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La séance est ouverte. Bienvenue à la 16
e réunion du Comité permanent de la condition féminine.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le mardi 1er février, le Comité entreprend son étude sur l'exploitation des ressources et la violence faite aux femmes et aux filles autochtones.
La réunion d'aujourd'hui se déroule selon une formule hybride, conformément à l'ordre adopté par la Chambre le 25 novembre 2021. Des députés sont présents dans la salle et d'autres participent à distance à l'aide de l'application Zoom. Le 10 mars 2022, le Bureau de régie interne a pris une directive obligeant les personnes présentes dans la salle à porter un masque, sauf si elles sont assises à leur place durant les délibérations.
Pour assurer le bon déroulement de la réunion, j'aimerais donner quelques consignes aux témoins et aux députés.
Avant de prendre la parole, attendez que je vous nomme. Si vous participez par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro. Veuillez mettre votre micro en sourdine lorsque vous ne parlez pas. En ce qui concerne l'interprétation, si vous participez à la réunion par l'application Zoom, vous avez le choix, au bas de votre écran, entre le parquet, l'anglais et le français. Si vous participez en personne, vous pouvez utiliser le casque d'écoute mis à votre disposition et sélectionner le canal que vous voulez. Je rappelle aux députés et aux témoins que toutes leurs observations doivent être adressées à la présidence. À titre d'information pour les témoins, s'il survient quoi que ce soit, nous demanderons le consentement unanime pour suspendre la séance.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins d'aujourd'hui. Nous accueillons, à titre personnel, Pamela Palmater, titulaire de la Chaire de gouvernance autochtone à l'Université Ryerson, maintenant connue sous le nom de l'Université métropolitaine de Toronto. Nous recevons également Kathleen Quinn, directrice générale du Centre to End All Sexual Exploitation; Viviane Doré-Nadeau, directrice de ConcertAction Femmes Estrie; et, enfin, Marjolaine Étienne, présidente de Femmes autochtones du Québec inc. et sa collègue, Stéfanie Sirois-Gauthier, analyste juridique et politique.
Nous allons commencer par les déclarations préliminaires. Vous disposerez chacune de cinq minutes. Quand vous me verrez lever le carton rouge, cela signifie qu'il vous reste une minute et que vous devez commencer à conclure.
Je cède maintenant la parole à Pamela Palmater. Vous avez cinq minutes.
Kwe' Ni'n teluisi Pam Palmater. Je suis membre de la nation souveraine des Mi'kmaq sur le territoire non cédé de Mi'kma'ki. Ma communauté d'origine est la Première Nation Ugpi'Ganjig Eel River Bar. Aujourd'hui, je m'adresse à vous depuis les territoires souverains des Mississaugas de Scugog.
Je vous remercie de me donner l'occasion de participer à cette importante étude sur le rapport entre l'exploitation des ressources et la violence faite aux femmes et aux filles autochtones. C'est un sujet sur lequel je me penche depuis longtemps, non seulement dans le cadre de l'enquête nationale, mais aussi dans le contexte des droits internationaux de la personne.
Je pense qu'il est approprié de commencer par rappeler un fait: il y a plusieurs années, KWG Resources Inc., une société minière canadienne, a mis en ligne une vidéo montrant des femmes en bikini pour promouvoir l'exploitation minière sur les terres autochtones dans la région du Cercle de feu. Le président de l'époque, Frank Smeenk, a défendu la vidéo en affirmant que « le sexe fait vendre » l'exploitation minière. Ce n'est là qu'un des nombreux exemples qui montrent que l'industrie minière ne se limite pas à l'exploitation des minerais enfouis dans les terres autochtones. Elle s'entend aussi à l'exploitation des femmes et des filles autochtones dans les environs.
Malheureusement, ce constat est corroboré par les recherches et les statistiques concernant, en particulier, les sociétés extractives canadiennes. En 2009, un rapport secret commandé par l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs a confirmé que les sociétés minières canadiennes affichent le pire bilan en matière de droits de la personne à l'échelle mondiale — pas seulement ici au Canada, mais dans le monde entier — et qu'elles sont beaucoup plus susceptibles de se livrer à des activités illégales et de commettre de graves violations des droits de la personne, malgré le fait qu'elles ont toutes des politiques en matière de responsabilité sociale.
Cela ne se limite pas à l'industrie minière. De toute évidence, il y a aussi d'autres industries extractives. Nous savons que les projets à risque élevé mettent en cause l'exploitation des ressources, mais c'est aussi le cas des industries extractives et, plus précisément, des sociétés transnationales; des projets énergétiques comme l'hydroélectricité et le nucléaire; des mégaprojets comme les grands projets de construction et de déclassement, les autoroutes, les aéroports, les ponts, les routes et les tunnels. Ces projets créent des zones à risque élevé, notamment des camps de travailleurs, mais il y a aussi l'afflux important de travailleurs temporaires ou de passage qui sont principalement des hommes: l'industrie du camionnage, l'industrie du transport, les services de sécurité privés et, malheureusement, les forces de l'ordre.
Les types de violence que les femmes et les filles autochtones subissent de la part de tous ces intervenants entraînent une augmentation des taux de violence physique, notamment la violence conjugale, des taux élevés d'exploitation sexuelle et de traite à des fins sexuelles, des agressions sexuelles et des viols, et une augmentation des taux de disparition. C'est sans compter que tous les intervenants que je viens de mentionner ne respectent pas le titre ancestral des femmes et des filles autochtones, leurs droits ancestraux et issus de traités, leur droit à l'autodétermination, ce qui comprend l'égalité des voix dans le processus décisionnel, et le droit au consentement libre, préalable et éclairé — bref, le droit de dire non à la violence.
Le Canada, en tant qu'État, n'a pas su protéger les droits des femmes et des filles autochtones, car rien n'a été fait pour contrer le racisme, le sexisme, la misogynie et la violence sexualisée de la part d'intervenants de l'État — comme les forces de l'ordre, en particulier la GRC —, de particuliers comme les individus qui s'adonnent à la traite de personnes à des fins sexuelles, et d'employés d'entreprises comme ceux qui sont embauchés dans les camps de travailleurs, les services de sécurité privés et, surtout, l'industrie du camionnage.
L'inaction devant tous ces problèmes a entraîné des taux élevés de violence sexualisée, mais il importe aussi de souligner que le Canada, en tant qu'État, a la responsabilité de faire respecter les droits fondamentaux de ces femmes, peu importe la structure constitutionnelle. Dans le droit international, on ne peut se défendre en disant que telle ou telle chose relève des provinces. Le Canada, en tant qu'État, est responsable de tout cela. Ses échecs répétés nuisent directement aux femmes et aux filles autochtones.
Le rapport de l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs, les rapports du FBI, Amnistie internationale, la Commission interaméricaine des droits de l'homme et les Nations unies ont tous conclu que les femmes et les filles autochtones font face à des taux élevés de violence sexualisée, de criminalisation et de surveillance de la part d'intervenants des secteurs public et privé.
En ce qui concerne les solutions, nous avons besoin d'une enquête publique sur les liens entre tous ces projets et mégaprojets d'exploitation et d'extraction des ressources dans les secteurs public et privé.
Nous devons respecter le droit des femmes et des filles autochtones, ainsi que le droit de leurs nations, à dire non aux projets. Il faut tenir compte des appels formulés par le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale des Nations unies, qui réclame l'arrêt de tous les mégaprojets tant qu'il n'y a pas de consentement libre, préalable et éclairé.
Nous devons dédommager les personnes qui ont subi des préjudices et faire en sorte que les femmes autochtones deviennent des décideuses clés à l'avenir.
Je vous remercie.
Au nom de ConcertAction Femmes Estrie, je remercie le Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes du Canada d'avoir invité notre organisme à participer à son étude sur l'exploitation des ressources et la violence faite aux femmes et aux filles autochtones.
Comme nous le faisons lors des assemblées de ConcertAction Femmes Estrie, j'aimerais reconnaître que nos bureaux se situent sur les territoires traditionnels non cédés des premiers peuples. Je rends hommage à leur présence et à leur rôle de gardiens des terres et des eaux où chacun et chacune d'entre nous se situe aujourd'hui. En tant que membres d'une organisation féministe centrée sur la justice sociale et environnementale, nous considérons qu'il est essentiel de reconnaître les conséquences passées et actuelles du colonialisme et de soutenir la résistance autochtone sur ces terres. Je m'engage à ce que ces paroles et ces intentions m'habitent lors de mon allocution.
ConcertAction Femmes Estrie n'étant pas une organisation autochtone, il me sera difficile de faire un témoignage vécu sur l'impact de la violence de l'extractivisme sur les femmes et les filles autochtones. J'essaierai donc de faire bon usage du privilège que nous avons d'avoir la parole aujourd'hui.
ConcertAction Femmes Estrie est une table de concertation formée d'une trentaine de groupes membres. Elle a pour mission la défense collective des droits des femmes. Elle coordonne le comité Marche mondiale des femmes—Estrie, qui participe à la coordination au Québec de cette organisation internationale.
Le comité Marche mondiale des femmes—Estrie a établi des liens de solidarité avec des femmes autochtones, plus précisément celles de la région de Macronorte, au Pérou, aussi impliquées dans la Marche mondiale des femmes.
C'est lors des actions de 2015, influencées par la culture des femmes autochtones du Sud, sous le thème « Libérons nos corps, notre Terre et nos territoires! », que le comité Marche mondiale des femmes—Estrie s'est intéressé à la question des minières canadiennes. Les femmes autochtones nous ont rappelé que nous appartenons à la Terre et que la Terre ne nous appartient pas. De plus, elles ont mentionné que les systèmes du colonialisme et du patriarcat exploitent la Terre mère comme ils exploitent le corps des femmes.
Quand nous parlons de l'exploitation des ressources et de la violence faite aux femmes et aux filles autochtones, nous devons comprendre que deux cultures très différentes se côtoient et que différents systèmes d'oppression entrent en jeu.
D'abord, le gouvernement actuel et les pratiques des compagnies minières s'approprient le territoire des peuples autochtones et perpétuent donc le colonialisme. Cela les empêche de vivre sur leurs terres. Rappelons-nous que 66 % de l'exploitation minière partout dans le monde est le fruit de compagnies ayant leur siège social au Canada.
De plus, les Autochtones ont vécu ici plus de 10 000 ans et, lorsque les Européens sont arrivés, les terres et l'eau étaient restées intactes. Après 600 ans d'habitation sur ces terres, nous avons déjà pollué tous les cours d'eau, détruit des forêts et éventré la Terre. Cela aussi constitue une forme de violence.
Quand nous parlons de violence envers les filles et les femmes autochtones, un autre système d'oppression entre en jeu, soit celui du patriarcat, qui engendre des violences envers les femmes.
Une étude menée en 2021 par l'association des femmes inuites du Canada révèle que plus de la moitié des femmes interrogées ont été victimes à répétition de violences, de harcèlement sexuel et de violence psychologique, et ce, sur cinq sites miniers différents. Une femme a déclaré avoir été congédiée après avoir signalé le problème à son entreprise, tandis qu'une autre femme a été priée de se taire.
De plus, dans son rapport, l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées montre du doigt les violences perpétrées aux abords des camps de travailleurs, sur les chantiers d'exploitation de ressources naturelles.
Pour sa part, le groupe de recherche Firelight a publié en 2017 un rapport affirmant que, dans la région de Fort St. James, les cas d'agressions sexuelles avaient augmenté de 38 % au cours de la première année suivant la construction du camp.
Lundi dernier, le comité Marche mondiale des femmes—Estrie a organisé une rencontre avec des femmes autochtones du Pérou et de l'Argentine. Au Pérou, une compagnie minière canadienne s'est approprié plus de 90 % des terres autochtones d'une communauté, lui laissant seulement son école, son centre de santé et son lieu de culte. Lorsque la communauté s'est opposée à cette prise de possession, elle a été victime d'actes répressifs violents. Des personnes ont eu des séquelles permanentes, telles que la perte de la vue et la paralysie. En Argentine, des activistes ont été emprisonnés à la suite de leur résistance à l'établissement de cette minière.
Nous demandons certaines mesures pour améliorer la situation.
Il faut entre autres, par l'entremise du système d'éducation, parler aux enfants de l'égalité entre les femmes et les hommes, démontrer aux enfants et aux adolescents que la violence est inacceptable et leur enseigner à bâtir des relations non violentes empreintes de bienveillance.
De plus, les compagnies devraient être tenues de mettre en application une politique pour contrer le harcèlement psychologique et sexuel des femmes.
En outre, nous demandons que les travailleuses autochtones soient renseignées sur leurs droits de recours en cas de violence psychologique et sexuelle.
Par ailleurs, le Canada devrait renforcer les ressources et les pouvoirs dont dispose l'ombudsman canadienne pour la responsabilité des entreprises, qui agit comme protectrice des citoyens à l'égard des minières canadiennes, afin qu'elle ait un pouvoir de sanction.
Nous demandons aussi qu'une loi sur la diligence raisonnable en matière de droits de la personne et d'environnement soit adoptée au Canada.
Il faudrait également qu'une loi pour empêcher l'obsolescence programmée soit mise en application.
Enfin, nous demandons que les activistes emprisonnés en Argentine soient libérés.
Je vous remercie beaucoup de m'avoir écoutée.
[Traduction]
Je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner.
Je vous parle depuis les territoires traditionnels des Premières Nations du Traité no 6 et des Métis de la zone 4. Je suis directrice du Centre to End All Sexual Exploitation, ou CEASE, depuis 25 ans. Ma déclaration s'appuie sur l'expérience d'une organisation communautaire qui lutte contre l'exploitation sexuelle commerciale, la traite de personnes à des fins sexuelles et la violence contre les filles et les femmes, dont beaucoup sont autochtones.
Edmonton a la réputation d'être la porte d'entrée vers le Nord, et le Nord est connu pour ses industries d'extraction de ressources, notamment le pétrole, le gaz et le charbon. On y trouve également une importante industrie forestière, souvent adjacente à ces industries d'extraction de ressources. Toutes ces industries ont une incidence sur tous les aspects de la vie dans les communautés des Premières Nations et des Métis. Bien que ces communautés s'emploient à créer des résultats socioéconomiques positifs en collaborant avec les entreprises d'exploitation des ressources, il y a des répercussions négatives.
Je parlerai surtout de la migration en provenance des communautés situées à proximité des industries d'exploitation des ressources et de la violence à laquelle font face les filles et les femmes autochtones qui partent pour les villes, grandes ou petites.
Le transport est un important facteur de vulnérabilité. Il existe de nombreuses communautés où l'accès aux autobus est inexistant ou très limité. En faisant de l'auto-stop, les jeunes et les femmes sont à la merci de chauffeurs qui peuvent exiger des services sexuels en échange. Lorsqu'elles sont déposées dans une ville voisine, elles courent encore plus de risques.
Plus de 70 % de la population autochtone d'Edmonton vient d'autres collectivités. Selon le recensement de 2016, les Autochtones représentaient 5,5 % de la population. La population autochtone des quartiers du centre d'Edmonton, où je vis, varie entre 10 % et 17,5 %. Ces quartiers sont souvent ceux où les jeunes et les adultes autochtones s'installent en premier et où ils sont la proie des exploiteurs du commerce du sexe, des trafiquants, des gangs et des profiteurs du commerce de la drogue.
Même si les camps de travail sont en mesure d'établir des codes de conduite pour les travailleurs et les entrepreneurs sur place, il y a peu de contrôle lorsque ceux‑ci quittent les camps et se rendent dans les villes voisines. Les hommes qui cherchent à avoir accès au corps des femmes créent une demande qui alimente le commerce du sexe, surtout lorsque les femmes ont peu d'options économiques. Là où il y a une demande, il y a aussi ceux qui voient une occasion d'affaires dans la traite des personnes.
Au moins 44 femmes exploitées sexuellement, dont des personnes transgenres et bispirituelles, ont été assassinées dans la région d'Edmonton au cours des 39 dernières années. Bon nombre d'entre elles ont été vues pour la dernière fois dans les collectivités du centre d'Edmonton, puis leurs corps ont été retrouvés à l'extérieur de la ville. Plus de 52 % d'entre elles étaient des Autochtones, ce qui montre la surreprésentation des filles et des femmes autochtones exploitées par la violence sexuelle dans le commerce du sexe. Seuls 11 de ces meurtres ont été résolus.
Celles qui survivent doivent composer avec la dure réalité des répercussions à long terme de la violence sexuelle sur la santé physique et mentale. Si l'on ajoute à cela la pauvreté, les logements précaires, le racisme et les traumatismes intergénérationnels, de nombreuses filles et femmes autochtones passent la majeure partie de leur vie dans des conditions de vulnérabilité. Il faut que cela change.
En conclusion, les industries des ressources doivent continuer à collaborer avec les communautés autochtones et métisses pour élaborer des plans communautaires visant à réduire la violence et l'exploitation sexuelle et à accroître la sécurité et le bien-être des filles et des femmes autochtones.
Les industries peuvent élargir la portée de leurs codes de conduite pour les travailleurs et les entrepreneurs afin d'y inclure une formation sur la violence sexuelle, l'exploitation sexuelle commerciale et la traite des personnes, comme le fera Enbridge à partir du 4 mai pour toutes ses activités en Amérique du Nord. Les industries peuvent financer des initiatives de sécurité communautaire, des bourses de formation à l'emploi et des programmes de littératie financière, tant dans les communautés des Premières Nations et des Métis que dans les villes. Elles peuvent élaborer des programmes de mieux-être pour la main-d'œuvre masculine et mettre l'accent sur une masculinité positive, des relations saines et des stratégies d'adaptation efficaces qui permettent de gérer le stress inhabituel lié au travail dans les industries primaires.
Merci.
Madame la présidente, j'aimerais prendre une petite minute pour vous informer que je vais devoir vous quitter à 14 h 15 en raison d’un autre engagement aux Nations unies. Ce sera ma collègue Stéfanie Sirois‑Gauthier qui terminera cette rencontre avec vous.
Tout d’abord, j’aimerais remercier les membres de ce comité d'offrir à Femmes autochtones du Québec, ou FAQ, l’occasion de s’exprimer sur les problèmes préoccupants qui découlent de la violence sous toutes ses formes que vivent les femmes et les filles autochtones du Québec.
Depuis 48 ans, FAQ consacre des efforts et contribue au rétablissement de l’équilibre entre les femmes et les hommes, que ces derniers soient autochtones ou allochtones, en donnant une forte voix aux besoins et aux priorités des femmes.
La promotion de la non-violence est un cheval de bataille pour FAQ depuis sa création. En ce sens, notre organisation remercie le Comité permanent de la condition féminine d’être à l’écoute des priorités de FAQ sur la question de la violence en lien avec l’exploitation des ressources.
Nul besoin de mentionner que les femmes et les filles autochtones sont disproportionnellement victimes de violence sous toutes ses formes. Je parle ici de violence physique, psychologique et sexuelle, mais également de violence culturelle, mentale, spirituelle, sociale, institutionnelle et financière. Ces violences sont présentes dans les communautés et en milieu urbain. Les femmes et les filles autochtones méritent d'être en sécurité face au fléau de la violence sous toutes ses formes, qui a été un fardeau supplémentaire pendant la pandémie. Ces violences sont le résultat de toutes les formes de politiques coloniales qui visaient et qui visent toujours à assimiler les Autochtones, plus particulièrement les femmes autochtones.
L’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, soit l'ENFFADA, mentionne que l’exploitation des ressources est à la base des politiques de colonisation. L’objectif était de développer un commerce international basé sur des ressources et un territoire jamais concédé aux différentes communautés autochtones qui l’occupaient, et ce, sans consentement ni accord.
L’ENFFADA dénonce le fait que les femmes et les filles autochtones sont 12 fois plus à risque d’être assassinées, notamment parce qu’il s’agit de personnes marginalisées. Les politiques coloniales discriminatoires, patriarcales et d’assimilation, ainsi que la mise en place des pensionnats autochtones, sont des exemples probants qui ont eu et qui ont encore des répercussions intergénérationnelles lourdes et permanentes. Il s’agit d’un génocide lent, mais dévastateur.
Nul besoin de vous mentionner à quel point cela a été néfaste dans les communautés et pour toutes les femmes autochtones. Je ne veux pas minimiser la violence que vivent les femmes de manière générale, mais les statistiques démontrent très clairement que les femmes autochtones sont beaucoup plus touchées par la violence que leurs consœurs allochtones.
Les appels à la justice 13.1 à 13.5 de l’ENFFADA renvoient explicitement à l’exploitation des ressources et aux répercussions sur les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones. De manière générale, les appels à la justice demandent qu’on prenne en compte la sécurité et la protection des femmes autochtones lorsqu'on réalise des projets d’extraction et d’exploitation des ressources. Pour ce faire, elles doivent être des parties prenantes au processus avant, pendant et après la mise en œuvre de ces projets. Aussi, les projets doivent être soumis à des évaluations des répercussions socioéconomiques.
Il est aussi demandé au gouvernement de financer des projets de recherche en ce sens et aux industries concernées d’élargir et de renforcer les infrastructures sociales existantes, afin de permettre une prestation de services plus grande.
Puisque nous sommes ici aujourd’hui pour parler de la violence que vivent les femmes et les filles autochtones dans un contexte d’exploitation des ressources, notre organisation se questionne quant à la réelle mise en œuvre de ces appels à la justice. Est-ce que le processus d’analyse du projet est complet et multifactoriel? Quels sont les critères de mise en œuvre ou de non-mise en œuvre du projet? Est-ce que des personnes autochtones, des experts ou expertes autochtones et des organisations autochtones représentatives siègent aux différents comités ou y sont représentés? Qu’en est-il du suivi continu prévu à l’appel à la justice 13.2?
En fait, l’ensemble de ces questions nous ramène à une seule question: est-ce que la mise en œuvre des projets d’exploitation tient réellement compte de la sécurité, de la protection et du bien-être des femmes et des filles autochtones?
Ces appels à la justice concernent également le droit au consentement libre, préalable et éclairé que garantissent les articles 18, 19 et 38 de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et le droit constitutionnel canadien. Il va de soi que le principe d’honneur de la Couronne n’est pas respecté de façon appréciable.
Notre organisation est aussi préoccupée de la suite donnée à l’appel à la justice 13.5 de l’ENFFADA, selon lequel les gouvernements sont censés financer davantage les projets de recherche pour mieux connaître le problème. Entre autres, l’association des femmes inuites du Canada a rendu publique, en mars 2021, une étude très pertinente en ce sens. Elle dénonce le fait que les femmes inuites qui travaillent dans l'industrie de l’extraction des ressources vivent des événements comme des attouchements non désirés et des abus émotionnels et font l'objet de commentaires sexuels, de harcèlement sexuel et de violence.
Il reste qu'une question se pose: quelles sont les autres études récentes qui dénoncent le problème? Y a-t-il des études d'actualité sur la violence qui se passe hors des chantiers d'exploitation? La réponse que notre organisation aurait à donner est que trop peu d'études sont réalisées pour que les femmes soient entendues.
Depuis les dernières années, les femmes autochtones sont un peu plus présentes dans les chantiers, mais il a précédemment été reconnu...
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Je vous remercie de poser cette question. Je crois qu'elle est importante.
Tout au long de son histoire, le Canada n'a pas respecté les droits fondamentaux des femmes et des filles autochtones. Il suffit de penser au traitement des femmes et des filles autochtones, à l'enlèvement d'enfants dans le but de les placer dans des pensionnats, aux stérilisations forcées, aux primes offertes pour les scalps et, bien entendu, à l'institutionnalisation des femmes. De plus, dans toute la Loi sur les Indiens, les femmes autochtones étaient traitées comme si elles n'étaient pas suffisamment indiennes pour appartenir à leur communauté, ce qui a eu pour effet de les en exclure et de les mettre en danger. Elle est longue la liste de lois et de politiques de ce genre.
Il faut aussi tenir compte de ce qui se passe aujourd'hui, notamment les cas répétés de placement forcé en famille d'accueil, les enlèvements de femmes, les agressions sexuelles commises par les intervenants de l'État comme la GRC, la police, les médecins et le personnel infirmier...
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Merci, madame la présidente.
J'aimerais commencer par remercier nos témoins d'être des nôtres aujourd'hui. Je vous remercie de vos excellents témoignages et de votre présence parmi nous pour répondre à nos questions.
Mes premières questions s'adressent à Mme Palmater.
Merci beaucoup pour votre témoignage très passionné. Je peux voir à quel point cette question vous tient à cœur. Bon nombre des statistiques et des faits que vous avez mentionnés m'ont choquée. C'est bien que nous en prenions connaissance, du moins ici. J'aimerais savoir plus précisément comment nous pouvons améliorer les choses, d'après vous.
Pour ce qui est de la situation au Canada, vous avez mentionné la GRC. J'ai siégé au comité de la sécurité publique. Je sais que la GRC doit faire mieux. Même les membres de la GRC ne sont pas à l'abri du système lui‑même. Je ne peux donc qu'imaginer à quel point des communautés comme les communautés autochtones, qui sont souvent victimisées, peuvent être en danger lorsqu'elles sont aux mains de la GRC.
À votre avis, qu'est‑ce qui explique la réputation du Canada à l'échelle internationale relativement aux violations des droits de la personne dans le contexte de l'exploitation des ressources?
Je suppose que je peux aussi poser ma deuxième question.
Vous avez dit que le Canada avait la possibilité de mettre en œuvre des politiques qui nous aideraient à régler ce problème. Connaissez-vous des pays qui ont adopté des politiques plus strictes? Si les États-Unis réussissent mieux que nous, qu'ont-ils mis en place au juste pour protéger les communautés autochtones partout dans le monde? Si vous connaissez des pays qui affichent un meilleur bilan, quelles leçons pouvons-nous tirer de leur expérience?
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Je vous remercie pour vos questions.
Selon ce que je comprends, la première a trait à la réputation du Canada à l'échelle internationale, et à ce qui explique cette réputation.
Il y a un ensemble important de facteurs. Les nombreuses entités qui participent à l'industrie de l'extraction dans le monde sont reconnues à titre de sociétés transnationales. Elles sont donc instituées ici, au Canada, mais font aussi des affaires à l'étranger. Lorsqu'il y a violation massive des droits de la personne, surtout dans le cas du viol collectif ou du meurtre des Autochtones dans d'autres pays, et qu'on tente de faire reconnaître la responsabilité au Canada, le gouvernement se dit incapable d'intervenir. Il fait valoir qu'il ne peut interférer avec la souveraineté du pays dans lequel le crime a été commis. Il ne prend aucune responsabilité, même s'il s'agit de sociétés canadiennes. Ces sociétés, quant à elles, font valoir qu'elles sont établies au Canada et qu'elles sont donc intouchables.
Ainsi, partout dans le monde, les femmes autochtones n'ont pas beaucoup de recours. Les organisations de défense des droits de la personne tentent de les défendre. Elles obtiennent parfois des règlements, mais ils sont presque toujours confidentiels. Ils ne sont jamais publiés, alors on ne sait pas à quel point la situation est grave. Nous pouvons uniquement nous fier à ce que nous voyons sur le terrain.
Ce qui est effrayant, c'est que le Canada ne fait rien et n'assume pas la responsabilité pour ce que les particuliers et les entreprises du pays font ailleurs dans le monde. Dans d'autres contextes, on pense que le Canada est un pays exceptionnel, mais lorsque je rencontre les femmes autochtones d'ailleurs dans le monde, elles me disent que les sociétés canadiennes sont les pires; qu'elles sont celles qui commettent les pires atrocités. Il n'y a pas de quoi être fiers. C'est le reflet de l'incapacité du gouvernement d'aider les femmes autochtones ici, au Canada.
Pour ce qui est des solutions, elles sont nombreuses.
La rapporteuse spéciale des Nations unies sur la violence contre les femmes a visité le Canada et a parlé aux représentants canadiens de même qu'aux femmes autochtones. Elle a été choquée d'entendre parler des agressions sexuelles violentes infligées par les agents de la GRC aux femmes et aux petites filles autochtones. Elle a demandé au Canada de tenir une enquête à ce sujet.
Nous avons demandé une enquête nationale... Nous avons demandé au Canada d'enquêter de façon précise sur la GRC et sur d'autres intervenants de l'industrie extractive en ce qui a trait à la violence sexuelle contre les femmes et les filles autochtones, mais ces deux éléments ont été omis du cadre de référence. Il faut cesser de préconiser l'économie au détriment des droits de la personne.
Je crois que nous pouvons prendre plusieurs mesures à cette fin.
Il faut absolument que tous les projets respectent la norme minimale en matière de droits de la personne que représente la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Il s'agit de la norme de base. Elle signifie que tout projet qui comporte un risque de violence sexuelle contre les femmes et les filles autochtones ne pourra être réalisé sans qu'il y ait des garanties de protection contre toutes les formes d'abus: exploitation sexuelle, meurtre, disparition, utilisation des terres et des ressources, défaut de respecter les droits.
Le Canada a des leviers financiers. Même lorsqu'il n'est pas le seul pays à autoriser les projets, il peut exiger par exemple qu'un projet interprovincial prévoie toutes ces garanties afin de protéger les femmes et les filles autochtones. Il peut le faire, mais il choisit de ne pas imposer de telles conditions.
La situation dans les provinces ressemble au Far West. C'est le chaos. Le Canada doit faire preuve de leadership et agir.
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Madame la présidente, c'est Sylvie Bérubé qui vous parle. Je remplace Mme Larouche, qui est occupée présentement.
Je tiens à remercier tous les témoins présents de leur comparution dans le cadre de cette étude, qui est selon moi très pertinente. Il est grand temps que nous parlions de tout ce qui se passe en ce qui concerne les femmes autochtones. Je viens de la circonscription Abitibi—Baie‑James—Nunavik—Eeyou et je suis très consciente de ce qui se passe.
Ma première question s'adressera à Mme Étienne.
On sait que le fait qu'il existe encore aujourd'hui des violences inacceptables dans le contexte de l'exploitation des ressources n'est certainement pas en phase avec les objectifs mêmes de la réconciliation que le gouvernement fédéral prône et qu'il doit atteindre. Nous avons devant nous, et ce, depuis 2019, un important rapport qui a mis en lumière cette problématique. Effectivement, l'objet de cette étude est directement lié aux appels à la justice 13.4 et 13.5 du rapport de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, l'ENFFADA. Ce rapport contient d'importantes recommandations auxquelles le gouvernement fédéral doit répondre.
Pourquoi, selon vous, cette problématique de violence en contexte d'exploitation des ressources persiste-t-elle alors que ces violences ont été nommées et dénoncées en 2015 dans le cadre de l'Enquête nationale?
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Au départ, il y avait effectivement les recommandations de l'ENFFADA. Il y a différents articles. Il y a certainement encore beaucoup de travail à faire afin de réduire les tendances actuelles dans tous les domaines où les femmes subissent de la violence, que ce soit dans le domaine du développement économique ou ailleurs. J'en passe, car je pense que nous connaissons tout cela. D'autant plus que, comme je le disais dans mon allocution, les femmes et les filles autochtones ont à combattre ce phénomène, à la fois en milieu urbain et dans nos propres communautés.
En réponse à votre question, je pense que la réconciliation est une finalité et qu'il y a un début à tout. On voit des choses qui ressortent au Canada, notamment les sépultures et tout le reste. Tous ces faits touchent inévitablement les femmes. Je crois effectivement qu'il faudra assurer une surveillance accrue de la mise en œuvre de ce plan. Quand je parle d'un plan, je parle de l'ENFFADA, qui comprend une série de mesures et de recommandations. Il faudra trouver un moyen de s'assurer qu'un plan est mis en œuvre à court, à moyen et à long terme pour que cela se réalise.
En ce qui a trait aux femmes liées aux chantiers d'exploitation et à tout le reste, on sait que, de façon générale, ce sont des hommes qui encadrent tous ces aspects du développement économique. Il faut être en mode solution afin de s'assurer que les femmes sont présentes partout, même dans ces domaines. Je dirais même, en ce qui concerne cet aspect, qu'il faudrait aussi faire participer les femmes à la lutte contre les changements climatiques. Il est aussi important d'assurer la présence de femmes autochtones dans ces domaines.
Je ne sais pas si je réponds à votre question de façon globale. Je pense effectivement que nous devons en faire plus pour faire connaître la situation des femmes. Il faut également reconnaître les droits ancestraux sur les territoires où il y a de l'exploitation. Il y a aussi l'aspect de réparation eu égard à tout ce qui s'est passé lors des événements qui ont marqué l'histoire des femmes et au processus de réconciliation qui s'ensuit.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je remercie tous les témoins d'être avec nous aujourd'hui pour cette importante étude.
Mes premières questions s'adressent à Mme Palmater.
Lors de la dernière législature, nous avons adopté le projet de loi et aujourd'hui, le gouvernement est tenu de veiller à ce que toutes les lois s'harmonisent à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Comme vous l'avez dit, ce sont là des droits de base, dont tous les humains ont besoin, qu'ils soient autochtones ou non. Ce ne sont pas des droits spéciaux. Ce sont tout simplement des droits qui n'ont pas été accordés aux peuples autochtones de façon particulière.
De quelle façon le défaut du gouvernement de faire observer cette nouvelle loi en assurant sa mise en œuvre — notamment en ignorant la violence contre les femmes, les filles et les personnes bispirituelles dans le domaine de l'extraction des ressources — exacerbe‑t‑il cette crise et la normalisation de la violence?
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Je vous remercie pour votre question, qui est d'une grande importance.
Vous avez soulevé tous les points importants. Nous sommes maintenant dans un domaine juridique et stratégique complètement différent.
La déclaration représente la norme minimale à respecter, et elle énonce qu'aucune violence contre les femmes et les filles autochtones ne peut être tolérée. Elle énonce aussi que le Canada doit veiller à ce que ces personnes aient le droit de décider de ce qui se passe avec leur corps et avec leurs terres. Elles ont le droit à l'autodétermination et ont le droit de décider si elles veulent ou non protéger leurs territoires, leurs zones maritimes côtières, leurs plans d'eau et leurs ressources, et en profiter. C'est le strict minimum.
La déclaration reconnaît aussi que les Autochtones ont le droit d'adopter leurs propres lois et de gouverner leurs propres territoires. Les femmes autochtones sont au premier plan et prennent les décisions.
Il faut que les choses changent. Il n'est pas seulement question des lois fédérales canadiennes, mais aussi des lois provinciales, parce que toutes les obligations en matière de droits de la personne appartiennent à l'État, sans égard à notre structure constitutionnelle. On ne peut se défendre et dire...
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Merci beaucoup de cette question.
Le Centre to End All Sexual Exploitation fait un certain nombre de choses, seul ou avec d'autres. Nous offrons ce que l'on appelle le « programme pour les délinquants sexuels », qui s'adresse aux hommes qui ont été arrêtés pour avoir tenté d'acheter des services sexuels, aussi bien dans la rue qu'en ligne. Nous profitons de cette occasion pour éduquer les hommes sur tous les aspects de nos lois, mais surtout sur les répercussions que leurs agissements peuvent avoir sur les femmes et les filles. Des femmes autochtones participent au programme éducatif, car nous savons que nous devons susciter l'empathie. Lorsque vous vous souciez d'un autre être humain et que vous entendez son histoire, cela vous porte à réfléchir et à changer votre comportement. C'est une des choses que nous faisons.
Avant de venir ici, j'ai contacté le centre d'amitié autochtone de Bonnyville, car il est situé dans un milieu où il y a beaucoup d'industries primaires et une grande circulation de gens. Le centre a récemment lancé une initiative communautaire sur la traite des personnes, et il fait un travail de sensibilisation. Selon les responsables, la chose sur laquelle ils doivent le plus insister en ce moment est la sensibilisation. Ils savent qu'ils dérangent les gens de la communauté parce qu'ils s'expriment et qu'ils font preuve d'audace. À Edmonton, nous avons nous aussi mené ce genre de campagnes de travail très audacieuses et nous avons fait d'autres choses.
Or, le plus important, c'est de comprendre que la sensibilisation n'est qu'un aspect de la question. À vrai dire, il s'agit d'amener les garçons et les hommes à s'interroger sur eux-mêmes et sur leur attitude envers les filles, les femmes et les personnes bispirituelles, et de soutenir ce changement d'attitude dès le plus jeune âge en contrant les stéréotypes négatifs avec lesquels les garçons et les hommes sont élevés. Nous avons quelques grands leaders masculins à Edmonton, qui font avancer cette conversation sur la façon d'être un homme sain et non un homme toxique.
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Merci. Je ferai de mon mieux, et je vous conseille de poser la question aux femmes autochtones de ce groupe d'experts.
Il y a un certain nombre d'initiatives formidables. En Alberta, il y a l'Institute for the Advancement of Aboriginal Women en Alberta, qui fait tout le temps participer les femmes et qui travaille aussi avec les jeunes femmes. Je salue le travail que fait cet organisme dans la communauté. Il y a aussi des programmes appelés Girl Power, qui s'adressent spécifiquement aux filles des communautés des Premières Nations et des communautés métisses, ainsi que différents types d'initiatives à fonction éducative.
Je sais que grâce à Femmes et Égalité des genres Canada, par exemple, le Bonnyville Native Friendship Centre a reçu des fonds qui lui permettent de faire du travail dans la communauté. Je pense que nous voyons des changements.
Je sais aussi que le travail de la Fondation canadienne des femmes a été vraiment crucial à Fort McMurray et dans d'autres endroits. Je pense qu'il y a de bonnes nouvelles, mais pour ce qui est de contrer l'exploitation, le gros du travail reste à faire. Je pense qu'il faudrait poser la question à Mme Palmater, parce que ce sont des choses qui doivent être intégrées aux politiques et à l'application de la loi.
Nous pouvons faire tout le travail d'éducation préventive dans nos collectivités et à notre manière. En même temps, si nous n'examinons pas les injustices structurelles qui existent... Par exemple, j'encourage tout le monde à consulter la récente déclaration d'Enbridge sur la traite des personnes. Ils ont engagé une femme autochtone pour former leurs travailleurs et leurs entrepreneurs en Amérique du Nord. C'est ce type de grand changement que nous devons voir pour soutenir les filles et les femmes autochtones.
Je vous remercie.
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Tout d'abord, je remercie toutes les témoins pour leur temps, leurs connaissances et leurs opinions.
J'aimerais assurément commencer en évoquant, en reconnaissant et en soulignant sans retenue le caractère inacceptable de toutes les violences que subissent tant de ces personnes. C'est inadmissible.
Cela étant dit, je voudrais revenir sur une chose que Mme Palmater a dite. Tout à l'heure, vous avez fait référence à un élément particulier de votre rapport. À partir des statistiques du rapport, il est tout à fait correct de dire que les sociétés minières canadiennes sont trois fois plus susceptibles de commettre des violations que celles d'autres pays. Cependant, il est important pour moi de clarifier deux éléments dudit rapport. Permettez-moi de les lire pour les besoins du compte rendu.
Le rapport s'intitule Corporate Social Responsibility: Movements and Footprints of Canadian Mining and Exploration Firms in the Developing World, que l'on traduirait par « responsabilité sociale des entreprises: mouvements et empreintes des entreprises canadiennes d'exploration et d'exploitation minière dans le monde en développement », et il a été produit par le Canadian Centre for the Study of Resource Conflict. Dans la section « Résultats et analyse », on peut lire ce qui suit:
Il est important de noter que ce rapport ne fait état que des informations sur les incidents qui ont attiré une attention publique significative. Les pays où les médias ou les groupes de la société civile sont contrôlés de manière négative par l'État ou l'industrie auront nécessairement une transparence et des obligations redditionnelles moindres. Ces pays sembleront par conséquent avoir commis un nombre limité des violations.
Deuxièmement, le rapport indique que si l'on considère que le Canada abrite plus de 75 % des sièges sociaux des sociétés minières et d'exploration du monde, il s'ensuit qu'il devrait y avoir une concentration proportionnelle de violations de la responsabilité sociale des entreprises.
Je tenais simplement à ce que cela soit souligné pour la gouverne du Comité.
Pour continuer, j'aimerais poser une question. J'avais l'intention de la poser à Mme Étienne, mais je vais vous demander à vous, madame Sirois-Gauthier ou madame Quinn, si vous préférez répondre.
Ma question s'intéresse davantage à l'enjeu du progrès. Tout à l'heure, il a beaucoup été question de rapports et d'études, mais que faisons-nous pour la suite des choses? Il y a eu la voie fédérale qui a été présentée avec l'intention de soutenir les changements systémiques et de s'attaquer à toutes les tragédies. La question précise que j'aimerais vous poser est la suivante: sur la base de votre expérience, l'une de vous peut-elle parler de l'efficacité ou de l'inefficacité potentielle du programme de la voie fédérale?
Madame Quinn, je vous écoute.
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Je vous remercie de poser cette question. Il est très intéressant qu'on parle du plan qui a été présenté en juin 2021.
Je rappelle que l'ENFFADA a été menée en 2019. Deux ans plus tard, nous avons présenté un plan, mais il n'a pas vraiment été mis en œuvre. Nous espérons qu'il y aura de grands changements bientôt.
Même si, à Femmes autochtones du Québec, nous avons de grands espoirs et que nous sommes optimistes quant à la réalisation des changements souhaités, nous avons de grands doutes. En effet, à ce jour, rien ne nous prouve qu'il y a eu des changements concrets sur le terrain.
Il est vrai que beaucoup de fonds ont été investis pour contrer la violence sous toutes ses formes, mais la violence prend tellement de formes et affecte les femmes autochtones de tellement de manières différentes que les répercussions de ces investissements sont peu tangibles.
C'est ce que j'avais à dire sur les changements systémiques. Nous espérons qu'il y aura de grands changements, mais il y a peu de résultats pour le moment.
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Veuillez m'excuser, mais je ne connais pas le rapport sur la voie fédérale. Je peux toutefois vous parler d'une ou deux choses.
Je suis très fière de la Ville d'Edmonton. Elle a conçu un cadre à l'intention des Autochtones et y travaille sans relâche. Le 6 avril, la Ville a renouvelé son engagement à écouter tout particulièrement la voix des femmes autochtones à propos de ce qu'elle doit faire de plus comme entité municipale — je ne travaille pas à la Ville, en passant — pour réduire le nombre de femmes assassinées et disparues ainsi qu'améliorer et mettre en valeur les contributions à notre collectivité.
Le gouvernement albertain s'est également fermement engagé ces dernières années à mettre sur pied une unité de liaison pour l'information à l'intention des familles des femmes autochtones disparues et assassinées partout dans la province, en plus d'avoir maintes fois renouvelé cet engagement par la création de comités consultatifs autochtones à chaque étape.
J'ai également le privilège d'appuyer le travail du comité consultatif et de surveillance autochtone pour le sous-comité des questions socioéconomiques de l'agrandissement du réseau de pipeline de Trans Mountain. Aux réunions, je constate l'engagement ferme des collectivités le long du tracé du pipeline, qui donnent corps aux activités et cernent les lacunes dans les ressources, par exemple le manque de refuges ou de formation. Tout autour de moi, je constate ces changements positifs.
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Merci beaucoup pour votre question. C'est un sujet abordé à l'international, qu'on pense à l'ONU ou à la Commission interaméricaine des femmes, mais aussi entre femmes sur le terrain. Je crois qu'agir concrètement contre la violence et l'exploitation continues est l'une des mesures les plus importantes qui peuvent être prises.
C'est l'une des choses qui se produisent au grand jour. Il y a de la traite de personnes aux relais routiers près des campements. Cela se passe en bordure des campements, quand ce n'est pas directement sur place. Tout le monde le sait. La police le sait. Les gestionnaires le savent. Aucune mesure n'est prise. Il semble y avoir un blocage qui nous empêche d'agir pour le bien des femmes et des filles autochtones.
L'autre chose, c'est de se pencher sur ce qui n'a pas fonctionné. Il y a eu un million de recommandations selon lesquelles il suffit d'offrir de la sensibilisation culturelle ou de la formation sur l'égalité des sexes, mais le problème n'a jamais été la culture autochtone. Ce sont les crimes sexuels violents et la traite violente des personnes qui posent problème. Tant à la GRC que dans les grandes sociétés et les secteurs public et privé, comment peut‑il y avoir une tolérance zéro par rapport à ces crimes violents quand aucun suivi, aucune enquête, n'a lieu? Il n'y a pas vraiment de poursuites. Tout est fait dans une relative impunité.
Je crois que nous devons vraiment ratisser très large et cibler toutes les activités, de l'initiative communautaire à un don à un pow‑wow. De toute façon, tout cela devrait se faire dans le cadre de partenariats, mais l'incapacité de remédier à la violence qui se produit au grand jour, c'est ce qui semble échapper à tout le monde. On préfère tourner autour du pot plutôt que de vraiment s'attaquer au problème.
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Certaines des préoccupations principales ont trait au manque d'autorité et au manque de reconnaissance de la législation des Premières Nations, qu'il s'agisse de lois adoptées au titre de la Loi sur les Indiens, comme les règlements municipaux, ou leurs propres lois traditionnelles. Ces forces de l'ordre n'ont pas l'autorité nécessaire pour s'occuper des prédateurs surtout non autochtones qui commettent de tels actes de violence.
En règle générale, les pouvoirs sont restreints aux limites de la réserve ou, dans le meilleur des cas, aux membres de la bande, mais d'un point de vue statistique, la grande majorité de ceux qui participent à la traite de personnes, à l'exploitation, à l'assassinat et à la disparition des femmes autochtones ne sont pas des Autochtones. Les tribus américaines connaissent des problèmes semblables. Elles ont un appareil judiciaire, des lois et des policiers, mais leur autorité ne dépasse pas les réserves. Nous savons que la majorité de la violence est causée hors réserve par ces campements.
Ce problème va persister. Je suis heureuse que l'on verse plus d'argent aux Premières Nations pour qu'elles aient leurs propres forces de l'ordre ou agents de sécurité, peu importe la forme qui leur convient, mais c'est le manque de reconnaissance de nos lois et de notre autorité qui nous empêche de s'occuper de la majorité des délinquants, y compris des agents de la GRC et des membres des forces armées. Comment pouvons-nous agir contre eux quand ils bénéficient d'un processus distinct?
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Lorsque Mme Étienne a parlé de la Déclaration des Nations unies, elle faisait référence aux appels à l'action 13.1 à 13.5 de l'ENFFADA, dont nous avons aussi discuté précédemment.
L'objectif de ces appels à l'action est que le bien-être et la sécurité des femmes autochtones soient pris en compte dans le développement des projets d'extraction, ce qui ne se fait pas, ou ne se fait pas assez, en ce moment. Les femmes autochtones ont droit à la consultation, comme le prévoient le droit constitutionnel canadien et la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.
Mme Étienne et moi sommes présentement à New York pour participer à l'Instance permanente sur les questions autochtones. Il y est notamment question du consentement préalable libre et éclairé. Or l'absence de consentement est flagrante. Voilà le lien qui a été fait avec la Déclaration.
Les constats qui ressortent, c'est que des projets d'exploitation sont mis en œuvre même en l'absence de consentement. Entendez-nous bien, Femmes autochtones du Québec ne s'oppose pas nécessairement aux projets qui sont bénéfiques pour les communautés et leurs habitants [difficultés techniques] émancipation économique. Toutefois, il arrive souvent que ces projets ne soient pas menés de manière à respecter les droits de la personne ou à garantir la sécurité et le bien-être des femmes autochtones.
Ainsi, les femmes continuent malheureusement de vivre de la violence sous toutes ses formes, en plus de voir leurs territoires et leurs ressources naturelles se faire exploiter sans leur consentement et sans qu'elles soient consultées. Tout cela a lieu devant leurs yeux, ce qui continue d'avoir de très lourdes conséquences intergénérationnelles et s'ajoute aux expériences des pensionnats et de la colonisation.
Toutes ces répercussions que nous vivons encore aujourd'hui avec le développement des minières, de la foresterie et des ressources en général sont comme une roue qui tourne.
Le cycle de la violence sous toutes ses formes ne se termine jamais. Les conséquences se font sentir sur de très nombreux plans et elles ne sont pas prises en compte et suffisamment évaluées.
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Je vous remercie grandement.
Quand vous dites que vous n'êtes pas nécessairement contre tout projet, j'entends aussi dans vos propos que vous trouvez important de se parler de nation à nation et d'établir un meilleur dialogue.
Ma prochaine question s'adresse à Mme Doré‑Nadeau.
Cette semaine, vous avez beaucoup parlé des minières. Je tiens à souligner que mon collègue de a tenté de déposer à la Chambre une motion concernant ces mêmes minières canadiennes afin d'obtenir un meilleur portrait de leur incidence à l'étranger. Malheureusement, cette motion a été rejetée.
J'aimerais revenir sur cette question, car vous en avez déjà parlé et ma collègue Mme Bérubé a elle aussi posé des questions sur le sujet.
Pouvez-vous me donner des exemples de ce que des entreprises qui exploitent des ressources pour en faire le commerce à l'international font ailleurs? Au Québec, y a-t-il eu des avancées sur la question?
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je sais que certaines membres du Comité ont parlé de la voie fédérale. J'ai d'ailleurs fait inscrire une question au Feuilleton pour savoir quelles sommes ont été versées sur les fonds prévus en 2021, car j'ai l'impression que le gouvernement n'agit pas avec toute l'urgence que cette situation exige.
L'une des membres du Comité a parlé de rendement du capital investi. Je suis d'avis que l'argent n'a pas encore été investi et que, en fait, pas le moindre sou du nouveau budget n'a été investi pour gérer la crise des femmes et filles autochtones disparues et assassinées. Je ne suis pas la seule à trouver cela préoccupant. L'Assemblée des Premières Nations, ou APN, l'Association des femmes autochtones du Canada, ou AFAC, et le Cercle national des familles et des survivantes ont aussi souligné que les investissements sont inadéquats et présenté des chiffres à l'appui, mais en vain. Il s'agit d'une véritable crise, et on semble constamment faire fi de la voix des femmes autochtones.
Madame Sirois-Gauthier, vous avez parlé de l'incapacité d'obtenir un consentement libre, préalable et éclairé des femmes autochtones en ce qui a trait à l'exploitation des ressources.
Selon vous, pourquoi craint‑on autant d'obtenir le consentement libre, préalable et éclairé des femmes et des filles autochtones, qui semblent les principales victimes des actes de violence? D'où vient cette peur?
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C'est beaucoup grâce à notre participation à la Marche mondiale des femmes, qui est un mouvement international, que nous avons pu tisser des liens avec diverses organisations de femmes autochtones de partout dans le monde. Dans le cadre de notre lutte, nous invoquons beaucoup le fait qu'il est nécessaire de se poser des questions en tant que société. Par exemple, quels types de développements ou de systèmes mettons-nous en avant?
Il est important de faire de la sensibilisation, mais des mesures, notamment des lois, doivent être mises en place pour transformer notre société. Tantôt, Mme Sirois‑Gauthier parlait des femmes qui allaient travailler dans les mines. L'une de nos demandes, c'était que les femmes puissent travailler dans les mines si jamais un projet minier était accepté dans la communauté. Or nous nous sommes rendu compte qu'il y avait effectivement des actes de violence. C'est pourquoi nous demandons que des politiques soient mises en place pour lutter contre la violence faite aux femmes. Nous avons des politiques en matière de harcèlement psychologique et sexuel. Il faut non seulement mettre ces politiques en application, mais aussi faire en sorte que les femmes aient vraiment un recours quand elles déposent une plainte. Nous demandons aussi qu'elles soient informées des recours qui sont à leur disposition et des diverses instances susceptibles de les aider. Au Québec, je sais qu'il y a, par exemple, la Commision des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail.
Nous avons beaucoup parlé de la question de l'acceptabilité des projets qui sont mis sur pied. Nous nous interrogeons également sur le fait que nous n'avons pas signé la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones sur leur propre territoire. En ce qui a trait à ce manque de reconnaissance envers les peuples autochtones, aux actes de violence qui se perpétuent et aux systèmes qui sont en place, nous pensons qu'il serait vraiment bien qu'il y ait une meilleure collaboration et une meilleure communication.
Nous avons eu droit à une autre heure et demie fort émouvante. Je trouve toujours ces séances déchirantes. On y entend de ces histoires! Je vais être franche: ce n'est pas quelque chose qui a fait partie de mon éducation. Je n'en parlais pas beaucoup à l'école. Devenue jeune adulte, on n'en parlait pas beaucoup à la maison.
Comment peut‑on engager la conversation avec plus de gens qui n'entendent pas parler de cela tous les jours et favoriser leur sensibilisation? J'ai le privilège et la capacité de siéger à ce comité aujourd'hui, mais je ne crois pas qu'il y ait assez de gens qui en parlent. Nous avons commencé à en parler, nous en parlons, et je salue chacune d'entre vous pour tous vos efforts, car il est sain de communiquer et votre présence aujourd'hui est un grand pas. Je sais que vous êtes très nombreuses à être fort actives sur le terrain.
Il est très rare que les solutions universelles fonctionnent. Chaque situation comporte son lot de subtilités.
Ma première question s'adresse à Mme Palmater.
Sur quoi se fonde‑t‑on pour établir qu'il y a des groupes distincts de femmes et de filles autochtones et de quelle façon leurs besoins diffèrent-ils d'un groupe à l'autre? Je ne m'attends pas à ce qu'une approche universelle s'applique ici.
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Merci, madame la présidente.
Je vais continuer dans la même veine que tout à l'heure. Ma première question devait s'adresser à Mme Étienne, mais elle sera plutôt pour Mme Sirois-Gauthier.
[Français]
Selon Mme Étienne, il faut consulter les femmes autochtones avant, pendant et après la mise en œuvre de projets dans leur région.
Ma prochaine question s'adresse à toutes les témoins, car elles ont toutes un peu abordé le sujet.
Quelle pourrait être l'approche que le gouvernement et ces grandes entreprises qui viennent exploiter les ressources de ces territoires devraient adopter pour consulter les femmes autochtones? Pouvez-vous nous donner plus de détails sur la façon dont ils devraient s'y prendre?
J'aimerais que Mme Sirois‑Gauthier réponde en premier, mais si une autre personne veut faire d'autres commentaires par la suite, qu'elle n'hésite pas à le faire.
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Je vous remercie de la question.
On parle en effet de consultations avant, pendant et après la mise en œuvre d'un projet. Avant leur mise en œuvre, lorsqu'un plan de projet est en développement, il faut consulter les communautés environnantes et les femmes autochtones au sujet du droit au consentement libre, préalable et éclairé. Il faut aussi s'assurer que tout est conforme à leurs valeurs ainsi qu'à un développement de projet adapté sur le plan culturel.
Pendant la mise en œuvre d'un projet, les choses ne se passent pas nécessairement comme il avait été prévu. Dans tout projet de développement, comme dans toute chose, des modifications ou des événements surviennent à un moment ou à un autre. Il faut donc faire un suivi de la situation. On doit se demander ce qui s'est passé depuis la mise en œuvre du projet, ce qui se passe aujourd'hui, comment évoluent les choses et si les engagements initiaux sont respectés.
Après la mise en œuvre d'un projet, celui-ci est en quelque sorte réévalué. Il s'agit de déterminer si les engagements initiaux sont toujours respectés. Lorsque l'on décide de mettre un projet en œuvre, tout peut paraître beau et rose et sembler se passer comme il a été prévu, mais en réalité, une fois qu'il est mis en œuvre, tous les droits de la personne sont violés, les femmes subissent de la violence et l'environnement, de même que les ressources naturelles, ne sont pas respectés, contrairement à ce que prévoyait l'entente initiale.
Il est donc vraiment important de faire en sorte que les populations autochtones, les experts, les organisations représentatives et les communautés elles-mêmes soient présents du début à la fin du projet, de façon continue. Le principe de l'honneur de la Couronne et celui de l'obtention du consentement sont violés lorsque l'on consulte la communauté sans le faire vraiment. On dit l'avoir fait, de façon à pouvoir cocher cette case, mais cela n'a qu'une valeur symbolique.
Voilà ce que nous déplorons. Cela se passe aujourd'hui dans le cas de tous les projets de développement, partout dans le monde. Cette situation touche directement les populations autochtones. Il est très malheureux que le droit constitutionnel le reconnaisse sans qu'il y ait pour autant de mise en œuvre réelle.
Une autre témoin voudrait-elle ajouter quelque chose?
[Traduction]
Madame Quinn, vous nous avez expliqué que, dans bon nombre de ces communautés, il se produit un déplacement de population en raison des projets et qu'il n'y a pas assez d'autobus. Les gens prennent l'autobus pour aller en ville, et c'est là que beaucoup de crimes sont commis, que beaucoup de victimisation a lieu. Beaucoup de choses là‑dedans ont été brièvement abordées, comme le fait que l'autostop n'est évidemment pas sécuritaire et qu'il n'y a pas assez d'autobus.
Que pouvez-vous suggérer au Comité? Vous avez bien décrit la situation, mais quelles suggestions pouvez-vous faire pour limiter les dangers associés à ce type d'activités? Il va sans dire que le déplacement de population ne devrait pas se produire, mais quand il a lieu, de quelles façons peut‑il devenir plus sûr pour ces communautés et ces femmes?
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Je vous remercie de votre question. J'ai deux ou trois suggestions à faire.
Premièrement, le gouvernement pourrait investir dans le développement de lignes de transport locales. Greyhound a complètement abandonné l'Ouest canadien, et il n'y a plus aucun service de transport, alors je crois qu'il faudrait investir dans des entreprises locales, des initiatives locales ou peut-être des entreprises autochtones, afin qu'elles exploitent des autobus et créent cette sécurité intégrée.
Un autre exemple consisterait à inciter les centres d'amitié autochtones des grandes villes à créer ce que nous appelons le service « nouveau en ville », en allant chercher les personnes qui sont à risque lorsqu'elles migrent vers les villes. L'une des organisations d'Edmonton, la Bent Arrow Traditional Healing Society, offre ce service. Elle recherche activement les personnes qui semblent être arrivées récemment, afin d'éviter qu'elles ne soient la proie de gangs, de trafiquants de drogue ou de prédateurs sexuels. Ensuite, elle les met en relation avec des ressources communautaires ou des ressources saines.
Je pense que la plus grande difficulté consiste à trouver des logements sûrs pour les filles et les femmes autochtones qui arrivent dans des villes ou dans un grand centre urbain comme Edmonton. Nous devons vraiment être attentifs à cela. Edmonton n'a pas de refuge pour les femmes autochtones, mais Calgary en a un.
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Merci, madame Palmater.
Merci, madame Gazan. Cela met fin à notre réunion.
Je remercie infiniment tous nos témoins d'avoir accepté de faire partie du groupe d'experts d'aujourd'hui. Au nom de nous tous, je vous remercie du travail que vous accomplissez au sein de la communauté et de vos témoignages importants.
Chers députés, pendant notre prochaine réunion qui aura lieu mardi, il est prévu que nous entendions Ellen Gabriel, une défenseure des terres autochtones du Québec, et Hilda Anderson-Pyrz, la présidente du Cercle national des familles et des survivants.
La communauté souhaite-t-elle mettre fin à la séance?
Merci. La séance d'aujourd'hui est levée.