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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 139 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 16 décembre 2024

[Enregistrement électronique]

(1105)

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte. Bienvenue à la 139e réunion du Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes.
    À tous les députés, veuillez attendre que je vous appelle par votre nom avant de prendre la parole. J'aimerais également rappeler à tout le monde que tous les commentaires devraient être adressés à la présidence. Merci de votre coopération.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mercredi 25 septembre 2024, le Comité reprend son étude sur la violence motivée par la haine ciblant la communauté 2ELGBTQI+.
    Avant d'accueillir les témoins, j'aimerais faire un avertissement. Nous allons discuter d'expériences liées à de la violence motivée par la haine. Cela pourrait susciter des émotions chez des auditeurs ayant vécu des expériences semblables. Si des participants ressentent de la détresse ou ont besoin d'aide, ils peuvent en aviser la greffière. À tous les témoins et aux députés, il est important de reconnaître que ce sont des discussions difficiles, et il faut donc essayer de faire preuve de compassion durant nos conversations.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins.
    Je vais commencer par M. Tyler Wisner.
    Vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
    Bon après-midi à tous.
    Je suis un homme gai de 26 ans et je suis parajuriste pour le ministère de la Justice Canada, mais je ne suis pas venu ici pour parler au nom du gouvernement du Canada.
    Je tiens d'abord à remercier le Comité permanent de la condition féminine de m'offrir la possibilité de parler de ma communauté. Même si je ne suis pas transgenre et que je ne peux pas parler au nom de tous les jeunes queers, j'ai soutenu les jeunes queers d'une manière ou d'une autre au cours des 10 dernières années. J'aimerais vous donner une idée de l'intimidation à laquelle ils font face, de l'exclusion qu'ils subissent et du rôle joué par la désinformation, mais j'aimerais également parler de la joie et de la nécessité de cette communauté qui aspire à se faire comprendre. Il s'agit d'une communauté qui encourage la coopération et le respect. Je crois qu'elle contribue à un sentiment de sécurité et réduit considérablement la probabilité d'actes de violence.
    Je vais commencer par revenir en arrière. Lorsque j'étais au secondaire, j'ai formé une alliance portant sur le genre et la sexualité pour discuter de questions queers, mais également pour créer un espace destiné à la communauté queer de mon école secondaire catholique. J'étais au courant des innombrables incidents d'intimidation et j'ai entendu les gens parler négativement des jeunes transgenres de manière générale. J'ai été à même de constater à quel point ce groupe a changé la vie des jeunes gais et transgenres, y compris la mienne. Le simple fait d'avoir un espace qui permet aux jeunes queers d'être eux-mêmes, sans avoir à dissimuler leur identité, tout en étant en contact avec leurs pairs et des adultes qui comprennent ou qui cherchent à comprendre, est essentiel, à mon avis, à la réussite des jeunes queers.
    En 2015, l'ancienne première ministre, Kathleen Wynne, a présenté un nouveau programme d'éducation sexuelle. Ce nouveau programme est devenu incroyablement controversé à Oakville, en Ontario. Une réunion d'une commission scolaire me vient en tête: une solide campagne de désinformation avait convaincu de nombreuses personnes que le nouveau programme était très loin de la réalité. Cette désinformation avait suscité la haine de dizaines de personnes qui avaient manifesté contre la réunion de la commission scolaire, et la police avait été appelée.
    Depuis 2021, je travaille comme conseiller de camp pour des groupes de jeunes âgés de 15 à 17 ans au camp Ten Oaks. Il s'agit d'un camp d'été en Ontario pour les jeunes d'identités, de familles et de communautés 2ELGBTQ+. Les séances du camp offrent un endroit sécuritaire pour les campeurs de toute l'Amérique du Nord afin qu'ils puissent nouer des relations avec leurs pairs ayant vécu des expériences semblables et apprendre de l'équipe passionnée qui sert de modèles queers, dont les membres ont également vécu une diversité d'expériences. Le directeur général de Ten Oaks Project, Kymani Montgomery, est présent ici aujourd'hui.
    Grâce à des conversations profondément introspectives, des débats ancrés dans la réalité et leur quête d'un avenir prometteur, ces groupes de campeurs m'ont ouvert les yeux sur les difficultés courantes auxquelles les jeunes queers, et plus particulièrement les jeunes transgenres, font face aujourd'hui. Même si bien des exemples me viennent en tête, une conversation avec un campeur m'a marqué. Un campeur plus âgé m'a pris à part et m'a dit de manière claire et passionnée avoir eu énormément de difficulté à sortir du placard au cours des dernières années. Le camp Ten Oaks lui avait donné la confiance nécessaire pour sortir du placard et être exactement lui-même. J'ai eu la chance de voir ce changement se produire chez cette personne.
    Les jeunes queers et transgenres ne méritent pas l'exclusion sociale, la manipulation émotionnelle, la méfiance et les discours transphobes et sexistes auxquels contribuent les chambres d'écho des réseaux sociaux, pas plus que la violence que certains vivent. Je sais que des endroits comme le camp Ten Oaks sont utiles et nécessaires — tout comme l'alliance de mon école secondaire portant sur le genre et la sexualité — car ils suscitent de la joie et du courage.
    En prévision de la réunion d'aujourd'hui, j'ai discuté avec des amis et collègues transgenres qui ont soulevé un point commun: les endroits queers comme le camp Ten Oaks étaient nécessaires pour leur propre sécurité et leur développement. J'aspire à un avenir où les jeunes queers pourront trouver une communauté accueillante et bienveillante tout autour d'eux, mais, bien entendu, cela ne se produira pas du jour au lendemain.
    Selon mon expérience avec les jeunes queers, créer des espaces sécuritaires pour leur permettre d'être eux-mêmes et pour s'attaquer à la désinformation véhiculée par les chambres d'écho des réseaux sociaux ou autres est important pour lutter contre l'exclusion, l'intimidation, la haine et la violence. Tenir compte des réalités auxquelles font face les personnes transgenres, et plus particulièrement les personnes transgenres de couleur, contribuera absolument à une société canadienne plus sécuritaire et solidaire.
    Enfin, l'apprentissage n'est pas seulement la responsabilité des personnes hétérosexuelles cisgenres ou des personnes hétérosexuelles. Les personnes queers ont aussi la responsabilité d'en apprendre davantage au sujet des membres de leur propre communauté. Chacun d'entre nous est humain. Nous ressentons tous le bonheur, la peur et la douleur. Je crois sincèrement qu'il est essentiel pour les jeunes queers de chercher à les comprendre plutôt que de simplement les tolérer ou les accepter.
    Merci.
    Merci, monsieur Wisner.
    Les prochains intervenants sont M. Breault et Mme Baker.

[Français]

     Vous avez la parole pour cinq minutes.

[Traduction]

    Avant de commencer, pouvez-vous s'il vous plaît soulever votre micro pour qu'il se trouve entre votre nez et votre bouche?
    Merci.
(1110)

[Français]

    Bonjour à tous les parlementaires et partenaires. Je vous remercie de nous recevoir.
    Je suis Laurent Breault, directeur général de la Fondation Émergence. Je suis accompagné de ma collègue Olivia Baker, formatrice et spécialiste contenu, pour représenter la Fondation Émergence.
    La Fondation Émergence est un organisme à but non lucratif qui vise à informer et éduquer le grand public sur les réalités LGBTQ+, de même qu'à le sensibiliser à cet égard. Notre expertise réside dans les services de formation, d'accompagnement des entreprises et de production d'outils de sensibilisation. En plus d'essayer de rendre les milieux du travail, des aînés et de la proche aidance plus inclusifs, nous agissons également contre les thérapies de conversion et la cyberintimidation.
    En outre, nous organisons chaque année une campagne de sensibilisation qui a lieu le 17 mai, lors de la Journée internationale contre l'homophobie et la transphobie, que la Fondation a lancée pour la première fois au monde en 2003. En 2024, nous avons choisi comme thème « La montée de la haine envers les personnes LGBTQ+ », ce choix reposant sur les tendances que nous avons remarquées. Mentionnons, par exemple, les statistiques sur l'augmentation des crimes haineux au Canada, la haine en ligne et la désinformation de plus en plus présentes, la hausse importante des messages haineux que reçoivent nos partenaires corporatifs quand ils font des publications en lien avec la diversité sexuelle et de genre, les manifestations et les actes de vandalisme anti-LGBTQ+, ainsi que l'attitude et les commentaires de certaines personnes qui émettent pendant nos formations des opinions basées sur de la désinformation, comme ce fameux canular sur les litières, ou qui démontrent une certaine hostilité à l'égard du sujet.
    Aujourd'hui, nous aimerons vous faire part de deux réflexions sur le sujet.
    Notre premier point est illustré dans notre slogan de campagne: « Lorsque les droits des personnes LGBTQ+ reculent, c'est toute la société qui revient en arrière ». Cette montée de la haine et le recul des droits LGBTQ+ ne sont pas à considérer de façon isolée, mais comme un symptôme d'une tendance plus générale et inquiétante pour l'ensemble de la société.
    On dit souvent que les communautés LGBTQ+ ne représentent qu'une minorité de la population, et c'est vrai. On parle généralement d'un peu plus d'un dixième de la population. Cependant, les violences anti-LGBTQ+ peuvent également toucher d'autres segments de la population, comme les personnes qui sont perçues comme étant LGBTQ+, par exemple ce jeune garçon qu'on considère comme efféminé et qui se fait intimider à l'école, ou la femme cisgenre considérée trop masculine et victime de transphobie, ou encore les familles et amis des personnes LGBTQ+, comme les enfants de couples homoparentaux.
     Il faudrait noter que, selon un sondage réalisé par la firme Léger en 2024, 45 % des personnes au Canada ont des proches LGBTQ+. Ajoutons à cela toutes les autres communautés marginalisées, car les LGTBQ-phobies ouvrent la porte à d'autres types de violence et peuvent créer des précédents dangereux.
     Notre deuxième point est que cette violence ne vient pas de nulle part. On peut voir cela comme un retour du balancier après une avancée remarquable des droits LGBTQ+ dans les dernières décennies. En effet, un pic de violence suit souvent les grandes avancées des droits de la personne. Je ne peux pas m'empêcher de penser ici au massacre de Polytechnique du 6 décembre ou encore à la croissance du mouvement masculiniste, qui exemplifie si bien la réaction négative aux luttes féministes en ce moment.
    La violence anti-LGBTQ+ est aussi le fruit de discours anti-LGBTQ+. À ce sujet, je voudrais vous faire part du concept de discours dangereux. Le discours dangereux est défini par le Dangerous Speech Project comme étant toute forme d'expression, comme des discours ou des images, qui augmente le risque qu'un auditoire cautionne ou commette de la violence envers les membres d'un groupe donné.
    Plusieurs éléments permettent d'identifier ce genre de discours dangereux, notamment des éléments de rhétorique que l'on retrouve souvent dans les discours anti-LGBTQ+ et dont voici quelques exemples: la déshumanisation; le fait de présenter le groupe visé comme une menace pour l'intégrité ou la pureté du groupe, notamment l'idée que les personnes LGBTQ+ recrutent ou mêlent les jeunes; le fait d'accuser ce groupe d'attaque contre les femmes et les filles, notamment par des accusations de manipulation psychologique envers les communautés LGBTQ+, ou d'une peur que les femmes trans s'attaquent aux femmes cisgenres.
    Le groupe Dangerous Speech Project a d'ailleurs produit un document sur l'utilisation de discours dangereux anti-trans dans le cadre des élections américaines de 2024. Toutefois, on sait que le Québec et le Canada…
(1115)

[Traduction]

    Madame Baker, pouvez-vous conclure, s'il vous plaît? Vos cinq minutes sont écoulées.

[Français]

    D'accord.
    On observe une augmentation du discours haineux aussi au Canada. En effet, 34 % des Canadiennes et des Canadiens pensent que les discours haineux envers les communautés LGBTQ+ ont augmenté au Canada au cours des trois dernières années.
    Parmi les solutions que nous voudrions mettre de l'avant, en accord avec les recommandations du Dangerous Speech Project, se trouve la sensibilisation, à la fois de façon préventive et en réaction à la haine et à la désinformation. En effet, il est plus facile d'apporter de l'information que de défaire la désinformation.
    Je vous remercie de votre attention.

[Traduction]

    Nous allons maintenant passer à Lauren Pragg. Vous avez cinq minutes.
    Bonjour. Merci à vous, madame la présidente, aux membres du Comité et aux autres témoins.
    Je vous remercie de m'offrir la possibilité de venir vous parler aujourd'hui, et j'aimerais remercier le Comité d'entreprendre cette étude importante.
    Mon nom est Lauren Pragg, j'utilise des pronoms neutres et je suis le directeur exécutif de la LGBT YouthLine. La YouthLine est une organisation antiraciste dirigée par des jeunes qui se consacre à soutenir les jeunes 2ELGBTQI+ de 29 ans et moins partout en Ontario, grâce au soutien des pairs, à des ressources, à des formations complètes, à la défense des droits et à des aiguillages.
    YouthLine a vu le jour en 1993 en tant que solution communautaire visant à offrir du soutien aux jeunes 2ELGBTQ+ qui avaient besoin de parler avec quelqu'un qui comprenait ce qu'ils vivaient. Même il y a 30 ans, les fondateurs de l'organisme reconnaissaient la nécessité d'offrir du soutien à l'extérieur des grandes villes; nous avons donc comme objectif d'avoir une présence dans les communautés rurales, éloignées et mal desservies de l'Ontario et, parfois, du Canada, pour nous assurer que, même dans les régions où les services se font rares, les jeunes ont accès à du soutien.
    Chez YouthLine, nous travaillons en première ligne six jours par semaine et nous entrons en contact avec environ 3 000 jeunes queers et transgenres par année. Grâce à notre ligne d'écoute, les pairs offrent un soutien à titre bénévole aux jeunes qui font face à de vrais problèmes pressants, y compris la discrimination et la marginalisation dans leur école, au sein de leur famille et dans les systèmes de soins de santé. Ces conversations leur offrent des points de vue modérés sur la manière dont les politiques et l'inaction contribuent directement aux obstacles et aux expériences douloureuses qui façonnent la vie des jeunes queers.
    Chez YouthLine, nous effectuons ce travail tout en vivant ses répercussions, car le personnel et les bénévoles sont eux-mêmes des jeunes et des adultes 2ELGBTQ+ qui travaillent sans relâche pour créer des espaces sécuritaires et valorisants. Notre expérience nous a appris que les jeunes savent qui ils sont et ont une bonne idée de la façon dont ils pourraient s'identifier. Toutefois, nous constatons, surtout en raison de la montée du discours sur les droits parentaux, que les jeunes doivent composer avec la possibilité que l'école ne soit pas sécuritaire pour eux alors qu'ils ne sont peut-être pas non plus en sécurité à la maison.
    Lorsque les utilisateurs de nos services nous demandent si les écoles révéleront leur identité à leur famille, nous ne pouvons leur donner une réponse définitive ou les rassurer en raison des grandes différences non seulement entre les politiques, mais également entre les manières d'appliquer les politiques et les lois.
    En vérité, il y a toujours un risque de voir son identité révélée, sans égard aux politiques. Pour les utilisateurs de nos services, cela veut dire que nous ne pouvons pas leur garantir qu'ils ne seront pas en danger s'ils décident de sortir du placard. Même si les commissions scolaires sont inclusives en théorie, les politiques de sécurité ne sont pas appliquées dans les écoles. Les étudiants queers et transgenres font face quotidiennement à de l'homophobie, à de la transphobie et à du harcèlement de la part de leurs pairs et parfois des adultes dans leur école.
    Un utilisateur de nos services nous a dit qu'il se fait constamment regarder de travers ou harceler dans les vestiaires et les toilettes. Cette personne et ses amis sont constamment la cible de remarques à l'heure du dîner ou se font carrément lancer des insultes. Cette personne et un autre étudiant ont parlé à la directrice des étudiants en question, mais elle n'est pas allée leur parler.
    Nous avons également entendu parler d'actes de harcèlement de la part du personnel scolaire. Un autre utilisateur nous a parlé d'un membre du personnel qui va dans ses autres cours et révèle son identité à tout le monde; il semble qu'elle le mégenre intentionnellement, ce qui le fait sentir comme un vrai raté et lui donne envie de pleurer. Il en a parlé à son directeur adjoint, mais la situation n'a toujours pas cessé.
    Nous avons aussi des utilisateurs dont les parents ont été radicalisés par l'extrême droite et ont adhéré à des opinions qui reflètent celles de personnalités populaires comme Donald Trump, Elon Musk et Jordan Peterson. Les parents de certains des utilisateurs de nos services s'opposent aux prétendus « programmes idéologiques de la gauche » et croient que les écoles « rendent » les enfants transgenres, mais pour ces jeunes, l'école est en fait le seul endroit sécuritaire où ils peuvent être eux-mêmes.
    La violence anti-2ELGBTQ+ touche également les étudiants qui ne sont pas sortis du placard. Depuis que le confinement a pris fin, nous avons remarqué que les jeunes ont de la difficulté à se faire et à garder des amis, et bon nombre de nos utilisateurs ont l'impression qu'ils n'ont d'autre choix que d'endurer des amis homophobes ou de rester seuls.
    Mis à part la situation des écoles, des manifestations comme 1 Million March for Children et la montée de la transphobie de manière générale font en sorte, à tout le moins, que les personnes transgenres craignent pour leur sécurité et, dans le pire des cas, que les membres de notre communauté se sentent complètement désespérés d'être queer ou transgenre. Les jeunes ont également parlé du fait que la haine profonde à laquelle ils font face les a poussés à se replier sur eux-mêmes.
    Le mois de novembre a été le plus occupé de l'année; plus particulièrement, le lendemain des élections américaines a été l'une des journées les plus occupées de l'année. Tous les utilisateurs qui nous ont fait part de leur genre étaient transgenres, en questionnement ou des femmes cisgenres. Tous les utilisateurs qui nous ont fait part de leur âge avaient 18 ans ou moins.
    En une semaine, dans la moitié des discussions qui portaient sur les élections, on a parlé explicitement du fait que les élections faisaient craindre pour les droits des personnes transgenres ou l'adoption de lois contre elles. Le soir suivant les élections, dans la moitié des discussions où l'on parlait des élections, il s'agissait d'utilisateurs des autres provinces qui craignaient l'incidence que les élections américaines pourraient avoir sur leurs propres droits. Les utilisateurs provenaient dans certains cas de provinces ayant privé les jeunes transgenres de leurs droits, comme l'Alberta, et ils ont exprimé un profond désespoir. Un utilisateur avait l'impression qu'il devait quitter sa province parce qu'il ne sentait vraiment pas en sécurité; il avait l'impression qu'il n'y aurait jamais sa place.
(1120)
    La campagne de sensibilisation récente de YouthLine, Write for Student Rights, était axée sur la sécurité et l'inclusion à l'école des jeunes 2ELGBTQ+ de l'Ontario. La campagne a été mise sur pied en réponse aux lois anti-trans des autres provinces et aux manifestations récentes contre les personnes transgenres à l'échelle du pays. La campagne était également motivée par les commentaires faits par le premier ministre Doug Ford aux médias...
    Lauren Pragg, il vous reste 30 secondes. Je vous prie de conclure.
    Merci.
    Les commentaires faits aux médias par le premier ministre Doug Ford et l'ancien ministre de l'Éducation, Stephen Lecce, à l'automne 2022, laissaient croire qu'ils étaient d'accord avec les changements de politiques dans les autres provinces, ce qui nous ramène à la discussion en cours au Comité au sujet de l'utilisation de la disposition de dérogation.
    La dernière chose que je vais vous dire maintenant, c'est que je veux être claire: les personnes queers et les personnes transgenres sont partout. Ce sont nos voisins, nos amis, les membres de notre famille et de nos collectivités. Aucun problème social ou politique ne demeure séparé de nos communautés et de nos préoccupations très réelles concernant la transphobie et l'homophobie… ni la souveraineté autochtone ici ou à l'étranger, ni la pauvreté, ni l'éducation, ni le logement, ni la crise climatique, ni les soins de santé. J'espère que le Comité gardera cette réalité en tête à mesure que vous procédez à cette étude importante et sérieuse.
    Je suis plus qu'heureuse de répondre à une quelconque de vos questions.
    Encore une fois, merci.
    Merci, Lauren Pragg.
    Nous allons ensuite passer à M. Tyler Boyce.
    Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Bonjour, membres du Comité, et organisations membres du réseau Enchanté qui ont déjà fourni leur témoignage aujourd'hui.
    Mon nom est Tyler Boyce. Je suis le directeur exécutif du réseau Enchanté, l'association nationale du Canada qui regroupe les organisations 2ELGBTQI+. Je suis également un fier homme noir et homosexuel.
    Aujourd'hui, je suis ici pour vous faire part des histoires réelles et des défis auxquels sont confrontées des centaines d'organisations et personnes transgenres et queers dans tout le pays. Je vais commencer par vous faire part d'une vérité malaisante. Les organisations que le réseau Enchanté soutient ne devraient pas exister. Leur existence découle directement des failles dans les systèmes du gouvernement, qui ont laissé les Canadiens membres de la communauté 2ELGBTQI+ sans accès au service des soins de santé, de logement et sans sécurité de base. Pourtant, ces organisations fournissent des services vitaux allant de la prévention du suicide au soutien en matière de santé mentale, en dépit du fait qu'elles ne reçoivent pas suffisamment de financement, qu'elles ne soient pas assez valorisées et qu'aujourd'hui, elles soient de plus en plus menacées.
    La haine anti-genre a eu des répercussions effrayantes dans le secteur des espaces dédiés aux 2ELGBTQI+, menaçant ainsi l'existence même de ces espaces vitaux. Ces répercussions effrayantes ne sont pas abstraites. L'été dernier, une organisation queer à North Bay, en Ontario, m'a appelé. Leur directeur exécutif, un homme transgenre, a ouvert le matin un courriel qui contenait des menaces de mort à son égard. Les extrémistes anti-genres lui ont dit qu'ils allaient le faire passer dans une déchiqueteuse à bois.
    Juste quelques mois après, j'ai parlé avec une mère à Vancouver, et elle m'a dit qu'elle a arrêté de se rendre au groupe local de soutien aux parents des jeunes transgenres de sa collectivité, car elle craignait de se faire suivre jusque chez elle. Elle a expliqué qu'elle faisait des détours pour rentrer chez elle après les réunions, car elle s'inquiétait que les extrémistes anti-genres s'en prennent à elle simplement parce qu'elle cherchait l'appui dont elle avait besoin, en tant que parent.
    Plus tôt cette année, une cyberattaque a été perpétrée contre TransCar+ en Ontario, ce qui les a obligés à interrompre leurs services et à réallouer leurs ressources déjà limitées aux efforts en matière de cybersécurité, au lieu de fournir leurs soins vitaux aux jeunes transgenres. Ces histoires ne sont que quelques exemples qui illustrent comment la haine cible non seulement les individus, mais elle déstabilise également les organisations mêmes qui veillent à la sécurité des Canadiens.
    Pendant ce temps, les ressources pour lutter contre cette crise sont très insuffisantes. Le plan d'action canadien de lutte contre la haine alloue 5,5 % de ses 273,6 millions de dollars aux organisations 2ELGBTQI+. Cela correspond à à peine une fraction de ce dont nous avons besoin. Quand est‑ce que nos représentants élus vont enfin nous allouer les ressources nécessaires qui nous permettront de répondre à ce besoin?
    Le fond de la résilience arc‑en‑ciel du réseau Enchanté a reçu des demandes d'aide totalisant plus de 1,6 million de dollars des organisations queers, en moins de trois semaines. Cependant, nous n'avions que 500 000 $ à distribuer, en raison de l'aide gouvernementale limitée. Pour chaque organisation que nous avons aidée, trois de plus ont été laissées pour compte, et se sont retrouvées vulnérables aux menaces de violence. Si quelque chose arrive à ces organisations qui sont dépourvues de soutien, la responsabilité incombera directement à nos représentants élus, qui n'ont pas pu agir de façon décisive pour l'empêcher.
    Heureusement, le Comité a le pouvoir d'agir. Je vous implore de recommander trois choses. La première, c'est de fournir un nouveau financement élargi afin de veiller à ce que les organisations 2ELGBTQI+ puissent continuer de fournir des soutiens vitaux. La deuxième, c'est de renouveler le soutien du Fonds de la résilience arc‑en‑ciel afin de répondre aux besoins urgents en matière de sécurité. La troisième chose, c'est d'améliorer les systèmes de signalement des crimes haineux, afin que les forces de l'ordre et les autres organismes chargés de la sécurité communautaire puissent être bien équipés pour soutenir nos communautés.
    Il ne s'agit pas d'un luxe, ce sont des choses essentielles, et le coût de l'inaction est dévastateur. Lorsque des organisations comme OUTLoud North Bay ou TransCar+ sont confrontées à des menaces de haine accablantes, cela reflète le grand danger que représente la haine anti-genre. Les organisations 2ELGBTQI+ font leur part du travail, souvent à un coût personnel et financier très élevé. Le moment est venu pour que le gouvernement intervienne et fasse sa part du travail.
    Chers membres du Comité, nous avons un choix: continuer à sous-financer et à négliger les organisations qui sauvent littéralement des vies, ou agir de façon décisive pour la protection des espaces et des personnes qui dépendent de ces organisations. L'avenir n'a pas à être défini par ces répercussions effroyables. Il y a un Canada où les Canadiens transgenres et queers peuvent s'épanouir, où la haine n'est plus tolérée, et où chaque personne, peu importe son identité, a la chance de vivre une vie pleine et sécuritaire, en toute dignité, mais nous pouvons y arriver seulement si vous agissez.
    Merci.
(1125)
    Merci, monsieur Boyce.
    Merci à tous de vos déclarations liminaires. Nous allons maintenant passer à la série de questions.
    Nous allons commencer par Mme Ferreri.
    Vous avez six minutes, madame Ferreri.
    Merci, madame la présidente.
    Bonjour à tous.
    Merci à nos témoins d'être ici.
    J'aimerais commencer par M. Breault.
    Tout à l'heure, vous avez fait référence à vos statistiques. Pouvez-vous faire part au Comité des statistiques que vous avez vues au sujet des crimes de haine qui ont touché votre clientèle?

[Français]

     Me permettez-vous de répondre à la question en français?
    Oui.
    La Fondation Émergence commande annuellement un sondage à la firme Léger pour évaluer l'opinion et la perception des Canadiennes et des Canadiens sur les réalités LGBTQ+. Tous nos sondages sont disponibles sur le site Web de la Fondation. Ce sont 1 500 répondants de partout au Canada qui répondent au sondage. Pour répondre à votre question, on voit que 78 % des Canadiennes et des Canadiens se disent alliés des communautés LGBT. Il y a quand même un écart important.
    En ce qui concerne les crimes haineux, nous nous basons beaucoup sur les données des forces policières. Ce sont des données publiques sur la montée des crimes haineux. Entre 2018 et 2022, il y a eu pratiquement le triple ou le quadruple des crimes haineux envers les personnes des communautés LGBTQ+. Nous utilisons toujours les données officielles. Je ne sais pas si je réponds bien à votre question, mais Mme Baker souhaite peut-être compléter ma réponse.

[Traduction]

    C'est excellent. Merci.
    Beaucoup de témoins se sont présentés pour nous présenter des témoignages puissants. L'une des choses que j'ai vues dans ma propre communauté, c'est que les personnes qui violent leur liberté conditionnelle, et qui violent leur libération sous caution commettent des crimes, et donc la sécurité du public est en péril, surtout pour de nombreuses personnes qui se sentent ou qui sont plus vulnérables.
    J'ai beaucoup d'amis qui ne se sentent plus en sécurité lorsqu'ils marchent dans la rue. Ils n'ont simplement pas l'impression que la priorité a été accordée à la sécurité publique, en raison du système judiciaire et de la mise en liberté sous caution, où les gens sont remis en liberté, comme les récidivistes violents.
    Est‑ce que cela est un problème au sein des collectivités que vous servez?
    N'importe qui est libre de répondre à cette question. J'ai M. Wisner et M. Boyce dans la salle, mais n'importe qui est libre de répondre à cette question.
(1130)

[Français]

    Je voudrais ajouter quelque chose. Les agressions et les crimes haineux ont augmenté de façon assez frappante, de 72 % dans les dernières années. Cela dit, je pense qu'il faut aussi tenir compte de tous les crimes qui ne sont pas signalés et des plaintes qui ne sont pas documentées. Voici un autre chiffre qui peut donner une idée de la situation: 91 % des personnes LGBTQ+ qui ont subi de la violence liée à leur orientation sexuelle ou à leur identité de genre ne l'ont pas signalée à la police. Quand on parle de ces chiffres, il faut donc se rappeler que ce n'est vraiment que la pointe de l'iceberg.

[Traduction]

    Je suis d'accord.
    L'une des choses que nous avons remarquées dans le cadre de nos études portant sur la violence entre partenaires intimes et qui ressortaient des témoignages des témoins, c'est qu'en l'absence de conséquences, rien n'arrête les personnes haineuses, les mauvaises personnes ou les criminels de refaire ces choses. Je pense que vous avez tout à fait raison de dire que… Je ne sais même pas si toutes ces choses sont signalées, surtout lorsqu'on regarde la violence entre partenaires intimes ou la violence familiale, car beaucoup de personnes ont également honte.
    Monsieur Boyce, on dirait que vous vouliez également dire quelque chose.
    Pour commencer, je suis très reconnaissant de la question.
    J'aimerais rappeler au Comité que ce ne sont pas seulement les criminels violents ou les récidivistes qui commettent ces crimes violents contre les communautés transgenres et queers. Ce qui se passe, c'est que nous vivons une période intense où des personnes sans casier judiciaire, des Canadiens lambda, se font radicaliser et rejoignent des mouvements anti-genres pour une myriade de raisons différentes. J'aimerais vraiment remettre l'accent sur le fait que ce ne sont pas seulement les récidivistes qui commettent ces crimes. Ce sont plutôt des personnes qui se font radicaliser. C'est pour cette raison que ces discussions sont si importantes.
    C'est juste.
    Est‑ce que ces personnes se font inculper? Dans le cas des personnes qui participent à ces mouvements radicaux, de ces crimes dont vous parlez, avez-vous l'impression que justice est rendue? Qu'il s'agisse de récidivistes ou de personnes qui commettent un crime pour la première fois, ou encore que ces crimes soient motivés ou non par la haine, est‑ce que vous pensez que justice est rendue pour les victimes?
    S'il est très important de penser à la justice, j'estime qu'il existe de nombreuses façons d'envisager la chose. L'une de ces façons est, je pense, sous-entendue par votre question, et c'est l'approche punitive de la justice. Je pense qu'il y a d'autres façons d'aborder la justice. C'est pour cela que les discussions comme celles‑ci, le fait d'écouter les témoins qui fournissent des témoignages de la vie réelle, nous permet de comprendre la façon dont les plus grands récits entourant la stigmatisation des personnes transgenres et queers, dont certains ont été répétés à la Chambre des communes, ont des conséquences. Il ne s'agit pas uniquement de punir, mais il importe également que tous nous utilisions nos mots de façon responsable afin d'empêcher que ces crimes ne se produisent.
    Merci beaucoup. Mon temps est écoulé.
    Merci, madame Ferreri.
    Nous allons ensuite passer à M. Serré.
    Vous avez six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci aux témoins d'être ici, et merci de vos témoignages.
    Je vais adresser mes questions à Lauren Pragg.
    Merci de travailler avec YouthLine. C'est très important.
    J'ai juste quelques petites questions. Vous avez mentionné que la ligne est accessible six jours par semaine. Quelles sont les heures ouvrables, et d'où vient votre financement? J'aimerais simplement que vous y répondiez assez brièvement.
    Merci de ces questions.
    Les heures sont de 16 heures à 21 h 30, six jours par semaine. Nous ne sommes pas ouverts le samedi, mais nous le sommes le reste de la semaine. Notre financement provient d'un mélange de subventions du gouvernement parfois, et de subventions d'organismes privés, et nous recevons aussi un excellent soutien communautaire de diverses personnes.
    Merci.
    Il ne fait aucun doute que les services doivent absolument être accessibles 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.
    Pour mes prochaines questions, vous avez mentionné les droits parentaux, et toutes les discussions qui ont lieu en ce moment. J'aimerais avoir votre opinion, car, de toute évidence, lorsqu'on regarde la situation des jeunes 2ELGBTQI+ dans les écoles, c'était un endroit sécuritaire. Or, aujourd'hui, ces jeunes sentent que cet endroit n'est peut-être plus autant sécuritaire. J'ai deux questions pour vous.
    Premièrement, que diriez-vous aux parents qui nous écoutent aujourd'hui?
    Deuxièmement, où les jeunes vont‑ils trouver un endroit sécuritaire aujourd'hui, si les écoles ne le sont plus?
(1135)
    Merci. Ce sont deux questions excellentes.
    Je vais commencer par répondre à la deuxième question. Le fait de demander où les jeunes vont aller, c'est une excellente question. Comme je l'ai mentionné, il arrive que les jeunes doivent faire des exceptions, et doivent demeurer dans des groupes d'amis, ou dans différents types de relations, qui ne les soutiennent pas vraiment, selon eux, donc leurs options sont très limitées. Je pense également que nos communautés choisissent d'aller en ligne une grande partie du temps. Il s'agit d'un espace très important pour nos communautés.
    Comme nous le savons, il y a énormément de mésinformation et de désinformation en ligne. Les algorithmes des réseaux sociaux contribuent à faire augmenter les tendances dangereuses, et peuvent vraiment avoir un impact sur la santé mentale. Je dirais que ce n'est pas beau. Il nous faut plus de financement et plus d'espaces sécuritaires. Les espaces qui existent doivent former des personnes afin qu'elles soient d'un plus grand soutien, qu'elles soient plus accueillantes et plus inclusives.
    Pour ce qui est de ce que j'aimerais dire aux parents, il y a beaucoup de choses que j'aimerais leur dire. Je pense que, pour l'instant, je dirais que je comprends la peur des parents. Je peux comprendre que les parents se sentent perdus. De ce que j'ai entendu dans les discussions précédentes au Comité, c'est que nous voulons ouvrir un dialogue, si nous voulons aider les gens à comprendre.
    Si les choses sont présentées d'une façon extrême, avec très peu de faits et d'information, elles peuvent être très différentes, très nouvelles et très effrayantes pour les parents. Donnez à vos enfants l'occasion de parler pour eux-mêmes. Offrez votre bienveillance et votre empathie, et soyez ouverts à apprendre vous-mêmes. Ce sont toujours les mêmes enfants, et les mêmes jeunes que vous avez toujours connus, et qui ont toujours fait partie de votre vie. Ils ont besoin de soutien pour affirmer qui ils sont, pour prendre la parole, et pour être eux-mêmes. Sans cet espace, des choses très dangereuses peuvent arriver, comme nous l'avons vu. Sans soutien à la maison, un plus grand nombre de jeunes se retrouvent dans la rue, consomment des substances et se retrouvent dans des relations violentes et ainsi de suite, parce que les gens cherchent un endroit où aller. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, il n'y a pas beaucoup d'options.
    Je demanderais que les parents viennent à la table avec l'esprit ouvert et avec empathie. J'espère que d'autres organisations qui effectuent ce genre de travail et moi-même pourrons aider à fournir cette information et à créer un dialogue.
    Merci.
    Merci, Lauren Pragg. Mon temps est limité.
    Monsieur Boyce, merci d'avoir parlé des problèmes à North Bay dans votre témoignage. Mon neveu, mon filleul, Jenna Seppa, vit à West Nipissing, juste à côté de North Bay. Il ressent les menaces visant les jeunes queers. Il est drag queen, et je suis très fier de lui.
    Vous avez parlé de la radicalisation en ligne. Avez-vous des recommandations pour ce qui est des algorithmes des réseaux sociaux et des robots? Que recommanderiez-vous au gouvernement fédéral de faire? Ce sont ces entreprises comme Twitter, qui appartient à Elon Musk. Je dis que Twitter « un puits de haine ». Que devrait faire le gouvernement à ce chapitre?
    Merci de la question.
    Je crois que c'est très difficile, parce que nous devons équilibrer nos libertés civiles avec ce qui est juste et ce qui permet d'assurer la sécurité des utilisateurs d'Internet. Je peux vous dire ce que nous avons observé dans notre travail: lorsque des sauvages vont en ligne et qu'il n'y a pas de rempart pour protéger les jeunes queer et trans, la haine a des répercussions dans la vraie vie. Dans ma déclaration, j'ai parlé de la manière dont les gens sont radicalisés jusqu'à l'extrémisme, des mouvements anti-genres et du fait qu'une grande partie de cela se fait en ligne. Nous savons qu'environ un tiers de la génération Z s'identifie comme faisant partie de la communauté 2ELGBTQQIA+. Nous savons aussi que les membres de cette génération, les leaders de demain, passent une grande partie de leur jeunesse en ligne.
    Je recommanderais au gouvernement de trouver un équilibre entre nos libertés civiles en ligne, d'une part, et la prévention des crimes haineux en ligne et des conséquences dans le monde réel, d'autre part. Prenez en considération l'expérience vécue des jeunes queers et trans qui subissent les répercussions des activités sur Internet. Le gouvernement doit participer à ces discussions.
(1140)
    Merci, monsieur Serré.
    Madame Larouche, c'est à vous.
    Vous avez six minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, madame la présidente.
     Je tiens d'abord à remercier les cinq témoins d'être des nôtres aujourd'hui dans le cadre de cette étude qui se déroule dans un climat plutôt trouble et incertain. En effet, les statistiques de la montée de la haine envers les communautés sont frappantes, et elles font suite à une étude sur la hausse des féminicides. On voit que tout peut être lié, en quelque sorte, et c'est extrêmement préoccupant.
    Je débuterai mon premier tour avec les représentants de la Fondation Émergence.
    Monsieur Breault, je reviendrai à vous après avoir posé ma question à Mme Baker.
     Madame Baker, vous avez terminé rapidement vos remarques préliminaires en parlant du Dangerous Speech Project. J'aimerais vous permettre, en une minute ou deux, d'ajouter quelques éléments que vous n'auriez pas eu le temps de préciser à la fin de votre allocution d'ouverture.
    En fait, il ne me restait pas grand-chose à dire. J'ajouterais toutefois que je trouve la notion de discours dangereux très intéressante. Il ne s'agit pas seulement de parler de discours haineux, mais de vraiment s'intéresser aux conséquences de ce type de discours et de rhétorique.
    Mon collègue M. Boyce a parlé des réseaux sociaux comme étant un environnement où tout est permis, mais ce type de discours se propage parfois aussi par le truchement de communications publiques, comme des chroniques, des livres ou des reportages diffusés dans des médias qui sont peut-être plus importants, qui peignent des soins de transition ou de la place des personnes LGBTQ+ un portrait alarmiste et affichant un parti pris.
    Pendant les formations, certaines personnes me disent qu'elles ont lu telle chose dans le journal, alors que ce n'est pas basé sur des faits avérés. Il devient difficile de démentir quelque chose qui provient d'une chronique ou d'un reportage qu'on a vu dans des médias qu'on pourrait qualifier de plus sérieux, plutôt que lorsque ça provient seulement d'une publication Facebook.
    D'autres témoins ont fait le lien entre les élections américaines et le climat observé au cours de la dernière année. Quelqu'un a-t-il des commentaires?
    Je reviens d'une mission à Genève, où j'ai notamment rencontré les représentants canadiens auprès de l'ONU.
    Tous les signaux sont au rouge pour ce qui est des droits des personnes LGBT sur toute la planète. Il est certain qu'avec les changements à la composition de la Cour suprême des États‑Unis, qui favorisent une mouvance de droite, ça envoie un signal à l'échelle mondiale que les droits des personnes LGBT sont maintenant des cibles plus faciles.
    On constate les reculs un peu partout. Le Canada n'est pas à l'extérieur du monde et ce qui se passe aux États‑Unis finit, au fil des ans, par arriver ici. En ce moment, aux États‑Unis, le débat est très chaud, très compliqué et très complexe. D'un État à l'autre, on voit des différences importantes. D'ailleurs, si on superpose la carte des États américains qui subissent des reculs à la carte actuelle des États‑Unis, on voit que ce sont les États où il y avait déjà très peu de droits ou de protections pour les communautés LGBT qui régressent davantage. C'est un phénomène qui est mondial, et on le sent venir ici.
    C'est très intéressant.
    Un autre sujet que vous avez abordé dans vos remarques préliminaires est celui des thérapies de conversion. Je sais que c'est un dossier qui vous tient énormément à cœur. Le fédéral a adopté une loi pour interdire ces thérapies et, pour donner suite à cette loi et voir comment ça se passait, vous avez même tenu un colloque sur ces thérapies en début d'année. J'aimerais que vous reveniez sur vos constats. On se rend compte qu'il est encore très facile de contourner la loi, surtout pour des groupes religieux. Est-ce que je me trompe? Est-ce que ce sont bien les premiers constats?
    Vous avez tout à fait raison. Je vous remercie d'aborder le sujet. Nous sommes très fiers du fait que le Canada est un des 11 pays ou États qui ont interdit, au criminel, les thérapies de conversion. Ce dont nous nous rendons compte sur le terrain, c'est que très peu de gens savent ce que sont les thérapies de conversion, qu'il s'agisse des intervenants, des forces de l'ordre, du milieu de la santé ou du milieu scolaire. Même dans nos rencontres sur le terrain, il y a une grande confusion au sein de la population, qui croit que les thérapies de conversion sont plutôt des thérapies d'affirmation, c'est-à-dire pour devenir gai, lesbienne ou trans. Nous effectuons donc un travail non négligeable de sensibilisation et d'information sur ces thérapies.
     Par ailleurs, ce n'est pas parce qu'on a interdit les thérapies de conversion qu'il n'y a plus de travail à faire. Nous constatons plusieurs défis, car les thérapies ont pris d'autres formes, elles sont encore plus cachées et plus insidieuses, et elles ont toujours cours. Par exemple, deux journalistes de l'ancien journal Métroont infiltré des églises à Montréal et ont pu très rapidement obtenir un service de thérapie de conversion. Par ailleurs, selon tout ce qu'on connaît de la « télémédecine », les thérapies se déplacent ailleurs et s'offrent de façon virtuelle, souvent à partir des États‑Unis. C'est donc là où nous en sommes pour ce qui est des thérapies de conversion.
    Pour terminer sur ce point, nous avons besoin d'aide pour trouver des victimes. Je m'explique. La nature même des thérapies de conversion fait que les victimes sont souvent aux prises avec leur entourage, qui est « complice » de la thérapie de conversion. Il est donc très difficile pour les victimes, qui ont été encouragées par leur entourage à suivre une thérapie de conversion, de les dénoncer. Nous avons donc un problème d'accès aux victimes, étant donné la complexité des thérapies de conversion.
(1145)

[Traduction]

    C'est maintenant au tour de Mme Gazan.
    Allez‑y, vous avez six minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je suis désolée de ne pas être parmi vous, en personne, aujourd'hui.
    Je tiens à remercier tous les témoins d'être ici.
    Je veux parler de la radicalisation de l'extrême droite, et en particulier de Jordan Peterson. J'ai entendu dire qu'il a déménagé aux États-Unis. Bon débarras. Il soutient des choses comme la One million man march. Ce qui est préoccupant avec Jordan Peterson, c'est que le chef conservateur fraternise activement avec lui et le soutient. Ce que je crains — et j'essaie de rester le plus neutre possible, au Comité —, c'est, comme l'un des témoins l'a mentionné, une autre attaque comme celle de Polytechnique, mais cette fois‑ci, contre la communauté 2ELGBTQQIA+ du Canada.
    Je crois que c'est Mme Baker qui en a parlé.
    Je vais vous donner quelques exemples. Le chef actuel, Pierre Poilievre, a fait une apparition sur la chaîne YouTube de Jordan Peterson, le 16 mai 2022, pour parler de la liberté.
    Jordan Peterson a récemment écrit un article, le 29 février 2024, intitulé: « Jordan Peterson: The awe-inspiring conservative counter-offensive against woke nonsense », c'est‑à‑dire le combat inspirant des conservateurs contre l'absurdité du wokisme, et c'est un discours que nous devons entendre. Les soins d'affirmation de genre sont maintenant une « absurdité du wokisme », et le droit des personnes 2ELGBTQQIA+ d'avoir accès à une toilette sécuritaire est maintenant une « absurdité du wokisme ». C'est ce qui est écrit dans le National Post. Ce sont seulement quelques exemples.
    Nous savons que la bêtise de l'extrême droite a augmenté depuis la pandémie. J'ai dit récemment, dans un documentaire national, qu'il y a, je crois, des gens qui souffrent réellement d'un problème de santé mentale, et que ces mouvements d'extrême droite les aspirent dans des mouvements anti-genres qui représentent un risque de violence.
    Je vais commencer par vous, Lauren Pragg. Pourquoi est‑ce dangereux? Pourquoi la communauté 2ELGBTQQIA+ est-elle en danger lorsque des leaders politiques fraternisent avec des personnes qui tiennent des discours haineux?
(1150)
    Merci beaucoup de la question.
    Je crois que, au final, c'est parce que cela légitime ces positions. Les gens qui essaient de prendre des décisions politiques informées pensent alors que ce sont des options viables et des affirmations légitimes. Je vous suggère de lire le livre de Naomi Klein, Doppelganger. Il explique de manière détaillée comment la pandémie a contribué à la mésinformation et à la désinformation et quel genre de radicalisation en a découlé.
    L'autre chose, c'est que l'objectif de certaines de ces campagnes est de trouver un bouc émissaire. Nous le savons. Nous le voyons. Nous en avons déjà parlé au Comité. Je crois que nous devons demander plus. Quel est le but? Pourquoi les personnalités de l'extrême droite essaient-elles de faire de notre communauté un bouc émissaire? C'est pour semer la division. C'est pour avoir le contrôle. C'est pour limiter de plus en plus notre liberté, même s'ils parlent en long et en large de la liberté.
    Je crois que c'est le risque.
    Je suis totalement d'accord. C'est un peu comme réclamer la liberté pour nous, mais non pour vous. Je l'ai déjà dit très souvent.
    J'aimerais maintenant passer à Mme Baker.
    Vous avez parlé de Polytechnique. Cela me glace le sang. C'est l'une des raisons pour lesquelles j'ai soutenu l'étude. Vous avez dit que vous essayez de définir les discours dangereux. Certains disent que la liberté d'expression est « woke », mais parlons des discours dangereux. Je crois que ce qui se produit... même avec les pétitions des conservateurs contre les femmes et les filles, qui disent la sécurité des femmes et des enfants est menacée par les femmes trans qui utilisent les toilettes adaptées à leur genre. Selon moi, c'est un discours dangereux, parce qu'il n'est pas fondé sur les faits.
    Vous avez dit que le discours dangereux est toute forme de discours qui cautionne ou encourage la violence contre la communauté 2ELGBTQQIA+. Ces discours visent à recruter et à attaquer. Vous avez parlé précisément des toilettes. Comment la rhétorique actuelle...?
    Je prends mon rôle de députée très au sérieux. Je sais que ce que je dis a des répercussions qui peuvent être positives ou négatives. De quelle manière le discours politique enhardit‑il l'extrême droite et expose‑t‑il la communauté 2ELGBTQQIA+ à des risques?

[Français]

     J'aimerais dire deux choses à ce sujet
    Premièrement, j'ai parlé de Polytechnique, mais j'aurais aussi pu parler de l'événement survenu à l'Université de Waterloo, lorsqu'une personne qui avait ce motif a poignardé un professeur qui enseignait la théorie du genre. En tant que formateurs au sein de la Fondation, nous nous sommes d'ailleurs demandé si nous aussi étions en danger lorsque nous donnions des formations. Je me suis demandé si j'allais être la prochaine personne à être poignardée parce que je parle de la « théorie du genre ». Les guillemets sont un peu sarcastiques.
    Deuxièmement, en ce qui concerne le discours dangereux, je trouve vraiment intéressant le fait qu'on a créé ce concept en étudiant les discours qui ont été faits avant des actes de violence comme des génocides, des guerres, et ainsi de suite. Qu'est-ce qui permet aux êtres humains de passer à l'acte ou d'être d'accord avec certains types de violence?
    Lorsqu'on fait peur à quelqu'un en lui disant que des membres de la communauté LGBTQ+ vont venir chercher ses enfants, c'est un argument qui va causer beaucoup de violence. En effet, si un parent pense que la sécurité de ses enfants est à risque, il se permettra beaucoup plus de recourir à la violence. Ce genre de menace mobilise beaucoup les gens, mais ça peut aussi être des caricatures. On a vu beaucoup de caricatures de femmes trans dans des toilettes pour femmes, décrites comme étant des prédateurs sexuels. Ce sont des éléments de rhétorique qui deviennent dangereux parce qu'ils donnent la permission de se défendre contre une menace.

[Traduction]

    Merci, madame Gazan.
    Merci beaucoup.
    Nous commençons la prochaine période avec Mme Roberts.
    Vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci aux témoins.
    Pour commencer, je vais vous demander si vous avez entendu parler du projet de loi C‑412.
    Non.
    Le projet de loi C‑412 est une solution de rechange au projet de loi C‑63, la Loi sur les préjudices en ligne. Il permettra d'assurer la sécurité des utilisateurs canadiens d'Internet sans porter atteinte à leurs libertés civiles. La loi sur les préjudices en ligne va créer une bureaucratie coûteuse, pour assurer la censure, qui coûterait 200 millions de dollars, selon les estimations du DPB, et serait donc l'une des plus dispendieuses au monde. Le projet de loi C‑412 protège davantage les utilisateurs canadiens d'Internet par l'entremise des règlements existants et du système de justice.
    Je pose cette question parce que je comprends la liberté d'expression. Je la comprends bien. Toutefois, selon ce que nous disent les témoins, nous ne demandons pas des comptes aux gens. Je crois que si vous commettez un crime, vous devez être tenu responsable. Si nous n'empêchons pas les agresseurs de faire du mal aux gens... Je crois que Mme Baker a dit plus tôt que 91 % des personnes 2ELGBTQI+... ne dénoncent pas.
    Comment pouvons-nous bâtir un monde meilleur si nous ne demandons pas des comptes à ces personnes?
    Je vais commencer par M. Boyce.
(1155)
    J'apprécie réellement la question.
    Je vais être plus précis, cette fois‑ci.
    Je suis d'accord que nous devons parler de justice, mais je ne veux pas parler seulement des approches punitives de la justice.
    Je crois qu'une autre approche de la justice est de mettre l'accent sur la prévention. Présentement, il y a un impératif d'éducation publique incontournable au Canada. Peut-être que les Canadiens en général savent ce que c'est d'être gai, bisexuel ou lesbienne, mais, au comité, je crois que l'on a mis l'accent uniquement sur le genre. Cela inclut les communautés trans et non binaires. Je crois que nous ne devrions pas aller trop vite et qu'il faut donner aux Canadiens l'occasion de recevoir une éducation publique de qualité sur les réalités des personnes trans. Faites participer les Canadiens à la discussion avant d'appliquer l'approche punitive. Il y a de nombreuses façons d'aborder la question de la dissuasion.
    Pour finir, je crois que l'éducation doit être la première étape.
    Une des raisons pour laquelle j'ai posé cette question est que, dans mon ancienne vie, une de mes clientes était lesbienne, et elle ne pouvait pas en parler à la maison en raison des croyances culturelles. Elle devait donc toujours faire très attention et elle avait peur des conséquences, même à la maison.
    Vous avez parlé d'éducation. Comment pouvons-nous éduquer les nouveaux arrivants, au Canada, et leur montrer que cela est accepté et bien accueilli, ici, et qu'ils ne doivent pas insulter ou blesser ces personnes, ou encourager la violence envers ces personnes?
    Comment pouvons-nous le faire?
    C'est une excellente façon de voir les choses. Je crois que nous avons tous deux une approche empathique et bienveillante.
    Je vais moi aussi vous raconter une histoire. Je fais du bénévolat dans des résidences pour personnes âgées, simplement pour rencontrer de nouvelles personnes et connaître les opinions d'une génération différente. Il arrive souvent que, lorsque je parle à ces personnes de mon orientation sexuelle, la discussion prend un autre tournant. Toutefois, grâce à ces moments, j'ai de plus en plus espoir et confiance en la bienveillance des Canadiens, qui sont amenés à participer à ces discussions générales sur l'égalité et la justice. J'aurais pu penser, de nombreuses fois: « Cette personne est une mauvaise personne, parce qu'elle ne comprend pas mon orientation sexuelle ou mon identité de genre. » Lorsque je prenais le temps de les écouter, d'être patient et compréhensif avec elles dans leur cheminement — lorsqu'elles étaient à l'aise de poser des questions sur ce que signifie être trans, non binaire ou gai —, je nouais soudainement de nouveaux liens.
    Je vous donne cet exemple parce que ce type de relation personnelle, dans ma vie, pourrait servir de modèle pour la manière dont nous abordons la société canadienne en général.
    Mon temps est limité.
    Je fais moi aussi du bénévolat dans des résidences pour personnes âgées. C'est quelque chose que j'aime beaucoup faire, parce qu'elles sont vraiment sans malice. Je ne crois pas qu'elles jugent les autres. Elles sont rendues à une étape de leur vie où elles sont très tolérantes. Cela me rassure de savoir que nous sommes capables de le comprendre alors que nous prenons de l'âge. Je suis une personne âgée — je ne vais pas mentir, et j'en suis extrêmement fière, parce que je suis encore bien vivante.
    Ce que je veux, à moins que nous soyons capables de garantir la sécurité de tout le monde — que ce soit à la maison ou en public —, c'est qu'il soit possible d'imposer des sanctions, pour protéger les gens. C'est ce qui m'inquiète. Des membres de ma famille sont gais, et ils m'ont parlé des difficultés qu'ils ont vécues dans leurs propres familles. Cela doit changer.
    Lorsque vous parlez d'éducation...
(1200)
    Merci, madame Roberts. Vous avez largement dépassé la limite de temps.
    Je ne peux plus parler?
    Vous pouvez répondre rapidement, en 30 secondes, à Mme Roberts.
    Je n'ai pas entendu la fin de votre question, mais je tiens à dire que je ne crois pas que ce soit une question dichotomique. Ce que j'essaie de dire, c'est qu'il y a un continuum de la justice. À la première étape du continuum, nous devons aller vers les Canadiens avec empathie, bienveillance, en espérant qu'ils pourront participer à la conversation.
    Peut-être que la dernière étape est une approche punitive, mais en ce moment, en 2024, je suis prêt à dire qu'il faut commencer par éduquer le public.
    Merci, monsieur Boyce.
    Madame Damoff, allez‑y, vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci beaucoup à tous les témoins d'être présents aujourd'hui.
    Je vais passer à M. Wisner, si vous le voulez bien.
    J'ai rencontré M. Wisner en 2015; vous veniez d'aller voir la commission scolaire. Vous m'aviez parlé de cette réunion à ce moment‑là. Votre professeur m'a demandé de prendre un café avec vous, parce que vous étiez extrêmement bouleversé par ce qui était arrivé. Je m'en souviens encore, parce que la mère d'un de vos meilleurs amis n'avait pas agi correctement avec vous.
    Pourriez-vous nous parler un peu de vos expériences, où vous avez subi ce niveau de haine?
    Je vais parler un peu plus en détail de cette réunion du conseil d'administration.
    Merci encore, madame Damoff, de m'avoir invité. C'est une occasion incroyable.
    Mon ami et collègue, Joel, a parlé, pendant cette réunion du conseil d'administration, de l'exclusion sociale dont j'ai été victime à l'école primaire, en sixième, septième et huitième années, et j'ai d'ailleurs manqué près de la moitié de la dernière année à cause de cette exclusion. Je craignais mes intimidateurs au point de rester caché dans ma chambre, même si j'étais très impliqué à l'école et que j'adorais apprendre. J'ai assisté à cette réunion du conseil d'administration avec un groupe de jeunes par l'entremise du réseau Espace positif. C'était un comité d'action jeunesse. Mon ami, Joel, qui était l'élève conseiller à ce moment‑là, a raconté mon histoire, qui a suscité beaucoup d'émotions. Je crois que mon histoire a eu un effet percutant pendant la réunion. En raison d'une campagne de désinformation massive — j'ai quelques articles avec moi, et je vais vous en parler plus tard —, de nombreux manifestants remplis de haine nous ont traités de tous les noms imaginables et nous ont attaqués physiquement, et c'est pourquoi nous avons appelé la police.
    Ce genre de violence se voit encore aujourd'hui. Il y a un mois, j'ai reçu une menace de mort. Mes collègues vivent ce genre de choses constamment. Je ne pense pas que cela changera aujourd'hui. Toutefois, comme M. Boyce l'a mentionné, je crois que le temps est venu de travailler ensemble et d'en parler. L'éducation est la première étape.
    Monsieur Wisner, je tiens à vous dire que je suis extrêmement fière de vous, pas seulement aujourd'hui, mais aussi en 2015, lorsque vous m'avez parlé de votre travail et en disant que vous n'abandonneriez pas la partie. Il est évident que vous n'avez toujours pas abandonné. Cela m'attriste de voir que vous devez continuer de lutter contre cela. Je sais que, à ce moment‑là, le Conseil scolaire catholique du district de Halton comptait des fonctionnaires élus qui attisaient la haine.
    Aujourd'hui, il y a une élection partielle en Colombie-Britannique, et la candidate du Parti conservateur, pendant l'élection de 2021, lors d'un débat sur la thérapie de conversion avait cité la Bible et dit que les gais étaient « sales ». Mon collègue, Rob Oliphant, a répliqué qu'il n'était pas sale. Honnêtement, c'était ignoble. Elle cherche aujourd'hui à être réélue, et il est très probable qu'elle soit à nouveau, dès demain, députée à la Chambre des communes. Récemment, un député conservateur a dit dans un balado que, si on lui en donnait l'occasion, il voterait contre le mariage gai.
    Monsieur Wisner, je vais commencer par vous, et M. Boyce pourra également répondre, s'il le souhaite. Quelle incidence ont les commentaires des élus sur la haine à l'égard de la communauté 2ELGBTQI+?
(1205)
    Je vais dire pour commencer que la rhétorique de la « saleté » a également été utilisée pour les personnes de couleur. C'est la même chose.
    C'est exact.
    C'est exactement la même chose, et c'est pourquoi c'est difficile à entendre. C'est très difficile d'entendre cette rhétorique sortir de la bouche de conservateurs et de personnes comme Jordan Peterson. Je vais vous parler de ce que les campeurs m'ont dit. C'est bouleversant. Ils sont terrifiés. Ils n'arrivent pas à comprendre ces discours qu'ils entendent tous les jours. Ces idéologies sont également diffusées sur les réseaux sociaux, et elles entraînent les gens dans des chambres d'écho pleines de haine, dont nous avons parlé deux ou trois fois, aujourd'hui. Cette rhétorique est terrifiante. D'ailleurs, je crois que cela a un lien avec un sujet qui a été abordé plus tôt; à savoir où vont-ils aller?
    Si les écoles ne sont pas sécuritaires, où peuvent-ils aller? Premièrement, bien entendu, ils ne devraient avoir besoin d'aller nulle part, mais ils peuvent aller au camp Ten Oaks. Par exemple, en 2024...
    Monsieur Wisner, s'il vous plaît, essayez de terminer en 30 secondes.
    ... 309 campeurs ont présenté une demande, même si nous ne pouvons accueillir que 179. Le nombre de demandes a augmenté depuis 2023, où nous avons reçu 287 demandes. C'est un besoin continu qui doit être soutenu.
    Madame la présidente, le témoin a dit qu'il avait quelques articles à présenter.
    Monsieur Wisner, tout document que vous souhaitez présenter au Comité nous sera distribué.
    Merci.
    Bien sûr. J'ai quelques articles sur la désinformation, en particulier sur la réunion du conseil d'administration, et quelques statistiques sur le camp Ten Oaks.
    Madame Larouche, allez‑y, vous avez deux minutes et demie.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Je vais poursuivre la discussion avec les représentants de la Fondation Émergence. Je vais y aller rapidement, parce que, deux minutes et demie, c'est court.
    Je remercie ma collègue Mme Roberts d'avoir abordé la question des personnes âgées. Parmi les nombreux programmes de la Fondation Émergence, il y en a un qui s'appelle Pour que vieillir soit gai. On parle beaucoup de l'importance de sensibiliser les aînés et de travailler en amont avant que des actes à caractère haineux ne soient commis. Dans le cadre de ce programme, on travaille beaucoup sur la prévention.
    Monsieur Breault, vous connaissez bien ce projet. C'est toute la question du financement qui pose problème pour ce type de programme. Avez-vous quelque chose à dire sur l'importance pour le gouvernement de maintenir ces programmes?
    On pense souvent aux réalités de la jeunesse lorsqu'on pense aux droits LGBTQ+, et avec raison. Par contre, il ne faut pas oublier les aînés. Quand on regarde les données démographiques au Canada, on voit qu'il y a pratiquement plus de gens de 65 ans et plus qu'il y en a de 25 ans et moins. Étant donné qu'il y a toujours 10 à 15 % de la population qui est LGBT, on sait qu'il y a donc des aînés LGBT qu'on ne voit pas, qui sont invisibles.
    Le programme Pour que vieillir soit gai n'a malheureusement plus de financement depuis plusieurs années. Le gouvernement fédéral finance très peu les projets et les programmes de sensibilisation et d'éducation auprès des aînés. Pourtant, il y a énormément de travail à faire. Cette population est invisible, malheureusement, car beaucoup d'aînés sont dans le placard. Les milieux de vie des aînés, comme les résidences pour personnes aînées, sont des lieux où il y a encore beaucoup de LGBTQ-phobies, et pas seulement de la part d'aînés envers d'autres aînés. Il y a aussi une incapacité des milieux des intervenants de prévenir l'homophobie et la transphobie et de réagir en situation de problème. Cette situation est généralisée et il y a très peu de ressources, malheureusement, pour rendre ces milieux plus inclusifs.
    Il est important de se rappeler que les aînés ont également besoin d'être considérés.
(1210)

[Traduction]

    Merci, madame Larouche.
    Madame Gazan, allez‑y, vous avez deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    J'aimerais dire que, si je suis aussi directe aujourd'hui, c'est en partie parce que j'espère que l'étude nous permettra, en tant qu'élus, d'améliorer les choses au Canada.
    J'aimerais parler d'un article de blogue écrit par Emily Sams-Harris pour la London School of Economics. Elle a écrit:
... en février 2022, des manifestants d'extrême droite ont occupé Ottawa, la capitale du Canada, sous la bannière du « Convoi de la liberté », et l'indifférence des policiers a alimenté le feu de la rhétorique anti-genres. Le convoi supposément organisé au départ pour protester contre l'obligation vaccinale anti-COVID‑19 imposée par le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux, a rapidement évolué. Il est rapidement devenu évident que les manifestants anti-vaccin et anti-masque reprenaient les discours et les cris de ralliement anti-genres tout en prétendant défendre la [soi-disant] « liberté ». Pendant plus de trois semaines, les occupants ont employé des tactiques agressives et menaçantes, y compris en interpellant les piétons qu'ils croyaient être pro‑masques et pro‑vaccins, en particulier les femmes, les personnes noires, les personnes autochtones, les personnes de couleur et les personnes queers et trans. Les insultes transphobes n'étaient pas rares.
    J'aimerais également dire que cela s'est produit dans le cadre de la campagne « Chaque enfant compte », quand la Société du chandail orange s'est opposée au convoi et a demandé à ce qu'il cesse ses activités.
    Lauren Pragg, je reviens à vous. Avec la montée de l'extrême droite, au Canada, que pouvons-nous faire, en tant qu'élus, pour nous assurer de ne pas contribuer à ce mouvement? Que devons-nous faire, en tant qu'élus, pour dénoncer les élus du Parti conservateur qui sont des extrémistes de droite.
    Merci beaucoup de nous avoir parlé de cet article et merci de la question.
    Comme je l'ai déjà dit, il faut surtout dénoncer la mésinformation et la désinformation. Il faut faire preuve d'empathie et de compréhension — vous devez comprendre que, en tant qu'élus, vous représentez tous les membres de votre circonscription, et qu'il y a des membres gais, queers, trans et bi. Vous devez comprendre que tous vos électeurs ont les mêmes droits.
    Pour ce qui est des idéologies et des opinions discriminatoires, nous devons revenir aux faits, aux lois et à la Charte. Les lois et la Charte sont importantes, et il faut les respecter. Comme je l'ai dit précédemment, c'est ici qu'une clause dérogatoire utilisée pour contourner certaines choses crée un précédent très dangereux dans de nombreuses situations, c'est-à-dire qu'elle est utilisée ou invoquée pour contourner un problème.
    Encore une fois, l'important est d'avoir des discussions empathiques et fondées sur les faits et l'équité, et aussi de représenter tous les Canadiens, comme c'est le devoir des élus, en vertu de la Charte. Voilà ma réponse courte à votre question.
    Madame Dominique Vien, allez‑y.
    Vous avez cinq minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie tous les témoins de s'être rendus disponibles.
    J'aimerais faire une petite mise au point avant de commencer. Le Parti conservateur du Canada a accepté d'entamer cette étude que nous menons actuellement sur la violence motivée par la haine auprès de la communauté LGBTQ, et d'y accorder toute l'attention sérieuse nécessaire. Nous le faisons dans un esprit d'ouverture et de bienveillance.
    Je trouve donc dommage aujourd'hui d'entendre la désinformation qui provient de nos collègues des autres partis. Depuis que nous avons commencé cette étude, ce n'est pas la première fois que nous entendons de tels propos, et c'est franchement dérangeant et déplacé, surtout quand nous savons que le Parti conservateur du Canada et ses députés ont voté contre les thérapies de conversion. Par ailleurs, M. Poilievre a lui-même nommé comme cheffe adjointe Mme Melissa Lantsman, membre de la communauté LGBTQ.
    Cela dit, monsieur Tyler Wisner, ai-je bien compris que vous avez dit avoir reçu une menace de mort dernièrement, il y a peut-être un mois ou moins d'un mois?
(1215)

[Traduction]

    Merci de la question.
    Oui, j'ai reçu une menace de mort en ligne, et ce n'était absolument pas la première fois. Cela ne sera également probablement pas la dernière. C'était il y a plus ou moins un an. Une phrase me reste en tête: « Je vais te battre et arrêter juste avant que tu meures. » C'est un parfait inconnu. Il ne me connaît pas. C'était de l'homophobie pure et dure.

[Français]

    C'est tellement un geste gratuit.
    Qu'avez-vous fait suite à cet événement? Vous nous en parlez aujourd'hui au Comité, et nous vous remercions de nous en faire part. Avez-vous rapporté cet événement aux autorités?

[Traduction]

    J'ai signalé l'incident à la plateforme de réseaux sociaux sur laquelle le message a été envoyé, et je suis en attente d'une réponse.

[Français]

     Bien.
    Pour reprendre les propos de Mme Baker, de la Fondation Émergence, quelque 91 % des victimes ne portent pas plainte. C'est aussi le cas de nombreuses victimes d'agression sexuelle, qui ne vont pas porter plainte elles non plus.
    Vous n'avez pas fabulé, vous avez reçu cette plainte, vous l'avez vue, vous l'avez lue. Elle vous a évidemment heurté profondément. Avez-vous l'intention de porter plainte à la police?

[Traduction]

    Tout à fait, c'est mon intention.
    Malheureusement, le message a été envoyé par un profil anonyme qui a été supprimé une heure après l'envoi. J'ai réagi rapidement et j'ai eu le temps de faire des captures d'écran et de les envoyer à la plateforme de réseaux sociaux, mais j'attends une réponse pour savoir qui est derrière le message et le compte, avant de communiquer avec la police. C'est également...

[Français]

    Bien sûr.

[Traduction]

    Je vais en rester là.

[Français]

     Je pense que je n'apprends rien à personne en disant que le Parti conservateur du Canada est un parti qui est du côté des victimes et qu'il souhaiterait bien sûr, le plus possible, que nous ayons des lois qui protègent mieux les victimes d'abord.
    Madame Baker, vous avez donné deux statistiques qui m'ont beaucoup accrochée. Premièrement, 78 % des Canadiens se disent des alliés des communautés. C'est peut-être vous ou votre collègue qui l'avez dit. Deuxièmement, 91 % des membres de la communauté LGBTQ sont victimes et ne font pas de signalement.
    Pourquoi ne fait-on pas de signalement? Je vous pose la question, mais, en même temps, je veux vous dire que, quand nous avons mené des études sur la violence entre partenaires intimes, par exemple, ou la violence faite aux femmes, plus précisément, nous avons appris que les filles ne vont pas dénoncer les crimes haineux, parce qu'elles se disent que ça ne donne rien et qu'elles ne seront pas crues.
    Dans quel genre de contexte se retrouvent justement ces personnes qui ne veulent pas dénoncer les crimes haineux? Pourquoi ne le font-elles pas? C'est énorme, 91 %.
     En effet, c'est quelque chose qu'on peut voir dans d'autres situations, mais je pense que pour les communautés LGBTQ+ en particulier, il faut prendre en compte l'historique qu'il y a entre les communautés LGBTQ+ et les services de police. Il n'y a pas si longtemps, c'était les forces de police qui faisaient des descentes dans les bars. Il y a encore des personnes qui ont vécu la criminalisation ou la persécution policière. Donc, il est clair que ça joue…

[Traduction]

    Merci, madame Baker.

[Français]

     J'enverrai les chiffres plus tard.
    Écrivez-nous. Si vous avez des données là-dessus, nous aimerions les avoir. C'est important.

[Traduction]

    Il n'y a pas d'interprétation.
    Pourriez-vous vous arrêter une minute?
    Madame Baker, pouvez-vous dire deux ou trois mots?

[Français]

    Oui. La principale raison qui a été évoquée est qu'ils ne pensaient pas que ça allait changer les choses.
(1220)

[Traduction]

    Oui, le problème est réglé.
    Allez‑y. S'il vous plaît, essayez de terminer en 30 secondes.

[Français]

    D'accord. Voici trois statistiques là-dessus: 74 % des gens pensaient que ça n'allait rien changer, 45 % disaient ne pas faire confiance à la police et 26 % disaient qu'ils ne pensaient pas que la police allait les croire. Ce sont des statistiques de Femmes et Égalité des genres Canada. Je pourrais vous les envoyer par courriel.
    Oui, nous vous en serions vraiment reconnaissants. Merci beaucoup.

[Traduction]

    Madame Hepfner, allez‑y, vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie tous les témoins d'être ici et je les remercie de leur important témoignage.
    Je ne sais pas trop par où commencer. Je crois qu'il est évident que les conservateurs ne souhaitent aucunement poser des questions pour comprendre pourquoi il y a eu une telle recrudescence de la haine contre la communauté 2ELGBTQI+.
    Monsieur Wisner, j'ai trouvé intéressant d'entendre quelqu'un vous demander pourquoi vous n'avez pas averti la police de cette menace faite en ligne. Je ne m'attends pas à ce que la police soit capable de faire quoi que ce soit pour une menace faite en ligne. Le Canada va adopter des lois sur les préjudices en ligne. Ce n'est pas parfait. Il y a encore beaucoup de travail à faire. Les conservateurs ont déposé un projet de loi semblable, qui prévoit que les gens devront poursuivre la plateforme de réseaux sociaux pour que la publication soit retirée ou qu'il y ait des représailles. Le fardeau leur revient, mais ils doivent poursuivre l'entreprise de réseaux sociaux pour qu'il y ait des représailles.
    Que pensez-vous de...?
    J'invoque le Règlement.
    J'aimerais dire, pour le compte rendu, que c'est faux. Si vous pouvez présenter une preuve de ce que vous dites, je vous en serais reconnaissante. C'est faux. Ce n'est pas l'objectif du projet de loi.
    Madame Ferreri, je ne vous interromps pas pour raconter des mensonges, donc vous allez devoir attendre votre tour pour raconter les vôtres.
    Madame Hepfner, allez‑y.
    Comment pouvons-nous lutter contre cela?
    Vous avez raison; il ne s'agit pas seulement de préjudices en ligne. Cela arrive aussi dans la réalité. Des gens sont attaqués. On le voit maintenant dans la vraie vie. Ce n'est plus seulement en ligne.
    Avez-vous des suggestions?
    Vous avez dit que cela ne se produit pas seulement en ligne. La semaine dernière, à Toronto, je revenais du travail à pied lorsque quelqu'un m'a menacé de mort. Comment pouvons-nous traiter le problème? Je crois qu'une partie du fardeau doit revenir aux entreprises de réseaux sociaux. Elles doivent être surveillées, d'une certaine façon, parce que ces menaces sont immédiates. Elles doivent être traitées en temps opportun, sinon il y aura des incidents de violence. C'est tout aussi simple que cela.
    Il est difficile de réglementer les entreprises de réseaux sociaux, parce qu'il y a des avantages et des inconvénients. Elles offrent un excellent réseau, qui permet aux personnes comme vous de trouver une communauté qu'elles n'auraient autrement pas trouvée, mais les menaces de violence sont réelles et abondantes.
    Monsieur Boyce, avez-vous quelque chose à ajouter?
    C'est exactement ce dont nous devons parler lorsque nous discutons des préjudices en ligne, parce que, comme M. Wisner l'a mentionné, ces menaces ont des répercussions dans la vraie vie.
    L'un des sujets qui est souvent revenu aujourd'hui est que les élus doivent s'assurer que ces discussions se déroulent de manière à ne pas causer des préjudices injustifiés. J'aimerais ajouter que, je sais que, de manière non partisane, dans tous les partis, les élus savent ce que signifie leur responsabilité de représenter les Canadiens. J'aimerais faire un petit rappel: « tous les Canadiens », cela ne veut pas dire seulement ceux qui sont politiquement avantageux; cela veut dire toutes les communautés, y compris nos communautés.
    Lorsque nous entendons le chef de l'opposition dire que « les espaces pour les femmes devraient être réservés exclusivement aux femmes, et non pas aux hommes biologiques », quel message, selon vous, envoie le chef?
    Je comprends que les femmes trans qui essaient simplement d'utiliser les toilettes sont exposées à un risque plus élevé de devenir une statistique d'un crime haineux injustifié et évitable. Selon moi, cela veut dire que les gens doivent repenser à leur façon de s'exprimer, qu'elle soit intentionnelle ou non, s'ils veulent réellement respecter leur promesse de représenter tous les Canadiens.
    Merci.
    Il me reste environ 45 secondes.
    J'espérais pouvoir m'adresser à vous en ligne, Lauren Pragg.
    J'ai vraiment été touchée par votre déclaration liminaire, surtout quand vous parliez d'un étudiant qui a été harcelé par des enseignants et des parents qui avaient été radicalisés et qui pensaient que les écoles rendaient les enfants « transgenres ». J'ai posé des questions à un enseignant à ce sujet, au cours de notre dernière séance. Des enseignants eux-mêmes sont attaqués parce que les gens pensent à tort qu'ils incitent les étudiants à percevoir leur genre d'une certaine façon.
    Que pouvez-vous répondre à cela?
(1225)
    Merci beaucoup de la question. Je sais que nous n'avons pas beaucoup de temps.
    En vérité, le genre est un concept social. Cela fait partie du rôle de l'enseignant de parler aux élèves de ce concept, comme de tous les autres concepts sociaux. Je pense que, encore une fois, la direction des écoles craint les représailles des parents et leurs répercussions. Comme nombre de mes collègues l'ont dit aujourd'hui, cette violence menace de se propager aussi au‑delà de nos collectivités.
    La dernière chose que j'aimerais dire, présentement, c'est que je pense que nous devons chercher davantage à savoir ce qui cause cette division. Le coût de la vie augmente. Les gens ont l'impression de ne pas en avoir assez, et ils cherchent partout un bouc émissaire. Aujourd'hui, nous parlons de la communauté 2ELGBTQ, mais il y a beaucoup d'autres exemples dans notre société. Je crois que c'est là‑dessus que nous devrions nous concentrer. Nous devons nous assurer que tous les gens ont ce dont ils ont besoin pour fonctionner et qu'ils n'ont pas besoin de se tourner l'un contre l'autre pour avoir l'impression d'avoir du pouvoir et accéder aux services qui leur importent.
    Merci, Lauren Pragg.
    C'est maintenant au tour de Mme Ferreri pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à nos témoins d'aujourd'hui. Le monde à l'heure actuelle est enflammé, sur le plan politique, et nous vous remercions de nous avoir accordé de votre temps.
    J'aimerais revenir à M. Wisner, si vous me le permettez.
    Il est évidemment inacceptable de proférer des menaces de mort, peu importe contre qui.
    Une chose que nous voyons et dont nous entendons beaucoup parler dans la communauté 2ELGBTQIA+, c'est l'itinérance, l'accès aux ressources et au logement. Dans beaucoup d'organisations que vous aidez... Encore une fois, je sais que divers groupes travaillent avec différentes personnes.
    Quelle est l'importance du logement? Je le vois dans ma collectivité de Peterborough. Nous avons un refuge d'urgence pour les jeunes. Il y a un important pourcentage d'enfants qui s'identifient, et ils n'ont pas accès à un logement abordable. Selon vous, quelle est l'importance de l'économie, et quel est son rôle dans la qualité de vie des gens? Nous avons vu cela. Nous avons entendu les libéraux dire cela aussi: quand l'économie faiblit, les gens cherchent un bouc émissaire. Ils sont stressés au plus haut point, il n'y a pas de réglementation qui tienne, et ils projettent ce qu'ils ressentent sur les autres et les blessent parce qu'ils ne cherchent qu'à survivre.
    Monsieur Wisner, selon vous, à quel point est‑il important d'avoir une économie saine pour rétablir notre capacité d'apprendre, de s'instruire et d'être disposé à le faire?
    Merci de la question.
    Il est extrêmement important que le logement, l'épicerie et le coût de la vie soient abordables. C'est malheureux si nous tenons cette discussion et que nous ne parlons pas de ces choses. Nous devons avoir cette discussion avant de passer à autre chose. Nous devons régler ces problèmes, sans quoi ils continueront. Nous devrions parler de la crise du logement, de la crise de l'épicerie et de la crise de l'emploi. Ce sont des choses qui touchent tout le monde, au Canada, qu'on le veuille ou non.
    Je pense à la santé mentale des gens. C'est comme une intersection. Vous pensez que vous ne pourrez jamais pouvoir vous acheter une maison ou vivre dans une maison sécuritaire ou des rues sécuritaires, et vous devez aussi gérer d'autres problèmes qui se recoupent, comme le manque d'éducation. Ma collègue, Mme Roberts, a dit qu'il fallait s'adresser à différentes personnes et avoir ces discussions, vous l'avez dit vous aussi, monsieur Boyce.
    L'énoncé économique de l'automne est censé être publié aujourd'hui. Que voulez-vous voir dans cet énoncé économique quant à la façon dont l'économie devrait fonctionner afin que les gens aient accès aux éléments essentiels, l'alimentation et le logement?
    Je vous pose la question, monsieur Wisner.
    Je dirais que, compte tenu du poste que j'occupe au ministère de la Justice, je ne devrais pas me prononcer sur ce sujet.
    Je dirais que ce n'est pas seulement les gens des milieux socio-économiques défavorisés qui vivent la haine ou qui la perpétuent. J'ai grandi à Oakville, en Ontario, une ville très riche, où j'ai ressenti une haine énorme de la part de socio-conservateurs nantis. Mes collègues au travail ont vécu la même chose, d'un point de vue différent.
(1230)
    Je crois que nous en avons parlé à maintes reprises avec d'autres témoins. Il faut créer ce lien pour que les gens voient les gens. C'est là que la discussion et l'éducation jouent un rôle, et cela rejoint ce qu'a dit M. Boyce au sujet des visites dans les résidences pour personnes âgées et ce qu'a dit ma collègue Mme Roberts. Quand nous voyons la personne, cela atténue beaucoup cette tension ou cette haine.
    J'insiste sur un point: quand les gens ne peuvent pas subvenir à leurs besoins, ils sont loin de pouvoir écouter et entendre ou de faire l'objet d'un règlement. Je viens à l'instant de recevoir un message de ma communauté. Nous avons atteint le plus haut taux d'insécurité alimentaire chez les enfants de notre histoire... de notre histoire. Si vous êtes un enfant et que vous êtes différent, que vous apprenez différemment, que votre genre est différent ou que votre sexualité est différente, et que vos parents ne peuvent pas subvenir aux besoins de la famille, ils se disputent et ils sont stressés. Le risque de violence familiale va augmenter. Le désespoir qui apparaît quand on ne peut pas nourrir sa famille se fait ressentir partout.
    Il y a eu une augmentation de 251 % des crimes haineux dans ce pays depuis que Justin Trudeau a accédé au pouvoir. Ce n'est pas une coïncidence. Le pays a aussi enregistré la plus faible croissance de son PIB par habitant. J'aimerais vraiment que les gens puissent avoir accès à cette éducation et à cette compréhension, et qu'ils soient ouverts à ces choses, mais nous devons nous assurer que les gens puissent manger et se loger.
    Madame Ferreri, il vous reste environ 30 secondes, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais seulement poser à Mme Baker une question sur l'accès au logement et, une fois que les gens ont un logement, sur l'accès aux ressources et au soutien des pairs.

[Français]

     Il ne fait aucun doute que les personnes LGBTQ+ sont surreprésentées dans la population en situation d'itinérance, une des principales causes étant leur rejet par leur famille. Le deuxième problème, c'est que le personnel des refuges, entre autres, n'est pas toujours équipé et formé pour recevoir de façon respectueuse les personnes LGBTQ+. Je pense particulièrement aux femmes trans, qui ne sont pas toujours les bienvenues dans les organismes pour femmes.

[Traduction]

    C'est maintenant au tour de Mme Lambropoulos.
    Madame Lambropoulos, vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    J'aimerais pour commencer remercier tous les témoins. Ils ont tous été excellents aujourd'hui. J'aimerais les remercier de tout cœur de leurs témoignages.
    J'entends des choses que je n'aime tout simplement pas. J'ai entendu des choses au cours de cette réunion et, en fait, au cours d'autres réunions sur cette étude, qui ne me plaisent pas. Cela ne fait que renforcer l'idée de trouver un bouc émissaire quand les choses ne vont pas bien. J'ai entendu dire aujourd'hui que de nouveaux immigrants, de nouvelles populations, pourraient être à l'origine de l'augmentation de la haine. J'ai entendu la même chose d'un autre député au cours d'une réunion précédente.
    J'aimerais juste dire que ce n'est pas la bonne façon de voir les choses. Selon mon expérience, les gens qui avaient une mentalité de « vivre et laisser vivre » sont en fait ceux qui ont changé de façon de penser au cours des dernières années. Ce ne sont pas nécessairement les nouveaux arrivants au Canada. Ce sont les Canadiens qui sont ici depuis longtemps et qui ont accès à la désinformation et à la mésinformation en ligne et à tout ce que l'on montre. Honnêtement, je pense que, effectivement, le Parti conservateur se sert de boucs émissaires, malheureusement, et qu'il monte certaines communautés minoritaires l'une contre l'autre pour expliquer l'augmentation de la haine.
    Je ne pense pas que ce soit le cas. Je pense que c'est très dangereux de penser ainsi.
    J'invoque le Règlement, madame la présidente.
    J'aimerais poursuivre, merci beaucoup.
    Voici ma question: que peut‑on faire, selon vous, ou que peut‑on dire aux gens qui étaient auparavant ouverts d'esprit et dont la devise était vivre et laisser vivre, et qui ont été influencés par le changement de discours qu'ils entendent en ligne? Quel genre de message voudriez-vous que les gens entendent aujourd'hui?
    Qui veut répondre?
    Allez‑y, monsieur Boyce.
    Merci beaucoup de cette question bien réfléchie, et merci de souligner les répercussions négatives du fait de faire de certaines communautés des boucs émissaires.
    Que peut‑on faire au lieu de choisir la solution la plus facile et faire de certaines communautés des boucs émissaires, pour plutôt tisser les relations durables dont nous aurons besoin ces dix prochaines années et sûrement au cours de la prochaine campagne électorale? Nous devons tenir ces conversations qui seront menées par des organisations 2ELGBTQI+.
    La manière la plus facile de ramener les gens sur la voie de la compréhension — et je vais en fait m'inspirer de votre dernière question —, c'est simplement de nous assurer que tout le monde a des chances égales dans tous les secteurs, au Canada, qu'il s’agisse du logement, de l'emploi ou des soins de santé. Si les Canadiens, simplement en raison de leur identité de genre, de leur orientation sexuelle, ou d'un quelconque autre facteur, ne peuvent pas accéder à ces mêmes ressources, alors nous n'atteindrons jamais ces objectifs.
    Je pense que les communautés d'immigrants comprennent cela mieux que la plupart des Canadiens. La plupart des immigrants sont venus ici pour avoir la chance d'accéder à toutes ces merveilleuses ressources et pour devenir députés, membres élus et têtes de file en intelligence artificielle et en innovation, et, si nous voyons cela, c'est parce qu'ils peuvent accéder à de l'éducation et à des ressources.
    Quand nous parlons de faire de certaines communautés des boucs émissaires, pour les gens qui ont peut-être oublié leur origine modeste dans ce pays, où les gens qui ciblent des communautés entières pour en faire des boucs émissaires, je pense que nous devons comprendre l'occasion extraordinaire que nous avons de tisser des liens dans notre pays. Cela ne commence pas par le choix d'un bouc émissaire. Pour commencer, il faut tendre la main à ces communautés dans des conversations comme celles‑ci, menées par des gens comme moi et des centaines d'organisations queers et trans représentées dans le réseau Enchanté.
(1235)
    Merci beaucoup.
    En fait, vous avez parlé de quelque chose qui a été mentionné précédemment au sujet du logement.
    Je connais une femme trans qui s'est vu refuser un logement locatif même si elle avait les fonds nécessaires pour payer le loyer. Elle a été refusée au moins dix fois avant de finalement trouver un logement où elle pouvait vivre.
    Ces obstacles existaient avant que les gens ne soient plus capables de payer un logement. Comme vous l'avez dit, il faut appliquer cette approche intersectionnelle, parce que tout le monde ne peut pas accéder également aux mêmes ressources, indépendamment de sa situation économique.
    J'ajouterais que nous allons présenter un mémoire avec des statistiques précises sur l'état des choses dans les communautés queers et trans de tous les secteurs, et aussi une analyse intersectionnelle des données, surtout pour les personnes noires, queers et trans qui, nous le savons, n'ont pas un accès équitable à ces services publics.
    Merci beaucoup. Je l'apprécie.
    Je pense que M. Wisner voulait intervenir aussi.
    Je vais simplement terminer rapidement l'intervention que j'avais commencée plus tôt.
    La crise du coût de la vie est bien réelle. Je crois que tous les partis s'entendent là‑dessus. Je veux toutefois insister sur le fait qu'un milieu socio-économique défavorisé n'entraîne pas de dysphorie de genre.
    Je vais m'arrêter là.
    Lauren Pragg, vous nous avez parlé plus tôt de votre organisation qui aide 3 000 jeunes par année.
    Avez-vous remarqué cette augmentation récemment? Avez-vous remarqué si plus de gens s'adressaient à vous?
    Selon vous, quelle est la cause principale?
    Vous avez aussi parlé un peu du fait que plus de gens ont plus de difficulté à se faire des amis et à les garder, depuis la pandémie. Pourquoi, selon vous?
    Terminez votre intervention en 30 secondes, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup de la question.
    Je dirais juste que c'est l'isolement qui entraîne cela. Les causes sont complexes. La diminution des espaces communautaires est vraiment un facteur important.
    M. Boyce parlait de tisser des liens avec des gens de l'extérieur de son profil démographique. Il y a beaucoup d'exemples de cela. De moins en moins d'espaces et d'occasions s'offrent aux gens. Pour les jeunes qui ont peut-être fréquenté l'école de façon virtuelle pour la majeure partie de leur secondaire, etc., surtout, c'est de plus en plus difficile. Les services sociaux n'ont pas de financement, donc il y a moins d'occasions pour des choses comme le bénévolat ou les emplois d'été ou des choses comme cela. C'est difficile pour eux de tisser ce genre de liens et de tisser de vraies relations, disons.
    C'est maintenant au tour de Mme Larouche, pour deux minutes et demie.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Je présente mes excuses aux témoins, mais j'ai surtout honte pour les membres de ce comité. Manifestement, nous n'avons pas tiré de leçon de la réunion de cet été, durant laquelle on avait tenté de politiser les violences envers les femmes, tout comme on est en train de politiser cette préoccupation majeure aujourd'hui. J'invite mes collègues à se rappeler que des témoins nous ont invités à ne pas politiser cette question.
    Cela dit, je remercie énormément Lauren Pragg, Tyler Wisner et Tyler Boyce de leurs témoignages, qui contribuent beaucoup à cette étude.
    Monsieur Breault, il est intéressant que vous ayez parlé de la recherche effectuée par les journalistes du Métro.
    Madame Baker, je sais aussi qu'il y a la question des Décrypteurs.
     Dans toute cette désinformation et mésinformation, il faut mentionner l'importance des médias traditionnels, qui sont soumis à des règles déontologiques, contrairement aux médias en ligne où l'on peut voir à peu près de tout. Parfois, on a vraiment l'impression que la notion de far west correspond bien à ces médias en ligne, parce qu'ils n'ont pas les mêmes règles et qu'ils contribuent à cette espèce de polarisation partisane du dossier.
     J'aimerais que vous me disiez en quoi l'importance des médias traditionnels par rapport à celle des médias sociaux peut être une piste de solution pour ces préoccupations LGBTQ.
(1240)
     Je pense aussi à des outils sur la littératie numérique. On parlait tout à l'heure de l'importance de l'éducation. Je donne des formations dans des entreprises et, généralement, je m'adresse plutôt à ce qu'on va appeler des cols blancs, qui ont quand même un bon niveau d'éducation. Pourtant, ça n'empêche pas qu'on me pose des questions sur les litières dans les écoles.
    Ce que je veux dire, c'est que les gens ont accès à énormément d'informations et qu'il est parfois difficile de faire le tri. Quand c'est quelque chose qu'on lit, on ne fait pas toujours la différence entre une chronique et un article.
    Par ailleurs, comme on parlait de responsabilisation, j'aimerais voir les médias citer leurs sources et rendre plus claire et transparente leur façon d'exposer l'information.
    J'aimerais aussi voir des outils pour vérifier l'information. Dans mes formations, j'appelle souvent les gens à faire le test. Je sais qu'il y a beaucoup d'outils en anglais, comme Snopes, que j'utilise. En français, l'émission les Décrypteurs est une possibilité. Le scientifique en chef du Québec a pour sa part rédigé un article sur les femmes trans dans le sport, ainsi qu'un article sur les litières. Cependant, on dirait que ces ressources ne sont pas forcément toujours très connues et que ce n'est pas forcément très complet.
     Je pense qu'une position vigoureuse de la part d'un média ou d'une source en lesquels les gens pourraient avoir confiance, qui permettraient de faire la part des choses concernant les réalités et les faits démontrés par les études et les recherches, pourrait constituer une piste de solution pour contrer la désinformation.

[Traduction]

    Merci, madame Baker.
    Ensuite, c'est au tour de Mme Gazan. Vous avez deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, madame Sidhu.
    Je tiens à être très claire: c'est une question non-partisane. Les droits de la personne sont une question non-partisane. Tous les membres du Comité ont soutenu l'étude. Je tiens à être très claire sur ce sujet.
    Je tiens aussi à préciser que ce que nous faisons en tant qu'élus et les messages que nous envoyons — et les témoins nous ont mis en garde aujourd'hui — peuvent soit nuire aux gens, soit les aider. Je prends mon rôle de députée très au sérieux. Je m'inquiète de la façon dont les couloirs du pouvoir sont actuellement utilisés d'une manière qui peut nuire aux gens
    Cela dit, j'aimerais vous poser une question, monsieur Boyce. Vous avez beaucoup parlé d'éducation. J'ai été enseignante. Je suis très triste de voir ce qui se passe dans les écoles, car j'ai été enseignante. Au début de ma carrière, j'enseignais l'éducation sexuelle.
    Pourquoi l'éducation est-elle importante?
    Croyez-vous que les députés devraient suivre une formation obligatoire lorsqu'ils sont élus afin de comprendre leur rôle et leur obligation légale de respecter la charte, c'est-à-dire toute la Constitution? Il semble que nous choisissons de la respecter ou de ne pas la respecter, selon le sujet à l'étude.
    J'apprécie vraiment la question.
    Bien entendu, je suis un grand partisan de l'idée de fournir aux gens les outils dont ils peuvent avoir besoin pour faire leur travail de la meilleure façon possible. Dans le présent dossier, je crois qu'il est très clair que cela inclut également une formation sur le vocabulaire à utiliser pour que les gens ne fassent pas du tort involontairement.
    J'ajouterais, pour répondre à la première partie de votre question sur l'éducation, que ma mère était également éducatrice. Quand nous parlons d'éducation, nous devons nous rappeler — et je tiens à le dire pour la communauté — la diversité des témoins qui ont été appelés à témoigner. Nous ne sommes pas tous tombés du ciel; nous venons de nos propres communautés.
    J'aimerais dire au Comité qu'il existe une possibilité formidable pour nous de partager les leçons retenues, que nous avons déjà dû apprendre dans nos communautés individuelles — religieuses, raciales, ethniques et autres —, et qui ont permis de construire des ponts. Voilà pourquoi, quand nous parlons d'éducation, et lorsque j'en parle, je suis un grand partisan de la possibilité pour les gens de changer d'avis, de voir les choses différemment, car je sais que je l'ai fait, et je sais que tous mes collègues ici aujourd'hui l'ont fait dans leur propre communauté. Permettez-nous de faire connaître ces leçons retenues aux membres de la Chambre des communes également.
(1245)
    Merci, monsieur Boyce.
    Ensuite, c'est au tour de Mme Roberts.
    Vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Premièrement, je tiens à dire aux fins du compte rendu que je suis vraiment déçue par les autres partis qui souhaitent politiser l'affaire, en particulier ma collègue d'en face, lorsque j'ai parlé d'une de mes clientes qui m'a fait part de son histoire très touchante. C'est en raison de ses antécédents et de ses croyances religieuses que j'ai mis l'affaire de l'avant. C'est pourquoi j'ai parlé d'éducation, car nous devons nous assurer qu'au Canada, tout le monde est accepté. C'est ce que je voulais dire. Je suis très déçue.
    Cependant, parlons des méfaits en ligne.
    Monsieur Boyce, je suis désolée que vous ayez eu à composer avec une personne qui vous a menacé. C'est inacceptable. J'aimerais vous entendre parler des opérations...
    Le projet de loi C‑412 vise à garantir que nous n'ayons pas cette haine en ligne. Les libéraux essaient de l'empêcher parce qu'ils veulent créer un autre ministère. Nous n'avons pas besoin de dépenser 200 millions de dollars pour un autre ministère. Selon moi, nous avons besoin de cet argent pour faire ce que vous avez dit aujourd'hui, à propos de l'éducation, et pour aider les gens à comprendre que la personne que vous aimez et que vous voulez aimer, cela n'a pas d'importance. C'est votre choix personnel. C'est la liberté qu'offre le Canada.
    J'en ai assez de voir le Comité pointer du doigt notre chef conservateur, qui est croyant. Nous avons une cheffe adjointe qui est homosexuelle et qui en est fière, et nous sommes fiers d'elle. Je ne sais pas exactement où les libéraux veulent en venir, car, lorsque vous pointez du doigt, il y a les quatre autres doigts qui pointent le bout de votre nez.
    Je tiens à vous dire que je suis navrée que vous ayez subi la haine en ligne. C'est inacceptable. Certains membres de ma famille sont homosexuels; je les aime profondément et je les suivrais jusqu'au bout du monde, et je suis fière d'eux.
     Pourquoi ne pouvons-nous pas assurer que cette haine en ligne...? Le dépôt du projet de loi C‑412y mettrait fin et imposerait des responsabilités, de façon que les personnes qui choisissent d'aimer qui elles veulent puissent le faire sans haine.
    Monsieur Wisner, j'aimerais que vous répondiez.
    Merci beaucoup, je ressens votre empathie, alors merci.
    Encore une fois, en raison de mon poste au ministère de la Justice, je ne commenterai pas les politiques fédérales, mais je serais plus qu'heureux de continuer à parler des incidents d'exclusion, d'intimidation, de haine ou de violence qu'ont vécus et dont m'ont parlé mes campeurs. C'est réellement l'expérience que je veux raconter et que je veux faire connaître; la montée de la rhétorique anti-trans, anti-LGBT et sexiste a été dévastatrice pour la jeunesse queer de toute l'Amérique du Nord. Nous avons des campeurs des États-Unis. Nous avons des campeurs des territoires.
    Merci.
    Je dirais que la meilleure façon de mettre fin à cette haine — et je suis totalement d'accord avec la partie éducation, à 100 % — serait de veiller à ce que les gens comprennent que l'on peut choisir d'aimer qui l'on veut. Nous ne sommes pas là pour en juger. Personne ne devrait être jugé là‑dessus. Ne croyez-vous pas que, si nous pouvions mettre un terme à cette rhétorique en ligne, à cette haine en ligne, cela contribuerait au processus éducatif?
    Je dirais que la rhétorique haineuse en ligne limite certainement la portée de l'éducation.
    Encore une fois, je ne suis pas un expert en matière de réglementation des médias sociaux et, en raison de mon poste au ministère de la Justice, je ne peux pas commenter.
(1250)
    Monsieur Boyce, ne croyez-vous pas que nous devons mettre fin à cette haine en ligne? Quand j'en suis témoin, cela me rend malade. Vraiment. Je crois qu'il devrait y avoir des conséquences à cela.
    Je tiens à féliciter tous les membres du Comité d'avoir accepté de réaliser cette étude et d'avoir accepté à l'unanimité qu'elle se fasse. Je crois que tout le monde dans la salle est d'accord pour dire qu'il faut faire quelque chose pour que la sécurité en ligne devienne une réalité, particulièrement pour nos jeunes transgenres, qui traversent actuellement une période très difficile.
    En ce qui concerne l'approche à adopter pour y arriver, je crois que le débat devrait avoir lieu à la Chambre des communes. Je peux dire à votre comité que ces conversations doivent se tenir en collaboration avec les organismes queers et trans, qui travaillent aux premières lignes tous les jours. Nous connaissons une multitude d'histoires et de réalités touchant les personnes qui subissent la haine en ligne. Nous avons des données et des histoires sur la façon dont cette haine se traduit dans la vraie vie par le manque de sécurité de notre communauté. J'espère que cette expertise pourra compléter la discussion en cours sur la marche à suivre pour arriver à nos fins.
    J'espère que nous examinerons le projet de loi C‑412 et que puissions arrêter les personnes qui projettent cette haine en ligne, car cela doit cesser.
    Merci, madame Roberts.
    Ensuite, c'est au tour de Mme Damoff.
    Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je suis ravie d'avoir une nouvelle occasion de poser des questions à nos incroyables témoins.
    Aux fins du compte rendu, le projet de loi mentionné par les conservateurs est un projet de loi d'initiative parlementaire qui n'a aucune chance de voir le jour. De plus, il impose à la victime le fardeau de se manifester et d'amener les entreprises de médias numériques ou sociaux à réagir.
    Monsieur Boyce, j'en ai fait l'expérience, je les ai contactés, mais cela n'a rien donné. Notre sergent d'armes dit qu'il n'est même plus possible de s'adresser à Twitter.
    Si mes collègues ne l'ont pas encore lu, j'aimerais parler d'un rapport du Bureau de l'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels, qui a été publié la semaine dernière, intitulé « Renforcer l'accès à la Justice pour les victimes de crimes motivées par la haine au Canada ». C'est un rapport exceptionnel. J'ai demandé à le soumettre au Comité à titre de preuve.
    J'aimerais vous lire certaines des statistiques.
    Monsieur Wisner, vous avez parlé d'une menace de mort en particulier. Je sais que ce n'est pas la seule dont vous avez été victime.
    Le rapport dit ceci:
72 % des policiers ont déclaré que leur service de police n'avait pas d'unité dédiée aux crimes haineux. Parmi les unités existantes, 44 % ne comptent qu'un seul agent.
44 % des services aux victimes comptaient moins de cinq employés rémunérés.
73 % des services aux victimes ont indiqué que les ressources limitées constituaient un obstacle important à la prestation d'un soutien adéquat.
77 % des policiers et 82 % des fournisseurs de services aux victimes croyaient que l'infraction générale de crimes motivés par la haine proposée dans le projet de loi C‑63 serait utile ou très utile.
    Le rapport dit aussi:
Au fils des ans, les lois discriminatoires ont marginalisé les personnes 2ELGBTQIA+, et des données récentes suggèrent qu'elles sont plus susceptibles de subir des dommages physiques à la suite de crime haineux que d'autres groupes ciblés.
    L'ombudsman a formulé 13 recommandations exceptionnelles que, je l'espère, mes collègues prendront le temps de lire.
    Encore une fois, je commencerai par les deux Tyler ici présents, M. Boyce et M. Wisner. Ensuite, si nous en avons le temps, j'irai en ligne.
    Vous êtes-vous adressé à la police pour signaler des crimes haineux, et quelle a été votre expérience si vous l'avez fait?
    Monsieur Boyce, je commencerai par vous.
    Mon partenaire et moi avons été victimes d'un crime haineux, pendant une promenade dans notre quartier, et nous avons porté plainte; cela n'a vraiment pas été une bonne expérience. On nous a posé beaucoup de questions sur ce qui s'était réellement passé, comme si on ne nous croyait pas. En ce qui concerne le soutien apporté, nous avons appelé; la police a décroché, puis a raccroché, et rien n'en est ressorti. C'est peut-être parce qu'ils manquent de personnel, ou peut-être parce qu'ils n'ont pas l'information, mais cela nous a vraiment amené à comprendre, au réseau Enchanté, que ce n'était pas une expérience individuelle, mais une expérience vécue par des milliers de Canadiens dans tout le pays.
    Nous avons demandé aux gens pourquoi ils ne signalaient pas à la police les crimes haineux dont ils avaient été victimes. Nous avons découvert le pot aux roses des relations profondes, ou plutôt l'absence de toute relation entre les services de police et les communautés queers et trans. La confiance doit être rétablie pour que les personnes queers et trans se sentent en sécurité lorsqu'elles signalent un crime haineux, que ce soit par téléphone ou en personne.
    Pour mettre les choses en contexte, imaginez qu'une personne transgenre se rend au poste de police pour signaler qu'elle a été victime d'un crime haineux. Pensez-vous que cette personne sera accueillie dans un environnement qui lui permettra de raconter de manière authentique l'événement traumatisant qu'elle vient de vivre?
    Je crois que, dans le mouvement pour le droit des femmes, les gens comprennent ce que cela signifie de s'avancer et de raconter son histoire et tous les obstacles inclus dans ce processus. Il y a des leçons à tirer de cette expérience.
    Premièrement, nous devons renforcer les services de police pour qu'ils soient en mesure d'intervenir, mais nous devons aussi comprendre comment, pour commencer, amener les communautés à se sentir à l'aise de signaler ces crimes haineux.
(1255)
    L'une de ces recommandations vise à investir dans la formation de la police sur les services aux victimes, ce qui rejoint votre point de vue. Je viens de lire qu'un crime horrible a été commis à Hamilton contre une femme trans qui a été battue et a perdu ses dents. Grâce aux services d'aide aux victimes, à une campagne de financement sur GoFundMe et à des dons, elle a pu se faire refaire les dents, mais cela a coûté des dizaines de milliers de dollars en raison des coups qu'elle a reçus.
    Dans les 15 secondes qu'il nous reste, monsieur Wisner, souhaitiez-vous ajouter quelque chose?
    Très rapidement, oui. Je n'ai jamais fait appel à la police pour signaler un crime haineux, même si j'ai entendu les histoires de certains de mes campeurs qui ont dû le faire. J'ai failli devoir appeler la police en leur nom, au camp, mais je ne l'ai pas fait en raison des règlements relatifs à l'âge.
    Pourriez-vous nous fournir plus d'information à propos du camp?
    Certainement.
    Merci.
    C'est tout pour notre groupe de témoins, aujourd'hui. Au nom du Comité, j'aimerais remercier tous les témoins. Merci beaucoup.
    Puisqu'il n'y a pas d'autres questions, la séance est levée.
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