NDVA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON NATIONAL DEFENCE AND VETERANS AFFAIRS
COMITÉ PERMANENT DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES ANCIENS COMBATTANTS
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le lundi 30 mars 1998
[Traduction]
Le président (M. Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, Lib.)): Mesdames et messieurs, bienvenue à notre séance du soir. J'ai quatre noms sur ma liste de témoins, et nous ferons comme cet après-midi, c'est-à-dire que je les appellerai l'un après l'autre. Je vais demander à chacune de ces quatre personnes de faire un exposé, qui sera suivi—et je dis cela pour tous—d'une brève période de questions et réponses.
Il y a une chose que je n'ai pas faite cet après-midi, et j'en suis désolé. Je n'ai pas demandé aux députés présents de se nommer et d'identifier leur circonscription. Je vous demanderais de bien vouloir le faire afin que tous sachent qui vous êtes. Commençons par le député assis à mon extrême droite—et cela n'a rien à voir avec la politique, David.
Des voix: Oh, oh.
M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Merci, monsieur le président. Je m'appelle David Price et je représente la circonscription de Compton—Stanstead. C'est dans la partie sud du Québec.
M. Ghislain Lebel, (Chambly, BQ): Je m'appelle Ghislain Lebel. Je représente la circonscription de Chambly sur la rive sud de Montréal.
M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Je m'appelle Leon Benoit et je représente la circonscription de Lakeland. Cold Lake se trouve dans cette circonscription. Je suis député réformiste.
Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.): Je m'appelle Judi Longfield. Je suis députée libérale pour la circonscription de Whitby—Ajax, située juste à l'est de la grande région de Toronto.
M. Bob Wood (Nipissing, Lib.): Je m'appelle Bob Wood. Je suis député de Nipissing, et ma circonscription comprend North Bay, où se trouve une base des Forces canadiennes. Et M. Price, là-bas, est le député de ma mère, dans le sud du Québec, de sorte que je dois faire très attention à lui.
Des voix: Oh, oh.
[Français]
Le président: Je m'appelle Robert Bertrand. Je représente la belle circonscription de Pontiac—Gatineau—Labelle, dans l'Outaouais.
[Traduction]
Nous allons commencer immédiatement. J'invite maintenant le lieutenant Martine Lauzé à faire son exposé.
[Français]
Lieutenant Martine Lauzé (témoigne à titre personnel): Bonsoir. Le sujet que j'aimerais aborder est celui des désavantages que subissent les célibataires qui font partie des Forces canadiennes. Je ferai état de trois points principaux.
Le premier concerne le statut que nous confère le fait d'aller suivre des cours. Nous sommes alors considérés soit en service temporaire, soit en mutation détachée, que je vais désigner par le terme attached posting puisque tout le monde le connaît.
La plupart des gens qui vont suivre des cours vont être considérés en service temporaire, ce qui signifie que les quartiers et les rations sont payés par la base ou l'unité en charge du cours, ou encore par l'unité à laquelle ils sont rattachés.
• 1910
Quand, par ailleurs, on va suivre un cours en étant en
attached posting, ce qui arrive souvent aux
célibataires, on doit payer nos rations nous-mêmes.
Cela entraîne des frais supplémentaires pour nous,
parce que, habituellement, ce qu'il faut défrayer sur
la base nous revient plus cher que ce qu'on achète
à la maison.
Cela m'est arrivé quand je suis allée suivre un cours d'administration de base. J'étais diplômée du Collège militaire de Kingston. Je suis arrivée ici, à la base de Trenton, où j'occupais un poste—je n'étais pas en entraînement—, puis on m'a envoyée suivre un cours en septembre. J'étais arrivée ici en mai et, en septembre, je suis partie pour Borden suivre un cours d'administration.
J'y ai été envoyée en attached posting, ce qui impliquait que je devais continuer à payer mon loyer, l'électricité, le gaz, le téléphone, etc. et payer en plus mes quartiers à Borden et ma nourriture. Habituellement, je paie environ 150 $ par mois pour ma nourriture. Là-bas, ces frais se sont élevés à 350 $ par mois.
La situation des personnes mariées était différente. Elles étaient considérées en service temporaire; donc, elles n'avaient pas à payer leurs rations ou bien elles touchaient des primes de séparation, ou autre chose du même genre, qui couvraient leurs frais.
Deuxièmement, je vais parler des mutations. Quand on est muté, on reçoit un demi-mois de salaire, ou bien un mois de salaire quand on a des personnes à charge. Les célibataires ne touchent que le demi-mois. Pourtant, je ne vois pas la différence entre un célibataire et une personne qui a des personnes à charge lors d'un déménagement qui comporte des frais de rebranchement du téléphone, l'achat de nouveaux rideaux et tous les autres frais. Les frais sont les mêmes, qu'on soit marié ou célibataire. Cette moitié de paie est censée nous aider à défrayer ces coûts. C'est là mon deuxième point: la différence entre le mois de salaire versé au personnel avec personnes à charge et le demi-mois versé au personnel célibataire.
Le troisième point se rapporte au choix des mutations. La plupart du temps—selon mon expérience personnelle, en tout cas—, quand on rencontre le gérant de carrière, on a souvent le dernier choix pour ce qui est des mutations. Parce qu'on n'a pas de personnes à charge, ils jugent qu'ils peuvent nous envoyer n'importe où. Je veux dire ici que nous avons quand même des préférences comme tout le monde. Ceux qui ont des personnes à charge, qui sont mariés et ont des enfants, ont des préférences, et je le conçois. Mais moi qui ne suis pas mariée, j'en ai aussi, qui comptent autant que ceux des autres. Cela est mon troisième point.
Le président: Merci beaucoup. Est-ce qu'on a des questions pour Mme Lauzé? Monsieur Lebel.
M. Ghislain Lebel: Oui, j'en aurais peut-être une sur le troisième point, sur le choix des mutations. Quand vous dites que votre gérant de carrière ne tient pas compte de vos choix, est-ce qu'en fait il vous impose...
Lt Martine Lauzé: Je ne peux pas dire qu'il ne tient aucun compte des préférences. Je ne veux pas généraliser non plus. Cependant, cela m'est déjà arrivé d'expliquer à mon gérant de carrière que j'ai un chum à Valcartier ou que j'aime beaucoup Montréal et de me faire répondre qu'on allait m'envoyer là où c'était possible. Il me répond que les personnes mariées ont la priorité parce que le mari ou la femme est déplacé dans un endroit donné.
Au point de vue de ma carrière, j'aimerais pouvoir au moins donner mes préférences et avoir autant d'occasions que les autres de les combler.
M. Ghislain Lebel: Je n'ai pas d'autres questions.
Le président: Merci beaucoup.
[Traduction]
J'invite maintenant le caporal-chef Lucy Critch-Smith à s'approcher.
Caporal-chef Lucy Critch-Smith (témoignage à titre personnel): Bonsoir, mesdames et messieurs. Mon problème concerne le ministère des Anciens combattants. Lorsque j'ai parlé cet après-midi, j'ai oublié ce que j'estime être un élément important.
Lorsqu'un militaire est libéré pour des raisons de santé, il lui faut passer une série d'examens médicaux au ministère de la Défense nationale. Si cette personne est admissible à une pension d'invalidité à long terme en vertu du régime d'assurance-revenu militaire (RARM), elle doit se soumettre à des examens médicaux effectués par des médecins du RARM. Lorsque cette personne s'adresse ensuite au ministère de Anciens combattants, les médecins de ce ministère lui font passer des examens, et ensuite, si cette personne est admissible à des prestations du Régime de pensions du Canada, elle doit subir encore d'autres examens effectués par les médecins du Régime de pensions du Canada. Ainsi, une personne qui a obtenu sa libération des forces armées peut voir jusqu'à 20 médecins différents au cours d'une certaine période.
• 1915
Ce que je ne comprends pas, c'est que nous avons affaire à
trois ministères fédéraux: le ministère de la Défense nationale, le
Régime de pensions du Canada et le ministère des Anciens
combattants. Je ne comprends pas pourquoi ces trois ministères
n'acceptent pas l'évaluation d'un médecin en ce qui concerne les
problèmes médicaux identifiés. Si un seul médecin pouvait agir au
nom des trois ministères, disant que c'est l'évaluation qu'il a
faite, et si le militaire est d'accord, pourquoi lui faire passer
tellement d'examens médicaux différents?
C'est comme si l'on disait dans un ministère que l'on ne croit pas le médecin d'un autre ministère. Les fonctionnaires du ministère des Anciens combattants ne font pas confiance aux médecins d'un autre ministère, qu'il s'agisse des Forces canadiennes ou du Régime de pensions du Canada.
En rétrospective, après toutes ces années de démêlés avec le ministère des Anciens combattants, je pense que c'est l'une des principales raisons pour lesquelles il faut tant de temps pour que toutes les formalités de libération passent par le ministère des Anciens combattants, le Régime de pensions du Canada et les Forces canadiennes. Les formalités sont trop longues, et je pense que c'est l'une des principales raisons.
Merci.
Le président: Je sais que M. Benoit veut poser une question, mais avant de lui donner la parole je voudrais savoir si vous avez dû payer quelque chose pour obtenir tous ces certificats.
Cplc Lucy Critch-Smith: Non, monsieur, et si nous avons eu des coûts au départ, on nous a remboursés.
Le président: Bien. Merci.
Monsieur Benoit.
M. Leon Benoit: On vous a remboursé vos frais de déplacement, et toutes les autres dépenses de cette nature?
Cplc Lucy Critch-Smith: Oui, monsieur.
M. Leon Benoit: Je suppose qu'après un examen médical, lorsque vous vous adressiez à un autre service gouvernemental, vous disiez que les tests avaient déjà été effectués.
Cplc Lucy Critch-Smith: Absolument.
M. Leon Benoit: Quelle réponse vous donnait-on?
Cplc Lucy Critch-Smith: Dans le cas de mon mari, j'ai dû utiliser la Loi sur l'accès à l'information pour obtenir des copies de ses dossiers médicaux. À chaque ministère où il a dû s'adresser, j'apportais des copies aux médecins qu'on lui faisait voir. Nous économisions du temps parce que j'apportais des photocopies de ces documents, car ils n'avaient pas à s'adresser à son médecin ou à attendre qu'un dossier médical arrive à leur bureau, ce qui aurait pu prendre des mois dans certains cas.
M. Leon Benoit: Vous avez donc eu recours à la Loi sur l'accès à l'information pour obtenir ces documents?
Cplc Lucy Critch-Smith: Oui, monsieur.
M. Leon Benoit: Vous ne pouviez pas les obtenir sur une simple demande?
Cplc Lucy Critch-Smith: Non, monsieur.
M. Leon Benoit: Lorsque vous alliez voir le deuxième médecin, ou groupe de médecins, vous aviez déjà ce rapport à lui montrer.
Cplc Lucy Critch-Smith: Oui, monsieur.
M. Leon Benoit: Je me demande si d'autres avaient eu des rapports indiquant la même chose, s'ils n'avaient pas accès au rapport original. Cela aurait certainement pu vous aider.
Cplc Lucy Critch-Smith: Ordinairement, lorsque les fonctionnaires d'un ministère demandent que vous voyiez un médecin, ou leur médecin, ou lorsqu'on vous demande une attestation d'un médecin avant même de pouvoir obtenir un rendez-vous pour voir le médecin du ministère des Anciens combattants, par exemple, il faut une attestation d'un médecin.
Il faut donc aller voir son médecin de famille, si l'on est déjà libéré des forces armées. Il faut avoir une attestation d'un médecin. Il faut donc passer un examen médical chez son médecin de famille. Il remplit son petit certificat médical que vous apportez au ministère des Anciens combattants, ou encore que vous photocopiez, télécopiez ou postez. Ensuite, le médecin de ce ministère l'examine et vous demande de prendre rendez-vous. Ce médecin vous fait ensuite passer un autre examen médical.
Je pense que c'est l'un des plus grands problèmes dans ce processus. Les formalités requises signifient qu'il faut passer plusieurs examens médicaux et voir plusieurs médecins. Cela prend tellement de temps.
M. Leon Benoit: Oui. Cela peut aussi être dispendieux. Merci.
Cplc Lucy Critch-Smith: Je vous en prie.
Le président: Monsieur Price.
M. David Price: Vous avez mentionné cet après-midi qu'au moment de prendre votre retraite, après 20 ans de service, vous avez profité d'une aide pour vendre votre maison... Je n'ai pas bien compris. Pourriez-vous m'en parler un peu plus?
Cplc Lucy Critch-Smith: Bien. Je vous demandais si, après 20 ans de service, au moment de la libération... Par exemple, si je termine ma carrière ici à Trenton et y obtient ma libération, je ne suis pas admissible au programme de rachat garanti de ma maison que j'ai achetée ici. Je demande pourquoi il en est ainsi. Pourquoi dois-je attendre d'avoir 25 ans de service pour être admissible à ce programme de rachat?
M. David Price: Je vois. Vous y êtes admissible après 25 ans.
Cplc Lucy Critch-Smith: Je me trompe peut-être, mais je crois qu'on y est admissible après 25 ans de service.
M. David Price: Mais vous n'y êtes pas avant cela.
Cplc Lucy Critch-Smith: Après 20 ans, non, monsieur.
M. David Price: Bien. C'est intéressant. Merci.
Cplc Lucy Critch-Smith: Je vous en prie.
Le président: Merci beaucoup.
Nous entendrons maintenant deux témoins, Britta Foster et Gwen Perrault.
Mme Britta Foster (témoignage à titre personnel): Bonsoir.
Nous sommes ici pour vous faire part de notre préoccupation et de notre déception en ce qui concerne l'attribution des logements familiaux (LF). Plusieurs familles nombreuses, comptant quatre enfants ou plus, ont demandé à l'agence de logement des Forces canadiennes une maison de quatre chambres à coucher sur le boulevard Hewson ou le boulevard Breadner. Nous avons demandé qu'on mette nos noms sur une liste d'attente. Ces maisons fournissent 240 pieds carrés de surface habitable de plus, ainsi qu'une salle de bain supplémentaire et une pièce supplémentaire à l'étage principal, comparativement à l'autre style de LF de quatre chambres à coucher disponibles sur cette base.
L'agence de logement nous appuie, mais ce n'est pas le cas du commandant de l'escadre. Actuellement, il a le pouvoir de décider qui a accès à ces maisons, en l'occurrence les adjudants-maîtres, adjudants-chefs, capitaines et militaires de grade supérieur.
Je suggère qu'on modifie la politique pour permettre à l'agence de logement des Forces canadiennes de déterminer l'attribution de tous les LF en fonction de la taille d'une famille et de ses besoins, et non pas en fonction du grade. Les familles n'ont pas de grade.
Merci de m'avoir écoutée.
Mme Gwen Perrault (témoignage à titre personnel): Je dirais essentiellement la même chose que mon amie Britta. J'attends mon sixième enfant et je suis d'accord avec elle pour dire que le logement est un besoin humain essentiel, quel que soit le grade. Nous espérons que d'autres finiront par penser de la même manière.
C'est tout ce que j'ai à dire. Merci.
Le président: Madame Perrault, vous dites que vous avez cinq enfants; combien de chambres à coucher avez-vous?
Mme Gwen Perrault: Nous avons quatre chambres à coucher et une salle de bain.
Le président: Quatre chambres à coucher et une salle de bain. C'est terrible!
Mme Gwen Perrault: Oui.
Le président: Bien, merci.
Monsieur Wood.
M. Bob Wood: Plusieurs de ces maisons sont-elles disponibles, ou les listes d'attente sont-elles longues?
Mme Britta Foster: Lorsque nous avons présenté notre demande, trois de ces maisons étaient inoccupées. Personne n'avait le grade requis. Ces maisons sont restées inoccupées pendant des mois. L'une d'entre elles est même inoccupée depuis environ un an, je crois, et elle l'est encore.
M. Bob Wood: Il y a donc trois de ces maisons qui conviendraient à votre famille.
Mme Britta Foster: Deux sont maintenant occupées par des familles moins nombreuses.
M. Bob Wood: Bien, merci.
Le président: Merci beaucoup.
Caporal Denis Paquet.
[Français]
Caporal Denis Paquet (témoigne à titre personnel): Bonsoir, mesdames, bonsoir messieurs. Ma question portera sur un droit acquis pendant que j'étais au Québec, soit mon permis de chasse du ministère de la Faune. Lorsque j'ai été muté à Borden, j'ai été obligé d'aviser le ministère que j'étais transféré en Ontario. Qu'ont-ils fait? Ils ont annulé mon permis. Autrement dit, ils ont mis ma carte de côté, tout en me conservant le droit de venir chasser au Québec, à la condition toutefois de payer le prix à titre de non-résidant.
Cela est un non-sens. En effet, je continue à voter dans ma circonscription, chez nous. Pourquoi faut-il que je paie 200 $ et plus quand je veux aller à la chasse à l'orignal chez nous, alors que c'est encore là que je vote pour mon député ou mon ministre? C'est ce que je ne comprends pas et qui me semble illogique. J'ai recommuniqué avec eux et ils m'ont dit que c'était ainsi dans la loi.
Quand je suis revenu en Ontario et que j'ai voulu aller à la chasse dans cette province, on m'a dit que la carte du Québec n'était pas valide ici. J'ai donc été obligé de suivre un cours et de réapprendre l'histoire des petits canards qui nagent et autres choses du même genre. Je me dis qu'après un certain temps, les choses doivent aboutir. Nous avons un gouvernement et nous sommes censés être égaux partout. J'ai des droits. Je ne suis pas dans la GRC, mais je travaille pour un ministère fédéral et j'ai les mêmes droits qu'eux. C'est mon premier point.
• 1925
Deuxièmement, je parlerai des réclamations de
déménagement. Lorsqu'on déménage, pourquoi a-t-on
autant de difficulté à réclamer le remboursement
du prix des objets brisés?
Il faut remplir des formules à gauche et à droite et
prendre contact avec notre compagnie d'assurance. Ensuite, il
faut attendre l'évaluateur qu'on va nous envoyer, etc.
Est-ce normal de devoir attendre six ou sept mois avant
de réussir à être remboursé?
On ne réussit à se faire payer que lorsqu'on sort de nos gonds, quand on est hors de nous, quand on se fâche. Là, subitement, on nous dit qu'un envoyé du ministère viendra faire une évaluation normale des bris et que nous serons payés. Est-ce que cela a du sens? J'ai déménagé deux fois et les deux fois il y a eu des bris. Comme on dit, j'aime mieux avaler ma pilule que commencer à me battre avec eux et attendre pendant six mois. Non, merci. Il est mauvais de procéder ainsi, mais attendre six ou sept mois pour en arriver au même point et se faire rembourser...
Mon troisième point portera sur le logement familial. Je comprends que tout le monde ne puisse pas être logé comme un général s'il n'a pas les moyens de se payer la maison d'un général. Mais, comme le disait madame précédemment, cette dame qui attend un sixième enfant, si le mari n'est pas en difficulté financière, pourquoi ne pas lui accorder son PMQ, soit un logement courant? Les raisons qu'ils nous donnent, comme le major a dit à mon sujet, c'est qu'ils ne peuvent pas nous mettre sur le pied que ceux qui ont rang d'officier quand on n'est qu'un pauvre caporal.
De mon point de vue, mon voisin de droite ainsi que mon voisin de gauche sont des pères ou des mères de famille. Je suis père de famille et ma femme est mère de famille. Nous sommes tous les mêmes sur le plan du coeur. Quand on vit ensemble, on forme une communauté. Si tu es capable de payer ton logement, tu devrais avoir le droit d'en avoir un.
Je comprends que certains logements coûtent plus cher que d'autres. Si une personne a des problèmes monétaires, il est normal qu'elle n'ait pas accès à ceux-là. Mais si elle est capable de le payer, elle devrait l'avoir. Merci.
Le président: Pour les bris subis lors d'un déménagement, est-ce que ce sont les assurances qui paient ou si ce sont les déménageurs?
Capl Denis Paquet: Normalement, ils disent que nos assurances seraient censées couvrir les bris. Il faut faire d'abord une réclamation au déménageur. On avise les déménageurs, qui nous disent d'aviser nos assurances. Il y a plein de papiers à remplir. Ils disent qu'ils vont nous envoyer un évaluateur des bris, puis on niaise encore, jusqu'à ce qu'on se rende au bureau du déménageur et qu'on lui dise de nous payer, sinon on va l'étouffer. Alors, il dit qu'il va envoyer quelqu'un d'autre. Et là on attend et on attend et, tout d'un coup, les choses débloquent. Mais si on connaît quelqu'un qui travaille dans ce bureau-là, on réussit à passer avant tout le monde.
Le président: Est-ce que vous communiquez avec quelqu'un de la base ou si c'est vous qui devez prendre toutes les initiatives?
Capl Denis Paquet: Il faut aussi aviser quelqu'un de la base, si je ne me trompe pas. On avise son déménageur des bris qui se sont produits; on fait rapport ici à la base des mêmes bris; on fait ensuite appel à ses assurances, après quoi on va et on vient: on va chez les assureurs, on va chez le déménageur, on va chez les assureurs et puis chez le déménageur, jusqu'à ce que les choses aboutissent et qu'on soit payé. C'est ainsi que cela fonctionne.
Le président: D'habitude, combien cela prend-il de temps?
Capl Denis Paquet: Ouf! Cela peut être long! Demandez à ceux qui sont revenus de l'Allemagne combien il a fallu de temps.
Le président: Est-ce qu'on parle d'un mois, de deux mois, de trois mois?
Capl Denis Paquet: Six mois et peut-être un an. Il y en a qui ont attendu longtemps.
Le président: Je crois que M. Lebel a une question.
M. Ghislain Lebel: C'est le deuxième cas dont j'entends parler aujourd'hui, à des moments différents. Le déménageur en question, qui le choisit? Est-ce vous ou l'armée?
Capl Denis Paquet: Normalement, il faut faire appel à une liste des déménageurs. J'ai déjà travaillé dans le secteur des déménagements. Un déménageur a le droit de faire un certain nombre de déménagements, en fait 20 déménagements au cours d'une année. Aussitôt qu'il a fait son quota, il faut qu'il laisse la place à un autre.
Donc, si on a des préférences personnelles, ce qui m'est déjà arrivé, on nous répond qu'il est impossible d'employer ce déménageur parce qu'il a déjà atteint son quota et qu'il n'a droit qu'à un certain nombre de déménagements dans l'année pour le ministère de la Défense. On donne alors la chance à une autre entreprise de travailler.
M. Ghislain Lebel: Ce que je veux savoir c'est qui est celui qui engage, du point de vue juridique.
Capl Denis Paquet: On n'a pas le droit de choisir son...
M. Ghislain Lebel: Celui qui engage le déménageur, celui qui le paye, c'est l'employeur, le ministère de la Défense nationale.
Capl Denis Paquet: C'est exact.
M. Ghislain Lebel: Si leur choix coïncide avec vos voeux, tant mieux, sinon c'est eux qui ont le dernier mot.
Capl Denis Paquet: C'est exact.
M. Ghislain Lebel: D'accord, merci.
Le président: Merci beaucoup.
[Traduction]
Sergent Louis Bédard (témoignage à titre personnel): Bonsoir. Je vous remercie d'avoir pris le temps de venir écouter certaines de nos observations et de nos plaintes.
Ma question est plutôt une observation au sujet des demandes de remboursement des frais de déménagement. Je ne sais pas dans quelle mesure vous connaissez le règlement relatif aux déménagements. Lorsque nous déménageons, nous avons accumulé un certain nombre de possessions pendant notre carrière—certains d'entre nous en ont plus que d'autres; je veux parler de tout le bazar qu'on accumule—les déménageurs viennent faire un pré-emballage. Ils choisissent les articles dont on n'aura pas besoin dans la semaine qui suit ou pendant la période du déménagement, et ils les emballent pour faciliter les choses le jour du déménagement.
Le problème n'est pas l'emballage préalable en soi. Les déménageurs viennent chez vous avant le déménagement et font un emballage préalable, séparant votre bric-à-brac des choses dont vous pourrez avoir besoin. Lorsqu'ils viennent faire l'emballage final—et cela peut être une semaine plus tard—ils chargent le tout sur un camion.
Je ne pense pas cependant qu'on devrait s'attendre à ce que j'emballe des draps sales, des serviettes sales, ainsi que des casseroles et des poêlons sales. Je m'explique.
Lorsqu'on doit venir charger toutes vos affaires après l'emballage préalable, tout est prévu d'avance. On vous dit, par exemple, qu'on viendra emballer vos affaires le lendemain matin. Ainsi, à 8 heures du matin, les déménageurs se présentent à votre maison, avec des emballeurs et toute une foule de gens. Ils occupent la maison, elle n'est plus à vous. Dès qu'ils entrent dans votre maison, c'est comme si elle leur appartenait. C'est à eux d'emballer vos possessions. Vous ne devez pas leur nuire, parce qu'ils ont un travail à faire. Leur temps est limité. Lorsqu'il s'agit d'un gros chargement, cela peut prendre toute la journée.
Je veux dire que la veille au soir, on s'attend à ce que nous restions dans la maison et utilisions les lits, les draps, les couvre-matelas. On s'attend à ce que nous déjeunions le lendemain matin dans la maison et utilisions les chaudrons et casseroles. On ne nous permet pas de faire autrement. J'ai essayé d'obtenir le remboursement d'une nuit ailleurs pendant des années—et je suis militaire depuis un bon nombre d'années—mais on a toujours rejeté ma demande. On a dit que si on le faisait pour moi, on devrait le faire pour tout le monde.
Je ne pense pas qu'il soit juste qu'on nous demande de rester chez nous. Je ne l'ai jamais fait. J'ai toujours amené ma famille en ville et jusqu'ici, j'en ai toujours assumé le coût, parce que je me disais que ma famille était plus importante. Je ne voulais pas emballer de vêtements sales, comme le linge de maison, les draps et autres articles. Pour le reste, il n'y a pas de problème; c'est seulement pour les draps, les serviettes, les chaudrons et casseroles.
La veille du déménagement, j'allais en ville coucher à l'hôtel. Mes draps étaient lavés, mes serviettes étaient lavées, ainsi que mes chaudrons et casseroles et le lave-vaisselle était propre. La laveuse était également propre. Le lendemain matin, lorsque les déménageurs arrivent à 8 heures, ils s'attendent à trouver une laveuse propre, de même que tout le reste. Si ce n'est pas propre, c'est vraiment dommage, mais il n'y a rien à faire.
Vous avez entendu raconter toutes sortes d'anecdotes. Je ne sais pas si vous voyagez, mais croyez-moi...
Je m'excuse de ne pas avoir eu la possibilité de vérifier si c'est la même chose pour les autres employés fédéraux, mais pour les militaires, je sais qu'il en est ainsi.
La deuxième partie de mon observation concerne l'autre partie du déménagement, soit le déballage—on parle de «déchargement»—où l'on s'attend à ce que les déménageurs montent les lits et ouvrent les boîtes contenant le linge de maison, soit les serviettes, les draps et autres choses dont vous aurez besoin ce soir-là et le lendemain matin. On s'attend à ce que vous passiez la nuit dans votre maison et c'est ce qu'on vous demande de faire.
Je répète que je ne trouve pas cela juste. Certains d'entre nous ont peut-être moins de bric-à-brac que d'autres. Ce n'est pas ma faute si j'ai plus d'affaires. Lorsqu'une famille s'agrandit, on acquiert parfois plus de choses. Quand quelqu'un est divorcé, ou s'est remarié, ou encore quand quelqu'un a perdu son conjoint et s'est remarié, il peut ainsi avoir beaucoup d'affaires.
Je ne pense donc pas que cela soit juste. Un déménagement cause déjà suffisamment de stress à une famille. C'est un important traumatisme. Les enfants doivent quitter leurs amis. Vous devez quitter votre maison, votre parenté, vos amis. Vous devez quitter votre travail et vous ne voulez pas partir. Mais il le faut. Je ne demande pas une indemnisation pour cela, mais ce n'est pas juste qu'en plus de tout ce stress, on vous demande encore de passer la première nuit dans la nouvelle maison, et si on ne le fait pas, c'est dommage, mais on ne vous rembourse pas les frais encourus. C'est absolument clair. On vous demande si les déménageurs ont monté les lits et si la réponse est oui, alors c'est dommage, mais on ne nous rembourse pas.
• 1935
Certains d'entre nous essaient de rester dans la maison avant
ou après le déménagement. Mais ma famille est ma première priorité.
L'argent n'est que de l'argent et on ne l'emporte pas en paradis.
La plupart du temps, je passe la nuit à l'hôtel. Je pense qu'après
tout ce stress, on mérite un peu de répit.
Par conséquent, nous devrions obtenir le remboursement d'une nuit passée à l'hôtel la veille d'un déménagement. Je ne parle pas des repas, je parle seulement de l'hôtel. Et la nuit avant qu'on déballe nos effets, nous devrions pouvoir demeurer à l'hôtel, afin d'être frais et dispos le lendemain matin pour faire tout ce qu'il y a à faire.
Merci beaucoup.
[Français]
Le président: Un instant, s'il vous plaît.
[Traduction]
Lorsque les déménageurs arrivent dans votre nouvelle maison, ils installent tout?
Le Sgt Louis Bédard: On a le choix, monsieur. D'après le règlement, ils doivent installer les lits. En outre, si nous le désirons, ils déballeront les boîtes, toutes nos possessions. J'ai le droit de le demander, mais c'est la dernière chose qu'on veut faire, parce qu'on ignore où l'on voudra mettre ses affaires. Chaque maison est différente. En outre, même si certaines des boîtes sont étiquetées, il est possible que sur l'étiquette figurent des choses qui ne sont même pas dans une boîte. Par conséquent, la dernière chose qu'on veut c'est d'avoir 20 000 livres de choses dans la maison sans savoir exactement où on les mettra. Nous faisons donc déballer le strict minimum. Le lendemain matin, nous commençons à décider où nous mettrons nos affaires.
Cela répond-il à votre question?
Le président: Quand vous dites qu'ils font le lit, voulez-vous dire qu'ils l'assemblent, ou qu'ils mettent les draps et couvertures?
Le sgt Louis Bédard: Ils assemblent le cadre de lit et y mettent le matelas, et ils doivent faire cela pour chacun des lits. S'ils le font, ils respectent les règlements.
Le président: Merci.
Bev Warden.
Mme Bev Warden (témoignage à titre personnel): Il y a deux principales questions dont j'aimerais parler, mais je veux d'abord revenir sur ce qu'a dit Gwen tout à l'heure, c'est-à-dire qu'on manque de logements. J'ai cinq enfants actuellement à ma maison, dont trois adolescents, et j'ai deux enfants qui viennent toutes les deux fins de semaine. J'ai donc neuf personnes entassées dans ma maison, qui compte quatre chambres à coucher. Même une salle de bain supplémentaire serait une grande amélioration. Je voulais simplement le mentionner.
Pour ce qui est du moral, la plupart des gens à qui je parle ne pensent pas que le problème est une question d'argent; c'est plutôt le lieu de travail. Le moral est presque complètement à plat. Lorsque votre mari rentre à la maison fâché tous les soirs parce qu'il ne peut plus trouver de plaisir à son travail et qu'il ne peut plus bien faire son travail à cause de toutes sortes de circonstances, ou qu'il a une foule de tâches différentes à accomplir et qu'il travaille pour 900 personnes différentes et qu'il ne peut terminer aucune tâche—et il est perfectionniste—parce qu'il doit travailler pour tellement de monde, le manque d'organisation... Je trouve triste que quelqu'une ne veuille pas aller travailler parce qu'il ne peut pas accomplir toutes ses tâches. C'est très triste. Le fait de ne pas avoir confiance en ses supérieurs enlève beaucoup de motivation à travailler.
En dernier lieu, je veux parler des rapports d'appréciation du rendement. C'est une plaisanterie. Je tiens seulement à ce que vous le sachiez. Qu'en est-il du mérite? Ce n'est pas de cela dont il est question dans les rapports d'appréciation du rendement. Les militaires ne reçoivent pas la reconnaissance voulue. C'est un problème généralisé, mon mari n'est pas le seul dans cette situation. On n'inscrit pas sur le rapport ce qu'il mérite qu'on y écrive. Il y a des choses qui n'y apparaissent même pas. C'est dommage, mais un nouveau venu dans un atelier peut être sûr que son rapport d'appréciation sera déplorable la première année. C'est assuré. Et c'est la même chose partout.
• 1940
Si quelqu'un est là depuis toujours, devinez qui aura la
prochaine promotion? Peu importe la qualité du travail, c'est le
plus ancien qui obtient la promotion. Quel genre d'encouragement
cela offre-t-il à ceux qui se trouvent «en bas de la liste»?
Mon mari a 27 ans et il s'est déjà résigné au fait qu'il demeurera caporal toute sa vie. Est-ce qu'il y a quelque chose de plus triste? Pourquoi faire son travail? Il n'y a pas de possibilité d'avancement. On sera payé quand même.
Si les choses demeurent telles qu'elles sont, cela n'aidera en rien. C'est essentiellement ce qu'avais à dire.
Merci.
Le président: Merci.
Capitaine Andy Cook.
Le capt Andy Cook (témoignage à titre personnel): Je veux seulement faire un bref commentaire. Je pense que la formule utilisée, la tribune offerte pour permettre aux membres des forces canadiennes et à leur famille de faire entendre leurs préoccupations est excellente. Je vous félicite tous d'être venus et je vous en remercie. Malheureusement, c'est seulement au dîner que j'ai appris la tenue de cette audience et mes commentaires ne sont donc pas préparés d'avance.
Je veux parler un peu de la question abordée par la dame qui m'a précédé. Je pense que le moral dans les forces canadiennes est en situation de crise et qu'il incombe à tous, membres des forces canadiennes et à leur famille, de faire de leur mieux pour rétablir le moral et essayer d'améliorer le milieu de travail pour tous. J'estime cependant qu'il y a certainement un problème et je suis persuadé que certains des commentaires que vous avez entendus au cours de votre tournée du pays reflétaient probablement la même idée.
Il est très triste, à mon avis, que l'une des plus grandes et anciennes traditions—une tradition au sein de la force aérienne canadienne, du moins—ne survive encore qu'un seul jour, et je veux parler du mess des officiers de la BFC Trenton. Après demain, on n'y servira plus de dîner, de déjeuner ou tout autre repas. Tout le monde devra aller manger au Yukon Galley, qui est un bon établissement, mais je pense qu'étant donné certains événements dont on a été témoin lors de l'enquête sur la Somalie et d'autres facteurs, comme le fait qu'on mette l'accent sur le comportement des officiers, la déontologie, et qu'on insiste pour que les officiers se conduisent en officiers, il vaudrait peut-être la peine de se demander s'il serait préférable pour les forces canadiennes et la population canadienne de traiter les officiers comme des officiers.
Je comprends que la question d'argent soit un facteur déterminant. Il y a des limites à ce qu'on peut faire avec l'argent dont on dispose. Je sais que le budget du commandant de l'escadre subit des compressions très fortes et qu'il doit s'acquitter d'un rôle opérationnel avec une somme d'argent fixe, et que ces contraintes s'appliquent à tous, tout comme elles s'appliquent à moi à titre de contribuable.
Je veux cependant vous signaler—et je sais que je parle au nom de plusieurs de mes collègues quand je dis que vous pourriez transmettre le message selon lequel l'argent ne peut pas toujours être le seul facteur déterminant. Il y a un coût pour faire les choses et un coût pour le moral, pour faire en sorte que les gens soient heureux dans leur travail et disposés, empressés même, à servir leur pays. Je vous saurais gré de bien vouloir rapporter ce message avec vous.
Il serait actuellement très difficile, à mon avis, de convaincre un soldat d'infanterie de sortir des tranchées et de faire face à une balle, quand il n'a pas suffisamment d'argent pour joindre les deux bouts et qu'il doit livrer des pizzas en fins de semaine. J'ai été moi-même témoin de ce genre de situation pendant ma courte carrière dans les Forces canadiennes.
Je vous prie et je vous demande ceci: le message que vous pourriez transmettre est que le facteur décisif n'est pas toujours le dollar et que nous devrions peut-être donner une priorité un peu plus grande aux personnes. Je sais que certains essaient de le faire. Je ne le vois cependant pas toujours où je travaille.
Merci.
Le président: Un instant, s'il vous plaît. Je pense que M. Wood veut vous poser une question.
M. Bob Wood: Je voulais poser une question à Bev, mais elle est partie avant que j'en aie eu la possibilité...mais peu importe. Ma question porte sur le même sujet, c'est-à-dire les mesures d'encouragement. Nous avons réfléchi à différents moyens de récompenser le personnel non officier...il s'agit simplement d'une prime de rendement. Je pense que Bev en a parlé, lorsqu'elle disait que son mari demeurerait caporal. Il y a évidemment quatre niveaux. Reprenez-moi si je fais erreur, car je ne suis pas trop certain de la façon dont cela fonctionne. Chaque grade comporte quatre niveaux de prime de rendement. Est-ce essentiellement ainsi que les choses fonctionnent?
Le capt Andy Cook: Ce n'est pas exactement correct, monsieur. En tant que capitaine, ma solde...
M. Bob Wood: Le grade de capitaine comporte huit niveaux, n'est-ce pas?
Le capt Andy Cook: Dix.
M. Bob Wood: Dix. Mais pour les militaires du rang, il y en a quatre, n'est-ce pas?
Le capt Andy Cook: Je l'ignore, monsieur.
M. Bob Wood: Je pense que c'est exact.
Mme Bev Warden: C'est exact.
M. Bob Wood: Quelqu'un m'a fait part d'une excellente idée aujourd'hui, et j'ignore si nous pourrions la mettre en pratique, mais le fait que ces gens restent coincés au même grade pendant de nombreuses années...et lorsque quelqu'un est arrivé au grade de caporal, il y restera assez longtemps étant donné qu'il n'y a pas beaucoup de promotions actuellement.
• 1945
Quelqu'un m'a fait part d'une suggestion aujourd'hui et
j'ignore si c'est une bonne idée, mais elle m'a paru bonne. On
pourrait faire passer des examens de métier après un an, afin de
déterminer s'il y a lieu de verser une prime de rendement. Dans
chaque métier, il faudrait passer un examen. Un résultat de—et je
choisis arbitrairement un chiffre—85 p. 100, disons, donnerait
droit à une prime de rendement.
Le capt Andy Cook: Bravo.
M. Bob Wood: Vous riez...
Le capt Andy Cook: Je ne ris pas, monsieur.
M. Bob Wood: Si vous avez une meilleure idée, j'aimerais bien l'entendre. C'est une idée dont on m'a fait part lorsque je discutais avec des militaires dans l'un des hangars. L'un des adjudants a proposé cette idée.
J'ai pensé que ce n'était pas une mauvaise idée. Les militaires du rang auraient ainsi une possibilité d'obtenir plus d'argent. Les officiers pourraient peut-être aussi en profiter. Cet homme était adjudant et le sort des officiers ne le préoccupait pas tellement, je suppose, mais la situation de ses subalternes le préoccupait certainement. C'était l'une de ses suggestions.
C'est juste un ballon d'essai que je lance pour voir si ce serait faisable. Qu'en pensez-vous?
Le capt Andy Cook: Je ne peux pas vraiment me prononcer à ce sujet. Moi qui suis pilote depuis près de huit ans dans les forces canadiennes, je peux vous dire que la rémunération incitative est quelque chose à quoi je pense beaucoup pour le moment. Si je pouvais vous donner mon propre avis, je vous dirais que cette formule est effectivement valable.
J'ai vu bon nombre de mes collègues quitter l'armée, et ce n'était pas parce qu'ils n'aimaient pas la vie dans les forces. Ils adoraient voler et ils auraient bien voulu rester, mais les attraits de l'aviation civile étaient tels qu'il était difficile de refuser. Le salaire, les avantages sociaux, les loisirs à la maison, voilà autant de choses qu'il est difficile de refuser. À l'heure actuelle, les pilotes nous quittent en masse et la crise est grave.
C'est également quelque chose qui vous touche sur le plan personnel. Je ne pense pas que la solde et les incitatifs soient toujours au premier plan des préoccupations; ce serait plutôt la qualité de vie. Il est regrettable à mon avis que les forces armées ait dû fermer les écoles qui faisaient partie des bases. Désormais, lorsque les gens sont mutés, ce sont les études qui souffrent. Les gens qui déménagent d'une province à l'autre doivent s'intégrer à un autre système scolaire, si vous voyez ce que je veux dire, et ils en pâtissent.
Les problèmes sont nombreux, mais je pense qu'ils reviennent tous à ces éléments fondamentaux dont Bev vous parlait un petit peu plus tôt. Je ne veux pas avancer de solutions ici parce que ce n'est pas mon boulot, mais pour une raison que j'ignore, je pense qu'il y a beaucoup beaucoup de gens chez nous qui ne sont pas heureux.
Ce que je voulais vous faire comprendre, était surtout que la question monétaire est importante. Il est facile de dépenser trop ou de vivre au-dessus de ses moyens, mais il arrive que lorsque nous établissons notre budget et que nous essayons de savoir au juste ce que nous pouvons nous permettre, nous devrions peut-être tenir compte aussi du fait que tout ce qui peut assurer le bonheur des gens est une dépense utile.
Voilà ce que je voulais faire valoir.
M. Bob Wood: Bev, auriez-vous quelque chose à ajouter?
Mme Bev Warden: C'est une idée qui me plaît. Je ne sais pas en revanche si elle serait du domaine du possible. Tout revient essentiellement à ce qu'il est extrêmement important, lorsqu'on travaille, de sentir au moins cette reconnaissance pour un travail bien fait, rien que cela, ce qui dans les Forces armées est à l'heure actuelle presqu'aussi important que l'aspect purement monétaire, justement parce que cette reconnaissance n'existe pas. En théorie, donc, c'est une excellente idée à condition de pouvoir la concrétiser.
M. Bob Wood: Je pense moi aussi que cette idée était intéressante et, venant d'un sous-officier, je me suis dis que ce n'était probablement pas une mauvaise idée. Il est manifeste qu'il se fait beaucoup de souci pour ses troupes.
Comme je le disais, c'était précisément quelque chose que nous avons essayé de mieux comprendre. Pendant nos déplacements, nous avons essayé de mieux comprendre comment on pourrait procéder pour donner aux militaires un but quelconque. Ainsi, même s'ils arrivent au niveau incitatif maximum—dans le cas d'un caporal, par exemple—il y aurait toujours cette reconnaissance du travail bien fait. Même si le caporal en question doit rester caporal, on reconnaît néanmoins qu'il fait du bon travail et qu'il mérite d'être récompensé. Pourquoi ces gens-là doivent-ils demeurer au même niveau pendant plusieurs années?
Mme Bev Warden: Ce serait une excellente chose à faire dans l'immédiat étant donné qu'il n'y a ni promotions, ni affectations. Il y aurait à ce moment-là toujours l'incitatif en plus de la reconnaissance du travail bien fait. Cela, ce serait excellent.
M. Bob Wood: En effet. Je vous remercie. Merci pour cette deuxième intervention.
M. Leon Benoit: J'aimerais vous poser à tous deux la même question. C'est quelque chose que vous avez effleuré, mais je vous demanderais Andy de penser à votre carrière jusqu'à présent, et à vous Bev, de vous souvenir de tout ce que votre mari vous raconte depuis plusieurs années, afin d'essayer de mettre le doigt sur ce qui serait à votre avis les éléments principaux à l'origine de cette baisse du moral.
Mme Bev Warden: J'aurais une liste longue comme le bras, mais je vais commencer par ce qui me vient immédiatement à l'esprit.
Il y a des gens qui ont des promotions et qui ne les méritent pas. Ce n'est pas une simple question de jalousie, cela se produit partout. Ce n'est pas cela qui préoccupe mon mari. Cela se voit partout.
Les gens doutent également des compétences de leurs supérieurs. Ce n'est pas simplement une question de confiance à l'endroit d'un être humain, c'est simplement une question de compétence.
On doute également de la formation de certains de ceux qui vous entourent. Il est très difficile de se résoudre à aller travailler lorsqu'on a peur de travailler avec certaines personnes, et cela aussi on peut le constater partout.
Pas de reconnaissance... Je connais quelqu'un qui a inventé un nouvel outil pour faciliter la réparation des hélicoptères de recherche et de sauvetage. L'invention était excellente, mais tout ce qu'il a eu, c'est un tape sur le dos. On lui a dit «C'est tout à fait formidable», mais cela n'est jamais apparu sur son rapport d'appréciation. On lui a dit «Vous avez le droit de me demander pourquoi on ne l'a pas mentionné, mais je ne suis pas obligé de vous répondre.» Voilà la réponse qu'elle avait eu. C'est ridicule. Elle ne veut même pas se battre. Elle s'est contentée de dire «À quoi bon?»
Dans la même veine, et c'est quelque chose qui me rend vraiment furieuse... Depuis lors, la dernière fois que le commandant de la base a discuté de ce genre de chose avec d'autres militaires, il a dit «Vous avez le droit de dire ce que vous voulez, ce ne sera pas retenu contre vous.» Devinez quoi? La personne dont je vous parlais ne travaille plus au service des hélicoptères de recherche et de sauvetage. Elle a été mutée aux armements je crois. On a dit que c'était à cause d'une invalidité à long terme. Elle n'a pas d'invalidité à long terme. Elle s'est blessée la jambe en pratiquant un sport et son dossier médical mentionne bien qu'il s'agit d'une incapacité temporaire et que dès que la blessure sera guérie, elle sera contente. Mais ils ont utilisé cette excuse pour la muter, et cela s'est produit après que le commandant de la base ait dit «N'hésitez pas à dire ce que vous avez à dire.» Son problème est un problème de moral.
M. Leon Benoit: Avez-vous le sentiment qu'il y a des gens qui n'ont pas voulu venir témoigner aujourd'hui?
Mme Bev Warden: Certainement, il y en a beaucoup parce qu'ils ont peur des conséquences, car il y a des conséquences. Ce n'est pas un secret. Ce genre de choses se produit. C'est le vrai monde ici. C'est cela qui se passe.
M. Leon Benoit: Andy, avez vous quelque chose...?
Le capt Andy Cook: Je n'ai pas de craintes comme celles-là.
M. Leon Benoit: Non?
Le capt Andy Cook: Je ne veux pas prendre le contre-pied de ce que Bev a dit, je précise simplement que je ne constate pas ce genre de chose dans mon quotidien. Je dois souligner pour commencer qu'en fait, je ne suis pas en poste à Trenton; je suis ici pour trois mois pour suivre un cours.
Il y a par contre quelque chose de vrai dans ce que Bev a dit, mais il faudrait y mettre un bémol. Moi aussi j'ai dû quitter un chasseur d'entraînement pour passer sur un Hercules, et lorsque je rejoins mon escadrille, je ne peux pas m'empêcher d'espérer que j'aurai un rapport d'évaluation individuel normal ou moyen pour l'année. Ce n'est pas parce que je suis pénalisé pour avoir été muté, c'est simplement que je ne connais rien à cet appareil, de telle sorte qu'il ne faut pas s'attendre à ce que j'accomplisse des merveilles par rapport aux autres pilotes qui ont 30 ans d'expérience.
Cela étant, si je devais mettre le doigt sur quelque chose qui, d'après ce que mes collègues disent, pourrait être à la base—vous m'avez demandé ce qui était à l'origine de la baisse du moral—je pourrais vous dire que parfois, nous avons l'impression qu'on essaye de faire trop de choses dans les forces armées, qu'il faudrait peut-être redéfinir nos rôles et faire en sorte qu'il s'agisse de rôles que nous pouvons assumer et bien assumer, qu'il s'agisse du maintien de la paix, de la protection civile ou que sais-je encore.
Je pense que les civils ont l'impression—et ce n'est pas simplement mon sentiment à moi, c'est un sentiment général—qu'il arrive que dans les forces armées nous demandions un peu aux gens d'être des bonnes à tout faire au lieu d'avoir un ou peut-être plusieurs rôles de premier plan. Il y a sans cesse des compressions de personnel, si bien qu'à mon avis il y a peut-être cette impression que si nos interventions étaient plus ciblées, nous pourrions exceller et en être fiers.
• 1955
Je pense qu'il y a déjà beaucoup d'incitatifs et que toutes
les escadres font de leur mieux pour améliorer la qualité de vie
des militaires dans les bases.
Les forces aériennes ont organisé leur colloque Plan de vol 97, que vous connaissez j'en suis sûr, afin d'essayer d'améliorer les communications dans la hiérarchie. J'ai d'ailleurs eu la chance de faire office de facilitateur pendant ces colloques et je pense que c'était une excellente initiative. Voilà le genre de choses qui nous achemine dans la bonne voie. Je voudrais néanmoins faire remarquer que nous essayons parfois d'en faire trop au lieu de nous contenter de faire quelque chose très bien.
M. Leon Benoit: Andy, je voudrais vous poser une question à propos de la prime dont il a été question pour les pilotes, afin de les inciter à rester dans les forces armées. À votre avis, que pensent les autres militaires qui sont également très spécialisés dans leurs fonctions, dont les services sont en demande partout dans le secteur privé du fait que les pilotes seraient ainsi mis dans une catégorie particulière si on leur donnait cette prime alors qu'ils sont eux-mêmes dans une situation très semblable et que pour eux, il n'est pas question de quoi que ce soit.
Le capt Andy Cook: Je me sens un peu sur la sellette ici monsieur. Je vais peser mes mots très prudemment pour vous répondre. Du point de vue de l'offre et de la demande, du point de vue purement économique, il est logique que si on paye quelqu'un si on lui donne un incitatif quelconque pour assumer une fonction, les gens vont être tentés de passer dans ce secteur, qu'il s'agisse des forces armées ou de l'aviation civile dans le cas des pilotes, ou que sais-je encore. On n'y peut rien. C'est le jeu du marché, et il n'y a rien à faire pour contrer cela.
Pour en revenir au cas des pilotes, si les forces armées et le ministère étaient en mesure—ou s'ils le voulaient de l'avis de beaucoup de gens, mais je ne pense pas que ce soit une question de volonté—de donner aux pilotes les mêmes incitatifs que ceux que leur offrent les compagnies aériennes, il n'y aurait probablement pas de problème d'exode. Mais je n'en sais rien car je ne suis pas expert en la matière.
Je pense que la même chose s'appliquerait à n'importe quelle classification professionnelle ou corps de métier dans les forces armées. Si la demande est forte dans le secteur privé, si le secteur privé est prêt à payer mieux, le même problème se poserait je pense. Les forces armées perdraient du personnel, et ici encore je ne pense pas qu'on y puisse quoi que ce soit.
Le même problème s'est posé jadis dans le cas des avocats et des médecins militaires. Si je me souviens bien, on avait proposé alors de les payer et de leur donner les mêmes avantages que ceux de leurs confrères en pratique privée. Je ne suis pas expert et je ne saurais vous dire si on a obtenu le résultat escompté, mais j'ai bien l'impression que si.
J'imagine que c'est une façon un peu contournée et longuette de dire tout simplement que cela revient à ceci: si vous voulez conserver vos effectifs, faites en sorte qu'ils soient heureux, payez-les bien ou donnez leur un incitatif quelconque pour qu'ils restent, un incitatif qui serait au moins équivalent à celui qu'ils obtiendraient ailleurs, à défaut de quoi ils partiront. C'est probablement aussi simple que cela, et cela vaut pour les pilotes, les médecins, les avocats, les usineurs ou que sais-je encore.
M. Leon Benoit: Je vous remercie.
Le capt Andy Cook: Merci.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Richard Abram.
M. Richard Abram (témoignage à titre personnel): Bonsoir, mesdames et messieurs. J'imagine que je suis un candidat de choix pour vous parce qu'il me reste 16 jours à tirer dans les Forces armées du Canada. En effet, j'ai accepté une démobilisation volontaire.
Pour faire un petit retour en arrière, certaines personnes vous ont parlé de ce qu'on appelle la progression professionnelle latérale. Cela a été démoli. Je n'ai pas toutes les données à ce sujet, mais je pense que c'était une consigne du Conseil du Trésor.
J'ai donc accepté une démobilisation volontaire. Vous parlez d'incitatifs dans le cas des pilotes, et je pense que c'est formidable que les pilotes puissent obtenir des incitatifs lorsqu'ils s'engagent, mais il n'empêche que le travail des forces armées ne s'arrête pas là.
À l'heure actuelle dans le secteur privé—et je ne peux vous parler que de ma propre expérience—tout le monde, depuis les PDG jusqu'aux simples employés, a droit à des primes au rendement. Ma petite amie va recevoir au mois d'avril une prime au rendement de 2 000 $ parce qu'elle a atteint ses objectifs de travail. Les forces armées donnent également des primes au rendement aux plus hauts gradés. Je trouve que cela...
M. Leon Benoit: Je ne pense pas qu'il s'agisse de prime au rendement. Ce genre de prime est donnée à tout le monde.
M. Richard Abram: Pour ce qui est des 4 000 $, admettons, ou alors...
M. Leon Benoit: Le montant varie. Il y a des primes beaucoup plus élevées.
M. Richard Abram: Vous avez raison.
M. Leon Benoit: Certains les appellent des primes au rendement mais le ministère dit que ce n'est pas le cas et que ces primes sont versées à tout le monde. Vous nous dites donc...
M. Richard Abram: Tout le monde, cela veut-il dire juste les officiers ou également les sous-officiers et la troupe? Moi je suis sous-officier.
M. Leon Benoit: Je veux parler de tous ceux qui sont dans la bonne catégorie, c'est-à-dire la catégorie supérieure...
M. Richard Abram: J'ai compris que les hauts gradés sortent une directive et touchent une prime, mais en réalité, il faut aussi penser au commun dénominateur. Je ne peux pas parler au nom de tout le monde, je ne connais que mon propre cas, mais à mon avis, il faut également penser aux petits, à ceux qui sont au bas de l'échelle. Il y a le bonhomme tout en haut de l'échelle qui pond les directives, mais il y a aussi le type tout au bas de l'échelle qui fait tout le boulot. C'est grâce à lui que le boulot se fait. Sans lui, il n'y a rien. Absolument rien.
J'ai entendu dire que beaucoup de gens étaient démoralisés. Vous avez vous-même parlé d'un problème de moral. Le problème de moral est grave. Ce n'est pas simplement une question de solde. C'est plutôt une question de progression de carrière. Moi je suis dans les forces armées depuis 15 ans. J'ai accepté une démobilisation volontaire parce qu'il n'y a rien de tel que la vie civile. Je vais reprendre mes études et obtenir un diplôme. Quand j'aurai mon diplôme, je gagnerai davantage dans le civil. J'aurai plus d'argent. Ce n'est pas plus difficile que cela. Je pourrai faire des heures supplémentaires et je toucherai des primes.
Dans les forces armées, on ne peut pas me payer suffisamment en me donnant des promotions. Il y a tout un tas de types qui sont là et qui disent «il me reste sept ans à tirer avant la pension». Oui, il y a tout un tas de types qui disent cela parce qu'ils n'obtiennent pas de promotion. Ce n'est plus une carrière. Lorsque je suis entré dans l'armée en 1983, je pensais que je commençais une carrière. J'allais être promu. J'allais m'élever dans la hiérarchie et peut-être allais-je pouvoir prendre ma retraite avec le grade d'adjudant-chef. Qui sait? Mais de toutes manières, j'allais pouvoir obtenir des promotions. Mais cela a cessé d'être une carrière, c'est devenu un simple boulot où il n'y a ni promotions, ni augmentations de solde.
Je vais au boulot le matin. Je fais mon boulot. Ne vous méprenez pas, j'aime bien faire mon boulot. J'aime toujours ce que je fais, mais je veux avancer. Je veux monter dans l'échelle professionnelle. C'est cela que je veux. Je ne veux pas être coincé pendant 20 ans avec le grade de caporal. Je serai franc avec vous, j'en suis presque gêné. Je suis fier de ce que je fais, mais je ne veux pas devoir dire un jour, oui, j'ai pris ma retraite à 20 ans au grade de caporal. Si vous dites cela, les gens vous regardent et vous disent, ciel, qu'est-ce que vous avez fait de votre vie? J'ai fait ceci, j'ai fait cela et, ne vous en déplaise, j'ai voyagé dans le monde entier. Cela, c'est une récompense. J'ai aussi beaucoup appris. J'ai vu beaucoup de choses, mais il arrive un moment où cela suffit. Il y a des gens qui se contentent de rester caporal toute leur vie, qui n'ont pas suffisamment d'initiative pour vouloir avancer. Mais il y a aussi des gens comme moi qui veulent grimper l'échelle et accéder aux échelons supérieurs de la hiérarchie.
Je vais donc reprendre mes études. Je vais m'inscrire en informatique à l'Université d'Ottawa et obtenir un diplôme en génie. Pour être franc avec vous, si je ne l'ai pas fait dans les forces armées, c'est parce que je veux pas rester dans les rangs. Je ne veux pas payer le prix qu'on me réclame. Cela n'est pas suffisamment intéressant. Ce ne serait plus moi. La vie civile offre mieux. C'est une vie meilleure et voilà tout. Et c'est d'ailleurs ce que beaucoup de types recherchent.
Il y a les curriculum vitae. Les types avec qui je travaille, il y en a des centaines, n'arrêtent pas d'en envoyer un peu partout. Pourquoi? Parce que la vie est meilleure dans le civil. Il y a énormément de types qui retournent à l'école, qui suivent des cours du soir et qui améliorent leur scolarité, qui suivent des cours par correspondance et ainsi de suite. Pourquoi? Pour se perfectionner, parce que lorsqu'ils sortiront de l'armée, ils n'auront pas une grosse pension et ce qu'ils auront appris dans les forces ne leur donnera pas grand-chose.
Je remercie quand même l'armée. Je la remercie beaucoup parce qu'elle m'a beaucoup appris. C'est l'armée qui m'a ouvert les yeux et qui m'a permis de voir à quoi j'étais vraiment bon. Moi je suis bon en électronique. Je suis un as. J'adore cela. C'est amusant. C'est pour cela que dans 16 jours, je m'en vais.
Le président: Avez-vous fini, M. Abram?
M. Richard Abram: Oui, je vous remercie.
Le président: Parfait, M. Benoit.
M. Leon Benoit: Je voudrais vous poser une seule question. Vous nous avez dit que vous ne vouliez pas rester avec le grade de caporal. Et s'il y avait des catégories? Vous, vous êtes dans l'électronique.
M. Richard Abram: Je suis technicien en aéronautique.
M. Leon Benoit: Même en restant caporal, si vous pouviez grimper l'échelle en étant reconnu comme spécialiste et en continuant à vous spécialiser dans votre catégorie, avec des augmentations de traitement correspondantes, cela vous conviendrait?
M. Richard Abram: Plus maintenant, parce que j'ai déjà mis des choses en route.
M. Leon Benoit: Mais si vous n'aviez pas encore pris votre décision de quitter l'armée?
M. Richard Abram: Si je n'avais pas encore pris ma décision, je n'aurais pas d'objection à ce que l'armée institue un régime de progression professionnelle latérale. D'ailleurs, c'est ce qui a déjà été... Les corps de métier ont été combinés. Actuellement, je suis un peu un homme à tout faire, sauf si je passais à l'avionique. Pour le moment, je travaille sur le système d'armement, le système de sécurité, le système électrique des instruments de bord, les moteurs d'avion et les cellules. Je suis donc qualifié pour ces cinq spécialités.
• 2005
Je ne vais pas vous parler de la solde. On en a déjà parlé des
centaines de fois, non? Je ne vais même pas prendre la peine de le
faire. Mais il n'empêche qu'il faut un genre de récompense.
L'armée est également en train d'implanter de nouvelles politiques pour la certification des appareils. Jusqu'à présent, il fallait une signature dans la première colonne, une signature dans la deuxième colonne et dans certains cas aussi un troisième avis indépendant. Actuellement, si vous avez les qualifications à un certain niveau, vous rayez la première colonne et vous signez simplement dans la deuxième. C'est une grosse responsabilité, certifier la navigabilité d'un appareil, le déclarer bon pour le service.
À mon avis, la personne qui signe dans la deuxième colonne ne donne pas vraiment un certificat de navigabilité, mais elle reste responsable du travail qui a été effectué. Elle certifie que le travail qui a été fait l'a été selon le bon de commande technique et que l'appareil peut voler, qu'il est bon pour le service. C'est une grosse responsabilité. Mais où est la paye? Où est le supplément de paye pour cette nouvelle responsabilité?
De plus en plus, nous avons des techniciens civils. Il faut les surveiller de plus près. Il y a des techniciens en aéronautique civils qui travaillent sur nos avions, et les gens de chez nous qui sont qualifiés pour la deuxième colonne doivent les superviser. Ils doivent les surveiller. C'est eux qui vont devoir certifier le travail. C'est tout un surcroît énorme de responsabilité.
En d'autres termes, quelqu'un qui a cinq fonctions appartient maintenant à un seul corps de métier, il peut se dispenser de la première colonne et signer dans la deuxième. Il peut toujours, s'il le souhaite, faire signer dans la première colonne, mais il peut également passer immédiatement à la deuxième. La personne qui signe dans la deuxième colonne est celle qui assume toute la responsabilité. Comment la récompense-t-on pour ce travail, pour toute cette connaissance?
Il y a beaucoup de gens qui trouvent que les échelons supérieurs... À partir du niveau mettons de sous-officier, d'adjudant-maître, d'adjudant-chef et ainsi de suite. L'échelon supérieur stagne. Je n'ai rien contre qui que ce soit, mais ces gens bloquent toutes les promotions, et c'est là l'un des problèmes que cela cause.
Mon poste ici à Trenton est un poste de technicien en aéronautique, et mon numéro RAPGER n'existe plus. Il a disparu. Mon poste a complètement disparu des forces armées. Personne ne va me remplacer. Cela veut dire davantage de responsabilité et davantage de travail pour les autres techniciens.
M. Leon Benoit: Merci Richard.
M. Richard Abram: De rien.
Le président: Merci beaucoup.
Le caporal Mark Quade.
Le cpl Mark Quade (témoignage à titre personnel): Bonjour mesdames et messieurs. Je suis venu vous parler d'un problème fondamental au sein des forces armées, celui du leadership.
Pour utiliser un mot à la mode dans les années quatre-vingt dix, nous parlons de gestionnaires. Le ministère n'a pas besoin de gestionnaires; nous avons besoin de chefs. Ête gestionnaires et être payés de la même façon que dans la Fonction publique serait une bonne solution si nous avions de bons gestionnaires. Le ministère ne serait pas dans une telle mouise si nous avions de bons gestionnaires. Un bon exemple en est la série 500 des corps de métiers où on trouve un décalage de près de 10 ans entre les soldats et les caporaux.
L'autre question dont je voudrais vous parler est celle des pilotes et de cette catégorie de la rémunération par incitatif. Dans les autres programmes de formation des officiers, il est obligatoire de donner autant d'années de service qu'on a eu d'années d'étude subventionnées à l'université. Cela veut dire qu'après un cours universitaire de cinq ans, les officiers sont obligés de rester dans l'armée pendant cinq au moins après avoir suivi leur formation. Si la formation d'un pilote coûte un million de dollars, pourquoi ne pas chiffrer à 20 000 $ chaque année de service obligatoire et imposer 20 ans de service sous peine de pénalité financière en cas de départ anticipé?
Voilà tout.
Le président: je vous remercie.
Monsieur Wood avez-vous des questions?
M. Bob Wood: Oui.
Mark, lorsque je parlais à d'autres personnes au début de la journée, quelqu'un m'a donné cette enveloppe brune où était inscrite toute une liste de choses; leadership, déploiement, autres formes de prestations de service et fusion de corps de métier. Vous avez parlé du leadership et il y a sur cette enveloppe quelques mots sur lesquels je voudrais que vous me donniez un peu plus d'explication.
• 2010
La personne qui m'a remis l'enveloppe dit—j'imagine que c'est
lui qui a écrit cela—«le leadership par l'exemple n'existe plus,
il n'y a plus que du leadership par consensus.» Il me dit qu'à
partir du niveau du technicien d'atelier, à tous les échelons
suivants de la hiérarchie, ou ne croit plus beaucoup au leadership.
Que veux-tu dire par là? Pourriez-vous me l'expliquer?
Le cpl Mark Quade: Je n'ai aucune idée de ce que cette personne a écrit là. À mon avis... vous savez, il y a eu ici une réunion au cours de laquelle des officiers supérieurs nous ont dit: «le moral, ce n'est pas mon problème». Ils sont là pour nous motiver. Si nous ne sommes pas motivés, comment pouvons-nous motiver les gens qui sont sous nos ordres? Si ces officiers ne sont pas que des leaders pour la forme, des personnalités dirons-nous, pourquoi ne pas simplement engager un consultant pour faire cela pour nous?
Le leadership n'est pas quelque chose qu'on peut enseigner. Nous avons tous en nous cette qualité à un degré plus ou moins élevé.
M. Bob Wood: De toute évidence donc il nous dit ici que les leaders ont peur de prendre position. C'est bien cela? Il nous dit que le leadership se fait par consensus. Est-ce qu'ils vont voir quelqu'un pour lui demander: «qu'est-ce que vous pensez de cette idée?», puis quelqu'un d'autre en posant la même question? Est-ce que c'est cela qu'il veut dire? Et veut-il dire que la décision est prise de cette façon au lieu d'avoir quelqu'un qui dit: «Écoutez, voilà comment je vois les choses, c'est la position que je vais prendre et voilà comment nous allons procéder»? Est-ce ainsi que les choses se passent?
Le cpl Mark Quade: À mon avis, est c'est une opinion purement personnelle, je pense qu'à l'heure actuelle l'objectif c'est de faire carrière à tout prix. La question est plutôt: «qu'est-ce que je peux faire?»; il s'agit de conforter les éternels acquiesceurs du QG en leur disant: «bien sûr, nous pouvons faire ceci, nous pouvons faire cela et tout le reste.» Mais de cette façon, on marche sur les pieds de beaucoup de gens.
Je suis entré dans l'armée il y a 15 ans. À l'époque, la sécurité était l'une des choses qu'on vous enseignait sans arrêt: «si vous travaillez de cette façon en pensant à la sécurité avant tout, vous penserez toujours à la sécurité avant tout.» Mais maintenant, on met cela de côté parce que la sécurité coûte de l'argent.
Un excellent exemple de cela serait celui de l'Arrow. Ils ont deux personnes qui sont tombées de l'aéronef, du moins à ma connaissance, et au moins une personne s'est brisé le dos. Oui, ils ont acheté des plate-formes d'aéronef, mais voilà maintenant 35 ans que nous travaillons sur un Hercule et ce n'est que maintenant qu'ils achètent ces plate-formes. Elles ne sont même pas encore sur la base. D'après ce que j'ai entendu dire—et ce ne sont que des rumeurs et j'espère que tout cela sera tiré au clair sous peu—l'achat des plate-formes aurait été retardé. Pourtant, il y a toujours des techniciens qui se déplacent autour de l'aéronef, et il y a une limite à la façon dont on peut travailler sans danger, sans compromettre son rendement.
M. Bob Wood: Ils ont donc reporté à plus tard l'achat des plate-formes de sécurité?
Cpl Mark Quade: Nous aurions dû les recevoir il y a des années.
M. Bob Wood: Oui.
Cpl Mark Quade: C'est toujours une question d'argent. Le problème...
M. Bob Wood: Comment peuvent-ils s'en tirer à si bon compte?
Des voix: Oh, oh!
M. Bob Wood: Non. Si vous allez dans un...
Cpl Mark Quade: J'arrive en seconde place pour ce qui est des qualifications dans mon domaine ici et je suis tout en bas de la liste, tandis que les échelons supérieurs sont là-haut. Donc disons que mes opinions et les notes de service que je rédige ne vont pas très loin. Vous êtes notre espoir. J'espère qu'après votre visite à la base vous resterez en place pendant très longtemps.
M. Bob Wood: Mais pour revenir à la question de sécurité, si on va dans un autre atelier d'entretien d'aéronefs, qui n'appartient pas aux forces armées, je suppose que l'on trouve ces plate-formes; la loi les oblige à les avoir. Je vais vous donner un exemple. Je suis de North Bay. Nous avons perdu tous nos aéronefs et de toute évidence les forces aériennes ne font plus de vols là-bas, mais nous avons pu utiliser les hangars. Nous avons maintenant Voyageur Airways qui utilise un de ces hangars. Ils font la révision et le réoutillage d'appareils Dash 7 et de certains des nouveaux aéronefs. Ils doivent donc acheter ce type d'équipement, car ils marchent sur les ailes, ils font beaucoup de travail de révision et de réoutillage des aéronefs.
Alors pourquoi ce retard? Je ne comprends pas pourquoi ces gens tardent à acheter cet équipement. C'est une question de sécurité. C'est le lieu de travail.
Cpl Mark Quade: C'est parce que nous ne tenons pas le gros bout du bâton, je suppose. Nous travaillons tout simplement pour ceux qui tiennent le gros bout du bâton.
M. Bob Wood: C'est bien dommage. Merci, cependant. Merci beaucoup.
Le président: Merci beaucoup.
Caporal Heather McRitchie.
Cpl Heather McRitchie (témoignage à titre personnel): Bonsoir, mesdames et messieurs. Je vous remercie beaucoup d'être venus pour essayer de comprendre un peu ce qui se passe ici.
Tout à l'heure vous avez parlé d'accorder des primes à certains corps de métier. Les primes devraient être données à tous les corps de métier. Nous avons subi des compressions, nous avons été réduits au minimum, nous en sommes arrivés à une microgestion du moindre petit détail. Voilà pourquoi le moral est si bas.
• 2015
Nous constatons que des primes sont accordées aux échelons
supérieurs. Ce n'est pas seulement le cas au ministère de la
Défense; on a accordé des primes aux échelons supérieurs de tous
les organismes gouvernementaux. Cela a été comme un coup de pied à
la tête. Si nous pouvions nous aussi avoir un petit morceau du
gâteau, ce serait bien. Votre idée, monsieur, dont vous avez parlé
avec l'adjudant tout à l'heure, qu'est-ce que c'était encore une
fois?
M. Bob Wood: J'ai rédigé quelques notes lorsqu'il parlait au sujet de la prime de rendement. Est-ce cela que vous voulez dire?
Cpl Heather McRitchie: Oui, une prime de rendement.
M. Bob Wood: Nous nous sommes mis à parler des caporaux, mais cela pourrait s'appliquer à n'importe qui. Lorsque j'ai dit cela, je voulais parler de tous les grades. Mais il parlait des caporaux dans son exemple. Je lui ai demandé ce que nous pourrions faire ou examiner pour faire en sorte que les gens reçoivent plus d'argent afin qu'ils se rendent compte que nous apprécions ce qu'ils font—comment nous pourrions nous y prendre. Il a suggéré, et c'était son idée, que nous ayons...
Il y a quatre niveaux de rémunération-rendement pour un caporal. Lorsqu'ils atteignent le quatrième niveau, il n'y a plus de promotion. S'ils deviennent caporal-chef, ils peuvent gagner 100 $ de plus par mois—je crois que c'était cela, ou par paye—et ils sont toujours bloqués à ces quatre niveaux. Ce qu'il a suggéré—et je pense que c'était une assez bonne idée—c'est qu'il devrait y avoir un examen selon le domaine dans lequel vous travaillez—que vous soyez monteur ou autre—je suppose que ce que le témoin disait, c'est qu'ils correspondaient tous maintenant à un...
Cpl Heather McRitchie: Nous sommes tous dans un même groupe.
M. Bob Wood: Il proposait qu'après un an dans un poste, une personne fasse un examen relatif à son corps de métier. Si la personne obtenait une note de 85 ou 90 p. 100—elle pourrait alors recevoir une prime de rendement de tel montant.
Cpl Heather McRitchie: Pourquoi faudrait-il qu'il y ait un examen? Pourquoi ne pourrait-on pas recevoir une prime au mérite?
M. Bob Wood: Cela serait possible. C'était son idée.
Cpl Heather McRitchie: Bien des gens sont de bons techniciens mais si vous mettez un test devant eux, ils n'arrivent pas à écrire. Ils sont bloqués par la nervosité. Je suis l'une de ces personnes.
Pourquoi ne pas accorder une prime au mérite d'après leur RAP?
M. Bob Wood: Pourquoi pas?
Cpl Heather McRitchie: Éliminons les limites des RAP, les limites numériques, et prenons-les tels quels.
M. Bob Wood: Oui, mais des RAP préparés de façon honnête. Je pense que Bev Warden nous a raconté qu'une de ses amis avait eu une excellente idée qui avait sans doute permis d'économiser de l'argent et de faciliter les réparations des hélicoptères. Pourtant cela n'a pas été mentionné dans son...
Cpl Heather McRitchie: Comme je le disais, ils jouaient avec les chiffres, les limites. Il y en a tellement, un pourcentage au niveau C, un pourcentage au niveau B, il y a un certain pourcentage au niveau F, par exemple. J'ai commencé par la fin.
M. Bob Wood: Oui, ça va.
Cpl Heather McRitchie: Le nombre de personnes est limité. Finalement, cette année, ils ont éliminé cette limite et les gens pourront être évalués au mérite. Si une personne travaille pour obtenir la norme D, alors elle a la norme D. Si elle travaille pour la norme DE, alors elle a la norme DE. Il n'y a aucune limite à cet égard.
M. Bob Wood: Quelle est la norme la plus élevée?
Cpl Heather McRitchie: C'est la norme G.
M. Bob Wood: Oui, cela pourrait se faire de cette façon.
Cpl Heather McRitchie: C'est essentiellement tout ce que j'avais à dire.
M. Bob Wood: Merci.
Le président: Merci beaucoup.
Leon, avez-vous une question?
M. Leon Benoit: Caporal, l'une de vos premières observations était que les augmentations de salaire ou les primes qui ont été accordées aux échelons supérieurs ont été pour vous comme un coup de pied à la tête.
Cpl Heather McRitchie: Oui.
M. Leon Benoit: Je veux que vous m'expliquiez exactement ce que vous voulez dire.
Cpl Heather McRitchie: Eh bien, dans notre corps de métier, essentiellement—je ne peux vous donner que l'exemple du nôtre ou de celui des techniciens en aéronautique, des techniciens en avionique—nous devons maintenant apprendre cinq métiers. Nous avons suivi les cours, nous travaillons très fort pour apprendre tous les autres aspects des aéronefs, non seulement les composantes électriques des instruments. Nous étudions la cellule, le moteur d'avion, les systèmes de sécurité et—quel est cet autre métier?—l'armement.
Nous apprenons tout cela, et nous travaillons très fort pour apprendre par la suite que tel général a reçu une prime de 4 000 $. Qu'avons-nous reçu depuis sept ans? Rien, si ce n'est un surcroît de travail et de responsabilités. Cela donc a été pour nous comme un coup de pied à la tête, monsieur.
M. Leon Benoit: On m'a expliqué que les grades supérieurs méritaient vraiment ces augmentations, pour qu'ils aient un salaire comparable à celui qu'ils pourraient obtenir dans le secteur privé s'ils dirigeaient une société ou ce genre de choses. Que répondez-vous à cela?
Cpl Heather McRitchie: Eh bien oui, ils méritent peut-être de recevoir ces primes, mais tout le monde le mérite également. Il s'agit tout simplement de partager la richesse. Pourquoi donner une prime à une seule personne alors qu'on aurait plutôt fallu la partager et accorder une prime de 500 $ à tout le monde cette année?
M. Leon Benoit: Vous avez dit que le fait qu'ils reçoivent ces augmentations alors que vous n'en receviez pas malgré le fait que vous appreniez tous ces nouveaux domaines de spécialité était pour vous comme un coup de pied à la tête.
Qu'est-ce que vous ou les gens avec qui travaillez penseraient si les hommes et les femmes des échelons supérieurs disaient: «Non, nous n'allons pas accepter cette augmentation ou cette prime, non pas parce que nous ne la méritons pas, parce que nous pensons que nous la méritons, mais parce que si les hommes et les femmes que nous dirigeons n'en obtiennent pas, alors nous n'allons pas l'accepter»?
Cpl Heather McRitchie: J'appuierais à 120 p. 100 l'homme qui dirait une telle chose. J'aurais beaucoup de respect pour quelqu'un qui serait prêt à dire quelque chose comme cela, qui dirait: «Non, si mes employés ne l'obtiennent pas, alors je n'en veux pas.» Cela serait très logique pour moi.
C'est plutôt de cette façon que le commandement devrait fonctionner. C'est l'ancienne école de commandement: occupez-vous de mes hommes d'abord avant de vous occuper de moi.
M. Leon Benoit: À votre avis, on a perdu cette mentalité dans les Forces à l'heure actuelle?
Cpl Heather McRitchie: Essentiellement, oui, monsieur. Il ne fait aucun doute dans mon esprit que l'attitude est de s'occuper de soi-même avant de s'occuper de ses hommes.
Comprenez-moi bien: je ne dis pas que cette attitude est généralisée à 100 p. 100, mais c'est en général ce que tout le monde croit.
M. Leon Benoit: J'essaie tout simplement d'obtenir votre impression générale. Je comprends cela.
Très bien, merci.
Cpl Heather McRitchie: Très bien. Avez-vous d'autres questions?
Le président: Merci beaucoup.
Elaine Black.
Mme Elaine Black (témoignage à titre personnel): Bonjour, et merci de nous donner l'occasion de venir nous parler.
J'ai deux choses à dire. La première concerne l'aumônerie dans les forces militaires canadiennes. Nous avons rationalisé notre aumônerie comme nous avons restructuré partout ailleurs ces dernières années dans les forces militaires. En tant que conjointe d'un militaire, j'estime que notre aumônerie est extrêmement importante pour la communauté militaire.
Il faut comprendre que nous sommes quelque peu différents en ce sens que nous sommes constamment en transit et que c'est bien d'avoir nos propres chapelles sur nos bases, de pouvoir faire nos dévotions dans la communauté militaire. Je vous encourage donc à faire votre possible pour que l'aumônerie ne se détériore pas davantage.
• 2025
La deuxième chose que je voulais dire est la suivante: en tant
que femme d'un militaire du rang (supérieur), lorsque j'ai épousé
un militaire il y a 22 ans, je peux vous dire honnêtement que je
n'avais guère d'estime pour les forces armées. J'ai encouragé mon
mari à quitter l'armée à plusieurs reprises.
Au fil des ans cependant, j'en suis arrivée à un point où je respecte vraiment les militaires et le travail qu'ils font partout au Canada. Je suis très fière de dire que mon mari est membre des Forces canadiennes.
Une chose que je n'ai jamais réussi à comprendre au cours de ces 22 années, c'est la distinction qu'on fait entre les officiers et les militaires du rang. Je ne la comprends toujours pas.
Ce soir, un monsieur a fait remarquer qu'à son avis les officiers ne devraient pas prendre leur repas à l'établissement Yukon Galley. Par ailleurs, au sujet des logements familiaux, il a dit qu'on devrait peut-être faire une distinction entre les officiers et les militaires du rang.
Après 22 ans, j'ai toujours du mal à comprendre cette distinction. On m'a dit à plusieurs reprises que je ne comprenais pas la situation. C'est bien possible, mais je crois que l'on peut continuer à respecter quelqu'un même si on mange ou vit à côté de lui. On peut quand même respecter tout à fait sa position et son grade.
Depuis deux ou trois ans mon mari a eu beaucoup de difficulté à accepter ce qui arrive à ces hommes. J'espère qu'il vous en a lui-même parlé aujourd'hui ou hier et qu'il vous a dit qu'il trouvait très difficile de voir jusqu'à quel point le moral des militaires du rang était bas. Nous avons passé de nombreuses soirées aux prises avec ce problème.
Cela ne veut pas dire que les gens qui travaillent pour lui dans son escadron ne sont pas encouragés, félicités et applaudis, car je crois qu'ils le sont. Ils travaillent pour un excellent commandant.
Mais le problème va au-delà du fait qu'il n'y ait pas d'augmentation de salaire ou de promotions. Cela va au-delà de cela également. C'est également une question de publicité qui est faite autour de ces hommes. Mon mari pourrait vous dire que sans doute 98 p. 100 d'entre eux sont d'excellents techniciens, pourtant ils n'ont pas l'impression d'être appréciés, pas nécessairement de la part de leurs patrons, mais par le ministère de la Défense nationale et le reste du pays.
Je pense que nous pouvons faire quelque chose à ce sujet. Nous savons que les médias ces dernières années ont dénigré les militaires, mais je pense que nous pouvons compenser en faisant beaucoup de publicité au sujet des bonnes choses que nos techniciens font dans chacun de leur métier respectif ou de leur escadron. Je pense qu'il y a certaines choses que nous pouvons faire pour aider ces gens à se sentir vraiment appréciés par les Canadiens pour le travail qu'ils font.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Wood.
M. Bob Wood: Elaine, j'ai entendu parler de vous aujourd'hui, alors c'est pour moi un plaisir de vous rencontrer. En fait, j'ai eu l'occasion de parler à votre mari. Il a exprimé les mêmes préoccupations que vous, mais il m'a également parlé de vous. Apparemment, vous faites beaucoup de bénévolat, et vous étiez justement à North Bay le week-end dernier, n'est-ce pas?
Mme Elaine Black: Oui, je vous ai entendu dire que vous étiez de North Bay. C'est un endroit magnifique.
M. Bob Wood: Vous étiez là pour prononcer quelques allocutions, les allocutions édifiantes, ou pour aider. Pouvez-vous nous parler du bénévolat que vous faites dans la province? J'avais l'impression que vous vous déplaciez de temps en temps pour prononcer des allocutions. Est-ce exact?
Mme Elaine Black: «Prononcer des allocutions»?
M. Bob Wood: C'est ce qu'a dit votre mari.
Mme Elaine Black: Il me vantait, n'est-ce pas?
M. Bob Wood: Oui, et c'est très bien.
Mme Elaine Black: Je suis membre de la Catholic Women's League of Canada qui, il y a 35 ans, a développé au sein des forces armées la onzième province de l'organisation nationale. Dans cette province, je siège à titre de première vice-présidente du Conseil de l'ordinariat militaire. Dans nos bases, nous avons des ligues et des conseils partout au pays, et j'ai fait un peu de formation pour les dames.
M. Bob Wood: La plupart des chapelles sont maintenant des chapelles oecuméniques, je suppose, et bon nombre d'églises ont été démolies. J'en connais une à North Bay qui a été démolie, ce qui était bien dommage. Je sais qu'il y a maintenant une nouvelle chapelle oecuménique. Comment fonctionne-t-elle?
Mme Elaine Black: On parle de chapelle «combinée», car elle réunit sous un même toit deux religions, mais nous ne sommes pas oecuméniques en ce sens que nos services ne seront pas oecuméniques. Il y aura un service catholique et un service protestant. Ce n'est pas le même service pour toutes les religions.
Nous ne sommes pas encore installés dans cette chapelle. Nous avons un petit problème de fuite, ce qui fait qu'il faudra encore sans doute deux ou trois semaines avant que nous puissions nous y installer.
M. Bob Wood: Les aumôniers qui sont ici sont-ils à contrat? Je sais qu'ils le sont à North Bay. Bon nombre d'entre eux sont sortis des forces aériennes ou des forces armées et travaillent maintenant à contrat. Est-ce la même chose ici?
Mme Elaine Black: À ma connaissance, nous avons deux aumôniers à plein temps pour les catholiques et un conseiller en pastorale. Je crois qu'ils ne sont pas à contrat, mais qu'ils sont des membres réguliers des forces armées, oui.
Naturellement, nous avons une grande base ici.
M. Bob Wood: Très bien. Merci.
Le président: Monsieur Benoit.
M. Leon Benoit: Elaine, vous avez dit qu'à votre avis les hommes et les femmes membres des forces armées n'étaient pas appréciés ni par leurs concitoyens ni par le ministère de la Défense nationale. Pourquoi pensez-vous que ce soit le cas? Parce qu'il n'en a pas toujours été ainsi.
Mme Elaine Black: Je ne sais pas exactement pourquoi. Je ne veux pas juger quelque chose que je ne connais pas vraiment, mais je n'aime pas entendre des commentaires, que j'entends ici et là, lorsqu'on dit qu'il est en quelque sorte dégradant d'être militaire de rang plutôt qu'officier.
Je suppose que les civils... vous savez, nous ne vivons pas dans ce genre de monde. Nous ne vivons dans des villes où, mettons un directeur peut être le voisin d'un enseignant, où ils peuvent manger au même endroit, jouer au squash ensemble.
Nous ne sommes donc pas habitués à ce genre de cloisonnement. Je ne sais pas si je m'y habituerai un jour. Je n'aime pas entendre des commentaires qui donnent l'impression qu'un groupe est mieux que l'autre. Nous avons tout simplement un travail différent à faire.
M. Leon Benoit: Pour revenir à la question, à votre avis pourquoi est-ce que les forces militaires ne sont pas perçues de façon positive par le pays, par les citoyens du Canada, par la population en général?
Mme Elaine Black: Nous avons eu beaucoup de mauvaise presse au ces dernières années. Encore une fois, je pense que c'est une question d'éducation. Lorsque les gens sont au courant du bon travail que font les militaires, lorsqu'ils savent cela, lorsqu'ils ont un lien avec les militaires pour une raison ou pour une autre, ils comprennent vraiment ce qu'ils font. Cependant, un fort pourcentage des gens ne sont pas éduqués à cet effet, de telle sorte qu'ils croient ce qu'ils entendent dans les médias. Naturellement, vous savez que les médias n'ont pas été très favorables, récemment, même s'ils ont été assez positifs à l'égard des projets à la suite de la tempête de verglas et des inondations à Winnipeg. L'affaire de la Somalie et tout ce dont je vous ai parlé ont laissé une bien mauvaise impression.
M. Leon Benoit: À votre avis, est-ce que cela aurait un impact important si notre premier ministre déclarait publiquement que le Canada a besoin de forces militaires fortes, que l'avenir même de la souveraineté de notre pays en dépend et que les hommes et les femmes membres de nos forces armées font du bon travail? Quel genre d'impact est-ce que cela pourrait avoir à votre avis sur les membres des forces canadiennes?
Aux États-Unis, le président déclare régulièrement que l'avenir de l'Amérique dépend de forces armées fortes. Chaque fois que les forces armées américaines se trouvent quelque part dans le monde pour s'occuper d'un problème, le président déclare: «Les hommes et les femmes membres de nos forces armées sont parmi les meilleurs au monde et ils sont là à risquer leurs vies pour nous tous.»
Au Canada cependant, à ma connaissance, depuis 30 ans jamais un premier ministre a-t-il déclaré une telle chose. Honnêtement, je ne peux pas me rappeler une occasion où un premier ministre du Canada aurait fait cela.
Mme Elaine Black: Je parle de tout le travail de relations publiques, à partir de notre premier ministre en descendant. Bien des choses pourraient faire une différence sur le plan des relations publiques, à commencer par lui et par le ministre de la Défense nationale.
J'ai assisté à une merveilleuse cérémonie l'an dernier à la résidence du gouverneur général où ce dernier a parlé des militaires de façon si positive que l'on ne pouvait s'empêcher de repartir avec un sentiment de fierté d'être militaire ou conjointe d'un militaire. Vous avez raison, nous avons vraiment besoin de ce genre de choses, mais pas une déclaration isolée. Nous avons besoin que l'on vante continuellement les militaires parce que nous faisons de grandes choses.
M. Leon Benoit: Une dernière petite observation.
Vous avez dit qu'au début vous encouragiez votre mari à quitter l'armée. Vous ne vouliez pas qu'il en fasse partie. Vous n'aviez pas une image positive de l'armée. Cependant, à mesure que vous avez appris ce qu'il faisait et à connaître les membres des forces armées, vous l'avez beaucoup soutenu, et vous êtes maintenant très fière de dire que votre mari est membre des Forces armées canadiennes.
Je voulais tout simplement dire qu'au cours des cinq dernières années et au cours des derniers mois, après être allé d'une base à l'autre et après avoir écouté des gens comme vous lors de séances comme celles-ci—et il y en a eu un assez grand nombre jusqu'à présent—je suis vraiment fier du travail qu'accomplissent les hommes et les femmes des forces armées. Si davantage de gens pouvaient en fait savoir quel genre de personnes—j'ai eu un immense plaisir à rencontrer des gens, à vous rencontrer et à rencontrer d'autres membres des forces armées—que nous avons dans les forces armées et jusqu'à quel point ils sont professionnels, pour ce qui est de s'acquitter de leurs tâches... Je ne pense pas que les Canadiens ont la moindre idée de ce qui se passe dans les Forces armées canadiennes.
Mme Elaine Black: Je suis d'accord avec vous, et c'est pourquoi je dis qu'il est extrêmement important d'éduquer les gens. Merci beaucoup.
M. Leon Benoit: Merci beaucoup.
Le président: Merci.
Monsieur Price.
M. David Price: On a déjà répondu à plusieurs de mes questions, car j'allais poser les mêmes questions que M. Wood.
• 2040
Dès le début j'ai constaté que vous faisiez beaucoup de
travail pour l'église. Vous venez de construire une nouvelle
chapelle ici. Est-ce en raison d'une demande plus importante?
Est-ce que la participation a augmenté à votre avis? Y a-t-il
davantage de groupes à l'heure actuelle? Depuis que vous êtes dans
les forces armées, avez-vous constaté une augmentation à cet égard?
Mme Elaine Black: Je pense que la raison pour laquelle on a construit une nouvelle chapelle, c'est que notre aumônerie a été combinée. L'aumônier de notre commandement est maintenant un protestant, et il est au-dessus de tous les aumôniers, protestants et catholiques, et l'an prochain il y aura un changement, c'est-à-dire que pour les deux prochaines années l'aumônier du commandement sera un catholique. Il y a donc eu combinaison des deux religions, de telle sorte que c'est ainsi qu'on a décidé de les réunir sous un même toit.
Naturellement, il y a également le fait que l'une de nos chapelles en particulier était en train de tomber en ruine et qu'il fallait faire quelque chose. Plutôt que de construire deux nouvelles chapelles, nous en avons construit une seule.
Je trouve très intéressante la possibilité de nous retrouver sous un même toit—non pas de partager le même service, mais d'être sous un même toit—car je pense que nous allons tous dans la même direction. J'espère que nous y arriverons tous ensemble.
Vous m'avez demandé si j'avais constaté une plus grande participation?
M. David Price: Oui, dans les groupes, par exemple, ou est-ce qu'à votre avis les groupes deviennent plus oecuméniques, il y a combinaison des groupes?
Mme Elaine Black: Eh bien, comme vous le savez, nous ne sommes pas encore sous un même toit, mais nous allons nous regrouper pour de nombreuses activités. Nous avons déjà commencé à le faire. Tout ce qui n'est pas encore établi... Par exemple, la Catholic Women's League et la Women's Guild ne vont sans doute pas changer, mais nous nous regrouperons, je l'espère, pour de nombreuses fonctions sociales, pour de nombreuses fonctions de dévotion...
M. David Price: Vous êtes donc enthousiaste face à un tel regroupement comme celui-ci?
Mme Elaine Black: Oui, en effet je suis très enthousiaste.
M. David Price: Au cours des années que vous avez passées dans les forces armées, avez-vous constaté que l'intérêt et la participation avaient augmenté dans les groupes et dans l'église?
Mme Elaine Black: Mon mari et moi-même sommes parmi ceux qui ont eu la chance de ne pas être transférés trop souvent, si bien que depuis 22 ans, mon expérience se limite à Edmonton, Summerside et Trenton. L'Église catholique romaine a été très active dans les trois bases où j'ai vécu, et ici à Trenton, oui, nous avons une église très active et nos groupes sont très prospères. Je ne peux pas dire si cela serait...
M. David Price: Croyez-vous que les gens recherchent plus de soutien ou veulent participer?
Mme Elaine Black: Je crois qu'on a tous un besoin naturel... Je ne me lancerai pas dans une discussion sur la foi, mais on trouve certainement le soutien le groupe, surtout pour celles d'entre nous dont le conjoint a été déployé, par exemple. Les autres membres de l'église et les aumôniers sont une source de soutien, ce qui est extrêmement important.
M. David Price: Merci.
Le président: Merci beaucoup.
Denis Paquet.
[Français]
Capl Denis Paquet: J'aimerais faire quelques commentaires au sujet du malaise, sur le plan militaire, qu'on identifie actuellement. Premièrement, je crois que les personnes devraient être rattachées à une unité. Lorsque qu'une personne est rattachée à une unité, elle est fière de dire où elle travaille et ce qu'elle y fait. Quand il y a des diminutions de personnel continuelles, il ne faut pas se gêner et dire que le gouvernement y a lui aussi contribué. Il ne faut pas se gêner de le dire.
On nous a demandé de dire comment on faisait notre travail, d'établir exactement les étapes que nous suivions à ce moment-là. C'est ce que nous avons fait; nous avons fait rapport de tout cela, bien proprement, sur des feuilles. Nous avons tout remis à nos supérieurs et cela s'est rendu tout en haut. Tout à coup, le gouvernement a dit qu'il allait tout mêler ensemble, les AVN, les AVS, etc. Il a ensuite dit à nos supérieurs de faire des coupures.
• 2045
Pourquoi a-t-il coupé? Parce qu'on peut sauter des
étapes. On se retrouve alors avec un surplus de
personnel: des AVN, des AVS. Nous sommes environ 300
AVN. Autrement dit, c'est parce que nous
avons décrit nos tâches très exactement, toutes les
étapes que nous suivions dans les Forces armées canadiennes,
que nos postes sont abolis. Nous nous sommes tiré dans
le pied. Nous nous sommes nui nous-mêmes en acceptant
de faire un bon travail pour le compte du gouvernement.
C'est comme donner une feuille à quelqu'un, par exemple le F9000, et lui demander de décrire ses tâches, étape par étape. Il le fait et le lendemain, on dit au concierge que c'est lui qui va monter le moteur ou qui va travailler à cet avion. On lui dit qu'il n'y a pas de problème parce qu'il n'a qu'à suivre les indications sur la feuille. La feuille décrit toutes les étapes.
Il ne faut pas oublier que l'expérience s'acquiert, ne s'achète pas. Demain matin, on ne pourrait pas dire au ministre qu'il devient STS, ou bien secrétaire, ou bien concierge, ou qu'il va tout faire cela en même temps. C'est impossible. Cela prend du temps. Cela prend de l'expérience. Cela prend de l'analyse, beaucoup de patience et d'entraînement.
Pour avoir de l'entraînement, il ne faut pas se faire réduire le budget, parce qu'alors, plus rien ne marche. Il ne faut pas oublier qu'on fait aussi fonctionner une partie de la Fonction publique et que pour un militaire, trois civils travaillent pour nous. Il y a le CE, et tout le monde qui travaille à ce qui entoure le domaine militaire. Il ne faut pas se leurrer. C'est ainsi qu'à la longue, à force de faire des coupures, on en subit les conséquences.
Le deuxième point concerne les examens dont monsieur parlait. Si on atteint 85 p. 100... En autant que je suis concerné, en tant que technicien, lorsque l'avion est sorti sur la flight line et qu'il a été testé, on vient de réussir son examen si l'avion...
[Note de la rédaction: Inaudible]. C'est une grande réussite pour le technicien, qui a sa fierté. Je tiens à dire qu'en tant que Canadien, quand un avion sort et s'envole dans les airs, je suis fier. Il est allé faire sa mission et il n'y a eu aucun bris. Lorsqu'on veut le réparer, on envoie là-bas des gars du MRP. Ils sont fiers de se déplacer pour aller réparer notre avion et le ramener chez nous. On vient de réussir notre examen.
Lorsque le pilote est dans les airs et qu'il vole, autant sur un avion de combat que sur un hélicoptère, on se dit que c'est grâce à nous, les techniciens. Il y a peut-être des divergences entre les personnes. Il ne faut pas mettre tout le monde sur le même pied; les pilotes sont des pilotes et les gens de terre sont des gens de terre. Ce qu'il ne faut pas oublier, c'est qu'il y a un homme en travers de tout le monde. Le monsieur en haut a sa job à faire. Il la fait. S'il pète plus haut que le trou—excusez l'expression—, c'est parce que c'est son genre.
Mais il ne faut pas croire que tout le monde est comme cela. Mon colonel peut s'asseoir à table avec moi; je vais causer avec lui, mais je sais que c'est mon colonel, que c'est mon patron. Il faut être capable de dire de quelqu'un qu'il est son patron, son supérieur. Il faut être capable de l'admettre. C'est mon supérieur et ça finit là. Tout le monde ne peut être valet et roi en même temps. C'est chacun son tour. Il se dit toutes sortes de choses sur le sujet. C'est vrai. Si je suis un fermier qui va vendre sa vache à l'encan et que je suis bon vendeur, je vous jure que je vais en passer des vaches malades.
Le président: Merci.
[Traduction]
Lt Mark McCullins.
Lt Mark McCullins (témoignage à titre personnel): Bonsoir.
La discussion de ce soir a porté notamment sur le leadership au sein des forces armées, et j'aimerais vous retenir pendant quelques minutes pour vous faire part de mon expérience d'officier au sein des forces armées et pour vous donner deux exemples des problèmes que cela a causé dans ma propre vie.
La médaille du leadership a deux côtés: la responsabilité et le pouvoir. L'équilibre est précaire entre ces deux côtés, mais c'est ce vers quoi on tend. Manifestement, si on a de grands pouvoirs mais aucune responsabilité à assumer, on peut facilement abuser de ce pouvoir. Par contre, si on a de grandes responsabilités envers des gens ou des choses, mais que l'on n'a pas le pouvoir d'assumer ses responsabilités, la situation est loin d'être idéale.
Je vous en donne deux exemples, brièvement. Je suis pilote de l'escadron 435, à Winnipeg. J'ai reçu mon brevet de pilote il y a environ un an, mais j'ai dû attendre un an avant de pouvoir obtenir un poste sur un Hercule C-130. Essentiellement, pour les contribuables, je représente un investissement de 1,5 million de dollars en formation de vol, qui a été fait une année financière trop tôt.
• 2050
Mon supérieur est le chef-pilote—notez bien le terme «chef»—
du 435. Personne ne niera que le chef-pilote est responsable de mon
moral, de mon bien-être et de mon perfectionnement comme officier.
Toutefois, pendant cette année d'attente au cours de laquelle on
m'a fait suivre un cours de trois mois après un autre et où j'ai dû
reporter mon mariage deux fois, ce qui n'est pas idéal pour la vie
du couple et n'a pas donné à ma femme une très bonne impression de
l'armée, mon supérieur n'avait pas le pouvoir d'envisager d'autres
possibilités de formation ou d'affectation pour moi, ou de prendre
d'autres mesures.
Je vous donne un exemple où je suis dans la situation contraire; à ma quatrième année au Collège militaire royal, pendant ma formation d'officier, j'étais chef d'un escadron de cadets et, à ce titre, responsable d'un escadron de 120 élèves-officiers. J'étais responsable de leur bien-être, mais je n'avais pas le pouvoir d'exempter un cadet de la parade parce qu'il s'était foulé une cheville et ne pouvait voir un médecin pendant le week-end.
À mon avis, cela illustre bien le problème endémique au sein des forces armées aujourd'hui, au moment où elles s'apprêtent à se restructurer: on n'a pas tenu compte de l'équilibre entre les responsabilités et le pouvoir des chefs, on l'a même négligé dans certains cas. Si vous voulez régler à leur source bon nombre des problèmes de moral, vous devez donner aux chefs les pouvoirs qu'il leur faut pour bien assumer leurs responsabilités. Merci.
Le président: Monsieur Benoit.
M. Leon Benoit: Vous avez dit que votre mariage avait dû être reporté. Expliquez-nous ce qui s'est passé.
Lt Mark McCullins: C'est intimement relié au problème d'attrition chez les pilotes dont nous avons parlé; on a eu beaucoup de mal à trouver des instructeurs pour notre unité de conversion opérationnelle, ici. Ce sont les plus chevronnés et, bien sûr, leurs compétences sont des plus commercialisables.
Lorsque je suis arrivé à l'escadron, à Noël l'an dernier, il y a un an, je devais joindre l'unité de conversion opérationnelle en avril. Mon mariage était prévu pour juillet, ce qui ne posait aucun problème. Toutefois, nous avons reçu un appel environ deux semaines plus tard, à l'escadron, nous disant qu'il n'y avait pas d'instructeurs et qu'on avait dû annuler la formation prévue en avril; ma formation devait alors se faire en juin, à l'étranger, et c'était pendant cette période que j'avais prévu de me marier.
J'en ai discuté avec mon supérieur qui m'a dit: «Nous pensons que vous ferez votre formation à ce moment-là». J'ai donc reporté la date de mon mariage en conséquence. Un mois plus tard, nous avons reçu un autre appel. Le cours avait été reporté de nouveau, et mon mariage tombait encore une fois en plein milieu de cette période; nous l'avons donc reporté de nouveau. Au bout du compte, cela importait peu puisque le cours a été reporté encore à six mois et que j'ai dû attendre un an, sur place, à Winnipeg.
En raison du manque d'information, et parce que mon supérieur, au niveau local, n'avait pas le pouvoir d'agir, nous nous sommes retrouvés dans une situation difficile. J'espère que cela répond à votre question.
M. Leon Benoit: Votre femme n'est pas dans l'armée?
Lt Mark McCullins: Non.
M. Leon Benoit: Je me demande ce qu'elle pense de la vie militaire.
Lt Mark McCullins: J'en ai entendu longuement parler hier soir. Comme vous le savez, l'escadron 435 est actuellement au Koweit pour effectuer du ravitaillement en vol. Lorsque j'ai quitté l'escadron, en raison de l'attrition, il n'y avait que trois premiers officiers compétents en ravitaillement en vol au pays. Parce que j'ai dû attendre si longtemps pour suivre mon cours et qu'il y a une telle pénurie en ce moment, je devrai faire du ravitaillement en vol. Après trois mois ici, à Trenton, j'ai reçu un appel de mon escadron, il y a deux jours, me disant de me présenter à l'hôpital pour un examen avant de partir pour le Koweit, où je retournerai pour trois mois dès notre retour. Comme vous pouvez vous l'imaginer, ma femme n'a pas été très heureuse d'apprendre que j'allais être absent pendant sept des neuf premiers mois de notre mariage.
M. Leon Benoit: Connaissez-vous d'autres cas de mariages qui ont dû être reportés en raison de ce genre de modification des affectations?
Lt Mark McCullins: Non.
M. Leon Benoit: Cela me semble plutôt inhabituel.
Une voix: Nous nous sommes mariés en cachette et avons abandonné l'idée d'une noce. C'est bien plus facile ainsi.
Lt Mark McCullins: Mes supérieurs locaux n'ayant ni les pouvoirs, ni les informations nécessaires pour faire leur travail, bien des gens se retrouvent en attente pendant des périodes indéterminées. J'avais mon brevet de pilote, mais j'ai dû attendre un an avant de pouvoir occuper un poste de pilote.
M. Leon Benoit: Devoir reporter la date de son mariage en raison d'un problème de remaniement d'horaire, ce n'est pas un petit inconvénient.
Lt Mark McCullins: Il y a mieux. Lorsque j'ai voulu faire des réservations pour mon voyage de noces—que nous avions planifié neuf mois d'avance—,j'en ai parlé avec mon supérieur. Au mieux de nos connaissances, nous avons prévu ce voyage à un moment où je ne serais pas en formation.
Lorsqu'on m'a dit que je commencerais mon cours en janvier, on m'a aussi dit qu'il me faudrait ma qualification de vol aux instruments, ce que je n'avais plus parce que, ayant dû attendre un an, ma qualification n'était plus valide.
On m'a trouvé une place dans un cours qui se donnait au même moment où j'avais prévu mon voyage de noces. Il y avait un autre cours qui se donnait un peu plus tôt, mais il n'y avait plus de place de libre. Plutôt que de m'envoyer à ce cours, on m'a suggéré de faire mon voyage de noces et de suivre ma formation plus tard, dans la nouvelle année, et d'attendre encore trois mois avant d'obtenir ma conversion de C-130. On a dû agir ainsi parce que mon supérieur n'a pu m'obtenir une place sur ce cours.
Finalement, les choses se sont arrangées, mais c'est plutôt par chance que par suite d'une bonne planification.
M. Leon Benoit: Merci.
Le président: En passant, êtes-vous toujours marié?
Lt Mark McCullins: Pour l'instant, oui, et je suis très heureux.
Le président: Monsieur Wood.
M. Bob Wood: Mark, avez-vous dit que votre supérieur n'avait pas examiné d'autres affectations pendant que vous attendiez de suivre votre formation?
Lt Mark McCullins: Il aurait bien aimé pouvoir le faire. Nous en avons parlé, mais étant donné la façon dont on fait les choses, il n'avait pas le pouvoir d'envisager d'autres affectations. Cette tâche incombe aux gestionnaires de carrières et à d'autres à des paliers supérieurs, dans un système de formation comme celui-ci.
M. Bob Wood: Avez-vous pu parler à des gestionnaires de carrières, à Winnipeg, pendant que vous attendiez? Cela aurait-il été possible?
Lt Mark McCullins: Je suis censé faire cela par l'entremise de mon supérieur.
M. Bob Wood: D'accord.
Lt Mark McCullins: Le gestionnaire de carrières m'a donné l'impression qu'il lui était impossible de faire quoi que ce soit. Si j'ai eu des problèmes, au cours de ma carrière, avec les chefs, ce n'est pas parce qu'ils étaient mal intentionnés. En fait, lorsque je parle à mon chef d'escadron, au commandant de l'escadre ou même au chef de l'état-major des forces aériennes, je peux voir sur leurs visages et constater en les écoutant qu'ils aimeraient bien améliorer la situation. Mais ils m'ont aussi donné l'impression qu'ils sont dans l'impossibilité d'agir.
M. Bob Wood: Avec tous les pouvoirs qu'ils ont, il me semble qu'ils pourraient faire quelque chose.
Lt Mark McCullins: Vous parlez de pouvoir, mais ils n'ont que des responsabilités, sans pouvoir pour les assumer.
M. Bob Wood: Je vois.
Lt Mark McCullins: Lorsqu'un commandant d'escadre ou un chef d'escadron n'a pas le pouvoir de garder ses pilotes ou de les affecter là où il le faudrait pour assurer leur formation, il n'a manifestement pas le pouvoir qu'il lui faut pour assumer ses responsabilités. Comment peut-il alors s'acquitter de ses fonctions? Comment peut-il veiller au moral de ses troupes?
M. Bob Wood: Merci.
Le président: Merci beaucoup.
Le capitaine Mike Blow.
Capt Mike Blow (témoignage à titre personnel): J'ai deux points à souligner. Premièrement, je voudrais dire que, probablement comme quelques autres ici présents, je suis officier sorti du rang. J'ai commencé comme soldat; je suis maintenant capitaine.
En ce qui concerne la prime au rendement, ou quel que soit le nom que vous voulez lui donner, je ne crois pas que l'armée devrait être traitée comme une société privée. Si vous voulez en faire une entreprise privée, tous les membres des Forces armées canadiennes devraient être traités comme des employés du secteur privé.
Disons que vous créez une prime au rendement. Prenons ma section comme exemple. Je suis chef pompier. Mes pompiers ne reçoivent pas la même rémunération que leurs homologues civils qui travaillent pour le ministère de la Défense nationale à Halifax ou à Esquimalt. Je n'ai pas le même salaire qu'un chef pompier de Halifax ou Esquimalt. Ça me semble injuste. Je suis payé en fonction du grade que je détiens et non pas en fonction du poste que j'occupe. Il en est ainsi pour toutes les forces armées, et c'est injuste.
Si vous voulez nous traiter comme une entreprise privée, vous devrez nous verser le même salaire que nos homologues civils, que nous soyons administrateurs, pilotes ou quoi que ce soit d'autre. Sans les employés de soutien, les pilotes ne peuvent décoller et les généraux ne peuvent travailler.
• 2100
Deuxièmement, il faut réexaminer la politique de congé. La
politique de congé du QGDN a sûrement été élaborée par des
travailleurs de jour, parce qu'elle ne tient pas compte des
responsabilités des travailleurs de quart. J'ai 50 employés qui
travaillent par quart. Chaque fois qu'ils suivent une formation
militaire, que cela soit lié à leur emploi ou non, ils doivent le
faire pendant leur congé.
Les pompiers civils reçoivent une rémunération pour les heures supplémentaires qu'ils font. Ils aussi droit à des congés compensatoires. Mes pompiers, eux, n'en ont pas, parce qu'ils doivent prendre 25 jours de congé par année. Je n'ai aucune marge de manoeuvre me permettant de leur donner des congés compensatoires ou des primes. Cela fait beaucoup de jours de congé—je dirais, en moyenne, de 25 à 30 jours par année, au moins, pendant lesquels ils doivent suivre une formation. Il ne s'agit pas là de formation militaire générale. Il s'agit de formation spécialisée, dans le cadre du Programme de réapprovisionnement des navires ou de Plan de vol 97, qu'ils reçoivent pendant qu'ils sont en congé. Comment puis-je les indemniser? Je ne le peux pas.
Il faudra donc examiner la politique de congé. Lorsque j'étais en mer, j'ai accumulé des congés. Je n'avais pas le choix. Si j'avais pris mes congés, j'aurais été... Pourquoi punir ceux qui travaillent par quart? Ils sont obligés de prendre congé, mais on ne prévoit aucune façon de compenser cela.
Le président: Bob, vous avez une question?
M. Bob Wood: Nous avons beaucoup entendu parler de la politique de congé, capitaine. Depuis combien de temps cette politique est-elle en vigueur? Existe-t-elle depuis longtemps?
Capt Mike Blow: Je crois que c'est la deuxième année.
M. Bob Wood: Elle vient donc tout juste d'entrer en vigueur.
Capt Mike Blow: Oui. Elle était censée améliorer le moral. Elle a plutôt eu l'effet contraire. Personnellement, j'aimerais bien savoir si les généraux, au QGDN, prennent 25 jours de congé par année. Ils le font peut-être, mais peut-être pas non plus. Je l'ignore.
M. Bob Wood: Je crois que vous connaissez la réponse à cette question.
Capt Mike Blow: Oui. Lorsque j'appelle au QGDN à la fin du mois de mars, je n'arrive à parler à personne, car tous sont en congé.
M. Bob Wood: Est-ce une politique permanente? Il n'y a pas eu de période d'essai? Ce n'est pas une politique provisoire?
Capt Mike Blow: Non, elle a été adoptée en raison du nombre important de jours de congé qu'on accumulait. La politique du QGDN permet d'accumuler jusqu'à cinq jours de congé, et ce, pour des raisons opérationnelles.
M. Bob Wood: D'accord.
Capt Mike Blow: La politique de la base ne permet pas d'accumuler des congés. Je ne blâme personne pour cette politique. Si c'est une question d'argent, l'argent qui sert à payer les congés accumulés ne peut servir aux exigences opérationnelles. C'est à nous de décider. Dans ma section, c'est la deuxième année de suite qu'aucun congé n'est accumulé, mais cela s'est fait au détriment du moral.
M. Bob Wood: Je vois.
Capt Mike Blow: Mes employés arrivent à 8 heures, ou à l'heure à laquelle leur carte de travail commence, et quand ils rentrent à la maison à la fin de leur quart, ils ne veulent plus entendre parler de l'armée. Ils ne viennent même pas aux fêtes de Noël, parce qu'ils ne veulent rien savoir de l'armée une fois que leur journée de travail est terminée. De plus, bon nombre de ces hommes ont deux emplois. Ils ont un autre emploi à temps partiel pour joindre les deux bouts.
M. Bob Wood: Rappelez-moi, je vous prie, comment fonctionnait l'ancienne politique? Vous pouviez alors accumuler des jours de congé, n'est-ce pas?
Capt Mike Blow: Oui.
M. Bob Wood: Jusqu'à concurrence de combien? Y avait-il une limite?
Capt Mike Blow: Non.
M. Bob Wood: Vous pouviez accumuler tous les jours de congé que vous ne preniez pas pour ensuite les prendre lorsque vous le vouliez ou vous le pouviez, n'est-ce pas?
Capt Mike Blow: Je pouvais accumuler autant de jours de congé que je voulais pendant l'année. Encore une fois, cela se faisait surtout en raison des opérations. Si je ne pouvais prendre congé... Lorsque je travaillais avec une seule autre personne, si l'autre prenait congé, je ne pouvais pas prendre congé aussi. S'il était en formation, je ne pouvais pas prendre congé.
M. Bob Wood: Oui.
Capt Mike Blow: J'accumulais donc des congés. Il n'y avait pas de limite au nombre de jours de congé que je pouvais accumuler. Au fil des ans, je pouvais accumuler 350 jours de congé. Normalement, si je ne m'abuse, ces jours de congé étaient rachetés à la fin de la carrière.
M. Bob Wood: A-t-on changé la politique parce qu'on estimait qu'il y avait abus?
Capt Mike Blow: Je l'ignore. On ne m'a pas demandé mon avis. Sinon, j'aurais probablement dit: «Je ne peux pas prendre congé pendant les six mois que je suis en mer».
M. Bob Wood: En effet.
Capt Mike Blow: Mais, voyez-vous, à votre retour... Comment peut-on faire? J'ai un homme qui passe six mois à Alert. Comment prendra-t-il 25 jours de congé pendant l'année? Lorsqu'il quittera Alert, il aura 10 jours de congé spécial parce qu'il était à Alert. Il faudra que je lui dise: «Maintenant que vous travaillez de jour, vous devrez prendre 10 ou 15 jours de congé». Je ne peux donc pas compter sur lui pendant environ un mois. Qui en souffre? Celui qui est censé le remplacer. Par conséquent, parce que cet homme prend congé, j'ai un sous-officier supérieur qui doit rester en poste, qui ne peut prendre congé.
• 2105
C'est une mauvaise politique qui devrait être réexaminée. Il
est bien de pouvoir prendre des vacances—je n'ai rien contre—,
mais il faut aussi permettre aux gens d'accumuler des jours de
congé en tenant compte des exigences du service.
M. Bob Wood: Oui, jusqu'à un certain point, ou peut-être...
Capt Mike Blow: On permet d'accumuler cinq jours de congé, mais, encore une fois, malheureusement, ce sont les facteurs économiques qui priment. Si le commandant d'escadre n'a pas le budget lui permettant de laisser 2 000 militaires accumuler cinq jours de congé... Ça représente beaucoup d'argent. On ne parle pas ici que de caporaux; il y aussi beaucoup de lieutenants-colonels et d'autres, qui ont de bons salaires, car tout cela est fondé sur le salaire. Je le répète, je ne m'oppose pas à cela. Je crois que les exigences opérationnelles doivent primer, mais, encore une fois, comment indemnise-t-on ceux qui ont travaillé pendant leurs congés?
Je ne peux pas les indemniser. Je ne peux pas leur accorder de congés compensatoires. Comme je l'ai dit, j'ai des employés à qui je dois 25 jours de congés compensatoires, mais à qui je ne peux les accorder.
Dites-en autant à un civil. La première chose qu'il vous dira c'est: «Allez voir mon représentant syndical. Je veux être rémunéré pour mes heures supplémentaires. Quand aurais-je mon congé?». Dans le secteur civil, on doit accorder ces congés. Nous, nous n'avons pas de choix.
M. Bob Wood: Dans votre section, peut-on prendre ces 25 jours de congé ou est-ce qu'on les perd parce qu'on ne peut trouver de moment où les prendre?
Capt Mike Blow: Si on ne peut verser une indemnisation en argent pour ces congés accumulés qui ne sont pas pris, on peut dire qu'ils sont perdus. Celui qui ne prend pas ses 25 jours de congé perdra 5 jours de congé, parce qu'on n'aura probablement plus d'argent pour le payer. Alors, oui, on perd ces congés.
M. Bob Wood: Merci beaucoup, capitaine.
Le président: Monsieur Price.
M. David Price: Vous avez dit être capitaine de pompier.
Capt Mike Blow: C'est exact.
M. David Price: J'ai une question sur la privatisation—autrement dit, sur les DMPS—des services d'incendie. Vous avez certainement parlé de ce qui se passe avec certains de vos confrères. Avez-vous des remarques à faire à ce sujet?
Capt Mike Blow: Cela dépend de la situation. Nous parlons de l'armée, et si vous voulez déployer des pompiers dans un endroit austère comme Sarajevo, vous ne pouvez compter sur les civils.
Il vous faut donc, à mon avis, un bassin de pompiers militaires. Il faut aussi des pompiers militaires sur les navires. Le navire est une unité opérationnelle. Vous ne trouverez pas de civils prêts à partir en mer pour six mois—à moins que vous n'acceptiez que cela vous coûtent les yeux de la tête.
Nous dispensons un service spécialisé, car nous sommes un service d'incendie et de sauvetage, et nous sommes aussi essentiels à la structure. Nous sommes mieux formés que nos homologues civils. En fait, dans tous les métiers, les militaires sont mieux formés...
M. David Price: C'est une formation très spécialisée.
Capt Mike Blow: En effet. Mais la rémunération n'est pas prévue en conséquence. Si vous voulez parler de salaire égal pour un travail égal, regardez ce que reçoivent les civils...
M. David Price: Je voulais seulement que cela figure au compte rendu. J'avais une bonne idée de ce que vous alliez dire.
Capt Mike Blow: Je peux vous en dire plus.
M. David Price: Merci.
Le président: Merci beaucoup.
Capt Mike Blow: Je veux simplement répéter que je suis officier sorti du rang et que je connais donc la situation des simples soldats, et des officiers subalternes, et que c'est loin d'être rose. Il faut absolument faire quelque chose. Merci.
Le président: Merci.
Monsieur Klaus Knauer.
Cpl Klaus Knauer (témoignage à titre personnel): Je vais tenter de vous résumer une carrière de 22 ans. Je prendrai ma retraite dans 25 jours plutôt que dans 16 jours. Je crois que le principal problème des Forces armées canadiennes se trouve à Ottawa—non pas chez les militaires, pas à Disney sur Rideau, mais plutôt sur la colline du Parlement.
Chaque fois qu'on veut faire des compressions budgétaires, par où commence-t-on? Par les forces armées. Nous n'avons pas d'autre choix que de nous soumettre. C'est un peu comme donner des coups de pied au derrière de notre petit frère; il n'y a rien qu'il puisse faire. Nos chefs sont des généraux, n'est-ce pas? Ils ont un travail à faire.
Les rations au Yukon Lodge—voilà un bon exemple. Le capitaine s'arrache les cheveux. Il a reçu l'ordre de demander une somme d'argent en raison des DMPS, et de tout le reste, et il doit donc le faire. Au bas de l'échelle, le jeune soldat qui gagne, je ne sais pas, 1 600 $, ne peut se permettre de payer 400 $ par mois pour des rations. Ça, c'est une chose.
Qu'est-ce que j'ai vu d'autre au cours des 22 dernières années? Notre gouvernement a détruit l'armée canadienne. La Somalie, le régiment aéroporté... Désolé, je sais qu'on ne doit pas parler du régiment aéroporté, mais vous avez détruit notre moral. Moi, je fais partie de l'armée, et non pas des forces aériennes. Lorsque ce régiment a été supprimé, notre gouvernement a sapé le moral des forces armées.
• 2110
Beaucoup de jeunes soldats aspiraient à se joindre au régiment
aéroporté. Je me souviens de l'entraînement préparatoire au
parachutage que j'ai fait avec 120 autres gars. Sur ces 120 gars,
30 ont été choisis. Nous faisions des efforts surhumains pour
pouvoir être choisis. Qu'a fait le gouvernement parce qu'il ne
pensait plus qu'à l'argent? Il nous considère maintenant comme une
société privée. Nous ne sommes pas une société privée. Nous sommes
un service ou une assurance sur laquelle les gens peuvent compter
lorsqu'ils sont dans le besoin. S'il y a une tempête de verglas, on
peut mobiliser 11 000 personnes pour porter des secours. Mais notre
gouvernement ne tient pas compte de cela et ne pense qu'à l'argent.
Si vous conduisez une voiture, il vous faudra acheter de l'assurance. Si vous voulez mener un pays, vous devrez vous payer une armée. On ne peut attribuer une valeur monétaire à cela. Cela n'a aucun sens. Nos généraux, nos colonels... Le colonel Dumais a dû faire face à bien des plaintes et des problèmes de la part de ses subordonnés et de ses supérieurs. C'est un problème politique, à Ottawa. Ce n'est pas un problème de moral dans les forces armées. Donnez-nous un moment de répit. C'est tout ce que je demande.
Je prendrai ma retraite dans 25 jours, non pas parce que je veux partir, mais parce que j'en ai assez de voir les politiciens me dire ce qui est bien et ce qui est mal. Laissons aux généraux faire le travail des généraux.
Remontons à il y a 50 ans, à l'époque d'Alolf Hitler et des Nazis. Qui a détruit ce système? Un politicien, pas les généraux. Un politicien a détruit ce qui aurait pu être une puissance de combat efficace. C'est tout ce que j'avais à dire.
Le président: Y a-t-il des questions?
Merci.
M. Vern Miller.
Cpl Vern Miller (témoignage à titre personnel): Bonsoir, mesdames et messieurs.
Je suis arrivé vers 19 h 30, un peu en retard. Je répéterai donc peut-être des choses qui ont déjà été dites.
Le problème de moral dans l'armée est en partie attribuable à l'absence d'aide juridique pour les soldats, les caporaux et les caporaux-chefs. Les militaires au bas de l'échelle n'ont pas les moyens de payer un avocat lorsqu'ils ont des problèmes, comme un divorce, la conduite en état d'ébriété, etc.
Il serait bon que les employés du Bureau du juge-avocat général prétendent être aussi des avocats et aident ceux qui se trouvent au bas de l'échelle et qui, dans bien des cas, n'ont pas les moyens de se battre pour faire respecter leurs droits, même s'ils ont raison. Ils n'ont pas les moyens de payer un avocat pour mener ce genre de bataille.
Vous recevez un coup bas lorsque votre femme part avec un autre et tout ce que vous possédez, et que vous n'avez pas les moyens de vous battre. En fait, vous pouvez perdre 10 000 $ en meubles, voitures et tout le reste. Si elle part pendant que vous êtes à l'étranger, vous pouvez en souffrir encore plus.
En ce qui a trait au logement, on vous en a probablement parlé des milliers de fois, mais c'est pitoyable. Lorsque j'étais marié—remarquez que j'ai bien dit «étais»—lorsque ma femme et moi sommes arrivés ici, je venais d'être promu caporal. Nous y reviendrons dans un moment. Il n'y avait pas de logement pour nous ici, alors, nous avons dû louer une maison en ville pour 750 $ par mois, parce que nous avions deux chiens. C'était une vieille maison. Aucun immeuble à appartements ne voulait accepter d'animal—ils étaient prêts à m'accueillir, par contre—et c'est pourquoi nous avons dû louer une maison. Il nous fallait une cour où les chiens pouvaient jouer et prendre de l'exercice. Ce n'était pas terrible pour 750 $ par mois, et, en plus, il fallait payer l'électricité, le gaz, l'eau, les égouts et l'enlèvement des ordures. Cela ne faisait pas l'affaire.
Il y a trop de hauts gradés, de personnel supérieur ici dans les quartiers, et je pense que ça ne tient pas debout. Ils sont mieux payés, ils sont capables de dépenser.
• 2115
Pour les quartiers des gens seuls, l'espace d'entreposage
manque. Dans les chambres, on est serré comme dans des boîtes de
sardines. On ne peut pas bouger. On ne veut pas se défaire de nos
choses, parce qu'un jour, on espère pouvoir emménager dans quelque
chose de mieux.
Les affectations à Alert durent six mois. On gagne 200 $ de plus par mois. C'est tout. Si on est envoyé à Chypre, sur les hauteurs du Golan ou ailleurs, on gagne assez, on peut se loger n'importe où. On ne peut pas quitter Alert pour deux ou trois semaines pour emmener notre conjointe quelque part. On est coincé là pendant six mois. Pourquoi? Parce qu'ils savent bien que si on sort, on n'y retournera pas.
Devinez où je vais dans deux semaines.
Autrefois, j'ai été opérateur radio, sur le terrain—vous savez, on partait, on couchait dans les tranchées et tout le bataclan, on se servait des jumelles pour trouver quelqu'un dont on savait qu'il n'était pas là parce qu'il était assez futé pour rester chez lui. J'ai eu une réaffectation parce que j'avais des problèmes à la main. Je ne pouvais pas taper très vite, ce qu'il faut pouvoir faire pour télégraphier des messages.
Je faisais tout le reste comme demandé—monter aux arbres, porter l'antenne sur le terrain, chercher un type introuvable, des corvées amusantes. Pourtant, quand l'heure est venue, ils n'ont pas voulu me nommer caporal parce que j'avais un problème à la main.
Il y en avait qui avaient des dossiers médicaux assez lourds pour envoyer un porte-avion par le fond, et ils ont été promus parce qu'ils pouvaient faire exactement ce que leur métier leur demandait—ni plus ni moins. Certains d'entre eux n'allaient pas sur le terrain. Nous avons eu beaucoup de problèmes avec les conjointes, ou leurs maris, qui appelaient l'aumônier en disant «Oh, il ne peut pas y aller. Ouah!», ils ont invoqué toutes les excuses et pourtant, ils ont été promus.
Compte tenu de la catégorie médicale dans laquelle on m'avait placé, j'ai essayé d'obtenir une réaffectation. Ils ont dit non, il n'y avait pas de réaffectation.
Le plan de réduction des forces a touché les opérateurs radio. Je suis allé pour m'en prévaloir et on a décidé que nous allions au Rwanda. Voyez-vous cela, ils ne pouvaient pas m'accorder de promotion mais ils m'enverraient au Rwanda.
Si vous avez lu les documents, selon eux, si on est dans une catégorie médicale, on ne sort pas du pays. Aux dernières nouvelles, le Rwanda était toujours en Afrique. Ils ont décidé que j'étais assez bon pour y aller mais pas pour une promotion.
Quand j'ai parlé de me prévaloir du programme de réduction des forces, je leur ai dit non, merci: ils pouvaient prendre le Rwanda et en faire ce qu'ils voulaient avec, mais j'allais partir, et mon député leur parlerait, peu après mon avocat, pour tout ce qu'ils m'avaient fait endurer.
Naturellement, les choses ont changé. Je suis allé en Afrique, j'ai été promu caporal, j'ai eu une réaffectation.
Vous savez ce qu'on m'offrait avant? Ils avaient affaire à un type avec une mauvaise main, qui ne pouvait pas taper parce qu'il avait des problèmes de dextérité, mais qui pouvait aller jouer avec des explosifs avec les ingénieurs. Ils voulaient que je joigne l'infanterie. Ils choisissaient des métiers de combat qu'ils savaient que je ne pouvais pas faire. Je n'avais pas d'autre choix que d'accepter ou d'échouer leur cours puis d'être renvoyé.
Vous voyez, ils ne voulaient pas tenir compte de cet aspect. C'est une autre raison qui explique pourquoi le moral est bas. On invoque la Loi sur la protection des renseignements personnels pour obtenir ces documents—dossier médical, dossier personnel, antécédents professionnels, et tout le reste.
Quand j'ai finalement pu voir mon dossier d'antécédents personnels, avant d'obtenir ma réaffectation, il avait un pouce d'épaisseur. C'était la même chose pour tous les escadrons: «Oh, il ne peut pas taper, il ne nous sert à rien. On aurait dû s'en débarrasser.» Quand ils me regardent maintenant, ils me disent qu'il y a des types pires que moi, mais à cause de la Division des droits de la personne, ils ne peuvent rien faire à leur sujet. Il y a des gens qui appartiennent à certaines catégories médiales, dans tous les métiers, qui occupent des postes qu'ils ne devraient pas occuper. Il y a trop de politique dans tout cela.
Un tel, ce bon sergent ici, est là depuis 30 ans—il se déplace dans un fauteuil roulant—, mais ils le gardent parce qu'il fait partie des vieux de la vieille, du spectre politique.
C'est désespérant. On n'y peut rien. On est coincé.
En plus, avec la Loi sur la protection de la vie privée, il m'a fallu trois mois pour obtenir les documents que je voulais. J'allais demander un recours à propos de mes caporaux. Ça prend tellement de temps pour tout. On nous dit, suivez la chaîne, suivez la chaîne. Eh bien, quand il manque un chaînon, et quand il y a des délais de 30 jours pour ceci puis de 15 jours pour cela, et de 20 jours pour autre chose, ça ne marche pas. Quand votre tour arrive, vous n'êtes plus là, ou il s'est passé autre chose.
• 2120
J'étais en Afrique pour Noël il y a deux ans et l'opération
que nous menions consistait à soutenir le Programme alimentaire
mondial et différents programmes de ce genre, à apporter des
approvisionnements aux camps de réfugiés et tout allait assez bien.
Le seul problème, c'est qu'ils nous ont gardés là bien plus
longtemps qu'ils n'avaient besoin de nous. Je veux dire que les
effectifs du Programme alimentaire mondial, du Haut Commissariat de
l'ONU pour les réfugiés et de tous ces différents programmes d'aide
alimentaire étaient rentrés chez eux pour Noël, mais Ottawa, dans
sa grande sagesse, au lieu de ramener les soldats au pays pour
Noël, avait décidé de nous garder là jusqu'au 31 décembre. Bonne
année. Ça ne marche pas. Allons-y, faisons le travail, ramenons nos
gens ici. Sinon ils y perdent leur mariage et tout le reste.
Quand on réaffecte du personnel d'une base, avec les nouvelles technologies d'aujourd'hui, beaucoup de gens—pas simplement les conjoints, les maris—mènent des carrières. Ils ont d'excellents emplois. On vous choisit. Vous êtes déraciné. Vous allez vers une nouvelle affectation. Il n'y a pas de travail autour. Trenton est une ville de 16 500 habitants et je ne sais pas combien parmi eux sont des militaires et leurs conjoints. Qu'est-ce qu'on fait? Il n'y a pas d'emplois, il n'y a pas de travail. Bien souvent, il faut deux revenus pour que la famille puisse vivre, et vous n'y arrivez pas.
Nous avons de nouveaux vêtements GORE-TEX pour l'armée. Leur tenue de travail, c'est une tenue de combat verte. Apparemment, une directive nous interdit de porter des vêtements en GORE-TEX bleu avec des vêtements verts, même si on est dehors à essayer de se cacher dans les arbres. Pour ma part, je ne vois pas pourquoi. Ces nouveaux vêtement GORE-TEX sont bien meilleurs que les vieux vêtements que nous avions. Ils vous tiennent au chaud et au sec.
Les forces diminuent maintenant, et ils s'attendent à ce que Joe Henry fasse le travail de trois personnes au lieu de deux, mais il a toujours la même paye, la paye d'une personne, et c'est une question très aiguë pour beaucoup de gens.
Pour ce qui est des permissions, il y a une allocation de voyage pour les membres seuls. Une fois par an, on vous accorde un certain montant. Ils soustraient les 500 premiers milles, ou 805 premiers kilomètres, ou une distance semblable, pour vous permettre de rentrer chez vous ou d'aller voir le membre de votre famille le plus près.
Je viens du nord de la Colombie-Britannique. Tout dépend du moment où je peux réserver, de ce qui se passe et ainsi de suite. Cela peut me coûter jusqu'à 1 500 $ pour rentrer chez moi. On me paie 80 p. 100 de ce montant—peut-être. Ils font leur évaluation par kilométrage de route, ce qui fait que parfois cela me coûte assez cher. Pour moi, ce n'est pas si mal. Je suis seul, mais pour un simple soldat qui a une famille, et peu importe, il ne gagne pas assez. Il ne peut pas se le permettre.
C'est tout ce que j'avais à dire.
Le président: Merci beaucoup.
Le capitaine André Gagnon.
Cpt André Gagnon (témoignage à titre personnel): Bonsoir, mesdames et messieurs, soyez les bienvenus.
J'aimerais parler d'un peu de tout. Je suis venu pour écouter, et j'ai entendu des choses qui m'ont piqué au vif. J'aimerais y répondre.
Un commentaire a probablement trait aux remarques que j'entends depuis que j'ai mis mon nom sur la liste; je parle de remarques portant sur le leadership. Comme on dit, "il n'y a pas de fumée sans feu".
Évidemment, il y a un problème là-haut. Nous, qui sont au bas de la pyramide, nous ne disons pas tous qu'il y a un problème quand il n'y en a pas. Mais le problème pourrait être exacerbé par le fait que... Il y a 26 ans que je fais partie du système. J'ai commencé avec 100 000 autres. Si je me souviens de mes cours d'instruction pour les aspirants officiers, nos rôles étaient tous établis. Il y avait aussi le livre blanc. Maintenant, nous ne sommes que 60 000. Et la dernière fois que j'ai lu le livre blanc, j'ai vu que rien n'a changé pour ce qui reste. On ne peut pas couper jusqu'à l'os et s'attendre à faire quelque chose avec l'os qui reste. Ça ne marche tout simplement pas.
Nos officiers supérieurs n'ont pas les moyens de faire tout ce qu'on leur demande de faire. Nous sommes là pour accomplir les tâches que le gouvernement nous demande, mais quelqu'un devra se réveiller. Il va falloir soit couper certains rôles de ce maudit livre blanc, soit nous donner les ressources qu'il nous faut pour faire notre travail.
• 2125
Il faudra aussi se réveiller à propos de ces fameuses
différentes méthodes de prestation de service. C'est très beau de
donner des contrats, parce que les compagnies nous proposent des
prix raisonnables. Mais une fois qu'on se débarrasse de nos propres
capacités, ils peuvent demander ce qu'ils veulent. En fin de
compte, il reste moins d'argent dans le budget du ministère de la
Défense pour en donner plus à l'entrepreneur civil. On reste coincé
avec le prix élevé. Les DMPS ne sont pas... Écoutez, téléphonez à
Air Canada Limitée de l'autre côté de l'Atlantique la prochaine
fois que vous avez besoin de l'avion et dites-leur qu'ils ne vont
pas en Angleterre mais au Rwanda. Demandez au pilote de changer de
cap. Nous faisons cela tout le temps dans notre travail.
J'aurais aussi quelques remarques sur mon travail. Ceux qui me connaissent savent que je suis navigateur aérien. Je travaille avec les pilotes. Je suis payé à l'échelle d'un fonctionnaire des services généraux. Nos pilotes méritent plus d'argent parce qu'ils font concurrence avec le marché, mais n'oublions pas ce qu'on a entendu ici plus tôt. C'est très beau de se baser sur la loi de l'offre et de la demande. C'est merveilleux, mais il ne faut pas oublier qu'en 1980, quand les entreprises renvoyaient leurs employés, aucun pilote n'a demandé une baisse de salaire, même si personne n'engageait.
Donc s'ils veulent obtenir des primes pour rester dans le système, c'est très bien pour eux, mais ils doivent comprendre que dans un avion comme le Hercules CC-130, il y a cinq membres d'équipage, qui font tous le même travail, et qui y mettent tous autant d'heures. C'est très beau pour eux d'avoir cet argent, mais autant que je sache nous faisons tous le même travail et nous appartenons tous à la même compagnie. Donc si vous voulez plus d'argent, essayez d'en obtenir, mais n'oubliez pas de penser un peu à nous.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Steve Panasky.
M. Steve Panasky (témoignage à titre personnel): Bonsoir.
Il y a quelques années, pendant la crise de logement, quand les logements coûtaient très cher, les forces armées ont établi l'indemnité d'aide au logement, qui existe encore aujourd'hui. Je ne sais pas si vous en avez entendu parler.
Permettez-moi de vous présenter un petit scénario pour vous aider à comprendre de quoi je parle. Disons que vous et moi sommes membres des forces armées. Nous avons le même rang, et nous gagnons le même salaire. On nous transfère de Trenton à Ottawa. Nous avons chacun un actif de 30 000 $. Vous décidez d'acheter une maison, mais moi je décide de louer. Moi j'investis mes 30 000 $; et vous utilisez vos 30 000 $ pour acheter votre maison. Moi je reçois l'indemnité d'aide au logement, mais vous non. Qu'en pensez-vous? Ce n'est pas très juste. De plus, j'ai le droit à un logement familial à Ottawa, et je reçois l'indemnité d'aide au logement. Vous habitez votre propre maison, et vous ne recevez pas l'indemnité.
De plus, si vous habitez à Ottawa—et tout le monde du comité devrait le savoir—, le prix du logement et le coût de la vie de cette ville sont très élevés. Peu importe si vous louez votre maison ou si vous en êtes propriétaire. Les taxes municipales sont très élevées. Heureusement, quand j'y habitais, j'ai reçu l'indemnité d'aide au logement, mais je n'ai jamais pensé que c'était juste.
Deuxièmement, un bon nombre de personnes ont parlé du leadership, et je suis en accord avec les propos dans une certaine mesure. Cependant, la structure du ministère de la Défense nationale est en fonction d'un organigramme. Le gros bonnet se trouve en haut, peu importe qui occupe ce poste, et en-dessous nous avons ces petites boîtes et à l'intérieur de ces boîtes on voit le nom des personnes et on descend jusqu'en bas, où on voit le simple soldat. Il faut dire que la boîte devient de plus en plus grande au fur et à mesure qu'on descend. Il faut y réfléchir et il faut comprendre que le gros bonnet qui se trouve en haut, c'est cette personne qui tire les ficelles pour faire bouger les boîtes.
Eh bien, lorsque je réfléchis à cette question de l'organigramme, je crois qu'il faut le voir dans le sens contraire. Je crois qu'il faut mettre le leader en bas. Il est là pour nous appuyer. S'il nous appuie, il n'aura pas à s'inquiéter de ses promotions ou de son avancement professionnel.
Troisièmement, et c'est le dernier point que je veux soulever, on a parlé tantôt des examens de métier. Où allez-vous trouver les gens et le temps nécessaires pour le faire? À l'heure actuelle, la charge de travail est trop élevée et il nous manque du personnel. Allez-vous nous donner plus de personnel qui pourra prendre le temps nécessaire pour administrer ces examens? Pour le moment, je crois que non.
C'est tout.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur David Beck.
M. David Beck (témoignage à titre personnel): Bonsoir. J'aimerais faire quelques remarques.
• 2130
Quant aux examens que doivent passer les gens travaillant dans
les métiers, je ne crois pas que cela serait faisable en raison de
toutes les coupures dans le personnel et en raison du fait que de
nombreuses personnes doivent accomplir un travail qui ne fait pas
partie de leur métier. Alors comment évaluer les compétences
acquises par quelqu'un dans un métier lorsque cette personne doit
faire le travail de quelqu'un d'autre en raison du manque de
personnel? En ce qui concerne mon métier, je dois dire que nous
avons certaines personnes des autres bases qui s'occupent des
réseaux, d'autres travaillent au Centre TAD pour réparer les
ordinateurs, certaines travaillent dans les centres des
communications, tandis que d'autres font fonctionner les standards.
Chaque base est différente. Il serait très difficile d'établir un
examen pour un métier en particulier. Cela s'applique à un grand
nombre de métiers dans les forces canadiennes. Je suis opérateur de
téléimprimeur, mais à l'heure actuelle je fais le métier d'un
technicien. Ou bien je suis technicien, mais je fais le travail
d'opérateur de téléimprimeur. Voici un aspect dont il faut tenir
compte.
Et il y a aussi la question de toutes ces combinaisons de métiers. J'aimerais voir les hauts gradés du ministère de la Défense nationale se trouver dans une situation où ils sont à Air Canada et ils doivent s'adresser à un syndiqué pour lui dire: «Très bien, vous travaillez présentement sur ce moteur d'avion, et maintenant nous vous demandons de réparer le système électronique, et ensuite les cellules et tout ce système de sécurité, mais, soit dit en passant, nous ne vous donnerons pas un cent de plus», ou bien dans une situation où ils doivent dire à un préposé à l'administration, un commis qui travaille dans une grande entreprise: «Très bien, vous vous occupez de 4 000 dossiers personnels, mais, soit dit en passant, vous serez dorénavant responsable de la paie, mais on ne vous donnera pas un cent de plus». Le ministère de la Défense nationale, c'est le rêve d'un gestionnaire dans le monde civil. Vous avez tout ce qu'il vous faut.
Troisièmement, j'aimerais vous raconter une expérience que j'ai vécue à Washington. Il s'agit de l'estime que les politiciens ont à notre égard et de la nécessité d'informer le grand public de notre sort. Je faisais partie de l'équipe qui a accompagné le premier ministre à Washington et j'étais en bas en train de parler avec un des secrétaires. Le premier ministre est arrivé, il m'a serré la main en me demandant si j'allais assister à la réception à la Maison blanche qui était de l'autre côté de la rue. Le secrétaire a répondu: «Non, voici le caporal Beck du MDN». Dès qu'il a prononcé ces mots, il a retiré sa main, il a fait demi-tour et ensuite il est reparti. Il n'a pas dit un autre mot. Alors vous vous dites: «Je suis tellement fier de travailler pour vous, monsieur». Voici le genre de chose qui nuit au moral. Il faut dire que, à l'heure actuelle, les militaires sont très démoralisés. À l'heure actuelle le moral est très bas.
C'est tout ce que j'avais à dire.
Le président: Merci beaucoup.
Mesdames et messieurs, nous avons entendu tous nos témoins. Je tiens à vous remercier tous d'avoir comparu devant nous ce soir, et je tiens à vous remercier de vos suggestions et de votre apport, qui vont nous aider à rédiger notre rapport.
J'aimerais également remercier le colonel Dumais ainsi que son personnel pour leur hospitalité et tout ce qu'ils ont fait pour faciliter notre visite ici aujourd'hui.
Encore une fois, je tiens à vous remercier tous. Nous allons vous envoyer un exemplaire de notre rapport.
Merci beaucoup. Bonsoir.