AANO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 23 avril 2013
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Chers collègues, la séance est ouverte. Il s'agit de la 68e séance du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord. Nous poursuivons notre étude du projet de loi C-428.
Aujourd'hui, nous avons le privilège de recevoir des représentants de l'Association du Barreau canadien. Nous avons parmi nous M. Christopher Devlin, qui comparaît de nouveau devant notre comité. Nous vous remercions d'avoir accepté de revenir. Nous savons que vous venez de l'Ouest et qu'il est là-bas 5 heures du matin; nous vous sommes donc reconnaissants d'avoir accepté de venir ce matin et d'être prêt à répondre à nos questions.
Nous accueillons aussi Mme Tamra Thomson. Merci énormément de votre présence. Nous vous sommes reconnaissants, à vous aussi, d'avoir accepté de venir répondre à nos questions.
Nous allons maintenant vous céder la parole afin d'entendre vos déclarations préliminaires. Ensuite, nous aurons quelques questions à vous poser.
Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité. Nous sommes ravis de comparaître devant votre comité aujourd'hui au nom de l'Association du Barreau canadien. Nous représentons plus de 37 000 membres un peu partout au Canada. Le mémoire que nous vous avons remis a été préparé par la Section du droit des Autochtones, qui regroupe des avocats de partout au Canada spécialisés en droit des Autochtones.
Pour ce qui est des domaines ayant trait aux articles 42 à 47, nous avons aussi reçu l'avis de notre Section des testaments et des successions.
L'un des objectifs de l'Association du Barreau canadien est d'améliorer le droit et l'administration de la justice. C'est de ce point de vue que nous avons examiné le projet de loi C-428.
Sur ce, je vais demander à M. Devlin d'expliquer plus en détail les points qui vous sont exposés dans le mémoire.
J'ai cru comprendre que tous les membres du comité ont sous les yeux une copie du document, ce qui leur sera très utile. Dans le mémoire, nos observations sont regroupées en trois parties.
Le projet de loi propose d'abroger différents articles de la Loi sur les Indiens. La première partie de notre mémoire passe simplement en revue les dispositions dont l'abrogation ne nous pose aucun problème. Il s'agit, pour la plupart, de dispositions archaïques ou de dispositions qui ont été tellement contournées qu'elles ne sont plus en vigueur d'un point de vue pratique. Nous proposons que le comité ne s'inquiète pas de l'abrogation de ces dispositions; je ne vais donc pas m'y attarder.
J'aimerais me concentrer sur les effets de l'article 7 du projet de loi, qui vise à abroger certaines dispositions de la Loi sur les Indiens qui ont trait aux testaments et aux successions. L'article 7 éliminerait le rôle du ministre — dont le titre juridique, si je ne m'abuse, est toujours celui de ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien — dans l'administration des testaments et successions. Nous sommes très préoccupés par cet article. Il s'agit d'un tout petit article qui aurait des répercussions énormes, selon nous. J'aimerais tout d'abord aborder la question des testaments, puis celle des successions, pour ensuite parler des problèmes de transition que nous avons cernés dans le mémoire.
En ce qui a trait à l'abrogation des articles 42 à 47 de la Loi sur les Indiens qui s'ensuivrait de l'article 7 du projet de loi C-428, les lois provinciales sur les testaments ne s'appliqueraient alors pas aux testaments indiens en vertu de l'article 88 de la Loi sur les Indiens. C'est un sujet très complexe, mais l'article 88 de la Loi sur les Indiens prévoit l'entrée en vigueur de lois provinciales qui s'appliquent aux testaments pour ce qui est des Indiens. Il s'agit de l'incorporation par renvoi de lois provinciales. En l'absence de réglementation fédérale pour administrer les testaments indiens, les lois provinciales s'appliqueraient. Selon nous, cela causerait un certain nombre de problèmes.
Tout d'abord, les lois provinciales sont différentes d'une province et d'un territoire à l'autre. Il n'y aurait plus de lois uniformes qui s'appliqueraient aux testaments indiens dans l'ensemble du pays.
Deuxièmement, il s'ensuivrait un processus très complexe et coûteux qui incomberait aux familles indiennes plutôt qu'à l'administration du ministère des Affaires indiennes. Il faut aussi garder à l'esprit que ces dispositions ne concernent que le testament d'Indiens qui résident ordinairement dans une réserve. Les testaments d'Indiens qui ne résident pas dans une réserve ou dont la résidence principale ne se trouve pas dans une réserve sont déjà assujettis aux lois provinciales, à une exception près. S'ils détiennent des terres dans une réserve, ils tombent toujours sous le coup de la Loi sur les Indiens pour ce qui est du transfert de terres. Le cas échéant, le système provincial régulier de transfert de propriété ne s'appliquerait pas. C'est encore la Loi sur les Indiens qui régirait le transfert et la répartition des terres situées dans les réserves et léguées à des bénéficiaires. J'expliquerai cela dans un instant.
En l'absence de garantie de la part du ministère des Affaires indiennes comme institution par défaut, ces particuliers — qui sont des Indiens qui résident ordinairement dans une réserve ou dont la famille réside ordinairement dans une réserve — seront obligés d'adopter le système provincial et devront probablement consulter le ministère des Affaires indiennes pour obtenir diverses opinions sur la valeur de la succession ou sur l'article 5 concernant la vente de leurs certificats de possession. Ensuite, une fois cela réglé, ils devront retourner dans le système provincial pour obtenir une homologation. Le système actuel permet au ministre, qui agit dans les faits à titre de tribunal successoral, de gérer le tout de façon très efficace. Cette efficacité sera perdue.
Les familles qui seront chargées de faire homologuer des testaments indiens devront faire l'aller-retour entre le règlement qui s'applique dans leur province et la Loi sur les Indiens s'il y a des questions foncières dans une réserve, pour ensuite revenir au système provincial. On s'attend à ce que cela accroisse les coûts.
Un autre élément que nous avons cerné dans notre mémoire est le fait que la plupart des successions indiennes, pour être franc, ne valent pas grand-chose. Généralement, la succession indienne type de quelqu'un qui réside ordinairement dans une réserve est constituée d'intérêts fonciers dans la réserve, comme un certificat de possession. Cela inclut généralement une maison familiale. Toutefois, la valeur de ces terres tend à être bien inférieure à ce à quoi on pourrait s'attendre à l'extérieur des réserves, particulièrement dans les collectivités rurales. La valeur d'un certificat de possession n'est généralement pas très élevée sur le marché.
D'autres dispositions de la Loi sur les Indiens exigent que les certificats de possession ne soient achetés et vendus que par d'autres membres de la bande, et bien sûr, aucune hypothèque ne peut être obtenue pour les payer, ce qui donne lieu à des transactions en espèces. Étant donné qu'il existe un marché restreint pour les certificats de possession — à savoir, les autres membres de la bande — et du fait que les prêts sont inaccessibles, le prix de ces propriétés foncières dans les réserves est bien plus faible.
En quoi cela constitue-t-il un problème? C'est un problème dans la mesure où les curateurs publics des provinces et territoires ne s'occupent tout simplement pas des petites successions. S'ils ne peuvent obtenir de frais suffisants de la succession, ils refusent de s'en occuper. Donc, si un testament est déclaré nul, en tout ou en partie, pour quelque raison que ce soit, ou si le testament établit que l'on peut obtenir tous les biens personnels à l'exception des biens immobiliers situés dans une réserve qui doivent être transférés selon la Loi sur les Indiens, la valeur de cette succession pourrait être si faible qu'il n'y aurait aucune garantie. Les curateurs publics des provinces ne s'y intéresseront tout simplement pas.
Par conséquent, l'une de nos grandes préoccupations est que les biens fonciers dans les réserves restent au nom d'Indiens décédés, car il n'y aurait pas d'incitatif financier pour effectuer un processus d'homologation ou, dans les cas des successions ab intestat, un processus d'administration. On pourrait avoir des certificats de possession qui restent au nom d'Indiens décédés pendant des années. Personne ne s'intéresserait à régler ces questions de succession. Ce ne sera plus le ministère des Affaires indiennes qui les administrerait. On vise à éliminer la compétence du ministre. Les curateurs publics ne seront pas en mesure d'en retirer des frais, ce qui ne les intéressera donc pas. Bien honnêtement, dans bien des cas, certaines familles de ces petites collectivités rurales n'auront probablement pas accès à la justice, du point de vue de leur capacité de recourir à des conseillers juridiques qui s'y connaissent en la matière ou de leur capacité de financer le processus d'homologation.
Nous avons aussi d'autres préoccupations, que je n'aborderais que rapidement et qui sont propres aux Premières Nations. Nous mentionnons la question des époux simultanés. La Loi sur les Indiens offre une certaine souplesse pour ce qui est des situations dans lesquelles une personne peut être mariée à une autre, dans sa jeunesse, par exemple, mais vers la fin de sa vie, elle vit avec quelqu'un d'autre. La Loi sur les Indiens permet au ministre de s'assurer qu'un testament comporte des dispositions pour toutes les personnes à charge d'un Indien décédé, ce qui peut inclure des conjoints simultanés. D'après ce que nous savons, cette souplesse n'existe pas dans les provinces.
En outre, l'adoption coutumière indienne est une autre grande préoccupation. En vertu de la Loi sur les Indiens, la définition d'un enfant comprend les enfants qui sont adoptés selon la tradition juridique autochtone. La définition d'un enfant dans la plupart des provinces et des territoires n'y fait pas référence. Donc, lorsque des enfants sont les bénéficiaires d'un testament indien, il peut s'agir actuellement d'enfants qui ont été adoptés selon la tradition de la Première Nation. Cela pourrait ne plus être le cas, car les bénéficiaires pourraient perdre leurs droits en vertu des testaments indiens.
J'ai déjà parlé du problème de la division des terres dans les réserves; je n'y reviendrai donc pas.
La forme des testaments est une autre question qui nous inquiète beaucoup. En vertu de la Loi sur les Indiens et du Règlement sur les successions d'Indiens, un testament doit être fait par écrit, doit être signé par le testateur et doit exprimer les souhaits de celui-ci. C'est tout. C'est une définition beaucoup plus large que ce qui existe dans la plupart des provinces et des territoires.
À l'heure actuelle, et nous fournissons ces chiffres dans notre mémoire, seulement 5 à 10 p. 100 des Autochtones qui résident ordinairement dans une réserve rédigent des testaments. Le fait que ce projet de loi ferait en sorte que les testaments indiens relèvent du système provincial et donc, qu'ils se conforment aux formes de testaments exigées en vertu des lois provinciales, pourrait réduire le nombre d'Indiens résidant ordinairement dans une réserve qui ont un testament. Cela pourrait accroître le nombre des successions non testamentaires d'Indiens qui résident ordinairement dans une réserve, en raison du fait qu'ils doivent se conformer au système provincial. Il est vrai que certaines provinces autorisent les testaments olographes, à savoir un simple morceau de papier signé par le testateur, mais ce n'est pas le cas dans un grand nombre de provinces. Il faut être conscient de cette réalité dans le cadre de l'examen du projet de loi.
J'ai abordé brièvement la capacité actuelle du ministre d'invalider les testaments dans des circonstances injustes. Les lois provinciales prévoient l'invalidation de testaments dans des circonstances de contrainte ou en cas d'incapacité testamentaire. La Loi sur les Indiens offre actuellement une plus grande souplesse au ministre, surtout lorsqu'un testament prévoit le transfert de terres contrairement à la Loi sur les Indiens ou contre l'intérêt du public. À l'heure actuelle, la Loi sur les Indiens laisse au ministre et au ministère beaucoup de souplesse pour attribuer aux bénéficiaires d'un testament ce qui leur revient et pour modifier les testaments en conséquence. Un tel degré de souplesse n'existe pas dans bon nombre de régimes provinciaux et n'est pas uniforme partout au pays, comparativement à ce qui existe en ce moment.
Bien qu'il vise à éliminer la compétence exclusive du ministre en matière de testament et de succession, le projet de loi prévoit la conservation des dispositions relatives aux successions non testamentaires qui existent dans la Loi sur les Indiens. Comme je l'ai mentionné plus tôt, plus de 90 p. 100 des Indiens qui résident ordinairement dans une réserve meurent sans laisser de testament. Cependant, la suppression de la compétence du ministre en vertu de l'article 43 de la Loi sur les Indiens signifie que le ministre a certaines obligations, mais qu'il n'aura plus compétence pour s'en acquitter aux termes des dispositions relatives aux successions non testamentaires.
Dans notre mémoire, nous parlons de ce que nous considérons comme des conséquences non souhaitées et possiblement fâcheuses. Par exemple, en vertu de l'article 48 de la Loi sur les Indiens, le ministre a toujours un rôle à jouer pour ce qui est de l'évaluation des biens de la succession et des successions non testamentaires, et il doit aussi fournir une opinion sur la question de savoir si les enfants et les personnes à charge bénéficient, comme il se doit, de la succession. À l'heure actuelle, le ministre et le ministère servent de garantie administrative pour les successions indiennes non testamentaires. Si ce n'est pas le cas, si le ministre et le ministère deviennent des joueurs plus passifs, bien que le ministre ait l'obligation d'émettre ces opinions, il ne pourra le faire tant qu'un administrateur privé ne sera pas mandaté par une famille indienne pour demander ces opinions au nom d'un Indien décédé. Cela signifie que les obligations du ministre dépendraient en quelque sorte de la diligence des administrateurs privés ou de la nomination de ces derniers.
Cela me permet de revenir à mon point précédent. Dans certaines successions indiennes, la valeur de la succession n'est tout simplement pas assez élevée pour qu'il vaille la peine de nommer un administrateur. Leurs honoraires et frais ne seront pas couverts.
La dernière partie de notre mémoire, la troisième, porte sur l'abrogation des dispositions relatives aux règlements administratifs. Il s'agit là de l'article 85.1 et du fait que certaines Premières Nations sont dotées de règlements administratifs qui gouvernent la consommation de substances toxiques sur leur territoire, et ces Premières Nations pourraient être touchées. Parallèlement, le ministère pourrait ne pas considérer que les autres pouvoirs liés à la promulgation de règlements administratifs sont semblables à ceux de l'article 85.1; par conséquent, les règlements administratifs existants pourraient continuer de s'appliquer. Selon nous, cela pourrait être problématique pour les Premières Nations qui ont choisi de se doter de règlements administratifs interdisant les substances intoxicantes.
La dernière page de notre mémoire contient une série de recommandations. Notre première recommandation est que l'article 7 du projet de loi soit mis de côté afin de permettre au ministère d'étudier de façon plus approfondie la meilleure façon de réformer les dispositions relatives aux testaments et aux successions afin d'éviter de créer certaines des conséquences non souhaitées dont nous avons parlé ou afin de les régler de façon plus holistique.
Nous remarquons aussi que le projet de loi ne prévoit aucune disposition de transition, ce qui rend impossible son entrée en vigueur progressive. Si le projet de loi est adopté, il aura immédiatement force de loi, et ces dispositions de la Loi sur les Indiens seront abrogées sans que l'on puisse en examiner les effets.
Si ces deux recommandations ne sont pas acceptables, nous avons une liste d'autres recommandations. Il s'agit de recommandations fragmentaires de solutions de rechange qui portent, par exemple, sur la protection de la validité des testaments établis afin qu'ils ne deviennent pas immédiatement nuls dès l'entrée en vigueur du projet de loi, et ce genre de choses.
Merci, monsieur Devlin.
Merci, madame Thomson.
Nous allons céder la parole à Mme Crowder pour les sept premières minutes.
Merci, monsieur le président.
Merci, madame Thomson et monsieur Devlin, de votre exposé très approfondi. Je vous suis reconnaissante de nous avoir envoyé les documents d'information.
Il semble que l'article 7 du projet de loi C-428 soit le plus problématique. Il y a aussi d'autres problèmes, mais c'est le plus épineux. J'aimerais que vous éclaircissiez quelques points relativement à vos recommandations précises.
En ce qui a trait à l'amendement que vous recommandez concernant les « conjoints de fait » dans le cas des Indiens qui résident ordinairement dans une réserve, le paragraphe 2(1) de la loi définit déjà cette notion. On considère que le paragraphe 2(1) de la loi prévaudrait même si l'article 7 du projet de loi C-428 était conservé. Y a-t-il quelque chose qui m'échappe? Car la définition existe déjà.
L'article 2(1) de la Loi sur les Indiens indique ce qui suit:
« conjoint de fait » La personne qui vit avec la personne en cause dans une relation conjugale depuis au moins un an.
Merci de votre question.
Pour y répondre brièvement, une fois que les dispositions de la Loi sur les Indiens relatives aux testaments seront abrogées, ce sont les définitions provinciales de conjoint de fait qui prévaudrait pour ce qui est des régimes de testaments et de successions dans les provinces et territoires où ils ont cours.
Vous avez donc raison dans le sens où la définition de conjoint de fait de la Loi sur les Indiens serait conservée dans le reste de la loi, mais les régimes qui s'appliqueraient aux testaments et aux successions seraient les régimes provinciaux. Il faut donc s'en remettre à la définition de conjoint de fait dans le régime provincial qui s'applique pour ce qui est des testaments. C'est ainsi que cela fonctionnerait.
Si on insérait une définition visant expressément les testaments et successions, en faisant référence à l'article 2(1), cela aurait-il préséance sur les lois provinciales?
Oui. Encore une fois, il s'agit de la doctrine de l'exclusivité des compétences. Chaque fois qu'on a... Désolé d'être aussi technique d'aussi bonne heure, mais...
... chaque fois qu'une loi fédérale précise comble un vide, en quelque sorte, elle a alors préséance sur les lois provinciales.
Cela revient en quelque sorte à notre première recommandation. Je déconseille le comité d'adopter une approche fragmentaire dans ce type de réforme. Il y a un grand nombre d'éléments dont il faut tenir compte, et il est très complexe de déterminer comment les régimes de testaments provinciaux fonctionneraient pour les successions indiennes. C'est quelque chose qui doit faire l'objet d'une réflexion approfondie. Cela ne saurait se résumer au simple fait d'ajouter la mention selon laquelle l'article 2 de la Loi sur les Indiens, en ce qui a trait au conjoint de fait, continue de s'appliquer. Il se peut qu'un tel ajout ne permette pas de résoudre entièrement le problème.
Je suis entièrement d'accord avec vous. Je ne pense pas que la solution consiste à apporter une modification isolée.
Selon la procédure que nous devons suivre, il faudrait que le comité vote contre l'article 7. En fait, on ne peut pas proposer de motion visant la suppression de l'article 7 à l'étape de l'étude du projet de loi au comité. Cela ne peut être fait qu'à la Chambre. Il faudrait que le comité accepte de voter contre l'article 7.
Si le comité refuse de voter contre l'article 7, y a-t-il moyen, à ce moment-là, de modifier cet élément ridicule du projet de loi, qui aura des conséquences imprévues? Vous en avez très bien présenté un certain nombre. Ce que j'essaie de savoir, c'est que si on ne parvient pas à s'entendre sur le fait de supprimer l'article 7 en votant contre cette disposition, sera-t-il possible d'apporter des amendements, même si l'on n'appuie pas l'article 7?
C'est ce que je veux savoir. Ce n'est pas que je pense que c'est une bonne façon de s'y prendre, bien au contraire.
En ce qui a trait à la partie (c) de votre recommandation 3, « une définition qui réserve un pouvoir et une compétence résiduelle au ministre en vertu de l'article 43 à l'égard des successions non testamentaires restant régies par la Loi sur les Indiens », d'après l'opinion juridique que nous avons obtenue, cela supposerait un amendement à l'article 7 afin que les paragraphes 43(c) et (d) ne soient pas inclus dans les articles abrogés 42 à 47 pour leur permettre de rester en vigueur, étant donné que les pouvoirs du ministre prévus en vertu de l'article 43 ont trait aux successions non testamentaires. Est-ce bien ce que vous proposez?
C'est tout à fait ce que nous proposons. En raison du libellé de la Loi sur les Indiens et du fait que le ministre a une compétence exclusive en vertu de l'article 42 de la Loi sur les Indiens, les articles suivants, qui portent sur les testaments et les successions, sont tous combinés. Si l'on se débarrasse des articles 42 et 43 en ce qui a trait aux testaments, on se débarrasse aussi de cette compétence exclusive par rapport aux successions non testamentaires.
Étant donné que nous n'entrevoyons pas que les curateurs publics pourraient intervenir pour servir, en quelque sorte, de garantie définitive, c'est-à-dire pour aider à régler les successions non testamentaires d'Indiens qui résident ordinairement dans une réserve, nous pensons qu'il est vraiment nécessaire que le ministre conserve cette compétence. Donc, en effet, les paragraphes 43(c) et (d) de la Loi sur les Indiens devraient rester là. Même si l'on supprimait les dispositions relatives aux testaments, la compétence sur les successions devrait rester.
Enfin, dernière question. Dans vos recommandations 3(d) et (e), qui ont trait au fait que le ministre ne recevra plus d'avis du décès d'Indiens résidant dans une réserve, le paragraphe 3(1) de la Loi sur les Indiens impose une exigence d'avis. Il se lit comme suit: « Aussitôt que possible après le décès d'un Indien, le surintendant doit faire parvenir au ministre un avis du décès, en la forme prescrite. »
Étant donné qu'il y a déjà un autre article de la loi qui s'occupe des avis au ministre, cela va-t-il suffire, ou va-t-on se retrouver avec le même cas que celui des conjoints de fait?
Absolument. Il s'agit du paragraphe 3(1) du Règlement sur les successions d'Indiens, qui n'est pas abrogé.
Je vois. D'accord.
Le problème est que le surintendant ne sera pas nécessairement au courant des successions non testamentaires. Puisqu'il n'y a pas de compétence exclusive, personne ne sera tenu d'informer le ministère des Affaires indiennes du décès de quelqu'un qui résidait ordinairement dans une réserve. Il n'y aura plus d'agents des successions pour faire ce type de recherche et s'assurer que la famille fait tout ce qui s'impose.
Dans un grand nombre de ces successions non testamentaires, un membre de la famille joue le rôle d'administrateur. Je ne suis pas en train de suggérer que le ministère joue le rôle d'administrateur dans chaque succession non testamentaire. Ce n'est pas vrai. Souvent, les gens décident d'agir — vous savez, un plus proche parent ou ce genre de personne. Étant donné la présence administrative actuelle du ministère des Affaires indiennes et son pouvoir de faire ces recherches, les gens sont beaucoup plus proactifs lorsque quelqu'un décède.
Il peut y avoir des changements aux listes des bandes. Parfois, on envoie une nouvelle liste des membres un an plus tard en disant: « Ah oui, telle personne est décédée ». Si l'article 7 est adopté, ce type de situation pourrait être la première occasion, pour le ministère, de s'apercevoir que quelqu'un est décédé, alors que les choses se produisent beaucoup plus rapidement à l'heure actuelle, puisque le ministère dispose actuellement d'une infrastructure administrative pour s'occuper des changements aux listes des bandes et des successions indiennes.
Merci, monsieur le président.
Merci, Tamra et Christopher. Christopher, je suis ravi de vous revoir et je vous remercie de votre analyse.
Mes questions vont porter sur l'article 7 du projet de loi d'initiative parlementaire. Tout d'abord, je voudrais faire quelques observations préliminaires, si vous le voulez bien, sur la situation actuelle et sur la façon dont un certain angle pourrait être utile.
On a discuté de l'utilisation de mots comme « progressif » et « fragmentaire ». S'agissant de la situation actuelle, nous dirions que c'est « progressif », alors que d'autres collègues pourraient dire « fragmentaire ». Cependant, quel que soit l'adjectif utilisé, un dialogue très sérieux s'est engagé, comme le souhaitait le député qui, j'ajouterais, est descendant d'une Première Nation. Ainsi, on a pu discuter plus particulièrement des articles 42 à 47 et, à la suite de votre rapport, de l'article 48 et ensuite de l'alinéa 2(1) sur lequel cela a une incidence.
Autrement dit, il se peut que nous soyons en présence de quelque chose de plus que progressif. Je pense que vos recommandations ont peut-être un caractère algorithmique, et c'est là-dessus que porteront mes questions. Toutefois, chaque fois qu'il s'agit de la transmission de biens par succession, par testament ou par des mécanismes d'appel, il y a évidemment des enjeux concernant la distribution des biens non testamentaires, et je vous remercie de nous avoir donné ces renseignements complémentaires.
De la même façon, je pense que l'alinéa 2(1) pose de graves problèmes au regard de la coutume indienne. Christopher, ma question porte précisément sur la coutume indienne, et je voudrais savoir pour quelles raisons, si vous en connaissez, on constate une absence de définition dans quelques provinces et territoires. La réponse à cette question sera sans doute très courte.
Ensuite, mes questions porteront plus précisément sur vos recommandations. À la recommandation 1, vous proposez de supprimer l'article 7 et à la recommandation 2, vous proposez un article sur l'entrée en vigueur. On a donc le choix entre l'une ou l'autre de ces recommandations pour trouver le meilleur moyen de réformer les testaments et les successions sans créer de conséquences non voulues ou de vides législatifs. Si on choisissait votre deuxième recommandation concernant l'entrée en vigueur, quel serait alors l'échéancier?
Ensuite, dites-moi si vous avez des recommandations préliminaires concernant une nouvelle façon d'administrer les testaments et les successions pour que nous ayons une idée de la façon dont les choses se dérouleront?
Je vous ai donc donné la liste de mes questions, en espérant que vous n'aurez aucun mal à y répondre et à les développer.
Merci.
À propos des adoptions coutumières, que je sache, seule la Loi sur les Indiens les reconnaît dans sa définition d'enfant, conformément aux traditions juridiques autochtones. À ma connaissance, c'est seulement la common law, c'est-à-dire la jurisprudence, qui reconnaît également les adoptions coutumières. Pour autant que je sache, aucune province ni aucun territoire...
Il est vrai que les avocats sont rarement en désaccord, mais je pense que ce genre de disposition existe en Colombie-Britannique. Il se peut...
Il se peut que ce soit une nouvelle loi, mais elle ne va peut-être pas assez loin. Je ne sais pas, mais ce n'est assurément pas le cas dans le reste du pays.
Une définition très claire figure dans la Loi sur les Indiens et elle englobe les adoptions coutumières. C'est une chose...
Oui, on reconnaît des droits civils à un groupe de gens qui pourraient en être privés si l'article 7 demeure tel quel.
C'est, en effet, une préoccupation.
Si je me souviens bien, deuxièmement, vous m'avez demandé quel serait l'échéancier pour l'entrée en vigueur. Nous n'avons pas fait de recommandations précisément à cet égard. Nous avons songé qu'il valait mieux laisser cette décision au bon jugement du comité.
Pour qu'une loi complémentaire, comme nous le recommandons, soit adoptée afin de combler le vide législatif que causerait l'abrogation des articles 42 à 47 de la Loi sur les Indiens, il faudra sans doute attendre de six mois à un an afin que soit complété l'examen par le Parlement. C'est d'habitude l'échéancier que les tribunaux donnent au Parlement pour modifier une loi déclarée inconstitutionnelle. Je sais que c'est court, étant donné le fonctionnement du Parlement, mais je ne pense pas qu'il soit réaliste de songer à moins d'un an.
Toutefois, nous n'en avons pas parlé dans notre mémoire; voilà donc ma tentative de réponse à votre question.
En effet, c'est ce que je voulais ajouter en troisième lieu. Je pense que nous aimerions participer au processus. L'ABC pourrait être une aide précieuse dans le processus de refonte du régime des testaments et successions des Indiens afin d'améliorer ce qui existe déjà et de l'aligner sur les régimes territoriaux et provinciaux, tout en tenant compte des distinctions spéciales encore nécessaires en ce qui a trait aux terres des réserves indiennes — et ce genre de choses.
Il y a aussi encore de nombreuses lois dont il faut tenir compte, ce qui rend la tâche plus complexe. Songeons, par exemple, aux biens immobiliers matrimoniaux dans les réserves. D'ailleurs, une loi à cet égard entrera en vigueur sous peu. Il y a les codes fonciers prévus dans la Loi sur la gestion des terres des Premières Nations. Tous ces régimes ont des conséquences diverses pour les Indiens qui souhaitent transmettre à leurs héritiers les terres qu'ils possèdent dans les réserves.
En effet, nous serions ravis de participer à un dialogue soutenu sur la façon de réformer cet aspect en particulier. Je ne peux pas vous en dire plus aujourd'hui.
Vous avez parfaitement raison. Je me suis demandé si vous alliez poser une question qui n'allait durer que cinq secondes, mais ce n'est pas le cas.
Madame Bennett, vous avez la parole pour sept minutes.
Merci pour le mémoire que vous nous avez remis. Il nous est très utile et nous a même servi lors de séances précédentes. Merci encore, même si vous venez témoigner à la fin du processus.
Je pense que nous avons tous été assez inquiets, à cause des propos très fermes que vous tenez dans votre mémoire. Par exemple:
La section de l'ABC n'est pas favorable à l'abrogation proposée des articles 42 à 47 de la Loi sur les Indiens. Si l'article 7 du projet de loi C-428 est adopté, il en découlera d'importants méfaits et difficultés...
Je pense que cela confirme ce que mon collègue a dit, à savoir qu'il nous faut convaincre le comité que la bonne chose à faire est de rejeter cet article, à condition que vous et d'autres puissiez collaborer avec le député pour élaborer un projet de loi complémentaire qui pourrait entrer en vigueur en temps utile afin de régler la complexité des testaments et successions et afin de garantir qu'il n'y a pas de vide législatif et que les problèmes que vous avez énumérés y trouvent une solution définitive.
Est-ce bien ce que vous conseillez aux membres du comité?
Oui, c'est cela.
Une partie des dossiers dont je m'occupe à mon cabinet — et ils ne sont pas nombreux, mais quand même — traitent de testaments et de successions pour les Indiens, et il y a beaucoup de complications rien qu'avec le régime actuel. Voilà pourquoi il serait intéressant que l'ABC participe à une certaine réforme à cet égard.
Selon les dispositions actuelles de la Loi sur les Indiens, étant donné que les bénéficiaires peuvent être soit des membres d'une bande, soit ne pas appartenir à une bande, être des Indiens inscrits, ou non, chaque fois qu'il y a des biens réels qui sont légués dans une réserve, les choses peuvent devenir très compliquées. Ainsi, cela entraîne des difficultés pour les membres de la famille. Souvent, les gens ont grandi ensemble, mais parce que l'un est un Indien inscrit et l'autre ne l'est pas, le premier peut hériter de la terre et l'autre, non. Ils sont alors forcés de vendre la terre. Pour régler la succession, il faut que la vente se fasse en vertu de l'article 50 afin que la personne qui n'est pas indienne puisse obtenir la valeur de ce qui lui est légué. Ce sont des difficultés qui existent actuellement. Les difficultés que nous avons décrites dans notre mémoire ne feraient qu'exacerber cette situation.
Ainsi, ce n'est pas non seulement que les héritiers éprouvent des difficultés, mais aussi l'ensemble de la bande. Si on ne peut pas léger une terre dans la réserve, si bien qu'elle demeure au nom des Indiens décédés pendant des années, le conseil de bande et les Premières Nations sont privés de la possibilité de procéder à toute réforme agraire dans leur propre réserve et à toute mise en valeur de ces terres. Ainsi, il est impossible, presque pour toujours, de les mettre en valeur ou de les utiliser au bénéfice d'autres membres de la bande, ce qui pourrait permettre à la Première Nation de prospérer.
J'ai rencontré ce genre de situations dans plusieurs dossiers. Ce genre de différends à propos des terres peut durer littéralement pendant des générations et empêche les propriétaires particuliers de mettre leur terre en valeur, et la bande n'a pas non plus la possibilité de le faire. Cela peut aboutir à des problèmes de gouvernance très difficiles à démêler et, dans la mesure où on pourrait empêcher cela ou éviter d'exacerber la situation, nous devrions tenter de réformer cet aspect-là afin d'éviter ce genre de litiges.
À défaut de cela, nous pourrions apporter un amendement concernant l'entrée en vigueur en attendant que soit déposé un projet de loi complémentaire, n'est-ce pas?
D'accord.
Je pense que les consignes sont claires pour les membres du comité.
Évidemment, le processus de consultation nous inquiète tous énormément. Sans consultation de gouvernement à gouvernement, les choses n'aboutiront probablement pas.
Vous reconnaissez pourtant que, dans le cas des articles qui sont désuets, c'est un pas en avant que de permettre à un projet de loi d'initiative parlementaire de les supprimer, car ils n'ont jamais été utilisés et ils sont complètement périmés, n'est-ce pas?
Oui.
S'agissant des écoles, par exemple, il n'existe plus de pensionnats. En outre, toutes les bandes des Prairies sont exemptées des dispositions concernant le troc et le commerce dans les provinces des Prairies.
Autrement dit, le projet de loi serait utile à l'avenir s'il se bornait à traiter des éléments dont on a besoin de se débarrasser, n'est-ce pas?
À propos des réserves où l'alcool est interdit et des réserves spéciales, avez-vous des conseils à nous donner?
Nous signalons dans le mémoire qu'il y a certaines nations qui ont adopté ce genre de règlements administratifs. Il s'agirait de voir si elles souhaitent les maintenir et si les autres pouvoirs de prendre de tels règlements prévus dans la Loi sur les Indiens seraient suffisants pour les maintenir.
Je ne pense pas que nous en ayons proposé dans le mémoire.
Nous en avons parlé pour attirer l'attention des membres du comité là-dessus.
Oui, nous le pourrions.
Souvent, les Premières Nations donnent une interprétation différente du pouvoir général prévu à l'article 81 concernant l'adoption de règlements administratifs et parfois, le ministère n'est pas d'accord. Ainsi, le ministère peut invalider certains règlements administratifs, alors qu'une Première Nation estime qu'ils ont été édictés comme il se doit en vertu de son pouvoir de maintenir l'ordre public.
Cela peut entraîner une divergence d'opinions administratives, ce qui a des conséquences juridiques. Si le ministère décrétait que les Premières Nations qui ont pris des règlements administratifs sur les boissons alcoolisées peuvent les maintenir en vertu de l'article 81, ce serait une solution.
Il faut qu'on réfléchisse à cet aspect-là afin que les Premières Nations qui se sont dotées de ces règlements administratifs et qui veulent les maintenir puissent disposer d'un mécanisme pour le faire, de sorte que ces règlements ne soient pas invalidés.
Merci, monsieur le président.
Merci à tous deux d'être venus aujourd'hui.
Monsieur Devlin, merci de votre exposé et du mémoire.
Je voudrais parler un peu des nouvelles dispositions prévues dans le projet de loi en ce qui concerne les règlements administratifs. À la page 3 de votre mémoire, vous signalez que l'approbation du ministre ne serait désormais plus nécessaire pour qu'un nouveau règlement administratif entre en vigueur, et je cite:
La section de l'ABC croit que ce sera là un changement positif.
Pouvez-vous nous parler davantage de cet aspect, s'il vous plaît?
C'est dans le même ordre d'idées que la réponse que je viens de donner.
Il arrive souvent que des Premières Nations exercent leur pouvoir de légiférer en vertu de l'article 81. Les règlements administratifs sont envoyés au ministère des Affaires indiennes, qui peut les annuler à l'intérieur de 40 jours.
Le ministère a tendance à les annuler. En effet, il a des politiques très arrêtées quant à la nature des règlements administratifs qu'il va valider, contrairement à ceux qu'il va annuler. Il arrive parfois qu'il y ait divergence d'opinions entre la Première Nation et le ministère quant à la validité d'un règlement administratif.
Le résultat de cette disposition ferait en sorte que la Première Nation pourrait s'approprier un règlement administratif; ainsi, si elle voulait adopter un règlement administratif en vertu de l'article 81, elle le pourrait. Si quelqu'un pensait qu'un tel règlement n'était pas valide, il pourrait le contester devant un tribunal, et le ministre n'aurait plus la possibilité, lui, de l'invalider.
Tout à fait. Si un citoyen pense qu'une municipalité a outrepassé ses pouvoirs en adoptant tel ou tel règlement administratif, ce règlement peut être invalidé par les tribunaux.
Il me semble que c'était là l'intention de M. Clarke. Il est ici et je suis sûre qu'il pourra défendre lui-même sa proposition. Je me souviens qu'il a affirmé que les gouvernements des Premières Nations étaient traités différemment des autres. À vrai dire, c'est ce qui l'a motivé à vouloir changer la situation.
Même si les Premières Nations ont des gouvernements locaux et réduits — et souvent, moins réduits —, ils peuvent compter sur des conseillers juridiques pour la rédaction de leurs règlements administratifs. Les temps ont changé et désormais, on peut compter sur une grande quantité de conseillers, d'avocats et d'autres experts pour les questions de gouvernance. Si une Première Nation veut exercer son pouvoir de légiférer, alors elle peut s'approprier des lois également.
Merci
D'autres témoins nous ont dit que le projet de loi C-428 imposerait une obligation de publier un règlement administratif, alors que ce n'est pas le cas pour les autres paliers de gouvernement. L'article 10 dispose que les règlements administratifs soient publiés sur le site Internet de la bande, dans la Gazette des premières nations et dans un journal largement diffusé dans la réserve. Cela vient remplacer l'approbation du ministre.
D'après des rumeurs que j'ai entendues, M. Clarke envisage de présenter un amendement à son projet de loi pour que l'exigence de publication d'un nouveau règlement administratif se limite à un seul support plutôt que trois.
Est-ce que l'ABC a une opinion sur cet éventuel amendement? Encore une fois, comment cela se comparerait-il aux exigences de publication imposées aux autres paliers?
Nous n'avons pas d'opinion là-dessus. En tant qu'avocat qui fait de la recherche sur ce domaine, j'opterais pour une publication dans la Gazette des premières nations , mais ce serait pour des raisons de convenance personnelle. Pour ce qui est de la question de savoir si une telle approche est trop coûteuse pour une Première Nation, il faudrait en tenir compte car l'obligation de publier sur ces trois supports signifierait un coût supplémentaire pour la Première Nation.
Même à l'heure actuelle, le ministère a parfois des exemplaires de règlements administratifs, et parfois il n'en a pas. Il peut être très difficile de trouver tous les règlements administratifs qu'une Première Nation a adoptés. Étant donné le système actuel, les ministères peuvent avoir sous la main les règlements administratifs d'une Première Nation en particulier, mais parfois ce n'est pas le cas.
Pour vous, la Gazette des premières nations serait votre choix de prédilection, si vous deviez rédiger des règlements administratifs, n'est-ce pas?
D'accord. Je songeais en particulier à l'accessibilité des règlements administratifs modifiés du point de vue de quelqu'un vivant dans une collectivité, c'est-à-dire pour la population en général, et non seulement pour les membres d'une bande.
Ce ne sont pas toutes les Premières Nations qui ont des sites Internet. Certaines oui, d'autres non. Dans certains cas, les sites Web datent de 10 ou 15 ans. Ils ne sont pas à jour. Cela pourrait être une exigence difficile à respecter.
Je comprends.
J'ai encore une question. Si le projet de loi C-428 est adopté, les collectivités de Premières Nations pourront-elles revoir, abroger ou modifier leurs règlements administratifs? Grâce à cette nouvelle indépendance, pourront-elles modifier leurs règlements comme n'importe quel autre ordre de gouvernement?
Le pouvoir de prendre des règlements administratifs ne changera pas. Ce qui change, c'est la possibilité pour le ministre d'invalider un règlement administratif pris en vertu de l'article 81 de la Loi sur les Indiens. Ainsi, le chef et le conseil pourront encore modifier les règlements administratifs, les abroger ou en prendre d'autres. Le projet de loi C-428 ne vise pas à changer le pouvoir actuel de prendre des règlements administratifs. On propose tout simplement de changer...
[Français]
J'ai pris connaissance de votre mémoire qui aborde les incidences associées à une abrogation éventuelle de l'article 47 de la Loi sur les Indiens. Quelques interventions en comité portaient sur l'incidence que cela aurait au final sur la reconnaissance d'un testament holographe, c'est-à-dire rédigé à la main, et sur les difficultés que cela représente sur le plan du droit civil, notamment au Québec, où la validité n'est pas automatique. Ce document doit donc être validé et authentifié par les cours de justice pour être valide.
J'aimerais entendre votre position à cet effet.
[Traduction]
Merci.
Ma connaissance du droit civil est très limitée, mais d'après la recherche que nous avons effectuée et d'après ce que nous avons compris, au Québec, les testaments doivent être authentifiés seulement s'ils sont contestés. Selon la pratique courante, les testaments sont acceptés tels quels, à moins qu'ils soient contestés devant la cour.
Voilà ce que nous avons reçu comme renseignement.
[Français]
Non, à partir du moment où c'est un document holographe, c'est une exigence. Il faut qu'il soit authentifié par une cour de justice. Autrement, ce document n'est pas valide. C'est une des prémisses essentielles de la reconnaissance d'un testament holographe et de sa présentation en cour.
[Traduction]
En vertu de la Loi sur les Indiens, à l'heure actuelle, le testament olographe, un papier signé par le testateur, est réputé valide. Donc, à la suite des modifications, comme c'est le cas dans les autres provinces, les lois que vous avez décrites au Québec auraient préséance, et les testaments indiens pour les Indiens qui résident ordinairement dans les réserves devront être authentifiés à la cour.
[Français]
Selon vous, quelle pourrait en être l'incidence sur le plan économique, compte tenu des réalités socioéconomiques propres aux réserves indiennes et compte tenu des coûts associés à la présentation et la production de documents en cour et à l'introduction de ce type de documents?
[Traduction]
Je crois que l'accès à la justice est une question énorme pour toutes les collectivités autochtones situées dans des régions rurales ou éloignées. Si vous devez vous adresser au tribunal pour faire authentifier votre testament et franchir toutes sortes d'étapes, au lieu de pouvoir demander au ministère des Affaires indiennes de vous aider, le coût va augmenter. Pour les gens à revenu modeste qui habitent très loin des services judiciaires, cela pourrait vouloir dire qu'un testament ne serait pas vérifié ou approuvé par un tribunal et, malgré l'existence du testament, des familles pourraient simplement ne pas avoir accès au système judiciaire. La question n'est donc pas résolue.
[Français]
[Traduction]
[Français]
[Traduction]
Oui. Je crois que nous allons nous en tenir à cela.
Nous vous sommes reconnaissants d'avoir été des nôtres ce matin, monsieur Devlin et madame Thomson. Pour ceux d'entre nous qui viennent de l'ouest du Canada, c'est encore très tôt le matin; nous sommes donc heureux que vous ayez accepté notre invitation et que vous soyez aussi bien préparés ce matin.
Nous allons suspendre la réunion pendant quelques minutes afin d'organiser notre table ronde.
Chers collègues, nous allons reprendre la séance. Silence, s'il vous plaît.
Aujourd'hui, pendant notre deuxième heure, nous allons suivre un processus différent. En tant que membres du comité, vous savez que nous allons utiliser une approche de table ronde pendant la deuxième heure. Nous allons commencer par nous présenter à tour de rôle, après quoi nous passerons à une discussion générale du projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui.
D'après ce que j'ai compris, il y a des témoins ce matin qui espéraient faire des exposés ou des déclarations préliminaires de 10 minutes afin de les inclure dans les témoignages du comité. Ils n'auront pas l'occasion de lire leurs mémoires, mais ils pourront les remettre au comité qui les consignera ensuite au compte rendu. C'est tout à fait conforme aux règles du comité; donc, s'il y a des invités qui veulent nous faire parvenir leurs documents, je me ferai un plaisir de les recevoir. Je crois que les membres du comité sont d'accord.
Madame Bennett, sur cette question.
Je crois que nous devrions donner aux invités l'assurance que nous allons également lire leurs mémoires. Il y a eu un petit malentendu, parce que je crois qu'on s'attendait à ce que la table ronde dure deux heures, et il est difficile d'inclure autant d'intervenants dans une heure.
Nous allons faire de notre mieux pour veiller à ce que vos voix soient entendues.
Nous allons commencer par un tour de table. Je vais d'abord me présenter. Je m'appelle Chris Warkentin. Je suis président du comité, et c'est un privilège de vous avoir parmi nous. Je suis content de voir des gens de l'Alberta aussi. Nous vous souhaitons, à tous, la bienvenue et nous vous remercions d'être venus.
Je vais commencer par Jean. Nous allons faire le tour de la table, ce qui comprend nos invités. Vous allez vous présenter à tour de rôle.
Je m'appelle Jean Crowder, et je suis la députée de Nanaimo—Cowichan ainsi que la porte-parole pour les affaires autochtones du NPD.
Je m'appelle Jonathan Genest-Jourdain et je suis le porte-parole adjoint pour les affaires autochtones.
Je m'appelle Carol Hughes, et je suis la députée d'Algoma—Manitoulin—Kapuskasing dans le nord de l'Ontario ainsi que la porte-parole adjointe pour la santé des Autochtones.
Je m'appelle Carolyn Bennett; je suis la députée de St. Paul, à Toronto et la porte-parole pour les affaires autochtones et du Nord pour le Parti libéral.
Je suis le chef Calvin Sanderson. Je représente la bande Chakastaypasin de la nation crie, chapeautée par la nation crie de James Smith.
Merci.
Je suis le chef Roland Twinn, chef de la Première nation de Sawridge. Je suis aussi le grand chef des nations membres du Taité 8 en Alberta.
Je m'appelle Michael McKinney, et je suis le directeur général et l'avocat général pour la Première nation de Sawridge.
Je m'appelle Craig Makinaw, et je suis le chef de la bande Ermineskin et le grand chef de la Confédération du Traité 6.
Bonjour. Je m'appelle Brent Rathgeber, et je suis le député d'Edmonton—St. Albert.
Je vous souhaite la bienvenue.
Je m'appelle Stella Ambler; je suis la députée de Mississauga-Sud et je suis également la présidente du comité spécial sur les disparitions et meurtres de femmes autochtones.
Je vous souhaite la bienvenue.
Bonjour. Je m'appelle Ray Boughen, et je suis le député de Palliser, qui se trouve au centre-sud de la Saskatchewan.
Je m'appelle Rob Clarke, et je suis le député de Desnethé—Missinippi—Rivière Churchill, qui se trouve dans le nord de la Saskatchewan.
Merci.
Nous avons également parmi nous certains membres de notre personnel. Je vous présente Tonina et Norah, qui sont nos analystes, ainsi que notre greffier, Jean-Marie, avec qui plusieurs d'entre vous ont communiqué puisque nous avons essayé d'inclure le plus de témoins possible aujourd'hui.
Nous vous remercions d'être venus de régions différentes pour être des nôtres aujourd'hui. Bien sûr, vos opinions sont très importantes, quelle que soit la question, mais surtout pour ce dossier particulier. Lorsqu'il s'agit de la Loi sur les Indiens, ce sont vos collectivités qui seront touchées par toute modification qui y est apportée.
Je crois qu'il y a un consensus partout au pays et dans tous les partis politiques sur la nécessité de remplacer la Loi sur les Indiens parce qu'elle est une relique du passé. Bien sûr, il y a des opinions différentes partout au pays en ce qui a trait à la façon dont on devrait s'y prendre. Le projet de loi C-428 représente une tentative de modification. Nous avons déjà entendu des gens avec des points de vue différents se prononcer sur le projet de loi.
Nous voulons écouter ce que vous avez à dire. Bien évidemment, vous avez non seulement lu le projet de loi, mais vous avez aussi vécu avec la Loi sur les Indiens et vous savez comment ces modifications pourraient vous toucher.
Nous voulons commencer tout de suite et entendre votre point de vue sur le projet de loi.
Bien entendu, le projet de loi comporte plusieurs dispositions. Ceux d'entre vous qui ont entendu tout à l'heure la déclaration de l'Association du Barreau auront appris qu'il y a différentes parties. Je ne veux pas tenir pour acquis que vos opinions sont les mêmes que l'Association du Barreau ou celles des autres témoins.
Cependant, il y a, semble-t-il, des dispositions moins controversées qui portent sur un certain nombre de sujets, tels que la vente ou le troc de produits, l'interdiction de commerce sans permis entre les employés du ministère et les Premières Nations, ainsi que d'autres dispositions portant sur l'absentéisme et les pensionnats en général.
J'ai pensé que nous pourrions commencer par entendre ce que vous pensez de ces dispositions, après quoi nous pourrions passer aux questions reliées aux règlements administratifs et aux testaments et successions.
J'aimerais donc donner la parole à ceux qui aimeraient commencer tout de suite. Si vous avez quelque chose à dire sur la vente ou le troc de produits, sur les approches envisagées, sur le renouvellement de ces dispositions dans la loi, nous aimerions entendre vos commentaires. Si vous voulez parler d'autres choses, sentez-vous libres de le faire. Nous pensions que ce serait une façon d'entamer la discussion ce matin.
Barry, commençons avec vous.
Iyiniw pikiskwewin ki wi pikikwatinawaw.
J'ai été chef pendant 20 ans. Cela fait un bout que je ne le suis plus, mais une fois qu'on a été chef, les autres nous voient toujours comme chef.
Je viens de la Saskatchewan. Dans le temps des traités, le chef Ahtahkakoop était un des grands chefs ayant oeuvré au traité no 6. Il y avait alors deux grands chefs: Mistawasis et Ahtahkakoop. Tous les autres chefs étaient des sous-chefs. Ils étaient les seigneurs des plaines et c'est de là que je viens, de ce groupe de chefs.
Les traités étaient soumis de nation à nation. On a arrêté la ligne télégraphique qui se dirigeait vers la région de Saskatoon parce qu'on devait mettre en place un traité, de nation à nation. En 1876, les gens du gouvernement se sont rendus sur place et ils ont conclu un traité à Fort Carlton. Il a fallu sept ou huit jours pour élaborer le traité. Notre peuple a tenu des cérémonies.
Plus tard, de nombreuses personnes sont parties. Elles ne voulaient pas croire en ces chefs qui avaient conclu un traité, en cette transition vers un nouveau mode de vie. Certains sous-chefs et leurs partisans sont aussi partis. Ils ont pris leur décision et maintenu un équilibre, et ils ont conclu un traité.
Le traité représente la base de nos travaux — le gouvernement en tant que nation et notre peuple en tant que nation. La Loi sur les Indiens a été mise en place de manière unilatérale par le gouvernement pour soi-disant protéger mon peuple, notre peuple. Cet objectif a parfois été atteint mais le gouvernement a abusé et profité de certains aspects pour faire la suppression de notre peuple. Il ne doit pas en être ainsi.
Ce que vous faites aujourd'hui — je félicite le député Clarke et je vous félicite tous d'être ici avec les meilleures intentions pour les membres de notre peuple, peu importe où ils se trouvent, d'un océan à l'autre. Notre peuple et nos chefs examineront le tout du côté législatif. Nos chefs sont sélectionnés pour représenter notre peuple, comme l'étaient jadis les chefs Ahtahkakoop et Mistawasis. Notre peuple, nos chefs doivent recevoir cette même reconnaissance aujourd'hui. Je suis heureux de voir que le chef de la nation crie de James Smith est ici, car il doit y avoir reconnaissance de la contribution des chefs en ce qui a trait aux changements qui doivent être apportés.
Je pense que la disposition sur les pensionnats devrait rester, mais être inversée. Tous ceux qui sont au pensionnat, en Saskatchewan, devraient avoir à parler le cri des plaines. Seul le cri pourrait être parlé et, si quelqu'un parle l'anglais, on lui donne une claque. C'est ce qu'on a fait à notre peuple.
Quatre générations, et maintenant les gens ne savent plus parler le cri. Je n'ai jamais été au pensionnat. Mon grand-père et ma grand-mère m'ont élevé et ne m'ont pas laissé aller au pensionnat. Grâce à cela, je parle le cri couramment. Je connais notre histoire, du début jusqu'à aujourd'hui. C'est une histoire orale qui raconte le déplacement de notre peuple — le Lac Ontario, Kici Sakahikan; le Lac Huron, Onatowew Kami; le Lac Michigan, Misi Kami; et le Lac Supérieur, Kitci Kamis—kayas ochi; toute notre histoire, l'histoire de nos cérémonies.
Nous avons une histoire, mais les pensionnats indiens nous l'ont enlevée. Il serait bien d'enlever cette disposition et nous sommes heureux qu'il y ait eu des règlements, mais ce dont nous avons besoin maintenant, ce sont des lois pour investir de l'argent dans notre langue et notre culture pour notre peuple.
J'ai lu dans les journaux qu'il y a eu à peu près 15 suicides dans une certaine réserve en Ontario. C'est parce que ces jeunes ne connaissent pas leur histoire, leur langue ou leur culture. On voit ici l'effet de tout ce que nous avons subi, de génération en génération. J'ai élevé mes enfants dans la tradition crie, et je ferai de même pour mes petits-enfants. Peu importe ce qui arrive, ils vont apprendre à parler leur langue. Ils parleront le cri.
Voici où je veux en venir: vous devez travailler avec nos chefs. Il faut investir de l'argent pour élaborer des lois par le biais de la Loi sur les Indiens. Les Nisga'a, en vertu de l'entente Nisga'a, ont un système de subventions grâce à vous. Vous avez conclu une entente avec les Nisga'a, mais qu'en est-il du reste des Premières Nations? Nous devons nous contenter d'accords de contribution. Si les provinces ont une part à jouer, c'est en vertu d'un système fiduciaire — un système fiduciaire qui vient du gouvernement fédéral et qui représente le gouvernement fédéral. Ce régime ne refile pas toutes les responsabilités aux provinces pour qu'elles puissent prendre leur propre décision. Non, nos traités ont été conclus avec le gouvernement fédéral — la Reine, la Couronne — et nos chefs se sont tenus debout. Ils ont assuré la paix.
Mon fils a servi en Afghanistan; il s'est battu au front pour le Canada, pour nous tous. Mon père a servi dans la guerre de Corée, dans les forces aériennes. Mon grand-père s'est battu durant la Première Guerre mondiale — il était trop jeune, mais il y est allé. Il a également participé à la Seconde Guerre mondiale.
Nous nous portons donc à la défense du Canada, mais en parallèle, nous devons avoir le respect et la reconnaissance du gouvernement.
Je vous remercie de m'avoir écouté. Je ne prendrai plus de votre temps.
Hai hai.
Merci.
Nous allons continuer. Je vous remercie d'avoir ouvert notre discussion. C'est ce qui est important: que nous, les parlementaires, entendions ce qu'ont à dire les chefs.
Je cède maintenant la parole au grand chef, puis nous continuerons avec un chef régional.
Je vous remercie.
Moi aussi, je viens ici avec de nombreuses préoccupations par rapport à la Loi sur les Indiens. Chez nous, nous avons ce que nous appelons des propriétaires fonciers, et nous avons néanmoins de nombreux obstacles. Le ministère, le bureau régional et le bureau du district nous disent que nous devons réapproprier ces terres. C'est un enjeu qui remonte à 1955, quand le bureau de district nous disait que nous pouvons donner à ces propriétaires fonciers des terres pour assurer leur prospérité et leur permettre d'en tirer profit.
L'autre question porte sur les testaments et les successions. Quand on perd un bien-aimé, il y a des litiges, mais on les règle au sein de la bande. Quand les gens ont recours au bureau régional et au bureau de district, ils doivent attendre près d'un an pour faire traiter leurs demandes afin de régler leurs griefs; en même temps, ils sont assujettis à un tas de paperasserie au sein du système. C'est une des raisons pour lesquelles nous le faisons nous-mêmes, mais on n'aime pas que le chef et les conseils essaient de régler ces testaments à l'interne sans que les bureaucrates fédéraux viennent nous dire quoi faire.
Nous procédons ainsi depuis un certain temps, et pourtant quand les gens meurent dans nos collectivités, leurs noms se trouvent toujours sur la liste des membres de la bande. Ils ne sont pas exclus de cette liste. Ils s'y trouvent encore après leur décès. Beaucoup de ces choses arrivent.
Nous adoptons de nombreux règlements, mais ils sont scrutés à l'échelle fédérale également parce que ce ne sont pas des règlements administratifs qu'on accepte de la part d'une Première Nation. Quand j'ai entendu que les Premières Nations n'avaient pas le droit d'adopter des règlements administratifs...
Nous suivons la coutume de la bande chez nous, c'est-à-dire que nous tenons nos propres élections de bande, et non pas des élections en vertu de la Loi sur les Indiens. Nos gens rédigent leurs propres codes électoraux. Ils ne sont pas rédigés selon le processus établi en vertu de la Loi sur les Indiens. Nous respectons ces élections selon la coutume de la bande, parce qu'elles suivent nos propres lois, que nous avons rédigées. Elles sont respectées au niveau régional et au niveau du district ainsi qu'au niveau fédéral. Elles sont reconnues par les membres de la bande, qui adoptent ces règles lors des réunions de bande. Nous adoptons des règles, d'après ce que disent nos membres, et non pas par l'entremise du chef et des conseils créant ces règlements administratifs.
Vous pouvez constater qu'il y a bien des questions que nous héritons chez nous en tant que chefs d'une Première Nation. Toutefois, en apportant ces changements, nous faisons face à des obstacles.
Je dois féliciter Rob Clarke d'avoir proposé ces changements, parce que chez nous, nous envisageons un projet hydroélectrique qui pourra nous procurer des bénéfices à long terme. Pourtant, la désignation de certaines de ces terres fait obstacle à nos Premières Nations, parce que nous devons nous soumettre à ce processus si nous voulons que le projet profite à nos gens. S'il va de l'avant, ce sera une source de richesse pour les Premières Nations de chez nous.
Pourtant, c'est la Loi sur les Indiens qui nous retient. En tant que chef, je représente 1 050 membres de la Première Nation de Chakastaypasin. La loi a également des conséquences sur nos revendications territoriales. Il y a bien des choses dans la Loi sur les Indiens qui nous touchent, qui nous lient les mains.
Notre aîné ici, Barry Ahenakew, a parlé des ententes des bénéficiaires que nous avons signées. Il y a des sections dans ces ententes qui définissent une bande. Si vous constituez une bande, vous êtes une bande. Ces ententes comportent bien des exigences en matière de reddition de comptes et de transparence que nous devons endurer en échange du financement, allant des rapports mensuels jusqu'à la vérification et la consolidation des vérifications. Il s'agit d'obstacles aux Premières Nations de chez nous quand nous essayons de faire des affaires. D'ailleurs, notre personnel ne reçoit pas de financement adéquat, parce que tous les programmes sont au point mort. Ces éléments, conjugués à la Loi sur les Indiens, nous touchent dans l'ensemble de nos collectivités.
Par rapport aux traités, j'ai toujours dit que si on respectait les traités et si on abolissait la Loi sur les Indiens, nous n'en serions peut-être pas là aujourd'hui.
Vous savez, certaines Premières Nations se conforment à la Loi sur les Indiens et opèrent selon celle-ci, mais ce régime comporte des obstacles et vient empiéter sur la façon dont elles font des affaires et la façon dont elles cherchent à prospérer dans le monde moderne d'aujourd'hui. Un grand nombre de ces dispositions constituent des obstacles pour nous, dans nos collectivités.
Je suis ravi d'être ici avec mes collègues de partout au Canada, d'est en ouest et, je présume, du nord au sud. Chez moi, un grand nombre de Premières Nations aimeraient voir beaucoup d'améliorations à la Loi sur les Indiens.
J'ai énormément de choses à dire, mais j'aimerais laisser mes autres collègues autour de la table s'exprimer. Je sais que nous devons nous en tenir à au moins une heure.
Merci. Si vous avez d'autres questions, j'y répondrai de mon mieux.
Merci.
Je serai bref, dans la mesure du possible. Vous me pardonnerez si je vous adresse la parole, en alternance, en tant que grand chef et chef.
D'abord, j'ai un message à vous transmettre de la part du comité exécutif des chefs du traité no 8 de l'Alberta. Nous nous opposons fondamentalement au projet de loi C-428 en raison du processus. Nous sommes des Premières Nations qui sont signataires d'un traité. Un traité est une entente signée entre des nations souveraines et constitue le commencement de preuve que nous sommes souverains. Modifier la Loi sur les Indiens qui nous touche, sans tenir des consultations convenables avec les titulaires de droits, c'est malcommode et insultant.
En ce qui concerne les aspects particuliers de la question de savoir si l'on devrait enlever ces dispositions archaïques et désuètes, oui, on devrait en supprimer certaines. Or, ce faisant, on créerait un vide. Par exemple, dans notre réserve, si l'on enlève certaines dispositions, le lendemain, l'approbation du ministre ne sera plus exigée pour quelqu'un qui souhaite exploiter des forêts de la réserve. Qu'est-ce qui empêcherait un membre d'une bande d'exploiter les forêts de la réserve et de vendre les billes sans dire un mot à personne?
J'ai entendu qu'on peut faire adopter des règlements administratifs. Pour une Première Nation, à quoi bon faire adopter des règlements administratifs s'il n'existe aucun organisme pour les mettre en application? Vous pouvez communiquer les règlements administratifs à la GRC, dont les agents ont le pouvoir de les appliquer, à leur discrétion. Les agents de la GRC n'ont aucun lien avec le chef ni le conseil, et comme ils font partie d'un système juridique, ils ne sont pas influencés par le chef ni le conseil. Donc, je répète: à quoi bon faire adopter un règlement administratif?
On pourrait publier des règlements administratifs dans la Gazette des premières nations. Je n'ai jamais entendu parler de cette gazette. Si jamais je voulais faire adopter un règlement administratif et le cacher des membres de mon conseil, je le publierais dans cette gazette. Il est probable qu'aucun d'entre eux n'ait jamais vu ni entendu parler de cette publication. Personnellement, je trouve cette idée très étrange.
Bon, maintenant, je ne vais plus parler en tant que grand chef, mais en tant que chef de la Première Nation de Sawridge. Selon moi, en ce qui nous concerne, nous ne voulons plus entendre parler de règlements administratifs. Nous comprenons l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Nous avons le droit inhérent de nous gouverner nous-mêmes et nous avons exercé ce droit. En vertu de ce droit, nous avons passé six ans à élaborer la constitution de notre Première Nation. Elle a été adoptée le 24 août 2009. Nos propres lois ont découlé de cette constitution. Mon mandat de chef, qui dure quatre ans, n'est pas en vertu de la Loi sur les Indiens, mais plutôt de la loi électorale de Sawridge, découlant de notre constitution que le gouvernement du Canada a reconnue par un décret en conseil. Notre Première Nation a été ainsi exemptée des dispositions de la Loi sur les Indiens qui portent sur les élections.
Même si l'on apporte certains de ces changements et qu'on élabore des règlements administratifs, quand on lit bien le texte de la loi, à mon avis, il n'y a pas de consultation convenable. Dans le préambule, il est question de consultations avec les Premières Nations, mais plus loin on lit que le ministre consultera les parties et organisations intéressées. Ça me pose problème.
Notre peuple semble être celui qui est le plus représenté au pays, pourtant on ne nous écoute pas. Je suis le chef élu et officiel de notre Première Nation. Nos membres sont représentés par moi, deux membres du conseil, l'APN, le Congrès des Peuples Autochtones — ou le CPA — et l'Association des femmes autochtones du Canada — ou l'AFAC. Pourtant, aucune de ces organisations n'est venue à notre réserve pour nous demander ce que nous voulions. S'agit-il vraiment d'une consultation convenable? Est-ce que ces organisations nous représentent réellement? Où est le respect pour la relation établie entre nos deux gouvernements?
Je crois que c'est dans cette direction-là qu'il faut se diriger. Et là, je parle en tant que grand chef du traité no 8. Nous avons présenté un document au premier ministre du Canada afin de discuter de la relation scellée par traité et de résoudre certains de ces enjeux. Il faut qu'on reconnaisse notre souveraineté, notre juridiction, notre autorité et nos pouvoirs, pour que nous puissions conclure une entente négociée qui répondra aux questions auxquelles vous cherchez des réponses.
Ce n'est pas vraiment au gouvernement du Canada de régler tous nos problèmes. En tant que Première Nation, nous avons reconnu que nous avons nos propres responsabilités et nous faisons des progrès en ce sens. Le gouvernement devrait mettre des ressources à la disposition des Premières Nations qui veulent poursuivre dans cette direction. Il devrait comprendre qu'il s'agit d'un investissement dans l'avenir, pour que nous ne soyons pas un « fardeau » pour les contribuables canadiens. Personne ne veut être un fardeau.
On a besoin de la guérison au sein de notre collectivité pour nous permettre de nous lever et prendre la place qui nous revient dans ce pays que nous avons accepté de partager. De notre côté, mon arrière-grand-père a signé le traité le 21 juin 1899, à Willow Point, aux abords du Petit lac des Esclaves. C'était le traité numéro 8. Il était un des premiers signataires.
Je suis le septième chef depuis. Donc, nous respectons nos coutumes et nos traditions. Depuis 115 ans, nous avons tenu peut-être 10 élections au maximum, et ce sont toutes des élections par acclamation. Nous vivons de notre manière traditionnelle et nous voulons continuer de le faire sans l'ingérence des autres.
Merci.
Merci, chef.
Avant de poursuivre, je veux mentionner qu'il y a trois personnes qui n'ont pas encore pris la parole, et nous voulons que vous ayez l'occasion de vous prononcer, si vous voulez. Alors, n'hésitez pas à intervenir.
Monsieur le grand chef, vous avez la parole.
Bonjour. Je serai très bref dans mes commentaires.
Je suis d'accord avec les autres grands chefs. Mon allocution sera courte. J'imagine que ce projet de loi est une initiative parlementaire qui touche nos droits protégés par la Constitution et nos relations fondées sur des traités avec le gouvernement du Canada, comme les autres grands chefs l'ont dit. Voilà ma préoccupation en tant que chef de l'Ermineskin et grand chef du traité numéro 6.
Étant donné notre relation scellée par traité avec le gouvernement, c'est une question qui nous préoccupe. Si vous allez de l'avant avec ces modifications à la Loi sur les Indiens, il s'ensuivra des problèmes constitutionnels. Toutefois, il faut que notre traité soit respecté. C'est une relation à deux sens, comme les autres grands chefs l'ont mentionné plus tôt. Si nous allons travailler ensemble, il faut le faire d'une façon positive. En ce moment, l'approche utilisée laisse à désirer. Le processus devrait respecter le traité.
Je ne veux pas en dire beaucoup plus. Mon dernier commentaire se rapporte à ce que mes confrères les grands chefs ont dit. Nous avons, nous aussi, une Constitution qui a été adoptée en 1982. Nous sommes comme la bande de Sawridge. Nous avons notre propre Constitution et nos propres lois, des lois coutumières. C'est ce que nous avons.
Je vais m'arrêter là et laisser du temps aux autres pour parler. C'est tout ce que je voulais dire.
Merci.
Je m'en tiendrais à une brève déclaration. Je ne suis pas vraiment préparée. Je n'ai reçu l'invitation qu'il y a cinq jours.
Si vous en avez la possibilité, je vous recommanderais à tous de lire un document de recherche très intéressant. Il s'agit d'un mémoire de recherche préparé pour le Centre national pour la gouvernance des Premières Nations. Il s'intitule: « Like an Ill-Fitting Boot ». On y trouve beaucoup d'explications sur la Loi sur les Indiens, notamment le manque de consultation auprès des bandes et ce que les réserves ont le droit ou non de faire. Ainsi, on peut lire que la loi « touche la capacité des Premières Nations à former des gouvernements plus responsables et démocratiques », et cela joue un rôle important dans la façon dont les bandes gèrent leurs affaires et consultent leurs propres membres.
Pour faire une autre observation concernant la remarque de M. Ahenakew sur la langue dans les écoles, je suis une membre des Premières Nations qui a connu les pensionnats, et notre collectivité a entièrement perdu sa langue. J'ai honte du fait que mes petits-enfants grandissent sans connaître leur histoire ou leur culture. C'est un problème auquel on a commencé à s'intéresser au cours des quelques dernières années. Je vois l'importance d'intégrer la langue dans nos écoles, et pas seulement à titre de solution improvisée comme l'intégration de la langue crie en 3e année. Cela ne nous aide pas. Il faut intégrer la langue dans l'ensemble du système scolaire...
Une voix: Dans la collectivité.
Mme Phyllis Sutherland: ... et dans la collectivité, absolument.
C'est tout ce que j'ai à dire pour le moment. Merci.
Merci.
Madame Venne, nous allons vous céder la parole, si vous souhaitez vous joindre à nous. Je pense que la conversation s'est élargie, et c'est une excellente chose. Je pense que c'est exactement ce que nous voulons faire. Nous y tenons. Nous allons maintenant vous céder la parole avant de donner de nouveau la parole à nos autres invités.
Si vous souhaitez intervenir sur quelque chose que quelqu'un a dit ou sur un aspect différent du projet de loi, nous aimerions vous entendre. Je tenais à vous l'indiquer afin que vous y réfléchissiez.
Sharon, vous avez la parole.
Merci de me donner le temps de m'exprimer. Je pense que j'en sais probablement plus sur la Loi sur les Indiens que quiconque dans la salle. Sans me vanter, c'est moi qui l'ai indexée dans les années 1970. La plupart d'entre vous ont probablement reçu une copie de l'index que j'ai réalisé sur la Loi sur les Indiens.
Selon moi, le problème des modifications fragmentaires qui ont été apportées à la Loi sur les Indiens tient au fait que si l'on remonte au livre blanc de 1969, et avant cela, à l'époque où les gens comparaissaient à Ottawa en 1948 et 1949 concernant la Loi sur les Indiens, la loi a mis en place un régime qui ne peut pas être modifié une partie à la fois. Tout y est relié, et le gouvernement, au fil des années, est parvenu à créer différentes parties.
Par exemple, la raison pour laquelle le gouvernement ne voulait pas que les Indiens fassent du commerce et vendent des produits à l'extérieur de la réserve sans sa permission, c'était les répercussions qu'une telle pratique avait sur les non-Autochtones qui avaient des exploitations agricoles autour des réserves. Ils ne pouvaient pas s'enrichir autant que les Indiens. C'est la raison pour laquelle des dispositions comme celle-ci ont été ajoutées à la Loi sur les Indiens.
Le fait d'apporter des modifications fragmentaires à la Loi sur les Indiens a toutes sortes de répercussions. Cela touche aussi les droits constitutionnels des gens. Dans la liste des pouvoirs prévus à l'article 91, on trouve « les Indiens et les terres réservées pour les Indiens ». Lorsqu'on supprime les dispositions de la Loi sur les Indiens ayant trait aux successions et testaments, on passe du ressort de l'article 91 à celui de l'article 92, à savoir la province. Cela revient donc à faire une modification constitutionnelle.
Je pense que ce serait là une modification considérable. J'ai parlé à beaucoup de gens dans les Premières Nations au sujet de ce projet de loi, et 99,9 p. 100 des gens à qui j'en ai parlé depuis novembre dernier... j'ai posé aux gens des collectivités la question: « Combien d'entre vous dans la salle ont un testament? » Quand on avait de la chance, une personne dans une salle de 200 ou 300 personnes levait sa main. C'est tout.
Ce n'est pas quelque chose que font généralement nos membres — pour des raisons spirituelles ou culturelles. Ils savent simplement que certaines choses sont faites de certaines façons. Si l'on commence à imposer des contraintes provinciales, et des critères provinciaux sur la question de savoir qui adopter et qui ne pas adopter...
J'ai adopté des frères et des soeurs à l'âge adulte. Selon notre coutume, les gens sont adoptés à l'âge adulte. Ils ont droit à un certain nombre de choses lorsque quelqu'un décède. Cela n'est pas reconnu dans les régimes non autochtones.
Je ne sais pas quel est le but de tout cela, mais dans les collectivités, les gens sont très préoccupés de ce que le gouvernement tente de faire, encore une fois, parce que c'est ainsi que les gens perçoivent les choses. Je pense que ce serait une bonne idée de prendre du recul et de s'engager dans ce dont les chefs ont parlé: une relation respectueuse. Comme la Cour suprême du Canada l'a indiqué à plusieurs reprises, il doit y avoir une réconciliation entre les deux peuples. La question consiste à savoir comment y parvenir.
Ce n'est pas un pas dans cette direction. Ce n'est pas un pas dans la bonne direction. À mon avis, il faut prendre du recul et analyser les choses. L'ABC a fait un certain nombre d'observations d'un point de vue juridique non autochtone. Du point de vue juridique autochtone, nous avons beaucoup d'inquiétudes, car nous avons là deux systèmes juridiques différents qui entrent en jeu: le système juridique autochtone et le système juridique non autochtone.
Cela va causer un grand nombre de problèmes, et ce que nous voyons n'est que la pointe de l'iceberg. Il n'y a pas vraiment eu d'études, je pense. Je ne sais pas si quelqu'un s'est adressé aux gens qui s'occupent de ce dossier au provincial pour leur demander ce qu'ils en pensent ou pour les informer du fardeau que cela va représenter pour eux, ou pour leur demander s'ils savent à quoi s'attendre.
Le gouvernement fédéral va se décharger, sur le dos des provinces, de quelque chose qui est... et la plupart du temps, je dirais que les gens n'ont aucune idée de ce que cela va entraîner. Cela va poser beaucoup de problèmes à l'interne et à l'externe, à l'intérieur et à l'extérieur des nations. Dans les provinces, cela risque de bloquer les choses, en quelque sorte.
Les administrateurs publics ne savent déjà pas quoi faire de nous lorsqu'ils sont confrontés à des problèmes propres aux Premières Nations. C'est principalement le résultat d'un manque de compréhension. La plupart des facultés de droit n'enseignent pas les systèmes juridiques traditionnels des Premières Nations. Les juristes ne les apprennent pas et ne savent donc pas quoi faire. Ensuite, on essaie de nous imposer des valeurs non autochtones, ce qui cause davantage de problèmes.
Je pense donc qu'il faut prendre du recul ou mener une étude. Il faut, selon moi, poser beaucoup plus de questions pour les gens qui...
Il y aura un transfert de responsabilités aux provinces. Qu'en pensent-elles? Je ne sais pas si elles ont été invitées à participer à ces discussions, mais elles devraient l'être, pour savoir comment elles s'en occuperont du point de vue administratif, une fois que ces responsabilités leur auront été cédées. Voilà une bonne question qu'il faudrait poser.
D'ailleurs, transférer la responsabilité d'un peuple protégé par la Constitution aux provinces sans notre consentement pose problème d'un point de vue juridique. En tant que peuple ayant signé des traités, nous avons droit à un consentement libre, préalable et éclairé, et ce n'est pas le cas. Il ne s'agit pas ici d'un processus consultatif sur le consentement. Nous sommes ici, nous repartirons, et comme la plupart du temps lorsque j'ai comparu devant un comité, les changements que nous avons proposés n'ont pas été retenus. C'est pourquoi nous avons présenté ce problème à Genève à plusieurs occasions.
Merci.
Merci.
La discussion a clairement touché sur tous les aspects du projet de loi. Je pense que nous sommes conscients du temps, mais j'aimerais maintenant qu'on ait une discussion plus générale. Je pense que vous avez tous parlé en général des testaments et des successions, ainsi que des règlements. J'aimerais savoir s'il y a des dispositions dont on n'a pas discuté et qui concernent ces aspects, et dont vous aimeriez parler maintenant.
J'aimerais également que vous nous parliez du processus prévu par le projet de loi concernant la poursuite de la discussion sur le remplacement de la Loi sur les Indiens. Évidemment, les aspects liés aux changements ou à la façon de prévoir les changements sont limités. Ils ne s'appliquent pas aux parties importantes de la Loi sur les Indiens. Reste-t-il des points à discuter concernant les testaments et les successions, les règlements ou le processus prévu?
Nous allons commencer par M. Ahenakew.
Meegwetch.
J'aimerais que le dialogue se poursuive. S'il n'y a pas de dialogue, rien ne bougera. Nos chefs reçoivent de l'argent du gouvernement fédéral pour faire leur travail, pour se réunir et pour présenter le point de vue des Premières Nations sur ce dossier.
Je peux parler de la gouvernance et des élections. Par le passé, en vertu de la Loi sur les Indiens, lorsque j'étais chef, nous choisissions un président du scrutin. Nous choisissions une personne de la région de Meadow Lake, un vieux cowboy. Il venait présider à nos élections. Maintenant, il y a un membre de la bande qui préside à nos élections, et c'est le cahot dans la réserve. Ce membre de la bande siège à des conseils d'administration avec le chef et le conseil, ce qui ne devrait jamais se produire. C'est un conflit d'intérêts. Cela ne devrait pas se faire.
Si on est régi par la Loi sur les Indiens — et il y a certaines bandes régies par les coutumes —, alors il devrait y avoir un président du scrutin neutre et indépendant. Même Élections Canada pourrait venir administrer nos scrutins. Ainsi, il n'y aurait pas de dispute. Sinon, il y en a. Environ 400 personnes dans la réserve ont signé une pétition pour contester cette présidente du scrutin. Le chef et le conseil — la majorité de celui-ci, mais pas tous les membres — ont choisi cette femme pour présider au scrutin. Il faut que ça change, pour que cela soit plus juste pour tous.
J'ai parlé de la situation démoralisante créée par les pensionnats. Je trouve très difficile de voir tous les abus qui existent, et pas seulement pour les jeunes femmes, mais aussi les jeunes hommes. Il ne s'agit plus tant d'alcool maintenant; ce sont plutôt les drogues. Que ce soit des médicaments, des drogues illégales ou peu importe, c'est un problème endémique. Comme je l'ai dit tout à l'heure, il y a eu des suicides dans une réserve ici, en Ontario. Je ne me rappelle plus combien exactement, mais il y en a eu plusieurs.
On fait ce que l'on peut, mais il faut que l'argent soit au service de la culture et de la langue, pour que notre peuple retrouve sa fierté, sa fierté dans son histoire, sa fierté en lui-même en tant que peuple.
C'est toute une tâche d'être chef ou membre du conseil aujourd'hui. Je sais que c'est toute une tâche.
Les investissements en logement sont au même niveau que lorsque j'étais chef. De nombreuses personnes ne sont pas d'accord avec la SCHL — chez nous, en tout cas. Il faut qu'il y ait des systèmes. Il faut les examiner, mais comment? Nos chefs doivent participer avec leurs conseillers afin de faire le travail, de vous rencontrer, d'en arriver à une compréhension commune et ensuite un accord sur ce qui doit être mis en place et ce qui doit changer.
Vous allez de l'avant. Vous faites des choses. Comme je l'ai dit, je félicite Rob Clarke. Certains de nos gens le traitent de traître, mais il n'est pas un traître. C'est un visionnaire pour l'avenir.
Les Ahtahkakoop et les Mistawasis, et les autres chefs qui ont signé les traités, doivent changer leur mode de vie. Il faut essayer de faire quelque chose maintenant pour les jeunes. Sinon, on n'aura même plus de chefs à l'avenir. Les gens seront complètement démoralisés. Tout le monde deviendra un toxicomane. C'est fou.
Je vais plutôt parler du processus. Le projet de loi prévoit que le ministre fera rapport à la Chambre des communes et consultera ceux qui le veulent et des « organisations ». J'en reviens au fait que les organisations n'ont pas le pouvoir de s'occuper des lois qui touchent aux droits issus de traités des peuples des Premières Nations.
Les membres des Premières Nations détiennent les droits issus de traités, mais pas l'APN financée pas le gouvernement. Cela en soi pose problème, parce que si l'APN ne coopère pas avec le gouvernement du Canada, elle ne recevra pas de financement et elle n'existera plus. D'après nous, voilà, d'entrée de jeu, une lacune fondamentale.
En ce qui concerne notre nation, la Première Nation de Sawridge a déjà envoyé sa résolution du conseil de bande, sa RCB, il y a plus d'une décennie, pour déclarer que l'APN ne représente pas nos intérêts. Comment une organisation peut-elle représenter les intérêts des 612 Premières Nations reconnues au Canada? Nous en sommes toutes à des étapes différentes. La Première Nation de Sawridge reçoit moins de 10 p. 100 de son financement des gouvernements du Canada et de l'Alberta. Nous générons notre propre financement. Nous comprenons le principe du développement économique, mais ce n'est pas une réponse. C'est un outil qui peut être utilisé pour en arriver aux réponses.
Je me demande si le comité a examiné l'article 52 de la Constitution canadienne. L'article 52 précise que toute mesure prise par le Parlement qui entre en conflit avec nos droits est « invalide »; alors, d'entrée de jeu, est-ce que le projet de loi C-428 est invalide? Il aura des conséquences sur les pouvoirs législatifs que la Première Nation de Sawridge exerce. Nous avons notre loi sur les biens matrimoniaux. Nous avons notre loi sur la gouvernance. Nous avons notre loi sur la responsabilité financière. Ces lois ont été rédigées par le peuple et adoptées par le peuple, au nom duquel je gère et je dépense les fonds. Comment pourrais-je être encore plus transparent?
Mon salaire est fixé par le peuple, et non pas par le chef et le conseil. J'ai éliminé cette possibilité, comme le prévoit la Loi sur les Indiens, afin que je ne puisse pas me payer un demi-million de dollars et obtenir un salaire semblable au premier ministre. Mon salaire est fixé par les membres eux-mêmes. Cela ne pourrait pas être plus démocratique.
Est-ce que cela vaut la peine de payer les frais juridiques pour contester la constitutionnalité de cette loi devant les tribunaux canadiens? Est-ce une bonne utilisation de l'argent des contribuables canadiens de faire tout cela pour que ce soit rejeté par un tribunal, ce qui, d'après moi, serait assez facile à faire pour les Premières Nations? Le projet de loi pourrait même être rejeté lors d'un examen judiciaire, mais encore une fois, on dépenserait l'argent des contribuables pour une mesure législative qui n'aurait même pas dû être proposée.
Le problème, ce n'est pas la Loi sur les Indiens. Le problème, c'est la relation. S'il y avait une relation saine et respectueuse entre notre nation et le gouvernement du Canada, je ne serais pas ici aujourd'hui. Nous aurions l'autonomie gouvernementale. Nous nous occuperions de nous-mêmes, et c'est tout ce que nous voulons. Chaque être humain sur cette terre veut être maître de sa destinée. C'est tout ce que nous voulons faire en tant que Première Nation: prendre en main notre destin.
Nous voulons sortir de cette loi paternaliste que l'on appelle la Loi sur les Indiens, qui n'a pas été mentionnée lors de la signature du traité no 8 en 1899. Personne n'a dit aux signataires à l'époque qu'en signant ce traité de partage, ils seraient assujettis à la Loi sur les Indiens en vertu de laquelle un ministre à Ottawa allait contrôler leur destin, prendre leurs enfants et les envoyer dans des pensionnats. Cela a été un double coup dur pour notre nation, parce que nous avons souffert de l'épidémie de grippe au début du XXe siècle pendant laquelle une majorité des adultes sont morts. Il y avait beaucoup plus d'enfants que d'adultes, et ils ont tous été envoyés dans des pensionnats. On se demande ensuite pourquoi il y a eu une perte de la culture et de la langue? Il faudra une guérison.
Dans une vraie relation de gouvernement à gouvernement, on songerait à une mise en commun des ressources pour ceux qui le veulent. Songeons aux investissements pour l'avenir, comme je l'ai dit plus tôt. Voilà l'un des problèmes fondamentaux de ce processus. On fait fi des représentants dûment élus. Vous ne nous permettez pas d'avoir notre mot à dire sur les conséquences qu'auront ces changements à la Loi sur les Indiens. A-t-on prévu des ressources lorsque certaines de ces dispositions seront éliminées, ce qui, dans mon exemple, permettrait à un membre — ou peut-être que cela ne le permettrait pas, mais cela ne l'empêcherait pas — de couper tous les arbres et de les vendre pour son profit personnel?
Ne devrait-il pas y avoir quelque chose, une étape de transition, pour certaines de ces dispositions, pendant laquelle nous pourrions mettre en place nos propres lois? Ai-je besoin d'un accord avec la GRC ou peut-être le service régional de police de Lakeshore, financé par les gouvernements fédéral et provincial, pour les cinq Premières Nations le long du lac afin qu'ils comprennent nos règlements et qu'ils aient le pouvoir de les faire respecter? Y a-t-il un tribunal où on peut invoquer ces lois?
Où sont les institutions de gouvernance dont nous avons besoin pour contrôler notre destin et nous gouverner nous-mêmes? Je me suis déjà adressé à la Cour fédérale du Canada. Elle n'est pas ouverte aux Premières Nations. Il y a un problème fondamental si l'on se présente devant cette cour, surtout si l'on se bat contre le gouvernement fédéral.
Qui nomme les juges — les chefs des Premières Nations? Qui les juges jurent-ils de protéger? La Constitution et les lois du Canada. Alors pourquoi se prononceraient-ils en faveur d'une Première Nation?
Voilà des choses vers lesquelles nous devons tendre.
Merci.
L'accord avec les Nisga'a comprend toute la population. Les accords de contribution pour notre peuple ne s'appliquent qu'à la population vivant dans les réserves. Mais dans le cas des élections, ceux qui vivent hors des réserves peuvent voter.
Premièrement, il faudrait absolument éliminer le système de vote postal. Il faudrait l'éliminer, parce qu'il est trop facile pour les gens de tricher. Il doit disparaître. Si les gens veulent voter, ils devraient se rendre à un endroit désigné.
Le comité aura peut-être l'occasion plus tard d'examiner les dispositions sur les élections. Ce projet de loi ne le fait pas, mais nous comprenons ce que vous dites.
Et il y a des gens qui vivent très loin, dans différentes réserves, et qui ne votent pas. Ils ne se donnent pas la peine de venir voter. Ils gagnent leur vie là-bas. Mais parfois, leur nom se retrouve sur un bulletin de vote ici. Voilà le genre de connerie que nous avons vue lors des scrutins.
Pardonnez mon langage. Merci de m'avoir écouté, et je pense que je vais m'en aller.
Je ne ferai que quelques observations, suite à ce qu'a dit le chef Twinn.
J'ai travaillé avec la Première Nation de Sawridge pendant plus de 26 ans. Bien que je ne sois pas moi-même membre d'une Première Nation, je connais bien la Loi sur les Indiens. La loi est assez courte. Elle ne contient que 122 articles. À première vue, elle semble assez simple, mais avec le temps, elle est devenue plus longue et lourde avec les différents cas et interprétations. Il s'y trouve toujours des dispositions qui, si on les lit, ne s'appliquent pas parce qu'elles ont été invalidées ou abrogées, et le Parlement n'a toujours pas fait ce débroussaillage.
Il y a un certain nombre de problèmes. Il faut être prudent lorsqu'on veut apporter des changements à ce cadre très compliqué qui a évolué avec le temps, parce qu'il pourrait y avoir des conséquences imprévues.
À l'article 2 du projet de loi, on parle de la collaboration avec les organisations des Premières Nations. Le chef en a parlé. Il faudrait en fait des consultations avec les Premières Nations. Il ne devrait pas s'agir de collaboration, et elle ne devrait pas se faire avec les organisations. Ce sont les Premières Nations qui ont le droit d'être consultées, et voilà qui l'on devrait consulter. Il faut le faire avant la promulgation des changements à la Loi sur les Indiens, car les Premières Nations sont celles qui sont régies par la Loi sur les Indiens, et elles représentent leur peuple.
Vous avez déjà parlé du troc et de la vente. Si on élimine l'approbation du ministre, qui approuvera la vente de matériaux? Les ressources qui se trouvent dans les réserves se retrouveront dans un vide. Il faudrait une transition. Peut-être que les chefs et les conseils, ou un autre système, pourraient le remplacer. Si le chef et le conseil remplaçaient le ministre, il y aurait au moins quelqu'un pour approuver les changements.
Au sujet des testaments et des successions, ma plus grande préoccupation concerne l'abrogation du paragraphe 44(3) et de l'alinéa 46(1)d). Les deux traitent des terres. Ces articles indiquaient en gros que la province n'avait pas le pouvoir de s'occuper de la cession de biens immobiliers dans les réserves. Avec l'abrogation de ces articles, est-ce que les lois provinciales s'appliqueront aux réserves? Il s'agit d'un transfert de pouvoir, et je crois que l'ABC en a parlé plus tôt.
L'abrogation de l'article 85.1 pourrait causer des problèmes pour les Premières Nations. La Première Nation de Sawridge n'a pas de règlement sur les substances intoxicantes, mais il y a d'autres Premières Nations qui seraient touchées si on enlevait tout d'un coup ce pouvoir. Je suis certain qu'un tribunal dirait que ce pouvoir n'est pas inhérent à l'article 81. Sinon, pourquoi aurait-on adopté l'article 85.1? On n'effacera pas ce qui s'est passé.
L'une de mes plus grandes inquiétudes concerne l'article 86.1. Il exige la publication des lois. On élimine l'exigence que le ministre approuve les règlements. Mais maintenant, d'une façon très paternaliste, on indique comment les lois devront être publiées, plutôt que de laisser les gouvernements des Premières Nations décider comment les publier d'une façon qui soit appropriée pour elles. Ça peut être assez lourd, parce que si on a un long règlement sur l'utilisation des terres, et qu'il faut le publier dans un journal local, cela peut coûter assez cher, d'autant plus que cela ne sera probablement pas très efficace parce que les gens qui lisent ce journal local ne s'y intéressent pas en général.
Voilà mes observations.
Merci.
Je crois que nous avons très bien entendu et compris les préoccupations.
Grand chef, vous serez notre dernier...
Voici mon dernier commentaire. Il s'agit des Autochtones qui habitent hors réserve.
Il y a eu des sondages, des discussions, des présentations sur ce qui a été fait dans les provinces des Prairies. Le problème que je vois, c'est que si on va parler à nos membres qui habitent hors réserve, pourquoi ne peut-on pas inclure les fonds nécessaires dans nos ententes globales de financement afin que nous puissions leur fournir des services? C'est comme si on nous pénalisait. En vertu des ententes globales, on ne peut rien faire. Voilà donc un point sur lequel je voulais attirer l'attention du comité. C'est un des problèmes auxquels nous faisons face dans nos ententes globales de financement. Nous ne pouvons pas fournir des services à nos membres qui habitent hors réserve parce que les ententes globales de financement nous empêchent de le faire. C'est un problème auquel nous faisons face. Au cours des années, c'est une question qui a été soulevée, et j'aimerais rappeler au comité que ce problème existe. C'est un problème qui persiste et que nous voulons résoudre.
Merci.
Merci.
J'aimerais vous remercier tous d'avoir été des nôtres aujourd'hui. Nous vous sommes reconnaissants de vos commentaires.
Comme M. McKinney a dit, il y a des choses dans la Loi sur les Indiens qui sont de la broussaille. Une de nos tâches en tant que comité est, en partie, de débroussailler, mais bien sûr, il peut y avoir aussi des conséquences inattendues. Vos commentaires aujourd'hui nous aideront dans nos délibérations, et nous aurons l'occasion d'écouter d'autres gens qui représentent les collectivités des Premières Nations partout au pays. Nous vous remercions de nous avoir donné vos impressions globales, et cela reflète beaucoup les préoccupations ainsi que les inspirations des gens qui se trouvent autour de cette table.
Merci d'être venus, et nous avons hâte de travailler avec vous à l'avenir au fur et à mesure que nous avancerons dans notre travail en tant que comité.
Encore une fois, merci. Au nom du comité, je vous remercie de votre présence aujourd'hui.
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