Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous poursuivons notre étude de la Loi sur la protection de la navigation.
Les témoins que nous recevons à 8 h 45 sont les représentants de la Fédération des pêcheurs et chasseurs de l'Ontario et de Pagaie Canada. Je vous souhaite la bienvenue.
Notre autre témoin participera par vidéoconférence, de la Colombie-Britannique. Elle aurait été incluse dans le présent groupe de témoins. Je suggère que nous permettions le chevauchement des deux groupes, s'il y a des questions. Elle se lève à 6 heures pour pouvoir se joindre à nous par vidéoconférence. Nous allons permettre la poursuite des témoignages si nous avons des questions qui le justifient.
Je donne la parole à M. Farrant, directeur, Affaires gouvernementales et politiques publiques, Fédération des pêcheurs et chasseurs de l'Ontario, puis nous entendrons Jay Morrison, directeur de la section Québec de Pagaie Canada. Messieurs, merci beaucoup d'être là et de contribuer à cette importante étude.
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Bonjour, madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du Comité.
Au nom de la Fédération des pêcheurs et chasseurs de l'Ontario, de nos 100 000 membres et des 740 clubs à l'échelle de l'Ontario, je vous remercie de nous avoir fait la courtoisie de nous inviter ce matin pour parler de nos préoccupations relatives à la Loi sur la protection de la navigation.
Il est crucial d'assurer la sécurité et la navigabilité des eaux pour permettre l'accès à des possibilités de pratiquer la pêche à la ligne et la chasse. Même si, au moment où la loi a été modifiée, Transports Canada a insisté pour dire que les effets sur ces activités seraient minimes, la FPCO continue de craindre que la portée réduite de cette loi telle qu'elle est maintenant puisse avoir des effets négatifs sur l'accessibilité.
Avant les modifications, la loi s'appliquait beaucoup plus généralement à tous les plans d'eau sur lesquels pouvait naviguer n'importe quel type de bâtiment flottant utilisé pour le transport, la plaisance ou le commerce, alors que maintenant, la loi ne s'applique plus qu'aux 162 plans d'eau, océans, lacs et rivières du Canada qui sont inclus dans l'annexe 2 de la loi. Cela signifie essentiellement que le droit de navigation sur toutes les eaux qui ne se trouvent pas à l'annexe 2 n'est plus protégé en vertu de la loi actuelle.
Le droit de navigation du public canadien sur les eaux qui ne sont pas énumérées dans la loi n'est protégé qu'en common law, ce qui signifie qu'il faudrait s'adresser aux tribunaux déjà engorgés pour la résolution des atteintes aux droits de navigation, par exemple dans le cas d'une plainte pour nuisance privée ou publique.
Nous vivons dans une société de plus en plus propice aux litiges, mais la plupart des particuliers n'ont pas les ressources financières et le temps qu'il faut pour faire valoir leurs droits de navigation devant les tribunaux. Que ce soit intentionnel ou non, par rapport au système qui a été remplacé, les dispositions en common law de la Loi sur la protection de la navigation représentent en réalité un processus encore plus lourd et inaccessible pour la majorité des Canadiens.
La nécessité d'exercer des recours devant les tribunaux n'empêchera absolument pas les obstacles à la navigation, et c'est au pêcheur, au chasseur, au canoteur ou au pagayeur qu'il incombe alors de relever les violations de leurs droits de navigation et de faire valoir leurs droits, ce qui signifie que la violation s'est déjà produite. Le recours à la common law est une mesure antagoniste, lourde et inefficace de protection des droits de navigation sur les eaux qui ne sont pas répertoriées.
On a, dans le passé, beaucoup discuté du retrait de la protection environnementale des eaux non répertoriées dans la LPN. D'après notre expérience, l'ancienne loi ne devait pas être le principal outil législatif pour la protection de l'environnement. Il y a d'autres lois fédérales et provinciales et règlements municipaux conçus spécialement pour assurer la protection des écosystèmes aquatiques, entre autres la Loi sur les pêches, la Loi sur la protection du poisson et de la faune et la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.
Une autre agence aura les ressources nécessaires pour traiter efficacement des questions de navigation, alors il est inutile de s'attendre à ce qu'elles comblent les lacunes de la loi.
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Comme je le disais, une autre agence aura les ressources ou l'expertise qu'il faut pour traiter efficacement des préoccupations relatives à la navigation, alors s'attendre à ce que ces gens s'occupent des lacunes de la loi est inutile.
D'autres agences fédérales, provinciales et municipales comptent sur Transports Canada pour avoir des conseils sur les eaux navigables afin de mettre en oeuvre efficacement leurs propres lois et règlements. Par exemple, certains obstacles à la navigation se trouvant dans les eaux, comme les barrages, sont soumis à la Loi sur l'aménagement des lacs et des rivières de l'Ontario, mais nous ne connaissons pas de loi semblable qui interdit les obstacles à la navigation hors de l'eau ou dans l'eau qui entravent les débits d'eau ou les niveaux d'eau nécessaires à la navigation, comme les clôtures, fils, tyroliennes et autres.
La LPN accorde de l'importance à la navigation commerciale et ne prend par conséquent plus en considération la plupart des activités récréatives se déroulant sur les eaux qui ne sont plus répertoriées. Dans sa forme actuelle, la LPN sépare effectivement la protection de la navigation de la protection des eaux navigables. Les voies navigables où les Canadiens s'adonnent à la plupart de leurs activités récréatives sont exclues dans une grande mesure de l'annexe 2 de la LPN et, par conséquent, sont soustraites à la surveillance du gouvernement fédéral.
Les eaux qui ne sont pas répertoriées à l'annexe 2 sont des endroits où l'on peut s'adonner à diverses activités, dont la pêche, la chasse, la navigation de plaisance, le kayak et le canot. Si les mesures législatives comportent des lacunes qui permettent les obstacles à la navigation dans les eaux non répertoriées, les usages traditionnels pourraient être restreints, ce qui a pour effet de diminuer les bienfaits sociaux, culturels, écologiques et économiques qui en découlent. Par exemple, la chasse, la pêche, le piégeage et les services de pourvoiries au Canada représentent une contribution annuelle de 15,2 milliards de dollars à l'économie nationale, et on peut dire que les restrictions laissées dans la LPN pourraient avoir un effet négatif sur ce résultat. Les changements apportés à l'ancienne Loi sur la protection des eaux navigables, la LPEN, peuvent aussi avoir des effets sur la sécurité du public, étant donné que des clôtures, des fils ou autres obstacles installés en travers des plans d'eau peuvent être extrêmement dangereux, en particulier là où le débit est élevé et où les problèmes de navigation se produisent.
En terminant, j'aimerais parler brièvement de l'un des aspects qui nous laissent le plus perplexes, parmi les modifications apportées. Aux fins de l'ancienne loi, les ouvrages secondaires et les eaux secondaires étaient des catégories d'ouvrages ou d'eaux navigables qui pouvaient déjà être exemptés du processus de demande en vertu de la loi. Cette disposition était là à l'origine pour simplifier les processus d'approbation du gouvernement fédéral et permettre à certains des promoteurs d'économiser temps et argent. On accordait une exemption quand les caractéristiques des lieux limitaient toute possibilité réaliste de navigation. Étant donné qu'il y avait déjà dans la LPEN un mécanisme permettant une exemption en pareilles circonstances, il aurait certainement été possible de resserrer la loi pour répondre aux préoccupations qui avaient été soulevées et éclaircir les dispositions plutôt que de simplement faire disparaître entièrement le processus et de laisser 99,7 % des lacs du Canada et presque 100 % de ses rivières sans protection. Il semble que les modifications apportées à la LPEN il y a plusieurs années n'avaient pas comme objectif de restreindre l'accès du public. Il n'en demeure pas moins que nous pourrions perdre l'accès à des milliers de lacs, de rivières et de ruisseaux partout au pays.
Nous croyons qu'il faut apporter des modifications à la loi actuelle pour garantir l'entière protection des droits à la navigation et nous encourageons les membres du Comité à se pencher sur ce qui a été fait et à trouver une meilleure façon de répondre aux préoccupations soulevées au sujet de la loi précédente, tout en rétablissant le droit d'accès de toutes les personnes qui utilisent les cours d'eau à des fins économiques, culturelles et sociales.
Les eaux navigables ont autrefois contribué à donner forme au commerce au Canada, mais aussi à notre culture et à notre identité. De nombreux Canadiens souhaitent toujours vivement faire l'expérience de ce magnifique pays en utilisant ses voies navigables. Ne dressons pas d'obstacles législatifs qui les empêchent d'exercer ce droit.
Merci encore, madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du Comité, de m'avoir accordé votre temps et de m'avoir écouté ce matin.
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Merci, madame la présidente.
Je remercie Greg de son exposé très approfondi. J'ai vraiment passé en revue plusieurs fois ma déclaration pour m'assurer de ne pas dépasser cinq minutes. Greg a fait un examen très approfondi des questions d'ordre juridique et je pense que c'est très utile.
Pagaie Canada est un organisme sans but lucratif dont la mission est de promouvoir l’enseignement sur le maniement de la pagaie, la sécurité et la sensibilisation à l’environnement dans le domaine du canotage et du kayak de loisir. Nous comptons plus de 2 000 moniteurs. Certains de ceux-ci travaillent dans plus de 200 organismes, entreprises et clubs partout au Canada.
Chaque année, plus de 25 000 personnes participent à des cours et à des activités de Pagaie Canada. Nous soutenons des programmes du gouvernement fédéral qui font la promotion des activités extérieures sécuritaires au moyen des programmes PaddleSmart et AdventureSmart. Nous sommes la voix nationale du maniement de la pagaie à des fins récréatives.
Combien de Canadiens font du canotage ou du kayak? Quelqu’un le sait? Personne ne le sait. L’industrie de la navigation de plaisance n’en sait rien. Ils sont certainement plusieurs millions.
Je suis le représentant du Québec. Il n’y a pas de section québécoise. Je suis en fait le représentant du Québec au conseil d’administration de Pagaie Canada, et je suis un moniteur accrédité dans diverses disciplines de canotage. Je suis aussi président de la section régionale de l’Ouest du Québec et de l’Est de l’Ontario de la Société pour la nature et les parcs du Canada, SNAP. Certains d’entre vous savent peut-être que c’est l’organisation de conservation du milieu sauvage la plus reconnue au Canada.
Je ne prétends pas avoir une expertise particulière en ce qui concerne le processus d’évaluation environnementale, qui faisait partie intégrante de l’ancienne Loi sur la protection des eaux navigables, mais je suppose que vous entendrez des spécialistes de ce domaine, du moins je l’espère. J’ai témoigné pour la SNAP, en 2009, devant le sous-comité sénatorial qui était chargé d’étudier les modifications à la Loi sur la protection des eaux navigables, LPEN. Je connais donc bien l’évolution de la loi.
J’affirme toutefois avoir une expertise de ce qui constitue les eaux navigables. J’ai pagayé sur plus de 8 000 kilomètres entre le golfe du Saint-Laurent et Inuvik, en empruntant les routes traditionnelles que parcouraient les peuples autochtones et les commerçants de fourrure qui les ont suivis. Dans certains cas, il faut traverser des marécages et des terres humides, des barrages de castor et des rapides, et je peux dire que la définition des eaux navigables établie en 1906 par le Conseil privé et confirmée par les tribunaux assez récemment demeure totalement pertinente.
Si un canot peut y flotter, les eaux sont navigables. Si les eaux sont navigables, le droit de naviguer de la population, selon la common law, doit être protégé par le gouvernement. La Loi sur la protection de la navigation, LPN n’y parvient pas.
Nous attendons avec impatience les travaux du Comité depuis 2009, année où le gouvernement antérieur a commencé, au moyen d’un projet de loi omnibus et sans débat parlementaire, à annuler les dispositions de la Loi sur la protection des eaux navigables. Pendant plus de 100 ans, cette loi a répondu à deux objectifs, soit aider à protéger la qualité de l’environnement des eaux canadiennes, et à protéger le droit de la population, en vertu de la common law, de naviguer en toute sécurité sur ces cours d’eau.
Une vaste coalition constituée de plusieurs groupes environnementaux, d’associations de plaisanciers, d’organismes de chasse et de pêche, d’associations de propriétaires de chalets et de propriétés et de Premières Nations de premier plan du Canada s’est opposée à ces changements. Sa principale préoccupation était l’annulation par le gouvernement de dispositions de la LPEN qui déclenchaient automatiquement la tenue d’une évaluation environnementale toutes les fois que d’importants travaux de construction touchaient des eaux navigables.
Je peux dire que ce n’est que lors d’une des dernières séances du sous-comité sénatorial que les sénateurs se sont mis à comprendre les incidences de cela. Ils n’avaient pas compris qu’en plus de ne pas avoir le chevauchement des évaluations environnementales des gouvernements provinciaux et du gouvernement fédéral que le gouvernement de l’époque disait exister, il n’y aurait pas d’évaluations environnementales quand de grands ouvrages seraient envisagés sur les voies navigables.
Même s’il n’a pas été possible d’obtenir la modification du projet de loi, l’exercice n’a pas été un échec total. Un député d’un parti de l’opposition a promis d’étudier les changements à la LPEN si son parti devait former le gouvernement. C’était, évidemment, Justin Trudeau. La Loi sur la protection de la navigation, qui a remplacé la LPEN en 2014, a nui encore plus au droit public de naviguer en déterminant que le gouvernement continuerait de respecter son obligation de protéger le droit de la population de naviguer pour seulement deux listes de 100 océans et lacs et certaines parties de 64 rivières, ce qui laissait aux particuliers la tâche pratiquement impossible de poursuivre les personnes qui ne respectaient pas ce droit pour des dizaines de milliers de grands lacs et rivières au Canada.
Il est intéressant de constater que les annexes de cours d’eau privilégiés comprennent les lacs et rivières dans les régions où les riches et célèbres ont des chalets, tout en excluant ceux qui sont essentiels aux Premières Nations et aux petites collectivités qui pourraient s’opposer à de grands projets menaçant leur mode de vie.
Pour tout le Québec, par exemple, seulement trois lacs sont inscrits sur la liste. La rivière Gatineau, à quelques pas du Parlement, en est exclue, et les citoyens des collectivités qui la bordent sont laissés à eux-mêmes.
Ce n’est qu’un résumé des lacunes de la LPN. La communauté du maniement de la pagaie est naturellement préoccupée par le maintien de son droit de naviguer sur les eaux canadiennes, mais elle est tout aussi préoccupée par l’incidence des travaux sur la qualité environnementale de ces eaux, ainsi que sur les gens qui vivent dans ces régions. Pour une discussion plus approfondie sur les aspects juridiques de ce sujet, je recommande au Comité de consulter le document d’information d’Ecojustice de 2012 à titre de référence.
À titre d’ancien gestionnaire principal au sein de la fonction publique, je comprends que les processus doivent être simplifiés et que les fonds des contribuables doivent être dépensés judicieusement, mais cela est possible sans que le gouvernement abandonne sa responsabilité de protéger l’environnement et les droits de navigation du public. Selon moi, le gouvernement actuel devrait abroger la LPN dont l’approche nécessite l’application sélective de droits, rétablir les protections qui étaient en vigueur avant 2009 en vertu de la LPEN et fournir les ressources qu’il faut au ministère des Transports en fonction d’un régime d’application et d’exécution plus efficace. Nous pouvons protéger tous nos cours d’eau et approuver rapidement les projets durables.
Merci.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Messieurs Farrant et Morrison, je vous remercie beaucoup de votre présence ici aujourd'hui.
Nous aurions nettement préféré vous recevoir avec une proposition de modification à la Loi sur la protection de la navigation qui aurait pu émaner du gouvernement. Malheureusement, le gouvernement a décidé de faire le contraire dans le dossier de la révision de la Loi sur la protection de la navigation.
Nous, à titre de membres du Comité, avons reçu une lettre du et du . Ces ministres exigent du Comité qu'il tienne une consultation avant même de savoir quelles sont les intentions du ministre des Transports concernant les modifications suggérées à la Loi sur la protection de la navigation.
J'aimerais que vous compreniez bien notre position de ce côté-ci à cette étape de l'étude du Comité et parler du mandat qui a été confié par le premier ministre. À l'époque, M. Trudeau a clairement dit ou presque qu'il voulait rétablir les anciennes protections. Vous en avez d'ailleurs parlé dans votre présentation, monsieur Morrison. Je vais lire un extrait du document que vous nous avez envoyé:
Même s’il n’a pas été possible de modifier le projet de loi, l’exercice n’a pas été un échec total. Un député d’un parti de l’opposition a promis d’étudier les changements à la [Loi] si son parti devait former le gouvernement. C’était, évidemment, Justin Trudeau.
Cela a mené à une lettre écrite par les deux ministres et qui a été envoyée au Comité. On peut y lire ceci:
Dans le cadre du mandat que nous a confié le premier ministre [le même M. Trudeau dont vous parliez], on nous a demandé d'examiner ensemble les modifications apportées par le gouvernement précédent à la Loi sur les pêches et à la Loi sur la protection des eaux navigables, en vue de rétablir les protections éliminées, d'y intégrer des mécanismes de protection modernes.
Vous avez dit que le message était passé et, en effet, il a été bien entendu. Malheureusement, nous ne connaissons pas encore la teneur de ces modifications. Nous ne savons pas exactement quelles sont les protections que veulent rétablir les gens du Parti libéral. Nous ne connaissons pas les intentions du gouvernement. Selon moi, il est prématuré pour vous de penser que vous allez récupérer l'ensemble des droits que vous aviez auparavant parce que nous ne savons pas ce que le gouvernement va proposer.
Il y a un autre élément que je tiens absolument à mentionner. Les ministres s'étaient engagés à mener eux aussi de leur côté des consultations auprès des différents groupes pour connaître leurs intérêts et leurs intentions. Malheureusement, nous avons appris de la part même du et de la que le ministre n'allait pas mener des consultations, si ce n'est une consultation générale où un ministre, dans le cadre normal de son mandat, rencontre des groupes sur un sujet donné.
De notre côté, nous aurions préféré avoir les modifications proposées avant de tenir cet exercice avec les différents groupes qui sont d'accord au sujet des modifications présentées et adoptées dans la précédente loi. Malheureusement, la manière de faire du gouvernement ne nous permet pas de connaître ses raisons ou ses motifs et, surtout, les modifications proposées.
Je vous ai fait une simple mise en contexte. Ce n'est pas que nous ne voulons pas étudier des modifications. C'est plutôt que nous ne sommes pas d'accord sur le processus qui nous est proposé. Nous ne sommes pas d'accord sur la manière dont le gouvernement utilise le Comité pour trouver une justification à une position qui est difficilement explicable.
Monsieur Farrant, je vais vous poser quelques questions.
À la suite des modifications aux règles de la Loi sur la protection de la navigation, à quels problèmes les chasseurs et les pêcheurs que vous représentez ont-ils été confrontés?
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Merci, madame la présidente.
Je remercie les témoins d'être avec nous ce matin.
J'ai des questions relativement précises qui vont dans le même sens que celles de M. Hardie. J'aimerais voir ce qui pourrait être modifié dans cette loi pour tenter de l'améliorer, si tant est que ce soit possible.
Monsieur Morrison, vous avez parlé de cette relation qui m'apparaît nettement importante entre la construction d'ouvrages potentiels et les études environnementales. Sous l'ancien gouvernement, et je dirai simplement cela, tant la Loi sur la protection de la navigation que les lois environnementales ont été édulcorées.
Dans le cas d'un projet relatif à ouvrage majeur, par exemple le pipeline Énergie Est, qui traverse un nombre incalculable de rivières qui ne sont pas protégées, vos membres sentent-ils qu'on passe à côté de l'évaluation environnementale fondamentale? À votre avis, serait-il davantage pertinent que ce type d'études revienne au ministère des Transports, ou l'étude qu'en fait l'Office national de l'énergie vous satisfait-elle?
Ma prochaine question s'adresse à M. Farrant.
Lors de votre présentation, vous avez parlé de la difficulté, pour les citoyens, de recourir aux tribunaux en vue de faire entendre leur voix au sujet de projets qui touchent une rivière ou un lac qu'ils apprécient particulièrement.
D'abord, est-ce que certains de vos concitoyens ont eu recours à ce processus? Si tel est le cas, j'aimerais que vous m'en parliez un peu. Sinon, j'aimerais savoir si les citoyens abandonnent un droit dont ils disent ne pas pouvoir se prévaloir parce qu'en réalité, le processus est trop compliqué et trop onéreux.
Ne serait-il pas préférable de revenir au processus d'acceptabilité des plaintes, à Transports Canada, plutôt que de passer par la voie judiciaire?
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Au sujet des répercussions économiques, je vais parler des préoccupations immédiates de nos membres, qui concernent la chasse et la pêche. Évidemment, la pêche récréative requiert l'accès à un cours d'eau, généralement, à moins qu'il s'agisse de pêche côtière. Notre pays compte également un très grand nombre de chasseurs de canards.
Nous voyons un effet de retombée. Par exemple, nous le voyons chaque fois que les provinces apportent des changements sur le plan de l'attribution des permis et des étiquettes. Nous l'observons lorsque des gens ont l'impression qu'il ne vaut plus la peine de sortir pour aller pêcher parce qu'ils ne peuvent plus accéder à un cours d'eau et lorsqu'ils craignent de ne plus pouvoir se rendre là où ils avaient l'habitude de se rendre. Il y a un problème lorsque des gens se disent qu'ils ne feront tout simplement plus ce qu'ils faisaient.
Par exemple, en Ontario, pour les gens qui pratiquent la pêche et la chasse, les revenus provenant des permis et des étiquettes qu'ils achètent fournissent les fonds par le compte à fin déterminée pour deux tiers de tout le financement destiné à la gestion des ressources halieutiques et fauniques pour tous les Ontariens, et non seulement pour les pêcheurs et les chasseurs. Quand des changements restreignent la capacité des gens de participer à ces activités, ils cessent d'acheter des permis, des bateaux, de l'essence et cessent de louer des chambres d'hôtel, d'aller au restaurant et de voyager.
Vous pourriez consulter, par exemple, l'étude que la Commission canadienne du tourisme a menée en 2012 sur les répercussions économiques des activités de pêche et de chasse au Canada, et les milliards de dollars générés uniquement par les touristes américains qui viennent au Canada pour pratiquer ces deux activités. Si on ne garantit plus aux gens l'accès aux lacs et aux rivières auxquels ils avaient normalement accès, pourquoi viendraient-ils? Pourquoi se donneraient-ils la peine de faire ces voyages? À quoi bon aller au camp de chasse ou faire un voyage de pêche, par exemple?
Tout cela a des répercussions économiques, car les gens dépenseront moins et ne prendront plus part à ces activités. D'un point de vue économique, cela a des effets sur les résultats financiers.
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Merci, madame la présidente.
Je remercie les deux témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
Je suis convaincu que vous avez, comme nous, un horaire assez chargé. Ma question risque de ressembler aux précédentes, mais je tiens à confirmer certains faits.
Le programme de navigation de Transports Canada n’accepte plus les plaintes visant des ouvrages entravant un cours d’eau non désigné. Les personnes qui estiment qu’un ouvrage sur un cours d’eau non désigné porte atteinte au droit public à la navigation doivent obtenir une ordonnance judiciaire pour régler la situation.
Les témoins qui font face à des problèmes nous parlent beaucoup d'environnement et de pêche. Or je crois qu'un ministère ou que d'autres personnes se préoccupent de cet aspect du problème. Pour ma part, je souhaite que, pour le moment, nous nous en tenions à la navigation.
Dans chacune de vos organisations, des plaintes ont-elles été émises sur le plan judiciaire depuis 2002, soit l'année où le projet de loi a été modifié?
Monsieur Farrant, vous avez la parole.
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Je vais même plus loin.
Plus tôt, vous avez parlé des communautés autochtones. Mardi, un témoin nous a dit que les consultations faites avant 2012 avaient été quand même satisfaisantes et que c'était la même chose en ce qui concernait les communautés autochtones. Je ne me souviens pas du nom de ce témoin, mais les analystes l'ont sûrement dans leurs dossiers.
Malgré tout, le projet de loi n'est pas parfait. Quand un gouvernement propose un projet de loi et pose des gestes — le gouvernement libéral fait la même chose —, c'est un pas en avant. Par la suite, on essaie de le modifier au fil du temps.
Même si je crois que, pour le gouvernement, tout est déjà décidé, quelle mesure proposeriez-vous qu'on prenne? On ne veut vraiment pas nous dire ce à quoi on peut travailler, et c'est ce qui est malheureux en ce moment. Si vous avez une recommandation, je vous permets de la faire.
Bonjour tout le monde. Il est tôt ici, mais je suis ravie de témoigner. Je souhaiterais remercier le Comité permanent d’avoir invité le Conseil des Canadiens à faire un exposé aujourd’hui.
Le Conseil des Canadiens est un organisme citoyen qui défend la pureté de l’eau, le commerce équitable, les énergies vertes, les soins de santé publique et une démocratie vivante. Nous comptons 60 sections et 100 000 sympathisants dans tout le Canada, et bon nombre de ces derniers vivent dans des collectivités où se trouvent des lacs et des rivières qui ne sont pas protégés par la Loi sur la protection de la navigation. Nombreux sont ceux qui s’inquiètent de projets qui menacent les eaux navigables de leur collectivité. Des projets industriels, tels que des oléoducs, des barrages, des mines et des fermes piscicoles vont de l’avant sans qu’on ait examiné leurs répercussions sur les eaux navigables.
De plus, bon nombre de ces projets sont menés sur des territoires traditionnels de peuples autochtones et auront des répercussions sur leur culture, leur mode de vie et leur situation économique.
Nous avons publié hier un rapport intitulé Every Lake, Every River : Restoring the Navigable Waters Protection Act, dans lequel sont examinés quatre projets: l’oléoduc Énergie Est, qui relie l’Alberta au Nouveau-Brunswick, le barrage de Keeyask, la ligne de transmission Bipole III au Manitoba et la mine Ajax en Colombie-Britannique. L’examen de ces projets montre que ces derniers mettent en danger les eaux navigables et la navigation. L’oléoduc Énergie Est, par exemple, traversera près de 3 000 voies navigables, dont beaucoup de collectivités dépendent pour la pêche, le transport, le tourisme et les loisirs.
Les déversements de produits pétroliers, comme celui qui s’est produit dans la rivière Kalamazoo, ont eu des répercussions sur la navigation. Par exemple, des sections de la rivière et un lac voisin ont été fermés pour une période de deux à trois ans en raison de ce déversement. En 2012, Mountain Equipment Co-op a publié une liste de 40 voies navigables importantes pour les loisirs qui ne sont plus protégées, soulignant que le secteur des loisirs représente au moins 6 millions d’emplois au Canada. Par comparaison, on ne dénombre qu’environ 250 000 emplois dans les secteurs minier, pétrolier, gazier et forestier réunis, ce qui ne représente qu’environ 1,6 % des emplois au Canada.
On parle beaucoup des emplois dans le secteur de l'extraction, mais, selon Statistique Canada, la plupart des emplois sont en fait dans d'autres secteurs: 12 % dans le commerce de détail, 12 % dans les soins de santé et l’assistance sociale, 12 % dans le secteur manufacturier, 8 % dans l’hébergement et la restauration et 8 % dans les services éducatifs, par exemple.
Il est donc crucial, au moment où le gouvernement Trudeau examine la Loi sur la protection de la navigation et d’autres lois relatives à l’eau et à l’environnement, que l’on ne mette plus en danger les voies navigables et que l’on modernise la législation de l’eau pour qu'elle constitue une partie importante d’un plan à long terme de transition des combustibles fossiles et du secteur de l'extraction vers la création d’emplois verts et durables.
Plus précisément, nous souhaitons que le gouvernement fédéral rétablisse et améliore la Loi sur la protection des eaux navigables de façon à ce que tous les lacs, toutes les rivières et toutes les voies navigables soient totalement protégés. Nous demandons à ce que l’annexe à la Loi sur la protection de la navigation soit supprimée de façon à ce que la Loi s’applique à tous les lacs, toutes les rivières et toutes les voies navigables. Nous demandons au gouvernement fédéral de rétablir et de renforcer l’examen fédéral des grands oléoducs et des grandes lignes d’électricité en vertu de la Loi et l’évaluation des cours d’eau en vertu de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale. Nous demandons également à ce qu'on ajoute à la Loi des dispositions prévoyant que les déversements ou les écoulements de substances toxiques fassent l’objet d’une évaluation de leurs répercussions sur toutes les eaux navigables.
Nous demandons également l'organisation de consultations publiques et de consultations de groupes d'experts indépendants; et il faudrait qu'on tienne compte de leurs commentaires afin de renforcer la Loi sur la protection des eaux navigables. Nous savons que le Comité permanent invite le public à faire part de ses commentaires par écrit. J'ai rencontré des représentants de Transports Canada lors de mon passage à Ottawa la semaine dernière. Je sais qu'un certain nombre de réunions ont lieu, mais nous croyons que les consultations doivent également être ouvertes au public, soit qu'il faut rencontrer les gens en personne.
Nous voulons également que le gouvernement fédéral s'assure qu’un processus de consultation est établi par la Loi afin de favoriser une véritable collaboration entre les collectivités et le gouvernement pour que les organismes de réglementation ou les ministères fédéraux mettent régulièrement en oeuvre les recommandations des collectivités. Le gouvernement doit mettre en place un mécanisme reconnaissant aux collectivités le droit de dire « non » à des projets qui menacent les voies navigables et donnant aux collectivités le pouvoir de créer des emplois faibles en carbone durables qui protègent les eaux navigables à long terme.
Nous demandons également au gouvernement de consulter les peuples autochtones et d'inclure dans la Loi sur la protection des eaux navigables l’obligation d’obtenir un consentement préalable, libre et éclairé afin que les traités et les droits relativement à l’eau des Autochtones soient respectés et qu’une relation de nation à nation soit véritablement établie.
Enfin, nous demandons la mise en oeuvre de mesures strictes de protection des voies navigables dans le cadre du droit à l’eau et à l’assainissement reconnu par les Nations unies.
Je vous remercie une fois encore du temps que vous nous avez consacré et je vous invite à formuler des recommandations qui assurent la protection, aujourd’hui et à l’avenir, de chaque lac et de chaque rivière.
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Merci pour la question, monsieur Hardie.
Je ne suis pas un législateur. Il est facile pour nous de dire que toutes ces choses devraient être incluses, mais il n'est pas toujours aussi simple de mettre cela en application.
Encore une fois, je crois que c'est une question d'équilibre. Je conviens que l'on devrait pouvoir formuler des observations avant qu'un projet soit mis en marche et que des obstacles à la navigation apparaissent, cela ne fait aucun doute.
En Ontario, la Loi sur l'aménagement des lacs et des rivières ne traite que des ouvrages qui, comme les barrages, font obstacle à l'écoulement de l'eau. Si quelqu'un construit un barrage au milieu d'une rivière — comme le font parfois des propriétaires privés —, cette loi s'applique et l'oblige à enlever le barrage en question.
En l'occurrence, personne ne peut faire de commentaires avant la réalisation d'un projet, et il y a tout lieu de se demander s'il ne faudrait pas inclure certains des éléments qui sont exemptés de l'application de la Loi, car ils auront assurément un impact sur la navigation et la navigabilité des cours d'eau.
La liste des cours d'eau protégés était très courte et, sans viser l'application de la Loi à tous les cours d'eau au Canada, il pourrait certes être bon de considérer les 40 cours d'eau extrêmement importants n'étant plus protégés qui ont été relevés dans le rapport de Mountain Equipment Co-op dont parlait la jeune femme qui m'a précédé. Toujours dans cette recherche d'équilibre, l'inclusion de ces 40 cours d'eau pourrait être une bonne solution de compromis dans le cadre de modifications apportées à la Loi.
Quels que soient les changements envisagés, j'estime qu'il importe d'abord et avant tout de tenir un processus de consultation comme celui auquel nous participons aujourd'hui.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je sais que mes collègues d'en face sont un peu dérangés par la manière dont nous déposons les motions uniquement dans le but d'avoir un processus clair. Ma motion dit: « Que le comité n'invite plus aucun témoin dans le cadre de cette étude et qu'il attende les modifications à venir du avant de poursuivre ses travaux. »
Je crois que c'est une motion très raisonnable. Quand nous aurons les modifications proposées par le ministre, nous pourrons décider de tenir six, sept, huit ou neuf rencontres à ce sujet. Je crois que ce sera tout à fait légitime pour notre comité de le faire parce que nous aurons alors une piste sur laquelle nous inspirer. Nous connaîtrions les intentions du ministre des Transports en ce qui concerne la Loi sur la protection de la navigation. C'est ce qui me préoccupe. C'est pourquoi nous avons déposé régulièrement, au cours de cette étude, des motions pour demander d'attendre d'avoir les détails des modifications proposées par le ministre à la Loi sur la protection de la navigation.
Nos collègues semblent croire que seulement de légères modifications seront proposées par le . Il est vrai que, depuis le début, tous les témoins ont exprimé leur satisfaction vis-à-vis des modifications qui pourraient être apportées à la Loi sur la protection de la navigation, à l'exception de ceux que nous entendons ce matin. Selon moi, les modifications que nous attendons du ministre sont donc absolument nécessaires à la poursuite d'une étude en bonne et due forme. À ce moment-là, le Conseil des Canadiens et vos organismes, messieurs Morrison et Farrant, auraient amplement d'informations pour être en mesure de formuler une proposition claire et de juger de ce que le gouvernement compte faire.
À plusieurs reprises, mes collègues du côté du gouvernement ont mentionné que des changements pertinents ont été apportés à la Loi. Plusieurs d'entre eux sont d'avis qu'il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain. Certaines modifications vont donc demeurer et vous allez sûrement, connaissant le passé de vos organismes, avoir des choses à dire à ce sujet.
Nous aurons donc à recommencer, encore une fois, cette étude dans le cadre du processus législatif normal. C'est pourquoi je considère que ces modifications devraient être soumises au préalable au Comité. Mardi, nous avons adopté un budget de plus de 10 000 $ pour fonctionner dans le cadre de cette étude, pour entendre des témoins et pour payer leurs frais de déplacement. Cette somme d'argent devra être dépensée de nouveau lorsque nous aurons à étudier les modifications soumises par le ministère des Transports. Je pense que c'est mal utiliser l'argent des contribuables que de faire un tel exercice à deux reprises.
Je crois qu'il est important que les Canadiens qui nous écoutent sachent que nous ne sommes pas contre le fait de réétudier une loi si elle peut être améliorée. Nous déplorons que le ait déjà décidé que la Loi n'est pas adéquate et que nous devons tout reprendre du début. Je vais lire encore une fois l'intention exprimée — et elle est même écrite dans la lettre de mandat du ministre: « [...] réinstaurer les protections éliminées et intégrer des mécanismes de protection moderne. »
Si c'est ce que le a l'intention de faire, pourquoi ne soumet-il pas les propositions de modifications à notre comité pour nous donner l'occasion d'en discuter. Vous allez peut-être revenir devant nous. Je suis persuadé que si le gouvernement fait des propositions de modifications à la Loi sur la protection de la navigation, tant le Conseil des Canadiens que vos organismes vont demander à être entendus.
Monsieur Farrant, vous avez dit que vous saisissiez toutes les occasions possibles pour faire valoir le point de vue de votre organisme quand cela concerne les intérêts de vos chasseurs et de vos pêcheurs. Vous allez donc revenir nous voir et il faudra, encore une fois, accorder un budget additionnel au Comité pour faire une nouvelle étude. Dans le fond, le travail que nous faisons aujourd'hui est presque — et je dis bien « presque » — inutile parce que nous aurons à le recommencer au complet.
Lors des témoignages précédents, nous avons eu beaucoup d'informations de la part de gens qui, contrairement aux témoins d'aujourd'hui, estimaient que les changements à la Loi sur la protection de la navigation avaient eu des effets bénéfiques. Je crois aussi honnêtement qu'il y a eu de bons changements.
Le président de l'Alberta Association of Municipal Districts and Counties, M. Al Kemmere, a d'ailleurs déclaré ce qui suit:
[Traduction]
L'ancienne Loi ne mettait pas à profit les connaissances locales quant à la façon dont les cours d'eau étaient utilisés, ce qui augmentait les coûts pour les municipalités et le gouvernement du Canada.
La nouvelle mesure législative établit un équilibre entre la surveillance fédérale et l'autonomie municipale. Elle permet au ministre d'ajouter, à sa discrétion, d'autres cours d'eau à l'annexe et elle permet aux propriétaires d'ouvrages ... aux termes de la Loi sur la protection de la navigation, même s'il ne s'agit pas d'un cours d'eau inscrit à l'annexe, puisque les propriétaires peuvent choisir d'adhérer au régime.
[Français]
D'après les remarques mentionnées au départ, il est possible d'agir dans le cadre de la loi actuelle. Aucun témoin n'est venu nous dire que ce processus avait été utilisé. Personne n'a demandé au ministre d'ajouter des cours d'eau sur la liste alors que c'est prévu dans la loi actuelle.
Donc, encore une fois, je me demande ce qui ne fonctionne pas dans la Loi sur la protection de la navigation? Pourquoi devons-nous faire en sorte d'absolument jeter le bébé avec l'eau du bain, de restaurer les protections précédentes alors que des possibilités d'intervenir sont bel et bien présentes dans la loi actuelle?
Le président du Forum rural de la Fédération canadienne des municipalités, M. Ray Orb a aussi déclaré ce qui suit:
[Traduction]
La Fédération canadienne des municipalités a accueilli favorablement les modifications apportées en 2012 à la Loi sur la protection de la navigation, ce qui a éliminé les exigences inutiles liées à une navigation publique inexistante. Les modifications ont permis de mettre à jour la Loi en vigueur et de la rendre conforme aux voies de transport actuelles du pays.
En réduisant les retards dans les projets et les coûts de construction élevés imposés aux municipalités, tout en assurant la protection de ces cours d'eau, les modifications apportées à la Loi sur la protection de la navigation donnaient suite directement aux préoccupations des municipalités en vue d'améliorer la capacité des administrations locales de construire des infrastructures et d'offrir des services essentiels. Pour faciliter la planification environnementale, le gouvernement fédéral a également reconnu la capacité limitée des municipalités rurales, d'où sa décision de faire en sorte que ces collectivités aient accès à des ressources propres aux régions rurales, ce qui comprend les outils, l'expertise et la capacité financière.
[Français]
Quand le gouvernement veut réaliser ses promesses électorales et qu'il veut modifier un projet de loi, il me semble que c'est de bon aloi qu'il mette ses intentions sur la table. Présentement, les intentions du gouvernement ne sont pas d'entendre les recommandations des témoins, ni d'entendre ce que les gens ont à dire au sujet du projet de loi. Les intentions du gouvernement, telles qu'elles sont spécifiquement indiquées dans la lettre que nous ont envoyée les deux ministres, sont de rétablir les protections éliminées et d'intégrer des mécanismes de protection modernes.
Ce matin, mon collègue, M. Hardie, a fait quelques suggestions concernant des améliorations qui pourraient être apportées à la Loi sur la protection de la navigation. Parmi les suggestions de M. Hardie, y aurait-il une piste que pourrait étudier le ministre afin d'apporter des modifications à la loi? Si c'était le cas, nous pourrions discuter de quelque chose de précis. Nous pourrions discuter de cas concrets et des effets concrets des changements touchant la législation sur les eaux navigables pour les pagayeurs, pour les projets de pipelines, pour les chasseurs et les pêcheurs. Malheureusement, encore une fois, nous sommes dans le vide. La société évolue, madame la présidente.
Revenons aux propos de M. Farrant concernant les chasseurs et les pêcheurs. Personnellement, en tant qu'ancien maire de Thetford Mines, je peux vous dire que la chasse et la pêche ont changé au cours des dernières années. Maintenant, pour se rendre aux lieux de chasse et de pêche, il faut des quatre roues et des motoneiges. Comme les chasseurs et les pêcheurs doivent traverser des cours d'eau, ils doivent effectuer des ouvrages sur ceux-ci. Et en effet, ces ouvrages doivent être réglementés.
Si on veut que les chasseurs aient accès aux ressources, il faut être en mesure d'intervenir sur certains cours d'eau, mais doit-on pour autant empêcher les pagayeurs d'utiliser toutes les rivières? Pas du tout!
Vous avez soulevé un point tout à fait pertinent, monsieur Morrison. Vous avez dit qu'il y a une activité importante sur les cours d'eau et que le Canada est connu pour ses grandes étendues d'eau. Je pense qu'il faut avoir des mesures de protection, mais ce n'est pas le rôle de la Loi sur la protection de la navigation. Il y a d'autres lois et d'autres ministères qui font ce travail. Certains des commentaires que vous avez faits ce matin pourraient être adressés à d'autres ministres, ministères et comités. Vous avez présenté des arguments assez pertinents et concrets pour défendre votre point de vue.
Laissez-moi revenir à deux autres témoignages que nous avons entendus pour appuyer la motion que je propose aujourd'hui.
Nous avons eu le plaisir de recevoir M. Michael Atkinson, président de l'Association canadienne de la construction. Il a dit qu'il était satisfait des changements faits en 2012.
[Traduction]
Je le cite: « Certains ont prétendu que les changements apportés en 2012 à la Loi sur la protection des eaux navigables ont réduit l'efficacité des mesures de protection de l'environnement dans tout le pays. »
[Français]
M. Atkinson a dit ceci:
[Traduction]
Nous ne sommes pas du tout d'accord.
Précisons d'abord que la Loi modifiée a cessé de figurer parmi les éléments pouvant déclencher une évaluation environnementale aux termes de la LCEE. Tout changement apporté devait être pris en considération dans le contexte des modifications à la LCEE. On commettrait une grave erreur en voulant modifier unilatéralement cette loi-ci sans tenir compte des changements...
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
Par respect pour mes collègues et pour les témoins, je vais donc tenter d'aller à l'essentiel, et ce, en faisant deux brèves remarques.
M. Chris Bloomer a déclaré ce qui suit devant notre comité:
[Traduction]
Elle peut être appliquée pour ajouter des plans d'eau si on le juge nécessaire; un processus et des principes s'appliqueront à ce sujet. Je pense qu'il faut agir au cas par cas; c'est probablement la meilleure manière de procéder.
[Français]
Nous entendons des témoins qui souhaitent des modifications et veulent revenir en arrière, mais pour avoir été maire et avoir entendu les propos d'un grand nombre d'associations à ce sujet, je peux vous dire que l'ancien processus causait beaucoup de problèmes dans les municipalités quant au développement de nos régions et du développement de l'accès à nos territoires. Il fallait intervenir.
J'ai entendu dire ce matin que, depuis 1906, le Canada protégeait les eaux navigables. Or le Canada de 1906 n'est pas celui d'aujourd'hui. La technologie et l'utilisation des cours d'eau ont beaucoup évolué. Autrefois, on utilisait beaucoup les cours d'eau pour faire du commerce un peu partout, mais ce n'est pratiquement plus le cas maintenant.
Je pense que les changements proposés et adoptés dans le cadre de la Loi sur la protection de la navigation étaient justes et méritaient d'être faits. C'est pourquoi, en toute transparence, étant donné qu'on parle ici du gouvernement de la transparence...
:
Merci, madame la présidente.
Comme je l'ai mentionné, chez ce gouvernement, la transparence est en ce moment plutôt opaque puisqu'il n'accepte pas de soumettre les modifications qu'il souhaite apporter à la Loi sur la protection de la navigation.
À mon avis, il est absolument essentiel de le faire. Je vais continuer à insister pour éviter qu'on ne dépense inutilement l'argent des contribuables et pour qu'on mettre fin à notre étude actuelle jusqu'à ce que les propositions du gouvernement soient disponibles. Par la suite, on pourra aborder tous les aspects que les témoins ont présentés.
Madame la présidente, j'aimerais donc, en terminant, lire le paragraphe suivant qui justifie la raison pour laquelle je crois que le a utilisé notre comité à des fins gouvernementales, alors que ce n'est pas le rôle habituel des comités.
Ainsi, la lettre de mandat du , qu'il a reçue du lui-même, traite clairement de sa responsabilité de travailler avec le . Je cite ce qui est mentionné à cet égard:
Travailler avec le ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne afin de revoir les modifications à la Loi sur les pêches et à la Loi sur la protection des eaux navigables apportées par le précédent gouvernement, réinstaurer les protections éliminées et intégrer des mécanismes de protection modernes.
Madame la présidente, je demande au — s'il veut vraiment que le Comité fasse convenablement son travail — de nous dire ce qu'il entend par « réinstaurer les protections éliminées ». Qu'est-ce que sont « des mécanismes de protection modernes » et qu'est-ce qui ne fonctionne pas dans la Loi qui a nécessité l'inscription, dans la lettre de mandat du ministre, d'une mission aussi claire qui édicte, de manière directe, les conclusions auxquelles devrait arriver ce comité?
Je vois que vous avez hâte, madame la présidente, que je mettre fin à mon intervention. Je vais m'arrêter ici parce que je ne veux pas utiliser tout le temps qu'il nous reste puisqu'il y a encore sûrement des questions à poser aux témoins.
Toutefois, et c'est utile de le rappeler à mes collègues, lors de la dernière rencontre, j'ai mentionné l'intention de présenter mes arguments pendant une dizaine de minutes avant que les témoins ne soient entendus. J'avais évoqué cette possibilité. Malheureusement, on m'a alors interrompu. J'ai donc été obligé d'utiliser le temps qui était à ma disposition et au moment où je pouvais le faire, c'est-à-dire pendant que les témoins étaient devant nous. C'est un fait important à souligner. Pour cette raison, je vais inviter mes collègues qui voudraient intervenir au sujet de la motion à le faire. Je rappelle qu'elle se lit comme suit:
Que le Comité n'invite plus aucun témoin dans le cadre de cette étude et qu'il attende les modifications à venir du Ministre des Transports avant de poursuivre ses travaux.
Je dois d'abord dire que je suis un peu déçue de la façon dont les choses viennent de se passer avec tout ce temps utilisé par M. Berthold pendant lequel il nous a été impossible d'exprimer les préoccupations de nos sections locales et de nos sympathisants.
Je vais maintenant répondre à votre question, monsieur Aubin.
Nous nous demandons dans quelle mesure l'Office national de l'énergie est capable de procéder à ces examens, une inquiétude partagée par nos sections locales et bon nombre de nos sympathisants. Nous estimons que c'est au gouvernement fédéral qu'il incombe d'évaluer les répercussions sur les eaux navigables. Nous savons que des employés de longue date du ministère ont pu acquérir une expertise en la matière et qu'il s'agit véritablement d'une responsabilité du gouvernement fédéral.
Comme je l'ai indiqué, des projets comme celui du pipeline d'Énergie Est auraient des répercussions sur de nombreux cours d'eau navigables. Le projet de Kinder Morgan est vraiment problématique en Colombie-Britannique également, car ce pipeline traverserait plus de 1 000 cours d'eau de son origine en Alberta jusqu'à sa destination dans la région de Vancouver.
L'Office national de l'énergie soulève d'importantes préoccupations. Certains remettent en question la légitimité de l'Office. Je sais que le gouvernement Trudeau s'est engagé à revoir la Loi sur l'Office national de l'énergie dans le but notamment de la moderniser, mais il faudra une transformation en profondeur pour regagner la confiance des Canadiens et des collectivités autochtones.
Le gouvernement fédéral doit assumer la responsabilité de la protection des cours d'eau. Nous parlons ici des différentes lois applicables, mais je crois qu'il importe surtout d'envisager les choses dans une perspective globale pour le Canada et les communautés autochtones.
Durant la campagne électorale, a fait de bien belles promesses que les gens ont beaucoup appréciées et qu'ils souhaiteraient vraiment voir se concrétiser. Cela reste à voir, mais je me pose de sérieuses questions à ce sujet. Les modifications apportées à cette Loi et à d'autres également nous indiqueront dans quelle mesure le gouvernement Trudeau respecte ses engagements.
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
Je crois qu'il est important que nos témoins comprennent bien les motifs qui nous incitent, de ce côté-ci de la table, à opposer une résistance à nos collègues relativement aux objectifs visés par cette étude. Il faut noter que le a écrit au Comité pour lui demander de procéder à l'examen de cette Loi dans le but de rétablir certaines des dispositions retirées de la Loi sur la protection des eaux navigables. De plus, le ministre lui-même a indiqué bien clairement que l'on allait assurément apporter des changements à cette Loi.
Je vais essayer de vous expliquer un peu comment les choses se passent généralement. Lorsqu'un ministre décide d'apporter des modifications à une loi, cela se fait avant l'étude de cette loi par un comité. Il indique alors quelles portions de la loi il souhaite que l'on modifie. Un projet de loi est débattu en Chambre et renvoyé au comité s'il est adopté à l'étape de la deuxième lecture. À ce moment-là, le comité en amorce l'étude.
Je m'inquiète du fait que nous procédions à cette étude sans savoir quelles modifications le ministre a à l'esprit. Par conséquent, il est possible que votre contribution ne nous soit d'aucune utilité, selon ce que le ministre a décidé de faire de toute manière. Il se peut que nous vous convoquions de nouveau. Je présume que votre temps est précieux. C'est pourquoi nous continuons à opposer une résistance à nos collègues d'en face et, par le fait même, au ministre qui nous a demandé de procéder à cette étude en sachant fort bien quels changements il voulait apporter à cette loi. On a mis la charrue devant les boeufs, il faut bien l'avouer.
Cela dit, madame la présidente, j'aimerais laisser le reste de mon temps à mon collègue.
Monsieur Farrant et madame Lui, pourriez-vous lever la main si vous êtes satisfaits de l’occasion qui vous a été donnée aujourd’hui de vous exprimer?
Je remercie M. Aubin pour sa motion proposant de vous inviter de nouveau, car cela nous donnera l’occasion d’échanger davantage avec vous. Nous savons que nous devons écouter les conservateurs exprimer leur point de vue. Maintenant que c’est fait, peut-être pourrons-nous entendre un peu plus nos invités, ceux que nous devons entendre, eux qui n’ont pas pu s’exprimer lorsque tout cela s’est produit.
Avant votre prochain témoignage, je vous demanderais de préparer du matériel à nous apporter. Ce serait parfait.
Encore une fois, quels seraient les éléments fondamentaux d’un processus visant à protéger les droits des utilisateurs des cours d’eau ainsi que les droits de ceux qui ont des choses à construire? Quelle forme cela prendrait-il?
Il a été brièvement question de moderniser la loi, mais qu’est-ce que cela signifie? Cela voudrait dire que la loi, dans sa forme actuelle, comporte des lacunes. Pour reprendre l’expression de mon collègue d’en face, plutôt que de jeter le bébé avec l’eau du bain, que peut-on faire pour obtenir quelque chose qui fonctionne?
Que signifie exactement « restaurer la protection »? Monsieur Farrant, je comprends ce que vous dites: un fossé dans lequel il y a de l’eau seulement six jours par année ne devrait pas nécessairement être considéré au même titre qu’une voie navigable importante.
Finalement, il y a un élément dont nous n’avons pas encore parlé. La Loi sur la protection de la navigation accorde la discrétion au ministre de décider, notamment, quels voies navigables, rivières ou lacs ajouter à la liste des cours d’eau protégés. Auriez-vous un mécanisme différent à proposer pour que nous ayons un processus plus simple, équitable et transparent de façon à ce que l’on puisse faire les bonnes choses de la bonne façon?
C’est ce que je voulais vous demander. Encore une fois, j’ai hâte de vous accueillir de nouveau au comité, en espérant que nous aurons suffisamment de temps pour vraiment échanger avec vous sur ces questions.
Merci beaucoup.
Merci, monsieur Hardie, pour ces commentaires.
Je vais laisser de côté la gymnastique politique.
Il y a toujours deux côtés à une médaille, et c’est vrai aussi dans ce cas-ci. Est-ce que nous proposons d’abroger la LPN dans son ensemble? Absolument pas. Il y a certainement des dispositions qui méritent d’être conservées. Est-ce que d’autres dispositions doivent être modifiées? Absolument.
Est-ce que je considère avoir perdu mon temps ce matin? Absolument pas. Chaque fois que le public, une organisation, un intervenant ou une ONG peut témoigner devant un comité — et j’ai eu le plaisir de me livrer à cet exercice à plusieurs reprises au cours des 16 dernières années —, il s’agit d’un exercice en démocratie, un exercice utile, à mon avis. Je peux dire sans équivoque que si j’ai le privilège d’être invité de nouveau à témoigner devant le comité, j’accepterai avec plaisir.
Je vous remercie pour vos questions. Je remercie également M. Berthold qui nous suggère, si nous avons des informations à ajouter, de les faire parvenir au comité, car cela vous sera utile, mais vous nous avez également posé des questions très intéressantes. J’ai promis plus tôt de faire un suivi sur certaines questions posées plus tôt et je serai heureux d’y répondre, soit par écrit ou lors d’une prochaine comparution devant le comité. Je vous remercie.