Vous nous avez invités tous deux pour traiter de deux articles que nous avons rédigés conjointement, la plus grande partie étant de la plume de M. Martin. Je dois vous faire savoir pour commencer que c'est moi qui lui en ai donné l'impulsion. Nous avons chacun des antécédents très différents, comme votre président vient de l'indiquer, mais nous avons travaillé main dans la main il y a quelques années de cela. Étant donné que nous avons des expériences différentes, nous allons parler à tour de rôle, si cela vous convient. Nous formulerons chacun quelques remarques.
Permettez-moi d'indiquer d'abord que nos écrits, et mes écrits antérieurs avant que Martin ne me rejoigne, ont été motivés par le fait que nous étions affligés de voir l'inefficacité de l'examen par le Parlement des prévisions budgétaires et son incapacité à déceler et mettre en lumière les dépenses faites à mauvais escient.
Avant que Martin Ulrich n'entre au centre, j'avais déjà déploré que les prévisions budgétaires soient ignorées. Mes écrits à ce propos ont amené John Williams, très tôt après son élection en 1993, à m'inviter à comparaître devant un groupe de collègues du Parti réformiste — ce n'était pas une séance de comité — pour parler de la situation. C'est un exemple de ce qui l'a mis sur la piste et l'a incité à en faire en quelque sorte l'oeuvre de sa vie. Ce n'est qu'après que Martin soit entré au centre que nous avons été en mesure, sur la base de son expérience — plus de 30 années au Conseil du Trésor — à proposer des moyens par lesquels le Parlement pourrait améliorer la situation.
Je dois dire que nous avons été tous deux très impressionnés par la qualité des témoins que vous avez invités, et par leur savoir. Je connais nombre d'entre eux et je peux affirmer que vous avez bien choisi vos invités. Je ne suis pas certain qu'il en aille de même aujourd'hui, mais quoi qu'il en soit, ce qui est remarquable est non seulement le fait que vous ayez fait appel à de bons témoins mais aussi que vous ayez consacré tant de temps à vous pencher sur le problème.
Vous avez réussi à travailler au cours de cette législature de manière assez coopérative, ce qui un peu inhabituel. Je pense que vous pourrez proposer des façons satisfaisantes d'améliorer la situation dans la mesure où vous pourrez vous inspirer de votre expérience.
Une grande partie du travail que nous avons accompli, Martin et moi, a consisté à nous adresser aux élus d'alors pour essayer de déterminer comment ils travaillaient. Nous sommes parvenus très rapidement à la conclusion, et nous l'avons fait ressortir dans nos écrits, que vous aviez besoin de ce que nous appelions un service financier substantiel.
Pour être franc, nous envisagions en fait un service beaucoup plus important que ce que vous pourrez obtenir, j'en suis sûr. Nous songions à une douzaine de personnes possédant une expérience poussée des services financiers gouvernementaux capables de comprendre la complexité des finances publiques, qui sont réellement difficiles à appréhender.
Un certain nombre des témoins que vous avez reçus ont exprimé leur appui à la proposition que nous avons faite, je suis ravi de le constater. De fait, Kevin Page, avec ses collègues qui ont comparu ici, sont un exemple du genre de personnes qui devraient, à notre avis, offrir ces services financiers.
La seule différence est que j'aimerais qu'il soit placé sous l'autorité directe du Parlement, et peut-être même de votre comité, et j'aimerais qu'il remette ses rapports à vous plutôt qu'aux médias.
Deuxièmement, j'aimerais qu'il prenne un peu de temps pour vous demander des instructions concernant les sujets à traiter, au lieu de décider de son propre chef ce qui est nécessaire.
Dans l'une de nos études, celle que nous avons rédigée pour l'IRPP, nous avons préconisé que les comités des prévisions budgétaires siègent tout au long de l'année. En d'autres termes, nous partageons l'avis de ceux qui disent que c'est une erreur de mettre un terme aux enquêtes le 31 mai.
Dans nos articles, nous avons conclu qu'il serait plus efficace, au lieu de se pencher sur les prévisions annuelles uniquement au printemps, que les membres se concentrent d'emblée sur l'examen de programmes particuliers. Ainsi, vous pourriez déterminer si les résultats de chaque programme correspondent à ce que vous estimez être les besoins et les attentes du public.
L'on nous a demandé de faire part de nos conclusions dans l'étude que nous avons menée pour la Commission Gomery, la Commission d'enquête sur le programme de commandites. Lorsque nous avons reçu votre demande, je me suis rappelé que, bien que nous ayons écrit le rapport en espérant un peu que quelqu'un y prête attention, à notre connaissance, ceci est la toute première fois qu'il fait l'objet de l'attention de parlementaires.
Je le mentionne parce que j'espère que le rapport que vous rédigerez vous-même aura un retentissement et ne sera pas ignoré comme le nôtre l'a été. Autrement dit, présentez un rapport qui aura quelque chance de rallier un soutien parlementaire et public.
Si votre rapport présente un ton positif et constructif, surtout s'il a l'appui des membres de tous les partis, ce qui est assez difficile à obtenir mais mérite d'être tenté, la probabilité qu'il soit pris au sérieux par le gouvernement sera d'autant plus grande.
Bob Marleau a eu bien raison de souligner que des conclusions revêtant un ton positif et proposant des moyens d'améliorer un programme seront plus susceptibles d'être pris au sérieux par le ministère. Cela peut prendre du temps. Cela n'arrivera pas du jour au lendemain, mais il vaut la peine de l'envisager.
Au cours des années que j'ai passées à observer — et elles sont nombreuses, comme vous l'avez mentionné — et à travailler avec les comités parlementaires, j'ai vu des cas, que je peux citer, où un rapport auquel tous les partis avaient souscrit a exercé une influence extraordinaire sur le gouvernement. Si les membres de l'opposition dans un comité, au lieu de chercher des façons d'attaquer le gouvernement, collaboraient avec les membres de la majorité sur les façons d'améliorer l'efficacité des opérations gouvernementales — pour reprendre les termes déjà employés par Joe Jordan — vous pourriez ensemble jeter les bases permettant de démontrer au public qu'un programme offre un bon rapport qualité-prix, et si vous pouviez vous accorder sur des façons de l'améliorer, le gouvernement pourrait y répondre favorablement.
Merci.
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Merci, monsieur le président.
Bon après-midi à tous.
Je vais approfondir un peu, particulièrement concernant l'étude pour l'Institut de recherche en politiques publiques. Je pense que celle-ci date un peu. Elle remonte à presque une dizaine d'années. Nous nous y penchions non pas sur les prévisions budgétaires en particulier, mais sur la supervision gouvernementale de la gestion financière en général. L'une des raisons en était que, comme vous le savez tous, c'était là un problème à l'échelle internationale et pas seulement au Canada. À l'époque, le Parlement était très critiqué par le monde universitaire, les médias, etc.
Nous voulions examiner ce sujet en profondeur, et nous avons donc pris toutes les études réalisées par tous les comités au cours d'une année civile. Nous avons isolé celles qui avaient, sous une forme ou une autre, une dimension de surveillance de la gestion financière. Tant Peter que moi-même avons rencontré à l'époque des députés de tous les partis. Je ne dirais pas que c'était un échantillon aléatoire, loin de là. Nous avons choisi des députés qui occupaient un siège depuis déjà quelque temps et connaissaient mieux le processus afin, en substance, d'obtenir les meilleurs avis possibles.
Il est ressorti très clairement de ces entretiens que la surveillance financière doit être considérée à trois niveaux différents. L'un est le niveau macroéconomique large, soit le budget global, le déficit et la dette — ce genre de choses. Un autre niveau est celui des transactions individuelles — les contrats individuels et tout ce genre de choses. Entre le cadre de contrôle que le gouvernement avait en place à l'époque, la Loi sur la gestion des finances publiques, qui établissait toutes sortes de contraintes concernant la façon dont le gouvernement pouvait utiliser les fonds alloués au titre soit de lois soit de crédits, et les vérifications effectuées par le Bureau du vérificateur général, il existait ce niveau intermédiaire, celui des programmes ou des ministères.
Nous avons consigné dans ce rapport les vues clairement exprimées par les parlementaires. Il s'est avéré, après toutes ces discussions, que nous partagions ces avis, mais ce n'était pas à proprement parler les nôtres. C'était les avis de personnes comme vous, il y a une dizaine d'années environ. Leur conclusion était que le Canada, le Parlement du Canada et la Chambre des communes canadienne font un assez bon travail à ce niveau supérieur, celui des agrégats. Le dépôt du budget est un événement majeur au Parlement. Il est précédé de quantités de préconsultations, etc. À l'époque, le Comité des finances était très actif sur le plan des consultations prébudgétaires. Cela fonctionnait assez bien.
Ils avaient également une grande confiance, même s'ils ne s'y attardaient pas beaucoup, au niveau des transactions particulières. Mais c'est ce niveau intermédiaire — celui où se situent les prévisions budgétaires — qui laissait essentiellement à désirer. Ce n'était pas une conclusion surprenante, je suppose, mais il était bon de savoir que les députés d'expérience pensaient que c'était le cas.
Un certain nombre de ces recommandations sont issues de ces entretiens, mais l'une que je trouve particulièrement intéressante — et là je vais recourir à quelques termes de jargon, car je ne sais pas quels autres mots utiliser — est le cadre de contrôle. Puisqu'il lui appartient de voter les crédits, comment le Parlement s'assure-t-il que les Canadiens ont bien reçu ce que le gouvernement avait l'intention de leur attribuer, et que les choses sont faites de manière efficace et rentable et tous ces autres aspects positifs?
Au fil des ans, la structure des crédits et de toutes ces mesures pour lesquelles vous votez techniquement au Parlement a évolué. Comme Peter l'a mentionné, dans de nombreux cas, au fil des ans, le gouvernement a graduellement rendu les crédits plus volumineux. Par conséquent, lorsque vous étiez face à un chiffre — lorsque les parlementaires voyaient que x milliards de dollars étaient alloués à quelque grande et noble cause, il n'y avait absolument aucun moyen de comparer cette somme au résultat.
Ils ont demandé ce qu'ils pouvaient faire. À divers égards, c'est l'une des raisons du service d'analyse financière. Nous avions entre autres recommandé que le service d'analyse financière, travaillant sous la direction de votre comité, se penche sur cet aspect. Comment faire un tri dans toutes ces affaires pour pouvoir s'y retrouver? Ce n'est pas que le gouvernement n'a pas besoin de flexibilité. Il lui en faut. Mais parallèlement, vous représentez tous les Canadiens. Le Parlement doit veiller à se pencher sur la manière dont le gouvernement, la grosse machine administrative, utilise les pouvoirs et les fonds qu'il lui alloue.
Je pense que ce cadre de contrôle — dont le pivot est principalement la structure des crédits — doit réellement être examiné. Kevin Page a certainement recommandé cela lorsqu'il a préconisé que les crédits soient structurés par programmes, et je pense que ce serait un énorme pas dans la bonne direction.
Cette étude a fait apparaître plusieurs autres choses. L'une était l'idée que le comité devrait à tout le moins considérer des indicateurs. Je crois — et Bob Marleau l'a dit très clairement — qu'il y a beaucoup de confusion chez les parlementaires concernant ce que vous avez le pouvoir de faire et ce que vous pouvez accomplir si vous le voulez.
Vous jouissez d'un énorme pouvoir. Vous pouvez faire énormément de choses si vous parvenez à vous mettre d'accord en comité. Nous nous sommes penchés sur les comités, et les prévisions budgétaires étaient censément l'une des raisons d'être des comités. Eh bien, dans cette étude, nous avons effectivement calculé combien de temps les comités consacraient aux prévisions budgétaires, et c'était infime par rapport à toutes les autres choses que vous faites.
Eh bien, si les prévisions budgétaires sont aussi importantes que nous le pensons et que le pensaient ceux à qui nous avons parlé, alors il serait bon de réfléchir aux critères permettant de juger si les comités ont bien rempli leur fonction de surveillance financière. Ce pourrait être un aspect sur lequel votre comité, avec sa responsabilité générale des prévisions budgétaires, pourrait vouloir se pencher.
C'était donc là l'étude. La seule chose que je dirais au sujet de l'étude sur les commandites que nous avons menée est que celle-ci n'a pas réellement porté sur les commandites. La question qui nous était posée était de savoir s'il était possible, pourvu que le Parlement remplisse mieux son rôle de surveillance financière, de réduire la probabilité d'un dérapage comme le scandale des commandites?
Inutile de le dire, nous avons conclu que les parlementaires ne pouvaient certes pas être tenus responsables de ce qui était arrivé, mais que l'on pouvait certes dire aussi qu'ils n'avaient pas effectué le genre de surveillance qui découragerait les fonctionnaires de faire ce qui avait manifestement été fait en l'occurrence.
Je pense donc que la question posée dans cette étude était tout à fait légitime. Les parlementaires pouvaient-ils être perçus, n'ayant pas rempli leur rôle, comme ayant encouragé une mauvaise administration financière? Vous pourriez vouloir y réfléchir.
Je terminerai avec quatre observations qui, je pense, se dégagent des deux études dont je parle.
Premièrement, je crois extrêmement important de concevoir les prévisions budgétaires comme ne se limitant pas seulement à l'argent. C'est de l'argent pour une fin bien précise. Vous devez pouvoir relier cet argent à cette fin. Si le genre d'information qui vous est fournie ne fait pas le lien entre ces deux dimensions d'une manière compréhensible par vous, alors vous ne pouvez pas réellement exécuter le processus.
Lorsque j'étais dans l'administration publique, ce qui remonte maintenant à plus de 10 ans, je travaillais au Conseil du Trésor et nous avions beaucoup de contacts avec le Parlement à l'époque. Cela fonctionnait assez bien. Il était clair que les fonctionnaires de l'administration, en rapport avec le personnel des parlementaires, consultaient beaucoup, ou du moins ils le pouvaient, à cette époque. Ils encourageaient le personnel parlementaire à déterminer de quels renseignements les parlementaires avaient vraiment besoin, et comment ils devaient être structurés.
Il en ressortait deux choses. L'une était qu'il existait une réelle disposition à faire cela. L'autre était qu'il fallait veiller à ce qu'il ne s'agisse pas uniquement d'un document financier, mais bien d'un document financier lié à des résultats que les Canadiens pouvaient comprendre. M. McGee, de la Nouvelle-Zélande, je crois, a mis l'accent sur cet aspect, et je dirais que tout ce que nous avons fait renforce son importance.
J'ai été frappé également par les remarques de M. Marleau et de M. Williams au sujet des pouvoirs que vous confèrent les procédures parlementaires. Selon mon interprétation, ils ne préconisaient pas que vous les changiez, et que si vous pensez que la solution réside dans une autre modification du Règlement de la Chambre, la probabilité est que cela n'aura pas d'effet. Il faut chercher au-delà. Il faut considérer la façon dont les choses sont faites, au-delà des autorisations et des pouvoirs et ainsi de suite.
J'ai déjà mentionné la structure des crédits. Ce que j'appelle le cadre de contrôle des programmes, et que vous pouvez appeler comme vous voulez, est certainement un domaine qui mérite quelque attention.
Peter a mentionné vers la fin de son intervention la réalisation d'un consensus dans les comités et ailleurs. Une option au sujet de laquelle j'ai toujours été sceptique est celle mentionnée par M. Williams qui figurait dans un rapport remontant à plus d'une dizaine d'années, à savoir la modification du montant d'un crédit donné. Je pense que c'est illusoire. Je ne crois pas que ce serait utile.
Je pense qu'il est plus important de bien voir que le contrôle doit appartenir au gouvernement. Ce dernier a un plan, qu'il a mis au point et dont il demande l'approbation. Si vous ne lui faites pas confiance, alors vous jouez votre rôle de parlementaires, mais je ne crois pas que ce soit une bonne chose que de tripatouiller les détails. Mais toutes ces études de 2001 — il y en a eu 19 qui contenaient des recommandations concernant des changements soit dans les ressources soit dans les résultats — ont été déposées au Parlement. Elles ont été envoyées à un comité pour examen.
Cela ne modifie pas les crédits d'une année donnée, mais autorise des changements en aval et habituellement, dans le passé, cela a été jugé acceptable par les gouvernements.
Si vous essayez de modifier les crédits d'une année, vous ne faites qu'ouvrir la porte aux difficultés. Si vous cherchez à faire évoluer le processus, vous pourriez avoir quelque succès.
Je pense que l'une des raisons pour lesquelles les prévisions budgétaires n'ont guère reçu d'attention est que le désir de modifier les chiffres est trop fort et, si vous n'y parvenez pas, vous estimez avoir échoué. Eh bien, si c'est votre façon de voir, cela ne marchera pas.
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Merci. J'ai réellement apprécié notre conversation avant le début. J'aimerais y revenir un peu. Je tiens à vous remercier grandement pour tous vos écrits sur cette question. Ils sont très réfléchis.
J'ai été réellement frappée par une chose que vous m'avez dite, et qui a été évoquée par pas mal d'autres experts, à savoir que tout le monde autour de cette table est simplement un député élu. Nous avons donc une responsabilité lorsque nous votons sur les prévisions budgétaires et le projet de loi d'exécution du budget. Nous avons une responsabilité envers nos électeurs et une responsabilité pour chaque portefeuille qui nous est confié. Nous sommes réellement tous dans le même bateau.
J'aime votre idée. Elle a déjà été lancée par quelqu'un d'autre dont j'ai lu l'article. L'auteur disait que ce comité était censé être neutre, et nous devrions donc peut-être réarranger les fauteuils et ne pas en faire autant un terrain d'affrontement, dès le départ. J'ai siégé à des comités où cela était véritablement le cas. Cela pourrait effectivement changer l'état d'esprit, en tout cas aux fins de la rédaction de ce rapport. C'est une idée rafraîchissante.
J'aimerais vous poser trois questions. Je vais vous les poser à la suite, et voudrez peut-être les fusionner dans votre réponse.
Premièrement, quels sont à votre avis les principaux obstacles à l'introduction concrète de changements dans le processus des prévisions budgétaires et du budget? Des rapports ont été déposés dans le passé, contenant d'excellentes recommandations. Certains des experts nous ont soumis quelques recommandations réellement intéressantes. Beaucoup d'entre elles semblent se recouper. Nous pourrions probablement trouver un consensus dans quantité de domaines, et nous sommes tous libres de nous mettre d'accord. Je serais intéressée de connaître vos conseils à ce sujet, hormis l'idée de réarranger les fauteuils.
La deuxième question porte sur un point qui figurait clairement dans le rapport du vérificateur général et que vous-même, je crois, avez mentionné indirectement, à savoir le choix des instruments. Le vérificateur général a vertement critiqué les Affaires autochtones et recommandé que le ministère surveille davantage les dépenses. La manière de le faire serait de renoncer aux accords de contribution et de procéder plutôt par le moyen d'un mandat législatif, soit la même manière dont les services sont fournis au niveau provincial.
Lorsque j'envisage cela selon notre perspective, celle des députés examinant les prévisions budgétaires, il nous est impossible de nous plonger dans les accords de contribution individuels. S'il n'existe pas de mandat législatif clair énonçant ce que le gouvernement s'engage à faire et selon quels critères il sera jugé, notre tâche devient d'autant plus difficile. Nous n'entrons généralement pas dans les détails de tous ces accords de contribution individuels. Cela pourrait même devenir encore plus complexe lorsque le gouvernement commencera à sous-traiter une partie de ses activités. Il faudrait alors éplucher ces contrats et leurs conditions.
Troisièmement, nous avons maintenant eu notre deuxième comité de sous-ministres chargé de surveiller les dépenses. Nous avons le comité des sous-ministres sur le F-35, appelé comité sur les sept points ou quelque chose du genre, je présume à titre de mécanisme de reddition de comptes sur les spécifications, les dépenses et la manière de déterminer quel appareil convient le mieux.
Les hauts fonctionnaires semblent dire maintenant que ce modèle a très bien fonctionné pour les marchés de construction navale et que ce sera donc un bon modèle pour le F-35. Cela pose une question évidente à mes yeux. Puisque le gouvernement commence à utiliser ce mécanisme, ne devrions-nous pas utiliser le même, au lieu de perdre trois années en disputes sur la vérité concernant les critères et les dépenses et les coûts? Est-ce le genre de mécanisme que nous devrions recommander d'emblée, ou d'autres similaires? Lui-même n'est pas exempt de problèmes, car s'il y a trop de responsables, la hiérarchie des responsabilités deviendra confuse.
Excusez-moi. Je ne sais pas si vous avez pu suivre ces trois questions, mais j'apprécierais vos réponses.
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Je vous laisse la troisième.
La première question portait sur les principaux obstacles. Je rêve peut-être en couleur, mais il me semble qu'il y a un énorme travail à faire et qu'il incombe à votre comité de réellement se pencher sur le mécanisme de surveillance au niveau des programmes. Comment les parlementaires peuvent-ils le faire? Il n'y a pas que votre comité, il y a tous les autres. Le mandat du vôtre, je crois, est de considérer les autres comités et leur travail sur les prévisions budgétaires, afin de déterminer ce qu'il y a lieu de faire.
Un deuxième aspect étroitement apparenté à celui-ci est que, dans un très grand nombre de comités, les députés de la majorité protègent le gouvernement. Les députés de l'opposition protègent l'opposition et la question est de savoir comment chaque parti peut retirer quelque chose de précieux de la surveillance, au nom de tous les citoyens canadiens, de la manière dont le gouvernement dépense leur argent. Il existe des solutions. J'en connais quelques-unes, mais je ne vis pas dans votre monde, je n'ai jamais vécu dans votre monde.
C'est une question très difficile, mais je pense que si vous vous y attaquez ouvertement et reconnaissez que les députés du côté gouvernemental sont convaincus d'avoir les bons types de programmes... Ils votent pour eux. Nous le savons. Mais quel mal y aurait-il à ce que les députés de l'opposition disent: « Eh bien, vous allez avoir vos programmes, mais faisons en sorte de comprendre ce qui se passe. Pourquoi faut-il ce montant d'argent pour réaliser ces résultats précis? » Si les députés de l'opposition y voient un gaspillage d'argent, ils ne peuvent rien y changer, mais ils auront certainement une meilleure idée de ce qu'il faudrait dire aux Canadiens pour leur expliquer qu'un changement serait une bonne idée.
Les députés de la majorité, me semble-t-il, puisqu'ils sont en faveur des programmes, seraient mieux en mesure de les défendre et de démontrer que c'est exactement ce que leur politique exige. Il me semble qu'il y a là une zone de convergence. Je ne sais pas exactement comment le faire, mais je présente cela un peu comme quelque chose que les parlementaires devraient faire. Ils devraient essayer de trouver une façon de mettre cela à l'essai, à un moment donné, au niveau des partis.
En réponse à la deuxième question, si je l'ai bien saisie, soit le mécanisme des contributions et le rôle des sous-ministres, des comités et toute cette sorte de choses, une chose très importante concernant les accords de contribution... Certains d'entre eux sont énormes, mais comme M. Williams vous l'a dit, le comité peut certainement en demander une évaluation. Dans le passé, c'était une chose parfaitement normale pour un comité parlementaire à faire: demander au gouvernement une évaluation, et même suggérer que les membres du comité soient consultés en vue de sa réalisation. C'est une façon, ou du moins c'en était une dans le passé, d'obtenir des renseignements sur une certaine période de temps et de vous faire une idée de la nature de cet énorme accord et de la raison pour laquelle il doit être comme il est et de ce qui pourrait clocher.
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La réponse sera probablement plus longue que vous ne l'escomptiez.
En guise de contexte, je vais porter à votre attention plusieurs choses. Je crois avoir mentionné — peut-être ne l'ai-je pas fait — que lorsque vous avez reçu ici M. Williams, il a un peu parlé de l'Organisation mondiale de parlementaires contre la corruption. J'en ai été le secrétaire exécutif pendant sept ans.
Nous avions, entre autres, toute une série de groupes internationaux de parlementaires travaillant avec des experts de la Banque mondiale et de toutes sortes d'organisations différentes à l'élaboration d'indicateurs portant principalement sur la performance des parlementaires dans le domaine de la prévention de la corruption ou, plus généralement, d'une meilleure administration gouvernementale. Il existe une documentation à ce sujet. L'une des choses que j'ai toujours encouragé M. Williams à faire, lorsqu'il était ici, était d'utiliser l'un des comités auquel il siégeait pour réaliser un essai à cet effet.
Cela m'amène à un point clé que je veux faire valoir. Sur le plan de la performance, du moins initialement, je pense qu'il faut mieux que les parlementaires eux-mêmes fassent l'évaluation de la qualité de leur travail. Mais pour cela, il faudra établir un ensemble d'indicateurs pour déterminer dans quelle mesure ils ont bien accompli le travail pour le compte des Canadiens.
Toutes sortes de points de démarrage sont possibles pour mettre cela sur pied, mais je pense que si vous élaborez ces indicateurs vous-mêmes, à titre de groupe multipartite, dans le but de faire cette évaluation, alors même si vous ne tombez pas d'accord, je pense que vous allez acquérir une compréhension extraordinaire du processus et des difficultés inhérentes à chaque optique. Je pense que cela peut avoir une puissante influence.
Par ailleurs, lorsque j'étais dans l'administration fédérale et responsable, à toutes fins pratiques, de l'instauration de la gestion des résultats dans les différents ministères et organismes, de manière telle que ces derniers commençaient concrètement à faire ce travail eux-mêmes — plutôt que de se faire dire quoi mesurer — ils se sont attelés à la tâche. Certes, certains d'entre eux, bien évidemment, n'ont pas joué le jeu — tout le monde ne le fait pas — mais pour certains d'entre eux c'était réellement une nouveauté transformatrice.
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Vous avez déjà entendu la réfutation assez convaincante de ce point de vue par Bob Marleau, et je ne vais donc pas tenter de faire mieux que lui.
Cependant, l'un des phénomènes que l'on observe, c'est le taux de roulement énorme dans le Parlement canadien, et cela a également été signalé par d'autres de vos invités. Là encore, je pense que M. Marleau avait tout à fait raison d'estimer qu'il y aurait peut-être un moyen de garder les membres d'un comité en place pendant une durée raisonnable.
J'ai beaucoup travaillé il y a quelques années sur la manière dont les présidents étaient remplacés. Je me souviens en particulier que lorsque Mulroney était premier ministre, en 1984, ses nominations étaient excellentes. Les 19 comités étaient présidés par les meilleurs députés de la Chambre. Mais après 1988 presque tous ont été remplacés parce que vous étiez tous en concurrence pour les postes, si bien que deux seulement sont restés en place. L'un était Don Blenkarn, parce qu'il était tellement bon que tout le monde était obligé de l'admettre, et l'autre était Pat Nowlan, et c'est parce que sa famille avait un tel lien avec le Parti conservateur qu'il possédait une certaine influence.
Je me souviens d'un gars de Montréal qui avait été élu pour la première fois en 1988. J'ai emmené un groupe de parlementaires à Washington pour tenter de faire constater à certains les avantages du système de comités américain. Je ne parle pas du système politique américain, mais du système de comités. Le Comité de l'énergie était antérieurement présidé par — je ne me souviens plus de son nom, car je deviens très oublieux — mais elle était de l'Alberta. Elle avait dirigé une société énergétique, elle connaissait le domaine. Celui qui l'a remplacée avait un peu d'expérience des affaires. Il venait de Montréal. Mais je me souviens qu'il m'a dit, au cours de ce voyage, que sa seule expérience dans le domaine de l'énergie était lorsqu'il remplissait le réservoir de sa voiture dans une station libre-service.
La réponse est donc qu'il faut réellement disposer de plus de temps. Je pense que si vous pouviez obtenir que les bonnes personnes demeurent dans un comité, pas seulement le président mais de haut en bas, cela ferait une énorme différence et vous commenceriez à exercer de l'influence sur vos collègues des deux côtés.
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Merci, monsieur le président.
Je ne me propose pas de vous lire à proprement parler mes remarques liminaires, mais, plutôt, de les résumer, et j'espère que les cinq minutes qui suivront me suffiront.
À une époque, lorsque je travaillais au ministère des Finances, au début des années 1980, le budget des dépenses était un élément essentiel aux fins de l'établissement du cadre des dépenses contenu dans le budget annuel. Les responsables au ministère des Finances et au Secrétariat du Conseil du Trésor consacraient des semaines à la compilation des projections de dépenses pour les différents ministères et organismes, pour ensuite les verser dans un système de type enveloppe, qui servait alors de base pour les dépenses de programmes directes contenues dans le budget.
Or, le budget et les états financiers vérifiés, qui servent en quelque sorte à illustrer la justesse du budget, ont évolué dans le temps. Toutes les activités contrôlées par le gouvernement y figurent, la comptabilité de caisse a été remplacée par la comptabilité d'exercice, et les dépenses et les revenus sont maintenant calculés en chiffres bruts plutôt qu'en termes nets.
Le budget des dépenses est cependant demeuré relativement statique. Aujourd'hui, le budget des dépenses n'a plus guère de pertinence aux fins de planification budgétaire. J'estime que le budget devrait être la pierre angulaire du budget des dépenses. Ce dernier devrait reposer sur la même base que le budget et les états financiers vérifiés, et devrait être déposé après le budget.
Dans le cadre de l'actuel processus d'examen des crédits, et l'exercice financier débutant le 1er avril, cela exigerait que le budget soit déposé au plus tard à la mi-février.
Jusqu'à tout récemment, ce fut là la pratique, du fait, surtout, d'un document de discussion produit par le ministère en 1984. À l'époque, il y avait le budget, il y avait le projet de loi portant pouvoir d'emprunt, il y avait les prévisions de dépenses pour les provinces et il y avait les prévisions budgétaires. Le budget constituait en quelque sorte la base pour ces trois types d'information, soit les prévisions, le projet de loi portant pouvoir d'emprunt et les transferts aux provinces.
Aujourd'hui, bien sûr, nous n'avons plus de projet de loi portant pouvoir d'emprunt, ce qui vient quelque peu diminuer l'importance de ce lien.
Si le budget annuel était déposé avant le budget des dépenses, alors ce dernier cadrerait de plus près avec le budget. Les rapports sur les plans et les priorités devraient être déposés en même temps que le budget des dépenses, reflétant ainsi l'incidence des initiatives proposées dans le budget. Et si cela est impossible à faire, alors il devrait y avoir, au minimum, concordance complète en ce qui concerne les rubriques incluses dans le budget mais non dans le budget des dépenses.
Les parlementaires auraient alors un tableau beaucoup plus complet des projections de dépenses par ministère pour l'année à venir. Sur la base des rapports actuels, l'information détaillée quant à l'incidence des réductions des dépenses proposées dans le budget 2012 ne sera pleinement disponible que dans le courant de l'année 2013, et les rapports sur les plans et les priorités, qui auraient normalement dû être déposés peu après le budget des dépenses, ne sont maintenant attendus qu'en mai, et n'engloberont donc pas ces changements.
Il y a ainsi lieu de s'interroger quant à l'utilité des rapports sur les plans et les priorités, surtout dans le cycle en cours.
Comme je l'ai mentionné, il devrait également y avoir un rapprochement détaillé entre le budget annuel et le budget des dépenses. Les deux ne s'inscriront jamais sur la même base. Il y aura toujours des différences, mais il devrait y avoir une explication exhaustive de ces différences. Le dernier rapprochement entre le budget annuel et le budget des dépenses remonte au budget de 2007, pour lequel il avait été fait un rapprochement exhaustif des chiffres des dépenses du budget et de ceux du Budget principal des dépenses.
Cela n'a jamais été fait depuis.
Si le budget des dépenses va demeurer tel qu'il existe à l'heure actuelle, alors je pense qu'il devrait être déposé beaucoup plus tôt dans le processus, en novembre, par exemple. Il n'y a aucune raison de ne pas le faire, s'il ne va pas être déposé, ou s'il ne va pas être établi sur la base des projections budgétaires, et s'il ne va pas cadrer, sur le plan conceptuel, avec la comptabilité budgétaire.
Cela donnerait aux parlementaires plus de temps pour évaluer le budget des dépenses en vue de son adoption avant le 1er avril.
Le budget des dépenses devrait, à mon sens, ne renfermer que les dépenses votées. Les dépenses législatives ne devraient pas y être incluses. Celles-ci ne font pas l'objet d'un vote. Elles sont utiles aux fins d'information, mais, au bout du compte, les parlementaires ne consacrent pas beaucoup de temps aux programmes législatifs, à moins que des changements proposés ne visent ces derniers, ce qui a été le cas avec le budget de 2012.
Il faut aux programmes législatifs une base pour leur inclusion dans quelque document que ce soit. Il leur faut un contexte économique et, à moins que le budget des dépenses ne soit déposé avec le budget, je ne vois aucune raison pour laquelle celui-ci devrait renfermer les dépenses législatives.
En ce qui concerne le Bureau du directeur parlementaire du budget, j'estime qu'il y aurait lieu d'en faire un haut fonctionnaire du Parlement, conformément à la promesse faite initialement, et qu'il devrait être doté de ressources accrues et se voir accorder un meilleur accès à l'information.
Le DPB a, la semaine dernière, publié un rapport intitulé Production de rapports sur le budget et les dépenses pour le Parlement: Renforcer la transparence et la surveillance en période de consultation budgétaire. Je recommanderais au comité de faire un examen sérieux des recommandations contenues dans ce rapport.
Je pense que ce dernier cerne plutôt bien les genres de renseignements qui devraient être obtenus et la façon dont ceux-ci pourraient être utilisés.
Voilà qui met fin à ma déclaration liminaire. Je me ferai un plaisir de répondre aux questions que voudront me poser les membres du comité.
Merci, monsieur le président.
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Comme je l'ai indiqué plus tôt, jusqu'en 2006, environ, il y avait en place une logique, un ordre, le budget venant en premier, suivi du budget des dépenses. Les parties III étaient alors déposées avec le budget des dépenses, et il se tenait en fait à l'époque une séance d'information à huis clos pour les prévisions budgétaires, des fonctionnaires étant à la disposition des journalistes pour expliquer les chiffres. Cela suscitait tout un foisonnement d'activités dans les médias ce jour-là et le lendemain.
Depuis 2006, il semble que l'on s'écarte de plus en plus de ce processus. Je ne dis pas que cela n'est pas arrivé par le passé, mais, depuis 2006, nous nous en écartons de plus en plus. Une partie de la raison à cela, bien sûr, ce sont les élections. Si vous tenez des élections tard dans l'exercice financier, alors il devient très difficile, voire même impossible, de déposer un budget. Vous recourez alors à des mandats du gouverneur général. Dès le retour de la Chambre, alors il vous faut déposer ces mandats du gouverneur général. Le budget ne sera peut-être pas encore prêt à être déposé, mais il vous faut déposer les autres documents.
Il y a donc des raisons pour lesquelles il peut, à certains moments, y avoir des retards. Mais, en temps normal, les principales décisions politiques ayant des ramifications budgétaires sont prises à la fin de l'année civile précédente, et c'est ainsi que le budget peut être largement arrêté dès décembre. Ce que vous attendez par la suite c'est de savoir s'il va y avoir de nouvelles données économiques susceptibles d'avoir une incidence sur les projections économiques énoncées dans le budget, puis sur les projections financières et les projections en matière de déficit ou d'excédent.
Vous voudrez peut-être attendre un petit peu plus longtemps pour avoir une meilleure idée de ce qui se passe sur la scène économique, car cela pourrait avoir une incidence majeure sur vos projections budgétaires. Cependant, cela étant dit, quels renseignements obtenez-vous après, disons, décembre de l'année civile antérieure? Vous obtenez les résultats du quatrième trimestre des comptes nationaux à la fin du mois de février; cependant, vous obtenez également les données intermensuelles pendant le dernier trimestre, ce qui vous donne une assez bonne idée de ce qu'il en sera pour le dernier trimestre de l'année et pour l'année dans son ensemble. Je soutiendrai donc que, fin janvier, vous n'allez pas recevoir encore beaucoup d'information qui va vous aider à finaliser votre budget devant être déposé en février.
Ainsi — à mon sens, en tout cas —, il n'y a aucune raison pour laquelle un budget ne pourrait pas être déposé en février sur la base de l'information que vous avez alors en main. Il se pourrait qu'il arrive en février quelque chose qui vienne fausser de beaucoup vos prévisions, mais vous pourriez y remédier au moyen d'un énoncé supplémentaire peu après le dépôt du budget.
Il n'y a selon moi aucune raison pour laquelle le budget des dépenses ne pourrait pas être déposé après le budget, si le budget est déposé à la mi-février. C'était la pratique autrefois. C'était la pratique lorsque nous n'avions pas toute l'informatisation que nous avons aujourd'hui. Je ne vois aucune raison pour laquelle cela ne pourrait pas être fait. Il en est de même en ce qui concerne les rapports sur les plans et les priorités.