HEAL Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent de la santé
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 19 mars 2002
Á | 1105 |
La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.)) |
Á | 1110 |
Á | 1115 |
La présidente |
M. Lunney |
La présidente |
Dr Brian Ellis |
Á | 1120 |
Á | 1125 |
La présidente |
M. Merrifield |
M. Brian Ellis |
M. Rob Merrifield |
M. Brian Ellis |
Des voix |
M. Rob Merrifield |
M. Brian Ellis |
M. Merrifield |
M. Brian Ellis |
M. Merrifield |
M. Brian Ellis |
Á | 1130 |
M. Merrifield |
M. Brian Ellis |
La présidente |
M. James Lunney |
M. Brian Ellis |
Á | 1135 |
M. James Lunney |
M. Brian Ellis |
La présidente |
M. Bob Speller (Haldimand--Norfolk--Brant, Lib.) |
M. Brian Ellis |
Á | 1140 |
M. Bob Speller |
M. Brian Ellis |
M. Bob Speller |
M. Brian Ellis |
M. Bob Speller |
M. Brian Ellis |
Á | 1145 |
La présidente |
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD) |
M. Brian Ellis |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
Á | 1150 |
M. Brian Ellis |
La présidente |
M. Stan Dromisky (Thunder Bay--Atikokan, Lib.) |
M. Brian Ellis |
Á | 1155 |
La présidente |
Mr. Merrifield |
M. Brian Ellis |
Mr. Merrifield |
M. Brian Ellis |
Mr. Merrifield |
M. Brian Ellis |
 | 1200 |
Mr. Merrifield |
M. Brian Ellis |
Mr. Merrifield |
M. Brian Ellis |
La présidente |
M. Jeannot Castonguay (Madawaska--Restigouche, Lib.) |
M. Brian Ellis |
M. Jeannot Castonguay |
M. Brian Ellis |
 | 1205 |
La présidente |
Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.) |
 | 1210 |
M. Brian Ellis |
Mme Hélène Scherrer |
La présidente |
M. James Lunney |
M. Brian Ellis |
M. James Lunney |
M. Brian Ellis |
 | 1215 |
M. James Lunney |
M. Brian Ellis |
M. James Lunney |
M. Brian Ellis |
M. James Lunney |
M. Brian Ellis |
Mr. Lunney |
La présidente |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
 | 1220 |
La présidente |
Ms. Wasylycia-Leis |
M. Brian Ellis |
La présidente |
M. Brian Ellis |
Ms. Wasylycia-Leis |
La présidente |
M. Bob Speller |
M. Brian Ellis |
M. Bob Speller |
M. Brian Ellis |
M. Bob Speller |
M. Brian Elllis |
 | 1225 |
M. Bob Speller |
M. Brian Ellis |
M. Bob Speller |
M. Brian Ellis |
M. Bob Speller |
M. Brian Ellis |
M. Bob Speller |
M. Brian Ellis |
M. Bob Speller |
M. Brian Ellis |
La présidente |
M. James Lunney |
M. Brian Ellis |
M. James Lunney |
M. Brian Ellis |
La présidente |
 | 1230 |
Mr. Lunney |
La présidente |
M. Brian Ellis |
La présidente |
Mr. Lunney |
La présidente |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
La présidente |
 | 1235 |
M. Stan Dromisky |
La présidente |
Mr. Merrifield |
La présidente |
M. Jeannot Castonguay |
La présidente |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. James Lunney |
 | 1240 |
Ms. Wasylycia-Leis |
La présidente |
M. Stan Dromisky |
La présidente |
Mr. Merrifield |
La présidente |
M. Rob Merrifield |
La présidente |
M. Rob Merrifield |
Mr. Dromisky |
M. Rob Merrifield |
M. Stan Dromisky |
La présidente |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
La présidente |
Mme Yolande Thibeault (Saint-Lambert, Lib.) |
La présidente |
M. Jeannot Castonguay |
La présidente |
M. Stan Dromisky |
La présidente |
CANADA
Comité permanent de la santé |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mardi 19 mars 2002
[Enregistrement électronique]
Á (1105)
[Traduction]
La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.)): J'ai le plaisir de déclarer ouverte la séance du Comité permanent de la santé qui poursuit son étude de l'étiquetage des aliments génétiquement modifiés. Je voudrais vous présenter notre seul témoin d'aujourd'hui, M. Brian Ellis, coprésident du Groupe d'experts sur l'avenir de la biotechnologie alimentaire de la Société royale du Canada.
Monsieur Ellis, je vous invite à prendre la parole, après quoi les membres du comité pourront vous poser des questions. Vous avez la parole.
M. Brian E. Ellis (directeur associé, Laboratoire de biotechnologie et professeur d'agroécologie, Faculté des sciences agricoles, Université de la Colombie-Britannique; coprésident, Groupe d'experts sur l'avenir de la biotechnologie alimentaire, Société royale du Canada): Merci beaucoup de m'avoir invité aujourd'hui. Je devais au départ être accompagné du professeur Conrad Brunk, mais celui-ci a malheureusement dû se rendre d'urgence en Virginie aujourd'hui car un membre de sa famille est gravement malade. Voilà pourquoi il ne m'accompagne pas à Ottawa, mais il m'a fourni néanmoins une copie de sa déclaration que je lirai avec plaisir pour vous plus tard. Malheureusement, je ne serai évidemment pas en mesure de répondre aux questions que vous pourriez avoir dans son domaine de compétence.
Je vais donc commencer par ma propre déclaration, en signalant d'entrée de jeu que mon intérêt à moi est surtout scientifique, tandis que le professeur Brunk s'intéresse principalement pour sa part aux questions sociales et déontologiques.
Madame la présidente et mesdames et messieurs du comité, je vous remercie à nouveau de nous avoir invités, le professeur Brunk et moi, à prendre la parole devant le comité permanent.
Les aliments génétiquement modifiés et leurs effets sur l'organisme continuent d'intéresser les Canadiens de près. La controverse que ce dossier suscite a attiré l'attention sur plusieurs questions allant de l'innocuité des aliments jusqu'au contrôle de l'information dans une société civile. Ainsi, en 2000-2001, la Société royale du Canada a été invitée par le gouvernement fédéral à étudier un certain nombre de ces questions, en mettant l'accent sur les aspects scientifiques de la mise au point et de la gestion des aliments génétiquement modifiés.
Le Groupe d'experts sur l'avenir de la biotechnologie alimentaire formé par la Société royale et que le professeur Brunk et moi avons eu le plaisir de présider a présenté ses conclusions en février 2001 dans un document qui comptait 53 recommandations dont certaines portaient sur l'étiquetage des aliments génétiquement modifiés. Ce document peut être consulté dans le site Web de la Société, et une version légèrement révisée vient d'être publiée.
Je tiens à fournir une précision à propos de ma comparution. Comme les groupes d'experts formés par la Société royale sont invariablement dissous une fois leurs rapports publiés, celui qui s'est penché sur l'avenir de la biotechnologie alimentaire n'a officiellement plus de rôle à jouer dans le débat qui se poursuit. Par conséquent, il ne répondra pas aux commentaires sur le rapport qu'il a soumis et ne donnera pas son avis sur les faits nouveaux dans ce dossier. Les 13 membres qui en faisaient partie peuvent, bien sûr, débattre des conclusions présentées dans le premier rapport du comité et prendre position sur n'importe quel aspect de la question des aliments transgéniques. Ils doivent ce faisant le faire uniquement à titre personnel ou professionnel. En ce cas, ils ne représentent ni le groupe ni la Société royale du Canada. Cela dit, je voudrais maintenant passer à l'étiquetage des aliments génétiquement modifiés, dossier qui a été étudié par le groupe d'experts, et aussi passer aux façons dont certaines des conclusions du groupe d'experts ont été interprétées.
Le mandat du groupe d'experts comprenait un examen des risques possibles pour la santé humaine et pour l'environnement susceptibles d'être associés à la consommation de plantes, d'animaux et de poissons transgéniques. Étant donné que le groupe n'était pas tenu d'examiner aussi bien les risques que les avantages de ces aliments, son rapport a été critiqué par les promoteurs des techniques du génie génétique. Il convient de noter qu'en dépit de cette perception chez certains, le groupe n'a pas réclamé une interdiction ni un moratoire sur la commercialisation des cultures ou des aliments transgéniques.
Il est également intéressant de prendre connaissance des recommandations du groupe sur l'étiquetage des aliments génétiquement modifiés. Après avoir examiné à fond la question de l'approbation réglementaire des cultures génétiquement modifiées au Canada, le groupe a conclu que si le processus réglementaire actuel exige un examen de la situation et un encadrement plus rigoureux—et nous avons discuté longuement de ce qui pouvait être envisagé—il demeure fondamentalement, comme il se doit, une étude scientifique des caractéristiques des organismes génétiquement modifiés et des produits qui y sont associés. Le groupe conclut également que dans l'éventualité où toutes les recommandations qu'il fait dans le rapport étaient mises en oeuvre, l'étiquetage obligatoire, à des fins d'innocuité, des produits alimentaires dérivés des cultures ou des animaux transgéniques ne serait pas nécessaire.
Á (1110)
Cette recommandation a parfois été considérée comme contraire à une grande partie des avis présentés dans le rapport, qui met l'accent sur les risques possibles—et je vous ai d'ailleurs expliqué qu'il en était ainsi à cause du mandat du groupe d'experts. De fait, cette recommandation ne fait que réitérer la conviction suivante du groupe: la seule façon d'évaluer les effets d'une nouvelle technique consiste à en examiner méthodiquement et consciencieusement les résultats au moyen des meilleurs instruments scientifiques disponibles. Lorsqu'une analyse approfondie de ces résultats a été effectuée, on peut évaluer comme il se doit la nature et l'ampleur des impacts négatifs et prendre une décision éclairée concernant la nécessité de l'étiquetage pour aider les consommateurs à éviter les effets indésirables.
Je tiens à souligner qu'en faisant cette recommandation au sujet de l'étiquetage, le groupe tenait pour acquis qu'une analyse rigoureuse serait effectuée au préalable. Il a précisé comment l'évaluation des aliments transgéniques pourrait et devait être améliorée sur le plan scientifique et, par conséquent, on peut déduire de sa recommandation qu'il serait justifié d'exiger un certain type d'étiquetage provisoire jusqu'à ce que les évaluations plus rigoureuses soient prêtes et validées.
L'étiquetage, provisoire ou à long terme, contribuerait en outre à régler le problème que représente l'évaluation, qui doit être essentielle, des effets à long terme de la consommation d'aliments transgéniques sur les populations humaines. Il sera extrêmement difficile, voire impossible, d'essayer de recueillir de telles données si un mécanisme pour déterminer les habitudes de consommation et la fréquence d'exposition de la population canadienne n'est pas mise en oeuvre.
L'établissement de la proportion maximale acceptable d'OGM dans les aliments est l'une des questions les plus cruciales qu'il faut régler—et je suis sûr que votre comité en a longuement discuté. Cette question est d'ordre à la fois général et technique. Sur le plan général, l'établissement d'un seuil sous-entend que les aliments transgéniques continueront de circuler dans certaines parties des réseaux d'approvisionnement en produits alimentaires. Le seuil en soi n'est important que s'il y a pénétration continue dans la chaîne d'approvisionnement. En conséquence, bon nombre de personnes estimeront peut-être que la présence d'une faible proportion d'OGM est rassurante et réduit leur exposition à d'éventuels risques. D'autres, par contre, continueront de considérer comme inacceptable une proportion même minime.
Cette dernière position peut être défendable sur le plan politique, mais en réalité, un seuil de tolérance zéro est dans une large mesure symbolique. Si j'insiste là-dessus, c'est que les méthodes que nous utilisons pour établir et consigner les seuils sont entièrement fonction de notre capacité technique de mesurer les produits qui présentent un intérêt potentiel. Par ailleurs, tant les outils techniques que la définition de ces produits sont des objectifs qui évoluent. Si les méthodes de détection deviennent chaque année plus sensibles et plus précises, les diverses cultures—ainsi que les animaux et les poissons—transgéniques qui pourraient à l'avenir être produites à des fins de consommation humaine créeront une très longue liste de produits présentant un intérêt potentiel qu'il faudra suivre de près et évaluer. Autrement dit, il existe actuellement une sélection relativement étroite de produits que la technologie actuelle peut étudier. Toutefois, ce sera tout un défi que d'évaluer les produits qui pourraient survenir d'ici cinq ou dix ans.
Du point de vue purement scientifique qui est le mien, tout modèle d'étiquetage basé sur un seuil devrait mettre l'accent sur les composantes des aliments génétiquement modifiés en rapport direct avec les dangers pour la santé humaine qui ont été signalés, c'est-à-dire les protéines et les nouveaux métabolites dérivés de la matière première à partir de laquelle ces aliments sont fabriqués.
S'il convient de créer des instruments précis—dont certains existent déjà pour évaluer les produits actuels—il existe cependant déjà des outils techniques qui permettent de contrôler régulièrement les protéines et les métabolites qui présentent un intérêt. Par ailleurs, il paraît sensé que les entreprises qui mettent au point de nouvelles sources d'aliments génétiquement modifiés soient tenues en même temps de créer les instruments d'analyse nécessaires pour assurer une surveillance de leurs produits dans l'ensemble des réseaux d'approvisionnement en produits alimentaires. À mon avis, la tâche ne devrait pas revenir aux instances de réglementation, et ce sont les créateurs des nouveaux produits qui devraient fournir les outils appropriés au système de réglementation.
Á (1115)
Enfin, soit dit en passant, si les aliments transgéniques demeurent dans le paysage agricole canadien, il est fort possible que les méthodes habituelles de manutention des produits en vrac soient appelées à disparaître dans un avenir proche. Il semble en effet inévitable que l'étiquetage et les méthodes de contrôle que nécessite cette mesure aboutissent à la création de circuits distincts de production végétale et animale permettant d'identifier les produits dans l'ensemble du circuit alimentaire, du producteur au consommateur. Cette conséquence n'est pas nécessairement négative, car elle pourrait à mon avis faciliter la gestion de réseaux d'approvisionnement en produits alimentaires fiables et sains par une surveillance des problèmes connus et potentiels. Dès que l'on connaît exactement la provenance des composantes alimentaires, il est beaucoup plus facile de trouver la source d'un problème.
Le débat sur les aliments transgéniques comporte de nombreuses dimensions scientifiques, juridiques et sociales. Dans mon exposé, je n'ai abordé qu'un ou deux points en rapport avec l'étiquetage. Je me ferai cependant un plaisir de répondre aux questions que pourraient se poser les membres du comité.
Préférez-vous que je passe directement à la déclaration du professeur Brunk?
La présidente: En effet, oui. Allez-y.
M. James Lunney (Nanaimo--Alberni, Alliance canadienne): Avons-nous des exemplaires de cette deuxième déclaration?
La présidente: Vous devriez l'avoir dans ce qui vous a été remis.
Dr Brian Ellis: Le professeur Brunk avait donc l'intention de comparaître. À mon avis, la Société royale du Canada a fait un choix très judicieux lorsqu'elle a nommé deux coprésidents à ce groupe d'experts; en effet, alors que j'étais moi-même chargé de représenter l'aspect scientifique de la question, le professeur Brunk était pour sa part chargé d'en présenter les dimensions sociales. Cette compatibilité a permis d'avoir une relation très constructive dont tous les membres du groupe d'experts ont profité.
Le professeur Brunk voulait également vous remercier de nous avoir invités tous deux à comparaître et voulait aborder un autre des aspects importants de la politique de l'étiquetage. Permettez-moi de lire mot à mot ce qu'il a écrit.
Vous me permettrez de commencer par préciser mes compétences dans le domaine. Je suis un philosophe social et non un scientifique, ce qui me rend davantage capable de commenter les aspects social, éthique et politique des questions liées à l'étiquetage des aliments génétiquement modifiés que leurs aspects scientifiques. Ces éléments scientifiques ont constitué le thème du rapport du Groupe d'experts de la Société royale du Canada sur l'avenir des aliments génétiquement modifiés, groupe coprésidé par le professeur Elis et moi-même.
Je laisse au professeur Ellis le soin d'expliquer la position du groupe d'experts sur les questions d'étiquetage des aliments génétiquement modifiés, position fondée sur l'établissement scientifique des risques pour la santé. Le groupe d'experts n'a pas jugé que les risques pour la santé justifiaient l'adoption d'un régime d'étiquetage obligatoire pour ces aliments, mais il a tout de même recommandé la création d 'un système d'étiquetage volontaire, fiable et informatif pour les aliments génétiquement modifiés. Toutefois, le groupe a clairement indiqué qu'il n'avait pas examiné les autres aspects de nature sociale, politique et éthique qui pourraient justifier l'adoption d'un système d'étiquetage obligatoire. Ce sont certains de ces aspects que je désire porter à l'attention du comité. À mon avis, ces questions représentent des arguments de poids en faveur de l'étiquetage obligatoire. Je tiens à préciser au comité que le point de vue que j'exprime aujourd'hui est le mien et non celui de la Société royale du Canada ou du Groupe d'experts sur l'avenir de la biotechnologie alimentaire.
Les aspects que je souhaite aborder concernent les éléments non scientifiques de la question de la santé, éléments importants sur le plan social. Les experts en gestion du risque du monde entier s'entendent pour dire que la question de la sûreté d'un aliment ou de toute technologie ne se limite pas à savoir si cet aliment ne présente aucun danger pour les humains, les animaux ou l'environnement. L'utilisation des aliments et des technologies entraîne des risques de toutes sortes. Il est rare que les risques soient nuls.
Tout produit est déclaré «sûr» lorsque le niveau de risque qui y est associé est jugé «acceptable» par les personnes qui s'exposent au risque, c'est-à-dire celles qui sont susceptibles de subir des préjudices si les risques se concrétisent. Par conséquent, l'établissement du niveau de sûreté d'un produit se fait en deux étapes. D'abord, il s'agit de cerner et d'évaluer scientifiquement le type et l'ampleur des risques associés au produit en question; la deuxième étape est un processus politique et éthique qui consiste à définir les normes qui permettront d'établir si le niveau de risque est acceptable. De toute évidence, c'est ce qui explique que des personnes et des groupes sociaux divers en viennent à évaluer un même niveau de risque de façon très différente.
D'aucuns jugent acceptable le risque de listériose que présente le fromage au lait cru; pour d'autres, ce risque est inacceptable. Cette divergence n'est pas reliée à une compréhension scientifique différente du niveau de risque, mais bien à l'utilisation de normes différentes en matière d'acceptation des risques.
L'acceptabilité des risques est en grande partie fonction de la façon dont certaines des caractéristiques de ces risques sont perçues. Voici certaines de ces caractéristiques les plus importantes: l'ampleur des préjudices possibles; la question de savoir si les avantages l'emportent largement sur les risques; la question de savoir si les risques et les avantages sont répartis de façon équitable; la question de savoir si les risques sont faciles à cerner ou faciles à éviter ou à maîtriser; la question de savoir si les risques sont assumés volontairement ou s'ils sont imposés par les autres; la question de savoir si les personnes qui gèrent les risques (soi-même ou les autres) sont dignes de confiance et respectées.
Un risque relativement élevé (p. ex., dans le cas de l'alpinisme) peut s'avérer tout à fait acceptable si les personnes qui s'y exposent ont l'impression qu'elles l'assument volontairement et le maîtrisent, qu'elles en tirent des avantages et qu'elles ont confiance en elles-mêmes. En revanche, un risque extrêmement faible (p. ex., le risque de la variante de la maladie de Creutzfeldt-Jakob associée à des bovins atteints de l'ESB) peut être tout à fait inacceptable si les personnes qui s'y exposent estiment qu'il comporte des dangers potentiels très redoutables, qu'il est invisible, qu'il est difficile d'en contrôler l'exposition et qu'il est imposé de façon involontaire au profit d'entités (l'industrie alimentaire et le gouvernement) qui l'ont très mal géré.
Á (1120)
Ces éléments sont généralement reconnus et considérés comme les facteurs déterminants de l'acceptabilité des risques par le public. Comme l'ont découvert les organismes réglementaires européens des aliments infectés par l'EBS (maladie de la vache folle), c'est le public qui a le dernier mot en matière d'acceptabilité des risques pour la santé, en dépit des conclusions des scientifiques t des économistes sur l'importance relative des risques et des avantages.
Les inquiétudes grandissantes en Europe concernant la sûreté des aliments génétiquement modifiés ne sont pas uniquement reliées à la soi-disant tendance d'une population mal informée sur le plan scientifique à surestimer les risques de ces aliments pour la santé et l'environnement. Ces inquiétudes sont davantage liées au fait que ces risques, bien que minimes, sont inacceptables parce qu'ils porte certaines ressemblances avec les risques associés à la variante de la maladie Creutzfeldt-Jakob—ils sont nouveaux et en grande partie méconnus, le public considère qu'ils profitent aux producteurs d'aliments alors que ce sont les consommateurs qui y sont exposés, et ils sont gérés par une industrie et des organismes réglementaires qui ont démontré qu'on ne pouvait pas se fier à eux pour gérer les risques liés à l'EBS et d'autres risques. Tout risque comportant de telles caractéristiques est susceptible d'obtenir un faible niveau d'acceptabilité publique.
Les gouvernements européens ont constaté que la mise en oeuvre d'un régime d'étiquetage obligatoire constitue le moyen le plus efficace pour amener le public à accepter les aliments génétiquement modifiés. L'étiquetage des produits contenant des ingrédients génétiquement modifiés permet d'apporter des changements importants au profil de risques qui influence les perceptions en matière de sûreté des aliments. D'abord, il permet aux consommateurs de contrôler leur exposition aux aliments génétiquement modifiés et aux risques qu'ils associent à ces aliments. Ensuite, il permet de rendre en grande partie volontaire le choix de s'exposer aux risques liés à ces produits. Enfin, et cet élément est peut-être le plus important dans le contexte politique actuel, il réduit la méfiance du public à l'égard de l'industrie et des organismes réglementaires, non seulement en permettant aux consommateurs de mieux contrôler l'exposition aux risques, mais aussi en amoindrissant le sentiment suivant, souvent exprimé: «si l'industrie estime qu'elle n'a rien à cacher, pourquoi alors s'oppose-t-elle à l'étiquetage des aliments génétiquement modifiés et refuse-t-elle ainsi de nous dire quels produits en contiennent?»
Au Canada et aux États-Unis, le niveau d'acceptabilité des aliments génétiquement modifiés est actuellement beaucoup plus élevé qu'en Europe et ailleurs dans le monde. Cette situation pourrait cependant changer rapidement et radicalement si nous connaissions un problème sérieux relié à la sûreté des aliments qui ébranlerait la confiance du public dans l'industrie et le gouvernement. Dans un tel cas, la perception du public à l'égard des aliments génétiquement modifiés correspondrait sans doute davantage à celle des habitants des pays d'Europe.
À mon avis, il serait avantageux pour l'industrie et le gouvernement, et bien sûr pour la population, d'adopter un système simple et fiable d'étiquetage des aliments génétiquement modifiés qui permettrait aux consommateurs d'adapter leur comportement à l'évolution de la perception des risques. Je suis persuadé que cette initiative augmenterait considérablement le niveau d'acceptabilité des aliments génétiquement modifiés et des risques pour la santé et l'environnement qui y sont associés.
L'opposition soutenue du gouvernement et de l'industrie à l'étiquetage des aliments génétiquement modifiés ne fait que maintenir et accroître les inquiétudes de la population face à cette technologie. Il est facile pour les consommateurs de voir la contradiction qui existe entre l'argument selon lequel il incombe au marché, et non aux organismes réglementaires, d'établir si les aliments génétiquement modifiés sont acceptables et le raisonnement voulant que les produits contenant des ingrédients génétiquement modifiés ne devraient pas être étiquetés à cet effet pour permettre aux consommateurs de faire un choix éclairé. Cette contradiction ne fera qu'ébranler davantage la confiance du public à l'égard de l'industrie et des organismes réglementaires, confiance qui est essentielle à l'acceptation de cette technologie.
M. Brunk aurait été ravi de répondre à vos questions et commentaires, mais comme je vous l'ai dit, il n'a malheureusement pas pu venir.
Á (1125)
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Ellis.
Nous allons maintenant passer aux questions et M. Merrifield a la parole.
M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne): Merci d'être venu et d'avoir lu les deux rapports.
Le comité réfléchit sérieusement à la question de la modification génétique et au fur et à mesure que j'écoute les témoignages, il me devient de plus en plus évident que tout cela est une question de confiance ou de méfiance envers nos aliments. Ça se résume à cela.
La question que je vais vous poser est très simple. Les aliments génétiquement modifiés sont-ils plus salubres ou plus dangereux que les aliments conventionnels que l'on trouve sur le marché aujourd'hui?
M. Brian Ellis: Vous appelez ça une question simple?
M. Rob Merrifield: Ils le sont ou ils ne le sont pas.
M. Brian Ellis: Peut-être. C'est la réponse simple que je vous donnerai.
Des voix: Oh, oh!
M. Rob Merrifield: Touché.
M. Brian Ellis: Le public pose cette question et voudrait obtenir une réponse simple. Malheureusement, il n'y a pas de réponse simple. Je formulerai ma réponse ainsi—et je la donne dans une perspective scientifique, parce que c'est vraiment sur ce plan que la salubrité, comme phénomène, se situe.
Pour l'heure, on n'a pas de preuve que les aliments actuels modifiés génétiquement que l'on trouve sur le marché comportent un risque pour la santé. Mon collègue, M. Brunk, vous répondrait d'emblée que l'absence de preuve ne constitue pas une preuve qu'il y a absence de risque, mais là-dessus, le débat pourrait être sans fin. Néanmoins, pour l'instant, sur le plan théorique et du point de vue de la surveillance très limitée que l'on a exercée, je ne vois pas de preuve d'un danger accru.
Mais je mets un énorme bémol à cette affirmation car, tout d'abord, chaque produit génétiquement modifié est un produit unique. Les combinaisons génétiques devraient être évaluées au cas par cas, au fur et à mesure, de sorte qu'il n'y a pas approbation universelle de la technologie des OGM. Les éléments que nous possédons indiquent que ce qui existe déjà ne semble pas comporter de risque particulier, mais cela ne veut rien dire pour l'avenir.
M. Rob Merrifield: Autrement dit, la réponse simple est la suivante: en ce qui concerne les produits commercialisés aujourd'hui, il n'existe pas de preuve que les aliments génétiquement modifiés comportent plus de risque que les aliments conventionnels, n'est-ce pas?
M. Brian Ellis: Je dois convenir de cela pour le moment.
M. Rob Merrifield: Maintenant, en ce qui concerne les aliments génétiquement modifiés qui sont commercialisés aujourd'hui, faut-il procéder dans leur cas à des analyses beaucoup plus rigoureuses que dans le cas des aliments conventionnels avant de les mettre sur le marché?
M. Brian Ellis: Les analyses sont très semblables. J'ajouterai, quand on utilise l'adjectif «conventionnel», que cela dépend. Nombre de produits qui sont commercialisés aujourd'hui ne font pas l'objet d'analyses rigoureuses car on les connaît bien et il se peut qu'il s'agisse de variantes de technologies existantes.
Je dirais que les aliments génétiquement modifiés auxquels on s'est intéressé jusqu'à présent ont été examinés en long et en large. J'ajouterai qu'il y a certains raffinements auxquels on n'a pas eu recours, alors qu'on aurait dû, étant donné que ces aliments sont nouveaux sur le plan du développement et des caractéristiques. C'était là une des recommandations du groupe d'experts. On pourrait appliquer une série de technologies qui, à moi personnellement, me donneraient une bien plus grande assurance que ces produits ont été modifiés génétiquement de façon mineure seulement.
Á (1130)
M. Rob Merrifield: Parlons un peu du principe de précaution que vous recommandez. Pouvez-vous développer un peu ce que vous entendez par là et ce que cela signifie pour les futurs aliments génétiquement modifiés?
M. Brian Ellis: Le principe de précaution n'est pas une entité fixe, mais une enveloppe souple où se trouve toute une gamme de situations allant du refus de tout risque, quel qu'il soit, en tout état de cause jusqu'à une acceptation quasi générale du risque dans des circonstances appropriées. Mais son thème général, c'est qu'en l'absence de preuves convaincantes de l'inexistence d'un risque, on suppose qu'il y a peut-être un risque exigeant que l'on ait recours, en l'occurrence, à telle ou telle technologie et seulement après un examen approfondi. Ainsi, on constitue un corpus de preuves pouvant convaincre le consommateur—en l'occurrence—et cela nous permet d'affirmer que la situation a été examinée avec la plus grande précaution moyennant quoi on estime que les preuves sont assez convaincantes pour permettre d'affirmer qu'il n'y a aucun risque grave.
Le principe de précaution impose tout simplement à ceux qui proposent un produit et aux organismes de réglementation le fardeau de prendre une décision fondée sur la prudence. Cette décision dépend des éléments de preuve qui ont été accumulés et produits. Le principe ne fournit pas un seuil fixe à respecter.
La présidente: Merci, monsieur Merrifield.
Monsieur Lunney.
M. James Lunney: Bienvenue au comité, monsieur Ellis. En ce qui concerne vos recommandations sur «l'équivalence substantielle», il n'est pas clair que la Société royale accepte ou rejette cette notion. Je me reporte à votre recommandation qui figure dans le résumé et j'y trouve trois références à cette équivalence substantielle.
À la recommandation 7.1, on lit: «Les tests effectués devraient remplacer la pratique courante de l'utilisation du concept d'équivalence substantielle ». Plus bas, à la recommandation 8.1 on lit le mot «rejette», et je cite: «Le Comité d'experts rejette le recours au concept d'équivalence substantielle comme seuil de décision pour exempter les nouveaux produits GM d'évaluations d'innocuité rigoureuses». Et plus bas à la recommandation 8.5, on lit:
Le comité d'experts recommande une approche précautionnaire dans l'utilisation de normes d'innocuités plus «conservatrices» face à certains types de risques... L'invocation de l'équivalence substantielle comme norme d'innocuité... suppose l'existence d'une norme d'innocuité raisonnablement conservatrice correspondant à une approche prudente. |
Il semble qu'il y ait contradiction ici. Les gens choisissent de citer une recommandation ou l'autre. Pouvez-vous nous donner votre interprétation de l'«équivalence substantielle»?
M. Brian Ellis: Je pense que c'est l'expression qui a causé le plus de difficulté dans toute l'histoire de l'évaluation des aliments génétiquement modifiés. Il faut remonter à l'origine des protocoles qui ont été établis pour l'évaluation des aliments génétiquement modifiés.
Les responsables de la réglementation se sont demandé s'ils devaient adopter toute une nouvelle procédure et de nouvelles approches pour analyser la salubrité des aliments génétiquement modifiés ou s'ils devaient se servir des modèles existants. Le modèle existant retenu—assorti de dispositions législatives existantes, dois-je ajouter—supposait que l'on compare un produit génétiquement modifié avec le matériau de base, le matériau dont il était dérivé, et que cela constituerait un bon point de départ sur lequel fonder l'analyse. Cette comparaison devait porter essentiellement sur la question de savoir si la version génétiquement modifiée d'une culture particulière—parce qu'il s'agissait essentiellement de cultures—différait considérablement du matériau parent. En l'absence de différences, on devait s'intéresser à la caractéristique suivante pour voir si cette caractéristique différait considérablement du matériau parent.
L'idée était d'examiner le produit génétiquement modifié et le produit parent en se demandant si les deux étaient des équivalents substantiels—c'est-à-dire identiques—mise à part la nouvelle caractéristique créée, et celle qu'on pourrait considérer comme étant le petit extra ajouté à l'arbre génétique.
Comme l'ont montré les arbres de décision utilisés par l'Agence canadienne d'inspection des aliments, par exemple, cette façon de faire était tout à fait raisonnable, sauf que l'on pouvait constater en un point de l'arbre de décision que la décision semblait avoir confirmé que l'aliment génétiquement modifié était un équivalent substantiel du matériau parent. Par conséquent, à part la caractéristique elle-même, il n'était pas nécessaire d'examiner rigoureusement tous les autres aspects de l'aliment.
À première vue, cela semblait être une conclusion raisonnable si l'on supposait que la caractéristique elle-même n'avait pas, sur l'organisme, d'effet autre que celui qui était prémédité, celui que l'on avait prévu. Le groupe d'experts en a conclu qu'on dispose de nombreuses preuves permettant d'affirmer que l'on ne peut pas modifier une caractéristique dans un organisme sans entraîner toute une gamme d'autres modifications, parfois subtiles, parfois moins subtiles; ainsi, affirmer qu'un produit est un «équivalence substantielle» sans examiner tout l'organisme et ses produits pour constater cette série de modifications était donc prématuré et inacceptable. Le groupe d'experts s'est véritablement inquiété du recours à l'expression «équivalence substantielle».
Ainsi, nous n'avons pas rejeté la notion de comparaison. Tout le monde reconnaîtra que c'est un mécanisme raisonnable et plausible. Toutefois, nous nous sommes élevés contre le fait que lors de la prise de décision, on trouve suffisante une comparaison relativement superficielle de tout ce qui ne constituait pas la caractéristique elle-même.
Á (1135)
M. James Lunney:
À propos de l'évaluation obligatoire ou volontaire, vous dites clairement dans votre rapport—et je cite la recommandation 8.4, page 228, chapitre 8:
La possibilité de risques graves pour la santé humaine, tels que les allergènes potentiels des aliments GM, de perturbations importantes et irréversibles des écosystèmes naturels à la suite de l'émergence d'espèces de plantes nuisibles très vigoureuses et très envahissantes ou une importante réduction de la biodiversité, entraîne le recours aux meilleures méthodes scientifiques pour réduire l'incertitude associée à ces risques. L'approbation de produits comportant ces risques potentiels graves doit être retardée jusqu'à ce que le niveau d'incertitude scientifique soit réduit à un niveau acceptable. |
Vous avez dit très justement dans vos remarques liminaires que votre recommandation concernant un système volontaire dépendait de l'acceptation de vos recommandations concernant une analyse plus poussée des produits. On a dit que même la Société royale préconisait un système volontaire. Pouvez-vous nous expliquer les conditions que vous y mettez, vous? Par exemple, quand une offre d'achat est assortie de conditions, et que les conditions ne sont pas respectées, la maison ne se vend pas.
M. Brian Ellis: C'est pour cela que j'étais ravi de pouvoir faire cette déclaration devant le comité aujourd'hui, parce que cela exige des précisions. C'est assez obscur dans le rapport.
Quand nous recommandons un étiquetage volontaire, plutôt qu'obligatoire, c'est à condition que l'on mette en oeuvre et qu'on valide une analyse poussée et à long terme de la salubrité des produits génétiquement modifiés et de leur impact sur l'environnement. Nous aurions dû le dire très clairement parce que c'est le contexte dans lequel s'inscrit cette recommandation. Comme je l'ai dit dans ma déclaration, cela tombe sous le sens. On doit en conclure d'après ce que j'ai dit à ce moment-là, d'après ce que j'ai dit aujourd'hui et d'après ce qui figure dans le rapport, qu'on devrait procéder à l'étiquetage tant qu'on n'aura pas étudié plus longuement l'innocuité du recours à cette technologie.
La présidente: Merci, monsieur Lunney.
Monsieur Speller.
M. Bob Speller (Haldimand--Norfolk--Brant, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente.
Merci beaucoup d'être venu, monsieur Ellis. J'ai quelques questions à vous poser.
L'une d'elles porte sur le poisson génétiquement modifié. Dans votre rapport, vous exprimez des préoccupations réelles concernant le poisson génétiquement modifié. Je sais que la Food and Drug Administration aux États-Unis se penche sur cette question en ce qui concerne le saumon de l'Atlantique et un gène de super croissance. Pouvez-vous nous dire quelles sont vos inquiétudes à cet égard?
M. Brian Ellis: En résumé, nos inquiétudes portent sur la façon dont le poisson est élevé, du moins sur les côtes, parce qu'ils sont relâchés dans des enclos de filet et ils sont élevés dans un environnement marin. Le fait qu'il y a des poissons qui s'échappent de ces enclos garantit plus ou moins qu'une partie du contenu de l'enclos est relâché dans l'environnement. Il est possible de gérer une culture pour qu'il n'y ait pas de propagation d'un champ à l'autre, mais il est impossible de récupérer les organismes qui s'échappent d'un enclos de filet dans la nature.
Voici ce qui inquiète le groupe d'experts: étant donné que nous savons peu de choses de l'incidence des versions génétiquement modifiées de poisson sur les stocks naturels et sur l'écologie des systèmes marins, ce serait faire preuve d'irresponsabilité que de garder des poissons d'élevage dans des enclos de filet. À tout le moins, on devrait avoir recours à des systèmes installés à terre.
J'ai souvent dit en public que je trouve que même ces systèmes installés à terre comportent de gros risques. Ce n'est pas parce que le poisson risque de se faufiler vers la berge, mais parce qu'un jour ou l'autre, quelqu'un trouvera ingénieux de prendre certains de ces poissons et de les rejeter dans un enclos de filet.
Á (1140)
M. Bob Speller: Merci.
Je vous félicite d'avoir lu l'exposé de l'autre intervenant. Il a parlé de considérations non scientifiques. Votre groupe a manifestement examiné ces aspects de la question et élaboré des recommandations.
Quelle est l'importance de ces considérations non scientifiques? Notre comité va devoir trouver un équilibre entre ce que nous disent les scientifiques et ces autres considérations. Pouvez-vous nous dire un peu comment nous pourrions procéder?
M. Brian Ellis: Je ne pense pas que les deux soient incompatibles. Je crois que ce que disent les scientifiques, c'est que nous pourrions plus facilement nous prononcer sur l'innocuité de ces substances si nous avions une analyse plus poussée de leurs effets. Nous n'avons pas de réaction d'alarme immédiate mais nous ne sommes pas en mesure de nous prononcer catégoriquement, surtout quand de nouvelles versions de ces substances génétiquement modifiées apparaissent.
Notre travail de scientifiques consiste à fournir le plus d'information pertinente possible pour qu'on puisse prendre une décision qui est essentiellement politique et sociale. Moi qui ai un pied dans chaque camp, à la fois citoyen et scientifique, je dirais que ces décisions sociales et politiques l'emportent sur les opinions scientifiques. Elles ne nient pas la valeur des avis scientifiques, mais la décision que l'on prend, comme l'a dit Conrad Brunk, et je suis entièrement d'accord avec lui, vise fondamentalement à établir une confiance dans cette technologie. Si l'on n'a pas confiance dans cette technologie, je pense qu'elle risque vraiment de ne pas avoir l'apport positif qu'elle devrait avoir. Il y a aussi un risque d'apport négatif, mais ce qui me préoccupe le plus, c'est la crainte de ne pas bénéficier de cet apport positif de la technologie si la confiance n'existe pas.
M. Bob Speller: Monsieur, je me demande si vous pensez qu'il y a des ressources suffisantes pour cela à Santé Canada actuellement. Avez-vous fait des recommandations visant à donner des garanties au public sur la sécurité alimentaire, et le ministère dispose-t-il de ressources suffisantes pour cela?
Deuxièmement, quelle réponse avez-vous eue de Santé Canada? Le ministère va-t-il accepter vos recommandations et les modifier, ou...
M. Brian Ellis: Je n'ai pas accès aux ressources du ministère, mais du point de vue de la technologie, je dirais qu'il dispose des éléments nécessaires. En ce qui concerne la capacité, autrement dit la question de savoir s'il a le personnel et la capacité de traitement nécessaires, je ne sais pas, et c'est une question qu'il faudrait poser spécifiquement au ministère.
M. Bob Speller: Vous reconnaissez tout de même qu'ils ont examiné cette cinquantaine de recommandations et qu'elles sont acceptables.
M. Brian Ellis: À part leur mouvement de recul initial, je dirais qu'ils ont réagi de façon constructive bien qu'hésitante. Ils ont dialogué de façon plus ou moins continue avec d'anciens membres du groupe sur la façon de mettre en oeuvre les recommandations.
Il faut dire à leur décharge que ces 53 recommandations se présentaient sous une forme brute. Nous avons été à court de temps. Nous avons dû publier notre rapport probablement deux mois plus tôt que nous ne l'aurions fait normalement. J'aurais personnellement été plus satisfait de présenter environ 25 recommandations qui étaient plus succinctes, et c'est donc un des problèmes que nous avons eus. Ils ont rencontré le groupe un mois ou deux après la publication du rapport pour demander des précisions sur ces recommandations. Nous les avons toutes examinées soigneusement avec eux.
Leur plan d'action, que vous connaissez peut-être, répond d'une certaine façon à ces recommandations. Toutefois, je trouve personnellement que c'est un peu flou et qu'il n'y a pas vraiment d'objectifs bien tangibles. C'est un texte qui propose des orientations formulées dans un jargon assez bureaucratique.
Á (1145)
La présidente: Merci, monsieur Speller.
Madame Wasylycia-Leis.
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Merci, madame la présidente.
Je reviens à ce mouvement de recul... [Note de la rédaction: Inaudible] ...plan d'abord, et ensuite je parlerai de toute cette question de Santé Canada.
Vous l'avez fort bien dit, monsieur Ellis, le gouvernement dans son ensemble et plus particulièrement Santé Canada ont très mal réagi quand votre rapport est sorti en contestant vos arguments scientifiques, en laissant entendre que vous n'aviez pas toutes les informations et en essayant de discréditer ce rapport. Je pense qu'ils ont maintenant essayé de rectifier le tir et qu'on voit s'esquisser un semblant de réponse. Mais comme vous l'avez dit, nous n'avons toujours pas vu de mesures concrètes répondant à la question fondamentale, celle de la sécurité alimentaire.
Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que la question de l'étiquetage est une question secondaire. Si l'on pouvait nous garantir à tous qu'il y a eu des recherches scientifiques indépendantes et que les aliments génétiquement modifiés que l'on trouve sur le marché sont sûrs au-delà de tout doute raisonnable, nous n'aurions pas tout ce problème d'étiquetage.
J'ai quelques questions à poser dans mes cinq minutes. En février 2001, en réponse au ministère, qui contestait votre démarche scientifique et l'idée d'équivalence en substances, vous avez répondu en disant que vous compreniez la démarche de Santé Canada mais que son analyse
reposait uniquement sur des données et des informations fournies par le demandeur et [que] les documents de décision décrivant et validant les résultats sont, comme vous le dites, internes et par conséquent ne sont pas directement disponibles aux chercheurs scientifiques ou au grand public. |
Avez-vous pu obtenir auprès de Santé Canada plus de renseignements sur les informations que le ministère utilise, les données sur lesquelles il travaille et les méthodes scientifiques utilisées dans le cadre de cet effort qu'on nous promet depuis longtemps et qui viseraient à tout faire pour nous garantir que nos aliments génétiquement modifiés sont sûrs au-delà de tout doute raisonnable?
M. Brian Ellis: Premièrement, comme dans le cas du groupe de travail qui a été démantelé, je n'ai plus de rôle officiel. Je ne suis donc pas mieux placé que n'importe quel citoyen pour obtenir des informations de Santé Canada, et je n'ai pas essayé d'aller plus loin.
Leur système n'est pas plus transparent qu'à l'époque où nous discutions avec eux, et les choses n'ont donc pas changé sur ce plan. La seule proposition qu'ils nous aient faite, et encore ce n'est qu'une ébauche, pour améliorer les mécanismes de supervision de leur procédure d'évaluation, c'était d'inviter un expert externe à assister aux séances durant lesquelles le groupe de travail décerne ses approbations finales. Je suis désolé, mais je trouve que c'est plus ou moins une offre bidon, ne serait-ce que parce qu'il y a tellement de facettes dans l'évaluation d'un aliment génétiquement modifié qu'un simple expert, que ce soit un écologiste, un allergologue ou autre, ne peut pas à lui seul se prononcer sur la qualité et la validité des travaux qui lui sont présentés.
Je souhaiterais revenir à la demande du groupe de travail qui souhaitait que toute la procédure soit plus transparente, et cela nous renvoie à toute cette idée de construire la confiance publique. Il ne s'agit d'ailleurs pas simplement de permettre au public d'avoir un meilleur accès à ces données, mais de permettre au monde scientifique d'examiner la façon dont les tests ont été conçus et les données ont été évaluées pour que leur voix relativement indépendante puisse être entendue et formulée dans le cadre du débat public.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Vous dites aussi dans votre rapport, et vous l'avez répété encore aujourd'hui, qu'il est essentiel pour notre société et notre gouvernement de préserver l'intégrité scientifique et que toute apparence de conflit tenant au fait qu'un organisme comme l'ACIA est à la fois responsable de la promotion et de la réglementation était inquiétante. Selon certaines informations publiées le mois dernier, le gouvernement aurait lancé une campagne coûtant des millions de dollars pour promouvoir les aliments génétiquement modifiés.
Vous qui avez présenté un rapport sur cette question il y a un an ou plus, que pensez-vous aujourd'hui de toute cette question, sachant qu'il ne s'agit pas seulement d'une question de perception?
Á (1150)
M. Brian Ellis: J'ai toujours trouvé que ce n'était pas correct, et je le pense toujours. D'après ce que j'ai pu voir, je pense qu'ils insistent moins sur la mise au point de la biotechnologie alimentaire et qu'ils ont une attitude beaucoup plus neutre. D'après mes discussions avec des chercheurs scientifiques d'Agriculture Canada, ils ont beaucoup moins tendance à insister très lourdement sur la mise au point de nouveaux produits de la biotechnologie au sein de la division de la recherche d'Agriculture Canada. Ils se concentrent beaucoup plus sur l'agriculture durable maintenant qu'il y a un an ou deux.
Donc les choses ont évolué. Je ne pense pas que notre rapport ait nécessairement joué un rôle très important dans ce changement, mais je crois qu'ils se sont rendu compte qu'il y avait une forte réaction publique à la mise en place de cette technologie. S'ils ne pensent pas que leur orientation n'était pas correcte, ils se rendent compte en tout cas qu'elle ne donne pas les résultats attendus.
La présidente: Merci, madame Wasylycia-Leis.
Monsieur Dromisky.
M. Stan Dromisky (Thunder Bay--Atikokan, Lib.): Merci.
Vous parlez de créer la confiance dans cette technologie, mais je crois que cela va beaucoup plus loin que cela. Vous avez tout un bagage et toutes sortes de connaissances dans le domaine de la recherche, etc., et vous savez donc aussi bien que moi que la plupart des recherches comportent une faiblesse. On peut examiner à la loupe les caractéristiques d'une recherche donnée et les contester, mais tout dépend des variables utilisées dans le modèle de recherche. Il y a d'un côté le secteur privé et d'autre part des institutions ou des fondations qui font de la recherche. Tous ces établissements peuvent utiliser toutes sortes de variables pour leurs recherches, des variables qui varient d'une institution à l'autre.
Vous parlez des universités. Vous recommandez que ce soit les universités qui fassent la recherche. Mais je pense qu'on retrouve le même genre de problèmes et de faiblesses dans n'importe quel département de recherche scientifique universitaire qui travaille dans ce domaine. Tout dépend des variables utilisées. Si une variable doit infléchir le résultat et le rendre inacceptable, les chercheurs vont se demander si leur commanditaire—une fondation ou le gouvernement, si les recherches sont financées par le gouvernement—va être content du résultat. Ils vont se demander s'ils doivent écarter cette variable pour être sûrs de pouvoir conserver leur financement au cours des années suivantes ou s'ils risquent de se faire supprimer ce financement s'ils présentent un rapport négatif ou un rapport qui n'est pas acceptable.
On parle de l'industrie, du secteur privé, des universités et de toutes sortes d'autres intervenants, mais il n'y a aucun moyen cohérent de contrôler les variables utilisées. N'importe quel critique peut venir vous dire que ce que vous faites est acceptable, mais si vous y regardez de plus près, vous allez vous rendre compte qu'on a oublié quelque chose, qu'on a délibérément écarté telle ou telle variable et qu'on étiquette maintenant le produit en prétendant qu'il est sûr et acceptable, alors que s'il avait été examiné avec un autre modèle, il ne serait pas considéré comme acceptable. C'est une pure hypothèse que j'avance là, car je ne sais pas ce qui est possible.
Que font les Européens à cet égard? Comment contournent-ils ce problème? Il ne s'agit pas simplement de problèmes de santé, mais de problèmes sociaux, économiques, etc., et de recherche. Les Européens font-ils des recherches?
M. Brian Ellis: Vous avez abordé plusieurs sujets.
Disons que je reconnais pleinement, comme nous tous, que les chercheurs scientifiques sont des êtres humains comme tout le monde et qu'ils subissent des pressions. C'est pour cela que le monde scientifique respecte le principe de l'ouverture et de l'examen par les pairs. Si l'on ne peut pas valider des données en les reproduisant dans un autre laboratoire, ces données sont suspectes. C'est clair. Ce n'est qu'en faisant des comparaisons, en refaisant les tests et en contestant les données qu'on finit par aboutir à une conclusion solide. On n'a pas une preuve absolue, mais tout le monde, aussi bien les chercheurs scientifiques que les profanes, a confiance dans l'exactitude des données.
Je suis donc tout à fait d'accord pour admettre que la question n'est pas de savoir si le travail s'effectue dans une université, dans l'industrie ou dans un laboratoire du gouvernement, même si l'on peut admettre que les pressions peuvent être plus fortes dans certains secteurs que dans d'autres. Ce qui est essentiel, c'est que les données soient pleinement accessibles et qu'on puisse tester ailleurs les conclusions qui sont présentées. C'est comme cela que fonctionne le régime d'examen par les pairs dans le domaine scientifique, et c'est là-dessus que nous avons insisté quand nous avons présenté notre rapport. Je pense donc qu'il existe un mécanisme permettant de s'occuper du problème de ces variables.
Vous voulez savoir ce que font les Européens? Ils font beaucoup de recherche, mais ils ont bloqué le déploiement des cultures génétiquement modifiées. Ils n'ont pas arrêté la consommation d'aliments génétiquement modifiés, mais ils ont plafonné la quantité de ces éléments qui peuvent être incorporés dans les aliments. Ils investissent des dizaines de millions de dollars chaque année dans l'évaluation des retombées des aliments génétiquement modifiés sur le plan environnemental et sur la santé, dans des laboratoires, dans des essais sur le terrain, avant de déployer pleinement ces cultures. Voilà ce qu'ils font.
Á (1155)
La présidente: Merci, monsieur Dromisky.
Monsieur Merrifield.
M. Rob Merrifield: Puisque vous parlez de l'Europe, je vais continuer là-dessus. Vous dites qu'ils font beaucoup plus d'études et d'essais sur des aliments génétiquement modifiés. On en revient à la question de la tonalité et de la confiance. Pour en revenir à la confiance, est-ce que tous ces tests que font les Européens depuis des années ont changé la situation? Je songe à un rapport publié juste avant Noël. C'est une étude réalisée en Europe d'après laquelle les aliments génétiquement modifiés seraient même encore plus sûrs que les aliments traditionnels. Pourriez-vous nous dire un peu où ils en sont?
M. Brian Ellis: Je ne suis pas sûr que l'attitude du grand public ait beaucoup changé. Je pense que les chercheurs scientifiques accumulent des informations très précieuses qui occuperont un jour une place importante dans le débat. Mais d'après ce que je peux lire, l'attitude des Européens face aux OGM n'a guère évolué. Il y a eu un léger changement, et ces aliments sont probablement un peu mieux acceptés, mais il y a toujours une résistance très forte dans le public.
M. Rob Merrifield: Est-ce qu'on constate ce changement au sein du monde scientifique? Vous pourriez peut-être nous en parler plus que...
M. Brian Ellis: Le monde scientifique n'est pas monolithique. J'hésiterais à être catégorique, mais pour répondre à votre question d'un point de vue strictement personnel, je dirais qu'il y a probablement eu une certaine évolution parce que ces chercheurs ont le sentiment d'accumuler de plus en plus de preuves et de constater en gros que ces produits génétiquement modifiés sont probablement assez sûrs, mais qu'il y a aussi des pistes intéressantes et inattendues qu'il faut suivre.
Là encore, comme toujours dans le domaine scientifique, on confirme des attentes mais en même temps on découvre de nouvelles questions intéressantes.
M. Rob Merrifield: D'après les essais qu'on fait ici en Amérique du Nord ou au Canada, il semble généralement admis que les produits que nous avons actuellement sur le marché sont parfaitement sûrs et qu'il n'y a aucune raison de s'en inquiéter.
Je m'inquiète un peu plus pour l'avenir. Avons-nous les mécanismes voulus actuellement? Attendons-nous suffisamment longtemps? Est-ce que nous faisons suffisamment d'essais avant d'autoriser la mise en marché de nouveaux produits? Du point de vue scientifique, avez-vous le sentiment que nous prenons toutes les précautions voulues actuellement, ou qu'il faudrait au contraire les renforcer?
M. Brian Ellis: Le défi que représente l'analyse des nouveaux produits à venir—par exemple, ceux qui résistent aux maladies ou au stress environnemental— est énorme, car ces produits ont des caractéristiques qui sont... Permettez-moi d'exprimer quelques réserves. Je ne pense pas que ces produits comportent nécessairement plus de risques pour la santé humaine, mais je pense que ces nouveaux produits représentent un défi énorme du point de vue de la santé environnementale, car leurs caractéristiques les rendent beaucoup plus compétitifs dans le milieu naturel. La transmission de ces caractéristiques à des espèces apparentées devra par exemple être surveillée de très près.
Du point de vue de la santé humaine, comme je l'ai mentionné dans mon exposé, nous possédons les outils qui nous permettent d'évaluer à fond les incidences éventuelles sur la santé, sans oublier qu'il faudra toutefois une surveillance à long terme si nous voulons vraiment être certains que nous ne déclenchons pas des réactions que nous n'avions pas du tout envisagées.
 (1200)
M. Rob Merrifield: Hésitez-vous en ce qui concerne le poisson parce que vous considérez que ce n'est pas une question de sécurité alimentaire, mais une question environnementale?
M. Brian Ellis: Parfaitement, c'est une question environnementale.
M. Rob Merrifield: Vous n'êtes toutefois pas très préoccupé par la sécurité alimentaire.
M. Brian Ellis: Je pense qu'il faut en faire l'examen de la même façon approfondie que tous les autres produits transgéniques, mais je n'y vois pas en effet uniquement une question de sécurité.
La présidente: Merci, monsieur Merrifield.
Docteur Castonguay.
[Français]
M. Jeannot Castonguay (Madawaska--Restigouche, Lib.): Merci, madame la présidente.
Merci, docteur Ellis. La question des aliments génétiquement modifiés est un sujet qui nous intéresse beaucoup. On nous disait que des modifications génétiques se produisent spontanément dans la nature. On sait que cette technologie a beaucoup de bénéfices potentiels à long terme. Cependant, tous se demandent si elle aura des effets néfastes sur la santé à long terme. Si je comprends bien, au moment où on accepte que ces aliments soient mis sur le marché, on dit qu'il y a eu une vérification scientifique et qu'en l'état actuel de la connaissance, on peut nous assurer qu'on peut les consommer sans problème pour la santé.
Comment peut-on arriver à faire ce suivi? Ce n'est pas une tâche facile, mais qui doit en prendre la responsabilité et comment doit-on le faire? Je compare souvent cela aux médicaments, pour lesquels on a un environnement plus serré. Ce sont des médicaments d'ordonnance et on a peut-être plus de chance qu'il y ait un suivi. Pouvez-vous nous suggérer une façon d'assurer le suivi de cette technologie, lorsqu'on va mettre de tels aliments sur le marché? Pour moi, un tel suivi est peut-être l'une des clés de l'acceptation de cette nouvelle technologie.
[Traduction]
M. Brian Ellis: Je suis tout à fait d'accord. Je pense que le plus grand défi auquel nous soyons confrontés sur le plan scientifique, c'est la surveillance à long terme—aussi bien des effets environnementaux que de l'incidence sur la santé. Revenons quelques instants à la question de la santé. Je ne vois pas comment il peut être possible d'effectuer des études épidémiologiques significatives afin de déceler, disons, de nouveaux types d'impacts sur la santé ou de réactions allergiques si on est incapable de tenir des dossiers sur la consommation pour les secteurs de la population qui semblent touchés. Sinon, il devient impossible d'établir des corrélations, le seul indicateur que des changements dans les modes de consommation sont en fait la cause ou tout au moins une cause probable des résultats que vous constatez.
Même avec des mécanismes d'étiquetage et de contrôle, c'est un processus d'envergure, coûteux. D'après ce qui ressort de nos discussions avec les représentants de Santé Canada, le ministère reconnaît qu'une surveillance à long terme devra être établie afin de faire face à cette situation. Le ministère a déjà créé un comité de surveillance à long terme, mais je ne suis pas très au courant car nous n'en avons pas discuté ensemble. Je ne connais pas la méthodologie que l'on envisage d'utiliser, mais en l'absence d'étiquetage, je suis franchement curieux de savoir comment on pourra faire avancer ce dossier. J'ai l'impression qu'actuellement, on temporise.
[Français]
M. Jeannot Castonguay: Je n'ai pas la réponse non plus, et ce n'est pas évident. Je pense que personne n'a aujourd'hui cette réponse, mais on est tous conscients de l'importance de ce suivi.
Revenons à l'étiquetage, qu'il soit obligatoire ou volontaire. Quelle information doit-on fournir au public pour que les gens puissent décider eux-mêmes s'ils veulent consommer de ces aliments? Quelle information devrait-on mettre sur les étiquettes?
[Traduction]
M. Brian Ellis: Je vais devoir répondre à cette question sous différents rapports. Comme je l'ai dit dans mon exposé, le principe de la tolérance zéro est très problématique. Si l'on accepte qu'il y a un seuil pratique, pour ainsi dire, votre question est tout à fait valable. Si c'est 2 p. 100 d'OGM, qu'est-ce que cela signifie et comment mettre cela en oeuvre? Je me concentrerais certainement sur toute protéine dans le produit qui provient de sources d'aliments génétiquement modifiés, telles que les plantes de grande culture. Le plus grand risque de cette technologie—je ne veux pas dire qu'il s'agit d'un risque énorme, mais c'est tout de même le risque le plus important—serait la naissance de nouvelles réactions allergiques causées par les protéines nouvelles qui sont soit des protéines que nous n'avons jamais vues auparavant dans notre régime, soit des protéines désormais présentes dans notre alimentation à des niveaux que nous n'avions jamais connus auparavant.
Je pense donc qu'il faudrait se concentrer sur le niveau de protéines dérivées d'OGM présentes dans le produit alimentaire en question. Je ne m'occuperais pas trop de l'ADN, parce que je ne sache pas qu'il y ait des problèmes de santé associés à l'ADN. Bien que j'estime que les métabolites—autrement dit, les matières chimiques qui s'accumulent dans les produits alimentaires—sont un élément important à surveiller, il est relativement facile de les surveiller. On peut faire une évaluation de leur présence a priori, au niveau du produit en vrac. Cela peut donner l'assurance qu'il n'y a pas de métabolites toxiques que l'on ne connaisse pas et l'on sait ainsi quels sont les niveaux de toxicité.
Par contre, les protéines sont associées à une vaste inconnue. On ne sait pas qui va y être allergique, tant qu'on ne dispose pas d'un historique d'une exposition d'une grande population aux protéines concernées. Cela peut sembler être une expérience sur le vif, et c'est effectivement ce que c'est, mais nous faisons cela pour les cultures de sélection classiques et pour les sélections par mutation. Je crois que c'est une chose que nous devons accepter, qu'il s'agit simplement d'un autre aspect de la manipulation de notre alimentation.
 (1205)
La présidente: Merci, docteur Castonguay.
Madame Scherrer.
[Français]
Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.): Je voudrais partir de la prémisse qui a été émise par ma collègue Mme Wasylycia-Leis, à savoir que le débat qu'on a actuellement est issu du fait qu'il y a quelque part des doutes. Si on savait qu'à court, à moyen ou à long terme, les OGM ne présentent aucun problème, on n'aurait pas ce débat-là aujourd'hui au niveau de la sécurité et de l'innocuité des produits.
Si la prémisse est qu'il y a un doute à l'égard de ces produits, je me demande pourquoi on ne recommande pas l'étiquetage obligatoire de ces produits à titre d'avertissement et, comme vous le suggérez, à titre provisoire, pendant une certaine période. On compare souvent cette situation avec ce qui se passe au niveau des médicaments. Pour moi, il s'agit d'une comparaison qui est faible, parce que dans le cas des médicaments d'ordonnance, on est capable de retracer la fréquence d'utilisation ainsi que leur combinaison avec d'autres éléments, ce qui n'est pas possible dans le cas d'un produit génétiquement modifié.
Je peux consommer tel type de maïs et souffrir d'une allergie. Cependant, ce n'est pas nécessairement ce produit qui me cause une allergie, mais sa combinaison avec un autre produit ou la fréquence à laquelle je le consomme au cours des années. Les scientifiques ne sont pas capables de démontrer l'innocuité de ces produits dans le temps, et je pense qu'on ne sera jamais capable de le faire. Vous allez peut-être pouvoir me donner des indices. Est-ce qu'un jour on sera capable de contrôler tous les variables qui vont entrer en ligne de compte, notamment la combinaison avec d'autres éléments et la fréquence à laquelle cet aliment est consommé?
Pourquoi, à la lumière des éléments que vous exposez, n'êtes-vous pas capables de dire qu'on devrait imposer l'étiquetage obligatoire, quitte à ce que cela soit provisoire, jusqu'à ce qu'on ait l'impression d'avoir mis en place des mécanismes pour évaluer si la combinaison, la fréquence, la durée, les modifications sont prises en ligne de compte, plutôt que de dire que dans le doute, on s'abstient?
Voici ma deuxième question. On parle du seuil de tolérance et de la possibilité de permettre tel pourcentage d'OGM dans un produit. Dans mon esprit à moi, on n'est pas à moitié enceinte. On est enceinte ou on ne l'est pas. Si ce produit cause des problèmes, pourquoi devrait-on le tolérer à 1 p. 100, 2 p. 100 ou 5 p. 100? Est-ce qu'on ne devrait pas décréter la tolérance zéro puisqu'on ne connaît pas les problèmes qui sont causés par ce produit?
 (1210)
[Traduction]
M. Brian Ellis: Vous avez posé beaucoup de questions distinctes. Je commencerai peut-être par la dernière pour remonter graduellement au début. Si j'oublie quelque chose, je vous prie de me le signaler.
Pourquoi pas la tolérance zéro? Parce qu'étiqueter un produit avec une teneur zéro, c'est essentiellement donner naissance à l'obligation légale de garantir que la teneur est effectivement de zéro. Comme je l'ai dit dans mon exposé, cela dépend essentiellement des technologies. Le niveau que l'on peut détecter aujourd'hui n'est pas celui que l'on pourra détecter demain. Le niveau détectable tombe constamment. C'est pourquoi je dis que ce n'est pas un niveau pratique ou significatif.
On peut essayer de garantir une teneur zéro, comme le font les cultivateurs de produits biologiques en déclarant qu'aucun produit génétiquement modifié n'est acceptable dans un système de production d'aliments biologiques. Toutefois, dans les faits, cela n'est pas vérifié. L'industrie n'est pas techniquement capable de vérifier cela et elle ne prétend absolument pas le faire. Bien qu'il faille accepter que la production biologique est exempte de tout OGM, je ne sache pas qu'il existe de données qui en fassent la preuve. C'est là la difficulté à surmonter, et c'est pourquoi la plupart des pays ont opté pour un niveau acceptable d'OGM, afin d'être réalistes.
Pourquoi ne déclarons-nous pas l'étiquetage obligatoire et ne réglons-nous pas ainsi le problème? Je crois qu'en fait c'est ce que Conrad Brunk et moi avons dit ici, même si nous envisageons la chose de points de vue différents. Du point de vue scientifique, je ne crois pas que nous ayons toutes les données nécessaires sur l'innocuité des OGM. Par conséquent, il serait tout à fait approprié de recourir à l'étiquetage obligatoire. Du point de vue de Conrad, il y a une dimension sociale et éthique. Si l'on demande aux consommateurs d'accepter un certain degré de risque, il faut donner aux gens la possibilité de faire des choix en fonction de ce risque. Je trouve cet argument tout à fait valable.
Ai-je répondu à...
[Français]
Mme Hélène Scherrer: Merci.
[Traduction]
La présidente: Monsieur Lunney.
M. James Lunney: Je reviens aux cultures génétiquement modifiées et au canola, en particulier, parce qu'il est si généralement utilisé. Si je comprends bien, environ 78 p. 100 du canola cultivé au Canada est génétiquement modifié. Êtes-vous au courant de l'existence d'études qui montrent que le canola génétiquement modifié a une pollinisation plus active?
M. Brian Ellis: Je ne suis pas au courant de l'existence d'études montrant que le canola génétiquement modifié connaît une pollinisation plus active, mais je sais qu'il y a une étude sur une espèce connexe, l'arabidopsis, qui tend à prouver que l'un des gènes résistant aux herbicides semble modifier l'efficacité avec laquelle le pollen transmettra cette caractéristique génétiquement modifiée à d'autres individus au sein de la population. Il semble qu'il y ait augmentation du taux de pollinisation croisée.
C'est un résultat plutôt inattendu, mais il semble qu'il a été confirmé par le chercheur d'origine. Je n'ai eu connaissance d'aucune expérience faite en guise de suivi par d'autres personnes, et je ne sais pas si l'on a fait des études correspondantes pour le canola. Je dois dire, toutefois, que ce serait une étude logique à faire.
M. James Lunney: Oui, exactement.
Pour ce qui est de la question des solutions de rechange, les milieux concernés semblent être favorables à un régime d'étiquetage volontaire. Vu les niveaux de tolérance en vigueur en Europe, j'imagine que cela s'appliquerait éventuellement à ceux qui veulent déclarer leurs produits exempts de tout OGM. En Europe, si je comprends bien, on a établi le seuil de tolérance à une teneur d'environ 1 p. 100.
Je crois comprendre que l'Office des normes générales du Canada envisage un seuil de 5 p. 100. Pouvez-vous nous dire ce que vous en pensez? Les fonctionnaires de Santé Canada qui ont récemment comparu devant un comité nous ont dit qu'il est difficile de quantifier, que le seuil soit de 1 p. 100, 5 p. 100, ou de tout autre pourcentage. On peut dire qu'il y a présence ou absence, mais pour ce qui est de quantifier effectivement la teneur en OGM, surtout pour les produits mixtes, il y a un problème.
M. Brian Ellis: Cela dépend de ce que Santé Canada examine. Je suppose que c'est l'ADN, qui est quantifiable, mais je ne sais pas si ses chercheurs examinent l'ADN. S'ils se concentrent sur les protéines, qui seraient certainement ma préoccupation première, je ne vois pas pourquoi elles ne seraient pas quantifiables.
Je vois bien les difficultés, parce que la méthodologie que l'on élabore pour une forme de protéine peut être moins efficace pour détecter cette protéine si, par exemple, elle a été cuite, transformée et entreposée sur une étagère pendant six mois.
Je comprends la difficulté, mais je ne vois pas pourquoi on ne peut pas la résoudre. Il y a d'excellents scientifiques et à l'intérieur de Santé Canada et à l'extérieur, et ces choses-là peuvent toutes être faites. Je ne comprends donc pas vraiment le raisonnement.
 (1215)
M. James Lunney: Diriez-vous que les cultures ou les substances génétiquement modifiées ont pour caractéristique de connaître un certain niveau d'instabilité, ou affichent-elles une tendance à l'instabilité lors de la reproduction, ce qui voudrait dire qu'elles engendrent beaucoup de variantes?
M. Brian Ellis: Lorsqu'on crée des cultures génétiquement modifiées, dès la première étape de la conception, on incorpore le gène dans les antécédents parentaux. Lorsqu'on examine les produits de ce travail, on constate l'existence de nombreuses variantes différentes ou de plantes hors-type. Les phytogénéticiens éliminent aussitôt ces variantes. Ils ne gardent que les plantes qui, premièrement, contiennent le gène; deuxièmement, contiennent le gène et où le gène semble se comporter conformément aux attentes et, troisièmement, ne semblent pas être des plantes hors-type. Ils passent donc par un processus d'élimination qui permet essentiellement de se débarrasser de la plupart des hors-type visibles. Ensuite, souvent, on croise cette lignée génétiquement modifiée avec des lignées non génétiquement modifiées existantes, afin d'améliorer le fonds génétique ou de donner à la plante des caractéristiques qui lui permettent de mieux s'adapter à une région en particulier.
Il y a donc beaucoup de travail préalable et, une fois la variété génétiquement modifiée choisie, je ne crois pas qu'il existe de preuve que les lignées choisies soient plus instables ou moins fiables génétiquement que celles des plantes sélectionnées de façon classique.
M. James Lunney: Est-il prouvé que les niveaux de production ou, du moins, les niveaux de production attendus, diminuent dans le cas de certaines cultures génétiquement modifiées? Au bout d'un certain temps, semblent-elles perdre de leur avantage?
M. Brian Ellis: Je n'ai rien vu qui permette de le penser. D'après les résultats des études faites auprès des producteurs de fèves soya, de coton et de canola que j'ai vues, il n'y a pas eu diminution de l'efficacité. Si c'était le cas, les producteurs auraient réagi très rapidement, car ils ne sont pas prêts à accepter une perte de rendement pour pouvoir se servir de cette technologie.
M. James Lunney: Sur cette question de l'utilisation d'un virus pour créer des cultures génétiquement modifiées, avez-vous entendu parler de virus associés aux adénovirus?
M. Brian Ellis: Ce terme que vous utilisez pourrait désigner deux choses. D'abord, parmi les éléments homologués qui entrent dans la composition des cultures génétiquement modifiées, on trouve généralement ce qu'on appelle un promoteur de gène, qui est issu d'un phytovirus. On se sert aussi dans les cultures génétiquement modifiées de gènes hybrides à caractère viral, qui sont censés supprimer les maladies virales. Voilà donc les deux utilisations qui sont faites de ces virus.
M. James Lunney: Une dernière observation, très brièvement...
La présidente: Je suis désolée, monsieur Lunney, mais vous avez déjà eu droit à cinq minutes et demie. Je dois donner la parole à quelqu'un d'autre.
Mme Wasylycia-Leis, suivie de M. Speller.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci, madame la présidente. J'ai quatre questions et je vais toutes les poser ensemble dans l'espoir que M. Ellis pourra y apporter des réponses.
Ma première question, monsieur Ellis, revient à la dernière réponse que vous m'avez faite au sujet de l'ACIA. Je vais simplement vous poser une question hypothétique. L'ACIA peut peut-être donner moins l'impression d'être dans une situation de conflit d'intérêts flagrant et sembler plus neutre car elle a maintenant ce groupe de façade naturel qui fait la promotion de l'innocuité des produits génétiquement modifiés et qui cherche à convaincre les Canadiens qu'il n'y a aucun problème. Je songe tout particulièrement à cette magnifique brochure qui a été diffusée. La brochure a été publiée par le Comité consultatif de la biotechnologie, sous l'égide du Centre d'information sur la biotechnologie alimentaire. On continue à diffuser beaucoup d'informations pour essayer de faire la même chose qu'auparavant, en changeant simplement les appellations, alors je me demandais si vous aviez quelque chose à dire à ce sujet.
Ma deuxième question concerne la recherche. Qui au Canada fait de la recherche scientifique indépendante? Je ne sais pas si vous pouvez répondre à cette question.
Je voudrais aussi savoir qui au juste se retrouve sous la bannière de l'Institut canadien de recherche pour la salubrité des aliments car, la semaine dernière, nous avons entendu le témoignage d'un certain Doug Powell. Il me semblait être plus une publicité ambulante pour l'industrie qu'un scientifique indépendant intéressé par la salubrité des aliments, et pourtant il prétendait représenter l'organisme qui...il nous a donné à entendre que l'information publique que fournit l'organisme se fonde sur des données scientifiques, que nous avons le meilleur système au monde pour assurer la salubrité des aliments, etc. Voilà ma deuxième question.
Ma troisième question a trait à l'étiquetage. J'appuie l'étiquetage obligatoire, mais, pendant que je vous écoutais, je me suis mise à penser que certains des géants du secteur alimentaire pourraient se rallier à l'idée de l'étiquetage obligatoire parce qu'ils en ont les moyens et qu'ils peuvent faire toute la publicité qu'ils veulent pour contrer les effets de cet étiquetage sans avoir à se soucier de la question fondamentale des données scientifiques. Qui écope à ce moment -là? Ce sont, bien entendu, les consommateurs, mais aussi les agriculteurs, qui doivent démêler tout cela aux fins de l'étiquetage.
Ma quatrième question vise simplement à obtenir un éclaircissement au sujet de votre position en faveur d'un moratoire sur l'homologation de tout nouveau produit génétiquement modifié qui pourrait être mis en marché.
 (1220)
La présidente: Vous avez déjà pris plus de deux minutes et demie, Judy.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Je suis désolée.
M. Brian Ellis: J'essaierai d'être bref. Suis-je soumis moi aussi à une limite de temps?
La présidente: Non, mais la députée a un certain temps de parole pour la question et la réponse.
M. Brian Ellis: Je vois. Très bien.
L'ACIA semble-t-elle être plus neutre tout simplement parce qu'elle consacre certains de ses efforts de promotion à d'autres...j e n'en sais rien. J'ai mes propres réticences face à certains des documents que l'Agence publie, car à mon avis, elle évite le sujet. L'Agence me semble tentée de défendre des intérêts, mais je ne crois pas que ce soit ce dont les Canadiens ont besoin pour l'instant. Ils n'ont pas besoin qu'on défende leurs intérêts, ils ont plutôt besoin de mécanismes leur permettant d'avoir confiance.
Deuxièmement, qui effectue de la recherche indépendante? Il se fait beaucoup de recherche indépendante dans les universités, mais c'est surtout de la recherche réactive plutôt que proactive. J'admets qu'il est difficile pour les chercheurs universitaires de se faire financer s'ils optent pour ce genre de sujets de recherche, notamment parce qu'il est peu probable qu'ils trouvent quoi que ce soit de véritablement nouveau et palpitant. Ce genre de projet de recherche est donc risqué pour celui qui doit assurer la viabilité de son programme de recherche et maintenir sa crédibilité. Si le chercheur consacre trois ou quatre ans de sa carrière à étudier un problème sans trouver de solution, il donne l'impression d'avoir perdu son temps, ce qui ne contribue en rien à redorer son image.
Maintenant, qui représente l'Institut de recherche canadien en salubrité des aliments? Je n'ai pas de commentaires à faire sur Doug Powell, car vous avez votre propre opinion sur lui.
Les grandes sociétés accepteraient-elles l'étiquetage obligatoire? D'un point de vue stratégique, je pense qu'il serait dans leur intérêt de le faire. Lorsque Monsanto a introduit les pommes de terre New Leaf au Nouveau-Brunswick, elle l'a fait lors d'une campagne de publicité ouverte et active dans laquelle on ne cachait nullement qu'il s'agissait de pommes de terre génétiquement modifiées. Monsanto avait installé des comptoirs dans les supermarchés où elle distribuait des primes, et où elle discutait volontiers de la technologie, ce qui a suscité une excellente réaction de la part de la population. J'ai toujours cru, d'ailleurs, que Monsanto avait joué là sa meilleure carte. Toutefois, la compagnie n'a pas réussi à distribuer ses pommes de terre génétiquement modifiées, simplement parce que les grands distributeurs comme McCain avaient affirmé publiquement qu'ils refuseraient désormais d'acheter des pommes de terre modifiées parce que leurs clients de produits alimentaires n'en voulaient pas. Toutefois, le modèle utilisé par Monsanto pour introduire la pomme de terre New Leaf était à mon avis plus respectueux des consommateurs que bon nombre d'autres modèles utilisés plus tard pour introduire d'autres produits.
Serais-je d'accord avec un moratoire? J'hésite à me prononcer là-dessus, car en tant que scientifique, je continue à maintenir qu'il nous faut des tests approfondis et des données complètes. Ce que je demande, c'est que tout nouveau produit mis en marché soit assorti de l'information requise et ne soit mis sur le marché qu'une fois tout le travail exhaustif effectué. Je m'en tiendrai à cela.
Mme Judy Wasylycia-Leis: D'accord. C'est noté.
Merci.
La présidente: Merci, madame Wasylycia-Leis.
Monsieur Speller.
M. Bob Speller: Merci, madame la présidente. J'ai seulement une ou deux petites questions.
Avez-vous étudié ce qui se passait en Europe? Les Européens consomment-ils actuellement des aliments génétiquement modifiés?
M. Brian Ellis: Oui.
M. Bob Speller: Mais on impose là-bas l'étiquetage obligatoire, n'est-ce pas?
M. Brian Ellis: C'est en train d'être implanté.
M. Bob Speller: Avez-vous étudié le système européen? Constitue-t-il la réponse à certaines de vos préoccupations? Vous avez dit plus tôt qu'il fallait «créer des instruments précis, mais qu'il existait déjà des outils techniques permettant de contrôler régulièrement les protéines et les métabolites qui présentent un intérêt». Pourra-t-on faire ce suivi en Europe? Vous avez également parlé de faire un suivi des populations humaines. Pourra-t-on le faire en Europe? Les Européens pourront-ils «mettre en oeuvre un mécanisme permettant de déterminer les habitudes de consommation et la fréquence d'exposition aux aliments génétiquement modifiés»? A-t-on établi en Europe le niveau du seuil de consommation des aliments génétiquement modifiés, et pourra-t-on vérifier si le seuil est respecté?
M. Brian Elllis: Les Européens en consomment en effet, puisqu'ils importent beaucoup d'aliments provenant des États-Unis.
Existe-t-il déjà en Europe les technologies voulues pour assurer le suivi? Oui. Les technologies existent également aux États-Unis, puisque ce sont les Américains qui ont dû les mettre au point pour pouvoir s'assurer que les cargaisons envoyées en Europe contiennent bien ce qu'ils prétendent qu'elles contiennent. Les gros céréaliculteurs américains sont aujourd'hui capables de prélever des échantillons dans des cargaisons de plusieurs tonnes en 10 minutes à peine, et peuvent vous dire avec des chiffres statistiquement fiables dans quelle proportion une cargaison est «contaminée» par des OGM.
 (1225)
M. Bob Speller: Pour tous les produits ou seulement pour les céréales?
M. Brian Ellis: Surtout pour les céréales, puisque l'on exporte vers l'Europe surtout des céréales, de la fève soja et des produits du maïs. Or, ce sont les seuls qui aient été modifiés. Quant au coton, il ne pose pas de problème, puisque ce n'est pas un aliment.
On peut donc dire que les Américains comme les Européens s'occupent du problème, mais pour différentes raisons. Les Américains s'en occupent parce qu'ils tiennent à exporter sur le marché européen, mais les Européens, en revanche, s'en occupent parce qu'ils veulent pouvoir vérifier que ce qu'ils reçoivent en importation correspond exactement à l'étiquette. Je ne vois rien qui manque ici.
Pour ce qui est du suivi à long terme, je ne sais pas quels programmes existent en Europe; toutefois, le simple fait d'implanter l'étiquetage permettra à des études épidémiologiques d'établir des corrélations entre la population et les habitudes de consommation, puisqu'il sera possible pour la population de signaler ce qu'elle aura mangé au cours des six derniers mois. Si quelqu'un explique qu'il évite soigneusement de manger tout aliment étiqueté GM, cela permettra de définir d'office une sous-couche de la population.
M. Bob Speller: Comment pourra-t-on prouver qu'un aliment n'est pas génétiquement modifié?
M. Brian Ellis: On ne pourra pas le faire, mais le recours à des seuils permettra aux Européens de définir une exposition relative. C'est pour cela que l'on établit des seuils. Si on fixe son seuil à 1 p. 100, par exemple, plutôt que de n'avoir aucun seuil comme au Canada, cela permet au moins de séparer la population entre ceux qui ont été exposés à au plus 1 p. 100 de protéines GM—qu'il s'agisses de protéines du soja ou de protéines du maïs—et ceux qui mangent un peu de tout dans la chaîne alimentaire, peu importe la moyenne que l'on puisse établir avec le temps en termes de suivi des OGM.
M. Bob Speller: Savez-vous s'il existe en Europe un système de dépistage permettant de repérer la ferme où le produit a été cultivé?
M. Brian Ellis: C'est pour bientôt. Les producteurs de fèves de soja américains l'ont déjà fait.
M. Bob Speller: Mais je pensais à l'Europe.
M. Brian Ellis: Inutile de vouloir dépister les fermes, car il n'y a pas de cultures génétiquement modifiées en Europe.
M. Bob Speller: En est-on sûr?
M. Brian Ellis: C'est illégal.
La présidente: Merci, monsieur Speller.
Monsieur Lunney, vous avez droit à la dernière minute, mais faites vite.
M. James Lunney: Pour revenir aux virus associés aux adénovirus, vous avez mentionné avoir des préoccupations au sujet de l'ADN; d'aucuns se sont déjà inquiétés au sujet de changements possibles au génome. D'ailleurs, on a déjà commencé à observer des changements inattendus et associés aux transgènes et aux récoltes GM, comme dans les fèves soja. C'est en tout cas ce qu'écrivaient Daniel Miller, Elizabeth Rutledge et David Russell dans un article intitulé «Effets chromosomiques de l'intégration des vecteurs des virus adéno-associés» publié dans la revue Nature Genetics en février 2002. D'après eux, une analyse plus poussée pourrait démontrer clairement que des séquences inattendues ou brouillées sont communes dans les cultures GM. Êtes-vous au courant de ces études?
M. Brian Ellis: Une précision: que je sache, on ne peut pas parler de gènes hybrides d'adénovirus dans les cultures GM. À ma connaissance, le virus est un virus animal qui n'a pas été utilisé dans les plantes. Par conséquent, je ne suis pas sûr de comprendre dans quel contexte on a tiré ces conclusions.
M. James Lunney: Ah bon. J'avais cru comprendre que l'on utilisait cette méthode, de même que la méthode biolistique.
M. Brian Ellis: On utilise en effet la méthode biolistique, mais pas celle de l'adénovirus dans les plantes. Cette dernière sert à transformer les cellules animales.
Pour revenir à ce que vous disiez au sujet des séquences brouillées d'ADN, on constate en effet que tout gène hybride inséré dans une plante par la méthode biolistique en particulier tend à être inséré à de multiples endroits, et que ces insertions sont souvent brouillées ou endommagées. Toutefois, par définition, il faut bien qu'un ou deux de ces gènes soient fonctionnels, sans quoi ils n'auraient pas pu continuer à se développer. Toutefois, les autres séquences endommagées restent bel et bien là, et il pourrait être difficile de les éliminer, sauf par une amélioration génétique très poussée des plantes. Voilà pourquoi la technologie cherche en général à utiliser la méthode agrobactérienne, c'est-à-dire la méthode du vecteur de transformation bactérienne naturelle. Cette dernière façon de faire est beaucoup plus propre et ne donne lieu à aucun brouillage, ou à peu près pas.
La présidente: Merci, monsieur Lunney.
 (1230)
M. James Lunney: Merci.
La présidente: Monsieur Ellis, c'est avec gratitude que le comité vous remercie d'avoir comparu et d'avoir représenté votre collègue. Vous avez fait preuve d'une grande générosité d'esprit en répondant à nos questions. Lorsque nous en saurons un peu plus, nous nous réservons le droit de vous rappeler ...pardon, ce n'est pas un droit, mais je me permets de vous avertir que nous aurons peut-être à nouveau besoin de votre aide pour discuter à nouveau de ces questions, lorsqu'elles seront peut-être un peu plus claires pour nous.
Comprenez bien que nous n'en sommes qu'au début de notre étude et que les choses portent encore souvent à confusion. Toutefois, les exposés d'aujourd'hui ont été parmi les plus clairs que nous ayons entendus, à mon avis. Vous nous avez très bien décrit la problématique, ce qui nous permettra de mieux comprendre nos prochains témoins.
Merci de nous avoir consacré tout ce temps aujourd'hui et d'avoir été si clair.
M. Brian Ellis: Merci beaucoup. Vous avez posé d'excellentes questions, et j'ai eu beaucoup de plaisir à comparaître. La route est longue, mais je constate toujours avec surprise qu'elle est très productive.
La présidente: Merci beaucoup.
Je demanderais l'attention pendant une seconde des membres du comité: je vous signale que nous avons été invités à une activité qui se tiendra au cours de la deuxième semaine de relâche, c'est-à-dire après Pâques. Il semble que des représentants de l'Allemagne soient très intéressés à nous rencontrer, et c'est pourquoi je demande à ceux d'entre vous qui le pourraient d'être ici à Ottawa le mercredi 3 avril prochain et d'en aviser le greffier—il y a une erreur dans le texte, car le 4 avril n'est pas un mercredi. L'ambassadeur vous invite avec plaisir à déjeuner avec lui et les représentants du Parlement allemand.
M. James Lunney: J'ai malheureusement une réunion d'orientation politique.
La présidente: Ah oui? Vous ne pourrez donc pas y être.
Passons maintenant à une motion dont vous avez reçu préavis jeudi dernier. C'est Mme Wasylycia-Leis qui dépose cette motion qui est assez longue et qui s'explique sur plusieurs lignes.
Voudriez-vous nous l'expliquer, madame Wasylycia-Leis?
Mme Judy Wasylycia-Leis: Je vous remercie, madame la présidente.
Je vais me dispenser de vous lire la motion, mais je vais vous expliquer certaines des raisons qui m'amènent à recommander que notre comité se penche d'ici la fin de la session parlementaire sur la question des effets indésirables des médicaments.
Madame la présidente, vous savez mieux que quiconque que c'est l'anniversaire du décès de Vanessa Young dû à l'effet indésirable d'un médicament qui lui a été prescrit à tort. Aujourd'hui correspond presque aussi à l'anniversaire du dépôt du rapport du coroner qui a fait enquête sur ce décès. Dans son rapport, le coroner formule un certain nombre de recommandations dont il propose la mise en oeuvre le plus tôt possible.
À ma connaissance, le gouvernement fédéral a pris très peu de décisions et de mesures pour donner suite à ce rapport depuis son dépôt bien qu'il se peut que certaines actions aient été prises dont je ne suis pas au courant. Je pense qu'il conviendrait que le comité consacre très bientôt un peu de temps à étudier cette question.
J'aimerais aussi souligner que la question ne concerne pas seulement Vanessa Young. De nombreux Canadiens ressentent les effets indésirables de certains médicaments. Il ne semble pas exister actuellement de système efficace permettant de tenir compte des effets indésirables des médicaments ni de système obligeant les médecins à signaler les cas d'effets indésirables et à diffuser l'information en temps voulu.
Tant de préoccupations sur cette question ont été portées à l'attention de la vérificatrice générale, qui a comparu devant le comité il y a quelques semaines, qu'elle songe à faire enquête sur le sujet.
Je propose donc, madame la présidente, que nous consacrions peut-être deux séances à étudier cette question d'ici au milieu de juin. La première séance pourrait être consacrée à l'audition de témoins provenant du ministère qui nous expliqueraient les structures actuelles dans le domaine de la sécurité des médicaments ainsi que les mécanismes prévus pour signaler les effets indésirables des médicaments. Nous pourrions peut-être aussi inviter à comparaître devant le comité des représentants de l'AMC étant donné que l'Association médicale canadienne, comme vous le savez, a fait savoir publiquement que comme le gouvernement fédéral n'était pas passé à l'action, elle comptait le faire. L'Association a participé à l'élaboration d'un semblant de système de déclaration des effets indésirables des médicaments. Nous pourrions peut-être aussi songer à inviter quelqu'un comme Terrence Young qui a une expérience personnelle directe de la question. Enfin, une dernière séance pourrait être consacrée à faire le point et à décider si nous voulons formuler des recommandations.
Voilà donc la proposition positive que je vous soumets. Je pense que le comité a un rôle à jouer à ce moment-ci dans ce domaine. Je sais que nous avons beaucoup de travail sur la planche avec notre étude sur les OGM, madame la présidente, mais je me demande s'il ne serait pas possible de consacrer peut-être deux séances à cette question.
La présidente: Je vous remercie.
Monsieur Dromisky.
 (1235)
M. Stan Dromisky: Je crois que les raisons à l'appui de cette motion sont valables, madame la présidente. Il ne fait aucun doute que la question sur laquelle porte la motion nous préoccupe tous. Je pourrais cependant aussi proposer dix autres sujets d'étude qui importent tout autant pour la santé des Canadiens.
Cette motion nous demande d'entreprendre cette étude avant l'ajournement d'été. Je signale d'abord qu'il y a de fortes chances que le Parlement ajourne plus tôt que prévu. Deuxièmement, nous savons que le comité sera saisi du projet de loi sur la reproduction assistée avant le 10 mai, ce qui signifie que nous devrons siéger toute la journée lundi, mardi, mercredi après-midi et jeudi comme nous l'avons fait avant Noël.
Troisièmement, nous examinons actuellement une question. Je ne sais pas jusqu'où nous pourrons aller dans cette étude. L'étude qu'on nous propose exigerait un certain investissement de temps de notre part. Ma collègue de l'opposition a fait quelques suggestions.
La suggestion que vous avez faite, Judy, ne nous permettrait pas, à mon avis, de vraiment rendre justice à cette question. Je peux songer à d'autres témoins que ceux que vous avez proposés qui pourraient comparaître devant le comité à ce sujet. Je pense qu'il nous faudrait consacrer plus d'entre deux à cinq séances à cette question qui est sans conteste très importante. Par conséquent, je ne vois même pas comment nous pourrions aborder la question avant l'ajournement d'été, mais j'aimerais que le Comité de la santé étudie un jour à fond cette question.
La présidente: Très bien.
Monsieur Merrifield.
M. Rob Merrifield: Je pense comme M. Dromisky qu'il s'agit d'une question très importante. Elle comporte de nombreuses ramifications. Il ne s'agit pas simplement de créer un organisme qui sera chargé d'assurer la sécurité des médicaments bien que j'espère que ce sera fait sous peu.
Voici la situation. Nous consacrons maintenant beaucoup de temps à étudier la question des aliments génétiquement modifiés alors que nous savons que tous les aliments actuellement sur le marché ne présentent aucun risque. Entre-temps, des gens meurent à la suite d'effets indésirables de médicaments et parce que nous n'avons pas de système adéquat en place pour tenir compte de ces effets. Nous savons que le problème existe depuis un certain nombre d'années. Je crois que nous ne nous sommes pas fixé les bonnes priorités.
J'appuie cette motion parce que je pense que nous devons absolument examiner le sujet.
La présidente: Docteur Castonguay.
[Français]
M. Jeannot Castonguay: Merci, madame la présidente.
Je crois que M. Dromisky a très bien exposé ses points de vue, que je partage. Je suis d'accord avec lui. Je dirai à Judy que j'ai vérifié du côté des officiels du ministère et qu'ils m'ont dit qu'on était actuellement en train d'examiner tout le système de reportage des réactions médicamenteuses pour trouver des façons de s'assurer que l'information soit véhiculée. Très souvent, il ne s'agit pas seulement de rapporter; il faut aussi s'assurer que l'information est véhiculée.
Voici un exemple concret. On me dit que quelque chose va commencer en avril. Auparavant, lorsqu'il y avait des réactions adverses, très souvent, on en parlait dans un article du journal de l'Association médicale canadienne. Dorénavant, il y aura un document séparé pour cela qui va vraiment attirer l'attention des fournisseurs de soins, des médecins. Très souvent, il n'y a pas juste le fait que ce n'est pas rapporté; il s'agit de transmettre le message aux gens impliqués pour qu'ils sachent qu'il y a une difficulté.
Je veux partager cette information avec le comité et avec Judy. On me dit, au niveau du ministère, qu'il y a des choses qui se font. À la lumière de cette information, et étant donné que notre programme de travail est très, très chargé, je ne peux pas voter en faveur de la motion telle qu'elle est présentée.
[Traduction]
La présidente: Je vous donne une minute pour conclure, Judy. Je vous ai déjà accordé plus de 12 minutes.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Vouliez-vous intervenir avant que je conclue?
M. James Lunney: J'aimerais me prononcer en faveur de cette motion, madame la présidente. Je serai bref, mais j'aimerais indiquer publiquement que je suis conscient de l'importance de cette question. Il faudra que le comité se penche sur le sujet. Il s'agit simplement de décider quand et comment nous le ferons.
J'aimerais donc simplement dire que je pense que le comité devrait étudier cette question le plus tôt possible. Si cette motion n'est pas adoptée, je propose que cette question soit inscrite à la liste des travaux prioritaires du comité.
Désolé, Judy.
 (1240)
Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci.
La présidente: Monsieur Dromisky.
M. Stan Dromisky: J'aimerais proposer un amendement officiel à la motion bien que je ne sache pas si on l'appuiera. Pourquoi ne supprimerions-nous pas les mots «avant le congé d'été du Parlement»?
La présidente: L'amendement est recevable.
M. Rob Merrifield: Voulez-vous que nous intervenions au sujet de l'amendement?
La présidente: Oui, vous devez le faire maintenant. Ou pouvons-nous simplement le mettre aux voix?
M. Rob Merrifield: J'ai une petite observation à faire au sujet de l'amendement.
La présidente: Très bien. Soyez bref.
M. Rob Merrifield: Santé Canada sait depuis 1996 qu'un problème important se pose dans ce domaine. Nous pouvons trouver toutes sortes d'excuses pour ne pas entreprendre cette étude, mais je pense que nous avons trop tardé à le faire. Je pense que nous devons étudier la question.
M. Stan Dromisky: Avant l'été?
M. Rob Merrifield: Avant l'été.
M. Stan Dromisky: Dans ce cas, comment allons-nous faire tout le travail que nous devons faire? Je siège à deux comités. Je m'oppose donc catégoriquement à cette motion.
La présidente: Je vais maintenant permettre à Mme Wasylycia-Leis d'intervenir sur l'amendement.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Je comprends que l'amendement vise à nous permettre d'étudier la question plus tard. Je pense cependant que la question est urgente et que nous devrions consacrer un peu de temps d'ici la fin juin à nous faire une idée préliminaire des suites qui ont été données à l'enquête menée sur le décès de Vanessa Young. Il faudrait aussi savoir ce qu'il en est au sujet de cet organisme dont M. Castonguay nous annonce la création aujourd'hui.
Comme mon collègue Rob Merrifield vient de le dire, beaucoup de temps s'est écoulé depuis 1996, date à laquelle nous avons commencé à prendre conscience du problème. Quatre-vingts décès sont survenus aux États-Unis et au Canada au total en raison des effets indésirables des médicaments. Le gouvernement a mis cinq mois avant d'agir après le décès de Vanessa. Deux ans se sont maintenant écoulés depuis sa mort et un an, depuis le dépôt du rapport du coroner qui contenait des recommandations précises. Je pense qu'il nous incombe maintenant d'étudier cette question et c'est la raison pour laquelle j'ai fait cette proposition.
Je sais que notre calendrier de travail est très chargé, mais nous pouvons être souples et consacrer une ou deux séances à cette question pour nous faire une idée de la situation et pour formuler au besoin des recommandations. J'aimerais évidemment beaucoup que nous puissions étudier plus à fond la question, mais parce que je crois que nous devons l'examiner le plus tôt possible et parce que je veux que nous puissions poursuivre nos travaux, je fais cette proposition et je m'y tiens.
La présidente: Des points de vue favorables et défavorables à l'amendement ont été présentés. L'amendement vise à supprimer les mots «avant le congé d'été du Parlement».
Que tous ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien lever la main.
Qu'allez-vous faire, madame Thibeault?
Mme Yolande Thibeault (Saint-Lambert, Lib.): Je vais appuyer la proposition faite par Mme Wasylycia-Leis.
La présidente: Excusez-moi. Très bien.
Est-ce que vous vous abstenez, madame Thibeault? Oui? Je vous remercie.
(L'amendement est adopté)
La présidente: Nous revenons maintenant à la motion principale qui ne comporte plus les mots sur lesquels portait l'amendement. Je pense qu'avant que nous procédions au vote sur l'amendement, M. Castonguay voulait intervenir.
M. Jeannot Castonguay: Je maintiens ma position. J'appuie l'amendement parce que je pense que nous devrions entreprendre cette étude si notre calendrier de travail nous le permet à un moment donné. Toutes les questions qui sont inscrites à notre calendrier sont cependant importantes et il s'agit de décider quelles sont nos priorités. Nous ne partageons pas tous le même point de vue là-dessus, mais j'appuie l'amendement qui vient d'être adopté.
La présidente: Puis-je mettre la motion aux voix?
M. Stan Dromisky: Madame la présidente, j'ai oublié de mentionner qu'un projet de loi qui sera présenté à la Chambre cette semaine sera renvoyé au Comité de la santé immédiatement.
La présidente: Je mets la motion modifiée aux voix.
(La motion, telle que modifiée, est adoptée—Voir les Procès-verbaux)
La présidente: Je vous remercie. La motion a été adoptée à l'unanimité.
J'allais justement dire, monsieur Dromisky, qu'il semble bien que nous serons saisis d'un projet de loi dès notre retour du congé de Pâques.
Compte tenu de cela, chers collègues, du fait qu'un autre projet de loi nous sera renvoyé et que nous voulons poursuivre notre étude sur les OGM, nous devrons certainement siéger plus souvent. Je le regrette, parce que je préférerais que nous nous ménagions pour pouvoir produire un rapport. Il semble bien cependant que nous devrons siéger plus souvent.
Je vous remercie de votre présence, de votre attention et de votre participation aujourd'hui.
La séance est levée.