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SRSR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la science et de la recherche


NUMÉRO 051 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 20 juin 2023

[Enregistrement électronique]

(1105)

[Traduction]

    Bienvenue à la 51e réunion du Comité permanent de la science et de la recherche.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule en mode hybride, conformément à l'ordre adopté par la Chambre le 23 juin 2022. Les députés participent en personne dans la salle, à l'exception d'un député qui participe à distance.
    J'aimerais formuler quelques consignes à l'intention des témoins. Je remercie les témoins de s'être joints à nous.
    Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Si vous participez sur Zoom, cliquez sur l'icône microphone pour activer celui‑ci. Lorsque vous avez la parole, parlez lentement et clairement. Lorsque vous ne parlez pas, mettez votre micro en sourdine. En ce qui concerne l'interprétation, pour ceux qui sont sur Zoom, vous avez le choix au bas de votre écran entre le parquet, l'anglais et le français. Pour ceux qui sont dans la salle, vous avez les oreillettes.
    Bien que cette salle soit équipée d'un système audio performant, une rétroaction acoustique est toujours possible. Celle‑ci peut être extrêmement nocive pour les interprètes et leur causer de graves blessures. La cause la plus fréquente de l'effet Larsen est un écouteur porté trop près du micro. Par conséquent, nous demandons à tous les participants d'être très prudents dans leur manipulation des écouteurs, en particulier lorsque leur micro est en marche.
    Conformément à notre motion de régie interne, je vous informe que tous les témoins ont effectué les tests de connexion requis avant la réunion. Je vous rappelle que toutes les interventions doivent être adressées à la présidence.
     Pour commencer, conformément à l'article 108(3)i) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mardi 6 juin 2023, le Comité entreprend son étude sur l'utilisation des subventions, fonds et contributions du gouvernement fédéral en matière de recherche et de développement par les universités et les établissements de recherche canadiens dans le cadre de partenariats avec des entités liées à la République populaire de Chine.
     J'ai maintenant le plaisir d'accueillir Christian Leuprecht, professeur au Collège militaire royal du Canada, par vidéoconférence, et Jim Hinton, avocat spécialisé en propriété intellectuelle, également par vidéoconférence.
     Vous disposerez chacun de cinq minutes pour vos déclarations liminaires, puis nous passerons aux tours de questions. Nous commencerons par M. Leuprecht.
     Vous avez la parole pour cinq minutes. Allez‑y, s'il vous plaît.

[Français]

    Monsieur le président, je vous remercie de l'invitation.
    Je vais faire mes remarques en anglais, mais c'est avec plaisir que je répondrai à vos questions dans les deux langues officielles.

[Traduction]

    Je vais passer sur l'introduction qui décrit l'infiltration et la cooptation de la recherche canadienne par les services chinois de renseignement de défense, de sécurité nationale et de technologie à double usage, mais soyez assurés que le dossier public montre que cette infiltration est profonde et étendue. Dans certains cas, les institutions et les chercheurs canadiens savent parfaitement que leurs interlocuteurs chinois sont hautement douteux, tandis que dans d'autres, ils sont participants par inadvertance.
     Depuis des années, l'argent des contribuables, le financement public de la recherche et les universités publiques sont systématiquement utilisés pour soutenir et permettre la recherche et l'utilisation de technologies qui profitent à des États autoritaires hostiles qui semblent saper les institutions démocratiques, les processus électoraux, la prospérité économique, la sécurité nationale et les valeurs fondamentales du Canada, ainsi que les institutions multilatérales internationales et ainsi de suite.
     Le gouvernement prétend mener une politique étrangère fondée sur des valeurs, mais depuis plus de 17 ans, ses propres fonds et institutions de recherche sont utilisés par des États hostiles à des fins néfastes qui vont à l'encontre de ces mêmes valeurs. Ce n'est pas un problème de distribution aléatoire. Les partenaires de recherche problématiques et les méthodes d'infiltration et de cooptation sont connus de tous depuis au moins cinq ans, tout comme les domaines clés de la recherche sensible.
     Parallèlement, les tergiversations du gouvernement fédéral quant à l'adoption d'une approche et d'un cadre cohérents et systématiques pour endiguer ce problème font que certains chercheurs sont exclus de certaines occasions, simplement parce qu'ils portent un nom de famille chinois. Contrairement aux affirmations du premier ministre selon lesquelles l'action du gouvernement pourrait avoir des conséquences ou des connotations racistes, c'est précisément l'inaction du gouvernement qui a des conséquences racistes en créant une incertitude généralisée.
     Inversement, tout universitaire qui a de la famille en Chine, qui travaille avec d'anciens collègues en RPC ou qui visite la Chine serait vulnérable, comme c'est naturellement le cas de la plupart des universitaires ayant des relations en Chine. Bien que le Comité se concentre sur le rôle du gouvernement fédéral, ce domaine requiert une collaboration étroite et étendue entre le gouvernement fédéral, les provinces et les institutions de recherche, avec un leadership fédéral ferme et solide pour garantir la certitude et une cohérence nationale. À cette fin, le gouvernement fédéral ne doit pas céder à la tentation de la facilité en adoptant une approche étroite. Ce serait une grave erreur. Seule une approche globale de la sécurité de la recherche sera efficace et valable.
     Premièrement, en ce qui concerne les domaines de recherche sensibles, le gouvernement doit signaler les domaines de recherche à haut risque, notamment ceux qui pourraient donner naissance à des technologies à double usage. Par exemple, l'informatique ou la fabrication de matériaux avancés et les minéraux critiques, qui engloberaient la recherche sur les véhicules électriques, sont manifestement absents de la motion sur laquelle se fondent les audiences du Comité.
     Deuxièmement, ce doit être indépendant du pays. Une fois que les domaines de recherche sensibles ont été repérés, l'approche doit être agnostique et englober non seulement la Chine, mais plus largement les régimes autoritaires hostiles, y compris la Russie et l'Iran.
    Troisièmement, les entités répertoriées. Le gouvernement doit avoir le courage de dresser la liste des entités problématiques, comprenant environ 200 institutions et entreprises chinoises, ainsi que des entités russes et iraniennes également, par exemple. Les chercheurs doivent savoir clairement quelles affiliations sont problématiques.
     Quatrièmement, la détermination des domaines de recherche sensibles, des pays problématiques et des entités réelles transfère une partie de la charge de la sécurité de la recherche au chercheur, qui devrait être tenu de certifier en toute bonne foi qu'aucun de ces éléments ne s'applique au chercheur principal et à sa demande, ou si c'est le cas, le chercheur devrait être tenu de soumettre un plan complet de sécurité de la recherche qui explique en détail les risques et les stratégies d'atténuation des risques. Des plans d'atténuation des risques inadéquats devraient constituer un motif de rejet. Les plans de sécurité de la recherche doivent faire preuve de diligence raisonnable visant à empêcher que la recherche ne tombe pas entre de mauvaises mains et à fournir des garanties supplémentaires, notamment des audits annuels et la possibilité de retenir des fonds pour les chercheurs et les institutions.
     Le cinquième point consiste à instituer un processus d'examen approfondi et complet. Au lieu de s'intéresser uniquement au soutien financier direct ou indirect — c'est‑à‑dire en nature — d'un projet, un processus d'approbation adéquat doit prendre en compte les collaborations du chercheur principal de façon globale, notamment les publications dont il est coauteur et les autres subventions qu'il a reçues. L'examen du seul soutien financier dans le cadre d'une demande de financement d'un projet ne permet pas de repérer les relations problématiques essentielles. L'argument selon lequel la charte va à l'encontre d'un processus d'examen approfondi est faux et n'est qu'une excuse pour éviter de faire ce qu'il faut.
     Sixièmement, le gouvernement fédéral a commencé à financer la sécurité de la recherche dans les universités canadiennes, mais deux problèmes se posent. Le premier est que la formule utilisée pour calculer l'aide au titre du Fonds de soutien à la recherche du gouvernement du Canada est problématique. L'Aurora College reçoit 256 $ par an, Trent 25 000 $ et l'Université de Toronto 4,3 millions de dollars. D'une part, ce montant est insuffisant pour permettre à Trent d'embaucher des chargés de recherche, d'autre part, il est beaucoup trop élevé pour l'Université de Toronto. Aussi, cet effort semble largement performatif. Les nouveaux chargés de recherche des universités ont jusqu'à présent reçu peu de conseils et remplissent en grande partie une fonction administrative. Ils ont besoin d'une orientation claire.
     Septièmement, les universités devraient être autorisées et encouragées à consacrer ces nouveaux fonds à la recherche, aux pratiques exemplaires et à la sensibilisation à la sécurité de la recherche.
(1110)
    Je vous remercie de votre attention.
    Merci beaucoup pour votre exposé.
     Je donne maintenant la parole à M. Hinton, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président et membres du Comité permanent de la science et de la recherche. J'ai eu l'occasion de m'entretenir avec vous en début d'année et c'est à nouveau un honneur pour moi de m'adresser à vous aujourd'hui.
     Je suis avocat en propriété intellectuelle, agent de brevets et agent de marques de commerce au sein de mon cabinet, Own Innovation. Je suis également chercheur principal au Centre pour l'innovation dans la gouvernance internationale, où j'étudie les politiques d'innovation et de propriété intellectuelle. J'enseigne également les stratégies d'innovation et de commercialisation de la PI à l'Université Western de London, en Ontario.
     J'exprime ma gratitude au Comité pour avoir étudié ce sujet important. La sécurité et le contrôle de la recherche canadienne sont une question de sécurité nationale et de prospérité économique nationale. La valeur de la recherche canadienne est contrôlée par la propriété intellectuelle et les restrictions physiques. Que nous protégions ou non notre recherche, des pays l'utilisent pour faire avancer leurs propres programmes.
     Aujourd'hui, nous parlons de ce qui se passe lorsque des acteurs étrangers utilisent notre technologie et notre PI pour mettre en péril notre sécurité nationale. Les instituts de recherche canadiens — nos universités — comptent parmi les institutions les plus sacro-saintes du Canada; or, ces institutions ont été compromises. Selon des rapports publics, 50 universités canadiennes ont mené des recherches approfondies avec l'armée chinoise depuis 2005.
     Huawei a établi des partenariats avec plus de 20 institutions de recherche canadiennes. Huawei a reçu la propriété intellectuelle de l'Université de Waterloo, de l'Université de Toronto, de l'Université McGill, de l'Université de Colombie-Britannique, de l'Université de Calgary, de l'Université d'Ottawa, de l'Université Laval, de l'Institut national de la recherche scientifique, ou INRS, de l'Université Carleton, de l'École Polytechnique de Montréal, de l'Université Western, de l'Université de Regina et de l'Université McMaster. Je cite ces noms pour lever tout voile du secret sur ces accords.
     Ce n'est que la partie émergée de l'iceberg. Des fonds publics importants, des millions de dollars et des ressources sont utilisés. Des centaines de brevets ont été générés pour Huawei grâce à ces accords. Les droits commerciaux reviennent à Huawei, qui peut utiliser cette technologie comme bon lui semble. La loi interdit aux Canadiens d'utiliser ces technologies. Ce ne sont pas des cas isolés. C'est l'exfiltration systématique d'actifs canadiens financés par des fonds publics vers une organisation qui n'est même pas autorisée à utiliser les systèmes de télécommunications du Canada.
     Le gouvernement fédéral, par le truchement de programmes comme le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, le CRSNG, a non seulement été complice de ces arrangements, mais a également encouragé ce comportement. Bien qu'il y ait eu récemment un changement d'approche en raison de protestations croissantes du public, ce changement a été entièrement réactionnaire. Le CRSNG finance des projets de recherche de Huawei depuis au moins 2010 et, malgré certains changements, les universités et les chercheurs canadiens peuvent toujours travailler avec Huawei. Il se peut simplement qu'ils ne soient plus incités à le faire.
     Je propose les recommandations suivantes, inspirées de pratiques exemplaires mondiales aux États-Unis, en Australie et dans d'autres compétences.
     La première est la transparence. Nous devons savoir qui travaille avec les institutions de recherche canadiennes et quels en sont les bénéfices. Nous ne connaissons pas vraiment l'étendue de cette relation ni son impact. Nous devons également savoir à quelles fins cette technologie a été utilisée, en particulier pour les technologies à double usage qui peuvent avoir des usages commerciaux ainsi que des objectifs malveillants. Les universités qui reçoivent des fonds publics doivent suivre et signaler les flux d'efforts de recherche et de développement en les divulguant annuellement et concrètement, y compris les montants et les personnes avec lesquelles elles travaillent.
     La seconde est une stratégie proactive et non réactive. Le renard est responsable du poulailler. Les universités et les chercheurs eux-mêmes sont souvent chargés de signaler eux-mêmes les problèmes éventuels de sécurité nationale, mais ils se trouvent dans une situation de conflit d'intérêts inhérente. Nous devons doter les universités de ressources suffisantes et les inciter à collaborer avec la communauté canadienne du renseignement afin qu'elles soient au fait des derniers renseignements et qu'elles comprennent les défis à relever pour gérer les relations de manière proactive, pour le bien du Canada. Envisagez une loi comme celle adoptée par l'Australie pour examiner et, s'il y a lieu, annuler les accords internationaux conclus par les universités.
     Enfin, nous devons conserver les actifs stratégiques canadiens en matière de propriété intellectuelle et de données. Nous devons cesser de conclure ces terribles accords, y mettre un terme dès maintenant et nous assurer que nous ne nous retrouverons plus dans la même situation. Nous devons également mettre à jour en permanence les technologies d'importance stratégique. Les risques économiques et sécuritaires ne sont pas des questions distinctes. La propriété intellectuelle et les données relatives à l'intelligence artificielle, à la quantique, à la photonique, à la biotechnologie et à l'aérospatiale sont des technologies à double usage qui ont une valeur à la fois économique et de sécurité nationale. Toute évaluation des risques et des avantages nets doit tenir compte à la fois de la valeur économique et des risques pour la sécurité.
     La Chine considère nos universités comme des générateurs stratégiques de PI pour son armée et ses entreprises, mais elle n'est pas la seule concernée. Il y a aussi les Américains. Il peut aussi s'agir de la Russie ou de l'Iran. Le gouvernement fédéral doit prendre la situation en main et veiller à ce que ce soit les Canadiens et non les armées étrangères qui recueillent les retombées positives de la propriété intellectuelle et des données financées par des fonds publics.
(1115)
    Je vous remercie et je participerai avec plaisir au débat.
    Je vous remercie. Votre exposé arrive à point nommé.
     Merci aux deux témoins.
     Nous passons maintenant à un tour de questions de six minutes, en commençant par M. Mazier.
     La parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
     Je remercie les témoins d'être ici aujourd'hui.
     Monsieur Hinton, je vous remercie d'être revenu ici.
     Je m'attends à ce que, pendant l'étude, nous entendions parler des lignes directrices de 2021 sur la sécurité nationale pour les partenariats de recherche et de l'annonce faite par les ministres en 2023 sur le financement des partenariats de recherche. Je m'attends à ce que les universités disent qu'il n'y a rien à voir ici parce que les lignes directrices ont changé. Je m'attends également à ce que le gouvernement dise que les ministres ont répondu aux préoccupations en matière de sécurité nationale avec la nouvelle directive.
     Par conséquent, en tant que comité, que devrions-nous garder à l'esprit lorsque nous entendrons le témoignage des universités à ce sujet?
(1120)
    Je vous remercie. C'est un plaisir de revoir le groupe.
     Ce n'est que la partie émergée de l'iceberg. Il se passe bien d'autres choses sous la surface. Fondamentalement, il y a un défaut de gouvernance dans les universités canadiennes. C'est un problème qui dure depuis des années, et ce n'est qu'avec l'examen public que nous avons vu une réaction. Il est clair qu'elles ne sont pas capables de se gouverner elles-mêmes.
     Oui, certaines universités semblent avoir mis fin à leurs partenariats avec Huawei, mais qu'en est‑il du prochain problème?
    Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet? Vous avez parlé de renards dans le poulailler. Y a‑t‑il quelque chose qui se cache là‑dessous? Vous avez également parlé de transparence et de secret. Y a‑t‑il un point sur lequel nous devrions poser des questions particulières?
    Oui. Fondamentalement, je demanderais avec qui les universités ont établi des partenariats, dans quelle mesure, où cette technologie a été utilisée et qui en a bénéficié. Surtout, ces technologies ont-elles été utilisées à des fins répréhensibles? Nous n'en connaissons pas l'ampleur — quoi exactement et quelle en a été la destination. Tout ça est confidentiel. Nous avons vu des reportages dans les médias sur ce qui s'est passé, mais c'est seulement parce qu'il y a eu des reportages dans les médias.
     En 2018, le Globe and Mail a publié un article sur cette question. Ce n'est qu'avec la pression publique croissante qu'il y a eu réorientation. Cela signifie que les universités elles-mêmes sont complices de cet acheminement de la propriété intellectuelle vers Huawei. Elles reçoivent un peu d'argent et en sont satisfaites, mais il est clair pour moi que ce n'est qu'après avoir été placées sous le microscope du public qu'elles ont réussi à s'extraire d'une si mauvaise situation. Nous ne pouvons pas leur faire confiance pour veiller à ce que cela ne se reproduise pas.
     Huawei est un exemple, mais il y a aussi la Russie et l'Iran. Il y a tous ces autres acteurs, ainsi que les acteurs étatiques chinois. Nous ne savons vraiment pas ce qu'il en est. Les 50 universités... De nombreuses universités canadiennes travaillent ou ont travaillé avec des chercheurs militaires chinois. C'est énorme. Ce n'est que la pointe de l'iceberg — ce que nous pouvons voir publiquement. Les universités elles-mêmes connaissent ces renseignements et ne les ont pas communiqués.
    Merci.
     Certains chercheurs ont affirmé que l'examen minutieux des menaces pour la sécurité nationale dans le financement de la recherche constituait une menace pour la liberté académique. Que répondez-vous à cet argument?
    J'enseigne à Western. Je connais bien la liberté académique. La liberté académique exige un environnement où l'autonomie est activée et où les chercheurs sont à l'abri de toute influence extérieure indue. Les acteurs militaires étatiques sont des influenceurs indus, que les universitaires veuillent l'admettre ou non.
     Il y a des limites à ce qui peut et doit être fait au nom de la liberté académique. Tout comme un chercheur n'est pas autorisé à falsifier ses recherches ou à plagier, il ne devrait pas être en mesure d'aider et d'encourager des acteurs militaires étrangers au péril de la sécurité nationale du Canada.
    Pensez-vous que les universités sont capables d'identifier les menaces à la sécurité nationale avant de s'engager dans des partenariats de recherche, et sinon, pourquoi?
    Je ne pense pas que les universités soient capables de peser les questions de sécurité nationale. Elles n'ont pas les ressources nécessaires. Elles n'ont pas les moyens et ne sont pas des experts. Elles ont des experts en photonique et en informatique quantique. Ils gravissent les échelons et deviennent administrateurs de ces institutions, mais ce ne sont pas des experts en matière de sécurité nationale. Nous avons même vu l'Université de Waterloo émettre des directives aux chercheurs pour qu'ils ralentissent, les informant qu'ils n'ont pas à travailler avec le Service canadien du renseignement de sécurité.
     Nous devrions collaborer et travailler ensemble. Les universités elles-mêmes en profitent. Elles prennent un peu d'argent et font ensuite ce qu'elles veulent. Oui, il y a de nouvelles règles et un examen plus approfondi, mais cela ne corrige pas le manquement à leur devoir envers l'intérêt public dans le passé. Elles ont commis des erreurs et continuent d'en commettre. Elles n'ont pas été corrigées et je ne leur ferais pas confiance pour les corriger elles-mêmes.
    Il faut donc que le Parlement, je suppose, ou le Service canadien du renseignement de sécurité, donne des instructions explicites. Il faut en faire plus. Il faut donner des instructions explicites aux universités, par tous les moyens.
    Oui. Absolument.
    Cette étude contribuerait sans doute grandement à ouvrir cette voie, je suppose.
     Monsieur Leuprecht, j'ai une question. Vous avez parlé d'il y a cinq ans et de l'accélération de la situation depuis lors. Quel a été l'élément clé qui a fait que tout d'un coup, cette question est devenue un énorme problème dans notre communauté de recherche?
(1125)
    Outre les malversations connues des acteurs du renseignement chinois à l'égard des institutions, comme l'exfiltration complète des données de l'Australian National University, nous avons également eu le rapport très complet de l'Australian Strategic Policy Institute, qui a été le premier à signaler ces collaborations problématiques et qui, à l'époque, sur 2 500 collaborations problématiques sur 10 ans, en a signalé 300 au Canada. En particulier, trois universités canadiennes figuraient parmi les 10 plus importantes collaborations problématiques dans le monde...
    Merci. Si nous pouvions obtenir le reste par écrit, ce serait formidable.
     La parole est à M. Sousa pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Merci, messieurs, pour vos exposés.
     Vous savez, ce comité a été formé avec pour priorité d'essayer de protéger la propriété intellectuelle, la question de la souveraineté de la présence du Canada en matière de technologie, ainsi que la sécurité nationale. Nous partageons tous le souci de veiller à ce que nos innovateurs canadiens soient protégés et à ce que nous conservions une partie de cette propriété intellectuelle, ainsi que la monétisation et la mise à l'échelle de cette technologie ici, au Canada. Nous sommes tous préoccupés par l'implication de certaines entités étrangères. Malgré l'excellence académique et l'indépendance requises dans la communauté scientifique pour un engagement international, nous voulons nous assurer que le Canada est protégé dans tous les cas. Il est certain que nous voyons la Russie et la Chine et certaines de leurs institutions exceller dans certaines applications. Nous voulons en profiter également, mais nous voulons protéger le Canada. Nous voulons protéger nos entreprises et notre économie dans son ensemble.
     Je reconnais, monsieur Hinton, que vous avez mentionné certaines des préoccupations concernant les compromis et, assurément, un certain nombre de situations qui se sont produites bien avant cinq ans. Cela dure depuis un certain temps. Ma question est la suivante: pensez-vous que le gouvernement Trudeau a eu raison d'interdire Huawei au Canada?
    Je laisserai la question de l'interdiction de Huawei aux experts en sécurité nationale, mais d'après les renseignements dont je dispose, c'est très logique. Interdire à Huawei l'accès à l'infrastructure de communication est une chose, mais il faut ensuite attendre un certain temps, un temps considérable, pour se tourner vers les universités canadiennes et dire: « Attendez, ce qui se passe ici n'est pas aussi simple que ça. »
     Il ne s'agit que d'une première étape. Il se passe beaucoup de choses en arrière-plan qui...
    Oui. C'est un bon point.
     Je reconnais également certaines des contraintes juridictionnelles entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux en ce qui concerne les universités. Les provinces appuient certaines politiques et certains engagements des universités.
     Monsieur Leuprecht, en mars de cette année, vous avez témoigné devant un comité parlementaire et déclaré: « Des versions récentes non classifiées du rapport annuel du Service canadien du renseignement de sécurité ont mis en garde à plusieurs reprises contre le problème de la mainmise de l'État sur les élites et les institutions politiques, commerciales, financières, éducatives et sociétales du Canada. » Vous avez exprimé votre inquiétude.
     Depuis combien de temps diriez-vous que cette menace est présente au Canada?
    Je dirais que nous avons récemment eu connaissance d'un débat public sur une personne dont le rapport est devenu très important, qui a fait au moins une douzaine de voyages en Chine et qui a parlé d'une grande université chinoise comme de sa deuxième maison. Certains de ses enfants ont étudié en Chine.
     Nous pourrions citer de nombreux autres exemples. Je dirais que les relations problématiques sont profondes et étendues au Canada, avec des intérêts pécuniaires éventuels.
     Je vous remercie.
    Je sais que des rapports du Service canadien du renseignement de sécurité datant de 2010 et 2011 ont été rendus publics — je pense pouvoir en compter huit — et qu'ils ont inquiété le gouvernement précédent, et Harper en particulier, qui retenait certaines de ces activités et qui a été averti de ne pas s'engager et de ne pas fournir une partie du soutien qui est apporté aux universités aujourd'hui.
     Je cite un des rapports:
Bien que la grande majorité des investissements étrangers s’y fassent de façon ouverte et transparente, certaines sociétés d’État et entreprises privées entretenant des liens étroits avec leur gouvernement ont des intentions cachées ou reçoivent secrètement des renseignements pour faciliter leurs activités au pays.
     Ces propos sont tirés du rapport public 2010‑2011 du Service canadien du renseignement de sécurité. L'année suivante, Harper a signé un accord avec Huawei pour sa participation à d'importants projets de télécommunications canadiens.
     Cela ne semble pas être une menace récente. Il est donc juste de dire que l'espionnage économique est une menace depuis bien plus que 10 ans. Certaines versions non classifiées de ces rapports sont envoyées directement au premier ministre avant d'être déposées au Parlement. Il est juste de dire que le premier ministre de l'époque, Harper, aurait été au courant des risques pour la sécurité et qu'il aurait quand même été de l'avant.
     Nous connaissons ces menaces. Nous avons pris des mesures pour tenter de les écarter. Votre mise en garde — tous les deux — est importante. Il est essentiel de veiller à ce que nous procédions de manière appropriée et efficace.
     Seriez-vous d'accord pour dire que cela se passait depuis un certain temps, bien avant ce gouvernement?
(1130)
    Oui, mais je dirais aussi qu'en 2017, nous avons assisté à un changement de paradigme qualitatif et quantitatif dans la posture agressive de la Chine et dans l'utilisation systématique de la technologie pour saper notre mode de vie, ce qui représente maintenant une menace existentielle pour le Canada comme nous n'en avions pas auparavant. Je dirais que le gouvernement actuel a été plutôt lent à prendre conscience de ce changement de paradigme.
    Je conviens que la Chine et la Russie se sont montrées très agressives dans le monde entier, dans les pays occidentaux, et pas seulement au Canada. C'est très préoccupant pour nous tous et, avec nos alliés, nous devons prendre les mesures qui s'imposent pour corriger ces mesures.
     Pensez-vous que le gouvernement Harper a eu raison d'autoriser Huawei à prendre de l'expansion au Canada, malgré les avertissements de ses alliés et de ses propres responsables de la sécurité publique?
    Je dirais que depuis 2015, nous avons constaté des changements importants en Australie, en particulier en ce qui concerne le financement étranger, y compris un registre des agents étrangers qui oblige les universités à signaler ce type de financement. L'administration américaine a pris des mesures énergiques, notamment l'arrestation d'au moins un éminent professeur pour avoir apparemment incorrectement défini ses relations.
     En d'autres termes, deux de nos principaux alliés, l'Australie et les États-Unis, ont été beaucoup plus rapides et agressifs que le gouvernement fédéral actuel.
    Je suis heureux de vous entendre dire cela, et je suis heureux également du fait que le Canada a pris des mesures importantes concernant Huawei, comme vous le savez. Cela a été très public pendant un certain nombre d'années avec la détention de la présidente.
     Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie tous les deux.

[Français]

    Monsieur Blanchette‑Joncas, vous avez la parole pour six minutes.
    Je salue les témoins qui se joignent à nous pour cette importante étude.
    Mes premières questions s'adresseront à M. Leuprecht.
    Monsieur Leuprecht, permettez-moi tout d'abord de vous exprimer ma surprise quant au fait que votre allocution d'ouverture était uniquement en anglais. Vous avez même dit en français que vous alliez parler uniquement en anglais. À ce que je sache, vous êtes un représentant d'un collège militaire bilingue. Or, être bilingue veut dire parler deux langues, et les deux langues officielles au Canada sont le français et l'anglais. Alors, je souhaite grandement que, dans vos prochaines interventions, vous puissiez vous exprimer dans les deux langues officielles du Canada, qui sont, je le répète, l'anglais et le français. Je comprends que...

[Traduction]

    Si vous me permettez de vous interrompre, les cloches sont en train de sonner. J'aimerais voir si nous avons le consentement unanime pour terminer avec les deux derniers tours de six minutes, ce qui nous amènera à environ midi moins le quart. Le vote aura lieu juste après midi.
     Est‑ce que tout le monde est d'accord?
     Des députés: D'accord.
     Le président: Je vous remercie.
     Je suis désolé de vous interrompre. Veuillez poursuivre.

[Français]

    D'accord. Merci, monsieur le président.
    Je vais revenir sur le sujet de l'étude, mais j'aimerais tout de même que mon commentaire soit pris en considération.
    Comme vous le savez, le sujet de l'étude d'aujourd'hui est l'ingérence chinoise dans nos établissements d'enseignement. Le rapport provisoire du Comité spécial sur la relation entre le Canada et la République populaire de Chine de la Chambre des communes a cerné cinq domaines de recherche qui seraient sensibles aux menaces: l'intelligence artificielle, la technologie quantique, la technologie 5G, la recherche biopharmaceutique et les technologies propres.
    À votre avis, monsieur Leuprecht, y a-t-il d'autres domaines qui seraient à risque et auxquels il faudrait porter une attention particulière?
    Tout d'abord, je vous remercie de votre intervention au sujet de l'utilisation des deux langues officielles et de votre souci à cet égard. Par le passé, dans des réunions d'autres comités, vos collègues du Bloc québécois ont commenté la qualité de mon bilinguisme. Je suis immigrant dans ce pays et j'ai fait l'effort de maîtriser les deux langues officielles. Or, j'ai reçu la demande de me présenter devant le Comité trois jours à l'avance et, vu que j'ai un horaire très chargé, cela m'a donné assez peu de temps pour préparer une intervention. Je vous prierais donc, la prochaine fois, de me donner un peu plus de temps pour que je puisse bien intervenir dans les deux langues officielles. Cela dit, je vous suis reconnaissant de vous soucier de la question des langues officielles. Depuis longtemps, je suis un ardent défenseur des deux langues officielles, y compris dans l'établissement fédéral où j'enseigne.
    Quant aux cinq domaines sensibles, j'attirerais votre attention sur les domaines que j'ai mentionnés lors de mon intervention, et particulièrement sur tout ce qui a trait à l'informatique. Il me semble que l'ensemble du domaine de l'informatique ne devrait jamais faire l'objet d'une collaboration avec les pays dits problématiques, parce que toute la recherche qui est faite risque de servir à des fins qui ne sont pas compatibles avec les intérêts nationaux du Canada. Par ailleurs, comme je l'ai mentionné aussi, il me semble important d'ajouter à ces domaines précisés dans le rapport celui de la recherche liée aux véhicules électriques, particulièrement en ce qui concerne les ressources critiques et la production de matériaux de pointe.
(1135)
    En vous basant sur votre expertise, monsieur Leuprecht, pouvez-vous me dire comment se positionne le Canada, par rapport aux autres États occidentaux, en matière de sécurité nationale dans le contexte de la recherche?
    C'est un enjeu problématique. Certains pays d'importance en ce domaine, comme l'Australie, les États‑Unis, le Royaume‑Uni et la France, sont beaucoup plus avancés que nous. L'Allemagne tient un peu les mêmes débats que nous. Par contre, comme le Canada est une société très diversifiée, certains de nos chercheurs présentent un risque très élevé de vulnérabilité. Il faut donc comparer non seulement les pays eux-mêmes, mais aussi leur vulnérabilité et leur réseautage avec des alliés importants. À cet égard, le Canada est une cible très particulière de la Chine. L'Allemagne n'est peut-être pas ciblée de la même façon, parce qu'elle est dans une position où elle peut se défendre. En revanche, le Canada est moins en mesure de le faire.
    Plus précisément, j'aimerais savoir où se positionne le Canada comparativement aux autres pays du G7 ou du G20. Est-ce que le Canada en fait plus ou en fait moins que les autres pays comparables?
    À titre d'exemple, le gouvernement a mis sept ans à bannir Huawei du secteur des télécommunications. Alors, pour ce qui est du temps qu'on met à prendre d'importantes décisions de sécurité nationale et de la capacité du système de renseignement de sécurité nationale à faciliter la prise de décisions pertinentes, il me semble que ce n'est pas bien calibré au Canada.
    On a vu, par exemple, que la décision concernant Huawei a vraiment envoyé un signal important aux universités. C'est effectivement après que le gouvernement fédéral a pris cette décision que les universités ont réagi à des collaborations. À mon avis, le leadership du gouvernement fédéral actuel était faible, par rapport à nos alliés. Les décisions qui ont été prises ont eu des conséquences importantes pour ce qui est de réorienter la trajectoire des universités canadiennes.
    Merci, monsieur Leuprecht.
    Parmi les pays du G7, le Canada est en queue de peloton en matière d'investissement dans la recherche, comme nous le savons. Je dirais même qu'il se classe parmi les derniers au sein du G20. Cette négligence se remarque-t-elle aussi en sécurité de la recherche?
    Le problème, c'est la façon dont on établit le lien entre les investissements et...

[Traduction]

    Je suis désolé. Nous avons dépassé le temps imparti.
     Je vais vous demander cela par écrit, car nous avons dépassé le temps imparti.

[Français]

    Vous pourrez en effet nous faire parvenir votre réponse par écrit, monsieur Leuprecht.
    Merci beaucoup, monsieur le président.

[Traduction]

    Je vous remercie. Je vous prie de m'excuser.
     Nous avons M. Cannings, pour six minutes.
     Je remercie les témoins d'être venus aujourd'hui.
     Je vais commencer par M. Leuprecht. Vous avez mentionné dans votre introduction que vous pensiez qu'il s'agissait d'une étude portant particulièrement sur les relations du Canada avec la Chine en matière de recherche, mais vous avez précisé que nous ne devrions pas tenir compte des pays lorsqu'il s'agit de ces considérations. Vous avez mentionné la Russie et l'Iran, je crois.
     Je me demande si vous pourriez nous en dire plus à ce sujet et nous expliquer comment il faudrait peut-être élargir cette conversation pour inclure tout pays susceptible de présenter ces risques.
    Il y a trois considérations à prendre en compte.
     La première est que les données dont nous disposons sur la Chine et les collaborations problématiques chinoises sont plus complètes dans le domaine public que celles concernant d'autres acteurs hostiles autoritaires. Toutefois, le défi posé par la Chine, en raison de la nature de son industrie et de sa société, est peut-être aussi plus vaste que celui posé par d'autres acteurs étatiques.
     Je dirais également, comme je viens de le mentionner dans mes remarques précédentes en français, que le gouvernement fédéral n'est pas particulièrement agile — pas seulement ce gouvernement, mais le gouvernement du Canada de manière plus générale — lorsqu'il s'agit de prendre des décisions clés en matière de sécurité, de renseignement, de défense et d'affaires étrangères. C'est un problème de longue date. Il faut beaucoup de temps pour prendre des décisions, et encore plus pour prendre les bonnes décisions. Nous devons nous assurer que nous mettons en place ce dispositif ou ce cadre de manière à ce qu'il reste agile et adaptable à l'avenir.
     La troisième considération est que nous voulons être sûrs d'identifier le défi — à savoir les acteurs hostiles autoritaires qui pourraient utiliser ou utilisent cette technologie, dans le cas de la Chine, pour saper activement les intérêts nationaux du Canada — plutôt qu'un pays en particulier, en tant que tel.
(1140)
    Je pense que le point suivant que vous avez soulevé dans vos remarques concernait l'établissement d'une liste d'entités problématiques. Je suppose donc que vous souhaiteriez que les entités problématiques de n'importe où dans le monde soient répertoriées dans ce contexte.
    Oui. Je dirais que certains adopteraient peut-être une approche différente de celle de M. Hinton, à savoir que les universités peuvent faire une grande partie du travail si on leur indique les domaines de recherche sensibles et les pays éventuellement problématiques, et si on leur indique les entités et les acteurs précis avec lesquels elles devraient éviter de collaborer. Cela ne nous permettra pas de connaître tous les domaines, mais cela permettra aux universités de mettre en place un processus de contrôle initial raisonnablement complet.
     Nous voulons nous assurer que les chercheurs ne soumettent pas de demande susceptible de poser un problème. Nous ne voulons pas dépendre des processus de contrôle du gouvernement fédéral et d'autres entités. Nous voulons en fin de compte créer un cadre dans lequel la plupart de ces relations problématiques peuvent être repérées et contrôlées par les universités elles-mêmes.
    Cela inclurait vos remarques sur la certification d'un plan de sécurité de la recherche, ou quelque chose du genre.
     Je me demande si vous pourriez nous en dire plus à ce sujet. Qu'est‑ce que cela supposerait? Qu'est‑ce qu'un chercheur devrait faire pour franchir ces obstacles?
    Il y a deux problèmes.
     Le premier concerne les chercheurs qui ont eu, par le passé, des collaborations en tant que coauteurs, par exemple, que l'on jugerait problématiques aujourd'hui. Comment les amener à expier les péchés du passé?
     D'autre part, il se peut qu'il y ait encore des motifs raisonnables de collaboration de recherche avec certains acteurs problématiques. Par exemple, il peut s'agir, d'une part, des technologies liées au changement climatique et, d'autre part, des technologies de renseignement ou des technologies militaires sur le plan des composants à double usage. L'informatique est un bon exemple.
     En effet, nous ne pouvons pas dire à un chercheur: « Parce que vous avez participé à des recherches chinoises problématiques ou avec une telle entité dans le passé, vous ne pourrez plus jamais obtenir de financement pour la recherche dans votre domaine de spécialisation, ou vous ne pourrez plus jamais travailler avec ces acteurs. » Nous devrions laisser au chercheur le soin de démontrer que ces collaborations ne posent pas de risque pour la manière dont le Canada a défini ses lignes de démarcation à ne pas dépasser en ce qui concerne ses intérêts nationaux et ses intérêts en matière de sécurité.
    Combien de temps me reste‑t‑il?
    Vous avez un peu plus d'une minute.
    Je donne la parole à M. Hinton.
     En réponse à une question qui vous a été posée, vous avez dit que les chercheurs qui travaillent avec des acteurs étrangers problématiques — des entreprises chinoises comme Huawei — voient leur capacité de s'exprimer et de faire de la recherche en quelque sorte limitée par ces accords. Ne diriez-vous pas que cela se produit chaque fois qu'un chercheur obtient un financement d'un intérêt commercial, qu'il s'agisse d'une compagnie pétrolière, d'une entreprise chimique ou autre? Cela limite, presque automatiquement, ce que fait le chercheur, les questions qu'il pose et ce qu'il dit sur les résultats de sa recherche. En fait, ils autocensurent leurs propres recherches.
     Ne pensez-vous pas que c'est un problème plus large, peut-être, que les questions de sécurité dont nous parlons?
    Donnez une réponse très brève, car cela fait plus d'une minute.
    Oui, c'est un problème plus large. C'est aussi un problème particulier. Il est très important de veiller à ce que les universités et les chercheurs canadiens travaillent pour le bénéfice net du pays, ainsi qu'ils repèrent les questions précises lorsque les technologies peuvent être utilisées de façon néfaste.
    C'est très bien.
     Merci à tous les deux. Je vous remercie d'être venus avec si peu de préavis, comme l'a mentionné M. Leuprecht, et je vous remercie d'avoir fourni les témoignages que vous nous avez donnés pour cette étude. Si vous avez d'autres renseignements à nous communiquer par écrit, ce serait formidable.
     Je me contenterai d'indiquer où nous en sommes au sein du Comité, car la sonnerie retentit. Nous disposons de 17 minutes. Nous devons faire venir nos autres témoins, ce qui sera fait à peu près 25 minutes après 12 heures. Cela nous donnera environ 40 minutes de leur temps, pour que les études soient équilibrées.
     Nous avons ensuite une motion. Nous devons établir le budget. Nous devons passer à huis clos, ce qui va également prendre un certain temps de conversion, pour les instructions de rédaction.
    Je pense qu'à ce stade, nous allons suspendre la séance jusqu'après le vote.
(1145)
    J'invoque le Règlement, monsieur le président, nous disposons de 15 minutes. Nous faisons de l'obstruction pour ne pas obtenir plus de réponses des témoins présents aujourd'hui...
    Je ne pense pas que ce soit de l'obstruction.
    Nous avons 16 minutes. Qu'allons-nous faire entre maintenant et le vote?
    Avons-nous le consentement unanime pour une autre série de questions?
    Eh bien, cette séance était prévue pour 45 minutes. Cela fait exactement 45 minutes.
     M. Corey Tochor: Nous avons commencé en retard.
     Mme Lena Metlege Diab: Je propose que nous préparions le deuxième groupe de témoins afin de ne pas gaspiller du temps de celui‑ci également. Nous devrons de toute façon nous arrêter cinq minutes avant la sonnerie.
    Oui. Je pense que nous allons suspendre la séance.
     Je n'essaie pas d'éviter les témoins — si vous pouvez nous apporter autre chose par écrit, n'hésitez pas à le faire —, mais d'ici à ce que nous fassions un autre tour, nous aurions dépassé l'heure du vote. Nous avons également d'autres travaux à examiner.
     Je suspends la séance jusqu'après le vote.
(1145)

(1215)
    J'espère que M. Blanchette-Joncas se joindra à nous.
     Conformément à l'article 108(3)(i) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 5 décembre 2022, le Comité entreprend son étude des répercussions à long terme de l'écart salarial entre les sexes et des groupes en quête d'équité dans le corps professoral des universités canadiennes.
     J'ai maintenant le plaisir d'accueillir, à titre individuel, Alexa D'Addario, étudiante au doctorat. Ivy Bourgeault, titulaire de la chaire de recherche sur le genre, la diversité et les professions, se joint à nous électroniquement depuis l'Université d'Ottawa.
     Vous disposez chacune de cinq minutes pour votre déclaration liminaire, en commençant par Mme D'Addario.
    Monsieur le président, je suis désolé de vous interrompre.
     Est‑ce qu'on ne doit pas attendre 10 minutes après un vote? Je ne sais pas où est M. Blanchette-Joncas, mais s'il est allé voter à la Chambre, nous sommes censés lui accorder 10 minutes.
    D'accord, merci.
    Je suis désolé. Je ne sais pas où il est, mais j'ai été pris comme cela d'autres fois.
    M. Cannings a raison. Il y a généralement 10 minutes d'attente. Lorsque j'ai donné la parole, je pensais avoir tout le monde dans la salle, mais j'ai confondu l'un de nos assistants avec M. Blanchette-Joncas. Je n'ai vu que l'arrière de sa tête. J'espère qu'il pourra se joindre à nous.
     Le voilà.
     Nous passons à Mme D'Addario pour un exposé de cinq minutes.
     Je vous remercie de vous joindre à nous.
    Bonjour, monsieur le président, monsieur le vice-président, distingués membres du Comité.
    Je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner devant le Comité permanent de la science et de la recherche de la Chambre des communes dans le cadre de son étude sur les répercussions à long terme de l'écart salarial entre les sexes et les groupes en quête d'équité dans le corps professoral des universités canadiennes.
    Depuis 2010, je poursuis mes études postsecondaires dans diverses universités canadiennes, avec de brèves périodes d'arrêt. Peu de temps après le début de mes études, j'ai constaté les écarts salariaux entre les sexes et les groupes en quête d'équité dans les corps professoraux des universités canadiennes.
    Dès le début de mes études, l'égalité entre les sexes est devenue un sujet de discussion populaire au Canada, sur lequel beaucoup de gens ont des opinions bien arrêtées. C'est normal puisque c'est un sujet complexe, qui met en jeu de très nombreuses considérations, et chacun semble avoir sa propre idée quant à ce qui explique que des différences existent, ou non.
    Les Nations unies et le gouvernement du Canada ont tous les deux établi que l'égalité des sexes est le cinquième objectif de développement durable. Voici ce qui est dit à ce sujet sur le site Web du gouvernement du Canada:
[…] l'égalité entre les sexes est non seulement un droit humain fondamental, mais aussi un fondement nécessaire pour un monde pacifique, prospère et durable. Cet objectif de développement durable tient compte de la réalité selon laquelle, malgré les progrès, l'inégalité entre les sexes subsiste. Les femmes et les filles sont souvent confrontées à des formes multiples et croisées de discrimination, aggravées par des facteurs fondés sur […]
    La liste suivante de facteurs est donnée ensuite: la race; l'ethnicité; la géographie; le revenu; l'éducation; la religion; la langue; l'orientation sexuelle; l'identité de genre; l'âge; l'incapacité; le statut de migrant ou de réfugié. Sur le site Web du Programme des Nations unies pour le développement, on explique: « Mettre fin à toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes et des filles n'est pas seulement un droit humain fondamental, mais également essentiel pour accélérer le développement durable. Il a été prouvé à maintes reprises que l'autonomisation des femmes et des filles avait un effet multiplicateur et contribuait à stimuler la croissance et le développement économique dans tous les domaines. »
    C'est un sujet qui a fait l'objet de recherches approfondies, notamment au Canada.
    Marcie Penner, une professeure agrégée de psychologie au King's University College, affilié à l'Université Western, et Tracy Smith‑Carrier, également professeure agrégée et titulaire de la chaire de recherche du Canada de niveau 2 sur l'avancement des objectifs de développement durable des Nations unies de l'Université Royal Roads, ont participé à une étude menée en 2021 sur la quantification des écarts entre les sexes au chapitre des salaires et des pensions dans les établissements postsecondaires au Canada, ainsi que les incidences au cours d'une carrière et à la retraite. Le rapport a été publié dans la Revue canadienne d'enseignement supérieur.
    La recherche du King's University College, qui peut servir d'étude de cas, a révélé l'existence d'un écart entre les sexes au chapitre des salaires et des pensions. D'après les résultats obtenus, les femmes touchaient un salaire moindre que leurs collègues masculins, même en tenant compte de facteurs comme le poste occupé et la qualification professionnelle. L'étude a aussi conclu que les cotisations de retraite des femmes étaient moindres et qu'il s'ensuivait une disparité entre les sexes relativement aux prestations versées à la retraite.
    Dans un article paru ensuite dans Affaires universitaires, Penner et Smith‑Carrier expliquent que l'écart salarial entre les sexes au sein du corps professoral des universités canadiennes reste important et tenace. Les femmes gagnent en moyenne 10 % de moins, soit 10 500 $ par année, que les hommes pour le même travail. Les auteures renvoient aux conclusions du rapport sur l'équité de 2018 de l'Association canadienne des professeures et professeurs d'université et le rapport Nombre et salaires du personnel enseignant à plein temps dans les universités canadiennes de Statistique Canada.
    Selon les auteures, ces écarts sont encore plus grands pour les membres du corps professoral qui sont autochtones, racisés ou de la communauté bispirituelle, lesbienne, gaie, bisexuelle, transgenre, queer et autres, ou 2ELGBTQ+. La race ne fait pas partie des variables prises en compte dans les données de Statistique Canada, et la législation sur l'équité salariale ne prévoit aucune mesure pour remédier aux écarts salariaux auxquels font face les Autochtones, les personnes racisées et 2ELGBTQ+.
    Toutefois, selon les auteures:
Les données de l'Association canadienne des professeures et professeurs d'université indiquent que les professeurs racisés gagnent 10 % de moins que leurs collègues non racisés, et que la disparité salariale est particulièrement marquée pour les femmes racisées.
L'écart salarial entre les sexes étant deux fois plus marqué pour les professeures racisées, force est de croire qu'elles font face à des disparités plus importantes au chapitre du salaire et de la pension de retraite que celles que nous indiquent les calculs pour les professeures non racisées.
    Il ressort de l'étude que l'écart salarial entre les sexes s'explique certes par une rémunération inégale pour un travail égal, mais également par des facteurs plus larges. On pense notamment à la ségrégation professionnelle et aux différences liées aux postes et aux possibilités d'emploi. L'étude met aussi en évidence l'importance de considérer les prestations de retraite comme faisant partie intégrante de l'écart global de rémunération entre les sexes.
    Ces résultats semblent corroborés par toutes les autres études dont j'ai pris connaissance. L'étude publiée en 2019 par Karen E. A. Burns et collaborateurs dans la revue PLOS Medicine conclut à une disparité généralisée entre les sexes pour ce qui concerne les taux d'obtention de bourses et de récompenses personnelles, et surtout des bourses destinées à certaines communautés de recherche. L'étude révèle des disparités importantes entre les sexes quant aux taux de financement selon le domaine de recherche sur une période de 15 ans. Dans certains domaines, les femmes ont eu moins de succès à obtenir une bourse que leurs collègues masculins. Le fait que ces disparités n'étaient pas uniquement le fruit de facteurs comme l'étape dans la carrière ou la productivité en recherche donne à penser que le processus d'octroi de bourses et de récompenses personnelles était entaché de préjugés sexistes.
    L'étude fait ressortir la nécessité d'éliminer les disparités entre les sexes dans les processus de financement de la recherche dans certains domaines. Elle montre aussi l'importance d'instaurer un cadre de financement plus équitable et plus inclusif, qui offre des chances égales à tous les chercheurs, sans égard au sexe et au champ de recherche.
(1220)
    Je vous remercie. Les cinq minutes sont écoulées.
    Je sais, le temps passe vite. Vous pourrez toutefois nous soumettre des compléments d'information par écrit ou les inclure dans vos réponses aux questions.
    Je donne maintenant la parole à Mme Bourgeault, de l'Université d'Ottawa. Vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président, distingués membres du Comité, de m'avoir invitée à prendre la parole sur ce sujet d'une grande importance.
    Comme vous le savez déjà, je m'appelle Ivy Bourgeault. Je m'adresse à vous à titre de titulaire de la chaire de recherche sur le genre, la diversité et les professions de l'Université d'Ottawa.
    Je baigne dans le milieu universitaire, sans interruption, depuis 1985. J'ai tout d'abord été étudiante et, depuis 1998, je fais partie du corps professoral. J'ai publié des articles sur les inégalités entre les sexes dans le milieu universitaire dans diverses publications nationales et internationales, et j'ai témoigné sur les écarts salariaux entre les sexes dans les professions de la santé, à forte prédominance féminine, devant le Tribunal des droits de la personne de l'Ontario.
    Je dois d'abord dire ceci: l'écart salarial entre les sexes dans le corps professoral des universités canadiennes est bien réel. Cet écart existe au sein des universités et entre elles. D'après les données, cet écart se creuse à tous les échelons du corps enseignant. Un article publié en 2019 par Momani et ses collègues mesure les écarts salariaux entre les sexes dans le système postsecondaire public en Ontario de 1996 à 2016 à partir des données sur les salaires de plus de 100 000 $ dans le secteur public. Selon les auteurs, les écarts se sont creusés à tous les échelons. Pour les postes de professeurs et de doyens, respectivement, les hommes gagnaient en moyenne 2,14 et 5,26 % de plus que les femmes dans toutes les universités. Je rappelle que ces données s'appliquent seulement aux salaires supérieurs à 100 000 $, ce qui limite l'analyse des tendances.
    Selon une analyse rigoureuse des facteurs qui influent de façon indépendante sur la rémunération, l'écart serait attribuable en grande partie à des facteurs pouvant être expliqués, si on peut dire. On pense par exemple à l'échelon, au département, aux années d'ancienneté à l'échelon atteint, ou à la titularité ou non d'une chaire de recherche. C'est important de souligner que ces facteurs indépendants sont eux-mêmes influencés par le sexe et d'autres formes d'inégalité. Par exemple, une femme devra attendre plus longtemps avant d'être promue aux échelons supérieurs. C'est ce qu'on appelle l'hypothèse du plancher collant. Il y a moins de femmes dans les disciplines, les écoles ou les facultés où les salaires sont plus élevés. Enfin, des recherches rigoureuses montrent que les femmes sont moins susceptibles d'être titulaires de chaires de recherche prestigieuses.
    D'autres raisons peuvent expliquer cet écart, dont le phénomène dit du « tuyau percé », une métaphore qui renvoie au fait que les femmes ne sont pas encore assez nombreuses dans les milieux universitaires pour que l'écart salarial entre les sexes diminue. L'analyse de Momani et de ses collègues infirme cette hypothèse. Selon eux, les années d'expérience des femmes n'ont aucune incidence sur les écarts salariaux observés dans les milieux universitaires.
    La productivité au travail est aussi invoquée. Selon cet argument, la productivité plus faible ou l'expérience moins longue des femmes les désavantageraient dans leur progression de carrière. Comme vous le savez, dans les milieux universitaires, la productivité se mesure par les subventions de recherche et les publications. Moins de poids est accordé à l'enseignement, à la supervision et au travail de service. Les femmes sont plus souvent affectées aux tâches plus onéreuses liées aux services universitaires, ou à l'intendance, et elles sont aussi plus nombreuses à superviser des étudiantes qui préfèrent être encadrées par une personne du même sexe et qui sont plus susceptibles de prendre un congé parental pendant leurs études, ce qui peut nuire à leur productivité et à celle de leurs superviseures.
    Il faut aussi tenir compte de l'impact de la pandémie. Il est maintenant établi que la pandémie a eu des répercussions importantes sur l'inégalité entre les sexes dans différents domaines, y compris les milieux universitaires. Comme Martucci et ses collègues le résument bien, les professeures d'université ont rapporté que leur conjoint travaillait à la maison pendant qu'elles étaient à la maison et essayaient de travailler. Elles se sont davantage occupées des activités des enfants durant les périodes de confinement, au détriment de leur productivité, surtout pour ce qui concerne les subventions de publication et de recherche, qui sont des activités essentielles pour les promotions et l'accès à la permanence.
    Un autre descripteur est lié à la disparition des programmes de recherche des universitaires ayant des enfants durant la pandémie de COVID‑19. Comme les femmes étaient plus susceptibles d'enseigner, elles faisaient plus d'enseignement en ligne même avant la pandémie. Pendant la pandémie, en plus de l'enseignement, elles étaient plus souvent sollicitées par les étudiants aux prises avec des problèmes de santé mentale dont la gravité s'était accentuée et qui ont alourdi considérablement leur fardeau émotionnel. Ces répercussions se font sentir à long terme.
    Il existe d'autres formes d'inégalité, mais elles sont beaucoup moins connues en raison de l'insuffisance des données pour le Canada. Les rares données que nous avons indiquent que les inégalités se sont accentuées pour les femmes noires, autochtones ou de couleur dans les milieux universitaires, et plus particulièrement pour ce qui concerne le soutien émotionnel, les inégalités révélées par le mouvement Black Lives Matter et la découverte de plus de 10 000 tombes autour des pensionnats.
    Par ailleurs, le salaire n'est pas la seule façon de rémunérer une personne. La rémunération englobe les périodes de temps libre, le financement pour la recherche, la taille du bureau alloué, le temps pour accéder à une promotion ou à la permanence, la charge de travail. Très peu de données systémiques sont recueillies sur ces facteurs répartis de façon inégale selon le sexe et d'autres considérations. Dans les études sur l'écart salarial, la rémunération est très souvent envisagée de manière trop étroite et l'accent est mis sur les disparités entre les salaires. Ces études trop focalisées ne tiennent pas compte de l'effet à long terme considérable sur les prestations de retraite, qui s'accentue d'année en année.
(1225)
    J'espère avoir réussi à vous convaincre de l'urgence d'agir maintenant, de prendre des mesures de nature structurelle. Il ne s'agit pas de régler le problème des femmes, des personnes de genres divers et des membres du corps professoral universitaire issus de la diversité. Baker et ses collègues ont plaidé pour la transparence salariale. Pour aider ces groupes, il faudrait aussi assurer la transparence du processus de promotion et prendre d'autres mesures dont je serai heureuse de parler.
    Merci.
(1230)
    Merci beaucoup.
    Nous allons commencer avec M. Soroka.
    Je crois que vous allez partager votre temps de parole avec M. Tochor.
    C'est M. Tochor qui va commencer.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins. Mes collègues auront des questions pour vous après ma courte intervention.
    J'aurais quelques remarques au sujet de cette étude et de chacune des études menées par le Comité depuis sa création. La conclusion est toujours la même: il manque d'argent et de contrôle. C'est ce qui ressort le plus souvent des études réalisées. Dans celle qui nous occupe aujourd'hui, nous cherchons des solutions pour combler l'écart, ce qui coûtera forcément quelque chose. Durant la première heure de cette réunion, il a été question de l'influence de Pékin dans nos universités, et le débat a été écourté. L'étude a débuté en retard, apparemment parce que les libéraux ne veulent pas débatte de la question ni trouver les réponses quant à l'influence exercée par Pékin dans nos établissements. Des milliards de dollars des contribuables canadiens sont engloutis dans la recherche et la création de propriété intellectuelle qui quitte le pays au profit de Pékin. C'est ce genre de contrôle que Pékin exerce sur notre propriété intellectuelle. Les dollars gaspillés dans ces travaux de recherche pourraient servir à régler tous les autres problèmes sur lesquels le Comité s'est penché.
    Nous traînons les pieds parce que des libéraux ne veulent pas entendre les réponses à ces questions, et c'est une honte. Nous espérons obtenir l'appui des partis de l'opposition à notre proposition de poursuivre cette étude au cours de l'été parce que les réponses auront des conséquences sur tous les travaux du Comité. Je pense bien que nous allons découvrir une tendance à fermer les yeux et à laisser notre argent sortir du pays, et que les Canadiens seront affaiblis et la Chine renforcée parce que les établissements utilisent inadéquatement l'argent des contribuables pour servir les intérêts de Pékin.
    C'est tout ce que j'avais à dire. Je redonne la parole à M. Soroka pour la suite de cette étude, mais je répète que je suis impatient de participer aux réunions estivales du comité de la science.
    Il vous reste quatre minutes. Allez‑y.
    D'accord. Merci, monsieur le président, et merci aux témoins d'être des nôtres aujourd'hui.
    Je vais m'adresser à Mme D'Addario pour débuter. Une chose me dérange particulièrement dans le cadre cette étude. Les universités répètent à qui veut l'entendre qu'elles sont inclusives, qu'elles offrent des possibilités égales à tous, mais ce n'est pas du tout ce que nous découvrons et nous entamons à peine cette étude.
    Pouvez-vous nous donner des exemples de préjugés sexistes dont vous avez été témoin ou victime?
    Avec plaisir.
    C'est tout à fait vrai, surtout ces temps‑ci. Depuis le début de mes études universitaires, on parle de plus en plus de l'importance de l'équité, de la diversité et de l'inclusion dans les processus d'attribution du financement, de postes, de promotion et tout cela. On en parle, mais les résultats se font toujours attendre là où ça compte. Je crois que la plupart de ceux avec qui j'étudie vous diraient la même chose.
    Un des principaux facteurs, dont Mme Bourgeault a parlé et dont j'ai moi-même fait l'expérience, concerne la plus grande présence des femmes dans les activités de mentorat. La réussite dans les milieux universitaires tient beaucoup à la publication d'articles. L'importance accordée aux publications est démesurée par rapport à toutes les autres manières possibles de rendre service au département ou à l'ensemble du corps professoral. Il faut absolument s'attaquer à ce déséquilibre, accorder plus de poids à ces activités essentielles et moins à la culture qui veut que ceux qui ne publient pas périssent, encore omniprésente.
    J'espère que j'ai répondu à votre question.
    Merci.
    Je voudrais revenir sur ce que vous avez dit au sujet des subventions. Comme Mme Bourgeault en a aussi parlé, ma question s'adresse à vous deux, mais je commence par vous, madame D'Addario. Il semble que les femmes n'obtiennent pas autant de subventions, ou que certains processus d'octroi de subventions vous confinent au rôle de gouvernante, dans une certaine mesure. Pouvez-vous me donner des exemples de ce que vous avez vous-mêmes expérimenté à cet égard? J'aimerais vous entendre en premier, madame D'Addario.
    C'est difficile pour moi de dire si j'ai eu moi-même cette expérience. Cela dit, une des études dont j'ai pris connaissance a conclu que, toutes choses étant égales par ailleurs, les hommes ont plus de chances que les femmes d'obtenir du financement même si leurs demandes de financement sont semblables. La différence, ou l'écart, est considérable.
    Madame Bourgeault, puis‑je vous demander ce que vous avez à dire à ce sujet?
    Merci de poser cette question d'une grande importance.
    D'un bout à l'autre de la filière des études supérieures et postdoctorales, les nouvelles chercheuses ont moins de chances d'obtenir des subventions. C'est un problème parce que le succès à ces premières étapes est déterminant pour réussir plus tard. C'est dû en partie à la répartition hommes-femmes entre les disciplines. Les femmes sont plus enclines à choisir les sciences sociales. Le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada est moins bien financé que le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada ou que les Instituts de recherche en santé du Canada.
    Beaucoup de données ont été recueillies sur le fait que les processus d'évaluation par les pairs défavorisent les femmes. Elles touchent des subventions moins élevées et pour une moins longue durée, de sorte qu'il est plus difficile pour elles de propulser des carrières et de maintenir des équipes de recherche, alors que c'est essentiel à la productivité.
    Tout cela pour dire qu'effectivement, il existe des problèmes systémiques et généralisés.
(1235)
    Les universités peuvent-elles attribuer le problème aux sciences sociales? Est‑ce que c'est pour cette raison? Quel argument les universités pourraient-elles invoquer pour se défendre?
    Il s'agit d'un phénomène complexe, influencé par une panoplie de facteurs. Ce qui se passe au sein des universités a une incidence. Ce qui se passe au sein des trois conseils a une incidence. Tout le monde a un rôle à jouer. Une partie de la solution coûtera de l'argent, mais plusieurs mesures, sur lesquelles je pourrai revenir plus tard, concernent les politiques et ne coûtent rien. Il faut tout simplement rendre les règles du jeu équitables.
    Merci beaucoup.
    C'est au tour de M. Collins. Vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être ici cet après-midi.
    Madame Bourgeault, je voudrais m'adresser à vous en premier. Vous avez parlé de la pandémie. Très franchement, jamais je n'aurais cru recevoir de l'information ou des témoignages sur la pandémie au cours de cette étude. Je suis content que vous l'ayez fait. Avez-vous des recommandations à soumettre au Comité concernant des mesures à envisager pour corriger le tir dans les aspects que vous avez évoqués? Vous auriez peut-être voulu en parler davantage si vous aviez eu plus que cinq minutes pour votre déclaration liminaire.
    Pouvez-vous nous en dire davantage sur les répercussions de la pandémie? À votre avis, quelles améliorations le Comité pourrait‑il proposer à cet égard?
    Merci de poser cette question.
    Effectivement, la pandémie a eu des répercussions différentes pour les femmes dans les milieux universitaires, les membres du corps professoral issus de la diversité et ceux qui s'identifient comme des personnes noires ou autochtones. C'est très important. Des études sérieuses ont confirmé ces répercussions pour ce qui est des subventions et du stress lié à l'enseignement et au fardeau émotionnel, comme je l'ai dit.
    Les aspects à considérer sont multiples. La transparence salariale — pas uniquement pour les salaires supérieurs à 100 000 $ — dans les universités des différentes provinces fait certainement partie de la solution. La transparence est aussi importante pour ce qui est du processus de promotion et des mécanismes de contrôle de ce qui est pris en compte pour déterminer qui accédera à un poste de professeur adjoint, de professeur agrégé ou de professeur titulaire. Pour chacun de ces postes, il y a un salaire de base qui augmente à chaque échelon, mais les inégalités les plus importantes se trouvent à l'échelon de la titularité.
    Concernant la pandémie, il y a déjà eu d'excellentes recommandations sur la réforme des normes institutionnelles et la transparence concernant le partage du travail selon le sexe et les tâches liées aux soins. Par exemple, les membres du corps professoral qui ont des responsabilités de soins importantes — il peut s'agir de soins à des enfants ou à des aînés, par exemple — pourraient se voir offrir du soutien à la recherche et à l'enseignement en étant exemptés des tâches non essentielles liées au service universitaire, et on pourrait encourager la communauté des professeurs à leur prêter main-forte. Ce serait une façon pour les professeurs de s'entraider. Ceux qui ont moins de responsabilités liées à la prestation de soins pourraient assumer une charge de travail plus lourde. Les activités universitaires peu appréciées sont souvent refilées aux femmes, et notamment aux professeures moins haut placées, si bien que c'est encore plus difficile pour elles d'obtenir des promotions.
    Je tiens à préciser que c'est beaucoup plus large que l'égalité entre les sexes. C'est une question de connaissance. Dans les milieux universitaires, les femmes et les personnes issues de la diversité posent des questions de recherche différentes et elles conduisent leurs recherches différemment. Il reste tout un univers de connaissances qui nous échappe parce que cette inégalité nous empêche de les explorer. La diversité dans les sciences l'enrichit, et c'est important de réaliser que c'est vers cette connaissance que nous voulons tendre.
    Merci.
    Merci pour ces réponses.
    Comme la formation sur l'égalité, la diversité et l'inclusion est presque devenue la norme ces dernières années, il serait logique de s'attendre à une réduction de l'écart dans plusieurs domaines dont vous et Mme D'Addario avez parlé aujourd'hui. Or, au vu de ce que vous et d'autres témoins nous avez dit au sujet des tendances à long terme, je pense que nous serons tous d'accord que l'écart est loin d'être comblé.
    Pouvez-vous nous parler du rôle de la formation pour ce qui concerne les politiques et la réalisation de progrès? Ces enjeux concernent autant les collèges que les universités, le secteur privé ou les trois paliers de gouvernement. Quelles recommandations auriez-vous à leur proposer relativement à la formation sur l'égalité, la diversité et l'inclusion et sur d'autres sujets?
(1240)
    Je suis très contente que vous posiez cette question, parce que beaucoup de gens pensent que la formation suffira à corriger la situation.
    Tout dépend de la manière dont la formation est intégrée. Si la formation est suivie une seule fois, elle n'aura pas l'effet escompté. Dans certains cas, il peut même y avoir un effet pernicieux parce que les personnes qui ont suivi une formation sur l'égalité, la diversité et l'inclusion croient avoir tout compris sur le sujet.
    Nous avons grandi avec beaucoup de ces idées, elles nous sont inculquées depuis notre naissance, notamment pour ce qui concerne la responsabilité des soins. Nous devons nous défaire de ce carcan. Je crois qu'il faut revoir les pratiques dans les écoles secondaires, les universités, au premier cycle et aux cycles supérieurs, et partout… Il faut une stratégie à plusieurs volets, qui inclut la formation, mais qui vise aussi une transparence et une responsabilisation beaucoup plus grandes, pour que les décisions à propos des salaires de départ… Nous avons également d'excellentes données à ce sujet. Le salaire de départ est déterminant de l'ascension sur l'échelle salariale. Les données sont sans équivoque. Les femmes sont moins susceptibles de gagner les salaires les plus élevés, même si elles les demandent ou, comme on dit, si elles mettent le paquet.
    Comme je l'ai dit, les femmes ne sont pas le problème. C'est le système structural qu'il faut changer, et diverses interventions sont possibles pour le faire à différents niveaux.
    Merci.
    J'ai une dernière question, que j'ai moins d'une minute pour poser.
    Je trouve toujours intéressant de comparer nos interventions avec celles des provinces. Il y a beaucoup de chevauchements entre les services que nous offrons. Pouvez-vous nous parler des provinces qui ont fait des progrès et des politiques qui ont favorisé ces progrès?
    Ce qui a été fait en Ontario par rapport à la transparence salariale dans le secteur, c'est certainement quelque chose qui pourrait être envisagé. Je crois que le gouvernement fédéral peut travailler en partenariat avec les provinces pour déterminer les pratiques prometteuses ainsi que la manière de les diffuser et d'en favoriser l'adoption. Des provinces ont fait de véritables efforts de mise en œuvre à l'échelle des universités plutôt que d'exiger une étude sur l'équité salariale dans chaque établissement. C'est une autre avenue qu'il vaudrait la peine d'envisager.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Monsieur Blanchette‑Joncas, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je salue les témoins qui se joignent à nous pour cette étude.
    Mes premières questions s'adresseront à Mme Ivy Lynn Bourgeault.
    Tous les membres de ce comité, je n'en doute aucunement, reconnaissent comme moi les constats très préoccupants en ce qui a trait aux inégalités salariales au sein des universités québécoises et canadiennes. Les études démontrent que les femmes gagnent moins que les hommes, et que les membres de diverses minorités ont plus de difficulté à tirer leur épingle du jeu. C'est évidemment une situation qui mérite qu'on s'y intéresse en tant que société.
    Cependant, à mon sens, il y a un fait évident que personne n'aborde, mais qui ne peut être ignoré: la rémunération des professeurs relève de l'administration interne des universités, et celle-ci est protégée par un principe important qui est celui de l'indépendance universitaire. Je suis donc préoccupé par cette étude, qui amène le gouvernement fédéral à examiner les décisions prises par les universités au sein de leur administration. Si on soumet les universités à l'autorité du gouvernement, cela peut rapidement devenir une pente glissante.
    Nos universités doivent être des lieux de foisonnement intellectuel et doivent se savoir à l'abri de représailles ou d'ingérence de la part du pouvoir politique, afin que les chercheurs puissent acquérir et produire de la connaissance dans tous les domaines du savoir. C'est nécessaire à l'avancement de notre société.
    À la lumière de ce préambule, comment voyez-vous la conciliation des principes de l'indépendance universitaire et de l'égalité salariale dans les corps professoraux des universités? Comment proposez-vous que le gouvernement fédéral intervienne, tout en respectant le principe d'indépendance universitaire, pour favoriser l'équité?

[Traduction]

    À qui la question s'adresse‑t‑elle?

[Français]

    Elle s'adresse à Mme Ivy Lynn Bourgeault.

[Traduction]

    Je vais partir de votre dernière remarque et remonter en arrière.
    Vous avez parlé de la création de savoir dans tous les domaines. J'ai expliqué pourquoi les règles du jeu sont inégales pour ce qui est de la création de savoir dans tous les secteurs. Les femmes posent différemment les questions. Les scientifiques noirs posent différemment les questions. Dans certains domaines, les règles du jeu ne sont pas égales. Si votre prémisse est qu'il faut créer du savoir dans tous les domaines, alors il faut assurer l'équité sans égard à ces différences.
    Certes, l'indépendance universitaire est un facteur, comme vous l'avez dit, mais les universités ne sont pas complètement indépendantes. Elles doivent se conformer à la réglementation provinciale ou territoriale et, parce qu'elles reçoivent du financement du fédéral, elles doivent respecter le cadre d'équité en emploi. C'est pourquoi l'indépendance universitaire n'est pas totale. Nous recevons des fonds publics des provinces et des territoires. Une autre partie de notre financement vient des frais d'inscription payés par les étudiants. Nous recevons des fonds du gouvernement par l'intermédiaire des trois conseils subventionnaires.
    Pour toutes ces raisons, les universités doivent rendre des comptes par rapport au principe de l'équité.
(1245)

[Français]

    Je vous remercie beaucoup de ces précisions.
    Si je comprends bien, le gouvernement fédéral peut intervenir là où il verse de l'argent. Par exemple, il accorde des fonds aux chaires de recherche, notamment par l'entremise des trois organismes subventionnaires, soit le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, les Instituts de recherche en santé du Canada et le Conseil de recherches en sciences humaines.
    Ce que nous comprenons concrètement de la situation actuelle, c'est qu'il y a des formes d'iniquité. Que recommandez-vous au gouvernement fédéral? De quelle façon peut-il intervenir dans les politiques publiques ou dans ses programmes pour rétablir une réelle forme d'équité?

[Traduction]

    Vous soulevez des points très importants.
    Je crois qu'il peut intervenir par l'intermédiaire du financement de la recherche. Les universités reçoivent de l'aide financière d'autres sources. Dans certains cas, elles sont financées directement par des ministères comme Emploi et Développement social Canada ou Femmes et Égalité des genres Canada. Même si des ministères et les trois conseils subventionnaires ont une certaine indépendance par rapport au gouvernement fédéral, il s'agit quand même de l'argent du fédéral.
    On peut aussi faire avancer les choses en appliquant les principes d'équité en emploi. Leur application peut contribuer à renforcer la transparence et la responsabilisation quant aux disparités salariales et aux salaires de tout le personnel. Pourquoi la divulgation des salaires de plus de 100 000 $ dans le secteur public est-elle obligatoire seulement en Ontario? Pourquoi cette obligation n'est-elle pas élargie? Les données obtenues nous permettraient de réaliser la nécessité d'exiger des comptes relativement aux inégalités.

[Français]

    Revenons à ce que peut faire le gouvernement fédéral. Quelles sont vos recommandations? Quels programmes suggérez-vous de modifier? Quelles recommandations faites-vous dans l'éventualité où il faudrait apporter des changements législatifs? Dans quelle mesure le gouvernement fédéral peut-il réellement intervenir en ce qui a trait à l'écart salarial dans les universités?

[Traduction]

    Je ne crois pas qu'une nouvelle loi soit nécessaire. On pourrait commencer par appliquer la législation en vigueur. Nous pourrions déployer un peu plus d'énergie et d'enthousiasme pour défendre les intérêts des personnes qui subissent des inégalités. Montrer l'exemple est un autre bon moyen. L'atteinte de l'égalité dans le secteur public peut servir d'exemple au secteur universitaire quant à l'application de ces principes.
    Voici quelques exemples de ce qui peut être fait: mettre la législation existante en application; faire un suivi serré des fonds, et exiger la transparence quant à l'utilisation de ces fonds et aux inégalités à cet égard.
    Merci beaucoup.
    Nous passons à M. Richard Cannings. Vous avez six minutes.
    Merci.
    Merci à nos deux témoins d'être avec nous aujourd'hui.
    Je vais commencer avec Mme D'Addario. C'est toujours un plaisir de rencontrer des biologistes spécialisés dans les espèces en péril. C'était mon champ de spécialité avant mon entrée en politique il y a 10 ans.
    Vous avez abordé plusieurs sujets, dont celui de la ségrégation professionnelle. Je crois comprendre ce que vous entendez par là, mais j'aimerais que vous nous l'expliquiez plus en détail, pour la gouverne du Comité, et que vous nous parliez des répercussions pour les femmes dans les sciences.
    Volontiers. Essentiellement, c'est l'idée selon laquelle les femmes et les hommes sont en général attirés par des professions ou des champs de recherche différents. Cette propension peut avoir une forte incidence sur l'attribution du financement. Selon les données de Statistique Canada, ce facteur compte pour le tiers à peu près. Est‑ce que cela répond à votre question?
    J'ajouterai que la ségrégation moins marquée fait partie des facteurs ayant contribué à réduire l'écart. Quand ils choisissent une profession, les gens ont moins tendance maintenant à se demander si un domaine est plutôt féminin ou plutôt masculin.
(1250)
    Merci.
    Madame Bourgeault, vous avez peut-être quelque chose à ajouter à ce sujet, et j'aurai une autre question ensuite.
    Je vais être brève.
    Il faut concevoir la ségrégation professionnelle comme allant de pair avec l'inégalité salariale. C'est plus large que la possibilité d'opter pour un cheminement différent. Il faut aussi que la personne soit intégrée dans ce cheminement différent. Le fait de se sentir à l'aise ou non… On entend parler de climat peu accueillant quand une femme, une personne noire ou qui s'identifie comme autochtone est la seule dans un milieu. Pour que cette personne puisse y rester, il faut que sa santé mentale soit préservée. Il existe des choix, mais beaucoup de ces choix sont limités et parfois, la personne est orientée. La ségrégation professionnelle dans les secteurs des sciences sociales, des sciences naturelles, du génie et de la santé est fortement influencée par ces différents degrés d'égalité.
    Merci.
    Je comprends.
    Je vais maintenant revenir sur un point soulevé par Mme D'Addario dans une réponse à une question. Nous considérons les universités comme des lieux d'apprentissage, où les jeunes acquièrent des connaissances et se préparent en vue de leur carrière. Or, comme l'a évoqué Mme D'Addario, les universités mettent beaucoup l'accent sur la recherche, au détriment de l'enseignement. Quand je travaillais à l'Université de la Colombie-Britannique, j'avais un ami qui a remporté la médaille remise par le président au meilleur professeur de l'année, mais à qui on a refusé la titularisation.
    Avez-vous un commentaire à ce sujet? Comme il se peut que je sois à court de temps, je vous demande tout de suite ce que vous entendez par le travail d'intendance universitaire. Comment est‑ce important dans le cadre de cette étude?
    Enseigner au premier cycle, à des groupes très nombreux, gérer plusieurs assistants, faire du counselling auprès des étudiants de premier cycle concernant leurs choix de carrière, tout ce mentorat fait partie du travail d'intendance dans les universités. Ces tâches incombent de manière disproportionnée aux femmes et aux subalternes au sein du corps professoral. Les hommes sont souvent avertis et encouragés par leurs mentors à éviter certaines tâches comme la peste. Le travail d'aide occupe une place disproportionnée dans le milieu universitaire, qui revient surtout à ceux qui enseignent.
    C'est un fait que les universités doivent être des lieux de recherche et de production de connaissance, mais il faut aussi mobiliser les étudiants pour qu'ils contribuent à ce travail. Cela prend du temps et de l'énergie. Au début, les étudiants sont pleins d'énergie, mais ils ne savent pas tout et il faut les aider à accroître leur efficacité. Ensuite, ils peuvent aller ailleurs et la productivité en souffre.
    L'enseignement, la supervision, ce genre d'activités… Il arrive qu'un étudiant particulièrement doué reste avec nous suffisamment longtemps et nous aide à améliorer notre productivité, mais avoir beaucoup d'étudiants, surtout des étudiants de premier cycle, exige beaucoup plus de travail pour ce qui est de la continuité.
    J'espère que j'ai répondu à votre question.
    Il me reste une minute.
    J'aimerais revenir au problème du tuyau percé. J'ai travaillé dans le domaine de la biologie dans les années 1990. Dans le secteur des sciences de la vie, il y avait un bon nombre d'étudiantes. J'ai même eu des groupes formés presque totalement d'étudiantes. Je crois que c'est un peu la même chose dans les sciences sociales ou la médecine.
    Où en est‑on pour ce qui concerne le problème du tuyau percé dans les domaines des sciences, de la technologie, du génie et des mathématiques?
    Je trouve important d'utiliser une autre analogie que celle du tuyau percé, qui donne l'impression que les gens décrochent sous l'effet de la gravité. Dans certains cas, ils sont activement évincés. Dans les domaines du génie et de la médecine, le harcèlement fondé sur le sexe, y compris le harcèlement de nature sexuelle, serait très fréquent selon certains rapports qui ne viennent pas d'ici, mais des États-Unis. Les femmes s'en vont, mais les harceleurs restent. Ce sont les étudiantes qui partent. Le problème prend des proportions particulièrement graves dans le cas des professeures noires ou autochtones.
    Des analogies comme le plancher collant et le plafond de verre sont beaucoup mieux adaptées que celle du tuyau percé.
(1255)
    Merci énormément d'avoir abordé tous ces sujets.
    Je remercie nos deux témoins, Mme D'Addario et Mme Bourgeault. Merci pour vos témoignages extrêmement précis et détaillés. Si vous souhaitez nous donner des compléments d'information, vous pouvez soumettre un document écrit à notre greffière, qui les transmettra aux analystes.
    J'aimerais maintenant passer, parce que je sais que M. Blanchette-Joncas est un peu pressé, à l'adoption du budget de l'étude sur le lien entre la République populaire de Chine et la recherche financée par le gouvernement fédéral. C'est important d'adopter ce budget pour que nous puissions convoquer des témoins. Hier matin, nous n'avions pas de témoins, mais notre formidable greffière a manœuvré très habilement et a réussi à trouver un premier groupe d'excellents témoins.
    Ce budget est‑il adopté?
    Des députés: D'accord.
    Le président: Merci.
    Nous allons suspendre la séance quelques minutes et nous allons poursuivre à huis clos pour formuler nos instructions sur la rédaction d'un projet de rapport sur les programmes des bourses d'études supérieures et postdoctorales du gouvernement du Canada.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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