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NDVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON NATIONAL DEFENCE AND VETERANS AFFAIRS

COMITÉ PERMANENT DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES ANCIENS COMBATTANTS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 19 novembre 1997

• 1538

[Traduction]

Le coprésident (M. Bill Graham (Toronto—Centre—Rosedale, Lib.)): La séance est ouverte. Je tiens à préciser pour le bénéfice des téléspectateurs qui se joignent à nous aujourd'hui qu'il s'agit de la deuxième séance conjointe du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international et du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants de la Chambre des communes; la question que nous examinons est la suivante: le Canada doit-il maintenir ses effectifs militaires en Bosnie-Herzégovine au moins jusqu'au 30 juin 1998?

Hier matin, nous avons entendu des témoins représentants de divers secteurs au Canada. Comme vous le savez, huit membres des deux comités—quatre du Comité de la défense nationale et quatre du Comité des affaires étrangères—se sont rendus en Bosnie la semaine dernière pour recueillir des témoignages sur le vif sur le théâtre des opérations. Aujourd'hui, la discussion s'engagera entre les membres du comité. On vous a remis une ébauche de résolution, une ébauche de rapport et une résolution.

M. Bertrand, notre coprésident et président du Comité de la défense nationale, et moi proposons de tenir un débat sur les principes généraux, sur l'utilité de maintenir nos soldats en Bosnie. Après ce débat, nous nous intéresserons au libellé même de la résolution. S'il y a accord général sur la résolution en dépit de quelques objections mineures, nous pourrons l'adopter rapidement cet après-midi. Si nous éprouvons quelques problèmes de terminologie, nous pouvons toujours interrompre la séance pour quelques minutes afin d'aplanir ces difficultés.

Notre objectif est d'adopter la résolution avant 17 h 30. N'est-ce pas, monsieur le coprésident?

Le coprésident (M. Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, BQ)): C'est exact.

Le coprésident (M. Bill Graham): Permettez-moi de vous présenter les personnes qui sont avec nous aujourd'hui non pas pour témoigner, mais pour répondre aux questions. Nous sommes heureux d'accueillir M. Jim Wright, directeur général, Division de l'Europe centrale, de l'Est et du Sud au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international qui nous a accompagnés en Bosnie. Nous accueillons également M. Charles Court, directeur adjoint pour l'OTAN, ministère des Affaires étrangères. Du ministère de la Défense nationale et des Anciens combattants, le lieutenant-général Crabbe et le contre-amiral King. Merci à vous deux d'être là. De l'ACDI, nous avons M. Charles Basset de la Direction de l'Europe centrale.

• 1540

[Français]

Le coprésident (Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, Lib.)): Pour résumer ce que vient de dire M. Blaikie, nous espérons, cet après-midi, d'abord discuter si nos Forces armées vont rester jusqu'à la fin du mois de juin 1998 et, si oui, examiner ensuite les propositions contenues dans le rapport et l'adopter cet après-midi.

Ce que M. Blaikie et moi avons discuté avant de commencer, c'est le temps que chaque personne pourrait utiliser pour faire connaître sa position, soit une présentation maximale de cinq minutes.

Sur ce, nous pouvons commencer; le débat est ouvert.

[Traduction]

Le coprésident (M. Bill Graham): Quelqu'un veut commencer? Vous voulez le faire, madame Beaumier?

Mme Colleen Beaumier (Brampton-Ouest—Mississauga, Lib.): Inscrivez mon nom en premier sur la liste. Donnez-moi une minute.

Le coprésident (M. Bill Graham): Nous pouvons inscrire votre nom, mais je commencerai, si vous êtes d'accord. Je voulais faire quelques observations concernant le voyage, je vais donc les faire maintenant, ce sera fait.

À mon avis, nous devons tenir compte de deux choses. Premièrement, il faut voir quelle est la nature du problème, deuxièmement, quelle solution on y propose. Nous le savons tous, le problème est extrêmement complexe. Comme le dit Michael Ignatieff dans son ouvrage intitulé Blood and Belonging: Journeys into the New Nationalism, la situation actuelle résulte d'une longue et tragique suite de conflits religieux, où certains font ou ont fait les frais de centaines d'années d'invasions, de conversions et de dictatures.

Les conflits des dernières années doivent être interprétés comme une autre conséquence d'une longue série de difficultés. La question qu'il faut se poser est la suivante: devons-nous baisser les bras et dire que tout cela ne finira jamais, ou au contraire, relever nos manches et créer les conditions qui empêcheront une reprise des hostilités? Dans les deux cas, il faut se demander quel est le rôle de nos soldats qui sont actuellement là-bas?

Moi, j'opte pour la deuxième solution. Je suis libéral et optimiste. Je suis d'accord avec le professeur Cohen qui, dans sa sagesse, nous a dit hier qu'il s'agissait d'une situation très complexe et que créer une société démocratique et pluraliste ne serait pas facile et n'apporterait pas non plus une solution rapide au problème. Je suis également d'accord avec lui que quelles que soient les perspectives à long terme, il faut garder nos soldats là-bas pour l'instant. Si on les retire aujourd'hui, on se condamnera inévitablement à l'avenir à une intervention plus coûteuse et plus sanglante.

J'ai eu le grand privilège, en compagnie de Robert, de nos collègues du Comité de la défense et de notre propre comité, de visiter la Bosnie-Herzégovine la semaine dernière. Nous avons eu l'occasion de voir nos soldats. Nous avons tous été d'accord pour dire que ce sont des militaires de la plus haute qualité, des professionnels, et que la tâche qu'ils exécutent est extrêmement complexe, sans compter qu'ils réussissent en dépit de circonstances très difficiles. Nous avons vu qu'ils pouvaient servir de liens entre les autres soldats qui sont là-bas. Et, il faut le signaler, n'est-ce pas Robert, ils nous ont dit vouloir rester là-bas et finir le travail.

Nous avons rencontré les représentants de nos ONG, de Care Canada, de l'Université Queen et de l'ACDI. Nous avons rencontré également des policiers de la Gendarmerie royale du Canada et compris la nature de leur travail là-bas. Il y avait des agents du comté de Waterloo. Il y en aura bientôt de l'agglomération de Toronto et comme me le rappelle Mme Augustine, d'Etobicoke—Lakeshore aussi.

J'espère qu'ils porteront tous l'uniforme que vous portez sur la photo, madame Augustine.

• 1545

Nous avons eu l'occasion de rencontrer nos commandants de la SFOR, des gens avertis, compétents et en mesure de faire respecter les Accords de Dayton.

Cela dit, il me semble que la résolution qui nous a été soumise jette les bases de nos travaux d'aujourd'hui. Le rapport précise ce que nous avons vu. C'est évident, vous l'avez en main.

On y recommande de garder nos soldats en Bosnie-Herzégovine jusqu'à la fin de leur mandat. Pour les raisons que j'ai données tout à l'heure, je suis d'accord.

C'est aussi pour les raisons données par John Graham au comité hier. Il évoquait la crédibilité de la présence du Canada sur le théâtre européen. Grâce à leur intervention en Europe aujourd'hui, nos soldats sont en train de récupérer pour nous ce que nous avons perdu, selon certains, à cause des années de compressions et de retraits de troupes du théâtre européen.

Songez aussi aux répercussions qu'aurait sur les autres militaires notre retrait de la Bosnie-Herzégovine aujourd'hui. Vingt-sept pays sont représentés sur place. Réfléchissez aux conséquences que cela aurait sur la décision qu'ils devraient prendre avant juin prochain si on leur disait aujourd'hui qu'on rapatrie nos soldats avant le mois de juin.

Deuxièmement, la résolution stipule que nous recommandions au gouvernement d'autoriser l'OTAN à prévoir le besoin éventuel de troupes de relève. Cela me paraît une recommandation logique. Cela ne veut pas dire que nous devons être là. Cela ne veut pas dire que nous devons envoyer 1 200 soldats ni que nous ayons quoi que ce soit à faire.

Ça signifie cependant que, s'il devait arriver quelque chose d'ici au mois de juin—je suis sûr qu'on peut en parler à nos collègues militaires ici—alors, nous ne pouvons attendre le mois de mai pour nous mettre à réfléchir à la question. Nous devons le faire maintenant. Nous devons permettre aux autorités de l'OTAN de le faire. C'est ce qu'on nous a dit dans toutes nos réunions avec les autorités de l'OTAN quand nous avons rencontré les commandants de la SFOR à Sarajevo la semaine dernière.

Quatrièmement, on reconnaît dans la résolution que le processus de reconstruction civile est amorcé là-bas, et que la SFOR joue son rôle en veillant à ce que cette reconstruction continue. On ferme les stations de télévision qui prônent la haine; on ferme les postes de police qui ne jouent pas leur rôle mais qui sont autant d'unités militaires pour le compte de dictateurs ou de dictateurs potentiels. La SFOR est là pour s'assurer que les conditions que nous estimons tous nécessaires au succès des Accords de Dayton nous permettront de récompenser ceux qui se rallient à nos idées et de punir les autres.

Donc, sans nous leurrer sur l'énormité de la tâche, je crois que nous pouvons donner suite aux mesures établies dans cette résolution. Je crois qu'elles sont justifiées. Je crois également qu'elles permettront à la Bosnie-Herzégovine de poursuivre le processus enclenché pour l'établissement d'une société stable et démocratique. C'est la seule garantie de paix. Ces mesures sont conformes aux normes du Canada dans les affaires internationales et à notre tradition de gardiens de la paix qui nous a valu une réputation méritée dans ce domaine.

Voilà, mesdames et messieurs les membres du comité, mon opinion personnelle. Je me suis dit qu'il était bon, si vous êtes d'accord, que votre président fasse état des résultats et des conclusions qu'il a tirées de notre voyage. Je sais que d'autres auront des opinions différentes, mais je voulais au moins ouvrir les discussions par ces observations préliminaires.

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Mme Beaumier, M. Mills et M. Turp.

M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Pour ce qui est de la première condition, j'aimerais simplement obtenir une précision.

Le coprésident (M. Bill Graham): Oui.

M. Sarkis Assadourian: Vous dites qu'il n'est pas nécessaire que le gouvernement continue de déployer les CF-18. Le 18 juin 1998, l'entente arrive à échéance. Donc, vous proposez que l'on retire les CF-18 après le mois de juin 1998, mais que la mission se poursuive quand même. N'est-ce pas?

Le coprésident (M. Bill Graham): C'est exact. La mission se poursuivra sans les appareils parce que l'entente prévoit déjà qu'on les rapatriera. Il n'est donc pas question de nous engager à de nouvelles opérations aériennes là-bas.

M. Sarkis Assadourian: En juin 1998, la force aérienne cessera ses opérations.

Le coprésident (M. Bill Graham): Est-ce qu'on veut confirmer cela? Pourquoi ne pas demander à l'amiral King? Il pourrait peut-être éclairer notre lanterne.

M. Sarkis Assadourian: Simplement une précision, Amiral.

Le contre-amiral J.A. King (directeur général, Politique de sécurité internationale): Merci, monsieur le président.

Lorsque nous avons demandé au gouvernement d'autoriser le premier déploiement, il n'était pas prévu d'opérations aériennes. Ce sont les commandants de l'OTAN qui nous ont demandé plus tard au cours de la mission si nous pouvions les aider en fournissant des avions. Nous avons sollicité l'autorisation du gouvernement qui a accepté de déployer des appareils pendant trois mois environ, ce volet de la mission vient de se terminer. Les appareils sont rentrés. Si on nous présentait à nouveau la même requête, nous demanderions l'autorisation au gouvernement, mais pour l'instant, nos plans ne prévoient pas l'affectation de forces aériennes, mais plutôt de forces terrestres uniquement.

• 1550

Le coprésident (M. Bill Graham): Monsieur Mills.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Merci, monsieur le président.

J'aimerais faire quelques observations préliminaires à ce sujet. Cela nous permettra peut-être de régler certains des problèmes que nous pourrions avoir.

D'abord, je pense qu'il faut examiner le problème même, comme nous l'avons fait de façon très attentive. Comme vous le savez, Mme Beaumier et moi nous sommes intéressés aux élections et à leur déroulement; nous avons examiné tous les aspects de la question. Et aujourd'hui, j'aimerais poser les questions auxquelles, je crois, les Canadiens veulent des réponses, non pas tellement en ce qui concerne les six mois, mais la prorogation du mandat, les recommandations que nous allons formuler. Je tiens vraiment à ce que l'on en discute parce que les gens posent les questions suivantes: la présence du Canada fait-elle vraiment une différence? A-t-elle fait une différence? De quoi s'agit-il exactement? En quoi la situation là-bas diffère-t-elle de celle en Irlande, de celle d'autres guerres civiles? Que faire des problèmes dans d'autres régions du monde comme le Nigeria, le Rwanda, l'Irak, etc. où nous devons peut-être nous impliquer?

Je crois qu'il faut répondre à ces questions. Le professeur Cohen et, certainement, John Graham sont allés sur place, ils savent ce qui se passe: ils ont précisé également que les Accords de Dayton étaient une solution forcée à un problème. On les a contraints à signer, les Américains puissants ont dit: «Signez l'Accord, les élections approchent, signez ça, finissons-en et nous allons nous arranger pour que ça marche.»

Les Accords de Dayton ne se sont pas embarrassés de sentiments ou d'histoire. On n'a pas tenu compte du problème ethnique qui existe là-bas, du fait que ces gens-là ont été dominés pendant 1 500 ans. On n'a pas vraiment étudié ces problèmes. Les États-Unis ont dit qu'ils allaient faire marcher ça en montrant leur gros bâton à ces peuples pour les faire obéir.

Je crois que nous sommes tous d'accord... du moins ceux de notre groupe, lorsque nous nous sommes parlé de ces questions... pour dire qu'une demi-heure après notre départ, si nous partions maintenant, la guerre reprendrait. Je suis convaincu que personne ici ne souhaite cela.

Je suis allé dans les écoles et j'ai recueilli des commentaires des enfants. Je les ai en main et je les ai fait traduire. Voici ce que disent les enfants: «Tous les jours, ils tuent mes amis, ceux que j'aime.» «Sans armes, les enfants ne peuvent pas riposter.» «Les enfants meurent d'infections et de maladies.» «Beaucoup de mes amis sont morts en venant à l'école, en traversant les rues, ils ont été frappés par des tireurs embusqués.» «Nous allons à l'école parce que c'est la seule façon de lutter contre cette guerre.» «Quand je m'en viens à l'école, je cours pour échapper aux tireurs embusqués. Ils nous tirent dessus au mortier. La ligne de front passe juste derrière mon immeuble.»

Je pourrais vous lire les pages de récit de ces jeunes enfants, des enfants de huit, dix ou treize ans. Nous avons visité diverses écoles secondaires et nous avons parlé avec les jeunes. Je leur ai demandé leur avis. Ils m'ont répondu: «L'avenir est prometteur. Nous pouvons remettre le pays sur pied, mais il nous faut du temps, beaucoup de temps. C'est impossible pour mes parents. Mes parents ne parlent que du massacre de leurs fils ou de leurs filles, de leurs oncles, de leurs tantes, de leur mère et de leur père.»

Voilà la vérité et la tragédie brutales d'endroits comme la Bosnie.

• 1555

Il est facile pour nous de dire d'ici que nous prolongerons le mandat de six mois et d'en être contents, mais est-ce que nous abordons vraiment le problème et est-ce que ça changera effectivement quelque chose? Si l'on quitte la Bosnie dans six mois plutôt que maintenant, est-ce que les tueries ne seront que retardées de six mois?

Ce sont là des questions extrêmement difficiles. À mon avis, ce sont des questions d'ordre humanitaire que nous devons nous poser. Nous nous adressons aux experts. Nous accueillons d'autres experts à qui nous pouvons poser la question. Pendant combien de temps devrions-nous rester là-bas pour éviter à ces enfants ce genre d'avenir? Je pense que nous obtiendrons à peu près la même réponse qu'hier: deux ans, cinq ans, trente ans, deux générations peut-être, peut-être toujours. Mais il nous faut poser cette question et nous devons dire aux contribuables canadiens combien cela coûtera. Nous devons les convaincre que c'est un bon investissement d'engager nos soldats qui font un travail merveilleux là-bas, un investissement qu'ils peuvent se sentir heureux de faire.

Je ne crois pas que nous l'ayons fait, que nous ayons dit aux Canadiens ce que nous faisons en Bosnie et comment nous le faisons. Je crois que notre comité a la responsabilité de le faire et je doute qu'au cours des deux prochaines heures nous puissions y arriver. D'après notre motion, je crois que nous devons aller plus loin.

L'Europe devrait-elle s'impliquer encore plus? Pourquoi ne pas le demander aux intéressés? Que dire des nationalismes intransigeants de ce pays? Est-ce que la partition est la meilleure solution? Nous n'avons pas posé ces questions. Devrait-il s'agir d'une partition temporaire, d'une partition permanente, est-ce que les États européens veulent même avoir un pays musulman ou un pays morcelé chez eux? Donc, le problème est d'ordre religieux, culturel, économique. Il y a beaucoup de réponses à chercher. Si je reviens à la motion, ce sont ses deux dernières parties qui me dérangent.

Pour commencer, je ne connais pas grand-chose aux avions de chasse et je pense que ces avions sont... Si nous n'en avons plus besoin, c'est parfait.

La seconde partie ne m'ennuie pas outre mesure, à savoir que nous devrions prolonger le mandat jusqu'en juin 1998. Ce qui me fait hésiter toutefois, c'est de donner l'impression que nous appuyons plus ou moins la notion que si les planificateurs de l'OTAN nous demandent de rester... Je ne voudrais pas une répétition de ce qui s'est produit cette année, car le 18 ou le 19 novembre, nous étions là dans le foyer à écouter deux ministres nous dire que nos soldats seraient rentrés pour Noël 1997, c'était absolument certain, sûr à 100 p. 100. Il n'y avait pas de doute là-dessus. Et je crains seulement qu'en mai ou en juin 1998, on soit encore là à se faire dire qu'en décembre 1998, quoi qu'il arrive, c'est absolument certain que nos soldats seraient de retour. Des déclarations pareilles n'aideront jamais à faire comprendre ce problème au public et notre engagement.

Donc, à mon avis, nous devons discuter de la durée du mandat, du temps que nos soldats passeront là-bas. Et je ne pense pas que le numéro trois ajoute grand-chose.

Pour ce qui est du numéro quatre, la reconstruction a été entreprise dans la fédération et ce, parce que les Américains ont décidé qu'un camp, la fédération, devait être renforcé, mais que l'autre, les Serbes, était déjà suffisamment fort. Prendre ce genre de décisions, vouloir créer la paix en armant un camp et en lui donnant une formation militaire... Partout où ils ont fait ça avant, ça a raté.

Aujourd'hui nous parlons de reconstruction; or, je crois comprendre que 95 p. 100 de l'aide canadienne va aux Croates musulmans et 5 p. 100 va aux Serbes. C'est donc dire que sur le plan de l'économie, de la reconstruction et de l'ACDI, nous aidons un camp mais nous n'aidons pas l'autre à se mettre au même niveau. Le seul problème, c'est que nous sommes en train de faire basculer les choses dans l'autre sens. Un camp va se rendre compte qu'il tient maintenant le gros bout du bâton.

• 1600

Alors, si on parle de poursuivre la reconstruction, quelles mesures allons-nous prendre pour équilibrer la situation des deux camps? Y aura-t-il toujours deux camps? Ou encore est-ce qu'on finira par en avoir trois? Selon moi, il faudrait examiner le mandat, les coûts et la durée prévue de cette mission.

Je vais m'en remettre à mon critique en matière de défense et dire qu'en ce cas, il nous faut voir si les forces armées peuvent exécuter le mandat que nous leur confierons. Peuvent-elles le faire? Continuent-elles de réduire leurs effectifs? Peuvent-elles mener à bien un autre plan à long terme dans cette région, si l'on garde à l'esprit le Nigeria, le Rwanda et d'autres points chauds? Faut-il adopter un deuxième volet aux Accords de Dayton? Ou devrions-nous songer à un Accord d'Ottawa, partie un? Devons-nous adopter une toute nouvelle initiative en remplaçant une politique forcée par une politique constructive?

Ce que j'essaie de vous faire comprendre, monsieur le président, c'est que dès le départ, nous avons beaucoup de questions auxquelles il faut répondre avant d'apposer notre signature sur un autre document qui nous donnera bonne conscience lorsque nous quitterons cette salle. Nous n'avons pas abordé un seul des problèmes que j'ai énumérés. C'est bien bon de jouer les boy-scouts—ça nous permet de dormir tranquilles—mais je ne crois pas que nous pourrons avoir l'esprit tranquille tout en sachant ce qui se passe en Bosnie, et sachant qu'on ne touche pas vraiment au problème. Je ne crois pas que nous servions très bien les contribuables en procédant de cette façon.

Voilà, vous connaissez notre point de vue. Je sais que la situation inquiète tout le monde ici. Je ne crois pas faire preuve d'esprit partisan. Nous voulons tous adopter une politique humaine et compatissante.

Le coprésident (M. Bill Graham): Merci, monsieur Mills.

[Français]

Monsieur Turp.

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Merci, monsieur le président. D'abord je dois vous dire que je suis heureux de retrouver ici aujourd'hui quelques-unes des personnes qui nous ont accompagnés en Bosnie. Je vois M. Wright, le colonel Hug. Comme le président, j'ai beaucoup apprécié l'occasion qui m'a été donnée, comme à d'autres parlementaires, d'aller sur place en Bosnie, observer la situation.

Contrairement à ce que vient de dire mon collègue, le député de Red Deer, j'ai apprécié l'occasion qui m'a été donnée d'aller voir et apprécier la situation en Bosnie au nom des citoyens, pour leur faire rapport sur l'état des choses et partager avec eux notre propre interprétation des faits au cours de ce débat en comité, lequel sera public puisque notre président et nos coprésidents ont bien voulu qu'il soit télédiffusé.

Je pense qu'il est tout à fait souhaitable que des débats comme celui-ci soient transmis, partagés avec la population du Canada et du Québec, de façon à ce que l'on soit plus conscients de l'importance des missions de maintien de la paix dans la communauté internationale.

J'ai trois séries de commentaires à faire sur ce qui nous concerne aujourd'hui, d'abord sur le processus qui nous amène à examiner cette question et sur le renouvellement du mandat du comité. Je voudrais aussi faire quelques observations sur la situation en Bosnie et enfin parler des recommandations dont le comité est saisi.

Je parlerai d'abord du processus. Je pense qu'il était fondamental que nous soyons invités à aller sur place et je crois que le ministère des Affaires étrangères et le ministère de la Défense nationale ont pris une fort bonne décision en choisissant de commencer cette étape de la révision par un voyage des parlementaires. Je dois saluer ceux qui ont préparé le voyage, ceux qui l'ont organisé et notamment les représentants des Forces armées canadiennes qui ont assuré la sécurité des membres de cette délégation et ont vu à vraiment leur faire voir les choses qui devaient être vues pendant ce voyage.

• 1605

Je pense qu'il était aussi très utile que nous entendions quelques témoins, comme nous l'avons fait hier, pour avoir un aperçu plus scientifique de l'avenir de la Bosnie. Je dois vous avouer avoir été particulièrement impressionné par le témoignage du professeur Cohen et l'avoir beaucoup apprécié car il nous a très bien décrit la situation et nous a démontré à quel point il connaît et comprend la Bosnie telle qu'elle est maintenant. Le fait d'entendre une présentation aussi objective que possible du point de vue scientifique, qui nous a présenté la situation sous un angle très critique, a été très utile au comité.

Je crois aussi que le débat d'aujourd'hui est un débat qui s'impose et j'espère qu'il permettra au comité d'atteindre le consensus sur une question aussi importante.

Nous avons discuté, vous vous en rappellerez, dans l'autobus qui nous menait de Banja Luka jusqu'à Sarajevo, d'un souhait que je formulais; lorsqu'il est question de renouveler le mandat d'une opération de maintien de la paix ou d'en créer une nouvelle, que le débat ne se tienne pas seulement en comité, mais qu'il soit étendu à la Chambre des communes.

Peut-être, dans ce cas-ci où il s'agit seulement de renouveler un mandat pour un certain nombre de mois, suffira-t-il de tenir ce débat en comité. Toutefois, lorsqu'il s'agira, soit de mettre fin à une opération, comme ce fut le cas pour Chypre il y a quelques années, soit de participer à une nouvelle opération de maintien de la paix, je pense qu'il faudra que la Chambre des communes en soit saisie afin que le débat soit rendu public et plus accessible, malgré les difficultés qu'il y a à tenir un débat informatif à la Chambre des communes.

Et maintenant, quelques commentaires sur la situation qui prévaut en Bosnie: nous avons constaté la dévastation de ce pays. Cette dévastation est générale dans tous les coins du pays que nous avons visités. Nous avons constaté jusqu'à quel point les dommages à la propriété sont considérables. Nous savons qu'il y a eu au-delà de 560 000 morts pendant cette guerre. Nous savons que des millions de personnes ont été déplacées et, à la face du monde et aux citoyens qui nous écoutent, il est important de démontrer jusqu'à quel point la situation dans ce pays est grave et que c'est là la raison pour laquelle la communauté internationale a voulu intervenir.

En même temps, nous avons constaté les efforts de reconstruction. Nous avons vu des maisons en construction, nous avons vu des hôpitaux commencer à fonctionner, nous avons vu des écoles en train d'être réparées, entre autres par des militaires. Nous avons vu s'améliorer la sécurité. Nous avons pu nous promener tout à fait librement dans les rues de Sarajevo par un beau lundi soir, un beau mardi soir, et nous avons constaté que la présence policière prend le relais d'une présence militaire qui était sans doute plus agressive et plus intimidante pour la population.

Ce que j'ai constaté, quant à moi, c'est que si cette reconstruction, si cette démocratisation qui est en cours,—qui connaît certainement des réussites, mais aussi beaucoup de ratés,—si la consolidation d'un État que les accords de Dayton ont voulu multi-ethniques...

Les accords de Dayton ont voulu que cet État soit multi-ethnique. Les accords de Dayton ont réfuté la partition comme solution, et la communauté internationale, l'Assemblée générale des Nations unies et son conseil de sécurité ont été en accord avec cette façon de voir les choses. Ce ne sont pas seulement des visées et des vues américaines sur l'avenir de la Bosnie.

Donc, si cette reconstruction, cette démocratisation, cette consolidation a été possible, c'est bien parce que la SFOR est là et que cette force de stabilisation permet la réussite de ces efforts malgré les limites de cette réussite. Nous avons constaté jusqu'à quel point les Forces armées canadiennes jouent un rôle déterminant, à tout le moins dans une partie de la Bosnie et fournissent cet appui dont un général britannique, que le ministre de la Défense a d'ailleurs mentionné cet après-midi à la période des questions, et souligné les grandes qualités.

• 1610

En ce qui concerne les recommandations, j'ai le plaisir de vous dire ici que le Bloc québécois va appuyer les recommandations présentées au comité. J'ai consulté les députés responsables du dossier des affaires étrangères ce matin en caucus et l'ensemble de la députation du Bloc québécois est favorable au renouvellement du mandat des Forces armées canadiennes en Bosnie. Sans doute pourrons-nous parler tout à l'heure du libellé précis des recommandations, mais dans l'ensemble, le Bloc québécois est d'avis que cette participation canadienne doive être renouvelée.

Le Bloc souhaite que ce comité reste saisi de cette question-là puisque, très bientôt, la question du renouvellement du mandat de la SFOR ou de la création d'une nouvelle opération de maintien de la paix va se poser. Il est essentiel, à mon avis, que ce comité continue de se pencher sur la question, qu'il suive l'évolution de la situation en Bosnie et qu'il puisse, dans les prochains mois, faire appel à tous ceux qui connaissent bien la situation et sont capables d'éclairer le comité sur la suite des événements.

Enfin, c'est vraiment une question de choix et de priorité. Le Canada s'enorgueillit, avec raison à mon avis, de l'héritage de Lester B. Pearson. Les Québécois, les souverainistes comme moi, les partis que sont le Parti québécois et le Bloc québécois partagent ces valeurs fondamentales de paix et de sécurité, sont d'avis que la Charte des Nations unies et les principes de maintien de la paix et de la sécurité sont des principes qui doivent être défendus vigoureusement par la communauté internationale et par tous les États qui forment cette communauté internationale.

Pour cette raison-là, il vaut la peine qu'un État investisse dans la paix et dans la sécurité; il vaut la peine que ces forces armées soient mises au service de la paix et de la sécurité et je crois que, dans le cas qui nous occupe, la SFOR est mise au service de la paix et de la sécurité.

Le coprésident (M. Bill Graham): Merci beaucoup, monsieur Turp. Monsieur Richardson.

[Traduction]

M. John Richardson (Perth—Middlesex, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis heureux de prendre la parole devant vous et de passer en revue quelques preuves tangibles de changements que nous avons pu constater de visu depuis notre visite en 1994.

En 1994, tout déplacement était extrêmement restreint; des tireurs d'élite, des mortiers, de l'artillerie tiraient de tous les côtés, 24 heures sur 24; et il y avait aussi des dommages collatéraux aux ponts et aux infrastructures, à tout ce qui pouvait être une cible pour les Serbes, les Bosniaques ou les Croates.

L'escalade n'a pas tardé et d'un côté comme de l'autre on a cherché à se venger. On tuait tout ce qui vivait et dans bien des cas, on jetait dans des fosses communes les cadavres des exécutés. Partout régnait la peur. On se méfiait de tous. Ensuite, la guerre a éclaté quand l'armée croate s'est avancée dans l'ancien territoire de Bosnie, pour en annexer une bonne partie.

Durant ce temps, on procédait au nettoyage ethnique. Les Musulmans ont quitté des territoires qu'ils habitaient depuis longtemps, pour laisser la place aux Croates. Les Serbes ont quitté à leur tour, les Musulmans se sont installés. On assistait à un va-et-vient pour prendre possession de nouvelles maisons ou en détruire. C'était la pagaille générale, il n'y avait plus d'ordre public et plus de pardon.

Lorsque nous sommes retournés cette année, oui, il y avait des soldats, mais cette fois-ci ce n'étaient plus des Croates, ni des Serbes, ni des Bosniaques. Même s'ils avaient le droit de garder leurs milices et de les entraîner, ils devaient respecter les conditions les plus strictes. Nous avons vu des gens se déplacer sur les autoroutes, nous avons vu et entendu des gens revenir dans les villages où l'on avait procédé au nettoyage ethnique.

• 1615

Nous avons entendu des tirs sporadiques, mais jamais comme en 1994. On avait beaucoup reconstruit—de nouvelles autoroutes, de nouveaux ponts, des écoles—et il y a un retour à la vie normale. Pour ceux qui ont eu la chance de faire la comparaison, le changement entre 1994 et la période de guerre était évident.

Le cessez-le-feu est en place. Les gens reviennent réclamer leurs maisons. Ce qui importe le plus, c'est qu'il y a eu des élections libres. Des élections libres ont eu lieu en Bosnie, les gens en ont accepté le résultat. D'autres élections dans ce que l'on appelle Srpska, la deuxième partie de la confédération, auront lieu dans deux semaines ou dans un avenir rapproché. Là encore, on verra si cet exercice de démocratie est possible et si des élections libres donneront des résultats en Srpska.

Dans l'État de Srpska même, il y a deux positions différentes chez les Serbes: dans le nord à Banja Luka et la ligne dure adoptée par les Serbes à Pale. Je crois que quelqu'un a soulevé la question du mauvais état des infrastructures chez les Serbes, et si les travaux de reconstruction tardaient, c'est notamment parce que les modalités des Accords de Dayton n'étaient pas respectées. Comme ils ne respectaient pas ces conditions, l'argent affecté aux infrastructures était donné avec parcimonie et servait de carotte.

Mais tous ceux qui se sont rendus dans cette région n'ont pu s'empêcher de constater des changements, et des changements pour le mieux. Il y a encore des problèmes, on pourrait même assister à un énorme renversement de situation si on cessait d'exercer des pressions.

Les quatre témoins qui nous ont fait un exposé ont parlé de l'état des choses. Tous ont dit qu'il y avait amélioration. Tous se sont rendu compte, cependant, que nous retirer ne serait pas la chose à faire. Nous devons tenir le cap, et essayer d'instaurer une forme de processus démocratique, d'asseoir des institutions et en assurer la surveillance au cours de leurs premières années d'existence.

La motion à l'étude dispose que les soldats canadiens demeurent là jusqu'au 30 juin 1998. Certes, vu les progrès réalisés à ce jour, le problème est que si nous nous retirons les premiers, d'autres suivront. Je ne voudrais pas qu'on dise que le Canada a été le premier à tourner les talons et à abandonner cette région de l'Europe à ses besoins criants.

Merci, monsieur le président.

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Merci.

Monsieur Brison.

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Merci, monsieur le président.

D'abord, le Parti conservateur appuie en tous points le renouvellement de l'engagement militaire du Canada en Bosnie jusqu'au 30 juin 1998. J'y étais la semaine dernière, et à l'instar des autres collègues de la délégation, je tiens à dire à quel point nous sommes fiers du travail des Casques bleus canadiens, des ONG et de l'ACDI. Des progrès considérables ont été réalisés depuis les Accords de Dayton.

Pour ceux qui n'y sont pas allés, si vous vous en remettez uniquement aux médias, il semble que très peu de progrès aient été réalisés. C'est encourageant de voir ce qui s'est fait: cessation du carnage généralisé, reconstruction des maisons, infrastructures sociales, démocratisation et réforme des médias. Voilà quelques exemples de progrès. Le plus gros problème concernant les Accords de Dayton est que des échéanciers peu réalistes, mal établis, motivés par des fins politiques et électorales ont été établis surtout par les États-Unis.

Il est important que jusqu'à l'an prochain nous amenions les Canadiens à discuter de notre participation en Bosnie, que nous les informions de l'importance des progrès remarquables qu'elle a assurés. Je crois que nous pouvons à juste titre faire partager cette fierté aux Canadiens à l'égard de notre participation et les amener à appuyer ces initiatives.

• 1620

Les Canadiens accepteront volontiers des délais réalistes s'ils figurent dans les plans et là encore, si nous les faisons participer à la discussion, ils accepteront ces échéanciers. Ce serait une erreur à l'avenir que de ne pas informer les Canadiens des délais réalistes qu'implique ce genre d'initiative.

Par ailleurs, monsieur Graham, vous et moi sommes tous les deux membres de l'Association parlementaire Canada-États-Unis. Nous en avons discuté, il serait important que nous exhortions nos collègues du Congrès à donner l'appui durable des États-Unis à cette initiative critique.

En outre—et je tiens à le rappeler aux membres du Bloc—ce que nous réussissons particulièrement bien comme Canadiens, ce sont nos missions de maintien de la paix et notre participation aux efforts internationaux. L'une des premières conséquences de la division du Canada serait l'impossibilité de participer à ces efforts internationaux. Donc, les Canadiens ne sont pas seuls à avoir besoin d'un Canada fort et uni, le monde entier a besoin d'un Canada fort et uni. Nous devrions considérer très sérieusement cette responsabilité, tant au Québec que dans le reste du Canada.

Merci beaucoup.

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Madame Beaumier.

Mme Colleen Beaumier: Merci, monsieur le président.

J'aimerais aborder un ou deux commentaires plus négatifs sur la situation en Bosnie. Certes, comme l'a dit M. Mills, la situation est émotive, émotive en ce que même les familles étaient partagées, non pas seulement pour des motifs ethniques.

J'en prends pour exemple les voisins de mon chauffeur: le père combattait du côté des Serbes alors que le fils est resté combattre aux côtés des Bosniaques. Décidément, la situation est émotive.

Mais s'il faut tenir compte de l'histoire pour faire un pronostic pour l'avenir, les perspectives sont peu reluisantes. Si nous devions adopter cette approche, il suffirait de considérer notre propre histoire et les atrocités, bien que certainement moins affreuses que la guerre civile. À un moment donné, les Juifs n'avaient pas le droit de posséder une maison donnant sur les plages publiques, les plages provinciales; ils n'avaient pas le droit de fréquenter les plages de Toronto. On pouvait voir des affiches comme «Pour les Irlandais, inutile de demander». Les Italiens sont arrivés, on a assisté à des divisions ethniques parce que c'était quelque chose de nouveau.

Je crois qu'aujourd'hui, l'une des raisons pour lesquelles nous avons fait des progrès, c'est que nous avons davantage accès aux médias. Les communications sont plus développées. Nous ne dépendons pas autant de notre propre cercle d'amis et de nos chefs spirituels pour prendre des décisions à notre place. Par conséquent, je crois qu'il est tout simplement très pessimiste de dire que l'histoire se répétera.

On m'a dit que ces élections ne valaient rien, que les gens avaient voté en fonction de considérations ethniques. C'est faux. À Tuzla, où j'étais, le candidat à la mairie était un Serbe dans une agglomération largement dominée par les Bosniaques. La plate-forme électorale était le multiculturalisme, et une communauté multiethnique. Il a remporté les élections haut la main, grâce à une harmonie entre les groupes religieux et ethniques différents.

Il est très injuste de dire que les Accords de Dayton étaient un accord forcé. Ces accords-là ne sont pas parfaits, mais aucune entente élaborée par des êtres humains n'est parfaite, rien de ce que nous adoptons n'est parfait non plus.

On a posé la question suivante à maintes reprises: pendant combien de temps allons-nous rester là? La réponse est que nous ne le savons pas. Alors, peu importe combien de fois on pose la question, on obtiendra toujours la même réponse. La réponse est que peut-être dans six mois, un an, deux ans ou cinq ans, on saura mieux combien de temps on devra rester là.

• 1625

La SFOR ne fait pas que maintenir la paix là-bas, elle contrôle la criminalité, elle empêche une accumulation des armements dans les deux camps. Lorsque j'ai assisté à la réunion de l'OTAN, l'ambassadeur de l'ONU a dit que la SFOR fait cela parce qu'elle peut le faire.

Si la SFOR est capable de contrôler la criminalité, l'accumulation des armements là-bas, ça veut dire qu'elle peut assurer une certaine stabilité afin que les gens de bonne volonté aient une chance. Tuzla nous montre que c'est possible.

La question de la partition ne nous concerne pas. Ce n'est pas à nous d'en parler. On ne veut pas non plus qu'ils s'occupent du problème de la partition du Canada; je ne pense donc pas qu'il faille aborder le morcellement de leurs pays.

Donc, j'espère que le comité se prononcera en masse en faveur de notre participation militaire en Bosnie et qu'il est prêt à attendre une réponse précise sur la durée de notre mandat là-bas.

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Merci beaucoup.

Monsieur Blaikie.

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Merci, monsieur le président.

Je suis désolé de ne pas avoir pu participer au voyage, mais je suis content d'avoir entendu les observations des gens qui en étaient.

J'ai déjà eu l'occasion de visiter des militaires canadiens, ou de travailler avec eux, dans diverses missions de maintien de la paix en Namibie, au Moyen-Orient, à Chypre et en Amérique centrale. Il s'agit là certainement d'une tradition canadienne dont le NPD, et moi-même personnellement, sommes très fiers et que nous avons largement appuyée dans le passé. C'est une tradition que nous continuons d'appuyer.

Nous ne sommes pas toujours d'accord avec le gouvernement, et je suis sûr que divers ministres de la Défense et des Affaires étrangères le savent. Au cours des années, nous nous sommes opposés à de nombreux éléments de la politique étrangère et de la politique de défense du Canada, que ce soit d'avoir recours les premiers aux armes nucléaires, les vols à basse altitude au Labrador—toutes sortes de choses. Mais en ce qui concerne notre capacité d'envoyer des Casques bleus et la capacité de maintien de la paix des Forces canadiennes, notre appui ne s'est jamais démenti. Je ne vois pas pourquoi nous nous écarterions maintenant de cette tradition.

Je comprends les inquiétudes quand je pense au temps que nous avons passé à Chypre, les mandats étant maintes et maintes fois prolongés jusqu'à ce qu'en fin de compte, nous y soyons restés 25 ans. C'est une crainte bien légitime, mais pour l'instant, ce n'est qu'une crainte et ce n'est pas suffisant, il me semble, pour nous opposer à cette recommandation.

À un moment donné, nous serons peut-être plus critiques de l'engagement du Canada en Bosnie, mais je crois comprendre que la situation s'améliore là-bas et que la participation du Canada est utile. Par conséquent, le mandat devrait être prolongé au moins jusqu'en juin 1998.

Je tiens à dire à M. Richardson, qui caricature ses détracteurs possibles, que même si je suis d'accord avec lui, je ne crois pas qu'il soit juste de dire de ceux qui posent des questions sur cette mission que le Canada tourne les talons et abandonne les gens. Il existe de bons arguments des deux côtés. Lorsqu'on tient un débat comme celui-ci, je ne crois pas qu'il soit utile d'utiliser ce genre de vocabulaire où l'on oppose courage à lâcheté, audace à timidité; je ne sais trop ce que vous voulez dire. Vous avez bien expliqué pourquoi nous devrions prolonger le mandat et vous auriez probablement dû en rester là.

Je tiens à dire que nous appuyons la recommandation.

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Merci beaucoup.

Monsieur McWhinney.

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Merci, monsieur le président.

Le débat est très intéressant. Il est important que le comité adopte une recommandation qu'appuieront tous les partis au Parlement, une recommandation que tout le monde pourra accepter parce qu'il s'agit d'une opération difficile et dangereuse tant sur le plan politique que militaire. Nous ne voulons avoir aucun regret plus tard et ne pas nous retrouver dans une autre Somalie où tout le blâme est attribué à un intervenant et non à un autre.

• 1630

Nous nous sommes engagés dans cette mission sans avoir participé aux décisions politiques importantes et dans des circonstances où, si l'on appliquait les critères mis en place lors de la dernière législature, nous aurions probablement choisi de ne pas participer. Autrement dit, lorsque nous avons, avec tout le pragmatisme voulu, élaboré certains critères pour les futures opérations de maintien de la paix, en ayant clairement à l'esprit notre expérience en Somalie, nous avons conclu que l'on devrait participer à certaines missions et non à d'autres.

Comme je vous l'ai dit hier, j'ai comparu à titre de témoin expert invité, devant le Congrès des États-Unis au début de cette affaire, l'éclatement de la Yougoslavie en États séparés, y compris la Fédération de Yougoslavie. Il était très clair qu'on avait pris des décisions politiques imparfaites en s'appuyant sur une base inadéquate, plus particulièrement la préservation des frontières internes de Tito, qui avaient été conçues pour des raisons internes yougoslaves et qui ne se souciaient pas des divisions ethnoculturelles. On voit là l'origine des conflits qui se sont produits par la suite.

Il est vrai aussi que nous n'avons pas participé à la préparation des Accords de Dayton. Cela a été critiqué et ces critiques ont beaucoup de poids, y compris le rôle qu'on a joué, je pense, au sein de deux commissions de l'ONU: que des gens qui n'ont pas d'expérience dans les États multinationaux imposent leurs propres formes idéales de gouvernement à d'autres. Cela cause inévitablement des problèmes, comme le professeur Cohen nous l'a rappelé.

Mais ce qui est important ici, c'est que nous nous sommes lancés de bonne foi dans une opération et que nous avons pris un engagement. Les initiatives clés ici—et c'était sous le gouvernement précédant celui-ci—ont probablement été proposées par le Secrétaire général de l'ONU, Boutros Boutros-Ghali.

Nous avons décidé de participer; nous nous sommes engagés. Et une fois qu'on est engagé, on devient un joueur, peu importe que par la suite on se dise: «Peut-être n'aurions-nous pas dû nous impliquer», «Peut-être aurions-nous dû imposer plus de conditions.» On devient un joueur et on est impliqué dans le processus.

La question de la continuité entre en jeu, et dans une large mesure, c'est le principe de l'application régulière de la loi qui vaut à l'échelle internationale aussi bien que chez nous. C'est dans ce contexte que je considère la motion. J'ai écouté avec grand intérêt les observations de M. Mills, qui étaient très bien réfléchies. Pour ce qui est des propositions 1 et 2, je ne crois vraiment pas que les membres du comité y trouvent quoi que ce soit à rejeter, et je pense que c'est la position qu'il a défendue.

Pour ce qui est de la quatrième proposition, là encore, l'une des choses qui est très populaire auprès des Canadiens—et cela est ressorti très nettement dans le témoignage du représentant de Care hier—c'est la contribution du Canada à la vie civile des États multinationaux qui se sont déchirés. Par exemple, la contribution que nous apportons en Haïti: forces policières et formation de policiers; et dans de nombreux pays du monde, où on aide à la formation du personnel des systèmes judiciaires et médicaux. La quatrième proposition est essentiellement une proposition que, peut-être, tous les membres ici, représentants de tous les partis, peuvent adopter.

Pour ce qui est du troisième élément, je suppose qu'on peut en discuter. L'un des points que je voudrais soulever, c'est que notre présence là-bas, me semble-t-il, facilitera la réalisation de toutes les options, y compris celle des visions apocalyptiques. S'il devait y avoir partition, il serait essentiel que cela se fasse de façon ordonnée et non pas comme ça s'est passé après l'indépendance de l'Inde en 1947 où l'on a assisté à une tragédie et à un carnage extraordinaires. Une présence raisonnée et équilibrée là-bas, comme celle que nous pouvons offrir, serait tout à fait cruciale si les options apocalyptiques devaient se matérialiser. Cela ne veut pas dire que ça arrivera, mais nous devons envisager cette possibilité.

Il y a beaucoup à dire de la continuité. Vous remarquerez ici—et j'invite nos collègues du Parti réformiste à examiner à nouveau la question—que la durée du mandat n'est pas prolongée au-delà de juin 1998.

• 1635

J'ai examiné le libellé de la troisième proposition à la lumière des commentaires de M. Mills et des autres. À mon avis—et d'après mes discussions avec certains de ceux qui ont rédigé la motion, je crois qu'ils sont d'accord—dans la troisième proposition par exemple, on ne projetait pas d'envisager une option militaire, une frappe militaire, une force de frappe, ce genre de choses. On pensait essentiellement que les ententes avec la SFOR sont peut-être dépassées, que les accords politiques, militaires et administratifs de rechange sont peut-être appropriés et qu'il serait sage de permettre aux planificateurs chargés de ce travail d'envisager ces options.

Par conséquent, je suggère—et j'espère que M. Mills trouvera ma proposition acceptable, si cela peut aider son parti à se ranger avec nous—de remplacer «envisager des options militaires» par «envisager des dispositions de rechange». Cela inclurait certainement les ajustements politiques et administratifs, et cela s'appliquerait certainement aussi au gouvernement civil et à ses ramifications. Cela empêcherait la possibilité d'une implication trop exclusive. Les rédacteurs de la motion m'ont assuré que le but n'est pas de dire un jour que si tout est perdu, nous envoyons des bombardiers.

Je propose cela à M. Mills, et j'espère qu'il trouvera que c'est acceptable. Il est important cependant de revenir à la Chambre avec une proposition que tous les partis puissent accepter. Légalement parlant, ce n'est pas une condition préalable, mais je pense que nous serions plus heureux si lui et ses collègues pouvaient accepter quelque chose de ce genre-là.

Merci, monsieur le président.

Le coprésident (M. Bill Graham): Monsieur Hanger.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Merci, monsieur le président.

J'ai écouté avec intérêt mes collègues nous faire part de leurs opinions sur la question de savoir précisément si oui ou non notre participation aux côtés de l'OTAN pour faire appliquer l'accord de paix en Bosnie devrait se poursuivre.

Je dirai tout de suite que je suis tout à fait d'accord que nos soldats font un splendide travail là-bas. J'ai eu l'occasion de le constater de visu et de voir leurs conditions de vie; le moins que l'on puisse dire, c'est que je suis fier de ce que j'ai vu. Leur effort est extraordinaire, et il ne fait aucun doute qu'ils méritent la réputation qu'ils se taillent en faisant le travail voulu, dans la région où on les a affectés. Je tenais simplement à préciser cela, parce que tout le monde ici, je le sais, est aussi fier que moi des efforts de ces soldats. Ils ont certainement ajouté à la réputation du Canada.

J'ai examiné les quatre résolutions, et en ce qui concerne les deux premières, comme l'a fait remarquer M. McWhinney, notre parti ne s'oppose certainement pas à ce que la mission se poursuive jusqu'en juin 1998.

Les deux autres résolutions doivent assurément être remaniées, mais j'aimerais d'abord faire les commentaires suivants.

J'ai remarqué une chose en Bosnie, après avoir voyagé d'un bout à l'autre de ce pays, et discuté avec les ONG et des militaires, c'est que la communauté internationale, tout comme le Canada, a déployé des efforts incroyables et fait d'énormes investissements dans le pays.

J'hésite parfois à me prononcer sur les résultats. Il y a eu du positif, cela ne fait aucun doute, mais il y a des choses qui ne sont pas aussi positives, qui nous font nous demander dans quelle direction on s'en va, c'est certainement le cas en ce qui concerne les Accords de Dayton.

Pour ce qui est des contributions positives, la reconstruction est en marche, des efforts humanitaires sont déployés et les violents combats entre les différents groupes ont cessé. On a pris des mesures contre ce type de violence.

Je sais que le Canada a apporté sa contribution dans le domaine des soins de santé, des médias, et participé à certains efforts de reconstruction pour relancer le système d'éducation. Mais je ne crois pas qu'on ait encore présenté le gros du travail aux intervenants qui appuient cette initiative particulière que sont les Accords de Dayton. Je parle ici du retour des réfugiés. Que va-t-il se passer exactement à ce moment-là?

• 1640

Les lois sur la propriété ne sont pas uniformes. La liberté de mouvement est toujours restreinte. Le taux de chômage élevé constitue un autre facteur aggravant. Donc on se retrouve avec tout cet enchevêtrement de problèmes en attente et nul doute que le retrait des Casques bleus serait catastrophique.

Ajoutez à cela, bien sûr, la corruption des criminels de guerre et du crime organisé dans ces forces politiques déstabilisantes.

Je me suis posé la question depuis que je suis allé là-bas: la communauté internationale, y compris le Canada, devrait-elle insister pour que ces gens essaient de vivre ensemble dans cette région, insister pour les ramener tous ensemble? Si on le fait, en dépit de ces animosités qui sont très profondes et auxquelles s'ajoutent les facteurs aggravants, il ne fait aucun doute que nous serons là pour toujours. Nous serons là peut-être encore pour deux générations. C'est ce que nous ont dit les témoins experts hier, que ces facteurs aggravants ne vont pas tout simplement disparaître.

Alors, si l'on revient aux deux dernières sections de cette résolution, je pense que l'on devrait préciser que le Canada réexaminera sa position dans cette région et qu'on devrait avoir des discussions sérieuses sur des solutions de rechange. On devrait même discuter de la question de la partition, et pourquoi pas, d'autres systèmes qui limiteraient l'action de la communauté internationale tout en permettant aux gens qui se trouvent dans les différentes régions au moins de vivre là où ils sont actuellement.

Moi ce que je propose—et je ne le fais pas nécessairement sous forme de motion pour l'instant—c'est d'indiquer au comité ou au comité mixte qu'une série de révisions importantes devrait se faire tous les deux ou trois mois et que le mandat devrait être réexaminé au même rythme.

J'ai eu aussi des réactions de certaines personnes à qui nous avons parlé là-bas, qui étaient très impliquées dans le processus, et qui ont dit que l'OTAN cherchait peut-être aussi une façon de se retirer—que sa réputation est restée intacte jusqu'à maintenant, qu'elle a apporté une contribution importante dans le monde en tant que force opérationnelle viable pour assurer la stabilité, et pendant que certains d'entre nous au Canada se posent des questions sur la nécessité de faire passer de longs séjours à nos soldats là-bas, d'autres pays font la même chose, y compris les Américains qui en réalité dirigent l'opération.

Donc, je crois que nous devrions nous préparer à toute éventualité et débattre de ces questions en détail.

Voilà qui conclut mon intervention, monsieur le président.

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Merci beaucoup.

Monsieur Assadourian.

M. Sarkis Assadourian: J'aimerais faire un très bref commentaire, et j'aimerais aussi poser une question, si vous le permettez, aux témoins qui ont été très patients de nous écouter.

Le coprésident (M. Bill Graham): Monsieur Assadourian, au départ, compte tenu du nombre de membres inscrits sur la liste, nous avions pensé pouvoir conclure le débat ou la discussion dans environ 20 minutes, après quoi nous céderions la parole aux divers membres qui voudraient interroger les témoins. M. Mills veut poser des questions, et quelqu'un d'autre voudra peut-être en poser à nos experts. Si vous voulez utiliser votre temps pour poser des questions, allez-y, mais nous avions prévu une période pour cela.

M. Sarkis Assadourian: Oui, s'il vous plaît, car ma question porte sur la note d'information que nous avons reçue des attachés de recherche.

Le coprésident (M. Bill Graham): Je voulais justement attirer l'attention des membres du comité là-dessus. Nous serons tous là et d'autres pourront avoir des questions à poser également. J'ai le nom de Mme Guay et d'autres membres sur la liste qui veulent intervenir, et une fois que nous aurons fini de parler... Mais allez-y si vous voulez poser une question maintenant.

M. Sarkis Assadourian: Je suis tout à fait d'accord pour qu'on prolonge le mandat de notre force de maintien de la paix en Bosnie, comme la plupart d'entre nous ici, mais Art Hanger du Parti réformiste a abordé le sujet qui me préoccupe.

• 1645

Le dernier paragraphe de cette note d'information du Service de recherche de la Bibliothèque du Parlement précise qu'il y a beaucoup d'incertitude parce que les États-Unis n'approuveront peut-être pas la prolongation du mandat de leurs Casques bleus après juin 1998. Sauf erreur de ma part, les États-Unis fournissent plus de la moitié du personnel militaire sur le terrain, nous ne fournissons qu'environ 700 ou 800 soldats, et les Européens envoient un peu moins de 50 p. 100 des soldats.

Si le Congrès refuse de prolonger le mandat des Casques bleus en Bosnie, quelles sont les chances que l'on réussisse avec les autres membres de l'alliance de l'OTAN? De quoi a-t-on besoin—d'outils, de machinerie, peu importe—pour continuer à faire le même travail sans eux? Sans l'aide des États-Unis, avec 50 p. 100 d'effectifs en moins sur place, je me trompe peut-être, mais franchement je crois que cela nous sera très difficile de continuer.

C'est la question à laquelle il nous faut une réponse avant de nous engager, parce que si les Américains ne restent pas, on pourra faire ce qu'on veut, mais on n'arrivera pas à faire le travail, du moins c'est ce que je pense. J'ai peut-être tort, mais vous avez les renseignements voulus.

Le lieutenant-général R.R. Crabbe (sous-chef d'état-major de la Défense, ministère de la Défense nationale et des Anciens combattants): Si vous permettez, monsieur, d'abord, je crois qu'il serait plus juste de dire que les États-Unis fournissent 30 p. 100 des effectifs qui composent la SFOR.

Selon moi, la contribution importante des États-Unis se situe dans le système de contrôle et de commandement—le système de communication que cela implique. Les États-Unis fournissent ce système ainsi que certaines capacités logistiques pour appuyer les forces sur le terrain. Un retrait des forces américaines de ces domaines créerait un vide important dans le commandement et le contrôle sur le théâtre même, qui pourrait certainement être comblé par d'autres nations contributrices.

M. Sarkis Assadourian: Donc, le travail pourrait se faire—est-ce bien ce que vous dites?

Lgén R.R. Crabbe: Oui, ce serait difficile, mais c'est possible.

Cam J.A. King: Un autre facteur important et qui se rapporte à la question, c'est que certains de nos alliés ont indiqué que si les États-Unis n'étaient pas sur le terrain, ils ne voudraient pas y être non plus, tant la participation des États-Unis est importante, non seulement en raison de leurs capacités, mais aussi pour la caution morale qu'ils donnent aux Européens. Manifestement, si d'autres alliés importants comme le Royaume-Uni et la France se retiraient, cela réduirait encore plus considérablement notre capacité de faire quelque chose.

Merci.

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Monsieur Wright, je crois que vous vouliez ajouter quelque chose.

M. Jim Wright (directeur général, Division de l'Europe centrale, de l'Est et du Sud, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Oui. Ce que nous sentons actuellement, c'est que de plus en plus le gouvernement américain se rapproche de notre point de vue qu'il est nécessaire de demeurer au sein de la SFOR. Nous sommes convaincus que le gouvernement américain, dans les discussions qu'il doit avoir avec le Congrès, saura calmer ses inquiétudes.

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Madame Guay.

[Français]

Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Merci, monsieur le président. Je vais essayer d'être brève. Comme mon collègue l'a déjà mentionné, j'aimerais tout d'abord dire que nous appuierons cette proposition.

J'aimerais aussi mentionner que j'ai fait partie de la délégation Canada-US à la réunion qui a eu lieu en septembre dernier et où on a discuté de la Bosnie, et qu'ils nous ont bien fait comprendre qu'ils désiraient demeurer là-bas pour maintenir la paix. Je n'ai pas vu de réelle inquiétude pour maintenir la paix.

Mais, étant critique en collaboration internationale, j'aimerais cependant vous faire part d'une certaine inquiétude que j'ai sur le rôle de l'ACDI dans le dossier de la Bosnie. Je sais que depuis 1993, l'ACDI a subi des réductions budgétaires de 617 millions de dollars et qu'il y aura des réductions supplémentaires de 150 millions de dollars en 1998-1999. D'autre part, considérant l'appauvrissement croissant de la population mondiale, je me demande comment l'ACDI peut se substituer au ministère de la Défense dans des dossiers comme le déminage et le cofinancement dans le déminage en Bosnie où on met plus d'un million de dollars.

Je me demande si ce rôle ne devrait pas être dévolue au ministère de la Défense plutôt que de continuer à venir chercher à l'ACDI les fonds nécessaires pour aider d'autres pays en voie de développement et en grandes difficultés.

• 1650

Par contre, on a évidemment un rôle très important à jouer sur la scène internationale, en particulier en Bosnie. On ne peut pas calculer cela en jours, en semaines, en mois, ni même en années, car ce n'est pas une question de jours, de semaines, de mois ou d'années, mais plutôt une question de maintenir la paix et d'aider ces pays-là à devenir démocratiques.

Merci.

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Merci beaucoup.

Madame Augustine.

[Traduction]

Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Merci, monsieur le président.

J'ai un mauvais rhume moi aussi, mais je suis allée en Bosnie. J'ai eu la chance de faire partie de cette délégation. C'était la première fois que je me trouvais dans un milieu de soldats, de militaires, d'armes, de mines antipersonnel, où je pouvais toucher, voir, ressentir. Je suis très heureuse d'avoir pu faire ce voyage.

Je suis revenue avec un sentiment de fierté, avec le sentiment que les hommes et les femmes qui servent notre pays dans cette région sont exactement le genre de personnes que tous les Canadiens... Quand on parle de fierté et de maintien de la paix, ce sentiment émanait de chacune de ces personnes.

Nombre de mes collègues ici ont parlé de choses très pratiques que nous avons faites et vues. Je tiens à dire qu'on nous a donné l'occasion de nous entretenir librement avec les gens. En leur parlant et en leur posant des questions sur la présence du Canada et du travail qu'on fait là-bas, que ce soit celui des ONG, de l'ACDI ou des travailleurs de Care, ou que ce soient les hommes et les femmes qui servent notre pays dans les forces armées, nous avons eu le sentiment que leur intervention était vraiment utile. Je crois que du fait que nous avons pu nous déplacer et constater un certain semblant de retour à la vie normale, nous aussi avons eu le sentiment que la présence de nos soldats là-bas était importante.

Je voudrais parler des quatre motions qui nous sont présentées et demander que nous envisagions sérieusement de continuer notre intervention, d'aider à l'établissement du processus démocratique et de donner une chance à la paix. Il est important de savoir que lorsque nous contribuons au retour de la paix dans ce pays, en y ramenant la sécurité, en nous assurant que les forces démocratiques sont à l'oeuvre, nous nous assurons en même temps que le Canada et la vie au Canada sont meilleurs par suite du travail de nos soldats là-bas.

On peut se poser des questions sur le mandat, le coût, la durée, notre capacité de tenir nos engagements, nos compétences, mais il est crucial et des plus importants, à l'approche de la fin de l'année, de prendre cette décision sans parler de coût. Combien coûte la paix? Que devons-nous investir pour nous assurer que ce pays et le monde connaissent la paix? C'est aussi important pour les hommes et les femmes qui ont investi tant de leur vie dans les activités de reconstruction, de maintien de la paix, qui ont fait des efforts pour que les gens puissent revenir à une existence normale. Ces hommes et ces femmes nous disent qu'ils veulent continuer l'entreprise et qu'ils font un bon travail.

Je tiens à me joindre à mes collègues du Bloc, du NPD et du PC, comme à ceux de mon parti pour appuyer cette motion et je tiens également à dire à nos amis du Parti réformiste que ce n'est vraiment pas le moment de parler de coût, que ce n'est pas le moment de parler de certaines des questions qui, me semble-t-il, sont des questions à discuter plus tard. Continuons le travail entrepris parce que c'est important.

• 1655

Les soldats et leurs chefs nous ont dit qu'il était important pour eux d'être tenus informés, d'avoir le temps de planifier, d'être certains d'avoir le temps de faire sur le terrain ce qu'on leur demande de faire.

Adoptons les résolutions qui nous ont été soumises. Compte tenu de tout ce que nous avons vu et entendu, tant des experts que de nos propres collègues, nous devrions appuyer la motion. Il est important que nous poursuivions le travail entrepris.

Merci.

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Merci beaucoup, madame Augustine.

Je crois que M. Bassett voulait faire un commentaire à propos de la question de Mme Guay.

[Français]

M. Charles Bassett (Vice-président de la direction de l'Europe centrale et de l'Europe de l'Est, ACDI): Je vais vous donner une réponse très brève, monsieur le président.

Nos opérations en Bosnie ne sont pas entreprises au détriment des opérations dans les pays les plus pauvres. Il y a deux composantes du budget de l'ACDI: l'aide publique au développement qui représente 95 p. 100 du budget total de l'ACDI, et les 5 p. 100 restants qui composent le budget pour l'Europe centrale et de l'Est. On tire de ces 5 p. 100 les fonds dont nous avons besoin pour nos opérations en Bosnie. Ce n'est donc pas au détriment de nos opérations dans les pays les plus pauvres.

Par rapport au déminage, les opérations financées par l'ACDI concernent les experts qui ne font pas partie de nos opérations de la Défense nationale. Ce sont des experts indépendants. C'est donc pour financer ces experts et pour financer un petit peu le centre de déminage en Bosnie.

Merci, monsieur le président.

[Traduction]

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Jim, vous avez le temps de faire un très bref commentaire.

M. Jim Wright: Lorsque les délégués étaient à Sarajevo, ils ont eu l'occasion de visiter le Centre de déminage. L'ambassadeur Eide, représentant spécial du Secrétaire général de l'ONU, les a entretenus du leadership du Canada dans les opérations de déminage en Bosnie. Il serait peut-être bon de le signaler aux membres du comité qui ne faisaient pas partie de la délégation.

Le coprésident (M. Bill Graham): Merci. C'est un rappel très utile.

Je dois dire que nous avons tous été très impressionnés par les opérations de déminage que nous conduisons dans ce pays, et par le risque mortel que prennent nos soldats lorsqu'ils entreprennent cette tâche très dangereuse.

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Monsieur Grewal.

M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Réf.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Permettez-moi seulement de signaler, par votre entremise, monsieur le président, que j'aimerais féliciter le général pour le professionnalisme et le rôle de nos braves hommes et femmes en Bosnie. Deux de mes collègues tout à l'heure ont très bien exprimé nos opinions et notre vision à l'égard du problème auquel nous faisons face aujourd'hui, mais notre rôle de maintien de l'ordre va au-delà de ça en Bosnie, ou d'ailleurs, dans tout autre pays où nous envoyons des Casques bleus.

Si l'on considère le déroulement de la guerre civile, j'aimerais faire une analogie avec la cocotte-minute. Il y a de l'eau dans la cocotte, et de la vapeur se forme lorsqu'on la place sur une source de chaleur. Pour mettre cette vapeur sous pression, on place un couvercle sur la cocotte. Le couvercle que nous mettons, c'est nos forces de maintien de l'ordre. Mais si on étudie les raisons pour lesquelles la vapeur se forme, il y a des émotions et certains problèmes sociologiques dans la région. Il y a des problèmes ethniques et religieux. Si on considère l'histoire des faits, on doit comprendre la situation plus en détail avant d'engager nos forces ou de nous joindre à la communauté internationale pour régler les problèmes en Bosnie.

Les enfants vivent dans la crainte et la tension nerveuse. Leurs personnalités se forment en fonction de la situation qu'ils vivent actuellement. Soixante pour cent de la population a été déplacée. On manque de maisons. On assiste à de l'obstruction politique. Il y a de la bureaucratie. Les gens veulent retourner chez eux, mais ils ne peuvent le faire à cause de cette bureaucratie.

• 1700

Si l'on examine la question de la justice et de la démocratie dans ces pays déchirés par la guerre, on peut faire davantage pour régler le problème. Nous ne pouvons appliquer davantage de pression et empêcher la vapeur de sortir tant qu'on n'aura pas écarté la source de chaleur. Donc, il faut examiner les sentiments, l'histoire, les problèmes ethniques et religieux de ces pays. Il faut trouver une solution aux problèmes de la Bosnie qui vienne de la Bosnie elle-même, il faut que toutes les parties le comprennent, et, au moyen des médias, nous devons dissiper les rumeurs qui aggravent la situation.

La population et les diverses factions opposées devraient avoir le désir de trouver une solution démocratique. Le désir mène à la volonté, et cette volonté devrait être restaurée par les voies démocratiques. Une fois cette volonté créée, elle devrait amener à la justice, laquelle devrait être source de fraternité et de paix dans ces pays.

C'est ainsi qu'il faut procéder.

Pour enlever la source de chaleur, il faut examiner les problèmes sociologiques. Nous ne devrions pas seulement prolonger notre mandat pour une période précise. Cela ne réglera aucun problème. Dès que l'on aura enlevé le couvercle de la cocotte, on reviendra à la case départ.

Il nous faut envisager des solutions à long terme et examiner les répercussions de ces solutions, utiliser les médias, et examiner attentivement le rôle que nous pourrions avoir pour créer ou maintenir la paix. Probablement que nous pourrions recourir à la fois à la création et au maintien de la paix.

Je joins ma voix à celle de mes collègues. Je pense que non seulement le fait de prolonger le mandat réglera le problème, mais que nous devrions probablement en élargir la portée et diversifier notre rôle afin de trouver des solutions à long terme à ces problèmes.

Merci, monsieur le président.

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Merci.

Monsieur O'Reilly.

M. John O'Reilly (Victoria—Haliburton, Lib.): Monsieur le président, je vous remercie de nous permettre de participer à ce débat.

Je suis tout à fait d'accord pour prolonger le mandat, uniquement pour des motifs humanitaires, sachant très bien que ce n'est probablement pas la solution, que les Accords de Dayton ne sont pas parfaits, comme tous les accords.

À la résolution numéro 3, le terme «militaire» me dérange un peu. S'il n'était pas là, je me sentirais plus à l'aise parce que je ne crois pas que nous soyons en mesure de prendre cet engagement envers nos forces militaires, au-delà de la prolongation dont nous parlons. Donc, je me pose toujours des questions sur la durée du mandat pour lequel les Forces canadiennes vont être requises là-bas.

Bien sûr, que l'ONU garde le commandement de toutes les forces engagées est une chose que je tenais à voir reconfirmée. Si je devais utiliser comme exemple la déclaration de ce général britannique cité dans la presse d'aujourd'hui, selon lequel les Forces canadiennes ne sont pas capables de servir parce qu'elles ne font pas de discrimination à l'égard des femmes, je trouverais difficile de composer avec une force de l'ONU dirigée par quelqu'un comme le lieutenant-général Pike des Forces britanniques. Comme vous le savez, il a fait une déclaration très peu flatteuse dans la presse britannique que la presse locale a relevée. Cela sème le doute dans mon esprit sur ce à quoi au juste nous engageons nos forces.

Est-ce que vous pouvez m'assurer que ce genre de leadership n'affectera aucunement le commandement de nos forces? C'est une question que je dois poser, à mon avis.

Le fait de rester seul mais d'avoir ce qu'il faut pour protéger nos forces, voilà une autre question qu'il faut toujours se poser. Est-ce que nous envoyons ou continuons d'envoyer sur les théâtres d'opérations, des forces bien équipées, tant sur le plan psychologique que physique, et qui ont l'équipement voulu? C'est toujours la question que je veux poser, et je tiens à ce que cela soit reconfirmé.

Les gens lisent le compte rendu des délibérations des comités, ils regardent la télévision, ils font des commentaires et des reportages sur la mission à laquelle nous participons aujourd'hui. Je veux qu'on me reconfirme que nous avons la capacité nécessaire à son exécution.

• 1705

Je sais que nous n'étions pas à la table lors de la signature des Accords de Dayton. Je considère qu'il serait très important que le Canada participe à toute négociation future pour que, si on doit prolonger le mandat au-delà de 1998, nous puissions effectivement jouer un rôle proactif, et pas seulement attendre, suivre le mandat et essayer de boucher les trous d'une mission qui n'est pas nécessairement complète. Il faut rassurer les Canadiens que nous serons parties intégrantes de toute la mission, tant sur le plan militaire que civil, ainsi que par l'intermédiaire des ONG présentes sur place.

Je sais que je dois restreindre mes commentaires parce que nous dépassons notre temps, mais j'aimerais particulièrement que les représentants des forces armées me disent ce qu'ils pensent du général britannique qui dit que le Canada n'est pas en mesure de combattre. J'ai trouvé ça extrêmement saisissant et j'ai posé la question au Parlement aujourd'hui à la période des questions orales. À moins que je les mette dans l'embarras, bien sûr...

Une voix: Ce sont là des paroles de défi.

M. John O'Reilly: Je me suis dit la même chose et les militaires devraient avoir la chance de nous dire ce qu'ils en pensent.

Le coprésident (M. Bill Graham): Vous ne demandez pas que nous le convoquions comme témoin devant notre comité pour répondre de cette déclaration, n'est-ce pas monsieur O'Reilly?

M. John O'Reilly: Je pense que si on avait le bras assez long, cela pourrait se faire.

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Nous passerons maintenant à M. Clouthier après quoi nous aurons peut-être du temps pour permettre aux militaires de répondre à cette question.

M. Hec Clouthier (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Lib.): Je serai bref parce que mes collègues ont déjà fait un certain nombre des commentaires que je voulais faire.

Je suis sûr que personne ici ne voudrait que nous cessions de faire partie de la SFOR.

Les résolutions 2 et 4 me causent peut-être un problème ou deux, mais à l'examen, je crois que tout s'équilibre, par exemple dans la résolution 3, on dit «surveiller l'évolution de la situation». Je suis d'accord avec mon collègue, John O'Reilly, qu'au lieu de dire «option militaire», on pourrait dire «envisager des options». Dans la quatrième résolution, le conditionnel nous porte certainement à croire qu'on discutera davantage de la question.

Quant à l'analogie avec la cocotte-minute, je vois que c'est une sorte de raisonnement dialectique. Pour répondre à cela, tout le monde sait que si on a une cocotte-minute—je vois M. Hanger qui me regarde... On nous a décrits comme le couvercle; les militaires sont ceux qui contiennent la pression, la vapeur. Comme vous le savez pertinemment, si toutes les pièces de la cocotte-minute ne fonctionnent pas bien, on ne peut rien faire. Je crois fermement que tous les éléments doivent bien fonctionner ensemble, que ce soient les forces militaires, la volonté politique, le peuple de Bosnie, tout doit fonctionner. Si l'on décidait de retirer nos militaires canadiens, je crois que ce serait tout simplement dévastateur.

Voilà en gros ce que j'avais à dire. Tout le reste a été commenté par mes collègues. Je crois fermement que la seule façon de rendre utile une cocotte-minute, c'est que tous ses éléments fonctionnent bien. Nous devrions essayer de régler cette situation.

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Nous pourrions peut-être passer à la période des questions avec nos témoins. Je sais que M. O'Reilly voulait poser quelques questions sur la valeur de nos militaires canadiens et l'opinion du colonel Pike sur nos troupes.

Lgén R.R. Crabbe: D'abord, pour ce qui est du leadership, je dirais que le leadership canadien exercé sur le théâtre des opérations est très solide, tout comme les divers échelons de commandement en place pour régler les questions concernant les Canadiens.

En tant que commandant de toutes les forces à l'étranger, au nom du chef d'état-major de la Défense, je puis vous dire que je suis en contact presque tous les jours avec les officiers supérieurs représentant les Canadiens et les troupes canadiennes en Bosnie qui font un excellent travail. Le commandant du contingent est là pour veiller à nos intérêts à tous égards et il est juste de dire que dans ce cas en particulier, l'officier s'acquitte très bien de sa tâche.

• 1710

En ce qui concerne l'équipement, l'entraînement, la préparation mentale et physique, je dirais qu'on offre deux types de formation avant de déployer des troupes en Bosnie. Un entraînement porte sur les capacités de combat. Le deuxième porte sur la mission en particulier, notamment sur les aspects qui sont particuliers à la mission au sein de laquelle les soldats vont être engagés. Cette formation dure de trois à six mois, selon la complexité de la mission.

Si je peux répondre de façon diplomatique à la question que se pose M. O'Reilly, je dirais simplement que je n'hésiterais pas un seul instant à comparer les soldats canadiens à n'importe quel soldat, n'importe où au monde, n'importe quand, quels que soient les commentaires que peuvent faire certains.

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Merci beaucoup.

Je crois que M. Turp voulait poser une question.

[Français]

M. Daniel Turp: Pendant qu'on était en Bosnie, et je pense que c'était la dernière journée où nous nous sommes présentés au quartier général de la SFOR, nous avons demandé à plusieurs personnes responsables de la SFOR à un très haut niveau, un général américain et un général français, si l'OTAN avait besoin d'un certain délai pour se préparer à une deuxième opération, c'est-à-dire celle qui aurait lieu après le 30 juin 1998. C'est ce qui explique, je crois, la référence à l'OTAN et à la planification qui est faite dans le paragraphe 3.

J'aimerais que vous nous disiez si vous considérez qu'il est très important, pour bien préparer une future mission, d'en être averti plusieurs mois à l'avance.

Lgén R. R. Crabbe: Cette mission est essentiellement une extension de la mission actuelle en Bosnie. Il y a actuellement un bataillon à Petawawa qui est en train de se préparer pour la mission qui commencera, selon la décision gouvernementale, en janvier.

M. Daniel Turp: D'après vous, pour bien préparer la future mission, c'est-à-dire celle qui aura lieu après le 30 juin 1998, est-il très important que l'OTAN sache dans les prochains mois, et nous suggérons le mois de décembre à cause d'importantes réunions de l'OTAN, s'il existera une nouvelle force à laquelle l'OTAN devrait participer après le 30 juin 1998?

Pour les fins de planification à l'OTAN, est-ce que vous pensez qu'il est essentiel que l'on sache rapidement si on va former une nouvelle force à laquelle l'OTAN participera?

Lgén R. R. Crabbe: Certainement. Il est préférable de savoir à l'avance quels pays contribueront à envoyer des troupes pour les missions après le mois de janvier ou le mois de juin et même plus tard.

M. Daniel Turp: Je voudrais demander à M. Wright s'il a une opinion sur cette question.

M. Jim Wright: Je suis tout à fait d'accord avec le général. Comme vous le savez, il y a un processus de revue à l'OTAN, en collaboration avec le Bureau du haut- représentant, qui a lieu tous les six mois. Il est donc certainement préférable de savoir à l'avance quel sera le nouveau mandat d'une force militaire qui suive SFOR. Mais, en réalité, je pense que par le processus de l'OTAN et du Bureau du haut-représentant avec le comité de suivi dont fait partie le Canada, il sera possible d'influencer le mandat ainsi que le niveau de participation de tous les pays.

• 1715

Le coprésident (M. Bill Graham): Merci. Monsieur Brison, vous avez la parole.

[Traduction]

M. Scott Brison: J'aimerais poser une question qui est assez simple, mais qui requiert probablement une réponse assez complexe. Dans quelle mesure le succès de la SFOR est-il important pour l'avenir de l'OTAN, à votre avis? J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

M. Jim Wright: L'exercice en Bosnie est extrêmement important pour l'OTAN. Il s'agit de la mission la plus créative et la plus dynamique à laquelle l'OTAN ait participé depuis l'effondrement de l'ancienne Union soviétique. On y retrouve des membres de l'ancien Pacte de Varsovie: la Russie, l'Ukraine, la Pologne et la République tchèque. On établit de nouvelles normes pour le maintien de la paix et la sécurité en Europe. Je dirais donc que pour le leadership de l'OTAN aujourd'hui, il est extrêmement important que notre expérience collective en Bosnie soit un succès sans réserve et jusqu'à maintenant, c'est le cas.

Lgén R.R. Crabbe: J'ajouterais simplement, pour avoir été au coeur même de la planification il y a quelque temps, que lorsqu'on a examiné les effectifs et le soutien dont on avait besoin pour la force, ce facteur-là a été un facteur déterminant de la planification afin d'assurer le succès de la mission.

M. Scott Brison: Merci.

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Monsieur Clouthier, je crois que vous vouliez poser une question.

M. Hec Clouthier: J'aimerais adresser ma question au général Crabbe.

Avant de vous poser ma question, général, j'aimerais vous féliciter de votre nomination au poste de sous-chef d'état-major. Je sais que vous êtes à la hauteur. Nous nous connaissons depuis longtemps. Je me souviens que lorsque vous commandiez la base de Petawawa, nous avons travaillé ensemble à maintes occasions.

Général, je crois que la préparation de nos soldats sur le plan physique n'est pas du tout mise en doute. Ce qui m'inquiète un peu, et peut-être pourrez-vous éclairer ma lanterne, c'est qu'on est certainement tiraillé entre des émotions contraires lorsqu'on va dans un pays étranger. Le mode de vie est différent, on est loin de sa famille et de ses amis. Est-ce qu'on forme nos soldats sur ce plan, pour faire face aux problèmes émotifs? Comme vous le savez très bien, à l'occasion, c'est dans ce domaine que sont apparus des problèmes. Jamais du côté physique parce que nos soldats sont—je suis bien d'accord avec vous—parmi les meilleurs du monde. Mais je suis un peu préoccupé par toutes les émotions que doivent ressentir nos jeunes hommes et nos jeunes femmes lorsqu'ils sont en mission de maintien de la paix dans le monde.

Lgén R.R. Crabbe: Tout à fait. Il ne fait aucun doute qu'une préparation mentale fait partie intégrante de la formation avant le déploiement dont j'ai parlé tout à l'heure, et que divers aspects de cette question sont délibérément intégrés à notre programme de formation avant le déploiement des troupes.

Comme vous le comprendrez, les soldats sont exposés au sein de la SFOR à des situations considérablement différentes de celles du temps de l'UNPROFOR lorsque j'en faisais partie. Tout ce qu'on a dit dans les discussions précédentes du nettoyage ethnique, des tueries, des tirs, des bombardements et des choses horribles qui se passaient, essentiellement, tout cela est fini.

Donc, le défi émotif maintenant pour les soldats est d'être longtemps loin de chez eux. Il y a aussi le fait qu'ils retournent maintenant pour une deuxième, une troisième ou une quatrième fois dans certains cas, et que pour cela, ils ont besoin de beaucoup de préparation, et c'est tout aussi important—à mon avis plus important—pour les familles; il faut qu'ils comprennent que nous pouvons appuyer leurs familles ici au Canada pendant qu'ils servent leur pays dans cette région.

• 1720

M. Hec Clouthier: Autre question, général, lorsque les soldats sont en mission de maintien de la paix, est-ce qu'il y a une personne là-bas, militaire ou autre, vers qui les troupes peuvent se tourner pour discuter de divers problèmes autres que les questions militaires?

Lgén R.R. Crabbe: Avec le contingent en Bosnie actuellement, oui, les soldats ont leurs propres supérieurs plus des aumôniers et des travailleurs sociaux, et en fait ils ont accès à des gens ici au Canada.

S'ils ont un besoin précis, nous pouvons envoyer très rapidement des gens en Bosnie pour répondre à ce besoin.

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Merci beaucoup.

[Français]

Madame Venne.

Mme Pierrette Venne (Saint-Bruno—Saint-Hubert, BQ): Merci, monsieur le président. Bonjour messieurs.

Je dois vous dire qu'après avoir vu en Bosnie même les troupes canadiennes sur le terrain, nous avons constaté qu'elles étaient prêtes à continuer le mandat.

Ceci étant dit, j'aimerais poser une question complémentaire. Savez-vous si nous aurons, dans la prochaine mission de janvier, des femmes dans les unités de combat? Est-ce que cela a été mentionné? Et est-ce qu'on le sait maintenant?

J'aurai une autre question ensuite.

Lgén R.R. Crabbe: Bien sûr, il y aura des femmes dans la prochaine unité qui participera à la mission.

Mme Pierrette Venne: Alors, cela veut dire qu'elles ont des chances de se retrouver sous le commandement de M. Pike? Je les plains grandement.

M. Daniel Turp: M. Pike est britannique.

Mme Pierrette Venne: Oui, je sais. Mais d'après ce que j'ai compris, il est au nord-ouest. Il me semble qu'il est responsable de la section nord-ouest que nous avons déjà visitée, n'est-ce pas?

Lgén R.R. Crabbe: La réponse est d'ordre technique.

[Traduction]

Je vais tenter de répondre à votre question en anglais.

Le général Pike sera le commandant en second des opérations de la SFOR, ce qui, essentiellement, revient à dire qu'il sera le commandant en second de la SFOR.

Les soldats canadiens sont sous commandement canadien. Cela ne change pas. Ils sont sous contrôle opérationnel—je vais essayer de ne pas être trop technique ici—d'un officier britannique, actuellement le général Pringle, qui est le commandant du secteur MND sud-ouest, comme on le désigne actuellement, en Bosnie.

Le général Pringle travaillera pour le général Pike. La chaîne de commandement pour le contrôle opérationnel sera la suivante: du général Pike au général Pringle aux Canadiens—seulement, autrement dit, pour la conduite des opérations du secteur canadien. Mais le commandement canadien est toujours exercé par le chef d'état-major et ainsi de suite.

[Français]

Mme Pierrette Venne: D'accord. Mais cela n'empêche rien et je me demande s'il n'y aurait pas lieu de faire pression plus fortement pour que ce personnage ne soit pas dans les environs. Est-ce que vous pensez qu'il soit possible de faire ce genre de pression?

Lgén R.R. Crabbe: C'est une question politique, je pense.

Mme Pierrette Venne: Peut-être. Mais je voudrais bien savoir quels sont les interlocuteurs dans cette histoire-là? Normalement, je pense que ça se passe entre militaires.

Lgén R.R. Crabbe: Je ne suis pas sûr que le Canada ait le pouvoir d'influencer la nomination du commandant, sauf le gouvernement peut-être. Je ne sais pas. Mais la décision concernant le commandement de la SFOR en Bosnie n'est certainement pas une décision militaire.

Mme Pierrette Venne: Je comprends bien que ce ne soit pas une décision militaire, mais je pense que l'on peut certainement essayer de faire pression.

Mme Monique Guay: On va s'en occuper.

Mme Pierrette Venne: Nous allons certainement faire des pressions, mais j'imagine que vous, en tant que militaires, devriez en faire également. Je pense qu'il n'a pas dû être très agréable de se faire traiter comme vous l'avez été. Alors, j'imagine que vous allez réagir. Il n'y a certainement rien qui vous interdise cela. Est-ce qu'il y a quelque chose qui vous l'interdit?

• 1725

M. Hec Clouthier: C'est une bonne question.

Mme Pierrette Venne: Je voudrais poser cette question directement ici.

M. Daniel Turp: C'est parce qu'on ne va peut-être pas avoir de réponse ici.

Mme Pierrette Venne: Si vous ne voulez pas répondre, passons au suivant.

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Monsieur Hanger.

[Traduction]

M. Art Hanger: Merci. J'aimerais poser deux questions soit au lieutenant-général Crabbe, soit au contre-amiral King ou aux deux. La première a trait au déploiement des soldats, la seconde à la participation des militaires canadiens à la reconstruction aux côtés des autorités civiles en Bosnie.

Premièrement, en ce qui concerne le déploiement des soldats, si tout à coup on demandait l'envoi d'un contingent de Canadiens au Moyen-Orient, pourrions-nous fournir un contingent de même taille et avec le même équipement au Moyen-Orient que nous le faisons en Bosnie actuellement?

Lgén R.R. Crabbe: Est-ce que vous voulez savoir si nous avons la capacité de le faire vu la structure actuelle des forces?

M. Art Hanger: Oui.

Lgén R.R. Crabbe: La réponse à votre question est oui.

M. Art Hanger: Combien faudrait-il compter de temps pour envoyer un contingent de cette taille au Moyen-Orient si nous devions faire la même chose?

Lgén R.R. Crabbe: Manifestement, cela dépendrait des exigences lorsque les soldats arriveraient sur le théâtre des opérations, c'est-à-dire du type de mission qu'on leur demanderait d'entreprendre. Si vous parlez du même type d'opération qui se fait actuellement en Bosnie, je pense qu'il serait difficile de dire combien de jours ça prendrait précisément. Certes, il faudrait compter quelques jours pour préparer la force à cette opération, lui donner la formation, la préparation nécessaires, plus le temps de déploiement pour aller du Canada à l'endroit prévu.

M. Art Hanger: Donc ça prendrait beaucoup de temps.

Lgén R.R. Crabbe: Oui, monsieur.

M. Art Hanger: Si cet engagement nous obligeait à participer à une guerre locale, conventionnelle et très violente, aurions-nous les capacités et l'entraînement nécessaires dans la situation actuelle de nos forces armées?

Lgén R.R. Crabbe: Là encore, j'essaie de répondre à une question hypothétique. L'avenir de nos opérations est axé sur la coalition, ce qui veut dire que nous combattrions aux côtés de nos alliés et que nous partagerions le fardeau, si vous voulez, des diverses fonctions de combat et des moyens nécessaires pour le faire.

Pour répondre brièvement à votre question, oui, nous serions capables de le faire. Nous en avons la capacité, et les troupes entraînées aux opérations de combat pour le faire, en ajoutant également qu'il faudrait donner à ces soldats un entraînement pré-déploiement pour les préparer spécifiquement à ce type de mission, au genre de terrain sur lequel ils combattraient à l'arrivée et ainsi de suite.

M. Art Hanger: On m'a laissé entendre que le fait de garder ce nombre de soldats sur le théâtre de la Bosnie mettait nos troupes terrestres à rude épreuve à cause de la rotation et de la fréquence de la rotation. S'il survenait d'autres engagements auxquels le Canada devait participer, serions-nous en mesure de faire face à de nouvelles responsabilités du même genre tout en maintenant à long terme la rotation de troupes et d'équipement?

Lgén R.R. Crabbe: Là encore, la réponse est oui. La difficulté que nous avons eue il y a quelques années, bien sûr, c'était que nous tentions alors de garder 5 000 soldats en service à l'extérieur du Canada. Nous avions des soldats en Bosnie, en Croatie, au Rwanda, au Moyen-Orient et en Haïti. On en a maintenant presque uniquement en Haïti et en Bosnie, nos autres engagements à l'égard de l'ONU au Moyen-Orient nous obligent à envoyer 200 ou 300 soldats seulement. Donc, pour effectuer une autre mission qui serait d'à peu près la taille de celle de Bosnie, on pourrait très bien le faire avec les Forces canadiennes d'aujourd'hui, oui.

• 1730

M. Art Hanger: Très bien.

Enfin, si on comprend l'engagement de l'OTAN dans la SFOR et les Accords de Dayton, ce qui implique également d'aider les autorités civiles à la restructuration, est-ce que ce mandat va au-delà des Accords de Dayton, en ce qu'il implique nos militaires dans des projets qui ne sont pas vraiment spécifiés dans les Accords de Dayton?

Lgén R.R. Crabbe: Vous parlez précisément du contingent canadien?

M. Art Hanger: Oui.

Lgén R.R. Crabbe: Non, il ne va pas au-delà, en ce sens que la mission principale du contingent canadien est d'assurer la stabilité permettant d'appliquer les dispositions civiles des Accords de Dayton—c'est-à-dire par le biais des ONG et des organisations internationales qui sont sur place.

Idéalement, bien sûr, la participation des militaires se ferait moins grande à mesure que ces organisations assumeraient les responsabilités. Quant aux exigences de sécurité—la protection de sécurité si vous voulez—elles pourraient être réduites, voire éliminées un jour. Ça c'est dans un monde parfait. Dieu sait que la Yougoslavie n'est pas un monde parfait. Nous le savons tous.

Les projets humanitaires auxquels les soldats canadiens participent sont essentiellement du domaine du coeur et de l'esprit; ils les font en plus d'assurer la sécurité dont j'ai parlé. Ils participent à ce genre de projets de façon très planifiée, mais seulement après avoir respecté l'engagement initial qui est d'assurer la stabilité et la sécurité dans leur propre secteur.

M. Art Hanger: Donc, vous ne diriez pas que les efforts humanitaires déployés par les militaires vont au-delà de ce qu'ils doivent faire pour respecter les Accords de Dayton, ou qu'ils sont une autre justification de maintenir notre présence, ou en assurer le remplacement, si vous voulez—en Bosnie.

Lgén R.R. Crabbe: Si vous me demandez si les soldats devraient jouer ce rôle, la réponse est non, nous ne sommes pas là pour ça. Mais en ce qui concerne la stabilité et la sécurité et la raison pour laquelle ils sont dans la région de Bihac, vous le comprendrez, nous sommes là, peu importe les ressources dont nous disposons, pour réparer les écoles, les ponts, aider dans les hôpitaux, réparer les routes, faire ce genre de choses, ce qui bien sûr contribue d'une façon plus générale à la sécurité et à la stabilité dans la région.

M. Art Hanger: Merci.

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Monsieur Mills.

M. Bob Mills: J'ai beaucoup de questions à poser, mais pour le moment je vais me limiter à trois auxquelles j'aimerais avoir des réponses très brèves.

Une des choses qui me préoccupent, c'est l'utilisation des bulletins de scrutin remis de main à main lors du processus électoral. Environ 39 municipalités, paraît-il, ont utilisé une liste d'électeurs établie selon l'endroit où vivaient les électeurs en 1991. Ce n'était pas l'endroit où ils étaient installés au moment des élections, mais là où ils vivaient en 1991. Ainsi, il y a eu beaucoup de bulletins remis de main à main. Beaucoup de gens vivant dans d'autres endroits avaient fait l'objet de nettoyage ethnique et avaient dû s'installer ailleurs.

Il me semble que ce plan ne pouvait pas fonctionner. À votre avis, peut-on tenir ces élections pour valables ou les changer en utilisant une nouvelle liste électorale? Comment ce problème sera-t-il abordé?

La deuxième remarque s'adresse à nos militaires; je tiens à dire que j'étais très fier en tant que Canadien d'aller dans une école qui arborait côte à côte un drapeau canadien et un drapeau bosniaque, et d'entendre dire que le Canada avait fait ceci ou cela. J'étais très fier en tant que Canadien.

Autre chose qui a suscité ma fierté de Canadien, c'est lorsque nous étions dans une ville frontalière, totalement perdue, entourée de mines et de désastres, et j'ai vu devant moi un drapeau canadien sur un véhicule de transport de troupes canadien. Je dois avouer que mon patriotisme a atteint son paroxysme à ce moment-là, quelque part au nord de Bihac, je n'ai aucune idée où.

• 1735

Cela me dérange vraiment de savoir que nous n'avons pas fait partie du groupe de contact envoyé en Bosnie au début des opérations. Examinons notre participation: nous avons été les premiers là-bas, plus ou moins, et nous n'avons pas fait partie du groupe de contact. Nous n'étions pas non plus à Dayton. J'aimerais savoir si nous avons voix au chapitre sur le plan militaire dans la SFOR. J'ai vraiment eu l'impression que les Canadiens étaient des citoyens de second ordre dans ces deux cas.

Il faudrait considérer les deux côtés de l'affaire: la peine et l'honneur.

Cam J.A. King: Je ne peux répondre à la question concernant le groupe de contact: je ne sais pas si nous avons été vraiment invités ou si nous avons décidé de ne pas y participer à ce moment-là.

Ce qui est important du côté militaire, c'est que bien sûr nous consultons notre représentant militaire à l'OTAN et puisqu'il s'agit là d'une mission de l'OTAN sous les auspices des Nations Unies, nous estimons que nous avons autant que les autres notre mot à dire dans l'opération et je crois que nous l'avons démontré à plusieurs reprises. Vous vous souviendrez peut-être de l'affaire du bombardement il y a quelque temps où le Canada a joué un rôle très actif dans la discussion du problème et a aidé les alliés à se former une opinion.

Donc, dans les opérations militaires quotidiennes et la planification de l'avenir, nous estimons avoir un rôle important à jouer. Nous consultons beaucoup et en réalité, c'est ce que nous avons fait dernièrement au sujet des options futures possibles. On ne peut rien nous reprocher dans ce domaine.

Lgén R.R. Crabbe: En ce qui concerne le groupe de contact, à l'époque où les Nations Unies dirigeaient les opérations, je comprends tout à fait votre frustration. En tant que Canadien occupant un poste important pour les Nations Unies, j'ai été agacé parfois parce qu'il y avait là, pour être franc, des gens qui ne savaient tout simplement pas ce qui se passait. Les Canadiens, eux, savaient ce qui se passait et il était désolant alors de ne pas pouvoir contribuer au groupe de contact.

Je ne voudrais pas avoir l'air prétentieux, mais je pense que nous avons pu influencer ce groupe en faisant connaître les positions que moi-même et d'autres défendions lorsque le groupe de contact avait de la difficulté dans ses délibérations.

M. Jim Wright: Pour ce qui est de la deuxième question, monsieur Mills, les décisions militaires concernant la SFOR seront prises à l'OTAN et le Canada bien sûr est présent à la table, et y joue un rôle de leadership.

Pour ce qui est du côté secondaire, la partie des Accords de Dayton qui s'occupe des mesures civiles, bien sûr, nous siégeons au comité de direction du Conseil de mise en oeuvre de la paix qui se réunit tous les mois. Le Canada est représenté à ces réunions, et je pense que nous jouons amplement notre rôle pour guider le processus de mise en place de la paix civile, un bon complément aux opérations de la SFOR sur le terrain.

Pour ce qui est de votre première question, sur les bulletins de vote remis de main à main, les réfugiés sont une réalité de la guerre de la Bosnie. Nous faisons toujours face à d'énormes populations de réfugiés tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de la Bosnie. Le procédé des bulletins de vote remis de main a main a été mis en place pour nous assurer que le nettoyage ethnique ne deviendra pas une réalité de la vie, que nous donnerons aux gens la possibilité de voter dans leurs municipalités d'origine.

Quant à savoir si ces personnes décideront de revenir ou non, c'est toujours incertain. Peu de groupes de réfugiés sont revenus jusqu'à maintenant. Nous assistons au retour de certains réfugiés lorsqu'ils sont en majorité: les Bosniaques reviennent dans les régions où ils étaient en majorité, les Croates font la même chose, et les Serbes aussi.

Là où nous avons des difficultés, et ce n'est pas surprenant, c'est dans des situations comme celle de Drvar où on a un groupe minoritaire qui contrôle actuellement le conseil municipal, et où pourtant une majorité issue d'un autre groupe ethnique s'est assurée quand même que ce groupe ethnique contrôle la majorité des sièges aux élections municipales.

• 1740

Le processus de mise en oeuvre prendra du temps. Il ne fait que commencer. Mais nous avons bon espoir de faciliter le retour des réfugiés en raison des bonnes conditions actuelles et du rôle important que joue la SFOR dans l'appui au processus d'instauration de la paix civile.

La question des droits de propriété a été soulevée précédemment et constitue un point essentiel des Accords de Dayton. Nous devons veiller à ce que les personnes qui veulent revenir puissent le faire et que celles qui décident de ne pas revenir dans leur propriété familiale soient au moins indemnisées pour leur ancienne propriété. Le bureau du Haut-Représentant, M. Westendorp, cherche actuellement à régler ce point essentiel avec toutes les parties en Bosnie, avec le plein appui de la communauté internationale, dont le Canada.

M. Bob Mills: La situation actuelle est que la population est à 95 p. 100 bosniaque, le maire élu est serbe et il est impossible de mettre ces élections en oeuvre et de les mener à bon terme. Je me demande comment on pourra régler ce problème.

M. Jim Wrigth: Il se réglera très lentement. La délégation qui était sur le terrain en Bosnie a eu la possibilité de parler avec l'OSCE, qui joue un rôle de premier plan dans le processus de mise en oeuvre des élections.

Une des difficultés qu'a rencontrées l'OSCE lorsque nous étions en Bosnie était que l'on donnait la priorité à la préparation des élections à l'Assemblée nationale dans la République de Srpska. Nous n'avons donc pas fait beaucoup de progrès dans l'application des résultats de ces importantes élections dans les municipalités de toute la Bosnie. La priorité sera donnée à cette question en décembre ou en janvier prochain. Cela exigera du temps et beaucoup d'efforts de la part de la communauté internationale, de l'OSCE, de la SFOR et d'autres parties pour s'assurer que les personnes qui veulent revenir puissent le faire.

Le coprésident (M. Bill Graham): J'ai une petite question. J'aimerais reprendre une observation faite par M. Mills durant le débat qui portait sur le fait que le montant de l'aide accordée est totalement biaisé en faveur de la partie bosniaque par rapport à la partie serbe.

Ce que je retiens des résultats de notre voyage, on l'a peut-être déjà dit au début, est qu'un des volets de la politique consistait à encourager au moins ceux de la partie serbe qui voulaient apporter leur collaboration aux Accords de Dayton et à un projet de démocratie politique et de société pluraliste. Et, bien sûr, de ne pas encourager ceux qui ne voulaient pas collaborer. Cela n'aurait pas de sens d'accorder de l'aide à M. Karadzic, par exemple.

Mais quand nous étions là-bas, nous avons vu notre ambassadeur donner de l'argent à Mme Plasvic pour la reconstruction d'une école de police. Nous l'avons vu donner de l'argent pour des médicaments et donner directement des médicaments. Je considère donc que la politique actuelle consiste à aider les éléments au sein de la République de Srpska qui collaborent aux accords de paix et aux efforts de démocratisation.

Je me demandais seulement si j'avais bien compris. Pouvez-vous, monsieur Wright ou quelqu'un d'autre, nous dire si le rapport de 95 p. 100 à 5 p. 100 a changé et, dans l'affirmative, de combien en faveur d'un partage plus équitable entre toutes les parties?

M. Jim Wright: Monsieur le président, vous avez tout à fait raison. Pendant un certain temps, durant la première année d'après-guerre, un très faible pourcentage des fonds de reconstruction provenant de la communauté internationale étaient acheminés vers la République de Srpska, surtout simplement à cause de l'attitude récalcitrante des dirigeants serbo-bosniaques. Ils ne voulaient appuyer ni l'esprit ni la lettre des Accords de Dayton, et la communauté internationale a pris la décision, par les bons offices du Haut-Représentant, d'abord M. Bildt et maintenant M. Westendorp, d'aller de l'avant et d'appliquer ce que nous appelons la conditionnalité positive et négative à toutes les communautés de la Bosnie, et pas seulement à la République de Srpska.

• 1745

On parle de la République de Srpska en raison de l'ampleur des problèmes que nous avons avec ses dirigeants, mais les exemples avec Mme Plasvic concernant l'aide canadienne que vous portez à notre attention sont de très bons cas d'espèce.

Nous croyons que la politique de «conditionnalité» fonctionne. Elle a été lente à démarrer, en raison de l'ampleur de l'aide économique accordée à la Bosnie et du nombre des parties sur le terrain, mais le bureau du Haut-Représentant a consacré énormément de temps à travailler en étroite collaboration avec les principaux donateurs de l'ensemble du monde et les institutions financières internationales pour assurer la cohérence des programmes d'aide technique destinés à la Bosnie.

Lorsque nous constatons un appui à l'esprit et à la lettre des Accords de Dayton, nous encourageons la communauté internationale à aller de l'avant et à fournir des stimulants économiques à ces communautés.

Certes, Mme Plasvic est actuellement une personnalité très importante en République de Srpska. Nous espérons que son approche très pragmatique à l'égard des Accords de Dayton... Lorsque nous l'avons rencontrée, elle a déclaré qu'elle n'avait pas assisté à la signature des accords, mais qu'elle les respectait et voulait les voir appliquer.

Ainsi, en appliquant la conditionnalité positive à des personnes comme Mme Plasvic et aux communautés qu'elle représente, nous envoyons un signal très clair au peuple de Bosnie, en lui indiquant que ceux qui respectent l'esprit et la lettre des Accords de Dayton seront appuyés par la communauté internationale.

Nous pensons que cette politique commence déjà à porter fruit. Nous l'avons vu dans le cas du président Tudjman il y a quelque temps lorsque la communauté internationale a exercé des pressions sur lui en ce qui concerne les criminels de guerre. Et, avant la visite de la délégation en Bosnie, dix Croates inculpés de crimes de guerre se sont présentés volontairement à la Cour. Cela est entièrement attribuable à la politique de conditionnalité appliquée au plus haut niveau aux autorités croates.

Le coprésident (M. Bill Graham): Cela met fin au débat et aux questions. Nos collègues du Bloc nous ont dit avoir une importante réunion à 18 heures, ce qui ne nous laisse qu'une douzaine de minutes.

Voilà ce que je vous propose: nos collègues, les secrétaires parlementaires et les divers membres présents ont cherché une solution de rechange aux paragraphes 3 et 4 de la résolution.

Les paragraphes 1 et 2 ont été acceptés par toutes les parties présentes. Nous sommes d'accord?

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Oui.

Le coprésident (M. Bill Graham): Monsieur Bertrand et moi-même suggérons que je vous lise les modifications proposées, qui ont été présentées à tous, pour faciliter le travail des interprètes. Ensuite, si elles vous semblent acceptables, nous pourrions procéder immédiatement au vote et peut-être terminer la réunion avant 18 heures.

Tel que proposé, le paragraphe 3 modifié s'énonce comme suit:

    Le Canada devrait surveiller l'évolution de la situation en Bosnie et discuter avec les alliés de la question d'une force de relève après le départ de la SFOR.

C'est la même chose que le précédent.

    Au cas où une telle force s'avérerait nécessaire, il faudrait dès maintenant donner la permission aux planificateurs de l'OTAN de commencer à envisager des solutions de rechange. Dans l'éventualité d'une prolongation du mandat, il faudrait définir ce mandat de façon précise et en prévoir l'examen à intervalles réguliers. L'examen devrait porter sur les termes exacts du mandat, les coûts et la capacité de s'acquitter du mandat. Tout débat à ce sujet devra se faire à la Chambre.

C'est ce qu'a recommandé M. Turp dans ses commentaires.

Le paragraphe 4 devrait s'énoncer comme suit:

    Le Canada devrait poursuivre ses propres activités de reconstruction, en mettant surtout l'accent sur les progrès réalisés dans la mise en place d'un gouvernement constitutionnel, la reconstruction et l'encouragement à l'instauration de la paix civile dans toutes les régions de la Bosnie, en tenant mieux compte des différences ethniques et culturelles.

Je crois que cela a été...

Mme Colleen Beaumier: Monsieur le président, je n'arrive pas vraiment à lire ce document, et je ne suis pas prête à voter sur une modification sans pouvoir y réfléchir au moins une ou deux minutes. Si je ne peux pas la lire, je ne peux pas y réfléchir.

Le coprésident (M. Bill Graham): J'ai l'avantage d'avoir un texte réécrit de façon lisible par le greffier. Je pourrais peut-être, madame Beaumier, si d'autres personnes ont fait des commentaires, demander au greffier de vous donner un exemplaire plus lisible. Je ne vous désapprouve pas de...

Mme Colleen Beaumier: Je crois que la plupart des hommes comprennent de quoi il s'agit parce qu'ils en ont déjà discuté. Malheureusement, nous...

Le coprésident (M. Bill Graham): Je suis désolé, nous avons voulu faire circuler le document parmi les représentants des divers partis. Le secrétaire parlementaire du Parti libéral a accepté la modification au nom du gouvernement, et ce sont les seules discussions qui ont eu lieu.

• 1750

Mais je suis entièrement d'accord, vous devriez lire le document avant de voter.

M. Ted McWhinney: Personne n'a parlé aux porte-parole officiels des trois partis présents, ni aux deux secrétaires parlementaires.

Le coprésident (M. Bill Graham): Il se pourrait que d'autres partis aient également des commentaires à faire. Je crois que M. Turp en a également. Monsieur Turp.

[Français]

M. Daniel Turp: Une simple question pour rendre les choses plus claires. Je suis tout à fait d'accord pour que le débat puisse avoir lieu devant la Chambre des communes. Je ne voudrais pas, toutefois, que cela empêche un débat préliminaire de se tenir également au sein de ce comité ou devant les comités conjoints.

Est-ce que je comprends bien que le débat pourrait aussi avoir lieu devant le comité et se tenir ensuite devant la Chambre des communes?

Le coprésident (M. Bill Graham): Soit devant chacun des comités séparément, ou devant nos comités conjointement.

Mais si j'ai bien compris la procédure proposée cette fois-ci, les cinq partis de la Chambre ont conclu que le débat devrait avoir lieu devant ces deux comités. Donc, en mentionnant dans notre décision qu'il devrait avoir lieu en Chambre, il devient évident que les cinq partis pourraient tout changer à leur gré. Toutefois, à mon avis de président de ce comité, je suis certain que cette affaire va être discutée à nouveau devant notre comité.

M. Daniel Turp: Donc, s'il n'est pas exclu que le débat puisse aussi se tenir en comité, de façon à ce qu'il soit peut-être plus efficace et plus approfondi, je n'ai pas d'objection à ce que l'on en tienne un à la Chambre des communes, comme nous en avions d'ailleurs parlé en Bosnie.

Le coprésident (M. Bill Graham): D'accord.

[Traduction]

Avec sa considération habituelle pour chacun, M. Hanger a proposé de laisser sortir les témoins pendant que nous étudions cette question. Cependant, si Mmes Beaumier et Longfield sont d'accord, j'avais espéré que nous pourrions... Cela ne nous prendrait que quelques minutes. Vous pourriez peut-être rester et nous éclairer sur une question soulevée durant la discussion.

Je pourrais peut-être profiter de la discussion pour remercier les témoins d'être venus nous éclairer durant le débat. Nous vous en sommes reconnaissants. Vos commentaires ont été extrêmement utiles et ont éclairé le débat. Je crois que votre présence ici, de la façon dont le débat s'est déroulé, illustre le nouveau rôle que prennent les comités parlementaires dans le processus. En nous assurant que nos propres discussions sont basées sur des faits et qu'elles se tiennent de façon adéquate, je crois que nous pouvons avoir des débats plus éclairés, grâce à l'avantage de la qualité de la représentation dont nous avons bénéficié ici aujourd'hui.

Je pourrais également signaler la présence dans la pièce du colonel Hug, qui nous a accompagnés lors de notre voyage en Bosnie et nous a protégés de tous les dangers. Nous sommes heureux qu'il soit parmi nous, car il continue à nous protéger du danger, même ici au Canada.

Monsieur Turp.

[Français]

M. Daniel Turp: Monsieur le président, je voudrais quand même faire la remarque suivante: pour le bénéfice de nos comités et de ceux qui nous auront entendus, je trouve que le fonctionnement du débat d'aujourd'hui, de la rencontre d'aujourd'hui, a été plutôt anarchique. Je pense que nous devons à nos futurs témoins de les entendre convenablement.

Le nombre de caucus, de petites discussions en groupes, que nous avons dû avoir pour rédiger ce projet de consensus, ne constituent pas à mon avis la meilleure façon de procéder. Si nous devions à nouveau devoir travailler à la rédaction de textes en commun, je trouve qu'il devrait y avoir des caucus préparatoires entre les membres des comités directeurs pour qu'une réunion comme celle-ci ne donne pas lieu à tous ces débats particuliers qui nous empêchent vraiment d'apprécier les témoignages et les réponses et pour qu'il nous soit permis de tenir une discussion tout à fait approfondie.

Alors, j'en fais la recommandation pour l'avenir, de façon à rendre justice à tous ceux qui nous entendent.

Le coprésident (M. Robert Bertrand): Monsieur Turp, pour votre information, ces gens-là n'étaient pas ici comme témoins, mais plutôt, si j'ai bien compris, comme personnes-ressources que nous pouvions consulter au besoin.

M. Daniel Turp: Je suis d'accord, mais je trouve, et je ne crois pas être le seul à le penser, que notre façon de fonctionner cet après-midi n'est pas la meilleure. Il y a eu trop de petits caucus qui nous ont empêché de vraiment nous concentrer sur l'ensemble des discussions qui avaient lieu autour de la table.

Le coprésident (M. Bill Graham): Je me rallie entièrement à votre observation, surtout parce que la dernière fois que j'avais proposé la mise sur pied d'un comité de rédaction, M. Bergeron qui vous a précédé à ce comité avait complètement rejeté ma proposition.

• 1755

Donc, si nous avons connu cette situation aujourd'hui, c'est parce que la dernière fois que j'ai proposé cette autre procédure, elle avait été complètement refusée par le Bloc.

M. Daniel Turp: Il fallait revenir à la charge, monsieur le président.

Le coprésident (M. Bill Graham): J'accepte votre observation avec enthousiasme.

[Traduction]

Mme Beaumier avait un commentaire à faire.

Mme Colleen Beaumier: «Tenir davantage compte des différences ethniques et culturelles». Je ne suis pas sûre de comprendre exactement ce que cela implique ou même ce que cela signifie.

M. Bob Mills: À vrai dire, nous voulions essayer de répondre à un besoin, car les Accords de Dayton n'ont tenu aucun compte de l'histoire, ni de la religion, ni des origines ethniques, ni de la complexité de l'histoire. La question a été traitée comme si on ne tenait compte de rien, comme si les gens étaient tous pareils. Mais, on ne peut pas procéder de cette façon dans une région qui a quelque 1 500 ans d'histoire. Il faut tenir compte des origines ethniques, des différences qui existent entre les gens, car c'est la réalité de la Bosnie. Je crois que c'est M. McWhinney qui a trouvé cette formule, on voulait simplement s'assurer que toutes les différences historiques et culturelles de la région soient intégrées dans la décision.

Mme Colleen Beaumier: Est-ce que cela implique que nous devions apporter des modifications aux Accords de Dayton?

M. Bob Mills: En réalité, une révision pourrait être nécessaire en fonction de l'évolution de la situation. Mais ce n'est pas notre rôle.

Mme Colleen Beaumier: D'accord. Je comprends.

Le coprésident (M. Bill Graham): Lors de la réunion centrale de l'OTAN, des modifications substantielles ont été apportées aux obligations à respecter en vertu des Accords de Dayton, par exemple. C'est un document évolutif. Il faudra le réviser. Mais je ne pense pas que l'on puisse aller plus loin. Je ne crois pas que l'on dise qu'il faut jeter les accords de Dayton à la poubelle.

Monsieur Brison, vous vouliez faire un commentaire.

M. Scott Brison: Oui. C'est à propos des commentaires de M. Turp. Vous avez sans doute remarqué que notre caucus d'aujourd'hui était uni et que les participants ont été très peu distraits. Nous prenons ce genre de décisions rapidement. Cependant, je voudrais prévenir mes collègues que cette situation pourrait changer considérablement dans environ quatre ans, je ne peux donc garantir pour toujours...

Le coprésident (M. Bill Graham): Monsieur Brison, nous essayons parfois de ne pas faire preuve d'esprit partisan au comité, mais d'autres fois, c'est le contraire. Nous en sommes tous très conscients.

Il est maintenant 18 heures. Puis-je considérer qu'il y a consensus, à savoir que les présidents sont autorisés à déposer leur rapport à la Chambre, séparément, comme nous sommes tenus de le faire?

M. John Richardson: J'en fais la proposition.

[Français]

À la condition que la version française soit revue par le...

M. Daniel Turp: Car il n'y en a pas pour l'instant.

[Traduction]

Mme Jean Augustine: La formulation du document est-elle satisfaisante?

Le coprésident (M. Bill Graham): Oui.

M. Ted McWhinney: Si Mme Augustine le désire, nous pourrions supprimer: «... mieux préparé, avec tout le soin requis».

[Note de la rédaction: Inaudible] On ne mentionne pas les Accords de Dayton. Je pense que c'est une formulation anodine, acceptable pour les deux ministres, mais «avec tout le soin requis» enlève l'élément d'évaluation.

Le coprésident (M. Bill Graham): «Avec tout le soin requis»: est-ce que cela vous convient?... Oui, c'est accepté.

[Français]

Accepté.

Monsieur Sauvageau. Une courte intervention à l'intention des membres du Comité des affaires étrangères et du commerce international.

M. Benoît Sauvageau: Nous avons reçu une note de la greffière afin d'inviter M. Harry Wu à une rencontre, le 27 novembre prochain. Je vous fais officiellement la demande qu'on l'invite, monsieur le président.

• 1800

[Traduction]

Le coprésident: (M. Bill Graham): Pour les membres du Comité des affaires étrangères, M. Sauvageau nous a signalé que nous avons reçu une lettre indiquant que M. Harry Wu viendra à Ottawa et nous demandant si nous sommes disposés à lui accorder une audience au comité. C'est un dissident chinois bien connu.

Madame Beaumier, vous qui êtes la présidente du Sous-comité des droits de la personne, les membres désirent-ils que cette audience ait lieu devant l'ensemble du comité ou devant le Sous-comité des droits de la personne? Pourrions-nous en discuter au Comité de la procédure?

Mme Colleen Beaumier: Ce serait une bonne idée que l'audience ait lieu devant l'ensemble du comité en raison de l'importance de l'APEC et d'autres...

Le coprésident (M. Bill Graham): Cela se fera au moment de la visite du premier ministre de Chine, qui sera en ville en même temps.

Mme Colleen Beaumier: Ça me convient.

Le coprésident (M. Bill Graham): Très bien. J'en déduis que nous avons autorité pour faire rapport à la Chambre.

Je tiens à remercier tous les membres pour leur collaboration et remercier à nouveau les témoins d'être venus.

Le Comité des affaires étrangères s'ajourne jusqu'à demain, 9 heures, et le témoin sera Mme Mary Clancy.