AANO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 25 avril 2013
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Je déclare ouverte la 69e réunion du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord.
Pour la première heure, nous entendrons un témoin de Winnipeg, qui témoignera par vidéoconférence. Il sera avec nous pour la première heure. Des témoins du deuxième groupe d'experts sont déjà arrivés. Ils répondront à nos questions pendant la deuxième heure.
Monsieur Kinew, la parole est à vous, pour 10 minutes. Ensuite, nous vous poserons des questions.
Bien, merci.
[Le témoin s'exprime en langue ojibwe.]
Je vais attendre l'interprétation simultanée. Non, cela va, je plaisante.
Bonjour à tous. Je m'appelle Wab Kinew. Je suis le directeur de l'inclusion des Autochtones à l'Université de Winnipeg, où je m'emploie à préparer des programmes qui aideront à établir des liens entre les peuples autochtones et l'économie générale, dans le respect des valeurs autochtones.
Lorsque je me suis présenté en ojibwe, je vous ai donné des informations sur mes origines. J'ai dit que je suis membre du clan des lynx. Mon peuple est connu sous le nom d'Anishinaabe du lac des Bois. Mon père est Tobasonakwut et mon grand-père est l'unique Wabanakwut; ils m'ont enseigné les coutumes des Anishinaabe. Mon père me parlait en langue anishinaabe. Grâce à eux, j'ai appris la loi anishinaabe.
C'est exact: nous avons une loi anishinaabe; c'est une loi qui prévoit que nous devons prendre soin les uns des autres. Je pense que d'autres devraient le comprendre. Nous, les nations autochtones — dont le peuple Anishinaabe n'est qu'un exemple — avons des lois et des systèmes de gouvernance qui sont encore valides, encore en vigueur et qui ont toute leur pertinence quant à nos comportements à l'ère moderne. Mon exposé renvoie à beaucoup de ces lois, à mon clan, à ma famille, à ma qualité de membre de la spirit lodge Midewin. Toutes ces choses prévoient mes droits, mes responsabilités et le comportement que l'on attend de moi au sein de la société anishinaabe. Si plus de gens connaissaient nos lois et nos cultures, les peuples autochtones et les autres Canadiens pourraient se réconcilier.
Dans sa forme actuelle, la Loi sur les Indiens est un affront au droit, à la culture et à la gouvernance des Autochtones. La Loi sur les Indiens garantit la suprématie du droit occidental et sous-entend que le droit et la culture autochtones n'ont aucune valeur. En nous imposant un régime de gouvernance, vous nous dites que nous ne savons pas comment assurer notre propre gouvernance.
Cela peut sembler abstrait. Cependant, Chandler et Lalonde ont constaté que chez les Premières Nations de la Colombie-Britannique, la continuité culturelle constitue un rempart contre le suicide. Les recherches menées aux États-Unis indiquent que les jeunes Autochtones qui jouent un rôle actif au sein de leur culture sont moins susceptibles de consommer des drogues et de l'alcool. Si c'est ce qu'indique la recherche, pourquoi continue-t-on d'utiliser une approche qui mine ces cultures et sous-entend que les peuples autochtones n'ont aucune valeur? La voie à suivre, c'est d'aider des peuples autochtones à revitaliser leurs propres cultures et collectivités. Pour ce faire, la première étape est de mener de véritables consultations. En consultant les peuples autochtones, vous indiquez que vous accordez de l'importance à nos peuples et à notre culture et que, par conséquent, vous souhaitez établir une nouvelle relation qui n'est pas teintée du paternalisme du passé.
La Loi sur les Indiens a causé beaucoup de tort, en ce sens qu'elle a éliminé des possibilités, qu'elle a incité beaucoup de personnes à emprunter la voie la plus facile qu'est la dépendance et qu'elle a mené à l'époque fort dommageable des pensionnats indiens. Je suis contre la Loi sur les Indiens. Le véritable enjeu n'est pas de savoir s'il faut remplacer la Loi sur les Indiens ou non, mais de savoir comment le faire. Les Indiens inscrits et d'autres personnes touchées par la loi ont fait des choix de vie en fonction de situations qui découlent en partie de la mesure législative. L'endroit où nous avons décidé de nous établir, les personnes avec lesquelles nous vivons et la façon dont nous gagnons notre vie ont été déterminés, en partie, en fonction de la Loi sur les Indiens. La modifier ou l'éliminer sans nous consulter n'est pas convenable. Pour cette seule raison, les peuples des Premières Nations méritent d'être entendus par rapport à la conception de ce qui remplacera la Loi sur les Indiens, peu importe ce que ce sera. Toutefois, le résultat des modifications à la Loi sur les Indiens découlant de l'obligation de consulter aura une incidence sur les droits issus des traités et les droits des Autochtones. Il devrait donc y avoir de véritables consultations.
Je suis conscient que j'ai été invité à présenter des commentaires, tout comme d'autres représentants des peuples des Premières Nations, mais je ne crois pas que cela satisfait à l'obligation de la Couronne de consulter. Y a-t-il une transparence quant à savoir pourquoi certaines personnes — dont je fais partie — ont été invitées à témoigner? Tous ceux qui sont touchés par la Loi sur les Indiens ont-ils été invités à présenter leurs commentaires? Y a-t-il une garantie quelconque que les opinions que nous exprimons se refléteront dans l'élaboration du projet de loi? Une consultation exhaustive ne devrait pas laisser subsister ces interrogations. Par conséquent, je ne crois pas que l'obligation de consulter est satisfaite.
Le projet de loi C-428 comporte une disposition qui prévoit la production de rapports sur la collaboration entre le gouvernement fédéral, les Premières Nations et les autres parties intéressées en vue de l'élaboration d'une nouvelle loi destinée à remplacer la Loi sur les Indiens. Cependant, la disposition est trop vague pour entraîner une véritable consultation. Elle n'exige que la production d'un rapport. Ce qui me préoccupe, c'est qu'un tel rapport pourrait simplement indiquer qu'il n'y a eu aucun progrès relativement au remplacement de la Loi sur les Indiens.
Si consulter les Premières Nations est une réelle priorité, cela devrait alors avoir lieu avant la présentation d'un projet de loi et non après. Si l'on souhaite vraiment le faire, il faut aussi consacrer du temps à l'élaboration des paramètres, à l'affectation des ressources et à l'établissement d'un calendrier pour ce processus. Nous ne devons pas nous contenter de dire que nous allons présenter un rapport une fois par année. Au lieu de cela, étant donné que le projet de loi C-428 est une mesure législative conçue sans une véritable consultation auprès des peuples des Premières Nations auxquels elle est imposée, il s'agit d'une approche paternaliste qui s'inscrit dans la tradition de l'actuelle Loi sur les Indiens.
Les solutions imposées de l'extérieur aux collectivités autochtones ne fonctionnent pas. Elles n'ont pas fonctionné durant les 140 dernières années. Remplacer la paternaliste Loi sur les Indiens par une loi paternaliste qui vise à modifier la Loi sur les Indiens n'est pas un processus réel. Il faut remplacer la Loi sur les Indiens, mais il faut la remplacer par une mesure législative qui, à tout le moins, aura été conçue en consultation avec les peuples autochtones, si elle n'est pas entièrement conçue par eux.
Les dispositions proposées dans le projet de loi C-428 sont plutôt anodines. Je ne pense pas qu'on trouverait beaucoup de personnes qui seraient favorables aux pensionnats indiens au maintien des lois qui les ont rendus possibles. Cependant, y a-t-il quelqu'un qui craint vraiment que le gouvernement fédéral recommence à financer les pensionnats indiens si la Loi sur les Indiens demeure inchangée? Je ne le pense pas. Donc, éliminer ces dispositions ne demande aucun effort. Cela ne semble peut-être pas trop mal, mais dans un monde où les ressources sont limitées, choisir la solution facile nous empêche de nous attaquer au problème plus difficile que sont les relations entre les peuples autochtones et le Canada.
Sur le plan juridique, il faut établir un lien entre le droit des Anishinaabe — dont j'ai parlé plus tôt — et le droit canadien. Ce lien existe déjà; en fait, il y en a plusieurs. On les appelle des traités. Nous devrions nous concentrer sur le respect de l'esprit et de l'intention des traités. Consacrer notre temps à des modifications mineures à la Loi sur les Indiens nous détourne de ce que nous devrions vraiment faire pour améliorer les relations entre les peuples autochtones et les autres Canadiens: respecter les traités dans les régions visées par des traités et respecter les titres ancestraux dans les régions non soumises aux traités.
De plus, au pays, l'appui politique que l'on peut utiliser pour traiter des enjeux qui touchent les Autochtones est limité. Si nous l'utilisons pour ce projet de loi, je crains qu'il n'en reste pas assez pour s'attaquer aux problèmes réels qui existent dans les collectivités des Premières Nations. Lorsque je visite des réserves partout au pays, les problèmes dont j'entends parler constamment sont le suicide, l'abus de médicaments d'ordonnance et le manque de débouchés. Nous devrions nous concentrer sur la lutte contre ces problèmes. Vous vous rappellerez que Chandler, Lalonde et d'autres ont constaté que la culture et, par conséquent, les lois autochtones afférentes peuvent aider à régler certains de ces problèmes. Consacrons nos énergies à améliorer la relation entre les peuples autochtones et le Canada ainsi qu'à intervenir pour régler les crises immédiates qui touchent actuellement beaucoup de peuples des Premières Nations.
En fonction de ses commentaires, j'ai trois recommandations. D'abord, le gouvernement fédéral doit entreprendre une véritable consultation sur le remplacement de la Loi sur les Indiens avec les politiciens des Premières Nations et les peuples autochtones. Par véritable consultation, on entend un processus de consultation où les opinions exprimées par ces Premières Nations ne sont pas seulement entendues, mais reflétées dans la mesure législative à venir. Deuxièmement, cette consultation doit avoir lieu avant le dépôt d'un projet de loi visant à remplacer la Loi sur les Indiens. Troisièmement, comme marque de bonne foi, vous devez retirer le projet de loi C-428 jusqu'à ce qu'une consultation véritable de ce genre ait lieu.
Meegwetch. Merci. Thank you much.
Mahsi Cho, monsieur Kinew.
Je viens des Territoires du Nord-Ouest. C'est ma circonscription. Je représente cinq régions des Premières Nations dans les Territoires du Nord-Ouest et une région inuvialuite. De plus, les Métis sont très présents dans les Territoires du Nord-Ouest.
Je suis d'accord avec vos propos. Nous avons affaire ici à un projet de loi d'initiative parlementaire qui a été présenté. Il ne s'agit même pas d'un projet de loi émanant du gouvernement. Nous sommes dans une situation où la personne qui a présenté le projet de loi n'a pas démontré qu'il a mené des consultations auprès des Premières Nations et qui, essentiellement, comme vous l'avez indiqué, utilise une bonne partie du temps du comité qui pourrait très bien être utilisé à d'autres fins.
Pensez-vous qu'il conviendrait que nous présentions dès maintenant au Parlement une motion demandant le retrait du projet de loi?
Oui. Je ne reproche pas à M. Rob Clarke de tenter de régler les problèmes qui découlent de la Loi sur les Indiens. Je pense que l'intention est bonne. Cependant, comme je l'ai indiqué dans mon exposé, je suis d'avis que le vrai défi ne soit pas de savoir s'il faut se débarrasser de la Loi sur les Indiens ou non, mais bien de savoir en quoi consistera le processus lié à son remplacement.
Si nous nous engageons dans une voie qui ne vise qu'à imposer une mesure législative sans consulter les peuples des Premières Nations, alors je ne pense pas que c'est la voie à suivre. Si nous choisissons vraiment de consacrer le temps, l'énergie et les ressources nécessaires et si nous sommes vraiment déterminés à le faire de la bonne façon et à mettre derrière nous l'époque de la Loi sur les Indiens, alors le processus par lequel la mesure législative est conçue et ensuite mise en oeuvre est très important et il doit correspondre à une nouvelle relation, qui est incarnée par beaucoup de Canadiens d'un océan à l'autre et selon laquelle les gens veulent mettre derrière eux l'ère du paternalisme.
Ce que je constate, c'est que de plus en plus, les gens comprennent que les peuples autochtones ont leurs propres cultures, leurs propres lois et leur propre façon de faire les choses et que tous ces éléments sont dignes de respect et doivent être pris en compte lorsqu'on élabore une mesure législative.
Oui, je serais d'accord pour que l'on présente une telle motion, principalement parce que je pense que dans sa forme actuelle, le projet de loi est établi sur un fondement empreint de paternalisme et n'est pas le reflet d'une véritable consultation avec les peuples des Premières Nations.
Je reconnais aussi que mon collègue souhaite changer les choses. Je ne considère pas que c'est une mauvaise chose, mais je constate certainement qu'il faut envoyer un signal clair.
Ces deux dernières années, nous avons vu ce gouvernement présenter des mesures législatives qui n'avaient pas fait l'objet de consultations véritables. Je suis d'accord avec vous pour dire qu'il est important pour le gouvernement et pour tous les autres législateurs de comprendre que les Premières Nations doivent être le maître d'oeuvre de l'élaboration d'une nouvelle mesure législative. Cela correspond aux concepts d'autonomie gouvernementale sur lesquels nous travaillons dans les Territoires du Nord-Ouest et dans l'ensemble du pays. Je crois que ces concepts devraient être au centre de ce que nous essayons de faire ici.
Comment pouvons-nous parler d'autonomie gouvernementale sans que les Premières Nations nous fournissent les réponses dont nous avons besoin pour faire en sorte que le Parlement présente une mesure législative sensée? À l'avenir, comment pourra fonctionner l'autonomie gouvernementale si nous, les législateurs, ne démontrons pas une bonne compréhension de cet enjeu?
Je ne pense pas que cela puisse fonctionner. Je pense qu'en fin de compte, les politiciens fédéraux ont sans contredit un rôle à jouer pour apporter des changements positifs pour les peuples des Premières Nations au Canada, mais je ne crois pas qu'il consiste à dicter ce qui doit se passer dans les collectivités des Premières Nations et d'autres collectivités autochtones.
Lorsque les Premières Nations auront un modèle et un système qui seront fondés sur leur culture et qui s'appliqueront dans le contexte actuel des ententes de financement, des règlements administratifs et des choses du genre, lorsque nous aurons un tel système, je pense que le rôle des politiciens fédéraux sera alors d'appuyer ces choses et de déterminer quelle forme d'affectation des ressources serait logique et de comprendre l'idée d'une interface entre le droit canadien et le droit autochtone dont j'ai parlé.
Je pense que si nous voulons mettre en place une relation saine, le rôle contemporain des politiciens fédéraux consiste à collaborer et non à dicter la voie à suivre. Il s'agit de savoir où les choses vont bien, de savoir où l'on prend vraiment des mesures concrètes pour améliorer la collectivité et de collaborer avec ces gens. Si nous continuons d'avoir une conversation à sens unique, cela ne constitue pas un pas en avant dans la relation. Il s'agit plutôt de la continuation de la relation qui a été la norme au Canada au cours des quelque 140 dernières années.
Merci beaucoup.
Mon temps est écoulé. Je pense que vous avez exprimé le sentiment qui règne de ce côté. Je vais en rester là.
Merci, monsieur le président. Je remercie M. Wab Kinew de nous avoir présenté ses commentaires à ce sujet malgré son emploi du temps fort chargé.
Je pense que nous comprenons tous qu'il faut mettre derrière nous la paternaliste Loi sur les Indiens, mais la question est de savoir comment la remplacer, et par quoi. En présentant ce projet de loi, l'intention de M. Clarke était d'amorcer le dialogue et de prendre des mesures concrètes pour améliorer la vie des peuples des Premières Nations.
Pourriez-vous nous dire par quoi on devrait remplacer la Loi sur les Indiens, à votre avis? Ce serait une chose à laquelle pourraient souscrire des collectivités autochtones, mais quel genre de programme et de processus devrait-on avoir?
Comme je l'ai mentionné, je respecte l'intention qu'avait M. Clark lorsqu'il a rédigé ce projet de loi.
La bonne façon de mener un processus de consultations sérieux pour remplacer la Loi sur les Indiens serait de définir un délai d'exécution, les ressources nécessaires pour mener à bien les consultations et les conditions de ces consultations.
Je suis conscient du fait qu'on a tenté de prévoir des consultations dans le cadre de ce projet de loi, comme en témoigne l'exigence de présentation de rapport annuel sur les progrès de la collaboration. Cependant, dans le monde contemporain, si vous voulez que quelque chose se fasse, vous devez en mesurer les résultats. Si nous voulons que ces consultations progressent, qu'elles soient transparentes et qu'elles soient conçues de façon à ce qu'on ne se demande pas constamment si elles ont été faites avec sérieux ou si on a respecté l'obligation de consulter, alors nous devrions définir en détail la façon dont nous allons en mesurer les résultats.
À mon sens, les trois points qui comptent le plus sont ceux de fixer un délai d'exécution, de consacrer des ressources au processus de consultations et de rédiger les conditions. Au-delà de cela, pour que l'on reconnaisse qu'il s'agit de consultations sérieuses, on ne peut pas se limiter à demander aux gens de donner leur opinion, mais à ne pas la prendre en compte au moment de rédiger la loi. Au lieu de cela, la loi devrait tenir compte de ces opinions. Des consultations sérieuses sont des consultations dans le cadre desquelles les gens se font entendre, et à l'issue desquelles les opinions des personnes consultées sont prises en compte dans le projet de loi qui finit par être déposé.
Voilà les principaux aspects tels que je les vois. Je pense qu'il y a un certain nombre de raisons qui les expliquent. Premièrement, il y a l’obligation légale de consulter du gouvernement fédéral. Au-delà de cela, il convient de consulter les personnes qui seront touchées par la loi, tout simplement.
Enfin, si vous voulez parler d'opportunisme politique, si vous obtenez le consentement des gens par le truchement de consultations, alors je pense qu'il est plus probable que la loi soit bien accueillie après son adoption et qu'elle donne donc de meilleurs résultats.
Pensez-vous que ce projet de loi soit un pas dans la bonne direction pour nous aider à laisser derrière nous la présente Loi sur les Indiens?
Je ne le crois pas, non, car il continue d'imposer des lois. Comme je l'ai dit, je crois qu'il part d'une bonne intention. Je suis d'accord avec ce désir de modifier la Loi sur les Indiens. Cependant, si je me fie à l'analyse que j'en ai faite, qui a révélé, au fond, que les Premières Nations n'ont pas été consultées de manière approfondie pendant la rédaction du projet de loi, je pense que ce projet de loi n'est qu'une continuation des politiques paternalistes en place plutôt qu'un vrai pas dans la bonne direction.
M. Clarke a déposé le projet de loi avec l'idée de privilégier une approche graduelle. Que pensez-vous de déposer le projet de loi par petits segments?
Je crois qu'il est vraiment important de tenir compte de la réalité politique et d'être pragmatique lorsque l'on traite de questions comme la Loi sur les Indiens, chose que le Canadien moyen pourrait ne pas entièrement comprendre. Je respecte cette approche. Cela dit, je continue de penser que chaque étape que nous suivons pour remplacer la Loi sur les Indiens devrait témoigner d'un engagement renouvelé à l'égard d'une relation nation à nation. Notre démarche devrait témoigner d'une nouvelle vision, celle dans laquelle l'on consulte les Premières Nations.
Que nous fassions un pas de géant en remplaçant d'un seul coup la Loi sur les Indiens ou que nous instaurions ces modifications législatives graduellement, selon une approche morcelée, je crois qu'il faut consulter les Premières Nations avant de procéder.
Étant donné qu'il y a plus de 600 bandes différentes, comment nous y prendrions-nous pour consulter tout le monde? Que nous suggérez-vous de faire pour maximiser le processus de consultation?
Je crois que le gouvernement fédéral a une très grande expérience des consultations non seulement avec les peuples autochtones, mais aussi en général dans d'autres domaines comme l'environnement. Je pense que le fait de tenir des consultations régionales et d'en rapporter les conclusions à l'échelon national est une approche légitime. Je pense que nous devons aussi faire pas mal de sensibilisation. Même si bien des personnes participent vraiment au processus politique dans les communautés autochtones, on dénote aussi une certaine apathie chez une partie des personnes les plus susceptibles d'être touchées par le projet de loi.
En plus de consultations dans les régions et pas seulement à Ottawa, j'aimerais aussi voir une certaine sensibilisation, qui pourrait se faire sous forme de marketing ou de sensibilisation à l'échelle communautaire.
Merci beaucoup.
Comme mes collègues de ce côté l'ont mentionné, je pense que nous sommes tout à fait d'accord avec vous que ce projet de loi devrait être retiré et que nous devrions lancer un processus en bonne et due forme pour remplacer la Loi sur les Indiens.
Puisque le gouvernement a, pour une raison ou pour une autre, décidé d'appuyer ce que vous avez appelé une loi paternaliste pour remplacer la paternaliste Loi sur les Indiens, cela nous empêche de trouver une façon sensée d'entamer ces consultations et le vrai travail qui doit être fait.
Avec 8th Fire, vous avez accompli un travail remarquable pour sensibiliser les 96 p. 100 des Canadiens qui ne sont pas d'origine autochtone. Je vous sais gré d'avoir décrit le type de processus qu'il faudrait suivre avec les Premières Nations, mais je me demande si vous avez pensé à la façon de conseiller le gouvernement d'entamer aussi le processus pour sensibiliser ces 96 p. 100 de Canadiens concernant le besoin de se débarrasser de la Loi sur les Indiens et de le faire maintenant, s'agissant de ce qu'ils voient et ce que vous avez décrit avec Chandler et Lalonde. Comment y arriver? Comme vous le savez, la volonté politique se manifeste lorsque tous les Canadiens disent au gouvernement de traiter immédiatement une question donnée.
Comment faire pour mieux expliquer qu'il ne s'agit pas d'un problème indien, mais bien d'un problème canadien et qu'il faut que tous les Canadiens participent pour accroître la volonté politique du gouvernement de prendre ses responsabilités et de faire son travail?
Je suis d'accord avec votre conclusion qu'il est important que les non-Autochtones du Canada appuient le besoin de remplacer la Loi sur les Indiens. Cela générera le capital politique nécessaire pour entamer ce vaste processus de consultation que j'ai décrit dans quelques-unes de mes réponses et mes remarques liminaires.
Puisque j'ai travaillé dans les médias à titre de journaliste dans un quotidien pendant un certain nombre d'années, je peux vous dire que des questions comme la Loi sur les Indiens et la raison pour justifier le besoin de tenir des consultations auprès des Premières Nations sont complexes et ne peuvent s'expliquer facilement dans un segment de deux minutes ou dans un éditorial de 700 mots. C'est vraiment un exercice difficile.
Cependant, chaque année le gouvernement établit ses priorités. Je pense qu'une première étape serait de veiller à ce que le gouvernement fédéral en fasse une priorité. Les médias seraient alors contraints à mieux expliquer en quoi consistent ces questions et l'obligation de consulter.
Au-delà de cela, je pense qu'il y a vraiment lieu de repenser la façon dont nous enseignons l'histoire et les questions autochtones aux niveaux primaire, secondaire et postsecondaire. Je pense qu'à long terme, nous voulons nous pencher sur ces questions et faire en sorte que la place que les Premières Nations, les Métis et les Inuits occupent dans le tissu social canadien soit bien enseignée. C'est la solution à long terme.
Je pense que la solution immédiate, celle à laquelle le gouvernement fédéral peut faire participer sa population, est d'en faire un point de discussion. Quelles que soient vos vues concernant la Loi sur les Indiens ou les politiques susceptibles de la remplacer, je pense que l'on s'entend généralement pour dire que le statu quo ne fonctionne pas. D'un côté, il y a les gens qui croient que la loi est offensante et paternaliste, et de l'autre, ceux qui ne s'opposent peut-être pas à la façon dont on l'approche, mais qui n'acceptent pas le statu quo dans les réserves. Ils aimeraient eux aussi que la Loi sur les Indiens soit modifiée.
Je pense que cela part du point où les politiciens fédéraux disent: « Nous en avons assez du statu quo. Changeons les choses. Pour ne pas avoir à revenir là-dessus dans un an, lorsque la prochaine crise du logement autochtone ou autre fera les manchettes, faisons-le correctement. Réglons le problème cette fois-ci ».
La façon de bien faire les choses est de participer au processus de consultation avec les Premières Nations, d'honorer l'obligation de consulter et de veiller à ce que toute loi qui finit par être adoptée ait tenu compte des conclusions du processus de consultation, même avant que le projet de loi soit déposé.
C'est une idée avec laquelle je suis d'accord, et c'est une démarche à la réalisation de laquelle tous les politiciens peuvent participer.
Dans ma circonscription, nous l'appelons le mouvement « Idle “Know“ More », c'est-à-dire « Jamais plus l'ignorance », pour contribuer à éradiquer l'ignorance et faire avancer les choses.
Nous sommes aussi impressionnés de ce qu'on a fait en Nouvelle-Zélande, où l'on enseigne le Maori de la maternelle à la huitième année. Cela fait plus d'un an que la CVR a recommandé que l'on apporte des changements aux programmes d'enseignement. Manifestement, un certain nombre de provinces et de territoires ont commencé à prendre des mesures à cet égard, mais je suppose que l'on estime que cela doit se faire à tous les ordres de gouvernement à partir des conseils scolaires.
Merci pour tout ce que vous faites pour raconter l'histoire de façon à ce que tous les Canadiens puissent comprendre. Vous jouez vraiment un rôle de premier plan.
Meegwetch.
Merci, monsieur le président, et merci à vous, monsieur Kinew, pour votre témoignage.
Lorsque je regarde la Loi sur les Indiens, je vois que cela fait 137 ans qu'elle maintient le statu quo. Nous avons été témoins d'environ 16 tentatives pour la modifier, mais elles se sont toutes soldées par un échec.
Je regarde la Loi sur les Indiens et je regarde ensuite l'apartheid en Afrique du Sud qui a pris la Loi sur les Indiens et l'a utilisée comme modèle. Il n'y a pas actuellement d'apartheid en Afrique du Sud, mais ici, nous avons 137 ans de Loi sur les Indiens, qui est toujours en vigueur, et qui régit la vie quotidienne des Premières Nations.
Dans votre série, 8th Fire, les gens ont accepté de donner des entretiens et de témoigner de leur expérience. Tout le monde dit de se débarrasser de la Loi sur les Indiens. Les dirigeants de l'APN le disent. Les autres chefs de partout au Canada en font autant. Ils demandent tous que l'on se débarrasse de la Loi sur les Indiens, mais personne ne semble jamais vouloir le faire.
À titre de membre des Premières Nations régi par la Loi sur les Indiens, je ne jouis pas des mêmes droits que mes collègues non autochtones. J'ai le sentiment d'être traité comme un citoyen de deuxième ordre à qui l'on dicte sa conduite au quotidien. Ensuite, j'entends le mot « consultations ». J'aimerais que vous me donniez des précisions, Wab. Estimez-vous que l'opposition devrait tenir des consultations pancanadiennes auprès de chaque groupe des Premières Nations lorsqu'elle présente une motion qui influe sur celles-ci ou un projet de loi d'initiative parlementaire?
Oui, tout à fait.
Je ne crois pas qu'il s'agisse d'une question partisane. Je ne crois pas qu'il s'agisse d'une question entre le gouvernement au pouvoir et l'opposition. Au bout du compte, quelle que soit la loi que l'on adoptera à la Chambre des communes, elle sera mise en oeuvre par le gouvernement et celui-ci doit honorer son obligation de consulter. Si l'on déposait un projet de loi visant précisément à remplacer la Loi sur les Indiens, ou qui, plus généralement, s'appliquait aux droits découlant de traités ou aux droits autochtones, ou qui influait sur ceux-ci, je pense qu'il devrait tenir compte des conclusions tirées d'un processus de consultation avec les Premières Nations concernées. Si c'est la Loi sur les Indiens qui influera sur l'ensemble des Premières Nations, alors je crois que oui, l'on devrait tenir ces consultations.
J'ai déposé mon projet de loi d'initiative parlementaire dans des circonstances très différentes. En tant que membre des Premières Nations, j'ai une occasion unique. Si nous revenons trois ou quatre ans en arrière, il n'était pas question de la Loi sur les Indiens. Si j'ai déposé ce projet de loi, c'est pour relancer le débat au fédéral. C'est ce qui, selon moi, se passe en ce moment. Nous avons entendu tout le monde en parler en privé, mais personne n'a jamais voulu soulever la question en comité. J'estime que c'est le dernier endroit où il faut en parler, à l'occasion de réunions officielles, où tous les gouvernements — provinciaux, fédéral et autochtones — et l'opposition peuvent suivre les discussions. C'est un endroit où la question peut être discutée ouvertement et honnêtement.
Le projet de loi demande en fait que quelqu'un fasse rapport au Parlement d'un processus visant à remplacer la Loi sur les Indiens. Dans la version en vigueur, rien n'oblige le gouvernement fédéral à parler de la Loi sur les Indiens et à y apporter des modifications en partenariat avec les Premières Nations. Qu'en pensez-vous? Pensez-vous que nous devrions simplement maintenir le statu quo, sans permettre aux Premières Nations de dire: « Eh, nous avons une idée qui permettrait aux Premières Nations de progresser, une nouvelle loi qui favorisera les débouchés économiques »? Quelle est votre opinion à ce sujet?
En fait, le statu quo ne fonctionne pas pour l'Autochtone moyen. Je doute que bien des personnes à l'extérieur des communautés autochtones soient satisfaites du statu quo dans les réserves ou en ce qui touche les Indiens inscrits.
Là où je veux en venir avec mes commentaires d'aujourd'hui est que le fait de continuer à étudier des mesures législatives, qui sont proposées et, dans certains cas, adoptées sans que les Premières Nations aient été consultées, est en lui-même une façon de maintenir le statu quo.
Je respecte l'intention que vous aviez lorsque vous avez déposé un projet de loi pour tenter de modifier la Loi sur les Indiens, mais je crois que le processus complet doit se faire en consultation avec les Premières Nations et autres parties concernées. Si nous tenons ce type de consultations avant, pendant et après ces processus législatifs, alors je pense qu'il y aura vraiment de la transparence, vraiment un appui et, en conséquence, une meilleure chance que ces modifications législatives remettent en question le statu quo.
Au-delà de cela, il y a bien des Premières Nations au Canada, et pas seulement elles, mais aussi des organisations régionales comme le Grand conseil du Traité no 3 dans le nord-est ontarien, qui ont lancé, ou dans certains cas mis en oeuvre, des solutions de rechange à la Loi sur les Indiens.
J'aimerais simplement dire, à titre informatif, que oui, le gouvernement fédéral a besoin de travailler avec ces Premières Nations et organisations régionales qui prennent des mesures concrètes positives. J'espère que le gouvernement fédéral est disposé à collaborer avec ces organisations qui le font et à déterminer avec elles quelles ressources il y a lieu d'affecter à ces initiatives.
Oui, je le crois. Je pense que, depuis cinq ans, on prête plus que jamais attention aux enjeux autochtones canadiens, en commençant par les excuses que le gouvernement fédéral a présentées aux survivants des pensionnats indiens et le cheminement vers la Commission de vérité et de réconciliation, lesquels ont été suivis par la couverture médiatique plus récente de la crise du logement à Attawapiskat, et l’attention généralisée qu’a attirée le mouvement Idle No More l’hiver dernier.
Bien qu’à court terme, le processus soit peut-être un peu chaotique, les débats, acerbes, les conflits, parfois nombreux, et la partisanerie, omniprésente dans certaines circonstances, au bout du compte, j’estime que la plupart des Canadiens sont des gens biens qui souhaitent que les choses tournent pour le mieux tant pour eux que pour leurs compatriotes. À la longue, ces intérêts partagés nous amèneront à nous débarrasser de la mesure législative paternaliste qui est actuellement mise en oeuvre.
Si, aujourd’hui, je montrais à des Canadiens ordinaires mon certificat de statut d’Indien et que je leur demandais s’il leur semblait logique qu’en 2013, je porte sur moi une pièce d’identité à caractère racial, la plupart d’entre eux déclareraient que cela n’a aucun sens et que cela ne ressemble pas au Canada qu’ils connaissent.
Toutefois, il ne s’ensuit pas automatiquement que nous devions simplement abroger la Loi sur les Indiens dans son ensemble. Comme je l’ai indiqué dans mes observations, la loi existe depuis longtemps. Des gens ont fait des choix de vie — comme ceux liés à leur lieu de résidence, leurs activités et leurs moyens de subsistance — en fonction de l’existence de cette mesure législative. Par conséquent, nous ne pouvons pas nous contenter de leur couper l’herbe sous le pied. Nous devons plutôt entreprendre un processus de consultation approfondie qui tiendra compte de leurs préoccupations. Nous serons ainsi en mesure d’élaborer une nouvelle mesure législative, qui durera longtemps si elle est idéale. Nous ne voulons pas nous employer, pendant une année ou deux, à faire adopter une loi, dont nous décèlerons ensuite toutes les lacunes et qui nous forcera à retourner à la table des négociations afin d’en rédiger une autre qui remplacera la loi de remplacement.
Donc, je pense que le débat...
Monsieur Kinew, j’ai horreur d’interrompre votre réponse, mais d’autres membres du comité doivent intervenir et poser des questions.
Nous allons maintenant passer à Mme Hughes, qui dispose de cinq minutes.
Monsieur Kinew, je pense que vous avez absolument raison. Au lieu de s'attaquer au vrai problème, à savoir la relation, on règle le problème le plus facile à résoudre. Comme vous l'avez indiqué, en s'occupant de la relation, les solutions se présenteront d'elles-mêmes.
Nous avons entendu divers témoins qui ont indiqué que les membres des Premières Nations étaient les mieux placés pour aider le gouvernement actuel à façonner la mesure législative qui s’impose, le cas échéant, à veiller à rétablir la relation et à faire en sorte que les membres de chaque nation soient en mesure de se gouverner eux-mêmes.
M. Clarke a mentionné qu'il se sentait comme un citoyen de deuxième classe. De plus, je peux vous dire que, lorsque, cette semaine, j'ai parlé au chef Moonias de la série de suicides et de tentatives de suicide qui sont survenus dans sa collectivité, il a déclaré que, selon lui, ses concitoyens se sentaient davantage comme des réfugiés que comme les premiers habitants du Canada.
En outre, M. Clarke a indiqué que la Loi sur les Indiens n’était pas sur leur écran radar. Le fait est que, si des observations comme celles-là sont formulées, manifestement, les excuses présentées et la Rencontre de la Couronne et des Premières Nations n’ont peut-être servi à rien. La rencontre donnait au gouvernement l’occasion de discuter avec les Premières Nations et de les consulter, afin d’être en mesure de régler les questions soulevées par la Loi sur les Indiens et les problèmes épineux qui ont surgi au fil du temps. Les gouvernements qui se sont succédé ont essentiellement refusé de rebâtir la relation. J’en suis donc consciente.
Je tiens à vous demander si, selon vous, il est impossible ou trop coûteux pour le gouvernement de consulter les Premières Nations. Je sais que vous avez indiqué qu’à votre avis, il était possible de le faire, mais pensez-vous que cette entreprise coûterait trop cher au gouvernement? À mon sens, quand on veut, on peut. Nous parlons de quelque 600 Premières Nations, et non quelque 6 000. Pourriez-vous réfléchir à cela et me faire part de votre point de vue à cet égard?
Je ne pense pas qu’il était futile de présenter des excuses. Je crois plutôt qu’il est bon que le gouvernement fédéral ait présenté des excuses aux survivants des pensionnats indiens. J’ai constaté dans ma propre famille l’effet positif que cela a eu sur les membres des Premières Nations. Mon père et mes cousins les plus âgés ont fréquenté des pensionnats indiens. Les excuses n’étaient ni une panacée ni une solution miracle mais, pour certaines personnes, telles que mon père et mon oncle, elles ont immédiatement rehaussé leur bien-être. Voilà le premier argument que je tenais à faire valoir.
En ce qui concerne l'évaluation des suites de la Rencontre de la Couronne et des Premières Nations, le jury ne s'est pas encore prononcé. Si, dans 10 ans, nous les passons en revue et nous constatons que la rencontre n'a eu aucun effet, alors cette dernière aura peut-être été futile. Toutefois, si la période que nous traversons en ce moment se solde par certains résultats tangibles pour les membres des Premières Nations, on en conclura peut-être que cette rencontre était un pas dans la bonne direction. Nous verrons. La question n'a pas encore été tranchée.
En ce qui concerne votre question, je ne crois pas que des consultations sincères coûtent trop cher et que le devoir de consulter les Premières Nations impose un fardeau coûteux à la Couronne. En fait, l'honneur de celle-ci est en jeu.
J'ai mentionné que des consultations nécessitaient un mandat, un échéancier et des ressources parce que, si nous voulons que quelque chose se produise, ces exigences doivent être satisfaites. Si l'on veut obtenir des résultats, il faut les mesurer. Établissons des mesures qui nous permettront de déterminer si des consultations ont été tenues.
Le lancement d'un appel à l'intention des 633 Premières Nations du Canada et des autres parties touchées n’imposera pas nécessairement un énorme fardeau financier à la Couronne. Selon moi, on pourrait raisonnablement mettre en oeuvre ce projet sans épuiser les ressources déjà affectées au ministère fédéral des Affaires autochtones et du Développement du Nord. De plus, on pourrait, de manière réaliste, entreprendre un processus de consultation qui permettrait de réunir ces avis et de les intégrer dans une mesure législative qui remplacerait, de manière légitime, la Loi sur les Indiens. Non, à mon avis, cette entreprise ne serait pas trop coûteuse.
Merci, monsieur le président.
Merci beaucoup, monsieur Kinew, de votre fascinant exposé.
Que se passera-t-il si les consultations n’aboutissent pas à un consensus? Que faudra-t-il faire alors?
Voilà une question intéressante, car les Autochtones se débattent tout le temps avec elle. Je pense que nous devons envisager la question une Première Nation à la fois. La probabilité que les 633 Premières Nations du Canada parviennent à un consensus est-elle élevée? Peut-être pas. La probabilité que, disons, les collectivités Anishinaabe ou Ojibway, ou toutes les Premières Nations établies dans un territoire visé par un traité, comme le Traité no 3, tombent d'accord est-elle plus élevée? Je pense qu’elle est.
Si nous structurons le processus de consultation de sorte qu’il soit mis en oeuvre à l’échelle régionale, je pense que nous serons plus susceptibles d’entendre des avis concordants, parce que les conditions qui s’appliquent dans une région donnée ou au sein d’une nation donnée se ressemblent beaucoup plus que celles qui s’appliquent dans différentes régions du Canada. C’est la raison pour laquelle j’ai suggéré plus tôt que les consultations aient un caractère très régional.
Nous devons également tenir compte du fait que nous ne pourrons peut-être pas remplacer la Loi sur les Indiens par une solution universelle. Par conséquent, nous devons examiner la possibilité d’adopter une approche pour les collectivités qui se trouvent, disons, dans la région des Prairies et peut-être une autre qui serait appropriée pour les provinces de l’Atlantique. Peut-être qu’une autre approche conviendrait à certaines parties de la côte Ouest. La façon…
Pardonnez-moi. Je comprends ce que vous dites. Il faut que je pose une deuxième question.
Je comprends l’obligation de consulter et le fait qu’elle soit consacrée par des décisions judiciaires et par l’histoire, mais certaines personnes soutiennent — et je pense que je vais me joindre à elles — que la mesure législative proposée prévoit une obligation de consulter assez prolongée. Comme vous le savez et comme nous en convenons tous, la Loi sur les Indiens doit être remplacée, mais personne ne semble savoir exactement par quoi.
Comme vous l’avez mentionné dans votre déclaration préliminaire, l’article 2 du projet de loi exige que, chaque année, le ministre présente à notre comité un rapport portant sur le travail accompli par son ministère « en collaboration avec les organisations des Premières Nations et les autres parties intéressées ». Je vous fais observer que cette disposition constitue une obligation de consulter.
Je comprends vos observations concernant les échéanciers et les ressources, mais il est tout à fait concevable qu’au cours de la première année, l’obligation de consulter nous amène à établir un échéancier et à consacrer des ressources au remplacement de la Loi sur les Indiens, selon les résultats des consultations que vous souhaitez, avec raison, voir mener.
Je conviens avec vous que l’obligation de consulter est importante et qu’elle doit être satisfaite. Toutefois, je pense que ce qui est proposé dans la mesure législative ne remplit pas cette condition parce que, comme je l’ai indiqué dans mes observations, le libellé est trop vague, ne le croyez-vous pas? Le ministre est simplement obligé de présenter un rapport portant sur le travail accompli et ce, annuellement. Le libellé n’exige pas que des progrès aient été réalisés. Qui sait, le rapport annuel pourrait indiquer qu’aucun progrès n’a été réalisé cette année-là.
Si nous tenons vraiment à ce que des progrès soient réalisés, nous devons prévoir les critères à utiliser pour les mesurer. Qu’est-ce qui constitue des progrès? À quoi ressemblent-ils, et quelle forme prennent-ils? En outre, l’argent est roi. Si nous voulons que quelque chose se produise, nous devons le mesurer. Parlons de l’argent et de la façon de le mesurer. Parlons de l’échéancier. En établissant des objectifs clairs et mesurables dans le cas en question, il se peut que nous soyons en mesure de réaliser des progrès.
N’êtes-vous pas d’accord pour dire que vos membres et vos groupes doivent être consultés relativement à l’échéancier et aux ressources nécessaires?
Non, parce que la mesure législative a été déposée sans consultation. Des consultations doivent être menées avant que la mesure législative soit déposée, voire avant qu’elle soit proposée.
Merci, monsieur le président.
Il y a une question que je souhaite clarifier brièvement. De plus, j’aimerais mentionner rapidement que nous sommes, bien entendu, d’accord pour dire que les excuses présentées aux survivants des pensionnats indiens étaient absolument essentielles et qu’elles ont marqué un moment très important dans l’histoire du Canada. Je vous sais gré d’avoir parlé de l’incidence qu’elles ont eue sur vous et sur votre famille.
Les précisions que j’aimerais obtenir concernent ce que vous avez dit à propos des échéanciers et du mandat. Je ne veux pas faire de suppositions, mais je suppose que vous souhaiteriez que le gouvernement discute des échéanciers, du mandat et des ressources avec les Premières Nations, afin d’éviter que celui-ci — et cette remarque n’a rien de partisan, étant donné que le gouvernement en question m’importe peu — présente le plan et déclare qu’il est à prendre ou à laisser. Je présume que vous voulez…
Pour éviter toute ambiguïté, je devrais mentionner explicitement que, même si je préconise le recours à un échéancier, des ressources et un mandat, oui, le gouvernement devrait établir ces éléments en consultation avec les membres des Premières Nations.
Merci beaucoup, monsieur Kinew. Nous savons qu’il est tôt là où vous vous trouvez. Nous vous sommes reconnaissants d’avoir accepté de vous joindre à nous ce matin.
Chers collègues, nous allons maintenant suspendre nos travaux.
Un groupe d’experts arrive. Par conséquent, nous allons suspendre la séance pendant cinq minutes pour permettre à ces gens de s’installer et pour nous assurer que tous sont à leur place. Nous reprendrons nos travaux dans cinq minutes.
La séance est suspendue.
Chers collègues, nous reprenons nos travaux.
La prochaine heure de la séance différera un peu de la première. Chers collègues, vous vous souviendrez qu’au cours de la dernière séance, nous avons mené une table ronde semblable à celle qui a été prévue pour la deuxième heure de la séance.
Pour commencer, je tiens tout d’abord à souhaiter la bienvenue à nos invités. Je vous remercie infiniment de votre présence. Nous vous sommes reconnaissants d’avoir accepté de venir à Ottawa et de participer à la séance de notre comité. Lorsque nous examinons une mesure législative, nous aimons toujours que les habitants des collectivités touchées par celle-ci assistent à nos séances, afin que nous puissions les entendre directement. Nous vous en sommes certainement reconnaissants.
Nous allons commencer par nous présenter. Nous allons faire le tour de la table en commençant par la gauche.
Je m’appelle Chris Warkentin, et je suis président du comité. Je représente une circonscription qui se trouve dans le nord-ouest de l’Alberta. Je vous remercie encore une fois de votre présence.
Je cède la parole à Jean.
Jean Crowder. Je suis députée de la circonscription de Nanaimo—Cowichan, sur l’île de Vancouver, et je suis la porte-parole du NPD en matière d’affaires autochtones.
Carolyn Bennett, députée de St. Paul's, à Toronto, et je suis la porte-parole du Parti libéral en matière d’affaires autochtones.
Chef James Plewak, chef de la bande du Mont-Riding de la Première Nation Ojibway Keeseekoowenin du Manitoba, Anishinaabe Agowidiiwinan, visée par le Traité no 2.
Je m'appelle Charlene Desrochers. Je suis membre de la Première Nation de Constance Lake qui se trouve dans le Nord de l'Ontario.
Bonjour. Je m'appelle Brent Rathgeber, député d'Edmonton—St. Albert. Je vous remercie de votre présence.
Soyez les bienvenus. Je m'appelle Stella Ambler, députée de Mississauga-Sud et présidente du Comité spécial sur les femmes autochtones assassinées ou disparues.
Bonjour. Je m'appelle Rob Clarke, et ma circonscription est Desnethé—Missinippi—Churchill River, dans le nord de la Saskatchewan.
Merci.
Nous avons aussi parmi nous M. Greg Rickford, secrétaire parlementaire du ministre. Il a dû sortir pour un appel, mais il va revenir.
D'abord, chers collègues, on nous a demandé de distribuer une carte, mais elle est dans une seule langue. Les noms sont en anglais. Il me faut le consentement unanime pour faire circuler ce document.
Puisqu'il n'y a pas d'objection, nous allons le faire circuler afin que nous puissions le consulter durant la séance.
Aujourd'hui, nous tenons à remercier nos témoins de leur présence.
Vous êtes bien au courant du projet de loi d'initiative parlementaire dont nous sommes saisis aujourd'hui. Nous allons discuter soit du projet de loi en général ou d'éléments précis du projet de loi. Vous savez qu'il porte sur un certain nombre d'éléments liés à la Loi sur les Indiens. Il vise à supprimer certains articles de cette loi et à la remplacer par un processus par lequel le ministre fédéral devrait rendre compte au comité ou au Parlement chaque année.
Oui, j'invite les témoins à nous remettre les mémoires qu'ils souhaitent nous présenter en plus de leur exposé. Nous serons heureux de les inclure au témoignage.
Merci, chef Head. Nous nous assurerons de l'inclure.
En ce qui a trait à la loi, il y a divers éléments importants qui sont abordés et touchés par ce projet de loi. Il y a des sanctions économiques et commerciales qui sont éliminées sur les terres des Premières Nations relativement à l'agriculture et aux produits agricoles. Sont également éliminés des éléments archaïques de la loi qui prévoient des dispositions concernant l'éducation et les agents de fréquentation scolaire. Il y a aussi la suppression d'une portion de la loi, soit les dispositions relatives aux pensionnats. Des modifications permettraient aussi d'éliminer la capacité du ministre fédéral de revoir et d'annuler les décisions des gouvernements des Premières Nations en matière de règlements administratifs. D'autres modifications proposées retireraient au ministre la responsabilité de surveiller les testaments et successions. Il y a d'autres éléments dont certains d'entre vous voudront peut-être discuter, et nous les invitons à formuler des commentaires également.
Nous allons vous céder la parole. Nous voulons entendre directement vos points de vue sur ces questions et d'autres aspects du projet de loi qui sont importants pour vos collectivités.
Comme d'habitude, nous vous laissons décider qui va commencer. Nous avons hâte de vous entendre.
Monsieur le président, j'invite le chef Houle à expliquer la signification de la plume d'aigle que nous avons devant nous.
Bonjour à tous.
Avant que nous commencions, sachez qu'une plume d'aigle représente la vérité et le respect. C'est ce qu'elle signifiera lorsque nous parlerons aujourd'hui. J'ai beaucoup de respect pour les personnes qui viennent ici. Dans notre culture, l'une des plus grandes marques de respect, c'est l'offrande de tabac. Je dois probablement vous rappeler que nous avons parcouru beaucoup de chemin pour venir vous rencontrer. Si vous voulez nous rencontrer à nouveau dans l'avenir, si vous voulez bien comprendre quelque chose, vous devriez d'abord offrir du tabac. Il vous faut comprendre réellement notre peuple, ce que nous avons traversé et d'où nous venons.
Il faut regarder la plume même. Il est très difficile de vivre selon notre mode de vie traditionnel. On dit qu'il faut emprunter le chemin rouge ou celui de cette plume, ce qui veut dire que cette plume est dure au milieu. Vous savez à quel point il est difficile de suivre le droit chemin. Si on vacille, on va à droite et à gauche. Cela signifie peut-être boire ou prendre des mauvaises habitudes. Nous avons entendu Wab Kinew parler de la consommation d'alcool et de drogues, des dépendances. Ce sont toutes des choses qui se produisent dans nos collectivités. Nous pouvons nous en sortir grâce aux valeurs traditionnelles. On dit que si l'on tombe dans la partie tendre d'une plume, c'est comme tomber dans un oreiller. C'est comme un lit. Quand on entre dans cette zone de confort, on n'a pas de souci dans la vie. On dépend simplement de cela. En fait, on gaspille sa vie. C'est très difficile pour quelqu'un d'emprunter la voie de la plume. Ce sont des valeurs qui nous ont été enlevées par les pensionnats et la Loi sur les Indiens elle-même.
Je voulais ajouter que je suis tout à fait d'accord avec Wab. Nous sommes tous d'accord. Vous demandez toujours comment régler cela. Vous devez comprendre qui nous sommes et ce que nous avons vécu. Nous avons signé un traité. Le Traité no 2 a été signé, pour nous, avec la reine. Mardi dernier, nous avons eu une rencontre au sujet du Traité no 2 dans ma collectivité, et tous nos aînés sont venus de diverses collectivités. Nous avons discuté de ce que nous fait subir le gouvernement et du fait que le mouvement Idle No More a réveillé notre peuple. Nous devons revenir au traité, à ce que nous connaissons et voyons. Un traité a été conclu entre la reine et les chefs de notre territoire. Il y a une tierce partie qui s'en mêle et qui tente de nous imposer des politiques et des lois. Ils nous disent que nous devons prendre les choses en main.
Comme l'a dit Wab tout à l'heure, il y a un manque d'argent. Selon les diverses ententes en vertu du traité, on nous garantit une école. Dans la bande Ebb and Flow, on nous a donné une école en 1983. Elle a été construite en vue d'accueillir 250 élèves. Aujourd'hui, nous en avons 708. Tout le monde ne peut pas utiliser notre gymnase. Le chef Eastman a les mêmes problèmes. Toutes les collectivités ont ces problèmes. Le seul moyen d'avoir une école, c'est de céder sa terre et de laisser la province entrer en jeu. Il y a là une violation du traité. Il y a aussi un problème en ce qui concerne l'argent que nous recevons dans la réserve. Nous recevons 7 200 $ par étudiant pour les frais de scolarité. Hors réserve, d'autres écoles reçoivent 11 667 $. Il existe une grande indifférence. Quand on y pense, on peut dire que nous sommes voués à l'échec. Et ce n'est que sur le plan de l'éducation. On vous garantit une école aujourd'hui. Combien de types d'écoles existe-t-il? Il y a les écoles élémentaires, intermédiaires et secondaires, les universités et les collèges. Cela aurait dû être réglé.
Comme Wab l'a mentionné, il aurait dû y avoir des changements en cours de route. Il s'est écoulé environ 140 ans depuis la création de la Loi sur les Indiens. Il aurait dû y avoir des changements pour répondre à nos besoins.
J'aime bien les commentaires que fait Jean parfois. Je les lis toujours. Elle a raison au sujet de nos ressources; ils ont bâti ce pays, mais ils nous ont oubliés.
Nous recevons encore 5 $ par année pour notre traité. Prenez ces 5 $ aujourd'hui et calculez ce qu'ils valaient il y a 140 ans. Il faut indexer ce montant.
Voulez-vous faire des changements? Alors faites-les en fonction des traités, de ce que nous avons signé. Donnez-nous ces écoles. Donnez-nous le financement que nous sommes censés obtenir. Donnez-nous le respect que nous sommes censés recevoir.
Selon le traité, toutes les Premières Nations ont droit, pour chaque famille de cinq personnes, à 160 acres. Où sont-ils? Combien ne les ont jamais obtenus?
Il prévoit également qu'avant que quoi que ce soit n'arrive dans notre territoire, nous serons consultés. Nous n'étions pas tenus de vivre dans les réserves. Nous avons un territoire. C'est la carte que vous avez devant vous. Si quelqu'un voulait venir y vivre, il devait consulter les chefs. On devait leur demander une permission spéciale pour y vivre, et ils y ont renoncé pour le peuplement.
Vous parlez des produits agricoles, de l'agriculture, et de tout cela. C'est tout ce qui a été permis. Tout le reste doit faire l'objet de consultations. Tout cela a été signé en fonction des quatre directions.
Il vous faut vraiment comprendre d'abord avec qui vous traitez. Même moi, j'ai perdu mon chemin. Nous sommes humains. Nous faisons des erreurs.
Si on regarde les signatures du traité, il est écrit: « Puis, ils ont fait une marque. » On regarde la marque. Les gens la regardent. C'est un X, n'est-ce pas? Eh bien non, ce n'est pas un X; ce sont quatre directions. Les quatre directions, dans notre culture... Voilà ce que je veux dire. On doit jeûner. Les gens qui veulent parler en notre nom doivent se mettre à notre place. Dans notre culture traditionnelle, chaque année, nous jeûnons durant quatre jours et quatre nuits. Nous nous privons. C'est pour nous donner au Créateur, pour faire ce qui est bien, pour savoir ce qu'il nous faut.
C'est la signification des quatre directions. La première direction est l'arbre. La deuxième, l'animal. La troisième, la terre. Et la quatrième, l'eau.
Quand j'ai demandé ce qu'elles signifiaient, mes aînés me l'ont expliqué. Ils ont dit que la première direction était un arbre. Quand les gens ont demandé s'ils pouvaient venir vivre sur notre territoire, nous leur avons demandé ce qu'ils allaient y faire. Ils ont répondu: « Je veux faire de l'agriculture. Je veux survivre. Je veux vivre. » Nous leur avons permis de venir. Ils ne sont pas venus avec des maisons, mais avec des outils.
Ils ont ensuite dit aux chefs devoir construire une maison et leur ont demandé s'ils pouvaient couper des arbres. Les chefs ont dit: « Chaque fois que vous prendrez trois ou quatre charges, vous nous en donnerez une ou deux. » C'est le fondement du traité. C'était une entente. Ce pionnier obtenait sa maison, mais ce qui restait aux chefs, ils le distribuaient au sein de leur collectivité.
Pensez à ce qui est fait à partir des arbres aujourd'hui: vos meubles, vos maisons, le papier, tout... C'est une industrie importante. La part de l'homme d'affaires est de 40 à 50 p. 100. Les gouvernements provinciaux qui perçoivent les impôts ont de 30 à 40 p. 100. Le gouvernement fédéral perçoit 5 à 10 p. 100 en frais administratifs. Environ 2 à 5 p. 100, peut-être même 10 p. 100, reviennent à la reine, selon le traité. Mais rien ne revient à nos bureaux des traités.
La deuxième, l'animal, était à l'époque le bison. Où est-il aujourd'hui? De nos jours, il y a des vaches partout. Nous n'avons pas droit à une part. Ni pour le poisson, d'ailleurs. Pourtant, on pêche dans nos affluents. Pensez-y. C'est un énorme marché. Les membres des Premières Nations sont à la base d'un marché important.
Je suis d'accord avec Jean au sujet de toutes ses observations. Les permis, les licences, tout; beaucoup d'argent est versé à nos dépens.
Cette troisième ressource, cette troisième direction, c'est la plus importante. C'est sous les terres que nous avons cédées. C'est une question de pétrole, aujourd'hui: on a extrait pour 218 millions de dollars de pétrole l'an dernier sur le territoire du Traité no 2. C'est le pétrole de notre peuple. C'est aussi notre avenir. Si nous disposions de cette ressource, si cet argent nous était versé, nous ne serions pas ici aujourd'hui.
Nous voudrions un accord de fait. Nous aurions nos écoles, et nos routes seraient réparées.
Nous sommes venus ici il y a quelques années quand nous avons été inondés, et tout le monde a fait la sourde oreille. On n'en a jamais discuté dans les médias. C'était contrôlé. Nous le savons.
Le pétrole n'est qu'un exemple. Il y a beaucoup d'autres minéraux: l'or, l'argent, le nickel, le cuivre, la potasse. Nous avons de la potasse en abondance. Selon nous, c'est ce que ces projets de loi visent. On veut davantage de nos ressources; on veut nous les enlever.
Notre quatrième direction est l'eau, et les aînés disent: « Si on ne peut pas aller dans les lacs, les rivières et les ruisseaux, y puiser librement de l'eau et la boire, alors les quatre parties du traité ont été violées. » C'est là où nous en sommes. Pensez à tous les projets hydroélectriques. On contrôle les eaux. On tire profit de cette ressource. Pendant ce temps, les gens de nos collectivités sont inondés parce que les terres sont saturées. Cette eau n'a nulle part où aller, alors elle entre dans nos maisons et crée des moisissures noires, dans la collectivité du chef Eastman et dans la mienne. Avec le temps, les gens tombent malades parce que nous ne recevons pas d'argent pour l'élimination des moisissures ou pour les problèmes réels. Des spores de moisissures se développent dans leurs poumons. Cela ne se guérit pas; quand vos poumons sont atteints, c'est irréversible. Nos enfants développent des maladies respiratoires. La moisissure rend facilement les gens malades. Voilà les vrais problèmes.
S'il y avait une entente sur la mise en oeuvre des traités, nous serions autonomes. Combien de gens viennent faire des affaires sur notre territoire? Il est prévu dans certaines lois dont nous avons discuté dans le Traité no 2 de créer une loi relative aux ressources. Nous voulons prendre en main la gestion de nos propres ressources. Nous le ferons volontiers avec le gouvernement en place.
Vous examinez tout cela. Le traité a été violé. Nous l'avons dit dans de nombreuses réunions. La reine vit à l'étranger, mais nous vivons ici ensemble. Concluons un nouveau traité. Si vous voulez vraiment passer à l'action, concluons un nouveau traité.
Le projet de loi qui circule et dont nous parlons, comme l'a dit Wab — il ne l'a pas dit tel quel —, c'est comme mettre la charrue devant les boeufs. C'est exactement cela. Vous devriez nous consulter avant même de penser à présenter un projet de loi. C'est une vraie relation de travail, c'est ce que vous avez.
En ce qui concerne les éléments du traité, comment sommes-nous arrivés là où nous en sommes aujourd'hui? Cela découle de la Loi sur les Indiens.
Nous avons nos propres histoires dans nos collectivités, celles des pionniers qui viennent, marchent dans les ruisseaux et tombent sur quelque chose de brillant. C'est de l'or. Le pionnier va montrer cela au chef et lui dit qu'ils devraient creuser. Le chef répond: « Non, n'y touchez pas. Prenez ce que vous voyez. Donnez-nous la moitié. » Voilà comment fonctionne le traité.
Mais ce qui arrive, c'est que le pionnier va parler à d'autres pionniers. Ils mettent en place des gouvernements coloniaux, puis cette Loi sur les Indiens, et ils élaborent le code électoral. Que font-ils? Ils font en sorte que le chef du traité se présente contre quelqu'un d'autre. Ils font en sorte qu'il défende son poste dans la collectivité. Le chef du traité vient peut-être d'une famille de 10 personnes, mais il se présente maintenant contre quelqu'un qui vient d'une famille de 50 personnes. Qui va gagner? C'est un concours de popularité. Le chef du traité est donc battu. Le nouveau chef entre en fonction, et le pionnier revient lui dire: « Il y a des choses ici, nous allons faire certains travaux, mais puisque vous êtes censé vivre dans la réserve, nous ne vous embêterons pas dans la réserve avec ce que nous allons faire. Cela vous convient? » Et le chef, parce qu'il n'est pas au courant de la situation, qu'il est nouveau et qu'il est trop fier pour aller demander au chef du traité ce qu'il doit faire...
C'est ainsi que nous avons commencé à perdre le cap. Nous n'avons même pas accès à nos propres territoires. Il y a des clôtures et des affiches d'interdiction de chasse. Ils nous disent que l'accès est interdit. Ce sont nos terres. On nous refuse l'accès à nos propres terres. Nous ne pouvons même pas pratiquer notre propre culture et nos propres traditions patrimoniales.
Voilà les vraies solutions. Si vous voulez honnêtement faire quelque chose, alors travaillez avec nous dès le début. N'essayez pas de présenter cette loi et de dire ensuite que vous nous avez consultés, car vous faites les choses à l'envers.
C'est ce que je voulais dire.
Nous allons donner la parole à un autre témoin, si quelqu'un veut parler du projet de loi que nous avons devant nous de façon précise ou de façon plus générale.
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de me donner l'occasion de vous fournir de l'information qui nous permettra de renforcer nos relations.
Je suis le chef James Plewak. Je suis le fils de Marjorie Burns, fille de Walter Burns, qui était le fils de Solomon Burns, dont le père était Moses Burns, aussi connu sous le nom de chef Keeseekoowenin, demi-frère du chef Mekis, qui a conclu le Traité no 2 avec la Couronne impériale, le 21 août 1871, au nom des bandes de Riding Mountain et de Dauphin Lake et du reste du territoire.
Vous pouvez voir le territoire sur la carte que vous avez devant vous.
Je suis accompagné aujourd'hui du chef Nelson Houle, d'Ebb and Flow, et du chef Eugene Eastman, d'O-Chi-Chak-Ko-Sipi, dont les Premières Nations relèvent du Traité no 2.
Dans les années 1800, notre peuple a travaillé avec la Compagnie de la Baie d'Hudson afin d'établir des activités commerciales dans ce qui est aujourd'hui le Manitoba. La région, qui constituait notre territoire traditionnel, sur lequel nous exercions notre souveraineté, s'étendait de la rive Est du lac Winnipeg, à l'est, jusqu'à Moose Mountain, qui se trouve aujourd'hui dans le sud-est de la Saskatchewan, à l'ouest, comme vous le voyez sur la carte.
Elle s'étendait également de la pointe nord du lac Waterhen à la frontière des États-Unis, sauf pour la région désignée dans le Traité no 1... La province timbre-poste, le Manitoba, s'étendait jusqu'à ce qui est aujourd'hui Brandon, dans le sud du Manitoba, comme vous pouvez le voir sur la carte.
En 1871, quand des représentants de la Couronne impériale nous ont demandé si nous voulions ouvrir des parties de notre territoire à l'immigration et au peuplement, il n'y avait pas de pionniers sur notre territoire. Nous étions les seuls occupants, comme l'a indiqué le chef Houle. En demandant le traité, la Couronne a reconnu notre souveraineté. Nous avons utilisé notre souveraineté et avons consenti au Traité no 2. Le mot « consentement » est inscrit au début du traité.
Nous aurions pu faire ce qu'ont fait les Ojibway de Rainy River. Ils ont dit aux commissaires qu'ils réfléchiraient au traité durant un hiver ou deux. Mais nous y avons consenti, et comme l'a dit le juge Binnie dans l'arrêt Première nation crie Mikisew c. Canada, le traité n'était pas la fin, mais le commencement.
Comme l'a indiqué le juge en chef McLachlin dans l'arrêt Nation haïda, l'obligation de consulter et d'accommoder vise à concilier notre souveraineté préexistante et la souveraineté proclamée de la Couronne. C'est un processus continu qui est nécessaire quand nous parlons de consultations.
Il y a autre chose que vous devriez savoir. Nous n'avons pas seulement ouvert des parties de notre territoire au peuplement, mais nous avons aussi invité les enfants des pionniers à fréquenter nos écoles, car ils n'en avaient pas. Nous avons invité les pionniers à faire partie de notre église, car nous en avions une pour nos membres qui voulaient pratiquer le christianisme.
Nous avons aidé les pionniers à s'établir, à construire leurs maisons, à survivre en hiver. Nous nous sommes entendus avec eux pour échanger notre bétail et nos chevaux, qui étaient les meilleurs du territoire. En vertu de l'Acte de la Terre de Rupert, la Couronne a été avisée que le nouveau Canada n'avait pas compétence dans notre territoire jusqu'à ce qu'un traité ait été conclu, un traité juste et équitable en matière d'indemnisation.
On nous a assurés, lors des négociations sur le traité, que les terres non utilisées pour l'immigration et le peuplement continueraient de nous appartenir, d'être régies par nos gouvernements souverains, qui comprenaient toutes les collectivités Ojibway de notre territoire. On nous a assurés que nous serions indemnisés pour la perte d'usage de ces terres colonisées. En 1871, on devait nous payer un dollar l'acre, le prix courant à l'époque; pas un dollar chaque année, mais un montant unique d'un dollar l'acre, tant que le soleil brillerait et que la rivière coulerait. Or, vous n'avez jamais versé un sou, pas un seul sou.
Cette situation explique à elle seule la pauvreté dans laquelle nous vivons depuis des générations. Pour vous donner une petite idée, dans ma région, les terres agricoles se vendent actuellement environ 500 $ l'acre. En 1871, la valeur de ces terres était de 1 $ l'acre. Vous voyez à quel point leur valeur s'est accrue.
Je ne veux pas vous interrompre, mais j'aimerais savoir quelle est la durée de votre exposé. Il semble que vous ayez une déclaration écrite. Je tiens seulement à m'assurer que nous pourrons entendre tous les témoins, car notre temps est limité.
Vous vous demandez peut-être ce que toute cette histoire a à voir avec notre présence ici pour discuter du projet de loi C-428. Le fait est que si vous ne comprenez pas cette histoire, confirmée par vos documents, vous ne comprendrez pas pourquoi nous nous opposons farouchement à votre projet de loi.
Le Traité no 2 n'affaiblit aucunement notre souveraineté. Au contraire, il a donné et donne encore à votre Couronne le droit d'exercer sa souveraineté sur ses pionniers et les terres que nous avons partagées avec eux. Tous les autres documents ne sont que de la poudre aux yeux et des incantations de doctrines de la découverte et de notre infériorité, qui vous ont obligés, même au XXIe siècle, à modifier un « acte » sur la civilisation graduelle des Indiens.
Votre projet de loi constitue une atteinte à notre souveraineté, une violation de notre traité, un non-respect du principe de l'honneur de la Couronne. Nous voulons rétablir l'esprit et l'intention juridiques réels de ce traité. Nous voulons entretenir avec vous et votre peuple une relation mutuellement fructueuse, amicale et chaleureuse.
Nous continuons à vous tendre la main de l'amitié; pourtant, pendant que vous êtes ici à discuter de la suppression des absurdités désuètes de la Loi sur les Indiens, la violation continue du traité nous détruit. Comme l'a souligné Wab Kinew tout à l'heure, elle est à l'origine de beaucoup de souffrances et de traumatismes.
Je vais vous donner un exemple. Parmi nos Premières Nations qui relèvent du Traité no 2, il y en a une qui a été totalement dépossédée, celle de Lake St. Martin. Plus de 1 000 personnes ont été évacuées parce que le gouvernement du Manitoba a délibérément inondé les terres afin d'empêcher que les gens de Winnipeg soient inondés.
La collectivité du chef Eastman a été délibérément inondée. Il y a eu de lourds dégâts dans la réserve Ebb and Flow du chef Houle à cause d'une inondation intentionnelle.
Qu'a fait le gouvernement fédéral? Nous sommes toujours aux prises avec ce problème deux ans plus tard. Vous demandez: « Cela ne relève-t-il pas des provinces? » Cette action entraîne une violation du droit de propriété dans nos réserves, et le gouvernement fédéral a l'obligation d'intervenir. En fait, selon la Loi sur les Indiens, que vous voulez modifier, il a le pouvoir exclusif de porter des accusations à cet égard.
Au cas où vous ne le sauriez pas, cette inondation s'est produite en mai 2011 et a détruit près de 200 maisons, rendant la collectivité inhabitable. Des centaines et centaines de personnes vivent toujours, deux ans plus tard, dans des hôtels de Winnipeg, temporairement, et non rien de concret à l'horizon; mais on leur fait des promesses et on leur demande de patienter. Ce n'est qu'une collectivité parmi plus de six qui ont subi ce genre d'inondation.
De plus, nous sommes meurtris et traumatisés, car les écoles que nous avons insisté pour obtenir dans le cadre du Traité no 2 ont été paupérisées dans un système d'éducation inférieur. Seulement 38 p. 100 de nos élèves du secondaire obtiennent leur diplôme. Faites la comparaison avec le reste du Canada. C'est quelque chose dont nous devons être conscients.
Chef, je suis désolé, mais nous devons tenir compte du fait que d'autres personnes sont venues témoigner. Il nous reste environ la moitié du temps prévu, et nous n'avons pas encore entendu les autres témoins.
Je me demande s'il vous serait possible de conclure dès maintenant et de céder la parole à l'un des témoins qui aimeraient aussi être entendus.
Oui, d'accord.
En conclusion, nous croyons que si votre comité se penche sur certaines parties du traité, il se consacrera à rétablir la relation initiale, de sorte que de nombreux problèmes disparaîtront, et nous pourrons nous servir de nos souverainetés respectives pour préparer un avenir resplendissant pour nos enfants.
Nous vous demandons de ne pas laisser passer cette occasion en adoptant ce projet de loi. Nous vous demandons d'écarter le projet de loi et de nous laisser nous mettre sérieusement à la tâche.
Ce que vous ferez de ce projet de loi témoignera de votre intention de continuer, en tant que maîtres coloniaux, à mettre de l'ordre dans la loi, ou de commencer à nous rencontrer à la table de discussion sur les traités afin de rétablir le lien brisé.
Merci.
[Le témoin s'exprime dans sa langue maternelle.]
Je suis venu aujourd'hui pour exprimer mes inquiétudes au sujet des modifications proposées dans le projet de loi relativement à la Loi sur les Indiens.
Je me demande comment fonctionne tout ce processus. Nous affirmons depuis de nombreuses années qu'il nous faut des changements, qu'il faut que des progrès soient initiés par les dirigeants. Une personne rédige un projet de loi, le présente au Parlement et veut changer nos vies, alors qu'elle n'a jamais vécu dans une réserve.
Je considère cela comme une insulte. J'en suis vraiment offensé, alors que mon peuple souffre à cause de l'inondation que nous subissons aujourd'hui et de la hausse du nombre de cancers dans ma collectivité. Nous devons boire des eaux de ruissellement, des eaux grises. Nous avons des champs d'épandage. Nous subissons des inondations intérieures cette année. L'eau doit être pompée au-dessus des digues permanentes qui nous entourent. Notre collectivité est endiguée. C'est vraiment troublant que nous soyons ici aujourd'hui pour tenter de nous pencher sur de petits éléments de la Loi sur les Indiens.
J'ai des droits issus de traités. Concentrons-nous sur ces droits.
Je me demande que ce nous devons faire. Dois-je emmener les gens de ma collectivité ici, ceux qui sont atteints de diabète ou de cancer? Je l'ignore, mais je pense que votre gouvernement et vos dirigeants doivent venir voir de leurs propres yeux, et non pas survoler nos collectivités, comme l'a fait le ministre il y a environ une semaine, sans que je sache qu'il venait sur notre territoire. C'est agir à notre insu. Il devrait venir constater lui-même la situation.
Nous sommes ici à nous demander comment nous allons changer tel ou tel mot de la Loi sur les Indiens.
C'est très contrariant d'avoir à venir ici pour m'expliquer. Si je dois le faire, j'emmènerai les gens de ma collectivité ici. Nous sommes critiqués dans les médias pour ce que nous faisons, pour notre responsabilité et notre transparence. Qui s'en inquiète? Est-ce vos contribuables? On dit que nous sommes financés par les contribuables. C'est faux. En vertu du traité, nous devrions être les personnes les plus riches dans ce pays, grâce aux ressources extraites chaque jour.
Sur notre territoire, nous avons de la potasse. Nous avons des forêts. Dans la partie nord de la région de Duck Mountain, soit les terres du Traité no 4, il ne reste rien. Nous chassons sur ces terres. Nous pêchons. Nous vivions de la terre. Il n'y a plus rien.
Il est très contrariant d'être assis ici et de parler de ces choses. Parlons des véritables enjeux. Retournons à la table des traités. C'est ce que nous proposons en tant que représentants des Premières Nations du Traité no 2.
Je vous salue au nom de mon peuple.
Je suis du même avis pour ce qui est d'un dialogue constructif au sujet des consultations. Nous avons une définition claire de ce mot, selon notre perception, mais c'est une définition d'ensemble tant pour les gouvernements fédéral que provinciaux. Notre définition précise clairement que pour que de véritables consultations aient lieu, la majorité des membres de la bande doivent être présents à une réunion dûment convoquée.
Même si je suis ici, cela ne veut pas dire qu'il s'agit d'une véritable consultation. Je sais qu'à maintes reprises, les gouvernements ont déclaré que puisque je suis le représentant de ma collectivité des Premières Nations, il s'agissait d'une consultation. Mais ce n'est pas le cas. Vous devez venir dans notre collectivité pour consulter nos membres au sujet de la mesure législative qui est proposée.
Avec d'autres chefs, j'ai participé au rassemblement entre la Couronne et les Premières Nations. Au sujet de la Loi sur les Indiens, le premier ministre nous a dit, devant tous les chefs et tous ses députés, qu'il n'avait aucunement l'intention d'abroger, de modifier ou même de déraciner — je crois que c'est ce qu'il a mentionné; c'est comme déraciner un arbre —, il n'a fait mention d'aucune modification à la Loi sur les Indiens. C'est ce qu'il a dit.
Même avant le rassemblement entre la Couronne et les Premières Nations, nous avons rencontré M. Clarke, le député de notre circonscription, qui nous a aussi montré le projet de loi d'initiative parlementaire, et nous lui avons dit. Si je me rappelle bien, Rob, nous vous avons simplement demandé d'attendre, de mettre votre projet de loi en attente. Mais vous êtes allé de l'avant et avez entrepris le processus.
La Loi sur les Indiens — je suis d'accord avec la personne qui a pris la parole avant moi — n'a fait qu'oppresser et déprimer notre peuple. Ce n'est pas ce dont notre peuple avait convenu à la signature du traité. Pour ce qui est du projet de loi d'initiative parlementaire, je sais que M. Clarke a assisté à l'assemblée de la Federation of Saskatchewan Indian Nations dans notre collectivité voisine, dans la localité de Nipawin, et qu'il a présenté un exposé là-bas, mais il n'a pas... Voyez-vous, je pense que c'est ce qui irrite les dirigeants de partout au Canada: différentes personnes viennent assister à nos assemblées et présenter leurs points de vue au sujet de la Loi sur les Indiens, mais aucun n'est prêt à répondre aux questions.
Vous vous souviendrez, Rob, que vous n'étiez pas préparé à répondre aux questions, mais que vous vous êtes rendu à l'avant et que vous avez répondu à une question des chefs...
Monsieur Head, il serait sans doute préférable que vous formuliez vos observations par l'entremise de la présidence.
Très bien, mais c'est exactement ce qu'il a fait. C'est moi le chef qui aie pris la parole devant l'assemblée pour dire à M. Clarke: « Vous ne voulez répondre à aucune question concernant votre projet de loi d'initiative parlementaire. Pourquoi devrions-nous répondre aux questions que vous nous posez? »
Je conviens qu'un dialogue véritable s'impose avant que des changements soient apportés à la loi.
Il y a aussi eu la rencontre du 11 janvier avec le premier ministre. J'étais parmi les chefs présents, et nous avons convenu de la nécessité d'un dialogue significatif. Nous discutions alors avec le premier ministre du projet de loi omnibus qui affectait la capacité... et cela concernait également la Loi sur les Indiens. Nous souhaitions discuter stratégie avec le gouvernement au pouvoir. Tout le monde a alors bien compris que le premier ministre avait accepté d'entreprendre un dialogue constructif avec les dirigeants des Premières Nations dans tout le Canada.
Nous sommes maintenant en mode attente. C'est une guerre d'usure. Je suis prêt à agir. J'ai soumis à votre comité un document exposant les conditions à remplir avant que la loi puisse être modifiée.
C'est dans ce contexte que les plus hautes instances doivent donner suite à leur engagement d'amorcer un dialogue véritable avec les chefs des Premières Nations visées par les traités, comme je l'indiquais.
J'en parlais justement avec mon analyste stratégique. Je crois que la première rencontre devrait servir en quelque sorte d'introduction. Lorsqu'il est question de mise en oeuvre des traités, nous ne voulons pas accélérer les choses en modifiant cette loi à moins que l'exercice ne soit bénéfique pour notre communauté.
Pour l'heure, nous estimons primordial de tenir ce dialogue avec le gouvernement. Comme vous le savez, je suis tout à fait disposé à m'asseoir avec le premier ministre et ses principaux ministres pour avoir une discussion constructive et présenter notre point de vue.
Le document que vous avez sous les yeux est celui que nous avons soumis au premier ministre sans toutefois obtenir de réponse. Voilà qui illustre bien la nécessité d'établir un dialogue pertinent quant à la mise en oeuvre des traités.
Je vous remercie.
Merci. Nous allons faire traduire votre document et le distribuer.
C'est à vous, monsieur Tailfeathers.
Je salue les représentants des autres Premières Nations qui partagent cette table aujourd'hui.
Je suis membre de la tribu des Blood et je représente le chef Weaselhead.
Mesdames et messieurs les membres du comité, je crois que vous connaissez très bien notre position sur le sujet à l'étude, le projet de loi C-428, et je vous encourage à jeter un coup d'oeil à notre mémoire.
Notre position est très claire. La tribu des Blood estime que le projet de loi C-428 pourrait avoir des effets préjudiciables sur nos droits. Le Canada était tenu de nous consulter avant de présenter un projet de loi semblable. Nous reconnaissons que la Loi sur les Indiens est tout à fait désuète. Cependant, nous nous préoccupons surtout du fait qu'il n'y a eu aucune consultation véritable avec les Premières Nations, y compris avec la tribu des Blood.
J'en reviens à ce que disait le chef au sujet du premier ministre. Celui-ci a récemment fait la déclaration publique suivante:
Il est certain que notre gouvernement n'a pas le grand projet d'abroger ou de réécrire unilatéralement la Loi sur les Indiens: après 136 ans, l'arbre a des racines profondes et en arrachant la souche, on n'obtiendrait qu'un trou béant. Toutefois, il y a des moyens, des moyens faisant appel à la créativité, à la collaboration, à la consultation entre notre gouvernement, les provinces et les dirigeants des Premières Nations, ainsi que les communautés, qui offrent des options, dans le cadre de la Loi, ou à l'extérieur, pour opérer des changements concrets, graduels, et véritables. Voilà notre approche, remplacer certains éléments de la Loi sur les Indiens par des dispositions et des procédures plus modernes, en partenariat avec les... Premières Nations.
Comment donc le gouvernement fédéral, sauf tout le respect que je dois à M. Clarke qui en fait partie, peut-il justifier une telle hypocrisie?
On ne cesse d'imposer des projets de loi à nos gens sans qu'ils aient voix au chapitre. C'est la raison pour laquelle nous sommes ici aujourd'hui.
C'est tout ce que j'avais à dire. Je vous remercie.
Merci beaucoup, monsieur le président. Je serai bref; cinq minutes à peine.
J'ai quelques observations à faire au sujet du projet de loi présenté par le député. Il devrait savoir, et tous les députés également, que les modifications proposées ne bénéficieront d'aucune manière aux membres des Premières Nations. Elles profiteront plutôt aux bureaucrates en consolidant leur autorité paternaliste. Elles vont également dans le sens de l'objectif de suppression du statut particulier et d'assimilation énoncé par John A. Macdonald, le premier des premiers ministres canadiens.
Je vais faire abstraction des modifications prévues dans ce projet de loi. Je serais toutefois favorable dans une certaine mesure au remplacement de la loi actuelle. Mais avant que cela puisse se produire, je pense qu'il faudrait que les premiers ministres et les Canadiens comprennent bien qui nous sommes, comme on l'a déjà mentionné. Pour ce faire, ils doivent se mettre au fait de la situation avant la signature d'un traité, au moment où il est signé et par la suite.
Avant la signature des traités, nous étions des nations souveraines avec nos propres programmes politiques, fiscaux, judiciaires et sociaux. Cela correspond exactement à la façon dont on définit une nation à l'échelle internationale: nous avons notre propre forme de gouvernement, notre population, notre territoire, notre culture et, le plus important, notre langue. On voudrait que nous modernisions ces programmes en les faisant passer à un niveau supérieur dans le cadre de ce qu'on appelle aujourd'hui l'autonomie gouvernementale. Mais l'autonomie gouvernementale ne va pas tout régler à elle seule. Elle n'est valable qu'à court terme lorsqu'elle est assujettie aux politiques fédérales. En fin de compte, il s'agira simplement de pouvoirs délégués, ce qui correspondra plus ou moins au statu quo. Il ne peut y avoir de véritable autonomie gouvernementale que si on nous permet, au moyen de mesures législatives convenues par les Premières Nations et le Canada, d'avoir accès aux ressources qui avoisinent nos réserves et abondent sur nos territoires.
Nous avons besoin d'une assiette fiscale afin de nous assurer l'autonomie nécessaire pour gouverner nos gens. L'autonomie gouvernementale est fonction des revenus que nous sommes en mesure de générer, et il en va de même de l'autorité judiciaire qui dépend elle aussi des ressources pouvant être exploitées sur nos terres ancestrales. La question de l'autodétermination est abordée dans les traités. La mise en oeuvre des traités découle, d'une part, d'une résurgence de l'esprit de nation autochtone et, d'autre part, de l'application des obligations fiduciaires. Je crois que le chef Head a déjà soulevé la question lors de rencontres avec les hautes instances du Parlement, ainsi qu'avec le premier ministre et le gouverneur général du Canada. Je ne sais toutefois pas si l'information s'est rendue comme il se doit jusqu'aux députés.
J'en reviens au concept de remplacement. Comme je le disais, je ne suis pas favorable à des modifications, mais si l'on souhaite apporter des changements en profondeur, je dirais qu'il faut s'en prendre à la Loi sur les Indiens dans son intégralité. Il s'agit de se demander d'où proviennent les pouvoirs et qui les exerce. Supprimons la Loi sur les Indiens et profitons-en pour démanteler le ministère et nous débarrasser du ministre des Affaires indiennes pour remplacer le tout par une instance semblable au Conseil privé.
Mesdames et messieurs, notons en terminant ce pouvoir constitutionnel établi à l'article 91.24. La plupart des gens y voient une application des obligations fiduciaires. À Shoal Lake et Red Earth, nous y percevons une reconnaissance de la Proclamation royale de 1763 qui stipule que des portions de territoire seront réservées pour les Indiens, les tribus ou les Premières Nations. C'est ce que confirme l'article 25 de la Constitution, avec l'article 35 en guise de protection. Il faut aller un peu plus loin que ces garanties quant à nos pouvoirs constitutionnels. Nous devons mettre en oeuvre un traité assorti d'un mécanisme d'application de telle sorte que les députés ne puissent pas s'immiscer dans nos affaires. Ils devraient se contenter de travailler pour les Euro-Canadiens, comme nous les appelons. Nous n'avons rien à dire du travail des députés auprès des Euro-Canadiens, mais nous avons besoin d'un système distinct adapté à nos enjeux particuliers.
Mesdames et messieurs, je vous remercie pour le temps que vous m'avez consacré. Je ne crois pas avoir dépassé les cinq minutes prévues.
Merci beaucoup pour vos commentaires.
Madame Desrochers, comme vous êtes la dernière à prendre la parole, vous avez le droit à tout le temps qu'il nous reste.
Oui, et j'en ai beaucoup à dire. Par quoi voulais-je commencer? Je n'ai rien préparé.
Je tiens d'abord à remercier les chefs de me donner l'occasion de m'asseoir à leurs côtés.
Je vais vous parler un peu de mes antécédents pour que vous sachiez à qui vous avez affaire. Je suis une Crie originaire du Nord de l'Ontario. Vous connaissez peut-être Longlac, Hearst ou la région de Thunder Bay. C'est la zone visée par le Traité no 9.
Je suis membre de la Première Nation de Constance Lake. Je suis infirmière autorisée et avocate. J'ai obtenu une maîtrise en droit et politiques des peuples autochtones sous la supervision de Jim Anaya, le rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.
Comme infirmière, j'ai toujours travaillé auprès des Premières Nations, notamment quelque 14 Premières Nations du Nord de l'Ontario, dans les régions visées par les Traités no 3 et no 9, tant dans des communautés accessibles par voie aérienne qu'en milieu urbain... J'ai en effet travaillé au Centre de santé Anishnawbe au centre-ville de Toronto. J'ai donc consacré la quasi-totalité de ma carrière d'infirmière aux gens des Premières Nations, tant dans les réserves qu'à l'extérieur. C'est la même chose pour ma carrière d'avocate. J'ai travaillé avec des chefs et des conseils de bande, de même qu'avec différents membres des Premières Nations. J'ai également été à l'emploi de Santé Canada au sein de la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits. J'ai travaillé pour l'Assemblée des Premières Nations et le Congrès des peuples autochtones. J'ai aussi eu l'occasion de faire des choses pour l'Association des femmes autochtones du Canada.
Je connais pour ainsi dire tout le système et la réaction des différents intervenants me déçoit énormément. Vous avez maintenant une meilleure idée de mes antécédents.
Je pense vraiment que la Loi sur les Indiens doit être réformée. Cette loi est tout ce qu'il y a de plus raciste. Elle est la cause de tous les problèmes qui frappent nos communautés et en partie de celui des pensionnats... Pendant mes études à la faculté de droit, j'ai travaillé dans ces communautés. J'ai pu constater de mes propres yeux les effets de la Loi sur les Indiens et les répercussions des pensionnats. J'ai été très choquée de voir comment les choses se passaient à l'Assemblée des Premières Nations. J'ai eu la même réaction lorsque j'ai pu voir comment fonctionnait le Congrès des peuples autochtones. J'ai fait le même constat avec l'Association des femmes autochtones du Canada.
Un changement s'impose et il faut agir sans tarder.
Je déplore moi aussi l'absence de consultation. Le projet de loi empiète sur les droits des Autochtones et les droits issus des traités. Il entrave notre droit à l'autonomie gouvernementale. Il enfreint notre droit à l'éducation en vertu des traités.
Du point de vue personnel, il contrevient à nos droits d'administrer nos propres affaires et nos successions. J'ai travaillé au dossier de la gestion des successions, et je peux vous assurer qu'il est très difficile de traiter avec le ministère des Affaires autochtones et du Nord à ce sujet. J'appelais le ministère au nom de mes clients et on me disait de communiquer avec les Six nations avant de rappeler le ministère, et je n'obtenais jamais de réponse. Si c'est effectivement une bonne chose de supprimer cette partie de la Loi sur les Indiens, il faut toutefois regretter que l'on se décharge de cette responsabilité sur le dos des provinces alors que notre peuple devrait avoir le droit de s'occuper lui-même de l'administration de ses successions et de ses testaments. Il devrait aussi pouvoir prendre en charge l'éducation conformément aux droits que lui confèrent les traités.
Je crois que M. Clarke a le mérite d'avoir soulevé la question de l'abrogation de la Loi sur les Indiens alors que personne n'en parlait publiquement. J'estime cependant nécessaire d'établir un processus, ce que ne fait pas le projet de loi. Il faut mettre en place une solution de remplacement et nous avons besoin des ressources nécessaires à cette fin.
Il faut d'abord et avant tout avoir recours aux personnes compétentes. Au fil de mes expériences à titre d'infirmière et d'avocate, j'ai pu constater que l'on n'utilise pas nos ressources à bon escient. Nous avons des praticiens bien formés prêts à agir dans toutes nos communautés. Nous avons des infirmières, des avocats et des enseignants et on ne fait pas appel à leurs services. Tout le système est monopolisé par un groupe sélect d'individus. Les choses doivent se passer autrement. Si l'on veut abroger la Loi sur les Indiens, il faut d'abord s'assurer de mettre à contribution toute cette expertise.
C'est ce que je pense après avoir entendu les chefs. Ils sont unanimes: personne ne les écoute. Le gouvernement ne les écoute pas. C'est là qu'il y a déconnexion. Lorsque le gouvernement n'écoute pas et n'entend pas...
Vous écoutez, mais vous n'entendez pas ce que les gens vous disent. C'est le problème que nous avons. Il y a aussi le fait que l'on ne fait pas appel aux bonnes personnes. Cela montre bien qu'il n'y a pas de relation bilatérale et qu'il n'y en a jamais eu.
Le moment est venu d'agir. Nous sommes tous d'accord: il n'y a pas eu de consultation. Le gouvernement fédéral nous dit qu'un changement s'impose. Nous voulons bien, mais il faut commencer à collaborer avec nous si on veut que ce changement se concrétise et il faut dorénavant mettre à contribution les ressources compétentes qui sont en place.
J'en ai glissé un mot à quelques chefs. Nous devons réformer la Loi sur les Indiens, mais je ne crois pas que ce soit une bonne idée de la remplacer par une autre, car celle-ci deviendra simplement une nouvelle Loi sur les Indiens sous une autre appellation, un peu comme la Loi sur la gestion des terres des Premières Nations. À mon humble avis, c'est une autre Loi sur les Indiens, car elle vise à réglementer notre vie. Elle a simplement un titre différent.
Il nous faut des ententes de nation à nation. Si vous souhaitez abroger la Loi sur les Indiens, c'est le point de départ. Voilà un moment que l'on parle de changements et de réforme; il est maintenant temps de nous concerter pour passer à l'action.
Nous savons ce que nous avons à faire. Nous devons amorcer la mise en oeuvre d'ententes de nation à nation dans le cadre d'une approche holistique. On ne peut pas se concentrer uniquement sur l'éducation sans tenir compte de la santé ou du logement. Il faut examiner tous ces enjeux dans le contexte d'une entente de nation à nation.
Ces ententes entre nations peuvent être conclues à l'échelon régional ou national, selon ce que les gens décideront d'en faire, car ils ont le droit de participer au processus. Ils ont le droit d'être consultés par leurs propres dirigeants. Nos gens ne sont pas consultés localement. Je ne dis pas que c'est généralisé, mais j'ai des clients qui se sont plaints de ce manque de consultation.
Non, nous ne sommes pas parfaits. Le gouvernement fédéral non plus, pas plus que les non-Autochtones d'ailleurs. Mais nous faisons des progrès.
Nous devons obtenir notre part des revenus tirés de l'exploitation des ressources. Si vous souhaitez l'épanouissement des Premières Nations, vous devez partager ces revenus et nous donner ainsi les moyens de prospérer nous aussi. Nous devons en outre avoir notre mot à dire dans les négociations de 2014 sur les paiements de transferts fédéraux aux provinces. Les Premières Nations doivent participer aux pourparlers et obtenir leur juste part des transferts. Si le gouvernement fédéral est vraiment sincère dans son engagement à nous aider à nous remettre de la Loi sur les Indiens et de l'expérience des pensionnats, il doit nous traiter comme des partenaires et nous laisser la place qui nous revient. Rien ne l'empêche de le faire maintenant.
Le statu quo n'est pas une option. Nous ne pourrons pas poursuivre de cette manière encore très longtemps. Les gens souffrent. Les conditions se détériorent du fait que les coûts augmentent. Plus longtemps nous attendons, plus il faudra d'argent pour améliorer notre sort.
Qu'est-ce que je voulais vous dire d'autre? Quelqu'un a parlé des pouvoirs constitutionnels établis au paragraphe 91.24. Cela procure effectivement au gouvernement fédéral compétence sur les Indiens et les terres réservées aux Indiens, alors que les pouvoirs des provinces sont établis à l'article 92 de la Constitution.
À mon avis, c'est l'article 35 de la Constitution qui donne aux Premières Nations compétence sur ces questions. C'était l'intention visée par l'article 35 que nous devrions donc commencer à mettre en application comme il se doit.
Au moment où on se parle, rien ne justifie notre absence de la table à titre de partenaires. Si on nous exclut, c'est uniquement pour des motifs de haine et de racisme, c'est bien évident. Tous n'ont pas cette attitude, mais ce sont tout de même les seules raisons à part le fait que l'on ne veut pas partager avec nous les revenus tirés des ressources exploitées sur nos territoires. Ce partage pourrait très bien s'effectuer. Si les entreprises ne veulent pas nous donner notre juste part, nous pourrions l'obtenir par l'entremise des provinces. Rien n'empêche en effet les provinces et le gouvernement fédéral de prélever notre part de revenu directement auprès des entreprises qui exploitent les ressources si elles se montrent réticentes, comme c'est le cas pour les sociétés minières dans le Cercle de feu, dans le nord du Manitoba et un peu partout ailleurs.
Les Premières Nations constituent bel et bien une industrie. Vous avez pu le constater. Nous sommes une industrie dans le contexte du droit pénal. C'est un peu la même chose dans tous les secteurs. C'est tout ce que nous sommes actuellement. C'est essentiellement la façon dont on nous traite; nous sommes une industrie pour les avocats et les consultants. Je suis moi-même avocate et je vous dis cela parce que les choses doivent vraiment changer. Il est grand temps d'intervenir.
J'ai pris connaissance du projet de loi. J'estime le processus proposé problématique du fait qu'il prévoit une collaboration entre le gouvernement fédéral et les organisations des Premières Nations. Celles-ci ne représentent toutefois pas les Autochtones et ne parlent pas non plus en leur nom. Elles ont été mises sur pied sans le consentement de nos gens et doivent maintenant être réformées en profondeur. Quand je parle de ces organisations qui ne représentent pas les Autochtones, je pense uniquement à l'Assemblée des Premières Nations, au Congrès des peuples autochtones et à l'Association des femmes autochtones du Canada. Ces organisations ne consultent pas les Autochtones et ne parlent donc pas en leur nom. Elles parlent en leur propre nom et en celui de la vingtaine de personnes qui en bénéficient.
Un changement s'impose, car nos gens ont le droit de participer au processus décisionnel et de demander des comptes à leurs dirigeants. Si nous continuons à passer par les grandes organisations autochtones comme le prévoit ce projet de loi, le statu quo sera maintenu. Alors, nous serions aussi bien de renoncer à tout cela et de continuer à vivre comme actuellement.
Merci beaucoup.
Nous n'avons plus de temps, mais nous vous sommes certes reconnaissants pour vos témoignages d'aujourd'hui. Nous avons entendu bien des points de vue divergents au fil des dernières semaines et nous apprécions pouvoir y intégrer les vôtres. Ils sont le reflet des communautés que vous représentez et nous vous remercions d'avoir bien voulu venir à Ottawa pour témoigner devant nous.
Chers collègues, je veux vous souligner que notre prochaine séance se tiendra sur la rue Queen. Nous n'aurons pas accès à cette salle-ci, mais nous avons besoin de l'équipement de vidéoconférence. Je vous prie donc d'en prendre bonne note.
Merci énormément.
La séance est levée.
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