Bienvenue à la 30e réunion du Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes.
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le mardi 1er février, le Comité reprend son étude sur la santé mentale des jeunes femmes et des filles.
La réunion d'aujourd'hui se déroule dans un format hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 23 juin 2022. Les membres participent en personne dans la salle, et à distance à l'aide de l'application Zoom.
J'aimerais faire quelques remarques à l'intention des témoins et des membres.
Veuillez attendre que je vous appelle avant de prendre la parole. Ceux qui participent à la réunion par vidéoconférence doivent cliquer sur l'icône du microphone pour l'allumer et doivent l'éteindre lorsqu'ils n'ont pas la parole. En ce qui concerne l'interprétation, ceux qui sont sur Zoom peuvent choisir le canal du parquet, de l'anglais ou du français indiqué au bas de l'écran. Les personnes qui sont dans la salle peuvent utiliser l'oreillette et sélectionner le canal désiré.
Je vous rappelle tous que vos interventions doivent être adressées à la présidence. Pour les membres dans la salle, si vous souhaitez prendre la parole, lever la main. Pour les membres sur Zoom, utilisez la fonction « lever la main ». La greffière et moi gérerons l'ordre des interventions du mieux que nous pourrons. Nous vous remercions de votre patience et de votre compréhension à cet égard.
En ce qui concerne les mémoires, avant d'accueillir nos témoins, j'aimerais demander l'accord du Comité pour accepter les mémoires jusqu'au 1er novembre pour l'étude de la santé mentale des jeunes femmes et des filles. Le Comité souhaite‑t‑il que l'on accepte les mémoires jusqu'au 1er novembre?
Des députés: D'accord.
La présidente: Je vois grand appui de cette idée, alors nous allons autoriser les mémoires. Tous ceux qui souhaitent présenter un mémoire ont jusqu'au 1er novembre. Cela donne à tout le monde un mois pour le faire. Merci beaucoup à tous.
J'aimerais présenter une mise en garde. Lors de notre réunion de cette semaine, il était manifeste que cette étude promettait d'être l'une de celles où nous devons nous soutenir mutuellement. Je vous mets en garde: cette étude sera difficile. Nous allons parler d'expériences liées à la santé mentale. Cela peut être un déclencheur pour nos téléspectateurs, nos membres ou notre personnel qui auraient vécu des expériences semblables. Si vous vous sentez en détresse ou si vous avez besoin d'aide, veuillez en informer la greffière. Et comme tout le monde le sait, s'il y a des problèmes, n'hésitez pas à m'en faire part également. Tout ce que nous pouvons faire pour nous soutenir mutuellement est la meilleure façon de nous aider les uns pour les autres.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins. Aujourd'hui, nous accueillons trois groupes différents.
Pour l'organisme Boys and Girls Club, le BGC, nous avons Owen Charters, président-directeur général. Je fais un petit clin d'œil à la ville de London. Nous avons également Gwendolyn Moncrieff-Gould, directrice des politiques publiques et de l'engagement.
Représentant les Services de santé Royal Ottawa, nous avons Krystal-Jyl Thomas, travailleuse sociale au Programme de santé mentale pour les femmes, et Michelle Jackson-Brown, travailleuse sociale inscrite.
De plus, en ligne aujourd'hui, nous avons Gordon Matchett, qui est le président-directeur général de la Fondation prendre l'air.
Pour la gouverne de tous les témoins, nous prévoyons cinq minutes pour les déclarations préliminaires. Vers quatre minutes et 30 secondes, je vous indiquerai que vous devez commencer à conclure votre temps de parole. Pour ceux d'entre vous qui sont sur Zoom, gardez un œil sur moi si vous le pouvez.
Je me tourne également vers le Comité, car il y a une discussion que j'aimerais avoir pendant environ cinq minutes, brièvement, à la fin de la réunion. J'aimerais ajouter environ cinq minutes pour les travaux du Comité, avec l'arrivée de certains renseignements. Si vous surveillez l'heure, vous constaterez que nous terminerons probablement nos questions lorsqu'il restera environ cinq minutes à la réunion, pour que nous consacrions deux ou trois minutes aux travaux du Comité.
Et maintenant, je cède la parole au BGC. Monsieur Charters et madame Moncrieff-Gould, vous avez la parole pour cinq minutes.
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Merci, madame la présidente.
Merci aux membres du Comité de me recevoir. Je m'appelle Owen Charters. Je suis le président-directeur général de BGC Canada. Nous sommes connus depuis de nombreuses années sous le nom de Boys and Girls Club du Canada. Maintenant, nous utilisons de plus en plus notre acronyme.
Je suis accompagné de ma collègue, Gwendolyn Moncrieff-Gould, dont le nom ne tient pas sur un porte-nom, apparemment, mais vous pouvez adresser vos questions à elle ou à moi.
Depuis plus de 120 ans, BGC Canada et ses clubs créent des occasions pour des millions d'enfants et d'adolescents canadiens. Nous sommes la plus grande organisation caritative au service des enfants et des jeunes au Canada. Nos clubs servent plus de 200 000 enfants, jeunes, adolescents et leurs familles dans près de 800 emplacements dans tout le pays, dont plusieurs dans vos circonscriptions. J'ai remarqué que certains nous ont reconnus lorsque notre nom a été mentionné.
En dehors des heures d'école, dans les petites et grandes villes, dans les collectivités rurales et autochtones, notre personnel qualifié et nos bénévoles offrent des programmes et des services qui aident les jeunes à obtenir des résultats positifs en matière d'expression personnelle, d'études, de préparation à l'emploi et, ce qui est le plus pertinent aujourd'hui, de santé mentale.
Nos clubs ont constaté un besoin accru de soutien sur le plan de la santé mentale pour les filles, les femmes et les travailleuses du secteur de la jeunesse depuis un certain nombre d'années, et cette tendance a été exacerbée par la COVID‑19.
Un récent rapport de Statistique Canada, que vous connaissez sans doute, montre que les jeunes ont connu le plus grand déclin de santé mentale depuis la pandémie: une jeune fille sur deux déclare maintenant que sa santé mentale est passable ou mauvaise, comparativement à 27 % des jeunes garçons. C'est presque le double chez les jeunes filles.
Nous relevons également cet écart disproportionné de l'impact sur notre main-d'œuvre. La grande majorité, 96 %, des éducateurs de la petite enfance au Canada sont des femmes, et les personnes qui travaillent auprès des enfants et des jeunes sont également des femmes de façon disproportionnée. Elles ont dû assumer des fardeaux supplémentaires pendant la pandémie, y compris la prestation de services essentiels, ainsi que le fardeau supplémentaire de la garde non rémunérée.
Nous avons récemment mené une étude sur la santé mentale du personnel de première ligne travaillant avec les enfants et les jeunes, en collaboration avec plusieurs autres organismes de bienfaisance nationaux, dont le YWCA, l'Association canadienne pour la santé mentale et la Fédération canadienne des services de garde à l'enfance. Nous avons découvert que le personnel de première ligne est aux prises avec des problèmes de santé mentale et qu'il souffre d'épuisement professionnel à des taux beaucoup plus élevés. Pourtant, seul un tiers de ces employés ont accès à des programmes de prévention de l'épuisement professionnel, et seulement un tiers disent qu'ils se sentiraient à l'aise de parler à leur superviseur de problèmes de santé mentale. Sans soutien supplémentaire pour le personnel de première ligne des programmes — dont la plupart sont, encore une fois, des jeunes femmes —, les enfants et les jeunes ne pourront pas recevoir des soins de grande qualité.
La sous-évaluation du travail en soin des enfants a entraîné une diminution constante du nombre de personnes qui entrent dans le secteur de l'enfance et de la jeunesse. Environ 50 % des éducatrices et éducateurs de la petite enfance quittent le domaine au cours des cinq premières années. Cette pénurie de personnel ne fait qu'accroître le stress du personnel en place, en raison des charges de travail supplémentaires, et de nombreux employés de première ligne disent se sentir coupables de prendre des jours de congé en raison de l'impact que cela aurait sur leurs collègues, qui sont déjà surchargés et tendus.
Plusieurs gouvernements dans le pays ont reconnu l'importance d'investir dans la santé mentale des travailleurs de la santé de première ligne au cours de la pandémie, et nous demandons maintenant des investissements et des soutiens analogues pour les travailleurs de première ligne et les organisations du secteur de l'enfance et de la jeunesse. Un investissement dans les services de santé mentale non seulement aidera les jeunes femmes et les filles aujourd'hui, mais aura des retombées à long terme.
Une étude a révélé que chaque dollar investi dans la prévention et le traitement des maladies mentales chez les adolescents rapporte 23,60 $. Nos recommandations sur la façon dont le gouvernement peut s'attaquer à ces problèmes urgents de main-d'œuvre et s'occuper de la santé mentale des jeunes femmes et des filles sont, entre autres: financer le soutien des organisations qui travaillent dans le secteur de l'enfance et de la jeunesse, comme nos clubs; veiller à ce que tous les enfants, tous les jeunes et toutes les personnes soignantes puissent avoir accès à des services communautaires de santé mentale fondés sur des preuves, sûrs sur le plan culturel et adaptés aux besoins; et financer les organisations pour que le personnel de première ligne travaillant avec les enfants et les jeunes ait accès à une formation de premiers soins en santé mentale, afin que le personnel puisse mieux soutenir la santé mentale des enfants et des jeunes dans leurs programmes.
Permettez-moi de vous raconter une petite histoire qui nous est parvenue récemment de l'un de nos clubs et qui, je pense, illustre bien l'impact de ces mesures sur les familles, les enfants, les jeunes et les travailleurs. C'est l'histoire d'une famille qui arrive dans un club, dont une mère célibataire, qui, selon le personnel, a un accident de voiture dans le stationnement du club, malheureusement. Lorsqu'ils sont sortis pour voir si tout le monde allait bien, la mère était sans connaissance. Malheureusement, comme vous l'avez peut-être vu dans le Globe and Mail d'aujourd'hui, l'épidémie d'opioïdes entre dans une phase plus grave sur le plan du nombre. Cette jeune mère était sous l'influence d'opioïdes et était pratiquement sans connaissance.
Lorsque le club s'occupe de ces enfants et tente de les faire prendre en charge par les services d'aide à l'enfance, ces derniers répondent qu'il n'y a plus vraiment de place dans le système pour leur apporter un soutien.
Dans ce genre de situation, on se retrouve avec une famille traumatisée, une jeune mère en difficulté, une famille dont les enfants ont besoin de soutien et ont subi un traumatisme, et des collègues, les travailleurs, qui vivent ce traumatisme personnellement et ne disposent pas du soutien dont ils ont besoin. Je pense que cela illustre parfaitement les défis dont nous parlons.
Je vous remercie.
Je m'appelle Krystal-Jyl Thomas. Je suis une travailleuse sociale qui se concentre sur le domaine de la santé mentale, de la psychothérapie et des services d'intervention familiale. Ma collègue, Michelle Jackson-Brown, se joint à moi aujourd'hui pour la période de questions et réponses. Elle est également travailleuse sociale et travailleuse de soutien par les pairs, et se concentre sur la santé mentale, la périnatalité et les services de soutien par les pairs. Ensemble, nous dirigeons le programme de santé mentale des femmes au Centre de santé mentale Royal Ottawa situé à Ottawa.
Avant de poursuivre, il est important, je crois, de souligner la situation actuelle en Iran en ce qui concerne les droits des femmes et les droits de la personne. Le gouvernement canadien, en tant que chef de file mondial, a la responsabilité de soutenir et d'appuyer la liberté de choix des femmes et des filles en Iran.
Depuis janvier 2021, près de 500 jeunes de 18 à 24 ans ont été orientés vers la Clinique de soins rapides du Royal, une clinique conçue pour répondre aux problèmes de santé mentale qui augmentent depuis le début de la pandémie. Parmi ces jeunes, 67 % étaient des femmes et 65 % recevaient des soins de santé mentale pour la toute première fois. De plus, parmi les personnes orientées, 17 % présentaient un risque élevé et 22 % un risque modéré de suicide.
Les femmes continuent de représenter la majorité des travailleurs de première ligne dans les domaines de l'enfance, de la famille, des personnes âgées et des soins à domicile, tout en étant confrontées au sexisme, à l'inégalité de genre, à la discrimination et à la violence. Nous pouvons faire mieux pour les personnes qui s'identifient comme des femmes dans ce pays.
Nos premières recommandations consistent à faire en sorte que toutes les provinces et tous les territoires disposent d'un financement protégé pour des programmes ciblés de santé mentale à l'intention des filles et des femmes et des programmes adaptés aux femmes appartenant aux communautés PANDC et 2SLGBTQ+, ainsi que les services requis pour surmonter les obstacles liés à la langue, au déplacement et au temps d'attente. Il peut y avoir parallèlement des normes nationales pour les outils de dépistage afin de faciliter l'intervention précoce, comme les problèmes de santé mentale périnatale et la violence sexiste.
Pour aller plus loin, le sexisme et les inégalités sont amplifiés chez la population autochtone du Canada. Dorénavant, il est impératif de cesser de contester les diverses décisions des tribunaux en ce qui concerne les obligations du gouvernement fédéral. Les retards continus nuisent encore plus à la santé mentale et perpétuent un message d'absence d'estime des communautés auxquelles appartiennent les filles et les femmes autochtones, et ils constituent un obstacle à la création de programmes autochtones autodéterminés à la base.
Ensuite, notre système actuel continue d'être axé sur l'intervention en situation de crise, ce qui signifie que de nombreux services ne sont pas disponibles avant que la situation ne devienne une crise ou une urgence. Dans la plupart des villes, on recourt aux services policiers pour l'intervention. Le fait d'exiger la création de programmes de formation en santé mentale pour la police ou de programmes qui soutiennent les professionnels de la santé mentale, déployés indépendamment ou de concert avec les services policiers, peut produire de meilleurs résultats de désescalade et de recours aux services appropriés.
En vue d'aider les services axés sur la crise, il faut élargir la portée des services de transition pour les jeunes qui quittent les programmes en raison de leur âge, des refuges pour les femmes victimes de violence, des programmes de santé mentale périnatale, des services d'aide à l'avortement et aux fausses couches, ainsi que des équipes de sensibilisation à la santé des mères et des bébés et des unités psychiatriques.
On peut confier aux écoles publiques l'objectif principal de mettre en œuvre des programmes éducatifs préventifs sur l'autonomisation des filles, ainsi que sur la manière de soigner et d'aborder la santé mentale. En normalisant ces conversations avec les enfants et leurs familles au sujet du sexisme, des droits des femmes et de la santé mentale, on peut les préparer à devenir des adultes qui réduisent la stigmatisation et créent des sociétés équitables.
Enfin, l'Initiative internationale pour le leadership en santé mentale a estimé que le soutien par les pairs est la main-d'œuvre qui connaît la plus forte croissance dans le domaine de la santé mentale. Les travailleurs de soutien par les pairs peuvent jouer un rôle clé en offrant un apprentissage avancé dans le cadre d'un lien personnel et précieux. Le soutien par les pairs est une main-d'œuvre inexploitée, disponible pour aider dans divers postes cliniques vacants. L'utilisation des compétences de soutien par les pairs est à l'avantage à la fois des clients et des familles grâce à l'expérience partagée, la résilience et la force. Aux États-Unis, les plans des États sont tenus de garantir des programmes de soutien par les pairs. Le Canada pourrait demander aux provinces et aux territoires d'en faire de même.
Merci. Meegwetch.
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'Uy' skweyul siem. Cela veut dire « Bonjour, personnes respectées » en
Hul'q'umi'num.
Je m'appelle Gordon Matchett et j'utilise le pronom « il ».
Aujourd'hui, je m'adresse à vous par Zoom depuis le centre-ville de Vancouver. Je suis entouré par la beauté de la mer des Salish et des montagnes du North Shore. C'est la terre traditionnelle des peuples Musqueam, Squamish et Tsleil Waututh depuis des temps immémoriaux.
La reconnaissance des terres est très importante pour nous à la Fondation prendre l'air, car un tiers des femmes et des filles que nous aidons s'identifient comme Autochtones. C'est l'une des parties les plus visibles de l'engagement de notre organisation envers la réconciliation et l'aide aux jeunes Autochtones pour qu'ils trouvent le succès, quelle que soit la façon dont ils le définissent.
En ce moment, je pense à Kishi. C'est une jeune femme autochtone qui s'est retrouvée dans la Fondation prendre l'air parce qu'elle masquait la douleur du traumatisme intergénérationnel par des substances et l'absentéisme scolaire. À la Fondation prendre l'air, Kishi a trouvé un environnement sûr et bienveillant avec des adultes sûrs et prévisibles qui ont pu nouer des relations avec elle, améliorer ses rapports à l'école et trouver des moyens sains de faire face à ce qui se passe dans sa vie. Aujourd'hui, Kishi travaille comme travailleuse de soutien dans le Downtown Eastside de Vancouver, qui est l'épicentre des crises de l'itinérance et des opioïdes en Colombie-Britannique.
Kim est un jeune transgenre qui en est à sa deuxième année à la Fondation prendre l'air. Kim a été assigné le genre féminin à la naissance et, comme environ 10 % des jeunes que nous servons, il s'interroge sur son identité de genre. Kim était victime d'intimidation dans son ancienne école et se disputait constamment avec sa famille. Il n'y avait vraiment aucun endroit où il se sentait en sécurité. À la Fondation prendre l'air, il a trouvé des adultes qui ont assuré la continuité des soins pour lui et sa famille. L'année dernière, il a pu reconstruire la relation avec sa famille et pour la première fois, il a trouvé une communauté à l'école. Nous sommes très heureux de pouvoir assurer cette continuité des soins pour Kim, afin qu'il puisse continuer le bon travail qu'il a entrepris l'année dernière.
Kishi et Kim ne sont que deux des jeunes femmes avec lesquelles nous avons travaillé à la Fondation prendre l'air. Leurs luttes et leurs succès sont le reflet de la population globale que nous servons.
Au fil des ans, nous avons vu un nombre croissant de jeunes femmes participer au programme de la Fondation prendre l'air. Elles présentent divers problèmes de santé mentale et de toxicomanie. Les femmes avec lesquelles nous travaillons cette année présentent des troubles sur le plan de l'alimentation, de l'automutilation, notamment se couper et s'arracher les cheveux, de l'anxiété et des troubles d'humeur très élevés et débilitants, une dysphorie de genre intense et une expression d'elles-mêmes entraînant une anxiété débilitante, ainsi que des impacts négatifs de leur réalité en ligne. Elles intériorisent la « norme » de la sursexualisation et nous constatons un grand nombre de problèmes d'image corporelle.
Nous constatons également que l'autodiagnostic de troubles mentaux devient une partie importante de l'identité et de la vie de ces jeunes femmes. En cherchant à éliminer cet autodiagnostic, il leur devient de plus en plus difficile de modifier la manifestation du diagnostic.
Les jeunes femmes et les filles que nous servons nous disent qu'elles veulent que les services de santé mentale soient offerts directement dans leurs écoles, où sont réduits les obstacles liés à la stigmatisation, à la disponibilité, à l'abordabilité, au transport, à l'incapacité d'établir des relations avec un nouveau conseiller et au fait d'être continuellement renvoyé d'un conseiller à l'autre.
La Fondation prendre l'air est un programme unique, novateur et fondé sur des données probantes qui s'associe aux districts scolaires publics de la Colombie-Britannique pour identifier les jeunes mal desservis et leur fournir des services de santé mentale directement dans la salle de classe. Nous utilisons le plein air pour établir des relations, nous engager avec les jeunes et apprendre à connaître la terre. La thérapie a lieu dans la classe, sur le terrain de basket-ball et sur les sentiers de randonnée, et elle est normalisée.
Les districts scolaires fournissent tout ce qu'ils sont tenus de fournir en vertu du mandat provincial. La Fondation prendre l'air vient s'ajouter au soutien en matière de santé mentale et couvre le coût des activités de plein air. Ces choses vont au‑delà du mandat du système scolaire public.
La Fondation prendre l'air a remporté un succès incroyable au cours des 22 dernières années. Au cours des trois dernières années, nous avons plus que triplé la portée de l'organisation. Nous servons maintenant 220 jeunes dans plusieurs régions de la Colombie-Britannique. Durant l'année scolaire 2020‑2021, au plus fort de la pandémie et la dernière année pour laquelle nous avons des résultats jusqu'à présent, 75 % des jeunes que nous servons ont connu une amélioration de leur santé mentale. Cela m'impressionne beaucoup, car je sais que ma santé mentale ne s'est pas améliorée pendant cette période.
La Fondation prendre l'air est prête à se développer à un rythme exponentiel. L'accès au financement gouvernemental constitue l'un des obstacles qui empêchent notre croissance. En tant que programme innovant, nous ne correspondons à aucune des options de financement gouvernementales traditionnelles. Nous sommes continuellement renvoyés d'un ministère et d'une administration à l'autre. Nous savons qu'il n'y a pas assez de commissions de santé mentale dans notre pays pour répondre aux demandes croissantes de la crise de la santé mentale.
Nous vous remercions de nous donner l'occasion aujourd'hui de vous faire part des problèmes de santé mentale que nous observons chez les jeunes femmes et les filles que nous servons, des obstacles à l'accès au soutien et de notre modèle novateur de service aux jeunes. Nous vous encourageons à trouver des moyens par lesquels le gouvernement peut soutenir des programmes novateurs et fondés sur des preuves qui éliminent les obstacles et aident les jeunes femmes et les filles à améliorer leur santé mentale.
Merci.
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Merci, madame la présidente.
Merci à tous nos témoins d'aujourd'hui. C'est un sujet très important qui nous passionne tous.
Monsieur Charters, merci de votre témoignage. Notre BGC de Haliburton—Kawartha Lakes—Brock est fantastique, et je suis donc heureuse d'en parler. Il se trouve juste à l'extérieur de ma circonscription.
Vous avez vraiment abordé ce sur quoi j'aimerais m'étendre. Vous avez parlé de la santé mentale des travailleurs de première ligne. Je suis curieux de savoir s'il existe des données ou si vous avez investi dans des données sur l'augmentation du nombre d'enfants, de jeunes filles, qui ont des problèmes de santé mentale ou des problèmes qui se transforment en maladies lorsque les parents ont des difficultés à la maison.
Ce que j'essaie d'expliquer ici, c'est que nous avons une crise d'accessibilité financière en ce moment. Nous avons quatre personnes sur cinq qui ont parfois recours aux banques alimentaires ou qui disent qu'elles vont le faire. Il y a beaucoup de stress dans les foyers en ce moment en ce qui concerne l'inflation et le logement. Je me demande s'il existe des données pour montrer cet impact sur les enfants et comment il est transféré.
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C'est toujours crucial lorsque nous examinons ce financement. Vous avez besoin de données pour étayer votre demande, mais vous avez besoin de fonds pour obtenir ces données, c'est un peu l'oeuf ou la poule. Si nous pouvions examiner l'incidence sur les enfants en cas de forte augmentation des problèmes de santé mentale chez les adultes, ce qui est en corrélation avec vos travailleurs de première ligne, voilà pourquoi je reviens sur ce point.
J'allais en discuter avec les autres témoins. On fait beaucoup de recherches sur les neurosciences et la corégulation. Nous ne pouvons pas être présents et être le meilleur parent, le meilleur employé ou le meilleur travailleur de première ligne lorsque nous sommes si distraits. Nous empêchons donc nos enfants d'être des enfants, ce qui nuit à leur santé à long terme et engendre ces problèmes à long terme que nous constatons.
J'aimerais que ce comité commence à se concentrer sur les données, car je pense que cela vous donnera plus de chances d'obtenir des fonds, bien honnêtement, car c'est ce que nous devons voir.
Si je peux m'adresser à Mme Thomas... J'ai vraiment aimé ce que vous avez dit à propos du système d'éducation. En ce qui concerne la santé mentale, chez les enfants et les jeunes filles en particulier, il y a la prévention, la fin des situations qui nous permet vraiment d'économiser ces montants dans notre système de soins de santé.
Connaissez-vous le travail de Stuart Shanker ou l'autorégulation, la corégulation et son offre à titre de...? Seriez-vous d'accord pour l'offrir comme programme financé par le gouvernement fédéral, ou pour qu'il y ait plus de programmes financés par le gouvernement fédéral qui apprennent aux enfants à reconnaître leurs émotions, leurs réactions à leurs émotions, leurs sentiments et à les nommer pour qu'ils puissent mieux s'autoréguler?
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Merci, madame la présidente.
Merci à tous les témoins qui nous ont rejoints aujourd'hui, non seulement pour leur présence, mais aussi pour le travail incroyable qu'ils accomplissent chaque jour.
Je vais adresser ma première question à Mme Thomas.
Tout d'abord, le travail du Royal Ottawa est phénoménal, en particulier en ce qui concerne la santé mentale des femmes. En tant que députée d'Ottawa, je peux en témoigner. J'ai entendu des histoires, et je n'ai aucun doute que la députée Vandenbeld en a aussi entendu beaucoup, de vies que vous avez changées et touchées grâce à votre travail ici dans notre ville. Je vous en remercie.
Vous avez fait quelques recommandations, dont deux sur lesquelles j'aimerais en savoir plus. Je me demande si vous pouvez préciser votre pensée. L'une d'elles concernait la création de programmes de transition pour les jeunes. J'aimerais beaucoup que vous nous en disiez un peu plus à ce sujet.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je remercie les témoins qui sont parmi nous aujourd'hui pour participer à notre étude.
Évidemment, il s'agit d'un sujet qui touche tout le monde de près ou de loin. Nous avons tous vu les chiffres au sujet de la santé mentale durant la pandémie. Les problèmes de santé mentale ont été vraiment exacerbés pendant cette période. Nous allons pouvoir y revenir plus tard.
D'abord, je tiens à rappeler, tout comme l'a fait Mme Thomas, la question des femmes en Iran. La semaine dernière, notre formation politique, le Bloc québécois, a déposé une motion à la Chambre des communes. Celle-ci a été adoptée à l'unanimité, afin que nous puissions soutenir le combat que mènent les femmes iraniennes pour leur liberté et pour être respectées.
Parfois, on a l'impression que les luttes sont terminées. Certains politiciens disent que la cause du féminisme et que les luttes entre hommes et femmes sont terminées. Cependant, cette étude démontre le contraire: il y a encore des différences entre les hommes et les femmes.
Ma première question s'adresse à M. Charters.
Des chiffres démontrent qu'il y a un écart entre le taux de suicide chez les jeunes hommes et celui chez les jeunes femmes, et que cet écart diminue. Est-ce ce que vous constatez? Comment expliqueriez-vous ce phénomène?
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Je vous remercie de votre question.
[Traduction]
En ce qui concerne les données auxquelles je faisais référence, je ne parlais pas exclusivement des taux de suicide. Nous savons que ces taux, et je n'ai pas les données pertinentes explicitement... Cependant, nous savons que les jeunes femmes sont deux fois plus susceptibles que les jeunes hommes de qualifier leur propre santé mentale de passable ou médiocre, donc pas excellente, ce qui explique évidemment les taux de suicide.
Je ne veux pas faire d'hypothèse à propos des taux, parce que malheureusement, les facteurs qui entrent en jeu dans ce que j'appellerai tristement l'efficacité à s'enlever la vie sont nombreux. Si les tentatives sont plus nombreuses chez les femmes, les hommes sont plus efficaces lorsqu'ils passent à l'acte. Je n'ai pas ces chiffres.
La difficulté que nous voyons est que pour les jeunes femmes, pendant la pandémie, nous n'avons pas vu seulement les pressions familiales et les autres pressions; il y a une pression sociale que nous observons dans les clubs, qui se manifeste aussi dans les outils de l'espace en ligne — les médias sociaux. Nous en avons déjà parlé. Le défi de l'intimidation et d'un plus grand isolement social ne disparaît pas lorsque vous quittez l'école. L'intimidateur est présent sur votre téléphone à trois heures du matin, et il est très facile pour les gens d'en rajouter.
Lorsque nous avons dû enseigner sur la violence fondée sur le genre et la sécurité dans les fréquentations, nous avons malheureusement constaté qu'une plus grande partie du fardeau est supportée par un grand nombre de ces jeunes femmes en ce qui concerne l'image sociale, l'image corporelle et ce qu'elles sont censées présenter comme une image parfaite en ligne, par exemple.
Nous dirions que c'est ce qui contribue dans une certaine mesure, mais je pense que mes collègues ici présents pourraient ajouter quelque chose à ce sujet.
Ma prochaine question s'adresse à Owen Charters, de l'organisme Boys and Girls Club.
Depuis la pandémie, quels sont les plus grands défis en matière de santé mentale que vous constatez chez les jeunes femmes et les filles et qui pourraient avoir une incidence sur leur santé mentale à long terme, des choses comme l'épuisement, la dépression et l'anxiété? Nous avons entre autres parlé de l'effet de l'urgence climatique sur la santé mentale des jeunes.
Vous avez aussi parlé des intervenants de première ligne. J'ai été éducatrice de la petite enfance. J'étais enseignante, en fait, et au début de ma carrière, j'ai été intervenante jeunesse. Il y avait encore des dinosaures et des palmiers. C'est de l'histoire ancienne.
Quels sont les problèmes les plus importants pour lesquels les jeunes se disent stressés ou qui ont une incidence sur leur santé mentale?
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La réponse à cette question est intéressante, car avant la pandémie, nous avons fait un sondage auprès de nos jeunes pour leur demander quels problèmes les affectaient le plus et ce qui les préoccupait le plus. Nous avons parlé de pauvreté et d'emploi, qui arrivaient tous en tête de liste. Le problème le plus important à l'époque était, en fait, la santé mentale. C'est un cercle vicieux.
Certains éléments dont vous avez parlé sont en fait ce que nous entendons de la part de nos jeunes sur les raisons de leurs difficultés. Avant la pandémie, les changements climatiques, l'emploi et la réussite scolaire y contribuaient de manière significative, ainsi que ce dont j'ai parlé plus tôt au sujet de l'effet des médias sociaux.
À cause de la pandémie, nous avons entendu parler d'isolement social et de la rupture des rapports sociaux, en particulier pour les jeunes. Nous en avons tous besoin, mais lorsque vous traversez les étapes formatrices et transitoires de votre vie, vous avez besoin de ce liant social. Cela leur a été arraché, dans certains cas pendant deux ans, à cause des fermetures ou de leur incapacité à entretenir des liens autrement que par l'entremise des écrans, que nous leur avons tous dit qu'ils ne devraient pas utiliser en premier lieu.
En plus de cela, ils voient maintenant l'effet d'une économie qui rend leur vie ou celle de leur famille plus chère. Ils constatent la précarité de l'emploi, tant pour eux que pour leurs familles. Ils constatent que la capacité à mettre de la nourriture sur la table crée un grand stress à la maison.
Maintenant, je pense que le défi des changements climatiques est revenu pour eux alors qu'ils sont témoins des conséquences des ouragans et d'un été très chaud. Nous savons que cela a causé ce que je qualifierais de niveau de détresse démesuré. C'est un niveau de détresse choquant pour beaucoup de jeunes lorsqu'ils évoquent son incidence réelle sur leur santé mentale.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je vais m'exprimer en français et parler lentement, étant donné que je vais vous poser une question extrêmement difficile.
Un comité mixte sur l'aide médicale à mourir, composé de sénateurs et de parlementaires, a été mis sur pied. Nous sommes en train de réviser la loi. Celle-ci prévoit qu'en 2023, une personne demandant l'aide médicale à mourir et n'évoquant comme seul motif qu'un trouble de santé mentale pourrait y avoir accès.
Par ailleurs, il nous est demandé d'étudier de plus près la question des mineurs matures. C'est une question à 1 million de dollars. Je sais que vous n'êtes pas nécessairement préparés à y répondre, mais, comme vous êtes devant moi aujourd'hui et que je fais partie de ce comité, je vous la pose. Je n'ai pas de position personnelle à ce sujet, mais j'ai déjà fait partie du gouvernement du Québec et, à cette époque, j'avais voté en faveur de l'aide médicale à mourir.
Il est important que vous soyez ici aujourd'hui. Si vous pouviez nous faire part de votre opinion à ce propos, je vous en serais vraiment reconnaissante. En effet, nous avons besoin d'être éclairés de toutes les façons possibles pour prendre la meilleure décision qui soit.
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C'est toute une question.
L'an dernier, je n'ai pas travaillé en première ligne en raison d'un épuisement professionnel dû à la pandémie. J'ai laissé la première ligne, mais les 15 années précédentes, j'ai travaillé en première ligne au sein d'une équipe de traitement communautaire dynamique et j'ai donc travaillé avec des personnes qui se sentaient incroyablement mal. C'est quelque chose qui revient souvent — la mort par suicide, que ce soit dans le cadre de l'AMM ou en raison de votre propre détresse et par votre propre main. J'en ai une grande expérience.
Suis‑je d'avis que les gens devraient mourir? Je n'ai pas vraiment d'avis sur le sujet, mais je suis pour les services d'AMM, avec une réserve. J'aimerais voir plus de mesures préventives pour nos services de santé mentale maintenant, de sorte que les gens n'aient pas à en arriver là. Et vlan dans les dents!
Des voix: Oh, oh!
Mme Krystal-Jyl Thomas: C'est vraiment ce que je pense. Si nous ne voulons pas avoir à composer avec ces questions difficiles plus tard, nous devons commencer à investir dans les services de prévention dès maintenant.
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Il s'agit absolument de prévention, parce que le plus tôt que nous pouvons intervenir... Comme Mme Thomas, j'ai fait partie d'une équipe de traitement communautaire dynamique. Plus nous pouvons intervenir tôt, moins les gens risquent de souffrir d'une maladie mentale importante, grave et persistante au cours de leur vie.
Chaque fois qu'une personne vit un épisode ou un accès de psychose, son niveau de base diminue et nous ne savons pas si nous pourrons la ramener à son niveau de fonctionnement antérieur, donc plus nous pouvons intervenir tôt, meilleurs sont les résultats à long terme.
De plus, lorsque nous examinons cette question, nous nous intéressons à la détresse que la personne vit. Si nous pouvons mettre en place des services qui atténuent cette détresse et lui donnent une qualité de vie, c'est ce que nous devons envisager — c'est‑à‑dire des services de santé mentale et des services qui vont aider une personne à avoir une bonne qualité de vie.
Au bout du compte, c'est la personne qui peut décider de ce dont elle a besoin pour sa qualité de vie, donc, avec la même réserve que Mme Thomas, je suis pour les services d'AMM, mais nous avons besoin de ces services de santé mentale et d'autres services, à la fois sur une base d'intervention précoce et de soins et de soutien à long terme.
Je tiens à saluer moi aussi le Royal Ottawa. Vous n'êtes pas dans ma circonscription, mais votre stationnement est à la limite de la circonscription, alors je vous revendique. Franchement, beaucoup de gens qui vivent dans ma circonscription, des gens que je connais et des membres de ma famille, se sont prévalus du soutien et de l'aide que vous offrez. C'est une aide qui sauve des vies. Je pense que tout le monde à Ottawa peut témoigner d'une connaissance dont la vie a été transformée grâce au Royal Ottawa, alors je tiens à vous remercier pour tout ce que vous faites.
Cependant, j'entends que même si l'établissement est extrêmement transformateur une fois que les gens y sont admis, le problème est d'y entrer. Vous avez parlé d'aiguillage. Je pense que nous savons tous que, trop souvent, lorsque la personne se présente à l'urgence en situation de crise — et surtout les jeunes femmes, les jeunes filles —, il s'agit de son premier point d'entrée dans le système. Comme vous l'avez dit, à ce moment‑là... J'ai entendu la même chose à maintes reprises, et je pense que nous allons l'entendre souvent. La prévention, l'intervention précoce, les soins préventifs, c'est vraiment à ce moment‑là qu'on en a besoin, pas au point...
Je peux dire qu'un membre de ma famille a éprouvé des difficultés pendant des années jusqu'à ce qu'il arrive au Royal. C'est la première fois que tout a changé dans ma famille. Je suis assez autonome. Je peux naviguer dans les systèmes. Je suis persévérante. Ce membre de la famille avait quelqu'un qui défendait ses intérêts, et trop de gens n'en ont pas. Comme je l'ai dit à d'autres membres de ma famille, je ne peux même pas imaginer ce qui se passe, surtout pour les adolescentes et les jeunes femmes, si vous n'avez pas cette personne qui va continuer à se battre pour que vous obteniez des services.
Je me demande si vous pouvez commenter. Je vais commencer par le Royal Ottawa, mais je m'adresserai ensuite au Boys and Girls Club. D'ailleurs, je pourrais m'étendre sur le Ron Kolbus Clubhouse du Boys and Girls Club et le travail que vous faites.
Comment pouvons-nous sortir de cette impasse, du fait que c'est au moment où la crise survient que les gens obtiennent vraiment de l'aide?
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Oui, juste pour compléter, un problème énorme et important à l'heure actuelle est l'accès à des fournisseurs de soins primaires et à des médecins de famille. Je le répète, je travaillais... Je fais un travail d'approche dans les refuges. Notre équipe de psychiatrie communautaire compte 10 personnes — soit sept infirmières et trois travailleurs sociaux — et nous avons des psychiatres que nous consultons. Nous avons été en mesure de nous rendre dans les refuges et de permettre aux gens d'obtenir des évaluations psychiatriques immédiatement, sans devoir passer par un médecin de famille. Cependant, pour accéder à la majorité de nos services au Royal, il faut un médecin de famille et quelqu'un qui soit prêt à vous suivre. L'accès à une clinique sans rendez-vous ne sera pas suffisant, il vous faut un fournisseur de soins primaires.
Nous avons obtenu de bons résultats avec les infirmières praticiennes qui ont été formées. Il existe d'excellents centres de santé communautaires et d'excellentes équipes de soins de santé familiale. Nous devons aussi éduquer nos médecins de famille et veiller à ce que la consommation de substances psychoactives et les soins de santé mentale fassent partie intégrante du programme d'étude des médecins afin qu'ils se sentent compétents lorsqu'ils dispensent ces soins.
À l'Hôpital d'Ottawa, dans le cadre de notre programme de soins de santé périnatale, nous avons envisagé de mettre en place, entre autres choses, un programme permettant d'offrir directement des consultations psychiatriques aux fournisseurs de soins primaires. Si ces derniers sont habilités à fournir des soins de santé mentale, les gens n'auront peut-être pas besoin de venir dans des endroits comme le Royal, et nous pourrons réduire les délais. C'est l'autre élément.
Dans le cas d'une maladie mentale légère ou modérée, il est possible d'obtenir du soutien et d'atténuer les symptômes grâce au soutien de pairs et à la psychothérapie. Si nous pouvons avoir accès à une psychothérapie gratuite, ce qui n'est pas le cas actuellement à l'échelle nationale, cela pourrait être très utile. Le programme de psychothérapie structurée de l'Ontario a connu un succès retentissant.
J'ai un dernier élément à ajouter: L'accès régional et coordonné par l'entremise d'AccèsMST a aussi connu un succès retentissant.
La Fondation prendre l'air fonctionne en partenariat avec les écoles publiques et celles‑ci ont une vision très singulière et intéressante de la vie des jeunes qu'elles servent. Nous constatons que les écoles sont remplies d'adultes bienveillants qui se soucient vraiment de la santé mentale des jeunes femmes et des jeunes filles et de tous les jeunes qu'ils servent.
Je constate en Ontario, tout comme en Colombie-Britannique et lors de mes conversations avec des gens des territoires, qu'on met en place des systèmes pour garantir que les jeunes reçoivent ces soins. Ils sont capables de les identifier, mais les jeunes disent qu'ils veulent que l'aide soit disponible à l'école. C'est là qu'un programme comme Prendre l'air est si important pour les jeunes, parce que nous sommes en mesure de leur offrir un environnement sûr et bienveillant pendant un an. Ils sont là toute la journée, tous les jours. Ils ne peuvent pas passer entre les mailles du filet, parce que nous les connaissons et nous sommes en mesure de faire un suivi avec eux.
J'encourage le Comité à vraiment réfléchir à la façon dont nous pouvons nous associer aux districts scolaires pour offrir ce soutien. Ce sont eux qui connaissent le mieux les enfants. Ils ne les connaissent pas aussi bien que leurs parents, mais ce sont eux qui les connaissent le mieux dans la communauté.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Madame Thomas, dans vos remarques préliminaires, vous avez parlé d'obligations du gouvernement fédéral et de retards. Chaque minute compte, quand une personne est en crise, et chaque geste retardé a une incidence.
Vous avez dit que la santé est un champ de compétence du Québec et des provinces, tout en affirmant que le gouvernement fédéral a des obligations dans ce domaine.
Comment peut-on distinguer ce qui relève du Québec et des provinces et ce que le gouvernement fédéral peut faire?
Vous avez aussi parlé de retards. Parliez-vous de retards dans les transferts de sommes aux organismes sur le terrain? Que vouliez-vous dire?
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Je vous remercie, madame la présidente.
Merci beaucoup des renseignements très intéressants dont vous nous faites tous part.
Je remercie ma collègue d'engager une conversation à laquelle j'aimerais que nous puissions consacrer tout un autre comité quand nous parlons d'investir dans la prévention des problèmes de santé mentale. Si nous voulons être honnêtes en la matière, où investissons-nous ces fonds? Où mettons-nous cet élément d'éducation?
Je reviens à vous, monsieur Charters.
J'aimerais approfondir un peu, si c'est possible, parce que nous disposons d'un peu plus de temps pour le faire, et parler du poids des problèmes des adultes qui sont transférés sur les enfants et qui pèsent sur eux.
Si nous regardons cette étude en particulier, il est question des facteurs qui contribuent aux problèmes de santé mentale que connaissent les jeunes femmes et les filles, y compris, mais pas seulement, les troubles de l'alimentation, la toxicomanie, la dépression, l'angoisse et le suicide. J'entends parler des jeunes. Ils racontent qu'ils ont préféré ne pas dire à leurs parents qu'ils voulaient jouer au hockey ou qu'ils voulaient faire de la danse parce qu'ils savaient qu'ils n'avaient pas les moyens.
Pensez-vous que ce soit un facteur important? Où cet aspect se situe‑t‑il dans ce que vous voyez dans les Boys and Girls Clubs?
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Je ne sais pas où se situe cet aspect, mais c'est un facteur important.
Je ne sais pas parce que nous ne leur avons pas demandé spécifiquement ce qu'ils en pensent. Trop souvent, les enfants qui viennent de foyers défavorisés ou de foyers où un seul parent assume très jeune les responsabilités d'un adulte. Ils s'inquiètent de ces problèmes d'adultes. Ils ne le disent peut-être pas toujours à leurs parents, parce qu'être un membre responsable de la famille, c'est aussi ne pas embêter les autres membres de la famille avec ce poids. Nous le voyons surtout dans les familles monoparentales ou dans les familles où les parents sont dysfonctionnels. Évidemment, cela se retrouve dans les clubs.
Dans nos clubs, nous essayons d'offrir à ces enfants les possibilités que la famille ne peut pas offrir. Nous entendons souvent dire — en fait, au club de London, à une activité à laquelle j'assistais —, une famille a dit que le club remplaçait chez elle le père absent. Le club a offert un équilibre dont ces enfants avaient besoin et qu'ils ne pouvaient trouver autrement.
Je crois que nous ne nous rendons pas compte à quel point c'est important. Il y avait un film au Festival international du film de Toronto intitulé Scarborough. Il est sorti il y a un an, je pense. C'est un film qui vaut la peine d'être vu. Il s'agit d'histoires vraies adaptées au cinéma, mais ce sont les vraies histoires que nous voyons dans nos clubs, de jeunes qui assument les responsabilités de leurs parents, qui font face à de vrais défis dans leur vie, de nourrir la famille à trouver un emploi.
Vous avez parlé de gérer les émotions. Il y a le défi d'avoir affaire à un parent qui est incapable de gérer ses émotions, et le jeune devient l'antidote ou se charge de ces problèmes. Je pense que ce sont des éléments plutôt inquiétants qui persistent à l'âge adulte d'une manière ou d'une autre.
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J'ajouterai que, quand nous disons « pauvreté », il me semble que les familles qui étaient à faible revenu sont devenues les familles de la classe moyenne. Ce n'est même plus seulement les familles à faible revenu. C'est devenu un problème canadien de tous les jours. Souvent, des gens m'écrivent pour me dire qu'ils gagnent 100 000 $, que c'est beaucoup d'argent et qu'ils ne s'en sortent quand même pas. Avant, les gens vivaient d'une paie à l'autre, mais maintenant, c'est 10 jours avant la paie.
Cela se répercute sur nos enfants. C'est cette angoisse, cette inquiétude, cette peur, ce poids et les conséquences à long terme de la COVID. Parce que les parents n'avaient pas dans leur trousse les outils pour gérer leurs émotions, le stress retombe sur les enfants et, patatras, vous avez un effet domino. Nous allons en voir les conséquences pendant des décennies, à mon avis.
Nous regardons les mécanismes d'abandon et d'adaptation, ou les mécanismes d'adaptation inadaptés, des parents qui n'arrivent pas à gérer ce stress. Il y a les médias sociaux. Nous parlons des enfants exposés aux médias sociaux, mais qu'en est‑il des parents qui sont sur leurs téléphones à essayer de gérer et de s'autodiscipliner parce qu'ils le peuvent? C'est ce qu'on appelle un mécanisme d'adaptation inadapté.
J'aimerais beaucoup avoir votre avis. Madame Jackson-Brown ou madame Thomas, si vous voulez répondre.
Quand je vois ce que font mes enfants... Je pense à moi, aussi, quand je regarde les nouvelles encore et encore et qu'elles commencent à influer sur mon état mental parce qu'elles sont négatives. Que pensez-vous de l'impact des médias sur les enfants?
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Il est certainement négatif. Monsieur Charters, vous l'avez dit tout à l'heure, les harceleurs peuvent maintenant être là à 3 heures du matin sur votre téléphone, et cela vaut pour les parents comme pour les enfants. De plus, avec les algorithmes, une fois qu'on commence à regarder certaines choses, nos téléphones ne cessent de renforcer ces croyances pour nous. Si vous regardez des choses tristes ou déprimantes, c'est avec ça qu'on vous alimentera tout le temps. À mon avis, les algorithmes sont une grosse partie du problème.
Je n'ai aucune idée de ce que prévoient les lois à ce propos je ne sais pas comment nous réglementons ce genre de choses, mais si le gouvernement fédéral fait quelque chose, j'aimerais beaucoup qu'il prête attention à ce phénomène.
Nous mentionnions que les familles ont maintenant besoin de deux revenus. Les deux parents doivent travailler à plein temps. C'est encore du temps en moins pour les enfants. Les enfants s'isolent et ils passent de plus en plus de temps sur leur téléphone, où les harceleurs guettent, pour essayer d'avoir un lien. C'est vraiment un problème continu qui se perpétue.
Une des choses auxquelles je pense — et je sais que je m'éloigne de votre question sur les médias sociaux, mais ce pourrait être très utile —, c'est le soutien par les pairs pour les familles. Cette solution peut permettre d'équiper les parents et les enfants de manière à ce qu'ils comprennent ce qui se passe. Nous avons parlé tout à l'heure des premiers soins en santé mentale. Si on apprend cela à un enfant et qu'en rentrant à la maison, il dit à ses parents qu'il se sent déprimé, cela peut être très traumatisant pour eux, mais si on apprend aussi aux parents ce que cela veut dire, on peut commencer à bâtir une communauté et une relation au sein des foyers.
J'ai essayé de parler vite.
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Oui, les écoles sont des endroits phénoménaux pour mener cette intervention et cette prévention précoces afin d'aider les jeunes vulnérables.
Je pense à bon nombre des programmes que nous voyons ici, en Colombie-Britannique, et en fait, dans tout le pays et dans toute l'Amérique du Nord. Ils enseignent l'apprentissage social et émotionnel. Il y a une énorme quantité de preuves montrant que les programmes qui se concentrent sur le bien-être social et émotionnel de nos jeunes donnent de merveilleux résultats, pas seulement en ce qui concerne leurs notes — qui s'améliorent de 17 % environ chez les jeunes qui participent à l'apprentissage social et émotionnel —, mais aussi pour ce qui est de développer chez eux une résilience, de sorte que, aux prises avec des problèmes de santé mentale, ils peuvent s'en remettre.
Je suis impressionné aussi par des programmes comme le programme de littéracie en santé mentale de Stan Kutcher qui apprend aux jeunes, ainsi qu'aux adultes, comment comprendre ce que sont les problèmes de santé mentale et ce qu'ils ne sont pas. Les jeunes sont nerveux quand ils ont des examens. Ce n'est pas de l'angoisse, mais de la nervosité à la perspective d'interrogations. Cela nous aide vraiment de clarifier ce point.
Nous voyons aussi que les écoles sont des endroits très importants où aller plus loin avec les jeunes. Comme je l'ai dit, les écoles commencent à chercher des moyens de repérer les jeunes qui ont des problèmes de santé mentale. Nous formons intentionnellement des partenariats avec les districts scolaires parce que nous savons qu'ils connaissent les jeunes. Nous comptons sur eux pour nous aider à repérer ces jeunes et à les amener dans le programme que nous offrons ensemble.
J'encourage vivement le comité à réfléchir à l'endroit où les jeunes passent la majeure partie de leur temps, c'est‑à‑dire l'école, à des solutions pour les aider quand ils s'y trouvent et à des moyens de soutenir des programmes comme Take a Hike qui sont proposés dans les écoles.
Je sais que les écoles ne relèvent pas du gouvernement fédéral, mais en ce qui concerne la santé mentale dans les écoles, c'est là que les jeunes veulent voir des mesures. C'est là qu'ils veulent pouvoir demander cette aide. Ils ne veulent pas avoir à aller ailleurs. Ils veulent que cette aide soit normalisée. Ils ne veulent pas être stigmatisés.
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Je pense que tout ce qu'a dit M. Matchett est tout à fait vrai. Je suis impressionné par ce que je vois dans les écoles. Je dirai aussi que nous ajoutons de nouvelles charges à un secteur qui manque de ressources. Je viens d'une famille d'enseignants. Il y a toujours eu le défi de ce qu'il y a d'autre à faire dans la journée, en plus d'enseigner le programme. Les administrateurs ont du mal à offrir ce qu'ils considèrent comme des liens croissants avec des services sociaux qui sont complètement débordés.
Selon moi, l'école est un merveilleux endroit pour faire une partie de ce travail, et je pense que nous avons besoin de ces soutiens complets. Je répondrai à une question posée plus tôt sur l'accès que le filet de sécurité sociale semble pas mal effiloché. Il l'était déjà avant la pandémie, à mon avis, et il l'est de plus en plus. L'école en fait partie, ainsi que le système de santé, et les services sociaux qu'offrent les clubs, par exemple. Malheureusement, beaucoup de familles et d'enfants tombent entre les mailles du filet. Ils passent à travers les mailles à l'école à cause du manque de ressources. C'est le cas actuellement à cause des problèmes d'effectifs dans les services sociaux et à cause d'un manque de capacité financière.
Il me semble qu'il s'agit d'un problème que nous allons devoir régler, en tant que société, d'une manière ou d'une autre. À un moment donné, il faudra payer la facture.
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Je vous remercie beaucoup, madame la présidente.
J'aimerais m'adresser aux témoins. Encore une fois, votre témoignage d'aujourd'hui nous confirme que certains cas sont extrêmement délicats et que cela n'est effectivement pas évident d'aller chercher de l'aide, et ce, pour plusieurs raisons. C'est déjà un obstacle personnel et une première étape à franchir avec soi-même que de reconnaître ses propres problèmes de santé mentale.
Madame Jackson‑Brown, j'aimerais revenir sur ce que vous avez dit juste avant la fin de mon dernier tour de questions. Vous avez parlé des transferts en santé. Nous ne pouvons pas penser à offrir de meilleurs soins en santé mentale sans donner plus de moyens au système, sans lui fournir de l'aide. Les organismes le réclament également. Chez moi, les organismes reçoivent de l'aide de la part du Ministère de la Santé et des Services sociaux. Il y a là un lien direct avec les organismes qui offrent des services en santé mentale ou qui viennent en aide aux femmes qui sont victimes de violence.
Plus concrètement, je vous invite à en dire davantage sur l'importance des transferts en santé. J'aimerais vraiment obtenir plus de commentaires sur l'incidence d'une hausse du financement de notre système de santé. Que ce financement soit dirigé vers des programmes de santé physique ou mentale, les intervenants sur le terrain, nos institutions, nos organismes ont besoin de moyens pour arriver à répondre à la hausse des cas dont vous nous avez parlé aujourd'hui.
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À propos de transferts, je pense que s'il y a un financement, le programme est offert. Si des fonds ne sont pas réservés, le programme ne sera pas mis en place.
Par exemple, en Ontario, nous avions des fonds pour de la recherche sur la santé des femmes et ils ont été réduits. Ensuite, nous avons perdu les fonds pour la recherche sur ces initiatives et programmes. C'était par l'intermédiaire du Women's College Hospital. Il y avait une enveloppe de 15 000 $. Elle n'existe plus. Il faut que des fonds soient réservés pour promouvoir la création de programmes de santé mentale et de soins de santé mentale pour les femmes expressément.
Par ailleurs, il faut faire en sorte que, dans la formation de nos fournisseurs de soins primaires, le programme d'études comprenne une sensibilisation aux questions de santé mentale et de toxicomanie, afin que les fournisseurs de soins primaires se sentent équipés pour faire face à ces problèmes quand ils se posent. C'est aussi pour leur donner des outils de dépistage. Quand nous parlons d'une stratégie nationale pour la santé mentale prénatale, nous parlons de soutenir les fournisseurs de soins primaires en leur donnant des protocoles universels en matière de dépistage et de soins.
Nous devons soutenir nos fournisseurs de soins primaires pour faire face à ces problèmes de santé mentale afin qu'ils n'exigent pas nécessairement d'autres soins psychiatriques spécialisés.
Je ne sais pas si quelqu'un d'autre souhaite ajouter quelque chose.
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Comme vous en témoignez aujourd'hui, quand on parle d'intervenants de première ligne, on fait référence à des organismes communautaires qui sont sur le terrain avec les gens et qui répondent aux situations d'urgence. Il ne faut pas oublier qu'ils font aussi partie du système de santé. Ils réclament depuis longtemps un meilleur financement à long terme. C'est mathématique: pour offrir plus de services, il leur faut plus de moyens, plus d'argent. On constate que notre système de santé a été sous-financé trop longtemps. Les conséquences ne s'observent pas seulement dans les hôpitaux et chez les médecins, mais aussi au sein des organismes communautaires et auprès des intervenants de première ligne, qui ont manqué de moyens pour développer et améliorer leur offre de service. Ce premier aspect est crucial pour moi.
Ensuite, peut-être parce que nous venons de terminer une étude sur la violence conjugale, nous avons beaucoup parlé des liens entre la violence vécue et les cas de santé mentale. Ces liens sont bien réels. Vous avez soulevé la question de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Comme vous l'avez mentionné, demain, le 30 septembre sera la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation, qui offre une occasion de se pencher sur le sujet. Des moyens et des solutions y sont proposés. Lorsqu'on se penche sur les retards, il faut aussi considérer que certains moyens ne sont pas mis en place.
Enfin, la question du logement doit aussi être examinée. On ne peut pas penser sortir une femme du cycle de la violence si elle n'a pas d'endroit où se loger. Nous avons vécu un retard dans les transferts pour le logement au Québec. Pourtant, on aurait besoin d'investir massivement dans ce secteur, parce qu'un logement sûr va permettre à une femme de sortir d'une situation de crise et, possiblement, de penser à rebâtir sa vie. Elle ne pourra pas le faire si elle est en relation directe avec son agresseur 24 heures sur 24. Il faut investir davantage pour créer des logements sociaux et communautaires. Il est important d'offrir un logement sûr, et ce, à un coût abordable. Cela permettrait de ne pas congestionner les maisons d'hébergement d'urgence, où les femmes restent plus longtemps parce qu'il n'y a pas de place pour elles pour la deuxième étape, ce qui fait que des places pour des femmes en situation d'urgence ne se libèrent pas. C'est un cercle vicieux causé par le manque de places et de logements sociaux et communautaires pour les femmes.
Je vois tous les intervenants hocher la tête. Le premier qui aurait envie de s'exprimer sur ce lien entre la santé et le logement est invité à le faire.
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Je vous remercie, madame la présidente.
J'ai une autre question pour les Services de santé Royal Ottawa.
Dans votre témoignage, vous parliez de la police dans les interventions liées à la santé mentale. À Winnipeg, nous menons actuellement un projet pilote. Il s'agit du programme Alternative Response to Citizens in Crisis, ou ARCC, qui propose une autre solution. Il est mené en partenariat avec le Service de police de Winnipeg et le centre d'intervention d'urgence de Soins communs.
Toutefois, à Winnipeg, les relations entre la communauté autochtone et les services de police sont très fracturées. Même si je pense que c'est bien intentionné, un des problèmes que je vois — et j'en ai fait part à un des agents de la police communautaire —, c'est que c'est encore un policier qui, en premier lieu, détermine s'il est sans danger pour le travailleur en santé mentale d'accompagner le policier. Il me semble que c'est la même réponse. Si la personne ne se comporte pas bien, elle a une crise de santé mentale et elle est arrêtée. Le problème, c'est que les gens hésiteront à appeler quand il y a une crise de santé mentale si c'est la police qui intervient plutôt que les personnes qualifiées pour traiter ce genre de situation.
Je sais que vous l'avez mentionné. Je ne sais pas si vous êtes d'accord avec moi. Il me semble que ce n'est pas la police qui résoudra une crise de santé mentale. Nous devons investir dans de vrais services de santé mentale avec des spécialistes de la santé mentale, des thérapeutes en action, et ainsi de suite. Êtes-vous d'accord? Ou pas? Pourquoi ou pourquoi pas?
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Je suis tout à fait d'accord.
Je ne connais pas bien le programme ARCC, mais j'ai travaillé avec une équipe de crise dans le comté de Simcoe. Dans le centre de crise où je travaillais, on m'envoyait intervenir dans des situations sans être accompagnée de policiers, mais parfois avec des policiers. Je peux affirmer que lorsque des policiers venaient avec moi, presque toujours, une situation qui n'avait pas besoin de dégénérer dégénérait. Nous pouvons former des spécialistes qui interviendront en première ligne dans des situations d'urgence. Si la situation est jugée dangereuse, alors peut-être la police pourrait se tenir à proximité.
Là encore, Mme Jackson-Brown et moi travaillons en première ligne depuis 15 ans. Je me souviens de trois fois peut-être où il a fallu que la police m'accompagne dans une intervention. Je me rappelle cette fois, dans un immeuble d'habitation, où un policier m'a dit qu'il n'arrivait pas à croire que j'allais seule dans ces maisons, que les policiers n'iraient jamais seuls, qu'en fait, ils y allaient à deux. Pourtant, en 15 ans — ce qui ne veut pas dire que cela n'arrive pas — , il ne m'est jamais arrivé de mal. Je ne me suis jamais trouvée dans une situation que je ne pouvais pas désamorcer moi-même.
J'ai bien mentionné la police. Je pense qu'en tout premier lieu, nous devrions former des personnes à intervenir dans des situations en première ligne où il y a une crise de santé mentale. En cas de problème de sécurité, la police ne serait pas loin. Je crois aussi que si nous continuons d'envoyer la police, il faut qu'elle soit bien mieux formée à la santé mentale.
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Merci, madame la présidente.
Si je peux faire un résumé, car je pense que ce sera ma dernière chance d'intervenir, nous avons établi les incidences des difficultés financières, de l'inflation et de ce genre de facteurs. Je trouve important d'ajouter que les difficultés économiques ainsi que le manque de sécurité financière et de fonds fragilisent aussi l'offre de services offerts. Par conséquent, il y a une diminution de ces services et des clients qui y ont accès, y compris les jeunes filles.
Je me demandais si vous aviez rencontré la . Une enveloppe de 4,5 milliards de dollars a été réservée pour la santé mentale. Avez-vous vu la couleur de cet argent? Y a‑t‑il des discussions à ce sujet?
Monsieur Charters, j'aimerais vous entendre en premier.
:
Je vous remercie, madame la présidente.
Je vais poursuivre dans la même veine que ma collègue.
Présentement, il y a des tables rondes, où le ministre fédéral de la Santé discute avec les ministres de la Santé des provinces et des territoires. Ils traitent de l'expansion des services communautaires et des services de lutte à la dépendance chez les jeunes, généralement pour ceux qui sont âgés de 10 à 25 ans. Évidemment, ils discutent aussi de services d'intervention précoce pour la prévention.
[Traduction]
Tout cela est en cours.
Tout à l'heure, j'ai entendu Mme Thomas parler de la difficulté à s'y retrouver dans le système. Il a aussi été question de la défaillance de ce système. J'aimerais vous entendre à ce sujet. Vous avez évoqué le programme de psychiatrie et le fait qu'il est financé non pas par le gouvernement, mais par des donateurs. Il y a de quoi s'alarmer, c'est le moins qu'on puisse dire.
Il y a aussi les troubles alimentaires. Selon mon expérience personnelle, on s'occupe des jeunes jusqu'à 18 ans, mais ils tombent ensuite dans un gouffre parce qu'ils ne reçoivent plus de services.
J'ai une question à ce propos. Je vais commencer par les porte-parole des Services de santé Royal Ottawa et je demanderai aux autres d'y répondre ensuite. Nous sommes actuellement en pourparlers avec les provinces. Quelles pratiques et quels résultats le fédéral doit‑il… Vous avez parlé des soins virtuels. Comme nous disposons de peu de temps, pouvez-vous nous exposer en trois ou quatre points ce que devrait contenir selon vous un accord fédéral-provincial? Le gouvernement fédéral devrait‑il contourner les provinces et verser une aide financière directement aux communautés pour les 12 mois à venir, d'ici à ce qu'un accord soit conclu? Je veux vous entendre au sujet de l'urgence actuelle et des moyens à prendre pour en sortir. Si vous vous trouviez en face des ministres de la Santé, que leur diriez-vous de prendre en compte dans les accords globaux qui seront négociés?
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Monsieur Matchett, j'aimerais revenir à vous parce que vous avez ouvert la porte sur la question complexe des compétences.
Je vous donne un exemple. Au Québec, on s'est fait un plan non partisan pour venir en aide aux femmes victimes de violence conjugale. Le rapport s'intitule « Rebâtir la confiance ». Le gouvernement du Québec a mis en place un plan pour aider les femmes à sortir de cette violence, ce qui peut aider dans le cas de la santé mentale.
Les organismes réclament des moyens financiers. Monsieur Matchett, vous avez ouvert la porte sur la question de la compétence; nous nous trouvons directement au cœur de cette question. Madame Thomas, vous avez dit qu'il n'y avait pas suffisamment d'argent pour les organismes sur le terrain. Je reviens à cette idée et à l'importance des transferts et du réinvestissement dans le système de santé, sans entrer dans des guerres de compétences.
En ce moment, le Québec et les provinces demandent ces transferts en santé. Au Québec, il y a des organismes communautaires qui sont prêts à agir sur le terrain, mais ils réclament de la prévisibilité. Des transferts récurrents et beaucoup plus importants à investir dans le système de santé leur permettraient de prévoir à plus long terme les services qu'ils offrent aux populations. Comme vous l'avez dit, les financements ponctuels ne fonctionnent pas. Les organismes doivent être en mesure de prévoir à long terme des projets qui viennent en aide aux femmes en matière de santé mentale. La question de transferts stables, permanents et récurrents est importante. La crise causée par la pandémie a révélé le besoin de réinvestir dans notre système de santé. Nous ne sommes pas encore totalement sortis de cette crise; il y a encore des cas qui s'ajoutent. C'est une crise pandémique qui a mis en lumière beaucoup de fragilité.
Monsieur Matchett, pourriez-vous clarifier la question des compétences? En haut, il y a un État fédéral qui doit transférer les sommes au Québec et aux provinces pour qu'ils puissent investir dans la santé. Cela simplifierait les transferts et l'aide aux organismes. C'est ce qu'on a mis en place au Québec. J'aimerais aussi que vous nous parliez de l'importance de financer les organismes et de reconnaître le travail qu'ils font sur le terrain.
Monsieur Matchett, vous pouvez parler de compétences et ensuite, parce que le temps file, revenir à l'importance d'investir davantage dans nos organismes communautaires, qui sauront quoi faire pour aider les gens. En ce moment, en fonction de ce qui se fait, le moyen le plus rapide serait de procéder à des transferts. Le Québec et les provinces ont déjà des plans en place. Je sais qu'au Québec, des organismes communautaires ont des plans déjà prêts, qui lèvent la main et qui ont besoin de moyens financiers.
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Je suis d'accord. En Colombie-Britannique, des projets comme Take a Hike attendent seulement le financement pour aller de l'avant. Depuis 22 ans, Take a Hike a été soutenu presque entièrement par des philanthropes. L'an dernier, nous avons reçu 150 000 $ environ d'aide gouvernementale non liée à la COVID.
Cette année, alors que nous entamons les négociations pour recevoir une aide financière du gouvernement fédéral, le soutien provincial au programme Take a Hike pose problème. Les organismes de bienfaisance doivent se dépêtrer dans le labyrinthe des compétences des provinces, des territoires et des différents ministères, alors que c'est aux gouvernements de tirer les choses au clair une fois pour toutes.
Les organismes de bienfaisance sont modestes. Nous avons un budget de 4,5 millions de dollars. Nous faisons de notre mieux pour fournir des services aux jeunes, mais nous avons besoin de financement. Il faut abolir les obstacles. Par exemple, nous perdons du temps à démêler qui est responsable de quoi et, quand nous obtenons enfin du financement, à répondre aux questions concernant les compétences d'une autre administration [difficultés techniques]…
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Ma question s'adresse à M. Matchett.
Vous nous avez expliqué qu'il est très difficile de recruter des intervenants de première ligne en santé mentale, surtout dans les régions éloignées. J'ai de longues années d'expérience comme éducatrice. Avant d'être élue, j'enseignais à l'Université de Winnipeg, et parmi nos champs d'intérêt se trouvait la formation d'intervenants dans les communautés. Par exemple, j'ai participé à la formation d'enseignants de la communauté pour qu'ils enseignent dans celle‑ci.
Il est connu que les membres d'une communauté seront plus enclins à y rester. Pensez-vous qu'au lieu de parachuter des spécialistes dans les communautés, il faudrait… Par exemple, l'éducation dans les réserves passe actuellement par le gouvernement fédéral. Les programmes dans les réserves et l'enseignement postsecondaire qui sont offerts aux membres des Premières Nations admissibles relèvent également du fédéral. Selon vous, devrions-nous soutenir des programmes de formation des membres des communautés plutôt que d'y envoyer des personnes de l'extérieur?
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Merci énormément. Je suis très content d'être ici.
D'habitude, je siège au comité des ressources naturelles. La réunion d'aujourd'hui m'a offert un changement de ton et de sujet très rafraîchissant. Merci de m'avoir permis d'être des vôtres.
Les échanges m'ont suggéré six pistes de réflexion un peu aléatoires, dont certaines ne sont pas étrangères au fait que mon épouse est médecin dans un hôpital de la Colombie-Britannique et qu'elle rencontre le genre de problèmes dont nous avons discuté aujourd'hui. Nous avons 3 enfants, soit 2 filles et 1 garçon qui ont de 16 à 21 ans, avec qui nous avons beaucoup de discussions. Ils m'ont questionné sur mon emploi du temps et je leur ai parlé de la réunion d'aujourd'hui, que j'ai trouvé passionnante.
Je vais donc vous faire part de mes réflexions sur divers thèmes, et je serai ravi d'entendre ce qu'elles vous inspirent dans le temps qui restera. Vous pourrez aussi nous soumettre des mémoires sur les sujets de votre choix si vous désirez alimenter la réflexion.
La première concerne le déploiement récent d'un modèle appelé Foundry en Colombie-Britannique. Si vous êtes de l'extérieur de la province, vous n'avez peut-être aucune idée de ce dont il s'agit. En bref, ce sont des programmes communautaires pour les jeunes. Ma communauté était la treizième en Colombie-Britannique, et il a permis d'offrir un lieu où se réfugier pour les jeunes en crise. Ils y trouvent des services de prise en charge globale. Les activités ont commencé il y a à peine un mois, mais c'est déjà une grande réussite. C'est un lieu pour les enfants en crise, qui ont des problèmes liés à l'identité, à la famille ou d'une autre nature, qui vivent de l'instabilité ou qui ont une santé mentale fragile. Cet endroit les accueille et ils peuvent s'y poser. C'est fantastique, et j'aimerais beaucoup connaître les autres initiatives du genre au Canada, dans d'autres provinces et territoires, d'autres administrations. Il peut s'agir de pratiques exemplaires qui méritent d'être connues, dont des leçons pourraient être tirées et dont le gouvernement fédéral pourrait soutenir la mise en œuvre.
Le deuxième thème qui m'est venu à l'esprit est celui des troubles alimentaires. Selon ma fille, la moitié de la population féminine aurait un trouble alimentaire ou de dysmorphie corporelle actuellement. C'est un phénomène social, mais comprenons-nous bien de quoi ilretourne? Est‑ce qu'il s'aggrave? Quelles sont les causes profondes et comment peut‑on les traiter? C'est un problème important, et nous ne pouvons pas prétendre qu'il n'existe pas dans notre société.
Une troisième piste de réflexion m'a été inspirée par ce que vous avez dit, monsieur Charters, au sujet du droit d'être oublié. En Colombie-Britannique, les noms Reena Virk et Amanda Todd nous viennent à l'esprit. Les deux ont connu une fin tragique après avoir été victimes d'intimidation et de cyberintimidation. J'aimerais vraiment savoir ce que le gouvernement fédéral pourrait faire pour faire avancer ce dossier, s'il en a assez fait pour appuyer les efforts d'autres gouvernements dans la lutte contre l'intimidation et la cyberintimidation.
Le quatrième aspect qui mérite réflexion à mon avis est le sentiment d'impuissance devant les changements climatiques. Comment redonner espoir aux jeunes? Les jeunes de nos communautés sont découragés, et je crois que nous, les adultes, pouvons faire mieux pour raviver l'espoir et leur certitude qu'ils peuvent faire quelque chose.
La masculinité toxique est le cinquième thème que j'offre à votre réflexion. Ma fille de 16 ans m'a envoyé un texto dans lequel elle me demandait pourquoi les hommes ont tous un ego mille fois trop gros et sont convaincus d'être des experts dans tous les domaines. Ce n'est pas aidant pour l'estime de soi. Sa question porte en fait sur la masculinité toxique dans notre société.
Le dernier thème est celui de la causalité, de la prévention et de la trajectoire, et du meilleur moment pour intervenir. Comment avoir une longueur d'avance en matière de santé mentale? Faut‑il recourir à la publicité, ou mettre en place des mesures pour favoriser la stabilité des communautés et des familles?
Comme vous pouvez le voir, j'ai beaucoup de questions, et j'aimerais beaucoup entendre vos solutions.
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Si les représentants de Take a Hike et BGC souhaitent donner suite aux questions, sachez que c'est exactement le genre de renseignements qui nous intéressent.
Au nom du Comité, je remercie nos témoins de leur présence aujourd'hui. Il reste une minute et demie environ pour discuter des travaux du Comité, et nous allons donc devoir prendre congé. Vous pouvez toutefois rester dans la salle puisque les délibérations seront publiques. Je vous demande à tous de mettre vos microphones en sourdine.
Je voudrais maintenant vous parler d'un courriel que nous avons reçu concernant notre calendrier et la visite des deux ministres. Les deux nous redemandent de comparaître ensemble pendant une heure. Cela signifie que la et la comparaîtraient pendant une heure en tout. Ce n'est pas ce qui est prévu dans la motion que nous avons adoptée et dans laquelle nous demandions à chaque ministre de passer une heure avec nous.
Je tenais à en discuter avec vous pour m'assurer que nous sommes toujours sur la même longueur d'onde. Je vais donc vous demander de confirmer la motion pour être bien certaine de transmettre la volonté du Comité.
Êtes-vous tous d'accord pour maintenir la motion dans laquelle nous demandons aux ministres de comparaître une heure chacune, pour un total de deux heures?
Des députés: D'accord.
La présidente: Merci. C'est ce que j'appelle de l'efficacité.
Monsieur Aldag, emportez ça chez vous. C'est comme ça qu'on fait les affaires du Comité.
Des députés: Ha, ha!
La présidente: Madame la greffière, pouvez-vous réécrire aux ministres pour leur demander de comparaître une heure chacune devant le Comité, soit deux heures en tout, comme les membres semblent le vouloir à l'unanimité? J'ai vu des sourires sur tous vos visages. C'était un grand moment!
Comme nous n'avons rien d'autre sur le métier et puisque tout le monde est heureux, je vais lever la séance.
À lundi.