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La séance est ouverte. Bonjour à tous.
Bienvenue à la 46e réunion du Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 31 octobre, le Comité poursuit son étude sur les femmes et les filles dans le sport.
Les délibérations se tiendront en mode hybride, conformément à l'ordre pris par la Chambre le 23 juin 2022. Certains députés siègent en personne et d'autres siègent à distance, au moyen de l'application Zoom.
Voici quelques consignes qui s'adressent autant aux témoins qu'aux députés.
Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Si vous participez à la réunion par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour l'activer, et mettez‑le en sourdine quand vous avez terminé votre intervention.
Pour entendre les interprètes dans l'application Zoom, vous pouvez sélectionner le parquet, l'anglais ou le français au bas de votre écran. Si vous êtes dans la salle, utilisez l'oreillette et sélectionnez le canal de votre choix.
Je vous rappelle que toutes les interventions doivent être adressées à la présidence. Les députés dans la salle peuvent lever la main pour demander la parole. Dans Zoom, veuillez utiliser la fonction de main levée. La greffière et moi-même ferons de notre mieux pour respecter l'ordre d'intervention.
Conformément à notre motion de régie interne, je signale aux députés que les témoins ont effectué les tests requis avant la réunion.
Avant de commencer, j'aimerais obtenir l'accord du Comité pour publier et rediffuser le communiqué de presse que la greffière nous a transmis vendredi passé. Avez-vous tous eu l'occasion d'en prendre connaissance?
Êtes-vous tous d'accord?
Des députés: D'accord.
La présidente: Parfait. C'est approuvé.
Je dois faire un traumavertissement. Avant de présenter les témoins, je dois vous avertir que le sujet de notre étude est très délicat. Les témoins vont nous parler de situations d'abus qui peuvent raviver des souvenirs difficiles chez des téléspectateurs, des députés ou des membres du personnel. Si vous éprouvez de la détresse ou si vous avez besoin d'aide, veuillez vous adresser à la greffière.
Je vais maintenant présenter les témoins.
Je souhaite la bienvenue à Mme Waneek Horn-Miller, une athlète olympique mohawk qui est membre du Temple de la renommée du Canada.
M. Kurt Weaver, le chef des opérations de l'organisme Tu peux jouer, inc., participera à la réunion à distance.
Je vous présente enfin Mme Léa Clermont-Dion, qui vient tout juste d'arriver. Elle est documentariste et chercheuse postdoctorale au Centre d'études sur l'apprentissage et la performance de l'Université Concordia.
Vous disposez chacun de cinq minutes pour nous présenter vos déclarations préliminaires. Je vous ferai un signe de la main pour vous inviter à conclure votre exposé.
Madame Horn-Miller, si vous êtes prête, nous allons commencer par votre témoignage. Vous avez la parole pour cinq minutes.
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Bonjour à tous. Je m'appelle Léa Clermont‑Dion et je suis docteure en sciences politiques. Je m'intéresse à la question des violences faites aux femmes depuis une dizaine d'années. Je suis chercheuse postdoctorale à l'Université Concordia.
Je suis aussi survivante d'une agression sexuelle. J'ai porté plainte dans le cadre du système de justice pénale il y a quelques années et il y a eu un verdict de culpabilité de l'agresseur. Ce dernier a interjeté appel et nous sommes toujours en attente de la décision de la Cour d'appel, cinq ans après les débuts du processus judiciaire. Nous ne connaissons pas encore l'issue de ce procès.
J'ai réalisé un film qui s'appelle T'as juste à porter plainte, une série documentaire qui fait aujourd'hui partie de la formation des juristes au Québec dans le cadre de la création du tribunal spécialisé en matière de violence sexuelle et conjugale. Je m'intéresse à cette question, qui me tient à cœur, car je suis mère d'un garçon et d'une fille.
Depuis quelques mois, je collabore avec la Ligue de hockey junior majeur du Québec et je donne aux joueurs des formations portant sur la question du consentement sexuel.
Le scandale entourant Hockey Canada a secoué le pays entier et a mis en lumière des dynamiques de domination, de violence sexuelle, mais aussi de banalisation dans le sport. Cette banalisation a été trop longtemps répandue, organisée et systémique, perpétrée par les acteurs du système, des gens dans des positions d'autorité. Ce scandale n'est malheureusement que la pointe de l'iceberg et il faut maintenant en arriver à une prise de conscience collective.
C'est une question politique et sociale, et, pendant trop d'années, le blâme de la victime a fait partie de la culture des organisations sportives. Certaines personnes sont à blâmer. Il doit y avoir une reddition de compte de la part des agresseurs et des personnes qui étaient responsables de ces dossiers. Je prends une seconde pour saluer le courage des victimes, qui sont des héroïnes et qui méritent tout notre respect.
Pour freiner ce fléau, cela prend des solutions. Il faut éduquer les coachs, les autorités et les joueurs au consentement sexuel et au respect. C'est l'une des solutions en matière de prévention, mais il y a aussi la réparation, sur laquelle je reviendrai plus tard.
J'ai deux pistes de solution concrètes à proposer aujourd'hui. La première vise la sensibilisation. Un premier besoin urgent s'impose en matière de sensibilisation. Oui, il existe des formations adéquates sur le consentement sexuel, mais cela prend plus. Il faut qu'on prenne collectivement conscience du fait que la banalisation des violences sexuelles est un problème. Il faut sensibiliser les coachs et les joueurs à ce qu'est une agression sexuelle. La plupart ne savent pas ce qu'est le consentement sexuel. Cela doit être systématiquement effectué. Comme l'a bien décrit Mme Horn‑Miller, le sport crée un contexte de proximité qui facilite les rapports de domination, les rapports d'autorité et certains abus.
Cela prend une campagne pancanadienne dans le cadre de laquelle on met en avant les ressources qui existent. Les ressources sont présentes, elles ont été créées par l'entremise de Sport'Aide. Or il faut des moyens et de l'argent pour que ces outils soient mieux connus et plus accessibles aux joueurs et aux coachs.
Cela prend des formations obligatoires pour les coachs et les joueurs afin de les sensibiliser et de prévenir les violences sexuelles. Il ne faut pas que cette formation soit aléatoire et il ne faut pas qu'elle soit facultative. Cette formation doit être créée en concertation avec les groupes de femmes et les groupes féministes avec un souci d'inclusion et il faut y aborder l'intersectionnalité des violences. C'est absolument nécessaire. Il faut qu'on intègre les problèmes de domination et de racisme à ce type de formation et d'éducation.
Plus précisément, je pense que cette formation devrait comprendre un volet sur le consentement et un volet sur la démystification des problèmes actuels comme la masculinité toxique et la culture du viol. Il faut aussi un volet sur la dénonciation dans le cadre duquel on explique aux entraîneurs et à tous les membres du personnel les répercussions d'une dénonciation dans la vie des victimes. Il faut aussi intégrer un volet sur la traumatologie afin de freiner les stéréotypes à l'égard des victimes d'agressions sexuelles. Finalement, il est nécessaire de créer un volet sur les effets des violences sexuelles sur les victimes.
La deuxième piste de solution que je propose est la réparation. Oui, il existe des outils permettant de dénoncer des agressions, mais quels sont ces outils? Il faut de la transparence de la part de Sport'Aide. On veut connaître la nature du processus entamé pour les victimes lorsqu'elles portent plainte. De quel registre cela relève-t-il? Est-ce qu'on s'inspire par exemple de la justice réparatrice? Il s'agit d'un moyen de réparation quand même intéressant et c'est une des solutions que j'aimerais proposer.
Le processus judiciaire traditionnel est extrêmement difficile pour les victimes. Il n'est pas toujours adéquat et il peut être destructeur plutôt que réparateur. Un processus de médiation ou de justice réparatrice peut parfois être intéressant. C'est une pratique qui s'inspire des cultures autochtones. C'est une voie pertinente qui peut être empruntée à l'extérieur du système judiciaire. Ce n'est pas parfait et cela nécessite de l'encadrement, une pérennisation des moyens et une professionnalisation de la pratique.
Ce qu'on veut, c'est de la transparence. En conclusion…
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Merci au Comité de me donner le privilège de prendre la parole aujourd'hui.
Depuis 10 ans cette année, l'organisme Tu peux jouer, inc. œuvre dans les milieux du sport et milite pour l'inclusion des personnes de la communauté lesbienne, gaie, bisexuelle, transsexuelle, queer, bispirituelle et autres, ou LGBTQB+. Nous avons collaboré avec nos partenaires des milieux du sport professionnel et amateur pour les aider à évaluer la situation dans leur milieu et à accroître leurs efforts d'inclusion. Notre principale mission a toujours été d'offrir un environnement sûr et accueillant à toutes les personnes qui souhaitent participer à des activités sportives à titre d'athlètes, d'entraîneurs, d'arbitres, d'administrateurs, de partisans ou de toute autre façon.
Notre collaboration avec nos partenaires touche principalement les programmes de visibilité et de sensibilisation, bien que nous soyons très conscients que la sensibilisation ne suffit pas pour venir à bout de ce genre de problèmes et régler ces questions. Pour y arriver, il faut que ces enjeux soient traités de concert avec tous les autres aspects d'un programme plus large de sécurité dans le sport, et il faut aussi faire de la sensibilisation pour aider les gens à réaliser ce qu'ils voient et ce qu'ils vivent. Essentiellement, nous voulons mettre à profit l'influence considérable de nos partenaires pour faire bouger les choses et améliorer la sécurité et l'inclusion dans le sport.
En plus d'être la chose à faire, assurer la diversité, l'équité et l'inclusion dans le sport permet d'améliorer les résultats. Le sentiment de responsabilité est renforcé. Plus il y a de points de vue, de visages et de gens différents dans les milieux sportifs, plus les gens se sentent responsables envers eux-mêmes et envers le sport. C'est la réalité. Les équipes et les milieux sportifs qui font ce travail sont meilleurs et connaissent plus de succès.
Personnellement, en plus d'avoir été entraîneur, athlète et arbitre pendant une bonne partie de ma carrière, j'ai dirigé un programme de sécurité dans le sport pour USA Rugby pendant cinq ans. Durant ces années, j'ai conçu des politiques, des procédures et des programmes de sensibilisation, notamment en matière de sécurité et de dénonciation. Le programme de sensibilisation représentait une première étape importante vers l'atteinte des objectifs. Les programmes de sensibilisation sont vus comme une fin en soi. On pense à tort qu'ils suffisent pour régler une question, alors qu'ils sont seulement une composante d'une stratégie beaucoup plus vaste.
J'aimerais attirer votre attention sur un programme en particulier qui, selon moi, est très innovateur. Je veux parler du programme Girls Rugby, qui est l'œuvre de la même personne qui a conçu le programme de rugby pour les jeunes du primaire au Canada. Ce programme axé sur les valeurs vise à outiller les filles par la pratique du sport.
L'apprentissage du leadership et l'approche axée sur les valeurs font partie intégrante des entraînements et des parties. La véritable innovation vient de ce que les jeunes filles développent des outils pour s'exprimer et prendre confiance en elles, se faire respecter et défendre leurs coéquipières. C'est une solution très intéressante à long terme à plusieurs des enjeux en cause.
Je sais que certains problèmes ne peuvent pas attendre et qu'il faut corriger les erreurs du passé. Toutefois, dans une perspective d'avenir, une approche qui vise à d'outiller les jeunes filles qui pratiquent un sport pour qu'elles deviennent des leaders et apprennent à se faire respecter et à prendre la défense de leurs coéquipières est très prometteuse.
Je suis très emballé par ce genre de programmes. Ils me donnent l'espoir que tous ceux qui le veulent pourront faire du sport, peu importe leur sexe, leur race, leur origine ethnique, leur orientation sexuelle ou leur identité de genre, et être certains d'y trouver un milieu sûr et accueillant. Parce que le sport a tellement à apporter, il doit être accessible à tout le monde.
Je m'arrête ici. Je me réjouis de pouvoir aider le Comité à accomplir son travail et sa mission.
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Merci, madame la présidente.
Je tiens à remercier sincèrement les témoins d'être des nôtres. Je vous ai écoutés attentivement. Vos témoignages sont très éloquents.
Si vous le voulez bien, madame Horn-Miller, je vais commencer avec vous.
Mme Waneek Horn-Miller: [Conformément à une motion adoptée par le Comité le 30 janvier 2023, le présent témoignage a été supprimé du compte rendu. Voir le Procès-verbal de la séance du 30 janvier 2023]
Mme Michelle Ferreri: Tout d'abord, félicitations pour tout ce que vous avez réalisé. Votre parcours est impressionnant. C'est vraiment extraordinaire.
Plusieurs choses dans votre témoignage m'ont interpellée, mais une a retenu particulièrement mon attention. Vous avez mentionné que le financement de Sport Canada est versé sans qu'il y ait de surveillance. Pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet? Selon vous, que faut‑il mettre en place pour assurer une surveillance des organismes qui reçoivent du financement?
Merci à vous tous d'être de participer à notre réunion.
Ma première question s'adresse à Mme Horn-Miller.
Tout d'abord, merci beaucoup de prendre la parole devant le Comité. Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé d'un moment où on vous a dit de vous occuper seulement de vous, alors de voir que vous vous êtes autant préoccupée des personnes qui vous ont suivie nous en dit beaucoup sur votre caractère. Nous vous sommes tous reconnaissants de votre présence.
Il a été question de la grande vulnérabilité des athlètes, du fait que leur rêve leur tient tellement à cœur et que c'est un terreau fertile pour les abus. À l'époque dont vous parlez, qu'est‑ce qui aurait dû être en place? Dans un monde idéal, qu'est‑ce qui aurait pu rendre le sport plus sûr pour vous, faire que ce milieu aurait été meilleur pour vous? Et, corollairement, que faudrait‑il mettre en place maintenant pour ces autres jeunes femmes qui se trouvent dans la même situation que vous à l'époque, et notamment les jeunes femmes autochtones et qui sont exposées aux désavantages intersectionnels?
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Je me fais l'écho du message selon lequel on amène son bagage de vie sur le terrain, dans la piscine ou sur la piste. Certaines choses ne peuvent pas être changées, que ce soit le sexe, l'orientation sexuelle, l'origine ethnique, la race, l'identité de genre. Si c'est perçu comme un problème, le sport perd de son attrait pour les personnes concernées, qui ne voudront plus y consacrer de temps. C'est trop difficile et la plupart des personnes abandonnent la lutte.
C'est très dommage de voir des athlètes d'élite qui sont parvenus au sommet et qui se retrouvent dans cette situation. Ils ont travaillé toute leur vie pour y arriver, mais ils ne se sentent pas à l'aise et en sécurité dans cet environnement. Ils se demandent ce qu'ils peuvent faire. Mais ils tiennent le coup, comme quand ils ont subi une blessure aux ischiojambiers ou d'autres épreuves. Ils essaient d'oublier et ils performent. C'est pourquoi j'adore le message de l'athlète vu dans son intégralité. C'est la chose à faire.
Concernant le programme de sécurité dans le sport auquel j'ai collaboré, je crois qu'il dépendait trop du bon vouloir des personnes qui reçoivent l'information, que ce soit la plainte d'un athlète ou un message anonyme, et que le processus a été éclipsé. Il faut rendre le processus efficient et efficace si nous voulons vraiment aider les athlètes, s'assurer que leurs plaintes seront traitées de manière adéquate.
Un trop grand rôle était donné à un contrôleur qui avait aussi un intérêt dans la performance de l'équipe, le sport et les résultats. Comme il a été dit, les médailles passent avant tout. Dans la plupart des cas, les problèmes venaient du fait que c'était la même personne qui était responsable des dénonciations et des résultats sur le terrain ou sur la piste. C'est le principal problème que nous avons rencontré.
Si j'avais un conseil à donner, ce serait d'examiner les processus et de voir si une personne qui a d'autres intérêts que le bien-être des joueurs a quoi que ce soit à voir avec le processus de dénonciation. Le bien-être des joueurs va bien au‑delà des résultats sur le terrain ou des podiums. C'est beaucoup plus large. Je crois que c'est un aspect dans lequel nous nous avons obtenu des résultats positifs. Nous avons fait en sorte de dissocier les personnes ou les fonctions ayant quoi que ce soit à voir avec la performance du processus de dénonciation. Bien sûr, il faut que des gens suivent les résultats des athlètes et que ceux qui les accompagnent au quotidien… Il faut aussi que les athlètes aient accès à un lieu où des mesures seront prises, peu importe ce qui se passe.
Je reconnais que le programme de sécurité dans le sport a permis de mettre en place un mécanisme et un processus, mais il faut faire un contrôle et une évaluation tous les ans, ou même plus fréquemment, pour déterminer s'ils donnent des résultats positifs. Est‑ce que les athlètes font des dénonciations qui aboutissent au bon endroit? Est‑ce qu'elles sont prises au sérieux? Est‑ce que le suivi est adéquat?
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Merci, madame la présidente.
Je remercie tous les témoins d'être venus aujourd'hui nous faire part de leurs expériences. Ils contribuent à ce qui sera, je l'espère, un changement de culture pour les femmes et les filles dans le sport.
Madame Clermont‑Dion, je vous ai vue réagir fortement pendant les témoignages des victimes. Je suis curieuse d'entendre vos propos, étant donné que vous êtes vous-même une survivante, mais que vous travaillez maintenant auprès de joueurs de la Ligue de hockey junior majeur du Québec.
Quelles sont vos premières impressions en entendant ce qui se dit aujourd'hui?
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Je dirais que c'est l'abus de pouvoir qui me fait réagir. Il faut très certainement sensibiliser à ces questions les gens qui sont en position d'autorité et de pouvoir, mais aussi mettre en œuvre de façon adéquate un système réel et efficace pour responsabiliser les entraîneurs et ces personnes en position de pouvoir.
En plus de ce processus de responsabilisation qui devrait être mis en œuvre, il devrait y avoir un lieu où les personnes pourraient porter plainte plutôt que de recourir au processus de dénonciation. Par exemple, l'entraîneur de Mme Horn‑Miller aurait dû assumer la responsabilité de ses gestes. Ce qui me fascine un peu, sans toutefois me surprendre, c'est le silence, la complicité des gens qui étaient en position d'autorité, un comportement qui a comme effet de banaliser les violences sexuelles.
J'aimerais revenir à mon message principal de tout à l'heure, à savoir que le fait de blâmer les victimes est omniprésent, tout comme les rapports de domination. Ayant moi-même porté plainte contre une personne en position d'autorité — j'étais stagiaire, et c'était mon patron —, j'ai vu ce système à l'œuvre, même s'il s'agissait d'une culture autre que sportive. Il s'agissait d'une personne reconnue, qui avait de l'ascendant sur moi.
J'ai donc pu observer la déresponsabilisation de certaines personnes en position d'autorité. Ce sont des comportements que l'on voit dans tous les milieux. Par conséquent, il faut donc un lieu indépendant où l'on peut porter plainte lorsque le système de dénonciation ne fonctionne pas.
Évidemment, il y a aussi la peur de dénoncer, qui est liée à la peur de déplaire et à la crainte de ne pas faire la bonne chose. De plus, on ne veut pas nuire aux équipes. Or, c'est un changement de mentalité qui doit se faire de façon durable. Il faut donc qu'il y ait des discussions et de la sensibilisation, mais aussi des sanctions. En effet, l'éducation n'est pas suffisante; il faut aussi des sanctions.
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Il faut absolument cette commission d'enquête indépendante, effectivement. C'est une des solutions à long terme. Nous en avons parlé, ce problème est systémique et répandu, et non anecdotique comme il a toujours été perçu. Ce que nous entendons et voyons aujourd'hui ne représente que la pointe de l'iceberg.
Combien de personnes ne parleront pas? Tout le monde n'a pas nécessairement la possibilité de raconter aujourd'hui ce qui s'est passé. Combien de Canadiennes ont-elles subi des abus innommables? Il y en a un très grand nombre.
Cette commission est donc nécessaire. Il faut aussi une volonté politique de changer le système de façon durable. Nous assistons aujourd'hui à une transformation sans précédent de la société. Sans le mouvement #MeToo, nous ne serions pas ici aujourd'hui en train de dénoncer ces violences. C'est pourtant nécessaire.
En effet, la solution ne peut pas passer uniquement par la voie juridique traditionnelle. Quand on est victime, qu'on soit athlète ou non, de quelles options dispose-t-on pour porter plainte? Il y a le processus judiciaire. Cependant, je pense que beaucoup de communautés ne font pas confiance aux forces policières, et avec raison. Il y a donc cette première voie, qui n'est pas toujours adéquate. L'autre voie est un système qui nous semble gangrené et peu fiable, en fin de compte.
Il faut absolument que cette enquête ait lieu afin qu'on trouve des moyens réalistes et pertinents pour faire évoluer la suite des choses.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je remercie tous les témoins d'être avec nous. Merci, madame Horn-Miller, de nous avoir parlé de votre expérience.
Comme je l'ai dit à d'autres témoins, nous sommes tous bouleversés, mais nous étions déjà au courant de ce qui se passait. Il y a eu tellement de documentaires au fil des années, mais il y a eu tellement de complaisance aussi, de la part des gouvernements fédéraux, des gouvernements provinciaux, des milieux sportifs. C'est inacceptable.
Madame Horn-Miller, vous avez dit qu'on vous a conseillé de vous taire avant que vous arriviez dans l'équipe. C'est quelque chose qui semble récurrent. Quand vous avez essayé de faire quelque chose, des anciens joueurs, des entraîneurs et des arbitres vous ont dit de vous occuper de vous. Est‑ce que c'est une pratique courante?
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Vous avez dit quelque chose qui m'a beaucoup choquée. Vous avez pris votre courage à deux mains, vous avez déposé une plainte contre l'entraîneur qui occupait un poste de direction subventionné par Sport Canada.
Mme Waneek Horn-Miller: [Conformément à une motion adoptée par le Comité le 30 janvier 2023, le présent témoignage a été supprimé du compte rendu. Voir le Procès-verbal de la séance du 30 janvier 2023]
Mme Leah Gazan: Plus nous entendons de témoignages, plus il devient évident pour moi… Je vais vous donner un exemple. Au Manitoba, nous avons un système de protection de l'enfance qui prend l'eau de partout. Des enfants pris en charge par ce système meurent. La plupart de ces enfants sont vulnérables dans les systèmes qui ont été mis en place et qui n'arrivent pas à les protéger. J'ai l'impression que tous les systèmes comme Sport Canada et d'autres organismes se retrouvent dans une position où ils ne protègent pas les enfants et les jeunes adultes. C'est maintenant évident pour moi.
Au Manitoba, nous avons un Bureau du protecteur des enfants. C'est une instance indépendante du système de protection de l'enfance et du gouvernement provincial.
Pensez-vous qu'il serait essentiel de créer une instance indépendante pour assurer la sécurité des enfants et des jeunes adultes dans le sport?
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Merci, madame la présidente.
J'aimerais prendre un moment pour remercier nos trois témoins.
Mes questions s'adressent à Mme Clermont‑Dion. Puis, s'il me reste du temps, je reviendrai à M. Weaver.
[Français]
Madame Clermont‑Dion, vous avez parlé du système et de ce dont nous avons besoin pour réparer ce système. Vous avez aussi parlé d'éducation et de sensibilisation et je suis totalement d'accord avec vous à cet égard.
Toutes les recommandations qui nous ont été faites jusqu'à maintenant visent vraiment à ce que les victimes puissent raconter leur expérience.
Pour l'avenir, nous voulons protéger dès maintenant nos jeunes et nos adolescents qui entrent dans le monde du sport.
[Traduction]
Nous voulons un système sportif plus sûr pour les enfants et les jeunes qui se lancent dans le sport.
Vous avez mentionné la mise en place d'un processus transparent afin que les gens connaissent les étapes éventuelles si quelque chose leur arrivait et à qui s'adresser pour se plaindre. Pouvez-vous nous donner plus de détails sur les éléments qu'un tel processus devrait comporter?
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Je vous remercie de votre question.
Le processus est très important dès la réception d'une plainte, que ce soit dans le système judiciaire ou à l'extérieur de celui-ci.
Il faut que les premiers répondants soient correctement habilités à recevoir les plaintes, c'est-à-dire en faisant preuve d'empathie, d'écoute et de bienveillance. Vous allez me dire que c'est subjectif, mais ce sont des techniques qui peuvent être utilisées et transmises si ces premiers répondants sont bien formés. On sait que, dans le cadre d'un tel processus, l'accompagnement tout au long de la prise en charge est fondamental.
Il faut donc que les répondants sachent pratiquer l'écoute active. Plutôt que de chercher à culpabiliser les victimes comme cela peut parfois être le cas dans le système criminel, les policiers et les intervenants doivent employer des techniques d'interrogation faisant appel à l'écoute active. C'est un premier élément.
Ensuite, je pense qu'il faut bien informer les plaignants et les plaignantes de ce qui s'en vient, parce qu'un processus de plainte comprend des étapes qui peuvent être traumatisantes. Quand je parle de traumatismes, je fais référence au fait que la personne peut vivre une nouvelle victimisation lorsqu'elle témoigne et qu'elle raconte son histoire, ce qui peut la rendre vulnérable durant le processus. Il faut vraiment faire attention à cela et il faut s'assurer de ne pas exiger trop de témoignages de la part de la victime: un seul devrait suffire.
Bien sûr, il faut que les victimes fassent confiance au processus de plainte. Plus on sait de quoi il s'agit et par qui le processus est mené, mieux le processus se passera. Par exemple, le processus pourrait être mené par des experts en matière de violence sexuelle ou de violence psychologique. Les victimes doivent avoir confiance et je crois que cela nécessite systématiquement un appui psychologique pour aider les plaignants et les plaignantes. Quand on porte plainte, cela vient réveiller des choses très difficiles et, sans l'appui d'un psychologue qui sait écouter, le processus peut être extrêmement anxiogène.
Il faut également s'assurer que le fait d'entamer ce processus de plainte nenuira pas à la future carrière de l'athlète. Pour ce faire, il faudrait peut-être sanctionner les personnes qui ont laissé ces événements se produire.
Je sais que c'est compliqué et que nous aurions pu aller plus loin, mais c'est un début de réponse.
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Pendant que tout le monde prend place, j'aimerais souhaiter la bienvenue à notre prochain groupe de témoins.
D'Athlétisme Canada, nous accueillons Chris Winter, directeur des programmes nationaux et du sport sécuritaire; et de Volleyball Canada, Mark Eckert, président et directeur général. Ils participent en ligne. Sur place, du Centre de documentation pour le sport, nous accueillons Debra Gassewitz, sa présidente et directrice générale.
Vous disposez chacun de cinq minutes pour votre déclaration liminaire. Lorsque vous me verrez faire des moulinets, je vous demande de conclure vos remarques dans les 15 secondes qui suivent.
Je cède maintenant la parole à Mark Eckert.
Monsieur Eckert, vous avez la parole pour cinq minutes.
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Je remercie le Comité de m'avoir invité à prendre la parole au nom de Volleyball Canada.
J'ai écouté les déclarations et les histoires des personnes qui ont fait part au Comité de leur vécu jusqu'à présent, et wow, elles ont été très poignantes. J'espère avoir l'occasion de parler de certaines mesures que nous prenons pour améliorer la situation dans ce domaine.
Tout d'abord, j'aimerais vous fournir quelques renseignements sur notre sport.
Le volleyball a un taux de participation féminine élevé, surtout chez les jeunes. En 2022, nos championnats nationaux juniors ont attiré deux fois plus de joueuses que de joueurs. La participation féminine était également plus élevée lors de nos championnats nationaux de volleyball de plage, les joueuses étant peut-être inspirées par le succès de nos équipes féminines aux championnats du monde.
Les équipes et les programmes féminins du Canada ont beaucoup progressé sur la scène internationale au cours des dernières années. Les Canadiens peuvent en être fiers, mais il n'y a pas que de bonnes nouvelles. Malheureusement, la plupart de ces jeunes athlètes n'ont été entraînées que par des hommes et souvent, le volleyball junior est le point final de leur parcours.
Nous devons nous poser des questions difficiles. Quels sont les obstacles pour les athlètes féminines et les entraîneuses? Comment Volleyball Canada et ses partenaires peuvent-ils aplanir ces obstacles pour les entraîneuses et les arbitres féminines? Comment pouvons-nous rendre notre sport plus attrayant et plus accueillant pour les femmes de tous âges, dans tous les rôles? Vraiment, d'abord et avant tout, comment pouvons-nous rendre l'environnement sportif aussi sûr que possible pour toutes, surtout pour celles qui se sont senties vulnérables ou exploitées dans le passé?
Volleyball Canada n'est pas à l'abri des défis auxquels le sport est confronté. Le travail pour rendre notre sport plus sûr est en cours, mais il est loin d'être terminé. Voici quelques-unes des initiatives qui contribuent à rendre le sport plus sûr.
Volleyball Canada exige de tous ses participants, comme c'est le cas dans de nombreux sports, qu'ils suivent une formation sur la sécurité dans le sport et, grâce à la formation des entraîneurs, nous avons intégré le programme de sécurité dans le sport et le programme de respect dans le sport à l'ensemble du système.
Volleyball Canada a été l'un des premiers ONS à adhérer au programme Sport Sans Abus. Comme nous l'entendons sans cesse, il est crucial que les participants disposent d'un mécanisme indépendant et qu'ils aient l'assurance que leurs plaintes sont entendues sans jugement et sans préjudice.
C'est un système qui évolue, et je suis encouragé par l'adhésion et la participation de nos partenaires à l'échelle provinciale et de leurs clubs affiliés. Nous ne pouvons apporter des changements concrets si nous ne travaillons pas de concert.
Nos associations provinciales et territoriales reconnaissent elles aussi l'importance de travailler ensemble sur les politiques. Nous avons mis en place des politiques pancanadiennes afin de favoriser la cohérence dans la façon dont nous traitons les problèmes à travers le pays.
Avec l'aide de nos partenaires financiers, Volleyball Canada s'est associé à l'athlétisme et à la natation pour créer un outil de sécurité sportive pour les jeunes. Notre objectif est de créer et de mettre en œuvre une plateforme numérique qui favorise l'éducation et la participation au sport sécuritaire pour les athlètes âgés de 11 à 18 ans. Cette plateforme servira à sensibiliser les jeunes athlètes à différents aspects du sport sécuritaire, notamment la prévention des mauvais traitements, le soutien en santé mentale et la nutrition. Nous avons consulté nos partenaires provinciaux et territoriaux ainsi que les clubs pour obtenir leur avis sur le projet afin de garantir une collaboration fructueuse.
Nous avons aussi eu la chance de travailler avec des associations, comme Femmes et sport au Canada, sur le Manuel de l'équité des genres. Cela nous a aidés à regarder vers l'intérieur avant de commencer à modifier les stratégies et les programmes externes.
Volleyball Canada est en train de procéder à des vérifications culturelles indépendantes de quelques-uns de ses programmes, ce que certains appellent des examens de l'environnement. Ces vérifications visent à déterminer comment nous pouvons être plus inclusifs et mieux servir nos athlètes en tant que joueurs et personnes. Je pense que les vérifications culturelles sont tout aussi importantes que les vérifications financières qui sont typiques dans le sport, et qu'elles doivent être régulières.
Avec l'aide de nos partenaires du Comité olympique canadien, nous avons entrepris un examen de la diversité, de l'équité et de l'inclusion mené par Deloitte. Cette expérience est déjà révélatrice pour toutes les personnes concernées.
Nous avons des femmes à des postes de direction, y compris notre entraîneuse en chef de l'équipe féminine en salle et notre entraîneuse en chef de l'équipe paralympique féminine. Plus de 40 % des membres de notre conseil d'administration sont des femmes. Nous ajoutons davantage de personnel féminin aux stades du développement et de la relève, mais ce n'est pas suffisant.
Nous devons faire en sorte que le parcours qui mène au succès est balisé et délibéré. Nous devons travailler ensemble et montrer que notre sport est un endroit où les filles et les femmes peuvent s'épanouir et réussir tout au long de leur vie et de leur carrière. Je suis le père de deux filles qui ont participé à plusieurs sports organisés. Il y a donc un côté personnel et professionnel à cette quête pour assurer la sécurité des athlètes et rendre notre sport plus inclusif et accueillant.
En apportant des améliorations ciblées à l'ensemble du système, depuis les clubs locaux jusqu'à nos équipes nationales, nous assisterons au changement nécessaire pour que notre sport reste pertinent, inclusif et agréable pour tous.
Je vous remercie de votre attention.
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Bonjour et merci au Comité de me donner l'occasion de m'adresser à vous tous.
Je m'appelle Chris Winter. Je suis directeur des programmes nationaux et du sport sécuritaire d'Athlétisme Canada, l'organisme national de sport pour l'athlétisme, le para-athlétisme, la course sur route, le cross-country, la marche athlétique et la course en montagne et sur sentier. J'ai personnellement été dans le monde de l'athlétisme toute ma vie, ayant adhéré à un club d'athlétisme à l'âge de neuf ans. J'ai eu la chance de représenter notre pays aux championnats du monde, aux Jeux du Commonwealth et aux Jeux olympiques de 2016.
Athlétisme Canada est un organisme qui croit fermement à la diversité et à l'accessibilité du sport, surtout dans l'optique de la diversité de genres. Dans son plan stratégique pour 2028, l'organisme a pour objectif de continuer à accroître la diversité, y compris l'équité des sexes, dans tous les rôles, ainsi que d'améliorer sans cesse les politiques et la gouvernance du sport sécuritaire.
À la base, l'athlétisme et sa structure de compétition offrent des chances égales aux hommes et aux femmes. Les programmes de nos équipes nationales offrent une égalité des chances similaire aux hommes et aux femmes. Dans cet esprit, l'une des priorités de l'organisme a été de veiller à ce que le conseil d'administration et le personnel de notre bureau national ressemblent à la diversité que notre sport présente sur le terrain.
En ce qui concerne nos membres entraîneurs, nous constatons qu'il y a un nombre relativement égal d'entraîneurs masculins et féminins au niveau de la base et des clubs. Cependant, ces chiffres penchent fortement en faveur des hommes à l'échelle nationale, donc nous avons du travail à faire.
Athlétisme Canada veut être reconnu comme un chef de file dans la croissance et le développement de l'équité des genres et au cours des dernières années, l'organisme a pu profiter d'un programme de subvention de Sport Canada pour travailler avec Femmes et sport au Canada en vue de se soumettre à une vérification de l'équité des genres. Cela a été suivi de la formulation d'un plan d'action pour l'équité des genres qui garantit qu'Athlétisme Canada s'efforce d'être un organisme de premier plan au niveau mondial en fournissant un environnement qui assure l'équité des genres et un environnement sûr à tous les niveaux dans l'ensemble de notre sport; qui est un reflet de nos membres en nous assurant de créer consciemment un organisme représentatif de notre bassin de membres à tous les égards; qui encourage les femmes et les hommes à travailler ensemble dans un sport où ils participent également à tous les niveaux, créant le succès ensemble; et qui maintient un parcours permettant aux femmes d'occuper des positions à tous les niveaux de l'administration et de l'entraînement par un effort concerté.
Des recommandations ont été formulées dans les domaines suivants: gouvernance, leadership et stratégie; recrutement, sélection et promotion; valeurs et culture; mesure et suivi; et accroissement du bassin.
Un domaine reconnu comme une priorité était le recrutement et le soutien d'un plus grand nombre d'entraîneuses afin qu'elles puissent atteindre le niveau de l'équipe nationale et de l'élite. À ce titre, Athlétisme Canada a lancé son programme national de mentorat d'entraîneuses à l'automne 2021 avec beaucoup de succès. Dans le cadre de ce programme, six entraîneuses mentores ont fait profiter de leur leadership à 16 entraîneuses mentorées. En 2022‑2023, ce programme a encore pris de l'ampleur. Nous avons maintenant 11 entraîneuses mentores qui travaillent avec 22 entraîneuses mentorées.
Depuis la formulation de ces recommandations, Athlétisme Canada a aussi formé un comité de la diversité, de l'équité et de l'inclusion pour aider à stimuler le changement nécessaire. Au cours des 12 derniers mois, le comité de la DEI s'est principalement concentré sur l'élaboration d'une politique d'inclusion des personnes transgenres et de la diversité de genres que notre conseil d'administration et nos membres ont approuvée lors de récentes réunions à Ottawa. L'attention va maintenant porter sur le plan d'action pour l'équité des genres.
En ce qui concerne le sport sécuritaire, l'athlétisme n'a pas été à l'abri de sa part de défis. En 2015, en réponse à ces problèmes, Athlétisme Canada a été l'un des premiers organismes nationaux de sport, sinon le tout premier, à désigner un tiers indépendant pour recevoir les plaintes de violation du Code de conduite pour prévenir et contrer la maltraitance dans le sport d'Athlétisme Canada. Depuis la création du bureau du commissaire, les politiques, la gouvernance et les procédures ont été sans cesse revues et améliorées. Nous disposons aujourd'hui d'une série complète de politiques visant à garantir non seulement un environnement sportif sécuritaire pour tous les participants, mais un mécanisme approprié pour traiter toute violation du code de conduite.
Des exemples de ces politiques comprennent les lignes directrices relatives à la protection des athlètes, la politique de dépistage et les exigences connexes, une politique de dénonciation et une politique de diversité, d'équité et d'inclusion. Athlétisme Canada est aussi en train de faire la transition au programme Sport Sans Abus pour traiter toutes les plaintes relatives au sport à l'échelle nationale, mais il conservera son bureau du commissaire afin de fournir un mécanisme de signalement indépendant pour les plaintes qui ne relèvent pas de la compétence de ce programme.
En matière d'éducation et de prévention, comme M. Eckert l'a évoqué, Athlétisme Canada collabore avec le volleyball et la natation à la création d'un programme d'éducation sur le sport sécuritaire pour les jeunes, conçu explicitement pour les jeunes de 11 à 18 ans. Le financement provient du Comité olympique canadien. Nous espérons qu'une fois que ce programme sera mis en place, d'autres ONS seront en mesure d'adopter ce programme pour leurs propres athlètes.
Je tiens à conclure en disant qu'en tant que directeur des programmes nationaux et du sport sécuritaire, je suis responsable de la sécurité de nos athlètes. Ma priorité est de veiller à ce qu'ils participent à un sport sûr et positif, et de faire en sorte que si des athlètes se sentent mal à l'aise ou se trouvent dans une situation où ils pensent être maltraités ou exploités, ils aient la possibilité d'en parler. Nous devons briser la culture du silence dans le sport. Je sais que je parle au nom de notre organisme dans son ensemble quand je dis que nous sommes prêts à collaborer et à soutenir toutes les mesures nécessaires pour faire du sport l'espace positif et sûr qu'il doit être.
Merci beaucoup.
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Merci, madame la présidente, et merci au Comité permanent de la condition féminine de m'inviter à vous parler au nom du Centre de documentation pour le sport. Tout au long de mon intervention, j'utiliserai le sigle CDS.
Aux survivants qui se sont manifestés et qui ont raconté leur vécu, et à ceux qui ne l'ont pas fait, je dis que je suis de tout cœur avec chacun d'entre vous, car personne ne devrait avoir à subir les mauvais traitements et les préjudices que vous avez subis. Comme parent, comme bénévole, comme fille qui a aimé le sport en grandissant et aujourd'hui, comme personne travaillant dans le sport, je suis fermement convaincue que nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour nous assurer que personne — et surtout les enfants — ne soit maltraité ou blessé de quelque manière que ce soit.
Si je suis venue aujourd'hui, c'est parce que je crois que nous pouvons améliorer la situation. Pourquoi? Parce que je vois les comportements changer.
Le CDS est le chef de file canadien de la promotion du sport par la connaissance et les données probantes et notre rôle est d'aider à répondre aux questions, de faciliter les conversations et de diffuser les connaissances au sein du secteur sportif. Nous ne sommes pas un groupe de défense des intérêts. Nous sommes un centre de ressources reconnu pour sa neutralité et son désir d'aider à trouver des renseignements crédibles, d'écouter et d'apprendre.
Par exemple, il y a 10 ans, les commotions cérébrales étaient peu connues dans la sphère publique. Les athlètes, les entraîneurs, les parents, les responsables sportifs et les médias semblaient tous adhérer à la mentalité selon laquelle il fallait « endurer ». En 2016, le gouvernement, dirigé à l'époque par le gouverneur général David Johnston, a adopté le principe selon lequel « nous pouvons faire mieux ». Les ministres ont érigé en priorité la sensibilisation aux commotions cérébrales, leur gestion et leur prévention ainsi que la collecte de données pour que nous puissions continuer à apprendre. Aujourd'hui, tous les organismes nationaux de sport ont des politiques obligatoires en matière de commotions cérébrales, les provinces ont mis en œuvre des protocoles relatifs aux commotions cérébrales, l'Ontario tient la Journée de la Loi Rowan et les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont désigné la quatrième semaine de septembre comme semaine de sensibilisation aux commotions cérébrales afin que nous puissions continuer à apprendre.
La lutte aux commotions cérébrales au moyen de recherches et de données probantes n'est qu'un moyen de rendre le sport plus sûr pour les athlètes canadiens. La sécurité dans le sport ne se limite pas à la sécurité physique.
Nous avons entendu parler des préjudices et des mauvais traitements horribles subis par nos athlètes, et nous savons que notre gouvernement est à l'écoute...
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C'est une bonne ligne, vous allez voir.
Nous savons que le gouvernement est aussi à l'écoute. En 2019, les ministres ont approuvé la Déclaration de Red Deer pour la prévention du harcèlement, de l'abus et de la discrimination dans le sport. Après une série de sommets pancanadiens du sport, le Code de conduite universel pour prévenir et contrer la maltraitance dans le sport, le CCUMS, a été publié. Trois ans plus tard, en 2022, le Bureau du commissaire à l'intégrité dans le sport, le BCIS, un organe indépendant du Centre de règlement des différends sportifs du Canada, le CRDSC, a été lancé pour administrer le CCUMS.
Ces mesures rapides montrent que le gouvernement a écouté et aidé, mais il faut en faire plus, ce qui nous amène au renouvellement de la politique canadienne du sport. En février 2022, des groupes de travail sur la politique canadienne du sport ont fait appel au CDS pour les aider à approuver la nouvelle politique et à trouver de l'information connexe. Depuis, plus de 5 000 Canadiens d'un océan à l'autre ont participé à 28 séances de consultation et un sondage en ligne disponible en anglais, en français, en inuktitut et en inuinnaqtun a été réalisé.
Les Canadiens nous ont dit que le sport fait partie intégrante de la santé et de la culture au Canada. Le sport a été décrit comme étant important pour la santé physique, psychologique, émotionnelle et communautaire. Il est considéré comme une partie intégrante de notre tissu national, un tissu qui nous unit et nous rassemble. À maintes reprises, nous avons entendu parler de l'importance du sport en tant que moteur d'un mode de vie sain et actif qui nous permet de nous amuser et de vivre la culture canadienne.
Nous avons aussi entendu dire que pour créer ces avantages pour les Canadiens, le sport doit être sûr, positif et fondé sur des valeurs. Les valeurs et l'éthique ont été citées comme priorité absolue du sport local pour 53 % des répondants au sondage. Les valeurs et l'éthique figurent aussi parmi les trois principales priorités du sport de compétition, le développement des athlètes arrivant en tête de liste avec 68 %. Les répondants ont également exprimé une inquiétude généralisée quant à la perception de la culture de « la victoire à tout prix » qui fait passer les performances des athlètes avant leur santé, leur sécurité et leur bien-être.
Tout ceci est très important pour l'avenir, et les participants ont souligné que le sport sécuritaire ne se limite pas à des programmes adaptés au développement et techniquement solides. Il faut mettre l'accent sur la formation obligatoire à la sécurité dans le sport et sur la formation contre le racisme et à la sensibilisation culturelle pour tous ceux qui gravitent dans le milieu sportif. Nous insistons ici sur le mot « tous », c'est‑à‑dire les participants, les athlètes, les parents, les entraîneurs, les officiels, les administrateurs et les dirigeants. C'était sans équivoque: tout le monde est concerné.
En plus de l'éducation et de la responsabilisation, le lancement du BCIS était très important. Il y a un besoin évident de messages, de ressources et d'uniformité dans l'ensemble du système.
Les consultations sur la politique canadienne du sport ont révélé un désir manifeste de voir le Canada devenir un chef de file mondial en matière de sport sécuritaire, alors qu'est‑ce que le gouvernement peut faire? Nous devons commencer par écouter les Canadiens, surtout nos survivants. Nous devons collaborer et faire du sport sécuritaire une priorité gouvernementale, et nous devons financer des programmes durables pour promouvoir le sport sécuritaire à tous les niveaux de pratique sportive. Des initiatives d'éducation et de sensibilisation, appuyées par des données, sont nécessaires pour modifier les comportements dans l'intérêt de tous dans le milieu sportif.
Merci de m'avoir écoutée. Nous voulons aider.
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Mettons à profit l'expérience de l'observation des énormes répercussions des commotions cérébrales. Elles ont été largement diffusées parce que le gouvernement en a fait une priorité. Cela a signifié que le financement était durable afin que les gens puissent élaborer, mettre en œuvre, surveiller et évaluer des programmes et continuer à les élargir. Cela a signifié que la sensibilisation s'est poursuivie. Cela a permis à la sensibilisation de passer par toutes les avenues et tous les niveaux du sport — nos niveaux national et provincial-territorial — jusqu'à nos communautés, afin qu'elle puisse faire son effet.
À partir de là, je dirais que la même chose s'applique ici. À l'avenir, il ne devrait pas s'agir d'un événement ponctuel, de sorte que cette année, c'est le sujet dont nous parlons tous simplement parce qu'on en parle dans les médias. Pour que les choses changent vraiment et pour que nous ayons un effet sur la société, je pense que le gouvernement doit en faire une priorité à long terme. Ensuite, vous pouvez lui permettre de passer par les étapes naturelles de la modification du comportement.
Une intervention ponctuelle et à court terme ne va pas modifier les comportements. Elle permettra de cocher une case et donnera un sujet de reportage aux médias. Pour réaliser un investissement à long terme et permettre aux différentes régions, provinces et parties prenantes de s'adapter comme elles doivent le faire, le gouvernement — et j'entends par là tous les gouvernements — doit dire: « Oui, pour notre société, cela demeure une priorité. »
À ce niveau, je dirais qu'il faut en faire une priorité à long terme, maintenir le financement durable pour qu'il ne s'agisse pas seulement du financement de cette année et continuer à raconter l'histoire. Faire en sorte qu'elle soit connue. Examinez l'évaluation, participez au processus et mettez en œuvre ces changements. Voyez‑le comme un moyen d'apprendre. Je pense que tout est un moyen .
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À mon avis, réagir en prenant des mesures l'est aussi.
Je recommande notamment... J'ai utilisé ce matin comme exemple les services de protection de l'enfance au Manitoba. Nous savons qu'ils sont censés protéger les enfants, mais dans beaucoup de cas, ils y ont échoué. D'après ce que j'apprends — et c'est très nouveau pour moi, pour tout dire; je découvre la gouvernance —, la structure de gouvernance telle qu'elle existe ne protège pas les enfants, les jeunes adultes et les athlètes dans les sports.
Selon vous, serait‑il utile d'avoir un organisme tiers indépendant? Au Manitoba, nous avons le défenseur des enfants, vers qui les enfants se tournent. Il est complètement indépendant et son financement l'est aussi. Les athlètes et les victimes de violence pourraient s'adresser à cet organisme tiers pour demander une surveillance et un examen indépendants.
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Ils reçoivent leur mandat, qui est un document d'entente publié afin que le public en prenne connaissance. Ce document explique comment ils doivent gérer les plaintes dans ces six domaines distincts. Ils travaillent avec la partie en fournissant des renseignements aux plaignants pour s'assurer qu'ils connaissent leurs droits et savent comment se déroule le processus. Ils travaillent de différentes façons pour parvenir à un règlement, et le mode choisi dépendra évidemment de la gravité de la plainte. Toutes les plaintes qu'ils reçoivent ne concernent, bien sûr, pas toutes les pires actes, c'est-à-dire les agressions sexuelles ou la maltraitance. D'autres problèmes et d'autres plaintes peuvent être portés à leur attention.
Le processus est, je le répète, indépendant. Ils peuvent, bien entendu, poser des questions à Athlétisme Canada si des témoignages sont nécessaires de la part des organisations sportives nationales, mais ils sont en mesure de gérer ce processus de manière tout à fait indépendante. Les dossiers en question ne sont pas communiqués à Athlétisme Canada. Nous ne pouvons pas nous immiscer dans ce processus. Dans beaucoup de cas, nous ne sommes pas au courant qu'une plainte a été déposée ou qu'une enquête est en cours jusqu'au moment où le rapport est établi à la fin.
Nous estimons que c'est ainsi que le processus devrait se dérouler pour que ni le personnel ni Athlétisme Canada ne puissent s'en mêler. Nous voulons qu'il soit aussi indépendant que possible pour que les athlètes aient le sentiment d'être traités équitablement et de ne pas risquer de représailles. Évidemment, nous voulons qu'il n'y ait pas de représailles du tout, mais nous voulons aussi être certains que les athlètes n'aient pas l'impression qu'ils risquent des représailles.
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C'est une excellente question.
C'est ce qu'on nous dit haut et fort dans tout le pays. Dans notre enquête, la sensibilisation et la formation arrivent en tête des messages à retenir, de la part des athlètes comme des entraîneurs. Nos responsables, en particulier, se sont exprimés à propos de ce type de violence. Ces thèmes occupaient une place considérable.
La sensibilisation et la formation sont prioritaires pour faire passer très clairement le message à tous les niveaux, à tous les participants. Les valeurs et l'éthique, qui entrent dans la catégorie de l'entraînement sportif sécuritaire, arrivaient au premier rang dans nos sports communautaires.
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Je reviens à ma question à Mme Gassewitz.
Vous avez dit que vous n'accordez aucun financement, mais je regarde votre site Web et je vois cet article, daté du 9 juillet 2021 intitulé « Le SIRC accorde des subventions d’activation communautaire pour promouvoir la sécurité dans le sport ». On y lit ceci: « Le Centre de ressources d’information sur le sport (SIRC) est heureux de continuer à rendre le sport plus sécuritaire au Canada […] Grâce au programme de subventions d’activation communautaire du SIRC, 25 organisations ont reçu des subventions pour se concentrer sur la formation et la sensibilisation […] au sport sécuritaire dans leurs communautés. » Puis il est dit que le gouvernement donne son appui.
Vous avez, en fait, accordé des aides financières, avec l'appui du gouvernement fédéral. Je reviens donc à ma question. Vous est‑il arrivé de financer une organisation impliquée dans la maltraitance d'enfants et, dans l'affirmative, quelle a été votre réaction immédiate?