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La séance numéro 96 du Comité permanent des transports, de l’infrastructure et des collectivités est ouverte. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous étudions les véhicules automatisés et connectés au Canada.
Les témoins que nous accueillons aujourd’hui sont l'agrégé supérieur de recherche, Laboratoire des politiques d’innovation de la Munk School of Global Affairs de l'University of Toronto, M. David Ticoll, le directeur général des communications et des relations gouvernementales de l'Association canadienne des automobilistes, M. Ian Jack et le directeur général du Canadian Automated Vehicles Centre of Excellence, M. Barrie Kirk.
Monsieur Ticoll, vous pouvez commencer. Nous devons vous avertir qu’il y aura peut-être un vote sous peu, de sorte que nous devrons suspendre la séance et nous rendre à la Chambre, puis revenir.
Vous avez la parole pour cinq minutes.
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Merci beaucoup, madame la présidente et membres du Comité, de me donner l’occasion de témoigner à l’appui de votre étude sur les questions liées aux véhicules automatisés et connectés au Canada.
Comme vous le savez peut-être, j’ai également eu l’honneur, avec mes collègues témoins, de comparaître à ce sujet devant le Comité sénatorial permanent des transports et des communications, le printemps dernier. Le rapport du comité sénatorial est excellent. Veuillez tenir compte du fait que mes observations s’appuient sur ce rapport.
J’ai l’intention de me concentrer sur certains enjeux stratégiques importants, mais je parlerai d’abord du décès récent d’un piéton frappé par un véhicule autonome en Arizona. L'enregistrement vidéo laisse entendre que la collision est attribuable à une défaillance des systèmes technologiques, mais les technologies en cause sont simples et sont utilisées à grande échelle. Un véritable mystère. Cet incident a probablement de grandes répercussions sur la politique réglementaire, mais la technologie du véhicule automatisé continuera d'évoluer.
Je vais entrer dans le vif du sujet en proposant respectueusement d’élargir la discussion. Les questions de politique concernant les véhicules automatisés et les véhicules connectés— les VA et les VC, ce que j'appelle la mobilité intelligente — cadreraient mieux avec la planification municipale et le programme des villes intelligentes. C'est ainsi parce que les applications de mobilité intelligente définiront les réseaux des futures villes tout comme les véhicules conduits par des humains ont façonné nos villes et nos villages au cours du dernier siècle. Les villes intelligentes et la mobilité intelligente sont sources de grandes promesses, notamment la sécurité, les avantages environnementaux, la gestion de la congestion, l'accessibilité, la commodité et les économies.
Il y a aussi des risques et des défis. Par exemple, nous savons que le covoiturage dans les grandes villes américaines a déjà augmenté la congestion et réduit l’utilisation du transport en commun. La question est de savoir ce que le Canada fait pour maximiser les avantages et minimiser ou atténuer les risques de baisse.
Je vais me concentrer sur cinq sujets: la gouvernance, les données, l’infrastructure, le développement du secteur de la mobilité et la politique sociale.
Tout d’abord, en ce qui concerne la gouvernance, le Sénat a demandé la création d’une unité d’orientation conjointe Transports Canada-ISDE à ce sujet. Je suggère que, comme c’est le cas ailleurs, cela soit élargi à une approche pangouvernementale, car les révolutions dans les domaines de la mobilité et de l’urbanisme auront des répercussions profondes et perturbatrices sur presque toutes les politiques et tous les secteurs gouvernementaux.
Je suggère également de mettre sur pied un forum fédéral-provincial-territorial-municipal permanent sur la mobilité intelligente dans des villes intelligentes. Ce forum national aurait pour mandat de veiller à ce que nous réalisions la vision du Canada intelligent que les Canadiens veulent.
Pourquoi avons-nous besoin d’un nouveau forum national? Eh bien, passons au deuxième sujet de mon exposé, qui est vraiment au coeur du problème: la politique des données. Le rapport du Sénat porte, à juste titre, beaucoup d’attention à cette question. Il y a de bonnes chances qu’une poignée d’entreprises de mobilité mondiale dominent nos rues, saisissent les données et exercent un contrôle sur leur utilisation. Les risques associés à ce scénario font les manchettes aujourd’hui. Le Sénat formule plus de recommandations sur la politique des données que sur tout autre sujet, y compris la cybersécurité, la sécurité routière et, bien sûr, la protection de la vie privée. Le Sénat souligne également la nécessité d’ouvrir les données et les algorithmes sur la mobilité numérique afin que les entreprises canadiennes puissent participer à ce marché et soutenir la concurrence à ce chapitre.
Le cadre de la politique sur les données du Sénat mérite d’être élargi. Les gouvernements ont besoin de données sur la mobilité et les municipalités pour gérer la circulation et éclairer les investissements dans les infrastructures. Les données sont essentielles à la mobilité en tant que concept de service qui permet aux consommateurs de passer facilement du vélo à l’autobus à la voiture. Elles sont nécessaires pour faire rapport de façon transparente des incidents, des collisions, des émissions, de l'efficacité énergétique et de l'utilisation des routes et pour garantir le respect des politiques en matière d'accessibilité, de tarification et de neutralité algorithmique.
Plus fondamentalement, nous devrions traiter les droits concernant les données comme des droits de la personne. Les particuliers et les collectivités devraient contrôler les données découlant de leurs activités essentielles, par exemple, se déplacer et utiliser les services publics. La mobilité et la vie urbaine, ce n'est pas Facebook, qui est un choix facultatif.
Mon troisième sujet porte sur les infrastructures. Deux choses sont claires. Premièrement, certains plans d’infrastructures actuels clés échouent au test de résistance à l'avenir. Deuxièmement, les modèles de mobilité intelligente axée sur les gens et les transports en commun sont plus clairs qu’il y a un an ou deux. L’approche actuelle qui consiste à laisser les décideurs locaux établir les priorités a trop souvent mené à des décisions qui sont devenues désuètes. Nous devons renverser la vapeur.
Quatrièmement, l’innovation et la croissance des secteurs de la mobilité intelligente et des villes intelligentes. Je suis très actif dans ce domaine. Nous avons 175 entreprises de mobilité numérique en Ontario. Je fais partie du comité consultatif du Réseau d’innovation pour les véhicules automatisés. Il s'y passe beaucoup de choses intéressantes.
Je vais devoir écourter, car je manque de temps, mais je dirai que le gouvernement doit se dépasser en matière de développement des compétences dans ce domaine. Nous devons promouvoir activement la mixité dans les carrières sous-jacentes et les gouvernements doivent accorder la priorité aux investissements dans les infrastructures intelligentes favorisant la mobilité et ouvrir les données pour soutenir le secteur.
Enfin, je parlerai des répercussions sur la politique sociale. D'après mes calculs, la mobilité intelligente entraînera des risques à la baisse pour les emplois dans des secteurs qui occupent 1,3 million de Canadiens. La plupart d’entre eux, comme les agents d’assurance, les concessionnaires automobiles et les travailleurs du secteur du carbone, ne sont même pas des conducteurs professionnels. D’autre part, nous pouvons réaliser de merveilleux gains pour l’environnement, pour toutes sortes de groupes défavorisés et pour l’équité en matière de transport si nous mettons en place nos politiques et nos programmes. Encore une fois, la coordination ne peut qu’aider.
Je terminerai en disant que je serai heureux de travailler avec le Comité et les membres du Comité pour vous aider à préparer votre intervention à ce chapitre. Je suis également conseiller auprès de l'Association canadienne de la technologie de l'information et nous nous intéressons tous beaucoup à la politique concernant les données en particulier et à de nombreux aspects dont l'un concerne le développement économique et la compétitivité du Canada.
Merci.
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Merci beaucoup, madame la présidente et vous, les membres du Comité. Je vous remercie de l’intérêt que vous portez à ce sujet, qui est très important pour plus de six millions de membres de la CAA au pays. Notre principal enjeu concerne le côté affaires publiques à but non lucratif de notre entreprise, y compris la sécurité routière, l’environnement, la mobilité, les infrastructures, la protection des consommateurs et l’avenir de l’automobile, ce qui nous amène ici aujourd’hui, entre autres interventions.
[Français]
Il faut savoir, avant tout, que des véhicules connectés circulent déjà sur nos routes et que la présence de ce type de véhicules augmente chaque année au Canada. La plupart des véhicules neufs, par exemple, offre une connexion GPS au moyen d'une antenne interne. De plus, divers dispositifs de sécurité, comme le système de maintien sur la voie ou le système de stationnement automatique, permettent aux ordinateurs de bord de gérer ce qui se passe à l'extérieur et de prendre le contrôle du véhicule, même si ce n'est que pour quelques secondes.
[Traduction]
Pour la plupart d'entre nous, l'image de la voiture Google n'est pas inconnue et elle nous revient en tête quand nous pensons aux véhicules autonomes. On dirait une espèce différente. Toutefois, il est plus probable que la réalité soit évolutive que révolutionnaire. Lentement, des caractéristiques y sont ajoutées et, ensemble, elles pavent la voie à la pleine autonomie.
Pour nous, le développement de la technologie nécessaire à un véhicule pleinement autonome est inévitable. Il y a toutefois au moins trois grandes questions sans réponse.
La première concerne la rapidité avec laquelle le contexte à l’extérieur du véhicule pourra évoluer pour tenir compte de la technologie. Tous les paliers de gouvernement devront adapter la réglementation en fonction de ce nouveau monde et, dans une certaine mesure, changer la façon dont ils dépensent pour les infrastructures. Prenons par exemple la législation sur les assurances qui parle universellement de personnes. Où se situera la responsabilité dans ce nouveau monde? Il est tout à fait possible d'arriver à trouver une réponse, mais il faudra discuter du sujet et préparer une loi.
[Français]
La deuxième préoccupation, qui est en lien avec la première, concerne la rapidité avec laquelle les véhicules autonomes deviendront monnaie courante sur nos routes. Sachez qu'il pourrait s'écouler 20 ans avant que tous les véhicules en usage aujourd'hui ne soient complètement transformés. Il est impossible d'en être certain, mais on estime que les véhicules autonomes domineront le marché d'ici 2025 ou 2040. Mieux vaut donc s'y préparer sans attendre.
[Traduction]
Cependant, les experts s'entendent pour dire que les véhicules automatisés, ou VA, causeront moins de décès que ceux conduits par des humains et qu'ils devraient permettre à beaucoup de se déplacer comme les personnes âgées qui ne peuvent conduire aujourd'hui. Voilà pourquoi la CAA appuie la mise au point responsable des technologies sous-tendant le véhicule autonome.
[Français]
Passons maintenant à la troisième grande préoccupation pour nous, à l'Association canadienne des automobilistes, soit le contrôle des nombreuses données personnelles que les véhicules connectés et autonomes collecteront sur les conducteurs.
[Traduction]
Les véhicules deviennent des téléphones intelligents sur roues. C’est presque banal de le dire aujourd’hui. Si ce n’est déjà fait, votre véhicule en saura bientôt autant ou plus sur vos déplacements, sur ce que vous aimez et ce que vous détestez que quiconque dans votre entourage, même votre conjoint, à moins que ces personnes ne soient toujours avec vous dans le véhicule. La CAA est depuis longtemps d’avis que les propriétaires de véhicules devraient être informés des données recueillies et être en mesure, dans des limites raisonnables, de choisir à qui ils les communiquent. Il ne doit pas y avoir d’approche « à prendre ou à laisser » qui oblige le propriétaire à renoncer à tous les droits à la vie privée pour profiter des avantages de la technologie automobile.
Ce n'est pas une préoccupation théorique. Dans un sondage d'opinion national mené au début de 2017 par la CAA, 49 % des Canadiens ont dit ne pas connaître l'éventail des données recueillies par leur véhicule aujourd'hui. Quant au partage de ces données, 90 % des Canadiens conviennent que c'est le consommateur qui devrait décider des personnes pouvant accéder aux données de leur véhicule. De plus, dans un sondage national mené à la fin de 2017, 77 % des Canadiens ont avoué ne pas être au courant qu'ils avaient consenti à ce que leurs données privées soient recueillies et utilisées quand ils ont acheté le véhicule.
Pour prouver que le problème de la protection des données dans les véhicules connectés existe aujourd'hui, non pas comme un concept théorique qui se matérialisera dans 10 ans, un Canadien interrogé sur trois qui louait une voiture ou utilisait une voiture partagée a trouvé les renseignements personnels concernant un utilisateur précédent dans le système du véhicule.
[Français]
D'après ce même sondage, 81 % des Canadiens croient que des règles claires doivent être appliquées pour protéger les données personnelles collectées par ces véhicules.
[Traduction]
La CAA a participé à la récente étude du Sénat sur les VA et a accueilli favorablement le rapport final, qui a été publié en janvier 2018. La position de la CAA dans ce dossier a fait écho à la recommandation selon laquelle « Les Canadiens devraient être maîtres de leurs renseignements personnels. » Voici une autre recommandation figurant dans le rapport — « Que Transports Canada rassemble les intervenants concernés — les gouvernements, les constructeurs d'automobiles et les consommateurs — afin d'élaborer un cadre de travail sur les véhicules branchés, dont l'un des principaux éléments sera la protection des renseignements personnels. »
À ce jour, il n'y a pas eu de discussions à cette fin. Nous espérons que le Comité conviendra qu'il faut s'attaquer à ces problèmes et qu'il appuiera cette recommandation.
[Français]
En conclusion, même si certains enjeux doivent être abordés, il est évident que les véhicules connectés et autonomes procureront plusieurs avantages au fil du temps. Il faut cependant prendre part au débat stratégique dès maintenant pour que les gouvernements puissent contribuer au développement responsable de ces technologies novatrices.
[Traduction]
La CAA a hâte de continuer à représenter les intérêts des consommateurs dans cet important dossier. Nous vous remercions de nous avoir invités à témoigner devant vous aujourd'hui.
Merci, madame la présidente.
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Merci, madame la présidente. Bon après-midi, et merci à tous de me donner l’occasion de témoigner.
Je vais être franc et honnête cet après-midi, mais je resterai poli.
En juin 2014, le gouvernement fédéral a demandé à l’honorable David Emerson d’examiner la Loi sur les transports au Canada. Le Canadian Automated Vehicles Centre of Excellence, ou CAVCOE, a contribué à cet examen.
Le rapport Emerson a été publié en décembre 2015 avec les résultats de la recherche sur les VA. Également en décembre 2015, la CAVCOE a publié son Livre blanc sur ce que, selon nous, le gouvernement fédéral devrait faire. Il y avait 30 recommandations relatives aux VA. La plupart ne sont toujours pas mises en oeuvre.
En 2016, Transports Canada a mené de vastes consultations auprès des Canadiens comme mesure de suivi au rapport Emerson. Également en 2016, la Bibliothèque du Parlement a fait des recherches sur les VA et les VC. Encore une fois, nous avons contribué à ces initiatives et le rapport a été publié en septembre 2016.
En 2017, comme vous le savez, le comité sénatorial a fait des recherches et a tenu des audiences. Encore une fois, nous y avons contribué et le rapport a été publié il y a deux mois.
Nous sommes en mars 2018 et vous tenez ces audiences. Parallèlement à tout cela, le personnel de Transports Canada discute des VA avec d’autres groupes au sein de Transports Canada. Le ministère en a discuté avec ISDE. Le gouvernement fédéral discute des VA et des VC avec les provinces et les territoires et Transports Canada en discute avec les États-Unis. Au total, cela fait trois ans et demi d’audiences, de recherches, de consultations et de rapports.
Comme aurait pu le dire le protagoniste de Yes, minister, sir Humphrey Appleby, « tout le monde a été terriblement occupé à tenir des réunions et des consultations et à discuter de ce sujet. » Mon premier message pour vous aujourd'hui, « C'est assez ». Il est temps d'aller au-delà de la recherche, des consultations et des rapports et de passer à l'action.
L’an dernier, Kevin Lynch, vice-président de la Banque de Montréal et ancien greffier du Conseil privé et secrétaire du Cabinet, a publié un excellent article dans le Globe and Mail. L'article s'intitulait « How disruptive technologies are eroding our trust in government ». M. Lynch y mentionnait le rythme de l'évolution technologique qui ne cesse d'augmenter par rapport au rythme d'élaboration des politiques.
J'ai un deuxième message à transmettre au Comité aujourd'hui et j'ai choisi une recommandation clé. Je propose que le gouvernement fédéral crée l’institut canadien des véhicules automatisés, l’ICVA, qui prendrait modèle sur le centre des véhicules connectés et autonomes du gouvernement du Royaume-Uni, le CCAV. Je propose que l'ICVA soit une unité conjointe chargée de la politique de Transports Canada et du ministère Innovation, Sciences et Développement économique. Ce serait un point de convergence pour les représentants du gouvernement, de l’industrie, du milieu universitaire et de l’étranger. Ce centre aiderait le Canada à se placer à l’avant-garde non seulement du développement, mais aussi du déploiement de véhicules autonomes. Le site Web du CCAV du Royaume-Uni présente des objectifs plus détaillés qui peuvent servir de modèle pour la version canadienne.
Selon le cabinet d’experts-conseils KPMG, les Pays-Bas, croyez-le ou non, sont les chefs de file mondiaux en matière de préparation aux VA, avec l’Institut néerlandais des VA, ou DAVI. Les Australiens ont l’Australian Driverless Vehicle Institute, l’ADVI, et le CAVCOE s'y est officiellement associé. Dans le même rapport de KPMG, il y a un tableau montrant l’état de préparation de 20 pays en matière de VA. Le Canada est au septième rang.
Parmi les conseils que j'ai donnés au comité sénatorial chargé d’examiner les VA, j'ai recommandé la création d'un institut canadien des VA. Mon conseil est devenu la recommandation numéro un dans le rapport du Sénat.
En résumé, je crois qu’il est temps que le gouvernement fédéral fasse la transition entre les études, les rapports et les consultations et qu'il commence à mieux préparer le Canada à l’ère des VA.
Je propose que le premier point à l’ordre du jour soit la création d’un institut canadien des véhicules autonomes.
Je vous remercie encore une fois de m'avoir donné l'occasion de me défouler un peu et de faire valoir mes convictions.
Merci, madame la présidente.
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Tout d’abord, je tiens à dire que je suis d’accord avec Barrie pour dire que la première étape consiste à mettre sur pied cette initiative conjointe de Transports Canada et d’ISDE. Nous pourrons ensuite faire fond sur cette initiative nationale dont je parle, mais tout devrait découler de cette initiative. La question de la gouvernance et la manière dont ce phénomène sera dirigé dans ce pays est une question décisive et je vous recommande de tout d'abord trouver un moyen d'aider le gouvernement à se sortir de cette impasse.
Le deuxième problème est celui des données. Je crois que l’une des raisons pour lesquelles le gouvernement a été si lent à agir, c'est que la question des données est confuse; nous n’avons pas les attributions, les outils ou les cadres législatifs nécessaires. La protection de la vie privée est un gros problème, on s'entend, mais ce n’est pas le seul. Il y a beaucoup d’autres questions, notamment la cybersécurité, l’accès aux données pour l’innovation, la mobilité dans les villes et la façon dont les villes gèrent leur environnement. Nous n’avons pas les compétences nécessaires au sein du gouvernement pour élaborer et mettre en oeuvre des politiques en la matière. Outre les voitures et la mobilité, cette question touche à peu près à tous les autres domaines. Voilà deux enjeux fondamentaux qui, à mon avis, seraient incontournables dans la suite des choses.
Permettez-moi de faire un dernier commentaire: il y a beaucoup d’autres facteurs en jeu ici. Il y a toutes sortes de mesures d’ordre administratif, de réglementation qui doivent être prises pour encadrer ce phénomène. C’est un tout autre domaine et je crois que le Comité doit trouver un moyen de faire en sorte que l’administration gouvernementale agisse un peu plus rapidement sur ces fronts, ce qui devrait être très facile par rapport aux questions complexes que je viens de mentionner.
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Puis-je ajouter quelque chose très rapidement pour appuyer ce que l’un de mes collègues a dit? Il est très important de transmettre au gouvernement qu'il y a une certaine urgence dans ce dossier. Il a été relégué au second plan, car le gouvernement aime éteindre des feux, alors en examinant ce dossier, il pourrait conclure qu'il sera d'actualité en 2025 ou 2030, alors pourquoi s'en occuper dès maintenant?
Comme j’y ai fait allusion dans mes remarques et comme le disent mes collègues, il y a énormément de travail à faire et il faudra des années pour le faire. Nous ne nous opposons pas à la proposition sur l'équipement qui a été présentée ici, mais je tiens à souligner que cette compétence, traditionnellement et en vertu de notre Constitution, relève également des provinces. Pour mener à bien ce travail de longue haleine, il faudra, entre autres, que le gouvernement fédéral et les provinces trouvent des façons inédites de travailler. Les fonctionnaires fédéraux à ISDE n’ont pas eu à se pencher sur la réglementation routière provinciale auparavant, par exemple.
Il faudra concilier tout cela de manière innovante, de sorte qu’il y a effectivement une certaine urgence et nous ne devrions pas mettre tout cela en veilleuse en croyant que nous pouvons attendre encore 5 ou 10 ans. Ce n'est pas le cas.
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Merci beaucoup, madame la présidente et merci à nos témoins d’être ici.
J’ai entendu dire à au moins deux reprises au cours de vos remarques liminaires que nous ne disposions peut-être pas des compétences nécessaires actuellement pour composer avec les exigences de la technologie émergente. Monsieur Ticoll, vous avez parlé précisément de la nécessité d’être présent à mesure que les innovations se feraient dans le monde en matière de développement des compétences.
À titre d’exemple, une jeune fille a communiqué avec mon bureau parce qu’elle faisait une recherche sur les véhicules automatiques. À 13 ans environ, elle a présenté un papier sur la question à son salon des sciences. Elle s’appelle Hayley. Elle connaît bien les enjeux relatifs aux véhicules automatiques et je crois même qu’elle en sait plus que la grande majorité des parlementaires. Quand elle m’a demandé de quelle façon elle pouvait continuer à nourrir son intérêt, mon visage est devenu vide d'expression. Je ne savais pas comment la diriger.
Comment pouvons-nous nous assurer que des personnes comme Hayley aient la possibilité de continuer à s'intéresser à cette industrie en plein essor tout en tirant parti de leur talent, afin de rester en tête de peloton si je puis dire, selon l'expression de M. Kirk?
Peut-être que M. Ticoll pourrait répondre en premier, puis M. Kirk ensuite, s'il veut bien.
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Comme je l’ai mentionné, je fais partie du comité consultatif du Réseau d’innovation pour les véhicules autonomes de l’Ontario. J’ai assisté à une réunion la semaine dernière et j’ai eu une conversation avec un fonctionnaire de l’Ontario au sujet de ce qui incite ces 175 entreprises à investir en Ontario. Il a répondu que la principale raison était le talent, la deuxième raison, le talent et la troisième, le talent.
Ceci signifie que nous démarrons sur une bonne base, car nous attirons des investissements très importants depuis notre lent démarrage il y a deux ou trois ans.
Je pense que nous devons maintenant — et j’ai une certaine expérience dans ce domaine — commencer à professionnaliser ce domaine. Nous devons commencer à le structurer en fonction de définitions de carrière claires. Nous devons commencer à mettre en place des programmes postsecondaires consacrés aux villes intelligentes et aux véhicules autonomes. Voici comment on aborde le développement des compétences — et si vous me le permettez, pour répondre à la question précédente, c’est là une façon dont le gouvernement peut jouer un rôle.
À cet égard, je dirais simplement qu'à mon avis, comme il s'agit de vies humaines et des atouts précieux que constituent les données les concernant. Voyez les grands titres: le gouvernement a laissé certaines organisations faire ce qu’elles voulaient avec nos données et il semble que ceci ait créé quelques problèmes auxquels nous devons nous attaquer comme société.
Malheureusement, nous devons nous y attaquer. Il y a de bonnes raisons pour que le gouvernement joue un rôle dans ces dossiers, entre autres.
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En effet, oui. Merci de votre question.
Tout d’abord, je suis d’accord avec mon collègue. Le gros problème pour le gouvernement, c’est qu’il y a trois secteurs différents, ce qui complique les choses. Il y a la technologie, l’innovation et la recherche-développement. Cela va bon train pour l’instant.
Deuxièmement, il y a le cadre réglementaire. Je n’aime pas que le gouvernement intervienne inutilement, mais comme David l’a mentionné, il y a la question de la protection de la vie privée et celle du cadre de réglementation. Je sais que General Motors a demandé au gouvernement américain certains changements à la réglementation sur la sécurité des véhicules, et c'est là l’une des façons dont le gouvernement doit intervenir. GM a annoncé qu’elle se lancerait dans la production de masse de véhicules autonomes en 2019, soit l’année prochaine, et elle a demandé un certain nombre de modifications aux règlements sur la sécurité, non pas pour rendre les voitures moins sécuritaires, mais dans le but d'être réaliste. À l’heure actuelle, la réglementation au Canada et aux États-Unis exige qu’il y ait un coussin gonflable à l’intérieur du volant. S’il n’y a pas de volant, cela n’a aucun sens. Ce que GM propose, c’est de traiter les deux sièges avant d’une voiture de la même façon, c'est-à-dire de la façon dont les sièges de passagers sont équipés à l'heure actuelle.
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Merci, madame la présidente.
Messieurs, merci d'être avec nous.
Après vous avoir écouté, je prends conscience de deux choses. D'abord, nous avons bien saisi le message selon lequel il faut cesser d'entreprendre des études et passer à l'action. Mais il semble aussi que le Canada accuse un retard certain — plus qu'un certain retard — en la matière.
J'aimerais revenir à vous, monsieur Kirk, mais les autres témoins peuvent répondre également.
S'il était créé, quelle spécificité l'institut canadien pourrait-il apporter que les autres instituts ayant une longueur d'avance sur nous n'apportent pas déjà? Cette spécificité est-elle liée au climat canadien, par exemple?
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Je vais faire deux brèves observations, étant donné que je suis conscient du temps, madame la présidente.
La première, c’est que je n’ai pas suggéré, sauf votre respect, que nous rendions les voitures moins sécuritaires. Ce que GM demande aux États-Unis, et que j’appuie, c’est de faire en sorte que les sièges avant soient aussi sécuritaires et qu’il y ait le même nombre de coussins gonflables qu'il y en a actuellement devant le siège passager.
Pour ce qui est de la sécurité générale, il y a un certain temps, nous avons rédigé un rapport conjoint avec Le Conference Board du Canada, lequel prévoyait qu’avec le déploiement complet des véhicules autonomes et des véhicules connectés, nous pourrions en fait éliminer 80 % des collisions, des accidents de la route et des blessures. C’est un grand pas en avant. Je pense que la plupart des gens sont d’accord pour dire que les VA et les ordinateurs seront beaucoup plus sûrs que les conducteurs humains.
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Certains concepteurs et fabricants de véhicules autonomes, Waymo par exemple, ont dit qu’ils concevaient leurs véhicules en présumant qu’il n’y aurait pas dans l'avenir d’infrastructure de soutien. Ils doivent présumer que si leurs véhicules sont capables d'aller n’importe où — ce qui constitue leur objectif à long terme —, ils ne pourront compter sur aucune infrastructure de soutien.
Par conséquent, si le Canada croit, et si vous croyez en tant que membre de notre gouvernement, qu’il est souhaitable que le Canada agisse plus rapidement en ce qui a trait au développement de l’industrie et à l’innovation urbaine, alors il serait probablement pertinent d'investir dans l’infrastructure intelligente.
Nous appelons ces automobiles des « véhicules connectés et autonomes ». La partie « connectée » est celle qui nous intéresse et il y a deux types de choses que nous pouvons apporter: d'abord, un grand nombre de dispositifs intelligents avec lesquels les véhicules peuvent communiquer et qui sont intégrés aux circuits routiers — les feux de circulation, les autres voitures et ainsi de suite. Ils sont tous électroniques. Ensuite, il y a le marquage des routes, qui relève de technologies matérielles.
La Ville de Montréal, qui fait preuve de beaucoup d’innovation en matière d’infrastructure pour les vélos, est en train de repenser le fonctionnement de ses rues, ce qui présente une occasion en or. La communauté de l’intelligence artificielle participe également à ce renouvellement. Ce serait un excellent endroit où commencer à innover, car les rues y subissent déjà de nombreuses transformations.
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J’ai quelques observations à faire.
Nous devons adopter un point de vue très holistique. Qu’en est-il de l’emploi des conducteurs? Comme nous travaillons avec l'Insurance Corporation of B.C. et que nous nous occupons de sécurité routière, surtout de l'excès de vitesse, depuis des années, nous savons que ce sont les écarts en matière de caractéristiques de conduite, si vous voulez, qui peuvent causer une foule de conflits de circulation. Qu’en est-il de la période de transition, quand les trois quarts de la population conduisent toujours des voitures et que l’autre quart est autonome? Je vous laisse y réfléchir.
Je veux contester certaines de vos hypothèses.
Quand j’étais enfant, le lait était livré à cheval à la maison, croyez-le ou non. Je suis vieux à ce point. Eh bien, vous savez quoi? On a recommencé à livrer les commandes d'épicerie. Si j'examine la région métropolitaine de Vancouver, je constate que la ville est conçue pour réduire la nécessité de se déplacer. Essayez-vous de trouver une nouvelle technologie qui pourrait être dépassée au moment où elle sera prête si les gens n’ont pas besoin de se déplacer autant?
L’autre problème, c’est que la conduite n’est pas une fonction utilitaire. Les gens aiment conduire. Ils échangent dans la voiture. Ils font beaucoup d’autres choses en plus de simplement se rendre d'un point A à un point B. Envisageriez-vous de les obliger à ne plus conduire leur voiture pour réduire les conflits de circulation?
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C’est une bonne question.
Pour ce qui est de la résistance, j’ai deux choses à dire.
Tout d’abord, il y a l’infrastructure. David a bien dit qu’il y a deux types d’infrastructure différents. L’infrastructure matérielle, et le premier commandement pour les VA, à mon avis, c’est « tu ne devrais avoir aucune infrastructure matérielle spéciale ». Les VA auront les capteurs, les logiciels et l’intelligence artificielle nécessaires pour circuler sur les mêmes routes que les êtres humains. Aucun gouvernement, aucune alliance de pouvoirs publics, ne peut se permettre de moderniser toute l’infrastructure à temps pour l’arrivée des VA.
Le deuxième commandement de l’infrastructure, en ce qui concerne les VA, c’est qu’une fois que nous avons suffisamment de VA en circulation, nous pouvons optimiser l’infrastructure. Une étude effectuée au Texas montre que...
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Bien sûr, et à toutes fins utiles, la CAA ne recommandera jamais de retirer aux gens leurs voitures.
En même temps, je suis d’accord avec mon collègue David. Les sondages indiquent clairement que plus on est jeune, moins on est attaché à la conduite et à un véhicule, et plus on la voit comme étant utilitaire. L'ensemble de la population n'est pas de cet avis, mais cela ne saurait tarder.
Encore une fois, nous envisageons un horizon assez long. Cela ne se fera pas en 2021. L’adoption massive de ces choses se produira un peu plus tard.
J’aimerais revenir sur ce que quelqu’un a dit de ce côté-ci de la table, à savoir que la technologie est à nos portes. J’ai mentionné tout à l’heure que c’est probablement... C’est aussi évolutif que révolutionnaire. Si vous disposez d'un système de maintien sur la voie, d'un véhicule qui freine quand vous vous approchez trop de celui qui est devant vous, vous possédez déjà une voiture qui se dirige vers l’autonomie. Je pense que la plupart d’entre nous — d'une génération de véhicules à l'autre au cours des 5 à 10 prochaines années — allons simplement passer de 5 ou 10 % à 20, 50 et 75 % d’autonomie avant même de nous en rendre compte.
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Bien sûr. Nous verrons si nous pouvons aller jusqu'à cinq minutes, madame la présidente.
Je tiens d’abord à dire que je suis personnellement très enthousiaste à l’égard de l’avenir des véhicules autonomes, et je pense que c’est quelque chose qui intéresse la plupart des Canadiens, malgré leur réserve sachant que des problèmes se posent. Je fais référence à ce qui s’est produit en Arizona.
Je discutais avec des gens qui travaillent dans le domaine de l’IA. Je viens d’Edmonton, en Alberta, où l’Université de l’Alberta a réalisé d’importants progrès en matière d'IA afin de trouver des endroits où mettre à l’essai les véhicules autonomes là-bas dans ce que nous n’appellerons pas la météo du Nevada, mais différents types de conditions météorologiques. Néanmoins, lorsqu’un incident comme celui de l’Arizona se produit, il y a toujours une sorte de recul où l'on se demande ce qu'il faut faire maintenant et où l'on trouve que cela va trop vite.
À votre avis, est-ce que certaines entreprises et certains organismes se sont précipités et ont agi trop vite? Vous avez dit que le gouvernement était très lent, mais ces problèmes continuent de se produire. Je ne pense pas qu’il appartienne au gouvernement de déclarer qu’il ne faut pas s’en inquiéter, que cela n'arrivera pas ici, que cela ne devrait pas se produire au centre-ville de Toronto. Toronto a retiré ses véhicules de la route.
Je vais vous donner l’occasion de rassurer les Canadiens pour qui ces cas isolés représentent un problème systémique plus important en matière d’utilisation de l'intelligence artificielle sur les routes.
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Merci beaucoup, madame la présidente. Bonsoir à tous.
Je vous remercie de me donner l’occasion de m'adresser à vous pour traiter de la question des véhicules automatisés et des véhicules connectés.
L'adoption de ces technologies gérée efficacement par l'industrie offre l'occasion de faire des progrès techniques susceptibles d'améliorer grandement la sécurité et d'accroître la mobilité, ainsi que de favoriser l’innovation et la croissance dans les entreprises de technologie et les instituts de recherche canadiens.
Il est essentiel que le Canada travaille en partenariat avec les États-Unis et l’industrie afin d'harmoniser et de synchroniser les exigences des politiques, car ces pays forment une aire géopraphique dotée d’une infrastructure uniforme où les déplacements s'effectuent sans heurts entre les frontières. La technologie des véhicules dans ces domaines continue d’évoluer rapidement, et les membres de l’ACCV demeurent déterminés à investir dans la recherche et le développement et à assurer le déploiement de technologies de pointe en matière d’aide à la conduite qui réduisent les accidents, les blessures et les décès au profit des occupants des voitures et des usagers de la route vulnérables, y compris les véhicules automatisés et les véhicules connectés.
L'engagement du gouvernement, sous la direction de Transports Canada, sera nécessaire pour faciliter le déploiement et l’acceptation de ces technologies par le public. Bien que certains déclarent que les technologies propres aux VA et aux VC, comme il est convenu de les appeler, pourraient être prêtes au cours des deux à trois prochaines années, nous tenons à préciser que leur adoption commencera lentement et de façon très contrôlée; il est probable qu'on aura recours d'abord à des applications commerciales spécialisées, comme le covoiturage, avant de les rendre accessibles aux consommateurs. Au fur et à mesure que la technologie progressera et sera mise en application, Transports Canada jouera un rôle clé en vue d'assurer la coordination nationale et l’harmonisation des approches réglementaires qui seront éclairées par les mesures réglementaires et non réglementaires américaines.
Nous tenons à souligner les progrès récents, y compris les modifications apportées à la Loi sur la sécurité des véhicules automobiles permettant la mise à l’essai et le déploiement de nouvelles technologies en cas de conflit avec les règlements actuels. Des mesures ont également été prises afin d'assouplir la loi afin d’harmoniser la réglementation pour la rendre conforme aux exigences de l’industrie et des États-Unis qui sont élaborées rapidement, compte tenu des objectifs en matière de conditions routières et de politique publique que nous partageons largement en commun.
De plus, le Comité sénatorial permanent des transports et des communications a publié son rapport intitulé Paver la voie: Technologie et le futur du véhicule automatisé, et Transports Canada a entrepris des consultations sur les options stratégiques en vue d'améliorer le régime de sécurité des VA et des CV. Transports Canada collabore également avec les provinces et les territoires par l’entremise du Conseil canadien des administrateurs en transport motorisé.
À mesure que la préparation se poursuit, il est primordial de veiller à ce que les approches soient harmonisées d'une administration à l'autre et d’éviter les obstacles susceptibles de nuire à la mise à l’essai et au déploiement de ces technologies au Canada. Ces mesures sont essentielles pour que le Canada puisse attirer des activités qui appuieraient les efforts mondiaux, compte tenu des nombreux essais et recherches qui ont déjà lieu dans d’autres pays.
Nous sommes également très conscients du fait que la confidentialité des données et la cybersécurité sont des éléments clés du déploiement réussi et de l’acceptation par le public des véhicules automatisés et connectés. Ils sont une priorité pour l’industrie automobile, le consommateur et le gouvernement. La protection et la confidentialité des données sont intégrées dès les premières étapes du développement des produits. À mesure que ces technologies évolueront, les entreprises membres de l’ACCV continueront de se conformer aux lois fédérales et provinciales exhaustives visant à protéger les renseignements personnels des consommateurs. À l'échelle fédérale, cela comprend la LPRPDE ainsi que la LCAP.
Les constructeurs d’automobiles sont également proactifs lorsqu’il s’agit de prendre des mesures pour régler les problèmes de cybersécurité. Des dispositifs de sécurité sont mis en oeuvre à chaque étape de la conception et de la fabrication des véhicules. Depuis longtemps, le secteur a établi des partenariats avec des groupes de recherche publics et privés et participe à des forums sur de nouveaux enjeux. Le Centre d'échange et d'analyse de renseignements — communément appelé Auto-ISAC — a été créé en juillet 2015 pour trouver et échanger de l’information sur les cybermenaces possibles dans le cadre des efforts continus de l’industrie visant à protéger les systèmes et les réseaux électroniques.
À mesure que les technologies des véhicules automatisés et connectés seront élaborées et mises en application, il faudra poursuivre les discussions dans de nombreux domaines, mais je m'arrêterai ici. Je veux toutefois insister sur la détermination des membres de l’ACCV à assurer la sécurité et la protection des renseignements personnels des Canadiens et à maintenir un dialogue constructif avec le gouvernement à mesure que ces technologies continueront de progresser.
Merci beaucoup.
Je vous remercie de m'avoir invitée.
[Traduction]
Il est largement admis qu’au cours de la prochaine décennie, le secteur des transports fera l’expérience de plus de changements qu’il n'en a connus au cours du siècle dernier. Les nouvelles technologies pour les véhicules et les nouveaux modèles de mobilité auront une incidence profonde sur la circulation des personnes et des biens.
Du côté de la technologie, la connectivité et l’automatisation feront partie du paysage de la mobilité. La combinaison de ces technologies est prometteuse pour assurer une mobilité plus sûre, plus démocratique et, si elle est planifiée de façon appropriée, plus durable grâce à l’utilisation judicieuse des VA. Dans le monde entier, les gouvernements adoptent des règlements favorisant l’arrivée de ces véhicules et investissent dans la création de carrefours industriels axés sur les technologies des véhicules connectés et autonomes, dans l’espoir d’attirer des intervenants dans le domaine de la mobilité qui engageront des fonds localement, ce qui rapportera des avantages économiques substantiels.
Au Canada, l’Ontario a pris les devants en matière de développement et d’intégration de ces technologies. Par l’entremise des Centres d’excellence de l’Ontario, le gouvernement de cette province investit avec l’industrie privée dans les efforts consacrés à la recherche et au développement. La présence d'une main-d'oeuvre qualifiée apte à mettre au point ces technologies est, bien sûr, essentielle pour attirer des intervenants. À titre d'exemple, les travaux de recherche en VA effectués à l’Université de Waterloo, qui sont reconnus à l’échelle internationale, attirent l’attention et les investissements du secteur privé.
En décembre 2017, le gouvernement du Québec a déposé le projet de loi 165 visant à modifier le Code de la sécurité routière et d’autres dispositions. Il prévoit des règles spéciales susceptibles d'être fixées dans le cadre d’un projet pilote autorisé par le ministre afin de permettre aux VA de circuler sur le réseau routier du Québec. Comme on l’a dit précédemment, le moment est venu d’agir pour faire en sorte que le Canada soit un acteur important dans ce qui devrait devenir une industrie de plusieurs milliards de dollars.
Grâce à l’expertise de ses membres, Mobilité électrique Canada occupe une place privilégiée pour comprendre et promouvoir l’adoption accélérée des VA comme élément clé d'une mobilité durable. Nous sommes convaincus que les futurs véhicules connectés et autonomes doivent être dotés d’une propulsion électrique afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Nous encourageons le gouvernement fédéral à étudier les répercussions des véhicules connectés et des VA dans le Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques et à élaborer des règlements qui feront en sorte que les futures technologies véhiculaires soient électriques.
L'International Zero-Emission Vehicle Alliance, qui compte des membres en Europe et en Amérique du Nord, dont deux au Canada, soit au Québec et en Colombie-Britannique, étudie actuellement l’avenir des parcs de véhicules autonomes en autopartage et les moyens de faire en sorte qu'il soient composés de véhicules électriques. Les autorités cherchent à collaborer avec d’autres gouvernements en vue d’élargir le marché mondial des VEZ et d’améliorer la coopération gouvernementale en matière de politiques sur les VEZ afin de renforcer et de coordonner les efforts visant à lutter contre la pollution atmosphérique, de limiter les changements climatiques mondiaux et de réduire la dépendance au pétrole en augmentant le déploiement des VEZ.
Je suis la gestionnaire de projet de cette initiative et je dirige le travail de l’alliance. J’encourage le gouvernement du Canada à tirer des leçons des travaux entrepris par cette alliance.
Le Comité permanent des transports, de l’infrastructure et des collectivités de la Chambre des communes devrait étudier comment faire en sorte que les véhicules connectés et automatisés soient électriques. Cette étude devrait viser trois objectifs.
Il s'agit d'abord de déterminer les avantages des VA électriques compte tenu des changements climatiques au Canada. Aujourd’hui, les transports produisent environ le quart des émissions de GES au pays. Comme il est prévu, si le nombre de kilomètres parcourus par les véhicules augmente avec l’arrivée des VA, sans changement dans les technologies de propulsion, nous pouvons raisonnablement nous attendre à ce que le secteur des transports entraîne des augmentations importantes des émissions de GES. Compte tenu des émissions de GES générées par le secteur des transports, des engagements du Canada en matière de changements climatiques et des inconnues quant à l’utilisation des VA, il est essentiel que le Comité recommande les nombreux avantages que présentent les technologies véhiculaires à venir utilisant l'électricité, et rassemble des informations à ce sujet.
Le deuxième objectif consiste à déterminer les domaines relevant de la réglementation fédérale. Le gouvernement fédéral canadien doit agir dans l’intérêt des Canadiens. Dans le domaine des VA et des VC, il est recommandé de collaborer avec d’autres administrations et d'autres organisations comme l'Alliance VEZ, et d'en tirer des enseignements. Le travail que nous proposons devrait évaluer les répercussions de ces technologies et des modèles de gestion connexes afin d’élaborer des politiques, des règlements et des programmes qui tiennent compte de l’intérêt des Canadiens, de l’économie et de l’environnement, et il devrait comporter trois éléments.
Premièrement, il faut déterminer comment assurer la sécurité de la technologie, comment nous la testons.
Deuxièmement, il faut évaluer les changements à apporter à la législation sur les données pour sauvegarder les intérêts des Canadiens concernant notamment la garde, l’accès et l’utilisation des données sur la mobilité, ainsi que les modalités de collaboration avec les gouvernements provinciaux, territoriaux et municipaux afin d’assurer la mise en place de modèles de mobilité durable intégrant ces technologies.
La troisième partie de cette étude vise à cerner les avantages économiques et les possibilités de création d’emplois au pays. Nous avons parlé des pertes d’emplois. Nous devons maintenant déterminer comment l’arrivée de cette technologie et de ces modèles commerciaux peuvent créer des emplois au Canada.
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Bonjour. Je m’appelle Kent Rathwell, de Sun Country Highway.
Voilà bien des années, avant qu’il ne se passe grand-chose dans le secteur des véhicules électriques, nous avons décidé que si l'on ne prenait pas en compte le fait que les véhicules électriques ne puissent pas voyager, le véhicule électrique mourrait. Ce serait comme avoir des véhicules à essence sans stations-service.
Vers 2011, nous avons décidé d’électrifier toute la Transcanadienne de St. John’s, Terre-Neuve, à Victoria, en Colombie-Britannique, et ce, sans l’aide financière du gouvernement. Nous voulions prouver que les gens ordinaires et les Canadiens d’un bout à l’autre du pays pouvaient s’unir pour assurer la survie du véhicule électrique à l’échelle mondiale.
Nous avons électrifié toute la Transcanadienne en l’espace de huit mois. Le neuvième mois, nous avons parcouru 10 000 kilomètres au volant de la voiture la plus rapide et la plus sexy au monde pratiquement. Dépourvue de tuyaux d’échappement, elle bénéficiait d'une infrastructure permettant un chargement quelques centaines de fois plus rapide que la norme prévue par le secteur de l’automobile pour le niveau 2.
Nous l’avons conduite en plein hiver pour prouver qu’au Canada, même dans un climat parmi les plus rudes et les plus froids du monde, l'infrastructure de véhicules électriques faisait ses preuves. Débat terminé. Nous avons montré que non seulement les voitures peuvent être rapides et attrayantes, mais qu’elles peuvent circuler sans émissions et que tout le réseau est en fait gratuit. Depuis, nous avons électrifié la plupart des routes du Canada avec la même technologie.
Quant au secteur de l’automobile, il reste à la traîne. Mis à part Tesla et quelques autres constructeurs qui nous ont emboîté le pas, il continue de sortir des véhicules incapables de tirer pleinement parti de notre capacité de rechargement de niveau 2, des centaines de fois plus rapide.
Nous avons maintenant déployé cette infrastructure dans de nombreux pays et définitivement prouvé que les voitures peuvent circuler à peu près partout chez nous et que leur performance de rechargement dépasse de loin les normes actuelles avec une infrastructure déjà en place. Mais le secteur automobile ne suit pas.
Essentiellement, je suis ici pour ajouter quelques touches au tableau que pourrait présenter le déploiement de véhicules autonomes.
Nous avons fait venir d’autres constructeurs au Canada pour leur fournir l’ingénierie, la conception et les pièces canadiennes. En fait, ils font aussi tous leurs essais de collision au Canada.
En ce qui concerne les véhicules autonomes, c’est un nouveau secteur. Il est en croissance rapide et appelé à gagner en sécurité. Il pourrait, dit-on, représenter un chiffre de plusieurs billions de dollars d’ici 2025.
Le Canada peut renoncer devant la difficulté. Ou bien se fixer des objectifs à sa portée et se concentrer sur quelques filières et domaines permettant une mise en oeuvre rapide de la conduite autonome pour devenir un chef de file mondial sur ces fronts. Nous pourrons alors non seulement stimuler notre économie, mais aussi sauver des vies comme le disait un témoin précédent.
Nous pouvons aussi réduire les émissions. Au Canada, les émissions dues aux transports constituent l’un de nos plus grands enjeux dans la lutte contre les changements climatiques et nous pouvons le faire très facilement dans le secteur des transports.
Encore une fois, je vous remercie de m’avoir invité aujourd’hui.
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Merci, madame la présidente.
J’aimerais creuser encore un peu la question, d’autant que nous en avons discuté tout à l’heure, et la centrer sur les fabricants et les consommateurs.
J’ai deux questions.
Songez que le gouvernement tente d’être un catalyseur. Nous essayons de donner des outils au secteur au moyen de nos programmes de recherche et de développement, d’innovation, de nos programmes scientifiques et de faciliter par là les choses entre les paliers de gouvernement — fédéral, provincial, municipal ou les différents ministères fédéraux et provinciaux — et, bien sûr, de faire les investissements appropriés dans l’infrastructure afin de nous préparer au mieux à ce changement de culture. Enfin, avant de poser mes questions, je veux souligner que la culture ne concerne pas seulement la conduite automobile, mais aussi la façon dont le produit est livré et le transport en commun et la liste continue.
Tout cela amène deux questions. Premièrement, le gouvernement peut-il faire davantage pour permettre à l’industrie de mettre en place les normes beaucoup plus rapidement, comme le suggéraient les délégués précédents?
Ma deuxième question vise l'intérêt du consommateur, car on sait qu’il y aura beaucoup d’avantages sur le plan des possibilités de revenus pour les fabricants. Ils seront en mesure de se procurer de nouveaux courants de revenus par comparaison avec l'achat ponctuel du véhicule, qui n'offre plus guère de possibilité de renouveler les revenus. Maintenant, la collecte de données, la publicité et autres choses du genre offriront de nombreuses autres possibilités pour ces fabricants de réaliser des revenus.
Ma deuxième question concerne le consommateur. Le consommateur aura-t-il la possibilité de profiter d’un prix plus bas ou des nouvelles sources de revenus qu’offrira désormais le véhicule dans les différents secteurs?
Tout d’abord, ces technologies ne sont pas pour l’année prochaine ni la suivante. Leur introduction sera lente. On n’a pas besoin d’avoir que des véhicules à émission zéro — en fait, au départ, il n'y aura probablement pas que des VEZ —, mais les véhicules électriques joueront certainement un grand rôle dans le domaine des véhicules autonomes.
Nous passons à une économie partagée. On en vient non seulement à la voiture partagée, mais à une économie partagée où les gens n’achètent pas nécessairement un véhicule, mais où ils bénéficieront de tous les avantages de transport que leur donnerait un véhicule. Cela offrira de nombreuses possibilités en matière de mobilité et pour les personnes handicapées et il y aura des avantages pour les consommateurs à cet égard.
On parle de publicité et de débouchés économiques sur le plan des ventes et de choses de ce genre, mais c’est probablement le moindre de nos objectifs. Ce qu'on cherche à faire, c’est à construire un véhicule sécuritaire, capable d’anticiper toutes les conditions routières, qui sera relié à l’infrastructure de manière à faciliter le déplacement des véhicules et à réduire la congestion et les émissions. C’est tout cela.
Nous devons être prudents, car on n'en est pas au « prêt-à-brancher ». On a intégré dès le départ la technologie dans la conception et la fabrication du véhicule. C’est parce que nous devons prévoir tous les types de conditions routières et météorologiques et l’intégration avec l’infrastructure elle-même, et c’est une tâche énorme. C’est pourquoi nous formons des partenariats de recherche avec des universités et des instituts ici au Canada sur l’intelligence artificielle et ainsi de suite.
Cela fait partie de l’autre économie dont nous bénéficierons. Les consommateurs eux-mêmes obtiendront cet avantage sans avoir peut-être à supporter tous les coûts associés à la propriété et c’est vraiment l’élément clé.
Nous dépenserons probablement 100 milliards de dollars pour les véhicules à émission zéro, les véhicules électriques, alors ils feront partie intégrante de l’avenir, mais il nous faut distinguer entre véhicules connectés et véhicules autonomes. L'évolution de ces derniers n'est pas subordonnée à celle des véhicules électriques; elle tient simplement à l’aspect autonome de la chose, aux avantages en matière de réduction du nombre des blessés et des décès et de mobilité. Les VEZ en feront partie à l’avenir, mais je peux vous dire que ce sera une combinaison de ces éléments pendant la période de transition, et cette période de transition prendra un certain temps.
Ce sont des questions très compliquées et notre industrie veut procéder avec ordre et méthode. D'où l'importance de travailler avec Transports Canada et les provinces pour veiller à ce que nous ayons des règlements uniformes qui n’entraveront pas l’introduction de ces technologies.
Dans toutes les études et évaluations effectuées à ce jour à l’échelle internationale en vue de connaître le nombre de véhicules-kilomètres que peut parcourir un véhicule automatisé, on estime que le nombre de kilomètres parcourus peut augmenter de moitié ou doubler. Ainsi, si on continue d'utiliser le moteur à combustion interne pour se déplacer, compte tenu de l’importance du secteur des transports dans les émissions de gaz à effet de serre, nous allons nous retrouver dans une situation très difficile, en tant que pays, voire même à l’échelle internationale, pour atteindre bon nombre de nos objectifs d’atténuation des changements climatiques, si nous n’y réfléchissons pas à l’avance et ne mettons pas des règles en place.
Par exemple, des municipalités et des pays affirment déjà qu’en 2030 ou en 2035, ils n'autoriseront plus les véhicules à moteur à combustion interne. Ce que je propose, c’est que, alors que nous nous préparons à l'arrivée des véhicules automatisés, avec ce qu'on sait déjà en termes de véhicules-kilomètres, on songe à introduire des commandes électriques dans ces véhicules.