Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Bonjour et bienvenue à la 102e réunion du Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes.
Conformément au Règlement, la séance d'aujourd'hui se déroule dans un format hybride. Les participants assistent à la réunion en personne dans la salle et à distance à l'aide de l'application Zoom.
J'aimerais maintenant faire quelques commentaires à l'intention des membres du Comité et des témoins. Avant de prendre la parole, veuillez attendre que je vous reconnaisse par votre nom. Pour ceux qui participent par vidéoconférence, assurez-vous que votre microphone est activé avant de parler et qu'il est en sourdine lorsque vous ne parlez pas. Pour ceux qui sont dans la salle, assurez-vous que votre microphone est éteint. J'ai un nouveau bouton qui me permet d'éteindre tous vos microphones et vous avez donc avantage à faire attention.
Même si cette salle est équipée d'un système audio puissant, je tiens à rappeler à tout le monde de ne pas mettre d'oreillettes près des microphones pour assurer la sécurité de nos interprètes.
Aujourd'hui, nous accueillons un groupe de quatre témoins qui comparaîtront de 11 heures à 12 h 20.
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 27 novembre 2023, le Comité reprend son étude sur la mise en œuvre du programme d'alerte robe rouge.
Je vous rappelle que la réunion d'aujourd'hui se prolongera jusqu'à 12 h 20, après quoi le Comité s'ajournera, de sorte que nous devrions avoir environ quatre séries de questions aujourd'hui.
J'aimerais maintenant accueillir nos témoins.
Aujourd'hui, nous accueillons Mitch Bourbonniere, qui comparaît à titre personnel par vidéoconférence.
Nous vous remercions d'être ici aujourd'hui, monsieur Bourbonniere.
Nous accueillons également Lorraine Augustine, présidente et cheffe du Conseil des peuples autochtones de la Nouvelle-Écosse.
Nous vous remercions beaucoup d'être ici en personne.
Nous accueillons aussi Marjolaine Étienne, présidente de Femmes autochtones du Québec inc. Mme Étienne comparaît également par vidéoconférence. Enfin, aussi par vidéoconférence, nous accueillons Melanie Omeniho, présidente de Femmes Michif Otipemisiwak.
Nous entendrons d'abord des déclarations préliminaires. Je vous demanderai de conclure au bout de cinq minutes. Vous pourrez prendre jusqu'à 10 secondes supplémentaires, mais nous tenterons de respecter le temps imparti.
Je vais d'abord donner la parole à M. Bourbonniere.
Je m'appelle Mitch Bourbonniere et je me joins à vous aujourd'hui depuis Winnipeg, au Manitoba, où j'habite et je travaille. Je me trouve sur le territoire traditionnel des Anishinabe, des Cris, des Oji-Cris, des Dakota, des Dénés et des Métis de la rivière Rouge.
Je travaille sur la question des femmes, des filles et des personnes bispirituelles autochtones disparues et assassinées. Je suis bénévole depuis plusieurs années pour un groupe appelé Drag the Red. Nous fouillons la rivière Rouge, à Winnipeg, à la recherche de preuves de la disparition et du meurtre de femmes et de filles autochtones. C'est un travail difficile et émotionnel. J'aide régulièrement des femmes dirigeantes à Winnipeg à effectuer des recherches sur le terrain et à organiser des veillées et d'autres événements liés à cette situation. J'organise sept marches communautaires différentes par semaine, auxquelles je participe, et au cours desquelles nous patrouillons dans les quartiers du centre-ville de Winnipeg.
Je travaille également sur la question des hommes et des garçons autochtones disparus et assassinés. La prochaine fête des Pères marquera notre septième marche annuelle et notre journée d'hommage aux hommes et aux garçons autochtones disparus et assassinés à Winnipeg. Je dirige deux programmes pour les hommes, l'un à Winnipeg et l'autre dans la nation crie de Fox Lake. Ces programmes visent à aider les hommes à s'en sortir et à débarrasser nos nations de la masculinité toxique, ainsi qu'à honorer les femmes et les filles à titre de donneuses de vie et de matriarches. J'ai été invité dans d'autres collectivités des Premières Nations pour conseiller les hommes de ces collectivités sur la façon de créer leur propre groupe.
Certains des hommes avec lesquels je travaille et moi-même sommes souvent sollicités par des femmes de la collectivité qui ont besoin de protection et de sécurité pendant qu'elles font leurs valises et préparent leurs enfants pour quitter une situation de violence. Nous nous asseyons de chaque côté de l'homme qui regarde sa famille faire ses bagages en vue de partir. Nous lui disons que s'il tient vraiment à essayer de retrouver sa famille, il doit venir avec nous et faire le travail difficile qui doit être fait pour guérir et se débarrasser de la toxicité qui lui a été instillée pendant toute son enfance. En effet, un grand nombre de ces hommes étaient autrefois des petits garçons qui ont vu leur mère se faire terroriser. Ils se sont sentis impuissants à protéger leur mère, mais c'est devenu tellement normal pour eux en grandissant qu'ils ont adopté le même comportement que les jeunes hommes et les hommes. Nous faisons appel au petit garçon en eux qui était horrifié par cette violence.
Dans le cadre des recherches pour les femmes et les filles autochtones disparues, nous travaillons constamment en réseautage avec divers groupes communautaires de Winnipeg, en particulier lorsque des cas particulièrement urgents de disparition de femmes autochtones se présentent. Je consulte fréquemment des groupes comme le Bear Clan, CommUNITY204, les Sabe Peace Walkers, Anishiative et le Downtown Community Safety Partnership.
En ce qui concerne l'alerte robe rouge, je suis très reconnaissant aux personnes qui s'efforcent de faire de ce projet une réalité. Je m'attends à ce que les familles des femmes et des filles autochtones disparues et assassinées participent à ce processus et à ce qu'elles soient consultées. J'aimerais également beaucoup qu'on crée un centre opérationnel stratégique local et national, doté d'un personnel rémunéré à temps plein et disponible 24 heures sur 24, qui permettrait aux aidants communautaires comme nous de communiquer en tout temps avec des experts sur cette question.
Je vous remercie beaucoup de votre témoignage. Nous vous en sommes très reconnaissants.
La parole est maintenant à la représentante du Conseil des peuples autochtones de la Nouvelle-Écosse. Madame Augustine, vous avez la parole. Vous avez cinq minutes.
Tout d'abord, je tiens à remercier le Comité de me donner l'occasion de m'exprimer contre le système d'alerte robe rouge.
Comme vous le savez, je m'appelle Lorraine Augustine. Je suis cheffe et présidente du Conseil des peuples autochtones de la Nouvelle-Écosse, qui représente la population autochtone hors réserve et les Indiens non inscrits de la province. Nous célébrerons le 50e anniversaire de l'organisme en septembre prochain.
Je n'ai pas de notes d'allocution à distribuer. Je n'ai pas l'habitude de parler à partir d'un discours écrit, mais j'ai quelques notes.
L'une des choses qui me préoccupent au sujet de l'alerte robe rouge, c'est de savoir qui sera responsable de l'administrer. Une alerte de ce type doit réellement viser les femmes. Je n'insisterai jamais assez sur ce point. Lorsqu'il s'agit d'une politique ou d'une loi du gouvernement ou de quoi que ce soit d'autre, on a toujours l'impression qu'on vise surtout les organismes ou ceux que l'on appelle les « titulaires de droits en vertu de l'article 35 ».
Pourtant, si on examine attentivement la Constitution, on constate que l'article 35 ne parle pas du tout de droits. Il parle simplement de l'identité d'une personne autochtone au Canada.
Je dois répéter que ce sont nos femmes autochtones qui doivent être protégées. Je vous garantis que vous avez un long chemin à parcourir pour élaborer cette alerte robe rouge.
Qui va l'administrer? Je pense que ce devrait être les peuples autochtones.
Sa mise en œuvre sera‑t‑elle déterminée par un calendrier? Il faut des lignes directrices précises pour la mettre en œuvre.
Je peux presque vous garantir qu'un grand nombre de femmes n'appelleront pas la GRC ou la police, car elles ont peur. Nos femmes ont été enlevées par des policiers, et elles ont été assassinées et violées. C'est la réalité.
Lorsque nous mettrons au point un système d'alerte, quel qu'il soit, nous devrons être certains de pouvoir compter sur les personnes qui l'administreront. De mon point de vue, il faut que ce soient les organismes autochtones. Si c'est la police qui s'en charge, elle devra faire appel à des femmes autochtones ou à des employés autochtones pour l'administrer.
Un calendrier sera‑t‑il établi pour le système dont vous parlez?
Des lignes directrices précises doivent être élaborées. Devrons-nous attendre 24 ou 48 heures? Nos femmes pourraient se retrouver au fond d'un fossé avant la fin de cette période. Nous devons réfléchir attentivement aux délais et aux lignes directrices concernant les personnes qui signaleront les disparitions et les meurtres et le moment où elles devront le faire.
Il faudra du temps pour mettre sur pied ce système de l'alerte robe rouge et pour amener le public à aider nos femmes autochtones. En fait, il faudra beaucoup de temps. Lorsqu'il s'agit de nos femmes autochtones, contrairement aux femmes non autochtones disparues ou assassinées… On s'occupe immédiatement de ces cas. Toutefois, lorsqu'il s'agit de nos femmes autochtones, on se contente parfois de hausser les épaules en disant que c'est juste une autre Indienne. Il va falloir beaucoup de travail pour nous faire reconnaître.
Ce système d'alerte ressemblera‑t‑il à l'alerte Amber? Entraînera‑t‑il des mesures immédiates? Qui sera autorisé à faire des signalements?
J'envie... le travail que vous allez accomplir, car il y aura beaucoup à faire pour mettre en place ce système et le faire fonctionner correctement.
N'oubliez pas qu'il ne s'agit pas des organismes. Il ne s'agit pas des organismes nationaux ou des organismes de femmes… Il s'agit de nos femmes. Nous devons inclure nos femmes. Nous devons inclure nos femmes autochtones et les protéger.
Il faut aller plus loin qu'un simple système d'alerte rouge. Nous devons envisager de prendre des mesures de prévention. Le système, pour commencer… La prévention est également un élément très important.
(1110)
Je crois qu'on m'a donné le signal, et je vais donc m'arrêter ici.
Je m'appelle Melanie Omeniho et je suis présidente de l'organisme Les Femmes Michif Otipemisiwak.
J'aimerais reconnaître que je me joins à vous aujourd'hui depuis le territoire du Traité no 6 et de la patrie de la nation métisse.
Les Femmes Michif Otipemisiwak est l'organisme national des femmes autochtones qui représente la voix des femmes métisses dans l'ensemble de la patrie de la nation métisse.
Nous défendons, à l'échelon national et international, le traitement équitable, la santé et le bien-être de tous les Métis, en mettant l'accent sur les droits, les besoins et les priorités des femmes, des jeunes, des enfants et des personnes 2ELGBTQQIA+ de la nation métisse.
L'organisme Les Femmes Michif Otipemisiwak envisage un système d'alerte à plus vaste portée qui donne la priorité aux femmes, aux jeunes et aux personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones qui risquent de disparaître, de subir des violences fondées sur le sexe et d'être victimes de féminicide. Nous pouvons y parvenir en mettant l'accent sur les expériences vécues par les personnes les plus vulnérables de nos collectivités, car il y a trop d'inégalités et d'oppression dans les structures existantes. Il s'agit notamment des femmes, des filles et des personnes de diverses identités de genre qui font déjà l'objet de signalements concernant des personnes disparues et des personnes qui sont susceptibles de faire l'objet d'une alerte robe rouge. Cela garantira une réponse plus efficace et plus rapide, et une réponse qui respecte la vie privée et l'autodétermination, qui ne mettra pas davantage ces personnes en danger et qui ne sera pas utilisée comme arme contre ces personnes.
En plus de fonctionner à partir d'une initiative dirigée par les Autochtones et de laisser la place à un leadership local axé sur les besoins de la collectivité, l'alerte doit prévoir des mécanismes qui permettent aux personnes susceptibles d'être visées par l'alerte de s'exprimer ou de fournir de la rétroaction sur le processus, y compris sur les éléments utiles et sur les éléments préjudiciables. Cette rétroaction doit également être utilisée pour améliorer le système dans son ensemble. La vision de Femmes Michif Otipemisiwak va au-delà d'un simple système d'alerte afin d'aider les personnes vulnérables à avoir accès à des soins intégrés informés par des pratiques autochtones judicieuses de réduction des risques et des soins tenant compte des traumatismes.
Nous proposons donc la création d'un organisme national à cette fin précise, tel qu'un centre de réponse aux alertes rouges qui serait indépendant de la police et qui offrirait des soutiens plus complets. Ce centre pourrait faciliter les efforts de recherche et de secours, offrir un soutien continu aux différentes étapes des affaires concernant les personnes disparues, y compris les disparitions à long terme, et servir de voie directe vers les services et les soutiens qui peuvent accroître la sécurité et la résilience des femmes, des jeunes et des personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones.
Le message principal de Femmes Michif Otipemisiwak est que les femmes, les filles et les personnes de diverses identités de genre méritent d'être en sécurité, d'être protégées et de recevoir un traitement équitable. Notre objectif ne serait pas de transmettre un message précis au grand public, qui a souvent des opinions très préjudiciables contre les Autochtones, les pauvres, etc. Nous pensons plutôt que l'alerte robe rouge devrait transmettre les quatre messages principaux suivants aux femmes, aux filles et aux personnes de diverses identités de genre.
Si vous avez disparu, nous vous chercherons.
Lorsque nous vous trouverons, nous vous aiderons.
Vous ne serez pas abandonnées ou laissées de côté.
Vous êtes aimées.
Il est important pour l'organisme Les Femmes Michif Otipemisiwak que la création, la mise en œuvre et l'évaluation du système d'alerte robe rouge accordent la priorité aux besoins et aux expériences de vie des femmes, des filles et des personnes LGBTQ2 autochtones plutôt qu'aux besoins ou à la sensibilisation du grand public.
L'alerte robe rouge doit être plus qu'un simple système d'alerte où un dossier est fermé une fois que la personne est retrouvée saine et sauve ou décédée. Il doit s'agir d'un moyen tangible d'accroître les capacités en matière de sécurité, de réduire les préjudices subis par des groupes qui font déjà l'objet d'une surveillance excessive et de mettre les personnes disparues ou à risque de disparaître en communication avec des services et des soutiens adéquatement financés.
L'objectif global doit être que l'alerte robe rouge produise des changements concrets et mesurables dans la vie des femmes, des filles et des personnes de diverses identités de genre autochtones, ainsi que dans la vie des membres de leur famille et de leur collectivité. Cette alerte doit répondre aux besoins des personnes déjà touchées ou susceptibles d'être touchées par la situation des femmes et des filles autochtones disparues et assassinées.
Si une réponse à l'alerte robe rouge était créée, il y aurait également une personne-ressource connexe [difficultés techniques].
Je dois vous interrompre brièvement, car la connexion ne fonctionne pas bien. Je vous demanderais de reprendre votre déclaration en revenant deux ou trois phrases en arrière, afin que nous puissions nous remettre en contexte. Je vais vous donner le temps restant.
L'objectif global d'une alerte robe rouge doit être de produire des changements concrets et mesurables dans la vie des femmes et des filles autochtones, et dans la vie des personnes LGBTQ2 et leur famille. Si on créait un centre de réponse à l'alerte robe rouge, il faudrait également prévoir des personnes-ressources connexes et donner à ce centre des moyens d'aider ces personnes. Cela ressemblerait à la Ligne d'urgence canadienne contre la traite des personnes où, lorsqu'une personne appelle la ligne d'urgence, elle est mise en communication avec divers soutiens.
Je vais m'arrêter ici, mais j'aimerais préciser que les intervenantes de Femmes Michif Otipemisiwak sont conscientes du fait qu'une alerte robe rouge est peut-être trop sexospécifique et qu'elle n'est peut-être pas suffisamment inclusive, et que nous devons trouver un moyen de faire en sorte que le nom utilisé représente tout le monde.
Je m'appelle Marjolaine Étienne et je suis la présidente de Femmes autochtones du Québec. Notre organisation va célébrer, au cours du mois de mai, son 50e anniversaire d'existence. Je trouvais important de souligner les 50 ans d'histoire et d'action de notre organisation, qui a su se relever après les échecs et qui a accompli de belles réalisations.
Femmes autochtones du Québec est ici pour émettre ses commentaires sur la motion qui a été adoptée. Une réunion a eu lieu en décembre ou en janvier, à ma connaissance, et nous avons pu transmettre nos commentaires quant à la mise en place d'un système qui ressemble à l'alerte Amber, soit l'alerte robe rouge.
Nous avons dit qu'il y avait des particularités dont il fallait tenir compte si ce système voyait le jour. Au Québec, il faut tenir compte de certains éléments qui pourraient assurer la mise en place de ce système. C'est probablement différent dans l'Ouest. Au Québec, des systèmes sont mis en place, mais ils sont complètement différents de ceux de l'Ouest.
Notre organisation est favorable à la mise en place de ce système, et nous nous attendons à ce qu'il voie le jour. Nous trouvons qu'il s'agit d'une piste de solution, parmi tant d'autres, qui permet d'assurer au maximum la sécurité des femmes et des jeunes filles, qu'elles soient dans leur propre communauté ou à l'extérieur de celle-ci, c'est-à-dire dans la population générale de la société québécoise.
Nous croyons qu'il est important de mettre en place le système d'alerte robe rouge. Nous croyons qu'il est nécessaire de rassembler autour d'une table les acteurs clés, qui auront un rôle à jouer et des responsabilités. Je fais notamment référence aux services policiers des différentes communautés du Québec. Plus encore, il faut tenir compte de tous les systèmes policiers à l'extérieur de nos communautés.
Si nous voulons assurer une meilleure sécurité et agir rapidement lors de la disparition d'une personne, je pense qu'il faut effectivement mettre sur pied une équipe multidisciplinaire et mettre en œuvre les mesures nécessaires. Il reste que, quand on parle de la mise en œuvre, on parle du démarrage d'une organisation. Cependant, en amont de tout cela, il faut mettre en place le prédémarrage. C'est là qu'il faut interpeller l'ensemble des acteurs clés, y compris nos chefs politiques autochtones, afin qu'ils sachent que la venue d'un tel système permettrait d'assurer ce service. Il faut voir cette mise en place d'un point de vue général et déterminer quels acteurs devront jouer un rôle important dans la mise en place de ce système.
(1125)
Tout récemment, nous avons eu l'occasion de discuter brièvement avec le chef de l'Association des directeurs de police des Premières Nations et Inuits du Québec.
Il n'y a pas eu d'interprétation de la dernière minute ou deux, même. Ce que je vais faire, c'est de m'assurer que vous aurez l'occasion de poursuivre vos réflexions pendant la période de questions.
Vous entendiez l'interprétation?
Je suis la seule à ne pas l'avoir entendue?
C'est écrit « anglais », et je n'entendais pas l'interprétation. Je n'avais pas l'interprétation de mon poste.
C'est probablement moi, monsieur. Vous le savez. Vous avez dû intervenir auprès de moi à maintes reprises.
Sur ce, je vais donner la parole à chacun pour six minutes, pour commencer. Je cède la parole à Mme Roberts pour ses questions.
Je regarde simplement quelques statistiques. Au 31 décembre, 1 186 enfants avaient été retrouvés grâce à l'alerte Amber.
Ce n'est que votre opinion, je le comprends, mais pensez-vous qu'en travaillant de concert avec l'ensemble des services de police des provinces du pays, nous pourrions intégrer cette alerte au système, afin qu'elle soit diffusée partout?
Absolument, je pense que ce serait possible. N'oubliez pas, cependant, qu'il faudrait que ce soit des Autochtones qui l'administrent, plutôt que les services de police seulement. Je pense qu'il est vraiment important que ce soit nos femmes ou nos hommes autochtones, peu importe, qui l'administrent. Les employés ou les administrateurs, quels qu'ils soient, devraient être autochtones. Je crois que nous avons une meilleure idée de ce qui se passe dans nos collectivités et chez nos femmes que quelqu'un qui voit seulement qu'une personne est portée disparue. Étant donné les statistiques sur le nombre de femmes autochtones assassinées ou portées disparues, je pense que ce genre d'administration est essentiel.
Ma prochaine question s'adresse à Mitch Bourbonniere.
Monsieur Bourbonniere, merci beaucoup de nous aider à mieux comprendre.
Ma question est la suivante: que pouvons-nous proposer, à ce comité, comme plan ou moyen pour éduquer les hommes afin que les femmes soient tout aussi respectées? Je trouve qu'il y a comme un décalage, si l'on veut. Je sais que vous en avez parlé et que vous avez dit que les petits garçons voient leur mère se faire torturer, puis qu'ils reproduisent ce comportement en grandissant.
Comment peut‑on changer cette attitude?
Je sais qu'il va falloir travailler avec les femmes pour les rendre plus fortes, mais il faut aussi travailler avec les jeunes garçons et les hommes pour leur apprendre à valoriser et à respecter les femmes autant qu'elles se respectent entre elles.
J'aimerais apporter une précision. Le phénomène des femmes et des filles autochtones disparues et assassinées vient de deux choses.
Le premier est le traumatisme causé par le colonisateur et par les hommes qui ont appris à être violents. C'est une chose. Comme la cheffe Lorraine Augustine l'a mentionné, il y a aussi des hommes non autochtones au pouvoir qui ont leur part de responsabilité dans le décès, le meurtre et la disparition de femmes autochtones. C'est très important de le dire.
Pour revenir à votre question, cela se produit magiquement et naturellement ici, à Winnipeg. Un centre de crise pour femmes et un refuge pour femmes ont communiqué avec moi et d'autres hommes en 2016. Ils nous ont tendu la main. Ils nous ont demandé de créer un programme de guérison et un lieu de guérison pour les hommes, ils nous ont en fait offert leur espace sacré. Ils nous ont invités dans leur lieu sûr pour travailler sur nous-mêmes et guérir afin que nous puissions redonner et faire oeuvre utile dans la collectivité.
Je travaille avec des garçons. Je travaille avec des jeunes. Je travaille avec des hommes. C'est le premier groupe d'hommes du genre à voir le jour à Winnipeg. Maintenant, tous les jours de la semaine, il y a un endroit où un homme peut aller rencontrer d'autres hommes et s'instruire sur le caractère sacré de la femme, comme donneuse de vie et matriarche.
J'ai ici des données de Statistique Canada qui montrent que 81 % des femmes et des filles autochtones ont été tuées par une personne qu'elles connaissaient, soit un partenaire intime — 35 % —, une connaissance — 24 % — ou un membre de la famille — 22 %. Dans la plupart des cas, la personne accusée de leur homicide était également autochtone — 86 %.
Je regarde ces statistiques et je me dis que nous avons beaucoup de pain sur la planche pour changer ces chiffres afin qu'ils ne soient plus aussi dramatiques. Je ne sais pas si vous avez lu le livre If I Go Missing . C'est un très bon livre, et c'est aussi ce qu'on y dit.
Êtes-vous en train de dire qu'en travaillant avec les jeunes hommes et en les aidant à valoriser et à respecter davantage les femmes, nous pouvons changer ces chiffres?
Nous devons également nous occuper des 20 à 25 % de personnes qui se rendent dans des communautés autochtones pour agresser, prendre, tuer, violer et assassiner des femmes et des filles autochtones. Cela ne se produit dans aucune autre collectivité.
Je tiens à vous remercier toutes et tous de vos témoignages et de tout le travail que vous faites.
S'il y a une chose à retenir de ce que chacun d'entre vous a dit, je pense que c'est cette question de confiance: il faut faire confiance au système, et ce n'est pas facile à faire. C'est ce que je retiens de vos témoignages.
J'aimerais revenir sur un sujet que Mme Augustine et Mme Omeniho ont abordé, je crois, soit le rôle du public. À mon avis, s'il y avait une alerte robe rouge, l'idée, c'est que ce devrait être comme une alerte Amber: tout le monde ouvre l'oeil pour multiplier les chances de retrouver ces femmes. Vous dites dans votre témoignage, à juste titre, je crois, qu'il y a du racisme et des préjugés dans la population, et le problème de confiance dont nous avons parlé pourrait aussi être un problème de méfiance dans la population en général. Ensuite, il y a toute la question de la protection des renseignements personnels et ce genre de chose.
J'aimerais que Mme Augustine me réponde en premier, puis Mme Omeniho. Si quelqu'un d'autre veut intervenir ensuite, libre à lui de le faire.
Je pense que le plus gros problème est le manque de sensibilisation. Une grande partie du grand public n'est même pas consciente de ce qui arrive aux Autochtones, encore moins à nos femmes autochtones. Il faudra beaucoup d'éducation pour sensibiliser les gens à ce qui se passe.
L'une de vos collègues a cité des statistiques. Si vous comparez les statistiques des femmes autochtones à celles des femmes non autochtones, la différence est très alarmante. Je pense qu'il faut informer le grand public de ce qui arrive vraiment à nos femmes autochtones. Tant que nous ne le ferons pas, beaucoup de gens — pas tous, mais la majorité — ne s'en préoccuperont pas vraiment, je suis désolée de le dire, mais à moins que cela ne leur arrive, à eux-mêmes, à un membre de leur famille immédiate ou à quelqu'un qu'ils connaissent. C'est là qu'ils se diront: « Oh, mon Dieu, c'est vraiment ce qui se passe là‑bas. »
Il faudra faire beaucoup d'éducation pour sensibiliser le public à ce qui arrive à nos femmes autochtones, et je pense que l'alerte robe rouge serait un bon début.
Madame Omeniho, vous avez utilisé un terme vraiment alarmant. Vous avez dit que cela pourrait être « utilisé comme une arme » contre les femmes. Je me demande si vous pourriez approfondir sur le sujet.
Cela peut être utilisé comme une arme. Tout d'abord, je tiens à souligner que je comprends la comparaison entre le système d'alerte Amber et ce que nous demandons avec le système d'alerte robe rouge. Je suis de ceux qui croient que le système d'alerte Amber n'est pas toujours le meilleur, parce que c'est la police qui décide qui fera l'objet d'une alerte Amber et qui n'en fera pas l'objet. Le problème pour nous, dans la perspective d'une alerte robe rouge, c'est que lorsque ce genre d'alarme retentit soudainement sur le téléphone des gens — et il ne s'agit pas seulement d'alertes Amber —, ils roulent des yeux. Ils n'aiment pas cette intrusion dans leur vie. Nous devons veiller à ce que ce ne soit pas la même chose avec l'alerte robe rouge.
L'autre chose, c'est que les femmes deviennent vulnérables lorsqu'on les cible et qu'on les cherche, surtout celles qui se cachent parce que leurs agresseurs les ont maltraitées. Elles peuvent être en fuite, auquel cas nous devons veiller à ne pas faire en sorte que ceux qui leur ont fait du mal se mettent à les poursuivre agressivement. Je n'arrête pas de dire « femmes », mais je parle de toutes les personnes vulnérables, qui peuvent aussi être des jeunes ou des membres de la communauté 2ELGBTQ. Il y a beaucoup de choses dans ce projet de loi auxquelles il faudra faire très attention dans la mise en oeuvre pour favoriser vraiment la sécurité et le bien-être des gens.
Je pense que c'est une possibilité très alarmante que le Comité doit prendre en considération.
Les deux autres témoins ont-ils quelque chose à dire à ce sujet avant que je passe à ma prochaine question?
Ma prochaine question s'adresse à M. Bourbonniere. J'ai été vraiment frappée par cette image de vous et d'autres personnes marchant le long de la rivière à la recherche de femmes. C'est tout simplement horrible de penser au fait que ce soit même nécessaire. De toute évidence, cette alerte vise à prévenir cela, à faire en sorte que nous n'ayons plus besoin de le faire, que les femmes ne soient plus portées disparues.
Étant donné que la prévention est un thème récurrent dans ces témoignages, je me demande si vous pouvez parler plus précisément de ce que nous pouvons faire pour aller au‑delà de la protection d'une femme qui vient d'être enlevée et de disparaître et travailler à la prévention en général.
Nous utilisons un bateau. Nous faisons des recherches terrestres le long de la rivière, mais nous arpentons la rivière pour deux raisons, pour transmettre deux messages. C'est un message à ceux qui commettent ces violences que nous sommes là, que nous les surveillons et que nous ne les laisserons pas faire. Le deuxième message s'adresse aux familles, c'est que nous n'avons pas oublié, que nous continuerons de chercher leurs proches et que nous n'abandonnerons jamais.
D'abord, je remercie les témoins d'être ici aujourd'hui pour cette étude sur la mise en œuvre de l'alerte robe rouge. Vous avez, tous et toutes, quelque chose à apporter. C'est extrêmement intéressant.
Madame Étienne, en tant que députée du Québec, je vais d'abord m'adresser à vous. Tout d'abord, je vous félicite pour les 50 ans d'existence de Femmes autochtones du Québec. C'est tout un exploit. Il s'agit de 50 années de travail acharné pour défendre la cause des femmes et des filles autochtones au Québec.
Dans vos commentaires sur l'alerte robe rouge, vous avez parlé des particularités du Québec. J'aimerais que vous nous en parliez davantage, parce que la création de l'alerte robe rouge est envisagée à l'échelle nationale. On sait que beaucoup d'initiatives se font déjà localement dans les communautés du Québec et des provinces. En tenant compte de ce qui se fait déjà sur le terrain à une échelle plus locale et plus près des besoins des communautés , comment envisagez-vous la mise en œuvre de cette alerte?
La particularité que je peux apporter en ce moment, c'est qu'un travail de fond reste à faire. Au niveau national, c'est autre chose. À mon avis, si on veut assurer la sécurité au maximum et la confiance à l'égard de la mise en place de l'alerte robe rouge, des tables de discussions doivent être rapidement mises en place auprès des acteurs clés. Je fais référence à des organismes ou à des services publics, comme les services policiers dans nos communautés. La démarche doit être structurée et organisée. Tantôt, on faisait référence à la sensibilisation et à l'éducation. C'est une pierre angulaire pour véhiculer et faire entendre nos messages.
Aux tables de discussions de niveau plus local, il faudra voir quel processus permettra de mettre en place le système de l'alerte robe rouge. On ne réinventera pas la roue. Des choses existent; il faut simplement les adapter culturellement aux façons de faire des Premières Nations.
Il faut aussi tenir compte de l'efficacité du service et de sa rapidité. Il faut assurer une meilleure qualité de service que ce qui existe actuellement afin de répondre aux vrais besoins selon les situations qui se présenteront. Cette table plus locale pourrait élaborer une stratégie de communication misant sur la sensibilisation et la prévention auprès de toutes les couches sociales, tant dans nos communautés que dans la société en général, soit la société québécoise.
À mon avis, un travail de fond doit être fait pour bien implanter ce service et interpeler les acteurs clés entourant ce beau projet. Ce sera une prise de conscience individuelle et collective sur des questions concernant les femmes autochtones disparues et assassinées.
Vous dites que c'est vous qui êtes le plus en mesure de savoir ce qui se fait dans vos communautés, quels sont les besoins et ce qui est le plus adapté culturellement. Je vois cela comme la nécessité de créer un dialogue de nation à nation dans une perspective de réconciliation.
C'est important de tenir compte de tout cela, sinon on va continuer d'alimenter le manque de confiance dans le système. C'est un peu ce que j'entends.
Exactement. On va effleurer ou mettre un diachylon sur quelque chose.
Vous utilisez les bons mots, les mots clés: réconciliation, confiance. Il faut mettre autour d'une table les acteurs clés et travailler à cette idée rassembleuse qui développera l'esprit de conscience individuelle et collective. Dans cet esprit de réconciliation, on se doit de travailler rapidement à cette question qui concerne les femmes autochtones.
Effectivement, c'est nous qui sommes le plus en mesure d'apporter les éléments qui permettront de répondre à un besoin réel en ce qui a trait aux femmes et aux filles autochtones disparues et assassinées.
Je vois l'implication d'une organisation comme la nôtre, Femmes autochtones du Québec, qui cumule 50 ans de connaissances et d'expertise sur les questions des femmes. Je vois également le chef régional de l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, qui représente l'ensemble des chefs. Je vois aussi le chef de police qui représente l'ensemble des chefs de police autochtones au Québec. À un autre niveau, je vois aussi Mme Johanne Beausoleil, la directrice générale de la Sûreté du Québec.
Il y a des étapes à franchir pour arriver à réunir les acteurs clés autour de cette table.
Merci à tous les témoins ici présents aujourd'hui.
Je voudrais commencer par mentionner mon frère Mitch. Je vais le gêner, parce que c'est mon frère d'adoption.
C'est une personne très humble qui passe sa vie à faire du bénévolat pour notre communauté et à sauver des vies, littéralement. Il a remporté le Prix du Gouverneur général pour avoir sauté dans la rivière Rouge afin de sauver une vie. Je veux simplement rendre hommage à Mitch.
Des voix: Bravo!
Mme Anna Roberts: Je trouvais qu'il vous ressemblait.
Mme Leah Gazan: C'est mon frère spirituel.
Je voudrais vous entendre parler avant tout du projet Drag the Red. Je pense qu'il est important que le Comité comprenne vraiment à quel point la situation est désastreuse. Le projet Drag the Red a vu le jour parce que personne ne cherchait ces femmes. Leurs proches ont donc commencé à les chercher eux-mêmes.
Lorsque vous arpentez la rivière, quel équipement utilisez-vous, et qui est avec vous dans ce bateau? Soyez très bref, parce que j'ai tant d'autres questions à vous poser.
Je vous remercie, madame Gazan, de ces mots aimables.
Cette initiative est entièrement dirigée par des bénévoles. Nous arpentons la rivière tous les soirs entre mai et octobre. Ce sont principalement des femmes qui gèrent et organisent les sorties. Elles effectuent le travail physique ardu sur le bateau. Quelques hommes et garçons apportent leur aide et leur soutien et suivent les directives des femmes sur le bateau.
Nous fouillons, littéralement, le fond de la rivière à l'aide de crochets. Il y a quelques années, nous avons trouvé un jeune homme. Je le connaissais. Nous avons pu le ramener à sa famille. De nombreuses femmes ont été retrouvées dans cette rivière, et beaucoup d'autres y disparaissent. Cette rivière pourrait raconter des histoires. Il s'agit d'un travail chargé d'émotions.
Je me suis dit qu'il était important de parler de cette initiative, car elle témoigne de l'urgence de mettre en place une alerte robe rouge. Nous ne devrions pas avoir à chercher nos proches aux fonds des rivières. Nos vies sont importantes et précieuses.
Vous avez dit que l'on banalisait la violence dans notre communauté. J'aimerais que vous nous parliez de cette réalité à l'extérieur de notre communauté.
Je vous pose cette question, car le dernier tueur en série qui a été accusé, qui subit son procès en ce moment, était un homme blanc. Shawn Lamb, qui a été accusé du meurtre de Tina Fontaine, était, lui aussi, un homme blanc.
Je pense qu'il est important de le dire, car les hommes autochtones sont souvent ciblés. On nous dit que nous devrions nous occuper de nos hommes. On me fait tout le temps ce genre de commentaires.
Pouvons-nous parler de la banalisation de la violence dans la société en général à l'encontre des femmes autochtones en particulier?
En 1990, nous avons fondé le Bear Clan Patrol. Nous avons d'abord créé cette patrouille à titre de solution de rechange à la police parce que nous voyions bien que des hommes non autochtones — des hommes blancs aisés des banlieues qui conduisaient des véhicules haut de gamme avec des sièges pour bébés à l'arrière — venaient au centre-ville et dans les quartiers autochtones pour ennuyer, prendre, profiter et abuser des femmes et des filles autochtones, qui ne faisaient que vaquer à leurs occupations. C'est la seule raison pour laquelle le Bear Clan Patrol a vu le jour il y a de cela 34 ans. Nous nous sommes dit que ces situations n'allaient pas se produire dans notre communauté.
La plus grande forme de racisme consiste à considérer une autre personne comme inférieure et non humaine. Ce faisant, on peut lui faire subir tout ce que l'on veut, surtout s'il s'agit de femmes. Une personne qui veut faire du mal à une nation fera du mal aux femmes de cette nation, et c'est ce qui s'est passé. Les statistiques démontrent toujours que dans 20 à 25 % des cas, ce sont des hommes blancs et non autochtones qui commettent cette violence contre les femmes et les filles autochtones.
Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de vous en parler.
En ce moment, nous avons l'impression d'être laissés à nous-mêmes. Les initiatives sont locales et tout repose sur les bénévoles et la création de réseaux.
Les familles communiquent avec notre communauté — la communauté qui apporte son soutien et à laquelle j'appartiens au centre-ville de Winnipeg. Les gens ne s'adressent pas à la police ni aux premiers intervenants. Ils ne se tournent que vers nous pour les vérifications de l'état de santé, pour les cas de violence conjugale, d'enfants disparus et de femmes et de filles autochtones disparues et assassinées. Ils communiquent avec nous. Nous avons l'impression de devoir nous débrouiller seuls et nous essayons de nous entraider à l'échelle locale.
Ce serait vraiment merveilleux de pouvoir appeler quelqu'un dans un centre, 24 heures sur 24, sept jours sur sept, pour demander de l'aide, des conseils et du soutien, savoir ce qui se passe et profiter de l'expertise de différentes personnes.
Ces centres opérationnels stratégiques seraient dirigés par des femmes autochtones qui ont une expérience vécue dans ce domaine.
C'est comme si j'interrompais le frère de Mme Gazan, alors je dois redoubler de prudence ici; nous devrons peut-être en parler après la réunion.
Des députés: Oh, oh!
La présidente: Merci beaucoup de votre témoignage.
Nous passons maintenant à notre prochaine série de questions. Les conservateurs et les libéraux auront cinq minutes chacun, et le NPD et le Bloc disposeront de deux minutes et demie chacun.
Bonjour à tous les témoins, que je remercie de leurs témoignages.
Je vous remercie, monsieur Bourbonniere, de toute cette bienveillance dont vous faites preuve, aujourd'hui. Par ailleurs, ce que vous avez raconté nous donne froid dans le dos. J'ai pris beaucoup de notes. Vous avez une vision de ce que les services devraient être. D'autant plus que votre témoignage est basé sur une expérience probante. Je vous remercie de nous avoir livré ce témoignage, ce matin.
Madame Étienne, bonjour, soyez la bienvenue à ce comité.
Je n'ai pas beaucoup de temps, alors je vais aller droit au but.
Vous semblez avoir un point de vue assez détonnant par rapport aux témoignages que nous avons entendus jusqu'à maintenant. Je ne dis pas que les autres témoins entendus font preuve de fermeture, mais ils démontrent assurément de l'inquiétude. Or vous faites preuve d'une ouverture pour ce qui est de l'accueil des policiers, des groupes policiers et des chefs policiers. Pourtant, jusqu'à maintenant, nous entendons que l'intégration des policiers dans cette opération pourrait ralentir l'élan des victimes pour faire des dénonciations, compte tenu de l'historique des événements qu'ont vécus les communautés et les femmes autochtones avec des services de police. Même Mme Augustine nous faisait part aussi de cette inquiétude.
Ai-je bien compris votre point de vue? Ce que vous dites, c'est que la police a sa place et il faut l'intégrer dans le processus; il faut qu'elle soit là. Iriez-vous jusqu'à dire que cela devrait passer par des mains policières, comme l'alerte Amber, ou, au contraire, comme d'autres intervenants l'ont dit, croyez-vous que ce sont les femmes autochtones, les groupes autochtones et les communautés autochtones qui doivent diriger cette opération?
La disparition de femmes ou de filles autochtones est l'affaire de tous. Je pense que cela nécessite une collaboration entre les gouvernements, les organismes communautaires et les forces de l'ordre. Nous avons tous un rôle à jouer dans cet enjeu. La communauté autochtone, en lien aussi avec les services qui sont déjà en place, doit effectivement être consultée. Si l'objectif est d'assurer un maximum de services pour ce qui est de la sécurité de nos femmes et de nos jeunes filles, en cas de disparition, une mobilisation doit se faire autour de cet enjeu. Il faut assurer un processus d'intervention où il n'y a pas de fissure entre la première intervention et la troisième intervention. Il faut une ligne continue pour assurer un processus d'intervention qui permettra, au bout du compte, de retracer rapidement la disparition.
Nous devons tous travailler en étroite collaboration pour nous assurer d'aller les consulter, de parler de ce projet, de pouvoir les faire participer en amont, parce qu'on parle effectivement de sensibilisation. Il faut aussi pouvoir élaborer des critères spécifiques à ce processus. À mon avis, il faut avoir une démarche qui va mener à l'implantation d'un système qui va répondre aux besoins réels des femmes autochtones.
Madame Étienne, vous êtes consciente, et vous l'entendez probablement comme nous, qu'il y a une énorme méfiance envers les services de police. Pour ce qui est d'intégrer la police, c'est mal barré.
Entendez-vous cela aussi de la part des groupes autochtones? C'est que nous entendons ici, au Comité.
J'ai eu l'occasion tout récemment de discuter avec le chef policier, le directeur et le président de l'Association des chefs de police des Premières Nations: eux aussi, ils sont préoccupés; eux aussi, ils veulent pouvoir répondre aux besoins des femmes et des filles autochtones disparues; eux aussi, ils prennent conscience...
Madame Étienne, à quoi devrait ressembler cette alerte robe rouge qu'on voudrait mettre en place? L'alerte Amber est-elle un bon exemple? Vous avez glissé un mot tout à l'heure au sujet des critères. Il y a le grand public, les délais pour commencer une recherche. Comment voyez-vous cela?
Mme la présidente va peut-être devoir nous interrompre, auquel cas je vous invite à réfléchir à toute cette question avec votre équipe et à nous envoyer les réponses par écrit.
Comment imaginez-vous, de façon terre à terre, le fonctionnement de cette alerte robe rouge?
J'entends la sonnerie du chronomètre. Vous nous enverrez votre réponse par écrit, madame Étienne.
Je remercie tous les témoins de leur présence aujourd'hui. Vous nous avez tous donné beaucoup de matière à réflexion et avez formulé des commentaires très précieux.
Mes premières questions s'adressent au frère de Mme Gazan, Mitch Bourbonniere.
Des voix: Oh, oh!
Mme Lisa Hepfner: Monsieur Bourbonniere, je dois vous dire à quel point votre témoignage est percutant. Nous avons appris beaucoup de choses en vous écoutant.
J'aimerais revenir en arrière. Dans votre déclaration liminaire, vous nous avez expliqué comment vous aidiez les hommes et les garçons à s'éloigner de cette masculinité toxique. Vous avez évoqué cette horrible situation où un petit garçon qui avait vu sa mère souffrir en était venu à trouver ce comportement normal.
En général, dans les communautés autochtones, les gens ont toujours considéré les femmes comme celles qui donnent la vie et comme des matriarches.
J'aimerais en savoir plus sur votre travail et sur la manière dont nous pouvons faire appel au petit garçon en ces hommes qui ont connu des situations horribles. Comment pouvons-nous commencer à renverser cette masculinité toxique?
Avez-vous des enseignements à nous donner que nous pourrions appliquer à d'autres cultures? C'est ma question.
J'admets que je ne veux pas prendre trop de temps de parole au sein de ce groupe de témoins, parce que je suis un homme. Je ne veux pas prendre trop de place. J'ai vraiment hâte d'entendre les autres témoins.
Je vais répondre rapidement à la question. À Winnipeg et au Manitoba, un processus naturel s'est mis en place. C'est ce que nous observons dans nos collectivités dans le Nord. Je reçois toutes sortes de demandes pour aller à la rencontre de femmes dans ces collectivités afin d'aider les hommes à guérir.
Nous savons que pour lutter contre la violence fondée sur le sexe... il ne s'agit pas d'un problème de femmes. Les femmes ne peuvent pas être les seules à essayer de le résoudre. Les hommes et les garçons doivent participer à la conversation. Je vous remercie du travail que vous abattez.
Je voudrais revenir sur votre idée de centre opérationnel stratégique qui serait ouvert 24 heures sur 24, sept jours sur sept. Ma question s'adresse à Mme Augustine.
À ce comité, nous essayons précisément de décider comment l'alerte robe rouge sera mise en oeuvre, à quoi elle devrait ressembler et qui devrait l'administrer.
Comment devrions-nous l'administrer, selon vous? Si nous avions un système d'alerte Amber... En ce moment, c'est la société Pelmorex — par l'entremise de MétéoMédia — qui gère ce système. Cependant, MétéoMédia ne décide pas qui envoie l'alerte. La société ne possède que la plateforme. Le centre pourrait donc utiliser la plateforme qui a été conçue pour l'alerte Amber et l'utiliser comme il l'entend.
L'alerte pourrait être transmise directement à un centre opérationnel stratégique composé de femmes autochtones qui serait ouvert 24 heures sur 24 et sept jours sur sept. Ces femmes pourraient prendre la décision d'envoyer ou non une alerte robe rouge, mais cette alerte pourrait quand même être diffusée sur la plateforme qui a été créée pour le système d'alerte Amber.
Pourriez-vous nous dire comment ce système pourrait fonctionner? C'est exactement ce que nous essayons de préciser ici.
Bien entendu, je pense que le centre devrait fonctionner 24 heures du 24, sept jours sur sept. Peu importe la plateforme choisie, il faudra veiller à ce que les alertes soient envoyées, comme on le fait pour l'alerte Amber. C'est très important.
Comme je l'ai dit plus tôt, le centre opérationnel stratégique doit être dirigé par des Autochtones. Il doit être ouvert 24 heures sur 24, sept jours sur sept. Il doit être régi par des lignes directrices et être à la disposition des familles qui veulent signaler un incident. Si le centre n'est pas dirigé par des Autochtones, bien souvent, les femmes et les familles de nos communautés ne voudront pas appeler ou signaler un incident, car elles n'obtiendront pas l'aide qu'elles souhaitent lorsqu'elles diront que l'incident touche une femme autochtone.
Le centre doit être ouvert 24 heures sur 24, sept jours sur sept.
Je sais que MétéoMedia — Pelmorex — peut concevoir ce système comme nous le souhaitons. Si le groupe de travail des femmes autochtones décide de diffuser l'alerte, elles peuvent choisir d'en faire une alarme intrusive qui réveillera les gens en pleine nuit. Elles peuvent décider de n'envoyer l'alarme que dans une petite partie du pays.
Madame Étienne, nous avons parlé, lors du tour de parole précédent, de la composition d'une éventuelle table de concertation et de l'importance qu'elle soit le plus diversifiée possible et qu'elle réunisse le plus d'acteurs concernés possible.
J'aimerais aussi que vous nous parliez du continuum de services. Quand on travaille contre la traite des personnes, il y a différentes étapes à suivre. La première consiste à travailler à la prévention et à l'éducation. Évidemment, nous voulons tous le faire. Ensuite, il faut détecter et repérer les femmes autochtones disparues ou assassinées et avoir les outils pour le faire; il y a donc tout un travail à faire pour avoir les lois et les moyens légaux nécessaires pour intervenir. Enfin, il faut aussi accompagner les hommes ou les femmes dans leur réhabilitation.
Au-delà de la diversité d'une table de concertation, comment envisagez-vous ce continuum de services?
Comme je le disais plus tôt, c'est l'affaire de tous. C'est avec un esprit de concertation, ou de prise de conscience collective, que nous allons pouvoir assurer un service continu pour les femmes des différentes nations.
Je ne ferai pas un retour dans le passé, car je pense que nous connaissons maintenant la situation des femmes autochtones, mais je trouve qu'effectivement, il faut revoir nos façons de faire afin que cette future structure nous permette d'agir rapidement et de savoir qui doit agir rapidement.
Je me préoccupe du fonctionnement de cette structure à une échelle plus locale. Je fais référence aux nations du Québec. Ce sont les premières communautés interpelées. Les femmes autochtones vivent dans leur milieu. Les femmes autochtones vivent dans la société québécoise. Implicitement, on doit donc interpeler l'ensemble des acteurs locaux. Le niveau national sera un autre niveau et il aura aussi un rôle à jouer, mais, avant tout, il faudra tenir compte du niveau local, car c'est la base.
Je trouve que si nous ne nous consultons pas à l'échelle locale, nous pourrions rater des éléments d'information pertinents pour mettre en place l'alerte robe rouge.
Mes premières questions s'adressent à Mme Étienne.
Pourriez-vous dire à notre comité ce qui est arrivé aux femmes à Lac-Simon? La plupart des femmes étaient originaires de Lac-Simon. Je sais que certaines venaient de Kitcisakik. Que s'est‑il passé là‑bas avec la police? Qu'a‑t‑on découvert?
En fait, en 2019, des femmes, en Abitibi, ont dénoncé certaines situations liées aux services policiers, à Val‑d'Or. Il s'en est suivi un bris de confiance à l'égard des services policiers allochtones
C'est pourquoi je propose qu'on examine de façon plus locale ce qui se passe dans nos communautés. Ces dernières ont toutes des services policiers autochtones. C'est la raison pour laquelle je crois fortement qu'il est nécessaire d'amorcer, auprès des communautés autochtones, une consultation entourant la mise en place d'un service adapté aux besoins réels des femmes autochtones. C'est la base.
Pour ce qui est du comportement, a‑t‑on signalé des incidents de violence perpétrés par la police, par la Sûreté du Québec, contre des femmes autochtones de ces communautés?
Cela a été rendu public en 2019. C'est en Abitibi, dans le coin de Val‑d'Or, que les femmes ont dénoncé publiquement des situations assez désagréables et troublantes.
Je leur tire mon chapeau et je salue la force et le courage dont elles ont fait preuve pour le dénoncer. D'ailleurs, on peut le voir dans un reportage d'ICI RDI, qui est accessible au public.
Cependant, ces situations ne se produisent pas seulement dans le coin de Val‑d'Or, mais aussi...
Comme je n'ai pas beaucoup de temps — et que ce temps est très précieux —, j'aimerais savoir ce qu'il en est de la confiance. Croyez-vous qu'une solution à ce problème serait de remplacer le service de police par un service de police des Premières Nations? La communauté se sentirait-elle plus en sécurité? S'agit‑il d'une solution dont vous avez discuté?
Selon moi, l'implication interne dans nos propres communautés permettrait de voir comment on s'organise et comment on structure la mise en place de ce service. De plus, cela permettrait de prendre en considération tous les éléments importants et pertinents pour la mise en œuvre d'un service adapté aux besoins des femmes et des filles, qui pourraient être portées disparues, entre autres.
D'habitude, je suis très stricte avec le temps qui nous est imparti. Cependant, je reconnais que ces réponses et ces questions sont toutes importantes. J'essaie donc de faire preuve de beaucoup plus de souplesse, ce qui, toutefois, nous empêchera d'avoir notre troisième série de questions.
Nous n'avons que le temps de terminer notre deuxième série de questions. Mme Ferreri aura cinq minutes et Mme Sidhu aura cinq minutes. Nous devrons ensuite lever la séance. Si vous avez d'autres questions, vous pourriez demander à vos collègues de les poser. Revenons aux questions.
Madame Ferreri, la parole est à vous pour cinq minutes.
Je remercie nos témoins. Cette étude est tellement importante.
Je remercie ma collègue, Leah Gazan, de l'avoir proposée. Cette étude est essentielle et porte sur un élément important dans toutes nos circonscriptions, partout au pays.
J'aimerais remercier M. Bourbonniere.
Votre témoignage aujourd'hui est très important pour la prévention. J'ai deux questions d'ordre logistique à vous poser.
Travaillez-vous également avec des hommes non autochtones? J'aimerais aussi savoir qui finance vos initiatives.
Non. Tout homme s'identifiant comme tel peut faire partie de notre groupe. Étant donné que ce sont des hommes autochtones qui demandent cette aide, nos groupes sont principalement composés d'hommes autochtones, mais nous accueillons certainement des non-Autochtones.
Me permettez-vous d'ajouter quelque chose? Je n'aurais besoin que de 20 secondes.
J'aimerais revenir aux 20 à 25 % de préjudices causés par des gens qui viennent de l'extérieur de la communauté. Certains chauffeurs de camion sur longue distance, certains chauffeurs de taxi, certains hommes du secteur de la construction et qui travaillent dans les « camps d'hommes » d'Hydro-Manitoba dans le Nord ont perpétré des actes de violence contre des femmes. Je dois le rappeler.
Très rapidement, parce que je suis un homme, je dois rendre hommage à nos femmes au Manitoba: Leah Gazan, Hilda Anderson-Pyrz, Sandra Delaronde, Cora Morgan, la ministre Bernadette Smith, notre députée provinciale, qui a cofondé l'initiative Drag the Red, et la ministre Nahanni Fontaine, qui a créé le cercle de matriarches.
La violence familiale a augmenté considérablement, en particulier pour cette population trop souvent ciblée de femmes et de filles autochtones assassinées et disparues. Il reste donc beaucoup à faire sur le plan de la prévention. Vous avez été très clair à ce sujet aujourd'hui. J'espère que les gens ont prêté attention à ce que vous avez dit, car nous devons briser de nombreux cycles dans lesquels les hommes et les garçons ont appris à avoir des relations très malsaines, et cela ne fait que se répéter. Nous avons beaucoup à faire. Lorsque nous examinons les modèles de financement, c'est dans ce domaine que nous devons investir.
Je vais poser mes questions à Mme Augustine. J'ai beaucoup aimé ce que vous avez dit aujourd'hui au sujet des personnes qui devront être aux commandes de la mise en œuvre d'une alerte robe rouge. Je constate que de nombreux programmes sont considérés comme étant d'excellentes idées. Cependant, on oublie souvent qu'il est nécessaire d'avoir une personne aux commandes sans quoi — comme avec un travail d'équipe au secondaire — cette bonne idée aux yeux de tous ne se concrétisera pas. D'après vous, comment cette initiative devrait-elle être mise en œuvre? Devrions-nous le faire à l'échelle provinciale? Vous avez la parole. Que peut faire notre comité pour veiller à ce que cette initiative soit mise en œuvre efficacement? Avez-vous des idées?
Je pense que la mise en œuvre devrait être gérée principalement à l'échelle nationale. Par contre, si nous voulons déployer cette initiative dans toutes les provinces, nous aurons besoin d'autres administrateurs. Il y aura des bureaux dans chaque province, en plus de l'organisme national — le bureau principal —, que je considère comme cette personne aux commandes. Il y aura un bureau dans chaque province, car le bureau national ne pourra pas accomplir tout le travail tout seul. Les provinces doivent participer au déploiement et savoir ce qui se passe sur leur territoire. Cette personne responsable dont vous parlez devrait être un organisme national qui pourrait s'appeler comme vous le voulez; ce pourrait être un centre opérationnel stratégique ou autre chose. Toutefois, cet organisme national doit être cette entité qui fera en sorte que l'initiative fonctionnera et sera opérationnelle.
Oui, le pouvoir d'une seule entité est souvent ce qui fait bouger les choses. Je suppose que nous devrions également parler des territoires et pas seulement des provinces. Nous ne voulons pas offenser les gens des territoires qui nous regardent.
Nous savons ce qui se passe dans les territoires. Évidemment, on y trouve également d'importantes populations autochtones.
La plus grande pièce manquante que j'aimerais voir dans les recommandations issues de cette étude est ce à quoi cela ressemble concrètement. J'aime beaucoup ce que vous avez proposé aujourd'hui, car j'estime que vous vous êtes exprimée avec éloquence.
Une femme, et je reviens toujours à elle — je ne me souviens plus de son nom, elle venait de la Nouvelle‑Écosse, s'appelait-elle Sandra — a réussi à faire ce qu'il fallait. Les choses se sont faites grâce aux gens sur le terrain.
Nous savons ce qu'il faut faire. Maintenant, je pense que nous avons besoin d'un champion qui dise: « voilà ce que nous allons faire et comment nous allons le faire ».
Je remercie tous les témoins de leur travail et de leur témoignage utile.
Ma première question s'adresse à M. Bourbonniere. Vous avez parlé du travail lourd et émotionnel, mais aussi de votre gestion de deux programmes de guérison pour hommes. Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?
Oui. Comme je l'ai dit, les femmes du North Point Douglas Women's Centre nous ont invités dans leur espace sacré en 2016. Elles nous ont concocté un repas, et les hommes ont eu conscience du geste de pardon sacré de ces femmes ce faisant. Elles nous ont offert cet espace sûr pour guérir. Grâce au bouche‑à‑oreille, des hommes autochtones et allochtones de la communauté, et maintenant des hommes d'un peu partout en ville, ont commencé à venir. Nous organisons des cérémonies de purification, nous chantons, nous partageons, nous rions et nous pleurons. On apprend aux hommes à ne pas dire « je t'aime », à ne pas demander d'aide et à renier leurs émotions. Nous, nous allons dans le sens contraire. Nous travaillons sur nous-mêmes pour devenir de meilleurs hommes, puis nous transmettons nos acquis à la communauté pour être des mentors, des guerriers et des soutiens. Ce sont les femmes qui nous apprennent tout cela.
Nous nous mobilisons déjà, notamment par l'intermédiaire du clan de l'Ours. Nous recevons des alertes constamment. Il y a aussi des familles qui nous contactent parce qu'elles savent qu'il faut le faire, après quoi nous nous mobilisons pour les recherches. Nous aurons besoin de femmes autochtones à la tête des opérations si nous sommes pour avoir une alerte robe rouge, qui implique un centre de commandement et des gens qui nous aident à coordonner les initiatives pour nous et avec nous.
Ma prochaine question s'adresse à vous, cheffe Augustine. Vous avez parlé de la grande importance de l'éducation et de la sensibilisation de la population en général. Qu'en est‑il des femmes et des filles? Comment pouvez-vous leur donner les moyens de lutter contre le système? Quels conseils aimeriez-vous nous donner en matière de protection de données et de la vie privée dans le cadre du système d'alerte robe rouge? Vous avez également dit qu'il devrait être dirigé par des organisations autochtones.
Je vais essayer de vous répondre rapidement. Votre question en contenait trois, en fait.
La première question à laquelle je répondrai est celle de la prévention. Je crois qu'il faudrait se pencher sur ce qui se passe lorsqu'une jeune fille quitte sa communauté, notamment. Elle se rend en ville, mais n'a nulle part où aller. Nous avons besoin de cette prévention... Elles auraient besoin d'un endroit sûr où aller pour savoir ce qui les entoure, surtout si elles sont jeunes et d'âge scolaire. Il faut des endroits sûrs pour elles. Ces derniers pourraient être publicisés sur les autobus ou ailleurs.
Pour ce qui est de la sensibilisation du grand public, là encore, c'est très difficile, parce que tous ne veulent pas savoir ou entendre parler de ce qui se passe. C'est vrai pour tout le monde. Certaines choses ne nous intéressent tout simplement pas. Il sera donc très difficile de sensibiliser la population à ce qui se passe.
Je suis désolée, mais j'ai manqué votre troisième question.
Ma dernière question portait sur la protection des données et de la vie privée au sein du système. Comment peut‑il être culturellement approprié? Pourriez-vous nous donner des conseils à cet égard?
C'est une question difficile, car ce sera très ardu d'y veiller. Savez-vous quoi? Je ne pense pas pouvoir vous répondre, pour être tout à fait franche. J'ai l'impression que cela sera vraiment difficile à faire, et qu'il faudra du temps. Il faudra faire confiance. Je pense que la confiance est le principal problème. L'éducation suit de près. Les gens veulent-ils être éduqués? Veulent-ils bâtir cette confiance?
Je voudrais vraiment remercier... Nous avons eu un excellent groupe de témoins. Nous avons entendu d'excellents témoignages dans les jours suivant nos semaines de circonscription. Je remercie les quatre témoins d'avoir été des nôtres et de nous avoir aidés à nous remettre sur la bonne voie pour notre étude.
Nous avons une réunion du sous-comité aujourd'hui, alors nous allons devoir nous dépêcher. Cela dit, je vous rappelle que nous avons besoin de votre liste de témoins pour notre prochaine étude sur le contrôle coercitif d'ici le 12 avril. Nous aimons les recevoir avant midi d'ordinaire, mais dans ce cas‑ci, nous allons vous donner jusqu'à 16 heures environ, parce que cet enjeu est fort préoccupant. Nous attendrons donc vos listes. Je vous rappelle que nous avons besoin des adresses, des numéros de téléphone et de toute autre information que vous avez à votre disposition.