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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 034 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 20 octobre 2022

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    La séance est ouverte. Bonjour tout le monde.
    Monsieur Genuis, vous avez la parole.
    Merci, madame la présidente.
    Je vais prendre un peu de votre temps pour lire un avis de motion. Je vous en fais part de vive voix maintenant, et vous aurez amplement de temps après pour la relire, l'entendre et y réfléchir. J'espère que nous pourrons en discuter dans le cadre d'une prochaine séance.
Que le Comité fasse rapport à la Chambre que, à son avis, le gouvernement devrait:
a) se doter d’un moyen efficace de lutter contre le harcèlement sexuel, la violence, les crimes haineux et diverses autres formes d’activité criminelle en mettant sur pied, en collaboration avec les autres ordres de gouvernement, les universités et la société civile, une formation enseignant aux personnes témoins de violence ou de harcèlement quoi faire et comment intervenir;
b) être favorable à ce qu’une telle formation soit offerte aux fonctionnaires fédéraux;
c) encourager les Canadiens et les Canadiennes à suivre une formation afin de savoir quoi faire et comment intervenir s’ils sont témoins de violence ou de harcèlement.
    Merci, madame la présidente.
    C'est très bien. Merci beaucoup.
    Comme la motion nous a été présentée oralement, il est très important qu'elle soit déposée par écrit pour qu'Andréanne Larouche en prenne connaissance… Nous allons la faire traduire en français et la distribuer aux membres. Je vais demander à la greffière de s'assurer que la motion vous est transmise et que tous les membres en ont une version écrite.
    Y a-t-il des questions ou des observations?
    Merci, monsieur Genuis.
    Bienvenue à la 34e réunion du Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le mardi 1er février, le Comité poursuit son étude sur la santé mentale des jeunes femmes et des filles.
    La réunion se déroulera dans une formule hybride, tel qu'il est prévu à l'ordre pris par la Chambre le 23 juin 2022. Certains membres siègent en personne et d'autres siègent à distance, au moyen de l'application Zoom. Si vous êtes en ligne, vous pouvez voir des députés ainsi que des témoins dans la salle.
    Voici quelques instructions pour la gouverne des témoins et des membres.
    Attendez que je vous nomme avant de prendre la parole. Si vous participez à la réunion par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour l'activer et pour le désactiver quand vous avez terminé. Dans l'application Zoom, les options pour l'interprétation sont affichées au bas de l'écran, soit Parquet, Anglais ou Français. Sélectionnez celle qui vous convient. Si vous êtes dans la salle, vous avez à votre disposition une oreillette très pratique. Là encore, vous pouvez choisir entre Français, Anglais ou Parquet. Vous pouvez aussi régler le volume.
    Je vous prierais de toujours vous adresser à la présidence. Les membres présents dans la salle peuvent lever la main pour demander la parole. Si vous nous joignez par Zoom, utilisez la fonction de main levée. La greffière et moi-même allons tâcher de gérer la liste des intervenants le plus efficacement possible.
    Avant de présenter les témoins, je dois faire une mise en garde. Notre étude porte sur un sujet délicat. Il sera question d'expériences liées à la santé mentale, et certains récits pourraient être troublants pour des téléspectateurs, des députés ou des membres du personnel qui ont vécu des choses semblables. Si vous ressentez de la détresse ou si vous avez besoin d'aide, veuillez en informer la greffière.
    Sur ce, je souhaite la bienvenue à nos témoins. Comme je l'ai déjà expliqué, certains sont ici en personne, et d'autres nous joignent par Zoom.
    Représentant le Centre canadien de la diversité des genres et de la sexualité, nous accueillons Debbie Owusu-Akyeeah, la directrice exécutive, ainsi que Jaime Sadgrove, la responsable, Communications et promotion.
    Du Kawartha Sexual Assault Centre, nous recevons Brittany McMillan, qui en est la directrice générale et, assise à ses côtés, Jordanne McLaren, la gestionnaire, Services à la clientèle et équipe d'intervention en matière de traite de personnes.

[Français]

     Madame Larouche, vous avez la parole.
    Madame la présidente, je veux simplement m'assurer que nous entendrons bien les témoins. Les tests de son préalables ont-ils été effectués?
    Oui, ils ont été faits.

[Traduction]

    Ils ont été effectués avec le début de la séance. Toutes vos oreillettes ont été testées.
    Pour La Maison Hébergement RSSM, nous avons Véronique Couture, la directrice générale. Bienvenue, madame Couture.
    Le porte-parole de l'organisme The MEHRIT Centre nous joint en ligne. Il s'agit de Stuart Shanker, qui est professeur distingué émérite de philosophie et de psychologie à l'Université York.
    Enfin, Melanie Omeniho représentera l'organisme Women of the Métis Nation-Les Femmes Michif Otipemisiwak.
    Je vais allouer cinq minutes à chaque organisme pour nous présenter une déclaration préliminaire. Vous pouvez vous partager ce temps si vous êtes deux porte-parole.
    Je cède la parole à Debbie Owusu-Akyeeah et à Jaime Sadgrove, du Centre canadien de la diversité des genres et de la sexualité. Vos cinq minutes commencent maintenant.
    Bonjour. Merci de votre invitation à comparaître devant le Comité.
    Je m'appelle Debbie Owusu-Akyeeah. Je souligne que j'utilise le pronom « elle ». Je suis la directrice exécutive du Centre canadien de la diversité des genres et de la sexualité, un organisme national basé à Ottawa qui s'intéresse aux enjeux touchant les jeunes des communautés deux esprits, lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres, queers et s'identifiant à d'autres identités de genre et orientations sexuelles, ou 2ELGBTQ+. Nous faisons la promotion de la diversité sexuelle et de genre sous toutes ses formes à travers nos services d'éducation et de défense des droits.
    Nous œuvrons à construire un monde exempt de discrimination, notamment pour les jeunes des communautés 2ELGBTQ+, et dans lequel les droits de tous les membres de ces communautés seront véritablement respectés. Parce que nous comprenons la complexité de la vie et des expériences, nos ressources et nos programmes sont axés sur le renforcement des capacités des jeunes queers, transgenres et autochtones marginalisés et, pour le grand public, sur l'acquisition d'outils pour bâtir des alliances avec les communautés 2ELGBTQ+.
    À titre de chef de file de la lutte à l'oppression, nous mettons l'accent sur les relations saines, le respect et la dignité au sein des communautés 2ELGBTQ+ et autour d'elles. Nous trouvons particulièrement important de reconnaître que les jeunes de nos communautés sont aujourd'hui disproportionnellement plus nombreux à être visés par l'intimidation, la violence et les crimes haineux que leurs pairs hétérosexuels cisgenres. Nous reconnaissons aussi les effets du racisme et du colonialisme sur les personnes queers qui sont noires, autochtones ou de couleur.
    Notre organisme s'adresse aux jeunes queers et transgenres de 12 à 29 ans qui vivent dans des régions urbaines et rurales du Canada. Nous travaillons principalement auprès des jeunes des écoles intermédiaires ou secondaires, mais également auprès de jeunes marginalisés en raison de nombreux autres attributs identitaires.
    Il se dégage très clairement de nos évaluations que notre clientèle est très diversifiée pour ce qui est de l'âge, de l'identité de genre, de l'orientation sexuelle, des capacités fonctionnelles, de la race et de l'origine ethnique. Je trouve important de souligner que 60 % des personnes que nous desservons s'identifient comme des femmes, des filles ou du genre féminin. Environ 25 % de ces personnes sont aussi racisées, noires ou autochtones. Nous travaillons également avec des personnes qui s'identifient comme étant transgenres ou ayant vécu une expérience transgenre; elles forment de 5 à 10 % de notre clientèle. Enfin, le cinquième environ a une forme quelconque de handicap.
    Je donne ces chiffres parce qu'ils montrent que notre travail en santé mentale touche une très grande diversité de jeunes des communautés 2ELGBTQ+, y compris des jeunes femmes et des filles. Nous trouvons important d'étudier l'expérience des jeunes femmes et des filles dans toutes ses nuances, en tenant compte de la diversité des genres et de la sexualité.
    Concernant ce que nous savons, Statistique Canada a publié récemment un rapport sur l'intimidation et la victimisation parmi les jeunes de diverses identités sexuelles et de genre au Canada. L'étude révèle que les taux d'intimidation très élevés dont ces jeunes font l'objet se répercutent sur leur santé mentale. Les jeunes plus susceptibles de vivre de l'intimidation rapportent en très grand nombre qu'ils sont habités par des pensées suicidaires et qu'ils sont plus enclins à manquer l'école. L'intimidation peut être plus ou moins grave et prendre la forme de plaisanteries, d'injures, de cyberintimidation, y compris les propos haineux en ligne contre l'expérience des personnes des communautés 2ELGBTQ+, d'exclusion des activités et de rumeurs.
    Nous savons que l'homophobie, la biphobie et la transphobie aggravent la discrimination et les obstacles ancrés dans la misogynie. Il convient de souligner également que les tactiques d'intimidation utilisées par les jeunes sont étroitement liées au genre.
    Je voudrais maintenant vous parler du rapport publié par mes collègues d'Egale Canada, intitulé Encore dans chaque classe de chaque école. L'étude porte sur le contexte particulier des communautés scolaires. Parmi les jeunes visés, 11 % des répondants hétérosexuels cisgenres ont déclaré avoir une santé mentale languissante, contre 20 % des garçons gais, bisexuels ou queers, 25 % des filles lesbiennes, gaies et bisexuelles, et 40 % des jeunes transgenres. À l'inverse, les filles lesbiennes, gaies, bisexuelles et queers cisgenres étaient plus susceptibles que les garçons gais, bisexuels et queers cisgenres d'avoir vécu une forme ou une autre de victimisation personnelle dans les médias sociaux. Les incidents peuvent avoir lieu dans les salles de bain, les vestiaires et les corridors, et ils influent sur leur disposition à participer aux cours d'éducation physique et autres activités du genre.
    Une chose est claire, et je vais conclure là-dessus avant de passer aux questions, c'est la nécessité de fonder l'étude en cours sur des données désagrégées.
(1535)
    Il faut étudier les incidences particulières sur la santé mentale des jeunes filles queers et transgenres, ou des personnes transféminines. Il est urgent de recueillir des données sur la réalité canadienne, notamment devant l'afflux grandissant de l'information en provenance des États-Unis. Il faut diversifier nos sources de données pour mieux comprendre ce que vivent les personnes transgenres, les filles transgenres et les personnes transféminines.
    Pour terminer, j'insiste sur l'importance de recueillir ces données pour aider les enseignants et les autres adultes à mieux répondre aux besoins des jeunes filles queers et transgenres.
(1540)
    Très bien. Merci beaucoup.
    Je cède maintenant la parole à Brittany McMillan et à Jordanne McLaren, du Kawartha Sexual Assault Centre.
    Vous avez cinq minutes. À vous la parole.
    Je vous remercie de tout cœur pour votre invitation.
    Je m'appelle Britanny McMillan. Je suis la directrice générale du Kawartha Sexual Assault Centre, un des nombreux centres qui viennent en aide aux victimes d'agressions sexuelles en Ontario. Notre financement de base provient du gouvernement provincial, et plus précisément du ministère des Services à l'enfance et des Services sociaux et communautaires. Le Centre est un petit organisme, qui reçoit tout juste 320 000 $ par année en financement de base.
    Je suis accompagnée de Mme Jordanne McLaren, qui m'assistera pour les questions d'ordre plus clinique ou plus axées sur la clientèle. Mme McLaren est notre responsable des services à la clientèle et de l'équipe d'intervention en matière de traite des personnes.
    Je vais vous parler aujourd'hui des répercussions très importantes de la violence sexuelle sur la santé mentale des femmes et des filles. Je vais aussi vous toucher un mot de l'importance de prendre des mesures pour éviter que les problèmes de santé mentale perdurent chez les personnes survivantes et d'accroître les efforts de prévention et de sensibilisation en matière de violence sexuelle.
    Après une agression sexuelle, les femmes sont deux fois plus à risque de souffrir d'un trouble de stress post-traumatique, ou TSPT, et leurs symptômes perdurent jusqu'à quatre fois plus longtemps que chez les hommes. Selon le DSM-5, on trouve un des taux les plus élevés de TSPT chez les personnes qui ont survécu à un viol, qui peut aller du tiers à plus de la moitié. Le TSPT est fréquemment associé à d'autres problèmes de santé mentale, et d'autres troubles mentaux peuvent apparaître après une agression sexuelle. Les personnes survivantes peuvent par exemple développer un TSPT complexe, un trouble d'anxiété généralisée, un trouble dépressif caractérisé, un trouble du comportement alimentaire, un trouble obsessionnel compulsif ou un trouble lié à la consommation de substances.
    Le risque de souffrir de troubles connexes augmente si l'agression sexuelle a été subie à un jeune âge. Les filles qui ont été victimes de violence sexuelle dans leur enfance sont plus susceptibles de subir de la violence sexuelle à l'adolescence ou à l'âge adulte, et donc encore plus à risque de souffrir de troubles de santé mentale.
    Soit dit en passant, nous ne recevons pas de financement pour venir en aide aux personnes de moins de 16 ans, ce qui laisse un trou béant dans notre offre de services aux jeunes filles.
    En 2021, environ 19,24 millions de femmes vivaient au Canada. On estime que le tiers des femmes et des filles subiront de la violence sexuelle au moins une fois dans leur vie. On peut toutefois penser que ces chiffres donnent un pâle reflet de la réalité étant donné le faible taux de signalement. Quoi qu'il en soit, cela signifie qu'au moins 6,41 millions de femmes et de filles seront victimes de violence sexuelle au Canada. Je précise au passage que la zone que nous desservons est de 320 000 personnes environ.
    Les chiffres ne sont pas les seuls à augmenter. Beaucoup de professionnels dans notre domaine observent une aggravation des agressions sexuelles, qui se manifeste entre autres par une hausse des sévices corporels et des étranglements. Il convient cependant de préciser que la pandémie n'est pas seule en cause. Les taux sidérants de violence sexuelle envers les femmes et les filles n'ont rien de nouveau, loin de là.
    Nous avons recommandé un plan d'action. Si on croit les femmes, si on ne les blâme pas et si on leur offre du soutien et des traitements après une agression sexuelle, leur santé mentale risque moins d'être hypothéquée à long terme. La thérapie, les groupes de soutien et les stratégies d'autoprotection peuvent être d'un grand secours pour aider les personnes survivantes à surmonter un TSPT et d'autres symptômes liés à la santé mentale et à se rétablir.
    Les centres qui viennent en aide aux victimes d'agression sexuelle un peu partout en Ontario et ailleurs au Canada doivent se contenter d'une aide financière famélique. Avec un meilleur financement de base, ces organismes pourraient accroître et accélérer l'accès à l'aide pour les personnes qui ont survécu à la violence sexuelle à du soutien et, dans bien des cas, ils leur éviteraient des troubles de santé mentale persistants.
    Il faut aussi mettre la prévention et la sensibilisation en priorité. En Ontario, de nombreux centres d'aide aux victimes d'agression sexuelle jouent ce rôle malgré le manque de financement. Nous le faisons parce que nous savons à quel point c'est efficace. Si nous arrivons à rejoindre les jeunes garçons et à leur enseigner ce qu'ils doivent absolument savoir au sujet de la violence sexuelle, du consentement, de la masculinité toxique et du patriarcat, les taux de violence sexuelle vont baisser. Actuellement, la priorité est accordée à cette sensibilisation dans les associations de hockey pour que tous puissent pratiquer notre sport national dans un environnement sûr. Il faut aussi donner la priorité aux programmes d'alliance inclusive pour les hommes.
(1545)
    Pour conclure, j'insiste sur le fait que nous sommes des vecteurs de changement. Nous travaillons dans ce domaine parce que nous voulons que les choses changent. Malheureusement, nous ne pouvons pas faire autant que nous le souhaiterions parce que le financement de base qui nous est versé au titre du modèle en vigueur est tout simplement insuffisant.
    Merci infiniment.
    Je donne maintenant la parole à Véronique Couture, de La Maison Hébergement RSSM.
    Les cinq prochaines minutes sont à vous, madame Couture.

[Français]

    Mon nom est Véronique Couture et je suis la directrice générale d'un organisme communautaire, une maison d'hébergement de transition située à Granby, au Québec.
    Nous offrons des services de transition aux gens qui arrivent d'un milieu carcéral, d'un hôpital ou d'un centre de désintoxication. Notre clientèle est mixte, mais comporte une majorité de femmes pour le moment.
    Nos besoins ont évidemment considérablement augmenté en raison de la pandémie et d'un manque de services pendant ces deux années et demie. Notre plus grand problème est un manque de financement régulier, qui fait que nous n'avons pas assez de personnel dans la maison. Nous sommes financés par le Programme de soutien aux organismes communautaires du gouvernement du Québec. Toutefois, nous avons besoin de financement d'ailleurs pour nous aider à avancer et à aller plus loin dans les services que nous offrons.
    Il est très compliqué de faire une demande de subvention et de la reddition de comptes. Nous nous retrouvons avec très peu de moyens. En effet, les intervenants ne peuvent pas faire leur travail, parce qu'ils ont beaucoup trop de travail de bureau à faire et qu'ils doivent composer avec des demandes qui n'en finissent plus. Nous recommandons donc que le financement nous arrive plus rapidement.
    Personnellement, je me suis présentée ici avec beaucoup de candeur et j'ai l'impression de ne pas être aussi préparée que les gens autour de moi. Toutefois, mes demandes sont bien réelles et urgentes: les femmes et les filles ont besoin de soins en santé mentale et dans différentes sphères. Les fonds doivent donc nous parvenir rapidement.
    Plus tôt, on a parlé d'agressions sexuelles. Quatre-vingt-dix pour cent de notre clientèle ont subi des agressions sexuelles dans leur enfance ou leur jeunesse. Nous devons donc aider ces personnes à acquérir une autonomie qu'elles n'ont jamais eue auparavant. Nous avons besoin de sensibilisation en milieu scolaire. Nous avons besoin de gens qui savent comment prendre soin des jeunes filles et des femmes canadiennes et les guider vers les bons endroits au bon moment.
    Je lance un cri du cœur: nous devons avoir beaucoup plus de moyens pour aider ces femmes et ces filles.
    Pour terminer, j'aimerais parler de quelque chose d'un peu plus personnel, alors que je vis quotidiennement cette situation avec ma fille aînée, qui ne réussit pas à recevoir d'aide. Je peux vous dire que les services sont déficients, non seulement faute de financement, mais surtout faute de sensibilisation et de compréhension en milieu scolaire et universitaire.

[Traduction]

    Merci beaucoup. Vous allez certainement constater que c'est le même son de cloche partout. Les manques sont criants. Merci énormément d'être des nôtres.
    Nous passons ensuite à un participant en ligne, M. Stuart Shanker.
    Monsieur Shanker, vous avez la parole pour cinq minutes.
(1550)
    Je ne peux pas m'empêcher de penser que vous devez vous sentir un peu dépassés par l'ampleur affolante des problèmes actuels dans le domaine de la santé mentale des femmes et des filles. J'ai pour tâche de vous parler, en cinq petites minutes, d'une révolution incroyable dans le monde des neurosciences. Je vais essayer de piquer votre curiosité en vous parlant de notre nouvelle compréhension et des outils qu'elle nous offre pour marteler encore plus fort les messages que je viens d'entendre et que vous avez déjà entendus de la part d'autres témoins.
    Je voudrais parler du phénomène actuel de l'anxiété et de ce que nous avons appris, surtout au cours des trois dernières années. Même s'il est très difficile pour nous d'établir les chiffres, nous savons que le taux de 20 % rapporté avant la pandémie est la pointe de l'iceberg.
    Nous savons que l'anxiété est un mécanisme d'alerte. Elle indique que le cerveau a détecté une menace extérieure, ce qui est facile à comprendre. Nous connaissons bien les menaces que les femmes doivent affronter de nos jours. Les témoins vous en ont donné des exemples éloquents.
    L'anxiété est aussi un mécanisme d'alerte contre les menaces intérieures, dont je vais parler aujourd'hui. Une menace intérieure provient d'une zone très profonde du cerveau, de systèmes qui agissent sous le seuil de la conscience. Essentiellement, ces systèmes se retrouvent dans ce qu'on appelle un déséquilibre homéostatique. Cet état peut conduire à des troubles comme la dépression, l'anxiété ou l'automutilation, pour n'en nommer que quelques-uns.
    Le déséquilibre homéostatique a trois causes principales.
    Il peut être causé premièrement par un stress excessif. Le stress est un phénomène complexe. Je vais expliquer tout à l'heure ce qu'un scientifique entend par le terme « stress ». La deuxième cause, qui a prédominé pendant la pandémie, est l'adoption de stratégies inadaptées pour gérer ce stress. Une stratégie inadaptée est tout ce qui soulage de manière passagère, mais qui a pour effet d'exacerber le problème de stress. La troisième cause est le nombre insuffisant d'expériences qui produisent l'oxytocine, une hormone qui désamorce la réaction de stress.
    Dans toutes les situations qui vous sont exposées, de jeunes femmes et des filles vivent un stress qui les dépasse. C'est ce qu'on appelle un « état hypodopaminergique ». Un stress est tout ce qui demande au cerveau de consommer de l'énergie pour y faire face. Il peut s'agir d'un stress physique, d'un bruit, d'une foule, d'un éclairage trop cru ou insuffisant. Le stress peut aussi être émotionnel ou cognitif. C'est le genre de choses dont nous parlons et que nous pouvons expliquer.
    Quand un stress est excessif, comme ce que nous avons vécu durant la pandémie, il bloque la dopamine. Nous avons besoin de dopamine. Ces femmes ont besoin de dopamine. Une baisse des taux de dopamine optimaux peut entraîner un repli sur soi et un état dit d'« anhédonie ». Cet état se manifeste par un manque de motivation, pour aller à l'école par exemple, un trouble chronique d'anxiété et de dépression, ou dysthymie.
    La question qui se pose est celle de savoir ce que nous pouvons faire pour soulager les femmes et les filles qui vivent des stress énormes. Quels moyens avons-nous pour aider leur cerveau à tirer tous les bénéfices des programmes dont vous entendez parler? La réponse est qu'il faut leur donner des moyens de désamorcer la réaction de stress.
(1555)
    Je vais vous donner une explication très rapide, parce que je crois que mes cinq minutes filent très vite. Le problème avec les facteurs de stress est qu'ils font grimper la production de substances chimiques dont provient l'énergie nécessaire pour gérer le stress. D'autres substances chimiques désamorcent la réaction de stress et nous permettent de retrouver l'équilibre. Chez une personne qui souffre d'un trouble anxieux, par exemple, les deux mécanismes sont détraqués, et il faut trouver le moyen de rétablir l'équilibre. L'éducation ne suffit pas. Ce n'est pas quelque chose que…
    Vos cinq minutes sont écoulées depuis quelques secondes déjà. Je sais que nous pouvons en apprendre beaucoup plus de ce cerveau, mais je dois donner la parole à la témoin suivante. Je vous assure que nous reviendrons à vous durant les périodes de questions. Un très grand merci, docteur Shanker.
    Nous allons terminer les exposés avec celui de Mme Melanie Omeniho, de l'organisme Les Femmes Michif Otipemisiwak.
    Madame Omeniho, vous avez cinq minutes.
    Merci de donner la possibilité à notre organisme, Les Femmes Michif Otipemisiwak, de parler avec le Comité des expériences en matière de santé mentale des femmes, des filles, des personnes des communautés deux esprits et de diverses identités de genre de la nation métisse.
    Je m'adresse à vous depuis le territoire non cédé et non abandonné des Anichinabés ici, à Ottawa. Je vis cependant sur le territoire du Traité no 6 et terre mère de la nation métisse à Edmonton, en Alberta.
    L'organisme Les Femmes Michif Otipemisiwak se consacre aux femmes métisses afin qu'elles puissent vivre sur la terre mère en toute sécurité et de manière interconnectée, et qu'elles acquièrent des outils et des capacités pour mettre en place les conditions essentielles à la santé et à la prospérité des communautés de la nation métisse.
    Les femmes métisses forment le cœur de la nation, et nous rêvons d'un monde où elles pourront vivre en sécurité et à l'abri de la violence, où les normes de protection, de sécurité, de justice, de santé et de bien-être seront équivalentes à celles qui s'appliquent au reste de la population.
    Au Canada, la proportion d'Autochtones qui sont aux prises avec des troubles de santé mentale est démesurément plus élevée que chez les non-Autochtones, et les symptômes sont souvent plus graves. Les taux de dépression, d'anxiété, de stress post-traumatique, de toxicomanie et de comportements suicidaires sont plus élevés chez les Autochtones, y compris les survivants des pensionnats et leurs descendants.
    Hier, de concert avec notre comité directeur de Métis Nation British Columbia, nous avons examiné des statistiques de 2018, soit avant la COVID, sur la santé mentale des jeunes métis de la Colombie-Britannique. Parmi les répondants à l'étude, 47 % des jeunes femmes métisses ont déclaré vivre de l'anxiété — je rappelle que c'était avant la pandémie —, 35 % des jeunes Métis ont déclaré avoir des troubles dépressifs, et 31 % des jeunes femmes métisses ont indiqué qu'elles songeaient sérieusement au suicide.
    Ces statistiques sont alarmantes, mais vu les répercussions de la pandémie sur la santé mentale, nous nous attendons à ce que les jeunes Métis soient aujourd'hui plus nombreux à souffrir des problèmes de santé mentale dont je viens de parler, et que ces problèmes soient encore plus graves. Nous savons que des recherches sont menées sur la COVID longue et ses effets sur la santé mentale de notre peuple, dont beaucoup de membres ont contracté la maladie.
    Concernant les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, nous savons que des femmes, des filles, des personnes des communautés deux esprits et de diverses identités de genre de la nation métisse ont été victimes de formes graves de maltraitance, de traumatismes et d'actes de violence. L'appel à l'action numéro 19 de la Commission de vérité et réconciliation du Canada pressait le gouvernement à combler les écarts dans les résultats en matière de santé entre les communautés autochtones et non autochtones, y compris pour des indicateurs comme le suicide, la santé mentale et la toxicomanie. Il est également ressorti de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées qu'il était impératif d'accroître le financement et de soutenir les services et la programmation holistiques axés sur les traumatismes, les dépendances, les traitements et la santé mentale.
    Il est important de souligner que pour beaucoup de personnes autochtones, le bien-être mental et émotionnel est intimement lié au bien-être social, culturel, spirituel, environnemental et politique. La santé est un concept holistique, qui englobe le bien-être personnel, mais aussi celui de nos familles, de nos communautés et de la nation. C'est pourquoi la santé mentale des femmes, des filles et des personnes de diverses identités de genre est étroitement imbriquée et liée au bien-être de nos familles et de nos communautés.
    Dans les communautés métisses, les déterminants sociaux de la santé transcendent la dimension sociale. Ils englobent aussi les dimensions politiques et historiques. Ce sont des déterminants structurels de la santé. Le colonialisme et tout ce qui en a découlé, c'est-à-dire les traumatismes intergénérationnels liés aux pensionnats, la rafle des années 1960 et d'autres événements, ont spolié nos peuples de leur culture et de tout ce qui représentait pour nous un chemin de guérison.
    En travaillant avec des Métis qui ont survécu à des traumatismes, à la violence, à la maltraitance et à la négligence, nous avons compris que le lien à la culture et à la communauté favorise la guérison. Travailler avec les aînés, passer du temps sur le territoire, récolter des herbes médicinales, tisser et faire du perlage sont toutes des activités dans lesquelles la culture devient un outil de rétablissement de la santé mentale.
    Il faut comprendre l'importance de la culture et de l'identité pour décoloniser les soins de santé mentale. En plus de l'approche panautochtone, il est essentiel d'intégrer les valeurs métisses comme les liens de parenté, la foi, la spiritualité, les récits et le savoir traditionnel aux soins de santé tenant compte des traumatismes si nous voulons vraiment favoriser la guérison de nos communautés.
(1600)
     C'est dans cet esprit que l'organisme Les Femmes Michif Otipemisiwak a publié le rapport Weaving Miskotahâ, qui énonce 62 appels au miskotahâ, ou qui veut dire « changement » dans notre langue. Le rapport parle notamment de l'établissement d'une fondation axée sur les ressources de guérison et de bien-être de la nation métisse, qui offrirait une aide immédiate et à long terme aux femmes, aux personnes survivantes et aux familles. Nous avons aussi observé la nécessité pour les intervenants-pivots du système de travailler main dans la main avec les femmes, les filles, les personnes des communautés deux esprits, lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres, queers, en questionnement, intersexuelles et asexuelles de la nation métisse, ainsi qu'avec leurs familles et…
    Madame Omeniho, je dois vous arrêter ici. Nous avons encore une fois dépassé un peu le temps prévu, mais soyez assurée que nous aurons beaucoup de questions pour que vous puissiez compléter…
    Nous allons attaquer la période des questions. Chaque député disposera de six minutes, et nous commençons avec Mme Ferreri.
    Madame Ferreri, vous avez six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je crois que je m'apprête à faire un des plus importants examens de ma vie puisque je vais interroger le Dr Stuart Shanker. Je suis vraiment contente. Notre discussion pourrait durer des heures, mais nous avons seulement six minutes, docteur Shanker. Je crois que nous y arriverons.
    J'ai un lien personnel avec le Dr Shanker. Il a ni plus ni moins transformé ma vie et celle de mes enfants. Je vous assure, sans l'ombre d'un doute, que cet homme sait exactement comment il faut intervenir quand il est question de santé mentale des enfants, mais des adultes aussi. Ses recherches sont concluantes et ses méthodes fonctionnent, mais ce n'est pas une solution rapide. La solution n'est jamais facile.
    Docteur Shanker, je suis persuadée que pour aider les enfants, il faut aussi aider les gens qui s'en occupent. Autrement, nous sommes condamnés à leur léguer notre propre stress, qui était le thème principal de votre exposé.
    Vous avez parlé entre autres du fait que le calme engendre le calme. Si les personnes chargées de s'occuper de nos enfants… L'étude que nous menons… Le comité de la condition féminine s'intéresse plus particulièrement aux facteurs qui contribuent à la bonne santé mentale des jeunes et des jeunes filles, et aux mesures d'aide et de soutien nécessaires. Si le calme engendre le calme, si les personnes qui sont censées être calmes ne le sont pas et n'ont pas les outils pour apprendre à se calmer, quelles sont les conséquences pour nos enfants? Comment pouvons-nous les aider à retrouver le calme?
    Il y a deux volets dans ce que Mme Ferreri vient de dire. Le premier est que nous savons, parce que nos études l'ont montré, que toutes les personnes qui travaillent avec des enfants, des adolescents et de jeunes adultes vivent actuellement beaucoup de stress. Dans tous nos instituts, nous avons constaté qu'il faut commencer, dès le début, à nous préoccuper de leurs besoins en santé mentale. C'est manifeste d'après nos travaux sur ce que nous appelons l'autorégulation.
    Ensuite, Mme Ferreri demande pourquoi c'est si important. C'est important parce que, selon une découverte récente dans le domaine des neurosciences, le lien avec les enfants se passe de cerveau à cerveau. C'est une connexion sans fil, qui s'établit entre notre système limbique et le leur. Ce que l'enfant entend correspond à ce que notre système limbique ressent. Si je suis énervé, anxieux, fâché ou très excité, c'est le message que reçoit l'enfant. Si je suis calme, autorégulé, c'est le message transmis à l'enfant. C'est ce qu'on appelle la connexion « intercerveaux ». C'est une véritable révolution, qui nous permet de comprendre pourquoi ce que nous disons, les mots que nous utilisons n'ont pas tant d'importance. Ce qui compte, ce sont les messages qu'envoie notre cerveau et qui passent par le regard, le ton de voix et ce genre de choses.
    Est-ce que ma réponse vous convient, madame Ferreri?
    Oui, tout à fait. Je sais… J'ai vu tout cela à l'œuvre et je comprends ce qui se passe. Ma vie a été transformée, comme je l'ai dit.
    Nous avons actuellement une enveloppe de 4,5 milliards de dollars pour la santé mentale, qui a été confiée à la ministre de la Santé mentale.
    Docteur Shanker, il existe un cadre, des recherches ont été menées et des données ont été recueillies concernant l'autorégulation et son enseignement dans les écoles. Les enseignants, les entraîneurs, toutes les personnes qui travaillent avec des enfants, y compris l'ensemble de nos témoins, tous les intervenants de première ligne pourraient recevoir une formation sur l'autorégulation. Si on vous allouait une partie de ces 4,5 milliards de dollars pour établir le cadre d'une stratégie en santé mentale pour soutenir les gens et leur permettre de trouver le bien-être et une bonne santé mentale, seriez-vous en mesure de mettre ce cadre en œuvre?
(1605)
    C'est une autre excellente question. Ce que Mme Ferreri nous fait réaliser, c'est que les chiffres sont très alarmants et qu'il faut privilégier une approche universelle. C'est pourquoi elle a mentionné les écoles et tous les organismes et groupes de parents.
    Nous devons mettre au point des méthodes pour outiller les enfants et les adolescents, pour leur apprendre à reconnaître s'ils sont trop stressés et à réduire ce stress, comment désamorcer le déséquilibre dont j'ai parlé, la réaction de stress, éprouver un sentiment de calme, une denrée oubliée de nos jours, et comment y revenir.
    Est-ce faisable? Oui, nous avons vu que c'est possible. Est-il possible de redresser la trajectoire de vie d'un enfant? Nous pouvons redresser la trajectoire de tous les enfants, si nous procédons étape par étape. Ils doivent retrouver l'état d'homéostasie, c'est-à-dire un équilibre dans leur cerveau. Oui, c'est possible d'utiliser les ressources publiques pour prodiguer cet enseignement. En fait, nous le faisons déjà, et les résultats sont concluants.
    Je le confirme. Je pense que les travailleurs de première ligne ont autant besoin de votre méthode d'autorégulation que les enfants. C'est essentiel pour qu'elle fonctionne.
    Je serais très curieuse d'entendre de ce que vous n'avez pas eu le temps d'aborder dans votre exposé, au sujet de ce que vous voulez faire. Il reste à peu près 40 secondes.
    Docteur Shanker, je vous cède la parole si vous la voulez.
    Si j'avais un seul message pour vous, ce serait… J'ai consacré toute ma vie d'adulte à ce travail. J'ai rencontré plusieurs milliers d'enfants. Je n'ai jamais rencontré un enfant foncièrement mauvais. C'est impossible. Quand un enfant est trop stressé, nous devons comprendre que c'est un signal d'alarme. L'enfant a besoin d'aide et il faut répondre à ce besoin. C'est pour cette raison que vous travaillez ensemble dans ce comité.
    Je suis parfaitement d'accord. Il n'existe pas d'enfants foncièrement mauvais. Quelle est la cause de tel ou tel comportement, et pourquoi apparaît-il maintenant? Je vous répète les paroles de mon très bon ami, le Dr Stuart Shanker…
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Mme Lambropoulos, maintenant. Elle est en ligne.
    Madame Lambropoulos, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je tiens à remercier tous nos témoins pour leurs témoignages remarquables.
    Docteur Shanker, je vais revenir à vous parce que le domaine de la psychologie m'intéresse au plus haut point et je voudrais aller plus loin avec vous. Toutefois, avant de discuter avec vous, j'aimerais interroger les autres témoins concernant leur travail et…
    Madame Lambropoulos, veuillez m'excuser, mais je viens de m'apercevoir que j'ai fait une petite erreur.
    J'ai oublié de vous informer que Mmes Sadgrove et Owusu-Akyeeah devront nous quitter à la fin de la première heure. Si vous avez des questions pour elles — je vais vous redonner votre temps madame Lambropoulos —, je vous demanderais de les poser avant leur départ. Je suis vraiment désolée de cet oubli.
    Je vous redonne la parole, madame Lambropoulos.
    D'accord. Merci de cette information.
    Je vais commencer avec Mme Owusu-Akyeeah.
    Vous avez parlé du genre comme du principal problème, et du fait que les incidences sur la santé mentale sont beaucoup plus importantes chez les personnes qui ont une orientation sexuelle ou une identité de genre différente. Leurs expériences sont en matière de santé mentale sont différentes. Pouvez-vous nous dire à quoi ressemble une journée pour les personnes comme vous?
    En quoi vos expériences sont-elles différentes exactement? Manifestement, l'intimidation est une réalité omniprésente pour ces personnes, comme vous l'avez dit. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi nous devons absolument chercher à comprendre ces différences pour nous assurer d'octroyer une aide financière suffisante?
    Avec grand plaisir. C'est une très bonne question. Merci.
    Pour ce qui est d'une journée dans la vie… Bien entendu, je vais vous parler plus précisément de ce que vivent les jeunes filles des communautés LGBTQ, qui représentent le principal groupe dans notre clientèle. Les facteurs de stress dans la vie quotidienne de ces jeunes, qui se trouvent à une étape charnière de leur développement parce que c'est le moment de la découverte de leur identité par rapport à leurs attirances ou à leur expression de genre… Il est clair que notre société ne s'est pas encore débarrassée de l'homophobie et de la transphobie, et que nous en voyons encore l'empreinte dans ce qui est enseigné dans les établissements, y compris dans le secteur de l'éducation.
    Malgré les efforts pour mettre les droits de la personne en priorité, la stigmatisation est loin d'avoir disparu au sein de nos communautés. Le résultat est que, que ce soit entre pairs ou autrement, des jeunes continuent de s'en prendre à leurs collègues… Les jeunes vivent encore beaucoup de honte. C'est encore le cas même si des adultes, et je peux citer l'exemple de Mme Sadgrove et le mien, qui ne sont pas beaucoup plus âgés affichent fièrement ce qu'ils sont et leur identité. Il y a encore beaucoup de rejet, qui explique une bonne partie des difficultés que rencontrent ces jeunes.
    En plus des relations entre pairs, je trouve important de souligner, comme le Dr Shanker l'a mentionné, que les adultes ont aussi leur part de responsabilité. Les intimidateurs peuvent être des adultes. La façon d'être de certains adultes peut être un facteur de stress à l'origine des troubles mentaux chez les jeunes. Ces troubles peuvent survenir par exemple quand des parents n'acceptent pas leur enfant, si un jeune ne se retrouve pas dans le programme de cours, ou si des approches et une rhétorique consensuelles mènent à l'exclusion des jeunes transgenres des activités que leurs pairs pratiquent.
    C'est encore la réalité. C'est culturel. Notre travail vise un changement de culture à long terme, la valorisation et la normalisation de la diversité de nos communautés. Un des aspects cruciaux de notre travail est de montrer qu'il existe des options et des modèles, bien entendu, mais il est aussi important de leur montrer que leurs expériences sont mises en valeur.
    Nous ne sommes pas le seul organisme à faire ce travail. Partout au Canada, des organismes des communautés LGBTQ font la même chose. Leur existence même représente un soutien en santé mentale et au bien-être parce qu'ils permettent de briser l'isolement que ces jeunes peuvent vivre dans leur école. Ils leur offrent un refuge à l'extérieur du cadre scolaire, et le financement… J'insiste sur le sous-financement des organismes LGBTQ, et le mot est faible. Des engagements très prometteurs ont été annoncés récemment, mais ce n'est pas suffisant. Nous avons besoin de financement de base et à long terme.
    Nous faisons un travail d'une extrême importance pour développer le sentiment d'appartenance de ces jeunes et leur offrir des solutions à leurs problèmes.
    Madame Sadgrove, voulez-vous ajouter quelque chose?
(1610)
    J'ai une chose à ajouter. Mme Owusu-Akyeeah a parlé du rôle des adultes et du fait qu'ils sont parfois les intimidateurs. Je trouve important de parler aussi du rôle des fournisseurs de services. Notre travail consiste à offrir des services axés sur la communauté, mais notre personnel n'a pas de formation clinique. C'est le cas de la plupart des organismes qui offrent des services aux communautés 2ELGBTQ+.
    Selon les résultats de l'enquête qui figurent dans le plan d'action 2ELGBTQI+ publié à la fin de l'été, moins de 20 % des fournisseurs de soins de santé mentale offrent des services qui s'adressent expressément à ces communautés. Si un fournisseur de services de santé mentale ne comprend pas leur expérience ou leur identité, les jeunes queers ou transgenres doivent surmonter l'obstacle supplémentaire d'avoir à éduquer les personnes censées les aider. Les facteurs d'identité croisée ajoutent à cette complexité. Par exemple, le défi est encore plus énorme et l'accès aux soins de santé mentale encore plus difficile pour les jeunes noirs, autochtones ou d'une communauté racisée.
     Je suppose, madame Sadgrove, que vous venez de m'aider à passer à ma prochaine question. Je sais que Mme Owusu-Akyeeah a aussi parlé de la mobilisation des connaissances afin que les adultes apprennent comment aider nos jeunes. Avez-vous des recommandations à nous offrir sur la façon dont nous pourrions mobiliser ces connaissances? De quelles façons pouvons-nous sensibiliser les éducateurs afin qu'ils connaissent mieux certains enjeux lorsqu'ils sont en présence d'enfants issus de milieux très différents, dans tous les sens?
    Oui, absolument.
     En fait, il existe un programme intitulé « Au-delà des préliminaires » qui a été lancé plus tôt cette année. Il s'agit d'un programme financé par Santé Canada et d'un projet pilote pour obtenir un modèle de « formation des formateurs » qui assure une éducation sexuelle complète. Essentiellement, notre personnel se rendra dans différentes villes du Canada pour former les éducateurs en santé sexuelle sur la façon d'offrir les services aux personnes homosexuelles et les transsexuelles. Je pense qu'un modèle comme celui-là peut se révéler très efficace pour former les professionnels de la santé et les éducateurs sur la manière de fournir des services éclairés et sensibles aux jeunes queer et trans.
     C'est également quelque chose qui évolue. Plutôt que d'avoir du personnel partout au pays, avoir des gens qui se déplacent pour former des éducateurs, il y aura des éducateurs qui pourront ensuite fournir ces services et transmettre leurs connaissances. Je crois que c'est quelque chose qui serait évolutif et une façon de faire vraiment efficace.
    C'est parfait. Je vous remercie beaucoup.
     La parole est maintenant à Mme Larouche.
     Madame Larouche, vous avez six minutes.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins de leur présence.
    Il est intéressant de parler des facteurs d'identité croisée avec M. Sadgrove et Mmes Owusu‑Akyeeah et Omeniho, et de la violence avec Mmes McMillan et McLaren et M. Shanker. Il est intéressant d'entendre parler des différentes préoccupations en lien avec la santé mentale.
    Madame Couture, vous avez lancé un véritable cri du cœur. Pour les raisons que vous avez évoquées, vous travaillez de la maison et vous êtes maman d'une jeune fille qui souffre de problèmes de santé mentale.
    Au cours de cette étude, plusieurs témoins nous ont parlé de l'importance d'avoir un financement stable et adéquat pour des organismes comme le vôtre, qui travaillent sur le terrain et sont en première ligne pour venir en aide aux personnes souffrant de divers problèmes de santé mentale.
    Croyez-vous que la hausse des transferts fédéraux en santé au Québec et aux autres provinces et territoires, demandée unanimement, pourrait être une des solutions? Vous avez parlé d'un manque de moyens financiers.
(1615)
    Effectivement, cela pourrait être une solution. Par contre, le financement doit être accordé rapidement et de façon récurrente et constante.
    C'est justement ce que les transferts en santé permettent. Le gouvernement fédéral s'engagerait à transférer des sommes stables, récurrentes, prévisibles et haussées de façon significative. Vous souhaitez un tel financement récurrent et stable.
    Or, le gouvernement fédéral s'ingère de plus en plus dans les compétences du Québec. Il met en place des programmes par projet, ce qui n'est pas ce que demandent les organismes sur le terrain comme le vôtre. Un financement stable et récurrent passe par les gouvernements du Québec et des provinces, qui ont les compétences nécessaires et sont beaucoup plus proches de ce qui se vit sur le terrain.
    L'imposition de conditions et la formule par projet peuvent-elles conduire à un redoublement des services? Ne vaudrait-il pas mieux transférer l'argent au ministère de la Santé et des Services sociaux à Québec, qui pourrait ensuite le distribuer à des organismes comme le vôtre par l'entremise de son Programme de soutien aux organismes communautaires?
     Effectivement, au Québec, les fonds devraient être redistribués par l'entremise de ce programme. Il faut que ce soit simple et facile d'accès, afin qu'on n'ait pas à engager quelqu'un ou à demander à une personne de se consacrer uniquement à cette tâche. Le financement par projet complique les choses. Nous voulons que le financement appuie la mission globale de l'organisme ou du regroupement qui reçoit ces fonds.
    Vous êtes dans le domaine communautaire et sur le terrain depuis longtemps et vous le dites depuis plusieurs années. Vous êtes donc bien au courant des programmes qui vous sont déjà offerts par le gouvernement du Québec. Vous en discutez avec ce dernier et il attend de recevoir des fonds pour financer plusieurs projets.
    Le gouvernement fédéral parle d'imposer des conditions en lien avec les transferts en santé. Pourtant, c'est le ministère qui a l'expertise et c'est avec lui que vous travaillez actuellement, n'est-ce pas?
    C'est exact, avec le ministère de la Santé et des Services sociaux.
    Des organismes spécialisés comme le vôtre se font dire que le ministère attend le financement, c'est exact?
    Oui. En ce moment, nous travaillons sur la base d'une convention qui date de 2015 et les fonds n'arrivent pas. Nous recevons des augmentations négligeables.
    Vous avez aussi évoqué la surcharge bureaucratique. Que pensez-vous de l'idée qu'un autre ordre de gouvernement vienne établir des conditions et des normes?
    Cela exigerait de faire deux fois le même travail. Nous voulons simplifier le travail, ne devoir le faire qu'une seule fois, et recevoir nos fonds. Le financement par projet, lui, demande énormément de travail ponctuel qui nous oblige à toujours refaire les mêmes démarches.
(1620)
    Je passe à un autre sujet.
     Vous avez dit que vous constatiez une hausse des cas de problèmes de santé mentale sur le terrain. Pourriez-vous nous en dire plus?
    Oui, absolument.
     Ces problèmes se sont exacerbés depuis le début de la pandémie. En ce moment, il y a 38 personnes dans le besoin sur ma liste d'attente. Je ne peux pas les aider parce que je n'ai pas assez d'intervenants ni de chambres, et parce que je n'ai pas les moyens d'engager plus d'intervenants ni d'agrandir l'espace.
     Nos intervenants se donnent vraiment beaucoup pour très peu.
    Notre organisme n'a jamais eu de liste d'attente, en fait. Cela fait à peu près un an et demi que la liste s'allonge. Les gens vivent dans la rue ou se retrouvent en milieu carcéral pour avoir commis des délits. Cela arrive fréquemment.
    Est-ce que vous...

[Traduction]

    Merci beaucoup. C'est tout le temps que nous avons. Nous pourrons certainement vous redonner la parole, madame Larouche.
     Je vais maintenant donner la parole à Mme Gazan qui est avec nous en ligne.
     Madame Gazan, vous avez six minutes.
     Merci beaucoup.
     Je remercie tous nos témoins.
    Je me joins à vous depuis un territoire algonquin non cédé, et en travaillant à la maison aujourd'hui, ce qui est nouveau.
     Ma première question s'adresse à Mme Owusu-Akyeeah ou à Mme Sadgrove.
     J'aimerais vous poser une question sur la santé mentale d'un segment particulier de la communauté 2SLGBTQIA+: la communauté trans. Nous savons que les risques et les taux de crises en santé mentale sont plus élevés pour les jeunes transgenres que pour les autres jeunes. Par exemple, grâce à la section ontarienne de l'Association canadienne pour la santé mentale, nous savons que les risques de suicide — vous avez mentionné le taux de suicide — et de toxicomanie chez les jeunes LGBTQ sont 14 fois plus élevés que chez leurs pairs hétérosexuels. De plus, une étude menée en Ontario nous a appris que 77 % des jeunes transgenres qui avaient participé à cette étude avaient sérieusement pensé au suicide et que 45 % avaient fait une tentative de suicide. L'étude a également révélé que les jeunes transgenres et ceux qui avaient été victimes d'une agression physique ou sexuelle étaient les plus vulnérables.
     Dire que ces statistiques ne sont pas alarmantes ou bouleversantes est un euphémisme et, de toute évidence, cela témoigne de l'incapacité à répondre aux besoins des personnes d'identités et d'expériences diverses. Je crois que cela révèle aussi que nous ne soutenons pas suffisamment les jeunes 2ELGBTQIA+ et, en particulier, les jeunes transgenres et de diverses identités de genre.
     Pouvez-vous préciser ce que nous devons faire pour aider les jeunes queer et trans? Je sais que vous avez parlé de données désagrégées. Je suis tout à fait d'accord avec vous. Sur le terrain, si nous pouvions enclencher un changement demain, à quoi ressembleraient certaines de ces mesures de soutien?
    Je peux commencer et je céderai ensuite la parole à Mme Owusu-Akyeeah.
     Je crois que les données désagrégées, que vous avez mentionnées, sont l'une des choses les plus importantes. Nous n'avons tout simplement aucune donnée au niveau fédéral sur les besoins des communautés transgenres et de diverses identités de genre. Par exemple, le rapport du Comité permanent de la santé publié en 2019 sur la santé des communautés LGBTQIA2 contient des données précises sur les expériences des personnes LGB, mais on n'y trouve aucun axe d'analyse sur la ventilation en fonction de l'identité de genre. Bien que vous ayez raison, madame Gazan, ces données sont de niveau provincial, nous n'avons pas encore obtenu de données au niveau fédéral.
     La formation des fournisseurs de services est un autre volet important, et pour faire suite à ce que d'autres témoins ont dit, je crois que le financement joue un rôle très important. Dans l'ensemble du Canada, la plupart des organisations qui fournissent des services aux personnes LGBTQIA+ sont financées dans le cadre de projets, ce qui ne leur permet pas de développer ce type de capacité de base.
    Lorsqu'il est question des communautés marginalisées, le soutien clinique est un aspect très important. L'autre facteur est la capacité de communiquer avec des gens qui comprennent ce que vous vivez. Pensez aux centres de la fierté ou aux centres communautaires queer et trans dont le soutien sauve vraiment des vies. Je crois que, surtout dans les régions rurales ou éloignées ou dans les provinces où il n'y a pas de grandes villes et où des centres de la fierté sont financés par les municipalités, le financement est vraiment un besoin essentiel.
    Je dois passer à une autre question puisque je n'ai pas beaucoup de temps. Je vais m'adresser à Mme Owusu-Akyeeah, car je sais qu'elle nous quittera à la fin de l'heure.
     Nous savons que les personnes LGBTQ sont exposées à des risques beaucoup plus élevés de vivre sans domicile fixe ou en situation d'itinérance. Je sais que le gouvernement n'en fait pas assez pour régler ce problème, en particulier pour les nombreux jeunes qui sont souvent chassés de la maison ou abandonnés par leur famille après l'affirmation de leur identité. À votre connaissance, quels types de mesures de soutien sont actuellement efficaces?
     Je veux aussi rappeler quelques statistiques. Par exemple, selon Statistique Canada, avant la pandémie, les Canadiens LGBTQ2+ étaient deux fois plus susceptibles que leurs pairs non LGBTQ2+, 27 % comparativement à 13 %, d'avoir vécu une forme quelconque d'itinérance ou d'insécurité liée au logement au cours de leur vie. Nous savons qu'il s'agit d'une crise. Je sais que c'est, assurément, une crise pour beaucoup de jeunes de ma circonscription. À votre connaissance, parmi les programmes actuellement offerts, lesquels sont efficaces et pourquoi les programmes actuellement offerts ne répondent-ils pas aux besoins?
     J'invite Mme Owusu-Akyeeah à répondre.
(1625)
    C'est une excellente question. Je pense qu'elle comporte deux volets.
     Il y a les services d'hébergement déjà en place, des services qui ont encore beaucoup de chemin à faire pour bien accueillir les personnes LGBTQ. Nous continuons de constater qu'il y a un énorme écart. J'ai moi-même travaillé dans des maisons d'hébergement pour femmes, et je sais qu'il y a encore des défis à relever pour renforcer la capacité pour assurer que ces espaces sont non seulement sécuritaires pour les personnes homosexuelles, mais aussi, je dirais, pour les personnes transgenres en particulier.
     J'ai d'autres recherches à ce sujet, et j'ai aussi contribué à la réalisation d'une étude. C'est avec plaisir que je vous la transmettrai afin que vous puissiez en prendre connaissance. En fait, je pense que le secteur LGBTQ et le secteur des refuges peuvent faire beaucoup de travail ensemble pour résoudre ce problème.
     Deuxièmement, en ce qui concerne la prévention de la violence familiale, je dirais qu'il y a beaucoup à faire dans ce domaine pour aider les parents et les fournisseurs de soins afin que ces jeunes ne se retrouvent pas à la rue. Il serait vraiment crucial de faire plus d'efforts en ce sens, et d'y consacrer du financement.
    Excellent. Merci beaucoup.
     Nous allons maintenant commencer notre deuxième tour. Les conservateurs et les libéraux auront cinq minutes et le Bloc et le NPD auront deux minutes et demie. Je vais commencer par Mme Vien qui disposera de cinq minutes.
     Madame Vien, nous vous écoutons.

[Français]

    Je remercie les témoins de s'être déplacés aujourd'hui.
    Monsieur Shanker, la motion parle des facteurs qui ont un effet sur la santé mentale des jeunes femmes et les rendent vulnérables. Pourriez-vous nous dire quels facteurs sont en cause, selon vous?

[Traduction]

    Excusez-moi de répondre en anglais. Je n'ai pas trouvé mon bouton de traduction.
     Mme Owusu-Akyeeah et Mme Sadgrove ont soulevé un point très important. Nous savons que les données montrent que ces centres de la fierté ont un effet bénéfique. En tant que neuroscientifiques, nous nous demandons toujours pourquoi. Ici, le « pourquoi » est que... C'est une chose à laquelle je pensais tout à l'heure lorsque je répondais à Mme Ferreri. Ce qu'il faut faire, c'est désactiver la réponse au stress.
     Le cerveau humain ne peut pas vraiment faire cela tout seul. Nous sommes programmés pour l'engagement social. Le stress est neutralisé par les contacts humains. C'est notre réaction primaire. L'une des raisons pour lesquelles nous avons constaté une augmentation générale pendant la pandémie, c'est que les adolescentes et les jeunes femmes étaient privées de ce dont leur cerveau a besoin, c'est-à-dire des contacts sociaux, ces relations qui neutralisent la réponse au stress.
     Dans la culture actuelle, le problème est aggravé par le fait que les jeunes recherchent ce que... Nous appelons cela des hameçons de dopamine. Les médias sociaux peuvent donner une dose de dopamine. Cela permet de tenir bon, mais cela ne fait rien pour neutraliser la réponse au stress. Au contraire, pour les raisons qui ont été expliquées précédemment, les jeunes sont exposés à des messages qui intensifient considérablement leur stress.
     Le dernier point que je voudrais soulever est que...
(1630)

[Français]

     Je dois malheureusement vous interrompre par manque de temps, monsieur Shanker.
     Je vous remercie de votre réponse, mais j'aimerais maintenant que vous me parliez d'un phénomène social qui a vu le jour il y a cinq ans, le mouvement #MoiAussi.
    Qu'en pensez-vous? Avez-vous l'impression que le fait que les femmes se soient libérées a eu un effet positif sur la santé mentale des jeunes filles et des femmes en général? Je parle des femmes en particulier, mais il peut aussi s'agir d'hommes.

[Traduction]

    Le problème, c'est qu'en étant isolés, les jeunes sont incapables de réduire leur stress, et c'est un phénomène très intéressant. Lorsque le niveau de stress très élevé, notre conscience de soi est obstruée. Le stress étouffe nos émotions. Le problème se complique donc parce que les jeunes ressentent de l'anxiété, mais ils en prennent conscience uniquement lorsque le problème éclate. Ce que nous devons faire pour répondre à ce dont vous parlez, pour réussir à les habiliter, c'est... Ils doivent apprendre à reconnaître quand le stress est, ou devient, trop important et ils doivent savoir comment le réduire, ce qui déclenchera l'ocytocine, et non la dopamine. Ensuite, ce que nous voyons dans tous ces problèmes...

[Français]

    Merci, monsieur Shanker.
    Madame McMillan, je voudrais vous poser la même question. Avez-vous remarqué que le mouvement #MoiAussi a eu un effet positif sur la santé mentale des femmes?

[Traduction]

    Je suis désolé. Je ne comprends pas.
    Ma question s'adresse à Mme McMillan, alors tout va bien, monsieur Shanker.
    C'est pour ça que je ne comprenais pas. Je n'ai pas fait cela.
    Oui, je pense que le mouvement #MoiAussi comporte deux volets. Le premier est que les femmes sentent qu'elles ont un pouvoir. Nous pouvons maintenant affirmer que nous sommes des survivantes de la violence sexuelle. Par contre, il ne faut pas négliger le fait qu'il peut être traumatisant d'entendre parler de la violence à caractère sexuel vécue par les autres. Même si nous voulons que les femmes se sentent habilitées à se manifester et qu'elles obtiennent l'aide dont elles ont besoin, je pense qu'un certain traumatisme est causé à chaque... Parce que ce mouvement est très public, cela devient très traumatique pour les personnes qui ont vécu quelque chose de similaire ou de simplement savoir qu'un tel risque existe. Chaque jour, les femmes sont susceptibles d'être agressées sexuellement, une réalité qui a été un peu plus révélée par le mouvement #MoiAussi et, de la même manière, en ce moment avec ce qui se passe avec Hockey Canada.
    Merci beaucoup.
     Nous retournons maintenant en ligne avec Mme Sudds.
     Madame Sudds, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Excellent. Merci beaucoup, madame la présidente.
     Je remercie tous les témoins d'être ici aujourd'hui et, bien sûr, du travail incroyable qu'ils font tous les jours dans nos communautés.
     J'aimerais avoir la confirmation — je ne peux pas le voir à l'écran — que Mme Owusu-Akyeeah et Mme Sadgrove sont encore dans la salle.
    Elles sont avec nous, oui.
    D'accord, c'est parfait. J'espérais pouvoir leur parler avant leur départ. Je vais donc poser mes questions à l'une ou à l'autre, ou aux deux.
     Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé des répercussions sur la santé mentale des personnes, des filles et des femmes 2ELGBTQIA+. Je me demandais si vous pourriez nous donner des détails sur certaines de ces répercussions et de la différence que peut faire un environnement fondé sur le soutien et l'acceptation.
    Oui. C'est une très bonne question. Vous voulez savoir ce que sont les différences apportées par un environnement de soutien. Je veux simplement préciser la question, si vous le voulez bien.
    Oui.
    D'accord.
     Ce que nous avons remarqué — et je pourrais vous fournir des renseignements supplémentaires par la suite — c'est qu'il y a une composante sexospécifique. Ce que les filles vivent est, bien sûr, aggravé par le recoupement de la misogynie, ou de la misogynie trans, et l'intimidation fondée sur leur sexe ou leur orientation sexuelle. À ce jour, la plus grande partie des mesures de soutien pour les personnes LGBTQ ont tendance à reposer sur les expériences des hommes cisgenres, ce qui signifie que la nuance supplémentaire de l'affirmation est perdue, encore une fois. C'est pour cette raison qu'il y a des stress supplémentaires. C'est ce que nous constatons.
     J'ai un peu plus d'information que je vous transmettrai avec plaisir après la réunion.
(1635)
    C'est incroyable. Oui, merci. Je crois que ce serait très utile pour le Comité.
     Il y a un autre sujet sur lequel j'aimerais poser des questions, et encore une fois, je m'adresse à Mme Sadgrove ou à Mme Owusu-Akyeeah. Récemment, j'ai eu l'occasion de visiter Pride Fredericton et Yukon Pride dans le cadre de mes fonctions de secrétaire parlementaire. Au cours des conversations, j'ai appris à quel point les soins de santé liés à l'affirmation de genre sont importants pour la santé mentale des jeunes transgenres et non binaires — des choses à la fois simples et importantes comme les soins et les articles d'affirmation de genre —, et la façon dont ils peuvent contribuer à l'euphorie du genre d'une personne.
     Je me demande quels sont les autres défis auxquels les jeunes transgenres et non binaires font face et qui ont une incidence sur leur santé mentale, et ce que nous pouvons faire pour mieux les aider.
    C'est vraiment une bonne question.
     Il est très intéressant et très important de parler des soins et des articles d'affirmation de genre. Je crois que l'un des problèmes est qu'au cours des dernières années, il y a eu une véritable augmentation de la mésinformation et la désinformation sur ce que sont les soins d'affirmation du genre et leur signification, en particulier les personnes de moins de 18 ans.
     Il existe une notion selon laquelle les jeunes peuvent dire qu'ils sont transgenres et obtenir immédiatement des soins d'affirmation de genre qui sont irréversibles, ce qui est faux. Tout d'abord, la réalité, c'est que les listes d'attente pour obtenir des soins d'affirmation de genre au pays sont très longues et ne cessent de s'allonger. Cela est vrai pour les soins d'affirmation de genre dans les hôpitaux pour enfants, ainsi que dans les cliniques pour jeunes et pour adultes. Je pense que les gens comprennent mal que, dans certains cas, les soins d'affirmation de genre peuvent consister à demander du soutien pour changer l'indicateur de sexe sur le passeport ou le permis de conduire, ou de l'aide pour faire un changement officiel de nom. Il ne s'agit pas de soins de santé en tant que tels, mais c'est néanmoins quelque chose qui a une incidence sur la santé mentale, le fait de ne pas être obligé de voir un nom ou un indicateur de sexe qui pourrait causer un malaise.
     Pour revenir à ce que je disais précédemment au sujet des soins de santé mentale, il faut que les jeunes aient accès à des fournisseurs qui comprennent ce qu'est l'affirmation de genre, de sorte qu'ils ne soient pas ensuite obligés de faire des recherches en ligne ou de s'expliquer auprès de fournisseurs de soins qui ont peut-être une compréhension désuète de ce que signifie être transgenre.
     C'est incroyable. Merci de votre réponse. C'est très utile.
    Il vous reste 10 secondes.
    D'accord. Merci.
     Comme je l'ai dit, je suis très reconnaissante des observations et de la participation de tous nos témoins aujourd'hui. Merci.
    Merci beaucoup.
     La parole est maintenant à Mme Larouche pour deux minutes et demie.
     Madame Larouche, nous vous écoutons.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Madame Couture, nous avons terminé notre conversation en parlant de la hausse des cas de santé mentale observée pendant la pandémie. Selon l'Institut canadien de l'information sur la santé, les hospitalisations pour des troubles du comportement alimentaire chez les jeunes femmes ont bondi de plus de 50 % au cours de la pandémie de la COVID‑19.
    De plus, la pandémie a mené à un accroissement de la présence des jeunes sur les réseaux sociaux. Croyez-vous que la haine en ligne et l'hypersexualisation en ligne que cette présence accrue a entraînées pourraient avoir une incidence sur la santé mentale des filles et des femmes?
    Oui, tout à fait. Notre organisme aide actuellement une jeune femme qui a été complètement démolie par les réseaux sociaux.
     Il faut faire de la sensibilisation sur les réseaux sociaux utilisés par les jeunes. Il faut que les messages soient rapides et sans publicité. Il faudrait mieux encadrer les compagnies et les gens qui offrent à nos jeunes un accès à des réseaux sociaux.
    Si je comprends bien, vous croyez que le gouvernement fédéral devrait légiférer pour mettre des balises en ce qui concerne la haine en ligne. Il faudrait avoir une telle loi.
    Oui, c'est nécessaire. Il y a des preuves flagrantes tous les jours des dommages causés aux femmes et aux filles par les réseaux sociaux.
(1640)
    Il faut effectivement une loi sur le contenu haineux en ligne.
    J'aimerais boucler la boucle sur le financement, dont il a beaucoup été question dans mon premier tour de parole. La hausse des prix, l'inflation et les risques de récession qui pèsent sur nous peuvent-ils être de mauvaises raisons pour les gouvernements de se défiler et de ne pas investir davantage en santé, notamment en santé mentale? Est-il opportun de faire des coupes budgétaires dans ce domaine?
    Au contraire, on devrait aller de l'avant rapidement.
    Selon vous, il ne faudrait donc pas se servir de la crise économique pour justifier un désinvestissement en santé, mais plutôt maintenir les investissements en santé malgré la crise économique.
    Tout à fait.

[Traduction]

    Excellent. Merci beaucoup.
     Nous allons maintenant aller en ligne pour deux minutes et demie avec Mme Gazan.
     Madame Gazan, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
     Puisqu'elles vont nous quitter, j'ai une autre question pour Mme Owusu-Akyeeah et Mme Sadgrove et…
    Mme Owusu-Akyeeah et Mme Sadgrove ne sont plus dans la salle. Elles sont parties. Je suis désolée.
    Oh, je les ai manquées. Ce n'est pas grave.
     Je vais passer au témoignage du Kawartha Sexual Assault Centre.
     L'un des thèmes dont le Comité a entendu parler au cours des dernières réunions est l'incidence de la violence sexuelle et de la violence fondée sur le sexe et les conséquences durables du traumatisme sur les femmes et les filles qui ont survécu à cette violence. Un des témoins précédents a dit qu'il ne sera pas possible d'améliorer la santé mentale des jeunes femmes et des filles sans se pencher sur la violence sexuelle.
     Pouvez-vous nous dire ce que vous en pensez?
    Oui.
     Comme Mme Owusu-Akyeeah et Mme Sadgrove l'ont dit, nous devons éduquer les gens relativement aux répercussions de la misogynie et du patriarcat, et nous assurer que ces enjeux sont au premier plan, si je peux dire, parce que si l'on y pense, tout le monde est touché par la violence sexuelle. Si nous vivons avec la peur de subir de la violence sexuelle ou si nous vivons avec le traumatisme d'une survivante de violence sexuelle, nous devons vraiment nous attaquer au coeur et à la racine du problème, c'est-à-dire à la violence elle-même.
    Pour faire suite à cette question... Nous savons que nous avons besoin d'éducation, mais pour revenir à ce qui a été dit, nous savons également que les femmes ou les personnes de diverses identités de genre qui ont été victimes de violence — il y a eu beaucoup de recherches à ce sujet — souffrent de troubles de stress post-traumatique durables qui ont des répercussions dans leur vie quotidienne. Croyez-vous que le soutien offert aux femmes ou aux personnes de diverses identités de genre qui ont échappé à la violence est suffisant pour les aider à guérir du stress post-traumatique qu'elles conservent souvent?
    Absolument pas. Si l'on considère uniquement les centres d'aide aux victimes d'agression sexuelle en Ontario, un grand nombre n'ont pas vu leur financement être augmenté depuis les années 1990. Avec le mouvement #MoiAussi, par exemple, le nombre de personnes demandant nos services a augmenté, mais nous n'avons pas été en mesure de trouver une façon de gérer nos listes d'attente sans un financement accru.
     Nous étions un service de base qui ne devait pas avoir de liste d'attente, mais ce n'est pas la réalité. Partout en Ontario — et, j'en suis certaine, partout au pays —, c'est un problème.
    Merci beaucoup.
     Nous allons maintenant commencer notre troisième tour, en commençant par Mme Roberts pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
     C'est fantastique. J'apprends énormément de choses aujourd'hui. J'ai quelques questions à poser, en commençant par Mme McMillan ou Mme McLaren.
     À combien de personnes offrez-vous des services?
    À l'heure actuelle, avec la façon dont nous sommes financés et notre financement de base, nous n'avons que quatre employés. Je ne peux pas embaucher plus de quatre personnes dans le cadre du modèle de base. Cependant, grâce à toutes les subventions que nous demandons — nous demandons toujours de l'argent et faisons toutes les démarches requises —, nous en avons plus que cela.
     À l'heure actuelle, nous avons trois conseillers à temps plein, dont l'un est rémunéré avec le financement de base. Ils s'occupent d'environ 30 clients par cycle et ces clients reçoivent de12 à 14 périodes de services, de séances de counseling. Nous avons ensuite deux conseillers à temps partiel qui fournissent des services à l'Université Trent, à l'Université de Peterborough et au Collège Fleming. En un an, nous accueillons probablement près de 200 personnes.
(1645)
    Vous le faites avec un budget de 300 000 $.
    Oui.
    Nous devons apprendre comment vous faites, parce que c'est vraiment incroyable. Félicitations à vous deux. C'est fantastique.
     J'aimerais poser une question au Dr Shanker. Est-il toujours là?
    Oui, il est avec nous.
    Monsieur Shanker, je sais que vous avez parlé à Mme Ferreri. Vous avez parlé de la recherche du calme. J'ai trouvé que ce point était très intéressant. J'ai fait des recherches sur le TSPT auprès d'anciens combattants et sur la façon dont les chiens d'assistance ou les chiens de thérapie aident vraiment les personnes touchées. Existe-t-il des études sur la façon dont les chiens d'assistance ou de thérapie, quel que soit le nom que vous leur donnez, aident les jeunes femmes et les victimes d'agression sexuelle à gérer des situations semblables?
    Vous avez tout à fait raison. Mon fils aîné a un trouble du spectre de l'autisme. La première chose que nous avons faite, c'est de lui procurer un chien d'assistance. Nous savons maintenant que le chien déclenche l'ocytocine. L'ocytocine neutralise la réponse au stress.
     Le problème avec le TSPT, c'est que la personne qui en souffre a ce qu'on appelle une réactivité au stress exacerbée ou accrue, alors toutes sortes de choses déclenchent l'hyperexcitation. Il ne s'agit pas d'une solution facile du genre « Allons chercher un chien labrador », même si, en tant que propriétaire d'un labrador, je peux affirmer que ces chiens ont d'incroyables avantages pour calmer un enfant autiste. Il existe toutes sortes de façons. C'est vraiment une situation dans laquelle nous voulons donner à ces femmes et à ces enfants tous les moyens possibles de déclencher l'ocytocine.
     C'est une excellente question.
    J'ai également appris que le fait d'avoir un chien d'assistance permettait de réduire les médicaments nécessaires pour traiter le TSPT. Cela aide également ces personnes.... Comme nous le savons, le dressage d'un chien coûte cher, mais les avantages au bout du compte sont que nous réalisons des économies, tant sur le plan des soins de santé que des ordonnances, et que la personne qui a un chien d'assistance ou de thérapie n'a pas besoin de prendre autant de médicaments.
     On m'a donné l'exemple d'un ancien combattant qui avait été placé sous surveillance parce qu'il présentait des risques de suicide. Il faisait d'horribles cauchemars en raison de ce qui s'était passé. Les chiens étaient capables de le réveiller et de le calmer. Pensez-vous que cela pourrait être avantageux?
    Vous avez fait vos devoirs, madame Roberts.
     Les médicaments suppriment les symptômes physiques d'une crise d'anxiété. Ils ralentissent le coeur. Ils ralentissent les réactions galvaniques. Ils ne font rien pour arrêter la réaction psychologique. Ils ne font rien pour neutraliser le stress lui-même. C'est ce que le chien fait.
     Nous constatons que ces merveilleux thérapeutes, dont nous avons parlé aujourd'hui, déclenchent ce système calmant. Permettez-moi de généraliser. Nous voyons maintenant une génération d'adolescents et de jeunes adultes, des deux sexes, qui ne connaissent pas la sérénité.
    Il me reste 10 secondes.
     Merci beaucoup.
     Il nous faut plus de chiens.
    Oui, et j'en profite pour saluer mon chien, Benson. Il est probablement en train de nous regarder. Il m'aide à demeurer calme.
     Je cède maintenant la parole à Mme Sidhu pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
     Je remercie tous les témoins d'être avec nous et de nous fournir de précieux témoignages.
     Ma première question s'adresse à Mme McMillan. Vous avez dit que nous avons besoin de plus d'éducation. Vous avez également parlé du TSPT. Quelle serait une façon efficace de prévenir la violence sexuelle? Pouvez-vous nous en dire davantage à ce sujet?
    Une des priorités de notre Centre est l'éducation à la prévention. Encore une fois, nos services comportent en quelque sorte deux volets. L'un est de fournir des services de counseling et de gestion de cas aux survivants. L'autre se concentre sur l'éducation en matière de prévention. En fait, nous parlons d'aspects comme l'intervention des témoins et la véritable signification du consentement. Nous intervenons réellement dans les systèmes scolaires et autres pour pouvoir offrir ces services.
(1650)
     Pensez-vous que la violence ou l'intimidation en ligne est aussi un facteur de risque? Comment feriez-vous pour la prévenir?
    Oui, c'est certainement un facteur de risque. Plusieurs personnes viennent nous voir parce qu'elles ont été victimes d'une agression sexuelle commise par le biais des médias sociaux ou de photos envoyées par texto, par exemple. C'est certainement une grande préoccupation, et à mesure que nous, en tant que collectivités, adoptons de nouvelles technologies, elle continue de l'être.
    Monsieur Shanker, est-ce que vous ou l'un des autres témoins pourriez nous en dire davantage et nous présenter des suggestions ou des recommandations sur la façon dont nous pourrions prévenir cela et protéger nos jeunes filles?
    L'une des questions que nous devons nous poser est de savoir pourquoi ces hommes, jeunes ou plus âgés, le font. L'un des problèmes que nous observons, encore une fois, est qu'il existe un mécanisme très profond dans le cerveau. Il s'agit d'un mécanisme de poursuite et lorsqu'il devient agressif, on parle d'agression prédatrice, et il peut être déclenché par ce que Mme McMillan vient de dire. Lorsqu'il est déclenché, il bloque la conscience de soi. Il bloque la réflexion. Ce qui se produit, c'est que tout ce que nous leur avons enseigné, toutes les leçons sur les préjudices passent à la trappe. Ils ne les traitent pas sur le moment.
    Ce que nous devons faire, c'est trouver... et nous savons vraiment comment le faire. Mme Ferreri y a fait allusion au début. Ils doivent apprendre à reconnaître en eux-mêmes quand ils se renferment et pourquoi ils se renferment afin que nous puissions rétablir leur empathie, parce que l'empathie s'arrête complètement. Ils ne voient pas leur victime comme un être humain. Ils la voient comme une proie. C'est ce qu'il y a de plus effrayant.
    Monsieur Shanker, vous avez parlé du stress psychologique et de la façon dont il bloque la dopamine, mais comment pouvons-nous équilibrer cette dopamine? Il y a un manque de motivation chez les jeunes. Comment pouvons-nous augmenter cette motivation? La psychothérapie peut-elle être utile?
    Bien sûr, mais le problème est que, comme les données provenant des États-Unis le montrent, au moins 50 % des adolescents présentent ces problèmes, et c'est probablement beaucoup plus. Notre problème est qu'ils vivent à une époque où ils se tournent vers des choses comme les médias sociaux ou les jeux vidéo, qui leur procurent une dose de dopamine, mais ne font rien pour réduire leur stress. Ils deviennent donc de plus en plus stressés et, devinez quoi, nous avons maintenant sur les bras un problème grave comme le suicide.
     Quelqu'un aujourd'hui a fait cette remarque merveilleuse. Je pense que c'était Jaime Sadgrove. Ces parents et ces pourvoyeurs de soins, nous devons les éduquer. Quels sont les signes que votre enfant est trop stressé? Que fait-il pour gérer ce stress? En tant que parent ou pourvoyeur de soins, vous ne devez pas ajouter à son stress en pensant que tout ce dont il a besoin est d'être poussé et que si nous le poussons, sa motivation reviendra. Il ne s'agit pas de le pousser. Il s'agit de réduire le stress pour qu'il puisse se calmer.
     Je ne sais pas si cela répond à votre question, car c'est une question vraiment difficile.
    Oui, c'est bien. Merci beaucoup pour tout le travail que vous faites sur le terrain.
    Je vous remercie.
    Fantastique.
    Nous donnons maintenant la parole à Mme Larouche pour cinq minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, madame la présidente.
    Madame McMillan, j'ai fait partie des députés qui ont siégé au Comité permanent du patrimoine canadien pour interroger les représentants de Hockey Canada dans le dossier des allégations d'agressions sexuelles. Ils ont depuis démissionné, et c'est correct: leur manque d'empathie et de volonté réelle d'effectuer un changement de culture était frappant dans leurs notes préliminaires.
    Vous avez vous-même parlé de hockey et de ces cas d'agressions. Or, maintenant que les représentants de Hockey Canada sont partis, que fait-on? Par quoi commence-t-on pour démontrer l'importance d'agir, pour engendrer un réel changement de culture quant à la masculinité toxique et au manque d'empathie concernant la violence faite aux femmes, et ce, dans l'ensemble des sports et pas seulement au hockey?
(1655)

[Traduction]

    C'est une excellente question. Je vous remercie.
     Je pense que l'élément le plus important est l'éducation à la prévention à un très jeune âge. En ce moment dans notre centre, par exemple, nous entrons en contact avec des associations de hockey mineur pour commencer cette formation dès six ans. Nous travaillons aussi avec des entraîneurs et des parents pour parler de la masculinité toxique et de ses dangers. Nous faisons beaucoup de travail de cette manière. Malheureusement, il n'y a pas de budget pour cela. Nous réagissons simplement à la crise, en sachant que nous pouvons prévenir un certain nombre d'agressions sexuelles.
     Nous travaillons en étroite collaboration avec nos équipes de la Ligue de hockey de l'Ontario, je tiens à le souligner. La LHO a pris de nombreuses mesures avant même ces allégations, alors je pense qu'il est important aussi de le souligner, mais c'est... Il s'agit de toucher les enfants, les entraîneurs et les parents à un très jeune âge, car nous mettons les joueurs de hockey et les autres athlètes sur un piédestal. Nous devons nous assurer qu'ils ne sont pas seulement d'excellents joueurs, mais qu'ils sont aussi excellents à l'extérieur de la patinoire.

[Français]

    On doit vraiment envoyer un message de tolérance zéro et de transparence quand de telles situations surviennent. Une formation appropriée permet de reconnaître ces situations et de les dénoncer afin d'envoyer ce message de tolérance zéro et de faire comprendre qu'on ne veut plus de cas comme ceux-là.
    On sait que des études, notamment universitaires, ont été faites sur la façon d'engendrer un changement de culture. Y en a-t-il auxquelles vous vous êtes intéressée? Souhaitez-vous vous tourner vers ces recherches et ces chercheurs qui se sont penchés sur cette question du changement de culture?

[Traduction]

    L'équipe d'éducation permanente de notre centre — et de la plupart des centres d'aide aux victimes d'agression sexuelle — prend toujours connaissance des recherches récentes et essaie de mettre en oeuvre ces changements et de participer à certaines de ces mises en oeuvre. Nous sommes constamment à la recherche de nouvelles idées, de la façon dont nous pouvons améliorer la situation et changer concrètement une culture.
     Cela ne se limite pas au hockey. C'est une culture présente dans l'ensemble de la société que nous essayons aussi de changer.

[Français]

    Absolument.
    Madame Couture, en terminant votre allocution, vous avez aussi parlé de l'importance d'éduquer les gens à cet égard et de travailler en amont avec les jeunes hommes et femmes. Aimeriez-vous ajouter quelque chose à cela?
    Je crois sincèrement que le corps professoral et les directions scolaires devraient avoir une formation sur les problèmes de santé mentale. Je pense qu'il y a un manque d'éducation à ce sujet. La plupart du temps, on met les problèmes de santé mentale dans une seule et même boîte, mais, à mon avis, tout le monde a besoin d'en apprendre davantage à cet égard.
    Vous parlez d'éducation, mais il y a aussi des lacunes pour ce qui relève des compétences du gouvernement fédéral, comme un manque d'éducation en santé mentale dans les pénitenciers fédéraux.
     Il faudrait former le personnel de ces pénitenciers sur les méthodes d'intervention, parce qu'il doit souvent composer avec des gens qui souffrent de problèmes de santé mentale.
     Les services sont effectivement assez minimes dans le milieu carcéral. Il devrait y avoir des formations beaucoup plus exhaustives et explicites. Je pense que c'est nécessaire, parce que les gens...

[Traduction]

    C'est parfait. Nous allons devoir passer à la l'intervenante suivante.
     Je vais donner la parole à Leah Gazan.
    Madame Gazan, vous disposez de deux minutes et demie. Non, je suis désolée. Vous disposez de cinq minutes. Je vous en donne cinq.
    J'allais dire que je surveille l'horloge. Merci beaucoup, madame la présidente.
     Ma question s'adresse à M. Shanker.
    Votre analyse m'intéresse. Lorsque j'étais à l'université, mon premier cours de psychologie a été donné par un neuropsychologue, alors j'apprécie certainement votre point de vue.
     Voici ma question. Dans votre témoignage, vous avez parlé d'aider les jeunes — ou les femmes et les filles — à surmonter le stress en éliminant des facteurs de stress, et vous avez mentionné, par exemple, les parents, mais nous savons que les situations ne sont pas toutes identiques.
    Par exemple, vous pouvez prendre en compte les déterminants sociaux de la santé et les examiner du point de vue de la psychologie sociale, notamment en ce qui concerne les identités croisées et les conséquences de la colonisation chez les Autochtones. Nous avons beaucoup entendu parler aujourd'hui des conséquences de l'intimidation dans la communauté 2SLGBTQIA+ et je dirais que cela va au-delà de l'intimidation, avec des phénomènes comme les tueries dont nous avons été témoins et le type de stress que le simple fait de vivre dans le monde impose à ces communautés. Les communautés de personnes handicapées sont elles aussi confrontées à la discrimination et à des préjugés fondés sur la capacité physique.
     Ce ne sont que quelques exemples très brefs qui ont des conséquences sur de nombreux jeunes — de nombreuses jeunes femmes et filles et des personnes de genre différent. Je me demande si vos recherches ont porté sur les facteurs croisés qui ont un effet sur la santé et le fonctionnement du cerveau.
(1700)
    Madame Gazan, vous avez eu un bon professeur.
    Oui, nous menons ces recherches. Nous distinguons trois niveaux du cerveau. Nous les appelons cerveau bleu, cerveau rouge et cerveau gris. Le cerveau rouge est la partie située sous la surface, celle qui contient le système limbique — nos émotions et les autres choses du genre. Tous les stress que vous décrivez envoient ces enfants — ou les personnes de tout âge — dans le cerveau rouge. Lorsqu'ils sont dans le cerveau rouge, les émotions négatives fortes sont aux commandes.
     Nous avons entendu parler aujourd'hui de ces merveilleux programmes qui sont conçus pour les ramener au cerveau bleu, pour calmer le cerveau rouge afin qu'ils puissent commencer à réfléchir. Nous constatons — et c'est vraiment important — que lorsqu'une personne est dans le cerveau rouge, elle ne peut pas choisir. Nous pouvons lui donner toute l'information que nous...
    À cet égard, nous entendons parler de choses comme la mémoire ancestrale, par exemple. Nous pouvons parler du cerveau rouge. Ce n'est pas un moment comportemental. Par exemple, si un parent est calme... Il existe des couches de traumatismes intergénérationnels. Par exemple, si nous regardons des anciens combattants ou des femmes qui ont subi de la violence, toutes sortes de déclencheurs mettent en branle des facteurs de stress qu'il est simplement impossible de contrôler. Cela va plus loin. C'est dans la mémoire vécue de notre cerveau. Je dirais même l'esprit, mais c'est notre cerveau.
    Lorsque vous parlez d'atténuer ce phénomène, est-ce qu'une partie de la réponse consiste à s'attaquer à ces conséquences historiques ou coloniales pour aider les personnes en crise?
    Tout à fait. Nous faisons beaucoup de travail dans le Grand Nord. La chose fondamentale que nous avons apprise est que nous ne pouvons pas avoir ce genre d'approche individualiste. Nous ne pouvons pas voir l'esprit comme cette chose solitaire. Nous voyons des collectivités entières qui sont dans le cerveau rouge. En fait, si nous regardons au sud de la frontière, nous voyons un pays entier qui est dans le cerveau rouge.
    Nous devons trouver comment nous pouvons précipiter ce processus de guérison. Il ne peut se produire que si nous rétablissons le calme, que si nous revenons à l'homéostasie, afin que nous puissions commencer à résoudre ensemble les problèmes et à y faire face.
    Bien sûr, merci beaucoup. Je dirais que lorsque nous parlons de rétablir le calme, cela comprend aussi la lutte contre le racisme systémique.
    Je suis d'accord.
    Je veux simplement passer à...
    Il vous reste 10 secondes.
    Oh, flûte.
     Mes prochaines questions s'adresseront à Melanie Omeniho.
    D'accord. Allez-y maintenant. Je vais vous donner votre minute et demie, madame Gazan. Allez-y, et nous reprendrons ensuite.
     Nous allons simplement devancer votre intervention. Allez-y.
    Vous avez parlé de la guérison par la terre. Nous avons une expression pour la décrire. Je me demandais si vous pouviez nous l'expliquer. Nous savons qu'une approche universelle ne fonctionne pas.
    Pouvez-vous nous en dire plus?
(1705)
    Beaucoup de nos collectivités offrent des possibilités d'apprentissage sur le terrain pour que les gens se reconnectent à ce qu'ils étaient, à leur culture, à leur identité et à leur capacité de résoudre de nombreux problèmes. De nombreux programmes et projets pilotes ont permis à nos jeunes de redevenir une partie intégrante de notre communauté et de notre société.
    Je disais simplement, pour faire suite à la dernière question, que c'est comme nourrir notre mémoire ancestrale. Il s'agit de résoudre les traumatismes passés. Êtes-vous d'accord?
    Tout à fait. Quand j'étais petite, j'ai été très chanceuse d'être entourée de ma communauté. J'ai pu établir des liens avec ma famille et j'ai toujours eu des gens qui m'aimaient et qui m'ont témoigné leur soutien, leur attention et leur bienveillance. C'est ce qui manque aujourd'hui à nos jeunes, surtout aux jeunes femmes. Nous devons les amener à renouer avec leurs grands-mères et leurs grands-pères pour qu'elles puissent se sentir liées à la société.
    C'est presque comme un cercle. Vous commencez à comprendre pourquoi vous êtes ce que vous êtes aujourd'hui en comprenant votre histoire, mais aussi l'histoire de ceux qui vous ont précédé.
    Exactement.
    Merci beaucoup.
    C'est merveilleux. Je vous remercie beaucoup.
     Nous passons maintenant à notre prochaine série de questions. Mme Gazan, je vous retire de ce tour.
    Pour le prochain tour, nous allons commencer avec quatre minutes pour Mme Ferreri et M. Serré, puis deux minutes et demie pour Mme Larouche et Mme Koutrakis.
     Nous commencerons par Mme Ferreri.
     Madame Ferreri, vous disposez de quatre minutes.
    Merci, madame la présidente. Merci à tous. Nous verrons ce que nous pouvons faire en quatre minutes.
     Nous étudions les facteurs de santé mentale qui contribuent au déclin des femmes. Je sais que nous avons parmi nous Mmes McMillan et McLaren du Kawartha Sexual Assault Centre. Je vais essayer de faire quelque chose en quatre minutes. Voyons si nous réussissons à le faire. Je vais essayer d'établir un lien entre vous et ce que M. Shanker fait pour voir comment cela peut nous aider dans notre démarche.
     Comment se porte le personnel de première ligne, madame McMillan, en ce qui concerne la gestion du stress lié à la prestation de soins à vos clients?
    C'est une excellente question. Je pense que c'est très important.
     Si nous pensons à la santé mentale de ceux d'entre nous qui servent les clients, cela doit être au premier plan. Malheureusement, avec tant d'incertitude à propos des budgets et des choses du genre, les gens se sentent toujours en danger de perdre leur emploi. On nous a demandé de continuer à fournir ce service en faisant appel à notre passion pour aider les gens. Toutefois, si nous envisageons cette question comme un problème systémique, les gens savent que la plupart des personnes qui dirigent ces types d'organisations sont des femmes et que nous le faisons par pure bonté d'âme.
     C'est un problème systémique. Nous sommes radicalement sous-payées — en commençant par moi jusqu'à chaque intervenante de première ligne. Nous continuons à faire des choses les unes avec les autres — nous formons une équipe formidable, et j'espère que beaucoup de gens bénéficient de cet appui — mais le fait est que c'est vraiment difficile.
    Il est ironique que vous ayez besoin des soins que vous essayez en fin de compte de prodiguer à vos clients.
     Je vais maintenant m'adresser à M. Shanker. Mme McMillan a abordé l'une des choses pour lesquelles nous nous battons avec autant d'énergie en ce moment, à savoir que chaque parent, chaque personne en général, subit les assauts du stress lié à ce monde nouveaud'inflation et de souci face à la crise de l'abordabilité. Cela vaut également pour le secteur sans but lucratif. Lorsqu'ont ne sait pas d'où viendra le financement, c'est une source de stress.
     Monsieur Shanker, comment pouvons-nous aider ces intervenants de première ligne? Si nous ne les aidons pas, si nous n'aidons pas nos agents de la GRC qui se font tuer parce qu'ils font le travail de trop de gens, comment allons-nous aider notre société à retrouver le calme et à s'autoréguler?
    Permettez-moi de dire au Comité qu'il faut assimiler très attentivement ce que Mme Ferreri a dit. C'est important. En ce moment, nous menons d'importants projets avec les forces armées. Nous menons des projets avec des hôpitaux, des pédiatres et du personnel infirmier, etc. Ils sont épuisés. Ils sont stressés à l'excès. Les parents sont stressés à l'excès à cause du stress que leurs clients, leurs patients ou les intervenants de première ligne ressentent.
    Nous devons commencer à envisager une approche universelle, et c'est le point que Mme Ferreri soulevait. En tant que société saine, nous devons comprendre pourquoi cela se produit et ce que nous pouvons faire pour maintenir ce qui a toujours été le cœur du Canada, c'est-à-dire une société qui se soucie de chacun de ses membres.
(1710)
    J'aime bien quand M. Shanker peut expliquer mon propos parce qu'il le fait si bien. C'est vrai, et je pense que si nous n'avons pas mis en place ce cadre national... Il dit « universel », mais je vais parler du point de vue du gouvernement fédéral.
     Monsieur Shanker, comme je l'ai dit, ce cadre a été doté de 4,5 milliards de dollars. Si nous n'envoyons pas ce transfert en matière de santé mentale dans un cadre universel ou national, quel sera le sort du Canada? Répondez en cinq secondes. Bonne chance.
    Vous avez 15 secondes pour répondre.
    Je peux le faire en huit secondes. Il suffit de regarder au sud de la frontière, madame Ferreri.
    Oui, bien dit.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant donner la parole à Marc Serré pour quatre minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à tous les témoins. Ce sera un défi d'aborder tous ces sujets en quatre minutes. J'aimerais simplement revenir sur ce que Mme Ferreri vient de mentionner au sujet du cadre national. Des négociations sont en cours entre les provinces et le gouvernement fédéral. De toute évidence, les services communautaires et les services de santé mentale et de toxicomanie destinés aux jeunes de 10 à 25 ans sont prioritaires. Nous avons entendu des témoins du Centre de santé mentale de l'hôpital Royal d'Ottawa nous dire que le système est brisé et difficile d'accès.
     Brittany McMillan, vous avez évoqué une lacune, le fait que vous ne pouvez pas servir des filles de moins de 16 ans. Qui s'en occupe? Que se passe-t-il et quelles recommandations avez-vous à faire pour que nous modifiions les accords bilatéraux afin de combler cette lacune?
    C'est une excellente question, une question qui nous préoccupe tous beaucoup. Nous savons que nous devons servir ces filles.
     Je dirai que nous avons reçu une petite subvention pour la sécurité publique, par l'entremise du gouvernement fédéral, pour nous concentrer un peu plus sur la traite des personnes et la violence sexuelle. Grâce à cette subvention, nous disposons d'une certaine latitude pour aider les filles de moins de 16 ans. Cependant, je le répète, ce n'est pas dans notre modèle de financement de base.
     C'est un tel problème. Je m'inquiète vraiment pour les filles. Je pense qu'à ce stade, on leur dit souvent de payer pour des services ou d'obtenir des services, comme le disait l'autre équipe qui nous a précédés, de personnes qui ne sont pas des spécialistes de la violence sexuelle. Nous ne sommes pas des conseillers débutants, mais nous ne payons que des salaires de débutants, alors nous devons nous assurer que ces jeunes filles reçoivent des services qui tiennent compte des traumatismes, mais qui sont aussi donnés par des personnes formées en matière de violence sexuelle.
    Je vous remercie pour cette réponse.
     Vous avez aussi évoqué la thérapie clinique par rapport aux stratégies à domicile. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur certaines recommandations concernant l'aspect hospitalier ou clinique par opposition aux stratégies faisant appel à des organisations et à des services à domicile? Vous y avez fait allusion plus tôt.
    Oui. Nous travaillons en étroite collaboration avec un grand nombre de nos partenaires communautaires, donc si des gens ont besoin de counseling, ils viennent nous voir ou nous les aiguillons vers d'autres ressources. Nous rencontrons aussi beaucoup de gens là où ils se trouvent. Mme McLaren accompagne notamment des personnes qui naviguent dans le système de justice ainsi que celles qui doivent se rendre à l'hôpital pour des IST. Il y a des interventions de cette nature.
    Je pense que nous faisons essentiellement tout en ce qui concerne la violence sexuelle. Cela contrariera peut-être le MSESC, mais nous ne pouvons pas nous limiter au mandat, sinon nous ne pourrions pas dormir la nuit.
    Merci.
     Melanie Omeniho, vous avez mentionné tout à l'heure le savoir lié à la terre et la médecine ancestrale, mais pouvez-vous nous en dire un peu plus sur le cercle de sagesse des grands-mères et la façon dont il pourrait nous guider, en formulant quelques recommandations en ce sens?
    Dans notre communauté, nous avons des grands-mères. Je sais que les gens ont tendance à les appeler « aînées", mais elles aiment vraiment se faire appeler « grands-mères », et ce sont les grands-mères qui travaillent ensemble.
     Lorsqu'elles se réunissent en cercle, elles emmènent les jeunes avec elles et transmettent la tradition, le savoir et le langage de ce que nous sommes. C'est un élément important pour rétablir le lien entre les personnes que l'on appelle parfois les « enfants à clé », qui ont été déconnectées en raison de problèmes urbains ou du fait que nous n'avons plus le même type de communauté qu'avant. Nous essayons de les réunir, et les grands-mères travaillent avec eux, les conseillent et les guident.
(1715)
    C'est parfait. Merci beaucoup.
     Je vais maintenant céder la parole à Mme Larouche pour deux minutes et demie.

[Français]

     Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie encore tous les témoins de s'être joints à nous aujourd'hui.
    Comme ce seront mes dernières questions, je vais m'adresser rapidement à Mme Couture, qui n'avait pas tout à fait terminé son intervention quand j'ai parlé de l'importance d'offrir de la formation sur la santé mentale, notamment en milieu carcéral.
     Avez-vous quelque chose à dire ou à ajouter à ce sujet, en 30 secondes?
    Je vais parler de ce que nous constatons chez nous. Les gens arrivent d'un milieu carcéral, mais, comme il n'y a pas de services directs en santé mentale, ils se retrouvent dans la population générale, où les problèmes ne sont traités qu'à moitié, voire très peu.
    Quand ils arrivent chez nous, ils sont encore plus malades, en fait. Ils ont besoin d'énormément de consultations avec nos intervenants. Leur séjour chez nous dure plus longtemps, puisqu'ils ont besoin de plus de temps pour retrouver suffisamment d'autonomie, notamment pour aller vivre en appartement. Normalement, un séjour chez nous dure de trois à six mois. Or, en raison d'un travail qui n'a pas été fait en amont pendant qu'elles étaient en milieu carcéral, ces personnes ont maintenant besoin de 18 à 24 mois pour atteindre cette autonomie.
    Je vous remercie de votre témoignage et de votre engagement dans la communauté, madame Couture.
    Madame Omeniho, vous avez mentionné les recommandations qui touchent les femmes et les filles autochtones. Si j'ai bien compris, vous avez parlé de l'importance d'appliquer ces recommandations, dont la mise en vigueur tarde encore, et du lien que cela pourrait avoir avec la santé mentale des jeunes femmes et des filles autochtones.

[Traduction]

    Oui, la mise en oeuvre a été repoussée. Les recommandations ont été formulées depuis très longtemps. Cela fait trois ans que les rapports de l'enquête « Weaving Miskotahâ » ont été publiés, et plus longtemps pour ceux de la CVR. Bon nombre des engagements n'ont pas eu de suite, ce qui a eu un impact considérable sur les jeunes femmes et les filles.
     Quand un tiers de nos jeunes femmes nous disent avoir des pensées suicidaires, c'est un problème grave et traumatisant dans nos communautés. Nous devons nous employer à faire en sorte que nous aurons des jeunes femmes en bonne santé qui n'auront pas l'impression de ne pas être importantes ou qui n'auront pas des problèmes d'anxiété extrême et de dépression.
    Merci beaucoup.
    Je vais maintenant céder la parole à Mme Koutrakis pour la dernière série de questions.
    Allez-y, madame Koutrakis, pour deux minutes et demie.
     Merci beaucoup, madame la présidente et merci de me donner l'occasion de poser cette question.
     Lorsque je fais passer des entrevues pour recruter des membres de mon personnel, je leur dis toujours qu'ils peuvent me présenter un argumentaire éclair d'une minute pour me convaincre de les embaucher, alors voici l'argumentaire éclair d'une minute pour le gouvernement du Canada.
     Comment le gouvernement du Canada pourrait-il augmenter l'efficacité, la disponibilité et l'accessibilité des services de santé mentale pour les jeunes femmes au Canada, et pourquoi devrait-il le faire?
    Si vous voulez adresser cette question à qui vous voulez, vous disposez d'une minute et demie.
    Je commencerais par M. Shanker, puis s'il reste du temps, les autres témoins qui le souhaitent pourraient mettre leur grain de sel.
     Je vous remercie.
    Je veux que le gouvernement enseigne aux parents et aux éducateurs ce qu'est l'autorégulation. Je veux qu'ils l'enseignent pour qu'ils le fassent eux-mêmes et qu'ils reconnaissent la nécessité pour leurs enfants, quel que soit leur âge, d'apprendre à s'autoréguler de façon saine.
    En ce qui concerne ce que nous pourrions faire en particulier, ce serait d'investir davantage dans le soutien aux victimes d'agressions sexuelles, sachant que, statistiquement, les taux de violence sexuelle sont considérables.

[Français]

    Je dirais pour ma part qu'il faut simplifier et accélérer l'accès au financement afin que nous puissions répondre plus rapidement aux besoins de notre clientèle.

[Traduction]

    Pour ma part, il s'agit d'essayer de faire en sorte que les ressources dont nous avons besoin parviennent aux fournisseurs de services des programmes communautaires qui offrent des services de santé mentale pour aider nos jeunes.
(1720)
    C'est parfait.
     Au nom du Comité, j'aimerais vraiment remercier tout le monde d'être venu et d'avoir apporté son témoignage. Ils ont été très puissants et très utiles.
     Au moment où vous partez, nous allons consacrer de six à dix minutes aux travaux du Comité. Nous ne discuterons pas à huis clos, nous le ferons en direct. Nos invités peuvent nous quitter dès maintenant s'ils le souhaitent. Je vais simplement passer en revue une partie de nos travaux pour l'instant.
    Les membres pourraient peut-être se pencher sur leur ordre du jour. Je vais commencer par un document d'Élections Canada. Comme vous en avez tous été informés par la greffière, la sénatrice Donna Dasko a demandé la possibilité de consulter la réponse écrite qu'Élections Canada nous a fait parvenir après sa comparution en juin 2018.
     Le Comité souhaite-t-il communiquer cette réponse à la sénatrice?
     Des députés: D'accord.
    La présidente: Madame la greffière, nous enverrons une réponse favorable à la sénatrice.
     Allez-y, madame Sidhu.
    Madame la présidente, le Comité a reçu une réponse en 2018. Si les députés de tous les partis sont d'accord, nous pouvons la communiquer.
    C'est fantastique. Il semble que nous soyons tous d'accord. Il ne devrait pas y avoir de problème. C'est merveilleux, alors nous allons l'envoyer.
    Pour le point suivant: une délégation de parlementaires arméniens a demandé à rencontrer le Comité la semaine prochaine. Nous avions initialement pensé au jeudi 17 octobre. Ils nous avaient demandé de le faire de 11 h 15 à 12 h 15. Malheureusement, cela ne fonctionnera pas, car nous ne disposons pas des ressources nécessaires.
     La greffière a essayé de régler le problème, mais c'est vraiment au Comité de décider si nous voulons organiser une séance informelle. Je vais poser la question à la greffière, si elle veut prendre le micro. Je vais être honnête, je n'aime vraiment pas l'idée d'annuler nos réunions qui portent sur la santé mentale et le bien-être, car nous faisons un travail tellement incroyable.
     Je vais laisser la parole à la greffière. Quelles sont nos options? Nous pouvons tenir une séance informelle et partager un goûter. Que recommandez-vous?
    Habituellement, les séances de cette nature sont considérées comme des séances informelles. Le Comité peut décider d'organiser un lunch. Je peux vérifier de nouveau auprès de l'Administration si la date et l'heure auxquelles le Comité souhaite les rencontrer leur conviendraient. Cela dépendra toujours des ressources. Je peux soumettre une demande pour le moment choisi. Si les ressources ne sont pas disponibles, ce sera alors aux whips de décider.
    C'est parfait.
     Je suppose que la première question que j'ai à vous poser est de savoir si vous souhaitez tenir une séance informelle avec les parlementaires de l'Arménie. Dans l'ensemble, il semble que nous sommes tous d'accord.

[Français]

     Madame la présidente, même s'il s'agit d'une rencontre informelle, avec un changement de plage horaire, pourrait-on quand même demander des ressources?
    En fait, j'avais déjà demandé des ressources pour la plage horaire qui avait été proposée, mais cela nous a été refusé. Si le Comité décide d'une autre plage horaire, je vais faire la même demande puisque je devrai encore une fois faire approuver les ressources.

[Traduction]

    C'est fantastique. Nous sommes prêts à tenir une séance informelle.
     Le Comité souhaite-t-il autoriser la greffière à prendre les dispositions nécessaires en matière d'accueil pour tenir une séance informelle avec la délégation parlementaire arménienne? Tout d'abord, nous devrons essayer d'obtenir des ressources. C'est très important, je le sais, pour Mmes Larouche et Vien en particulier, pour que nous puissions tous y participer. Si tout fonctionne, le Comité souhaite-t-il autoriser la greffière à prendre les dispositions nécessaires? Ai-je l'accord de tous?
     (La motion est adoptée.)
    Nous allons donc aller de l'avant. Avec votre autorisation, je vais collaborer avec la greffière et nous allons trouver une date et une heure et essayer de trouver une solution qui convient au moins à la plus grande majorité d'entre nous.
     Enfin, nous nous retrouverons lundi prochain, le 24 octobre, pour reprendre l'étude de la santé mentale des jeunes femmes et des filles.
     Ai-je votre permission de lever la séance?
    Des députés: D'accord.
    Je suis désolée, j'ai simplement une question. On nous a présenté une motion. Que va-t-il se passer avec celle-ci?
    Cette motion est en suspens. Elle a été déposée. Elle reste en suspens parmi toutes nos autres motions. Lorsque nous en viendrons à discuter de ce que nous voulons faire pour nos prochaines études, il appartiendra aux membres du Comité de décider de la voie à suivre.
(1725)
    Oh, d'accord. Je vois. Merci de cette précision.
    La séance est levée.
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