l'organisme de réglementation aurait une fonction de communication, de diffusion élargie de l'information, et ainsi de suite.

Un tel organisme et les mécanismes qui l'entourent devraient être représentatifs de tous les intervenants dans le domaine de la procréation assistée, devraient travailler dans la transparence et être responsables. Cet organe devrait être souple et apte à réagir rapidement et efficacement aux nouvelles réalités dans un domaine qui est reconnu par tous comme étant en rapide évolution.

Comme vous le savez, le ministre a demandé au comité de lui faire un rapport sur cette question. Comme le faisait remarquer un membre du comité, le fait de soumettre une ébauche de projet de loi permet au gouvernement de bénéficier d'une rétroaction avant de finaliser les détails du projet de loi. Notre but à nous, les fonctionnaires, est de vous épauler de notre mieux, pendant que nous continuerons à collaborer avec nos homologues des provinces et des territoires et que votre comité étudiera les propositions.

Je m'arrête ici. Nous répondrons volontiers à vos questions, du mieux que nous pourrons.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Shugart.

Nous commencerons avec M. Manning.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, AC): J'aimerais remercier les fonctionnaires du ministère pour tous leurs efforts. Je sais qu'ils travaillent sur ce dossier depuis longtemps. Je suis sûr qu'il y a énormément de matériel à étudier.

Je dispose de combien de temps, madame la présidente?

La présidente: Si l'on faisait un tour de cinq minutes?

M. Preston Manning: Cinq minutes, d'accord.

Je vais commencer par énumérer sept ou huit sujets sur lesquels j'aimerais obtenir davantage de documentation, ou peut-être pourrions-nous commencer par un simple index du matériel dont dispose le ministère. Permettez-moi donc de les énumérer pour le compte-rendu, et puis j'y reviendrai point par point, si cela vous convient.

Nous nous intéressons, bien sûr, au contexte scientifique de la procréation assistée. Je suppose qu'il nous sera présenté par des témoins experts en la matière. Je m'intéresse aussi à la définition de la recherche connexe. Le ministre affirme que cet avant-projet de loi vise la procréation assistée et la recherche connexe. Comment le ministère définit-il exactement ce type de recherche? Je crois que l'article 8 aborde cette question, mais je me demande où se trouvent les balises. En principe, cela pourrait recouper toute la science génétique. Voilà pour mon premier point.

Deuxièmement, les dimensions fédérales-provinciales nous semblent importantes. Il s'agit, bien sûr, d'un domaine de compétence fédérale, et j'aimerais que le ministère nous dise où, à son avis, cette compétence côtoie la compétence provinciale.

• 1125

Troisièmement, nous nous intéressons bien sûr aux dimensions sociales, morales et éthiques de la question. À ce chapitre, je me demande si le ministère a reçu—je suis sûr que oui—au cours des dernières années, depuis le projet de loi C-47, des mémoires de la part de spécialistes d'éthique portant sur les aspects moraux et éthiques de la question; je me demande aussi si des groupes religieux vous ont fait part de l'argumentation qui découle de leur point de vue. Il serait intéressant de prendre connaissance de ce type de propos.

Je crois que nous voulons tous savoir quels sont les modèles réglementaires qui s'offrent à nous, tant à l'étranger qu'au Canada.

Je me demande aussi s'il existe un répertoire des cliniques spécialisées en procréation assistée, des établissements de soin et des programmes de recherche en matière de procréation assistée. Sur le plan des services, quelle est l'ampleur du secteur de la procréation assistée? En tant que profane, je n'ai aucune idée de son importance, et je ne sais pas où il se concentre ni quels en sont les éléments. Il serait intéressant de pouvoir étudier un inventaire partiel du secteur pour en évaluer l'ampleur.

En ce qui concerne l'aspect économique et celui des coûts, je me demande si le ministère a procédé à une analyse économique... Si ce projet de loi et la recherche connexe avaient pour effet de faciliter le recours aux techniques d'assistance à la procréation, quel fardeau cela imposerait-il sur le système d'assurance-santé et sur les provinces? Tout le volet économique et la question des coûts sont importants.

Et en dernier lieu, le ministère a-t-il réalisé des sondages sur les attitudes publiques face aux nouvelles technologies ou aux services offerts, ou encore face à la recherche ou aux questions d'éthique que cela soulève, des sondages dont nous devrions être informés au moment d'orienter notre travail?

J'ai complété mon énumération. Peut-être que je pourrai revenir sur l'un de ces points et toucher aux autres en passant.

Sur le premier point que j'ai soulevé, la question de la recherche connexe, le ministre a affirmé, tout comme vous, qu'il y aura deux types d'activités qui seront soit prohibées soit réglementées: la procréation assistée et la recherche connexe. Pouvez-vous nous dire jusqu'où va la recherche connexe? Élaborons-nous ici un cadre destiné à réglementer les applications de la science génétique dans tout le domaine? J'ai l'impression que vous n'avez pas l'intention d'aller si loin. En matière de reproduction assistée, quelle est la définition de la recherche connexe, du moins en ce qui concerne le ministère?

M. Ian Shugart: Permettez-moi d'abord de souligner, monsieur Manning, que la méthodologie de présentation de votre liste est très appréciée. Au niveau de la procédure, nous pouvons nous y reporter avec les membres du comité.

De façon générale, je dirais que bon nombre des questions que vous avez soulevées seront abordées par les témoins qui viendront comparaître devant vous. En effet, nous avons peut-être des points de vue sur certains des sujets que vous avez abordés et serions disposés à les soumettre à l'étude du comité. Mais je crois que le comité aurait tout avantage à entendre ces propos directement des experts dans le domaine. Il pourrait y avoir des divergences d'opinions dans les témoignages, et il reviendrait alors au comité, dans l'exercice normal de ses fonctions, de porter des jugements sur des faits ou des interprétations divergents.

Nous serions très heureux de partager avec le comité le matériel dont nous disposons. Dans certains cas, cela pourrait prendre un certain temps puisqu'il faut compiler et préparer les documents conformément aux exigences du comité. Au fur et à mesure que vous étudiez cette ébauche de projet de loi, nous nous ferons un plaisir de revenir et de vous soumettre des mémoires.

En ce qui concerne la recherche connexe, le point de départ est le suivant: la portée du projet de loi s'étend aux produits, à savoir, les résultats de l'utilisation des techniques d'assistance à la procréation, qui sont en quelque sorte des embryons produits artificiellement, ou même les gamètes qui sont utilisés dans ce processus. D'emblée, donc, la portée du projet de loi est définie. Et vous avez tout à fait raison de dire que nous ne voulons pas dépasser ces limites.

• 1130

En fait, l'embryon, qui est créé à des fins de procréation assistée, peut générer des découvertes scientifiques qui ont des applications dans de nombreux domaines. Mais l'embryon ne constitue absolument pas l'unique objet de recherche de la génétique, par exemple, qui est à la fine pointe de la recherche biomédicale actuelle.

Pour l'instant, il est probablement impossible d'estimer avec certitude toute la gamme des applications ou des pistes potentielles qui pourraient découler de l'étude des cellules souches prélevées de l'embryon, par exemple.

Mais la loi peut permettre de veiller à ce que le traitement de l'embryon lui-même soit réglementé ou surveillé dans un certain sens par des mesures législatives et réglementaires.

Je crois que les applications du savoir tiré de l'embryon pourraient être classées selon trois grandes catégories.

La première serait l'étude du développement de l'être humain. Ce sont vraisemblablement les tous premiers stades du développement de l'organisme qui livrent le maximum d'information sur le développement de l'être humain. On pourrait dire que, au stade embryonnaire, ce développement est visible.

Voilà donc une application possible, et il en résulte une meilleure compréhension des mécanismes de développement des maladies. Quand on parle de cancer, par exemple, il est essentiellement question du niveau cellulaire, de la vie des cellules. Et si nous arrivons à comprendre les mécanismes du développement cellulaire aux stades les plus précoces, cela pourrait déboucher sur une meilleure compréhension du cancer et du développement de cette maladie, et ainsi de suite.

La deuxième catégorie d'applications est la connaissance des mécanismes de la fertilité et du développement de l'embryon puis, plus tard, du foetus, et ainsi de suite. Nous pouvons ainsi mieux comprendre les causes de l'avortement spontané qui, d'après les données de la médecine clinique, est beaucoup plus fréquent qu'on le croit, même dans la population féminine. Une connaissance accrue des mécanismes de la fertilité et de l'avortement spontané, voilà qui constitue la deuxième catégorie des retombées scientifiques.

La troisième catégorie est l'application de la recherche embryonnaire au traitement, ou aux manipulations au niveau cellulaire, ce qui aurait des retombées sur le traitement des maladies.

Voilà donc les trois grands domaines de recherche et les trois applications possibles de la recherche embryonnaire. Mais si l'embryon constitue—et j'essaierai de m'exprimer de la façon la plus neutre possible—une source abondante de renseignements sur ces mécanismes et sur la génétique, ils n'en sont absolument pas l'unique source.

M. Preston Manning: Je vous arrête, si vous me permettez, parce que mon temps de parole tire à sa fin.

J'ai une seule question à vous poser, j'en ai pour 30 secondes. Ma question porte sur ce point précis, c'est-à-dire l'utilisation du matériel embryonnaire, qui constitue un domaine de recherche connexe en matière d'assistance à la procréation. Prenons la recherche sur les cellules souches. Affirmez-vous que, si cette recherche utilise des embryons, elle serait visée par cette loi et exigerait une autorisation qui pourrait être délivrée, par exemple, par l'organisme de réglementation en question?

M. Ian Shugart: Oui.

M. Preston Manning: Mais si cette recherche porte sur des cellules souches provenant d'adultes, c'est-à-dire de sources non embryonnaires, à votre avis, cela tomberait-il à l'extérieur du champ d'application de ce projet de loi?

M. Ian Shugart: Oui.

Le principe est le suivant: Essentiellement, la procréation assistée consiste à créer un embryon. Voilà ce que circonscrit la mesure proposée.

Si nous ne savions pas que l'embryon peut être utilisé à des fins de recherche, le projet de loi n'aborderait peut-être pas la question de la recherche, et se limiterait aux pratiques de la procréation assistée. Or, nous savons qu'il y a des applications en recherche, que l'embryon constitue une source d'information scientifique, donc le traitement de l'embryon entre en ligne de compte.

• 1135

M. Preston Manning: Madame la présidente, j'en déduis que le comité devrait poser la question aux chercheurs qui oeuvrent dans le domaine des cellules souches, lorsqu'ils comparaîtront. Beaucoup de laboratoires travaillent à la fois avec des cellules souches embryonnaires et des cellules souches qui proviennent d'autres sources.

Comment cela peut-il fonctionner? Un laboratoire obtient une autorisation d'un organisme de réglementation, pour un volet de sa recherche, mais doit vraisemblablement procéder à l'autre volet de sa recherche sans autorisation, ou encore il doit obtenir une autorisation d'un autre organisme de réglementation. C'est bien la ligne de démarcation que vous fixez.

M. Ian Shugart: Oui. Il s'agit des activités qui découlent de la création de l'embryon. Il pourrait être utile pour le comité d'approfondir cette question avec la communauté scientifique. L'IRSC, par exemple, pourrait vous fournir des renseignements très solides sur cette question. Je vous suggère d'inviter des membres du groupe de travail spécial sur la recherche avec des cellules souches de l'IRSC.

Cet aspect est vaste et comprend la procédure d'autorisation de recherche avec des cellules souches. Il comprend le processus de revue de la recherche sur le plan de l'éthique dont j'ai parlé plus tôt, et les distinctions qui existent entre ce type de revue et l'examen par des comités de l'éthique en recherche au sein des centres de recherche à travers le Canada. Nous nous ferons un plaisir de prendre part à ces discussions.

La présidente: Merci beaucoup.

Merci, monsieur Manning. Vous avez dépassé de loin le temps de parole qui vous était alloué. En fait, vous l'avez triplée. Vous êtes très rusé. Je devrai vous surveiller.

La parole est à M. Dromisky.

M. Stan Dromisky (Thunder Bay—Atikokan, Lib.): Merci beaucoup.

Madame la présidente, avant d'aller plus loin, je veux une mise au point sur la maternité de substitution, car elle fait l'objet d'une section importante de ce projet de loi.

Si je comprends bien, la maternité de substitution est pratiquée à l'heure actuelle au pays. L'avant-projet de loi vise-t-il uniquement l'aspect financier de la question, c'est-à-dire la rétribution, en nature et autres, de ce service? En d'autres mots, la maternité de substitution est permise à condition qu'elle ne soit pas rétribuée. Est-ce exact?

M. Ian Shugart: Je crois que la notion s'étend au-delà de la rétribution pécuniaire. Je demanderais à Glenn de bien vouloir répondre à cette question.

Je crois, Glenn, que le terme employé est «rétribution»; peut-être pouvez-vous expliquer cela un peu.

M. Glenn Rivard (avocat général, Services juridiques, ministère de la Justice): Il est exact d'affirmer que les dispositions veulent interdire la maternité à visée commerciale. Conséquemment, s'il n'y a aucune rétribution pour cette maternité de substitution, l'interdiction ne s'applique pas. Le terme rétribution recouvre une notion plus large que le simple paiement. Il comprend également l'échange de services, et le paiement en nature.

M. Stan Dromisky: Ça ne répond toujours pas à ma question. Ce qui m'intéresse, c'est une autre forme de compensation. Supposons qu'un couple promette à une mère porteuse de lui faire don d'un appartement ou d'un condominium, ou encore de lui payer un voyage en Espagne en contrepartie de sa maternité. On peut payer de multiples façons.

Supposons qu'il n'y ait aucun versement en argent. À l'heure actuelle, une femme ou un couple infertiles peuvent avoir recours à une mère porteuse dans les cas où la femme ne peut porter l'enfant elle-même ou encore est sujette à des avortements spontanés. Je connais un cas où la soeur d'une femme incapable de porter un enfant a accepté de porter l'enfant et a donné naissance à un bébé en santé.

Aurons-nous un inspecteur qui examinera chaque situation? Je l'ignore. Je sais que nous y viendrons plus tard, mais votre réponse ne suffit pas à dissiper mes doutes. Le médecin sera payé. Il y a de l'argent en jeu. C'est une entreprise commerciale.

• 1140

M. Glenn Rivard: Je pourrais peut-être apporter une précision. S'il s'agit d'une entente altruiste, autrement dit si aucune rétribution n'est offerte à la mère porteuse, il n'y aura pas d'infraction à la loi.

Également, les personnes qui offrent leurs services professionnels à la mère porteuse ou au couple ne sont normalement pas visées par l'interdiction qui touche les intermédiaires. Par conséquent, si vous êtes un médecin qui fournit des services médicaux à une mère porteuse, ces services ne tombent pas sous le coup de cette interdiction. De la même façon, l'avocat qui conseille une mère porteuse ou le couple qui fait appel à elle au sujet des droits et obligations découlant de ce genre d'entente n'est pas considéré comme un intermédiaire. Aux termes du projet de loi, l'intermédiaire est la personne par l'entremise de laquelle un couple obtient les services d'une mère porteuse.

Les situations dont j'ai parlé ne sont pas visées par les interdictions que prévoit le règlement. Je suis convaincu que ces dispositions seront très efficaces pour poursuivre ceux qui pratiquent ce type de commerce. Ils ne pourront pas soustraire leurs activités à la loi et ces dispositions pourront être appliquées contre eux.

M. Stan Dromisky: Merci, madame la présidente.

Cela va sans doute nous donner beaucoup de travail, car un avocat habile s'amusera sans doute beaucoup avec certaines de ces dispositions. Nous allons donc devoir nous pencher plus tard sur ces questions.

La présidente: Merci, monsieur Dromisky.

La parole est à M. Merrifield.

M. Rob Merrifield (Yellowhead, AC): Comme l'a dit M. Dromisky, cela va nous poser un sérieux problème.

En examinant ce projet de loi et ce qui nous attend, je suis frappé de voir à quel point il y a chevauchement entre les champs de compétence des provinces et du gouvernement fédéral. Je prévois toutes sortes d'embûches, surtout en ce qui concerne les dispositions équivalentes et les répercussions que cela aura si les provinces décident de contester cette loi.

Pourriez-vous tout d'abord m'expliquer quelles pourraient être certaines de ces embûches et comment vous comptez les éviter?

M. Ian Shugart: Pour répondre précisément à votre question, monsieur Merrifield, il faudrait que je reconnaisse qu'il faut s'attendre à de nombreuses embûches. En réalité, les dispositions qui prévoient des accords d'équivalence remédieront à la situation si une province désire appliquer sa propre réglementation. C'est donc un mécanisme qui vise à faciliter une collaboration étroite dans ce domaine entre le gouvernement du Canada et les provinces.

Je dois préciser que le gouvernement se fonde sur ses pouvoirs en matière pénale pour légiférer dans ce domaine. C'est ce que disait par exemple la Commission Baird. Il s'agira de faire en sorte que l'exercice de ce pouvoir n'empiète pas sur un champ de responsabilité qui revient aux provinces. Si cette limite est bien respectée, il ne devrait y avoir aucun problème.

• 1145

Prenez par exemple l'interdiction du clonage. Le Canada peut légiférer pour interdire le clonage humain en vertu de ses pouvoirs en matière pénale, qui entrent dans le champ de compétence du Parlement. Le fait qu'aucune province n'ait cherché à légiférer dans ce domaine en est la preuve, dans une certaine mesure, étant donné que ces dispositions entrent dans le champ de compétence du gouvernement fédéral.

Nous allons devoir être très prudents en ce qui concerne les responsabilités des provinces sur les questions civiles ou locales, c'est-à-dire les établissements de santé, les hôpitaux, etc., ou même l'exercice de la médecine. Nous devons nous assurer que la réglementation qui sera mise en place régira les questions morales ou, dans le jargon du Code criminel, la moralité publique ou encore la santé et la sécurité et non pas l'exercice de la médecine. Si nous proposions des règlements qui s'écartaient de ce principe, nous aurions de la difficulté à les faire accepter par les provinces et les territoires. Ce serait d'ailleurs normal, car cela n'entre pas dans notre champ de compétence.

M. Ron Merrifield: À ce propos, je pourrais peut-être vous donner un exemple des problèmes que j'envisage. Je me trompe peut-être, mais il y a dans ce projet de loi une disposition où il est question de chimères, de la combinaison de matériels humain et animal pour créer quelque chose d'autre. Cela peut faire l'objet d'une autorisation. Qu'arrive-t-il si des provinces appliquent des dispositions équivalentes, mais que...?

De toute évidence, il s'agit d'une zone grise, mais ne pensez-vous pas que les critères en fonction desquels une autorisation est accordée peuvent différer d'une personne à l'autre ou qu'il pourrait y avoir certaines contestations à cet égard? Je m'inquiète à l'idée qu'on puisse autoriser ce genre d'activité, car cela ouvre la porte à toutes sortes de choses qui pourraient conduire à une situation extrêmement explosive.

M. Ian Shugart: Je comprends, mais ce sont là deux questions distinctes. Pour ce qui est des autorisations, il s'agit de voir si une activité est réglementée ou interdite, si elle est réglementée ou interdite par la loi.

Il s'agira de voir si cette activité doit être autorisée ou non, mais si cela figure ici c'est parce que cela tombe sous le coup des dispositions du Code criminel. Nous partons du principe que l'identité humaine n'est pas une identité animale, qu'il s'agit d'espèces différentes et que l'être humain est différent, qualitativement, de l'animal et qu'il ne faudrait pas mélanger les deux... Les détails pratiques et le potentiel d'application limitée au niveau cellulaire font qu'il s'agira d'une activité réglementée plutôt qu'interdite, mais c'est sur ce principe que repose l'interdiction. Au départ, c'est le code pénal qui permet d'affirmer que l'on ne doit pas autoriser à mélanger les animaux et les être humains.

S'il y a désaccord entre les provinces et le gouvernement du Canada sur une question de droit pénal, c'est le droit pénal, la compétence fédérale qui l'emporte. C'est ce que prévoit la Constitution.

Par conséquent, si l'on reconnaît qu'il s'agit d'une activité réglementée par le pouvoir en matière pénale, si une province veut autoriser les chimères, c'est cette loi qui prévaudra. C'est parce que le pouvoir en matière de droit pénal appartient au Parlement.

• 1150

Votre question laisse entendre qu'une province pourrait vouloir autoriser une activité, qu'il s'agisse de créer des chimères ou autre chose. Comment régler le problème? En fait, les accords portant sur les dispositions équivalentes visent à assurer l'équilibre entre deux objectifs. En premier lieu, ces dispositions équivalentes doivent dire la même chose. Il faut que nous nous entendions, à l'échelle du pays, sur des règles communes à l'égard de l'assistance à la procréation et c'est pourquoi nous parlons de disposition équivalente. Cette équivalence doit être fondamentale étant donné que, dans certains domaines ou à un moment donné, il faudra faire preuve d'une certaine souplesse.

En fin de compte, l'équivalence est une question de jugement. Ce sera une question de principe pour le gouvernement du Canada et les provinces. En pratique, nous discuterons ensemble des objectifs visés. Si ces objectifs sont les mêmes, nous devrions pouvoir nous entendre, mais s'ils ne sont pas exactement similaires, le ministre de la Santé devra décider s'il y a lieu ou non d'aller au Cabinet pour proposer un accord d'équivalence.

C'est une question de politique et de pouvoir. Cela doit se faire ouvertement et de façon transparente. Le gouvernement du Canada et la province auront à expliquer au public pourquoi ils font les choses différemment. Mais le gouvernement ne peut pas conclure d'accord d'équivalence si cela permet à la province d'aller dans une direction opposée à la sienne, car ce ne serait pas équivalent.

Il s'agit d'un domaine complexe. J'espère que cela servira au moins de point de départ.

M. Rob Merrifield: J'aurais beaucoup d'autres questions à poser, mais mon temps de parole est expiré.

La présidente: Merci, monsieur Merrifield.

Nous allons passer à M. Charbonneau.

[Français]

M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.): Madame la présidente, je voudrais demander à nos personnes ressources ce qu'elles nous suggèrent de répondre aux gens qui nous demandent pourquoi on ne peut pas interdire immédiatement le clonage humain, puisqu'il semble y avoir un consensus au point de départ là-dessus. Il n'y a personne qui préconise le clonage humain à ce qu'on sache. Pourquoi faut-il attendre encore un an ou un an et demi avant d'interdire cette pratique?

M. Ian Shugart: C'est évident, madame la présidente, qu'il existe, je pense, dans l'opinion du ministre, au Canada et partout dans le monde industrialisé, un consensus en ce qui concerne certaines pratiques relatives à la procréation assistée. Cependant, d'autres éléments ne sont pas si universellement acceptés. Ainsi, dans cette approche globale visant à regrouper dans une même loi toutes les provisions portant sur la procréation assistée, certains éléments sont très clairs, d'autres seraient un peu plus controversés. Il faut examiner l'ensemble de ces provisions. J'espère que le processus sera facilité par la considération de l'ensemble.

Il serait utile aussi, je pense, de prendre en considération les principes qui sont à la base de l'avant-projet de loi et qui jettent un éclairage sur les autres aspects. Par exemple, le principe de l'identité, le fait que l'être humain a sa propre nature et sa propre identité, s'applique au clonage humain, mais aussi à d'autres éléments de l'ensemble de notre proposition.

• 1155

M. Yvon Charbonneau: Voici une deuxième question: nous avons vu, la semaine dernière, le rapport d'une recherche qui informe que des embryons ont été constitués à partir du patrimoine génétique de deux mères et d'un père. Une mère a fourni les mitochondries à la mère qui a porté l'enfant.

Est-ce que Santé Canada a émis un avis sur cette question? Sous quel angle nous suggérez-vous d'analyser cette situation?

M. Ian Shugart: De temps à autre, je prends la liberté de référer quelques questions à mes collègues. Je pense que Francine pourrait répondre à la question de M. Charbonneau.

Mme Francine Manseau (analyste principale des politiques, Direction générale de la politique de la santé et des communications, Division des projets spéciaux, Santé Canada): Merci.

Santé Canada n'a pas émis de commentaire à ce sujet. Il demeure que dans l'avant-projet qui vous est présenté, il est certain qu'une telle procédure aurait été réglementée, c'est-à-dire que, pour qu'une clinique puisse manipuler des ovules de cette façon et insérer du matériel génétique venant d'une autre donneuse, il aurait fallu que ce soit réglementé. Je pense qu'il se serait certainement posé des questions de sécurité de la procédure comme telle. Je pense qu'il faut prendre aussi en considération le bien-être de l'enfant à venir. Ce serait certainement quelque chose qui aurait été réglementé par la législation.

M. Yvon Charbonneau: Réglementé plutôt que prohibé.

Mme Francine Manseau: Plutôt que prohibé comme tel.

M. Yvon Charbonneau: Est-ce que j'ai le temps de poser une troisième question? À partir de...

Mme Francine Manseau: Je pourrais peut-être ajouter qu'il demeure que la réglementation peut interdire certaines manipulations en vertu, par exemple, de questions d'éthique, de sécurité ou de santé qui justifieraient que ce soit interdit éventuellement.

M. Yvon Charbonneau: Quant à moi, je suis porté à analyser cette question que j'ai posée en me fondant sur le dernier «attendu» qui apparaît au préambule du projet de loi:

    reconnaît qu'il importe de préserver et de protéger l'individualité humaine et l'intégrité du génome humain,

Nous devrons donc analyser avec nos témoins ce qu'est, finalement, la définition de «l'intégrité du génome humain». Est-ce qu'un génome humain doit absolument refléter la contribution génétique d'un homme et d'une femme ou s'il est admissible de recevoir la contribution du patrimoine génétique de deux femmes, en l'occurrence. J'ai compris l'orientation de votre réponse. Nous aurons à revenir sur cette question.

Ma troisième question est reliée à l'échange que vous avez eu avec M. Manning à propos de la recherche. J'ai compris, monsieur Shugart, que vous répondez aux préoccupations de M. Manning. J'ai les mêmes préoccupations quant à l'extension à donner à cette question de recherche.

Vous avez répondu prudemment en disant: «lorsqu'il s'agit de la confection d'un embryon humain». Mais sa question de savoir si ça se fait à partir d'une cellule adulte. Vous avez formulé votre réponse dans les mêmes termes: «lorsqu'il s'agit d'un embryon humain».

S'il s'agit de tissu tiré du cordon ombilical, qui n'est pas un tissu adulte et qui n'est pas non plus le matériel premier, comment déterminez-vous le champ de recherche? Où est-ce que vous tirez vraiment la ligne? Ou bien, est-ce que vous nous dites carrément que ce sera à évaluer, que cela fait partie de ce qui doit être étudié par le comité, à savoir où tirer la ligne entre ce qui sera dans le champ de recherche visé par la réglementation et ce qui sera laissé à la discrétion d'autres organismes de réglementation, éventuellement.

Pourriez-vous revenir sur le sujet et l'approfondir, ou encore nous dire ce qu'on attend du comité? Quel est le type de recherche qui revient au comité là-dessus?

• 1200

M. Ian Shugart: Dans le cas que vous citez, monsieur Charbonneau, la source n'est pas l'embryon, c'est-à-dire que

[Traduction]

il y a diverses sources de cellules souches, mais les dispositions de l'avant-projet de loi sont centrées sur l'embryon.

[Français]

C'est l'embryon lui-même. Et le lien entre la recherche et l'objectif, le but, de cet avant-projet de loi, repose sur les activités, les techniques, pour créer un embryon, soit en vue de la procréation au départ ou pour la recherche à la suite de sa production pour la procréation.

Je souligne qu'il y a dans le projet de loi une disposition qui va à l'encontre de la création d'embryons pour des fins de recherche seulement. Ainsi, le lien est entre l'embryon comme source et, je le dis d'une manière plus précise, entre l'embryon comme source de cellules à des fins de recherche. Mais le but premier doit avoir été la procréation. Ainsi, les cellules provenant d'autres sources, comme dans l'exemple que vous donnez, n'entre pas dans la perspective de cet avant-projet de loi.

[Traduction]

La présidente: Merci, monsieur Charbonneau.

Madame Wasylycia-Leis, à vous la parole.

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Merci, madame la présidente.

Comme je n'étais pas là, la semaine dernière, pour le dépôt de l'avant-projet de loi et que je suis arrivée tard ce matin, excusez-moi si mes questions sont répétitives ou si les réponses sont évidentes.

Je voudrais m'attarder, quelques instants, sur la commercialisation des ovules et des spermatozoïdes humains. Si j'ai bien compris, il y a dans cette mesure des interdictions qui s'appliquent à la vente d'ovules et de spermatozoïdes humains.

M. Ian Shugart: Oui.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Mes questions sont donc les suivantes. Depuis la Commission royale d'enquête, nous nous sommes notamment inquiétés de tout ce qui se passe dans le domaine de la commercialisation des ovules et des spermatozoïdes humains. Je voudrais savoir dans quelle mesure nous intervenons trop tard et ce projet de loi va permettre d'interdire ce genre de chose vu tout ce qui se passe déjà. Voilà ma première question. Savons-nous quelle est l'ampleur de ces activités? Où elles ont lieu? Sur quelle base?

Deuxièmement, d'après les exemples déjà cités, il semble que cela se fait dans une large mesure sur Internet. Quelqu'un va inviter une jeune étudiante à donner des ovules si elle répond, bien entendu, à certaines exigences en ce qui concerne la race, le quotient intellectuel, les caractéristiques physiques et le reste. Dans quelle mesure est-il possible de réglementer ce genre de chose ou de faire respecter les interdictions? L'interdiction vise-t-elle la vente ou les intermédiaires qui tentent de recruter des vendeurs ou encore les deux? Quelle est la situation sur la scène internationale? Il est évident qu'il faut certaine... Ce commerce se pratique à l'échelle mondiale. Y a-t-il une norme internationale où des exemples de réglementation dans le monde qui peuvent être appliqués chez nous? Voilà le genre de questions que cela soulève.

M. Ian Shugart: Afin de ne pas oublier certaines questions pendant que je réponds aux premières, je vais demander à Glenn de répondre brièvement à votre question concernant Internet et à Rhonda, pour ce qui est de l'aspect international.

Vous avez raison de dire que le projet de loi part du principe que la commercialisation des fonctions reproductives et du matériel reproductif humain devrait être interdite.

• 1205

Pour ce qui est de ce qui se passe actuellement, nous nous ferons un plaisir de vous fournir, comme l'a suggéré M. Manning, des renseignements sur ce que nous savons à ce sujet. Si vous me permettez de faire une suggestion, vous pourriez également explorer la question avec la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada ainsi que la Société canadienne de fertilité et d'andrologie.

En fait, l'interdiction viserait ceux qui organisent une transaction commerciale de même que ceux qui participent à la transaction, ce qui nous semble être la bonne façon de tout couvrir. La seule exception à cet égard est que l'interdiction ne viserait pas la mère porteuse de la même façon. Elle s'appliquerait à ceux qui incitent, organisent ou annoncent ce type de transaction. Cela se rapporte à la question du... sur le plan de la politique sociale, nous craignons les répercussions négatives potentielles découlant de la vulnérabilité des gens.

À mon avis, si une certaine activité existe, il ne faudrait pas lier les mains de la société en ce qui concerne son interdiction. Si cette activité a lieu, du point de vue de l'application—Glenn parlera de la question de l'Internet—, il est possible d'y remédier. Il y a toujours la question des lacunes que pourraient présenter nos systèmes de réglementation et d'application, mais c'est vrai en ce qui concerne la police, la sécurité publique, la conduite professionnelle régie par les lois provinciales, etc. De façon générale, nous croyons que l'interdiction et la limitation de l'activité commerciale sont faisables. Allons-nous tout couvrir à 100 p. 100? Sans doute pas plus que pour toute autre activité réglementée ou interdite.

Glenn, vous pourriez peut-être parler d'Internet qui pose un défi technologique particulier, mais qui inclurait l'importation et l'exportation. Même s'il existe une barrière internationale, cela n'empêche pas en soi toute intervention.

Glenn.

M. Glenn Rivard: Oui, je vais parler brièvement d'Internet.

Bien entendu, les défis que pose l'application de la loi sur Internet outrepassent largement le cadre de cette question bien que, si vous examinez les décisions des tribunaux, ces derniers considèrent que l'utilisation de cette technologie ne crée pas une situation juridique différente. Il suffit de prendre la décision concernant Napster. Le fait d'avoir utilisé cette technologie n'a pas permis de justifier des atteintes aux droits d'auteur.

Pour prendre quelques exemples... Si l'une des activités—si quelqu'un offre d'acheter des spermatozoïdes sur Internet, quel que soit l'endroit du monde où cette offre est faite, elle est également faite au Canada. L'offre apparaît sur le réseau Internet au Canada et elle irait donc à l'encontre de la loi.

• 1210

C'est surtout un problème d'application. À toutes fins pratiques, vous pouvez appliquer la loi si l'intéressé se trouve au Canada. Par conséquent, si l'offre d'achat est faite au Canada, vous pouvez évidemment appliquer la loi, que cette offre ait été faite par l'entremise d'un journal ou d'Internet. Également, si le fournisseur de service Internet qui véhicule l'offre se trouve au Canada, vous pouvez appliquer la loi.

La présidente: Merci.

Mme Rhonda Ferderber (directrice, Division des projets spéciaux, Direction des politiques, de la planification et des priorités, Direction générale de la politique de la santé et des communications, Santé Canada): J'allais justement aborder la question de l'expérience internationale en ce qui concerne l'achat d'ovules ou de spermatozoïdes.

Il semble que les divers pays abordent la question de façon différente et qu'au Royaume-Uni les donneurs sont payés, même si le paiement n'est pas très important. Aux États-Unis, ces donneurs sont payés. À l'heure actuelle, l'Australie rembourse certaines dépenses. C'est un des domaines dans lesquels nous avons proposé que les donneurs puissent avoir droit à un remboursement de leurs dépenses, avec reçus, et que cela soit régi par le règlement.

Comme vous pouvez le voir, nous essayons de nous aligner sur les pratiques qui ont cours au Canada dans d'autres domaines liés aux dons d'organes et de tissu humains. Nous essayons donc d'en tenir compte.

M. Ian Shugart: J'ajouterais très brièvement, madame la présidente, que le ministre doit assister la semaine prochaine, je crois, à la réunion de l'Organisation mondiale de la santé. Il compte rencontrer plusieurs de ses homologues pour leur proposer que l'OMS entreprenne des travaux dans ce domaine afin d'assurer une meilleure uniformité à l'échelle internationale de façon à ce que certains pays ne servent pas de refuge pour l'exercice de certaines activités.

La présidente: Merci, madame Wasylycia-Leis.

La parole est à Mme Scherrer.

[Français]

Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.): Merci, madame.

Ce projet de loi, pour moi, remet vraiment plusieurs choses en question quand on parle de l'avancement de la science par opposition au respect de la personne humaine. Là où je me pose des questions—et je ne sais pas si vous allez être en mesure d'y répondre—, c'est lorsqu'on parle d'activités réglementées. Ces dernières ne me posent pas de problèmes, mais lorsqu'on parle, par exemple, d'actes prohibés, c'est différent. Je regarde l'avancement de la science depuis les 10 dernières années. Je regarde, par exemple, tout ce qui s'est fait au niveau de la transplantation de tissus d'animaux sur des êtres humains, de greffes de la peau, de toutes sortes de nouvelles méthodes qui, si on les avait prohibées ou si on avait retenu la science il y a 10 ans—on avait dit que jamais on ne transplanterait un coeur de cochon sur être un humain, que ce n'était pas correct—, n'auraient peut-être pas contribué à faire avancer la science. Certains actes prohibés m'agacent un peu en ce sens que je me demande si on ne limite pas la science en disant, par exemple, que nul ne peut sciemment modifier le génome d'une cellule d'un être humain ou d'un embryon in vitro de manière à rendre la modification transmissible aux descendants de celui-ci.

Quand on sait que les recherches qui se font actuellement sur les génomes ne sont pas faites pour la commercialisation, mais pour améliorer la race, pour essayer, parfois, de faire une modification génétique pour permettre, par exemple, que certaines maladies ne soient pas transmissibles, est-ce qu'on ne se limite pas? Ne se dit-on pas plutôt qu'on en est rendu là en l'an 2 000 et ne faudrait-il pas garder une certaine ouverture en se disant qu'il y a de l'amélioration pour le genre humain et que ça passe probablement par l'utilisation d'embryons? Je suis tout à fait d'accord pour que l'on banisse le volet de la commercialisation de façon générale, mais lorsqu'on encadre un peu la science, qui pourrait peut-être, je pense, venir nous aider à vraiment améliorer notre sort ou à faire disparaître des maladies génétiques ou des choses comme ça, ça m'agace un peu. Est-ce qu'il y aura vraiment autre chose au niveau de la science qui pourra les contrôler ou est-ce qu'on ne se limite pas? J'aimerais juste que vous commentiez cela.

M. Ian Shugart: La question que vous soulevez, madame Scherrer, est capitale pour tout ce qui touche à l'exercice dont il est ici question. Le nexus entre la science et les principes d'éthique qui gouvernent la science est exactement ce que vous avez défini. Oui, la réponse simple: on limite la poursuite de certaines sciences par la prohibition. Il est évident qu'une des choses importantes devant retenir l'attention du comité, c'est l'établissement de lignes entre ce qui est prohibé et les activités contrôlées. Le comité entendra plusieurs présentations sur l'éventail d'opinions quant à l'établissement de telles lignes.

• 1215

[Traduction]

Néanmoins, le projet de loi reflète clairement le principe voulant que la science ne puisse échapper à la surveillance de la société civile. Le préambule n'énonce peut-être pas tous les principes qui s'appliquent à cette question, mais il définit certaines des limites des activités scientifiques. Vous constaterez sans doute, lorsque d'éminents chercheurs comparaîtront devant le comité, qu'ils ne verront aucune objection à se soumettre à l'interdiction de certains types d'activités. Ces limites se situent tant du côté de la santé et de la sécurité que du côté de la morale.

Quand je travaillais à l'ancienne direction générale de la protection de la santé, je me souviens d'avoir entendu un chercheur international très éminent parler de la xéno-transplantation,

[Français]

comme vous l'avez dit, la transplantation de tissus d'animaux dans le corps humain.

[Traduction]

Son équipe et lui étaient convaincus qu'il existait des solutions techniques aux problèmes du rejet et de l'adaptation de ces tissus, mais il était tout aussi convaincu que ces solutions ne devaient pas être appliquées tant qu'elles n'auraient pas fait l'objet de discussions publiques. Je crois que c'est ce que nous faisons maintenant.

Je n'ai donc pas de difficulté à reconnaître qu'effectivement nous limitons ce que la science peut faire, mais ce sera au Parlement qu'il reviendra de dire, après mûre réflexion, quelles devraient être les limites et pour quels motifs.

La présidente: Merci, madame Scherrer.

Monsieur Manning, avez-vous quelque chose à ajouter?

M. Preston Manning: Ma question concerne également la dimension sociale, morale et éthique. Le ministère a-t-il reçu des instances ou eu des discussions avec les éthiciens, par exemple, au sujet du projet de loi précédent, le projet de loi C-47, pour entendre leurs préoccupations ou leurs suggestions à l'égard de ce genre de loi? Si c'est le cas, y a-t-il une question en particulier que les éthiciens vous ont recommandé d'examiner avec prudence ou d'inclure dans ce projet de loi?

M. Ian Shugart: Je vais demander à Rhonda de vous répondre, monsieur Manning, mais je crois qu'en ce qui concerne la recherche sur les embryons, la plupart des éthiciens—et bien entendu, en plus de les consulter directement, nous nous tenons au courant de l'état de la recherche—diront que les divergences de vues portent sur le statut moral de l'embryon.

• 1220

Vous avez, à une extrême—et j'essaie d'être le plus neutre possible—ceux qui disent que l'embryon n'a droit à aucun statut moral particulier. Ce n'est qu'une masse de tissus ou de cellules qui commencent seulement à se développer. À l'autre extrême, vous avez ceux qui considèrent que l'embryon est un être humain à part entière. Entre les deux se situent les personnes qui veulent accorder à l'embryon un statut moral spécial estimant qu'il ne s'agit pas de simples tissus, mais pas encore d'un être humain. C'est dans cette zone intermédiaire qu'il faut veiller soigneusement à traiter l'embryon en tenant compte des avantages que son utilisation appropriée pourrait avoir pour la société humaine.

D'un point de vue éthique, c'est ce qui a servi de départ aux discussions, mais pour ce qui est des interactions... Rhonda ne vous en donnera pas une liste exhaustive, mais elle va vous décrire, dans les grandes lignes, les consultations que nous avons eues.

Mme Rhonda Ferderber: Au cours des années, depuis le projet de loi C-47, et en fait depuis la commission royale, le ministère a tenu, à plusieurs reprises, des consultations très concrètes. Nous recevons, bien entendu, une correspondance régulière dans laquelle les chercheurs nous font part de leurs opinions, de leurs points de vue et de leurs observations sur ce qu'ils ont appris par les médias ou autrement.

Au cours de l'hiver 2000, nous avons eu des discussions très approfondies sur les propositions que nous comptions formuler. Dans la documentation que vous avez reçue, vous trouverez le manuel dont nous nous sommes servis pour ces discussions de même qu'un aperçu général de la rétroaction que nous avons obtenue des représentants des provinces et des territoires que nous avons rencontrés ainsi que des parties prenantes.

Les parties prenantes à qui nous avons parlé et à qui nous avons demandé des mémoires comprenaient un grand nombre de groupes confessionnels. Vous en trouverez la liste à la fin du document. De nombreuses personnes et, bien entendu, les experts et les éthiciens qui étudient la question se sont montrés très généreux de leur temps et ils nous ont remis des mémoires très complets dans lesquels ils expliquaient leur position, etc. Nous avons évidemment lu tout cela très attentivement pour finaliser la proposition qui vous est soumise aujourd'hui.

Nous avons régulièrement l'occasion de rencontrer des gens qui veulent nous parler et nous donner leur opinion. Nous avons pu prendre connaissance des publications sur le sujet. Patricia Baird nous a écrit assez souvent en nous donnant parfois des exemples de discours qu'elle comptait faire.

Nous avons donc obtenu, régulièrement, l'avis d'un groupe d'experts et en tout cas des éthiciens.

M. Preston Manning: C'est un sujet dont nous pourrions discuter longtemps, mais je voudrais vous poser une autre question étant donné que, pour le moment, nous essayons simplement d'obtenir un aperçu général.

Lorsqu'on parle de modèles de réglementation, je me demande si le ministère et le ministre font vraiment la distinction entre les règlements quasi-judiciaires et les règlements administratifs. En écoutant le ministre, j'ai eu l'impression que non. Il a parlé d'un organisme de réglementation—peut-être de l'extérieur—qui serait représentatif. C'est une façon de procéder. Les différents groupes d'intervenants y sont représentés et vous essayez de concilier les points de vue divergents.

N'y a-t-il pas une autre solution qui consiste à avoir un organisme de réglementation composé de personnes qui sont surtout là en raison de leur capacité de jugement? Elles n'ont pas de liens particuliers avec les divers groupes d'intérêts, mais elles se trouvent devant une structure qui permet aux divers intérêts d'être représentés adéquatement. C'est un modèle assez différent. L'organisme de réglementation n'est pas représentatif en soi. Il s'apparente plutôt à un tribunal.

• 1225

J'ai été consultant en gestion. J'ai beaucoup travaillé dans le domaine des services publics réglementés au niveau provincial. Bien entendu, une commission de services publics provinciale est une entité quasi-judiciaire. En Alberta, elle a pratiquement le même statut juridique que la Cour suprême de l'Alberta.

Je me demande si votre modèle de réglementation établit suffisamment la distinction entre les deux types d'organismes de réglementation, si vous avez des modèles quasi-judiciaires et si vous pensez qu'il faudrait également envisager cette formule.

M. Ian Shugart: C'est une question sur laquelle nous pourrions passer beaucoup de temps à envisager tous les types d'organismes possibles en discutant du pour et du contre de chacun. Nous nous ferons un plaisir de vous aider à cet égard. En ce qui nous concerne, nous allons certainement examiner les divers modèles possibles et je crois que le comité voudra sans doute en faire autant, à commencer par les modèles internationaux. Il n'y en a pas beaucoup, mais le Royaume-Uni, par exemple, a maintenant un modèle assez mûr dont il serait assez facile de voir les avantages et les inconvénients.

Encore une fois, les fonctions que j'ai mentionnées ne représentent qu'un point de départ. La délivrance des autorisations et le processus décisionnel qui s'y rapporte englobent un type d'activité de réglementation différent de la simple tenue de registres d'information, des garanties concernant la protection de la vie privée, et de ce genre de choses. Cela diffère également de la surveillance de la recherche scientifique, des conseils politiques donnés au gouvernement concernant les changements dans la réglementation, et ainsi de suite.

Par conséquent, quel que soit le mécanisme qui sera mis en place, il faudra qu'il remplisse adéquatement ces fonctions différentes.

Nous pouvons utiliser divers modèles pour faire en sorte que les responsables de la réglementation, ceux qui exerceront leur jugement et accorderont une autorisation, par exemple, auront accès à des conseils et des avis judicieux. Une solution serait certainement d'établir un conseil consultatif qui fonctionnerait de façon transparente, mais qui fournirait des conseils indépendants quant aux décisions à prendre sur le plan de la réglementation. Si ce modèle est choisi, il peut présenter plusieurs variantes. Comme vous l'avez dit, vous pourriez nommer à ce conseil des personnes d'une grande sagesse qui auraient elles-mêmes accès à des points de vue différents ou encore, ce conseil pourrait représenter les diverses parties prenantes.

Le modèle du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes permet lui aussi de nommer des commissaires dont la représentativité pourrait être décidée à l'avance ou pas. Ces commissaires coordonnent l'activité de réglementation et forment une entité quasi-judiciaire.

Il y a toute une gamme de modèles parmi lesquels on peut choisir et des variations du même modèle. Glenn nous expliquait avant la séance d'aujourd'hui qu'il existe toute une gamme de ces instances et qu'aucune formule unique n'a été suivie. Ce sont les fonctions spécifiques et les circonstances de sa formation, de même que le contexte dans lequel l'instance doit oeuvrer, qui ont été les facteurs ayant mené au choix de tels modèles. Donc, tout est permis.

• 1230

Le ministre était sincère lorsqu'il a dit qu'en même temps qu'il voulait consulter la population, il voulait vraiment savoir ce qu'en pensait le comité. Il a dit en conférence de presse l'autre jour qu'il préférait personnellement un mécanisme de réglementation indépendant plutôt qu'interne, mais rien n'est encore décidé.

La présidente: Merci.

Monsieur Merrifield, avez-vous une autre question?

M. Rob Merrifield: En effet, j'en ai une.

Lorsque l'on songe à toute la dynamique et à l'envergure de l'enjeu pour le Canada, on a l'impression que notre réflexion pourra se poursuivre pendant des années, du moins si on regarde l'inventaire de ce qui se fait actuellement. Le problème est-il à ce point énorme? Jusqu'où va-t-il? Je vais beaucoup plus loin que ce que laissait entendre M. Charbonneau: dans le cas du clonage, pourquoi ne pas l'interdire d'ores et déjà, plutôt qu'attendre la fin de notre réflexion? De plus, même si le projet de loi mentionne la continuation de certaines activités, il faut comprendre que certains événements pourraient influer sur l'issue de notre examen de ce projet de loi.

L'ampleur du problème me préoccupe. Est-ce que nous avons vraiment cerné son ampleur? Y a-t-il déjà des activités de clonage qui se feraient à notre insu? Que ferions-nous si le clonage s'effectuait déjà cette année au Canada? Permettrions-nous que cette activité soit maintenue?

M. Ian Shugart: L'individu issu—si j'ose dire—serait dès lors considéré comme unique. Nous ne pouvons tout prédire ni savoir avec certitude tout ce qui se passe actuellement. Toutefois, des lois sont parfois promulguées parce que certaines activités se passent dans une société qui décide qu'elles ne devraient pas se produire ou qu'elles devraient être circonscrites. Il ne fait aucun doute que cet avant-projet de loi se propose d'imposer de nouvelles restrictions dans un domaine extrêmement actif depuis déjà un certain temps. J'en veux, pour preuve, l'établissement de registres d'information, registres qui n'existent actuellement pas. On ne peut pas revenir en arrière et tout reprendre à zéro, mais à partir du moment où la loi sera promulguée, on pourra exiger que les enfants issus de ces techniques aient le droit de connaître leur passé biomédical.

Vous entendrez beaucoup parler de ce qui se fait actuellement, je n'en ai aucun doute. Il vous faudra donc notamment confronter le bien-fondé de nos propositions législatives à la réalité dont on vous fera part. Mais en tant que ministère, du mieux que l'on puisse faire nous avons présenté des propositions qui, à notre avis, correspondent le mieux possible à ce qui se fait actuellement dans le domaine.

L'une des raisons pour lesquelles, comme je l'ai mentionné, nous avons traité toutes ces questions ensemble, c'est que les principes sur lesquels elles reposent peuvent sembler s'appliquer de façon généralisée. Autrement dit, le principe selon lequel on doit interdire le clonage humain s'applique aussi à d'autres activités.

De plus, il faut savoir utiliser de façon efficace le temps des parlementaires et savoir manoeuvrer de façon optimale dans la procédure parlementaire, et c'est pourquoi il ne faut pas aborder cette question fondamentale au cas par cas. Les travaux effectués à ce jour sont prêts à porter fruit et nous permettent d'avancer en proposant des mesures d'ordre général. Toutefois, vous entendrez peut-être parler d'activités qui pourraient être frappées d'interdiction par les dispositions de l'avant-projet de loi mais que vous, comme parlementaires, pourriez décider de ne pas interdire. Ou, au contraire, certaines activités devraient peut-être être interdites, à votre avis, ou mieux réglementées.

• 1235

C'est ce que vos consultations permettront d'établir. Mais ce n'est pas parce que c'est un domaine qui a une existence propre qu'il ne faut pas tenter d'interdire certaines activités.

M. Glenn Rivard: Me permettez-vous d'ajouter quelque chose au sujet de l'article 43 qui traite de la continuation des activités? Cet article ne s'applique qu'aux activités réglementées, de sorte que l'interdiction de clonage entrerait en vigueur dès la promulgation de la loi.

M. Rob Merrifield: Et l'utilisation des embryons à des fins de recherche?

M. Glenn Rivard: L'interdiction de créer des embryons à des fins de recherche entrera en vigueur dès le jour où la loi sera promulguée. Les activités de recherche déjà en cours pourraient être maintenues. Si nous avons inclus la disposition sur le maintien des activités, c'est simplement pour reconnaître que la loi pourrait entrer en vigueur avant que les règlements ne soient prêts. Cela nous donnerait un certain temps pour élaborer les règlements. Une fois ceux-ci élaborés, toute activité réglementée, y compris les activités déjà en cours, devrait alors se conformer aux règlements.

M. Rob Merrifield: Je comprends. J'espère simplement que c'est la loi ou les règlements et le cadre législatif qui porteront fruit et rien d'autre.

M. Preston Manning: Mais d'ici à ce que nous ayons terminé l'étude du projet de loi, la disposition relative aux droits acquis s'appliquera peut-être à quelque chose de tout à fait différent...

Des voix: Oh, oh!

La présidente: Madame Scherrer.

[Français]

Mme Hélène Scherrer: J'ai encore deux petites questions qui touchent probablement le domaine juridique.

Lorsque M. Rock est venu présenter le projet la dernière fois, une question lui a été posée à laquelle on a répondu assez rapidement. J'aimerais qu'on puisse y revenir pendant quelques minutes. Je parle de la définition d'un être humain, par exemple. Je sais qu'on parle de procréation assistée, qu'on ne parle pas d'interaction entre deux individus, qu'on parle de quelque chose qui se passe dans un laboratoire, mais à un moment précis, quelque part, on va devoir dire qu'il y a un ovule, un spermatozoïde, et reconnaître qu'à une date donnée ou à un moment donné, il y a un être qui devient un être humain. Est-ce qu'il aura été transplanté? Est-ce qu'il sera toujours en laboratoire? Est-ce que ça ne risque pas de poser des problèmes légaux? Cette définition, à ce moment-là, ne viendra-t-elle pas s'ajouter à la loi qui touche l'avortement, si on met le bouchon sur l'éprouvette trop rapidement ou si on ouvre la porte du frigo au moment où ça devient un être vivant? Je sais qu'il y a des définitions. Il y a des définitions, par exemple, au niveau d'un embryon. Quelle sera l'implication juridique? Ce n'est pas évident non plus.

M. Glenn Rivard: Il n'y a pas de définition d'un être humain dans le projet de loi. Il y a des définitions de l'embryon in vitro, lorsque l'embryon est un foetus, mais il n'y en a pas pour l'être humain. Alors, à mon avis, il n'y a pas d'implication pour d'autres questions, comme l'avortement, par exemple.

Mme Hélène Scherrer: Mais il reste que ces procédures qu'on va mettre de l'avant sont des procédures pour venir en aide à des femmes qui veulent aussi procréer. Il faut penser que les méthodes pour aider la procréation font en sorte que, j'ose l'espérer, ça va déboucher sur un être humain. Alors, est-ce que ce projet de loi se rend jusque-là et, à partir du moment où on va parler d'être humain, ce n'est plus dans ce projet de loi, ça ne touche pas ce projet de loi? Est-ce qu'on ne frise pas, quelque part... L'objectif du projet de loi est de venir en aide à des femmes qui désirent carrément procréer?

[Traduction]

Vous pouvez répondre en anglais.

M. Glenn Rivard: On a beaucoup discuté des embryons, mais si vous regardez le projet de loi de près, vous constaterez que la plupart des dispositions traitent de l'embryon in vitro, c'est-à-dire avant qu'il ne soit transplanté dans le corps d'une femme. Voilà qui restreint sensiblement la portée de la mesure. Une fois la femme inséminée, la loi ne s'applique plus. Elle ne vise en aucune manière la relation qui existe, par exemple, entre la femme enceinte et son médecin et n'aborde en aucune façon la naissance et les autres domaines connexes.

• 1240

[Français]

Mme Hélène Scherrer: Oui, mais je veux quand même revenir là-dessus. Est-ce qu'on ne parlera d'êtres humains qu'au moment où il y aura eu transplantation?

[Traduction]

M. Glenn Rivard: Non...

[Français]

Mme Hélène Scherrer: D'êtres vivants seulement après la transplantation?

[Traduction]

M. Glenn Rivard: Le projet de loi traite des embryons in vitro; ce sont les termes utilisés.

[Français]

Mme Hélène Scherrer: Pas un être vivant?

[Traduction]

M. Glenn Rivard: Non.

[Français]

Mme Hélène Scherrer: Oui. D'accord.

M. Yvon Charbonneau: Mes questions ont pour but de nous amener à bien comprendre la portée de l'avant-projet de loi, ce qu'il prétend ou veut couvrir et ce qu'il laisse à découvert. C'est aussi le sens des questions de ma collègue.

Au fur et à mesure des réponses, on a l'impression, finalement, que la portée du projet de loi est, d'une certaine manière, assez étroite, c'est-à-dire qu'on parle de fécondation in vitro. Si c'est autre chose, ce n'est pas couvert. Si c'est après 14 jours, ce n'est pas couvert. S'il s'agit d'embryons déjà conçus non pas aux seules fins de la recherche, mais conçus, je dirais, de surcroît, pour ce dont on a immédiatement besoin, oui, alors on peut faire de la recherche.

On ne peut pas faire de la recherche, cependant... Enfin, ce n'est pas l'objet du projet de loi de réglementer la recherche qui pourrait mener à la production d'un embryon, puisque la recherche dont il s'agit ici, à ce que j'ai compris, ne porterait que sur des embryons créés en surplus, dirais-je. Donc, la recherche sur des méthodes pour en arriver à créer un embryon ne serait pas couverte.

J'essaie de voir exactement la portée du projet de loi et je cherche où sont les portes d'entrée sur la question de la recherche. Où trouve-t-on, dans le projet de loi, le sujet de recherche. Je n'arrive pas à le trouver.

Quant à l'organisme réglementaire, où est-il question, dans le projet de loi, de sa mise en place? Devrions-nous penser, nous du comité, à écrire un nouveau chapitre qui n'est pas prévu? Ou bien, où est-il prévu dans le projet de loi?

M. Ian Shugart: Je demanderai à Francine Manseau d'ajouter ses propres commentaires, mais vous avez bien raison; le point central porte sur les activités qui ont pour but et pour conséquence la procréation assistée. C'est le cadre du projet de loi.

Est-ce que d'autres questions sont liées, d'une manière ou d'une autre, à cette question? C'est bien possible, mais ce qui confère la cohérence à ce projet de loi, c'est la procréation assistée, c'est-à-dire la production, la création d'un embryon humain in vitro en vue de la reproduction ou de la procréation.

Cet embryon peut avoir d'autres utilisations, soit à des fins de la recherche, mais c'est une conséquence de la production de cet embryon.

Francine, veux-tu ajouter quelque chose?

Mme Francine Manseau: Oui. Pour ce qui est de vous référer au projet de loi comme tel pour savoir quel domaine est couvert, on peut consulter la section 8 du projet de loi, qui porte sur les activités réglementées et délimite assez bien le champ d'action.

• 1245

À la première question, ici on répond en disant que ce qui peut être réglementé, c'est toute activité—modification, manipulation, traitement— conforme au matériel reproductif humain, donc, à des embryons, des ovules ou encore du sperme. Donc, cela touche à toute manipulation qui est faite par une tierce partie et à l'extérieur du corps d'une femme dans le but de créer un embryon pour faciliter la reproduction.

Dans le deuxième, on parle de la recherche. Ce qui est encadré dans la législation, c'est la recherche qui va utiliser tout un embryon, ou une partie d'embryon, in vitro. Donc, c'est un embryon qui est encore à l'extérieur du corps de la femme. Donc tout ce qu'on fait au niveau de la recherche va être, à ce moment-là, réglementé.

Et le troisième, c'est tout ce qui a trait à la collection—prélever, conserver, importer, exporter—des ovules, du sperme ou un embryon in vitro. Donc, cela a trait à la manipulation par une tierce partie pour, finalement, créer un embryon. Dès que cet embryon est transféré dans le corps d'une femme, on n'est plus présents.

L'utilisation des embryons qui ne sont pas transférés, qui sont des surplus, qui sont congelés, à des fins de recherche serait couverte, et la recherche devrait se faire dans les 14 premiers jours de développement de l'embryon, limite reconnue au niveau international. Ce genre d'opération est couvert vraiment en détail dans la section 8 de la législation.

M. Yvon Charbonneau: Et la porte d'entrée pour l'organisme réglementaire, où se trouve-t-elle?

Mme Francine Manseau: En ce moment, dans le cadre de cette législation, l'autorité est confiée au ministre. M. Rivard pourra me reprendre, mais elle est confiée, finalement, au ministre de la Santé. Cependant, le ministre de la Santé pourrait choisir si, par exemple, un organisme était créé à l'extérieur du ministère, de lui déléguer cette autorité, et celui-ci aurait, à ce moment-là, la responsabilité de mettre la législation en application. Je crois que si un tel organisme était créé en dehors du ministère, il devrait exister une législation connexe pour clairement l'indiquer. En ce moment, l'autorité est entre les mains du ministre et, indirectement, à l'intérieur du ministère.

M. Yvon Charbonneau: C'est l'article 12 alors, le paragraphe 12.(1).

Mme Francine Manseau: Le paragraphe 12.(1)? D'une certaine façon, oui. C'est une responsabilité qui est donnée au ministre.

[Traduction]

M. Glenn Rivard: Le libellé actuel prévoit que les décisions sont toutes prises par le ministre; autrement dit, les conseils dans ce domaine seraient donnés par le ministère de la Santé et la mise en oeuvre sera entreprise par celui-ci. Si vous recommandiez la mise sur pied d'une agence indépendante et que le gouvernement accepte la recommandation, il faudrait rajouter des dispositions supplémentaires au projet de loi.

La présidente: Puis-je vous interrompre, monsieur Charbonneau? J'avais cru comprendre qu'il s'agissait ici uniquement d'un avant-projet de loi. Si nous faisons connaître au ministre notre préférence pour une instance extérieure qu'il accepte notre conseil, cela pourrait être intégré au véritable projet de loi, celui qui porterait un numéro.

M. Glenn Rivard: En effet.

M. Ian Shugart: C'est cela.

La présidente: Dans ce cas, il ne serait pas nécessaire d'avoir une autre mesure législative. Il suffirait de corriger celle-ci pour tenir compte de notre décision finale.

M. Glenn Rivard: C'est exact; il faudrait simplement ajouter d'autres dispositions à cette mesure législative-ci.

M. Yvon Charbonneau: Des dispositions supplémentaires.

La présidente: Oui, mais pas rédiger une autre mesure législative. Il suffirait d'inscrire dans l'avant-projet de loi une disposition habilitante.

M. Yvon Charbonneau: Par exemple, au paragraphe 12(1).

La présidente: Ce serait sans doute dans ce paragraphe-là. Mais nous sommes dans une situation où nous devons réfléchir aux grands enjeux et faire des recommandations.

M. Yvon Charbonneau: Je voulais simplement retracer le progéniteur de cet organisme qui sera créé.

La présidente: Monsieur Charbonneau, vous êtes vraiment pris par votre sujet.

[Français]

M. Ian Shugart: Sur le génome réglementaire, l'autorité revient aussi, en fin de compte, au ministre. Comme ministre de la Santé, il a l'autorité de promulguer des règlements, nonobstant le moyen de

[Traduction]

d'assurer la surveillance de ceux-ci

[Français]

et le renforcement des règlements.

• 1250

M. Yvon Charbonneau: Pour aujourd'hui.

Vous avez mentionné, monsieur Shugart, dans les fonctions de l'organisme réglementaire, quatre de ces fonctions dont j'ai pris note: l'émission de permis, la tenue de registres, le développement de la politique et une autre touchant les communications et la formation. Pourquoi cette fonction de réglementation de la recherche n'est-elle pas aussi mentionnée? C'est-à-dire que cet organisme va aussi réglementer le développement de la recherche en la matière. Ce pourrait être une fonction explicitement mentionnée aussi?

M. Ian Shugart: C'est une application de la fonction, un domaine où la fonction sera appliquée, mise en oeuvre. C'est-à-dire que les autorisations qui sont émises par l'autorité s'appliquent à la recherche.

M. Yvon Charbonneau: Merci.

[Traduction]

La présidente: Madame Scherrer a une courte question.

Y a-t-il quelqu'un d'autre de ce côté-ci qui veut poser une question?

[Français]

Mme Hélène Scherrer: Concernant justement des registres d'information, je voudrais être bien certaine d'avoir compris quelle était la recommandation à l'étape de l'ébauche du projet de loi. On dit que ces registres vont pouvoir être consultés. Est-ce que la personne ou l'être humain qui sera né d'une telle manipulation va avoir un papa et une maman enregistrés sur un disque dur quelque part et va-t-il pouvoir apprendre de quoi ils avaient l'air ou d'autres choses de ce genre? On en est là. Tu effaces tout quand tu ne veux plus le savoir, etc.

Est-ce que, effectivement, ces renseignements vont être disponibles au moment où il deviendra essentiel pour un enfant de connaître ses origines et son bagage génétique? Est-ce que ce sera facilement disponible ou est-ce que ce sera vraiment...?

D'un autre côté, si c'est très facilement accessible, est-ce qu'il ne se pose pas un problème majeur de confidentialité en quelque sorte? Quelle est la première recommandation actuellement contenue dans l'ébauche?

Mme Francine Manseau: Il y a toute une section dans la législation qui a trait à la divulgation des renseignements, à ce qui sera permis ou non. Il est certain que dans l'exemple dont vous parlez, celui d'un enfant qui serait né d'un don de sperme, d'ovule ou d'embryon, on considère ici que l'enfant et ses parents devraient avoir accès à de l'information médicale et génétique sur le donneur, non pas sur l'identité du donneur, sauf si le donneur a donné son accord là-dessus.

Mais l'enfant devrait avoir accès à l'information de base. Les règlements détermineront aussi quels types de renseignements pourront être accumulés. Il est nécessaire qu'un individu connaisse ce qui a trait à sa propre santé.

Maintenant, il se peut que d'autres personnes aient accès à un certain type d'information, par exemple, le succès ou, selon le terme anglais, l'outcome» de toutes ces procédures. Souvent, cette information peut être importante pour les gens qui font de la recherche, par exemple, l'information relative aux conséquences d'une manipulation. Le projet de loi est assez spécifique quant au type d'information qui pourrait être transmise aux chercheurs, mais là encore, jamais l'identité des personnes ne pourrait être dévoilée.

Mme Hélène Scherrer: Je veux revenir justement sur l'identité des personnes. Quand on voit tout ce qui se passe actuellement dans le domaine de l'adoption, quand on voit comment on a protégé tous ces renseignements dans le passé et qu'on assiste aujourd'hui à un tel revirement où tout le monde veut savoir qui était papa et qui était maman, je me dis qu'il va falloir en tenir compte. Autrefois, l'adoption était quelque chose de caché. On ne révélait pas qui était la mère et le père biologiques. Maintenant les jeunes veulent le savoir et les parents veulent aussi voir leurs enfants.

Il va falloir vivre également avec cette réalité. Bon, on ne met pas d'interdit au départ, mais il va falloir se dire que si, oui, papa et maman sont un élément d'un disque dur, éventuellement, ces gens-là vont vouloir être réunis. Que ce soit à partir d'un sperme ou d'une relation sexuelle entre deux personnes, il reste qu'un enfant sera né de cette personne.

Mme Francine Manseau: Vos commentaires sont très justes et je pense que si le comité reçoit des parents et même des enfants issus de ces dons de sperme, la question sera certainement soulevée. Il n'y a pas de doute. Nous en avons entendu aussi. Alors, il est effectivement délicat de savoir jusqu'à quel point on peut permettre quoi.

Je pense que tout le processus des dons de sperme en est peut-être au point où en était l'adoption il y a peut-être 20 ans.

• 1255

Ce qui est surprenant aussi, c'est que de nombreux parents ne disent pas à leur enfant qu'ils sont issus d'un don. C'est très fréquent encore. Donc, ce sont des questions très pertinentes. Je pense que le comité va certainement entendre des gens qui y sont confrontés, et il aura à y réfléchir.

[Traduction]

La présidente: Merci beaucoup, madame Scherrer; je remercie aussi tous mes collègues d'avoir posé des questions si intéressantes et si variées.

Merci également aux représentants du ministère de la Santé qui sont obligés d'être généralistes et d'en savoir un peu sur à peu près tout. J'imagine que nous pourrions poser les mêmes questions aux témoins qui se spécialisent dans des domaines plus restreints pour obtenir des réponses plus détaillées. Mais je crois que l'exposé d'aujourd'hui constituait un excellent survol. Merci, donc, à Mme Ferderber, à M. Shugart, à Mme Manseau, et à M. Glen Rivard.

M. Preston Manning: J'aimerais aborder une dernière question qui intéresse les membres du comité. Madame la présidente, je ne sais pas quelles règles de procédure vous suivez en pareil cas, mais ne croyez-vous pas que lors d'un exposé comme celui-ci, il pourrait être utile aux membres du comité de se garder une vingtaine de minutes à la fin de la séance pour discuter en collégialité de ce qui a été dit et pour préciser un peu plus notre pensée? Il y a deux choses que j'ai entendues qui m'ont semblé intéressantes: d'abord, c'est que nous allons avoir beaucoup de pain sur la planche pour essayer de définir les règlements, de façon pointue ou élargie. C'est ce qui est ressorti des questions.

La présidente: Je ne suis pas d'accord, mais continuez tout de même.

M. Preston Manning: Ces exposés nous apprennent des choses, et il serait peut-être utile que nous nous gardions du temps pour en discuter brièvement entre nous, tandis que le sujet est encore frais dans notre esprit. Vous avez dit vous-même qu'il serait intéressant de poser les mêmes questions à des scientifiques. Votre façon de fonctionner prévoit-elle...?

La présidente: Pas d'habitude. À mon avis, ce serait très prématuré, car nous pourrions nous enferrer dans des positions. Je vous rappelle qu'à la fin de la dernière séance, une motion a été déposée dans laquelle vous vouliez vous-même, monsieur Manning, y inclure les sujets que vous aviez soulevés dont, notamment, l'aspect économique de la question.

Or, à mon retour à mon bureau, je me suis rendu compte que j'en avais déjà parlé au ministre, au moment des questions lorsqu'il comparaissait ou immédiatement après la réunion, je ne me rappelle plus. Il me semble que le ministre ne nous a pas demandé de réfléchir aux modes de paiement pour déterminer qui paierait quoi et si les provinces peuvent se permettre financièrement d'en assumer les frais; mais comme la question a été soulevée à nouveau aujourd'hui, je devrais obtenir des précisions là-dessus. Il me semble que nous devons donner une touche canadienne à notre réflexion sur un sujet relativement pointu, comme vous venez de le dire. J'ai l'impression que j'ai fait une erreur en permettant la discussion là-dessus, car je ne crois pas que cela se trouve nulle part dans le projet de loi et qu'il n'a jamais été dans l'intention du ministre de nous demander notre opinion là-dessus.

Je préférerais attendre que les attachés de recherche commencent à rédiger leur rapport. Lorsque nous l'aurons sous les yeux, nous pourrons décider si, à notre avis, ils ont bien représenté la tournure de la discussion.

Je ne voudrais pas que nous terminions les séances par des séances de discussion d'une dizaine de minutes entre nous, car pour ma part, j'ai personnellement besoin de temps pour digérer l'information entendue et pour tirer mes conclusions.

La difficulté, c'est que vous nous devancez un peu, monsieur Manning. Vous avez beaucoup lu sur la question mais certains d'entre nous n'en savent pas autant et sont obligés d'absorber beaucoup de nouvelles données à chaque réunion. Il se peut même que nos questions n'aient rien à voir avec la compréhension que nous avons de ce que nous entendons. Si vous le voulez bien, je préférerais que nous ne tirions pas de conclusions pour l'instant.

Cela n'empêche aucun d'entre nous de faire sa propre évaluation des séances de comité et de se préparer en vue d'une discussion qui aura lieu sans doute avant la pause estivale et peut-être même avant.

M. Preston Manning: Avons-nous prévu une ou deux séances où nous pourrons discuter entre nous de la façon dont chacun de nous a absorbé l'information entendue?

La présidente: Je n'en suis pas sûre.

L'une des façons pour nous de réfléchir à ce que nous avons entendu, ce pourrait être d'attendre que les attachés de recherche aient terminé leur rapport provisoire, ce qui sera fait d'ici l'intercession. Vous voyez peut-être ce rapport d'un oeil différent du mien, mais le comité doit pourtant parler de façon unanime. Parfois, il vaut mieux réagir à un document plutôt que...

Mais cela ne vous empêche pas de communiquer avec les fonctionnaires du ministère de la Santé ou avec vos collègues après les séances. Mais si vous le voulez bien, je préférerais que cela ne fasse pas l'objet d'une séance officielle.

M. Preston Manning: D'accord.

La présidente: Merci beaucoup.

• 1300

Pour revenir aux affaires du comité, sachez qu'il se pose un léger problème la semaine prochaine. M. Merrifield, M. Charbonneau et moi... non, monsieur Charbonneau, vous serez ici mardi prochain, je crois. Ou partez-vous dès mardi?

M. Yvon Charbonneau: Je serai ici mardi.

La présidente: Mais vous venez quand même avec moi.

Je viens d'apprendre que l'autre vice-présidente, Mme Sgro, se rend en Israël. Avec votre permission, je communiquerai avec le whip pour voir comment le comité pourra se dérouler en notre absence et comment on pourra organiser les réunions. Je tenais à vous le signaler, car si le whip ne peut résoudre la difficulté, les deux séances de la semaine prochaine devront peut-être sauter. J'avais cru à tort que mme Sgro serait ici, et je m'excuse de mon erreur. On ne m'avait pas avisée qu'elle partait elle aussi.

Mme Hélène Scherrer: Je pourrais toujours me réunir avec M. Manning.

Des voix: Oh, oh!

La présidente: La séance est levée.

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