:
Merci, madame la présidente. C'est un plaisir d'être ici aujourd'hui.
Je suis Helena Borges, sous-ministre déléguée des Transports. J'ai déjà comparu devant le Comité par le passé, alors vous allez peut-être vous rappeler de moi.
Je suis aujourd'hui accompagnée de plusieurs de mes collègues du ministère et du Bureau de la concurrence. M. Alain Langlois est l'avocat en chef dans ce dossier. Mme Brigitte Diogo est notre directrice générale de la Sécurité ferroviaire. J'ai ici Mme Marcia Jones, directrice des politiques ferroviaires; Mme Sara Wiebe, directrice générale de la Politique aérienne; et enfin, M. Mark Schaan, d'ISDE.
Tout d'abord, permettez-moi de reprendre les propos de la présidente en remerciant le Comité d'être revenu plus tôt et de prendre le temps d'étudier ce projet de loi avant la reprise des travaux du Parlement. Si vous n'avez pas passé l'été ici à Ottawa, sachez qu'il s'agit officiellement de la première semaine de l'été, du point de vue de la météo, parce qu'il a plu sans arrêt.
Le projet de loi , Loi sur la modernisation des transports, prévoit des modifications législatives qui permettront au gouvernement d'aller de l'avant dans la prise de mesures préliminaires dans le cadre de Transports 2030, un plan stratégique du gouvernement sur l'avenir des transports au Canada. Ce plan a été annoncé par le ministre des Transports en novembre dernier à l'issue de nombreuses consultations menées auprès d'intervenants de l'industrie, de groupes autochtones, de provinces et territoires et de Canadiens, en fonction des constatations et des recommandations du rapport d'examen de la Loi sur les transports au Canada. Vous entendrez plus tard aujourd'hui M. Emerson, qui était le président de ce comité d'examen. Grâce à ce processus, nous avons pu entendre un vaste éventail de points de vue sur l'avenir des transports au cours des 20 à 30 prochaines années, et sur la façon de voir cela se matérialiser pour nous assurer que le réseau national des transports continue de stimuler la compétitivité, les échanges commerciaux et la prospérité du Canada à l'échelle internationale.
[Français]
Le projet de loi fait la promotion de la transparence, de l'efficacité du réseau et de l'équité. Il propose des modifications législatives qui répondront mieux aux besoins et aux attentes des voyageurs et des expéditeurs canadiens en matière de services. Il créera également un réseau de transport plus sécuritaire et plus novateur qui positionnera mieux le Canada afin que ce dernier tire parti des possibilités mondiales et prospère dans une économie très performante.
Permettez-moi de souligner les éléments clés du projet de loi.
[Traduction]
Je vais commencer par les initiatives dans le domaine du transport aérien. Le projet de loi propose la création de nouveaux règlements pour renforcer les droits des passagers aériens du Canada en veillant à ce qu'ils soient clairs, uniformes et équitables, pour les voyageurs et les transporteurs aériens. L'Office des transports du Canada aura pour mandat d'élaborer, de concert avec Transports Canada, ces nouveaux règlements, et il consultera les Canadiens et les intervenants une fois la sanction royale obtenue.
L'objectif primordial de cette nouvelle démarche est d'assurer que les Canadiens et quiconque voyage à destination, en provenance et dans les limites du Canada comprennent leurs droits en tant que passagers aériens sans compromettre l'accès aux services aériens ni faire augmenter le coût des voyages en avion pour les Canadiens.
Le projet de loi stipule que ces règlements comporteront des dispositions au sujet des irritants les plus courants suivants: fournir aux passagers, en langage clair, des renseignements sur les obligations des transporteurs, ainsi que sur la marche à suivre pour obtenir réparation ou déposer une plainte; établir des normes de traitement des passagers en cas de surréservation, de retard et d'annulation, y compris l'indemnisation; uniformiser les niveaux d'indemnisation en cas de perte ou d'endommagement des bagages; établir des normes de traitement des passagers en cas de retard d'une durée donnée sur l'aire de trafic; asseoir les enfants près d'un parent ou d'un tuteur sans frais supplémentaires; et exiger des transporteurs aériens qu'ils élaborent des normes régissant le transport des instruments de musique.
Enfin, ce projet de loi propose également d'établir des règlements afin de recueillir des données pour permettre de surveiller l'expérience des passagers aériens, notamment le respect par les transporteurs aériens de l'approche envisagée sur les droits des passagers.
[Français]
Par ailleurs, le projet de loi propose d'assouplir les restrictions sur la propriété internationale. Ainsi, le maximum en ce qui a trait aux transporteurs aériens canadiens passera de 25 % à 49 %. Afin de protéger la compétitivité du secteur aérien et d'appuyer la connectivité, cette disposition est assortie de garanties connexes.
Parmi ces garanties, mentionnons les restrictions selon lesquelles, d'une part, un seul investisseur international ne pourra détenir plus de 25 % des actions avec droit de vote d'un transporteur aérien canadien et, d'autre part, aucune combinaison de transporteurs aériens étrangers ne pourra posséder plus de 25 % des actions d'un transporteur canadien.
Ce changement de politique ne s'appliquera pas aux services aériens spécialisés du Canada, comme l'hélidébardage, la photographie aérienne ou la lutte contre les incendies, dont le pourcentage maximum d'actionnariat international demeurera à 25 %.
L'assouplissement des restrictions relatives à la propriété internationale signifie que les transporteurs aériens canadiens — ce qui englobe les fournisseurs de services de transport de passagers et de fret — auront accès à davantage de capitaux d'investissement, qu'ils pourront utiliser pour innover et, peut-être même, pour prendre de l'expansion.
Cela contribuera à augmenter la compétitivité du secteur aérien canadien, en plus d'offrir davantage de choix aux Canadiens et de générer des profits pour les aéroports et les fournisseurs, ainsi que de nouveaux emplois pour les Canadiens.
Une plus forte concurrence au sein du marché pourrait à son tour réduire le coût du transport aérien et ouvrir de nouveaux marchés aux consommateurs et aux expéditeurs au Canada. Cela pourrait englober la création de nouveaux transporteurs à très bas coût, desservant de nouveaux secteurs du marché canadien.
[Traduction]
Le projet de loi propose un nouveau processus transparent et prévisible autorisant les coentreprises entre transporteurs aériens, en tenant compte de la concurrence et des considérations plus vastes d'intérêt public et en établissant des échéanciers clairs pour la prise de décisions.
Les coentreprises sont monnaie courante dans le secteur mondial du transport aérien. Elles permettent à deux ou à plusieurs transporteurs aériens de coordonner leurs activités sur certains faisceaux, notamment dans le domaine des horaires, des prix, de la gestion des recettes, du marketing et des ventes.
Même si actuellement les coentreprises prévues au Canada sont uniquement examinées par le Bureau de la concurrence aux termes de la Loi sur la concurrence, et qu'elles se concentrent exclusivement sur les effets anticoncurrentiels des déplacements en avion sur certains marchés, le nouveau projet de loi permettra de tenir compte des plus grands avantages pour le public.
En outre, le nouveau processus comportera des échéanciers parfaitement clairs pour le processus d'examen, à la fois pour l'examen des éventuelles considérations de concurrence par le Bureau et l'évaluation par Transports Canada des avantages pour le public. On prévoit que cet examen plus global et ponctuel permettra aux transporteurs canadiens d'épouser cette tendance, qui confère des avantages non seulement aux transporteurs aériens qui en sont partenaires, mais aussi aux consommateurs qui ont tout à gagner d'une amélioration de la connectivité des vols, sans oublier le tourisme canadien qui devrait connaître une certaine croissance en fonction de la multiplication des options de réseau.
[Français]
Le secteur canadien du transport aérien a exprimé son intérêt à investir dans des services de contrôle de passagers autres que ceux que fournit déjà l'Administration canadienne de la sûreté du transport aérien et à y avoir accès afin de faciliter les voyages par avion et d'en tirer des avantages économiques.
Les modifications prévues permettront à cette possibilité de se matérialiser selon les formules d'un recouvrement des coûts.
[Traduction]
Passons maintenant aux initiatives dans le domaine du transport ferroviaire.
Un réseau ferroviaire fiable de transport des marchandises revêt une importance névralgique pour le succès du Canada en tant que pays commerçant. Bon nombre de nos matières premières, depuis les minerais jusqu'aux produits forestiers et aux céréales, dépendent du réseau ferroviaire pour être acheminées jusqu'aux marchés, aussi bien au Canada qu'à l'étranger. Le Canada jouit de services ferroviaires efficaces, et leurs prix sont les plus bas au monde.
C'est d'ailleurs pourquoi le projet de loi vise à alléger les pressions qui s'exercent sur le réseau pour que celui-ci continue de répondre aux besoins des usagers et de l'économie à long terme. À cette fin, le projet de loi favorise la transparence, l'efficacité et d'importants investissements du secteur privé dans le réseau ferroviaire, ainsi que des recours accessibles aux expéditeurs. Parmi les principales mesures, mentionnons les suivantes: de nouvelles exigences sur les rapports de données des compagnies de chemin de fer au sujet des prix, des services et des résultats qui augmenteront nettement la transparence du réseau; une définition de service ferroviaire adéquat et convenable qui confirme que les compagnies de chemin de fer doivent offrir aux expéditeurs le niveau de service maximum qu'elles peuvent leur offrir raisonnablement dans les circonstances; la capacité des expéditeurs de solliciter des sanctions financières réciproques en cas d'infraction aux accords de niveau de services avec les compagnies de chemin de fer; des recours actualisés pour les plaintes sur les prix et les services, afin d'en faciliter l'accès aux expéditeurs et de les rendre plus ponctuels; et enfin, l'interconnexion de longue distance, nouvelle mesure qui offre l'option aux expéditeurs captifs des différents secteurs et régions d'avoir accès à des compagnies de chemin de fer concurrentes.
Ces mesures répondront aux besoins des expéditeurs d'une plus grande concurrence dans le réseau de transport ferroviaire de marchandises, tout en protégeant la capacité des chemins de fer de réaliser des investissements cruciaux dans le réseau ferroviaire, ce qui profite à tous les expéditeurs et à l'ensemble de l'économie.
Les modifications que l'on prévoit apporter à la Loi sur la sécurité ferroviaire pour rendre obligatoire l'installation d'enregistreurs audio-vidéo dans les locomotives sont conçues pour renforcer encore davantage la sécurité ferroviaire, tout en protégeant la vie privée des employés. Elles répondent aux recommandations émanant de votre comité, du comité d'examen de la Loi sur les transports au Canada et du Bureau de la sécurité des transports, dont vous entendrez les représentants tout de suite après.
Ces enregistreurs contribueront à améliorer la sécurité ferroviaire en fournissant des données objectives sur les mesures prises par les équipes de train avant et pendant un accident ferroviaire. Cette technologie fournira aux compagnies de chemin de fer un instrument de sécurité supplémentaire pour analyser les tendances recensées par le biais de leurs systèmes de gestion de la sécurité.
Grâce à son rôle de surveillance, Transports Canada veillera à ce que les compagnies respectent les limites sur l'utilisation et les exigences en matière de vie privée mentionnées dans le projet de loi.
[Français]
Je vais maintenant aborder les initiatives dans le domaine du transport maritime.
Le projet de loi propose de modifier la Loi sur le cabotage pour permettre à tous les armateurs de repositionner leurs conteneurs vides, loués ou leur appartenant en plusieurs lieux au Canada au moyen de navires battant n'importe quel pavillon. Cette mesure appuiera les demandes de l'industrie d'une plus grande souplesse logistique et permettra de remédier à la pénurie de conteneurs vides pour les marchandises à exporter.
Le projet de loi propose également de modifier la Loi maritime du Canada afin de permettre aux administrations portuaires canadiennes de solliciter des prêts et des garanties d'emprunt auprès de la Banque de l'infrastructure du Canada, qui est en train de voir le jour.
[Traduction]
En conclusion, ce projet de loi regroupe des initiatives législatives en un seul projet et ces initiatives sont indispensables pour faire avancer des mesures prioritaires liées à l'amélioration de l'efficacité et de la sécurité du système de transport canadien.
En plus d'avoir fait l'objet d'un processus de consultation complet, ces modifications reposent sur de solides éléments de preuve. Par exemple, pour ce qui est des mesures relatives au transport ferroviaire des marchandises, nous avons sollicité l'expertise technique d'intervenants du secteur ferroviaire, de l'Office, des principaux ministères fédéraux et d'autres administrations dans le cadre des consultations sur ce projet de loi. Nous avons analysé les tarifs marchandises et les investissements entre les administrations, de même que les mouvements des produits au Canada, en utilisant le Programme interne de surveillance des grains et les lettres de voiture des compagnies de chemin de fer et d'autres données.
Les mesures que contient ce projet de loi reflètent les priorités dont nous ont fait part les intervenants et les Canadiens au cours des consultations. Elles pavent la voie à des réformes législatives qui favoriseront un réseau de transport plus sécuritaire et plus efficace qui stimulera la croissance tout en défendant les droits des travailleurs canadiens afin de mieux répondre à leurs besoins et attentes.
J'ajouterais que ce projet de loi fait suite aux nombreuses recommandations formulées par le Comité l'an dernier dans le cadre de son étude de la Loi sur les services équitables de transport ferroviaire pour les producteurs de grains.
Je tiens à remercier une fois de plus le Comité de m'avoir invitée aujourd'hui. Mes collègues et moi-même sommes entièrement disposés à répondre à vos questions, maintenant et tout au long de l'étude de ce projet de loi. Nous serions heureux de vous fournir tout renseignement utile.
D'ailleurs, je tiens à dire que nous avons mis à la disposition du Comité une série de documents et de feuillets d'information qui pourraient vous aider à comprendre les dispositions ainsi que le contexte entourant certains des enjeux dont il est question ici, les questions qu'on nous pose fréquemment, car nous sommes conscients qu'une certaine confusion peut régner au sein des divers intervenants quant à la signification et à l'application de ces dispositions et, évidemment, à l'étude article par article. S'il y a quoi que ce soit que nous pouvons faire pour vous aider, nous le ferons volontiers.
Merci, madame la présidente.
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Merci, madame la présidente.
J'ai une dernière question même s'il nous reste du temps avec ces témoins.
M. Garneau a présenté les conclusions clés de l'examen de la Loi sur les transports au Canada de 2016. Vous y avez tous participé, en élaborant une vision pour l'avenir des transports au Canada. Ainsi, vous avez effectué des consultations approfondies. C'étaient donc vous, experts en la matière, qui deviez vous pencher sur la Loi sur les transports au Canada et, bien sûr, présenter les conclusions aujourd'hui.
Je sais que les consultations se sont soldées par un grand consensus. Nous comprenons tous que le réseau des transports du Canada joue un rôle critique pour ce qui est du bien-être de notre économie, car il assure le transport des biens et des gens au pays et à l'étranger. Il nous faut, et ce, depuis longtemps, un leadership fédéral et une stratégie nationale pour les transports afin de faire fonctionner le système pendant les 20 et 30 prochaines années et mettre en oeuvre la vision pour les transports, l'économie, la sécurité et l'efficacité.
Un réseau des transports national doit être efficace, comme je viens de le dire, et intégré, afin de jouer le rôle vital nécessaire à notre croissance, au commerce, à notre bien-être social et à notre environnement, comme l'ont bien dit mes collègues d'en face. Le plan Transports 2030, qui repose sur cinq axes, répond à tous ces besoins et en fait partie.
Pensez-vous, fort de votre expérience, qui, je dois dire, est de loin supérieure au nôtre, que le projet de loi répond aux besoins en matière de sécurité et d'efficacité et, enfin, qu'il met à profit tous nos moyens de transport au pays afin que nous puissions améliorer et accroître notre rendement économique à l'échelle internationale?
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Merci, madame la présidente.
Bonne après-midi. Je vous remercie, madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du Comité, d'avoir invité le Bureau de la sécurité des transports du Canada à comparaître aujourd'hui, afin de nous permettre de répondre à vos questions au sujet du projet de loi .
Comme vous le savez, ce projet de loi vise à apporter des changements à la Loi sur la sécurité ferroviaire et à la Loi sur le Bureau canadien d'enquête sur les accidents de transport et de la sécurité des transports. Ces modifications exigeraient l'installation d'enregistreurs audio-vidéo dans la cabine des locomotives circulant sur les voies principales, et élargiraient l'accès à ces enregistrements à Transports Canada ainsi qu'aux compagnies ferroviaires dans certaines conditions. Vous savez peut-être également que ce type d'enregistrement est largement utilisé à bord des navires et des aéronefs depuis de nombreuses années.
Les trois collègues qui m'accompagnent aujourd'hui ont une vaste expérience.
[Français]
M. Jean Laporte est notre administrateur en chef des opérations. Travaillant au BST depuis sa création, en 1990, il possède une connaissance approfondie de notre mandat et de nos processus.
[Traduction]
À ma gauche, j'ai M. Mark Clitsome, ancien directeur des enquêtes aéronautiques qui a collaboré étroitement avec Transports Canada sur les modifications législatives proposées, dont celles qui visent la loi qui régit nos activités.
Tout à fait à ma droite, j'ai M. Kirby Jang, notre directeur des enquêtes ferroviaires et de pipelines, qui a énormément contribué à la réalisation de l'étude sur les enregistreurs audio-vidéo de locomotive publiée l'an dernier.
Je serai brève afin que nous puissions passer rapidement aux questions. En fait, j'aimerais attirer votre attention sur quatre points seulement.
Le premier point, c'est qu'au BST, nous avons besoin d'enregistreurs audio-vidéo à bord des locomotives pour mieux effectuer nos enquêtes.
[Français]
C'est essentiel, à tel point que nous avons fait deux recommandations en ce sens et et avons intégré cet élément aux enjeux de sécurité importants de notre liste de surveillance. Privés des données extraites des enregistreurs audio-vidéo de locomotive, ou EAVL, nos enquêteurs ne disposent pas de tous les renseignements dont ils ont besoin pour déterminer ce qui s'est passé, information dont nous avons besoin pour rendre le réseau ferroviaire canadien plus sûr.
[Traduction]
Permettez-moi de vous donner un exemple.
Le 26 février 2012, un train de voyageurs VIA Rail a déraillé près de Burlington, en Ontario. Les trois membres d'équipage dans la cabine ont perdu la vie et des dizaines de passagers ont été blessés. Le consignateur d'événements à bord nous a fourni quelques données, grâce auxquelles nous savons que le train circulait à 67 milles à l'heure sur une liaison où la vitesse maximale permise était de 15 milles à l'heure. Mais nous n'avons jamais pu établir avec certitude pourquoi. L'équipage n'a-t-il pas vu les signaux lui indiquant de ralentir? Ou les a-t-il vus mais mal interprétés? Nous ne le savons pas, et nous ne le saurons jamais. Un enregistreur audio-vidéo de locomotive aurait permis de mieux comprendre les facteurs opérationnels et humains influençant l'équipage et aurait orienté les enquêteurs vers les lacunes en matière de sécurité qui auraient ainsi pu être atténuées.
Voilà qui m'amène à mon deuxième point. Les renseignements extraits des enregistreurs audio-vidéo de locomotive doivent demeurer protégés. Ils ne doivent pas être divulgués publiquement. Ils doivent demeurer protégés de manière à ce que seules les personnes autorisées qui en ont directement besoin à des fins légitimes de sécurité puissent y avoir accès.
L'information extraite de certains enregistreurs audio-vidéo de locomotive devrait être mise à la disposition des compagnies ferroviaires à des fins d'utilisation dans l'optique non punitive d'un système de gestion proactive de la sécurité.
[Français]
Les compagnies ferroviaires devraient être en mesure d'examiner les actions de leurs employés, par exemple pour vérifier si les signaux en voie sont toujours nommés à haute voix ou si un train a dépassé les limites de son autorisation, autant d'actions qui, en soi, ne causeraient peut-être pas directement un accident, mais qui suggèrent des améliorations possibles de la sécurité.
[Traduction]
L'objectif n'est pas disciplinaire: la démarche vise plutôt à repérer et à corriger les problèmes systématiques susceptibles de mener à des améliorations des procédures d'exploitation ou de la formation. J'insiste cependant sur le fait que le tout doit s'inscrire dans un contexte non punitif, d'où mon dernier point, à savoir qu'indépendamment du fait que nous souhaitons donner un certain accès à ces enregistrements aux compagnies ferroviaires, des contrôles adéquats doivent être inclus dans la loi et la réglementation, afin de veiller à ce que ces renseignements ne soient pas utilisés à des fins disciplinaires, sauf dans des circonstances particulièrement accablantes.
Cette dernière exigence pourrait se révéler l'une des plus délicates, notamment parce qu'elle relève de l'existence de ce qu'on appelle une « culture d'équité ». Celle-ci peut être définie comme un environnement de travail où la distinction entre une simple erreur humaine et un comportement inacceptable est clairement tracée, et où on ne met pas en cause le travailleur sans avoir préalablement recherché les facteurs contributifs systématiques.
Cependant, les compagnies ferroviaires canadiennes ont souvent eu des comportements révélant une culture punitive basée sur le respect des règles. Bien que des progrès aient été accomplis pour améliorer cette culture, le BST comprend les préoccupations des employés concernant l'utilisation, éventuellement abusive, de ce genre de données.
[Français]
Transports Canada devrait aussi avoir accès à ces enregistrements pour pouvoir exercer une surveillance de la sécurité et devrait pouvoir les utiliser lors de recours contre des exploitants, mais pas contre des employés isolément.
[Traduction]
Les modifications législatives proposées constituent une rupture avec la façon dont les choses ont toujours été faites, mais le domaine du transport évolue, et les méthodes de travail doivent suivre. Il est très probable que l'information extraite des enregistrements audio et vidéo puisse être un outil pertinent lorsqu'elle est utilisée à des fins légitimes de sécurité. La loi et la mise en oeuvre de la loi doivent permettre l'atteinte d'un équilibre entre les droits des employés et les responsabilités des exploitants afin d'assurer la sécurité de leurs activités.
Merci. Nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.
:
Merci, madame la présidente.
Merci au comité de l'invitation à comparaître aujourd'hui.
L'Office des transports du Canada est le plus ancien organisme de réglementation et tribunal spécialisé indépendant du Canada. Créé en 1904 en tant que Commission des chemins de fer du Canada, il a vu ses responsabilités et ses fonctions évoluer parallèlement à l'évolution du réseau national de transport et à celle de l'économie et de la société canadiennes.
De nos jours, les trois mandats fondamentaux de l'Office des transports du Canada sont les suivants. Le premier est de voir au bon fonctionnement et à l'efficacité du réseau national de transport, notamment en réglant les différends opposant les expéditeurs par rail aux transporteurs, les plaintes relatives au bruit et aux vibrations et les contestations liées aux droits de port et de pilotage.
Notre deuxième mandat consiste à protéger le droit fondamental des personnes ayant un handicap à des services de transport accessibles.
Notre troisième est d'offrir un régime de protection du consommateur aux passagers aériens.
L'un des plus importants projets auxquels nous nous sommes consacrés ces dernières années est l'Initiative de modernisation de la réglementation, ou IMR. Dans le cadre de cette initiative lancée en mai 2016, nous réalisons un examen exhaustif de l'ensemble des règlements que l'Office est chargé d'appliquer afin de nous assurer qu'ils sont conformes aux modèles opérationnels, aux attentes des utilisateurs et aux pratiques exemplaires en vigueur dans le domaine de la réglementation.
[Français]
Durant les 10 prochaines minutes, j'aimerais vous parler de l'incidence qu'aura le projet de loi sur les différents rôles de l'OTC et, s'il est adopté, de la façon dont nous mettrons en oeuvre les éléments dont nous aurons la responsabilité.
J'aimerais souligner que je formule mes commentaires dans l'optique de l'organisme indépendant qui est le principal responsable de l'administration quotidienne de la Loi sur les transports au Canada.
C'est principalement de Transports Canada que le ministre des Transports reçoit ses conseils sur la politique publique, et je me référerai au ministre et à son ministère pour toute question liée à l'objectif des diverses dispositions du projet de loi.
[Traduction]
Mes observations porteront principalement sur deux grands volets du projet de loi , soit la protection des passagers aériens et les mécanismes utilisés pour régler les questions liées aux expéditeurs par rail.
Les voyages en avion font partie intégrante de la vie d'aujourd'hui. Même s'ils se déroulent généralement sans incident, lorsqu'il y a un problème, l'expérience peut être frustrante et troublante pour les passagers, en grande partie parce que, comme individus, ils ont très peu de contrôle sur les événements.
En vertu du projet de loi , l'Office des transports du Canada sera tenu de prendre des règlements pour consacrer les droits des passagers aériens dont le vol est retardé ou annulé, dont les bagages sont perdus ou endommagés, qui voyagent avec des enfants ou des instruments de musique, ou en cas de retard de plus de trois heures sur l'aire de trafic. Il s'agit d'un changement considérable.
Selon le régime actuel, les transporteurs aériens sont uniquement tenus d'élaborer et d'honorer un tarif: le document dans lequel ils énoncent leurs conditions de transport. Le rôle de l'Office des transports du Canada consiste à déterminer si un transporteur a correctement appliqué son tarif et si les conditions prévues dans ce tarif sont raisonnables.
Nous estimons qu'il est important que les droits des passagers aériens soient transparents, ce qui signifie que les voyageurs peuvent facilement les trouver; clairs, ce qui suppose qu'ils sont rédigés dans un langage clair et non dans un jargon juridique; équitables, en ce sens qu'ils prévoient une indemnisation et d'autres mesures raisonnables si des problèmes surviennent pendant un vol; et uniformes, ce qui signifie que les voyageurs qui se retrouvent dans les mêmes circonstances devraient avoir droit à la même indemnisation et aux mêmes mesures.
L'automne dernier, nous avons lancé une campagne d'information du public afin de mieux faire connaître aux voyageurs les recours dont ils peuvent se prévaloir par l'entremise de l'OTC en cas de problème relatif au transport aérien qu'ils ne réussissent pas à régler en s'adressant à la compagnie aérienne. Pour que les recours prévus par le Parlement soient efficaces, il faut que les personnes à qui ils s'adressent sachent qu'ils existent. C'est pourquoi nous avons mené ces efforts de sensibilisation.
Les résultats de ces efforts, combinés à l'attention accordée par les médias et le ministère des Transports aux questions de transport aérien, ont été spectaculaires. Entre 2013-2014 et 2015-2016, l'Office recevait généralement environ 70 plaintes liées au transport aérien par mois. Au cours de la dernière année, nous en avons reçu en moyenne plus de 400 par mois. Et au cours de la dernière semaine, nous avons reçu 230 plaintes de voyageurs aériens. Autrement dit, en l'espace d'une semaine, nous avons reçu le tiers des plaintes que nous recevions habituellement dans une année complète.
Cette hausse marquée laisse croire que le besoin d'aide a toujours existé et qu'il suffisait de faire connaître aux Canadiens l'aide que l'Office peut leur apporter pour qu'ils commencent à faire appel à ses services en très grand nombre.
Si et lorsque le projet de loi sera adopté, l'OTC devra agir rapidement pour élaborer les règlements sur la protection des passagers aériens. Nous chercherons à trouver un juste équilibre entre, d'une part, le grand intérêt que les questions liées au transport aérien suscitent au sein de la population et le désir des passagers d'avoir leur mot à dire dans l'élaboration des nouvelles règles et, d'autre part, les attentes selon lesquelles ces règles seront mises en oeuvre le plus rapidement possible. Pour atteindre un tel équilibre, nous tiendrons des consultations ciblées et approfondies échelonnées sur une période de deux ou trois mois auprès des représentants de l'industrie, des associations de défense des droits des consommateurs et des passagers à l'aide d'un site Web créé expressément pour les consultations et des audiences en personne tenues dans différentes régions du pays. Lorsqu'ils seront en vigueur, les nouveaux règlements sur la protection des passagers aériens offriront aux Canadiens qui voyagent par avion une définition claire de leurs droits et des recours qui s'offrent à eux si ces droits ne sont pas respectés. Une telle mesure s'imposait depuis longtemps.
[Français]
Permettez-moi maintenant d'aborder un autre élément principal du projet de loi: les changements aux dispositions portant sur les relations entre les compagnies de transport ferroviaire et les expéditeurs.
Faciliter ces relations a toujours été un élément essentiel du mandat de l'Office des transports du Canada, ou OTC. Cela reflète l'importance du réseau national de transport ferroviaire pour la prospérité du Canada et les préoccupations constantes parmi les expéditeurs relativement à ce qu'ils qualifient de pouvoir inégal de négociation entre eux-mêmes et les compagnies de chemin de fer dont ils dépendent pour transporter leurs marchandises.
L'OTC a fait valoir que, malgré ces préoccupations, les expéditeurs n'utilisent que de façon relativement restreinte les recours que leur procure la loi. Si cela se justifie par des négociations commerciales de bonne foi qui donnent lieu à des accords satisfaisants, c'est là une excellente nouvelle. Par contre, si c'est plutôt attribuable au fait que les coûts et les efforts engendrés pour avoir accès aux recours sont perçus comme surpassant les avantages probables, alors les dispositions en question n'atteignent peut-être pas les objectifs.
[Traduction]
Nous avons également constaté qu'il existe très peu de données accessibles sur le rendement du réseau de transport ferroviaire de marchandises. Cette situation, qui contraste avec celle que l'on observe au sud de la frontière, nuit au bon fonctionnement des marchés et fait en sorte que les dirigeants n'ont pas l'information voulue pour prendre des décisions éclairées.
Les éléments du projet de loi liés au transport ferroviaire de marchandises pourraient permettre de régler une partie de ces problèmes. Les modifications proposées concernant le recours à l'arbitrage pour des questions de prix ou d'entente sur le niveau de service et les décisions que doit rendre l'office à ce sujet pourraient rendre les mécanismes de recours plus avantageux aux yeux des expéditeurs. Par ailleurs, en imposant aux compagnies ferroviaires l'obligation de soumettre davantage de renseignements et en exigeant de l'office qu'il publie en ligne des données sur le rendement, le projet de loi pourrait contribuer à pallier le manque de renseignements.
Le changement lié au transport ferroviaire le plus important prévu par le projet de loi est sans doute celui qui consiste à remplacer le pouvoir conféré à l'office de fixer des distances d'interconnexion supérieures à 30 kilomètres ainsi que les dispositions relatives aux prix de ligne concurrentiels par une nouvelle option appelée l'interconnexion de longue distance. Le rôle de l'OTC consistera à ordonner que le service demandé soit fourni, si les conditions voulues sont respectées, et à établir le prix pour ce service.
Le projet de loi nous accorde 30 jours ouvrables pour recevoir les demandes, les examiner et prendre les décisions nécessaires. Nous avons déjà commencé à élaborer un processus qui nous permettra de respecter ce délai extrêmement court. Nous savons que les parties intéressées surveilleront de près les décisions que nous prendrons concernant les demandes d'interconnexion de longue distance. Ces décisions seront fondées sur les critères adoptés par le Parlement et l'analyse que nous ferons des faits qui nous seront soumis. En effet, en tant que tribunal quasi judiciaire et organisme de réglementation, l'office se préoccupe uniquement de la loi et des éléments de preuve.
[Français]
Avant de conclure, je tiens à mentionner un élément qui n'est pas compris dans le projet de loi, à savoir le pouvoir élargi de l'OTC de mener des enquêtes de sa propre initiative.
L'OTC détient déjà ce pouvoir en ce qui a trait aux vols internationaux. Il l'a tout récemment utilisé pour entreprendre une enquête relativement aux retards sur l'aire de trafic de certains vols d'Air Transat. Ce cas démontre la pertinence de ce pouvoir...
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Merci, madame la présidente, et merci honorables membres du Comité. Je comparais aujourd'hui à titre personnel. J'ai dirigé un examen de la Loi sur les transports au Canada il y a de cela deux ans et demi ou trois ans. Une grande partie des observations que je formulerai feront écho à quelques-unes des conclusions présentées dans ce rapport.
Pour votre gouverne, je suis également le président du conseil d'administration de Global Container Terminals, qui est un intervenant dans le secteur des transports, comme vous le savez. Je ne prends pas la parole aujourd'hui au nom de cette organisation. Je suis ici à titre personnel.
Je vais maintenant faire mon exposé aux fins du compte rendu.
La triangulation du commerce, des transports et des technologies n'a jamais été aussi primordiale au succès économique du Canada. Nous sommes une petite nation commerçante dispersée sur un territoire immense et diversifié. Le Canada doit bien gérer les transports, dans l'intérêt de notre compétitivité et des générations futures. Pour ce faire, nous devons reconnaître la nature extrêmement complexe, étroitement intégrée, multimodale et internationale du système des transports. C'est de plus en plus un système qui évolue constamment, 24 heures par jour, sept jours par semaine.
En 2014, comme je l'ai mentionné, j'ai présidé un comité chargé de mener un examen exhaustif de la Loi sur les transports au Canada et d'autres questions connexes. Le rapport renferme 56 recommandations et plus de 100 sous-recommandations. Le sujet principal du rapport portait sur la nécessité d'instaurer un processus décisionnel amélioré, opportun et adapté à la nature changeante du commerce, des transports et des réseaux de logistique.
De nombreuses recommandations ont été mises en oeuvre ou sont en train de l'être, du moins en principe, par le gouvernement en place, notamment les suivantes: une priorité accrue aux investissements dans les infrastructures, dont l'élaboration de mécanismes de financement et d'une base de données plus systématique sur l'état des infrastructures au Canada, une hausse de la limite de propriété étrangère pour les compagnies aériennes du Canada, des plans de recapitalisation de la Garde côtière canadienne, une priorité accrue sur les besoins en matière de transport dans le Nord canadien, le déplacement sérieux des services ferroviaires voyageurs dans les corridors à forte densité de l'Ontario et du Québec, une importante initiative de financement pour continuer à créer des corridors de commerce et de transport, des droits accrus pour les voyageurs aériens — M. Streiner l'a mentionné dans son exposé — et des normes renforcées pour les voyageurs handicapés.
Dans le cadre de l'examen de la LTC, on a reconnu principalement qu'il n'existe pas de solution magique ou de panacée et que pour faire les choses correctement, il faut améliorer la gouvernance. Nous entendons par cela qu'il faut établir des cadres relatifs à la prise de décisions qui sont mieux adaptés à l'importante complexité du système de transports moderne, de ses fournisseurs de services et de ses millions d'utilisateurs. Pour faire les choses correctement, il faut reconnaître que le secteur des transports transcende tous les secteurs de l'économie, toutes les régions du pays et pratiquement tous les aspects des politiques gouvernementales et publique. La prétendue approche pangouvernementale est plus essentielle à notre avenir à long terme dans quelques secteurs seulement. Pour faire les choses correctement, il faut aussi que l'organisme de réglementation, l'OCT, Transports Canada et d'autres agences aient les renseignements, le mandat et les outils requis pour composer en temps réel avec un système extrêmement complexe et dynamique.
Le projet de loi prévoit quelques étapes importantes pour accroître la base d'information afin d'améliorer la prise de décisions, le règlement des différends et, de façon générale, le cadre de réglementation. Cependant, à mon avis, il faut faire plus. L'omission la plus flagrante dans le projet de loi C-49 est peut-être l'approche réactive, à la pièce et axée sur les plaintes que continue d'adopter l'OTC. Je crois que l'organisme a besoin du mandat et de la capacité d'anticiper les problèmes et de les gérer avant qu'ils deviennent des crises systémiques. Le fait de gérer une plainte à la fois lorsque de nombreuses plaintes sont les symptômes d'un problème plus grand n'est tout simplement pas efficace.
Par ailleurs, l'agence doit avoir le pouvoir de lancer des enquêtes. Lorsqu'elle dispose de preuves réelles et concrètes d'un problème émergent, l'agence doit avoir son propre pouvoir de lancer une enquête et devrait avoir la capacité, dans la mesure du possible, d'adopter des mesures d'atténuation ou de prévention. Aucun de ces pouvoirs ne doit nuire au pouvoir du ministre et du Parlement de donner des directives à l'agence, mais ces pouvoirs devraient favoriser une prise de décisions améliorée et opportune qui aide le système des transports à offrir de meilleurs services pour les déplacements et les expéditions.
Pour faire les choses correctement, il faut établir des cadres de gouvernance robustes créés et autorisés par le gouvernement pour permettre aux organismes d'administrer divers aspects du système des transports. Les autorités aéroportuaires, par exemple, ont été mises sur pied il y a 25 ans pour recapitaliser et exploiter des aéroports canadiens. De façon générale, ces démarches ont donné d'excellents résultats, mais les ententes de gouvernance doivent être mises à jour. Les aéroports sont en grande partie des monopoles locaux qui disposent de pouvoirs de facto de taxation. Je signale que les frais d'amélioration aéroportuaire, par exemple, intégrés au coût des billets d'avion, affaiblissent la responsabilité à l'égard du public, et il n'y a aucun vrai intervenant pour demander des comptes aux conseils d'administration et à la direction quant à la façon dont les capitaux sont déployés. Des arguments semblables pourraient être présentés au sujet des administrations portuaires. Dans la plupart des cas, il n'existe aucun principe directeur législatif qui expose les considérations relatives à l'intérêt public.
À l'heure actuelle, il n'y a aucun mécanisme d'appel pratique pour l'abus de pouvoir possible sur les locataires ou les clients. Une partie lésée ne peut même pas interjeter appel auprès de l'OTC car l'organisme n'a pas le pouvoir de traiter ces situations, et il n'est habituellement pas pratique d'interjeter appel auprès du ministre. Il y a de nombreuses entités mandatées à l'extérieur du gouvernement. Elles exploitent divers systèmes de mode de transport et ont des ententes qui sont généralement énoncées dans les baux fonciers, les règlements des entités ou d'autres formes d'arrangements contractuels. Bon nombre de ces problèmes liés à la gouvernance ont été soulignés dans l'examen de la Loi sur les transports au Canada.
Là encore, la prise de décisions dans l'univers des transports, où des milliers de fournisseurs de services interagissent pour servir des millions de clients et d'expéditeurs, s'articule autour de la gouvernance. Pour avoir un système de transports sain, dynamique, mondial et compétitif, il faut des responsabilités claires et un système robuste de freins et de contrepoids. La Loi sur les transports au Canada devrait préciser les principes de bonne gouvernance devant être appliqués aux organismes de réglementation de même qu'aux exploitants non gouvernementaux et aux fournisseurs de services. La loi devrait également prévoir officiellement l'obligation de renouveler une stratégie nationale des transports. Le concept d'un examen décennal est archaïque et devrait être aboli pour être remplacé par un processus évolutif.
Merci, madame la présidente et honorables membres du Comité. J'ai hâte à notre discussion.
Je suis Murad Al-Katib. Je suis le directeur général d'AGT Food and Ingredients Inc. J'ai eu l'honneur de collaborer avec M. Emerson à la rédaction du rapport Emerson également. J'étais son premier conseiller sur le secteur des grains, le transport ferroviaire de l'Ouest canadien et les ressources naturelles, y compris le secteur pétrolier et gazier et le secteur minier. Je veux vous faire part de mes perspectives non seulement dans le cadre de ce rôle que j'ai assumé, mais aussi en tant que président de l'un des plus grands expéditeurs de conteneurs par transport intermodal au Canada. AGT Food figure, peut-être, parmi les cinq ou sept principaux expéditeurs de conteneurs au pays. Nous sommes également le plus grand chemin de fer de catégorie 3 au pays à l'heure actuelle, depuis l'acquisition d'un chemin de fer d'intérêt local en Saskatchewan.
Permettez-moi de revenir sur quelques points qui ont été soulevés par mes collègues. L'un porte sur notre travail et le travail dont vous êtes saisis maintenant avec l'étude du projet de loi . Pour le Canada en tant que nation commerçante, les infrastructures de transport et l'interaction des politiques avec ces infrastructures sont des éléments que je considère comme étant les activités générationnelles les plus importantes du pays. Il faut examiner comment nous permettons à l'économie de saisir les occasions qui se présentent, à mesure que les échanges commerciaux continuent de prendre de l'expansion, et plus particulièrement pour commercialiser nos produits sur les marchés, étant donné la vaste superficie de notre merveilleux pays. En raison de ces distances physiques, la réglementation au sein du système devait tenir compte d'un certain nombre de secteurs. Je vais les expliquer en détail.
La transparence du système de transports était un thème récurrent de notre rapport qui continue de trouver écho au sein de l'industrie. Je pense que le projet de loi règle en grande partie l'une des principales critiques que l'on formulait au sujet du système. Maintenant, nous avons au moins un système dans le cadre duquel, si ces mesures sont mises de l'avant, les sociétés ferroviaires seront non seulement encouragées mais mandatées à fournir des données. Ces données seront incorporées dans la LTC, résumées et publiées. Elles permettront aux décideurs de prendre des décisions plus éclairées plutôt que d'essayer de réagir au pied levé. Je pense que la transparence des données est un élément très important. L'industrie le demande, parmi les recommandations que nous avons formulées, et c'est certainement un aspect dans le projet de loi C-49.
Lorsque nous nous sommes penchés sur la transparence cependant, pour réitérer les observations de mes collègues, nous avons constaté une grande volonté d'octroyer des pouvoirs ex parte à l'office pour tenir des enquêtes et de lui donner la capacité de ressembler davantage à un Conseil sur le transport de surface, comme aux États-Unis. Nous semblons rater un peu la cible dans cette ronde, mais je pense qu'en tant qu'industrie, nous sommes encouragés par les mesures qui sont prises.
Sur le sujet de la transparence, j'ai toujours dit à l'industrie de faire attention à ce qu'elle demande car les requêtes s'accompagnent de responsabilités. Il faut toujours reconnaître que c'est un système de transports. Considérez-le comme une chaîne d'approvisionnement où chaque lien dans la chaîne est essentiel pour le lien précédent ou suivant. Dans le système de transports, chaque lien a tendance à blâmer le lien qui précède ou qui suit.
C'est un élément très important, à savoir la responsabilité de l'industrie d'assurer une reddition de comptes fiable quant aux prévisions et à son rendement au sein du système. L'efficacité est un aspect que la transparence des données apportera au système. Je pense que c'est un élément très important. Il n'y a pas que les chemins de fer; il faut penser à chaque lien de la chaîne.
À mesure que cette chaîne continue d'évoluer, l'accès équitable au système fait partie de nos objectifs, et je pense que nous avons intégré d'excellentes mesures dans le projet de loi . Dans le cadre de nos recommandations, nous cherchions à établir un système où les règles du jeu seraient uniformisées de manière à favoriser la conclusion d'ententes commerciales.
Je pense que nous devons aussi être très prudents. La réglementation excessive de l'industrie des transports est une pente très glissante. La surréglementation de notre réseau ferroviaire peut certainement entraîner des conséquences imprévues. En raison de notre environnement difficile, des longues distances, des caractéristiques physique de notre territoire et du climat, une réglementation excessive pourrait donner lieu à un système non concurrentiel qui deviendrait un boulet pour l'économie. Je pense qu'un accès équitable au système et des mesures visant à encourager la conclusion d'ententes commerciales faisaient partie intégrante de nos recommandations.
Discutons de quelques-uns de ces points.
Les recours offerts aux expéditeurs étaient très robustes dans le projet de loi . Il y avait un certain nombre de mesures concernant le pouvoir de l'agence de rendre les plans opérationnels et les accords sur les niveaux de service plus permanents. Des conséquences financières réciproques ont été mandatées, ce qui était une importante requête des expéditeurs depuis plus d'une décennie, et que l'on a esquivé dans un certain nombre de révisions des politiques précédentes. C'était donc une mesure populaire au sein de la communauté des expéditeurs pour que lorsqu'ils négocient un accord sur les niveaux de service, ces plans opérationnels doivent être définis et des conséquences financières réciproques doivent être mandatées par les deux parties. L'agence peut alors les imposer aux parties si elles ne parviennent pas à conclure une entente commerciale.
Les mécanismes simplifiés de règlement des différends ont été essentiels. Je pense que nous avons réalisé des progrès appréciables à cet égard. En ce qui concerne la définition d'ententes adéquates et convenables — vous en entendrez beaucoup parler au cours des trois ou quatre prochains jours —, je pense que nous avons réalisé d'importants progrès.
Pour ce qui est de l'efficacité globale au sein du système, l'interconnexion pour le transport longue distance soulève de grandes inquiétudes, car dans l'industrie céréalière plus particulièrement, avec la Loi sur les services équitables de transport ferroviaire pour les producteurs de grains, nous avions une interconnexion de 160 kilomètres, en tant que recours pour les expéditeurs. Cette interconnexion existait et a été prolongée. Elle n'existe plus maintenant, et une interconnexion pour le transport longue distance a été mise en place en tant que nouveau recours potentiel. Je pense que les inquiétudes des expéditeurs sont attribuables au fait qu'ils ne comprennent pas si cette interconnexion peut ou non être mise en oeuvre. Après avoir entendu les observations de mon collègue, M. Streiner, j'ai bon espoir que les expéditeurs auront l'occasion de faire une demande pour une interconnexion pour le transport longue distance de 12 mois, sur des distances beaucoup plus longues que 160 kilomètres, et je pense que la combinaison de l'interconnexion et des taux concurrentiels des parcours de ligne pourrait être un mécanisme efficace.
C'est un nouveau système, et je pense que cela soulève parfois des inquiétudes, et comme M. Streiner l'a dit, la LTC sera jugée en fonction de sa capacité d'intervenir et de mettre en oeuvre des mesures. J'ai également formulé des recommandations très fermes à Transports Canada et à l'agence pour qu'ils envisagent des processus de renouvellement accélérés. Donc, lorsqu'on a reçu l'approbation pour un an, comment peut-on être approuvé pour une deuxième et troisième année plus rapidement? Ce sont des aspects de la prestation de services envers lesquels je suis optimiste.
Pour ce qui est du revenu admissible maximal, la modernisation a commencé avec les dispositions du projet de loi qui sont proposées, et nous avons recommandé une modernisation beaucoup plus exhaustive du revenu admissible maximal. Il y a quelques mesures initiales qui ont été prises qui sont, à mon avis, très positives. L'exclusion du trafic intermodal des conteneurs et l'exclusion des revenus d'interconnexion sont des mesures très sensées, à mon avis, et il était très logique de les inclure dans la modernisation. La capacité des sociétés ferroviaires de tenir compte des investissements effectués était absurde. Lorsqu'une société ferroviaire effectuait un investissement, ces fonds étaient répartis entre les deux chemins de fer. Nous avons maintenant réglé ce problème. Nous l'avons fait en proposant d'apporter des ajustements pour encourager les investissements dans les wagons-trémies. Ce sont toutes des dispositions positives qui continuent de protéger les agriculteurs en ce qui a trait au revenu admissible maximal et qui prévoient du temps pour voir quels effets ces mécanismes auront, mais je pense qu'ils donnent des résultats très positifs.
Il y a les taux d'interconnexion réglementés également, et la réduction et l'élimination des volumes minimaux de grain.
Nous avons réalisé de bons progrès, je pense, et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions et de vous faire part de nos points de vue au cours de la prochaine heure.
Merci, madame la présidente.
Bonsoir. Je vous remercie de m'avoir invité à témoigner, et je suis heureux d'être ici aujourd'hui.
Je m'appelle Ray Orb et je suis vice-président de la Saskatchewan Association of Rural Municipalities (SARM).
La SARM représente les 296 municipalités rurales de la Saskatchewan. Le secteur agricole revêt une importance capitale au sein de nos municipalités membres. Près de 40 % des terres arables du Canada se trouvent en Saskatchewan. Cette province est ainsi devenue le plus grand exportateur mondial de lentilles, de pois secs, de moutarde, de lin et de canola.
En 2016, la Saskatchewan a exporté pour 14,4 milliards de dollars de produits agroalimentaires. Comme la Saskatchewan est une province enclavée, il lui faut un système de transport ferroviaire efficace et efficient pour amener ces produits vers les marchés. Je suis heureux d'avoir la chance aujourd'hui de discuter du projet de loi , car la réussite des membres de la SARM et du secteur de l'agriculture dépend du système de transport.
La SARM défend depuis longtemps l'idée d'une obligation accrue de production de rapports. Une meilleure connaissance des faits favorise une meilleure prise de décisions par les producteurs et les autres intéressés de la chaîne d'approvisionnement. Selon la SARM, les compagnies de chemin de fer devraient être tenues de présenter des plans exposant la façon dont elles vont répondre à la demande pour la prochaine campagne agricole. Ces plans devraient englober des plans d'intervention en cas de moissons plus abondantes et prévoir des dispositions pour composer avec les mois d'hiver, qui sont très froids dans les Prairies, en indiquant, par exemple, quel matériel et combien d'équipes seront nécessaires.
La SARM se réjouit de constater que le projet de loi prévoit conférer au gouverneur en conseil des pouvoirs accrus d'exiger, par règlement, que les compagnies de chemin de fer importantes fournissent au des renseignements relatifs à leurs services, à leurs prix et à leur rendement. Le fait d'exiger plus de renseignements et de faire en sorte que les différents maillons de la chaîne d'approvisionnement aient plus d'information n'est pas, en soi, une solution aux problèmes que pose le transport, mais c'est un élément crucial dans le règlement de ces problèmes.
La SARM a toujours défendu aussi l'idée qu'il fallait des sanctions réciproques. Il importe d'exiger des comptes des sociétés ferroviaires et des autres intervenants de la chaîne d'approvisionnement parce que ce sont les producteurs qui risquent de tout perdre quand les services ne sont pas adéquats.
Le projet de loi conférera aux expéditeurs le droit d'obtenir des conditions contractuelles prévoyant les sommes à payer en cas de non-respect des obligations de service des compagnies de chemin de fer. Il faudra mieux expliquer aux producteurs comment cette mesure fonctionnera. Il serait utile pour toutes les parties en cause que l'Office des transports du Canada fournisse plus d'information, comme des lignes directrices ou des exemples de pratiques exemplaires dans le cas des sanctions réciproques.
La SARM regrette que la mesure législative ne fasse aucune mention des sanctions réciproques. En cas d'impasse entre l'expéditeur et le transporteur concernant les sanctions réciproques, l'Office des transports du Canada interviendra-t-il? Il faut plus de précisions sur les services de règlement informel de différends. Il semble qu'il faille encore régler des détails concernant les sanctions réciproques, mais la SARM est heureuse de voir que de telles sanctions seront permises.
Les services de règlement informel des différends constituent également une modification appréciée par la SARM. Il est indispensable de fournir en temps utile aux producteurs des services de règlement des différends efficaces et d'un bon rapport qualité-prix. Une fois les récoltes terminées, les producteurs doivent acheminer rapidement leurs produits aux marchés pour respecter leurs obligations contractuelles. Les différends devront être réglés aussi vite que possible afin que les producteurs n'encourent pas des sanctions additionnelles ou des délais inutiles.
L'interconnexion de longue distance pourrait aussi être une nouvelle disposition intéressante pour les producteurs. La SARM était favorable à l'augmentation des distances d'interconnexion proposée dans la Loi sur le transport ferroviaire équitable pour les producteurs de grain. On espérait que l'augmentation des distances d'interconnexion prévue dans cette loi soit rendue permanente. Le rayon élargi sera utile à davantage de producteurs, mais ceux qui sont admissibles devront toujours négocier avec les transporteurs avant de demander une interconnexion de longue distance. Il reste à voir si cette nouvelle disposition est la solution à long terme dont on avait besoin.
La SARM et ses membres sont heureux que la disposition sur le revenu admissible maximal (RAM) ait été conservée. Les membres de la SARM sont contre l'élimination du RAM. Cette disposition met les producteurs à l'abri de frais de transport excessifs, assure le mouvement du grain et permet aux compagnies de chemin de fer de réinvestir dans le réseau ferroviaire. Les membres de la SARM ont adopté une résolution demandant que la formule du RAM, au lieu d'être éliminée, soit révisée dès que possible. La SARM espère que les modifications au RAM assureront toujours la reddition de comptes et la transparence des sociétés ferroviaires tout en protégeant les producteurs contre les frais de transport élevés.
Dans l'ensemble, le projet de loi semble répondre à bon nombre des préoccupations des producteurs. L'examen fait par l'Office des transports a donné beaucoup d'occasions au secteur de l'agriculture de réagir aux propositions, et la SARM en est reconnaissante. La SARM continuera à faire part de ses réactions et de ses observations chaque fois qu'on le lui permettra. Elle est prête à poursuivre le travail avec le gouvernement fédéral et tous les intéressés pour assurer l'essor du secteur agricole.
Merci encore de nous avoir permis de vous rencontrer aujourd'hui.
Je veux d'abord vous remercier de me donner l'occasion de prendre la parole devant vous aujourd'hui. J'aimerais traiter avec vous de la question des enregistreurs audio-vidéo de locomotive, un enjeu que nous estimons crucial.
Je m'appelle George Bell et je travaille pour Metrolinx, une société de transport en commun qui exploite le réseau GO et la liaison express entre le centre-ville et l'aéroport Pearson de Toronto. Le réseau GO fait de Metrolinx le plus important exploitant de transport urbain par rail au Canada avec plus de 450 kilomètres de voies pour les sept lignes desservant la grande région de Toronto et Hamilton. Lorsque j'ai déménagé à Toronto pour occuper cet emploi, j'ai été surpris d'apprendre qu'un Canadien sur six vit dans la région desservie par le réseau GO. Nous transportons plus de 250 000 personnes par jour. Notre flotte ferroviaire est impressionnante: 651 wagons de voyageurs, 62 locomotives et 15 véhicules ferroviaires pour notre liaison express avec l'aéroport Pearson. Nous utilisons actuellement 61 rames de train pour effectuer quelque 300 trajets par jour. Pour vous donner une meilleure idée, nos trains les plus longs peuvent transporter environ 2 500 passagers, soit à peu près le même nombre que cinq avions gros porteurs.
Nos trains roulent en mode réversible. Ainsi, la locomotive demeure toujours à la même extrémité du train. Si nous faisons un trajet est-ouest, la locomotive demeure à l'extrémité est du train, peu importe la direction prise. Pour les trajets nord-sud, la locomotive est toujours au sud du train. Nous produisons une force motrice pour tirer ou pousser les wagons sur la voie. Lorsque la locomotive est en mode poussée, l'équipage dirige le train à partir de l'extrémité opposée dans ce qu'on appelle une voiture à cabine de conduite. On y retrouve les mêmes commandes que dans la locomotive avec contrôle à distance. C'est l'inverse lorsque la locomotive tire le train. C'est une considération importante dans ce contexte.
Depuis les tout débuts, Metrolinx a amélioré sans cesse son offre sur le réseau GO en vue d'en faire un service continu de transport régional bidirectionnel, plutôt que de simplement desservir les banlieues aux heures de pointe. Notre plus récent service, le train express régional, misera sur la planification effectuée et les progrès réalisés au chapitre des infrastructures, autant d'éléments qui accéléreront l'expansion future des services. Ainsi, des trains électriques circuleront à toutes les 15 minutes ou moins dans nos corridors les plus achalandés; nous multiplierons par quatre le nombre de trajets en dehors des heures de pointe sur semaine, en incluant les soirées et les fins de semaine; et nous doublerons le nombre de trajets pendant les périodes de pointe en semaine. Grâce à cette expansion, le nombre de voyages hebdomadaires passera à environ 6 000 d'ici 2024.
Tous ces chiffres revêtent une importance cruciale lorsque l'on considère le recours aux enregistreurs audio-vidéo de locomotive pour améliorer la sécurité des chemins de fer et des passagers. Nous devons ainsi assumer de très importantes responsabilités quant à la sécurité de nos voyageurs, de nos collectivités et de nos employés. Nous prenons ces responsabilités très au sérieux. Nous nous efforçons d'être des chefs de file en matière de sécurité et il n'est pas rare que nous soyons parmi les premiers à adopter de nouvelles technologies et méthodes de travail. L'utilisation d'enregistreurs audio-vidéo de locomotive témoigne bien de nos idées avant-gardistes. Toutes les locomotives et les voitures à cabine de conduite du réseau GO sont déjà équipées de tels enregistreurs.
Pour vous donner une meilleure idée, disons qu'il s'agit d'un système d'enregistrement qui est alimenté par quatre caméras et deux microphones. J'aurais voulu vous présenter des photos, mais je ne les ai malheureusement pas avec moi. Trois des caméras fournissent des images de l'intérieur de la locomotive. Deux d'entre elles montrent les conducteurs à partir des coins arrière de la cabine. L'autre est placée à l'avant pour présenter une image de la paroi arrière de la locomotive. Nous ne cherchons pas à capter l'expression faciale de nos conducteurs. La caméra située à l'avant vise surtout à montrer le mur arrière où l'on retrouve différents équipements permettant de poser un diagnostic sur le fonctionnement de la locomotive. Les deux caméras arrière permettent de voir comment les conducteurs s'y prennent. On peut voir la façon dont ils manipulent les commandes d'accélération et de freinage et même les prendre en flagrant délit s'ils utilisent un téléphone, une activité interdite, mais tout de même possible.
Nous avons aussi deux micros qui captent toutes les conversations dans la locomotive. La quatrième caméra présente ce qui se passe devant la locomotive. Les suicides sont malheureusement chose fréquente pour les chemins de fer, et les trains de banlieue tout particulièrement. La caméra située à l'avant nous fournit des éléments de preuve lorsqu'il arrive quelque chose devant la locomotive. C'est la seule caméra du système dont les images peuvent être téléchargées directement. Pour les trois autres, des permissions spéciales sont nécessaires, et seules les autorités responsables ont accès aux images.
Nous sommes convaincus que la technologie que nous avons mise en place dans nos locomotives peut permettre de sauver des vies et d'améliorer la sécurité de nos passagers. Le Bureau de la sécurité des transports a recommandé le recours aux enregistreurs audio-vidéo de locomotive, tant aux fins des enquêtes que dans le cadre des systèmes de gestion de la sécurité utilisés par les entreprises ferroviaires pour déterminer proactivement les améliorations à apporter. Il est bien certain que cette technologie permet de recueillir des éléments de preuve lorsqu'il s'agit de déterminer les causes d'un accident. Nous sommes d'avis qu'il serait plus utile et responsable d'autoriser la consultation des renseignements captés par ces enregistreurs avant même qu'un accident se produise. Notre sécurité se trouverait grandement améliorée si nous pouvions déterminer à l'avance les tendances comportementales ou ergonomiques pouvant être à l'origine d'accidents.
Metrolinx convient qu'il est très important de protéger la vie privée de l'équipage de conduite. Toutes les fois qu'un enregistreur a été installé, nous en avons informé nos équipages en précisant bien la manière dont il était utilisé. Cela étant dit, nous ne voyons pas vraiment de caractère privé aux activités qui ont cours aux commandes d'un véhicule à cabine de conduite ou d'une locomotive. Nos mécaniciens et nos conducteurs sont des professionnels très qualifiés, et nous nous attendons à ce qu'ils se comportent en conséquence dans le cadre de leurs fonctions. En outre, nous estimons que la sécurité doit primer lorsqu'il y a un choix à faire entre sécurité et protection de la vie privée. C'est d'autant plus vrai que tout comportement dangereux du conducteur d'un train de banlieue ne met pas seulement en péril sa propre sécurité, mais aussi celle de 2 500 passagers à bord. Nous estimons avoir l'obligation absolue d'assurer aux passagers de nos trains et à leur famille des déplacements en toute sécurité. Nous serons mieux à même de nous acquitter de cette obligation si l'on permet aux entreprises comme la nôtre d'utiliser les enregistreurs audio-vidéo de locomotive de façon non punitive et proactive.
Merci de votre attention.
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Je vous remercie de me donner l'occasion de vous parler aujourd'hui, madame la présidente. Je suis très heureuse d'exposer la position d'Ingénieurs Canada sur le projet de loi , Loi sur la modernisation des transports.
Je m'appelle Jeanette Southwood. Dans le cadre de mes fonctions précédentes de directrice d'une société d'ingénierie mondiale, je dirigeais le volet de la viabilité des villes à l'échelle mondiale et celui du développement urbain et de l'infrastructure au Canada. Mon équipe se concentrait sur des domaines tels la chaîne d'approvisionnement, la continuité des activités, l'adaptation au climat, l'intensification et la réhabilitation urbaines, ainsi que l'intégration stratégique d'innovations et de connaissances de pointe dans les solutions proposées aux clients privés et publics. Nous nous occupions notamment du transport ferroviaire.
Je suis actuellement vice-présidente, Stratégie et Partenariats, à Ingénieurs Canada, un organisme qui se situe ici, à Ottawa. Ingénieurs Canada est un organisme national qui représente 12 associations provinciales et territoriales qui réglementent l'exercice de la profession d'ingénieur au Canada et qui accorde des permis d'exercice à plus de 290 000 ingénieurs professionnels au pays. Ensemble, nous nous efforçons de faire progresser la profession pour servir l'intérêt public.
Dans le cadre de l'examen et des consultations publiques visant l'ensemble de la Loi sur la modernisation des transports, le témoignage d'Ingénieurs Canada se concentre aujourd'hui sur l'article 11 de la Loi sur la sécurité ferroviaire, et surtout sur les éléments liés à la conception, à la construction et à l'entretien d'installations ferroviaires au Canada. Aujourd'hui, j'aimerais parler de trois recommandations que nous formulons à cet égard.
Nous recommandons d'abord de préciser la définition des principes d'ingénierie contenus dans l'article 11 de la Loi sur la sécurité ferroviaire. Ensuite, nous recommandons d'obtenir la participation d'ingénieurs professionnels tout au long du cycle de vie de l'infrastructure ferroviaire. Enfin, nous recommandons de mener des évaluations sur la vulnérabilité des infrastructures ferroviaires du Canada au climat et d'adapter ensuite ces infrastructures aux changements climatiques.
Tout d'abord, en ce qui concerne les principes d'ingénierie,12 ordres provinciaux et territoriaux réglementent l'exercice de l'ingénierie au Canada. Ces organismes de réglementation doivent s'assurer que les ingénieurs exercent leurs fonctions de manière professionnelle, éthique et compétente, et qu'ils respectent les lois provinciales ou territoriales, les codes de déontologie ou les cadres juridiques en vigueur relativement à la profession d'ingénieur. Des normes de conduite techniques et professionnelles sont établies, révisées et mises en oeuvre à l'échelon provincial, et des organismes de réglementation formés d'ingénieurs professionnels sont responsables de leur mise en oeuvre sur leur territoire.
Étant donné qu'ils sont des professionnels réglementés, les ingénieurs professionnels doivent travailler dans l'intérêt du public et assurer la sécurité de la population. C'est pourquoi Ingénieurs Canada appuie et encourage vivement la participation directe d'ingénieurs professionnels à la conception, à la construction, à l'entretien, à l'évaluation, à l'utilisation et à la modification de tous les travaux d'ingénierie liés au transport ferroviaire au Canada, non seulement dans le but d'accroître la transparence et la confiance du public à l'égard d'un système ferroviaire sécuritaire et bien réglementé, mais également pour assurer la sécurité du public et la reddition de comptes dans toutes les installations ferroviaires.
Il est essentiel que le gouvernement fédéral intègre les ingénieurs professionnels à l'ensemble du cycle de vie d'un projet ferroviaire, et pas seulement à la dernière étape de l'approbation d'un projet ferroviaire. Ingénieurs Canada encourage donc le gouvernement fédéral à prendre des mesures pour veiller à concrétiser cette vision. Il est également important de confier à des ingénieurs professionnels la tâche de superviser et de faire respecter les normes et les règlements mis en oeuvre par le gouvernement fédéral.
Actuellement, la Loi sur la sécurité ferroviaire précise que les entreprises sont tenues de divulguer les qualifications et les permis des membres de leur personnel de sécurité. Toutefois, il est évident que l'article 11 de la Loi sur la sécurité ferroviaire présente des ambiguïtés et des possibilités de fausses interprétations, surtout en ce qui concerne la définition des rôles et des principes liés à l'ingénierie. En effet, la loi énonce ce qui suit:
Les travaux relatifs aux installations ferroviaires, notamment la conception, la construction, l'évaluation, l'entretien ou la modification, sont effectués conformément à des principes d'ingénierie bien établis.
L'ambiguïté liée à l'expression « principes d'ingénierie » peut fausser l'interprétation et créer une situation dans laquelle la sécurité du public est compromise. La loi devrait préciser que les principes d'ingénierie doivent être mis en oeuvre par un ingénieur professionnel. Les fonctionnaires fédéraux responsables de la supervision des travaux d'ingénierie auxquels fait référence l'article 11 doivent également être des ingénieurs professionnels. En effet, lorsque des ingénieurs professionnels participent à la prise de décision, l'application cohérente des procédures liées à la sécurité et au choix de l'emplacement permet de mieux protéger les collectivités.
Notre deuxième recommandation concerne le cycle de vie de l'infrastructure ferroviaire. En effet, la participation d'ingénieurs professionnels au cycle de vie des projets ferroviaires assurera non seulement que ces projets sont mis en oeuvre en tenant compte de la sécurité du public, mais également que les ingénieurs sont bien équipés pour la conception, la construction et la gestion d'une infrastructure ferroviaire résiliente.
Comme nous l'ont dit les deux témoins précédents, l'infrastructure ferroviaire du Canada favorise directement la croissance de l'économie canadienne, car ce secteur fournit chaque année des services à plus de 10 000 clients commerciaux et industriels, déplace environ 4 millions de wagons de marchandises d'un bout à l'autre du pays et aux États-Unis, et fournit du travail à environ 70 millions de personnes chaque année à Montréal, dans la région du Grand Toronto et à Vancouver. Ce vaste réseau intégré doit être exploité efficacement en tenant compte de la sécurité du public, ce qui nécessite des services extrêmement fiables.
Enfin, j'aimerais parler de notre recommandation liée à la vulnérabilité au climat. Une infrastructure résiliente représente la force motrice des sociétés productives et des industries stables et elle accroît la confiance du public à l'égard de l'infrastructure civile. Toutefois, le bilan en matière d'infrastructure du Canada souligne que la plus grande partie de l'infrastructure canadienne actuelle est vulnérable aux effets des conditions météorologiques extrêmes, qui sont de plus en plus fréquentes et violentes. L'infrastructure ferroviaire vulnérable pose un risque non seulement pour la sécurité publique, mais également pour la productivité des particuliers et des entreprises canadiennes, ainsi que pour l'économie du pays. Sans le recours constant aux évaluations liées à la vulnérabilité au climat pour éclairer la conception dans le domaine ferroviaire, la confiance du public à l'égard de l'infrastructure ferroviaire s'effritera.
Par exemple, le 23 mai 2017 — il y a seulement quelques mois —, des inondations et des débits d'eau jamais enregistrés auparavant ont lourdement endommagé le chemin de fer de la baie d'Hudson à Churchill, au Manitoba. Cette inondation importante a lourdement endommagé cinq ponts, a emporté 19 sections de voies ferrées, et exigé la vérification de l'intégrité structurale de 30 ponts et de 600 ponceaux. Sur ce chemin de fer, on transporte des aliments, des marchandises et des gens vers la collectivité éloignée de Churchill, au Manitoba, une collectivité fréquemment visitée par les touristes pendant l'été. Les dommages considérables qu'a subis le chemin de fer de la baie d'Hudson ont causé des perturbations au service, ce qui a nécessité le transport par avion de biens, de services et de gens — un mode de transport dispendieux pour cette collectivité nordique. Il faudra des mois pour réparer les dommages catastrophiques causés au chemin de fer, ce qui perturbera considérablement le service sur le plan de la productivité individuelle et commerciale et diminuera confiance du public à l'égard de l'infrastructure ferroviaire.
Les évaluations sur la vulnérabilité au climat informent les planificateurs des effets potentiels des conditions météorologiques extrêmes sur l'infrastructure publique et privée dans les collectivités de partout au Canada. Les ingénieurs professionnels du Canada sont des chefs de file dans le domaine de l'adaptation et ils sont prêts à collaborer avec le gouvernement fédéral pour fournir des conseils impartiaux et transparents en vue de protéger l'infrastructure ferroviaire des effets dévastateurs liés aux changements climatiques. Ingénieurs Canada, en collaboration avec Ressources naturelles Canada, a mis au point un outil d'évaluation du risque posé par le climat. Cet outil augmente grandement la résilience de l'infrastructure, accroît la confiance du public à l'égard de l'infrastructure ferroviaire et diminue la gravité des effets des changements climatiques sur la productivité individuelle et commerciale.
Le protocole du Comité sur la vulnérabilité de l'ingénierie des infrastructures publiques, aussi appelé CVIIP, fournit aux ingénieurs, aux géoscientifiques, aux propriétaires d'infrastructures et aux gestionnaires un outil pour concevoir et construire une infrastructure ferroviaire qui sera en mesure de s'adapter à un climat qui change rapidement. Ce protocole a été mis en oeuvre plus de 40 fois au Canada dans un large éventail de systèmes d'infrastructure — notamment dans le cas de Metrolinx —, et trois fois à l'étranger. Ingénieurs Canada encourage le gouvernement fédéral à investir dans l'évaluation précoce et dans les outils de prévention, par exemple le protocole du CVIIP, à en faire une condition à l'approbation de financement, à l'acceptation d'évaluations liées à l'impact environnemental et à l'approbation de la conception de projets d'infrastructure ferroviaire qui font intervenir la réhabilitation, la réorientation, l'entretien et la mise hors service d'infrastructure ferroviaire existante. Cet investissement contribuera à maintenir les niveaux de service, à protéger l'environnement, à renforcer la productivité individuelle et commerciale, et à assurer la sécurité du public.
Madame la présidente, je vous remercie d'avoir permis à Ingénieurs Canada de livrer un exposé sur cet enjeu important devant le Comité aujourd'hui. Nous espérons que les membres du Comité reconnaîtront que les ingénieurs professionnels jouent un rôle essentiel dans l'infrastructure de transport au Canada et que les membres de notre profession sont prêts à veiller à ce que le système ferroviaire canadien soit résilient et sécuritaire et qu'il continue de contribuer à la croissance de l'économie canadienne.