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NDVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON NATIONAL DEFENCE AND VETERANS AFFAIRS

COMITÉ PERMANENT DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES ANCIENS COMBATTANTS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 20 avril 1999

• 1617

[Traduction]

Le président (M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.)): J'ouvre la séance du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants.

Nous avons un témoin aujourd'hui. Je crois savoir que M. Bland doit partir dans environ une heure. Cela devrait nous suffire car j'aimerais que le comité aborde à 17 h 15 deux ou trois points importants à l'ordre du jour, et ensuite les cloches devraient sonner aux environs de 17 h 30. Nous allons procéder ainsi.

Bienvenue à M. Lebel—welcome, Mister Lebel—qui, je crois, a été membre du Comité de la défense dans le passé et nous revient maintenant avec, évidemment, M. Laurin du Bloc.

Monsieur Bland, nous vous souhaitons la bienvenue et nous attendons votre exposé d'ouverture.

M. Douglas Bland (titulaire, chaire de gestion de la Défense, Faculté des études de politiques, université Queen's): Merci beaucoup.

Je tiens simplement à vous dire que je n'ai pas l'intention de bousculer qui que ce soit. La seule raison c'est que je dois quitter le Parlement pour me rendre à une institution plus huppée: la Société Radio-Canada veut que je fasse une entrevue ce soir.

Des voix: Oh, oh.

M. Douglas Bland: C'est toujours un plaisir de parler avec les membres de votre comité et je vous remercie de l'invitation.

On m'a demandé de dire quelques mots sur les achats de matériel de défense. J'ai pensé que je pourrais faire quelques remarques impromptues et décrire certains des enjeux qui me semblent importants. Ensuite, il sera peut-être plus utile que vous me posiez quelques questions sur ce sujet.

Les gens aiment poser des questions sur la politique canadienne d'achat du matériel de défense et les cyniques diront souvent—vous les avez peut-être déjà entendus—que ce serait bien d'avoir une telle politique. Au Canada, le problème a toujours été d'essayer de faire concorder les trois volets des dépenses de la défense: les dépenses de personnel, les dépenses d'exploitation et d'entretien et les dépenses d'immobilisations. Cela a entraîné des difficultés car nous ne semblons pas capables d'arriver avec une stratégie cohérente correspondant aux besoins de ces trois volets.

• 1620

Je vais m'efforcer de vous parler de ce que l'on pourrait appeler des macro-questions traitant des approvisionnements. Des approvisionnements pourquoi? De quelle structure des forces parlons-nous? Ensuite il y a des micro-questions, qui ont un rapport avec des équipements en particulier. Enfin, je vous parlerai quelques minutes des implications budgétaires, de quelques-uns des problèmes à long terme que nous rencontrons, et je vous ferai peut-être une suggestion audacieuse sur la façon dont nous pourrions aller de l'avant à partir de là.

Essayer de décider en quoi nous nous approvisionnons équivaut à des questions de stratégie, c'est-à-dire la concordance entre les fins et les moyens, et cela équivaut également à des questions de structure, c'est-à-dire quel genre de forces armées faut-il avoir?

Il existe deux façons générales d'essayer de répondre à ces questions. La première est de commencer par définir les rôles et les missions des Forces canadiennes et ensuite d'espérer que les énoncés de ces rôles et de ces missions décideront de toute évidence pour nous quelle est la structure des forces armées.

Je prétends qu'il existe trois missions des forces armées. Nous les avons probablement depuis la Confédération, nous les aurons toujours, et elles ne changeront pas dans leur essence même. La première mission consiste à défendre le Canada. La deuxième consiste à défendre l'Amérique du Nord en collaboration avec les États-Unis. La troisième consiste à fournir un corps expéditionnaire pour des missions à l'étranger avec nos alliés et nos amis.

L'énoncé de ces missions ne définit cependant pas la structure des forces, parce que cela équivaut à des questions sur l'équilibre entre les forces pour chacune de ces missions et sur les genres de corps expéditionnaires que vous aurez, etc. L'approche de la politique d'approvisionnement en examinant les rôles et les missions n'est pas très souvent couronnée de succès. Nous revenons toujours à des choix politiques.

On ne peut pas se soustraire au fait que, même si nous comprenons très bien les rôles et les missions des Forces canadiennes, d'aujourd'hui et de demain, il nous faudra cependant encore des discussions politiques, des décisions politiques, pour savoir qui obtient quoi du trésor national, quel montant approximatif revient aux forces armées, combien de structures environ et de quelle sorte vous aurez dans les forces armées, et à quel genre de missions vous allez participer, en détail.

Le problème pour les politiciens, je pense—de mon point de vue en tout cas—c'est que vous faites toujours face à une grande incertitude au sujet des détails des missions. Si une chose caractérise la politique de défense des Forces canadiennes ou la politique de défense canadienne au cours des 25 ou 30 dernières années, c'est la surprise. Le gouvernement est toujours surpris par l'état des forces armées, je pense, et les forces armées sont toujours surprises par les missions que le gouvernement lui demande d'exécuter. Il est difficile de trouver quelqu'un qui, il y a six ou sept ans, aurait prédit que les Forces canadiennes seraient principalement déployées dans les Balkans, en Afrique et au Moyen-Orient en 1999. Il est difficile d'ériger une stratégie autour de cette situation. La surprise et l'incertitude aboutissent à un problème délicat.

L'approvisionnement est encore aggravé par les pressions institutionnelles. Je veux dire par-là, comme nous nous en rendons tous compte, que les gens dans l'armée de terre, dans la marine et dans l'aviation ont leurs propres idées de nos besoins, et ce sont souvent des points de vue institutionnels. En fait, dans certains éléments des services, comme l'armée de terre par exemple, vous pouvez trouver des gens ayant des points de vue différents sur la composition de l'armée. Il est difficile, pour les politiciens, d'obtenir ce que nous appellerions un point de vue militaire; souvent, vous obtenez un point de vue institutionnel.

Enfin, il y a des contraintes budgétaires. Nous pourrons en parler dans quelques minutes.

Une autre façon d'aborder les achats d'immobilisations consiste à commencer avec ce que vous avez à l'heure actuelle dans les forces armées comme point de départ ou, autrement dit, à examiner votre stock de capacités militaires—le nombre d'avions, le nombre de véhicules et le nombre de navires dont disposent les Forces canadiennes—et d'en arriver à une certaine évaluation de cette capacité, de ces stocks de biens.

• 1625

Ensuite, la stratégie consisterait simplement—et j'utilise le terme à la légère—à élaborer une stratégie pour réapprovisionner, pour recapitaliser, le stock de biens. Permettez-moi de vous donner un exemple. Supposons que le stock de biens dans les Forces canadiennes vaut actuellement 50 milliards de dollars et que nous décidons de recycler ce stock tous les 10 ans. De toute évidence, il vous faudra dépenser 5 milliards de dollars chaque année en recapitalisation de la force pour entretenir ce système, pour le payer.

Comme je l'ai mentionné il y a quelques instants, une autre façon d'examiner la situation consiste à le faire au niveau micro-économique. C'est ce que nous faisons souvent dans le cadre de la politique de défense du Canada, dans la planification de la défense au Canada, et dans le cadre de notre système politique, je suppose. Nous avons tendance à examiner des équipements individuels: un programme de remplacement de navires, un programme de remplacement d'aéronefs, un programme de remplacement de véhicules blindés, etc. Mesdames et messieurs, je suppose que je n'ai pas besoin de vous dire qu'il y a un problème. Des pressions sont exercées sur les députés pour s'assurer que les contrats accordés vont à des gens de leur circonscription. Des pressions sont toujours exercées sur les leaders pour essayer de tirer une valeur quelconque des dépenses de défense, comme si les effectifs de l'institution n'avaient pas assez de valeur.

Certains d'entre vous ont peut-être répondu à un sondage que j'ai effectué cet hiver sur les attitudes des députés à l'égard de la défense nationale. Dans la section de ce sondage qui traitait des achats de matériel de défense, les députés et les sénateurs, presque tous, ont répondu à un certain nombre de questions—par exemple où nous devrions acheter notre équipement, qui devrait en profiter, si ce devrait être à terre ou en mer, etc.—en disant que les dépenses de défense devraient être effectuées en premier lieu pour profiter aux forces armées et que, toutes choses étant égales par ailleurs, des critères comme l'efficacité du matériel, etc., vous pouvez insister pour que l'équipement soit acheté au Canada.

Il y avait un consensus—tout au moins dans le sondage—à savoir que les députés fédéraux ne devraient pas se préoccuper beaucoup de la répartition des dépenses de défense par région. Autrement dit, si le bien des forces armées est ce qui compte vraiment, si tous les budgets de défense étaient dépensés en Ontario, par exemple, ce serait une bonne chose. C'est un des résultats du sondage. Parfois, je pense que le va-et-vient quotidien pourrait nous donner un résultat différent, mais c'est une inquiétude continue et un problème permanent avec les dépenses de défense au Canada, pour savoir qui en bénéficiera.

Enfin, j'aimerais vous dire quelques mots sur les budgets. Comme vous le savez, notre processus budgétaire normal pour le ministère de la Défense au cours des dernières années, sous l'ancien gouvernement et sous l'actuel, consistait à accorder une enveloppe fixe au ministre de la Défense et à lui demander de voir ce qu'il pouvait faire avec cette somme. Cela met le ministère de la Défense véritablement dans l'eau chaude. Comme un retraité ou un vieux soldat comme moi, peut-être, qui vit d'une pension fixe, lorsque vous devez faire des choix à partir d'un budget fixe, cela signifie que vous videz une poche pour remplir l'autre.

Pour les dépenses de défense, cela signifie que si nous dépensons pour le personnel, nous ne dépensons pas pour l'exploitation et les immobilisations. Si nous dépensons pour les immobilisations, nous n'avons pas d'argent pour le personnel. Les recherches révèlent, sur une période prolongée, que ce sont toujours les achats d'immobilisations qui souffrent de cette dynamique. Au Canada, les achats d'immobilisations ne font pas partie d'une stratégie, ne font pas partie d'une politique, mais constituent un élément résiduel. C'est ce qui reste après les dépenses de personnel et après les dépenses d'exploitation. Si vous pouvez trouver des moyens de comprimer le personnel ou de réduire les dépenses d'exploitation, vous obtenez plus d'immobilisations, et ainsi de suite. Ça ne fonctionne pas très bien.

Une autre suggestion consiste à essayer d'ériger ce que j'appellerais un processus de référence. La prémisse de base consisterait à établir un budget pour les besoins du ministère de la Défense, pas pour ce que vous pouvez obtenir avec le budget. Autrement dit, nous affecterions les montants qui sont nécessaires.

• 1630

Mais comment savoir ce qui est nécessaire? Quel montant suffit? C'est une question primordiale et permanente dans la gestion de la défense. Pour trouver quel montant est suffisant, nous avons besoin du Parlement pour définir l'envergure des forces armées, pour décider que les forces armées auront telle et telle taille, avec tel taux de rémunération. Cela vous donnera votre budget de la rémunération, votre budget du personnel. Après, il faudra peut-être établir une stratégie de recapitalisation annuelle du stock des biens de la défense nationale. Nous pouvons le calculer avec suffisamment de précision sur une certaine période.

Ensuite, vous examinez le budget d'exploitation et d'entretien simplement comme un ratio en fonction des deux autres segments du budget de la défense et, ce qui détermine les besoins pour la défense nationale. Cela nous donnerait un budget qui est prévisible et raisonnable et une base de référence suffisante à des fins de planification. Si les circonstances sont telles que les Canadiens constatent qu'ils n'ont pas assez d'argent pour satisfaire les dépenses de référence, le Parlement pourrait soustraire de cette base de référence connue. Si nous constatons que, par une chance inouïe, nous disposons d'excédents pour dépenser dans la défense nationale, nous saurions exactement où dépenser l'argent et à quel rythme.

Sinon, nous nous retrouvons dans une situation à laquelle j'ai donné un nouveau nom il y a longtemps. Comment faisons-nous la gestion de la défense au Canada? C'est un «système de gestion aléatoire». Cela ne signifie pas que les gens au ministère de la Défense et dans les forces armées ne sont pas intelligents et consciencieux au niveau des dépenses. Ils le sont assurément. Ce que cela signifie, c'est que ces personnes qui sont responsables de la planification et de la gestion de la défense nationale n'ont pas le contrôle des facteurs de planification. Ils ne connaissent pas le budget. Ils ne savent pas ce qui se passe. Ils ne connaissent pas la stratégie. Ils ne savent pas ce qu'ils vont faire le lendemain. Le résultat, c'est que vous avez un système de gestion très aléatoire pour la défense et la planification de la défense du Canada.

Je vous remercie.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Bland.

Nous devrions avoir assez de temps pour deux tours de questions, chers collègues. Nous allons commencer le premier tour de dix minutes avec M. Hanger du Parti réformiste.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Merci, monsieur le président.

Merci beaucoup pour votre exposé, monsieur Bland.

Une déclaration que vous avez faite vers la fin de votre exposé a piqué ma curiosité. Il s'agit du système de gestion aléatoire auquel sont assujetties les Forces armées canadiennes si l'on peut dire. Vous avez déclaré que les militaires n'ont pas le contrôle sur certains facteurs de planification. Pouvez-vous développer ce thème?

M. Douglas Bland: Dans le milieu universitaire, nous aimons croire que les politiques sont gérées de façon rationnelle, pas au ministère de la Défense mais au sein du gouvernement. Nous aimons croire que c'est un système de gestion rationnel, que tout est mûrement réfléchi et que nous pouvons calculer le résultat par des méthodes scientifiques et économiques. Dans la réalité, nous savons par expérience que le système est moins rationnel et plus bureaucratique que nous le souhaiterions.

Un «système de gestion aléatoire» est mon expression. À l'époque, j'écrivais un ouvrage sur ce sujet et j'essayais de trouver une façon de différencier ce qui se passe vraiment au quartier général de la Défense nationale de ce que l'on dit se passer au quartier général de la Défense nationale. Au quartier général, comme dans de nombreux ministères, il y a des livres volumineux qui vous décrivent le processus en vue de prendre une décision, mais personne dans l'immeuble ne croit que c'est ainsi que nous prenons les décisions, alors j'ai dû réfléchir à une autre façon d'expliquer comment les décisions sont prises dans la réalité.

Après mûre réflexion, je suis arrivé avec cette notion que c'est aléatoire. C'est aléatoire au sens qu'à tout moment particulier dans le ministère, les forces armées peuvent être envoyées vers une nouvelle mission, en Afrique par exemple, et cela démolit dans une certaine mesure le processus de planification de la défense. Le gouvernement peut ou bien récupérer des fonds ou encore ordonner une hausse salariale pour les soldats.

Le ministère de la Défense n'est pas comme une société, dans laquelle les membres du conseil d'administration, le président et le chef de la direction peuvent s'asseoir autour d'une table pour définir leur plan d'entreprise et contrôler leurs dépenses et tout le reste. Au quartier général, la plupart des gestionnaires consacrent la majorité de leur temps à répondre à des circonstances imprévues. Nous l'avons constaté de nos propres yeux au cours des deux ou trois dernières années, qu'il s'agisse de dépenser des fonds pour les inondations au Manitoba, pour lutter contre les feux de forêt, pour aller en Yougoslavie ou pour exploiter des avions au Kosovo à l'heure actuelle. Toutes ces dépenses sont des surprises inattendues et c'est ce qui a provoqué le caractère aléatoire dans le processus de planification.

• 1635

M. Art Hanger: Juste après votre description du sondage, vous avez parlé des gouvernements qui se présentent devant les militaires en disant très bien, nous avons x dollars, alors vous allez acheter du matériel, et qui propose même cette affectation de fonds avant qu'il y ait un examen exhaustif, si vous voulez, pour formuler un bon énoncé solide des besoins des militaires. Ou bien il peut y avoir un énoncé déjà formulé des exigences des militaires et le gouvernement dit que c'est trop et leur ordonne de faire des coupures. Il y a une simplification à outrance des spécifications, si vous voulez, en vue d'acheter un appareil.

Comment pouvez-vous possiblement éviter ce genre d'interférence dans le processus des achats militaires? On dirait que c'est inhérent à ce genre d'organisation que nous avons au Canada.

M. Douglas Bland: Je ne qualifierais pas cela d'interférence. Le gouvernement a tout le loisir d'orienter, de questionner et d'affecter des fonds aux dépenses de défense. À mon avis, la responsabilité des militaires—et la responsabilité des fonctionnaires de la défense, dans une certaine mesure—consiste à présenter au gouvernement un énoncé clair des besoins ainsi qu'un énoncé clair des risques impliqués ou des changements et des capacités qui découleront de la modification des besoins. Une fois que cet énoncé est bien compris par le gouvernement, il incombe à ce dernier de décider quoi faire.

Mais il s'ensuit évidemment que, si les Forces armées canadiennes se retrouvent dans une situation où elles n'ont pour ainsi dire pas de capacités militaires ou ne disposent que d'une douzaine de navires ou de quelques hélicoptères ou de quoi que ce soit d'autre, il incombe au gouvernement d'assumer le risque qui en découle.

Je pense qu'il existe deux processus pour l'achat de matériel important. Le premier est le processus bureaucratique, militaire, celui des experts techniques, qui consiste à décrire ce qu'il faut pour respecter les politiques du gouvernement. La deuxième est un processus politique pour décider s'il acceptera ce conseil, quelle direction il suivra et quel genre de décision il prendra. À ce stade, la responsabilité des répercussions incombe entièrement au Parlement.

M. Art Hanger: Nous pourrions nous livrer à toute une description de quelques-uns des achats les plus récents effectués par l'actuel gouvernement—ou par n'importe quel gouvernement, peut-être même par le précédent—dans le cadre desquels des appareils ont été achetés mais ne répondaient aux exigences mentionnées par les militaires. Peu m'importe qu'il s'agisse d'un hélicoptère tactique ou d'un équipement au sol que vous recherchez, pour l'utiliser dans une situation opérationnelle alors qu'en réalité il n'est pas capable de remplir même les exigences minimales de base après qu'elles aient été modifiées, cela constitue à mon avis une interférence du gouvernement. Si les politiciens viennent nous dire, voilà tout l'argent dont vous disposez mais nous voulons x machines, alors assurez-vous qu'elles entrent toutes dans ce budget...

M. Douglas Bland: Encore une fois, dans un contexte de relations civilo-militaires, je ne pense pas que le gouvernement puisse intervenir dans les décisions des militaires. Toutefois, le point le plus évident, à mon avis, est que l'expert technique, la personne responsable des Forces armées canadiennes, pour l'exploitation, le commandement et l'administration des forces armées, c'est le chef d'état-major de la défense. S'il ne peut pas supporter la décision du gouvernement concernant les achats, sa responsabilité lui dicte clairement de quitter ses fonctions et de faire connaître son point de vue au Parlement ou de le faire connaître au Parlement d'une certaine façon. Mais en autant que les militaires acceptent les décisions du gouvernement à cet égard, ils ne peuvent pas vraiment s'en plaindre.

Si toutefois, dans quelques semaines, nous nous retrouvons dans une situation où le matériel ne correspond vraiment pas à ce qui est nécessaire, c'est évidemment une responsabilité qui incombe au gouvernement. Il incombe aux gouvernements d'accepter ce risque, celui de déployer des militaires avec ce matériel, et je suis convaincu que les gouvernements le savent.

• 1640

Mes entretiens avec des chefs d'état-major de la défense—je veux dire ici d'anciens chefs d'état-major de la défense—révèlent qu'ils ont communiqué clairement aux gouvernements les conséquences de leurs décisions, et les gouvernements ont répondu, en autant que je sache, merci beaucoup pour les conseils, et nous nous en tiendrons là.

M. Art Hanger: Je vais simplement orienter les questions vers un événement qui s'est passé très récemment. Il a trait au relâchement du lien de défense entre le Canada et les États-Unis. Je sais que notre ministre des Affaires étrangères s'est rendu aux États-Unis pour essayer de parer des mesures qui dépouilleraient en réalité le Canada de son accès privilégié au marché américain du matériel de défense.

Je suis simplement curieux de savoir ce que vous pensez des mesures américaines dans ce cas particulier et si, oui ou non, ce serait relié à d'autres enjeux, comme la politique étrangère ou la politique de défense du Canada, la situation de nos militaires ou la question des armes nucléaires. Il y a toute une série de sujets que les États-Unis ont mentionnés, ont rendu publics. Pensez-vous qu'ils aient un lien avec cette mesure actuelle?

M. Douglas Bland: Il y a pas mal d'années, nous avions l'habitude de rédiger des articles savants sur «l'infrastructure industrielle de défense» qui était le concept en vertu duquel toute l'Amérique du Nord était une immense usine heureuse. Ce concept a quelque peu dérapé après la fin de la Guerre froide.

Je n'en sais pas davantage maintenant sur cette situation particulière en dehors de ce que j'ai lu dans les journaux. Il me semble plutôt bizarre que les Américains essaieraient de détruire un partenariat avec un allié qui lui fournit du matériel de défense—peut-être davantage de matériel de défense que notre industrie du matériel de défense n'en fournit aux Forces armées canadiennes. Je ne pense pas que les Américains accordent une très grande attention à nos déclarations de politique étrangère et de défense. Ils aiment voir ce que nous faisons, dans la réalité, pas ce que nous disons. Vraiment, mon seul commentaire est le suivant: lorsque les gens d'affaires et les politiciens américains commencent à parler de drapeau et d'argent, ils s'intéressent habituellement à l'argent. J'estime donc que cela a quelque chose à voir avec la concurrence, pas tant avec la politique de défense étrangère, mais je n'en suis pas absolument certain.

Le président: Merci, monsieur Hanger.

[Français]

Monsieur Lebel du Bloc québécois, 10 minutes, s'il vous plaît.

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur Bland, merci de votre exposé. On parle du marché public de la Défense. Vous dites qu'il faut d'abord fixer les objectifs et que c'est en fonction de ceux-ci qu'on va évaluer l'équipement nécessaire pour les atteindre.

Vous parlez de pressions de l'extérieur. J'aimerais connaître la nature de ces pressions. Je sais que des hauts gradés de l'armée américaine déposent parfois des mémoires devant des comités comme celui-ci pour ceux qui ne s'y connaissent pas. Cela semble un peu curieux que des chefs militaires d'un autre pays viennent déposer des mémoires devant un comité de la Chambre des communes ou du Parlement canadien, et nous devons nous demander jusqu'à quel point nos décisions nous appartiennent dans le domaine de la défense étant donné que nous subissons des pressions de l'extérieur. À ce moment-là, pouvons-nous avoir une politique cohérente, une politique d'achat qui puisse suivre les politiques qu'on a établies en matière d'utilisation de l'armée?

[Traduction]

M. Douglas Bland: Je le pense. Je n'ai pas connaissance de nombreuses tentatives récentes déployées par des gouvernements étrangers pour influencer les politiques d'achat de matériel de défense au Canada, en dehors des activités concurrentielles habituelles de la part d'entreprises qui essaient d'obtenir des contrats pour leur propre pays, que ce soit pour des hélicoptères, des navires, des avions ou d'autres équipements.

• 1645

Les pressions qui sont plus souvent exercées sur les fonctionnaires de la défense et les hauts gradés viennent du Canada. Il s'agit de pressions en vue d'acheter du matériel fabriqué au Canada. Il y a des pressions en vue de maintenir des bases militaires dans certaines régions du pays, même si elles ne sont pas forcément nécessaires, et cela a une incidence sur l'argent disponible pour les achats. Il y a des pressions pour égaliser les dépenses de défense entre toutes les régions du pays.

Certains de mes collègues ont beaucoup écrit dans ce domaine et ils estiment que ces sortes de pressions, régionales, intérieures, canadiennes, ces pressions politiques, font augmenter considérablement le coût d'achat du matériel. Que vous ayez un chantier naval ou six qui fabriquent des destroyers ou des frégates ou autre chose peut avoir une incidence.

Quant aux pressions extérieures, je pense que, dans la majorité des cas, nos alliés de l'OTAN et d'autres pays seraient heureux si nous dépensions de l'argent dans presque toutes les régions. Mais une fois encore, les Britanniques, les Français et les Américains, par exemple, seraient très heureux si nous augmentions nos dépenses de défense, si nous augmentions nos achats de matériel de défense et si nous dépensions l'argent dans leur pays. J'estime que c'est un élément naturel—qu'il soit naturel ou non, peut-être ce n'est pas naturel—un volet normal de rapports politiques entre deux pays.

[Français]

M. Ghislain Lebel: Je n'ai plus d'autres questions. Merci.

M. René Laurin (Joliette, BQ): Puis-je prendre le reste du temps de mon collègue, monsieur le président?

Le président: Oui. Il reste six minutes.

M. René Laurin: Monsieur Bland, j'ai malheureusement manqué votre exposé parce que j'étais allé au briefing d'un autre comité sur le Kosovo. J'aimerais avoir votre opinion sur une autre opinion qui nous a été donnée ici en comité, lors de notre dernière séance, par un spécialiste du renseignement, qui prétendait que l'armée canadienne devait se modifier afin de s'adapter à une conjoncture moderne plus réaliste. Dans son esprit, on ne fait plus la guerre comme on la faisait il y a 15 ou 20 ans puisqu'on dispose maintenant de toutes sortes de moyens de télécommunication et de téléguidage sophistiqués. Il prétendait que l'armée canadienne n'était peut-être pas équipée de façon appropriée pour répondre aux besoins de la guerre moderne.

J'aimerais que vous nous disiez ce que vous pensez de cette opinion. Est-ce que l'armée canadienne devrait réduire son effectif? Sinon, est-ce qu'on devrait penser à d'autres équipements de nature différente? Les guerres actuelles sont des guerres régionales. On ne parle pas d'une guerre mondiale, dans laquelle le Canada n'aurait pas sa place parce qu'il n'a pas d'armes nucléaires et que c'est comme cela qu'une guerre mondiale se passerait. Le témoin pensait à une force multifonctionnelle, peut-être de moindre importance, mais ayant des moyens différents qui coûteraient moins cher à l'acquisition pour venir en aide lors d'autres guerres régionales. J'aimerais avoir votre opinion là-dessus.

[Traduction]

M. Douglas Bland: Je suppose que vous me permettrez de faire une réponse quelque peu théorique. Lorsque des gens me disent que les Forces canadiennes ne sont pas équipées pour faire la guerre, je dois toujours leur demander de quelle guerre ils parlent. Dans certaines discussions, nous parlons d'un spectre de conflit allant de policiers armés de matraques à une extrémité à des armes nucléaires à l'autre extrémité. La guerre survient tout au long de ce spectre et, en réalité, les gouvernements peuvent décider pour eux-mêmes à quel genre de guerre ils souhaitent participer. Il n'existe pas de définition de la guerre et vous ne pouvez donc pas dire que nous devrions équiper les forces armées pour aller à la guerre.

Je répète que les missions de planification de la défense pour les forces armées et autres sont des choix effectués par les gouvernements—je l'espère—et que ces choix ont des conséquences sur la structure des forces, les équipements que vous achetez, et tout le reste.

• 1650

Si le gouvernement canadien souhaitait s'engager uniquement dans des missions de nature policière, alors nous sommes suréquipés. S'il souhaite s'engager, comme il l'a dit, je pense, dans le livre blanc de 1994, dans des guerres «au côté des meilleurs, contre les meilleurs»—déclaration regrettable à mon avis—nous ne sommes pas équipés pour cela. Ce qui me dérange, c'est que les gouvernements n'abordent pas ces questions directement, en achetant simplement des appareils ici, là et ailleurs. Nous finissons par n'avoir ni chair ni poisson et nous ne sommes pas certains de l'objectif que nous visons.

Vous utilisez l'expression «force convenable». Avons-nous une force convenable? Je dirais que nous avons toujours une force convenable parce que le gouvernement a décidé ce que sera la force. À l'heure actuelle—à la fois d'après les compressions de 1989 effectuées par le Parti conservateur et d'après l'actuel budget de la défense du gouvernement au pouvoir—le Canada a les forces armées de ses rêves. C'est ce que nous voulons. La situation des forces armées n'est pas une sorte de conséquence involontaire de restrictions budgétaires. Les gouvernements ont été informés de ce qui se passerait s'ils réduisaient les budgets de la défense: il en résulterait une force très petite, ayant des capacités limitées, pas vraiment prête à se rendre n'importe où à court préavis. C'est ce que nous avons.

Les gouvernements le savaient. Tous les gouvernements savaient cela. Alors, les gouvernements doivent avoir dressé des plans en conséquence. Nous avons donc une force convenable. La force dont nous disposons actuellement est celle qui résulte des politiques du gouvernement.

[Français]

M. René Laurin: Monsieur Bland, notre expert nous mentionnait à titre d'exemple qu'un seul soldat ennemi équipé d'un engin téléguidé pourrait facilement détruire un de nos chars Leopard. Quand on compare les différents moyens ou les différents coûts d'un char Leopard et d'un engin téléguidé ou d'un engin manié par un seul soldat, il y a lieu de se poser des questions. Est-ce qu'on a encore besoin aujourd'hui de ce genre de plate-forme pour faire la guerre? Ne vaudrait-il pas mieux faire d'autres choix qui correspondraient mieux à nos moyens?

On sait que nous avons un budget d'environ 10 milliards de dollars pour la défense nationale et qu'on ne prévoit pas pouvoir l'augmenter de façon appréciable au cours des prochaines années. C'est ce genre de questions qu'on doit se poser. Est-ce qu'on doit continuer de s'acheter des équipements comme ceux-là ou s'il ne vaudrait pas mieux acheter des équipements qui ne sont plus utilisés par d'autres pays? C'est une autre suggestion que faisait M. Forster. J'aimerais vous entendre là-dessus.

[Traduction]

M. Douglas Bland: En tant qu'ancien soldat dans un char de l'armée canadienne, j'ai toujours de la difficulté avec ces genres d'exemples; ils sont, d'une certaine façon, perturbateurs.

Permettez-moi de vous dire ceci. Je suis d'accord que les principaux chars de combat que nous avons actuellement sont des équipements de catégorie inférieure qui servent peut-être à des fins d'entraînement mais ne répondent pas aux normes pour un combat classique de chars en 1999 mais, avec tout le respect que je vous dois, je ne pense pas que ce soit la question importante.

Si le gouvernement veut participer à de grandes batailles, à des batailles classiques avec des effectifs nombreux, des chars d'assaut, etc., nous aurions mieux fait de nous acheter quelques chars. Si le gouvernement ne veut pas participer à ces genres de batailles, alors tout va très bien. Mais j'ose espérer que le gouvernement comprend les conséquences de ses actes. Si, en fait, tout ce qui se passe c'est que nos chars tombent en ruines parce que nous n'avons pas d'argent à dépenser pour eux ou parce que nous ne pouvons pas nous permettre d'en acheter quelques nouveaux, et si le gouvernement ne reconnaît pas que cela signifie que les Forces armées canadiennes ne peuvent pas être déployées au premier échelon des troupes au sol qui partiront au Kosovo au cours des prochaines semaines, alors il y a un danger. C'est un problème pour le gouvernement.

Toutefois, comme je l'ai mentionné, nous avons un spectre de conflit. Les gouvernements peuvent choisir où ils veulent se situer pour pouvoir fonctionner sur ce spectre et ils peuvent prendre les décisions appropriées concernant l'équipement, les dépenses, la taille de la force, l'entraînement, etc., pour respecter cette politique. C'est l'élément principal.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Laurin.

• 1655

[Traduction]

Maintenant nous allons passer à la majorité. Il y a un certain nombre d'intervenants, alors vous pouvez utiliser les dix minutes en conséquence. J'ai tout d'abord M. O'Reilly et ensuite Mme Longfield, M. Proud et M. Clouthier, si le temps le permet.

Nous commencerons par M. O'Reilly.

M. John O'Reilly (Haliburton—Victoria—Brock, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Merci, monsieur Bland, de venir témoigner à nouveau. Si je me souviens bien, vous nous avez fait un exposé sur l'étude des réserves en 1994-1995 et vous avez fait des commentaires à l'époque sur le livre blanc. Vous êtes un ex-major des forces armées, je crois.

M. Douglas Bland: Lieutenant-colonel...

M. John O'Reilly: Oh, désolé. Lieutenant-colonel.

M. Douglas Bland: ... la dernière fois que j'ai vérifié.

M. John O'Reilly: Je ne tiens pas à ce que vous fassiez des réponses de fonctionnaire, mais vous pouvez peut-être remettre votre chapeau de militaire. Vous avez parlé d'une stratégie cohérente et je pense que nous avons tous parlé de la pyramide inversée ou de l'entonnoir inversé, dans lequel une somme importante est filtrée vers chaque ministère et est utilisée pour le montant immuable. Le nouveau matériel figure parfois très bas sur la liste.

Vous parlez de dresser d'abord un inventaire et ensuite de faire des achats sur une base quasi annuelle. Je ne sais pas très bien comment cela fonctionnerait. Je veux savoir si vous parlez d'améliorations. Parlez-vous de remplacer les CF-18 ou de les moderniser? Je pense que c'est déjà en cours. Les chars, les hélicoptères, ce genre de matériel... Je ne sais pas comment vous le feriez sans faire de gros achats, pas des achats annuels.

Un volet du processus de planification reposait sur la force de 60 000 soldats et sur ce que vous pouviez en faire. Je pense que nous avons abordé cette question au point que nous étions tous d'accord sur un certain montant pour une force ou pour une certaine force prête à intervenir, et je pense que votre commentaire disait à l'époque qu'elle servirait uniquement comme force de maintien de la paix si, en fait, elle atteignait ce niveau. Pouvez-vous formuler des commentaires à ce sujet?

M. Douglas Bland: Ce que j'ai essayé de faire en quelques minutes, c'est de décrire un modèle peut-être complexe, pas un programme gouvernemental, mais un modèle pour essayer de décider de combien vous avez besoin pour votre budget de la défense, pour essayer de répondre à la question, quel montant est suffisant? Au lieu de choisir simplement un chiffre au hasard et de dire que 30 p. 100 du budget devrait être consacré aux achats d'immobilisations, une façon d'essayer de modéliser le montant nécessaire pour les dépenses en immobilisations consiste à dire «Voici mon stock de biens militaires et si je devais le remplacer sur une certaine période, voilà le montant que je devrais dépenser».

Le modèle devient beaucoup plus complexe parce que vous avez besoin d'un critère pour décrire les caractéristiques des divers éléments du stock. Vous pouvez ensuite intégrer des questions portant sur la modernisation du matériel ou le remplacement du matériel, et ainsi de suite, mais tout ce que j'essaie de décrire ici c'est un concept de base qui vous permettra d'aboutir à une estimation assez grossière de vos besoins dans votre budget d'immobilisations pour maintenir ce que vous avez à l'heure actuelle.

Si vous conduisez aujourd'hui une Cadillac et si vous avez l'intention de la conduire pendant 15 ans, vous savez que vous devrez mettre un peu d'argent de côté, car une Cadillac vous coûtera davantage dans 15 ans—ou vous devrez peut-être acheter une Ford, je suppose. C'est ce genre de modèle qu'il faut peut-être travailler.

Comme vous le savez, ces questions reviennent à dire que c'est une décision politique concernant les capacités de la force et le montant qui lui sera consacré.

Quant aux capacités de la force, si nous repensons au comité spécial mixte de la Chambre et du Sénat, lorsque nous parlions de ces questions auparavant et lorsque nous collaborions avec le Comité de la défense auparavant, je pense avoir dit en 1993 que s'il n'y a pas plus d'argent à dépenser pour la défense, ou s'il n'y aura pas d'augmentation des dépenses de la défense—ce qui était nettement le cas à cette époque—et si le monde a tant changé que les menaces et nos vulnérabilités sont différentes et pas aussi importantes qu'auparavant, alors vous devez faire des choix différents à propos du genre de force que vous allez avoir, et vous devrez ensuite faire des choix concernant les endroits où vous participerez.

• 1700

Tout simplement, si vous avez une très petite force avec des capacités militaires très limitées, la seule chose raisonnable que vous pouvez faire, c'est de vous engager dans des opérations très limitées.

M. John O'Reilly: Avez-vous lu le rapport sur la qualité de vie rédigé par notre comité et la réponse du gouvernement? Si oui, quels sont vos commentaires sur ce sujet?

M. Douglas Bland: Je pense que c'était un excellent rapport et je félicite les membres qui ont traversé des moments difficiles pour le rédiger.

J'aurais espéré que la réponse du gouvernement aurait été plus proche des recommandations en termes de financement. J'estime que les conséquences du processus et du financement gouvernemental font que le budget de la défense est en fait réduit, pas augmenté. Je sais que vous avez probablement épluché les chiffres. Le fait est que, si nous voulons satisfaire les exigences pour le programme de la qualité de vie, comme je le comprends, nous devrons trouver environ 350 millions de dollars quelque part ailleurs dans le budget de la défense pour atteindre ces buts et objectifs. Il n'y a qu'un seul endroit où vous pourrez trouver cet argent: dans le budget d'immobilisations.

M. John O'Reilly: Merci.

Monsieur le président, je sais que nous manquons de temps aujourd'hui, alors je vais laisser la parole à mes collègues.

Le président: Merci, monsieur O'Reilly. Il reste quatre minutes.

Mme Longfield, M. Proud et M. Clouthier.

Madame Longfield.

Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.): Merci.

Monsieur Bland, vous parlez du sondage que les députés ont rempli. Le comité pourrait-il obtenir des exemplaires des résultats de ce sondage sous une forme quelconque?

M. Douglas Bland: Oui. Dès que je serai de retour au travail, j'ai l'intention de commencer à regrouper tout cela sous un format lisible. Nous avons pris toutes les données reçues des députés et des sénateurs et nous les avons entrées dans un ordinateur. Nous avons les résultats sous la forme d'une formule mathématique et maintenant j'aimerais les mettre sous une forme quelconque de prose qui serait utilisable pour les gens. J'espère les distribuer au moins aux personnes qui ont répondu au questionnaire.

Mme Judi Longfield: Ce serait utile.

Nous avons beaucoup parlé de ce que nous devrions acheter pour nos militaires. C'est un sujet qui pourrait durer à l'infini, mais une fois que nous avons pris la décision—une fois que le Parlement a décidé et une fois que le ministère a décidé qu'il va acheter—je suis préoccupée par le temps qu'il faut pour voir réellement le matériel sur le terrain. Pouvez-vous nous donner des suggestions utiles sur la façon de rationaliser ce processus, de réduire les coûts et d'en faire un programme plus utilisable et plus convivial dans le but d'obtenir l'équipement le plus tôt possible là où on en a besoin?

M. Douglas Bland: Je pourrais vous donner une réponse banale du genre «dépensez plus d'argent», mais la réponse générale... et c'est une réponse générale, parce que vous devez examiner individuellement tous ces équipements et ces programmes, car ils ont tous des caractéristiques particulières. La réponse générale consiste à prendre votre argent et à faire des démarches à la recherche du meilleur matériel qui correspond à nos exigences et qui existe déjà ou qui sera produit bientôt. C'est probablement la façon la plus rapide de produire un nouvel équipement.

Il n'est pas nécessaire que ce soit toujours du matériel neuf. La meilleure façon de produire un équipement utilisable pour les forces armées consiste parfois à améliorer le programme en permanence, autrement dit à moderniser les avions de chasse au fil des ans, pas un élément à la fois, pas un programme à la fois, mais dans le cadre d'un volet permanent du programme.

L'autre façon, qui ne raccourcit pas forcément la période d'achat mais donne le même résultat, consiste à prendre une décision, par exemple que nous aurons 14 frégates dans la marine canadienne à partir de maintenant jusqu'au jour du jugement dernier. Nous les aurons pour toujours. Par conséquent, vous avez un plan d'achat continu pour produire un navire chaque année. Sur une certaine période, vous aurez de nouveaux navires qui entreront en service à un rythme très raisonnable, et ils peuvent être modernisés car vous les produisez. En disposant de ce genre de service d'achat, on ne démarre pas la production pour l'arrêter et connaître tous les affres de la bureaucratie pour s'interroger à nouveau sur le programme et le redémarrer ensuite; cela pourrait permettre de régulariser le débit d'une certaine façon.

Mme Judi Longfield: Ai-je assez de temps pour une brève question?

Le président: Oui. Il reste trente secondes.

Mme Judi Longfield: Voyez-vous un rôle pour les représentants élus dans le processus de sous-traitance, d'appel d'offres, d'achat?

• 1705

M. Douglas Bland: Oui. Il y a un rôle. C'est le point d'entrée, je suppose, qui est la question. Le processus fonctionne bien lorsque les fonctionnaires, les industriels et les gradés militaires peuvent collaborer très étroitement, lorsqu'aucune restriction ne s'applique à eux pour concevoir un énoncé des besoins. Les fonctionnaires responsables, le chef d'état-major de la défense et le sous-ministre du MDN, devraient alors, à mon avis, présenter un dossier cohérent aux leaders politiques. Ensuite, ils devraient intervenir dans le programme à ce stade.

Toutefois, il serait très utile d'avoir, dans notre système politique, beaucoup de députés et de sénateurs ou autres qui sont très au fait de toutes ces questions spécialisées. Nous pourrions toujours offrir un cours à cette fin à l'université Queen's.

Des voix: Oh, oh!

M. Douglas Bland: Plus il y aura d'expertise au sein du Parlement, plus les Forces armées canadiennes et les Canadiens seront dans une meilleure position, parce que souvent ce n'est pas l'endroit où les politiciens interviennent dans le processus qui est important; ce sont leurs connaissances et la pertinence des questions qu'ils posent aux experts qui importent.

Le président: Merci, madame Longfield.

Nous allons maintenant passer à M. Earle du NPD.

Avez-vous des questions, monsieur Earle?

[Français]

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Merci, monsieur le président.

[Traduction]

Je suis désolé d'être en retard mais, comme vous le savez, j'assistais également à l'autre réunion.

Je n'ai pas entendu votre exposé, mais juste comme j'arrivais, vous avez souligné un point qui concerne les pressions internes. Vous avez parlé de la pression en vue d'acheter des équipements fabriqués au Canada et de ce genre de chose. Je n'étais pas certain, d'après vos commentaires, si vous vous contentiez d'énoncer ces éléments ou si vous étiez pour ou contre. C'est peut-être vrai, que si l'on doit chercher au Canada pour acheter certains articles, le coût pourrait grimper dans plusieurs cas. Mais n'y a-t-il pas également des avantages qui découlent du fait d'insister sur le contenu canadien—comme des emplois et une valeur ajoutée pour les Canadiens? N'y aurait-il pas quelques avantages qui compenseraient les coûts supplémentaires éventuels?

M. Douglas Bland: C'est un principe raisonnable. S'il en était ainsi, ce serait une très bonne idée d'acheter tout au pays. Je ne suis pas un économiste, mais les recherches révèlent que de tels projets de dépenses de défense ont en réalité très peu d'effet en aval sur l'économie canadienne. Dans quelques domaines seulement, nous avons réussi à établir un lien direct entre les dépenses de défense et l'industrie, et c'est dans certains secteurs des télécommunications et de l'aérospatiale. Il y a deux ou trois experts au pays dans ces domaines, mais leurs recherchent tendent à révéler qu'il n'y a pas beaucoup de retombées de tels programmes.

M. Gordon Earle: Je pensais en particulier à l'idée, que vous avez mentionnée et qui a également été avancée par un autre témoin devant notre comité, d'avoir une sorte de processus d'achat permanent dans le cadre duquel, au lieu d'attendre, de faire tout en bloc et de ralentir ainsi le processus, vous produisez quelque chose une année, puis l'année suivante ou deux ou trois ans plus tard un autre produit entre en service.

Je pensais à cela en particulier et à la façon dont cette idée pourrait s'appliquer, par exemple, à la construction navale. Si nous avions des chantiers navals viables ici au Canada et s'ils produisaient des navires pour les Forces canadiennes, selon les grandes lignes que vous avez mentionnées, cela ne serait-il assurément pas avantageux en termes d'emplois stables et de connaissances accrues de l'industrie, etc., ce qui ferait alors de nous des concurrents viables dans ce domaine? Ne s'agirait-il pas de quelque chose dont les Canadiens pourraient bénéficier?

M. Douglas Bland: C'est possible. Je ne veux pas sous-estimer les problèmes dans un concept simple du genre «nous produirons des navires sans arrêt», qui est l'exemple que j'ai mentionné. Lorsque vous faites cela, le gouvernement au pouvoir engage en fait le gouvernement suivant à poursuivre le programme. Au mieux, c'est problématique.

Si nous pouvons produire une demande suffisante à l'intérieur du système canadien pour des navires produits au Canada, il faut se poser la question. Peut-être qu'une année est une bonne idée, mais vous ne commencez généralement à faire des bénéfices sur ces choses que si vous vendez cet équipement sur des marchés ailleurs, comme nous l'avons fait avec notre programme des véhicules blindés polyvalents. GM a réussi à réaliser quelques bénéfices en vendant ses véhicules ailleurs.

Quel niveau d'expertise développerions-nous, je n'en sais rien, mais je pense que vous pourriez développer une expertise en construction navale à cet égard.

• 1710

Le président: Merci, monsieur Earle.

Nous aurons le temps de faire un deuxième tour plus court. Nous commencerons par le Parti réformiste.

Monsieur Hart, je crois comprendre que M. Bland peut nous accorder une dizaine de minutes supplémentaires. Ensuite, nous aurons quelques questions de procédure. Nous allons amorcer un deuxième tour et nous devrions pouvoir poser des questions des deux côtés.

M. Jim Hart (Okanagan—Coquihalla, Réf.): Merci beaucoup.

C'est un plaisir de vous revoir, monsieur Bland.

En 1987, vous avez écrit un ouvrage intitulé Administration of Defence Policy in Canada 1947-84. À cette époque, vous éprouviez quelques problèmes avec la fusion des quartiers généraux civil et militaire. Je pense que vous l'avez décrite comme une «entité auxiliaire». Êtes-vous toujours du même avis et en quoi cela a-t-il, selon vous, des répercussions sur la politique de défense et, en particulier, sur la politique d'achat?

M. Douglas Bland: Je déteste que l'on me remémore des citations.

Des voix: Oh, oh!

M. Douglas Bland: Comme nous le savons, beaucoup de choses se sont passées depuis 1987, lorsque ce magnifique ouvrage a été rédigé. Oui, j'éprouve toujours des problèmes avec la structure actuelle du quartier général de la Défense nationale—la fusion du quartier général des forces armées et du quartier général du ministère—principalement par le fait que cela interfère avec des perceptions et des énoncés clairs du pouvoir et de la responsabilité dans les effectifs de défense. C'est une autre question, peut-être pour une autre séance du comité.

Beaucoup de choses ont changé, principalement suite à l'enquête sur la Somalie et aux recommandations qu'elle contient et aussi parce qu'on s'est rendu compte que ces problèmes étaient réels et qu'ils ont eu des conséquences au niveau opérationnel, par exemple avec les sous-ministres qui se sont impliqués dans les questions opérationnelles, avec une influence surtout négative sur les forces armées.

Du côté des achats, il existe, si je comprends bien, un ensemble bien défini de responsabilités dans la loi, dans les règlements, pour l'achat d'équipement. Les forces armées font connaître les besoins des experts aux fonctionnaires, en travaillant dans le cadre de la Loi sur la gestion des finances publiques, etc., et, par le truchement des règlements du Conseil du Trésor, arrivent avec des processus contractuels pour acheter l'équipement, pour se procurer le matériel et, en définitive, nous obtenons une part du tout.

Ce qui était un problème dans le passé... Comme exemple, je citerai peut-être les hélicoptères EH-101 et la chute de l'amiral John Anderson à l'époque. Certains se souviendront peut-être que le public et des politiciens avaient mené la vie dure à l'amiral Anderson à cause de l'ineptie du contrat des hélicoptères, à savoir qu'ils coûtent trop cher, et tout le reste. La plupart d'entre vous connaissent l'histoire.

Mais le fait est, le chef d'état-major de la défense (CEMD) n'est pas responsable—il ne l'était pas alors, et il ne l'est pas maintenant, si je comprends bien—pour la situation contractuelle dans le ministère. La personne qui était responsable à l'époque—tout comme maintenant—pour les contrats était le sous-ministre. Si quelqu'un aurait dû être interrogé sur le sujet à l'époque—je ne formule aucun jugement sur le résultat des questions—cela aurait dû être le sous-ministre, pas le CEMD. Nous faisons l'erreur, qui a été amplifiée par la fusion des quartiers généraux, de supposer que le ministère de la Défense nationale et les forces armées constituent une seule entité alors qu'ils en forment deux, alors qu'ils ont deux chefs en vertu de la loi.

Quelquefois au détriment des CEMD, habituellement, les militaires prennent le blâme pour des choses qui ne sont pas de leur faute. J'espère qu'ils en tirent aussi la gloire, mais c'est un problème permanent. Je dirai maintenant que, sous la direction de Mme Fréchette et de quelques autres, bon nombre de ces problèmes ont été abordés, mais théoriquement je m'en tiendrai, je crois, à l'ouvrage rédigé en 1987.

M. Jim Hart: Ai-je encore le temps de poser une autre question?

Le président: Oui.

M. Jim Hart: Dans ce cas, parlons des hélicoptères pendant une minute. Notre comité, durant l'étude sur les approvisionnements, a appris par les témoins militaires que l'énoncé des besoins opérationnels (EBO) pour les hélicoptères embarqués est encore soumis à un processus, que ce n'est pas encore terminé. Nous avons également eu des échos des représentants de l'industrie. Ils estimaient que ce processus avait déjà trop duré, que cet EBO devrait être clair et précis, qu'on ne devrait pas se tromper au sujet des besoins militaires.

• 1715

Quel est le retard à ce sujet? Avez-vous une opinion là-dessus? S'agit-il de quelque chose que l'on ne sait pas à propos de l'EBO? Ou est-ce politique... Je ne dirai pas que c'est de l'interférence, mais maintenant que je viens de le dire... Où se situe le retard, de votre point de vue d'universitaire?

M. Douglas Bland: Je n'ai pas étudié ce projet depuis un certain temps. J'écoute les nouvelles et je parle à mes collègues au travail et à l'extérieur. Je dirais que le retard, comme vous le décrivez, se situe au niveau des rapports entre les militaires, les bureaucrates et les politiciens.

Le président: Merci, monsieur Hart. C'est une réponse intéressante.

Nous avons du temps pour une dernière série de questions. J'ai trois collègues de ce côté-ci qui souhaitent prendre la parole: M. Proud, M. Clouthier et M. Wood.

Monsieur Wood, aviez-vous une question?

M. Bob Wood (Nipissing, Lib.): J'ai seulement une question rapide.

Le président: Nous allons les prendre dans l'ordre.

Monsieur Proud.

M. George Proud (Hillsborough, Lib.): J'ai écouté votre exposé avec beaucoup d'intérêt, monsieur Bland. En réponse à la question de M. O'Reilly concernant le rapport sur la qualité de vie, vous avez mentionné que vous auriez souhaité ou espéré que le gouvernement y injecte plus d'argent. Je pense que nous avons tous eu la même idée.

Durant notre examen de la politique de défense en 1994, toutes sortes de formules ont été lancées sur la table sur le mode de financement du ministère de la Défense. Une qui a circulé mais qui n'a jamais fait partie de l'étude préconisait qu'un certain pourcentage du PIB soit affecté au ministère, comme une formule préétablie chaque année pour le financement du ministère de la Défense.

En réponse à une question de quelqu'un d'autre, vous avez également dit qu'à l'heure actuelle nous avons l'armée dont nous rêvions, que c'est ce que nous souhaitions et que c'est ce que nous avons. Mais il y en a plusieurs parmi nous, autour de cette table, qui estiment ne pas avoir suffisamment d'argent dans leur budget et nous croyons qu'il devrait exister une meilleure façon et que des fonds supplémentaires devraient être mis à leur disposition. Je me demandais si, avec votre connaissance des opérations actuelles, vous aviez des idées ou des suggestions. Devrait-on avoir une sorte de formule—un pourcentage du PIB ou quelque chose d'autre—pour financer le ministère de la Défense nationale?

M. Douglas Bland: Non, je ne le pense pas. Les mesures de ce genre sont vraiment très imprécises et difficiles à maîtriser, et elles peuvent également être dangereuses car le PIB peut tout aussi bien augmenter que diminuer. Cela revient au point fondamental que le gouvernement doit décider de quelle force armée il a besoin et fournir un budget à cet effet—non pas fournir un budget et voir quel genre de force armée on peut obtenir. Je pense que le gouvernement a probablement décidé dans ce cas quel genre de force armée il souhaite, et il a fourni le budget pour l'avoir. Si nous avons d'autres besoins, alors le gouvernement doit réévaluer quel genre de force armée il souhaite avoir. Je ne pense pas qu'une méthode de financement préétablie soit une bonne idée pour le ministère de la Défense ou pour n'importe quel autre ministère.

M. George Proud: Merci.

Le président: Merci, monsieur Proud.

Monsieur Clouthier, ensuite M. Wood, il reste environ trois minutes.

M. Hec Clouthier (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Lib.): Monsieur Bland, comme vous le savez pertinemment bien, il y a un certain budget que nous devons respecter, mais pour parler plus précisément des méthodes d'achat, je sais que vous avez été militaire pendant 30 ans et que vous êtes le titulaire de la chaire de gestion de la défense. À votre avis absolument impartial, où établiriez-vous des priorités pour dépenser l'argent dans les achats, que ce soit dans l'armée de terre, la marine...? Au fait, je ne devrais pas dire cela, parce que vous avez mentionné avoir servi dans un corps de chars...

M. Douglas Bland: Vous avez la réponse.

M. Hec Clouthier: Sachant de quelle façon le Canada examine la situation et s'il s'agit d'un théâtre des hostilités dans une région quelconque, où dépenseriez-vous l'argent en priorité? J'aimerais simplement le savoir.

M. Douglas Bland: J'établirais des priorités et je dépenserais l'argent pour bâtir un corps expéditionnaire pour les Forces armées canadiennes. Il s'agirait d'une formation unifiée de l'armée de terre, de la marine et de l'aviation, selon les besoins, afin qu'une force canadienne unifiée facilement identifiable puisse se déplacer vers des endroits dangereux et fonctionner sur place, comme l'ont dit les Britanniques dans leurs récentes études sur la défense, pour faire du bien partout dans le monde.

Je ne parle pas forcément de maintien de la paix—au besoin pour le maintien de la paix mais pas nécessairement. Nous pourrions devoir participer à une sorte de conflit, et je pense que la constitution d'un corps expéditionnaire a plus de chance de nous fournir les capacités qui seraient très utiles dans le monde que nous connaissons actuellement.

• 1720

La défense du Canada n'est pas un grand enjeu. La défense de l'Amérique du Nord avec les États-Unis n'est pas forcément un grand enjeu. Être capable de participer à des opérations internationales comme au Zaïre, ce que nous avons essayé de faire en 1996 mais où nous avons échoué... Nous devrions être capables de faire quelque chose du genre. J'estime que c'est là que nous devrions avoir un plan et une stratégie pour bâtir ce genre de structure des forces.

M. Hec Clouthier: Il s'agirait donc de quelque chose qui ressemblerait au Corps des marines aux États-Unis ou à quelque chose de semblable? Quel serait l'effectif militaire nécessaire pour cela?

M. Douglas Bland: Voyons, nous sommes Canadiens, alors ce serait mieux que le Corps des marines.

Des voix: Bravo!

M. Douglas Bland: Je ne serais pas favorable à ce genre de système. Il ne fonctionne pas pour nous, et le Corps des marines n'intervient pas très loin à l'intérieur des terres, et cetera. Il pose certains problèmes. Cela n'a aucun sens de créer une autre force alors que nous avons déjà suffisamment de problèmes avec trois. Je pense que la force pourrait être créée à l'intérieur de la structure de commandement actuelle.

Mais, dans tous les cas, il est difficile de croire que le Canada ne peut pas se permettre une force de 75 000 à 80 000 soldats. Certains n'aiment pas la proposition Canada 21, je le sais, mais bien des gens sont désolés maintenant de ne pas l'avoir, parce que Canada 21, si vous vous en souvenez, proposait une force de 85 000 soldats. Nous serions chanceux d'avoir une telle force. À mon avis, c'est là que nous devrions nous situer.

Un diplomate canadien, qui écrivait à Lester Pearson au début des années 50, lors des débuts de l'OTAN et des Nations Unies, a parfaitement présenté la chose, je pense: le Canada a une petite force armée non pas parce qu'il n'a pas les ressources et les personnes intelligentes dans l'industrie pour avoir une force plus grande mais parce que nous n'avons pas la volonté politique pour le faire. C'est peut-être très bien ainsi. C'est peut-être ce que les Canadiens souhaitent. Mais si vous me demandez ce que nous devrions faire, je crois que nous devrions faire quelque chose avec un peu plus d'enthousiasme qu'à l'heure actuelle.

Le président: Merci, monsieur Clouthier.

Une dernière question rapide de M. Wood. Ensuite nous excuserons M. Bland, car nous aurons quelques questions de procédure.

M. Bob Wood: Merci beaucoup, monsieur le président.

Monsieur Bland, le comité va se rendre au Royaume-Uni au cours des trois ou quatre prochaines semaines. Je veux simplement savoir rapidement quel est votre avis sur la Smart Procurement Initiative au Royaume-Uni?

M. Douglas Bland: Je n'ai aucune opinion là-dessus. Je ne suis pas vraiment au fait de ce projet. Je suis désolé. Je me fierais vraiment à ce que les Britanniques ont à dire à ce sujet.

Le président: Monsieur Bland, merci beaucoup d'avoir partagé votre temps avec nous cet après-midi. Nous apprécions votre témoignage.

M. Douglas Bland: Merci, mesdames et messieurs.

Le président: Chers collègues, il y a trois ou quatre questions de procédure à examiner avant la sonnerie des cloches et la fin de cette séance.

Puis-je attirer votre attention sur la rencontre de jeudi prochain? Elle devait normalement se tenir à 9 heures du matin, mais notre présence est requise à la Chambre des communes pour un discours du président de la République tchèque. Nous devrions nous y rendre un peu avant 10 heures, si bien qu'il y aura un conflit d'horaire direct avec notre réunion.

Je vais demander au greffier de faire un sondage parmi vous, mais je propose que nous pourrions peut-être avoir un déjeuner de travail juste après ce discours, plutôt que d'essayer de glisser la séance le jeudi après-midi. Je vais demander au greffier de communiquer avec vous au sujet du jeudi 29 avril, lorsque le président de la République tchèque sera là. Il vous sondera mais je pense qu'il vaut mieux s'y prendre plus tôt que plus tard, en sachant ce que les membres du comité en pensent. Je propose une réunion à l'heure du déjeuner le jeudi 29 avril, parce que nous ne pouvons pas tenir notre rencontre régulière. C'est le premier point à l'ordre du jour.

Deuxièmement, notre voyage en Angleterre, dont M. Wood vient tout juste de parler, a du plomb dans l'aile à l'heure actuelle, même depuis que M. Hart et moi-même en avons discuté plus tôt aujourd'hui.

Tout d'abord, il y a un problème avec les vols du MDN, pas tellement pour nous emmener là-bas mais plutôt pour nous ramener à la date que nous souhaitons.

• 1725

Cependant, l'autre problème est apparemment que tous les leaders parlementaires—cette information m'a été transmise par le greffier et elle est un peu indirecte, mais je suis certain qu'elle est fiable—se sont entretenus aujourd'hui, et ils sont peu disposés à voir autant de députés voyager à cette époque étant donné la situation tragique qui prévaut au Kosovo, en Yougoslavie.

Je vais m'entretenir à nouveau avec M. Boudria et peut-être que les membres des autres partis pourraient s'entretenir avec leurs leaders parlementaires, mais on m'informe qu'il y a une inquiétude quasi unanime parmi tous les leaders parlementaires de ne pas laisser autant de députés voyager à cette époque en particulier. Peut-être que tous les membres du comité pourraient s'entretenir avec leurs leaders parlementaires et que nous pourrions en reparler.

Le troisième point est que nous avons demandé à M. Bertrand, lors de la dernière séance, d'aller parler au ministre au sujet de la possibilité d'avoir quelques séances d'information. Il a accepté de le faire et de présenter un rapport au comité aujourd'hui. Je vais passer la parole à M. Bertrand et lui demander d'informer le comité des résultats de ses entretiens.

Monsieur Bertrand.

[Français]

M. Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

[Traduction]

M. Proud a demandé la semaine dernière d'avoir plus de séances d'information, et je pense que c'est M. Price qui a dit que les briefings techniques présentés au QGDN étaient acceptables, sauf qu'il était impossible de poser des questions. Après plusieurs appels téléphoniques, j'ai constaté que tout le monde est invité à ces briefings techniques, comme je l'ai dit précédemment, et que n'importe qui peut poser des questions. Elles sont ouvertes à tout le monde. Il y a également beaucoup de renseignements sur le site Web du QGDN, si quelqu'un s'y intéresse.

Je crois que le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international (CPAECI) aura des séances d'information sur le Kosovo deux fois par semaine, alors je ne pense pas que cela changerait grand chose d'avoir davantage de séances d'information pour notre comité.

Le président: Merci pour cette information. J'aimerais simplement faire remarquer que—et ensuite nous passerons aux questions—le ministre sera avec nous mercredi prochain à propos du budget et que les membres du comité auront certainement l'occasion de lui poser toutes les questions pertinentes.

Je tiens simplement à répéter ce que M. Bertrand a dit. Tous les membres sont les bienvenus à ces séances d'information quotidiennes. M. Laurin et moi-même en avons également parlé. Si vous ne pouviez pas poser de questions, peut-être que vous feriez tout aussi bien de les regarder à la télévision, mais si un député est présent, on nous dit qu'il pourra poser des questions aux fonctionnaires compétents.

Est-ce exact?

[Français]

M. Robert Bertrand: Exactement. Des gens de la Défense nationale et des Affaires extérieures sont là pour répondre à toutes les questions des médias et des députés.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Laurin.

M. René Laurin: Monsieur le président, cela ne me satisfait pas beaucoup. Le matin, ce sont des séances d'information destinées aux journalistes. Nous sommes des parlementaires et nous n'avons pas les mêmes intérêts que ces journalistes. J'aimerais que nous ayons nos propres séances d'information parce que nous pouvons avoir des questions différentes à poser sous des angles différents. Quand on voudra s'adresser aux journalistes, on fera une autre séance. Je ne pense pas qu'on puisse nous traiter comme des journalistes et nous dire de venir à la séance des journalistes. Il y a des journalistes qui ne seront pas contents parce que nous allons leur enlever des questions, et nous n'aurons peut-être pas assez de temps pour poser toutes nos questions parce que les journalistes auront pris trop de temps. Je ne pense pas que nous devions nous satisfaire de cette formule.

D'autre part, la semaine prochaine, s'il y a budget, on ne doit pas considérer cette séance comme une séance d'information sur le Kosovo. On a eu l'expérience du ministère des Affaires étrangères qui a fait cela en même temps que son budget. Toutes les questions ont été posées sur le Kosovo et on a escamoté le budget. Je ne voudrais pas que la même chose se produise pour le ministère de la Défense. Il s'agit de deux sujets différents qui méritent qu'on leur accorde tout le temps nécessaire.

Monsieur le président, j'aimerais qu'on revienne tout à l'heure sur le voyage en Angleterre. On n'a aucune autre possibilité. J'aimerais que vous y reveniez plus tard.

Monsieur le président, je souhaite qu'on accède à notre demande de séances d'information, quitte à ce que ça soit fait conjointement avec le Comité des Affaires étrangères, ce à quoi je ne vois pas d'objections. Ces séances doivent durer plus d'une demi-heure et doivent avoir lieu plus d'une fois par semaine.

• 1730

Le président: Merci, monsieur Laurin.

[Traduction]

Je crois comprendre, comme l'a dit M. Bertrand, que le Comité des affaires étrangères et du commerce international envisage ces séances d'information deux fois par semaine. Si les membres de notre comité le souhaitent, nous pourrions demander à tenir des réunions conjointes. Je ne suis pas certain que cela soit nécessaire. Toutefois, j'ai assisté à la réunion d'aujourd'hui, tout comme un certain nombre d'entre nous, dont M. Laurin, et c'était assez clair qu'il s'agira de séances d'information d'une demi-heure... peut-être trop courtes.

Votre demande est tout à fait appropriée. M. Proud aimerait poser une question et ensuite j'aimerais demander à M. Bertrand d'y répondre. S'il y a une motion en bonne et due forme à un moment quelconque, et bien nous accepterions une telle motion.

Monsieur Proud, une question sur ce sujet, et ensuite M. Bertrand.

M. George Proud: Ce n'était pas vraiment une question. J'allais tout simplement suggérer à M. Laurin d'avoir des séances d'information deux fois par semaine avec le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international. Nous sommes tous invités et puis, comme ils le disent, les briefings se déroulent tous les jours au QGDN. Je ne tiens pas particulièrement à aller là-bas non plus, mais je pense que les deux séances d'information que nous avons par semaine au Comité des affaires étrangères seront assurément suffisantes... pour moi en tout cas.

Le président: Très bien. Merci.

Monsieur Bertrand.

M. Robert Bertrand: M. Proud a dit à peu près tout ce que je m'apprêtais à dire. Nous ne voulons non plus une surdose d'informations, monsieur le président. Avec ces briefings techniques quotidiens au QGDN, plus les séances d'information du CPAECI... Il y aura vraisemblablement des gens de la Défense nationale et je suis convaincu qu'ils seraient capables de répondre aux éventuelles questions de notre part ou d'autres députés.

Le président: Monsieur Laurin, à propos de la rencontre avec le ministre la semaine prochaine, je ne proposais pas qu'elle soit considérée comme une séance d'information, mais c'est une occasion lorsque l'honorable ministre est là à propos du budget; je suis certain qu'il répondra à toutes les questions que les membres du comité voudront bien lui poser, mais je ne proposais que cela soit considéré comme une séance d'information.

Voilà pour la question des séances d'information, à moins qu'une motion ne soit proposée en bonne et due forme. Je ne vois pas comment je pourrais en disposer autrement. Si les membres souhaitent vraiment présenter une motion ou quelque chose par écrit, avec nos règles, je l'examinerai, mais je pense que, peut-être pour un certain temps, nous devrions essayer la démarche que M. Bertrand a expliquée et voir si elle est satisfaisante.

Monsieur Laurin, vous avez mentionné que vous vouliez revenir à la question du voyage en Angleterre. Je peux faire un bref résumé à ce sujet. Des obstacles surgissent à propos du calendrier de ce voyage, tout d'abord avec les dates des vols militaires, et maintenant avec l'inquiétude de tous les leaders parlementaires à propos du voyage de tant de députés à cette époque. Les perspectives semblent plus favorables à un déroulement de ce voyage à l'automne. Je ne sais pas.

Souhaitiez-vous soulever un point au sujet du voyage, monsieur Laurin?

[Français]

M. René Laurin: Oui. Je m'attendais à ce qu'on fasse une suggestion. On envisage de reporter le voyage à plus tard. C'est cela? Si c'est cela, je n'y vois pas d'objections.

[Traduction]

Le président: Il me semble qu'étant donné les obstacles qui se dressent sur notre chemin, c'est probablement la décision la plus sage, mais j'aimerais que tous les membres s'entretiennent avec leurs leaders parlementaires. Ensuite, nous aurons une discussion informelle à ce sujet. D'accord?

Y a-t-il d'autres questions?

[Français]

Oui, monsieur Laurin.

M. René Laurin: Concernant les séances d'information, devons-nous considérer que la réponse de M. Bertrand est l'offre qui nous est faite, à savoir aller aux séances d'information du matin? Est-ce définitif? Si c'est cela, monsieur le président, je vais annoncer au comité que je présenterai une motion écrite lors de notre prochaine assemblée; j'aimerais que ce soit à l'ordre du jour.

[Traduction]

Le président: Très bien. Il semblerait que ce soit l'offre ou le processus qui a été expliqué.

Monsieur Bertrand.

[Français]

M. Robert Bertrand: Monsieur Laurin, permettez-moi de vous donner une précision. Il y a les briefings techniques qui sont donnés tous les jours au quartier général de la Défense nationale, et il y a aussi le Comité des affaires extérieures qui donne un briefing deux fois par semaine. Il y aurait là des gens de la Défense. D'après moi, il y a assez d'information pour ceux qui en veulent.

• 1735

M. René Laurin: Ce n'est pas notre opinion, monsieur le président. Nous présenterons une motion à la prochaine assemblée. Prenez-en note.

[Traduction]

Le président: Très bien. Nous avons un avis oral. Nous attendrons la motion écrite et nous l'étudierons en comité.

Merci beaucoup.

La séance est levée.