AANO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 21 mai 2013
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Distingués collègues, la séance est ouverte.
Il s'agit de la 73e réunion du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord. Nous commençons aujourd'hui l'étude du projet de loi S-8, Loi concernant la salubrité de l'eau potable sur les terres des Premières Nations.
Le ministre est avec nous aujourd'hui, ce qui est toujours un grand privilège.
Nous apprécions votre disponibilité, monsieur le ministre. Nous allons vous laisser faire votre exposé, puis, comme d'habitude, nous amorcerons une ronde de questions.
La parole est à vous, monsieur le ministre.
[Français]
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Je suis heureux de pouvoir participer aux travaux du comité relatifs à l'examen du projet de loi S-8, Loi concernant la salubrité de l'eau potable sur les terres des Premières Nations.
Je suis ravi de vous présenter aujourd'hui cet important texte de loi, rédigé afin de garantir aux collectivités des Premières Nations une alimentation en eau potable assortie des mêmes protections, sur le plan de la santé et de la sécurité, que celle de tous les autres Canadiens. J'espère vraiment que vous appuierez son adoption avant la suspension des travaux du Parlement, en juin.
Le projet de loi S-8 ne doit pas être vu comme un effort isolé. Il constitue un volet essentiel de la stratégie globale que notre gouvernement s'applique à mettre en oeuvre pour améliorer la salubrité de l'eau potable pour les collectivités des Premières Nations, stratégie dont les trois piliers sont le renforcement des capacités, la poursuite des investissements dans les infrastructures et l'élaboration d'une réglementation claire.
[Français]
Notre gouvernement reconnaît la nécessité de renforcer les capacités et les infrastructures pour fournir de l'eau potable salubre aux réserves. Je sais que beaucoup de gens intéressés sont préoccupés par la question des capacités et des infrastructures en place. C'est pourquoi, comme gouvernement, nous avons multiplié par deux le financement du Programme de formation itinérante, qui a permis d'aider et de former des centaines de responsables de réseaux de distribution de l'eau et de traitement des eaux usées des Premières Nations. Ce programme a d'ailleurs donné des résultats très positifs. Depuis juillet 2011, par exemple, le pourcentage de systèmes des Premières Nations dont l'opérateur principal est agréé pour la gestion des réseaux d'eau potable est passé de 51 à 60 %, et le pourcentage d'opérateurs agréés de systèmes de traitement des eaux usées est passé de 42 à près de 54 %.
Par ailleurs, nous continuons bien sûr d'investir dans l'infrastructure de distribution de l'eau et de traitement des eaux usées. Entre 2006 et 2014, notre gouvernement aura investi environ 3 milliards de dollars à l'appui de la fourniture d'eau potable et de services de traitement des eaux usées aux collectivités des Premières Nations. D'ailleurs, vous vous souviendrez que le Plan d'action économique de 2012 prévoyait investir 330,8 millions de dollars sur deux ans. À la suite de ces importants investissements, le pourcentage de réseaux d'aqueduc à risque élevé a baissé de 8,1 %, et celui des systèmes d'eaux usées à risque élevé, de 2,1 %.
Monsieur le président, je peux assurer au comité que notre gouvernement prévoit continuer à investir dans l'infrastructure de distribution de l'eau et de traitement des eaux usées.
Toutefois, malgré ces investissements et ces progrès non négligeables, un facteur clé décelé auparavant n'a toujours pas été abordé: il s'agit de l'absence de règlements exécutoires dans les réserves. Tant que ces règlements ne seront pas adoptés, nous savons qu'il sera difficile de réaliser des progrès à long terme. De l'équipement moderne et de bonnes intentions sont d'excellentes choses, mais il faut qu'un règlement les appuie. C'est pour cela que l'ensemble des municipalités partout au pays, et bien d'autres collectivités qui ne sont pas des municipalités, ont adopté des règlements. Un règlement est essentiel parce qu'il définit clairement les responsabilités associées à chacune des nombreuses étapes à exécuter pour préserver la qualité de l'eau, comme la protection de l'eau de source, les tests de qualité périodiques et le respect des normes légales, et donc exécutoires, de traitement et de distribution de l'eau.
Notre gouvernement estime que les collectivités des Premières Nations de tout le Canada devraient avoir accès à une eau potable salubre, propre et de bonne qualité au même titre que les autres Canadiens vivant hors réserve, et que le seul moyen d'y parvenir consiste à adopter un cadre réglementaire efficace.
Le projet de loi qu'étudie le comité vise à combler ce vide réglementaire. Si le projet de loi S-8 reçoit la sanction royale, notre gouvernement poursuivra sa collaboration avec les Premières Nations et les autres intervenants en vue d'élaborer des règlements région par région. Cette façon de procéder permettra au gouvernement et aux Premières Nations de s'associer aux experts techniques des municipalités et des régions.
De plus, cette approche axée sur la collaboration région par région permettra d'exploiter les règlements existants. Au lieu de créer des textes entièrement nouveaux, la méthode la plus efficace consistera à s'appuyer sur les règlements provinciaux et territoriaux existants et à les adapter au besoin pour tenir compte des conditions locales de chacune des Premières Nations.
[Traduction]
Je veux que les choses soient bien claires, monsieur le président. Cette approche ne retirerait aucunement leurs compétences aux Premières Nations, pas plus qu'elle ne donnerait à une province, à un territoire ou à une municipalité quelque compétence que ce soit sur les terres des Premières Nations. En élaborant des règlements comparables à ceux qui existent hors réserve, les Premières Nations seront mieux placées pour s'associer aux municipalités voisines afin d'offrir des services de traitement des eaux et de coopérer dans d'autres domaines, comme la formation des opérateurs, la création d'entreprises et l’adoption de nouvelles technologies.
Il faudra un certain temps pour élaborer et mettre en oeuvre une réglementation à l'échelle du Canada. C'est pourquoi nous procéderons de façon progressive afin de laisser au gouvernement et aux Premières Nations assez de temps pour rendre l'infrastructure de distribution de l'eau et de traitement des eaux usées conforme à cette nouvelle réglementation. Il serait tout à fait illogique d'instaurer une réglementation avant que cette capacité et ces infrastructures aient été mises en place. Comme notre gouvernement l'a déjà dit à maintes reprises, nous n'adopterons pas de règlements tant que les Premières Nations n'auront pas la capacité de s'y conformer, car la santé et la sécurité demeurent notre objectif premier.
Je sais parfaitement que certaines Premières Nations ne disposent pas des ressources nécessaires pour participer à l’élaboration de ces règlements. En avril 2012 déjà, l'ancien ministre des Affaires autochtones et du Développement du Nord, M. John Duncan, a envoyé une lettre à I'ensemble des chefs et des conseils de bande confirmant que notre gouvernement fournirait les fonds nécessaires à la mise en oeuvre des activités admissibles.
Par exemple, nous avons déjà versé des fonds au Congrès des chefs des Premières nations de l’Atlantique afin d'appuyer les recherches et les analyses de ce dernier relativement à l’élaboration de règlements visant les Premières Nations de la région de l’Atlantique. Il est important de reconnaître que l’approche axée sur la collaboration région par région s'appuie sur l’engagement constant et large, et sur les consultations, qui définissent le plan d'action conjoint relatif à la gestion de l’eau potable dans les collectivités des Premières Nations.
Le gouvernement du Canada et l’Assemblée des Premières Nations ont lancé de concert ce plan d'action en mars 2006 pour répondre aux préoccupations relatives à l’eau potable dans les collectivités des Premières Nations. Au cours des sept dernières années, notre gouvernement a mobilisé les Premières Nations, leurs chefs régionaux et leurs organisations, les représentants des gouvernements provinciaux et territoriaux, les municipalités et d'autres intervenants en vue d'examiner pas à pas la loi relative à la qualité de l’eau potable et au traitement des eaux usées.
Notre gouvernement entend continuer à consulter les Premières Nations et d'autres intervenants à propos de l’élaboration de règlements. Au terme de ce processus de collaboration, 10 amendements ont été apportés à ce projet de loi.
Voici certaines des principales différences entre la version précédente du projet de loi et l’actuel projet de loi S-8: l’ajout de texte dans le préambule afin de démontrer l’engagement qu’a pris le gouvernement de travailler avec les Premières Nations à l’élaboration de règlements, la clarification apportée à l’effet que les règlements ne prévoiront pas le pouvoir d’attribuer les réserves d’eau ou de délivrer des permis aux utilisateurs de l’eau à toute autre fin que la fourniture d’eau potable, la suppression du texte qui pourrait être interprété comme l’octroi du pouvoir d’obliger les Premières Nations à conclure un accord avec des tierces parties et l’inclusion d’une clause de non-dérogation relative au lien entre la législation et les droits ancestraux et issus de traités.
La clause de non-dérogation désormais intégrée au projet de loi S-8 a été proposée par les Premières Nations durant les discussions sous toutes réserves. Sur le fond, cette clause privilégie la salubrité de l’eau potable par rapport aux enjeux liés aux droits ancestraux et issus de traités. Il s’agit là d’un aspect fort important et, selon moi, tout à fait approprié, puisque la salubrité de l’eau potable est essentielle à la santé humaine.
Comme je l’ai déjà dit, la loi proposée est axée sur la santé et la sécurité des Premières Nations. L’inclusion d’une clause de non-dérogation est l'une des nombreuses mesures d’accommodement qui ont directement résulté des consultations menées auprès d'elles.
Notre gouvernement demeure à l’écoute. Récemment, des intervenants ont posé des questions à propos de la clause optionnelle d’adhésion — le fameux article 14 du projet de loi —, qui offrirait aux Premières Nations autonomes, et à celles ayant conclu des accords de revendications territoriales, la faculté d’adhérer si elles le voulaient à un régime réglementaire fédéral. Plus précisément, ils pensent que cette clause pourrait créer des problèmes de champs de compétences et avoir un effet sur les accords de revendications territoriales existants et futurs, entre autres.
Comme je l’ai dit devant la Chambre il y a deux semaines, à l’issue d’un examen minutieux et de nombreuses discussions entre mes représentants et ces intervenants, je recommande le retrait de cette clause du projet de loi. Permettez-moi d’assurer aux membres du comité que ce retrait ne nuira aucunement à quelque Première Nation que ce soit.
En outre, je crois que le retrait de cette disposition est un autre exemple des résultats positifs découlant des discussions menées dans un esprit de collaboration avec les Premières Nations et d’autres intervenants. J’espère que les membres du comité percevront eux aussi la valeur de ce changement et appuieront donc cet amendement.
[Français]
En conclusion, permettez-moi, monsieur le président, de rappeler que le projet de loi qui vous est proposé aujourd'hui est le fruit d'un processus long et exhaustif d'examen et d'engagement ainsi que de consultations constructives auprès des Premières Nations et d'autres intervenants. Ce projet de loi constitue un volet essentiel de la stratégie à laquelle j'ai fait allusion d'entrée de jeu, soit une stratégie de collaboration à plus grande échelle visant à améliorer la qualité de l'eau potable accessible aux résidants des collectivités des Premières Nations.
Même si cette stratégie a produit d'excellents résultats à ce jour, tant que les règlements ne seront pas en vigueur, les progrès réalisés demeureront fragiles. Pour garantir la salubrité de l'eau potable, il faut instaurer un régime qui définit les responsabilités et en établit clairement la hiérarchie. En réponse à ceux qui pensent que nous devrions attendre que tous les investissements aient été effectués dans les infrastructures, je dis que les Premières Nations ne devraient pas avoir à attendre plus longtemps pour avoir accès à de l'eau potable propre et salubre. Je vous ferai remarquer avec respect que cela dépend de la stratégie exhaustive à laquelle j'ai fait allusion plus tôt.
Il nous aura fallu sept ans pour arriver là où nous sommes présentement. Ces sept ans de discussions, de consultations, de mobilisation et d'investissements ont conduit à la présentation du projet de loi qui est devant vous aujourd'hui. Nous croyons que le moment est venu d'aller de l'avant. La santé et la sécurité des Premières Nations constituent une priorité urgente et, grâce à la poursuite des investissements, cette loi fera en sorte que la qualité de l'eau potable et le traitement des eaux usées dans les réserves respectera les normes dont profitent déjà tous les autres citoyens de ce beau et grand pays.
L'eau potable salubre devrait être accessible à tous les Canadiens et le projet de loi S-8 permettra d'atteindre cet objectif.
Monsieur le président, la solution est désormais entre les mains compétentes de votre comité. Je vous remercie et je suis prêt à répondre aux questions des membres du comité.
[Traduction]
Monsieur le ministre, merci beaucoup.
Nous allons passer à la ronde de questions. Madame Crowder, vous avez les sept premières minutes.
Merci, monsieur le président.
Soyez le bienvenu, monsieur le ministre.
Sauf votre respect, le simple fait d'instaurer un régime de réglementation ne suffira pas à assurer la salubrité de l'eau. En fait, le Groupe d'experts sur la salubrité de l'eau potable affirmait dans son rapport de novembre 2006 que:
Le premier élément, et le plus critique, est qu'il ne serait pas crédible de mettre un régime de réglementation en place sans que les capacités adéquates ne soient présentes pour répondre aux exigences du régime. Il est tentant de présumer qu'en établissant un régime de réglementation, on réduirait les dangers liés aux réseaux de traitement d'eau, mais c'est exactement le contraire qui pourrait se produire. Cette situation est attribuable au fait que la création et la mise en application d'un régime de réglementation exigeraient du temps, de l'attention et de l'argent, et qu'il pourrait être préférable d'investir dans les réseaux, les opérateurs, la gestion et la gouvernance.
Monsieur le ministre, j'ai trois questions. La première — et je sais que vous avez fait très attention d'être clair à ce sujet — concerne les Premières Nations autonomes. Je crois que vous êtes bien conscient que le paragraphe 14(1) du projet de loi suscite de l'inquiétude, car il ne se limite pas aux groupes pour lesquels il n'y a pas de réglementation ou qui se sont donnés leurs propres lois.
Faut-il comprendre qu'un amendement sera proposé pour que ledit paragraphe soit retiré du projet de loi?
Oui, c'est ce que je recommande au Comité, et pour les raisons que vous avez évoquées. Les groupes qui ont des accords de revendication territoriale et ceux qui en négocient ou qui négocient des accords en matière d'autonomie se sont dits inquiets de savoir que cette disposition, cette clause optionnelle d'adhésion, pourrait poser des problèmes sur le plan juridique, mais aussi qu'elle puisse être utilisée pour les obliger à adopter la réglementation comme condition de l'aide en matière d'infrastructures.
Nos fonctionnaires ont eu de longs entretiens avec les parties concernées. Or, après avoir bien examiné la question et nous être assurés que la suppression ne créerait pas de vide juridique, nous recommandons au Comité de supprimer l'article 14 du projet de loi.
Merci, monsieur le ministre.
Ma deuxième question concerne la responsabilité. Je sais que certains changements ont été faits au projet de loi à l'étude concernant la responsabilité des réseaux de tierces parties pris en charge par des Premières Nations. Nous avons reçu une note d'information de l'agglomération de Vancouver. La ville a un document d'orientation sur le projet de loi S-8. Dans votre exposé de tantôt, vous avez dit que les municipalités ont été consultées, mais, selon l'agglomération de Vancouver, l'une des plus grandes du pays — et où des Premières Nations vivent à proximité —, la loi proposée suscite un certain nombre de préoccupations.
L'une d'elles est le manque de consultation et le fait que l'on n'ait pas tenu compte de l'opinion des gouvernements locaux. En effet, les municipalités peuvent bien fournir l'eau, mais il faut aussi établir les responsabilités. Les Premières Nations ont en effet posé des questions sur leur responsabilité en tant que propriétaires-exploitants, le cas échéant, et sur leur propre capacité à faire appliquer ces règlements.
Les Premières Nations veulent savoir ce que devient leur responsabilité lorsqu'intervient une tierce partie, comme une municipalité.
Quand vous dites que les représentants du grand Vancouver déploraient le manque de consultation, je serais tenté de leur demander où ils étaient pendant les sept dernières années. Leurs préoccupations ont été portées à mon attention; en fait, ils m'ont écrit. Je leur ai répondu que les municipalités étaient les bienvenues et qu'il était important qu'elles participent à ce processus et qu'elles continuent de travailler avec nos gens, là où il était opportun de le faire. En ce qui concerne l'inquiétude que suscitait l'offre de services aux collectivités de Premières Nations, je leur ai rappelé que nous nous étions engagés à travailler avec les Premières Nations, avec les gouvernements provinciaux et territoriaux et les autres parties concernées pour mettre au point des mécanismes appropriés de conformité et d'exécution.
Quant à la responsabilité, vous n'êtes pas sans savoir qu'il n'y a actuellement aucune norme légalement applicable sur l'eau potable et le traitement des eaux usées, et que les responsabilités potentielles sont, pour l'instant, mal définies. Les responsabilités de ces parties et les obligations qui pourraient en découler seront semblables à celles des provinces et territoires. Tout propriétaire d'un réseau d'aqueduc doit assumer toute une gamme des responsabilités. Voilà pourquoi le projet de loi S-8 ouvre la porte à une loi habilitante. L'alinéa 5(1)o) indique clairement que le règlement peut « limiter la responsabilité de toute personne ou tout organisme qui exerce des attributions conférées par un règlement ».
Ces dispositions seront élaborées en collaboration avec les Premières Nations et les parties concernées. La responsabilité qui s'applique déjà aux gouvernements provinciaux et aux municipalités seront pour le commun des mortels le genre de responsabilité qui s'appliquerait à n'importe quel exploitant. Le règlement permet la signature d'ententes entre Premières Nations et tierces parties. Il est clair que le projet de loi permettra de circonscrire les responsabilités de chacun grâce un amendement qui permettra d'établir qui sont les propriétaires et les exploitants présumés du réseau.
En ce qui concerne votre première question...
En ce qui concerne la responsabilité, vous savez tout comme moi qu'un règlement n'implique pas la même surveillance que pourrait le faire le Parlement ou ce comité. Un règlement pourrait être imposé laissant toute la responsabilité entre les mains des Premières Nations. Or celles-ci ne pourraient pas se permettre certains des autres investissements, car elles seraient désormais liées par tout ce régime de conformité. Cet aspect a été souligné par le Groupe d'experts sur la salubrité de l'eau.
Comme je l'ai dit, les responsabilités et les obligations qui pourraient en découler seront semblables à celles des provinces et des territoires. Qu'il s'agisse d'une Première Nation ou d'une municipalité, la fourniture d'eau potable suppose des responsabilités qui, en l'occurrence, seront assumées par les Premières Nations et les fournisseurs. Nous disons que le projet de loi autorise les règlements qui fixent des limites à la responsabilité, mais ces règlements permettront aussi de protéger les membres des Premières Nations dans les collectivités. Je crois qu'un juste équilibre pourra être atteint lors de l'élaboration de ces règlements.
Merci, monsieur le président et merci, monsieur le ministre, d'être ici aujourd'hui, début de la Semaine de sensibilisation aux cultures autochtones.
Pendant sept années consécutives, nous avons travaillé étroitement avec les Premières Nations afin de remédier au problème de l'eau potable et au vide juridique actuel en la matière. Pouvez-vous nous parler des échanges qui ont eu lieu à ce sujet entre le gouvernement et les Premières Nations?
Je ne sais pas si j'aurai assez de temps pour vous répondre. Ce que vous soulevez est important. Depuis 2006, donc depuis sept ans, il y a eu une mobilisation à grande échelle — j'en ai parlé dans mon exposé —, et le Groupe d'experts sur la salubrité de l'eau potable dans les collectivités des Premières Nations en est un exemple. De juin à août 2006, des audiences avec les Premières Nations et d'autres intervenants se sont tenues à neuf endroits répartis dans tout le pays.
Des fonctionnaires fédéraux et le groupe d’experts technique sur l’eau de l’Assemblée des Premières Nations ont tenu un atelier conjoint en 2007. En 2008, il y a eu des rencontres avec des organismes des Premières Nations et avec des fonctionnaires provinciaux et territoriaux pour partager de l'information sur le cadre législatif proposé. De février à mars 2009, le gouvernement a lancé une série de 13 séances de mobilisation un peu partout au pays, auxquelles quelque 544 membres des Premières Nations ont assisté. Du début de 2009 au début de 2010, le gouvernement a rencontré des chefs régionaux et des organismes des Premières Nations pour parler d'enjeux régionaux particuliers. D'octobre 2010 à octobre 2011, le gouvernement a eu des discussions « sous toutes réserves » avec les Premières Nations et certains organismes des Premières Nations.
D'octobre 2011 à aujourd'hui, le gouvernement a continué de rencontrer les Premières Nations et d'autres intervenants pour poursuivre les discussions sur la loi proposée. Le préambule du projet de loi stipule clairement que le gouvernement travaillera avec les Premières Nations pour élaborer la réglementation. L'adoption de cette loi n'entraînera aucune pression additionnelle sur les Premières Nations. Plutôt, elle ouvrira la porte à une collaboration accrue quant à l'élaboration de ces règlements, qui sont une partie importante de la stratégie globale dont j'ai parlé en début de séance.
Je vous remercie d'avoir expliqué comment nous collaborons avec les partenaires des Premières Nations depuis 2006, et tout au long du processus relatif à cette proposition.
En fait, après la dernière mouture du projet de loi S-11 et sa mort au Feuilleton, nous avons pris les mesures nécessaires pour rassurer les Premières Nations et d'autres intervenants, en apportant certaines modifications.
Pour le projet de loi actuel, le projet de loi S-8, nous avons poursuivi les consultations et avons pris des mesures pour répondre aux préoccupations que suscitait la clause optionnelle d'adhésion pour les Premières Nations autonomes.
Lors de la deuxième lecture en Chambre, vous avez dit que le gouvernement avait choisi de retirer l'article 14 du projet de loi S-8; on l'a aussi mentionné tout à l'heure. Pouvez-vous nous dire comment l'amendement traitera de ces préoccupations?
Comme l'a fait valoir Mme Crowder, l'article 14 du projet de loi a soulevé des inquiétudes. Il a suscité la même réaction au comité sénatorial devant lequel j'ai témoigné il y a deux semaines. Les représentants des Premières Nations autonomes s'inquiétaient de la possibilité que les programmes et le financement associés au traitement et à la protection de l'eau dépendent de leur acceptation d'être assujettis à la loi. Bien sûr, ce n'était pas notre objectif.
Comme ils ont déjà compétence à l'égard des questions touchant l'eau et que j'ai recommandé de retirer l'article 14, tout simplement, je me suis assuré qu'il n'y avait aucune lacune. Ce sont les membres des collectivités des Premières Nations qui comptent: les familles, les enfants, les gens. Le retrait de l'article 14 n'entraîne aucune lacune puisque les Premières Nations autonomes et celles qui ont conclu une entente sur les revendications territoriales ont déjà ce pouvoir.
Toutefois, je vais être franc: dans le cas de la bande sechelte, le pouvoir n'est pas désigné dans l'accord intégral. Nous allons donc travailler avec ses membres afin de modifier la loi pour leur conférer ce pouvoir.
Merci.
Le processus de consultation exhaustif a donné lieu à l'élaboration de la clause de non-dérogation en collaboration avec l'Assemblée des chefs des Premières Nations signataires d’un traité en Alberta, qui aborde de façon spécifique la relation entre la loi et les droits ancestraux et issus des traités en vertu de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Un préambule a également été ajouté pour décrire l'intention du gouvernement d'élaborer un règlement qui correspond aux besoins des Premières Nations.
Pourquoi le projet de loi S-8 comprend-il une clause sur les droits ancestraux et issus des traités?
Au cours du processus de consultation et des délibérations parlementaires sur l'ancien projet de loi S-11, les représentants des Premières Nations, dont l'Assemblée des Premières Nations et les sénateurs libéraux, ont dit craindre que la loi et les futurs règlements ne contreviennent à ces droits, à moins qu'une clause de non-dérogation ne soit ajoutée au projet de loi.
Comme vous le savez, le projet de loi S-11 comprenait une clause qui traitait de ces droits. Elle aurait permis l'ajout de clauses de non-dérogation aux règlements fédéraux élaborés en vertu de la loi afin d'assurer l'offre d'eau potable sécuritaire, propre et fiable sur les terres des Premières Nations. Toutefois, plusieurs sénateurs et représentants des Premières Nations, y compris les chefs de l'Alberta auxquels vous avez fait allusion, ont interprété l'omission involontaire d'une clause de non-dérogation dans la loi comme un signe que le gouvernement voulait déroger aux droits autochtones et issus des traités, ou les enfreindre.
Après que le projet de loi soit mort au Feuilleton, nous avons tenu compte de cette inquiétude et avons consulté les Premières Nations. Ainsi, à la suite des discussions sous toutes réserves dont j'ai parlé, nous avons ajouté l'article 3, qui est la clause de non-dérogation qui traite de la relation entre la loi et les droits ancestraux et issus des traités en vertu de l'article 35.
Merci, monsieur le ministre.
La parole est maintenant à Mme Bennett; vous avez sept minutes, madame.
Merci beaucoup.
Monsieur le ministre, nous l'avons déjà dit, le Parti libéral croit qu'une loi sans capacité n'a pas de valeur. Je dois donc vous poser une fois de plus cette question.
Le rapport de votre ministère dit qu’« une réglementation à elle seule ne permet pas d’assurer avec efficacité une eau potable sécuritaire » et que « l’instauration d’une réglementation qui ne serait pas accompagnée d'un investissement nécessaire pour renforcer les capacités pourrait même mettre en péril la salubrité de l’eau, car les ressources si rares serviraient pour financer le cadre de réglementation et les coûts de sa mise en application. » On a également fait valoir que « pour être en mesure d’assurer la salubrité de l’eau potable, il était plus important d’avoir les ressources adéquates pour financer les usines, la tuyauterie, la formation, les programmes de surveillance, ainsi que le fonctionnement et l’entretien, que de compter uniquement sur une réglementation ».
J'aimerais savoir pourquoi vous avez décidé de faire fi de ces avertissements et d'adopter ce projet de loi sans aborder les importantes lacunes en matière de capacité.
Madame Bennett, vous soulevez une grave préoccupation qui est aussi la nôtre. En 2011, vous avez écrit à mon prédécesseur pour lui faire part des inquiétudes de votre parti à cet égard, et vous avez même cité le Rapport du groupe d'experts sur la salubrité de l'eau potable dans les collectivités des Premières Nations de novembre 2006, qui disait qu'« il ne serait pas crédible de mettre un régime de réglementation en place sans que les capacités adéquates ne soient présentes pour répondre aux exigences du régime. »
Maintenant, lorsqu'on lit le projet de loi S-8... Je vous ai demandé au début d'étudier cette partie de la stratégie globale, qui se fonde sur trois piliers...
D'accord, c'est là où nous voulions en venir l'autre soir. Le rapport de 2011 qui a été publié après les élections, même s'il était prêt avant, puisque son contenu était accablant, établissant un manque à gagner immédiat de 1,2 milliard de dollars, et de 4,7 milliards de dollars sur 10 ans. Or, le budget de l'année dernière prévoyait uniquement 330,8 millions sur deux ans, en 2012, ce qui n'est en fait qu'une prolongation du financement temporaire actuel; le budget ne prévoyait aucun nouveau fond.
J'aimerais savoir si le ministère a élaboré un plan exhaustif pour donner suite à cette évaluation. Pouvez-vous le transmettre au comité? Quand est-ce que tous les ménages et les collectivités des Premières Nations auront accès à l'eau potable?
Entre 2006 et 2014, notre gouvernement aura investi environ 3 milliards de dollars pour les infrastructures de gestion des eaux et les activités de santé publique connexes en faveur des Premières Nations.
Si on étudie la situation actuelle, à la suite de la publication des résultats de l'évaluation nationale de juillet 2011, je crois...
Monsieur le ministre, vous ne cessez de nous donner ces chiffres faramineux, et vous omettez de reconnaître que, bien qu'au cours des six dernières années, le programme ait reçu en moyenne 1,2 milliard par année, il s'agit d'une diminution d'environ 345 millions de dollars par année par rapport au financement de 2012, et de 500 millions de dollars sur la moyenne de six ans. J'aimerais savoir comment, plutôt que de combler les lacunes existantes, vous pouvez prétendre qu'il y aura suffisamment de ressources pour gérer ces nouvelles responsabilités. Pourquoi ne pas aider les Premières Nations à être conformes ou construire les infrastructures dont elles ont besoin?
Vous vous souvenez peut-être que l'une des principales conclusions de l'évaluation nationale des systèmes d'approvisionnement en eau et d'évacuation des eaux usées des Premières Nations était que la majorité des risques associés aux systèmes à risque élevé avaient trait à la capacité, et que seulement 30 p. 100 étaient associés à la conception et aux infrastructures. Je n'aime pas y revenir, mais nous avons élaboré une stratégie exhaustive qui traite du développement des capacités, qui vise des investissements continus dans les infrastructures et qui exige l'établissement d'un cadre de réglementation clair. C'est notre stratégie. Nous réalisons des investissements. Le budget de 2012 prévoyait un investissement de 338 millions de dollars sur deux ans, je crois, pour les infrastructures des systèmes d'approvisionnement et d'évacuation...
... étant donné la situation financière à laquelle sont confrontés tous les Canadiens. L'argent ne pousse pas dans les arbres. On investit les fonds des contribuables de façon stratégique pour protéger la santé et la sécurité des membres des Premières Nations qui vivent dans les réserves du Canada.
Monsieur le ministre, les chiffres parlent d'eux-mêmes. Des réductions budgétaires de 345 millions de dollars par année ont été faites par rapport aux niveaux de financement de 2012, et de 500 millions de dollars sur une moyenne de six ans. Je m'inquiète des capacités, et j'espère, monsieur le ministre, que vous écouterez ce qu'ont à dire les chefs qui viendront témoigner. Le recours à une approche de normalisation provinciale en inquiète plus d'un, puisque la formation et les essais entraînent parfois la mise à pied de personnes qui travaillent dans ces usines depuis 20 ans. Bon nombre des personnes à qui nous avons parlé préféreraient avoir un système géré et exploité par les Premières Nations. J'espère que vous les écouterez.
La vraie question que l'on se pose est de savoir si le projet de loi ne passe pas par le Sénat pour empêcher son financement? Étant donné les recommandations du groupe d'experts sur la nécessité de s'occuper des capacités, nous vous demandons pourquoi vous avez décidé de procéder ainsi, puisque le projet de loi sera assujetti à des restrictions accrues relatives à l'intégration des ressources nécessaires pour offrir de l'eau potable aux Premières Nations.
Pour répondre à votre première question, bien sûr que nous écouterons les chefs qui viendront témoigner. Notre engagement est clairement exprimé dans le préambule du projet de loi: les règlements seront élaborés en collaboration avec les Premières Nations.
Vous avez parlé des soumissions, des municipalités et des conséquences. J'aimerais citer l'alinéa 5(1)b). Selon le paragraphe 5(1): « Les règlements pris en vertu de l’article 4 peuvent notamment: »
b) conférer à toute personne ou à tout organisme tout pouvoir, notamment législatif, administratif ou judiciaire, que le gouverneur en conseil juge nécessaire afin de régir efficacement les systèmes d’alimentation en eau potable et les systèmes de traitement des eaux usées.
Le projet de loi autorise l'élaboration et la mise en oeuvre de règlements qui visent à garantir la santé et la sécurité des membres des Premières Nations. Cela prendra du temps. Il faut que les capacités soient là. Bien entendu, les infrastructures doivent aussi être en place pour répondre aux normes adoptées. Ce sera fait, mais pas du jour au lendemain. La loi doit être en place pour permettre l'élaboration des règlements.
Ce n'est pas comme si aucun investissement n'était fait dans les infrastructures ou la formation. Vous avez parlé des gens qui travaillent dans les usines depuis 20 ans. J'ai visité la bande de Kashechewan il y a un mois et demi. On y a mis sur pied un tout nouveau système. Malheureusement, en raison du manque de formation des opérateurs, la bande a subi des pertes. Nous avons dû investir des sommes importantes pour corriger la situation. Le programme de formation offert présentement donne de bons résultats. Le nombre d'opérateurs qualifiés et accrédités augmente, ce qui aide à protéger les investissements importants que les Premières Nations font elles-mêmes dans leurs systèmes.
Merci beaucoup, monsieur le ministre.
La parole est maintenant à M. Boughen; vous avez sept minutes, monsieur.
Merci, monsieur le président. Je remercie aussi le ministre et ses collaborateurs d'avoir pris le temps de nous rencontrer. Nous vous en sommes reconnaissants.
Monsieur le ministre, le projet de loi S-8, la Loi concernant la salubrité de l'eau potable sur les terres des Premières Nations, permet de veiller à ce que les mêmes protections relatives au traitement de l'eau potable et des eaux usées s'appliquent aux Canadiens et aux Premières Nations. Pouvez-vous élaborer à ce sujet? Je sais que vous en avez parlé dans votre exposé, mais est-ce que les Premières Nations participeront à l'élaboration et à la mise en oeuvre de ces règlements?
Oui, absolument. Comme l'établit clairement le préambule du projet de loi, nous travaillerons avec les Premières Nations et les autres intervenants à l'élaboration de ces normes et règlements dans chaque région. Le Canada est un pays vaste et sa population est dispersée; nous savons que la situation varie selon les régions. Nous reconnaissons que toutes les collectivités des Premières Nations du pays sont confrontées à des défis uniques, et que leur capacité de répondre aux exigences réglementaires fédérales peut varier selon les provinces et les territoires, et aussi selon les régions au sein d'une même province.
On comprend que la réalité des collectivités isolées n'est pas la même que celle des quartiers en périphérie de Vancouver ou d'Edmonton. Nous travaillerons avec les Premières Nations à l'élaboration de ces règlements. Comme je l'ai dit, il faudra du temps, mais nous les mettrons en oeuvre au cours des prochaines années, en pleine collaboration avec les Premières Nations et les intervenants, et sans oublier le principal souci qui est le nôtre, la santé et la sécurité des membres des Premières Nations.
Depuis 2006, le gouvernement a investi environ 3 milliards de dollars dans les infrastructures de traitement des eaux usées, pour aider les collectivités des Premières Nations. Le 13 janvier 2013, l'ancien ministre a annoncé l'octroi de 330,8 millions de dollars sur deux ans pour poursuivre la construction et la rénovation des infrastructures de traitement de l'eau et des eaux usées, et pour permettre l'élaboration d'une stratégie à long terme visant à améliorer la qualité de l'eau dans ces collectivités. Le gouvernement continuera de financer l'amélioration des infrastructures et des capacités relatives aux services de traitement de l'eau sur les terres des Premières Nations.
Monsieur le ministre, quelles autres mesures ont été prises par votre gouvernement pour se préparer à établir un régime de réglementation des infrastructures des Premières Nations?
Vous soulevez une importante question. Je faisais allusion à l’Évaluation nationale qui a été entreprise de juillet 2009 au printemps 2011. Ses résultats ont été publiés en juillet 2011. Des ingénieurs indépendants ont inspecté dans l’ensemble du pays 1 300 systèmes d’approvisionnement en eau potable et de traitement des eaux usées, plus de 800 puits et 1 900 champs d’épandage de fosse septique. Il s’agissait de l’évaluation la plus rigoureuse, la plus détaillée et la plus indépendante en son genre, dans le cadre de laquelle on a enquêté sur 97 p. 100 des systèmes d’approvisionnement en eau potable et de traitement des eaux usées installés sur les terres des Premières Nations.
Après la publication des résultats de l’évaluation, nous nous sommes, bien entendu, engagés à prendre des mesures concrètes pour aider les collectivités des Premières Nations à améliorer leur accès à une eau potable propre, salubre et fiable. Les problèmes d’eau potable et d’eaux usées dans les réserves ont été jugés prioritaires. La stratégie globale à laquelle j’ai fait allusion a été élaborée en s’appuyant sur les trois piliers que j’ai mentionnés.
Il est important de comprendre que, grâce à l’argent qui a été affecté et investi à ces fins, des travaux ont été amorcés en 2011 afin de remédier à 47 systèmes de traitement des eaux qui ont été désignés comme étant à la fois d’une conception de haut niveau et grandement risqués dans l’ensemble. Ces travaux englobent la conception, la construction et la rénovation ou l’agrandissement de ces systèmes, dont bénéficieront quelque 24 000 personnes vivant dans des réserves. De plus, on renforcera le processus annuel d’inspection afin d’assurer une plus grande uniformité à l’échelle nationale et de veiller à ce que les Premières Nations et le ministère disposent de renseignements exacts pour appuyer la prise de décision relative aux systèmes d’approvisionnement en eau potable et de traitement des eaux usées. Et, enfin, dans le cadre du Plan d’action économique de 2012, le gouvernement s’est engagé à investir 330 millions de dollars sur deux ans pour contribuer à soutenir les progrès réalisés relativement à la construction et à la rénovation des infrastructures d’approvisionnement en eau potable et de traitement des eaux usées des réserves.
Comme je l’ai mentionné plus tôt, d’ici 2014, nous aurons investi approximativement 3 milliards de dollars dans le soutien de la prestation des services d’approvisionnement en eau potable et de traitement des eaux usées offerts dans les collectivités des Premières Nations. Selon moi, cela indique bien que nous sommes déterminés à nous assurer que les collectivités ont la capacité de desservir leurs membres.
Monsieur le ministre, j’ai une brève question d’une minute à vous poser.
Le projet de loi S-8 permettra d’établir des normes et des protocoles exécutoires en matière d’approvisionnement en eau potable et de traitement des eaux usées. Si chaque province et chaque territoire possèdent ses propres normes relatives à la salubrité de l’eau, en ce moment, les collectivités des Premières Nations n’en ont pas qui sont légalement exécutoires. Combien de temps faudra-t-il pour mettre en vigueur le règlement?
Celui-ci sera élaboré sur une certaine période de temps. Il faudra du temps pour élaborer et faire observer le règlement partout au Canada. C’est la raison pour laquelle il sera mis en oeuvre progressivement. Ainsi, le gouvernement et les Premières Nations disposeront du temps nécessaire pour amener leurs infrastructures d’approvisionnement en eau potable et de traitement des eaux usées et leur capacité d’exploitation au niveau requis pour respecter ces nouveaux règlements.
Merci beaucoup.
Nous allons maintenant céder la parole à M. Genest-Jourdain pendant les cinq prochaines minutes.
[Français]
Bonjour, monsieur le ministre.
Considérant que l'implication des membres des Premières Nations est indissociable du processus de mise en oeuvre du projet de loi visé et que la campagne de consultation amorcée sur le même thème en 2009 — une campagne pancanadienne menée à grands frais — n'a attiré que 544 participants, j'aimerais savoir comment vous allez assurer cette fois-ci une participation réelle des membres des Premières Nations quant à la mise en oeuvre de ce projet de loi précis.
Bien sûr, comme le préambule l'indique, nous allons continuer à travailler avec les leaders des Premières Nations partout au pays afin de développer les règlements devant encadrer la distribution d'eau salubre dans les communautés des Premières Nations. Je ne crois pas que le système exige que tous les membres des communautés soient présents. Ce qui est important, c'est que les leaders des diverses Premières Nations au pays soient partie prenante au processus. Ils vont l'être, de même que les autres intervenants du système.
Maintenant, monsieur le ministre, j'aborderai un article particulier du projet de loi, soit l'article 3, qui prévoit une dérogation aux droits ancestraux issus de traités des peuples autochtones du Canada, le tout en conformité avec la Constitution et dans la mesure nécessaire pour assurer la salubrité de l'eau potable sur les terres des Premières Nations.
Est-ce possible de nous indiquer dans quels cas précis on pourrait appliquer cette dérogation aux droits ancestraux issus de traités des Premières Nations?
Je crois que nous sommes le seul pays au monde où les droits autochtones et les droits issus de traités sont protégés par la Constitution. Il ne faut jamais perdre cela de vue.
L'article 3 vise à s'assurer qu'aucun règlement ne pourra enfreindre ces droits issus de traités ou ces droits autochtones et que ceux-ci auront toujours préséance, sauf, bien sûr, si la santé des membres des Premières Nations est compromise.
Je vais laisser à d'autres le soin de parler de situations hypothétiques. Ce qu'il est important que le comité sache, c'est que cette clause de non-dérogation que vous retrouvez à l'article 3 du projet de loi est presque identique à ce qui a été abordé dans les discussions sans préjudice que nous avons eues avec les Premières Nations.
[Traduction]
[Français]
D'accord.
Monsieur le ministre, je regardais le résumé législatif du projet de loi S-8, qui prévoit la possibilité de mettre en oeuvre des règlements qui exigeraient, au final, l'obtention de permis préalablement à l'exercice de toute activité sur les terres des Premières Nations susceptible d'influer sur la salubrité de l'eau potable.
J'aimerais connaître votre opinion à ce sujet. Est-ce possible d'appliquer le même raisonnement aux territoires traditionnels des Premières Nations, étant donné que l'activité industrielle qui s'y observe est souvent liée à l'atteinte des nappes phréatiques et à la baisse sensible de la qualité de l'eau potable dans les réserves indiennes?
Le projet de loi qui est devant le comité vise essentiellement à cibler les terres des Premières Nations situées dans les réserves. Le projet de loi se limite à ce qu'il tente d'accomplir, c'est-à-dire s'assurer que ces règlements s'appliquent à la protection de sources d'eau, à la provision d'eau salubre et au traitement des eaux usées dans les réserves, et non à l'extérieur de celles-ci.
[Traduction]
Merci beaucoup. Merci, monsieur le ministre. Nous vous sommes assurément reconnaissants du témoignage que vous avez apporté aujourd’hui et de l’empressement à comparaître devant nous que vous avez toujours démontré.
Chers collègues, nous allons suspendre nos travaux, puis nous passerons aux prochains témoins.
Merci encore, monsieur le ministre.
Nous reprenons nos travaux, et nous invitons nos témoins à s’avancer.
Monsieur Paul, nous allons commencer par vous.
Je vous suis reconnaissant d’être venu. Nous vous savons gré d’être disposé à vous joindre à nous.
Je vous remercie infiniment de votre présence.
Nous vous savons gré de votre empressement à comparaître devant nous; nous nous attendions à ce que le chef témoigne.
Nous allons vous céder la parole afin que vous puissiez faire votre déclaration préliminaire, puis nous vous poserons quelques questions une fois que M. Paul aura prononcé la sienne.
Bonjour.
Premièrement, j’ai apporté une lettre de mon chef qui dit ce qui suit:
Je vous remercie de permettre à des représentants de ma nation, Tsuu T'ina, de vous donner un exposé concernant le projet de loi S-8.
Au nom du peuple Tsuu T'ina, je souhaite, par la présente, vous aviser que la Première Nation Tsuu T'ina a compétence sur l’eau qui existe sur nos terres. Notre compétence est protégée par le traité no 7 et par la Loi constitutionnelle de 1982.
Le Canada, l’État successeur de la Grande-Bretagne, est tenu d’observer la Loi constitutionnelle de 1982.
Ces paroles sont celles du chef Roy Whitney de la Première Nation Tsuu T'ina.
Tout d’abord, nous aimerions nous présenter. Nous sommes membres de la Première Nation Tsuu T'ina qui a signé le traité no 7.
Notre réserve est rectangulaire. Elle mesure 18 miles de long, d’est en ouest, et 6 miles de large, du nord au sud. Elle compte à peu près 69 000 acres. Selon les dernières statistiques, notre population s’élève à 1 863 habitants au total. Notre réserve touche aux limites sud-ouest de la municipalité de Calgary.
Deux réseaux d’alimentation en eau naturels traversent notre réserve, soit la rivière Elbow et le ruisseau Fish. La ville de Calgary dépend largement de ces deux réseaux. La rivière Bow, une importante rivière qui traverse la ville de Calgary, fait partie de notre territoire traditionnel depuis des temps immémoriaux.
Toutes ces sources d’eau ont été amplement polluées par le développement industriel, agricole et résidentiel. Voilà pourquoi, nous sommes très préoccupés par la pollution de l’eau et la salubrité de l’eau potable.
Conformément au jugement rendu dans l’affaire Van der Peet, l’eau fait partie intégrante de notre culture. Outre les besoins physiques qu’elle satisfait, l’eau est au coeur de nos cérémonies, de nos chants et de nos histoires, lesquels définissent qui nous sommes en tant que nation.
En tant que signataire du traité no 7, notre nation aimerait rappeler à la Couronne l’existence de ce dernier. Le traité no 7 est un traité de paix négocié entre nos deux nations dans lequel notre chef, Bull Head, a accepté que l’on confère à une partie de notre territoire traditionnel le statut de terre de réserve à notre usage exclusif, afin que nous puissions préserver notre mode de vie. De plus, il a accepté de partager le reste de notre territoire traditionnel avec les nouveaux venus d’Europe en échange d’un certain nombre de garanties, dont une protection fiduciaire contre tout empiètement par les nouveaux venus, des services d’enseignement et de santé à vie, le maintien des droits de chasse, de pêche et de piégeage, et des fonds pour favoriser le développement économique.
Le projet de loi concernant la salubrité de l’eau potable est un autre exemple de tentatives continues par la Couronne de se soustraire aux responsabilités qu’elle a acceptées en signant le traité no 7. Toutefois, nous aimerions rappeler à cette dernière qu’elle est tenue d’assumer les responsabilités fiduciaires et fiscales envers nos peuples qu’elle a acceptées. Ces responsabilités sont issues de plusieurs sources, dont la Proclamation royale de 1763, le traité no 7 de 1877, la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et des causes portées devant la Cour suprême, comme l’affaire Guerin.
La Cour suprême du Canada a également rappelé au gouvernement du Canada qu’il doit agir avec honneur lorsqu’il traite avec les Premières Nations.
Le point de vue de notre nation concernant le projet de loi S-8 est que la Couronne n’agit pas de manière très honorable et cherche simplement à se dérober à ses obligations de fiduciaire envers nous.
Le sommaire du projet de loi S-8 indique ce qui suit:
Le texte répond à des préoccupations concernant la santé et la sécurité sur les terres de réserve et certaines terres déterminées. Il prévoit la prise de règlements relatifs à l’eau potable et au traitement des eaux usées dans les collectivités des Premières Nations. Ceux-ci peuvent varier d’une province à l’autre en fonction des régimes réglementaires provinciaux, mais avec les adaptations que nécessite la situation des Premières Nations vivant sur ces terres.
Ce sommaire rend compte de la teneur de la loi proposée, laquelle traite uniquement des régimes réglementaires, sans s’occuper des normes de santé. Cela cadre avec l’habitude générale que le gouvernement fédéral a d’adopter les régimes législatifs et réglementaires provinciaux et de les appliquer aux terres des Premières Nations.
Tout semble indiquer qu’aux termes de la loi proposée, on adoptera simplement les lois et les règlements provinciaux en matière de salubrité de l’eau potable et de traitement des eaux usées mais, en vérité, la pollution de l’eau sur les terres de réserve est en grande partie causée par la faiblesse des normes provinciales en matière d’eau ou l’application insuffisante des lois et des règlements provinciaux. Par conséquent, le gouvernement fédéral devrait assumer un rôle de chef de file en aidant les Premières Nations à élaborer des normes de salubrité de l’eau potable dans les réserves, plutôt que de s’en remettre aux lois et aux régimes réglementaires provinciaux.
Le projet de loi S-8 fait allusion aux sources d’eau potable. Au Canada, aucune Première Nation n’exerce un contrôle sur des sources d’eau potable autres que des puits creusés dans les réserves.
De plus, il est mentionné qu’on peut exiger qu’un organisme obtienne un permis préalablement à l’exercice de toute activité susceptible d’influer sur la salubrité de l’eau potable. Par organisme, on pourrait entendre une société pétrolière. Par exemple, la fracturation est une activité qui influe sur les eaux souterraines, mais la loi proposée ne fait aucune allusion à la réglementation de ce genre d’activités, mis à part la nécessité d’obtenir un permis.
La loi proposée reconnaît distinctement que les eaux et les autres ressources naturelles relèvent des gouvernements provinciaux. Cela indique très clairement que le gouvernement fédéral ne tient pas à assumer un rôle de chef de file relativement à la salubrité de l’eau potable. Il cherche simplement à se décharger sur les provinces de ses responsabilités en matière de santé envers les peuples des Premières Nations, même si les provinces ne sont nullement responsables des Indiens, sur le plan constitutionnel.
Le texte de la loi proposée indique très clairement que celle-ci n’aura pas d’incidence sur la gestion de l’eau. Le problème tient essentiellement au fait qu’on ignore ce qui adviendra si les besoins d’une Première Nation entrent en conflit avec l’eau allouée à des fins industrielles ou d’irrigation. Le texte de la loi proposée indique très clairement que l’eau allouée par les provinces primera sur les besoins en eau potable des Premières Nations.
La loi proposée confiera au gouverneur en conseil un vaste éventail de pouvoirs de réglementation. Le projet de loi S-8 ne mentionne ni les chefs, ni les conseils, mais indique qu’on accordera à une personne ou à un organisme le pouvoir de mettre en oeuvre les règlements. Comme les chefs et les conseils ne sont pas mentionnés, il est probable que l’organisme sera non autochtone. Ce sera soit une société, soit un organisme administratif provincial. Autrement dit, des étrangers seront probablement chargés d’assurer la salubrité de l’eau potable dans nos réserves. Si l’on confie cette tâche à des non-Autochtones ou à une société, il est plus que probable qu’ils se préoccuperont de leurs profits, plutôt que de la santé des Autochtones.
Une part importante de la loi proposée vise à protéger les fonctionnaires gouvernementaux, tant fédéraux que provinciaux, contre des poursuites éventuelles. Le gouvernement a le pouvoir d’adopter toutes les lois et tous les règlements, mais il ne souhaite assumer aucune responsabilité pour les erreurs, les omissions ou les négligences. Selon la loi, les chefs et les conseils seront tenus responsables de ces questions.
L’eau n’est pas mentionnée précisément dans la Constitution canadienne. Le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux revendiquent la compétence dans le domaine des eaux en raison de la relation qui existent entre elles et des enjeux comme les côtes maritimes, les pêches dans les eaux intérieures, la navigation, le transport maritime, les institutions municipales et les droits civils et de propriété. Toutefois, que l’on envisage la question du point de vue des droits des peuples autochtones, des droits issus des traités — conformément à l’article 35 de la Loi constitutionnelle — ou d’une appropriation antérieure, le droit des Premières Nations sur l’eau a préséance sur celui du gouvernement fédéral ou des gouvernements provinciaux.
Compte tenu de ce droit sur l’eau, le projet de loi S-8 devrait vraiment traiter de la mise en oeuvre des traités. Il devrait incomber aux Premières Nations d’adopter des lois et des règlements concernant la salubrité de leur eau potable, et non au gouvernement fédéral ou aux gouvernements provinciaux.
En conclusion, nous sommes ici pour vous informer que la Première Nation Tsuu T’ina rejette le projet de loi S-8 en entier, étant donné qu’il ne respecte pas l’esprit et l’intention du traité no 7. Le traité no 7 et les droits inhérents des Autochtones sont protégés par votre Loi constitutionnelle de 1982.
Sachez que la Première Nation Tsuu T’ina élabore en ce moment une loi qui cerne les besoins en eau des habitants des terres des Tsuu T’ina.
Merci.
Merci, conseillère Crowchild. Nous vous sommes reconnaissants de votre déclaration préliminaire.
Nous allons maintenant passer à M. Paul, qui est ici pour représenter le First Nations of Alberta Technical Services Advisory Group.
Nous savons gré à tous les deux d’être venus.
Monsieur Paul, nous allons maintenant vous céder la parole pour vous permettre de faire votre déclaration préliminaire.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Bonjour, chers membres du comité. Je vous remercie d’avoir invité notre organisation à faire un exposé sur cette mesure législative.
Je vais vous fournir un peu de contexte. Je tiens à remercier Regena d’avoir commencé sa déclaration en présentant le point de vue de l’Alberta. Je travaille pour le First Nations of Alberta Technical Services Advisory Group, le TSAG en abrégé. Il s’agit d’un fournisseur de services sans but lucratif qui est administré par toutes les Premières Nations de l’Alberta par le biais d’un comité de direction des chefs nommés par l’Assembly of Treaty Chiefs. Le TSAG offre des services techniques et de la formation aux Premières Nations dans le domaine du logement, des travaux publics, des installations communautaires et de la gestion environnementale, dans le cadre de plus de 12 programmes spécialisés.
Notre organisation est particulièrement axée sur la gestion de l’eau à l’échelle locale, dans les collectivités des Premières Nations, et possède des connaissances dans ce domaine. Le TSAG offre un programme de formation itinérant qui enseigne aux opérateurs de systèmes de traitement des eaux des Premières Nations comment assurer la salubrité de l’eau potable. En partenariat avec Affaires autochtones et Développement du Nord Canada — son bureau régional et son personnel ici, à Ottawa —, le TSAG s’est également employé à élaborer avec une Première Nation de l’Alberta un plan de protection de l’eau de source axé sur les collectivités. C’est le premier plan de ce genre à avoir été élaboré, et il servira de modèle pour planifier la protection de l’eau de source dans les réserves, à l’échelle nationale, et pour développer les capacités communautaires en matière de gestion des ressources en eau. Le TSAG donne au personnel des départements responsables des terres et de l’environnement l’occasion de suivre des cours de formation technique et de se mettre en relation avec leurs homologues.
Au cours de la dernière année et demie, nous avons entrepris un projet pilote avec des représentants d'AADNC. Nous avons installé des dispositifs de surveillance à distance de l’eau dans toutes les usines de traitement de l’eau des Premières Nations de l’Alberta. Leur conception et leur mise en oeuvre sont plutôt uniques en leur genre. Ils n’emploient pas de réactifs ou de produits chimiques pour les essais ou la surveillance. Ils nous fournissent des données en temps réel sur la qualité de l’eau potable qui sort des usines de traitement de l’eau, à l’aide d’un modèle et d’un algorithme très élaborés et je vous prie de ne pas me demander de vous expliquer comment ils fonctionnent. Ainsi, il n’est pas nécessaire d’utiliser des réactifs ou des produits chimiques, et les dispositifs ne requièrent pratiquement aucun entretien.
Cela étant dit, je tiens à préparer le terrain afin d’exposer les connaissances que nous avons le sentiment de posséder. Ces connaissances ne sont peut-être pas très grandes mais, au fil des ans, nous avons participé à l’analyse des répercussions qui a été demandée pendant que nous prenions part à l’élaboration du rapport Neegan Burnside. Nous avons senti que cette analyse était inadéquate, en ce sens que les responsables n’avaient pas alloué suffisamment de temps pour mener des consultations et des discussions approfondies sur les répercussions et les ramifications des différentes méthodes utilisées pour élaborer cette mesure législative.
Dans le cadre du mandat de l’analyse des répercussions, AADNC a demandé aux Premières Nations d’examiner l’incidence qu’aurait sur celles-ci l’incorporation par renvoi de règlements provinciaux déjà en vigueur et d’étudier les éléments des lois provinciales qui pourraient être cernés par la mesure législative. AADNC a énuméré ces éléments dans un document de travail qu’il a préparé au début de 2009. Les employés du ministère ont également exigé que nous retenions les services d’experts locaux pour nous aider à procéder à l’analyse et que nous examinions l’incidence qu’auraient les régimes réglementaires déjà en vigueur dans la province.
AADNC a indiqué que l’analyse des répercussions avait pour objet de connaître l’opinion des Premières Nations et des organisations régionales des Premières Nations relativement au cadre législatif proposé par le gouvernement fédéral pour gérer l’eau potable et les eaux usées, en fonction de la possibilité d’incorporer par renvoi des règlements provinciaux. Les Premières Nations disposaient de seulement deux mois pour mener à bien cette tâche, qui comprenait l’examen de cinq lois provinciales et de 19 règlements, codes et directives — soit environ 149 pages d’exigences réglementaires —, lesquels représentent collectivement le régime réglementaire provincial en matière d’eau potable et d’eaux usées.
Il nous a fallu solliciter les commentaires de 47 collectivités autochtones de l’Alberta et de leurs opérateurs de systèmes de traitement des eaux concernant les conséquences possibles de l’assujettissement des Premières Nations au régime réglementaire provincial. Il nous a également fallu tenir compte des répercussions possibles de l’incorporation par renvoi du régime réglementaire provincial et résumer tous les renseignements mentionnés plus tôt dans un rapport d’analyse des répercussions. Pour permettre à l’AOTC de procéder à l’analyse des répercussions, AADNC lui a accordé un financement de 22 000 $, ainsi que 468 $ pour chaque Première Nation de l’Alberta.
Étant donné qu’en de nombreuses occasions, le TSAG a travaillé avec des collectivités des Premières Nations de l’Alberta à régler des questions liées à l’eau, l’AOTC a communiqué avec le TSAG au début de 2009 pour lui demander de l’aider à procéder à une analyse des répercussions. Malgré le budget nettement insuffisant qu’AADNC avait accordé et l’échéance presque impossible à respecter qu’il avait établie, nous avons accepté avec réticence d’effectuer l’analyse des répercussions pour le compte de l’AOTC.
Le 6 avril 2009, au nom de l’AOTC, le TSAG a présenté à AADNC une analyse des répercussions que pourrait avoir la loi sur l’eau potable proposée par le gouvernement fédéral. Vous disposez d’une copie de cette analyse, et celle-ci est également affichée sur notre site Web. Dans le mandat de l’analyse, AADNC avait indiqué qu’une fois que cette initiative serait terminée, chacun des 12 apports régionaux d’analyse des répercussions serait remis à l’expert-conseil chargé de coordonner le projet, et ce dernier compilerait les résultats dans un rapport sommaire final. Ce rapport serait remis à AADNC une fois que toutes les organisations régionales des Premières Nations ayant participé à l’analyse des répercussions l’auraient examiné.
Nous avons reçu l’ébauche du rapport sommaire préparé par l’Institut sur la gouvernance tard dans l’après-midi du 13 avril 2009. On s’attendait à ce que nous et les organisations régionales des Premières Nations examinions l’ébauche du rapport avant la réunion qui devait se dérouler à Ottawa, le 15 avril 2009, et au cours de laquelle on apporterait la dernière touche au rapport. Bien entendu, nous avons passé le 14 avril à voyager de l’Alberta à Ottawa. Donc, en pratique, le TSAG a eu peu de temps pour examiner l’ébauche du rapport sommaire.
D’après ce que nous avons pu comprendre, ces circonstances ne se sont pas appliquées uniquement aux Premières Nations de l’Alberta. Chaque organisation régionale des Premières Nations a reçu l’ébauche du rapport sommaire tard dans la journée du 13 avril 2009. Par conséquent, le TSAG et les organisations régionales des Premières Nations de la Saskatchewan, du Manitoba, de l’Ontario, de la Nouvelle-Écosse, de la région de l’Atlantique, des Territoires du Nord-Ouest et du Yukon ont demandé à AADNC qu’on leur accorde 30 jours pour examiner l’ébauche du rapport sommaire de l’Institut sur la gouvernance. Toutefois, notre demande a été refusée. Il s’ensuit que, collectivement, ces mêmes organisations régionales des Premières Nations ont insisté pour qu’on ajoute au résumé du rapport sommaire de l’Institut sur la gouvernance l’avertissement suivant: « Le contenu du présent document engage la responsabilité des auteurs du rapport de l’Institut sur la gouvernance, et il ne correspond pas nécessairement aux positions ni aux points de vue des représentants régionaux de l’analyse des répercussions sur les Premières Nations ni d’une Première Nation ou d’un organisme régional en particulier ».
Jusqu’à maintenant, AADNC n’a pas répondu à aucune des préoccupations signalées par le TSAG et l’AOTC dans l’analyse des répercussions. Comme AADNC a complètement négligé de répondre aux résultats de l’analyse des répercussions, les Premières Nations de l’Alberta continuent d’être très préoccupées et frustrées par ces répercussions. Pourquoi AADNC a-t-il financé une analyse des répercussions s’il n’avait pas l’intention d’examiner ses résultats et de répondre aux préoccupations qu’elle a soulevées ou de rencontrer les Premières Nations de l’Alberta afin d’en discuter?
Il est clairement recommandé qu’AADNC entreprenne un processus approfondi de consultation auprès des Premières Nations en vue d’élaborer une mesure législative de ce genre, en collaboration avec elles. Bien que le gouvernement fédéral soit tenu par la loi de consulter les Premières Nations, celles de l’Alberta sont surtout préoccupées par les conséquences pratiques qui découlent du fait qu’AADNC a négligé d’examiner et de répondre aux résultats de l’analyse des répercussions de l’AOTC. En termes simples, cela signifie que le projet de loi S-8 a été élaboré sans tenir compte des points de vue constructifs des dirigeants des Premières Nations, des collectivités, des organisations ou des opérateurs de systèmes de traitement des eaux de l’Alberta.
Je vais maintenant passer à un bref résumé des préoccupations générales signalées par l’analyse des répercussions, qui représente les efforts collectifs des dirigeants, des collectivités, des opérateurs et des employés des systèmes de traitement des eaux des Premières Nations, ainsi que des membres inquiets des Premières Nations de l’ensemble de l’Alberta qui ont assisté aux ateliers organisés par le TSAG, qui ont répondu aux questions, qui ont téléphoné pour exprimer leurs inquiétudes ou qui les ont présentées par écrit. Le document est long, ce qui n’a rien d’étonnant, compte tenu de ce qu’il était censé accomplir. Malheureusement, le TSAG ne dispose pas des fonds nécessaires pour faire traduire en français les 220 pages d’analyse des répercussions, et AANDC a confirmé qu’il n’avait pas fait traduire le document. Pour que les membres du comité puissent le consulter, nous l’avons affiché sur notre site Web à l’adresse suivante: www.tsag.net.
Bien que nous encouragions les membres du comité à examiner l’analyse des répercussions, nous vous fournissons le résumé suivant des préoccupations et des problèmes signalés au cours de l’analyse par les dirigeants des Premières Nations et les opérateurs des systèmes de traitement des eaux concernant les conséquences que pourrait avoir l’application du régime réglementaire provincial aux collectivités des Premières Nations.
Il est important de souligner que ce résumé ne rend pas compte de la partie de l’analyse des répercussions qui portait sur les conséquences que la mesure législative proposée pourrait avoir sur les droits des Premières Nations issus des traités et sur leur compétence sur les eaux qui se trouvent sur les terres de réserve. Ces questions ont été abordées dans le mémoire de l’AOTC, et je suis certain que les Premières Nations des autres régions les soulèveront également.
Premièrement, nous recommandons de cerner d’abord les ressources et, ensuite, les règlements.
Au cours de l’élaboration de l’analyse des répercussions avec le TSAG, les dirigeants des Premières Nations et les techniciens des eaux ont mis en évidence un grave problème persistant, qui l’emporte sur tous les autres. Le Canada a toujours négligé d’accorder aux Premières Nations les fonds nécessaires pour concevoir, construire, exploiter et entretenir les usines de traitement des eaux des Premières Nations et les autres infrastructures d’approvisionnement en eau potable. Au cours des dernières années, AADNC a investi plus de deux milliards de dollars en vue de remédier aux installations problématiques des collectivités des Premières Nations mais, pour rehausser tous les systèmes de traitement des eaux des Premières Nations à un niveau acceptable, il faudrait investir plus d’argent.
Les coûts liés à l’amélioration des systèmes de traitement des eaux des Premières nations sont actuellement étudiés dans le cadre de l’évaluation technique nationale qui n’est pas encore achevée. Si le problème fondamental lié au manque de ressources n’est pas réglé avant la mise en oeuvre de la nouvelle mesure législative concernant la salubrité de l’eau potable, de nombreuses Premières Nations ne seront pas en mesure de respecter les nouvelles normes réglementaires. De plus, les nouveaux règlements pourraient aggraver la situation en accroissant les coûts occasionnés par la surveillance, l’établissement de rapports, le respect des normes et les sanctions pécuniaires liées à l’application de la loi qui pourraient être encourues.
AANDC a indiqué que les règlements seraient mis en oeuvre graduellement et appliqués aux Premières Nations lorsqu’elles seraient prêtes et, pourtant, on ne retrouve aucun engagement ou aucune exigence de ce genre dans le projet de loi S-8. Personne ne désire que la nouvelle mesure législative concernant l’eau potable rende la situation plus précaire qu’elle ne l’est déjà.
Le groupe d’experts a insisté sur le fait que le manque chronique de fonds est le problème le plus important qui empêche les Premières Nations de distribuer de l’eau potable salubre. Par exemple, un certain nombre de nos collectivités ont déjà dépensé la totalité de leur budget pour leurs installations d’approvisionnement en eau et de traitement des eaux usées au cours du premier trimestre. Étant donné les coûts élevés de la main-d’oeuvre, des produits chimiques et des services de base en Alberta, lorsque le mois de septembre ou d’octobre arrive, elles sont à court d’argent, et elles doivent trouver d’autres moyens de financer leurs activités.
Des règlements n’assureront pas à eux seuls la salubrité de l’eau potable, à moins que d’autres exigences — comme une approche à barrières multiples, un processus décisionnel prudent et des systèmes de gestion efficaces — soient satisfaites. Pour satisfaite à ces autres exigences, il faut qu’on investisse suffisamment d’argent dans des ressources humaines et des biens matériels. Si l’on applique des règlements sans investir les sommes nécessaires pour développer les capacités, on pourrait même mettre en péril la salubrité de l’eau potable en obligeant ces collectivités à réaffecter des ressources grandement nécessaires pour prendre en charge les frais liés aux cadres réglementaires et au respect des normes.
La politique actuelle d’Affaires autochtones consiste à financer 80 p. 100 des coûts d’exploitation et d’entretien estimatifs, au lieu d’assumer la totalité des coûts réels occasionnés par les systèmes d’approvisionnement en eau des Premières Nations. En 2005, le commissaire à l’environnement a découvert que les coûts estimatifs sur lesquels reposait le pourcentage n’avaient pas été réexaminés, ni actualisés, depuis plusieurs années.
À notre connaissance, la formule de financement employée par AADNC n’a pas changé depuis 2005. De plus, lorsque le ministère des Affaires autochtones négocie des ententes de financement avec les Premières Nations, il ne cherche pas à savoir si les Premières Nations disposent d’autres ressources pour financer les autres 20 p. 100 des coûts.
Un grand nombre de techniciens des eaux ont indiqué au TSAG qu’en pratique, ils sont souvent forcés d’exploiter et d’entretenir les systèmes d’approvisionnement en eau de leur collectivité à l’aide de budgets qui sont inférieurs aux coûts réels. Certaines collectivités des Premières Nations n’ont d’autre choix que réaffecter des fonds alloués à d’autres domaines sous-financés, comme la santé, l’éducation et le logement, pour exploiter leurs systèmes de traitement des eaux.
Rien dans le projet de loi, le document de travail d’AADNC ou dans ses plans de mise en oeuvre du projet de loi n’aborde ce problème fondamental et crucial. Si l’on met en oeuvre des règlements sans accorder aux collectivités les ressources nécessaires, on ne fera que perpétuer le long bilan désastreux du Canada en matière d’eau potable des Premières Nations.
Le président du groupe d’experts, M. Harry Swain, a indiqué très clairement que si nous voulons « que les réserves indiennes aient accès à une eau potable salubre, nous devons d’abord nous préoccuper de leur fournir les ressources de base, puis de mettre en place un régime réglementaire. »
Toutes les Premières Nations de l’Alberta ont communiqué le même message au TSAG, lorsque nous avons procédé à l’analyse des répercussions. Elles souhaitent que le gouvernement du Canada s’engage fermement à régler le problème de sous-financement avant d’élaborer de nouvelles mesures législatives ou de nouveaux règlements.
Le deuxième problème a trait à l’eau des Premières Nations et au gouvernement de l’Alberta. La position du gouvernement de l’Alberta est que les Premières Nations n’ont aucun droit, ni compétence, sur l’eau qui se trouve sur les terres de réserve. Il soutient que la province est propriétaire de toutes les ressources en eau disponibles sur les terres des Premières Nations et que celle-ci exerce un contrôle sur ces ressources.
AADNC n’a pas pris en considération les conséquences de la position du gouvernement de l’Alberta et les rapports difficiles que, par conséquent, les Premières Nations entretiennent avec celui-ci, en ce qui a trait à l’eau, même si le groupe d’experts en matière de salubrité de l’eau potable des Premières Nations a signalé que cette préoccupation nuirait à une utilisation efficace des règlements provinciaux. Cet obstacle pourrait devenir encore plus important si des fonctionnaires provinciaux étaient appelés à jouer un rôle dans la réglementation des systèmes de traitement des eaux des Premières nations.
Les techniciens des eaux, leur chef et leur conseil craignent beaucoup que les fonctionnaires provinciaux utilisent tout pouvoir qui pourrait leur être accordé par le gouvernement fédéral à titre de responsables de la réglementation pour faire également avancer leur prétention à la propriété et au contrôle des ressources en eau des réserves des Premières Nations. Ces dernières redoutent particulièrement que le projet de loi ait pour effet de les assujettir aux nouveaux marchés de l’eau albertains, où même de petites quantités d’eau allouées coûtent des millions de dollars, et de les forcer à faire face aux conséquences financières potentiellement stupéfiantes qui découleraient de cet état de choses.
En ce moment, AADNC ne s’est pas engagé à acheter, pour le compte des Premières Nations, des quantités d’eau sur les nouveaux marchés de l’eau albertains.
Je me demande si vous pourriez résumer votre dernier argument. Nous atteignons la période allouée pour les questions. Alors, s’il vous était possible de résumer vos propos, ce serait merveilleux.
Je vais simplement lire trois arguments, puis je présenterai le document à titre de renseignement à l’intention de ceux que cela pourrait intéresser.
L’un d’eux concerne le fait de prendre des règlements sans prévoir un organisme de réglementation.
On ne dispose pas de suffisamment d’information sur l’incorporation par référence. Qu’entend-on par là exactement? Est-il logique d’incorporer par référence le régime réglementaire de l’Alberta?
Un autre problème est lié à la protection de l’eau de source.
L’examen par le TSAG des mesures de protection de l’eau de source que comporte le régime réglementaire de l’Alberta remet également en question la capacité du régime de protéger efficacement l’eau de source des réserves des Premières Nations. Il est probable que l’incorporation par référence comprendra les dispositions du régime réglementaire de l’Alberta ayant trait au plan de gestion des bassins hydrographiques. Ce premier aspect est préoccupant, car la position du gouvernement de l’Alberta à cet égard est qu’il n’est nullement obligé de faire participer les Premières Nations à la gestion des bassins hydrographiques. De plus, aux termes du régime albertain, les plans de gestion des bassins hydrographiques, qui sont censés être le principal moyen de protéger l’eau de source, ne sont pas exécutoires et sont administrés comme un objectif de politique dont il est impossible d’assurer l’application. La province de l’Alberta ne dispose d’aucune mesure législative, comme la Loi sur l’eau saine de l’Ontario, qui peut être appliquée pour protéger l’eau de source. Les exigences limitées du régime provincial ont démontré qu’elles ne parvenaient pas à protéger l’eau de source des réserves des Premières Nations contre des menaces éventuelles locales et imminentes.
Pour toutes les raisons exposées ici et précédemment, les Premières Nations se demandent avec beaucoup d’inquiétudes si AADNC a étudié soigneusement la pertinence d’adopter le régime réglementaire provincial et si celui-ci est une solution satisfaisante dans le contexte de l’eau potable des Premières Nations.
Le document comporte pas mal de pages. On y retrouve une conclusion et des recommandations.
Nous voulons vous remercier de nous avoir donné l’occasion de faire un exposé concernant la mesure législative. Notre organisation partage l’opinion de longue date de l’Assembly of Treaty Chiefs selon laquelle il faut combler la lacune en matière de réglementation de l’approvisionnement en eau potable et du traitement des eaux usées des Premières Nations, et ces dernières doivent jouer un rôle central dans les efforts de collaboration avec le Canada déployés pour élaborer une mesure législative visant à combler cette lacune. Toutefois, compte tenu des préoccupations et des questions soulevées par les dirigeants des Premières Nations de l’Alberta et leurs techniciens des eaux, au cours de l’analyse des répercussions, le TSAG soutient respectueusement que, dans sa forme actuelle, le projet de loi crée autant, voire plus, de problèmes qu’il n’en résout. En conséquence, nous recommandons que le projet de loi soit renvoyé au gouvernement du Canada afin que celui-ci le retravaille, en particulier, en tenant compte plus directement les commentaires des Premières Nations.
Merci.
Merci beaucoup.
Chers collègues, nous allons commencer par des interventions de cinq minutes afin que quelques intervenants supplémentaires puissent poser des questions.
Je remercie infiniment nos témoins de leurs mémoires détaillés et importants.
Nous allons céder la parole à M. Bevington, pour commencer.
Merci beaucoup, chers témoins. Vous nous avez apporté tous deux de précieux témoignages, et vous nous avez donné un exposé très détaillé des systèmes de traitement des eaux de l’Alberta.
Je suis certain que vous connaissez bien l’évaluation nationale qui a été effectuée. Elle indique que quelque 25 des 82 systèmes d’approvisionnement en eau de l’Alberta découlent de genres d’ententes avec des municipalités. Comment ces relations se déroulent-elles?
Je fais partie d'une des Premières Nations qui a conclu, avec Edmonton, un ATM, un accord de type municipal. Les relations sont plutôt satisfaisantes.
Le problème, c'est que nous avons installé la canalisation nous raccordant à la station de pompage il y a 20 ans. Fournir de l'eau potable à cette époque coûtait environ 80 000 $ par année. Depuis, le coût a triplé, mais pas les budgets. Notre Première Nation doit donc chercher des solutions afin d'acquitter cette facture supplémentaire.
D'après l'étude nationale, 162 millions de dollars étaient nécessaires pour que les 82 systèmes d'approvisionnement en eau de l'Alberta atteignent une qualité raisonnable, et il fallait probablement prévoir un montant supplémentaire de 800 millions pour l'avenir.
Êtes-vous au courant de ces chiffres? Vous apparaissent-ils exacts?
Le premier ministre a annoncé qu'il accorderait les montants nécessaires, mais ce n'était que des paroles en l'air. Jusqu'à présent, notre collectivité ou l'ensemble des collectivités autochtones de l'Alberta n'a reçu aucun montant. Nous espérions que le premier ministre tienne sa parole.
Merci.
J'ai participé à l'étude sur les bassins des rivières du nord de l'Alberta. J'ai constaté les problèmes auxquels étaient confrontées les Premières Nations en matière d'approvisionnement en eau. On en est au courant depuis les années 1990. Il n'y a donc eu aucune amélioration au fil des ans, n'est-ce pas?
Dans les réserves, environ 30 p. 100 des maisons sont approvisionnées en eau à l'aide de camions. Dans les Territoires du Nord-Ouest, le coût est très élevé. Vous pourriez peut-être nous dire à combien se chiffre ce coût et quelles en sont les répercussions sur les collectivités.
Je n'ai pas en main les chiffres. Cependant, la plupart des maisons dans nos réserves sont dotées de citernes. Certaines ont des puits. Parfois, nous achetons l'eau à la ville de Calgary pour approvisionner notre immeuble administratif, le casino et les bâtiments dans l'est de notre réserve.
Je m'excuse, mais je n'ai pas en main les chiffres, mais je peux vous dire qu'il nous en coûte beaucoup d'argent.
Je suis au courant des coûts de l'approvisionnement en eau pour les collectivités éloignées dans les Territoires du Nord-Ouest. D'après cette étude, l'eau est livrée à 31 p. 100 des personnes vivant dans les réserves. Le coût est très élevé et augmente chaque jour. C'est une situation difficile.
Le système de distribution est l'un des éléments qui fait augmenter l'écart dont nous parlons pour les ressources. On pourrait couper les cheveux en quatre pour définir ce qu'est un système de distribution. D'après nous, la livraison d'eau par camion coûte très cher à cause du prix élevé du diesel. En raison de l'accroissement rapide de la population dans certaines collectivités, la livraison se fait 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Pour obtenir de l'eau potable de certaines nappes souterraines et de certains cours d'eau... La livraison d'eau dans les maisons des Premières Nations coûte cher.
Les camions créent d'autres problèmes. Ils endommagent les routes, et nous devons investir pour les réparer. Il y a des problèmes de délai dans la livraison. Il y a la période de gel. Et la loi de Murphy semble s'appliquer. Je ne pourrais pas vous donner un chiffre exact, mais c'est une estimation un peu faible que de dire que 30 p. 100 des résidences sont alimentés en eau par camion. Dans ma seule collectivité, c'est bien au-dessus de 60 p 100. Dans d'autres collectivités de l'est et du centre de l'Alberta où l'on exploite beaucoup le pétrole et le gaz, l'eau n'est pas potable.
Merci, monsieur le président.
Je remercie nos deux témoins de leur présence parmi nous. Je suis toujours ravi d'accueillir d'autres Albertains dans la capitale nationale.
Madame Crowchild, je me souviens qu'en 2006, l'Alberta avait mis en oeuvre un plan de gestion des eaux du bassin hydrographique de la rivière Saskatchewan Sud. Si ma mémoire est bonne, la Première nation Tsuu T'ina s'y est toujours opposée. Est-ce exact?
De plus, elle s'est opposée plus farouchement lorsque la province a augmenté la portée de ce plan de gestion des eaux pour inclure toute l'Alberta. Suis-je dans l'erreur?
Pas du tout.
Nous avons essayé de faire entendre notre voix sur cet enjeu, mais les représentants de la province et les autres interlocuteurs n'ont jamais donné suite à nos préoccupations correctement.
Je sais qu'il y a un procès en raison d'un différend entre votre Première Nation et d'autres Premières Nations assujetties au traité no 7 d'une part, et la province d'autre part. Le premier tribunal a donné raison à la province, mais j'ignore où en sont rendues les choses.
Avez-vous interjeté appel devant la Cour d'appel de l'Alberta?
Oui. Les tribunaux étant encore saisis de l'affaire, il m'est impossible d'en discuter pour l'instant.
L'affaire est instruite, mais aucune décision n'a encore été rendue. Je ne peux en parler davantage pour cette raison. Je ne voudrais pas porter préjudice à notre cause.
Je comprends très bien.
Je sais qu'à un moment donné, les Premières Nations assujetties au traité no 7, plus particulièrement la Première nation Tsuu T'ina, étaient en faveur de l'initiative fédérale visant à réglementer la gestion de l'eau potable et des eaux usées.
Est-ce que je fais fausse route si je dis que la majeure partie de vos préoccupations à propos du projet de loi portent moins sur le cadre réglementaire que sur la position du gouvernement fédéral par rapport à l'approvisionnement en eau, qui relève des compétences provinciales?
Nous nous opposons au projet de loi S-8. C'est la position de la Première nation Tsuu T'ina. Lorsque le projet de loi a été présenté, les Premières Nations assujetties au traité no 7 ont affirmé n'avoir aucun problème par rapport à l'eau potable. Nous voulons de l'eau potable. Le problème, c'est que le tout a été intégré dans une mesure législative qui fait fi de nos compétences, des obligations fiduciaires et des responsabilités financières.
Nous avons la compétence exclusive sur l'eau dans notre territoire. Notre Première Nation ne cédera jamais sur ce point. Nous nous attendons à ce que le Canada commence à respecter l'esprit et l'intention du traité. Le dossier de l'eau, entre autres, nous préoccupe. L'Alberta qui applique la réglementation ou est responsable de la gestion des eaux, viole directement l'esprit et l'intention du traité no 7. Nous voulons que cette question soit réglée. On semble nous avoir toujours fait la sourde oreille, car le problème n'a pas pu être réglé correctement. Nous voulons certes avoir de l'eau potable, mais nous voulons que les choses se fassent correctement.
Très bien. Nous voulons tous avoir de l'eau potable.
Dans votre déclaration, vous avez indiqué que les normes provinciales relatives à l'eau n'étaient pas assez élevées et qu'il y avait absence de réglementation provinciale. Faisons fi des questions de compétence. Je suppose que vous accepteriez un plan de gestion de l'eau fédéral assorti d'un règlement fédéral régissant l'eau potable.
Nous sommes en train de rédiger notre loi sur la gestion de l'eau. Nous espérons que le gouvernement fédéral nous facilitera la tâche à cet égard et ne nous imposera pas ses règlements. Les règlements provinciaux sont effectivement déficients. En vertu de la Constitution, les provinces n'ont aucune compétence sur la gestion de nos terres et notre peuple. Pourquoi le gouvernement fédéral essaie-t-il toujours de faire assumer ses responsabilités par les provinces? Cela ne nous apparaît pas constitutionnel.
Merci beaucoup.
Je vais poursuivre sur le même sujet.
Vous pourriez peut-être tous les deux nous décrire comment il faudrait procéder. Tous veulent de l'eau potable, vous l'avez dit. Quelle forme auraient dû prendre les consultations avec les Premières Nations? Comment garantiriez-vous une eau potable si nous vous aidions à élaborer vos lois et si nous vous communiquions nos pratiques exemplaires?
D'après moi, cette méfiance émane du fait qu'une mesure législative est imposée alors qu'on ne dispose pas de moyens nécessaires, peu importe ce que d'aucuns prétendent. Se vanter d'investir alors que les crédits sont réduits, qu'on ne peut pas obtenir l'essentiel pour la formation ainsi que l'infrastructure nécessaires, et qu'on ne peut même pas s'attaquer aux risques modérés ou élevés que posent beaucoup de systèmes d'approvisionnement en eau... Par contre, beaucoup de personnes à qui on livre de l'eau ne reçoivent pas d'avis d'ébullition de l'eau. Nous sommes aux prises avec une crise qui, selon moi, scandalise tous les Canadiens.
Ce que nous essayons de dire et de faire valoir au ministre, c'est que la mesure législative ne réglera pas la crise à moins que le Canada n'assume ses responsabilités fiduciaires en mettant en oeuvre un plan pertinent. C'est-à-dire qu'il faut investir les montants suffisants et rédiger la réglementation après avoir consulté en bonne et due forme.
Nous avons préconisé de s'attaquer à la mise en oeuvre du traité. À cet égard, le premier ministre a indiqué l'an dernier et de nouveau en janvier qu'il tiendrait des discussions sérieuses sur la question, ce qui ne s'est pas encore produit. On nous fait toujours des promesses en l'air. Nous voulons un dialogue de nation à nation sur notre eau, nos terres et nos compétences à ce chapitre. Nous devons établir de saines relations. Lorsque le premier ministre tiendra sa promesse, nos chefs seront alors disposés à aborder ces enjeux, c'est-à-dire la gestion de l'eau, les obligations fiduciaires et les responsabilités financières.
L'Assemblée générale des Nations Unies a adopté une déclaration que le Canada et le premier ministre ont ultérieurement approuvée et qui porte sur les droits de nos peuples et l'obligation du Canada de fournir les mécanismes et les ressources financières pour nous aider. Vous pouvez constater que la plupart de nos réserves n'ont pas encore les moyens nécessaires pour faire bouger les choses, faute d'argent. Tous les ans, le ministère des Affaires indiennes accorde de moins en moins de crédits à chaque tribu. Que faire alors?
On a adopté ce projet de loi tout en déclinant toute responsabilité pour les négligences ou les autres torts. Si quelqu'un est poursuivi en justice, et s'il faut verser des indemnités, c'est nous qui devons assumer les responsabilités à cet égard.
Pourquoi le gouvernement fédéral nous sacrifie-t-il? Pourquoi nous met-il dans une situation précaire alors que nous avons des moyens très limités et qu'il n'assume pas ses responsabilités envers nos peuples? N'oubliez pas que nous avons été les premiers à occuper ce territoire. Si les traités nos 6, 7 et 8 n'avaient pas été conclus, l'Alberta n'existerait pas. Nous devons en tenir compte et respecter les obligations découlant des traités, ainsi que reconnaître les droits autochtones et inhérents. Merci.
C'est très frustrant. Les Canadiens pensent pouvoir nous imposer leurs lois, nous dire quoi faire tout en interprétant à leur façon les lois suprêmes de notre territoire. Il faudrait examiner ensemble tous ces enjeux, clarifier le traité, établir nos relations en fonction de celui-ci, trouver un modus vivendi pour assurer la sécurité ainsi que favoriser la santé de tous et vivre en harmonie avec les non-Autochtones dans nos territoires. Nous avons accepté de vivre côte à côte sans ingérence. Pourtant, le Canada s'est ingéré dans nos vies, et ce avant même la conclusion des traités. Nous avons dû composer tout d'abord avec la Loi sur les Indiens et maintenant avec toutes ces autres mesures législatives. C'est frustrant.
Monsieur le président, je vous signale que des signatures ont été apposées sur ce document. D'autres documents suivront car, lorsque nous représentons nos nations autochtones, nous les consultons et elles nous donnent leur appui. Il y aura d'autres documents.
Merci, monsieur le président.
C'est toujours intéressant d'entendre des collègues invoquer qu'il faut agir. Lorsque le gouvernement précédent a été élu en 1993, il lui a fallu jusqu'en 2003 pour se pencher sur l'évaluation d'un système d'eau potable et d'eaux usées pour en conclure que nous n'agissons pas assez rapidement... mais je m'éloigne du sujet.
Monsieur Vaughn, vous avez, entre autres, semblé insister beaucoup sur l'incorporation par renvoi de normes provinciales. Cette question semble vous préoccuper passablement, ce que je peux comprendre. Vous avez proposé certaines mesures. Si celles-ci étaient adoptées, quels en seraient les coûts et quelles en seraient les difficultés?
Je suis certain que vous êtes au courant du paragraphe 5(3) ainsi libellé: « Les règlements pris en vertu de l'article 4 peuvent incorporer par renvoi, avec ses modifications successives... » On y retrouve le verbe « pouvoir » et non « devoir ». C'est une distinction importante. On évoque que c'est une possibilité. Ce qui est aussi important, c'est le libellé du préambule:
que le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien et le ministre de la Santé se sont engagés à travailler avec les Premières Nations afin d'élaborer des propositions en vue de la prise de règlements en vertu de la présente loi,
Le projet de loi, me semble-t-il, prend en compte vos préoccupations, tant dans le préambule, où il est question de collaboration sur la prise de règlements, que dans le paragraphe, où l'on emploie le verbe « pouvoir ».
N'êtes-vous pas d'accord qu'on aura suffisamment le temps de s'attaquer aux préoccupations dans le cadre de la collaboration à laquelle on s'est engagés?
Pas nécessairement. Si le projet de loi est adopté, il en découlera, selon nous, un imbroglio insoupçonné dans les compétences respectives. Ce sera insoupçonné pour vous comme pour nous. Je n'ai pas beaucoup confiance que la situation sera à l'avantage des Premières Nations.
Les spécialistes ont parlé de financement, ajoutant qu'il était essentiel d'adopter une nouvelle loi fédérale pour établir des normes relatives à l'eau qui soient uniformes pour l'ensemble des collectivités autochtones. Il s'agit, selon moi, d'une loi habilitante qui permettra d'élaborer des propositions en vue de la prise de règlements uniformes pour toutes les collectivités, mais les Premières Nations auront été consultées préalablement.
C'est une première étape. Vous et moi serons peut-être en désaccord, mais je crois que vous avez proposé d'abord de s'attaquer aux ressources pour ensuite envisager les règlements. Je vous dirai franchement que c'est mettre la charrue avant les boeufs. Pensez-y, sans règlements, comment pouvez-vous affecter les ressources correctement? Comment faut-il s'y prendre? Il faut d'abord consulter les Premières Nations et prendre les règlements nécessaires. C'est ce que nous proposons, je pense. Une fois que ces règlements seront pris, nous aurons une idée des coûts, et des organisations comme la vôtre pourront conclure que, dans la foulée des règlements pris, nous saurons quel sera le coût et combien d'argent il faudra pour mettre le tout en oeuvre.
C'est ce qui m'apparaît une approche plus sensée.
Je pense qu'on peut faire les deux simultanément. Vous pouvez investir pour que les systèmes d'approvisionnement en eau respectent une norme acceptable, quel que soit l'ordre de gouvernement qu'il l'a établie, et consulter judicieusement les Premières Nations dans chaque région respective. Par contre, s'il s'agit d'un règlement visant toutes les collectivités, je n'y vois aucun problème. Cependant, il ne m'apparaît pas logique d'adopter un texte législatif sans savoir ce qu'il en résultera.
La mesure législative ne crée rien. Elle ne fait que préciser que nous pouvons prendre des règlements.
Nous pouvons donc consulter les Premières Nations sur la réglementation, parce que nous devons agir.
Nous ne voulons pas imiter le gouvernement précédent qui n'a rien fait. Nous voulons faire bouger les choses.
Il faut du temps pour mener des consultations. On a tenu une vaste consultation. On a déjà accordé beaucoup d'argent. Vous avez évoqué le financement. On a déjà affecté environ 3 milliards de dollars si vous tenez compte des crédits votés, du financement ciblé et des montants versés pour l'eau potable et les eaux usées dans le cadre du plan d'action. Depuis 2006-2007, c'est près de 3 milliards de dollars. On a donc certainement investi.
Je pense que nous devons envisager la prise de règlements en consultation avec les Premières Nations pour ensuite déterminer les fonds supplémentaires qui seront nécessaires.
Merci, monsieur Seeback.
Madame Crowchild et monsieur Paul, merci beaucoup de votre présence parmi nous. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir comparu.
Monsieur Paul, si vous voulez nous faire parvenir vos documents, nous nous assurerons que les membres du comité les recevront.
Chers collègues, il reste un point à examiner: la demande de budget pour notre étude. Vous avez tous un exemplaire du budget en main. Si vous n'avez pas de questions sur le sujet, nous passerons au vote.
Monsieur Del Mastro.
Merci, monsieur le président.
Je remarque qu'une partie importante du budget porte sur les témoins. A-t-on envisagé de recourir à la vidéoconférence par souci d'économie, surtout pour les témoins de l'Ouest?
Tous les efforts sont déployés en ce sens. Le comité offre cette possibilité à tous les témoins. C'est bien connu. On a établi le budget en supposant que chaque témoin viendra à Ottawa. Néanmoins, il est toujours possible... Certains ont déjà indiqué qu'ils comparaîtront par vidéoconférence.
Onze témoins viennent de Vancouver. Font-ils partie d'organisations ayant une vocation semblable? Est-il possible de trouver des moyens d'économiser? Non?
Très bien. Merci.
Merci.
Nous allons mettre aux voix le budget.
(La motion est adoptée.)
Le président: Chers collègues, je rencontrerai individuellement plusieurs d'entre vous lors des prochaines heures ou des prochains jours, pour examiner la liste des prochains témoins. Plusieurs d'entre vous devant aller siéger à d'autres comités, nous allons donc mettre fin à nos travaux.
La séance est levée.
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